eut Ru ae Le FRULRNRS, D NDS Eu Ka ES À x Parent Res ne Dee 12 “ne ta Pan se * ARE TE Rte Tee te = 10% » A RTS Au Nm QE TER SL he nu ne Rae à AH YAUR 4 DETTE Le Dm A RAA AA - “aient PUURRIRR EEE) DA Lt 50 NES TENR Er De ÉD ER LS A D nn RE TE ALT 2er PONS PS ne tea AT D rte Rate ane ETS ame nat ÆEx Libres SIR WILLIAM CROOKES, D.Sc. FRS. : La REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES TOME DEUXIÈME REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES PARAISSANT LE 15 ET LE 80 DE CHAQUE MOIS Direcreur : Louis OLIVIER. Docreur às SGExces TOME DEUXIÈME 1891 AVEC 342 FIGURES ORIGINALES DANS LE TEXTE PARIS Georges CARRÉ, Éditeur 58, RUE SAINT-ANDRÉ-DES-ARTS, 58 1891 2e ANNÉE NOM 15 JANVIER 1891 DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES Æ \ DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER \ LE PROBLÈME DES TROIS CORPS La loi de Newton est la plus simple de toutes les lois physiques; mais elle a pour expression mathématique une équation différentielle, et pour obtenir les coordonnées des astres, il faut intégrer cette équation. Ce problème est un des plus diffi- ciles de l'Analyse, et malgré les recherches persé- vérantes des géomètres, il est encore bien loin d'être résoiu. [ Quel sera le mouvement de # points matériels, s'attirant mutuellement en raison directe de leurs masses et en raison inverse du carré des distances ? Si n — 2, c'est-à-dire si l’on a affaire à une planète isolée et au Soleil, en négligeant les perturbations dues aux autres planètes, l'intégration est facile; les deux corps décrivent des ellipses, en se confor- mant aux lois de Képler. La difticulté commence si le nombre » des corps est égal à trois; le pro- blème des trois corps a défié jusqu'ici tous les efforts des analystes. L'intégration complète et rigoureuse étant mani- festement impossible, les astronomes ont dû pro- céder par approximations successives ; l'emploi de cette méthode était facilité par la petitesse des masses des planètes, comparées à celle du Soleil, On a donc été conduit à développer les coor- données des astres, suivant les puissances crois- santes des masses. Ce mode de développement n’est pas sans incon- vénient; je n'en citerai qu'un : supposons qu'il entre dans l'expression d'une de ces coordonnées un terme périodique dont la période soit très REVUE GÉNÉRALE, 1891, longue, et d'autant plus longue que les masses troublantes sont plus petites, et développons ce terme suivant les croissantes des ; quelque loin que nous poussions l’ap- proximation, la valeur approchée de ce terme ira en croissant indéfiniment, tandis que la vraie va- leur reste toujours finie. C’est ainsi qu’en déve- loppant sin #14€ suivant les puissances croissantes puissances mass de # et négligeant les {ermes en »”, on trouve mt — £m 6, polynôme susceptible de croître indé- finiment, tandis que sin mt est toujours plus petit que 1. La véritable nature de la fonction est donc complètement dissimulée. Cette méthode a été cependant jusqu'ici très suffisante pour les besoins de la pratique; les masses sont, en effet, tellement petites qu’on peut, le plus souvent, négliger leurs carrés et se borner ainsi à la première approximation. Mais on ne peut espérer qu'il en soil toujours ainsi; il ne s'agit pas seulement, en effet, de cal- culer les éphémérides des astres quelques années d'avance pour les besoins de la navigation ou pour que les astronomes puissent retrouver les petites planètes déjà connues. Le but final de la Méca- nique céleste est plus élevé ; il s'agit de résoudre cette importante question : la loi de Newton peui- elle expliquer à elle seule tous les phénomènes astronomiques? Le seul moyen d'y parvenir est de faire des observations aussi précises que possible, de les prolonger pendant de longues années ou même de longs siècles et de les comparer ensuite aux résultats du calcul. Il est donc inutile de de- | 2 H. POINCARÉ. — LE PROBLÈME DES TROIS CORPS mander au calcul plus de précision qu'aux obser- valions, mais on ne doit pas non plus lui en demander moins. Aussi l'approximation dont nous pouvons nous contenter aujourd'hui deviendra- t-elle un jour insuffisante, Et, en effet, en admettant mème, ce qui est très improbable, que les instru- ments de mesure ne se perfectionnent plus, l'accu- mulation seule des observations pendant plusieurs siècles nous fera connaitre avec plus de précision les coefficients des diverses inégalités. On peut done prévoir le momentoù les méthodes anciennes, malgré la perfection que leur a donnée Le Verrier, devront être abandonnées définitive- ment. Nous ne serons pas pris au dépourvu. Delaunay, Hill, Gyldén, Lindstedt ont imaginé de nouveaux procédés d'approximation successive plus rapides et plus satisfaisants à tous égards que les anciens; en particulier, ils se sont affranchis de l'inconvénient que je signalais plus haut. Les développements auxquels ils parviennent pourraient même être regardés comme une solu- tion complète du problème des trois corps, si la convergence en était établie. Il n'en est malheu- reusement pas ainsi. Faute de cette convergence, ils ne peuvent pas donner une approximalion indéfinie; ils donne- ront plus de décimales exactes que les anciens procédés. mais ils n'en donneront pas autant qu'on voudra. Si on l’oubliait, on serait conduit à desconséquences erronées. On en serail vite averti, d’ailleurs, car ces conséquences ne seraient pas les mèmes, selon qu'on appliquerait les méthodes de Delaunay ou celles de Lindstedt, et ces contradic- lions suffiraient pour montrer qu'un au moins des deux développements n’est pas convergent. Ne peut-on cependant établir aucun résultat re- latif au mouvement des trois corps avec celle absolue rigueur à laquelle les géomèêtres sont habi- tués? S'il est possible d’en découvrir, ne pourrait- on y trouver un lerrain solide sur lequel on s’'ap- puierait pour marcher à de nouvelles conquétes? N'aurait-on pas ouvert une brèche qui permettrait d'entrer enfin dans la forteresse? On ne peut s'em- pêcher de le penser, et c'est ce qui donne quelque prix aux rares théorèmes susceptibles d’une dé- monstration même ils ne semblent pas immédiatement applicables à l'astro- nomie. Telles sont les propriétés des solutions particu- lières remarquables du problème des trois corps. Le mouvement des trois astres dépend en effet rigoureuse, quand de leurs positions et de leurs vitesses initiales. Si l’on se donne ces conditions initiales du mouve- ment, on aura défini une solution particulière du problème, Il peut se faire que quelques-unes de ces solutions particulières soient plus simples, plus abordables au calcul, que la solution géné- rale; il peut se faire que pour certaines posi- tions initiales des trois corps, les lois de leur mouvement présentent des propriétés remar- quables. Parmi ces solutions particulières, les unes ne sont intéressantes que par leur bizarrerie; les autres sont, comme nous le verrons, susceptibles d'applications astronomiques. Lagrange et Laplace ont déjà abordé le problème par ce côté, et ils ont découvert ainsi un théorème important. Il peut arriver que les orbites des trois corps se réduisent à des ellipses. La position el la vitesse initiales de notre satellite auraient pu être telles, que la Lune fût constamment pleine; elles auraient pu être telles que la Lune fl constamment nouvelle; elles auraient pu aussi être telles que cet astre fût constamment à 60° du Soleil dans une phase intermédiaire entre la nouvelle lune et le premier quartier. Ce sont là des solutions particulières très simples ; il y en à de plus compliquées qui sont cependant remarquables. Si les conditions du mouvement avaient élé différentes de ce qu'elles sont, les phases auraient pu suivre des lois bien étranges; dans une des solutions possibles, la Lune, d’abord nouvelle, commence par croître; mais, avant d’at- leindre le premier quartier, elle se met à dé- croître pour redevenir nouvelle et ainsi de suite; elle a donc constamment la forme d'un croissant. Dans une autre solution, plus étrange encore, elle passe trois fois par le premier quartier entre la nouvelle lune et la pleine lune; dans cet inter- valle, elle croit d’abord, décroit ensuite, pour se mettre de nouveau à croitre. Ces solutions sont trop différentes des véritables lrajectoires des astres, pour pouvoir jamais être réellement utiles à l’Astronomie. Elles n’ont qu'un intérèt de curiosité. Il n'en est pas de mème de celles dont je vais maintenant parler. IH y a d’abord les solutions périodiques. Ce sont celles où les distances des trois corps sont des fonctions périodiques du temps; à des intervalles périodiques, les trois corps se retrouvent donc dans les mêmes positions relatives. Les solutions périodiques sont de plusieurs sortes. Dans celles que j'ai appelées de la première sorte, les inelinai- sons sont nulles et les trois corps se meuvent dans un même plan ; les excentricités sont très petites et les orbites sont presque circulaires; les moyens mouvements ne sont pas commensurables; les deux planètes passent en même temps au périhélie, qui, loin d’être fixe, tourne avec une rapidité com- H. POINCARE. — LE PROBLÈME DES TROIS CORPS 3 . parable à celle des planètes elles-mêmes, de {elle facon que ces deux astres sont au périhélié à chaque conjonction. C’est à cette catégorie qu'ap- partient la première solution périodique qui ait été découverte et que son inventeur, M. Hill, à prise pour point de départ de sa théorie de la Lune. Dans les solutions de Ja seconde sorte, les ineli- naisons sont encore nulles, mais les exentricités sont finies; le mouvement du périhélie est très lent; les moyens mouvements sont près d’être com- mensurables; les périodes anomalistiques (on appelle ainsi le temps qui s'écoule entre deux passages consécutifs de l'astre au périhélie), le sont exactement. À certaines époques, deux pla- nètes passent en même temps au périhélie. Dans les solutions de la troisième sorte les inclinaisons sont finies, les orbites sont presque circulaires; le mouvement des périhélies est très lent et égal à celui desnœuds; les périodes anomalistiques sont commensurables; à certaines époques les planètes passent en mème temps. aux périhélies. Je laisse de côté de nombreuses catégories de solutions pério- diques plus compliquées et qu'il serait trop long d’énumérer. IL y a ensuite les solutions asymptotiques. Pour bien faire comprendre ce qu'on doit entendre par là, qu'on me permette d'employer un exemple simple. Imaginons d'abord une Terre et un Soleil isolés dans l’espace, se mouvant par conséquent d'après les lois de Képler, Supposons encore pour simpli- fier, que leur mouvement soit circulaire. Donnons maintenant à cette Terre deux satellites L, et L, dont la masse sera infiniment petite de telle sorte qu'ils ne troubleront pas le mouvement circulaire de la Terre et du Soleil, et qu'ils ne se troubleront pas non plus mutuellement, chacun d'eux se mou- vant comme s'il était seul. Choisissons la position initiale de L, de façon que cette Lune décrive une orbit® périodique ; nous pourrons alors choisir celle de L, de facon que ce second satellite décrive ce que nous appellerons une orbite asymplolique. D'abord assez éloignée de L,. il s’en rapprochera indéfiniment, de sorte qu'après un temps infini ment long, son orbite différera infiniment peu de celle de L,. Supposons un observateur placé sur la Terre et tournant lentement sur lui-même de facon à regarder constamment le Soleil, Le Soleil lui pa- vaitra immobile et la Lune L, dont le mouvement est périodique lui semblera décrire une courbe fermée C. La Lune L, décrira alors pour lui une sorte de spirale dont les spires de plus en plus serrées se rapprocheront indéfiniment de la courbe G I y a une infinité de pareilles orbites asymptotiques. L'ensemble de ces orbites forme une surface conti- nue S qui passe par la courbe C el sur laquelle sont tracées les spires dont je viens de parler. Mais il y a une autre catégorie de solutions asymptotiques. Il peut arriver, si l’on choisit con- venablement la position initiale de L,, que cette Lune aille en s'éloignant de L,, de telle façon qu'à une époque très reculée dans le passé, son orbite diffère très peu de celle de L,. Pour notre obser- vateur, ce satellite décrira encore une courbe en spirales dont les spires se rapprocheront indéfini- ment de la courbe C; mais il la décrira en sens contraire en s’éloignant constamment de C. L'en- semble de ces nouvelles orbites asymptotiques formera une seconde surface continue S' passant également par la courbe D. Enfin il y a une infinité de solutions doublement asymptotiques; c'est là un point que J'ai eu beau- coup de peine à établir rigoureusement. Il peut arriver que le satellite L,, d’abord très rapproché de l'orbite de L,, s’en éloigne d’abord beaucoup et s'en rapproche ensuite de nouveau indéfiniment, A une époque très reculée dans le passé, celte Lune se trouvait sur la surface S’, el y décrivail des spires en s’éloignant de C; elle s’est ensuite beaucoup éloignée de C; mais dans un temps très long elle se retrouvera sur la surface S et décrira de nouveau des spires en se rapprochant de C. Soient L,, L, ..., L, n — 1 lunes décrivant des orbites doublement asymptotiques; à une époque reculée, ces » — 1 lunes se meuvent en suivant des spirales sur S'; en parcourant cette surface on rencontre ces à — 1 orbites dans un certain ordre. Au bout d’un Lemps très long, nos satellites se retrouveront sur S et décriront de nouveau des spirales; mais, en parcourant cette surface $, on rencontrera les orbites des — 1 lunes dans un ordre tout différent. Ce fait, pour peu qu'on prenne la peine d'y réfléchir, semblera une preuve éclatante de la complexité du problème des Trois corps el de l’impossibilité de le résoudre avec les instru- ments actuels de l'Analyse. L'astronomie ne nous offre aucun exemple d'un système de trois ou de plusieurs corps dont les conditions mouvement soient {elles qu'ils décrivent exactement des orbites pério- initiales du diques ou asymptoliques. D'ailleurs & priori la probabilité pour que cette circonstance se pré- sentàt était manifestement nulle, On ne peut pas en conclure que les considérations précédentes ne sont intéressantes que pour le géomètre et inutiles 1 [Il peut arriver, si l'inclinaison des orbites est nulle, que S se réduise à une surface infiniment aplatice, formée de plusieurs feuillets plans superposés, et analogues aux surfaces de Riemann, À H. POINCARÉ. — LE PROBLÈME DES TROIS CORPS à l’astronome. Il peut arriver, en effet, el il arrive quelquefois que les conditions initiales du mouve- ment diffèrent peu de celles qui correspondent à une solution périodique. L'étude de cette solution présente alors un double intérêt. D'abord, le plus souvent, le mouvement de l’astre présentera une inégalité dont le coeflicient sera très grand, mais très peu différent de ce qu'il se- rait si l'orbite était rigoureusement périodique. Le calcul de cette solution périodique fournira alors ce coefficient plus rapidement et plus exactement que les méthodes anciennes. C’est ce qui est arrivé dans la théorie de la Lune de M. Hill pour le calcul de cette grande inégalité appelée variation. En second lieu, l'orbite périodique peut être prise comme première approximation, comme « orbite intermédiaire » pour employer le langage de M. Gyldén. La seconde approximation conduit alors à un calcul relativement facile, parce que les équations sont linéaires et à coefficients pério- diques. C'est ainsi que M. Hill a calculé le mouve- ment du périgée et qu'il aurail pu calculer égale- ment le mouvement du nœud et la grande inégalité connue sous le nom d’évection. Je pourrais citer beaucoup d’autres exemples. Un des satellites de Saturne à un mouvement très troublé : son périsaturne tourne très rapidement; M. Tisserand a rattaché sa théorie à l'étude d'une solution périodique de la première sorte. La même méthode est applicable à une certaine pelite pla- nète dont le moyen mouvement est sensiblement double de celui de Jupiter et que M. Harzer a étu- diée. Gauss à cru pouvoir aflirmer que les mouvements moyens de Jupiter et de Pallas étaient entre eux exactement dans le rapport de 7 à 18. Si ses vues venaient à se confirmer, ce qui est encore douteux, la théorie de Pallas se ramènerait à celle d'une solution périodique de la seconde sorte. Mais l'exemple le plus frappant nous est fourni par l'étude des satellites de Jupiter. Les relations qui ont lieu entre leurs moyens mouvements, el dont la découverte est le plus beau titre de gloire de Laplace, montrent que leur orbite diffère fort peu d’une orbite périodique; en y regardant de près, on voit que la méthode spéciale créée par le génie de ce grand géomètre ne diffère pas de celle que nous préconisons ici, IV Les équations différentielles du problème des trois corps admettent un certain nombre d’inté- grales qui sont connues depuis longtemps; ce sont celles du mouvement du centre de gravité, celles des aires, celle des forces vives. Il était extrème- ment probable qu’elles ne pouvaient avoir d'autres intégrales algébriques; ce n'est cependant que dans ces dernières années que M. Bruns a pu le démontrer rigoureusement, Mais on peut aller plus loin; en dehors des intégrales connues, le pro- blème des trois corps n’admet aucune intégrale analytique et uniforme; les propriétés des solu- tions périodiques et asymptlotiques, étudiées avec altention, suflisent pour l’établir. On peut en con- clure que les divers développements proposés jus- qu'ici sont divergents; car leur convergence entrai- nerait l'existence d’une intégrale uniforme. Dirai-je pour cela que le problème est insoluble? ce mot n'a pas de sens; nous savons depuis 1882 . que la quadrature du cercle est impossible avec la règle et le compas, et pourtant nous connaissons 7 avec beaucoup plus de décimales que n'en pour- rait donner aucune construction graphique. Toul ce que nous pouvons dire, c’est que le problème des trois corps ne peut être résolu avec les instru- ments dont nous disposons actuellement; ceux qu'il faudra imaginer et employer pour obtenir la solution devront certainement être très différents et d'une nature beaucoup plus compliquée. V Une des questions qui ont le plus préoccupé les chercheurs est celle de la stabilité du système so- laire. C'est à vrai dire une question mathématique plutôt que physique. Si l’on découvrait une démons- tation générale et rigoureuse, on n’en devrait pas conclure que le système solaire est éternel. Il peut en effet être soumis à d’autres forces que celle de Newton, et les astres ne se réduisent pas à des points matériels. Bien des causes peuvent dissiper peu à peu l'énergie du système; on n’est pas abso- lument certain qu'il n’existe pas de milieu résis- . tant; d'autre part les marées absorbent de Péner- gie qui est incessamment convertie en chaleur par la viscosité des mers, et celle énergie ne peut être empruntée qu'à la force vive des corps célestes. De plus si tous les astres sont des aimants comme la terre, leurs mouvements doivent produire, par une induction mutuelle, des courants dans leur masse el par conséquent de la chaleur qui est encore empruntée à leur force vive. Mais toutes ces causes de destruction agiraient beaucoup plus lentement que les perturbations, et si ces dernières n'étaient pas capables d’en altérer la stabilité, le système solaire serait assuré d'une existence beaucoup plus longue. La question de la stabilité con- serve donc toujours un très grand intérêl. Lagrange, par une démonstralion d’une admi- rable simplicité, a montré que, si l’on néglige les carrés des masses, les grands axes des orbites A. VERNEUIL. — LA REPRODUCTION ARTIFICIELLE DES RUBIS j) demeurent invariables, ou plutôt que leurs varia- tions se réduisent à des oscillations périodiques d'amplitude finie autour de leur valeur movenne. Poisson a étendu la démonstration au cas où l’on lient compte des carrés des masses en négligeant leurs cubes; mais, malgré la virtuosité analytique dont il a fait preuve, son analyse montre déjà les défauts des anciennes méthodes. Il montre en effet que les grands axes éprouvent autour de leur valeur moyenne des oscillations périodiques ; mais, d'après ses formules, l’amplitude de ces oscillations pourrait croître au delà de toute limite; ce n’est là qu'une apparence due au mode de développement, et si l'on ne négligeait pas certains termes, on pourrait prouver que cette amplitude reste finie. Après Poisson on a cherché à trouver une démons- tration générale ou au moins à établir l’invariabi- lilé des grands axes en tenant compte du cube des masses. Mathieu avait eru un instant y réussir; mais M. Spiru-Aretu à montré ensuite qu'il s'était trompé. Il avait ainsi plutôt condamné les an- ciennes méthodes que démontré l'instabilité du système. La question restait entière, Toutes ces recherches ontexigé de grands efforts qui nous semblent aujourd’hui bien inuliles; les méthodes de M. Gylden et celles de M. Lindstedt ne donnent en effet, si loin que l’on pousse l'ap- proximation, que des termes périodiques, de sorte que tous les éléments des orbiles ne peuvent éprouver que des oscillations autour de leur valeur moyenne. La question serait done résolue, si ces développements étaient convergents. Nous savons malheureusement qu'il n'en est rien. Incapables pour le moment de résoudre le pro- blème général, nous pouvons nous borner à un cas particulier. Imaginons trois masses se mou- vant dans un même plan, la première très grande, la seconde assez petite, la troisième infiniment petite et par conséquent hors d'état de troubler les deux autres. Supposons de plus que les deux grandes masses aient un mouvement circulaire el uniforme. Tel serait le cas du Soleil, de Jupiter et d'une petite planète, si l’on négligeait l'inclinai- son des orbites et l’excentricité de Jupiter. Dans ce cas, MM. Hill et Bohlin ont démontré que le rayon vecteur de la petite planète reste loujours inférieur à une limite finie. Cela ne suffit pas toutefois pour la stabilité ; il faut encore que la petite masse repasse une infinité de fois aussi près que l’on veut de sa position initiale. Il est évident qu'il n'en est pas ainsi pour toutes les particulières, c'est-à-dire quelles que soient les conditions initiales du mou- vement; l'existence des solutions asymptotiques en est une preuve suffisante. Mais d'autre part on peut rigoureusement démontrer que l’on peut choisir ces conditions initiales de façon que l’astre repasse une infinilé de fois dans le voisinage de sa position primitive. Il y a donc une infinité de solu- tions particulières qui sont instables, au sens que nous venons de donner à ce mot et une infinilé d'autres qui sont stables. J’ajouterai que les pre- mières sont exceptionnelles (ce qui permet de dire qu'il y a stabilité en général). Voici ce que j'entends par là, car ce mot par lui-même n'a aucun sens. Je veux dire qu'il y a une probabilité nulle pour que les condilions initiales du mouve- ment soient celles qui correspondent à une solution instable, On objectera qu'il y a une infinité de manières de définir cetle probabililé; mais cela reste vrai quelle que soit la définition que l’on : soient z et y les solutions adopte, à une condition loutefois coordonnées de la troisième masse, +’ et y'les com- posantes de sa vitesse. J'appelle P de dy de'dy" la probabilité pour que z soit compris entre x, et æ, + dr, y entre y, et y, + dy, x entre +, et a, + dx’, y entre y, et y, + dy’. Nous pouvons définir la probabilité comme nous le voulons et par conséquent nous donner arbitrairement P en fonc- ion de x,, y,, #, et y. Eh bien, le résultat que j'ai énoncé plus haut reste vrai, quelle que soil cette fonelion P, pourvu quelle soit continue. H. Poincaré, de l'Académie des Sciences LA REPRODUCTION ARTIFICIELLE DES RUBIS Au moment où les recherches de MM. Fremy et Verneuil semblent démontrer que la production des rubis artificiels, applicables à la joaillerie, ne dépend plus que des expériences relevant du domaine de l’industrie, il peut paraitre intéressant d'exposer un résumé des nombreux travaux que la solution de ce problème a nécessités. C'est ce que nous nous proposons de faire dans les lignes qui suivent : [ Quoique la matière fondamentale du rubis, qui estle sesquioxyde d'aluminium, ait pu être obtenue cristallisée en suivant les procédés de la voie humide el de la voie sèche, ce sont les réactions 6 : A, VERNEUIL. — LA REPRODUCTION ARTIFICIELLE DES RUBIS par voie ignée qui ont donné les meilleurs résultats. La plus ancienne méthode par laquelle on ait re- produit le corindon (ou rubis incolore) par voie humide est due à M. de Sénarmont; elle consiste à chauffer vers 350° dans un tube de verre scellé, très épais et d'un faible diamètre intérieur, une solution d'alumine dans l'acide chlorhydrique. À côté de lames minces prismatiques formées d’une combinaison d’alumine el d'eau, que les miné- ralogistes nomment diaspore, on trouve, sur les parois du tube, des rhomboëdres de corindon inco- lores et mieroscopiques. Comme, dans les mêmes conditions, les chlorures de fer et de chrome, en se décomposant, n’abandonnent les oxydes correspon- dants que sous la forme de précipités amorphes, il est probable que la présence d'une petite quan- lité de chlorure de chrome ne donnerait pas au corindon précipité la couleur rouge du rubis ni celle du saphir. C'est là un fait intéressant que le mé- moire de de Sénarmont ne mentionne pas, mais qui mériterait d'être étudié. M. Georges Friedel vient d'obtenir, également par voie humide, de jolis cristaux de rubis, par l’action dans un tube d'acier boulonné, porté à une température de 530°, d'une solution de soude sur un grand excès d’alumine. Quand l’alumine contient un peu de chrome, la coloration du corindon est celle du rubis naturel. Les recherches par voie sèche sont beaucoup plus nombreuses; je rappellerai d'abord les expé- riences dans lesquelles l’alumine prend naissance au sein d'un flux sans passer par l'état de eom- posé volatil. Le premier résultat dans cette direc- tion fut obtenu en 1837 par Gaudin, chercheur in- fatigable, doué de la plus vive originalité, qui con- serve un rang distingué parmi les chimistes de son époque et auquel nous serions redevables de tra- vaux plus nombreux et plus remarquables encore s'il avait pu leur consacrer tout son temps. Il obte- nait le corindon chauffant à une très haute température, à l’aide du chalumeau oxhydrique ou bien dans un violent feu de forge, de l’alun de en potasse placé dans un petit creuset de noir de fumée fortement tassé. L'opération était terminée en quelques instants et la cavité du creuset conte- nait une masse scoriacée présentant des géodes aux parois consteilées de petits cristaux très bril- lants de corindon. On admet généralement que c’est le sulfate et le sulfure de potassium qui ser- vent ici de fondants et déterminent la cristallisa- tion de l’alumine; les réactions qui lui donnent naissance sont probablement plus complexes et en relation avec la décomposition lente de l’aluminate de potasse, qui se forme d’abord en grande quan- tilé dans ces conditions. En creuset fermé l'atmosphère est puissamment réductrice et, l'oxyde de chrome ajouté à l'alun élant réduit, l’alumine ne peut prendre la colora- tion rouge Pour développer la tein(e du rubis, il faut découvrir le creuset et maintenir le feu oxy- dant, mais en évitant la fusion de l’alumine. Ces petits rubis, isolés de leur gangue par les acides, forment une poussière microscopique ayant toutes les propriétés du produit naturel. Ils ont été ana- lysés par Malaguti. Ebelmen en i847 appliqua au corindon l'ingé- nieuse méthode qui lui permit de faire cristal- liser un grand nombre d’oxydes à l’aide de flux volatils à haute température. Il employait parti- culièrement l'acide borique, le borax et les phos- phates alcalins : un mélange composé d’une partie d’alumine calcinée avec trois ou quatre parties de borax, placé sur une feuille de platine repliée en forme de cuvette peu profonde, donne pendant la durée d'une cuisson de porcelaine, c’est-à-dire après trente heures environ, dont six de feu maxi- mum, un grand nombre de petits cristaux trans- parents, très nels, microscopiques et doués d'une belle coloration rouge, si l’on a ajouté 1 Z% d'oxyde de chrome au mélange primitif. Ces cristaux sont ac- compagnés de longues aiguilles bleuâtres très abon- dantes surtout aux bords de la capsule et d'autant plus nombreuses que le feu a duré moins longtemps; elles constituent un borate basique d'alumine. L’acide borique employé dans les mêmes condi- lions laisse l'alumine absolument amorphe. Ebel- men altribuait cel insuccès à la trop grande vola- Lililé de ce corps; mais il ne me paraît pas douteux que la présence de l’alcali ne soit indispensable, comme le démontrent du reste les autres résultats oblenus par ce savant. Je crois, en partant de là, qu'on peut expliquer ainsi le mécanisme de la réaction qui donne naissance au rubis dans celle belle expérience d'Ebelmen : le système alumine et borax se partage en aluminale de soude, borate d'alumine et borax, suivant un équilibre en rela- Lion avec la température. Ace moment la volatilité du borax intervient pour diminuer la dose de ce corps qui limite les quantités de borate d’alumine et d'aluminate de soude présentes; il en résulte que l’acide et la base de ces deux sels s'unissent à nouveau pour reformer du borax et rétablir l’équi- libre primitif, tandis que l’alumine s’isole et eris- tallise. La disparition du borate d’alumine dans les expériences {très prolongées me semble un ar- gument en faveur de cette manière de voir. L'addition de carbonates alcalins ou alcalino- terreux favorise beaucoup la cristallisation de l'a- lumine ; la silice agit de même et dans les meil- leures conditions Ebelmen a pu obtenir des tables de plusieurs millimètres de côté, mais de très faible épaisseur. A. VERNEUIL. — LA REPRODUCTION ARTIFICIELLE DES RUBIS 7 Debray s'est occupé à plusieurs reprises de la cristallisation de l’alumine. Suivant la première de ses méthodes, il obtenait le corindon en mettant à profit la volatilisation du chlorure de sodium formé par l'action de l'acide chlorhydrique gazeux sur l’aluminate de soude; dans une seconde série d'essais il arrive au même résultat par la décom- position du phosphate d’alumine à haute tempé- rature, en présence d’un excès de sulfate de soude; on retrouve dans le creuset du phosphate alcalin tribasique, tandis que l’alumine est devenue libre presque intégralement, ainsi que M. Grandeau l'a vérifié plus tard. C'est à la même catégorie d'essais qu'il faul rapporter les jolies expériences de Parmentier sur la décomposition des molybdates doubles d'a- lumine et de potasse, Il a montré que lorsqu'on atteint une température suffisamment élevée, le sesquioxyde se précipite en totalité et, comme il se redissout en partie dans le flux lorsque la tem- pérature baisse, il peut y avoir accroissement des cristaux par des réchauffements successifs, suivant un phénomène exactement inverse de celui qui se passe dans les ceristallisations ordinaires où l'ac- croissement du cristal déjà formé a lieu pendant le refroidissement. Le corindon obtenu est en pe- lites lames hexagonales peu épaisses. Le premier procédé suivi par MM. Frémy el Feil, pour la production du corindon, remonte à une quinzaine d'années; il consiste à chauffer au rouge blanc pendant plusieurs heures dans un creuset siliceux un mélange à poids égaux d’alu- mine amorphe et d'oxyde de plomb additionné de deux à trois centièmes de bichromale de potasse. Il se produit une grande quantité d’alumine cris- lallisée surmontant une masse vitreuse de silicate de plomb et d’alumine qui gagne le fond du creu- set; les auteurs admeltent que l'aluminate de plomb d'abord formé est décomposé par la silice du creuset qui s'empare de l’oxyde de plomb pen- dant que le rubis s'isole. Les cristaux obtenus se présentent en lames ex- cessivement nombreuses, très larges et peu épaisses, fortement agglomérées et presque toujours souil- lées par une petite quantité de silicate mal séparé qui leur enlève une partie de leur éclat et s'oppose à ce que leur couleur un peu sombre prenne à la lumière artificielle la belle teinte pourpre si re- cherchée. Il y a lieu de remarquer ici que la for- mation des d'alumine lames peu épaisses peut tenir à deux causes, soit à un déve- loppement trop rapide, soit à la présence d’une impureté qui peut quelquefois, même à des doses très minimes, produire le développement excessif du cristal suivant l'un de ses axes au dépens des autres. Ne pouvant modifier le milieu, MM. Fremy cristaux en et Feil dirigèrent les essais dans le sens qui devait déterminer le ralentissement de la cristallisation et poursuivirent avec persévérance l'étuderde celte réaction en opérant sur des quantités de matière qui s'élevaient jusqu'à trente kilogrammes à la fois et dans des conditions où la température était maintenue constante pendant vingt jours consé- cutifs. Malgré cela, ces efforts sont jusqu'ici de- meurés infructueux et les masses considérables de rubis qu'il serait si facile d'obtenir ainsi restent sans application pour la joaillerie, Au cours de cet important travail, MM. Fremy et Feil ont imité la couleur du saphir en ajoutant à leur composition première une petite quantité d'oxyde de cobalt à la place du bichromate alcalin. Il Les méthodes dans lesquelles l'alumine passe à l'état de composé volatil avant de cristalliser conviennent particulièrement à la production de cristaux très purs. Ce sont celles que je vais main- tenant exposer. A vrai dire, tous les procédés proposés jusqu'ici ne sont que des variantes de la célèbre expérience de H. Sainte-Claire Deville et Caron sur la décom- position du fluorure d'aluminium par l'acide bo- rique; mais les auteurs qui ont étudié postérieu- rement celte ont différé soit dans la manière d’engendrer le fluorure, soit dans le choix de l’oxyde qui fait la double décomposition avec lui. Le chlorure d'aluminium, quoique beaucoup plus facile à préparer que le fluorure, n'a guère été employé pour la production du rubis; la violence avee laquelle la vapeur d’eau réagit sur lui pro- duit le plus souvent de l’alumine amorphe, car la décomposition a déjà lieu à une température très inférieure à celle où les cristaux de corindon peu- vent s’'engendrer. Aussi l'expérience de Gay-Lussac qui donne si aisément de beaux cristaux d’oligiste par l’action de la vapeur d’eau sur le perchlorure de fer, n’a pu être appliquée que très difficilement par M. Stanislas Meunier à la production de petites lamelles hexagonales de corindon obtenues en fai- sant passer au rouge un courant de vapeur d’eau réaction sur le chlorure d'aluminium. Chacun sait que l'expérience de Deville et Caron consiste à enfermer dans un creuset nor siliceux une certaine quantité de fluorure d'aluminium au- dessus duquel on suspend, en l’attachant au cou- vercle, une petite capsule de platine remplie d'acide borique desséché. Le creuset de charbon, conte- nant ces malières, est placé dans une enveloppe sili- ceuse et protégé convenablement par une brasque de charbon de bois en poudre, puis maintenu pen- A. VERNEUIL. —- LA REPRODUCTION ARTIFICIELLE DES RUBIS dant une heure au rouge blanc. Après ce temps tout le fluorure s’est volalilisé; ses vapeurs, ayant ren- contré l'acide borique, ont donné du fluorure de bore et du corindon en magnifiques lames incolores ayant jusqu’à 1 centimètre de côté; mais, comme elles se sont formées très vite elles manquent d’é- paisseur. On ne peut obtenir la teinte du rubis dans ce creuset réducteur, tandis que sices mêmes ma- tières additionnées de fluorure de chrome sont chauffées dans un creuset d’alumine, on assiste à la production du rubis, du saphir et même du co- rindon vert ou émeraude orientale selon la quan- tité de chrome employée et les circonstances de l'opération. C'est la seule expérience qui, jusqu'à présent, ait permis de reproduire ces deux der- nières gemmes, sur la coloration desquelles plu- sieurs points restent encore à éclaircir. Le procédé de M. Hautefeuille pour la produc- tion du corindon réalise des conditions analogues à celles dans lesquelles Sainte-Claire Deville s'était placé pour reproduire l'oligiste. M. Hautefeuille a fait agir un courant lent d'acide fluorhydrique sur un mélange d'oxydes d'aluminium et de chrome maintenu au rouge orangé dans un tube de platine. Après quelques heures d’action toute l’alumine est cristallisée parce que le fluorure d'aluminium et la vapeur d’eau engendrés en un point de l'ap- pareil ont réagi en donnant une réaction inverse dans les parties où les conditions de température et de masse sont un peu différentes; en se refor- mant lentement ainsi, l’alumine cristallise, {tandis que l'acide fluorhydrique reformé va continuer in- définiment son aclion minéralisatrice. A l’origine, tant qu’il y a de l’alumine amorphe à transformer, le phénomène est très rapide à cause de la surface d'action considérable; il se ra- lentit ensuite, mais ne s’annule jamais, car, la vi- tesse d'attaque demeurant, toutes choses égales d’ailleurs, proportionnelle à la surface, il est cer- tain que les petits cristaux se corrodent au profit des plus volumineux qui s’accroissent lentement; théoriquement, s’il était possible de maintenir pendant longtemps dans un vase inattaquable et imperméable une masse donnée d’alumine et de gaz fluorhydrique, on ne devrait rétrouver qu'un seul cristal de corindon représentant la totalité de l’alumine employée. Pour un grand nombre de causes que je ne puis analyser ici, on est bien loin d'obtenir ce résultat en pratique, mais l'expérience de M. Hautefeuille n'en constitue pas moins celle qui a donné pour la première fois des cristaux de rubis non seulement de la plus grande pureté, mais aussi présentant le développement de la forme cristalline dans lLoute sa perfection. Tout récemment MM. Haulefeuille et Perrey ont démontré que l’on l'acide chlorhvdrique que croyait être tout à fait sans action sur l’alumine amorphe, peut minéraliser cet oxyde vers la tem- péralure de 600° et que cette action minéralisa- trice augmente beaucoup avec la tension sous la- quelle le gaz chlorhydrique agit. III Le second procédé suivi par MM. Frémy et Feil repose sur une réaction essentiellement différente de celle appliquée dans le premier; ces savants reconnurent l’action minéralisatrice puissante que les fluorures exercent sur l’alumine el entrevirent la possibilité de réaliser, dans les conditions or- dinaires des expériences de creuset, l’action de l'acide fluorhydrique à haute température qui exige habituellement des appareils de platine très coûteux. A la mort du regretté Ch. Feil cette étude était à peine ébauchée; elle fut reprise et continuée par MM. Frémvy et Verneuil, qui se proposèrent d’éluci- der le plus complètement possible le mécanisme de cette intéressante réaction. On reconnut d'abord que les fluorures alcalino- terreux sont réellement ceux qui produisent le mieux la cristallisation de l'alumine, lorsqu'ils sont employés purs et surtout exempts d'hydro- fluosilicates. Ces recherches préliminaires mon- trèrent aussi que le fluorure de baryum était celui qui agissait de la manière la plus intense, et c’est lui qui fut presque toujours employé. L'alumine s’obtenait par la calcination de l’alun d’ammoniaque auquel on faisait perdre au pelit rouge la majeure partie de ses produits volatils; puis on calcinait ensuite fortement le résidu, afin d'en expulser la totalité de l'acide sulfurique. Quelques centièmes de fluorure de baryum suf- fisent, à la température du rouge blanc, pour trans- former intégralement l'alumine amorphe en corin- don; cette puissance minéralisatrice s'explique aisément : M. Frémy a montré, il y a longtemps, que les fluorures alcalino-terreux perdent au rouge une grande partie de leur fluor à l'état d'hydracide sous l'influence de la vapeur d’eau; la série des phénomènes développés à propos de l'expérience de M. Hautefeuille se réalise done ici el se poursuit jusqu'au moment où l’acide fluorhy- drique, rencontrant la paroi du creuset de terre, est définitivement pris à l’état de fluorure de sili- cium, désormais inactif. Si l'acide fluorhydrique rencontre en même temps de l’oxyde de chrome, il lui fait subir les mêmes transformalions et les quelques millièmes de composé chromique qui suffisent à colorer le corindon produisent ici le rubis et quelquefois le saphir. La vapeur d’eau nécessaire est amplement A. VERNEUIL — LA REPRODUCTION ARTIFICIELLE DES RUBIS 9 fournie par les gaz du foyer qui traversent la paroi du creuset, poreuse à l’origine de l'expérience mais qui devient imperméable lorsque le mélange, vers la température du blanc naissant, a complè- tement vitrifié la paroi. Ce régime établi, une petite quantité de vapeur d’eau demeure captive et réagit indéfiniment. Quant à la baryte qui provient de la décomposition du fluorure, nous la retrouvons combinée à l’état d’aluminate. Les rubis obtenus ainsi ont été analysés; ils ne conliennent pas de baryte et sont seulement for- més d’alumine et d'oxyde de chrome; ils rayent la topaze avec la plus grande facilité et M. Descloi- zeaux, qui en à fait l'examen cristallographique, les a trouvés identiques aux plus beaux cristaux naturels. On pourrait croire, d’après cela, que pour ob- tenir de gros cristaux de corindon, il doit suflire d'ajouter plus de matière active, d'augmenter la quantité de fluorure de baryum. C'est là une illu- sion que l’expérience détruit vite, car si l’on élève la dose de fluorure à partir d’une certaine limite, on assiste à la formation de combinaisons fluorées encore peu connues en raison des diflicultés que leur séparation présente, tandis que les cristaux d'alumine deviennent plus rares, puis disparaissent tout à fait. D’après cela, les doses de 15 à 20°}, de fluorure de baryum semblent celles qu'on ne peut avantageusement dépasser. Ces nouvelles expériences donnaient des rubis remarquables par leur pureté et la régularité de leur forme cristal- line, et au point de vue scientifique, ce procédé pouvait prendre place à côté de ceux déjà décrits; son point faible résidail dans l’extrème dissémi- nation de cristaux extraordinairement nombreux, mais fort petits; la nutrition des cristaux déjà formés demeurait en effet presque insensible, soit à cause de la présence de la paroi siliceuse, soit par l'épuisement trop rapide de la matière fluorée. Cela devenait manifeste, surtout lorsqu'on opérait sur des masses plus grandes, dans l'espoir d'obtenir des cristaux plus volumineux; on devait recon- naître alors que l’activité du produit minérali- sateur s’épuisait dans un rayon très restreint, car les cristaux obtenus n'étaient pas sensiblement plus développés que dans les expériences effec- tuées sur de pelites masses. IV Un grand progrès fut réalisé le jour où MM. Frémy et Verneuil trouvèrent, après de très nom- breuses expériences, que certains oxydes ajoutés à l'alumine produisent justement l'action si longtemps recherchée, c'est-à-dire la formation de géodes, ou nids cristallins, dans lesquels un REVUE GÉNÉRALE, 1891, petit nombre de cristaux relativement gros se forment à la place des poussières cristallines engendrées comme précédemment en nombre infini. La chaux, la baryte, la strontiane, peuvent agir ainsi; mais les alcalis possèdent à ce point de vue une puissance bien supérieure à celle des alcalino- terreux ; la potasse ou la soude, mélangées, sous forme de carbonetes, à l’alumine, deviennent de puissants auxiliaires pour la nutrition des cristaux. Ce n’est pas à la formation d’un fluorure alcalin qu'il faut rapporter l’action immédiate de ces bases, car les fluorures alcalins calcinés dans les mêmes conditions avec l’alumine amorphe n'engendrent pas de corindon et c’est pour cela qu'on doit faire un emploi judicieux du carbonate alcalin, car si on le mélange avec le fluorure de baryum et l'alumine, on paralyse en même temps l’action minéralisatrise de l’acide fluorhydrique. La condilion, pour réussir, consiste simplement à séparer, dans le creuset, la partie qui donne naissance à l'agent actif de celle qui doit recevoir cette action. On conçoit qu'une recherche dans laquelle le nombre des variables en jeu est aussi grand, ait nécessité des centaines d'expériences, d'autant plus qu’elles sont rendues souvent peu compara- bles par les énormes variations de température que présentent les fourneaux ordinaires de labo- raloire; contrairement à l'opinion accréditée on ne saurait croire à quel point les moindres varia- ions dans la pression atmosphérique, l’état hygro- métrique de l'air et la direction du vent, peuvent modifier l'allure d’un four el quelles difficultés on éprouve à les compenser par le jeu du registre ou l’état de la grille, lorsqu'il est nécessaire de main- tenir la température constante. Les fours à gaz présentent donc pour ce genre d'essais une supé- riorilé incontestable. La température la plus favorable à la réaction est celle de 1350° environ. Lorsque l'expérience est bien réussie, on trouve les parties d'alumine qui ont subi à la fois l’action de l’acide fluorhy- drique et de l’aleali, presque entièrement transfor- mées en rubis. Ces derniers sont disposés soit iso- lément, soit par petits groupes dans les cavités de la matière devenue caverneuse et extrêmement friable; c’est généralement au fond du creuset, là où la couche de produit est plus épaisse, c’est-à-dire à l'endroit où l'acide fluorhydrique peut demeurer le plus longtemps sans rencontrer la paroi sili- ceuse, que l’on trouve les plus beaux cristaux ; ils sont isolés, sans point d'attache et toujours complets. Rien n’est plus facile que de les séparer de leur gangue, carune simple lévigation entraine toute la matière blanche peu dense, tandis que les 1* 10 C. WEYHER. — NOUVELLES EXPÉRIENCES SUR LES TOURBILLONS rubis gagnent le fond du vase. On élimine les plus petits par le tamis. Gràce à la netteté de leurs faceltes qui présen- tent Le plus beau poli, ils ont pu être montés sans avoir subi aucun travail de la part du lapidaire. Les plus grosses pierres obtenues en opérant sur une quantité de matière ne dépassant pas quinze cents grammes ont environ quatre millimètres et demi d'épaisseur et pèsent soixante-quinze milli- grammes, soil un peu plus d’un tiers de carat; elles se comportent en joaillerie exactement comme les plus beaux rubis naturels de même taille. Si l’on se reporte aux conditions dans lesquelles ces derniers résultats ontété acquis, il semble bien probable qu'en consacrant de nouveaux efforts à l'étude de cette question, on arrivera à produire des pierres beaucoup plus volumineuses. Les expé- riences qui précèdent montrent déjà qu'il faudra s’efforcer de ralentir la réaction en opérant à une température aussi basse que possible, car c'rst en effet de cette donnée que parait dépendrela plus ou moins grande épaisseur des cristaux ; il faudra d'autre part éviter la formation des corps vitreux qui englobent contre les parois du creuset les premiers cristaux formés, ceux par conséquent qui sont le mieux placés pour acquérir le développe- ment maximum. La dissémination extrême des cristaux obtenus jusqu'ici a pour cause principale le déplacement incessant des zones actives ; il en résulte que les cristaux formés ne demeurent pas pendant un temps suffisant dans les conditions où ils peuvent s’accroitre. Comme on le voit, il y a encore beaucoup de dif- ficultés à aplanir et l’on ne peut espérer arriver à les surmonter qu’en disposant dès à présent de ressources très supérieures à celles d’un labora- loire scientifique, c'est-à-dire en se plaçant dans les conditions de l’industrie. Les dernières expé- riences de MM. Frémy et Verneuil démontrent que la grosseur des cristaux obtenus est fonction des masses réagissantes, ainsi que cela s’observe dans la plupart des cas. Il devient donc fort probable que lorsqu'on opèrera sur une centaine de kilo- grammes de matière, on obtiendra des pierres du poids d’un ou de deux carats. Leur bas prix met- tra alors à la portée de tous ces belles gemmes réservées jusqu'ici à quelques privilégiés. A. Verneuil, Docteur ès sciences, Professeur au collège Chaptal, NOUVELLES EXPÉRIENCES SUR LES TOURBILLONS Dans mes précédentes expériences pour pro- duire la trombe marine avec son fuseau de vapeur, je m'élais servi de tourniquets munis d'un fond et d’un rebord vertical, le tout formant un tam- bour ouvert par le bas. J'avais expliqué, dans ma brochure sur les tourbillons !, pourquoi un sem- blable tourniquel donnait les mêmes effets que ceux qui résultaient dans la nature des girations aériennes prenant naissance dans les régions supé- rieures de l'atmosphère; néanmoins et, pour ré- pondre à certaines critiques de M. Faye, j'ai cons- truit des moulinets composés simplement de quatre à six ailettes emmanchées sur un axe vertical ?. Il est donc bien entendu que ces moulinets sont 1 Sur les tourbillons, trombes, tempôtes et sphères tournantes. Etude et expériences. 2° édition. Paris, Gauthier-Villars. 2 Voir le n° 16 du 30 août, page 498 de cette Revue où M. Faye disait : « De plus les girations deviennent immédiatement descen- dantes dans la nature, tandis qu’elles restent horizontales dans les expériences; aussi faut-il, dans ces mêmes expériences recourir à un tour de main (en terme d’atelier) pour faire des- cendre l’air expulsé latéralement ». Le tour de main visé par M. Faye, c’est notre rebord ver- tical des premiers tourniquets ; nos nouvelles expériences font voir que les girations aériennes descendent aussi bien quand ce rebord n'existe pas. ouverts haut et bas ct que le vent qu'ils chassent horizontalement autour de leurs palettes n'est arrèlé par aucun rebord. J’ajoulerai que le support, portant l’axe vertical de rotation, est réduit à une simple tige disposée de manière à ne présenter aucun obstacle à l’air venant du haut ou du bas. Lorsqu'on fait tourner un semblable moulinet (fig. 1), il se produit nalurellement une dépression vers son centre de rotation, puisque l’air est expulsé tout autour par la circonférence; il suit de là que des couches d'air situées au-dessus et au-dessous du moulinet se dirigent vers cette depression cen- trale. Les deux courants verticaux inverses, ainsi engendrés, viennent buter l’un contre l’autre dans le plan du moulinet pour être expulsés horizonta- lement par les palettes. Comme le moulinet con- tinue de tourner, cette double circulation s’ac- centue de plus en plus et se propage de plus en plus loin, haut et bas, dans le milieu aérien envi- ronnant. Le tourbillon ainsi créé au-dessous du mouline, a bien vite atteint la surface du plancher ; aussitôt il se ferme sur cette surface en constituant un tube aérien sans solution de continuité et qui relie le moulinet au plancher. Les particules d’air qui # J 2 | + . . : . 1 ; C. WEYHER. — NOUVELLES EXPÉRIENCES SUR LES TOURBILLONS 11 froltent directement à terre perdent de leur vitesse en raison même de leur frottement contre la sur- face du sol; leur force centrifuge diminue alors comme le carré de cette vitesse, ce qui fait que ces mêmes particules sont rappelées vers le centre par la dépression axiale; elles remontent alors vers le tourniquet pour être expulsées de nouveau, et ainsi de suite. Si donc nous plaçons sur le plancher un bassin contenant de l’eau chauffée, nous voyons aussitôt les vapeurs se concentrer et dessiner un tube de vapeur identique à celui que nous obtenions avec le tourniquet fermé et au sujet duquel ont été faites les objections auxquelles nous répondons ici. L'expérience réussit même mieux et sur une plus grande hauteur avec ces moulinets entière- ment ouverts. Quand on fait tourner le mouliret et qu’on pré- sente tout autour des brins légers de laine oudesoie,onconstate des courants d’air vio- lents gagnant le cen- tre par le haut et par le bas suivant les fle- ches aa et a'a' (fig. 1) et d’autres courants expulsés par les pa- 7e lettes suivant les flè- NS ches BB, 44, dd’. Si à quinze ou vingt centimètres au-des- sous du tourniquet nous présentons (fig. 2.) un bassin A rempli d'eau Fig. 1. Fig. 2. Lo chaude, nous voyons d’abord toutes les vapeurs émises par cette eau fuir en désordre en tous fuseau de sens et sortir horizontalement de tous les côtés. Puis, tout d'un coup, la trombe s'amorce et toutes les vapeurs, au lieu de s'échapper en tous sens, se dirigent au contraire vers l'axe et montent en colonne serrée vers le centre du tourniquet (fig. 3) tandis qu'en même temps l'eau s'élève éga- Fig. 3. lement sur ce centre et forme la gerbe dite « Buisson ». À l'instant précis où cet amorçage a lieu, on constate la disparition totale des courants d'air de direction 44 des figures 1 et 2; ces cou- rants dd, de même que ceux horizontaux BB s'in- fléchissent vers le bas et prennent les directions courbes de mêmes lettres de la figure 3, tandis que les courants 4x continuent de subsister. Le travail du tourniquet va se concentrer à la surface de l’eau où il transporte toute son énergie. Et, en effet, avant l'amorçage de la trombe, le moulinet tourne facilement sans fatiguer sa corde ou courroie de commande, tandis qu'après l’amor- çage, la corde glisse ou la vitesse se ralentit un peu et le tourniquet fatigue et secoue son sup- port. On sent très bien que, maintenant, il effectue un travail plus considérable, La trombe une fois amorcée, on peut descendre le bassin À à huit ou dix fois le diamètre du tour- niquet sans troubler le phénomène (fig. 4); le vapeur s'élire à mesure et l'action à la surface de l’eau reste la même. Bien entendu, la trombe s'amorce également d'elle-même à cette grande distance et cela à l'air libre, pourvu, toutefois, qu'il n’y ait pas d'obstacles trop voisins et capables de produire des remous anormaux, Bien entendu aussi, lorsque, par un dispositif convenable, on fait voyager horizontalement le moulinet tournant au-dessus du bassin, la trombe se déplace en suivant le tourniquet générateur et 12 C. WEYHER. — NOUVELLES EXPÉRIENCES SUR LES TOURBILLONS en donnant toujours les mêmes effets à la surface de l’eau. Disons maintenant qu'il importe peu que les girations des couches d’air situées en haut soient produites par un tourniquet dans les expériences, ou par des courants de vilesse inégale des régions supérieures dans la nature; du moment que ces girations ont pris naissance, les effets en seront les mêmes en grand comme en petit et ne sauraient dl \— x x — x — Ÿ EEEaEZEZEZEZ— ——_—_—_ à —_ —— = À vs différer que par leur intensité. Comme le dit M. Faye, ces girations descendront vers le sol soit des régions supérieures dans la nature, soit du tourniquet dans les expériences; mais, aussitôt qu’elles auront atteint le sol, les veines d’air tour- nant, loin de s'échapper par l'extérieur, se dirige- geront, au contraire, vers le centre du tourbillon, d’où elles remonteront vers le générateur supé- rieur ; l'observation saine du phénomène naturel ainsi que les expériences et le raisonnement ne laissent aucun doute à ce sujet. Le nier, c’est vou- loir nier l'évidence. Il résulte des expériences qu'avec le moulinet entièrement ouvert nous oblenons le même fuseau nébuleux à mouvement ascendant intérieur que celui que nous avions réalisé avec le tourniquet muni d’un fond et d’une paroi verticale ; et même nous l'obtenons sur une hauteur plus grande relative- ment au diamètre du tourniquet; mais il y a plus : nous avons donné, dans notre brochure, l'expé- rience consislant à faire descendre des vapeurs ou des fumées dans l’axe même du tourbillon, et cela en sens inverse de la nappe aérienne intérieure de ce tourbillon et dont le mouvement est ascendant. Tout le monde a pu voir cette expérience dans les séances de la Société française de Physique et de la Société d'Encouragement où elle a été présentée, il y à bientôt deux ans. Nous obtenons ce résultat en permettant à des vapeurs produites dans une chaudière extérieure. d'arriver par un tuyau dans l’intérieur du tourbillon, ou mieux encore, en brû- lant simplement, près de l'axe de ce tourbillon, une matière fixée à l'extrémité d’une tige et don- nant des fumées abondantes. Lorsqu'on présente ainsi ces matières en ignition dans la partie supé- rieure d'un tourbillon, on voit les fumées descendre © en formant un cône pointu, dont la pointe va sou- vent toucher le sol ou la surface de l’eau. Or, avec notre nouveau moulinet, nous obtenons ce même résultat qui semble si paradoxal, mais qui reproduit exactement la descente du nuage en fuseau pointu tel que nous le montre la nature dans une trombe marine. Quoique les choses se comprennent presque d'elles-mêmes, disons, cependant, pourquoi, sui- vant nous, de la vapeur ou des fumées descendent dans une gaine aérienne intérieure dont le mouve- ment est ascendant el, pourquoi, le cône ainsi formé par ces vapeurs ou ces fumées a sa pointe tournée vers le sol. En ce qui concerne le premier point, nous n'avons qu'à rappeler l’expérience consistant à sonder l'intérieur d'un tourbillon en employant pour cela un tube recourbé et relié à un baromètre sensible ; lorsqu'on promène l'extrémité de ce tube du haut en bas dans l’axe du tourbillon, on retrouve toujours au baromètre la même dépression almos- phérique. Le tourbillon constitue donc un tube aérien reliant le moulinet au sol et, dans ce tube, la région axiale se trouve du haut en bas à une pression inférieure à celle de la pression atmosphé- rique régnant tout autour à l'extérieur. Si done, par un tuyau, nous permettons l'accès dans l'axe du tourbillon à des vapeurs ou à des fumées venant de l'extérieur et soumises, par conséquent, à celte pression extérieure, ces vapeurs ou ces fumées rempliront du haut en bas la région intérieure du tube aérien et, si nous avons présenté l’orifice du tuyau adducteur dans le haut du tourbillon, nous voyons la fumée descendre en même temps qu’elle prend le mouvement de rotation autour de l’axe. Pour expliquer le second point, c’est-à-dire la forme conique avec le sommet du cône en bas, il convient de remarquer que le tourbillon aérien formant tube prend son origine à la partie supé- | * W. KILIAN. — LA GÉOLOGIE DES ALPES ET LA CARTE DE M. NOË rieure, là où se trouve le moulinet générateur, dans les expériences, et là où prennent naissance les girations supérieures, dans la nature ; à mesure que les veines d'air descendent vers le sol, elles perdent un peu de leur vitesse linéaire ! et elles perdent de celte vitesse par suite de leur frotte- ment contre les couches stagnantes existant tout autour; la force centrifuge diminue donc aussi, en sorle que, pour chaque tranche horizontale que l’on considère dans le tourbillon, la dépression intérieure, qui est la même du haut en bas, ne se trouve plus équilibrée aux mêmes distances de l’axe de rotation par la force centrifuge; les circon- férences sur lesquelles se réalise cet équilibre vont 13 en se rétrécissant de plus en plus, à mesure qu'on se rapproche du sol et c’est ainsi que se dessine la nappe conique. Ajoutons que, si, dans les expériences, on peut négliger l'influence des varialions de pression atmosphérique résultant de la hauteur de 4 à 3 mètres qu'avait la trombe dans ces expériences, il n’en est plus de même dans la nature où une hauteur de plusieurs centaines de mètres exerce au contraire une action très prononcée qui vient s’ajouter à la première pour effiler le fuseau conique dont la pointe est dirigée vers la lerre. Ch. Weyher. LA GÉOLOGIE DES ALPES ET LA CARTE DE M. NOË : Peu de régions ont été autant que les montagnes du système alpin l'objet des recherches des géolo- gues ; la liste serait longue des mémoires, notes, et cartes locales concernant diverses parties des Alpes qui, depuis une trentaine d'années, ont été livrés à la publicité; et c’est avec raison que l’on semble chercher de plus en plus dans la connais- sance de celte chaine d’origine relativement récente la solution des problèmes orogéniques; car dans les contrées plus anciennement disloquées de l'Europe septentrionale, il semble plus difficile de les élucider, la trace des phénomènes dynamiques n'étant plus là, comme ici, fraiche et pour ainsi 1 Nous disons « linéaire » et non « angulaire ». Cette der- nière vitesse va au contraire en augmentant de plus en plus, jusqu’à la pointe au bas du cône où elle est maxima. 2 Docteur Franz Noë. Gcologische Ucbersichtskarte der Alpen, mit Erlaüterungen der Verfassers und einigen cinbeg- leitenden Worten des Professors Dr Ed. Suess. — Carte géologique générale de la chaine des Alpes, à l’échells du millionième, exécutée d’après les tracés géologiques de régions alpines, de l'Institut géologique de Vienne, de l’Institut géolo- gique hongrois à Budapest, du Service des mines de Bavière. de la Commission géologique de la Société helvétique des sciences naturelles, de la Société géologique de France, de l'Ecole des mines de Paris * et du Comité géologique d’Italie. et avec l’utilisation des recherches de MM. Baltzer, Marcel Bertrand, Bittner, Caméré, Carez, Czyzck, Diener, Escher A Favre, E. Favre, Korel, Frech, Th. Fuchs, Gastaldi, Gerlach, Geyer, Gilliéron, Guembel, Harada, FE, von Hauer, Heim, R. Hoernes, Karrer, Kilian, Lepsius, Lory, von Mojsi- sovies, Neumayr, Nevri, H. Pichler, Renevier, Reyer, von Richthofen, Sismonda, Spreafico, Stache, Studer, Stur, Suess, Taramelli, Teller, Theobald, Tietze, Toula, Vacek, Vasseur, Wachner, Zaccagna, etc. Vienne 1890, (Institut géographique d'Ed. Hoeltzel.), une carte dans un carton, in-folio avec notice de 27 p. in-8°. * I est probable que l'auteur désigne ainsi le Service de la Carte géologique de France, dont le siège est dans le même édifice que l'Ecole nationale des Mines de Paris, mais qui constilue toutefois, comme on sait, une administration distincte ayant un directeur spécial et un personnel indépendant de celui de l'École. dire intacte. Les résultats de tant d’explorations, de tant de publications et de discussions si mémo- rables n'avaient cependant pas encore été réunis en un tableau unique ; on n’avait pas eu l’idée ou plutôt le courage de publier, autrement qu’à une échelle très réduite, une carte géologique de la chaîne des Alpes. Studer en 1851 avait fait paraitre comme an- nexe à sa (réologie de la Suisse une petite carte du système alpin dont l'échelle insuflisante et l’an- cienneté rendent actuellement l'utilité fort contes- table. Tout récemment le regretté Neumayr donna, dans son Ærdyeschichte, sous un très petit format, également, un essai carte géologique des Alpes; mais, malgré tout le mérite de ce travail, de ceux qui désirent pour leur enseignement plus qu'une grossière esquisse, se trouvent dans la né- cessité d’avoir recours aux cartes générales de l’Eu- rope comme celle de Dumont, où la région alpine ne saurait être traitée avec le même soin que dans un tracé spécial. Les cartes locales pourtant ne manquaient pas: en Autriche les tracés de von Hauer; en Bavière ceux de Guembel; en France, la carte d'Elie de Beaumont et de Dufrenoy, celles de MM. Carez et Vasseur et du Service de la Carte géologique; en Suisse, les levés anciens de Studer, d'Escher et la carte au 100,000 récemment achevée, donnaient d'excellents renseignements pour diverses parties de la chaine. Il faut savoir gré à M. Noë d’avoir entrepris, sous le haut patronage de M. Ed. Suess, la tâche ardue de raccorder toutes ces cartes conçues souvent dans un esprit très différent; d’unilier les nomen- clatures souvent difliciles à accorder des divers auteurs, et de faire concorder autant que possible 14 W. KILIAN. — LA GÉOLOGIE DES ALPES ET LA CARTE DE M. NOÉ les divisions staligraphiques représentées par les teintes conventionnelles; de tirer en un mot de ce chaos d'interprétations parfois contradictoires une œuvre épurée, claire, et comportant en même temps le degré d’exactitude compatible avec l'échelle adoptée. On peut dire que M. Noë a pleinement réussi. L'unité de la chaine alpine apparait plus nette qu'on ne l'avait encore pu voir sur aucune carte et s'est la première fois aussi que nous trouvons de si nombreux détails, el tant de si utiles renseigne- ments, coordonnés en un tout aussi harmonieux où l’on sent si peu la surcharge. La carte de M. Noë est appelée à rendre de grands services aux géologues des Alpes, en leur permettant de ne pas perdre de vue, tout en poursuivant leurs recherches locales, l’ensemble orographique dont ils étudient un coin particulier et en leur rappe- lant que leur travail ne sera vraiment fructueux que s’il contribue à la solution du grand problème orogénique ; d'autre part, et comme l’a si bien dit M. Suess dans l'introduction dont il a fait précéder la Notice explicative, elle vient combler une lacune vivement ressentie dans le matériel de l’Ensei- gnement supérieur. Au point de vue matériel, la nouvelle carte de M. Noë se recommande par son format rendu maniable à l’aide d'un procédé très simple, par son impression, très lisible et peu fatigante pour les yeux. La topographie est empruntée à la carte topographique au millionième (1 centimètre pour 10 kilomètres) des Alpes de M. Haardt von Harten- thurm, exécutée dans les ateliers de Ed. Hoeltzel à Vienne. L'auteur a reproduit en grisaille la topo- graphie de M. Haardt à laquelle les teintes géolo- giques sont superposées; c’est là une heureuse combinaison; on pourrait désirer cependant un peu plus de vigueur dans les hachures qui figurent le relief. En se débarrassant d’une foule d'indications inu- tiles comme le tracé des routes, celui des voies ferrées et un grand nombre de noms de localités peu importantes pour le but scientifique de la carte, l'auteur n’a pas peu contribué à augmenter la netteté de son œuvre; nous remarquons égale- ment que, parmi les noms conservés, M. Noë a choisi avec beaucoup de discernement ceux des localités (Barrème, Annot, Pelit-Cœur, Haering, Reit-im-Winkel, etc.) connues des géologues el qui, trop souvent, ne figurent pas sur les cartes. Les couleurs employées sont un peu crues; mais l'effet en est heureusement adouci par la topo- graphie en grisaille dont nous venons de parler. Quant au choix des teintes, les conventions établies au Congrès de Bologne ont étésuivies dans leur ensemble, sauf pour le Trias auquel la couleur bleue a été affectée, tandis que le violet a été em- ployé pour les dépôts paléozoiques. Ce mode de représentation, qui rend facile une confusion des dépôts triasiques avec le Jurassique, déroute beau- coup le lecteur, habitué à voir le violet réservé au Trias. De plus il rend moins facile à saisir le rôle si spécial de ce terrain, en particulier en Lom- bardie et dans le Tyrol. Le Permien, en raison de son importance au point de vue des mouvements anciens des massifs cristallins, a été distingué par une teinte particulière. Un figuré spécial a permis de mettre en évidence un facies quisemble lié àun épisode orogénique important de la chaine alpine et qui affecte tantôt le Crétacé supérieur (environs de Vienne), tantôt, et le plus souvent, la partie inférieure des terrains tertiaires; nous voulons parler du Flysch, auquel M. Noë assimile au point de vue du mode de formation le puissant système des Grès des Vienne et des Karpathes. La facon dont les documents ont été utilisés parait être excellente : Conformément aux tradi- tions, la surface d’une série de petits lambeaux, d’une signification souvent très grande pour l'orogénie, a été exagérée afin de rendre possible leur reproduction à la petite échelle du 1 : 4.000.000, En ce qui concerne la France, nous regretterons qu’il ait été tenu si peu de compte des progrès que la Carte officielle au millionième (1889) a réalisés sur la carte au 500.000%€ de MM. Carez et Vasseur. On sait que MM. Vasseur et Carez, se basant sur les travaux des géologues italiens, ont représenté par la teinte des formations paléozoïques une large zone de schistes, ‘allant d'Oulx à Coni par Césanne et Aiguilles, laissant en Trias une autre bande plus étroite, située à l'Ouest de la précédente. M. Zac- cagna a publié en 1887 une petite carte géologique au 1 : 1.000.000 des Alpes occidentales; il a indiqué en « prépaléozoïque » (Schistes cristallins) une grande partie des formations schisteuses situées entre Césanne, Saint-Véran et le Viso, et n’a laissé comme Trias qu'une bande étroite allant de Briançon à Arvieux, Ceillac et Maurin. Sur la Carte au millionième du Service français, le tracé dû aux explorations de Lory porte au contraire une zone triasique très étendue comprenant non seulement les schistes des environs de Suze et du Mont-Cenis (prépaléozoïques pour M. Zaccagna), mais ceux de Césanne, d’Aiguilles, de Saint-Véran, etc. Suivant en partie les tracés de M. Zaccagna, M. Noë a fait figurer, comme schistes cristallins, la bande Suse-Césanne-Aiguilles et à conservé comme triasique, outre la zone portée comme telle par M. Zaccagna un grand massif entourant W. KILIAN. — LA GÉOLOGIE DES ALPES ET LA CARTE DE M. NOË 15 Modane et la Vanoise; il en résulle que suivant qu'ils se trouvent en Italie où en France, les mêmes schistes Lustrés sont portés en Trius ou en Terrain primitif. Il demeure réservé aux recherches futures de modifier entièrement les tracés géologiques de cette zone frontière de nos Alpes; pour ceux qui connaissent un peu cette région, il est incontestable que les figurés donnés jusqu’à ce jour sont tous, sauf peut-être ceux de M. Zaccagna, basés sur une interprétation erronée, provenant de l’âge que, tour à tour, l’on a attribué aux « Schistes lustrès » rattachés par Lory au Trias et par les membres du comité italien à la série ancienne Un accord a été conclu récemment, à la suite d’explorations faites en commun par des géologues des Services ilalien et français, pour considérer ces schistes comme anté- rieurs au Trias. Il y aura donc à les détacher des autres termes incontestablement triasiques avec lesquels ils sont confondus sur la Carte au millio- nième du Service français. Quant aux contours de MM. Carez, Vasseur et Noë qui ont pour résultat de figurer à l'Est les schistes lustrés comme anté- rieurs au Trias (Château-Queyras, Aiguilles), de les laisser au contraire vers l'Ouest (en France, Lans-le-Bourg, Mont-Cenis) en partie sous la même teinte que les gypses et les quartzites lriasiques, ils ne correspondent qu'à une espèce de compromis, en quelque sorte imposé par l’état encore peu avancé des levés géologiques dans cette partie des Alpes. Le Massif du Pelvoux est ici, comme sur la carte de MM. Carez et Vasseur, entièrement formé de schistes cristallins ; il n’a été tenu aucun compte de la nature, maintenant considérée comme nette- ment éruptive, de la protogine ni des filons granu- litiques des environs dela Bérarde. Si M. Noë avait pris davantage en considération la nouvelle Carte au millionième faite sous la direction autorisée de M. Michel-Lévy, il aurait évité cette erreur. Ajou- tons aussi que la bande granilique placée au S. E. d’Allevard par M. Noë, étant formée de gneiss gra- nuliliques et non de roche éruplive, ne figure pas sur la carte du service officiel de France. Pour la partie des Basses-Alpes située aux envi- rons d’Allos, de Colmars et de Barcelonnette, les explorations spéciales exécutées en vue de la publi- cation de notre carte au millionième ont modifié considérablement les contours de MM. Carez et Vasseur. Pourquoi M. Noë s’en est il tenu à ces der- niers ? Il en est de même pour la vallée du Jabron (Basses-Alpes) le long de laquelle l'auteur n’a pas indiqué les lambeaux mollassiques si importants pour dater le dernier plissement de cette zone. Les alentours du Mont Viso également laissent un peu à désirer. Signalons par contre comme faciiitant beaucoup l'intelligence de certains faits orogéniques la facon dont la région des Alpes est limitée sur la carte que nous avons sous les yeux et le soin qu'a pris l’au- teur d’amorcer les môles anciens limitrophes («das Vorland ») tels que le massif de la Bohème, la Forêt-Noire, le Plateau central de la France, les Maures et l'Esterel, dont le rôle, quoique tout pas- sif, a laissé des traces profondes dans la structure de la chaine alpine. Depuis l'exécution, pourtant très récente, de cette carte, de nouvelles découvertes comme celle du Nummulitique de Radstatt dans la vallée de l’'Enns (Guembel, etc) ont été faites et ne figurent nalurellement pas sur les tracés de M. Noë. Les divisions adoptées! sont, sauf une exception *, Ces divisions sont les suivantes : y Granite, Granulite, Protogine, Tonalite, Syénite et, à Predazzo, dansle Tyrol méridional, Phorphyrites et Mélaphyres rouge carmin. 5, à Serpentine (6) Diorite, Mélaphyre, Gabbro, Diabase, Grünstein… Vert foncé. zx Porphyres, Porphyre quartzifére et porphyre à Augite Vermillon avec hachures. 8, + Basaltes (8) Trachytes (x). Vermillon avec hachures. Gn. Gneiss, ses variétés, Gneiss central, et, dans les Alpes Suisses et occidentales (Mt. Rose) Micaschistes anciens. Acse sans hachures. Kr. Micaschistes, Chloritoschistes, Taleschistes, Amphibo- lites. Rose avec hachures. Ph. Groupe des Schistes de Casana, des Schistes lustrés et bigarrés (gris et bleus) dans les Alpes occidentales et en Suisse. Groupe des Phyllites (Schistes argileux, Schistes ar- gilo-micacés, Schistes quartzeux Caleschistes) dans les Alpes occidentales et le Tyrol. Violet avec hachures roses. Ce groupe comprend des Schistes d'âge très variables, dési- gnés habituellement par le nom de Schistes métamorphiques ou par celui de « Schistes d’âge indéterminé » dans les Alpes occidentales et la Suisse; l’auteur en a détaché une bande im- portante s’étendant du Valais à la Ligurie pour la rattacher au Trias, à l’exemple de Lory (V. plus haut). Les Schistes des Grisons (Bündner Schiefer) des anciennes cartes ont été éga- lement démembrés; une partie a été réunie aux Schistes mé- tamorphiques, une autre aux Schistes cristallins, une dernière enfin (au nord de Coire), au Flysch (Crétacé supérieur et Éocène). Ainsique l’avoue l’auteur lui-même, la lumière est loin d’être faite sur ces formations schisteuses, et il est certain ainsi du reste que nous l'avons fait remarquer, que l'avenir modifiera singulièrement les contours actuellement donnés dans la zone Mont-Cenis-Cuneo. K. Calcaire cristallin (Marbre blanc, Cipolin). Bleu vif. PI. Paléozoïque en général (Permien exclus). Violet pâle. S. Silurien. Violet pale. D. Dévonien.; Violet pâle. C. Carboni- fère. Violet pâte. (Ces terrains ne sont distincts que dans la partie orientale de la chaine.) Iei encore il eût été utile, comme pour le Permien, de dis- tinguer par une différence de teinte les formations marines des Alpes oricntales de leurs équivalents continentaux de l'Ouest. P. Permien (Dyas) : Verrucano, Grès de Grœden. Brun. W. Trias inférieur : Schistes de Werfen. Bleu pâle avec poin- tillé bleu foncé. T. Trias moyen et supérieur Calc. de Virgloria, de Reïfling, de Recoaro de Buchenstein C. de Wengen, St Cassian, Houille de Lunz, Tufs porphyristiques, etc.. (y compris les couches de Raïibl.) ; Trias entier dans les Alpes occidentales. Bleu gäle à hachures obliques. Le rôle important du Trias dans le Tyrol est facile à saisir, malgré la coloration bleue qui le rapproche trop du Jurassi- + * Ils'agit des roches connues en France sous le nom de porphyrites augitiques. 16 W. KILIAN. — LA GÉOLOGIE DES ALPES ET LA CARTE DE M. NOÉ pour le Flysch. purement chronologiques; nous re- grettons vivement que M. Noë ne se soit pas ins- piré de l'essai tenté il y a quelques années par M. de Lapparent lorsque ce dernier annexa à son Abrégé de géoleyie une petite carte de France sur laquelle il avait eu l'excellente idée d'appliquer un figuré particulier aux formations lacustres ou saumätres, c'est-à dire de représenter sur son esquisse non seulement l’âge des diverses assises, mais aussi leur facies. L'introduction d’une telle que. On aimerait ici encore voir mis davantage en évidence les facies différents et notamment le contraste classique entre le « Trias Alpin » des chaines centrales et orientales e* lo facies que revêt ce terrain à l’O. de la ligne du Rhin. R. Dolomie principales Rhétien calcaire du Dachstein, couches de Kæssen. Bleu pâle sans hachures. Cet étage atteint 800 mètres dans les Alpes orientales. J. Lias et Jurassique (Tithonique compris). Bleu pâle avec hachures longitudinales. 11 eût été désirable que le Lias dont l'extension est assez différente de cclle du Malm füt séparé du reste, comme aussi il eût été intéressant de voir bien délimités les facies coralligè- nes du Malm. Cr. Crétacé. Vert dair. Une seule teinte pour le système entier. 11 semble toutefois que le Crétacé supérieur aurait pu être utilement distingué, surtout à l'Est où la transgression cénomanienne aurait été ainsi mise en évidence. E. Tertiaire ancien : Eocène (Calcaires et grès nummuliti- ques). Jaune orange. L’Eocène lacustre du $S. de l'Autriche {Cosina) y est représenté par la même teinte que les calcaires à Nummulites de Faudon (Hautes-Alpes) et les assises oligo- cènes de Castel-Gomberto). Il y aurait eu grand avantage, comme pour le Crétacé supérieur, à figurer d’une manière spéciale les dépôts lacustres. L’extension de la mer nummuli- tique aurait ainsi pu être évaluée à simple vue. F. Flysch; Facies « flyscheux » dela Craie et de l'Eocène T. Juune avec hachures vertes. Flysch, Grès de Vienne, Grès des Karpathes, Macigno, Tassello, Grès de Taveglianna., Grès a Fucoïdes, etc. Nous touchons ici à un point faible de l'œuvre de M. Noë. Non seulement il est fâcheux que les circonstances aient né- cessité l'assimilation de dépôts crétacés, éocènes et souvent même oligocènes, mais nous nous heurtons à une interpréta- tion erronée qui aurait pu être facilement évitée. Le Flysch, te] que le comprend M. Noë, ne s’étend pas plus au Sud que les environs de Chambéry ; les vastes affleurements cocûnes et olisocènes des Hautes et Basses-Alpes ont tous été teintés en jaune orange (E.), c’est-à-dire en Eocène alors que les puis- sants dépôts de Grès (Grès d’Annot) Quartzeux, de grès mouchetés (si analogues aux grès de Tavegliannaz), de schis- tes à Fucoides et de marnes sans fossiles des environs d’Em- brun, de Barcelonnette et du Massif des Trois-Evèchés (Basses-Alpes) méritent au premier chef la désignation de Flysch. En réalité la teinte de l'Eocène devrait être réduite dans ces parages à un mince liséré entourant les massifs du Flysch qui lui est superposé. L’aspect de la carte serait donc considérablement modifié. m. Néogène Miocène (Aquitanien inclus) et Pliocène. Jaune paille. - Il aurait été également et plus encore que pour les autres autres terrains d’un haut intérêt de mettre en évidence par un procédé quelconque la nature marine ou lacustre des dé- pôts miocènes et pliocènes, ce qui eùt permis de saisir facile- ment les relations si étroites qui existent entre la répartition de la mer helvétienne et l’âge relatif des différentes zones alpines. g. Dépôts diluviens et alluviaux. Jaune pâle. Il est probable que le domaine de ces dépôts sera, dans les Alpes septentrionales, encore notablement augmenté, une partie d’entre eux ayant été considérés à tort comme ter- tiaires. En blanc : Glaciers et champs de neige. méthode dans la cartographie géologique en augmente singulièrement la valeur théorique; elle permet à la simple inspection du tracé de se faire une idée beaucoup plus complète de l’histoire et de l’orogénie d'une région donnée. Il Malgré l'abondance de détails que porte le tracé, surlout pour les Alpes orientales, il semble que quelques traits généraux se détachent avec plus de clarté que par le passé du travail de M. Noë. Nous croyons pouvoir en tirer le schéma suivant, qui pourrait fournir, s’il était développé et accompagné d'un nombre suflisant de faits justificatifs tirés des diverses monographies régionales et relié à des considérations sur l’âge des principaux mou- vements alpins, le sujet d'une très intéressante étude dans le genre de celles dont M. Suess a si magistralement inauguré la série. Le plissement alpin, tel qu'il se montre à nous, résultat démantelé d’une suite de dislocations suc- cessives, peut être décomposé, lorsque l’on fait abstraction des accidents purement locaux (affais- sements, petites failles transversales, etc.), en zones parallèles, qui toutes participent de la courbure générale de la chaine. Dirigées E.N.E. — O.S.0, entre le Danube et une ligne Lausanne-Turin, elles sont ensuite brusquement infléchies en demi- cercle, de facon à se recourber vers l'Est (Cuneo) et à se rattacher a l’Apennin. 1. On distingue tout d'abord sur la carte de M. Noë, une zone centrale, constituée par les schistes cristallins, avec leur cortège de cipolins, d’amphi- bolites, de serpentines, ete., que percent des roches granitoïdes et qui portent encore des lambeaux de sédiments paléozoïques (Schistes lustrés dans les Alpes occidentales; Phyllites, Dévonien, Silurien et Carbonifère marin des Alpes autrichiennes) et de Trias à facies variés, suivant qu'on les étudie à l'Est ou à l'Ouest de la chaine. Émergeant près de Gratz, des sédiments tertiaires du bassin danubien, cet axe central cristallin s'étend sans interruption jusqu’en Piémont, offrant seulement quelques par- ticularités qui n’en lroublent que peu la manifeste continuité. Les affleurements paléozoïques affec- tent à l'Est, dans leur disposition, une symétrie assez nette par rapport à l’axe central. C'est ainsi qu'à part quelques parcelles insignifiantes et un massif plus étendu à l'extrémité orientale de la chaine, là où la zone cristalline s'épanouit à la manière d’un éventail et va disparaitre en deux branches sous les sédiments lerliaires (au nord-est et au sud-est de Gratz), ils forment deux bandes allongées dans le sens général de la chaîne : au Nord entre Neustadt et Innsbruck; au Sud de Kla- Le, W. KILIAN. — LA GÉOLOGIE DES ALPES ET LA CARTE DE M. NOÉ 17 genfurt à Mauthen et Brixen par exemple. La dis- tribution du Permien est aussi remarquable : bor- dant la chaine centrale au Nord (Hopfgarten près Kufstein) et au Sud (Botzen-Tarvis) dans les Alpes orientales ; formant des massifs toujours voisins de la bande cristalline (Mals et au Sud entre Bel- lagio et Storo), il se présente également dans les Alpes occidentales (Ubaye-Savone) en bordure de cette dernière. Dans les Alpes centrales, un accident lransver- sal d’une grande importance (Judicarienlinie de M. Suess) constitué par des fractures N.N.E. (Storo- Meran) accompagnées des éruptions granitiques et porphyriques de l'Adamello, de Botzen, Meran, et des environs N.E. de Trient, et s'étendant sur une longueur de plus de 100 kilomètres, vient trou- bler un moment la régularité de l'axe. Ce dernier semble avoir été brisé,et déjeté à la manière d’une baïonnette. Aussi le plan général est-il moins net dans cette région où la zone cristalline parait comme morcelée. Les Alpes françaises correspondent à l’inflexion en arc de cercle de toute la chaine, signalée plus haut. La zone cristalline coïncide sur une certaine longueur avec notre frontière et, au Sud du Brian- connais, reste même en dehors de notre territoire. Une partie même semble s'être abimée sous les plaines du Pô et c’est ainsi que disparait, auprès de Coni, cette zone maitresse du système alpin, dont un coup d'œil sur la carte permet de saisir la remarquable continuité depuis Neustadt en Au- triche, jusqu'à Suse et Saluce en Piémont. 2. De chaque côté de cette zone se trouvent deux zones subalpines symétriques (Préalpes, Alpes cal- caires, chaines secondaires) : a) Une zone interne [Sesto-Calende (Come) - Brescia-Verone] continue, de la Save au Tessin, mais dont l'extrémité occidentale disparait, sans doute par suite d’affaissements, sous les plaines du PO, Il est probable que, suivant l'inflexion de la zone centrale elle devait du reste ici décrire un arc de cercle de façon à venir se raccorder à la bordure nord-est de l’Apennin. Au Sud-Est, cette zone s'éloigne de l’axe cristallin, et ses lignes de dislocations s’infléchissent en éventail du côté de l'Istrie et de la Dalmatie. La structure de cette bande méridionale est assez remarquable: les syn- clinaux ont une tendance à se déverser vers le Sud ; peu serrés, ils possèdent pour la plupart une grande amplitude, et sont fréquemment faillés en gradins, surtout au voisinage de la dépression adriatique, (Véronais, etc.). Des éruptions récentes s’y sont en maints endroits manifestées. b) Une zone externe, constituée également par des sédiments mésozoïques et tertiaires qui sont ici énergiquement plissés, mais plus constante et plus étendue que la précédente. De Vienne au Rhin par Kufstein, celte zone présente trois bandes bien nettes : une sous-zone intérieure, la plus rap- prochée de l’axe cristallin, est formée de Trias, de Jurassique et de Tertiaire; et, à l'extérieur, une autre sous-zone constituée principalement par le Flysch, borde la précédente et la sépare d’une bande tout à fait externe de Mollasse miocène. Plus à l'Ouest, en Suisse el dans les Savoies, la bande de Flysch se confond avec la sous-zone mé- sozoïque, tandis que la Mollasse se maintient tou- jours sur le bord externe. Celle zone mollassique avec sa continuation est la partie la plus récente des Alpes : À partir de Chambéry, elle comprend aussi ses chainons mésozoïques, dont les syneli- naux et les failles présentent encore des lambeaux de Mollasse pincée : tels le Jura el les chaines su- balpines du Dauphiné ainsi qu'une grande partie des montagnes de la Provence, dernières rides du système alpin. Dans les Alpes occidentales, un nouvel élé- ment s'ajoute aux précédents : à partir de Disentis et du Toedi apparaissent une série de massifs cris- tallins portant les traces de dislocations hercy- niennes (antéhouillères et antéliasiques) traversées par des éruptions granitoïdes, montrant en divers points des lambeaux houillers et liasiques, et sépa- rés de l’axe cristallin de la chaîne par une bande mésozoïque (Andermatt) qui comprend, au $. O. de Sion, de vastes affleurements de Houiller continen- tal. Cette bande cristalline, la première zone alpine de Lory qui contient les massifs les plus élevés et les plus imposants des Alpes : le Mont-Blane, la Meije, le Pelvoux, apparait ainsi comme un simple accident dans le plan général du système alpin, comme un fragment remaniée de l’ancienne chaîne her- cynienne, compris dans la bande secondaire externe. En effet, à partir du Toedi et surtout de Sion (Va- lais) cette zone secondaire septentrionale jusque- là unique se divise vers l'Ouest en deux bandes qui laissent percer entre elles, comme par une bou- tonnière, les massifs cristallins de la première zone alpine (Mont-Blanc-Belledonne-Pelvoux), pour sé rejoindre ensuite dans le Gapençais, puis se sé- parer de nouveau un moment et laisser place au massif cristallin des Alpes-Maritimes (Mercantour), de même ordre que ceux que nous venons d’énu- mérer. La zone Valais-Briançon-Savone que signale sur la carte une traînée d’affleurements triasiques et houilliers (2° et 3° zones alpines de Lory) n’est done autre chose qu'une partie ici chaines secondaires bavaroises et autrichiennes. En même temps, la zone du Flysch qui à l'Est formait une bordure externe régulière au nord des isolée des 18 W. KILIAN. — LA GÉOLOGIE DES ALPES ET LA CARTE DE M. NOÉ chaines mésozoïques continue à se maintenir, quoique moins distincte, au nord de la zone subal- pine et de ses enclaves cristallines (1° zone), tandis qu'à partir de la Maurienne, une nouvelle bande de Flysch, marquée par erreur comme formée d’Eocène à facies ordinaire sur la carte V. plus haut), mais très nette et très développée, vient se placer entre ces dernières et l'axe cristal- lin central, entoure au S$S. et au S. O. le Pelvoux de ses accumulations détritiques, acquiert dans les Basses-Alpes un grand développement et se continue avec la zone secondaire vers la Méditer- ranée, enclavant la boutonnière cristalline des Alpes-Maritimes el du Mercantour. La 1° zone alpine de Lory peut done n’être consi- dérée que comme une annexe s’intercalant dans la zone subalpine externe, de Disentis à Tende, en une série de massifs, sorle de chapelet, dans l’inter- valle desquels les deux sous-zones secondaires se confondent à plusieurs reprises dans les environs de Louèche (Leuk), Sion et de Chorges-Barcelon- nette). Les mouvements orogéniques es plus ré- cents (fin du Miocène, Pliocène) semblent s'être manifestés dans la bande externe seulement, la zone interne de ces deux séries de chaines cal- caires n'ayant subi probablement que des plisse- ments datant du milieu des temps tertiaires. C'est au fait de s'être trouvées refoulées entre les massifs de la zone centrale et les môles an- ciens (Vorland), bourrelets déjà plissés extérieurs au système alpin, tels que le massif de la Bohème, la Forêt Noire et les Vosges, la Serre, le Plateau central de la France, les Cévennes et les Maures, que les zones secondaires externes des Alpes doivent leur constilution si compliquée et les nom- breux accidents (plis couchés, elc.), qui témoi- gnent d’une poussée intense émanant de la zone centrale et dirigée vers la bordure externe (N., NO et O.). C'est dans la disposition des éléments consti- tuant les chaines subalpines, que se décèle ainsi avec le plus de netteté cette influence des massifs anciens que l’on pourrait qualifier d'influence hercy- nienne !. Entre Vienne et Constance par exemple, les plissements subalpins sont à peu près parallèles au 1 C’est également par l'existence d’anciens reliefs her- cyniens ou d’une zone d’eaux, très peu profondes au large du rivage formé par notre Plateau central et à l'emplacement de nos Alpes francaises, que l’on peut expliquer le facies dé- tritique (quartzites) et lagunaire du Trias dans la plus grande partie des Alpes occidentales, alors qu’à l'Est régnait le régime franchement marin, bord du massif de la Bohême. Le Jura représente un arc extérieur de plis subalpins s’écartant un moment du faisceau; déviés par le petit massif de la Serre, ils viennent, à Brugg (Argovie), s'é- craser contre la terminaison méridionale de la Forêt Noire (Pli couché du Boetzherg). Enfin dans la région Delphino-Provençale, nous avons fait ! ressortir la facon frappante dont les dislocations récentes se sont pour ainsi dire adaptées aux contours anciens du Plateau central et des Maures. L'effet des mouvements alpins sur les masses hercyniennes elles-mêmes déjà plissées a été in- diqué du reste par M.Julien, puis plus complète- ment mis en lumière par M. Michel-Levy. Ils ont été faillés à leur tour lors des mouvements subal- pins ; on y remarque des synclinaux et des anti- clinaux à vaste amplitude, de date récente, bien distincts des plis anciens résolus en gradins et en failles ; mais c’est entre la zone centrale des Alpes avec ses puissantes et larges voûtes (Simplon, Mont-Cenis),et ces masses hercyniennes remaniées, que se trouve la zone des plis aigus,desisoclinaux, des contournements et dislocations énergiques qui caractérisent les Préalpes. Pour les chaines secondaires de la bande interne méridionale (zone subalpine interne), il en est tout autrement. Au Sud, dans le Bellunais, la Lombardie, le Véronais, l'allure qu’affectent les éléments de la zone secon- daire est tout autre. De vastes plis d’une grande amplitude, morcelés et décomposés en gradins par des failles, témoignent d'un refoulement moins intense, de l’absence de môles rigides, comparables aux massifs hercyniens, qui ont donné à la zone subalpine externe son caraclère spécial et, comme l'a si bien fait voir M. Suess, d’un affaissement considérable du sol autour de l'emplacement actuel de l'Adriatique. Ces fractures et ces flexures du Bellunais vont en effet, à l'Est, quitter la direction alpine et s'incurver vers le S. S. E. (Dalmalie) sui- vant le contour adriatique et méritant la déno- mination de « périadriatiques » qu’on leur a quel- quefois appliquée. Ainsi, quoi qu'il en soit de ses légères imperfec- lions, la carte de M. Noë permet d’embrasser d’un coup d'œil le vaste ensemble alpin et fournit une base excellente aux recherches à venir. W. Kilian, Professeur de Géologie à la Faculté des Sciences de Grenoble. ! Ann. des sciences géologiques, t. XX. mm titi tte) À à BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 19 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Gomes Teixeira (EF), Director de Academia Poly- technica do Porto. — Curso de Analyse infinitesi- mal. Calculo differencial, 2° édition 1890, Porto, typographia occidental, rua da fabica, 66. Nous avons rendu compte dans la Revue du 30 juin 1890 du volume que M. Gomes Teixeira venait de faire paraître sur le calcul intégral ; une seconde édition du volume sur le calcul différentiel a été publiée récemment. Nous ne pouvons que répéter à cette occasion ce que nous avons déjà dit sur l’impor- tance de cet ouvrage qui est très complet et très au courant de toutes les nouvelles recherches, EAUX Longridge (James Atkinson), — Smokeless Powder and its influence on gun Construction. Mem. Ins. Civil, Eng.; hon mem. of England Isntitute of mining and mechanical engineers. — Spon, 125, Shrand. London; New-York, 12 Cortland Street, 1890. M. Fénéridee a publié cent un traité de balis- tique interne “ont ila été rendu compte dans la Revue (n° 11, 15 juin 1890, page 340) ; au cours du dernier cha- pitre de ce traité, il faisait allusion aux nouvelles pou- dres sans fumée qui attirent si vivement en ce moment l'attention des artilleurs ; il vient de compléter son ou- yräge en consacrant à ces poudres un petit opuscule de 50 pages. Il examine successivement quels sont les avantages des poudres sans fumée dans les canons d'acier forgé du nouveau type, quelle sécurité elles présentent, quelles modifications leur usage entraînera dans la fa- brication des canons, quels effets d’érosion elles pro- duisent, quel degré ‘de conservation elles possèdent. Les remarques de! M. Longridge, sans donner la solution complète de ces questions, offrent un très réel intérêt, IL; (O Dvelshauvers-Dery (V.), Professeur de mécanique à l'Université defLicge. — Le Révélateur Donkin et l'action des parois des cylindres à vapeur. Mé- mode présenté à la Société industrielle de Mulhouse, 1890. L'appareil présenté à la Société industrielle de Mul- house par M. Dwelshauvers-Dery et destiné aux mesures thermométriques et calorimétriques des phénomènes dont la machine à yapeur est le siège, complète avec les freins, les dynamomètres, les indicateurs de pres- sion, l'ensemble des appareils de mesure nécessaires à l'étude des machines à vapeur. Le point de départ du Révélateur Donkin est un appa- reil très sommaire disposé pour l'étude des condensa- tions et des vaporisations qui se produisent dans la machine à vapeur à la surface des parois intérieures du cylindre, Dans l’état actuel, le Révélateur permet d'étudier la propagation de la chaleur à travers le métal des cy- lindres, les effets de l'enveloppe, de la surchauffe, des grandes et des petites vitesses; c’est, en un mot, un indicateur d'échanges de chaleur, aussi bien que de pro- pagation de la température à travers les parois métal- liques. L'appareil peut s'adapter sur les cylindres aussi faci- lement qu'on y adapte l'indicateur de pression. La va- peur y arrive dans un COLE cylindrique formé du même métal que le cylindre. Dans l'épaisseur des pa- rois de ce cylindre, et à diverses distances de son axe, | | ET INDEX sont creusés de petits puits où des thermomètres plongent dans le mercure, La température de la vapeur est prise sur un thermomètre placé dans un petit cy- lindre métallique à parois très minces et plongeant au milieu de la vapeur, Ilest difficile d’ ADR QE dès maintenant les services que peut rendre cet appareil; mais il faut noter qu ‘il a permis d'établir indubitablement les faits suivants : Vers les parois intérieures des cylindres, et sur une certaine épaisseur, la température est variable; ce qui indique que tantôt la paroi cède de la chaleur à la va- peur, et que tantôt c'est la vapeur qui cède de la cha- leur à la paroi. Sur la partie complémentaire de l’é- paisseur, qui est grande relativement à la précédente, la température est constante en chaque point, ce qui indique que le transport de chaleur se fait dans le même sens, vers l'extérieur. À. GOUILLY. Thurston (R.H.). — A practical methodfor redu- cing the iaternal wastes of the steam-engine. — American Society of civil Engineers, New-York, 1890. On sait que la majeure partie de la chaleur perdue dans la machine à vapeur est due auxéchanges à travers la paroi métallique du cylindre et du piston, Hirn a, le premier, appelé l'attention sur l'importance capitale de ce phénomène et M. Dwelshauvers à publié, sur ce point, des études célèbres. Depuis lors, de nombreuses tentatives ont été faites pour réduire cette perte, ainsi que celle qui se produit par la condensation. On à surchauffé la vapeur, on a imaginé les enveloppes, on a construit des compound, on a cherché à rendre moins bonnes coque trices les surfaces internes du cylindre et du piston, C’est à ce dernier système que se rapporte la communication de M. Thurston; voici, en principe, quel est son système : On sait que la fonte ordinaire contient de 2 à 6 0/0 de charbon; si on la soumet à une lente oxydation, le fer disparait et le charbon reste à la surface sur une profondeur qui dépend de la méthode suivie et de la durée de l’action ; on a ainsi diminué la conductibilité à la chaleur de cette surface. Un des meilleurs procédés pour produire l'oxydation dont il s’agit consiste, d’après M, Thurston, à traiter la fonte par un mélange d'une partie d'acide sulfurique dans dix parties d’eau et de laisser l’action se produire pendant une dizaine de jours. Il soumet les parties internes de la machine à ce trai- tement, convertissant ainsi leur surface en une matière fortement chargée de carbone et, par suite, comparati- vement médiocre conductrice. Bien e ntendu, les parties frottantes ne sont pas traitées ainsi; mais, comme elles sont entretenues à un haut degré de poli, ‘leur pouvoir conducteur est très diminué, “etelles ont, au point de yue qui nous occupe, un intérêt moindre. Les surfaces préparées comme il vient d'être dit et rendues ainsi un peu poreuses sont enduites alors d’une huile mauvaise conductrice qui, en même temps qu’elle diminue enccre leur conductibilité, augmente leur résistance aux agents de destruction, aux varia- tions de pression et de température, à lhumidité. Les expériences faites dans les premiers mois de 1890, au laboratoire de Sibley College, Cornell Univer- sity (New-York), semblent montrer que le procédé a un réel intérêt pratique. M. Thurston pense que ce simple traitement réduirait la perte dans le cylindre « de la moitié au moins », ce qui correspondait à 10 0/0, et même pour les machines de petites dimensions, à 20 0/0 20 BIBLIOGRAPIHE. — ANALYSES ET INDEX de la vapeur consommée, Ce résultat, s'il était ac- quis, serait considérable; les premiers essais entrepris ne sont pas suffisants pour qu'on puisse se prononcer d’une facon certaine; il faut espérer que M. Thurston poursuivra ces très intéressantes recherches. J. Poucer. 2° Sciences physiques. Brillouin (M)—Principes genéraux d’une théorie élastique de la plasticité et de la fragilité des corps solides. Annales de l'Ecole Normale supi- rieure, décembre 1890, « La théorie élastique des corps plastiques ot fragiles est un de ces sujets délicats sur lesquels on ne peut espérer atteindre la vérité par l’expérimentation pure : la preuve est faite surabondamment par le nombre pro- digieux de mémoires de mesures qui, chacun à son tour, obscurcissent davantage un sujet déjà peu clair, » Ainsi s'exprime M. Brillouin dans son mémoire : il croit à la nécessité de faire des hypothèses et de les développer jusqu'au point où elles peuvent être compa- rées avec l'expérience, Celle qu'il introduit n’est pas, à proprement parler, une hypothèse ; c’est un principe extrêmement simple qui est contenu en germe dans la théorie ordinaire de l'élasticité : seulement il fallait l'y apercevoir et le mettre en évidence, Pour un corps isotrope soumis aux lois de Hooke, dans lequel, par conséquent, les déformations sont pro- portionnelles aux forces déformatrices, les équations qui lient ces quantités sont toujours résolubles par rapport aux forces déformatrices; tandis que si l’on essaie de les résoudre par rapport aux déformations, il pourra y avoir indétermination, A tout système de déformations correspond un système de forces élastiques déterminé, mais la réciproque.peut n'être pas vraie. Un des cas d’indétermination est bien connu : le cas où la rigidité est nulle : le corps est alors fluide, Si on le soumet à des forces tangentielles ou à des pressions normales inégales en divers sens, il ne prendra pas un état d'équilibre défini : il se séparera, il coulera. On conçoit très bien que, de même, dans un corps solide donné, un système particulier de forces défor- matrices puisse faire naître un système de déforma- tions indéterminé, Sice système de déformations a lieu sans variation de densité, la déformation peut s’ac- croître sans rupture : le corps est plastique. Si elle a lieu avec variation de densité, elle entraine la rupture dans la région où la dilatation cubique est la plus grande : le corps est fragile. On voit combien ce principe est simple et fécond : il pourra permettre de faire rentrer, sans introduire au- cune théorie moléculaire nouvelle, les propriétés des corps fragiles et plastiques dans les propriétés géné- rales des corps élastiques auxquels s'applique la loi de Hooke : les deux mémoires qu'annonce M, Bril- louin ne sauraient manquer de jeter une vive lumière sur la question. Bernard BRuNuEs. Chapel d'Espinassoux (G, de). — Traité pra- tique de détermination du temps de pose, — 1 vol., (Bibliothèque photographique), Paris. Gauthier- Villars, 55 quai des Grands-Augustins, 4890, M. de Chapel d'Espinassoux a exposé avec beaucoup de méthode, dansun espace relativement restreint (120 pages in-8°) {ous les points essentiels que le photo- graphe à à approfondir pour déterminer le {temps de pose, le facteur principal de toute opération photographique. L'ouvrage débute par une classification des différentes données du problème : données naturelles dépendant de la lumière et du sujet; données optiques dépendant de l'objectif et du diaphragme; données chümiques dé- pendant de la nature de la couche sensible ainsi que du révélateur; et enfin données anormales ou mécani- ques, dépendant des mouvements du sujet dans les épreuves instantanées, Nous n’entrerons pas dans le détail de l'exposition : disons seulement que l’auteur donne des formules sim- ples pour déterminer le temps de pose suivant les divers cas, suivant la saison, l'heure, etc., et Ja nature de l’objet. Un tableau de temps de pose en fractions de seconde, pour les vues instantanées, termine ce livre extrèmement intéressant. M. de Chapel d’Espinassoux n'exclut pourtant pas l'usage rationnel des photomètres et recommande,dans les cas spéciaux, l'usage des deux meilleurs : le pho- tomètre de M. Decoudun et surtout le photomètre de M. Louis Olivier, Enfin il préconise avec raison l'usage des plaques isochromatiques et, quand c’est possible, le procédé si remarquable et si simple indiqué par M. Lippmann pour obtenir des épreuves des objets colorés en valeur vraie. La photographie du paysage ne saurait que ga- gner à ne plus avoir les prairies et les arbres en noir profond. M. de Chapel d'Espinassoux a pensé qu'il était utile de faire connaitre aux amateurs cette méthode déjà connue des savants : je ne puis que l’approuver en cela, L'auteur, dans sa préface, adresse surtout son ou- vrage aux débutants : qu'il me permette de lui dire que son livre, utile à ceux-ci, serait pourtant d’une lecture profitable à plus d’un photographe de profes- sion, Il y a là excès de modestie, et c’est la seule cri- tique que je puisse faire de cet excellent ouvrage qui a sa place marquée dans la bibliothèque de tout pho- tographe, amateur ou praticien. Alphonse BErGEr, Pickering, — Etude sur la nature de la disso- lution. Jowrnal of the chemical Society, 1890. Ce volumineux mémoire contient l’application à un certain nombre de cas de la méthode proposée par M. Mendeleeff pour l'étude des dissolutions, M. Men- deleeff suppose que la densité d’une dissolution est proportionnelle au poids de corps dissous, Tant qu'il n'y aura qu'un seul corps au sein du liquide. la courbe qui représentera la densité en fonction de la concen- tration sera une droite, S'il se forme au contraire, dans la dissolution, des hydrates partiellement disso- ciés, la courbe prendra une forme plus ou moins com- plexe; mais la disparition d’un hydrate déterminé cor- respondra toujours à un point anguleux de la courbe. En somme, d’après cela, la recherche des hydrates définis qui existent à l’étatde dissociation partielle au sein d’une dissolution, revient à la recherche des points anguleux de la courbe représentant les densités ou une autre pro- priété.Pour faciliter la recherche de ces pointsanguleux, M. Mendeleeff construit les courbes en portant en or- données, non les densités, mais les différentielles suc- cessives de cette variable, On obtient ainsi des courbes plus simples, et après un nombre suffisant de diffé- renciations, des droites, mais sans que les points angu- leux soient déplacés. En opérant sur l'acide sulfu- rique, M. Mendeleef avait trouvé que la première diffé- rencialion conduisait à une courbe formée d’une série de droites, M. Pickering, en opérant sur le même corps, est obligé d'aller jusqu'à la seconde différen- cialion et il conclut, de la forme de sa courbe, à l'existence de 17 hydrates définis de l'acide sulfurique, dont les formules varient de 36 SO*H? + H20 à SO‘ H? + 5000 H20, Il applique le même procédé d'étude à la chaleur de dilution et à la conductibilité électrique, Les résultats ne présentent qu'une concor- dance très faible avec ceux de MM. Mendeleeff et Cromp- ton, et mème entre eux. La méthode employée par M. Pickering a recu de M. Arrhénius des objections très graves : il ne semble pas, notamment, que l’on doive chercher à faire coin, cider les points anguleux avec des compositions molé- culaires définies, car la place de ces points anguleux varie avec la température à laquelle on fait les me- sures, Enfin le principe de la méthode est lui-même BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 94 attaquable. Dire que la courbe correspondant à la seconde différenciation est formée d'une série de droites, cela revient à dire que la densité est repré- sentée par une série de courbes du troisième degré. Comme on n’a qu'un nombre fini d'expériences, on peut trouver une infinité de systèmes de courbes pas- sant exactement par tous les points expérimentaux. La divergence des résultats obtenus par les différents expérimentateurs montre que cette indétermination existe bien en réalité. Georges CHARPY. 8° Sciences naturelles. Billet (A.). -— Contribution à l'étude dela morpho- logie et du développement des Bactériacées. Bul- letin scientifique du Nord de la Franceet de la Belgique, t. XXI, 1890. La grande majorité des nombreux travaux auxquels. depuis une dizaine d'années, les Bactériacées ont donné lieu, ont élé entrepris pour élucider le rôle de ces microorganismes dans les fermentalions et la pro- duction des maladies, La morphologie des microbes a été jusqu'ici à peu près délaissée et reste presque tout entière à faire. M. Billet, par de patientes et longues recherches, a essayé de combler en partie cette regret- table lacune, en suivant l’évolution de quelques espèces dans un même milieu et les modifications que subis- sent ces espèces sous l'influence du changement de milieu, Deux théories sont actuellement en présence relati- vement à la morphologie des microbes, Les uns, avec Cohn, sont partisans de l’immutabilité des espèces et des formes; les autres, avec Ray-Lankester, Cienkowski et Zopf admettent le polymorphisme ou pléomorphisme de ces êtres, c'est-à-dire que les différentes formes peuvent dériver les unes des autres, Les observations et les expériences faites par M. Billet sur le Cladothrix dichotoma etle Bacterium parasiticum, ainsi que sur deux espèces nouvelles de Bactéries, le Bacterium Bulbianii et le B. osteophilum, l'ont conduit à admettre que la plupart des Bactéries passent par plusieurs phases pen- dant le cours de leur développement, et suivant les milieux où elles vivent, Ces phases sont au nombre de quatre : élat filamenteuæ, état dissocié, état enchevétré, état zoogléique. Ces différents états correspondent chacun à un grou- pement morphologique particulier des éléments bac- tériens, en rapport avec des conditions spéciales de milieu. Parmi ces conditions de milieu, les unes sont intrinsèques, c’est-à-dire inhérentes à la nature nu- tritive même du milieu; d’autres sont extrinsèques, c'est-à-dire liées à des phénomènes extérieurs, tempé- rature, pression, quantité plus où moins grande d’oxy- gène elc. Aussi la succession de ces différentes phases n'a-t-elle rien de fixe, ni de constant dans le cours du développement de chaque Bactériacée. Tel ou tel état, sous des conditions de milieu les plus diverses,, peut évoluer rapidement vers un autre état, ou même faire complètement défaut. D'autre part, si le milieu ne se modifie pas, on peut conserver le même état pendant longtemps, sans que lui-même se modifie, L'état filamenteux est l’état végétatif par excellence. Sous cet état les éléments bactériens, qu'ils naissent directement de la spore, ou qu'ils proviennent d’un autre état, se disposent bout à bout en séries longitu- dinales, où en chaines articulées, dont chaque article est représenté par un élément. Les éléments en général immobiles se présentent sous trois formes principales : formes rectilignes (Leptothrir, Bacillus, Bacterium), formes courbes (Vibrio) et formes spiralées (Spürillum Spü'ochæte), Ces formes proviennent de l'élément rec- tiligne primitif et peuvent passer de lune à l’autre sous la moindre influence. Il ne saurait donc être ques- tion de polymorphisme ou de pléomorphisme, dans le sens où un grand nombre d’observateurs semblent le comprendre, et qui, selon eux, tendrait à faire croire que chaque forme d’élément bactérien, représentant une espèce ou même un genre spécial de Bactériacée, se transformerait en une espèce nouvelle en changeant de forme. L'état dissocié est avant tout une phase de dissémi- nation; il est caractérisé par la mise en liberté des élé- ments constitutifs de l’état filamenteux, Les éléments sont alors essentiellement mobiles et se présentent sous toutes les formes qu'on rencontre dans l’état fila- menteux: ils continuent à se multiplier par division et restent quelquefois accouplés deux à deux ou en chainette d’un petit nombre d'éléments. L'état enchevètré se présente sous forme de filaments enchevêtrés les uns dans les autres, comme autant d'écheveaux à mailles plus ou moins serrées, Il cons- itue un état transitoire entre l’état filamenteux et l’état dissocié, ou entre un de ces deux états et l’état zoogléique. Dans la dernière phase du cycle évolutif des Bacté- riacées, lPétat zoogléique, les éléments se groupent suivant certaines dispositions qui paraissent varier pour chaque espèce. Autour de chaque élément se sé- crète une gangue gélatiniforme épaisse et l'élément ainsi encapsulé devient immobile, Dès lors, l’état z00- yléique présente une succession de stades auxquels auteur attache une grande importance à cause de leur constance : 1* chaque élément est entouré d’une gangue propre; 2 es éléments se segmentent dans deux di- rections et forment des groupes en tétrades, se déve- loppant uniquement en superficie (stade Merismopeuia) ; 3° les éléments se segmentent dans les trois direc- tions (stade Surcina); 4° la division des éléments se poursuit activement et donne lieu à la formation de capsules agglomérées, renfermant un nombre illimité d'éléments se présentant sous la forme Bacterium, (stade Ascobacteria où Glæocapsa). Ges groupes de cap- sules affectent entre elles des dispositions caractéris- tiques, sous forme arborescente (Cladothrix dichotoma), sous forme cérébroide (Bacterium Balbiant), sous forme aciniforme (B. osteophilum), et sous forme losangique (B. parasiticum). Get élat zoogléique définitif avec son allure propre et constante, pour telle ou telle Bacté- riacée, parait devoir conslituer, selon M. Billet, un ca- ractère de premier ordre, pour la différenciation des des espèces de Bactériacées. Suivant lui, une Bacté- riacée ne peut être spécifiée que d’après l’ensemble de ses caractères ; il ne sufhit pas d'indiquer les formes qu'on rencontre dans tel ou tel milieu, il faut recher- cher si telle ou telle forme reste constante et identique à elle-même suivant les milieux où on la cultive. Si les observations de M. Billet n’ont pas peut-être toute la portée générale qu’il tend à leur donner, puis- qu'elles ne sont relatives qu'à un petit nombre d’es- pèces, elles ont le grand mérite d’avoir été poursuivies avec toute la rigueur scientifique que comportent de semblables recherches; son mémoire comptera assu- rément parmi les meilleurs travaux sur la morpho- logie des microbes, F. HENNEGUY. Certes (A.). — Sur un Spirille géant développé dans les cultures de sédiments d’eau douce d'Aden. Bull. de la Soc. Zool. de France, XIV, p. 322. En rendant compte des études de M. Certes sur les Protozoaires du cap Horn, nous montrions de quelle utilité pouvait être la récolte, puis la mise en culture des plantes desséchées ou des sédiments provenant de régions dont la faune est encore mal connue, L'inté- ressante note que nous résumons ici (en utilisant aussi des observalions inédites, communiquées par l’auteur) nous en donne un nouvel et frappant exemple. En cullivant avec les précautions d'usage des Con- ferves desséchées, recueillies par M. le D'F, Jousseaume à l'entrée des citernes d’Aden, M. Certes a observé, entre autres organismes, un remarquable Spirille de taille gigantesque, comprenant jusqu'à 70 tours de spire et long, suivant le nombre de ceux-ci, de 5 à 250 p; la 19 ol largeur est de 7 à 8 p. Qu'il soit vivant (fig. 1, 3, 5 et 6), ou fixé par l'acide osmique (fig. 2 et 4) l'organisme Fig. 1 à 6. présente des tours de spire étroitement juxtaposés; de l’entrecroisement des filaments sur les parties laté- rales résulle un aspect singu- lier : on dirait une double rangée de perles ou de spores. Mais celles-ci se voient ra- rement et ne se présentent d’ailleurs pas avec une si par- faite régularité (fig. 6). Elles sont ovoides et sont mises en liberté par dissolution du fi- lament. Le Spirille non sporifère progresse ou recule au moyen d'ondulations soit verticales, soit horizontales; il tourne rarement sur son axe. Ce mode de locomotion est, au contraire, celui des individus sporifères. Dans aucun cas, des cils vibratiles ou des fla- gellums n’ont pu être apereus; 7 mais l'existence de sembla- bles appendices semble être démontrée par ce fait que les individus fixés par une de leurs extrémités déterminent dans le liquide un tourbillon énergique. La nature microbienne de cet organisme de grande taille est évidente ; M. Certes le dé- signe sous le nom de Spiro- bacillus gigas. Monté dans le baume, il se déroule plus ou moins sous l’action de la cha- leur (fig. 7). Il est très com- ) parable, sauf pour la taille et la couleur, au Sp. Cienkowski Metchnikoff, parasite des Daphnies. Fio. 3 et 8. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Un fait encore inexpliqué mérite aussi d’être men- tionné, Des exemplaires recueillis pendant l'hiver de 1888 à 1889 purent être revivifiés plusieurs mois de suite, puis cessèrent de donner des cultures, même à l'étuve, De nouveaux essais tentés en juin 1890 ont pleinement réussi. Il semble donc que la reviviscence ou la reproduction des organismes desséchés dépende, outre les conditions de température, de quelques autres conditions encore indéterminées. D'R. BLancranD, Hérouard (Ed.), Préparateur de Zoologie à la Sor- bonne. — Recherches sur les Holothuries des côtes de France. Thèse pour le doctorat ès sciences; in-8° de 170 pages avec 8 planches en couleur. Archives de Zoologie expérimentale, 2° série, vol, 7, 1890. Les Holuthuries représentent probablement le groupe le plus ancien des Echinodermes; aussi leur étude est-elle d’une haute importance au point de vue phylogénique. Les résultats acquis jusqu'ici man- quaient trop souvent de précision et de généralité; aussi M. Hérouard a-t-il pu combler de nombreuses lacunes dans l’ordre des Pedata, qu'il a spécialement étudié. Dans la description des téguments et des organes, Pauteur insiste sur les rapports d’une couche de tissu conjonctif lâche, qu'il appelle coucne lacunaire et dans laquelle se déplacent en grand nombre les amibocytes chargés de la nutrition des tissus. A propos de la for- malion des plaques calcaires, il émet une théorie nou- velle; pour lui, chaque plaque est précédée d’une mo- saique de cellules hexagonales; le calcaire se dépose le long des parois de contact, de manière à figurer / \ . V : , , d’abord un | puis un réseau hexagonal, en ménageant naturellement des trous correspondant aux noyaux cellulaires, trous qui ne sont jamais comblés, M. Hérouard donne d'excellents détails sur la cons- titution du bulbe aquo-pharyngien : les canaux ambu- lacraires radiaux, peu après leur naissance, communi- quent par de petits orifices avec les tentacules buccaux, qui sont par conséquent des ambulacres modifiés et non point des diverticules directs de l’anneau, comme on le croyait autrefois, L'espace péripharyngien, com- pris entre la portion dilatée et interne des tentacules buccaux et le tube digestif, traversé par de nombreux tractus rayonnants, n’est qu'une dépendance du cœæ- lôme, avec lequel il communique par cinq grands trous interradiaires. M. Hérouard montre que les nerfs radiaux sont divi- sés sur toute leur longueur en deux bandes, l’une mince et interne, l’autre beaucoup plus épaisse et externe, Entre le ruban radial et le canal ambulacraire. se trouve un sinus (canal subnervien); au-dessus du ruban, du côté de extérieur, il y a un autre espace, dit extranervien, qui se prolonge d’ailleurs au-dessus de l’anneau nerveux oral, Ces deux cavités, de valeur et d’origine différentes, forment ce qu'on appelait autre- fpis les espaces périhémaux ou périnerviens. L'appareil lacunaire sanguin (système amæbophore de M. Hérouard) est constitué par un anneau péripha- ryngien diffus, qui recoit les absorbants intestinaux (lacunes marginales) et émet cinq lacunes radiales logées dans la paroi externe des canaux ambulacraires, De la lacune marginale dorsale (ou externe) se détache une lacune génitale (canal problématique) qui aboutit aux organes génitaux. A propos des organes arborescents, dont les fonctions respiratoire et excrétrice sont bien connues, l’auteur montre qu'ils agissent aussi comme appareils hydro- statiques, se vidant lorsque l'animal veut’se contracter, se remplissant lorsqu'il veut s'épanouir. Le chapitre relatif aux processus mécaniques de la rétraction et de l'extension du corps est particulièrement intéressant. D’après M. Hérouard, les tubes de Cuvier, que Sem- per et Jourdan ont considérés comme organes de BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX défense, n'auraient pas cette significalion : ce seraient des organes arborescents transformés, adaptés à des fonctions glandulaires spéciales. 11 donne de bons dé- fails sur le processus de leur dilatation par l’eau du cloaque et sur leur rejet hors du corps de l'Holothurie ; il considère ce rejet comme le premier acte de Pexpul- sion du tube digestif, qui se produit, comme l’on sait, lorsque l'animal est irrité ou mal portant, M. Hérouard termine son travail par la liste des es- pèces qu'il a rencontrées dans l'Océan et la Méditer- ranée, aux stations fondées par M. de Lacaze-Duthiers à Roscoff et à Banyuls; l’auteur, ayant pu étudier un grand nombre d'échantillons vivants, a rectifié plu- sieurs descriptions et créé trois espèces, le Colochirus Lacazii et deux Thyone (T. subvillosa et Roscovita). En résumé, ce travail fournit aux morphologistes d'excellents renseignements anatomiques el physiolo- giques, qui permettront de comparer avec plus de fruit les Holothuries avec les Echinodermes plus récents, L. CuÉNoT. 4° Sciences médicales. Spilimann (P.), Professeur à la Faculté de Médecine de Nancy. — Manuel de diagnostic médical et d’explo- ration clinique. 2° édition. 1 volume G. Masson, 120, boulevard Saint-Germain, Paris, 1890. Un bon manuel doit être clair et concis tout en étant très complet. Le petit livre publié par le Professeur Spillmann possède au plus haut pointces qualités. Il se caractérise en outre par ce fait que, toutenconservantce qu'il y a de bon dans les traditions de l’ancienne eli- nique, l’auteur a parfaitement montré l'utilité pratique des nouveaux moyens d'investigation mis à notre portée par les progrès de la chimie et les découvertes de la microbiologie. C'est ainsi qu'il est pour les pra- ticiens un aide-mémoire très utile, pour les étudiants un excellent livre d'instruction. D'E. DE LAVARENNE, Audry (Ch.). — Etudes sur les tuberbuloses du pied. Anatomie pathologique. Revue de chüurgie, Paris, aoûi 1890, p. 657, L'examen d'un grand nombre de pièces anatomiques, recueillies dans le service de M. Ollier à Lyon, conduit l’auteur à distinguer dans les tuberculoses du pied une série de types pouvant être différenciés les uns des autres : 1° Tuberculose du tarse postérieur, répondant à l’an- cienne tumeur blanche du cou-de-pied, d’origine syno- viale et tibio-péronière généralement, exceptionnelle- lement partie de l’astragale ou du calcanéum, se développant surtout dans l'articulation tibio-tarsienne et accessoirement dans la sous-astragalienne. 2° Lésions associées du calcanéum et de lastragale ; ce type comprend le plus grand nombre des tubercules astragaliens qui évoluent dans la tête ou le col de l’as- tragale, se propageant le long du ligament interosseux et par lui à la grande apophyse du calcanéum. Les ar- ticulations sous-astragaliennes sont, bien entendu, toujours malades; l’interligne de Chopart n’est toutefois que peu atteint, 3° Tuberculose centrale juxta ou intra-épiphysaire du calcanéwum. Cette tuberculose peut aboutir à des cavités s'étendant jusque sous le périoste: quand elle envahit les articulations voisines, c’est presque toujours les sous-astragalienne qu’elle gagne, quelquefois la petite séreuse calcanéo-cuboïdienne, mais on n’observe qu'ex- ceptionnellement la diffusion des fongosités entre toutes les surfaces osseuses du tarse. 4° Tuberculose antéro-tarsienne ; débutant par un quelconque des pelits os du tarse antérieur, elle gagne le plus souvent la presque totalité de linterligne de Lisfranc en ayant, entamant volontiers les métatarsiens ; en arrière elle ne dépasse guère celui de Chopart, »° Lésions des métatarsiens et des phalanges. D'une manière générale on peut dire que toutes ces tuberculoses du pied sont anatomiquement des lésions localisées par rapport à l’ensemble du squelette du pied et, en mème temps, des lésions totales par rapport à chaque segment osseux; la première de ces proposi- tions légitime les opérations partielles pratiquées sur le pied tuberculeux, puisqu'elles peuvent être des opé- rations complètes; la seconde permet de conclure que, dans la grande majorité des cas, il faut agir sur la tota- lité de l'os atteint, c’est-à-dire ne recourir qu'à des résec- tions typiques régulières. Dr HARTMANN. Bertillon (Alphonse). — La Photographie judi- ciaire, avec un appendice sur la classification et l'identification anthropométriques. (Paris, Gauthier- Villars, 55 quai des Grands-Augustins, 4890.) Tout le monde connaît l’ingénieux mode de signa- lement anthropométrique en usage à la préfecture de police de Paris, grâce auquel aucun récidiviste ne doit plus espérer le succès dans la dissimulalion de son identité. L’inventeur de ce système d'identification, M. Alphonse Bertillon, en a exposé le mécanisme et les avantages dans une précédente brochure dont le présent ouvrage peut être considéré comme un com- plément. Sa compétence et son expérience en pareille malière ne sauraient être mises en doute, car le ser- vice important qu'il dirige depuis plusieurs années au dépôt opère sur une clientèle quotidienne d’une cen- taine d’inculpés, et son succès s'affirme annuellement par la reconnaissance de 400 à 500 récidivistes revêtus d’un nom sans tache, mais faux. Jusqu'à ces sept der- nières années, le service photographique avait été abandonné aux inspirations d’un personnel de prati- ciens dont la technique habile et artistique laissait beaucoup à désirer sous le rapport de la précision indispensable aux recherches judiciaires. M. Alphonse Bertillon indique dans son livre les raisons qui l’ont guidé dans la réorganisation et la régularisation de ce service. Il s’agit d’abord des causes d'erreur et des conditions de succès dans l'exécution d’une photographie judi- ciaire, Quelle pose et quel éclairage doit-on donner au modèle ? Quelle réduction et quel format convient-il d'adopter? Quelles sont les diverses conditions à remplir pour produire l’image la plus facile à recon- naitre, la plus facile à identifier avec l'original ? L’au- teur examine süccessivement: 1° l'identification de deux photographies; 2 l'identification d’une photo- graphie avec un détenu; 3° l’identification avec une personne libre, 4° avec un souvenir. Il étudie l’utilisa- tion des diver:es poses de face, de profil, en buste et en pied. Autant de questions curieusement analysées et intéressantes même pour les personnes les plus étrangères à l’art de la photographie, mais particu- lièrement utiles à étudier pour les magistrats, les poli- ciers, les jurés, sans parler des photographes et de leurs clients. Plusieurs planches en photogravure, accompagnent cette partie de l'ouvrage. 11 y en a deux qui démontrent d’une facon frappante les difficultés de l'identification par la photographie. M. Alphonse Bertllon conduit ensuite le lecteur dans son atelier judiciaire de la Préfecture de police pour lui en décrire et lui en expliquer la disposition, ainsi que la classification anthropométrique des cent mille photographies exécutées jusqu'à ce jour. Enfin, partant de ce fait: qu'on ne regarde bien, qu'on ne voit bien et qu'on ne retient bien que ce qu’on est capable de décrire avec exactitude, l’auteur termine son intéressant petit livre par une analyse descriptive de la figure humaine. On ne s'imagine pas combien, avec un nombre relativement faible de termes fort simples dont la signification et l'emploi seraient bien précisés, on ne s’imagine pas, disons-nous, Com- bien il serait facile de décrire correctement et fidèle- ment un visage, une tête humaine, et combien un portrait parlé avec précision donne de vivacité à l’image une fois vue qui se conserve dans notre cerveau. D' L. MANOUYRIER, 24 ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance publique annuelle du 29 décembre 1891 Discours du président sortant : M. Hermite. Eloge de Louis Poinsot; notice sur Cosson, par M. le secrétaire perpétuel. J.Bertrand.—Ces deux discours ont été publiés, le lendemain de la séance, dans notre numéro du 30 décembre 1890. Prix décernés. Grand prix des sciences mathématiques : M. Paul Painlevé., — Mention honorable : M. Léon Autonne, Prix Francœur : M. Maximilien Marie, Prix Poncelet : M. le Général Ibañez. Prix extraordinaire de six mille francs : Trois prix de deux mille francs sont décernés à MM. Madamet, Ledieu et Cadiat et Louis Favé. Prix Montyon : M. le colonel Locher, Prix Plumey : M. Jules Ernest Boulogne. Prix Lalande : M.J. V. Schiaparelli. Prix Valz : M.S$. de Glasenapp. Prix Janssen : M. C. A. Young. , Prix Montyon ; M. le D' Paul Topinard, — Mention honorable : M. Dislère, Prix Vaillant : M. Marcel Bertrand. Prix Fontannes : M. Ch. Depéret. Prix Gay : M. Franz Schrader. Prix Desmazières : M. Maurice Gomont. Prix Montagne : deux prix sont décernés à MM, Paul Hariot et le Dr Albert Billet. Prix Savigny : deux prix sont décernés à MM. le D' Jousseaume et le R, P. Camboué. Prix Serres : M. Camille Dareste. Prix Montyon : trois prix sont décernés à MM. Félix Guyon, Auguste Olivier et Paul Richer, Trois [mentions honorables sont accordées à MM. Ch. Fressinger, J. Chau- vel et H. Nimieret Ch. Mauriac, Des citations sont accordées à MM. C. L. Coutaret et G. Pichon. Prix Bréant : MM. G. Colin et A. Layet. Prix Godard : M. Samuel Pozzi; mention honorable : MM. Ch. Monod et O, Terrillon. Prix Barbier : M. Claude Martin; mentions hono- rables à MM. Gaston Lyon et B. Dupuy. Prix Lallemand : Mme Déjerine-Klumpke et M. G. Guinon. Prix Dugsate, non décerné. Trois récompenses sont accordées, l’une de douze cents francs à l’auteur de Fuc, non spera, l'autre de huit cents francs à M. le D' Gan- nal et la troisième de cinq cents francs à l’auteur de l'Egalité devant la mort. Prix Bellion, non décerné. Deux encouragements de cinq cents francs sont accordés à MM. H. de Brun et A. Morel Lavallée et L. Bellières. Des mentions hono- rables à MM. le D: Sutils et le Dr Bedoin. Prix Mège : M. Nicaise. no Prix Montyon : Deux prix ex æquo sont décernés à M. E. Gley et à M. E. Wertheimer. Deux mentions honorables à MM. E. A. Alix, G. Arthauld et L. Butte. Des citations à MM. le Dr A. Griffiths et J, Lenoble du Teil. Prix Montyon : M. Casimir Tollet, Prix Jérôme Ponti: R. P. Colin. Prix Trémont : M. Beau de Rochas. Prix Gegner : Paul Serret,. Prix Delalande-Guérineau : le D° Verneau, Prix de la fondation Leconte : M. Prosper de Lafille. Prix Laplace : M. Bailly. Séance du 5 janvier 1891, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. Brioschi : Sur une classe d'équations modulaires. — M. P. Appell : Sur des équations différentielles linéaires transfor- mables en elles-mèmes par un changement de fonction et de variable, — M, G. de Vaux, consul général et chargé d’affaires de France à Quito, a adressé à M. le Mi- nistre des affaires étrangères, une lettre concernant l’é- tat actuel des pyramides élevées en 1740 par de La Condamine, aux extrémités de la base boréale qui a servi à la mesure de l’arc du Pérou, et divers monu- ments qui se rattachent à l’expédition scientifique de Godin, Bouguer et de La Condamine, —- M. Th. Mou- reaux donne la valeur absolue des éléments magné- tiques au 1% janvier 1891, calculés au moyen des ob- servations horaires du 31 décembre et du 1° janvier, au parc Saint-Maur, à Perpignan. — M. Greil adresse une série de Mémoires relatifs à la navigation aérienne. — M, abbé Fortin adresse une note sur les taches solaires d'octobre et novembre (1890.) 20 ScieNcEs PHYSIQUES, — M. Berthelot communique les derniers résultats acquis par la commission des substances explosives; on a étudié la propagation de l'onde explosive dans un liquide, après l'avoir fait pour les gaz et les solides; lexplosif choisi a été le nitrate de méthyle; les pressions de détonation ont été déter- minées avec des appareils crushers à piston pesant; la vitesse de détonation a été mesurée dans des tubes de diamètre variable et construits de substances diverses, caoutchouc, verre, acier; les tubes ont toujours été brisés quelle que fut leur résistance; on peut démon- trer théoriquement que la pression dégagée par cer- tains explosifs détonant dans leur volume dépasse toute grandeur donnée, De l’ensemble des faits exposés, il résulte que l'onde explosive n’existe avec ses carac- tères simples et ses lois définies que dans la détona- tion des gaz, ces lois et ces caractères ne subsistant qu'en partie dans la détonation des liquides et des so- lides, touten demeurant assujetties aux mêmesnotions générales de dynamique physicochimique, -—M, Vieille fait voir qu'en introduisant dans l’étude de l'explosion la notion du covolume des gaz produits et en le compa- rant à la densité de l’explosif, on reconnaît que dans certains cas la vitesse de propagation doit dépasser toute valeur assignable; ce cas limite ne peut être atteint en pratique, parce que les densités qui assu- rent ces vitesses de propagalion indéfiniment crois- santes déterminent également des pressions indéfini- ment croissantes que la résistance des enveloppes ne permet pas de réaliser, — M. H.Rigollot a étudié les spectres d'absorption des solutions d’iode dans divers dissolyants, tant au point de vue du déplacement de la bande d'absorption qu'au point de vue de la quantité de lumière transmise. Ila constaté que pour les corps homo- logues ou pourles composés d’un même radical, servant de dissolvant à l'iode, lorsque le poids moléculaire augmente : 4° la bande d'absorption s’avance très légè- rement vers le violet du spectre, 2° le minimum de la lumière transmise diminue. — M. H. Le Chatelier s’est servi de la variation de la résistance électrique pour étudier les changements moléculaires que la trempe et le recuit font subir à l'acier; il a pu fixer une température de trempe bien détérminée, qui corres- pond précisément à celle de la transformation du car- bone, 730°, — M. Daniel Berthelot a étudié la conduc- tibilité des acides organiques et de leurs sels; entre autres résultats, les chiffres qu'il a obtenus conduisent à cette loi; tandis que la conductibilité varie beaucoup ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Le Qc d’une isomère à un autre pour les acides libres, elle est la même pour les sels neutres de ces isomères. — M. A. Renard en faisant réagir les vapeurs du soufre sur la benzine au rouge-vif a obtenu le {rithiényle; il étudie les propriétés de ce corps. — M. J. Minguin à fait réagir le benzylate de soude sur le camphre eyané. — M. Ed. Mohler indique une méthode d'analyse des eaux-de-vie commerciales qui permet de doser tousles éléments importants à partir de 508 gr. de matière, Il donne la composition de divers spiritueux, naturels et de fantaisie; le cœfficuent d'impureté de ces derniers est considérablement moins élevé que pour les premiers. — M. Fr. Laur appelle de nouveau l’attention de l’Académie sur les relations qui lui paraissent exister entre les variations de la pression atmosphérique et les explosions du grisou. — M. Delaurier adresse une note intitulée « de la combinaison de l'azote avec d’autres éléments chimiques, sans l'intervention des microbes. » 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Letellier a reconnu la présence de l'acide hippurique dans cerlains orga- nes excréteurs de acéphales (glande de Grobben chez le Pecten, organe de Keber chez le Cardium), — M. L. Joubin a suivi le développement des chromato- phores des Céphalopodes ; ces organes proviennent d’une cellule épidermique qui s'enfonce dans le derme et s’annexe des éléments mésodermiques; ceux-ci d’ailleurs ne jouent pas un rôle essentiel dans les mou- vements du chromatophore., — M. R. Moniez montre que le polymorphisme de l’atlantonema rigida, parasite de différents Coléoptèrescoprophages, est encore plus grand qu’on ne le pensait. — M. A. de Grassouvre à reconnu que la craie de Touraine comprend trois ni- veaux bien caractérisés ; elle est synchromede la craie à Micraster coranguinum. — M. W. Kilian a fait l'étude géologique des chaînes alpines entre Moutiers(Savoie) et Bacelomette (Basses-Alpes), au point de vue des terrains antérieurs au jurassique ; il a constaté que les gypses, les cargnueilles inférieurs et supérieurs et les calcaires se remplacent réciproquement dans lesmêmes niveaux. — M. A. Delebecque donne sommairement la (topogra- phie sous-lacustre du Léman, d’après les sondages ré- cents. — M. J.-M. Schnyder adresse une note relative à la maladie de la vigne. M. d'Abbadie est élu vice-président pour l’an- née 1891, L. Larrcoue. ACADÉMIE DE MÉDECINE décernbre 1890. M. Féréol lit le rapport général sur les prix décer- nés en 1890. — M. Bergeron, secrélaire perpétuel pro- nonce l’éloge de Chauffard, Séance du 23 décembre 1890. M. Chervin prouve que dans ledépartement de Lot- et-Garonne ce sont les familles les plus riches qui ont Séance du 16 le moins d'enfants et inversement. — M, Bourgeois (de Tourcoing) lit une note sur le traitement de la tuberculose par le fluorure de sodium. — M. Terrier a observé un cas d’ectasie considérable de la vésicule biliaire qui contenait 24 litres de liquide de couleur gouw-gutte s'étant formé très rapidement. Laparotomie, ablation d’une énorme tumeur constituée par les parois de la vésicule, fistule biliaire, puis cicatrisation. Dans l'intérieur de la vésicule, on trouve un diplocoque remonté du duodénum.—M.Lancereaux a étudié l’ac- tion sur l’organisme des huiles essentielles ajoutées aux boissons alcooliques pour faire l'absinthe, le ver- mouth, les amers, ele., etc, Intoxication aiguë déter- minant des troubles convulsifs; intoxication chronique des troubles de la sensibilité et de l'intelligence ame- nant au gâtisme, Très fréquentes, aujourd’hui, elles sont une cause de danger surtout pour fa classe ou- vrière, à laquelle il serait utile de le faire savoir, On pourrait en diminuer l'usage en les frappant d’un lourd impôt. M. Laborde pense que les accidents dusaux essences sont trèsdifficiles à différencier de ceux produits par l’alcooiï. Il serait nécessaire d’instruire les ouvriers par des conférences que M. Lagneau voudrait voir faire dès l’école primaire, Séance du 30 décembre 1890. M. Péan, pour opérer les rétrécissements de la val- vule iléo-cæcale, produit une dilatation au niveau du rétrécissement en incisant la peau au-dessus du liga- ment de Poupart, de l’épine iliaque antérieure et su- périeure jusqu'à l'épine du pubis, sectionne les museles de l’aponévrose, ce qui met le cæcum à nu. Il attire l'intestin et place au-dessus et au-dessous une anse de caoufchouc, produisant ainsi l’hémostase. Il incise au niveau de la valvule, puis, après lavage antiseptique, résèque la partie malade, Il rapproche ensuite les deux bords de l’incision, en accolant la lèvre iléale à la lèvre cæcale, — Le professeur Le Dentu décrit deux faits d'intervention chirurgicale en cas de lithiase bi- liaire. Dans l’un d'eux, où existait un seul calcul en clavé dans le canal eystique, ce caleul fut extrait et le malade guérit. Séance du 6 janvier 1891. Discours du président sortant, M. Moutard-Martin, — M, Tarnier, président pour 1891, annonce la mort de M. Baillarger et lève la séance en signe de deuil. D' Ed, pe LAVARENNE. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 27 décembre 1890 A propos des objections que M. A, Treille a adressées à la théorie des hématozoaires du paludisme, M, La- veran fait remarquer que les résultats négatifs obtenus par un observa{eur ne sauraient infirmer les résultats positifs obtenus par un grand nombre d’autres, — M. Galezowski à employé avec succès la pyocyanine dans les ulcères de la cornée; cet antiseptique n’est nullement irritant. — M. 4. M. Bloch. a étudié la sensibilité de la peau à la pression et à la traction au moyen d'appareils très simples construits par lui-même; il donne le tableau des différentes parties du corps rangées par ordre de sensibilité décroissante; la limite inférieure de la sensibilité à la pression s'abserve en divers points du visage, où une pression d’un seizième à un huitième de milligramme détermine la sensation. — MM. A. Gilbert et J. Girode ont fait étude bactériologique d’un cas de cholécystite sup- purée avec angiocholite suppurée, dans les deux cas, ils ont trouvé un seul microorganisme, le Bacterium coli commune. — À propos de cette communication, M. Bouchard fait savoir qu'il a trouvé récemment dans un cas d’hépatite suppurée : un bacille voisin du coli commune; les expériences sont poursuivies par MM. Charrin et Roger, qui ont reproduit l’angio- cholite chez le lapin en injectant dans le canal cholé- doque des cultures de ce bacille, — M. Laïller a constaté que la glycérine est toxique pour les serins qui meurent avec les symptômes de l'alcoolisme aigu. Séance du 10 janvier 1891, M. Oechsner de Coninck présente une nole surtrois nouvelles bases pyridiques., — M. Féré signale de nou- veaux cas d'attaques épileptiques localisées d’abord à un groupe de muscles, et s'étendant ensuite, par les progrès de la maladie, au corps entier, — M, Veillon et Jayle ont trouvé dans des abcès du foie consécutifs à de la dysenterie un seul microbe, le Bacterium coli commune, ils font remarquer qu’au début on ne trouvait pas de microbes. — M. Laveran confirme le fait que souvent les cultures faites avec le pus de l'hépatite de la dysenterie restent stériles. — M. Arnaud présente un sujet dont le cœur est transposé. Il présente un la- pin sur lequel il a produit une ectopie rénale double; 26 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES les deux reins ont été amenés sous la peau au travers d'une boutonnière pratiquée dans les muscles lom- baires; l'animal a fort bien survécu et n'a présenté qu'une albuminerie passagère, — M, Pouchet à étudié la moelle du cachalot; cette moolle offre un diamètre plus faible que celui de la moelle d'un bœuf; les sec- lions n'offrent pas toujoursles figures classiques : ainsi entre la première et la deuxième paire cervicale, on n'observe pas sur la coupe les cornes postérieures de la substance grise; M. Pouchet appelle surtout Patten- tion sur l’extrème petitesse relative de cette moelle, — M. Gréhant a constaté chez le lapin que l'acide car- bonique exhalé par les poumons augmente à la suite de l’excitation électrique d’un groupe de muscles. — M. R. Blanchard en examinant les déjections d'un Protée au point de vue de la recherche des parasites intestinaux, a trouvé des corpuseules d'environ 30 vw, qu'il a pris d’abord pour des œufs de nématodes, puis pour des coccidies ; il a pu s'assurer qu'il s'agissait du noyau des cellules épithéliales de l’intestin, Certains tænias des rongeurs ont des œufs dont la coque, mu- nie de deux cornes, prend le nom d'appareil piriforme, M. Blanchard a observé des complications très grandes dans cet appareil, qui est généralement muni de deux longs filaments ignorés jusqu'ici; il propose de décou- per dans les {ænias un genre nouveau, dont le type esi le Tænia pectinata du lapin de garenne et auquel il donne le nom de Moniezia. — M, d’Arsonval présente un appareil destiné à filtrer rapidement sur porcelaine les hquides les plus visqueux: il utilise la pression de l'acide carbonique liquide, L. LAPICQUE. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 26 décembre 1890. M. O. Saint-Pierre a obtenu le tétraphénylméthane CG (C5HS)#, en faisant réagir la bromobenzine sur le tri- phénylméthane potassé. Cet hydrocarbure, d’une sta- bilité remarquable, n’est pas oxydé par l'acide chro- mique en solution acétique. — M. Tissier à préparé l'alcool et l’aldéhyde triméthyléthyliques par réduction du chlorure triméthylacétique par l'amalgame de so- dium, — MM. Béhal et Choay ont constaté que la parachloralimide répond à la formule C5 CI Az3 H£, et en décrivent divers dérivés obtenus soit par l’action de la chaleur, soit par oxydation, — M. A. Carnot indique une méthode de recherche de laluminium dans les aciers en précipitant l’alumine à l’état de phosphate neutre. — M. Vladesco a étudié l’action du chlore sur la méthyléthylacétone, Dr M. Haxrior, SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 18 décembre 1890. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — MM. Hugh L. Callendar et G. H. Griffiihs font une communication sur la déter- mination du point d’ébullition du soufre, et sur une méthode pour étalonner les thermomètres de platine à résistance électrique. Il est bien connu que les ther- momèlres à résistance électrique fournissent la mé- thode la mieux appropriée et la plus exacte pour mesurer les températures entre des limites très dis- tantes, Dans une communication antérieure, (Philosoph- Trans. 1887, p. 161.) l’un des auteurs a établi une for- mule pour comparer les thermomètres de platine aux thermomètres à air entre 0° et 700° C. La note que MM. Callendar et Griffiths présentent aujourd'hui con- tient une description de la méthode employée pour comparer les thermomètres de platine avec les thermo- mètres à air, à une température très voisine du point d'ébullition du soufre. Les expériences ont montré que la température de la vapeur saturée de soufre bouil- lant librement sous une pression de 760 mm, de mer- cure ramenée à OC, et déterminée par le thermo- mètre àair à pression constante normale, est de 444°53C., l'intensité de la pesanteur étant de 980-61, C. @, S. au niveau de la mer el à la latitude de 459, Cette tempé- rature est de près de 4" plus basse que celle qui a été trouvée par Regnault (Mémoires de l’Institut, vol. p. 26, p. 26): les auteurs croient cependant qu'elle est exacte au 10° de degré, et qu'on peut en toute sécurité s'en servir pour étalonner les thermomètres de platine par la méthode décrite, 2° SCIENCES NATURELLES. — M, R. Lyddeker fait une communication sur lidentité générique du Sceparno- don et du Phascalonus. En 1872, sir Richard Owen a décrit et figuré deux mâchoires- inférieures incom- plètes provenant d’une grande espèce de Wombat. aujourd'hui éteinte, trouvées dans le Pliocène du Queensland ; il donna à ce Wombat le nom de Phaseu- lomys (Phascalonus' qgigas. (Philosoph. Trans. A872, p. 257.) Il décrivit plus tard des incisives supérieures incomplètes, qui venaient du Queensland, et de l'Aus- tralie du Sud, et qui étaient caractérisées par leur applatissement et leur forme de ciseaux, et les attri- bua à un genre nouveau auquel il donna le nom de Sceparnodon. En faisant le catalogue des mammifères fossiles de la collection du British Museum, M. Lyddeker a été frappé de ce fait que, tandis que les incisives supé- rieures du Phascalomys gigas sont inconnues, il n’y a pas de molaires qui puissent être rapportées au Sce- parnodon, et il en tira la conclusion qu'en conséquence les dents décrites comme appartenant au Sceparnodon étaient probablement les incisives du Phasealomys giqus : en s'appuyant sur cette supposition, il crut pouvoir af- lirmer que le Phascalomys gigas était génériquement dis- tinct de tous ces wombats existants, et le catalogua en conséquence sous le nom de Phascalonus gigas M décrit maintenant des incisives du Sceparnodon et des mà- choires inférieures du Phascalonus gigas, qui provien- nent de Berigera, Nouvelle-Galles du Sud; il s'appuie sur cette description pour affirmer que nous sommes maintenant en droit de regarder définitivement le genre Sceparnodon comme un genre factice éteint de Wombat et que les incisives dont il s’agit appartien- nent bien à une espèce gigantesque, connue sous le nom de Phascalonus. — M. Sheridan Delepine commu- nique une note sur le foie chez les Vertébrés. Il a décrit l'arrangement des colonnes hépatiques dans le lobule classique du foie, l’arrangement des cana- licules biliaires et le lobule vrai, lobule primaire ou secrétoire, Il montre que les tubes du foie, au lieu d'être groupés autour des veines hépatiques termi- nales, sont distinctement arrangés en petites masses pyramidales qui correspondent aux lobules des autres glandes. IT à fait des observations sur le développe- ment du foie et la structure des cellules hépatiques. — M. le D' A. Ransome fait une communication sur certaines conditions qui modifient la virulence du ba- cille de la tuberculose. Afin de déterminer l'influence de la lumière, de l'air et de la terre sèche, sur la viru- lence du bacille de la tuberculose, il a soumis les cra- chats tuberculeux à l’action des conditions suivantes : 1) Dans une localité où le sol était sec et sableux, et où il ne s'était produit qu'un très petit nombre de cas de phlisie, les crachats ont été placés en pleine lumière et exposés à d'abondants courants d'air pur, 2) Ils ont été mis dans les mêmes conditions, mais tenus à l'abri de la lumière, 3) On les a placés sur le bord de la fe- nètre d’une petite maison mal ventilée, sans cave, bâtie sur un sol d'argile, à Manchester. 4) Dans un coin sombre d'une chambre à coucher de la même maison, où trois décès par tuberculose avaient eu lieu pendant ces six dernières années. 5) Les crachats ont été exposés à l'air qui venait d’une salle d’un hôpital de phtisiques. Les résultats des expériences indiquent que Pair pur, la lumière, le sol sec et sablonneux ont une influence très nette sur l’atténuation de la viru- lence du bacille de la tuberculose; que l'obscurité nuit en quelque mesure à cette action désinfectante, mais que la lumière, si les autres conditions sont dé- favorables, est incapable à elle seule de détruire le virus, Richard A. GRÉGORY. ACADEMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 2 SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 5 janvier 1891, Il est donné lecture de quelquesnotices nécrologiques, entre autres celle sur Sir Henry par M. Coutls Trotter. Sir Henry ayant été élumembre correspondant de l’Ins- litut de France, dieta quelques heures avant sa mort la réponse suivante : «Reddo gratias, illustrissimi Domini, ob honores tanto nimos quanto immeritos, Mihi rebora deficiunt vitacollabiltur,accepialis voluntatem pro facto. Cum corde pleno et gratissimo moriturus vos illustris- simi domini, saluto. » — Le professeur Tail com- munique un mémoire sur le vol des oiseaux, qui est la continuation d'une lettre de feu M. W. Fronde à Sir W. Thompson. Dans la partie antérieurement pu- bliée de cette lettre, M, Fronde avait exposé cette idée que quand un oiseau s'élève ou plane sans mouvoir ses ailes, il doitexister effectivement un courant d'air de bas en haut dont l'oiseau doit profiter. Ainsi, dans le cas d’une mouette qui semble s'élever dans un calme plat, l’auteur lémontre qu'en réalité cet oiseau vole dans des courants dirigés de bas en haut sur le front d’une brise qui s'avance. De même il explique que le glissement de l’albatros le long de la surface de la mer, pendant un jour calme, est dû à un déplacement de bas en haut de l'air qui a nécessairement lieu sur la houle de l'Océan. Dans Ja suite de sa lettre, actuel- lement communiquée, M, Fronde présente une suite d'observations sur ce fait que l'oiseau glisse sur cette portion de la vague et commence son coup d’aile, quand il passe en arrière ou quand la vague passe en avant, Au front d’une vague de 500 pieds de long et haute de 10, avançant avec une vitesse de 50 pieds par seconde, le maximum du déplacemeut de bas en haut atteint 3 pieds par seconde, Dans sa communication actuelle, M. Fronde traite aussi du vol de l'oiseau dans un coup de vent, Il croit que dans ce cas le vol est dû à la même cause que celle qui soulève effectivementde gouttes d’eau ou d'écume à des hauteurs de #0 ou50 pieds. Des tour- billons se produisent dans l’air à la surface, et les cou- rants ascendants dans les tourbillons se meuvent plus rapidement que lescourants descendants. La partie as- cendante a proportionnellement moins d'étendue trans- versale; mais d’un autre côté la résistance est proportion- nelle au coursdela vitesse de manière que le mouvement de bas en haut qui est communiqué à la goutte d'eau pendant qu'elle traverse les parties ascendantes est plus grand que le mouvement de haut en bas qui lui est com- muniqué quand elle traverse les parties descendantes, M. Fronde pense que ces faits expliquent aussi bien le vol des oiseaux dans un coup de vent, Sir W. Thompson, cependant, pense que cette cause, quoique probable- ment suffisante pour rendre compte de l'élévation des youttes d’eau, produit seulement des effets de second ordre dans la suspension des oiseaux. Il pense que l’explication donnée par lord Rayleigh, qui semble n'avoir pas été connue de M. Fronde, que l'oiseau tire profit de la plus grande vitesse du vent aux niveaux supérieurs, etdela plus faible vitesse aux niveaux infé- rieurs, est la seule vraie, — Le professeur Tait lit une note sur le choc, continuation d’une série de notes sur le même sujet, Il établit que les solides peuvent être divisés en deux grandes classes relativement aux effets que produit un choc sur eux. Dans la première classe la durée du choc demeure constante, quelle que soit la déformation jusqu'à une certaine limite, Si cette limite est dépassée, la durée du choc devient plus ra- pide quand la déformation est accrue. De manière que la loi de Hooke (la déformation est proportionnelle à la force déformatrice) est satisfaite jusqu'à cette limite à partir de laquelle la force de réaction augmente plus rapidement que la déformation, Dans l’autre classe de substance, la durée du choc augmente d'abord, ensuite reste constante et finalement diminue, quand la défor- mation est continuellement accrue. Par suite, dans le premier état la force de réaction ne doit pas augmen- ter aussi rapidement qu'augmente la déformation, Le l:ège est un exemple-type de la dernière classe, le caoutchouc vulcanisé de la première, W. PEDDIE, Docteur de l'Université d'Edimboure, ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE Séance du 6 décembre 1890, Le principal objet inscrit à l’ordre du jour de la séance du 6 décembre était la lecture des rapports des commissaires (le général Liagre, secrétaire perpétuel, M. Folie, directeur de l'Observatoire royal, le colonel De Teilly, commandant de l'Ecole militaire) sur les deux points suivants, qui avaient été soumis à la classe par le gouvernement : 1° Estil opportun que la Belgi- que adhère à la conférence que le gouvernement se propose de réunir à Rome pour examiner la proposi- tion, faite par l’Académie de Bologne, en faveur de l'adoption de Jérusalem comme méridien initial? 20 Quel est l'avis de l’Académie au sujet de l'adoption du système des fuseaux horaires en Belgique, et de l'heure de Greenwich non seulement pour les horaires des trains, mais pour la vie civile? Ces questions ayant déjà été traitées d’une manière détaillée dans la Revue, il suffira de dire ici que l'Académie à émis un vote affirmatif unanime sur le premier point, de même que sur l'adoption du système des fuseaux dans les loraires des trains, mais qu'elle a rejeté l'adoption de l'heure de Greenwich comme heure officielle dans la vie civile, Cette question, du reste, est loin d’être aussi mûre que le pensent quelques-uns, et l'on peut affir- mer que le gouvernement belge ne prendra pas linitia- tive d’une solution, même quant à l'application du sys- (ème des fuseaux aux horaires des trains, avant qu'un accord préalable soit intervenu entre elle et les états voisins, Séance du 15 décembre 1890, Ont été élus : membre, en remplacement de M, Mon- ligny : M. Le Paige, géomètre très distingué, profes- seur à l'Université de Liège ; correspondant : M. F. de Rujdts, géomètre distingué, chargé de cours à la même Université; plus un certain nombre d’associés étran- gers : MM. Cayley, de Cambridge; Fisiau, de Paris; von Baeyer, de Munich. Séance publique du 16 décembre 1890. M. Stas, l'éminent chimiste, directeur de la classe, s’est occupé de la nature de la lumière solaire. Après avoir rappelé les principaux faits connus sur la consti- tution du soleil, sa couleur bleue, dont on peut s’as- surer en le regardant à travers une ouverture de deux millimètres de diamètre à bords {rès nets, pratiquée dans une plaque de cuivre, ses taches, leur nature, la faible densité de l’astre (1,4) qui renferme cependant des métaux très lourds (fer, manganèse, baryum, strontium, magnésium, zine, nickel, cobalt, etc.), dont la présence n'y est, par conséquent, possible qu'à l’état de vapeurs, il a fait appel à ses souvenirs relatifs aux observations qu'il lui a été donné d'entreprendre sur le spectre solaire, avec le P. Secchi, au Collège ro- main, Il a constaté d'abord que la coloration rouge des protubérances est due à la présence des vapeurs de calcium et de magnésium, fait que Joung a vérifié au moyen du spectroscope. Mais, de plus, il a reconnu, en 1879, qu'un spectre d'incandescence est essentielle- ment différent d’un spectre produit par des décharges électriques. Poursuivant ses recherches, il à reconnu qu'on ne peut reproduire les raies du sodium du spectre solaire dans un laboratoire qu'en faisant usage de dé- charges électriques disruptives, c'est-à-dire disconti- nues. La conclusion de ce discours est que la lumière du soleil n’est pas une lumière d'incandescence, mais qu'elle est, au contraire, produite par de l'électricité disruptive ; conclusion très remarquable et qui éveil- lera au plus haut degré l'attention des hommes compé- 28 ACADÉMIES ET SOCIÈTES SAVANTES tents. — La seconde lecture a été faite par M. Le Paige, qui a exhumé de l'oubli un astronome belge presque complètement inconnu, Wendelin, né en 1380 dans le Limbourg. Curé d’une modeste paroisse de Ja Campine, il avait su intéresser presque {ous ses paroissiens aux observations astronomiques. Doué d'une grande péné- tration, il avait remarqué l'influence de l'amplitude des oscillations du pendule sur leur durée ainsi que la variation de la durée de l'été à l'hiver, Au moment où l'astronomie allait seulement naître en Europe, il avait affirmé que la parallaxe du soleil ne pouvait pas être supérieure à 14°, estimation singulièrement approchée pour cette époque. Il fut très estimé de Gassendi, de Hugghens, de Descartes et du P. Mersenne. Détail assez surprenant : il serait question de lui élever un monu- ment sur la montagne de Lure, dans les Pyrénées, où il a passé plusieurs années de sa jeunesse comme pré- cepteur dans une famille seigneuriale du pays. Si son nom s'y trouve un jour gravé sur la pierre, il le devra bien certainement à son “historien, dont la correspon- dance échangée avec les habitants du pays, pour ob- tenir des r« enseignements sur Wendelin, leur aura fait connaître le mérite de l’astronome amateur belge qui fut plusieurs années leur hôte, F° Membre de l'Académie. SOCIÈTÉ DE PHYSIQUE DE BERLIN Séance du 19 décembre 1890, M. Glan présente un saccharimètre spectral de sa construction, Tandis que dans la plupart des saccha- rimètres on se sert de la lumière blanche ou mono- chromatique, l'appareil présent est destiné à mesurer la rotation du plan de polarisation pour chaque cou- leur du spectre. Il se compose d’un appareil de po- larisation et d'un spectroscope. Le premier se dis- lingue des appareils ordinaires en ce que la pente est illuminée intensivement par une petite lentille de 1 centimètre de distance focale, La lumière est fournie par une lampe électrique où par une bonne lampe de pétrole dont l'intensité est renforcée par un réflecteur conique. La lumière, polarisée par un nicol, traverse une lame circulaire dont une moitié est formée par une lame de quartz coupée parallèlement à l'axe du cristallographique. Derrière l’analyseur se trouve un prisme en flint qui fournit le spectre dont on peut sé- parer telle partie que l’on veut par un diaphragme et qu’on examine au moyen d'une petite lunette. L'obser- vation se fait comme dans l'appareil de M. Laurent, en tournant l’analyseur jusqu'à ce que les deux moitiés de l’image soient de la même clarté. L'appareil fonc- tionne le mieux pour les rayons verts ; pour les rayons rouges l'écart des différentes valeurs entre elles peut atteindre de 3 à 4%. — M. Wien emploie le téléphone pour la mesure des courants. La membrane de fer est remplacée par une petite plaque d'argent ondulée ° comme celle d'un anéroïde; elle porte au centre un petit morceau de fer doux. A l'extérieur la lame porte un petit miroir très léger, Si un courant traverse la bobine du téléphone, le miroir est dévié, Cette dévia- tion peut être assez agrandie à l’aide d’une projection sur une échelle, de sorte qu'une déviation d’un degré corresponde à un courant de 10 ampères. Quant à la mesure de courants alternatifs, il faut se servir d'un artifice pour que le rythme des interruptions du cou- rant et des vibrations de la membrane du téléphone soit identique, On atteint facilement ce but en em- ployant comme interrupteur un monocorde, —M. Rei chel décrit une expérience de cours destinée à com- parer les méthodes statique et dynamique pour la mesure des forces, La poussée d’un jet d’eau neeoner est équilibrée par des poids, La vitesse est » Ne Jpg. On vérilie avec une exactitude de 1 à 2 % la nee ME = py, Séance du 9 janvier 1891. M. Liebreich répète devant la Société ses expériences sur l’espace mort, que j'ai décrites dans le compte- rendu de la séance du 27 novembre 1890 ! D° Hans Jaux, ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 18 décembre 1890. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M, L. Gegenbauer. Sur la théorie des fractions continues régulières. — M. Grus- tave Kohn. Sur quelques propriétés projectives des po- ligones de Poncelet. -- M. E. Weiss. Sur la comète décou- verte par M. Spitaler le 17 novembre. L'état du ciel n'a permis aucune observation à Vienne pendant la fin de septembre et les premiers jours de décembre, mais, à partir du # décembre, M. Spitaler a réussi à retrouver la comète qu'il avait découverte, Il résulte des obser- vations que la trajectoire doit être une ellipse parcou- rue en 6 ans 1/2, La comète était à la fin de 1887 très près de Jupiter et s'éloigne depuis 6 ans de cette pla- nèle, Les éléments présentent une grande analogie avec ceux de la comète périodique de Tempel, avec cette différence toutefois que les longitudes du périhé- lie diffèrent de 180; ils présentent aussi une analo- gie avec ceux de la comète de Faye, la position des nœuds étant intervertie, 2e SCIENCES PHYSIQUES. — M. G. Adler. Sur une con- séquence des théories de Poisson et de Morotti. Les théo- ries de Poisson sur la polarisation magnétique et de Morotti sur la polarisation diélectrique établissent une relation entre le coefficient d'aimantation ou entre la constante diélectrique K = 1 + 4x k, et la fraction du volume de la substance, g, qui est occupée, par la mo- 3 kr —9) Dans son mémoire, auteur montre que, par une sim- ple différenciation de cette formule on peut déduire la relation entre la variation de la constante diélectrique ou du coefficient d’aimantation, quand la densité du corps change. Par la différenciation par rapport au vo- lume v occupé par la substance, on obtient la cons- tante introduite par Helmholtz et Kirchhoff pour re- présenter la force de compression sur les corps polarisés magnéliquement et diélectriquement : = dK pL= NE Là on lécule polarisée, On a, dans les deux cas, k# — dlogv Il est alors possible de déterminer expérimentalement si la variation de avec la densité est d'accord avec la théorie de Poisson. Les faits établis par Boltzmann dans ses recherches sur la variation de la constante diélectrique du gaz avec la pression concordent par- faitement avec les résultats déduits de la formule. Au contraire, les expériences de Guincke sur la variation de volume des liquides polarisés rendent peu vraisem- blable l'exactitude de la formule; elles donnent le plus souvent K° comme constante. Il résulte de là que la formule de Poisson et de Morotti ne saurait être appli- quée que dans le cas des gaz, si l'on en veut tirer des conséquences relativement au volume occupé par les molécules, par exemple et à la grandeur de ces molé- cules, — M. J. M. Fernter. Observations anémométri- ques au sommet du Sonnhlick et dans quelques autres stalions de montagne, L'auteur étudie la marche jour- nalière et les variations annuelles des vents au moyen des observations effectuées depuis septembre 18S7 au Sonnhlick, et compare les résultats à ceux obtenus dans d’autres stations, en particulier dans les observa- boires francais du Pie du Midi, du Puy-de-Dôme, et de la Tour Eiffel. — M. @, V. Niessl. Détermination de la trajectoire du grand météore du 17 janvier, Vers 5 Dee de temps moyende Vienne le 17 janvier éelata sur l'Au- { Voyez à ce sujet la Revue du 30 décembre 1890, t. I, p. 194 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 29 triche un grand météore qui forma ensuite une longue colonne de 190 kilomètres visible pendant au moins un quart d'heure; on n’a pu encore trouver les météorites tombés mais on à pu faire les observations suffisantes pour déterminer la trajectoire du météore, —-M, Ch. Gross. Recherches chimiques sur le soufre. L'auteur à ob- tenu par combustion du lait de soufre un résidu carboné d'où il a pu séparer une substance qu'il désigne par l'indicex et qu'il considère comme un produit de dé- composition. En introduisant du sulfate de plomb dans du chlorate de potasse fondu, il se produit une réaction violente; de l’oxyde de plomb se sépare et Pon sent lo- deur du ‘chlore ; si l’on introduit ensuite la masse re- froidie dans une cornue en verre peu fusible et que l’on chauffe dans un gaz, inerte, le nitrate d'argent pré- cipite Dés les gaz; au contraire le nitrate de baryte reste limpide. I traitement se dissout dans lacide azotique étendu sans précipitation de sulfate de plomb, mais l’eau sulfu- rique ne produit un léger trouble. En opérant sur de plus grandes quantités avec une partie de sulfate de plomb, pour douze de chlorate de polasse, on a obtenu une solution 4 dans l'acide nitrique que l’on a traitée par l'acide sulfurique ou par le sulfhydrate d'ammonia- que de manière à ce qu'elle reste acide, on filtra; le li- quide b ainsi obtenu renferme simplement des traces de plomb; on ajoute de la potasse en grand excès, il se sépare un précipité légèrement coloré par du fer ; le liquide surnageant est “traité par l'acide chlorhydrique étendu et précipité de nouveau par la potasse en excès. Après différents traitements on arrive à une poudre grise insoluble dans les acides chlorhydrique et azotique et même dans l’eau régale; après l'avoir purifiée des traces de plomb et de fer, on obtient un produit que l'auteur désigne par P indice 6, qui n’est plus attaqué par le chlorate de potasse el dont il se propose de con- linuer l'étude. Emile Weyr, Membre de l'Académie. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séance du 21 décembre 1890, Aucun des mémoires présentés à cette séance ne ressortit aux sciences mathématiques, physiques et naturelles, Séance du 4 janvier 1891. 1° SGiENGES MATHÉMATIQUES. — M. Cerruti. Sur la dé- formation d’un corps élastique isotrope. — M. Bian- chi. Sur les surfaces, dont les sections faites avec un système de plans parallèles, coupent les lignes de courbure sous un angle constant, — M. Tacchini donne le résumé des observations solaires faites à l'Observatoire du Collège romain, pendant le qua- trième trimestre du 1890, Les taches solaires n ont pas été aussi fréquentes que dans le trimestre précédent, mais le phénomène fut bien plus remarquable que dans la période signalée par M. Tacchini comme cor- respondant au vrai minimum, L'accroissement des protubérances a continué, et l’on peut dire que, autant pour les taches que pour les protubérances solaires, la période du minimum est passée, — M. Mil- losevich expose une série d'observations qu'il a exé- cutées du 16 novembre au 14% décembre 1890, sur ïa comète découverte à Palerme par M, Zona, le 15 no- vembre 1890. Cette comète, qui a un très faible éclat, présente la particularité d'avoir une distance du pé- rihélie qui a été seulement dépassée jusqu'ici par six autres comètes. M. Zona, directeur de l’Observa- toire de Palerme, entretient l’Académie des résultats qu'il a obtenus en exécutant des observations, avec un instrument, des passages de RAtÈeLEs pour déter- miner, avec les méthodes modernes, la latitude de Pa: lerme, A l'aide de ces observations, faites en sep- tembre et octobre 1890, M. zoné a reconnu que la latitude de Palerme est L — 38, 14", 525 ; cette lati- ; ; a masse cristalline obtenue dans le premier tude, reportée au point occupé dans l'Observatoire par le cercle de Ramsden, dont faisait usage l’astro- nome Piazzi, devient 37, 6/, #4", valeur qui, depuis plus d’un siècle est admise comme celle de la lati- tude de Palerme, et qui, en conséquence, n’a présenté aucune variation, — M, Giacomelli donne la {roisième série des mesures micrométriques d'étoiles doubles, exécutées à l'Observatoire du Capitole, 20 Sarences PuysiQuEs. — M. Tacchini donne com- munication d’autres recherches exécutées par M. Aga- mennone sur la tour du Collège romain, avec la séis- mométrographe Brassart. Les observations prouvent encore mieux ce qu'il avait annoncé dans une autre note; c’est-à-dire que le passage des soldats à plus de 150 mètres, et le contre-coup des mines que lon fait sauter à plus d’un kilomètre de distance, peuvent faire entrer en sensible oscillation les instruments enre- gistreurs. M. Tacchini insiste sur la nécessité de cons- truire les observatoires géodynamiques hors des villes, dans des localités où, sur un rayon suffisant, n'existent point des causes perturbatrices.En donnant une extrême sensibilité aux appareils, on a vu au Collège romain que les séismométrographes sont capables d’enre- gistrer les plus faibles frémissements du sol — M. Cancani présente les résultats obtenus en exami- nant les observations microséismiques et celles sur la vitesse du vent, exécutées dans les Observatoires géo dynamiques de Rome, de Rocca di Papa, de Florence, et de Spinea de Mestre. Il en déduit que la plus grande partie des mouvements que l’on peut observer sur les pendules tromométriques sont dus exclusive- ment à l’action du vent. — M. Gratlovitz adresse une note sur les observations marégraphiques qu'il con- tinue, depuis trois années, dans le port d'Ischia. Il a déterminé la moyenne du niveau de l’eau dans ce port et des oscillations dues, séparément, à l’action du Soleil et de la Lune, — M. Cossa à obtenu, en faisant agir sur le sel vert de Magnus une solution concentrée et bouillante de nitrate ammonique, un nouvel iso- mère ; ce corps possède les propriétés de la combi- naison d'une molécule de chlorure de platosodia- mine avec deux molécules d’un chlorure d’une nou- velle base du platine, qui contient une seule molécule J'ammoniaque, et à laquelle il a donné le nom de platososemiamine, M. Cossa a préparé, avec des pro- cédé différents, les dérivés de la nouvelle base, et il a commencé des recherches pour obtenir des combinaisons de bases platiniques d’éthylamine el de pyridine, homologues aux combinaisons de la base qu'il à déc ouverte; il est réussi à préparer un composé très intéressant, formé par une nouvelle base du platine analogue à la platososemiamine, — MM. Menozzi el Appiani ont établi des recherches dans le but de passer de l’acide glutammique à la glutammine, et pour comparer la glutammine obtenue de cette manière avec la glutammine que l’on à trouvée dans plusieurs végé taux et que, par exemple, M. Menozzi a tirée des bourgeons de citrouilles qui ont poussé dans l’obscurité, — M. Marino Zuco décrit un nouveau procédé d'extraction de la chrysanthémine, alcaloïde qu'il a découvert dans les fleurs du chrysan- temum cinerar'iæ folium. Xl ajoute avoir reconnu que cet alcaloïde n'a aucune action nuisible sur les animaux, et qu'il peut donner origine à plusieurs combinaisons, dont M. Marino Zuco s’occupe particulièrement, — Fileti, avec la collaboration de M. Amoretti, traite dans une note des principaux dérivés de l’acide isopro- pylphénylglycolique; dans un autre travail M. Fileti étudie la parapropylisopropylbe nzine. — M. Errera à étudié l’action du chlorure de cromile sur le cymène. 3SCIENCES NATURELLES. —M. Pigorini à poursuivi les fouilles du terremare de Castellazzo de Fontanellato {dans la province de Parme). Ce terremare est quadri- latère, et formé par un pilotis à l’intérieur, entouré pa un rempart et par un fossé ; il recouvre une sur- lace de plus de 19 hectares. A la stalion, qui est la plus grande du groupe à qui elle appartient, on arrivait au 30 COURRIER DE GENÈVE moyen d'un pont en bois qui, si l’on se reporte à la position des troncs d'arbres dont on a trouvé les restes, avait une largeur de 30 mètres, Ce pont, qui s'élevait au milieu du côté méridional du quadrilatère, fait penser à l’existence d’une route, le decamanus, qui de- vait traverser la station en la partageant en deux em- placements égaux. Le fossé était toujours rempli par Peau d'un petit torrent qui existe encore, et il y avait un canal d'écoulement dont on a découvert les traces. — M. De Stefani rappelle que dans le Montelisano on trouve une arenaire siliceuse appelée verrucano, dont COURRIER 1.— Nous aussi, nous avons eu nos congrès.Je ne vous parlerai pas de celui d'Odontologie (4-6 octobre, Genève), car le sujet en est trop spécial; je ne puis cependant passer sous silence une intéressante communication que M. Magitot y est venu faire sur les mutilations des dents chez les différents peuples. Depuis la taille dé- formée par le corset des Européennes jusqu'au pied des Chinoises, il semblerait qu'il restàt peu de chose à apprendre sur les goûts de l'humanité; mais hélas! les sauvages nous préparent bien d’autres surprises. Que certains nègres ne trouvent pas leurs négresses à leur goùt — et vice versa — cela pourrait se comprendre ; mais qu'ils essaient de remédier à cela en se mutilant les dents, voilà qui paraît plus extraordinaire, Les méthodes de mutilation qu’on rencontre sont les plus diverses; on peut les subdiviser en six groupes: la fracture, l’ablation, le limage, les incrustations, l'a- brasion et le prognathisme artiticiel. M. Magitot appuie, par l'existence des mêmes mutilations sur la côte orientale d'Afrique et les terres correspondantes de l'Océan Indien, l'hypothèse que ces parties n'étaient pas primitivement séparées par la mer. 2,— La soixante-lreizième session de la Société Helvé- lique des sciences naturelles (18 août, Davos) a été des plus fécondes. Nous relèverons, comme intéressant plus particulièrement les lecteurs de la Revue, l'impor- tante communication du Pr Béraneck de Neuchâtel, sur l'œil primitif des vertébrés. Pour trouver un lien entre l'œil cérébral ou encéphalique des Vertébrés et l'œil ectodermique des Invertébrés, l’auteur passe en revue les différentes hypothèses émises sur lorigine de Pœæil complexe des Vertébrés. À ce sujet aucune des théories proposées ne lui paraît satisfaisante : celle de Ray-Lan- caster qui admet que l'œil primitif des Vertébrés devait ressembler à celui des Tuniciers; la théorie de Balfour, d’après laquelle la rétine s’est trouvée comprise dans l'invagination qui a produit le canal nerveux eentral: celle de Dohrn où l'œil représente une transforma- tion d’une fente branchiale et de muscles branchiaux ; celle de Nuel, pour lequel le nerf optique est lhomo- logue d’une ou plusieurs racines postérieures et la rétine l'homologue d’un ou de plusieurs ganglions ; enfin l'hypothèse de Baldwin Spencer qui compare les yeux pairs à l'œil pinéal des Sauriens et les attribue comme ce dernier à une évagination de la vésicule cé- rébrale antérieure, Aucune de ces théories ne donne la solution de la question de savoir si le développement des éléments récepteurs de la lumière aux dépens de la vésicule cérébrale antérieure constitue le caractère primordial de l’œil des Vertébrés, ou si ce n’est qu'une adaptation secondaire, En partant du fait que l'œil des Vertébrés forme une exception unique parmi tous les organes des sens de la série animale, tous d'origine ectodermique:; que l’analogie de l'œil des Vertébrés avec celui de certains Lamellibranches, les Peignes et les Onchidies qui semblent constituer une forme de passage, n’est qu'apparente, puisque l'œil de ces der- niers est purement técumentaire, l’auteur insiste sur le fait que l'œil primitif des Vertébrés a dû être également técumentaire, Et commeil existe dans l'œil des Vertébrés l’âge avait donné origine à des discussions. Ayant su que dans la localité susdite on faisait usage d'une ma- tière noire qui servait à la peinture et comme com- bustible, M. de Stefani à voulu visiter le petit dépôt d'anthracite ; il a retrouvé de nombreux restes de vé- gélaux fossiles qui, comme le genre Lepidodendron, sont exclusifs au carbonifère, ou sont identiques aux espèces trouvées dans le carbonifère supérieur. Cette découverte confirme l'opinion de M. Merreghini qui, déjà en 1851, attribuait le verrucano au carbonifère, } Ernesto MAxcinr. DE GENÈVE un organe de provenance eclodermique, — le cristallin, — M. Béraneck arrive à la conclusion que c’est juste- ment le cristallin qui a dù servir primitivement de vésicule optique. En effetil est acquis : 1° que le cristal- lin des Vertébrés est cellulaire et formé par une inva- gination de l’ectoderme ; 2° qu'à un certain stade de son évolution il est comparable à la vésicule optique de certains Mollusques et Annélides ; 3° que le mode de développement des fibres du cristallin est spécial aux Vertébrés ; pources raisons le cristallin des Verté- brés ne peut pas être homologué à celuides Invertébrés chez lesquels cet organe ne montre pas de structure et doit être considéré comme une formation cuticulaire — exception faite pour les Peignes et les Onchidies, où le cristallin est cellulaire, mais d’origine conjonctive. M. Beraneck trouve la confirmation de son hypothèse dans le fait que le cristallin pendant son développe- ment prend la forme de vésicule (lexception signalée par Gotle, que chez les Amphibiens le cristallin se for- merait non par invagination, mais par épaississement de l’ectoderme, n'existe pas, d’après l’auteur : Balfour du reste avait déjà mis en doute cette exception). Cette vésicule cristallinienne se forme de la même façon que l'œil des Gastéropodes, des Céphalopodes, de certaines Annélides, La production même des fibres du cristallin qui se forment aux dépens de la paroi interne de la vésicule, s'explique par cette hypothèse, car, d’après celle-ci, la paroi interne de la vésicule cristallinienne servait anciennement de rétine et était composée de bâtonnets réliniens qui n’ont fait plus tardque setrans- former en libres du enstallin, tandis que la partie externe de la vésicule servait de milieu réfringent, Plus lard lévagination encéphalique à entouré l'œil pri- mitif tégumentaire et s’est transformée en rétine secon- daire en substituant celle du cristallin. 3.—- Depuis une dizaine d'années il y à une discussion pendante entre M, Colladon et M. Faye sur les trombes dair et d'eauet sur la direction des courants qui S'y produisent: d’après ce dernier savant les tourbillons d’eau qui se forment dans le courant d'un fleuve sont loujours descendants et ont leur bouche en haut et leur axe vertical, tandis que, d'après M. Colladon, les trombes d'air et d’eau peuvent dans certaines con- ditions être ascendantes, IL s’est produit ces derniers temps à Genève un fait intéressant qui a fourni à M. Col- ladon de nouveaux arguments en faveur de sa théorie. Chacun à pu voir en passant par le pont de la Machine qui domine les forces motrices du Rhône, dont Genève s’'énorgueillit à bon droit, un phénomène très curieux qui se produit le long du barrage à rideaux construit en amont et le long de ce pont, Dans des conditions données, un certain nombre de rideaux étant abaissés, tandis qu'aux extrémités ils sont relevés, il se produit à chaque extrémité ouverte une trombe ou tourbillon dont la bouche est dirigée en bas. Un peu plus haut les trombes deviennentcylindriques, horizontales ettendent àse réunir entre elles. Ce phénomène, auquel le peuple a donné le nom de « serpent d’eau » a été étudié d’une facon très complète par M. Colladon. La profondeur movenne de la veine horizontale était d'environ 50 cen- CHRONIQUE 31 timètres., En essayant d'interrompre la veine à l’aide d'une pelle parfaitement plane et triangulaire, à long manche, la veine cessait d’être continue, dès que la partie qui la frappait dépassait trois ou quatre cenli- raètres, Un manomètre monté sur des tubes à gaz longs de 5 mètres montait brusquement par une aspi- ration de 30 à 40 centimètres d’eau, dès que le tube pénétrait dans la partie centrale de la veine, En vou- lant déterminer la longueur maxima que peut atteindre le barrage, on a pu se convaincre que le phénomène se produit assez facilement à 12 m., 75 et même à 15 m., 08, mais qu’au delà de cette distance, à 17 m.. #2, c’est-à-dire en abaissant 15 rideaux continus, il se pro- duit deux troncons qui ne se rejoignent plus et le phé- nomène même ne dure qu'un instant. M. Colladon insiste sur le fait que ce tube d'air parfaitement eylin- drique de 1,500 centimètres de longueur horizontale était formé par deux tourbillons horizontaux qui tous deux avaient leurs bouches à un niveau inférieur, dans la parlie ouverte par laquelle l'eau s’écoulait. 4. — Les recherches de Stahl (1883) ont montré qu'il y a une différence notable entre les feuilles des végétaux exposées à la lumière et celles qui se trouvent à l'ombre. Il était intéressant de savoir si l'influence du climat et de l'altitude se fait également sentir dans la structure intime des feuilles, M. Leist ! a done étudié comparativement la structure microscopique des feuilles d’une trentaine d'espèces de la plaine et des mêmes plantes croissant dans les montagnes. Les re- cherches portent sur des plantes de familles différen- tes, des arbres, des buissons, des herbes, des plantes cultivées, mais toujours sur des feuilles dont le pa- renchyme se divise en deux parties: parenchyme en palissade et parenchyme lacuneux, Les feuilles al- pines sont en premier lieu moins épaisses que les feuilles de la plaine, Les plantes à feuilles épaisses et charnues sont, il est vrai, plus fréquentes sur les Alpes, mais chez la même plante les feuilles devien- nent moins épaisses, à mesure que croit l'altitude, En même temps la surface des feuilles augmente en général, Dans la structure microscopique de la feuille on distingue deux cas: 1° le nombre des couches de cellules du parenchyme en palissade ne varie pas, mais les cellules mêmes sont plus courtes et plus larges chez les plantes alpines ; 2 le nombre de ces couches diminue. Des feuilles ayant des palissades dans la plaine peuvent les perdre sur les hauteurs (Soldanella alpina et pusilla.), des feuilles isolatérales peuvent devenir bifaciales La structure des feuilles devient plus lâche, le nombre et le volume des la- cunes augmente. Les caractères des feuilles alpines poussant en plein soleil sont donc les mêmes que ceux des feuilles poussant à l'ombre dans la plaine, tels que les à décrits Stahl. Des plantes croissant à de très grandes hauteurs (plus de 2000 mètres) présentent, il est vrai, des feuilles diminuées de volume, mais on a affaire dans ce cas à un phénomène d’étiolement. Comme caractère distinguant les feuilles alpines des feuilles poussées à l'ombre dans la plaine, il faut noter l'épaississement de la cuticule. Ces caractères dis- linctifs des feuilles alpines se développent même chez des plantes annuelles et dépendent par conséquent d'influences directes. Par des expériences sur des plantes tenues sous cloche ou non, à la lumière ou à l'ombre, M. Leist a pu se convaincre que la structure des feuilles alpines est due à l'humidité plus grande de l'air et du sol sur les hauteurs, accroissement d'humidité mis hors de doute par les observations météorologiques. Cette hypothèse est confirmée par le fait que des plantes poussant sur la moraine du glacier du Stein et du Steinlimmi présentent des caractères intermé- diaires : les glaciers exercent en effet une action des- sechante sur Fair. D' H, Crisrrant. CHRONIQUE LA CHIMIE A L'ASSOCIATION BRITANNIQUE POUR L’'AVANCEMENT DES SCIENCES Au dernier Congrès de lAssociation britannique. tenu en 1890, les communications sur la chimie ont été parliculièrement nombreuses et intéressantes. Nous nous bornerons à signaler les plus importantes : Dr J. H, Gladstone et G. Gladstone : Sur la réfraction et la dispersion de la benzine fluorée et des composés analogues, Le fluor se comporte tout différemment du chlore, du brome ou de l'iode, Il réfracte à peine les rayons lumineux et possède la propriété de détruire la dispersion produite par lesautres substances. MM. Bailey et Kead ont étudié l'action des hautes températures sur les oxydes métalliques, Les recher- ches sur l’oxyde de cuivre avaient été déjà présentées à la Société chimique de Londres. Ces savants ont opéré depuis sur plusieurs autres oxydes. À une (température élevée, dans une atmosphère oxydante, V?05 se trans- forme en V?0%; MoO perd de l'oxygène et se transforme en l’oxyde bleu de molybdène, Sn0? perd une faible partie de son poids; Bi?03, PhO, WO restent inaltérés, Le docteur Bailey à lu un mémoire sur le spectre des sels haloïdes de didyme. Le professeur Armstrong à présenté le cinquième rap- port du comité sur les dérivés isomériques de la naph- taline. Bien que 13 dichloronaphlalines aient été décrites, il n’en existe que 10 et sur 14 dérivés trisubs- litués possibles, 13 ont été obtenus. M.J. H. Vant’Hoff : Sur l'influence de la chaleur sur le chlorure cupropotassique et ses dissolutions saturées. un 1 Travail communiqué à la Naturforschendi Gesellschaft à Bern. 1890. Les cristaux bleus CuCP, 2KCI, 2H20 chauflés à 1000 changent de couleur, Gela tient à la formation d'un sel brun CuCP, KCI d’après l'équation : Cu CE, 2KCI, 2H20 = Cu CI2.KC1+ KCI +2 H20. Le même composé peut être obtenu à température plus basse en chauffant le sel double bleu avec du chlorure cuvrique, On à alors la réaction Cu CL, 2KCI,2H20 + Cu CI, 2H20 = 2(Cu C2, KCI) + 4 H20. Les deux transformations sont réversibles, Les fem pératures de transformation, 93° et 56°, ont été déter- minées par l'étude de variations de volume, Ces deux températures sont situées au point de rencontre de trois courbes de solubilité dans chaque cas, savoir : A 56°la courbe du système CuCl2, 2KCI, 2420 : CuCR, 2420 Gelle du système CuCP, 2KCI,2H20:CuCl?, KCI Celle du système CuCP, KCI : CuCP, 2H20, A 939 la courbe du système Cu@2, 2KCI, 2H20 : KCI Celle du système CuCB, 2KCI, 2H20 : CuCE, KCI Celle du système CuCPR, KCI : KCI. Enlin, ces températures sont caractérisées par l’inter- section de 4 courbes de tensions de vapeur, savoir : À 56° les courbes des trois systèmes cités et de plus celle du mélange sec de sel double bleu et de chlorure de cuivre, A 93° les courbes des trois systèmes cités et celle du mélange sec du sel double bleu et de chlorure de po- lassium. Le D' Richardson a lu le rapport du comité chargé d'étudier l’action de la lumière surles hydracides et les halogènes en présence de l'oxygène. Il a trouvé que la présence de 1007, d'acide ehlorhydrique empêche l'alté- ration de l’eau de chlore au soleil, De nombreuses 32 CHRONIQUE expériences, non encore terminées, ont été faites sur l’alfération au soleil de solulions aqueuses de brome et d'iode, MM. Liveing et Dewar : Expériences sur l'explosion de mélanges gazeux sous de fortes pressions, L’éclat de la flamme augmente constamment avec la pression, Quand l'hydrogène fait explosion avec un excès d’oxy- gène, les petites quantités d'azote contenues comme impuretés dans les gaz, sont (transformées en aeide azo- tique et bioxyde d'azote, Avec un excès d'hydrogène il se forme de Pammoniaque. MM. Dixon et Harker : Sur l'explosion du mélange d'hydrogène et de chlore à l’état sec et humide. La vapeur d'eau ne semble pas intervenir, Le docteur Turpin à lu un mémoire sur la combustion des mélanges gazeux explosifs. La méthode employée à été celle de MM. Mallard et Le Châtelier 1, Elle a été appliquée aux mélanges de vapeurs de sulfure de ear- bone avec l'oxygène et divers autres gaz, M. Turpin trouve dans cerlains cas une discontinuité entre la combustion lente et l’explosion ; dans d’autres cas il y a entre les deux phénomènes une gradation complète. Le rapport du comité sur les propriétés des solutions à été lu par le docteur Nicol. On a complété les expé- riences sur la solubilité d’un sel dans une solution d'un autre sel, En général la solubilité est moindre que dans l’eau. : Le professeur Pickering a soulevé une discussion sur la nature de la dissolution et ses relations avec la pres- sion osmotique. Il compare les deux théories en pré- sence, la théorie de l’hydratation et la théorie physique réunie actuellement à celle de la pression osmotique et conclut à la supériorité de la première. Ses conclu- sions sont contestées par MM. Fitzgerald, Ostwald, et Lodge. MM. Green, Cross et Bevan ont décrit une méthode de teinture et d'impression photographique, Le com- posé diazoïque de la primuline est décomposé par la lumière et perd alors la propriété de se combiner avec les phénols et les amines en produisant des matières colorantes. Une étoffe imprégnée de ce corps est expo- sée à la lumière sous un cliché, et le dessin est déve- loppé ensuite au moyen d'un phénol ou d’une amine. Le professeur Thorpe a démontré que les effets physio- logiques ordinairement attribués au phosphore sont dus en réalité à l’oxyde phosphoreux. M. Meldola à attribué aux composés diazo-amidés la formule suivaute : X — Az — Az — AzR'— Y | | Y — A7 — A7 — A7R— X el les à considérés comme des dérivés de la tétramine hypothétique : H — Az — Az — H | | H—Az— Az—H M. Bothamley a montré que l'équation généralement adoptée pour représenter Paction du tnichlorure de phosphore sur les acides organiques et l’eau est incor- recte ; il lui substitue la suivante : 3 CH — CO? H + 2P Cl:=3 CH3 — CO C1+ P205 + 3H CI Quand on prend un acide de poids moléculaire élevé, la réaction devient beaucoup plus complexe. Les recherches de M. Perkin Junior sur Ja berbérine l'ont conduit à admettre pour cet alcaloïde la formule suivante : CH3 0 "CCH DIET | 0 Ù JCsH/ \cene. CH30 DCATECEHECEE No” G. Cuarry. ‘ Travaux de la commission du grisou. (Température d’in- flammation). Revue du 15 septembre 1890, p. 540. SUR UN PROCÉDÉ D'OBTENTION DES MICROPHOTO- GRAPHIES DESTINÉES À LA PROJECTION Les images positives photographiques utilisées jus: qu'ici pour la projection manquent de transparence et ne reproduisent pas les couleurs de la préparation qui a servi à les obtenir, MM. A. et L. Lumière, fabricants de plaques photo- graphiques à Lyon, ont obtenu des photographies présentant la double coloration, en combinant les procédés photographiques avec les méthodes de colo- ration des préparations microscopiques. Ils impriment limage par le procédé au charbon sur un papier renfermant peude matière colorante et l’immergent au préalable, afin de le sensibiliser, dans une solution dont la température doit être de + 15° et qui se compose de : BAD TE LR RU AE hante 650 Bichromate de pota doit 25 AICOOLERMS EN MR UE St, Après 5 minutes d'immersion, le papier est séché dans l'obscurité, puis exposé à la lumière sous le chässis-presse pendant un certain temps. L'image est alors développée d’après les méthodes connues; après avoir reporté la mixtion colorée sur un verre douci, on la dépouille; on lave l'épreuve à l’eau froide, puis on l’immerge 10 minutes dans l'alcool et on la laisse sécher. L'image obtenue doit être faible, elle sera même parfois peu visible. Pour la colorer on prépare des solutions aqueuses des couleurs employées en micrographie telles que le violet et le bleu de méthyle, le violet de gentiane, le bleu coton, le rouge de Magenta, le nacarat, lu safranine dimé- thylée, le vert malachite, ele. La concentration varie entre 4 et 2 suivant la solu- bilité et le pouvoir colorant. On peut aussi employer une quantité d'alcool très faib'e pour dissoudre la substance et l’étendre ensuite avec de l’eau, On verse la solution colorée sur l’image jusqu'à ce que la coloration soit bien nette; s’il y a excès, on lave à l’eau et à lalcool si l’action de l’eau est insuffisante, et on ramène la teinte au point voulu. Pour obtenir la double coloration, on verse d’abord sur l’image une teinture rouge intense, mais qui puisse se décolorer partiellement par le lavage (1). Quand la coloration est bien nette on lave pour décolorer jus- qu'à ce que le fond commence à perdre sa teinte; on traite alors de nouveau par la teinture qui doit colorer le fond, Pour cela on emploie une solution faible de bleu coton. On fait disparaitre le grain du verre dépoli en vernissant l’image avec : Benzine-teeerrer Do ge 9 Cr ce 300 Gomme Dammar... "1.4. ù que l’on applique à froid à la manière du collodion. On peut prendre un verre poli, mais il y à à craindre des décoliements de l’image. Les clichés ainsi obtenus présentent une netteté de contours et de coloration remarquable et donnent par la projection une idée absolument exacte des prépa- rations qu'ils représentent, MM. A.et L. Lumière ont donc ainsi réalisé un grand progrès dans les photomicrographies pour projections, C. Naup. A la dernière séance de l’Académie des Sciences, la Section d'Economie rurale a présenté pour succéder à M. Péligot : En {re Jione : M. Armé Giranp, En 2e ligne, et par ordre alpha- ( M. CHAMBRELENT. bétique : t M. Muxrr. L'élection aura lieu lundi prochain. (1) La solution à + de rouge de Magenta est dans ce cas: Le Gérant : Ocrave Don. Paris.— Imprimerie F, Levé, rue Cassette, 17. 2° ANNÉE N° 19 30 JANVIER 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LA PHOTOGRAPHIE DES OBJETS À TRÈS GRANDE DISTANCE PAR L'INTERMÉDIAIRE DU COURANT ÉLECTRIQUE Après l'article de M. Mathias dans la Revue du 30 décembre 1890, €. [, p. 798, sur la fransmission instantanée des images par l'électricité, | qui indique neltement l’élat actuel de la question, les lec- teurs de la Æevue trouveront peut-être quelque intérêt à une discussion plus serrée du problème pralique à résoudre, el des difficultés qu'on ren- contrera; plusieurs pourront probablement êlre levées, mais une au moins me parait encore insur- montable. [ C'est par celle-ci que je veux commencer : L'image transmise doit paraitre nette, vue à l'œil nu à une distance de trente ou quarante centimètres ; c'est de cette condition qu'il faut bien voir les conséquences en se rappelant que le seul pro- cédé imaginé jusqu'ici pour la transmission des images par un seul fil, consiste dans la trans- mission des éclairements d’une série de points formant mosaïque en un temps lolal qui reste indivisible pour l'œil. Pour que le modelé soit conservé, el qu'en même temps les traits de l’objet, au lieu de former une série de taches dis- jointes, présentent une réelle fermeté de tracé, il faudrait cerlainement ne pas donner plus d’un vingtième de millimètre (0®",05) de diamètre à la tache mobile dont le déplacement engendre l’image; il faudrait donc décrire l’image par successive ! N'oublions pas qu’il ne s'agit que des images en blanc et noir, et nullement des différences de coloration, REVUE GÉNÉRALE, 1891, bandes d’un vingtième de millimètre de largeur exactement juxtaposées; le long de chacune de ces bandes, pour un déplacement d'un vingtième de millimètre au plus, le disque lumineux devrait changer complètement d’éclairement comme les divers points de l’objet à reproduire. Sil'on veut une reproduction fidèle, il faut donc douer l'appareil de transmission d'une obéissance assez rapide et d'un amortissement assez considérable pour qu'il ait acquis complètement l'éclairement du point de l’objet qui l’actionne actuellement et perdu complètement l’éclairement du point qui l’action- nait tout à l'heure, pendant le temps que le disque lumineux met à se déplacer d'un vingtième de millimètre. Tàchons de nous faire une idée de ce temps si court, el bornons notre ambilion par exemple à la produclion d’une image nette pour l'œil nu, de quatre centimètres de côté, à peu près le carré circonscril à une pièce de cinq francs en argent. Celle surface de seize centimètres carrés contient 800 bandes d’un vingtième de millimètre de hau- chacune de ces bandes est décrite en + du teur; temps nécessaire pour couvrir la surface entière, et le déplacement d'un vingtième de millimètre du disque le long d’une des bandes se fait en il Il 800 X 800 640.000 transmettre l’image par un seul fil et donner à l'œil l'illusion de l'existence simultanée de toutes les 0) = de ce temps. Si l’on veut 34 M. BRILLOUIN. — LA PHOTOGRAPHIE DES OBJETS À TRÈS GRANDE DISTANCE parties de l’image, il faut que le disque lumineux décrive Loute la surface en moins d'un dixième de seconde. Ainsi pour produire une mage lumineuse, nette à l'œil nu, de quatre centimètres de côté seulexent, il faut que l'appareil de transmission obéisse complètement aux changements d'éclairement aurquels il est soumis en moins de = deseconde en nombre rond. Ilest nécessaire qu'il ait pris en ce temps si court l'état permanent qu'il atteindrait par la con- tinuation du même éclairement, car il est néces- saire qu'il ait perdu toute trace de l’éclairement subi 2 >< 107 seconde auparavant, sans quoi une teinte plate serait traduite par une teinte dégra- dée, au moins sur ses bords. A la rigueur, on peut espérer obtenir cette rapi- dité dans l'organe récepteur, mais par un seul moyen, la rotation magnétique du plan de polari- sation, qui, d'après les expériences de MM. Bichat et Blondlot, obéit aux variations d'intensité du courant avec un retard certainement inférieur à 0,33 <107* de seconde et peut être beaucoup plus faible. Mais que peut-on espérer de l'appareil transmetteur qui jusqu'à présent est le sélénium? Tout ce qu'on sait, c'est qu'il peut transmettre des paroles dont l'articulation est reconnaissable pour l'oreille ; j'ose à peine hasarder un nombre, mais il semble qu'en supposant une obéissance parfaite en 35% de seconde, on obtiendrait une netteté d’articulation absolue, et que l’attribuer au sélénium, c'est faire une hypothèse trop favorable. C'est tout au plus s'il serait possible de couvrir en 0,1 seconde une surface cinquante fois plus petite que celle admise, soit cinq milimètres sur six environ en conservant la même netteté, ou la mème surface de quatre cen- limètres sur quatre, avec une netteté bien insuffi- sante, le disque lumineux ayant 1/3 de millimètre de diamètre et ne changeant complètement d’é- clairement qu'après un déplacement d'un liers de reproduire en mais millimètre. On pourrait encore l'amollissant un dessin modelé sans (raits, non une gravure au burin. Mème si je me contente de cette image grossière, je crois entendre les physiologistes qui ont étudié les conditions de sensibilité de l'œil, m'arrêter par ces questions sceptiques : « Vous vous figurez pro- « duire en un cent-millième de seconde un impres- « sion lumineuse que la réline conservera fidéle- «ment pendant tout un dixième de seconde, avec «son degré d'intensité relative! Avez-vous quelque « idée de l'éclat extraordinaire qu'il faudra don- « ner au disque lumineux mobile, pour produire « seulement la sensation de lumière, même sans « nuances du plus au moins? El ne craignez-vous « pas que, sans s’en douter, l'œil, au lieu de rester «immobile, ne suive, si peu que ce soil, le mouve- « ment de la ligne lumineuse et ne brouille toute « l'image ? » Peut-être même seraient-ils plus affirmalifs, et pourraient-ils nous dire quelle est la limite de sub- division possible d'une image. Si par exemple l'œil ne percevait rien d’une lumière, d’un éclat réali- sable, dont la durée soit inférieure à de seconde, tout ce qu'on pourrait faire serait de reproduire une mosaïque en cent morceaux, un centimètre carré, divisé en carrés d’un millimètre, ou, pour avoir le degré de finesse qui me parait nécessaire à l’œil nu, un quart de millimètre carré, divisé en pelits carrés d'un vingtième de milli- mètre de côlé. Et peut-être la limite de subdivi- sion des images lumineuses qu'il est possible de transmettre à l’œil n'est-elle pas beaucoup plus reculée, dix fois, cent fois au plus. Coneluons donc qu'aborder le problème de front, c'est s’exposer à des mécomptes certains, car c’est ici qu'il serait faux de dire : «le temps ne fait rien à l'affaire ». Rayons le titre : Transmission instanta- née des images par l'électricité. » Un expérimentateur sérieux n'y doit pas songer pourle moment. Il Pour faire œuvre utile il faut changer un peu le problème, en conservant toutes les conditions essentielles, mais en supprimant d’abord radicale- ment les difficultés décourageantes auxquelles on est exposé presque à coup sûr en voulant se servir de l’œil directement, Il faut se donner tout le temps qu’on voudra pour décrire l'image entière, et pour cela substituer à l'œil une plaque photographique ; c’est pourquoi j'ai adopté le titre : Photographie des objets à très grande distance par l'intermédiaire du cou- rant électrique. Je sais bien qu'on excitera moins l’étonnement du public, qui sail déjà que la reproduction de l’é- crilure et des dessins par les télégraphes Caselli, Mayer, ele. a été réalisée avec succès. Pourlant une différence considérable subsiste et qu’on a bien le droit de mettre en évidence. Ce n’est pas seule- ment un dessin qu'on peut reproduire, c'est un objet quelconque. Voici le problème qui me parail absolument abordable et que je ne doute pas de voir complètement résolu d'ici très peu d'années : Un objet quelconque, paysage, figure ou tableau, vive- ment éclairé est placé devant une lunette qui projette une ümagye réelle sur un appareil transmetteur convenable. Le transmetteur est relié par des fils conducteurs de l'é- lectricité à un récepteur éloigné, au moyen duquel une image réelle semblable à l’image fournie par l'objectif au départ, est dérrile en quelques minutes, sur la surface d'une plaque photographique, qu'on développe ensuite à la manière ordinaire. C'est l'expérience seule qui apprendra quelle M. BRILLOUIN. — LA PHOTOGRAPHIE DES OBJETS À TRÈS GRANDE DISTANCE 39 distance peut être franchie avec un isolement sufti- sant, sans capacité ni induction propre excessives; mais les diflicullés ne paraissent pas devoir être supérieures à celles qu'on rencontre en téléphonie. On pourrait donc faire poser à Versailles ou Melun, et obtenir la photographie à Paris. Passons à l'ex- trème : un crime est commis à Paris, l'assassin s’est réfugié en Amérique; on en possède un por- trait en France, on l'éclaire vivement et on le place devant l'appareil transmetteur relié au câble transatlantique ; on installe le récepteur à New- York, et en quelques minutes, le chef de la police de New-York a entre les mains un cliché photo- graphique bien supérieur à un signalement. N'in- sistons pas! Tirons parti des idées émises par les inventeurs cités dans l’article de M. Mathias, mais reconnais- sons tout de suite les insuffisances de presque toutes les parties des appareils reproducteurs d’images que l’on a proposés, tant au point de vue de la netteté que de la fidélité, de l'éclat et de la rapi- dité d'impression. — Passons-les en revue rapide- ment ! : le téléphone à capsule et flamme, de M Kônig, de M. Weiller, ne peut donner assez d'éclat d’ailleurs il n'assure aucune relation de pro- porlionnalité même grossière entre l'éclat de l'ob- Jet el celui de la flamme; il manque de sensibilité et est d’un réglage dillicile par suite de la faible excursion de la membrane vibrante. Dans les autres projets, l'éclat est suffisant grâce à l'emploi d'une source élrangère. Le téléphone à membrane polie et réfléchissante de M. Nipkow approche da- vantage de la solulion; mais il parait bien dou- teux que la membrane reste assez plane au repos pour n'être pas constamment déréglée; les chan- gements de courbure produits par le passage du courant ne produisent d’ailleurs que des varia- lions d'éclat depuis un maximum jusqu'à un mini- mum non nul; l’image sera toujours noyée de Iu- mière. Enfin la rotation du plan de polarisation de la lumière, indiquée par M. Sutton, a l'avantage de l'extrème rapidité d'indication ; mais elle exige un courant électrique d'assez grande intensité pour une rotation notable, et, comme avec les nicols croisés l'éclat est minimum ou nul, une rotation d'un certain angle proportionnel à l'intensité du cou- rant ne produit qu'une augmentation d'éclat pro- portionnelle au carré de l'intensité du courant, et par suite au carré de l’éclairement du point corres- pondant de l’objet à reproduire, ce qui en change tout à fait le caractère. Le disque à trous en spi- rale de M. Nipkow ne permet ni finesse ni éclat; et le cylindre à 360 miroirs de M. Weiller qui per- 1 Le lecteur est prié de se reporter à l'article de M. Ma- thias. 30 décembre 1890, p. 198, met à peu près l'un et l’autre, est d’une construc- lion presque impraticable, si l’on veut de la fidélité. III Appareil récepteur proposé. Pour la reproduction photographique la fidélité est plus importante que la rapidité : il faut la réaliser complètement, C'est ce qu'il est facile de faire au moyen de l'appareil récepteur suivant (fig. 1), qui donne en un point Fig. 1. — À, aimant permanent fixe, ou électro-aimant. — C, cadre de fil mobile autour d’un axe perpendiculaire au plan du dessin. — Ce cadre tourne d’un petit angle quand il est parcouru par un courant électrique, et entraine dans son mouvement le miroir concave M. — L,, lentille conver- gente qui donne une image du trou S sur le miroir M; cette image est reprise par la lentille convergente L, qui donne ainsi sur le trou I une image fixe du trou S. — E,, écran (voir la fig. 2) dont le miroir concave M donne une image mobile E!, sur l'écran fixe E,. Ÿ fixe un petit disque lumineux dont l'éclat est pro- portionnel à l'intensité du courant électrique. Le courant électrique arrive dans un galvano- mètre Deprez-d’Arsonval, ou plutôt dans la partie galvanométrique d'un siphon recorder de Sir. W. Thomson. À est un aimant ou électro-aimant puis- sant; le courant de ligne arrive dans une bobine rectangulaire C suspendue dans le champ de l’ai- mant, non pas entre deux fils fins mais entre deux fils métalliques gros et courts, par exemple deux fils de laiton d'un millimèlre de diamètre et d’un déci- mêtre de longueur; on obtient ainsi un couple directeur considérable, mais grâce auquel la période acquiert l’extrème pelilesse nécessaire pour la ra- pidité des indications, malgré l’inertie de la bobine mobile C et du miroir M. La bobine est très résis- tante; on obtient l'amortissement convenable, même en circuit lrès résistant ou ouvert, en en- roulant le fil sur un cadre de cuivre fermé, que parcourent les courants induits dès qu'il se meut dans le champ de l’aimant A. Le reste de la figure représente l'appareil opti- que au moyen duquel on oblient en [| une image réelle fixe, de dimensions constantes, mais d'éclat proportionnel à la déviation du miroir, produite par un faisceau de direction invariable. Le soleil où une autre source un peu convergente éclaire uniformément un trou S d’un ou deux mil- limèêtres de diamètre percé dans une plaque 36 M. BRILLOUIN. — LA PHOTOGRAPHIE DES OBJETS À TRES GRANDE DISTANCE opaque. La lentille L, donne une image réelle de ce trou sur la surface du miroir M, ou plus exactement !, sur le fil de suspension autour du- quel tourne le miroir M; cette image reste fixe quand le miroir tourne; les rayons réfléchis sur le miroir donnent à travers la lentille L, une image fixe I du trou S, plus petite, que l’on reçoit sur un pelit trou d’un vingtième de millimètre de diamètre. Pour faire varier l'éclat de l’image I pro- portionnellement à la déviation du miroir on place près de la lentille L,, et près de la lentille L, deux écrans E,, E, représentés à part (fig. 2). Le miroir M Fig. 2, — Forme des écrans. est concave et donne de l'écran E, une image réelle, nette, et d'éclat uniforme sur l'écran E,, mais mo- bile sur cet écran; l'ouverture de l'écran E, est triangulaire et allongée dans le sens horizontal; l'ouverture de l'écran E, est rectangulaire étroite, allongée dans le sens vertical. Au zéro, la pointe du triangle E, fait son imagesurle bord de la fente E,, en dehors ; aucune lumière ne pénètre à travers la lentille L,. Que le miroir tourne du bon côté, l'image de l'écran E, s'avance sur l’écran E, comme le montre la figure, et laisse pénétrer jusqu'à I une 2 quantité de lumière proportionnelle? au déplace- ment de l'image E', comme il est facile de le voir. L'éclat de l'image [ est done proportionnel à la déviation et par suite à l'intensité du courant. Cette image est fixe, el éclairée par un faisceau limité de direction fixe, Pour avoir une sensibilité suffisante 1 Une position du miroir M un peu excentrique est néces- saire pour la netteté de l’image K',. 2 Sauf une petite perturbation initiale dépendant de la lar- wceur de la fente E, qu'on supprimerait d’ailleurs à peu près, en remplaçant les côtés du triangle par les deux branches d’une hyperbole convenable dont ces côtés sont les asympto- tes; ourigoureusement en remplacant le côté du triangle par un escalier à marches égales, distantes de la largeur de la fente, comme dans les parties d'écran figurécs en €, eve il suffit de prendre assez grandes(de à à 10 mètres) les distances des écrans E,, E,, au miroir M. On emploiera des lentilles L,, L,, peu convergentes, L, moins convergente que L, de manière à avoir une image I de petit diamètre. Si d’ailleurs on reconnaît que l'intensité du cou- rant dépend de l'éclairementde l’objet à reproduire suivant une loi autre que la proportionnalité mais fixe, on pourra toujours tracer empiriquement l'ouverture de l'écran E, qui doit remplacer le triangle. IV Analyseur et reproducteur de l'image. — 1 faut pou- voir analyser et reproduire une image fine et éten- due au moyen d'un appareil d'une construction précise et facile. Voici la disposition qui me parail réunir toutes ces qualités (fig. 3). Fig. 3. — 1,, 1 .. 9, lentilles de méme distance focale, dont les centres optiques €j, Co, .. Cp, sont équidistants sur une mème circonférence d’un disque mobile de centre 0. — I4 Li6; C1, Co, mème signification pour le disque mobile de centre O. Ce dernier disque à une vitesse de rotation exactement 1000 fois moindre que le premier. On Eee pas dessiné le système de vis tangentes qui assure cette Ialson, 493 Deux disques circulaires mobiles autour d'arbres parallèles sont placés l’un derrière l’autre comme l'indique la figure 3; chacun d'eux porte enchàässées dans des fenêtres rectangulaires une série de 10 lentilles (par exemple) toutes de même foyer, et dont les centres optiques sont rigoureusement sur une même circonférence concentrique à l’axe de rotation. Les deux disques sont disposés de ma- nière que les circanférences des centres des len- tilles se coupent à angle droit. Enfin leurs mouve- ments sont liés rigoureusement V'un à l’autre, par exemple par une double commande à vis tangentes, de manière que l’un deux tourne rigoureusement 1.000 fois plus vite que l’autre !, L'image d'un point lumineux fixe, dont la lumière traverse les deux lentilles situées près du point de croisement des 1 Une disposition mécanique calquée sur cette disposition optique me semblerait convenir au tracé des réseaux par une machine animée d’un mouvement continu, uniforme, sans va- et-vient, sans mouvement périodique, sans chocs. + fththamitls fnac Cats ét tot dt. à“ 2,4 | M. BRILLOUIN. — LA PHOTOGRAPHIE DES OBJETS À TRÈS GRANDE DISTANCE 37 circonférences, décrit d'un mouvement uniforme une série de droites (ou plutôt d’arcs de spirale) parallèles, très voisines : en effet pendant le temps qu'une lentille Z, met à passer devant la lentille L celle-ci a monté un peu, uniformément, l'image a décrit un petit arc de spirale. Quand la lentille Z, succède à la lentille /,, elle trouve la lentille L un peu plus haut, l’image qu’elle forme décrit donc un arc de spirale parallèle au premier mais un peu plus haut; ele. Reportons-nous à la figure 4 où n'ont été dessi- nées qu'une seule des lentilles /, et une seule des lentilles L. Le pelit trou éclairé par l'imaze I est placé dans le plan du foyer principal des lentilles /; le faisceau lumineux qui sort de la lentille 7, de- vient parallèle à la droite qui joint le centre op- tique e de cette lentille au point I. Ce faisceau tom- bant sur la lentille L, (fig. 4) donne dans le plan Fig. 4. — ], trou à éclat variable de la figure 1. — Le faisceau de lumière qui l'a traversé couvre sur la lentille { mobile dans le sens horizontal la petite surface a; puis la surface A sur la lentille L mobile dans le sens vertical ct donne sur la plaque photographique une image nette J dont les coor- données e, J, C, J sont à chaque instant égales aux distances des centres optiques e, C, des lentilles 2, L, à laxe fixe du faisceau incident La. focal de celle-ci, sur la plaque photographique, une image du trou I égale en grandeur, et située sur la droite C J, parallèle à Ie. Les coordonnées de l’image mobile sont donc celles des deux centres optiques e, G, des lentilles 7, L à chaque instant. Comme le faisceau est étroit, il suffit que les len- tilles aient un diamètre un peu supérieur à celui de l'image qu'on veut obtenir pour que la clarté reste la même jusqu'au bord, par exemple 4, 8 centimè- tres de côté pour une image de 4 centimètres, En prenant 2 millimètres pour l'enchässement ; si les deux disques sont de même dimension et ont le mémenombredelentilles, lalentille Laura monté de jen J 4000 ‘7 200° cement du passage de la lentille 7, jusqu'au com- mencement du passage de la lentille ?,. La lentille L, donne l’image une fois; la lentille recommence exactement à Ja même de millimètre depuis le commen- suivante place, ete. À l’arrivée, les variations d'éclat de l'image I dans le temps sont ainsi distribuées dans l’espace et couvrent la plaque photographique. Au départ ! un appareil identique (fig. 5) et syn- Fig. 5. — À, système objectif (analogue à un oculaire positif employé à l'envers) qui donne des objets extérieurs une image réelle dans le plan P, avee un anneau oculaire réel éloigné, dans le plan duquel tourne le premier disque à 10 lentilles d. Tout près se trouve le second disque D, l’en- semble des deux donne successivement une image de tous les points de P sur le petit trou B (0,05 à 0,1 millimètre). — C, cône de verre qui transforme le faisceau étroit en une nappe conique annulaire, recue par l’anneau de sélénium Se, chrone a recueilli sur un petit trou fixe B les images des divers points P de l’objet à transmettre; au delà du trou il peut être commode de placer un prisme conique C de manière à élaler en anneau circulaire l’image du trou sur le contour d’un transmetteur à sélénium $S construit à la manière de M. Mercadier. Contrôle du Synehronisme. — Dès que la trans- mission n’est pas plus rapide que celle des appa- reils Meyer ou Caselli, le synchronisme des deux appareils ne saurait présenter de difficultés insur- montables ; c'est un problème de mécanique in- dustrielle tout différent de celui qui fait l'objet principal de cet article; je veux seulement indi- quer comment il est possible de contrôler le syn- chronisme à mesure que le mouvement se fait. Sur le côté de l’objet à la station de départ on placera une bande droite bien éclairée, qui fera partie de l'image à reproduire ; on fera en sorte que l'image de cette droite se produise à côté de la plaque photographique un peu en avant d'une fente étroile, qu’on regarde avec un oculaire grossissant quatre ou cinq fois. Le synchronisme sera parfait si l’image de la droite regardée à travers la fente à mesure qu'elle se forme parait rigoureusement rectiligne, et uni- formément éclairée. V Tout dans celtappareil me parait immédiatement réalisable pour un constructeur déjà expérimenté el soigneux. Quelques réglages, portant surtout sur la grosseur du fil de suspension du cadre mo- bile et la rapidité du mouvement à donner aux deux disques pour obtenir une netteté salisfai- sante doivent permettre d'obtenir au laboraloire la reproduction photographique nette et fidèle d'i- Pour un objet éclairé, Pimage doit être formée par une lunette et un oculaire donnant un anneau oculaire réel, et non par un objectif photographique ou un appareil de pro- jection seul, — Voir la fisure 5 et la léwende. 38 A. E. MALARD. — LA CASTRATION PARASITAIRE mages de quelques centimètres carrés en un petit nombre de minutes d’après des objets situés dans une autre pièce, à travers quelques centaines d’ohms de résistance. Ce serait un résultat assez curieux par lui-même pour tenter un bon constructeur, bien que sans avenir industriel probable. En tout cas, c’est un intermédiaire indispensable pour arriver à la vi- sion directe des images. De lents perfectionne- ments à chaque instant contrôlés par les photogra- phies pourront peut-être permettre d'augmenter assez la rapidité d'obéissance de toutes les parties de l'appareil pour y parvenir; à moins que la pa- resse de l'œil ne soit décidément trop grande et que, pour avoir une image rélinienne netle, il ne soit nécessaire d'imaginer un mode de transmis- sion simullané et non successif des éclairements des divers points de la mosaïque, par un seul fil conducteur, — et cela ne me parait pas facile. Marcel Brillouin. Maitre de conférences de Physique à l'Ecole normale supérieure, LA CASTRATION PARASITAIRE L'une des questions les plus intéressantes des sciences naturelles est, sans contredit, celle des relations des organismes entre eux. Déjà depuis longtempsles rapportsentre individus d'une même espèce, vivant en société, ont atliré l'attention des observateurs. La sélection naturelle et la division du travail amènent forcément, à la longue, une adaptation particulière pour certaines individua- lités (Fourmis, Abeilles, ete.). Il en est résulté, chez ces espèces, la constilution de véritables sociétés hiérarchisées, les individus primitivement sem- blables, qui les composent, s'étant par la suile différenciés et accommodés à des fonclionsdiverses. Cette différence, gique, entre les diverses individualités d’une même société animale, se retrouve encore lorsque la colonie devient permanente et constitue un cormus, c’est-à-dire une réunion matérielle d'individus soudés morphologique et physiolo- entre eux comme les divers polypes d'un polypier. La théorie des Colonies unimales n'est autre chose que cette observation appliquée à la constitution des individualités supérieures. De même que le polypier est un cormus de polypes, de même, sui - vant Hæckel, la personne seraitun cormus d'organes ; seulement les organes sont arrivés ici à un degré de différenciation beaucoup plus élevé. , Au lieu de nous maintenir dans le groupe res- treint de l'espèce, cherchons à étudier les rapports qui relient entre eux des organismes d'espèces différentes. Ici, nous devons le dire, bien que la litlérature devienne extraordinairement riche dans le domaine des faits, elle est d’une extrême pau- vrelé quant à la systématisation de ces faits et aux déductions qu'on peut légitimement en tirer. A l'Etranger un petitnombre de travaux récents, parmi lesquels il faut surtout citer ceux de M. Van Beneden ont un peu éclairé la question. En France les découvertes de M. Giard ont puissamment con- tribué à l'élucider. Avant de les décrire, remar- quons, en quelque sorte à priori, que si, dans une société animale ou végétale, vient à être substituée ou surajoutée une individualité d'espèce différente, deux cas pourront se présenter : ou bien l'élément nouveau vivra aux dépens de la société, — c’est en cela que consiste le parasilisme pur et simple, — ou bien il s’harmonisera plus ou moins avec elle el il y aura dans une certaine mesure mulualisme ou symbiose *. En fait toute une série d’insensibles transitions relient l’un à l'autre ces deux cas. Comme exemple du dernier on peut avecM. Giard citer les Bopyres, petits crustacés marins qui, tout en élant capables de vie indépendante, s’insinuent souvent dans la cavité branchiale des crevettes et se substituent aux branchies de ces animaux. Leurs personnes remplissent alors la fonction de ces organes. On sait d'autre part que lorsqu'un organe prend une importance exagérée, l'un des premiers résul- tats physiologiques de cette hypertrophie, est la diminution, puis l’arrèt de la reproduction sexuée. On connait la stérilité des plantes hybrides, dont les organes végétatifs deviennent exubérants. Cet antagonisme entre les facultés génésiques et le développement excessif de l'individu se mani- feste dans certains organismes composés, où l’on voit l'insertion de l'élément substitué ou surajouté provoquer la stérilité de son hôte, La découverte de cette sorte de castration ne remonte qu’à 1886. On la doit à M. Giard, qui l’a publiée en 1887 *. Ayant pêché à Concarneau une assez grande quantité de Sfenorkynchus, sortes de Crabes à longues pattes (fig. 4), M. Giard remarqua qu'un parasite (Saceulina Fraissei, Giard) qui générale- ment habite sous le post-abdomen de cet animal, semblait ne se rencontrer que chez les femelles; celles-ci généralement ont le post-abdomen 1 Voyez à ce sujet l’article de M. P. Vuillemin sur les Wy- corhizes dans la Revue du 15 juin 1890, t. I, p. 326. 2? Bull. scientif. du nord de la France, 1887, 2' série, 10 p. 2 | et sq. + remet #4 A. E. MALARD. — LA CASTRATION PARASITAIRE 39 élargi (fig. 1, A), de manière à protéger leurs œufs qu'elles maintiennent ainsi contre le sternum. Au contraire chez le mâle, qui possède normalement un appendice post-abdomin?l plus étroit (fig. 1, B)et Fig. 4. — Type de Stenorhynchus. Individu complet, l’abdo- men est replié sous l’animal et appliqué contre le sternum. — À, abdomen de la femelle — B, abdomen du mâle, presque styliforme,le parasile paraissait ne jamais se rencontrer, Bientôt cependant une observation plus attentive fil voir à M. Giard qu'il n°y avait pas, commeil l'avait d'abord pensé, infection des femelles à l'exclusion des mâles, mais un fait beaucoup plus curieux. Ce fait consistait, chez les mäles infestés, dans le développement exagéré de l'appendice post-abdominal, ce qui les faisait en tous points ressembler aux femelles. Ajoutons que dans cetelal, les mâles sont impropres à la reproduction, mâles et femelles paraissant tendre à un individu neutre. Depuis, M. Giard a eu l’occasion de constater le même fait, chez d'autres Crustacés comme le crabe commun de nos côtes. Là encore le mâle infesté par une sacculine (fig. 2, II), prend des caractères intermédiaires entre le mâle (fig. 2, Il, et la femelle (fig. 2, 1). [ Il II Fig. 2. — Abdomens du Stenorhynchus. — I, de la femelle. — IT, du mäle non infesté. — TITI, du mâle infesté. Chez ces animaux d'ailleurs, la castration para- silaire n'est que temporaire, Fhôle du parasite pouvant, après la mort de ce dernier, recouvrer ses facultés normales. Quelquefois, le parasite, au lieu d'agir ainsi indirectement sur les organes de la génération, par sa seule nutrilion, et en se subs- tituant aux œufs comme chez ces crabes, agil au contraire en détruisant la glande mâle ou fe- melle. C'est à ce cas qu’on peut rapporter le curieux parasitesignaléchez uneophiure parM.W.Fewkes"!. Cette castration parasitaire directe agit aussi for- tement sur les caractères secondaires ? et sur les instincts de l'animal infesté *. Le crabe, — mâle ou femelle, peu importe, — veille sur son parasite avec le soin jaloux d’une mère sur ses propres œufs. Cette castration parasitaire est un fait très géné- val : on l’a rencontré chez des Infusoires, des Cæœ- lentérés, des Vers, des Echinodermes, des Mol- lusques, des Arthropodes et des Vertébrés. Le Cuterebra emasculator, larve de Diptère, fournit un exemple de castration directe chez un mammi- fère voisin des Écureuils, le Tamias Lysteri. Enfin chez l'Homme même il parait probable que le Bacille de Koch et peut-être un ver intestinal, l'An- chylostonuun duodenule, peuvent produire des acci- dents :emblables. Mais alors il faut remarquer que l'organisme tout entier se ressent de ce parasitisme et manifeste de la facon la plus évidente un état pathologique général. Les phénomènes précédemment décrits existent non seulement chez les animaux, mais même chez les végétaux. Les spores d’un champignon, l'Usti- lago Antherarum, tombant sur les fleurs du Compa- gnon blanc (Melandryum album) se substituent au pollen des anthères et, fait très curieux, le Welan- dryum élant dioïque, si par hasard l’Ustilago anthe- rarum tombe sur un pied femelle, on voit les fleurs mâles, ordinairement rudimentaires, déve- lopper alors leurs étamines, et fournir ainsi au parasite les anthères nécessaires à sa fructifica- tion. La sélection s'exerce donc ici à la fois sur l'hôte et sur le parasite, et établit un modus vivendi entre ces deux êtres. Une note de M. Ant. Magnin ‘ sur la castration parasitaire de l'Anemone ranunculoides par l'Œxi- dium leucospermum nous fait connaître de nou- velles investigations suggérées par les travaux de M. Giard. Ces recherches ont prouvé qu'ici encore, a côté d'une atrophie plus ou moins complète des organes de la reproduction, le parasite pro- duit une excitation physiologique très nette de l'appareil végétatif (tige et feuilles de l’involuere) : « Les pieds urédinisés, écrit l’auteur se font sou- 1 Nature de Londres, n° 941, vol. 37, 19, janvier 1888, p. 274. 5 A, BRaNpT. Anatomisches und allæemeines über die so- genannte Hahnenfedrigkeit und über anderweitige Gesch- lechtsanomalien bei Vügeln. Z. Wiss. Zool., V.48, Leipsig, 1889. 3 Chez les Oiseaux on a vu des femelles prendre le plumage et les habitudes du mäle dès que s’éteignaient les fonctions sexuelles ordinaires. Bull. scient. du nord de la France, II° s'- rie, {re année, t. III, p. 100. i (. R. séance du 28 avril 1890 40 G. LUNGE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE vent remarquer au milieu des touffes saines par leur taille et leur plus grand développement; les feuilles de l'involucre sont plus larges, plus épaisses, plus raides et comme charnues; même dans les portions des involucres partiellement envahies, les cellules de l’épiderme ont augmenté de largeur et d'épaisseur. C'est donc bien sur l'appareil reproducteur que le parasite localise son action atrophiante, qui s'exerce d'abord sur les sépales et le pédicelle, puis sur les carpelles, enfin sur les élamines ». Tels sont les faits dignes du plus haut intérêt que les recherches de M. Giard ont conduit à constater. Comme on le voit, la moindre synthèse, quand elle est faite d’une manière judicieuse, la moindre obser- vation, justement interprétée, jettent une vive lumière surune foule de phénomènes et ouvrent la voie à des idées générales qui deviennent à leur tour de puissants moyens d’invesligation. A. E. Malard, Sous-Directeur de la Station zoologique du Museum à Saint-Vast,. REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE LA GRANDE INDUSTRIE CHIMIQUE I Deux découvertes importantes en chimie inorga- nique ont marqué la fin de l’année 1890 : celle de l'acide azothydrique due à M. Curtius et celle de l'oxycarbure de nickel due à MM. Mond, Langer et Quincke‘. La description de ces composés intéres- san(s n’apparlient pas, à proprement parler, à une revue de chimie appliquée. Il importe cependant de s'y arrêter quelques instants, car le second de ces corps, tout au moins, semble appelé à jouer un certain rôle dans la pralique. On ne connaissait pas jusqu'à présent un bon agent capable de reti- rer tout l’oxyde de carbone contenu dans un mé- lange gazeux. Il se peut que le nickel métallique soit appelé à remplir ce but. Bien des progrès res- tent évidemment à faire pour que celte réaction puisse être réellement employée en granä. Mais si la chose est possible, il faut reconnaitre que tous les éléments du succès se trouvent réunis dans la collaboration de MM. Mond, Langer et Quincke : d'un côté de jeunes et habiles chimistes, dont l’un, M. Langer, s’est déjà fait connaitre par ses remar- quables « recherches pyrochimiques » exécutées avec M. V. Meyer à l'École polytechnique de Zurich; de l’autre côté, un grand industriel animé du désir d'apporter le précieux et généreux concours de moyens mécaniques puissants et des ressources pécuniaires indispensables pour de semblables re- cherches. 1 La Revue a sisnalé ces deux découvertes dès leur appa- rition. La premitre a été dans notre numéro du 30 oc- tobre 1890 (t. I, p 656) l'objet d’une nouvelle étendue où le mode de préparation, les principales propriétés, la formule brute et la formule de constitution de l'acide azothydrique ont été décrits avant la publication du mémoire original de M. Curtius dans les Berichte de la Société chimique de Berlin Quant à l’oxycarbure de nickel, notre distingué collaborateur, M. G. Charpy lui a consacré un important article dans notre numéro du 15 novembre 1890 (t. [, p. 657). (Note de la Direction. A première vue l'emploi du nickel pour l'absorp- tion de l’oxyde de carbone soulève cependant une objection: la mise en pratique d'un pareil procédé serait inévitablement accompagnée de pertes de l'agent absorbant, métal encore assez rare et d'un prix plutôt élevé. Mais cette objection perd aujour- d'hui beaucoup de sa valeur, depuis que l’on a dé- couvert les minerais de Sudbury, au Canada, dont la richesse en nickel dépasse celle des minerais dela Nouvelle-Calédonie. Ces gisements sont consi- dérables et doivent se prêler à une exploitation facile, ainsi que l’auteur de cette revue a pu s’en convaincre sur les lieux mêmes, il y a quelques mois à peine. Une des applications les plus importantes que l’on pourrait faire de l'absorption de l’oxyde de -arbone contenu dans un mélange gazeux serait évidemment la purification du gaz d'éclairage, qui renferme toujours une quantité appréciable de ce composé dangereux. Avec plus de raison encore, on peut espérer venir ainsi à bout des difficultés qui se sont opposées jusqu'à présent à l'emploi général du gaz d'eau pour le chauffage et l'éclairage (lumière incandescente). On sait en effet que la grande toxicité du gaz d’eau, — mélange impur de Il et de CO, — provient de sa forte teneur en oxyde de carbone. Si l’on parvenait, sans frais trop consi- dérables, à éliminer complètement ce dernier (pour lemployer ensuite sous une autre forme), on obliendrait de l'hydrogène presque pur, utilisable aux lieu et place du gaz d'éclairage ordinaire, pour les usages domestiques, les services publics, etc. Il Ces considérations nous amènent tout naturel- lement à examiner jusqu'à quel point se sont réalisées les grandes espérances que l’on avait fondées sur l'emploi du gaz d'eau. L'opinion lui est généralement moins favorable aujourd’hui qu'il y a quelques années. Nous sommes loin des pré- G. LUNGE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APLLIQUÉE 41 tentions de ceux qui voyaient dans ce produit le «combustible de l'avenir » destiné à remplacer le gaz des gazogènes, le gaz de houille et même la houille, aussi bien dans l’industrie que pour les usages domestiques. Dans tous les cas où il s'agit d'utiliser aussi complètement que possible une quantité donnée de chaleur, on à reconnu que la préparation du gaz d'eau est non seulement inutile, mais plus coûteuse que la combustion directe du charbon ou sa transformation en gaz au moyen des gazogènes ordinaires. Il y a cependant un cas où l'emploi accessoire de l’eau peut rendre des services, c’est lorsqu'il s’agit de faire marcher les gazogènes d’une façon continue. On sait en effet que la préparation du gaz d'eau proprement dit s'opère en alternant les deux opérations suivantes : 1° diriger de la vapeur d'eau surchauffée sur du charbon porté au rouge, d'où résulte un abaissement de température en relation avec la chaleur absorbée par la décom- position de l’eau; 2° ranimer la combustion par un courant d'air, ce qui a pour effet de relever la température et de la ramener à ce qu'elle était avant la première opération. Le gaz produit dans cetle seconde phase est très voisin, par sa composition, du gaz des gazo- gènes appelé «gaz Siemens » ou (gaz d'air». Il est cependant rare qu'on l’utilise d’une façon com- plète, et, dans bien des cas, il était même entiè- rement perdu. En réglant convenablement la quantité d’eau employée, de telle façon que la température ne tombât pas en dessous d’un certain minimum, on est parvenu à obtenir d’une façon continue un mélange gazeux contenant, en volumes, 20 25 °/, d'oxyde de carbone et 10-15 ?/, d'hydro- gène. C'est à ce mélange qu'on a donné le nom de « gaz mixte » ou de « demi-gaz d'eau ». Parmi les appareils nouveaux construits Sur ce principe, il faut mentionner ceux de Schilling, de Siemens, de Dowson et Wilson. Tous donnent une solution rationnelle du problème du chauffage, car ils produisent sans augmentation de frais un gaz plus riche que celui des gazogènes ordinaires, capable de donnner une flamme de température plus éle- vée, et dont l'emploi est particulièrement ap; ro- prié aux moteurs à gaz. Il convient d'examiner aussi deux cas où le gaz d'eau avait paru présenter de tels avantages sur les autres combustibles, que, malgré son prix de revient élevé, son emploi semblait devoir se justi- fier complètement; nous voulons parler de la pro- duction des hautes températures et de l'éclairage. En ce qui concerne la première de ces applica- tions, il faut distinguer deux alternatives : Ou bien il s’agit de produire des températures très élevées que l’on ne peut atteindre avec nos REVUE GÉNÉRALE, 1891. moyens actuels. Tel est le cas de la soudure des tuyaux en fer ondulé, pour laquelle le gaz d’eau ne peut être remplacé par aucun autre agent. Il en sera de même dans l'avenir pour toutes les opéra- tions analogues. Ou bien au contraire il s’agil de produire des tempéralures moins élevées, que l’on peut réaliser par nos moyens actuels, mais avec un faible effet utile, La fabrication de l'acier par le procédé Sïe- mens-Marlin nous en fournit un exemple. Jusqu'à présent les lentatives faites en vue d'y appliquer l'emploi du gaz d’eau ne paraissent pas avoir élé très heureuses. La Société des Hauts-Fourneaux de Wittkowitz (Silésie autrichienne) avait annoncé qu'elle obtenait ainsi des résultats remarquables. Dans le même but, on avait construit à Hoerde, en Westphalie, les plus grandes installations qui aient été créées jusqu'à présent pour la production du gaz d’eau. Or, voici que l’on annonce cette année l'abandon de toutes les installations de Wittkowitz. D'autre part, on ignore encore les résultats obtenus à Hoerde depuis un an et demi que fonctionne le gaz d'eau. Si ces résultats répondaient à tout ce qu'on en attendait, on n'aurait pourtant pas manqué de les faire connaître. Enfin, en Angle- terre, M. J. von Langer, ancien ingénieur des éta- blissements de Wittkowitz, est bien parvenu à fonder, avec l'appui de capitaux considérables, une Société pour l’exploitalion de ses brevets rela- tifs à la préparation du gaz d’eau. Mais, encore ici, les résultats obtenus ne sont pas en rapport avec les espérances ou les promesses auxquelles on s'é- tait laissé aller. De toutes ces tentatives il faut donc conclure que dans les conditions écono- miques de l’industrie européenne, le gaz d’eau n'est pas appelé à jouer le rôle important qu'on lui avait prédit pour la production des hautes tem- pératures. En ce qui concerne son emploi pour l'éclairage, les progrès réalisés en Europe ne sont pas non plus très encourageants. On avait cru momentané- ment, qu'appliqué à la produclion de la lumière incandescente (autrefois avec le platine, aujour- d’hui avec la magnésie), le gaz d’eau était destiné à remplacer le gaz d'éclairage. De simples considé- rations d'hygiène s'opposent déjà à cette applica- tion dans les localilés où ce gaz serait distribué au moyen d’un réseau de canalisation. Il est en effet cinq à huit fois plus toxique que le gaz d'éclai- rage, el, d'autre part, on n’est pas encore parvenu à lui donner une odeur caractéristique et persis- tante comme celle du gaz des cornues. Au reste, une discussion sur cette matière entre les défenseurs du gaz d’eau et les administrations responsables de la santé publique ne prouvera 9% 42 G. LUNGE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE jamais rien, lant que les premiers n'auront pas démontré pourquoi les grands établissements in- dustriels ne donnent pas au gaz d’eau la préférence sur le gaz de houille pour lout ce qui concerne l’é- clairage. On sait pourtant que ces élablissements ne dépendent pas des autorités et qu'ils préparent eux-mêmes, d’une façon régulière, le gaz d'éclairage nécessaire à leurs besoins. L'auteur de cet article avait autrefois fort bien auguré du succès du gaz d'eau pour la production de la lumière incandes- cente à la magnésie, fout en laissant absolument réservé le côté hygiénique de la question. Les fails sont encore loin d’avoir répondu à son attente. Une dernière remarque, enfin, sur l'emploi du gaz d'eau dans l'Amérique du Nord, où il serait parvenu à remplacer le gaz d'éclairage dans un tiers environ des localités. Indépendamment du fait qu'en Amérique l’industrie est beaucoup moins entravée qu’en Europe par des considérations d'hygiène, l'emploi du gaz d’eau n'est pas sans présenter une ombre au tableau ; on s'émeut vive- ment de la fréquence des accidents. En outre, il ne faut pas oublier que le côté écono- mique de la question se présente d’une façon tout autre que chez nous. Ce que l’on appelle en Amé- rique « gaz d’eau » est fort différent du produit que nous désignons sous ce nom. Nous entendons par là un mélange gazeux, presque inodore, contenant en volumes, environ 50 °/, d'hydrogène et 40 ?/, d'oxyde de carbone, mélange qui brûle avec une flamme non lumineuse et ne peut par conséquent être employé que pour la production de la lumière incandescente. Sous ce même nom les Américains désignent un mélange de «gaz d’eau» pur (préparé au moyen de leur excellente anthracite) avec 20- 30 °/, d'hydrocarbures provenant des résidus lourds du raflinage des pétroles; cette matière pre- mière fait totalement défaut dans l’Europe occiden- tale. Le gaz américain possède une odeur péné- trante, brûle avec une flamme très lumineuse, et, vu le prix relativement bas des charbons bitumi- ugux en Amérique, il présente, vis-à-vis du gaz de houille des avantages réels que la lumière incan- descente à la magnésie est loin d'offrir en Europe. On voit par là qu'il ne faut pas songer à établir une comparaison quelconque entre les produits désignés sous le nom de gaz d’eau en deçà et au delà de l'Atlantique. Les considérations détaillées dans lesquelles nous sommes entrés au sujet de ce chapitre fort important des combustibles gazeux, nous obligent à mentionner simplement divers problèmes de mème palure qui ne manquent pas non plus d’in- térêt. Tels sont les travaux entrepris aux États- Unis pour l’ulilisation des gaz naturels comme combustibles, les questions qu’on se pose sur la durée de ces sources merveilleuses; enfin, dans un autre ordre d'idées, les résultats heureux obtenus par M. Mond pour produire simultanément l’ammoniaque et le gaz à chauffer !. HIT Nous passons maintenant à une autre question d’un grand intérêt également, tant pour l’industrie chimique que pour l’industrie en général; nous voulons parler de la préparation économique de l'oxygène à partir de l'air atmosphérique. On se rappelle que le procédé Marguerite consistait à transformer la baryle en peroxyde par grillage à l'air, el à régénérer ensuite l'oxygène et la baryte par l'action d’une chaleur plus intense. Deux chi- mistes français, les frères Brin, ont considérable- ment perfectionné cette méthode, encore améliorée depuis par la compagnie anglaise qui a repris leurs brevets. On doit lout particulièrement aux ingé- nieurs de cette société d'avoir transformé la méthode Marguerite en un procédé à marche con- tinue. Au lieu d’avoir recours à des températures fort différentes pour fixer l'oxygène de l'air sur la baryte et pour l'en dégager, ils sont arrivés au même résultat en opérant à température cons- lante, mais en faisant varier la pression dans les appareils. D'autre part, le chimiste de la So- ciété anglaise, M. Thorne? s’est efforcé de trouver de nouvelles applications techniques du gaz oxygène: des perfectionnements dans la purification du gaz d'éclairage, l'emploi de l’oxygène pour le blan- chiment des matières textiles et de la päte de pa- pier, pour la transformation des huiles siccatives en vernis, tels sont les premiers résultats de ces recherches que d’autres suivront certainement. Une découverte de M. Kassner‘ promet encore davantage en ce qui concerne la fabrication de l'oxygène à bon marché. Si l’on chauffe au rouge un mélange d'oxyde de plomb et de carbonate de chaux, on obtient du plombate calcique Ca Pb Of, qui, sous l’action de l'acide carbonique abandonne de l'oxygène, landis que le calcium et le piomb sont ramenés à leur élat inilial, carbonate de chaux et oxyde de plomb, prêts à être utilisés pour une nouvelle opération. Bien que l'inventeur fonde de grandes espérances sur l'influence que sa décou- verte peut avoir dans l'industrie, il convient cepen- dant d'attendre que ce nouveau procédé soit entré dans la pratique, pour en estimer raisonnablement la valeur. IV Dans le domaine dela grar.de industrie chimique proprement dite, — c'est-à-dire, fabrication de 1 Journal of the Society of Chemical Industry, 1889, p. 907. 2? Journal of the Society of Chemical Industry, 1890, p. 246. 3 Moniteur Quesnevillé, 1890, p. 503, 614. PP PO PT G. LUNGE. —- REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE : 13 l'acide sulfurique, de l'acide chlorhydrique, du sulfate de soude, de la soude, du chlore, de l'acide nitrique, ete. —il n’y a à mentionner aucune trans- formation technique fondamentale. Ce qu'il y au- rait à dire des découvertes les plus importantes remonte aux années précédentes, comme le pro- cédé Chancel pour la régénération du soufre des résidus de soude, ou bien est de date si récente que l'avenir seul permettra d'en apprécier la valeur, C’est pourquoi nous donnerons ici la première place non pas aux questions techniques, mais bien à un fait d'ordre commercial d’une signification très importante : la réunion de (outes les plus grandes fabriques anglaises utilisant le procédé Leblanc, en une vaste compagnie, Unitel Alkali Company Limited. Les maisons les plus renommées : Ten- nant, Muspratt, Kurtz, Gaskell et Deacon, Sullivan, Allhusen, Jarrow, et une quantité d’autres ont ainsi subitement disparu. Leurs propriétaires ne sont plus qu'actionnaires ou administrateurs de la nouvelle société. Les seules fabriques anglaises qui aient conservé leur autonomie sont les maisons Gamble et Chance. Cette suppression de toutes les individualités dans un pays qui avait toujours marché à la tête de l’industrie de la soude est un événement sans précédent dans l'histoire de la chimie appliquée. Aura-t-il pour effet de ren- forcer ou d’affaiblir l’esprit d'invention et d’inilia- tive? Les deux alternatives sont possibles; l'avenir seul en décidera, Un fait est cependant certain; c'est que la fonda- tion de l’Alkali United Company Limited doit être considérée comme une tentative d’accaparement ou plutôt comme une ligue de défense dirigée contre la concurrence énergique faite au procédé Leblanc par les procédés à l'ammoniaque de Solvay. Bien qu’en apparence il ne se soit produit aucun chan- gement important dans le disposilif des appa- reils Solvay, les fabriques syndiquées qui en font usage ont pris un développement considérable dans toutes les grandes régions industrielles. De plus, le procédé Schlæsing, bien qu'installé plus modestement donne de bons résultats. Enfin, il existe, en Allemagne surtout, plusieurs fabriques indépendantes qui travaillent d’après le procédé à l’ammoniaque. Depuis longtemps les défenseurs du procédé Leblanc avaient regardé la partie comme perdue en ce qui concerne la soude calcinée ‘sel de soude), et avaient voué tous leurs soins à la fabrication de la soude caustique pour laquelle ils avaient une certaine avance. Mais, même sur ce terrain, les fabriques Solvay avaient peu à peu engagé une lutte énergique et porté des coups sensibles à leurs concurrents. Aussi, depuis plu- l Zeitschrift für angewandte Chemie, 1889, p. 631. sieurs années déjà, les fabriques utilisant les pro- cédés Leblanc avaient été obligées en quelque sorte de renverser les rôles de leur fabrication, et de reléguer la soude, et même la soude caustique, au rang de produits secondaires dont les prix res- taient entre les mains des fabriques Solvay. En même temps, plusieurs fabriques anglaises et quelques maisons françaises donnaient toute leur attention à la préparation de l’acide chlorhydrique, laissée jusqu'alors au second plan. Le chlore qu'on en retire, ou plutôt les dérivés solides qu'on prépare avec ce gaz, soit le chlorure de chaux et le chlorate de potasse, devaient leur fournir un bénéfice modéré, ou tout au moins diminuer leurs pertes. De fait, ni M. Solvay, ni ses émules, n’ont encore obtenu aucun résultat dans toutes leurs tentatives pour adapter à leur système cette branche des produits chlorés, tentatives basées, on le sait, sur l’utilisation du chlore con- tenu dans leurs résidus de chlorure de calcium. L'auteur de cetle revue a du reste démontré par des considérations thermochimiques ! que l’on ne pouvait guère compter sur une solution écono- mique de ce problème, attendu que le chlorure de calcium présente à peu près la même stabilité que le sel marin. Cette fabrication des produits chlorés, — dernier retranchement des procédés Leblane, dont ils sont la raison d’être, — a élé sérieusement menacée par les inventeurs qui cherchent à préparer le chlore au moyen du chlorure de magnésium, com- posé tout à fait aple à ce genre de réactions. A vrai dire, il n'y aurait pas eu là de quoi inquiéter les fabriques Leblanc, si la préparation du chlorure de magnésium devait être entreprise, comme on l’a plusieurs fois proposé, par les fabriques Solvay. Mais on sait qu'en réalité il en est tout autrement : le chlorure de magnésium à l’état de solution con- centrée est obtenu à Stassfurt, comme sous-pro- duit, sans valeur, résullant de la fabrication des sels de potassium. Ces solutions sont en quantités plus que nécessaires pour suffire largement à toute la consommation de chlore qui se fait actuellement sur la surface du globe; elles deviennent de plus en plus encombranles; on ne sait comment s’en débarrasser, surtout en présence des exigences croissantes des autorités sanilaires. Le fait que l’on puisse vendre quelques milliers de tonnes de chlorure de magnésium ne change nalurellement rien à cette situation. Il n’en est cependant pas moins certain que la préparation du chlore par le procédé Weldon-Péchiney devait trouver à Stassfurt son vrai centre d'activité, si les résultats 1 Voir SCHEURER-NESTNER, Bulletin de la Société chimique, 1889. vol. I, p. 405, 4% CG. en étaient bien établis. De fait, les fabricants de Stassfurl se sont opposés à l'introduction de ces nouvelles et ingénieuses méthodes; elles leur ont paru trop compliquées; le succès leur a semblé douteux; ils ont préféré suivre leur propre voie qui devait, dit-on, les conduire à un meilleur ré- sultat. Jusqu'à présent ils n’en ont pas donné la preuve; leurs essais actuels, pas plus que ceux tentés précédemment, n’ont fourni une solution précise et définitive de la question. Il y a quelques années encore, il était incontes- tablement reconnu que les produits chlorés du monde entier étaient préparés, à de rares excep- tions près, par les fabriques Leblanc qui trou- vaient là leur principale source de bénéfices. Une ère nouvelle a semblé s'ouvrir pour ces fabriques par suite du succès éclatant obtenu par le procédé Chance : cette méthode permeltrait de retirer du soufre des résidus de soude, et cela, à un prix quatre à cinq fois inférieur à celui du soufre des pyrites. Ainsi se trouverait fermé le cycle ingé- nieux de réactions dont les phases principales ont été découvertes par Nicolas Leblanc. Ce résultat devait assurer pour longtemps à lout le système une vitalité complète. Malheureusement le procédé Chance n’est pas sans présenter encore quelques ombres, Entre des mains moins habiles que celles de l'inventeur, la mise en œuvre de masses énormes de gaz sulfhydrique présente de grandes difficultés pratiques. Mème au point de vue économique, la méthode ne semble pas avoir tenu tout ce qu'elle avait promis. On peut et doit cependant espérer que ces difficultés pourront être atténuées par une plus longue expérience, si ce n’est mème entièrement vaincues. Parmi les nombreux el nouveaux procédés proposés pour la préparation du chlore, tous ceux qui reposent sur l'emploi de l’acide chlorhydrique gazeux ou liquide ne sont en aucune manière dirigés contre le procédé Leblanc, mais seulement contre les méthodes Weldon ou Deacon, étroite- ment liées du reste avec celui-ci. Depuis long- temps la supériorité de la méthode Deacon a été reconnue; elle se trouve encore accrue par le système de M. Hasenclever pour l’utilisation des acides impurs des fours, dont on peut déplacer l'acide chlorhydrique au moyen de l’acide sulfu- rique. Bien qu'il s'agisse là d’un fait définitive- ment acquis, la plupart des fabriques ont con- servé la méthode Weldon, parce que les frais d'installation du procédé Deacon les effraient et que d'autre part, à chaque instant on annonce de nouvelles méthodes répulées encore supérieures. Il serait presque impossible d'analyser tous les nouveaux syltèmes proposés. Une pareille étude ne présenterait du resle pas grand avantage, LUNGE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE attendu que jusqu'à présent, aucun de ces systèmes n’est sorti de la période d'essais. On remarquera toutefois que les procédés reposant sur la réaction (découverte par Schlæsing) entre le bioxyde de manganèse, les acides chlorhydrique et nitrique, sont actuellement les plus en vue, notamment depuis que la récupération de l'acide nitrique des vapeurs nilreuses peut s’opérer d’une facon complète au moyen des colonnes à pla- leaux. Le chlore, ce gaz tant redouté dans l'industrie par suile de ses aclions corrosives et de sa toxicité, est maintenant au nombre des produits livrés dans des récipients en fer où on le liquéfie par le froid et la compression. C’est là un fait digne de remarque. Le chlore liquide est donc à ajouter à la liste des gaz liquéfiés préparés industrielle- ment : acide carbonique, ammoniaque, acide sulfu- reux, chlorure de méthyle, et oxygène comprimé à 100 atm. Sous cette forme, le chlore se prêtera plus facilement à de nouvelles applications. Dans cet ordre d'idées, il se pourrait aussi que la belle découverte des tubes laminés de Mannesmann ait une réelle importance. A résis- tance égale, ces tubes sont cinq fois plus légers que les tubes soudés; ils rendront certainement des services soit pour le transport des gaz liquéfiés, soit pour les réactions qui se font sous pression. Tandis que les fabriques Leblane et Solvay, et avec elles nombre d'inventeurs espèrent trouver la fortune dans la découverte de procédés chi- miques pour la préparation de la soude et du chlore, l'électricité, qui n'avait pas inspiré jusqu'à présent de craintes sérieuses, semble entrer sérieu- sement en lice. Il y a un an à peine, la décomposi- lion des chlorures par le courant électrique n'était pas un problème résolu. En réalilé, la question élait restée bornée à des essais d’une portée restreinte. Par exemple, on voyait figurer à l'Exposition de 1889 du chlorate de potasse préparé par voie électrolytique d'après une méthode imaginée par M. Gall etle comte de Montlaur. Déjà, à cette époque, l’auteur de cette revue avait pu se con- vaincre qu'il s'agissait bien là d’un procédé indus- Lriel sérieux, fonctionnant en demi-grand. Depuis, ces inventeurs ont fondé dans la Suisse française une fabrique utilisant 700 chevaux de force, qui livre maintenant du chlorate de potasse d'une façon régulière. Celle solulion du problème ne concerne cepen- dant qu'un produit de consommalion limitée. Il élait encore beaucoup plus important de chercher à dédoubler les chlorures alcalins en soude (ou po- tasse) et en chlore, pour utiliser ensuite ce dernier sous une autre forme. Cette question élait toujours restée sans solution pralique. Elle parait cepen- su sb dtataat éds ste. D. 2 0 vil Ga. : G. LUNGE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE 45 dant avoir fait un très grand pas dans le courant de l’année 4890 à la suite des recherches faites par la fabrique Griesheim à Francfort-sur-Mein. On y pratique actuellement en grand la décomposition électrolytique du chlorure de potassium qui sert ainsi à préparer la potasse et le chlorure de chaux. On prétend que loutes les difficultés auraient été surmontées et qu’en principe le même traitement serait applicable au sel marin. Il est difficile de dire à quelle époque ce traitement du chlorure de sodium entrera réellement dans le domaine des faits. [Il n'y aurait, en effet, rien d'étonnant à ce que dans ce moment-ci la décomposition électrolytique du chlorure de sodium ne püt se faire à des condilions assez économiques pour lutter avec les anciennes méthodes. L'électrotechnique demande en effet à être encore travaillée et perfectionnée par un ensemble de recherches pratiques et scien- tifiques. Dans un ordre d'idée très voisin on a proposé d'employer l'électrolyse pour le blanchiment des fibres textiles et de la pâte de papier. Des nom- breux essais tentés dans celte voie les plus connus jusqu’à présent sont ceux de L'Hermite. Malgré la réclame considérable faite à leur sujet, ils n’ont pas eu de succès pratique durable. Peut-être les procédés Kellner auront-ils plus de chance. Attaquant hardiment le problème, cet inventeur électrolyse le sel marin en solution pour produire dans la masse même à traiter les ingré- dients nécessaires au blanchiment, la soude et le chlore. Il doit y avoir là de grandes difficultés d'ins- tallations à vaincre. D'après ce que l’on sait des premiers résultats obtenus en Angleterre par une des plus grandes fabriques de papier de ce pays, il faudrait croire qu'ils sont tout particulièrement favorables. On voit par là que l’année 1890 ne nous apporte aucune solution définilive; il est même prémaluré d'en attendre une en 1891. Quoi qu'il en soit, si des procédés de ce genre devaient se généraliser, l’industrie du chlorure de chaux verrait se fermer un de ses principaux débouchés. La fabrication de l'acide sulfurique passait autre- fois — et avec raison, — pour la base indispen- sable de la grande industrie de la soude ; aujour- d’hui, elle perd peu à peu cette position et la perdra probablement tout à fait dans un avenir plus ou moins rapproché. La moitié environ de la soude con- sommée dans le monde entier ne se prépare plus au moyen du sulfate de soude, mais bien directement, à partir du sel marin; et pourtant, fait élonnant, la production totale d'acide sulfurique, bien loin de diminuer, est en augmentation continuelle. De fait, l'acide employé autrefois pour la préparation du sulfate a trouvé un vaste débouché dans la fabrication des superphosphates. Les engrais arti- fils constituent, à l'heure actuelle, une des branches importantes de l’industrie chimique; ils sont du reste destinés à prendre encore une grande extension par suite de la découverte des gisements de phosphates de la Somme, de la Floride (Amé- rique du Nord), etc. Enfin, bien qu’on puisse tirer parti des scories du procédé Thomas, — (source très importante d'acide phosphorique) — après un simple broyage et sans leur faire subir aucun traitement chimique, on trouvera encore de larges emplois de l'acide sulfurique dans le traitement des phosphates minéraux et du noir animal, dans la préparation de l'acide nitrique. Cette dernière application devient considérable, non seulement pour obtenir l'acide nitrique pur, mais aussi pour préparer les mélanges nitriques des deux acides, mélanges employés en grand dans deux industries différentes : la fabrication des couleurs artificielles et celle des explosifs. Cet ensemble de débouchés variés nous expliquent pourquoi la production de l'acide sulfurique est destinée à suivre pendant longtemps encore une marche ascendante. Il y aurait à enregistrer de nombreux perfec- tionnements apportés soit aux appareils, soit aux manipulations concernant la fabrication de l'acide sulfurique. L'auteur a pu s’en convaincre en réu- nissant les matériaux nécessaires à la rédaction de son nouveau traité sur la question, — traité qui doit paraitre prochainementen Angleterre !. Cepen- dant, il n'y à à mentionner aucune modification fondamentale qui puisse intéresser les lecteurs de cette Revue. Les perfectionnements qui ont été proposés de divers côtés, en particulier par l’au- teur, doivent encore subir la sanction d'une plus longue expérience. Il suffira done de rappeler que ces propositions ont été fondées sur une nouvelle thérorie de la formation de l'acide sulfurique, (théorie, qui a été dévelopnée d’abord par lauteur?, et, peu après, d'une façon tout à fait indépen- dante, par M. Sorel *. Fait digne de remarque, des essais praliques dans cette même voie avaient été tentés, il y a déjà plusieurs années, avec peu de succès du reste, parce que les conditions essen- tielles du procédé n'étaient pas encore bien connues. On abandonne complètement aujourd’hui, comme n'élant plus soutenable, la théorie donnée par M. Raschig sur la formation de l'acide sulfurique ; on se rappelle que, d'après cette conception, dont la hardiesse avait frappé l’imaginalion de bien des chimistes, il faudrait admettre que l'acide sulfu- 1 Voir aussi les travaux de M. KiENLEN, Moniteur Quesne- ville, 1889 ct 1890. 2 Berliner Berichte, 1885, p. 1391 ; 1888, p. 67 et 3323. 3 Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, 1889, p. 240. 416 G. LUNGE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE rique se forme aux dépens de dérivés hypothé- tiques de l’hydroxylamine ?, La fabrication de l'acide sulfurique fumant con- tinue à faire des progrès en Allemagne. Elle est restée stationnaire en Angleterre et ne s’est pas encore acclimatée en France. Malgré tous les mys- tères dont on entoure cette question, on sait au- jourd'hui que la plus grande partie de l'acide sul- furique fumant estpréparée synthétiquement parle procédé G. Winkler : réaction de contact de l'acide sulfureux et de l’oxygène en présence de la mousse de platine chauffée. Les diverses installations ne différent que sur des points de détails. Les uns emploient les gaz des fours à pyrite, les autres, au contraire, de l'acide sulfureux pur que l'on peut du reste retirer par la méthode Schrôder-Hänisch des gaz pauvres des fours à pyrites. Ce dernier procédé a doté l’industrie d'un nouveau produit, le gaz sulfureux liquide’que l’on expédie dans de rorts récipients en fers ou dans des wagons spé- ciaux d’une contenance de 10.000 kilos. Les fabri- ques de sulfites, de cellulose à sulfite, les maisons de blanchiment, les fabriques employant des machines frigorifiques, trouvent là une matière première facile à manier, qui, pour le moment, ne se fabrique en grand qu’en Allemagne. Le développement considérable de l'industrie des explosifs a donné une vigoureuse impulsion à la fabrication de l'acide nitrique. Depuis l'intro- duction des poudres sans fumée, cet acide tend à remplacer peu à peu le salpêtre et sa préparation a été l’objet de plusieurs perfectionnements, parmi lesquels il convient de citer ceux dus à M. Guttmann relatifs à la condensation ?, Plusieurs autres amé- liorations qui se sont produites dans des établisse- ments d'État, sont encore tenues secrètes. Le nombre des nouveaux explosifs croît avec une rapidité verligineuse. Aujourd hui on préconise l'emploi de l’éther sulfurique pour telle ou telle composition; demain, on ne voudra plus que de l’éther acétique, dont le succès n’aura pas une plus longue durée. Entre temps, on installe de grandes fabriques pour la préparation de ces produits auxi- liaires, et, avant même qu'elles aient commencé à fonctionner, on signale de nouvelles inventions qui font abandonner complètement ces produits pour les remplacer par d’autres destinés à subir probablement le même sort. C’est une véritable fièvre. Les poudres sans fumée sont toujours en hon- neur. Il est difficile de prévoir quelle sera la solu- tion définitive donnée à ce problème. En ce moment les compositions d'Abelel Dewar en Angleterre, de 1 Annalen der Chemie, v. 241, p. 242, 2 Zeitschrift für angewandte Chemie, 1890, p. 507. Nobel dans d'autre pays sont peut-être au premier rang des découvertes récentes. Parmi les produits nouveaux touchant à la grande industrie, il convient de citer enfin la dé- couverte de l’alun de soude de M. Augé !. On ne peut encore se prononcer définitivement sur l’impor- tance technique de cette invention, V Nous terminerons celte revue par quelques con- sidérations sur un métal dontla préparation sort du cadre des procédés métallurgiques usuels, et que nous avons par conséquent bien le droit de ratta- cher à l’industrie chimique : nous avons nommé l'aluminium. On sait que ce corps remarquable a été préparé pendant de longues années à Salindres (Gard) par le procédé de laboratoire de Wôühler et Deville. Les applications en étaient restées fort limitées. Subitement, ces dernières années, ce métal a pris un tout autre rang dans l’industrie chimique aussi bien à l’état de pureté qu'à l’état d’alliages avec le cuivre, le zinc, l’étain, ete., et plus récém- mentaveclefer. Lestermes de bronze d'aluminium, laiton d'aluminium, acier à l'aluminium sont main- tenant couramment employés dans l’art des cons- truetions mécaniques. [Il est vrai que le métal pur n'est pas encore parvenu à y prendre pied, malgré son prix actuel qui ne représente plus que le 1/5 etmème le 1/10 de ce qu'il était autrefois. On le voit, les changements dans l'industrie de l'aluminium se suivent avec une grande rapidité, parfois funeste pour ceux qui travaillent cette question. Il y a deux ans à peine, on regardait comme impossible de préparer industriellement l’alumi- nium sans l'emploi du sodium mélallique. Aussi, tous les inventeurs ont voué d’abord leurs plus grands soins à la préparation de ce métal qui n’était alors utilisé que dans les laboratoires. Grâce à ces recherches, on peut aujourd'hui s'en procurer facilement et à bon compte. Mais, par une coïncidence curieuse, le sodium a élé presque complètement abandonné dans la fa- brication de l'aluminium. Les nouveaux procédés de Cowles (pour la préparation des bronzes), de Héroult et de Hall (pour la préparation du métalet de ses alliages) ont démontré que la méthode élec- trolytique proposée autrefois par Bunsen était la plus avantageuse. On nous annonce enfin d'Amérique que l’on serait parvenu à retirer l'aluminium de l'argile par une méthode si simple, que le prix actuel de 15 francs par kilo devrait baisser dans l'avenir jusqu'à 1 franc par kilo, soit en dessous du prix du cuivre, On fera bien de n'accueillir ces récits l Moniteur Quesneville, 1890, p. 857. PH. A. GUYE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE 47 qu'avec les réserves les plus formelles. S'ils de- vaient se confirmer, il en résulterait des consé- quences incalculables pour la construction des appareils et machines de toute nature. Mais on nous a si souvent annoncé de pareils résultats qu’il convient d'avoir des preuves palpables pour que nous puissions y donner créance. G. Lunge, Professeur à l'Ecole polytechnique de Zurich. MATIÈRES COLORANTES ET PRODUITS ORGANIQUES Il est très difficile de donner une idée à peu près exacte des progrès réalisés en une année dans l’industrie des matières colorantes et des produits organiques de synthèse. La principale raison en est dans le mystère dont on entoure toutes les recherches sur ces questions. Les procédés ne viennent que peu à peu au jour, car les brevets, qui sont dans ce domaine une des sources d'information les plus importantes, ne paraissent souvent que très tardivement, après l'expiration des longs délais nécessités par les exigences des législations sur la matière. En outre, il s'écoule presque toujours beaucoup de temps, depuis le moment où un procédé est ex- périmenté dans les laboratoires jusqu’à l’époque où il est assez perfectionné pour entrer réellement dans la pratique. Pour ces molifs le lecteur ne s'étonnera done pas de rencontrer parfois dans cette Revue spé- cialement consacrée à l’année 1890 quelques in- ventions dont les premières origines remontent à une époque un peu antérieure. Il Par leur nombre, les couleurs azoïques sont tou- jours au premier rang. Elles sont l’objet d’études incessantes dans les laboratoires de recherches de toutes les grandes fabriques de matières colo- | rantes. Pour mettre convenablement en lumière les ten- dances nouvelles dans cet ordre d'idées, rappelons d’abord en quelques mots le chemin parcouru en ces dernières années. Les azoïques les plus employés comme produits tinctoriaux pouvaient se rattacher | à deux groupes principaux dérivant, au point de vue théorique, d'un composé fondamental, l’azo- benzine : CG HS — Az — Az — COH® par remplacement d’un ou plusieurs atomes H par les groupes suivants, soil : 1° Les amido-azoïques : H remplacé par le groupe amidogène AzH?; 2° les oxy-azoïques : H remplacé par le groupe oxyhydrile OH. En outre, un ou plusieurs atomes H peuvent être remplacés par des groupes acides, SO°H, CO?H, qui donnent aux azoïques la propriété de se fixer sur la fibre ; de même, les deux radicaux phényles C*H° peuvent être remplacés par des résidus plus com. plexes, tolyle CfH*.CH, naphtyle C!° HT, etc. On voit par là sur quel nombre considérable de matières colorantes a pu s'exercer la sagacité et la patience : des chimistes !. Malgré la grande étendue de ce champ de re- cherches, on l’a trouvé trop petit, et nous rendions compte, il y à un an, des travaux qui ont conduit aux composés présentant deux fois la fonction azoïque (— Az — Az —) et appelés pour cela disa- zoiques où télrazoïques. Là ne se sont pas encore arrètésles chercheurs, et la tendance dominante aujourd'hui est de greffer sur les azoïques déjà connus les fonctions chi- miques les plus variées. Nous allons en citer quelques exemples. MM. Rosensthael et Norlting ont traité la métani- traniline par la poudre de zinc en solution alea- line, et l'ont ainsi transformée successivement en azoxybenzine diamidée, en azobenzine diamidée et en phénylène-diamine. 2 mol. H2 Az.C6H4.Az202:= > H?Az. CGH1.Az—A7. CHA. AzH2 ce 0 Nitraniline È Azoxybenzine diamidée 2s—> H2A7.C6H1,A7—A7.CGHfA7H?222—»2 mol.H?A7.C6H4.AzH? Azobenzine diamidée Phénylène-diamine L’azoxybenzine diamidée peut être diazotée sur chacun de ses deux groupes AzH?, de sorte qu'en faisant réagir sur l’a-sulfo-4-naphtol, par exemple, le sel diazoïque formé, on obtient une superbe ma- tière colorante, le rouge de Suint-Denis, plus écla- tant encore que le rouge ture. Cette réaction s'opère donc en deux phases 1° formation d’un dérivé de l’azoxybenzine, et 1 La méthode générale de préparation des azoïques se prète, en effet, à une multitude de réactions. On se rappelle que cette méthode comporte deux opérations : 1° Formation d’un sel diazoïque par l’action de lacide nitroux sur un sel d’une amine aromatique. Exemple : CSHS.AzH2HC1-+ Az02H = H20 + CSH5 — Az — Az — CI Chlorhydrate Acide Chlorure d'aniline nitreux de diazobenzine 90 Réaction de ce sel sur un phénol ou sur une amine aro- matiques. Exemples : CSH5 — A7 — Az — Cl + CSH.OH — H CI + Chlorure de diazobenzine Phénol + CSH5 — Az — Az — C6Hi.0H oxy-azobenzine CGH® — Az — Az — Cl + CSH5.AzH? = HCI + Aniline + C5H5 — Az — Az — C6HA4.AzH? amido-azobenzine 48 PH. A. GUYE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE 2% réaction diazoïque. 4/. Rosensthiel a reconnu de- puis qu'il y avait avantage à interverlir l'ordre des opérations, soit à diazoter la nitraniline, la combi- ner avec un phénol et réduire partiellement par une solution de glucose le produit ainsi formé. Dans ces conditions le rendement est théorique. En outre, si l’on opère à chaud avec un excès de glucose, on obtient presque quantitativement l’a- zobenzine diamidée. Ces intéressantes recherches fournissent done les moyens de préparer tous les diazoïques dérivés soit des azoxybenzines, soitdes azobenzines diamidées. La Société badoise a fait breveter des dérivés de la diphénylurée diamidée : AzH? H Az.C6Hi,AzH° co/ 04 NAz H2 NH Az. C5 Hi, Az H? Urée Diphénylurée diamidée On les prépare en faisant réagir le gaz chloroxy- carbonique sur les mono-azoïques de la paraphé- nylène-diamine : CI H2Az.C6Hi.Az=— Az—R CORRE —2HCI + CI H? Az.C5Hi.Az = Az—R / HAz.CSHi.Az— Az—R + co, Ah Pa A H Az.C6Hi.Az— Az—R Les mono-azoïques de la paraphénylène-diamine sont eux-mêmes obtenus en diazotant son dérivé mono-acétylé H°?Az.C°H*.AzH.COCH*, en combi- nant le sel diazoïque formé avec un phénol : l'acide salicylique pour la préparation du jaune colon , l'acide naphtionique pour la préparation du rouge saumon. Par un traitement à la soude on élimine ensuite le groupe acétyle CO CH? sous forme d'acé- late de sodium, et il ne reste plus alors qu'à faire réagir le gaz chloroxycarbonique !. On fait aussi des azoïques dérivant des oximes. On savait que les diamines des cétones ?, la diami- dophénylcétone par exemple CO (CSH*.AzH?) ?, ne donnent pas de couleurs azoïques teignant direc- tement sur coton. Il n’en est plus de’même lors- qu'on combine au préalable cette cétone avec l'hydroxylamine AzH?.0H. On obtient ainsi une diamine de la formule : OH.Az—C —(C°H*.AzH°}. C’est cette dernière qui par diazotation et combi- naison avec des corps à fonction phénolique, se transforme en matières colorantes teignant direc- tement sur coton *. La maison #. Bayer et Ce a décrit aussi des azoïques dérivant de l'oxyde de phényle diamidé H2Az. CCH4.0.CCH'AzH?. 1 Chem. Ber., 1890. Ref. 307. 2 Nous adoptons pour les dérivés appelés autrefois « acé- toniques » les dénominations plus simples de « cétoniques », « cétones », etc., qui sont actuellement employées dans le nouveau supplément du Dictionnaire de Wurtz en cours de publication. 3 Chem Ber., 1890. Ref. 535. On devait déjà à l'industrie des matières colo- rantes la fabrication en grand de plusieurs pro- duits dont la préparalion était réputée fort délicate dans les laboratoires : l’oxychlorure de carbone, le trichlorure de phosphore, l'éther acétique, la phé- nylhydrazine, etc. A cette liste on peut donc ajou- ter les composés sur lesquels nous venons d’at- tirer l'attention, soit l'hydroxylamine, les dérivés diamidés de l’azoxybenzine, de l’azobenzine. A mentionner enfin, avant de quitter le chapitre des diazoïques, la découverte de la première ma- tière colorante verte appartenant à ce groupe !. C'est un dérivé de la dioxynapthaline 1.8, dont nous parlerons plus loin. IT Les couleurs dérivées du triphénylméthane CH (C6H° ont été l’objet de bien des études; il sem- ble qu'il doit être difficile de trouver du neuf en cette voie. Cependant, on peut signaler quelques travaux intéressants relalifs à des dérivés de l’au- rine, aux benzéines et aux rhodamines. Commençons par l’aurine qu’on peut regarder comme un dérivé du triphénylméthane dans lequel on auraitremplacé 3H par 30H, soit CH (CS H* OH}? corps quiperd immédiatement une molécule d’eau : CiHi.0H C_—CSHs.OH SN C5H4.0 Aurine On a oblenu un dérivé tricarboxylé de l'aurine, vendu sous le nom de violet de chrome, en faisant réagir l'acide salicylique sur l'alcool méthylique, en présence d’un oxydant tel que l'acide nitreux : OH f OH 3 HO.CH®+ 30H12 —6H—HO0.C— (ce 120 ) CO°H CO?H Cette réaction a été découverte par les chimistes de la fabrique Geigy de Bäle *. On se rappelle que les dérivés les plus simples des benzéines avaient été obtenus autrefois par l’ac- tion du toluène trichloré sur les phénols : _CSH5 C6H5.CCL + 2CSH5.0H+ H,0 —H0 —C—C5H1.0H + 3HCI. Trichlorotoluène NGH1.0H Le pouvoir tinclorial des composés préparés de la sorte avait été trouvé insuffisant. Aujourd’hui, la question a été reprise en remplaçant les phénols par leurs dérivés amidés et, particulièrement, par | le méta-amidophénol diméthylé ou diéthylé : OH Ci H4 OH C5 H1/ NAz(C2H5)2 NAz(CH5}2 | Fürberei und Musterzeitung, 1890, p. 229. 2? Chem. Ber., 1890. Ref. 163. . ; | PH. A. GUYE . — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE 49 En faisant réagir le toluène trichloré sur ce corps diméthylé, on obtient une rosamine brevetée par la Socièté pour l'industrie chimique de Bale ! : COR à / OSH4 — A4 (CH? HO \C6Hi —"Az(CHS)2 Tétraméthylrosamine Dans les laboratoires des anciens établissements Meister Lucius et Brünning on a obtenu le même com- posé en faisant réagir la diméthylamine sur le chlorure de benzéine ? : CH" 7€ 65H53 — CI je 0 H0/ \cixs Chlorure de benzéine Une méthode analogue avait déjà permis de pré- parer la rhodamine à parlir d’un chlorure qui se formelorsqu'on fait réagir le chlorure de phosphore sur la fluorescéine : HO — C6 H® CSHi— CO CI—CSHS, . ,CSHi — CO 0 N\c/ SET | HO — CiH3/ RE er) CLS CE AN EE 0 Fluorescéine Chlorure CH3)2— Az— C6HS CS Hi — CO a Dé TC | (CH) AT NCA 0 Rhodamine Depuis, d’autres travaux ont démontré que l'on pouvait passer directement de la fluorescéine à la rhodamine par l'action à chaud de la diméthyla- mine sur la première de ces deux substances. Il se forme en même temps un composé intermédiaire — le rhodaminol, — soluble dans les alcalis, tei- gnant la soie en brun saumon fluorescent : (CH? — A — CHE, | CHI — CO - De: | HO Cr Net) Rhodaminol Cette réaction a été l’objet de deux brevets, l’un pris par la Société des matières colorantes de Saint. Denis ?, l'autre par la Manufacture lyonnaise de ma- lières coloran'es À La-formation de ces deux corps avait élé décou- verte plusieurs mois auparavant par 47. Grimaur qui avait déposé à ce sujet un pli cacheté à la Société industrielle de Rouen *. La fabrique #. Baeyer et C° a remplacé l’an- hydride phtalique employé dans la préparation usuelle de la rhodamine par l'anhydride sucei- nique; la matière coloranfe ainsi obtenue n’est plus un dérivé du triphénylméthane ; mais, vu l’analogie l Moniteur Quesneville, 1890, p. 292. ? Chemische Industrie, 1890, cahier 19. 3 Moniteur Quesneville, 1890, p. 1206. 4 Moniteur Quesneville, 1890, p. 1211. 5 Bull Soc. Chim., 1891, p. 2. Pli cacheté du 25 mai 1889. 5 Chem. Ber , 1890, Ref. 532. du mode de formation, on lui a donné le nom de rhodamine S': Az (CH HV Me 2C6F HC 1074 NoH \c Anhydride suceinique — 33H20 + Méta-amidophénol diméthylé C2Ht C6 Hi—Az (CH)? O0 | NA CO=07 \CsHiT Az (CHS)2 Rhodamine S La rhodamine $S teint le coton non mordancé en rose; son pouvoir colorant serait cinq fois plus fort que celui des rhodamines ordinaires. La fabrique eister Lucius el Brünning a organisé la fabrication d’un dérivé du triphénylméthane, le bleu patenté, dont la préparation est assez intéres- sante !. La mélanitrobenzaldéhyde est condensée avec la Pre = CH)? A7. C8 HAN AE (C2 H°)2 Az. Cô HA 7 NCiHt.A702 Ce dérivé nitré du triphénylméthane est réduit : le groupe AzO? est ainsi transformé en AzH?, puis, par une des réactions de Griess, en OH :° (C7 H°)? Az — C6 Hi pas (C2 Hs): AV \CGHiOH Ce composé phénolique est enfin transformé par l’action de l'acide sulfurique en acide disulfoni- que, puis oxydé : de chaux de l'acide disul- ionique formé n’est autre que le bleu patenté : le sel (C2H°)2 Az — CS Hi, , OH CZ SO &, (C2H5)2 Az —C 6Hi Nc? SO: Bleu patenté OH LIT L'indigo de synthèse n’a pas encore détrôné l'indigo naturel. Bien que l’on ait fait un pas de de plus en avant sur la voie qui pourrait peut-être conduire à une solution de la question, il faut avouer que la lutte avec le produit naturel devient de jour en jour plus difficile. Par un choix conve- nable des espèces,on avait déjà amélioré le rende- ment des cultures. D’après des observations ré- centes de 1. Schrottky ?, il y aurait encore possi- bilité de tirer un meilleur parti du produit naturel en empêchant ou en réglant certains phénomènes de fermentation qui se produisent dans les cuves aux dépens de la matière colorante. Quoi qu'il en soit de ces résultats, il convient de signaler deux synthèses récentes de l’indigo qui sont encore loin de donner des résultats pratiques applicables dans l'industrie, mais qui sont cepen- dant fort intéressantes par la manière nouvelle dont le problème a été abordé. 1 Voir UrricH. Chem. Zeiturg, 2 Leipziger Monatssehfte. f. Textilind. 1889, p. 1702. 1890, p. 17. PH. A. GUYE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE On se rappelle que les belles recherches de M. Bayer ont assigné à l’indigo la formule : CSHi— AzH HAz— CS6Hi LE RES Les groupes AzH et CO, en relation avec le noyau benzénique, élant en position ortho, toutes les synthèses de l’indigo ont été effectuées jusqu’à présent à partir de nitrodérivés de la benzine appartenant à la série ortho : acide orthonitrocin- namique, orthonitrobenzaldéhyde, etc. Pratiquement,la préparation de ces orthodérivés présente de grandes difficultés et ne peut se faire à des conditions assez économiques pour que l'in- digo de synthèse puisse lutter comme prix avec le produit nalurel. ; MW. Heumann! a done retourné le problème et a cherché à construire le noyau caractéristique de l'indigo à partir d’une aniline substituée. En faisant réagir l'acide monochloracétique sur l'aniline, ilse forme du phénylglycocolle : CSH5 — AzH? + CICH? — CO?H Aniline Acide monochloracétique = HCI -£ CSHS — AzH — CH? — CO2H Phénylglycocolle Si l’on parvenail à déshydrater ce phénylglyco- colle en lui enlevant une molécule d’eau au dé- pens du carboxyle et du noyau benzénique, de telle facon que la chaine se ferme en ortho rela- livement au groupe AzH, on devrait obtenir l’in- doxyle ou pseudo-indoxyle : CSH# — AzH C6Hi— AzH qe NE 0 EI | HOH:CO—CH? Co CH? Phénylglycocolle Indoxyle Or, comme on sait que l’indoxyle se transforme quantitativement en indigo par l'action oxydants les plus faibles, tels que l'oxygène de l'air, la synthèse de l’indigo se trouverait ainsi effectuée : des C6 Hi — AzH CSH—AzH AzH-CiHi 2 | | +20—2H?0 + | | | CO —— CH? CO—C —= C——-Cco Indoxyle Indigo C'est à ce résultat que M. Heumann est parvenu en chauffant le phényiglycocolle avec de la soude au-dessus de 200°, en reprenant la masse fondue par l’eau et en dirigeant un courant d'air dans cette solution. Cette action de la soude comme agent de condensation ne laisse pas que d'être assez cu- rieuse. Celte réaction a été ensuite appliquée à l'acide anthranilique, qui représente l’aniline dont un des atomes H est remplacé par un carboxyle CO?H : / AzH? CSH°.AzH? CH \co?H Aniline Acide anthranilique 1 Chem. Der., 1890, p. 3043 et 3431. Par l’action de l'acide monochloracétique, l'acide anthranilique se transforme en acide phénylglyco- colle-carbonique, et celui-ci, fondu avec la soude, perd de l’acide carbonique pour se convertir en indoxyle : CSHE — AzH Z | COOH OHOC— CH? Acide phénylglycocolle carbonique CéHi — AzH = C0? +0 +1 | Co RC Indoxyle Jusqu'à présent, et d’après ce qu'on en sait, on n'est pas encore parvenu à améliorer les rende- ments de ces deux réactions; ils sont encore si défectueux que l’on ne peut encore songer à les uti- liser industriellement. L'avenir nous apprendra, s’il y alà le point de départ d’un procédé réellement pratique ou s'il ne s’agit seulement que d’intéres- santes réactions de laboratoire. Nous ne quitterons pas ce sujet de l’indigo sans mentionner le fait que, d’après une note de MA. Durand, Huquenin et C° 1 de Lyon, l'emploi du mélange d’indigo (3 parties), et d’indophénol (1 partie), présente de sérieux avantages en tein- ture. Il permettait de remplacer la solution réduc- trice d'hydrosulfite par le sulfate ferreux ou la poudre de zinc. IV On a beaucoup travaillé ces derniers temps sur les malières colorantes soufrées, tant au point de vue technique qu'au point de vue scientifique. Quelques nouveaux produits sont actuellement préparés industriellement. Pour mettre un peu de clarté dans cel exposé, nous rappellerons d’abord que d’après une observation ancienne de HW. Mertz et Weith, le soufre réagit sur l’aniline en donnant de la thio-aniline : H°A7.C5H{ — S — CiHi.AzH? Si l’on remplace l'aniline par la paratoluidine, on obtient le thiodérivé correspondant : Az H? CH = S = CH2/ NCH® H’Az. HACK Mais si l’on opère à une température plus élevée, en présence d’un excès de soufre, la réaction se passe tout autrement, et l’on obtient une base con- tenant deux atomes H de moins que la thiotolui- dine : la déhydrothiotoluidine. CH Az 2C0H1/ + 2 S2= CHE — CHE à C— C5H1. Az H? NAzH2 DS + 3 H°S. Toluidine Déhydrothiotoluidine En même lemps, et par suite de l’action ulté- rieure du soufre sur la déhydrothiotoluidine, il se forme une autre base dont la constitution est vrai- 1 Fürberzeitung, 1889-90, p. 146. Chemiker Zeitung Rep.1890, p. 57. PH. A. GUYE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE 51 semblablement représentée par la formule sui- vante (AW. Gattermann ei Pfinteiger) \ : MT ANT ON ANT UT É KS 7 Vs Se Base de la primuline Cette base — appelée dase de lu prümuline — est » ensuite transformée en acide sulfonique dont lesel de soudeest vendu comme matière colorante jaune sous les noms de primuline, sulfine, auréoline ete. La prémuline teint le coton non mordancé. La base delaprimuline ainsi que la thiotoluidine - el la déhydrothiotoluidine, contiennent un groupe + AzH°. Elles peuvent donc être diazotées, et les sels - diazoïques, combinés à des corps de fonctions phénoliques ou basiques. Plusieurs brevets ont été pris dans cesens par la Clayton Aniline Compy, par la Société Badoise, par la Société pour l'Industrie chimique de Büûle, par les fabriques Æ. Baeger et C° et Oëhler. Les matières colorantes ainsi obtenues sontjaunes. Les dérivés de la primuline et de la déhydrothio- toluidine sont caractérisés par la chaine fermée : . ME - Thiazol On a donné le nom de #hiazol à ce noyau dont la structure rappelle à la fois celle du thiophène et celle du pyrol ou plutôt de la pyridine : fl C HC AC CH HC( ŸCI | | lÙ nl Ven HC| CH HC | | CH / Y $S AzZH AZ Thiophène Pyrol Pyridine La fonction thiazol est donc une fonction colo- rante ; elle représente ce que l’on est convenu d’ap- peler un ckromophore?. Pour donner une idée un peu nette des progrès récents de l'industrie des matières colorantes, il nous resterait à entrer dans quelques détails sur diverses recherches faites dans les groupes des in- dulines, des oxazines, des dérivés de l’alizarine, dés azines, ete.; nous aurions également à rela- ter les travaux qui ont conduit à des méthodes nouvelles pour la préparation de produits déjà connus. Ces détails intéressant plus particulière- ment les spécialistes, nous les laisserons de côté en nous limitant à quelques considérations sur les couleurs oxycétoniques dont les propriétés linc- toriales méritent d'attirer l’attention *. 1 Chem. Ber. 22, 1063. 2? Voir sur les primulines : p. 841. 1 Chem Ber. 1890. Ref. #3 et 168. Monileur Quesneville 1890, Ces composés peuvent être considérés commé des dérivés de la benzophénone et de l’acétophe- none ou de leurs homologues, dans lesquels on au- rait remplacé deux atomes H par deux groupes hydroxyles OH : CH, co CLP COS re 6 el | x h nc /N cu HC \/ CH HC NZ CH HC D CH CH CH CH Benzophe one Acétophénone Mais, fait très intéressant, les seuls dérivés capa- bles de donner des laques avec l'oxyde de chrome. et par conséquent se prêtant à des applications, sont e ractérisés par ce fait que deux groupes OH au moins sont en position ortho (1, 2) l’un relative- ment à l’autre : CH CH co Fe ni € A FT | N € (0H) (Ho)c//\ c (ou) ue js HC | Je VA 4 cu C (0H) I II Ainsi, pour fixer les idées, le composé [ donnera des laques et sera susceptible de recevoir des ap- plications en teinture; car deux groupes OH sont en ortho. Le dérivé IT, alors même qu'il contient 3 groupes (OH), restera sans action sur, les oxydes de chrome etn'aura pas de valeur tinctoriale : aucun de ses groupes (OH) ne se trouve en position ortho relativement à l’un d'entre eux. C'est évidemment là un fait très curieux sur lequel M. de Kostanecki a tout particulièrement attiré l'attention. Cependant les travaux les plus récents ont montré que cette règle, qui semblait absolument générale, esten défaut avec les dérivés de la di-oxynaphtaline 1.8. Les deux groupes OH dans cette position sem- blent jouer le même rôle que dans la position or- tho en ce qui concerne la possibilité de former des laques avec les mordants de chrome. Ce fait doit certainement être rapproché de la transformation facile de l'acide dicarbonique 1.8 de la naphtaline en un anhydride interne analcgue à l’anhydride phtalique : (0 ou ou EN L co C0 /8\ AN JA  N\ co 7 | | ’ À 6 2 30 6 3 (5 3 5 C0 VV NW TAC 4 Di-oxynaphtaline Anhydride Anhydride naphtalique phtalique Quoi qu'il en soit, ces faits demontrent une fois de plus les relations inattendues qui peuvent exis- OL Le PH. A. GUYE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE } ter entre les propriétés colorantes des corps etleur constitution chimique. Ces intéressantes questions devant être traitées ici même par M. Noelling avec toute la compétence d'un spécialiste, nous nous bornons à les signaler en passant, et nous re- venons au mode de formation des oxycétones. En principe, la Sociélé Badoise a fait breveter deux types de préparation : 1° Condensalion d'un acide gras ou aromatique avec l'acide pyrogallique. Exemples : CéHiC.O2H + CH? (OH) — H20 + CCH5.C0.C5H2(0H)5 Acide benzoïque Acide pyrogallique Trioxybenzophénone D’après des informations récentes !, l'acide ben- zoïque pourrait être remplacé par le toluène tri- chloré C°H°.CC, lequel — on le sait — peut en- gendrer facilement de l'acide benzoïque. 9° Condensation de l'acide gallique avec un phé- nol quelconque. Exemple : CO’H a RON POSE CERE CE EU CE CES Acide gallique [A ge K Acide pyrogallique Hexa-oxybenzophénone Il est presque inutile d'ajouter que l'acide pyro- gallique dans le premier cas, l'acide gallique dans le second, représentent les composés ortho-di-hy- droxylés nécessaires à ces réactions : 0H OH {304 ANT | 1 ak Jon V7 \4 Acide pyrogallique Acide gallique VI Les grandes fabriques de matières colorantes sont dotées d’un outillage perfectionné: elles dis- posent d'excellents laboratoires de recherches dirigés par un véritable état-major de chimistes distingués. L'étude des produits physiologiques de synthèse rentre done naturellement dans le cadre de leur activité. Et, de fait, on les voit peu à peu ajouter cette nouvelle fabrication à celle des malières colorantes. Ce rapprochement entre deux branches en appa- rence si différentes de l'industrie chimique esl d'autant plus indiqué aujourd'hui que l’on a re- connu à plusieurs malières colorantes des pro- priélés thérapeutiques marquées. Ainsi, d’après M. Ghillany ?, le bleu de méthylène CÆH'SAZISCI, un dérivé du violet de Lauth, produirait en injec- Lions sous-cutanées des effets calmants très accen- tués. Toute une série de couleurs dérivées du diphé- nylméthane et du triphénylméthane constitue- raient d'excellents antiseptiques!; tel serait en par- ticulier le cas du violet méthylé et de l’auramine. Le succès obtenu par l'antipyrine comme anti- ! Chemiker Zeitung. \SM, p. 14. © Zeïtsch der Œsterreichen Apothekerveins 4890. p. 318. thermique était de nature à tenter les chercheurs. On a donc préparé dans le même but un nombre considérable de dérivés de la phénylhydrazine. Malheureusement, aucun d’entre eux n’a donné les“ résultats qu'on en attendait. MM. Kobert, Unver- richt, Henitz ? qui les ont étudiés, ont constaté que tous, sauf l’antipyrine, avaient une action nocive sur. le sang. Le nombre des antiseptiques proposés n’est pas moins grand. Ne pouvant nous prononcer sur leur valeur, nous nous bornerons à mentionner le fait. que le phénol est maintenant fabriqué synthéti-. quement à l’état de grande pureté par fusion sodi- que du phényl-sulfonate de sodium. Ce résultat a” été obtenu tout d’abord par A. Gilliurd, P. Monnet" et Cartier, dont les produits figuraient déjà à l’Ex- position de 1889, et, peu après, par la Société Ba- doise. Ces deux fabriques élaient déjà connues pour la préparation de la résorcine médicinale par une méthode analogue. La maison Gülliard, Monnet et Cartier fabrique aussi le chlorure d’éthyle comme anesthésique; il est d'un emploi plus facile que le chlorure de mé- thyle et produit les mêmes effets. Sous les noms de quiono-iodine, d’aristol, d’io- dothymol, d'iodonaphtol, d’iodol, de sozo-iodol,ete. on propose toute une série de dérivés iodés, plus ou moins complexes destinés à remplacer l’iodoforme. À part quelques rares produils dont le succès est encourageant, l'industrie des corps p hysiologi- ques de synthèse n'a done pas encore donné tous les résultats qu'on en attendait. Il est vrai qu’elle en est à ses débuts, qu'elle cherche sa voie. Mal- gré des recherches très intéressantes et des études isolées fort bien faites sur les relations qui peuvent exister entre les effets physiologiques des. corps et leur constitution chimique, on n’a encore trouvé aucune théorie générale permellant de préparer à peu près à coup sûr des produits ayant une action donnée sur l'organisme vivant. On ne pos- sède pas encore le fil conducteur qui permettra de s'orienter au milieu de ces fails d'une nature par- lüiculièrement délicate. À vrai dire, on pourrait se passer pour le moment d'une théorie rigoureuse- ment et scientifiquement établie. Il suffirait d’une méthode un peu empirique, comme celle des groupes chromophores, chromogènes, auxochro- mes, ete.; l'industrie des produits physiologiques en retirerait cerlainement de grands avantages el prendrait une rapide extension. Philippe A. Guye, Docteur ès sciences. 1. Travaux de : MM. Penzoldt et Beckh (Arch. f. exp. Patho- log. et Pharmakol 1890.) M. Stilling (Anilinfarbstofte als Antisep- tica, Strasbourg 1890). ? Pharm. Centralblatt. 1890, p. 60. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX TES BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques. Huygens (Chrisliaan), — Œuvres complètes. pu- bliées par la Société hollandaise des sciences. 3 vol. (105 fr), La Haye, Martinus Nijhoff, et Gauthier- Villars 55 quai des Grands-Augustins, 1891. C'est à l'Académie royale des Sciences d'Amsterdam que revient l'honneur d’avoir décidé la publication des manuscrits d’'Huygens; dans la séance du 28 oc- tobre 1882, de la section des sciences, à l’occasion d’un projet de statue à élever à l’illustre savant, M. Van der Sande Backhuysen faisait remarquer « qu'on pourrait atteindre le but proposé, fonder un monument en l'honneur de Huygens, et en même temps rendre à la science un signalé service, soit en faisant paraitre une nouvelle édition de ses œuvres, soit en publiant ses écrits restés inédits, ainsi que sa correspondance, » Cette proposition fut adoptée et l’Académie se préoc- cupa de la réaliser. La Commission qu'elle nomma à cet effes se mit à l’œuvre avec énergie et ne tarda pas à se trouver en présence de plus de 2.600 pièces, rien que pour la correspondance, Il devenait impossible, avec les moyens dont disposait l'Académie, de réaliser uae pareille publication ; elle s’adressa alors à la Société hollandaise des Sciences de Harlem, qui accepta avec enthousiasme de prendre part à cette noble tâche et qui, depuis 1888, à fait paraitre successivement trois volumes de la Correspondance, Cette magnifique publication, éditée avec un grand luxe, fait le plus grand honneur à ceux qui l’ont concue et exécutée; elle constitue non seulement un hommage à la gloire de Huygens, tout à fait digne d'elle, mais encore un service rendu à {ous ceux qui s'intéressent au développement des idées mathématiques et veulent étudier le mouvement scientifique du xvrr° siècle. L. O0. Goursat (E.), Maitre de Conférences à l'Ecole normale supérieure. — Leçons sur l'intégration des équa- tions aux derivées partielles du premier ordre. Rédigées par C. Bourlet, (2 fr.) Hermann, 8 rue de la Sorbonne, Paris, 1890, On sait à quel degré de perfection la théorie des équations aux dérivées partielles du premier ordre a été portée, depuis Lagrange et Cauchy, ses fondateurs, par les travaux de Jacobi, de Mayer, de M. Darboux et du grand géomètre suédois, M. Sophus Lie, Cette théorie formait dès à présent un tout assez complet pour faire regretter l’absence d’un ouvrage d’exposi- üon qui lui fût consacré et destiné à présenter l’en- semble des résultats acquis. Le jury d'agrégalion, en inscrivant au programme de 1890 les principales notions relatives aux équations aux dérivées partielles du premier ordre, a fourni à M. Goursat l’occasion de combler cette lacune. Dans une série de lecons faites à la Faculté des Sciences de Paris, il part des premiers principes pour amener pro- gressivement ses auditeurs jusqu'aux derniers résultats obtenus par M. Sophus Lie, Après avoir reproduit la célèbre démonstration de Mme Kowalewska relative à l'existence des intégrales, M. Goursat expose, en la précisant sur quelques points, particulièrement en ce qui regarde les solutions singu- lières, la théorie classique des équations linéaires et place immédiatement après l'étude des systèmes com- plets, puis celle des équations aux différentielles to- tales, qui n'intervient que comme auxiliaire de !la précédente, Celte disposition oblige l’auteur à renver- ser l’ordre suivi par Mayer, | — lu LISR Avec le quatrième chapitre commence la théorie des équations de forme quelconque, telle que l’a concue Lagrange. Puis viennent la théorie des caractéristi- ques, introduite d’abord sous la forme méme donnée par Cauchy, la première méthode de Jacobi, et la mé- thode de Jacobi et Mayer, ainsi que le théorème par lequel M, Lie ramène l'intégration d’un système du premier ordre à celle d’une équation unique. C’est alors, et après un chapitre consacré à l'étude géométrique des intégrales et des solutions singuliè- res, d'après l'important mémoire de M. Darboux, que M. Goursat généralise avec M. Sophus Lie les notions d'intégrale et de caractéristique, de facon à relier entre elles les méthodes, si opposées en apparence, de Cauchy et de Mayer. Enfin arrivent les deux principales théories par les- quelles M. Sophus Lie à transformé la question de l’intégralion des équations du premier ordre : la théorie des transformations de contact et la théorie des groupes. La première ramène les méthodes don- nées précédemment à une seule : « Pour intégrer une « équation aux dérivées partielles du premier ordre, «on détermine une transformation de contact dans « laquelle la nouvelle variable z soit précisément le « premier membre de l'équation proposée. » Quant à la théorie des groupes, elle donne à l'intégration la plus grande simplicité possible en permettant d'utiliser, daus la méthode de Jacobi et Mayer, les intégrales qui interviennent dans la méthode de Cauchy. Ajoutons que la rédaction de ces Lecons fait le plus grand honneur à M. Bourlet, I. Hapamarp, Souchon (Abel). — Traité d'astronomie théorique contenant l'exposition du calcul des pertur- bations planétaires et lunaires et son applica- tion à l'explication et à la formation des tables astronomiques, avec une Introduction historique et de nombreux exemples numériques. Ouvrage dédié aux astronomes, aux marins et aux élèves de L’en- seignement supérieur, 504 pages in-8. (16 fr.) Georges Carré, éditeur, 58rue Saint-André-des-Arts, Paris, 4891. L'ouvrage se compose de deux parties principales : l'exposition du calcul des perturbations planétaires et lunaires (p. 37-368) et la construction et l’usage des tables astronomiques (p. 368-491). En 1883, l'auteur a publié un Traité d'astronomie pra- tique, contenant l’exposition du calcul des Ephémérides astronomiques et nautiques, d’après la méthode en usage dans la composition de la Connaissance des Temps et du Nautical Alnanac, L'ouvrage actuel forme une sorte de complément au premier, puisque la seconde partie enseigne avec détails l’usage des tables astrono- miques de Le Verrier et le calcul des lieux des planètes pour une époque donnée; mais en même temps, l’au- teur a voulu, dans les 300 pages de la première partie, exposer les principes du calcul des perturbations. M. Souchon nous semble avoir été peu heureuse- ment inspiré en prenant et surtout en mettant en pra- tique l’épigraphe placée en tête du livre : « il n’est pas nécessaire qu'un mème ouvrage conlienne tout ce qu'il élait possible dy mettre, il y en a d’autres; l’impor- tant est qu'il contienne des choses utiles, qui ne se trouvent pas ailleurs, » N’est ce pas, par exemple, dépasser les limites raisonnables que de consacrer 26 pages aux coefficients de Laplace et 27 aux pertur- bations de second ordre et des ordres supérieurs par rapport aux masses, c'est-à-dire autant et plus que Le Verrier dans le tome II des Annales de l'Observatoire, © = BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX alors surtout que la théorie de la Lune est traitée som- mairement ? Comment se fait-il aussi que, au courant comme il l’est de l’histoire de la Science, l’auteur parle avec détails des travaux de M. Liouville et de M. Gas- cheau (et non Gaschaud) sur l'examen de certaines conditions de stabilité des deux solutions particulières du problème des trois corps trouvées par Lagrange, et oublie de mentionner le nom de Poisson, en parlant de L'invariabilité des grands axes lorsqu'on à égard aux termes du second ordre ? Laissons de côté les critiques, pour dire que l’ou- vrage, précédé d’une intéressante introduction histo- rique de 36 pages, avec un chapitre sur la théorie de la Lune de Newton, est d’une lecture facile. Les six livres de la première partie contiennent la théorie du mouvement elliptique et celle du mouvement troublé (exposée d’après la méthode de la variation des cons- lantes arbitraires) ; le développement en séries de la fonction perturbatrice ; les théories des inégalités sécu- laires et périodiques (avec une application numérique intéressante à une inégalité à longue période de la petite planète Concordia), enfin les perturbations d'ordre supérieur par rapport aux masses, Le dernier livre, consacré à la Lune, contient l'exposé des princi- pales découvertes de Newton, de rapides indications sur la théorie de la Lune de Delaunay et une analyse du célèbre mémoire de Lagrange sur le problème des trois corps. Quant à la seconde partie de l'ouvrage (construction et usage des Tables astronomiques), les relations de l’auteur avec la Connaissanee des Temps lui donnaient une compétence particulière pour l'écrire. Le livre de M. Souchon sera sans doute consulté avec profit par les jeunes astronomes désireux de s'initier aux tables astronomiques. O. CALLANDREAU. 2° Sciences physiques. Vaschy, Ingénieur des télégraphes, Eraminateur d'ad- mission à l'Ecole polytechnique. — Traité d'Electri- cité et de Magnétisme. (Cours professé à lEvole supérieure de télégraphie. ? volumes. (25 fr.), Baudry et Cie, 15 rue des Saints-Pères, 1890. Une première édition de l'excellent cours de mesure électrique de M. Vaschy avait été autographiée en 1888 à un pelit nombre d'exemplaires par les soins de l'Ecole supérieure de télégraphie, Cette première édition, quoique constituant déjà une œuvre très personnelle. était une reproduction partielle du cours professé à celte école par le regretté M. Raynaud. M. Vaschy a repris, coordonné de nouveau et com- plété les diverses parties de son cours; il y a joint de très importants développements qui avaient fait l’objet d’un grand nombre de notes publiées par lui dans les Comptes rendus de l’Académie des Sciences, les Annales télégraphiques, ete., et c’est cet ensemble, absolument transformé, qu'il vient de publier. L'ouvrage, sous cette rédaction définitive, comprend deux parties nettement séparées en deux volumes : la seconde a conservé le caractère d'un exposé pratique de mesure électrique ; la première est un traité théorique très large de lélec- tricité et du magnétisme. Le premier volume forme un tout complet. Il com- prend à lui seul l’ensemble de la théorie de la science électrique, L'auteur, pour abréger les préliminaires, suppose connus les principaux phénomènes dont on trouve la description dans les ouvrages élémentaires de physique. Evitant toute hypothèse insuffisamment justifiée sur la nature des phénomènes électriques et la structure moléculaire des corps, il définit rigoureu- sement, dans chaque théorie, la loi expérimentale qui sert de point de départ et s'attache à n’appuyer ses déductions que sur des données sûrement démontrées par des faits observés, Quelques hypothèses restent néanmoins nécessaires, dans l’état actuel de la science, pour assurer l’explication de tous les phénomènes, M. Vaschy les réduit à deux : la première, d'après la- quelle la variation du flux d’induction d'un tube de force dans un diélectrique donnerait lieu aux mêmes effets magnétiques qu'un courant: la seconde, qui se traduit, soit par la conservation du flux d’induction électrique cu magnétique le long d’un tube de force, soit par l'existence de la polarisation des diélectriques ou de l’aimantation induite. Ces deux hypothèses sont d’ailleurs justifiées, à posteriori, par l'exactitude des déductions auxquelles elles conduisent, Beaucoup de chapitres présentent des démonstrations ou des aperçus empreints d’une grande originalité. On ne pourrait, dans une notice aussi sommaire, attirer l'attention du lecteur sur tous les points intéressants de l’ouvrage. IL me semble toutefois impossible de ne pas signaler quelques paragraphes où sont traitées, d'une facon toute personnelle, avec autant de elarté que de rigueur, des questions particulièrement diffi- ciles : rapport des unités, — loi de Coulomb, — polari- sation des diélectriques, — attraction et répulsion des diélectriques par les corps électrisés, — transmission des actions électriques par le milieu diélectrique, — application du principe de Carnot, — conduction el induction simultanées, —nalture du courant électrique, — écrans magnétiques, — aimantation par influence, — feuillets magnétiques, — énergie potentielle des feuillets, — action d’un courant sur un aimant, — ai- mantation par les courants, — énergie relative d’un courant et d’un aimant, — énergie relative de deux courants, —- théorie de l'induction, — potentiel vecteur électro-magnétique, Enfin, tout le dernier chapitre du tome premier sera lu avec le plus vif intérêt : l’auteur y présente, sous une forme absolument originale et personnelle, la théorie de Maxwell relative aux propriétés du champ électro-magnétique en écartant plusieurs hypothèses qui lui paraissaient inutiles, notamment celle du dépla- cement électrique, Au point de vue des applications, le livre de M, Vaschy envisage principalement la télégraphie. Il n'existe pas, à ma connaissance, d'autre ouvrage qui traite avec autant d'ampleur, avec une sûreté aussi magistrale, les problèmes si nombreux et si difhciles dont la solu- tion est inspirée aux ingénieurs télégraphistes par l'emploi des lignes à self-induction et à capacité, l'usage des appareils rapides, l'extension de la téléphonie à des distances de plus en plus grandes. Tous les eas pratiques sont étudiés, la plupart des solutions sont nouvelles et dues à M, Vaschy, et l'intérêt des ques- tions traitées est augmenté par l'élégance des méthodes analytiques et l’habile développement des calculs. Ces problèmes, l'exposé des méthodes de mesures, la description et la théorie des appareils font l'obiet du deuxième volume, F. DE NERVILLE. Mmagat, Membre correspondant de l'Académie des Sciences. — Nouvelles méthodes pour l'étude de Ja compressibilité et de la dilatation des liquides et des gaz. Comptes rendus de l'Académie des Sciences. 8 décembre 4890. Depuis de longues années, M, Amagat effectue des recherches sur l’élasticité des corps sous leurs diffé- rents états, et les résultats extrêmement étendus qu'il a obtenus ont seuls permis de vérifier l'exactitude des formules de MM. Van der Vaals, Clausius et Sarrau, Jusqu'ici, pour mesurer Les volumes du fluide sous de très fortes pressions (certaines expériences ont été poussées au delà de 5.000 atmosphères), M. Amagal soudait dans son piézomètre un certain nombre de fils de platine, et chaque fois que le mercure arrivait au contact de l’un d’eux, un courant électrique actionnant une sonnerie en avertissait l’expérimentateur. L'habile physicien est parvenu actuellement à construire un appareil dans lequel il peut opérer jusqu'à des pres= sions de 4.000 atmosphères et à des températures supé- rieures à 200, en suivant la colonne de mercure avec un viseur, Le bloc d'acier qui contient le piézomètre porte des regards fermés par des cylindres de quartz à RS | BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX (27 ©t travers lesquels on voit très nettement le niveau du mercure, Pour pouvoir suivre les déplacements, on élève et on abaisse le piézomètre au moyen d'une longue vis traversant un presse-étoupe et on maintient constamment ainsi le ménisque dans le champ de visée. Le principe de cel appareil est extrêmement simple, mais il suffit d’avoir manœuvyré un instant un appareil à pression pour se rendre compte des difh- cultés pratiques que comportait sa réalisation, De telles expériences constituent une tâche des plus diffi- ciles, et qui ne conduit pas à des résultats à effet; mais il ne faut pas oublier qu'une bonne mesure est cent fois plus utile qu'une série d'expériences approxi- matives; on ne saurait savoir trop de gré aux savants qui se consacrent à celte ingrate besogne. Georges CnaRPY. 8° Sciences naturelles. Brueckner, — Sur le climat de l'époque gla- ciaire. (in Archives des Sciences physiques naturelles, nov. 1890. Genève.) Sous ce titre le Pr Brueckner, de Berne, a fait une très intéressante communication à la Société helvétique des Sciences Naturelles. On sait que le problème du climat de l’époque glaciaire est fort ancien ef a donné lieu à de nombreuses interprétations. Ce n’est que tout dernié- rementet grâce à l'étude suivie des dépôts diluviens, que les faits ont puètre établis sur une base assez sûre pour trouver la véritable solution. Il en résulte que les oscillations du climat de l’époque glaciaire se tradui- sent par deux périodes — humides sur le continent et plus froides que la nôtre de 3° à 4° sur tout le globe — séparées par une période chaude, analogue aux épo- ques pré-glaciaire et actuelle. C. Naun. Schulze (E.) et Kisser (E.). — Sur la décompo- sition des matières protéiques dans les plantes vertes cultivées à l'obscurité. Landw., Vers. Stat. XXX VI, p. 1 à 8, 1890. M. Borodin ayant démontré la formation d’asparagine dans les rameaux coupés conservés à l'obscurité, MM. Schulze et Bosshard ayant constaté qu'il dispa- raissait en même temps de la protéine, d’autres auteurs admettant dans les plantes fanées Papparition d'amides aux dépens des matières protéiques, MM, Schulze et Kisser ont voulu étudier les phénomènes de cet ordre qui se passaient dans de jeunes plantes normales et enracinées dans le sol. L'expérience a porté sur l’avoine qu'on a laissée croître en pots jusqu'à ce que les plantes eussent alteint #5 à 50 centimètres de hauteur, La moitié des plantes de chaque pot a été immédiatement séchée et analysée, tandis que Pautre moitié a été auparavant conservée dans une armoire aérée pendant sept jours. L’azote total ayant été dosé par le procédé Kjeldahl, celui des matières protéiques par la méthode de Stutzer, el l'azote non protéique ayant été obtenu par différence, la conclusion de ces analyses est bien celle que l’on pouvait prévoir : les plantes normales enra- cinées, comme les plantes coupées, lorsqu'on les con- serve à l'obscurité, perdent une forte partie de leurs ma- tières protéiques, en même temps qu’il se forme de l’as- paragine et d’autres corps analogues, A. HéBerr. Platt-Ball (William), — Are the effects of use and disuse inherited. (Y «@-{-il héritage des effets de l'usage et du non usage des organes?) London, Macmillan et C°, Bedford Street Covent Garden, Londres, 1890, Le livre de M. Platt Ball est une contribution aux idées actuelles sur l'hérédité, idées dont Weissmann est le plus illustre défenseur. C’est une charge à fond contre M. Herbert Spencer ou mieux contre les applica- tions qu'il à faites à la sociologie du principe de Lamark reproduit et développé par Darwin. M. Platt Ball examine et discute d’une part les exemples et les arguments présentés par M. Spencer, de l'autre ceux que Darwin à lui-même exposés, IL s’at- tache à démontrer qu'il est toujours inutile et souvent illogique d’invoquer l'hérédité des effets de l'usage et du non-usage des organes, autrement dit l’hérédité des caractères acquis. L'auteur conclut qu'il faut défi- nitivement abandonner dans la conception de l'évolu- tion le principe de Lamark comme un facteur inutile el peu probable, l’erreur de ceux qui l'ont accepté provenant de ce que la sélection naturelle imite fré- quemment certains des plus évidents effets de l’usage et du non-usage. | Ce qui frappe surtout, quand on lit cet intéressant petit livre, c’est de constater la facilité avec laquelle sont renversées certaines théories qui ont un moment séduit le monde, el, après une aussi grande fortune, moutrent une telle fragilité, D' H. BEatrEecanD. Arloing (S.), Professeur à l'école vétérinaire et à la Faculté de Médecine de Lyon. — Contribution à l'é tude de la partie cervicale du grand sympathi- que envisagé comme nerf sécrétoire. Archives de Physiologie normale el pathologique, Paris, 1890. Les belles recherches que Luchsinger a publiées en 1880 établissent qu'il existe des fibres nerveuses excito sudorales. M. Arloing, en expérimentant sur le bœuf, dont le mufle très large et nu se prête admirablement à l'étude de la sécrétion sudorale, a complété nos con- naissances sur cette question, Il à étudié les relations physiologiques qui existent entre les glandes du mufle, la glande lacrymale etle sympathique cervical, En ajou- lant aux renseignements tirésde la section et de l’exei- tation des nerfs ceux que fournissent les poisons exci- tateurs ou paralysants de la sécrétion, il est arrivé à conclure qu'outre les fibres excito-sécrétoires il existe des fibres nerveuses fréno-sécréloires. Si l’on coupe le cordon du grand sympathique d’un côté sur un bœuf, on note immédialement après lopé- ration, que tout le mufle est couvert de gouttelettes, mais que celles-ci sont un peu plus grosses dans la moitié de la région qui répond au nerf sectionné que dans la moilié opposée, Cette hypersécrétion est de courte durée;car si après dix à douze minutes on essuie le mufle, la sécrétion s’élablit rapidementsur la moitié du mufle qui répond au nerf intact, tandis que, sur la moilié opposée, la sécrétion apparait à peine près du bord supérieur du mufle, A ce moment, l'excitation du bout supérieur du cordon vago-sympathique avec des courants induits dé- termine, au bout de quelques secondes, un effetexcito- secréloire très marqué dans les glandules de ce côté. Après vingt sept à quarante jours le bout supérieur du vago-sympathique est dégénéré; alors on n'obtient plus aucun effet sécrétoire par son excitation. Mais on cons- late qu'en dehors de toute excitation l’activité glaz du- laire s’est rétablie en partie; seul le pourtour immédiat du naseau reste indéfiniment sec. Les nerfs excito-sécré- loires des deux moiliés du mufle ne sont donc pas tous contenus dans le cordon cervical du grand sympa- thique : un grand nombre émergent du bulbe, Si le lendemain de la section du sympathique, on admi- uistre de la pilocarpine, on voit que la sécrétion devient plus active du côté où le sympathique a été coupé ; elle se fait sentir à son maximum là où la sécrétion semble dé- finitivement supprimée. Celte expérience donne encore les mêmes résullats si la pilocarpine est administrée quand le nerf coupé est dégénéré. Cet effet ne peut pas s'expliquer par la vaso-dilatalion consécutive à la sec- tion du sympathique. I faut done admettre que le cor- don cervical du sympathique renferme des fibres fréno- sudoræes et des fibres excito-sudorales, M. Arloing à constaté aussi, qu'après la section du grand sympathique, il y a une hypersécrétion perma- uente dans l'œil correspondant portant sur les glandes Jacrymale et les glandes de Meibonius, L'administra- tion de pilocarpine augmente encore cette hyperséeré- »6 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX tion au point que les larmes deviennent deux fois plus abondantes du côté où le nerf est coupé que du côté opposé. L’excitation du bout supérieur du nerf COUPÉ depuis peu modère dans l'œil correspondant Phyper- sécrétion produite par la pilocarpine. Quand la section du sympathique est ancienne, la sécrétion provoquée par la pilocarpine est moins abondante du côté corres- pondant. Il résulte de ces faits que le cordon cervical du sympathique transporte aussi des filets excito et fréno- sécrétoires destinées à la glande lacrymale. M. KAUFMANN. 4° Sciences médicales. Richelot (L.-G.). — Professeur agrégé à la Faculté de médecine, — Sur le traitement du pédieule dans l’hytérectomie abdominale par la ligature élasti- que perdue, Annales de Gynécologie, Paris, 8 octobre 1890, p. 247. Dans ce mémoire M. Richelot se déclare partisan résolu de la méthode de Kleeberg, dite de la ligature élastique perdue, qui a déjà donné de bons résultats entre les mains de M. Terrillon et entre celles de M. Hector Treub (de Leyden). La ligature se fait avec un tube de caoutchouc rouge. L'utérus fibromateux étant sorti de la plaie, on jette le lien élastique autour du segment inférieur, au-dessous des ovaires, en pre- nant le bord supérieur du ligament large, on Pétire fortement, on croise les deux chefs en avant et on les fixe au moyen d'un clamp. On sectionne l'utérus, on serre davantage la ligature dont on unit les chefs avec un fil de soie et l’on enlève le clamp. Pour éviter le glissement du bord supérieur du liga- ment large M. Richelot passe à droite et à gauche, à travers le pédicule, un fil de soie plat qui pénètre obli- quement sous la ligature pour sortir au-dessus et fixer le bord supérieur de ce ligament. La muqueuse utérine est détruite avec le thermocautère, puis on dispose l'intestin de manière qu'aucune anse ne soit prise der- rière le moignon, que l’on sépare de la masse intesti- nale en élalant l’épiploon sur sa tranche. ; Nous rapprocherons du mémoire de M. L.-G. Riehe- lot celui publié en juillet de cette année par Kocher dans le Correspond. BL. f. schweiz. Aerzte. De même que, M. Richelot, Kocher se propose de traiter l'utérus comme un pédieule de kyste ovarique ; mais il y arrive par un autre procédé. Il commence par lier les vais- seaux des ligaments larges, cherchant à comprendre dans l’anse de soie l'artère utérine ; puis sectionnant les ligaments à une certaine distance de l'utérus, il jette sur la partie inférieure de celui-ci une ligature à la soie qu'un aide serre fortement pendant que le chi- rurgien opère la section de l'organe. Dr Henri HARTMANN. Eternod (D'A.). Professeur d'Histologie et d'Emthryo- logie à l'Université de Genève, et Haceius, Directeur de l'Institut vaccinal de Lancy (Genève). — Note sur des recherches concernant la variolo -vaccine Semaine médicale, 31 décembre 1890, L'article de MM. Eternod et Haccius n'est qu'une communication provisoire, provoquée par un récent travail de M. Fischer, directeur de l’Institut vaccinal de Karlsruhe, sur le méme sujet et arrivant aux mêmes conclusions, Ces conclusions sont très importantes, tant au point de vue scientifique pur qu'au point de vue pratique. 1 en Los auteurs se rangent parmi les partisans de l'unité de Ja vaccine, de la variole et probablement du horse- pox, et cela en se basant sur des inoculations de va- riole humaine (variole noire, variole simple, variole confluente) à des veaux par un procédé qui leur est spécial : la peau, lavée et rasée, est usée avec du papier de verre sur un espace de quelques centimètres, jus- qu'à léger suintement sanguin, auquel succède bientôt | jection intraveineuse, 2 jection dans l'intestin après la laparotomie, Pinjection un suintement séreux : celte surface éminemment absorbante est frottée avec une spatule chargée de virus. Cette méthode a permis à MM. Eternod et Hac- cius d'obtenir toujours des résultats, tandis que la piqüre, l’incision, etc., ne donnaient que des insuccès. Les pustules, peu typiques à la première génération, le deviennent de plus en plus, et dès la troisième géné- ration, il devient impossible de les distinguer du cow- pox spontané, Le virus variolique a pu être transmis dans une série jusqu'à la quatorzième génération, et, dans les dernières générations, côte à côte avec du vaccin ordinaire, Nous citons textuellement les conclusions : 1° La variole est inoculable à coup sûr à l'espèce bovine, quand le mode opératoire est bon-et que la récolte du virus est faite en temps opportun. 2° L'inoculation de la variole au veau constitue une source précieuse de souches nouvelles pour le vaccin animal, Ceci peut avoir une grande portée pratique, non seulement pour les instituts vaccinaux d'Europe, mais aussi dans les pays chauds, où la variole est faci- lement endémique et où les générations de vaccin tendent à s’abätardir rapidement. 3° La variole, inoculée au veau, se transforme en vaccine au bout de quelques générations, par son pas- sage dans cet animal, Il n’y a donc pas dualité. 4° Ces conclusions pratiques confirmeraient les idées émises par Depaul, en 1863, à l’Académie de Médecine de Paris. Dr Crisrrant (de Genève). Cygneus (Walter), — Etudes sur le Bacille ty- phique. Annales de l'Institut Pasteur. Paris, Masson, 120, boulevard Saint-Germain, 1890. L'auteur a eu pour objet la production de la fièvre typhoïde expérimentale, On injectait une émulsion de culture du bacille typhique sur la pomme de terre dans l’eau distillée : les modes d'infection étaient l'in- l'ingestion par la bouche, l’in- intrapéritonéale, Les symptômes observés sur les animaux (souris, lapins, chiens), étaient somnolence, anorexie, élévation de température, diarrhée, amaigrissement, quelque- fois des vomissements. La mort arrivait au bout de quelques jours. A l’autopsie on trouvait : rougeur et gonflement de l'iléon, gonflement des plaques de Peyer et des follicules clos, suffusions sanguines aux mêmes points, ganglions mesentériques gonflés, rate volumi- neuse, On à retrouvé les bacilles dans les principaux organes, et on a pu les cultiver; ils étaient encore vi- vants au bout de quatorze jours. Ces résultats sont fort intéressants; mais il parait sage cependant de les accueillir avec beaucoup de ré- serve et d'attendre de nouveaux faits pour se pronon- cer sur la nature typhoïdique de la maladie conférée. D' H. Durer. Forster (J.). — Infectiosité des viandes fumées d'animaux tuberculeux. Munch. med. Wochenschr., n° 16, 1890. M. Forster a inoculé à des lapins et à des cochons d'Inde une émulsion de tubercules restés visihles sur des morceaux de viande fumée, Au bout de deux mois, les animaux d'expériences ont été sacrifiés, et l'on a constaté qu'ils présentaient des lésions tubercueuses dans le mesentère, dans le foie etla rate. L'auteur en conclut que l'action de fumer la viande ne détruit pas le virus tuberculeux, et il pense même que l’usage de cette viande est plus dangereux que celle des viandes salées:ces dernières ne se mangeant qu'après cuisson, tandis que la viande fumée est ordinairement consom- mée telle quelle. D' H. Dumrer. Poggi (Auguste), — L'Unité des maladies et l'u- nité des remèdes (5 fr.). Paris, G. Masson, 129, bou- levard Saint-Germain, Paris, 1890, ë a te éd» in dt nimt “sd | 4 ] ; k ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 57 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 12 janvier 1891 1° Sciences MATHÉMATIQUES. — M. E. Vicaire : Sur les petites oscillations d’un système soumis à des forces perturbatrices périodiques. — M. Léauté cite une expérience tentée industriellement sur Putilisation des poulies de transmission comme régulateurs, avec ré- duction du volant de la machine au quart de sa puis- sance normale; les lois qu'il à formulées pour les arbres de transmission s'appliquent à ces poulies, — M. H. Faye montre que les données géodésiques actuelles ont conduit tous les calculateurs à admettre pour la Terre la forme d’un ellipsoide de révolution, comme l'avait admis déjà, en partant de données incomplètes, la Commission du système métrique; c'est à cause de l'insuffisance même de ces données du xvu siècle que Laplace avait pu les faire cadrer avec l'hypothèse d’un sphéroiïde irrégulier. Quant aux arguments en faveur de cette hypothèse lirés des irrégularités visibles de la croûte lerrestre, montagnes el dépressions océaniques, ils ne résistent pas à l’exa- men approfondi des faits : les varialions que ces acci- dents produisent dans l'intensité de la pesanteur mesurée par le pendule ou dans la direction du fil à plomb ne répondent pas à leur masse apparente; il y à donc des variations de densité compensant à peu près les salllies et les creux. Considérant que la tempéra- ture décroit verticalement dans les océans, tandis qu’elle croît rapidement sous les continents, M. Faye pose la loi suivante : A toutes les époques, le re- froidissement du globe va plus vite et plus profon- dément sous les mers que sous les continents. Cette loi rend compte de la compensation en question, Il en résulte que les accidents superficiels maffectent en rien la masse totale de la planète, et que sa lente rotation à pu ainsi produire une figure de révolution. -— M. A. Collot fils rend plus rapides et plus sensibles les oscillations d’une balance en projetant, au moyen d'un appareil optique, l'ombre de l'aiguille; le amen systématique de ces oscillations permet d'effectuer plus rapidement les pesées, 29 SGiENCES PHYSIQUES, — M. Ch.-Ed. Guillaume à véritié expérimentalement qu'une tige de thermomètre sans réservoir, dite tige correctrice, placée à côté de Ja tige émergente du thermomètre observé, donne exactement la correction à faire subir à ce thermo- mètre. — M. E. Branly à fait de nouvelles expé- riences sur la diminution de résistance électrique qu'éprouvent les poudres métalliques soumises à l’ac- tion de forts courants ou d’élincelles électriques écla- tant dans le voisinage; le phénomène est le même quand on substitue divers diélectriques à Pair inter- posé entre les particules métalliques ; on lobserve de même entre deux tiges métalliques mises en contact par des surfaces oxydées.— Pour les corps qui suivent la loi de Dulong et Petit, on peut considérer le nombre de molécules par unité de volume comme propor- lionnel au produit de la chaleur spécifique par la den- sité. En comparant la résistance spécifique d’un métal à la distance moyenne de ses molécules ainsi calculée, M. P. Joubin s’est apercu que cette relation classe les mélaux en deux groupes, l’un où la résisiance aug- mente avec l’écartement des molécules, #autre où elle diminue avec cet écartement; dans le premier groupe sont les métaux diamagnétiques, dans le second les métaux magnéliques, — M. E. Mercadier a déterminé expérimentalement les conditions d'épaisseur de dia- mètre du diaphragme, d'intensité et de disposition du champ magnétique qui donnent à un téléphone son maximum d'intensité. — MM. Lecoq de Boisbaudran et A. de Lapparent montrent que M. de Chancourtois a le premier formulé la notion de la périodicité des poids atomiques, — M. J. Minguin à fait réagir le phénol et le naphtol iodés sur le camphre cyané ; il a obtenu une réaction identique à celle qu'il à fait con- naître pour le benzylate de soude, — M. L. Lindet, en distillant des moûts à diverses périodes de leur fer- mentation, montre que la production d’alcools supé- rieurs, lente au début, s'accélère et finit par prédo- miner quand la formation de l'alcool éthylique est presque terminée, — M. R. Brullé indique la solution alcoolique du nitrate d'argent comme un réactif per- mettant de distinguer les diverses huiles, par les colo- rations variées qu'il produit ; il peut servir de même à reconnaître le beurre et la margarine. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. S. Jourdain croit que, dans l’état actuel de nos connaissances, il est impos- sible de déterminer les conditions dans lesquelles les moules deviennent toxiques. — M. P. Lesage signale les deux faits suivants qu'il a observés dans des expé- riences sur lés racines : 1° une radicelle de Phaséolus croissant dans l'air humide ayant atteint la couche d’eau s’accroit considérablement en longueur eten dia- mètre en perdant ses poils; 2 une racine de fève dont les radicelles étaient coupées à mesure qu’elles appa- raissaient se couvrait de poils abondants. — Dans une série d'expériences sur diverses plantes à piquants, M. A. Lhotelier a reconnu qu'une diminulion de l'éclairage amenait ‘une diminution du nombre des piquants. — M. Ch. Velain à fait l'étude de sables semmifères rapportés par M. Rabot de la Laponie russe; ces sables contienent des diamants ; il provien- nent vraisemblablement des pegmatites. Mémoires recus : M. A. Aignan : Sur les préten- dues combinaisons en proporlions continuellement variable et la dissociation par dissolution. — M. F. Stormer adresse une note relative à un appareil au- quel il donne le nom d’Inhalatewr norvégien. — M, Rey de Morande adresse une note « Sur les rivages mari- times paléozoiques » — M. E. Delaurier adresse des « Remarques sur les observations récentes de la pla- nèle Vénus, » M. Haller est élu correspondant pour la section de Chimie, Séance du 19 janvier 1894. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Tacchini : Résumé des observations solaires faites à l'Observa- toire royal du collège romain pendant le second semestre de 1890.— M. Em. Marchand : Observations des taches solaires faites en 1890 à l’équatorial Brun- ner (018) de l'Observatoire de Lyon. — M. Edm. Les- carbaut signale l'apparition dans la constellation du Lion d’une étoile comparable à Régulus pour son éclat. — M. G. Sire : Nouvel appareil gyratoire, le gyroscope alternatif. 20 Scrences PuYsiQuEs, — M. E. Mercadier montre que pour reproduire par le téléphone le timbre de la voix humaine aves le moins d'altération possible, la condition importante consiste dans le choix d’un dia- phragme à son fondamental très élevé. — M. A. Haller a continué ses recherches sur le pouvoir rofatoire des camphols ; la nature du dissolvant n’a eu en général pas d'influence sur le pouvoir rotaloire moléculaire du camphol gauche &; elle modifie au contraire celui de l’isocamphol gauche ; pour étudier les propriétés opti- 58 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ques des dérivés des isocamphols, M. Haller a eu recours au bornylale de chloral, — MM. Berthelot et André indiquent sur quels principes doit reposer la méthode de dosage des alcalis dans les terres: ils montrent par des analyses comparatives, que les pro- cédés ordinaires, notamment l'attaque par les acides fournit des résultats fort au-dessous de la vérité; or on doit admettre que les plantes savent décomposer pour leur alimentation même les silicates inattaqua- bles par les acides, — Les mêmes auteurs ont suivi, par des analyses portant sur les diverses parties de la plante aux différentes phases de son évolution, la maiche de l'assimilation du soufre chez les végétaux — M. Scheurer-Kestner a reconnu que l'huile pour rouge usitée en teinturerie contient deux principes actifs distincts, l'acide o/éoricinoléique, fournissant des nuances Jaunâtres, et des acides polyriciniques, donnant des tons violacés. — M. H. Arnaud admet que les albuminoïdes seraient essentiellement constitués par trois ordres de principes immédiats : les hydrocar- bonés, les corps gras ef le cyanate d’ammoniaque ou l’'urée. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Stilling produit chez le lapin l'exophtalmie double par la ligature des deux veines jugulaires externes et la seclion du sympathique cervical d’un côté; cette exophtalmie est attribuable à l'engorgement des veines rétrobulbaires, — M. R. Lé- pine et Barral ont fait de nouvelles recherches sur la distinction du sucre dans le sang in vitro : le ferment £glycolytique est détruit par une température de 54°; la plus grande partie de ce ferment sécrété par le pan- créas est emportée par les veines pancréaliques. — MM. Pouchet el Beauregard signalent les variations considérables que présentaient quant à la conformation de leurs bassin les divers Cachalots qu'ils ont eu l'oc- casion d'examiner, — M, A. Pizon étudiant le dévelop- pement de l'Astellüun spongiforme a reconnu que la larve possède au moment de son éclosion deux axydio- züides, comme les autres diplosoniens, et non pas trois, comme l'avait dit M. Giard, — M. P. Thélohan décrit deux sporozoaires nouveaux, para$ites des muscles des poissons, — M. Ad. Chatin à fait l’élude de la truffe d'Afrique ou Terfus : il a reconnu que sous ce nom on confondait plusieurs espèces ; il distingue du Terfezia léonis de Tulasne un T. Boudieri (n. sp.) et une volu- mineuse truffe blanche dont il fait un genre à part sous le nom de Tirmania, — M. Ch. Naudin qui a réuni dans son jardin une nombreuse collection d'Eucalyptus et les a suivis dans leur développement, présente à l'Académie un mémoire sur la description et l'emploi de ces arbres, — M. Daubrée à fait de nouvelles expériences sur les roches au moyen des explosifs; il a reconnu que les gaz peuvent produire des stries-et des cannelures sans le secours d'aucun fragment solide ; sur des météorites, la chaleur instantanée de l'explosion à reproduit identi- quement les caractères de la croûte noire qui se forme pendant le trajet atmosphérique ; en recueillant eu un carton graissé les menus fragments arrachés à la roche et projetés, on a retrouvé en abondance les globules microscopiques dont esl composée la poussière dite cendre des volcans ; dans certains cas, l'échantillon de roche à élé entièrement pulvérisé et aussitôt recons- titué, de manière à simuler une plasticité complète, — De l'étude dune faune conchyliologique, subfossile, recueillie par M. Dybowski au sud de l'Algérie, M. P. Fischer conclut que les eaux marines n'’onl Jamais pénétré dans le Sahara depuis la fin de la période crétacée. — M. À. Sella à trouvé du nickel natif dans les sables du torrent Elvo, près de Biel!a (Piémont). — M. A. Obry a étudié le bassin houiller du Boulonnais Mémoires reçus : M. Foveau de Courmelles adresse une note de physiologie intitulée : « Nouvelles actions mécaniques des courants électriques : actions de trans- port, » M. Ch. V. Zenger adresse une note intitulée : « La période solaire du 25 novembre, les essaims périodiques du 27 au 29 novembre 1890 et les phéno- mènes météorologiques en Bohème » et une autre note intitulée : « La périodicité des grandes éruptions volcaniques, » k M. Chambrelent est élu membre de la section d'éco- nomie rura'e, L. LaricQue, ACADEÈMIE DE MÉDECINE Séance du 13 janvier 1891. M. Hervieux lit un rapport concluant à la nécessité de rendre la vaccine obligatoire, surtout dans les colo- nies où il faudrait fonder des Instituts de vaccine ani- male, — M. Le Fort considère une loi rendant la vac- cine obligatoire comme attentatoire à la liberté indivi- duelle et devant amener une réaction fâcheuse comme celle qui se fait peu à peu en Angleterre, En France où les populations sont généralement disposées à se faire vacciner, il suffirait de rendre la vaccination facile et accessible à tous. D'autre part il est indispensable d'imposer l'isolement des varioleux et la désinfection des objets et locaux contaminés, mesures appliquées seulement à Paris où elles ont fait baisser la mortalité par variole de 55 pour 100.000 habitants en 1887 à 5 en 1589. C’est à des mesures analogues prises dans toute l'Allemagne, et à l'établissement de services publies et gratuits de vaccination qu'est due, dans ce pays, lé- norme diminution de mortalité par variole. Séance du 20 janvier 1891. M. Proust partage l’avis de M.Le Fort sur l'isolement et la désinfection relativement aux varioleux; ces me- sures ne sont pas appliquées à Paris seulement, mais à Bordeaux, Nantes, Montpellier, Marseille, Reims et au- tres grandes villes, Il est partisan de la vaccination et de la revaccination obligatoires comme mesures d’in- térêt général, d'autant plus qu'appliquées en Allemagne elles ont fait tomber la mortalité par variole à 2,2: pour 100,000 habitants de telle sorte qu'à Paris il meurt plus de varioleux que dans toute l'Allemagne, En Angleterre où la revaccination n’est pas obligatoire; la,mortalité est trois fois plus forte qu'en Allemagne, en Autriche, où il n'existe aucune obligation, 27 fois plus forte, Il demande donc à l'Académie d'adopter les con- clusions du Comité d'hygiène tendant à rendre obliga- toires par une loi la vaccination et la revaccination, — M. Dujardin-Baumetz démontre que les mesures né- cessitées par l'isolement et la désinfection sont autre- ment attentatoires à la liberté individuelle que la vac- cination obligatoire; aussi demande-t-il une loi comprenant non seulement les vaccinations et revacei- nations, mais encore des règlements sévères de police sanilaire, — M. Duplay lit un rapport sur une pré- sentation de M. Terrillon d’une ablation d'une partie du foie à l’aide de la ligature élastique dont il approuve l'emploi comme permettant de circonscrire exacte- ment la région malade et assurant une hémostase parfaite, — M, Kirmisson présente un malade atteint d’un double pied-plat, valgus douloureux, traité avec succès par la résection astragalo-scaphoïdienne (opéra- lion d'Ogston). D'E. De LAVARENNE. SOCIETE DE BIOLOGIE Séance du 17 janvier 1891 M. A. Treille communique le détail d’une observa- tion de fièvre paludéenne; pour confirmer la formule de la périodicité des abcès établie par lui, il décrit un mi- crobe polymorphe trouvé par lui dans le sang des pa- ludéens. — M. Pommay à provoqué le rachitisme chez des geais en les nourrissant avec de la viande bouillie, MM. Cadiot, Gilbert et Roger donnent l’observa- tion d’un cas de tuberculose spontanée chez le chien: les bacilles offraientun aspect particulier, — M. E. La- guerre à reconnu que le tissu réliculé de la rate est constitué, non par des fibres, mais par des cellules anastomosées ; il avait observé cetle structure chez les ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 39 poissons; des recherches spéciales sur l'embryon du mouton lui permettent de l’étendre aux mammifères, — M, P. Thelohan: sur deux Sporozoaires nouveaux, parasites des muscles des poissons. — MM. Mairet et Base ont fait des expériences pour déterminer séparément qu’elle part revient dans la toxicité de l'usine normale, à l‘eau, aux sels et aux produits de l'oxydation incomplète des albuminoïdes. — M. R. Blanchard présente une perruche dont toute la peau est envahie par des tophus d'urate de soude. — MM. J. Héricourt el Ch. Richet ont recounu que le sérum de sang de chien, recueilli à labri des ger- mes de l'air, peut être inoculé à l'homme sans inconvé- nient dans le tissu cellulaire sous cutané, — M. Ch. Ri- chet signalé comme pouvant être utilement montré dans un cours le fait suivant : un chien ayant subi une forte saignée, mais vivant encore, meurt subitement si onlemetdebout.—M.L.Chabryindique des conditions de vision dans lesquelles certains yeux présentent une diplopie musculaire, Séance du 2% janvier 1891 M. Laveran présente un appareil destiné à étudier les germes de l'air ; il consiète essentiellement en un barboteur qui recueille les germes dans de l’eau sucrée ; M. Laveran à constaté dans les salles d'hôpital une augmentation considérable du nombre des germes en suspension dans l'atmosphère après le balayage. — M. Devaux : note sur l'asphyxie par submersion des animaux et des plantes. — M. Straus présente une seringue stérilisable dont la particularité consiste dans l'emploi de moelle de sureau pour le piston, — M. d'Arsonval à étudié l'influence de l'électricité sur les échanges respiratoires, indépendamment de tout mouvement apparent ; sous l’actionde l'électricité sta- fique fournie par une machine à haute tension, il y à augmentation notable de l'acide carbonique exhalé ; sous Paction de courants alternatifs, mais dont le ren- versement se fait lentement de facon à ne pas exciter de mouvement, il ya une augmentation plus forte encore ; les courants continus n'exercent à peu près aucune action, Les recherches de calorimétrie faites dans les mêmes conditions ont donné à M. d'Arson- val des résultats concordants avec ceux fournis par le dosage de l'acide carbonique. — M. Richet rapporte plusieurs observations de tuberculeux auxquels des injections de sang de chien ont été faites par MM. He- ricourt, Langlois, Saint-Hilaire ; dans plusieurs cas, il y a eu amélioration sensible !. L. LAPICQUE. SOCIETE FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 16 janvier 1891. M. Violle est élu vice-président pour l’année 1891. M. Pellat est nommé secrétaire général. M. Joubert qui, depuis dix ans, remplissait ces importantes el délicates fonctions, n’a pas voulu, asborbé par d’autres occupations, accepter le renouvellement de son mandat; le président sortant, M. Mallard, lui exprime, avec l’assentiment général, les regrets que cause cette détermination à tous les membres de la Société. — M. Gernez rend compte de la suite des recherches qu'il poursuit sur l'application de la mesure du pouvoir rotatoire à la détermination des combinaisons formées par les solutions aqueuses d'acide malique avec les molybdates divers et les tungstates neutres alcalins. — M. Ch. Ed. Guillaume explique comment on peut tenir compte du retard des thermomètres. Un thermo- mètre n'alteint pas instantanément la température du milieu qui l'entoure. Si cette température est constante, elle n’est théoriquement jamais atteinte. Le plus sou- vent le problème que l’on a à résoudre se présente sous Ja forme suivante : la température d’un milieu donné variant d’une manière uniforme, il s'agit de connaître 1 Zrratum.: Séance du A0 janvier. — Communication de M. Galezowsky au lieu de « Pyocyanine », lire « Pyoctre- nine », la différence entre la température du milieu et celle d’un thermomètre qui s’y trouve plongé. La question ainsi posée se ramène aisément à la première forme ; par l’étude expérimentale de la variation d’un thermo- mètre placé dans un milieu à température constante, on détermine un coefficient, dont là connaissance per- mettra ensuite de calculer le retard correspondant à une marche donnée de la température du milieu. Dans les applications météorologiques, ces principes sont importants, mais ici de nouvelles précautions deviennent nécessaires, Pour avoir la température de Pair ambiant, l’on se sert avec raison d’un thermo- mètre-fronde; il peut y avoir de sérieux inconvénients à arrêter le mouvement du thermomètre pour procéder à la lecture; les conditions du rayonnement étant alors changées. On peut lire la température du ther- momètre en mouvement à l’aide d’un ingénieux appareil inventé dans un autre but (pour déterminer la vitesse dun axe inaccessible) par M. Thury de Genève, et nommé le cyclostat, On regarde l’objet en mouvement à travers un oculaire, formé de deux lentilles, entre lesquelles on interpose un prisme rectangle dont lhypoténuse est dirigée parallèlement à l'axe optique du système, La lunette peut être mise en mouvement autour de son axe et animée d’une vitesse angulaire égale à la moitié de celie de Pobjet à observer. On con- coit aisément que si l’on observait avec l'instrument en rotation un objet immobile, cet objet paraîtrait animé d’un mouvement de rotation de même sens que celui de la lunette et de vitesse double, selon une propriété bien connue des miroirs, le prisme fonction- nant ici à la manière d’un miroir; si donc la lunette et l'objet tournent dans le même sens. la vitesse de la lunette étant la moitié de celle de l’objet, on apercevra dans la lunette l’objet immobile... — Le mème auteur présente ensuite une solution pratique du problème de la colonne émergente d’un thermomètre par l'emploi d’une tige correctrice. On sait que, si toute la tige d'un thermomètre n’est pas plongée dans le milieu dont on cherche à déterminer la température, il faut ramener par une correction la partie émergente de la colonne à la température du milieu. Cette correction très impor- tante a souvent été étudiée, mais on ne connaissait pas encore de solution générale et pratique de la question. M. Guillaume a d’abord étudié dans diverses conditions les températures de tous les points de la tige, au moyen d'un thermomètre muni d’une petite ampoule, soufflée sur la tige, ampoule, qui, véritable réser- voir thermométrique, indique la température de la tige, sans troubler sensiblement sa distribution; mais on peut abandonner toute formule et corriger directe- ment la température, en employant, à côté du thermo- mètre, une tige cylindrique, contenant du mercure et se trouvant identiquement dans les mêmes conditions que la tige, d'un thermomètre émergeant de la même quantité et graduée d'avance dans la supposition qu’elle plonge en entier dans le bain : la différence entre la lecture actuelle et celle qui corespond à la température du bain donne directement la correction de la partie émergente, Des expériences diverses ont démontré l'efficacité de cette solution. Lucien Poincaré, SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 8 janvier 1891. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. À. B. Basset faitune com- munication sur la réflexion et la réfraction de la lu- mière à la surface d'un milieu aimanté. En 1877-78 le D' Kerr avait observé certaines particularités dans un rayon de lumière polarisée réfléchi par la surface polie d’un électro-aimant (Phil. Mag. mai 1877 et mars 1878.) Ces particularités disparaissaient quand le courantétaitinterrompu et devenaient inverses quand le courant magnétique était renversé. Les résultats obte- nus étaient complexes ; ils étaient troublé par l’influence de la réflexion métallique, Mais il y a plusieurs subs- 60 | ACADÉMIES ET SOCIÈTES SAVANTES tances non-métalliques (les solutions fortes, par exem- ple, de certains composés du fer), qui sont capables, lorsqu'elles sont aimantées, de produire un effet sur la lumière ; l'explication ÉRRe den action magnétique de ces substances sur la lumière est exempte des diffi- cultés qui proviennent de la réflexion métallique.M. Bas- set expose une théorie applicable aux milieax de cette espèce et il compare les résultats obtenusavec ceux des expériences du D' Kerr, — M. Edward Mathey apporte une nouvelle contribution à la métallurgie du Bismuth. Dans une communication précédente (Roy. Soc. Roc. vol. XLIII, p. 172), l'auteur avait décrit une méthode pour séparer le cuivre du bismuth par fusion avec le sulfure de bismuth. Cette méthode nécessite l’emploi d’une température assez élevée pour amener la sulfure de Bismuth à la fusion complète : aussi perd-on par volatilisation une grande quantité de bismuth, à moins que l’on ne prenne detrès grandes précautions, La mé- thode décrite dans cette communication consisle à traiter le bismuth cuprifère à une température un peu au-dessus de son point de fusion par une petite quan- tité de monosulfure de sodium. Si l’on remue l’alliage en fusion et qu’on enlève la pellicule de scories qui s’é- lève à la surface, on peut éliminer les moindres traces de cuivre. L'avantage de cette méthode est qu'on peut opérer à une plus basse température où le bismuth a moins de tendance à se volatiliser. 2? SCIENGES NATURELLES. — M. E. A. Schañfer fait une communication sur la structure histologique des co- lonnes musculaires ou sarcostyles qui forment les muscles de l'aile des insectes. Le terme colonnes musculaires ou son équivalent sarcostyles est employé pour désigner les éléments facilement séparables longi tudinalement qui constitueut les fibres des muscles des ailes de la plupart des in ectes, On supposait que la colonne musculaire élaitcomposée d’un certain nombre de fibrilles juxtaposées, dont chacune est formée des substances qui constituent le sarcostyle, disposées en couches qui se succèdent alternativement ; chacun des segments d’une fibrille estcomposé en son milieu d’une portion du disque épais, à chacune des extrémités de ce disque et continue avec lui d’une portion de l’inter- valle clair, et enfin terminant aux deux bouts cet inter- valle clair, d'une portion du disque mince. Les obser- valions de M. Schafer tendent à prouver que les disques épais ne sont pas composés d’un faiseau de fibrilles, mais constitués par une substance homogène, qui se colore par l’hematoxyline et d’autres matièresanalogues et qui est traversé par des canaux tubulaires.La section optique de chaque disque épais présente une douzain de canaux analogues (ou davantage); la substance contenue dans ces canAe se continue librement, selon touteapparence, avec la substarce transparente et sans couleur de intervalles clairs. La striation longitudinale du disque épais est due à la canalisation ; celle de l'intervalle clair au prolongement de lignes minces de substances sarcodiques à travers l'intervalle clair j jus- qu'au disque mince, Le sarcostyle tout entier semble ètre enveloppé d’une membrane d’une extrème délica- tesse, — M. le D' J. B. Haycraft, fait une communica- tion sur la structure histologique des muscles striés. Il s'attache spécialement à l’exvosition d’une nouvelle méthode de recherche, qui consiste à prendre l’em- preinte des fibres musculaires au moyen du collodion. L'auteur montre que lorsqu’ un muscle se contracte, le changement d'aspect qu'on peut observer en lui esl entièrement dù à un changement de forme. Les em- preintes des fibres présentent des stries identiques à celles des fibrilles musculaires, mais elles s’effa- cent en 5 minules environ à cause de la contraction de la membrane de collodion, qui fait disparaitre toutes les inégalités que présente sa surface. Il est clair que ces rides, empreintes dans le collodion, ne pourraient se produire si la striation de la fibrille musculaire était due à des modifications de sa struc- ture interne ; elle est donc causée par la forme des librilles ; forme el striation sont transportées sur le collodion. Le D' Hayeraff a obtenu fréquemment des empreintes de muscles quimontrent sur la même fibre état de contraction et l’état de repos avec les états in- termédiaires. Ces observations contredisent donc cette hypothèse quelesstries transversales correspondentaux diverses couches qui constituent les fibres, ou que les changements observés dans la striation pendant la con- traction sont dusaux variations des quantités relativesde liquides contenues dans les différentes substances qui produisent la striation. Séance du 15 janvier 1891, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A.E. H. Love pré- sente une note sur l’état présent de la théorie des parois élastiques minces. 2 SCIENCES PHYSIQUES. — M.le professeur J.-J. Thomp- son fait une communication sur la vitesse de propaga- tion de la décharge lumineuse d'électricité à travers un gaz réréfié. Pour mesurer la vitesse de propagation de la lumière qui accompagne la décharge électrique dans les gaz, le professeur Thompson s'est servi d'un tube de verre de 15 mètres de longneur environ et de 5 mil- limètres de diamètre, couvert de noir de fumée, sauf en deux endroits, On fait le vide dans ce tube et on y fait passer un courant qui traverse une électrode don- nant dans l'air des étincelles de six ou sept pouces de long. La lumière qui passe par une des parties décou- vertes tombe directement sur un miroir qui tourne 00 fois par seconde ; celle qui passe par l’autre est réfléchie par un miroir plan sur le miroir tournant. Les images des parties brillantes du tube, réfléchies par le miroir tournant sont observées avec un téles- cope, et les miroirs sont disposés de telle sorte que lorsque le miroir tournant est immobile, les images des parties brillantes du tube apparaissent comme por- tions d’une même ligne horizontale. Les observations montrent qu'une fois environ en quatre minutes d'é- troites images brillantes des deux parties découvertes du tube peuve ent être apercues à l’aide du télescope. Ces images n’ont pas de largeur appréciable. mais elles n'apparaissent pas absolument sur une même li- gne droite ; le déplacement relatif des lignes se ren- verse,si l’on retourne l’électrode et aussi si Pon change le sens de rotation du miroir. Le déplacement des images de la mème ligne droite est dû à la vitesse finie avec laquelle la lueurse propage. En déterminant la vitesse de rotatiou du miroir,le déplacement verticaldes images et ladistance entreles deux portions découvertes du tube on à pu calculer la vitesse de propagation de la lueur qui est de 16 X 1010, vitesse égale à plus de la moitié de celle de la lumière. Cette valeur ne doit être regardée que comme valeur approximative et non comme une détermination exacte. Un autre fait que ces expériences ont fait connaitre, c'estque la partie principale de la déeharge neue se produit dans un long tube vide a son origine, à l’électrode posi- tive, Cette colonne positive remplit pratiquement le tube, car elle s'étend jusqu'à un pouce ou deux de l'anode. La déchar ve part de l’électrode positive, même quand elle est constitué par une surface plate liquide, tandis que l'électrode négative est un fil terminé en pointe aiguë, Les expériences nous conduisent donc à regarder Ja décharge comme un écoulement de l’élec- tricité positive soit depuis l’anode avec une vitesse égale à la moitié de celle de la lumière, accompagnée par une décharge comparativement trèslente venant du cathode, 3° SCIENCES NATURELLES, — M. le D' William Marcet fait une communication surles phénomènes chimiques de la respiration de l’homme. Il étudie le cas où lair renfermé dans un espace clos est constamment re- respiré. L'objet de la recherche est de déterminer les effets produits sur les phénomènes chimiques de la respiration, lorsqu'on respire et qu'on re-respire un volume donné d'air en un temps. Voici les résultats généraux de ces expériences : 1) La quantité d'acide carbonique expirée en un temps donné est moindre que dans les conditions ordinaires, 2) Les personnes ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 61 qui émettaient le plus de CO? dans l’air confiné sont cel- les qui expirent le plus d'air et de CO? dans les condi- tions ordinaires et vice-versa. 3) Lorsqu'on respire 35 litres d'air dans un espace clos pendant 5 minutes, le volume de cet air subit une légère diminution. #) Les effets produits sur les phénomènes chimiques de la respiration par les conditions précédentes disparaissent en moins de six minutes, lorsqu'on a recommencé à respirer dans les conditions normales. Richard A. GREGoRY. SOCIÈTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 16 janvier 1891 Le professeur G.M.Minchin ! lit un mémoire Sur lu photo-électricité, Ses expériences sur ce sujet ont été commencées en 1877 dans le but de produire une image photographique d'un objet éloigné. Les expé- riences n'ont pas encore permis d atteindre cer résultat; mais on a rencontré, en route, des phénomènes inlé- ressants. On produit un courant électrique entre deux lames d'argent recouvertes avec du collodion ou de la gélatine enduits de chlor ure, bromure, iodure ou d’un autre sel d'argent, ou avec de l’éosine ou de la fluores- ceine ; l’une “des lames étant illuminée, tandis que l'autre est maintenue dans l'obscurité, toutes deux plongeant dans un liquide convenable. La direction du courant dépend des matières premières employées et la partie bleue du spectre est la plus efficace. Les cou- rants ont sur les lames un effet photographique, et celte action est strictement limitée aux parties traver- sées par le courant. M. Becquerel, qui avait déjà étudié action de la lumière sur des plaques d'argent enduites de bromure, etc., conclut que la nature posilive ou négative de la lame éclairée dépend de l’épaisseur de la couche superficielle. Des feuilles d’étain ternies plon- gées dans l'eau ordinaire donnent un courant quand l’une d’elle est exposée à la lumière et l’autre non, Si on rend les feuilles nettes et propres, le courant cesse. L'addition d’un sel au liquide, qui diminue la résis- tance, réduit invariablement la force eee, l'expérience montre que les alcools sont les liquides qui fournissent les meilleurs résultats. Diverses expé- riences semblent prouver que la sensibilité de lélain est due à la production d’une légère couche d'oxyde à la surface. Les variations de la force électromotrice ont été étudiées avec un électromètre, la force électromo- trice est proportionnelle à l'intensité de la lumière, Quelques-unes des piles à étain ont une manière particu- lière de se comporter. Leur force électromotrice dis- parait au bout de quelques jours; mais une légère impulsion la fait disparaitre, un choc nouveau les rend insensibles,et ces effets peuvent être indéfiniment répétés, Ces « piles à impulsion », comme les appelle l’auteur, sont sensibles aux impulsions électro-magné- liques ; un oscillateur de Hertz rétablit leur sensibilité à une distance de 81 pieds. Durant ces derniers temps M. Minchin à construit des éléments à sélénium en répandant ce corps liquéfié sur des métaux, que l’on plonge ensuite dans un liquide; l'aluminium comme métal, et l’acétone comme liquide fournissent les meil- leurs résultats. Une particularité remarquable de ces éléments est qu'ils sont presque également sensibles à toutes les radiations, quelle que soit la couleur de ces radiations. L'auteur remarque en terminant que ces résultats pourraient être appliqués à la photométrie, à la téléphotographie et à l'utilisation de l’énergie so- laire, — Le professeur F. R. Barrell montre et décrit un appareil de cabinet pour déterminer l'accélération de la pesanteur. Un certain nombre de balles de fer tombent d’une certaine hauteur, et partent successive- ment, la seconde quand la première est arrivée à des- lination, ainsi de suite. On peut ainsi déduire avec précision le temps de la chute de l’une d’entre elles et ! Voyez sur ce sujet un article de M. Minchin paru dans la Revue du 15 juin 1890, t. I 1890, page 339, connaissant la distance parcourue, en déduire ia valeur de g. Le déclanchement est produit à l’aide d’un système d’électro-aimants actionnés par un courant qui se forme quand les balles arrivent au bas de leur course, SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 9 janvier 1891, SCIENCES PHYSIQUES. — Le D' John Murray lit un mémoire sur la forme, la structure et la distribution des nodules de manganèse dans les profondeurs de la mer. Il montre un grand nombre de spécimens de ces nodules. Les fragments de pierre-ponce qui ont été pénétrés par l'eau et se sont enfoncés au fond de la mer forment souvent les noyaux de ces nodules. Dans d’autres cas, les noyaux sont des morceaux de roche ou des dents ou des os des requins et des baleines, etc. Le D' Murray pense que le manganèse est déposé de la dissolu- tion par la voie des carbonates. Ces nodules se ren- conPens comparativement d’une facon assez rare dans s dépôts du bord (vase bleue) où la vie organique est A plus grande; ils sont, au contraire, très abondants dans les eaux profondes où la vie est minima. M. Robert Qvine et le D' John Gibsson lisent un mémoire sur la présence de dépôts de manganèse dans la vase marine. Les auteurs ont trouvé expérimentale- ment que le sulfure de manganèse est dissous et décom- posé par l’eau de mer qui contient de l'acide carbo- nique en dissolution, — M. J. G. Buchanan lit un mémoire sur la composition des nodules de manga- nèse de l'océan et du littoral. Ce mémoire renferme des analyses de nodules du Pacifique Nord, de océan au sud de l'Australie et du Loch Fyne; les endroits et les circonstances attenantes sont amplement décrites, comme aussi les caractéristiques physiques des dif- férents types de nodules. Le principal objet de l'analyse était de déterminer le degré d’oxydation du manga- nèse, On a trouvé que, dans les nodules de l'océan, la formule de l’oxyde varie depuis MnO 1% à Mn0O 1°, comme s'il y avait seulement du Mn0? pur. Il existe une légère différence dans l'oxydation des couches superficielles et du noyau:les parties externes ont la for- mule MnO 15 (andis que la formule des parties internes est MnO 14%, Les formules des oxydes, dans les nodules du Loch Fyne, varient depuis MnO* 54 À MnO 1.56 , CES no- dules ont donc une composition voisine du sesqui- oxyde Mn?0°. Les noyaux sont beaucoup plus riches en oxygène que les parties externes, la formule est environ Mn0!: 5, On a fait un grand nombre de déter- minalions de humidité, de la perte par calcination et des densités des nodules dans Phumidité, On caleulait la densité SpENEEnE des produits volatils, eu égard à la dessiccation et à état calciné. — M. Buchanan dé- pose aussi un tableau d’un grand nombre de résultats analytiques, relativement à la composilion de divers dépôts profonds provenant de la Méditerranée. M. Robert Qvine el W. S. Anderson communiquent un mémoire sur l’action des sels métalliques sur le carbonate de chaux, plusieurs spécimens sont montrés. — La lecture de ces mémoires est suivie d’une courte discussion sur certains des résultats et conclusions auxquels est arrivé M. Buchanan dans son mémoire (lu dans la séance du 1 décembre), relativement à la part attribuée aux sulfures dans la formation des dé- pôts brunätres dans l'océan. M. Qvine et le D' Gibsson pensent que les résultats qu'ils ont obtenus prouvent que le manganèse ne peut jamais se former dans les circonstances décrites par M. Buchanan. M. Buchanan reconnait l'importance de ces observations, mais il pense que, bien qu'il soit fort altérable dans l’eau de mer, et même dans l’eau douce, le Mn peut être formé localement, et, dans son mémoire, il lui attribuait seu- lement une existence transitoire. Ces résultats ne touchent donc en rien ses vues, relativement à la for- mation des hydrates d’oydes de fer et des dépôts rouges et bleus; M. Buchanan pense que nous sommes 62 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES maintenant encore dans lignorance, relativement à la formation des nodules. Séance du 15 janvier 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — Le Dr Thomas Muiz lit un mémoire sur quelques théorèmes sur les détermi- nants. Des symboles tels que d; indiquent l'ensemble de tous les déterminants compo- sants GO & GG & & & GG bi D, b, b; —( by Obs by b, —=\i}. C1 Co C3 C l'O Ci Cs cc dy d ds; di dj) de ds ds Le D' Muiz prouve directement que la loi de multipli- cation de ces expressions symboliques est la même que celle de la multiplication des déterminants, et il applique ces résultats à la démonstration de divers théorèmes sur les déterminants connus antérieurement. — Le D° Muiz discute ensuite un problème d’élimina- tion relatif aux roulettes des ellipses et des hyperboles. Le prof, Tait a montré que les roulettes d’une ellipse qui glisse sur des axes rectangulaires peuvent être obte nues comme les roulettes d’un symbole glissant sur des axes inclinés. L’équation de la roulette rapportée aux droites sur lesquelles roule la courbe s’oblient par léliminätion d’une variable entre deux équalions. En faisant l'élimination, le prof. Tait oblient une équation du dixième degré, mais le prof, Cayley a montré que l'équation doit être du huitième degré et par suite l'équation du prof. Tait contient un facteur étranger. Le D'° Muiz à réussi à délerminer ce facteur, — Lord M Laren lit un mémoire sur la roulelte de la courbe ent 1 ee + de — {Il oblient deux équations entre lesquelles æ* La l'éliminalion d'un paramètre donne l’équali n de la roulette, 2° ScrexcEs PHYsIiQuEs. — Le prof, W. H. Perkin lit un mémoire sur la berbérine. L’alcaloiïide désigné sous ce nom, C?20H{7A70$, fournit par oxydation avec le perman- ganate de potasse un grand nombre de substances dont les plus importantes sont loxyberbérine C20H17 A70ÿ, la dioxyberbérine C2H174706, le berbéral C2HITAZOT, l'acide anhydroberbéridique C2H1TAZO, et l'acide berbéridique CH4A701, L'étude de ces substances à donné plusieurs résultats qui apportent une grande clarté sur la constitution des alcaloïdes, L’acide anhy- droberbéridique dissous dans un alcali forme un sel d'acide berbéridique et celte dernière substance mêlée avec de l'acide sulfurique dilué est décomposée en acide hémipinique (CH30)?2C5 H?(COOH> et en une nou- velle base CIMHMAZO® qui répond à la constilution : (o) co CH NC: F (oja CH? CH: Az H?. La conslitulion de l'acide anhydroberbéridique est jar suile : : COOH< ON 9 ol SGH ÿCH. (CH3O)>C6H2/ . ÿAz— CH? — CH? 07 cod Le berbéral est décomposé, quand on le (raite par l'acide sulfurique dilué, en acide pseudopinique /COH {(CHS 0)? C5 H2 SCOOH et une substance CI0H%A7 03 qui est l’anhydride de la base CI0H11 AZ 0! décrite précédemment et qui par suite a la constitution : CO AzH CH2/ “CH | -0- N\cH— CH2 La constitution du berbéral est représentée par la formule : COH CO L 0 (CH0} C5 H2/ >CH2 \CH3 \co—A:— ec” Ca et la constitution de la berbérine est probablement : CK==410 0 Ncsx2 NC (CH: 0} Ci H2 ei Co | R CH — Az — CH? — CH? W. PEDDIE, Docteur de l'Université d'Edimbourg. SOCIÉTÉ PHILOSOPHIQUE DE MANCHESTER Séance du 13 janvier 1891. On annonce la mort de M. G. W. Ormerod, ancien trésorier de la Société. C’est M. Ormerod qui a le pre- mier en 1847 donné une description détaillée des régions salines du Cheshire, — M. de Rance lit un mémoire fait en commun avec M. W. Brockbank surla nouvelle section géologique exposée dans la construction du chemin de fer de Fallowfield et Levenshulme. Il décrit en détail le calcaire du Spürorbis, qui est composé ici d’une couche de marne pourpre ayant plus de 60 mètres d'épaisseur et d’une couche de calcaire véritable, épaisse de 0%26 et contenant un tiers d’hématite, L’exa- men au microscope y montre l'existence de beaucoup de fragments d’os et de petits Entomostraciens. Une dénudation considérable à eu lieu après la déposition des couches houillères moyennes, — MM. Gee et Har- den ont étudié le voluménomètre de Regnault et lont modifié, Avec un cylindre de laiton ils ont pu réduire l'erreur expérimentale jusqu'à 0,17 /,. Ils décrivent un nouveau procédé pour déterminer la densité des corps à l’état de poudre. La poudre est introduite dans un vase en verre de capacité connue que l’on remplit ensuite d'acide carboniquesec, On détermine le volume occupé par la poudre en chassant l'acide carbonique par un courant d'air dans un appareil à potasse que l’on pèse avant et après l'expérience. L'erreur d’expé- rience est de moins de 0,20/,. Les auteurs concluent néanmoins qu'il vaut mieux, dans tous les cas où cela est possible, adopter une mesure hydrostatique, SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES (SEGTION DE MANCHESTER) Séance du 9 janvier 1891. M. Gerland à trouvé que les dissolulions d'acide oxalique litrées se conservent sans s’altérer si l’on y ajoute un peu de thymol. Le thymol n’agit pas sur les corps habituellement employés comme indicateurs, — M. J. A. Wilson lit un mémoire sur le ‘‘Turkey-red oil”, Gette huile, introduite dans le commerce depuis 1876, est fabriquée au moyen de la réaction de lacide sulfurique sur l'huile de riein ou l'huile d'olive à froid. On enlève ensuite l'excès d'acide. Le produit final con- lient environ 1.3 (/, Na?0, 20 ©}, d'acide gras non combiné, et 25 0 d'éthers de la glycérine. La densité varie de 4.017 à 1.135. La constitution de ce corps, étu- diée déjà par divers savants, n’est pas encore bien dé- terminée. P. J. Hanroc. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 9 janvier 1891. 1° SCIENGES MATHÉMATIQUES. — M. Emil Wælsch : Sur la géométrie infinitésimale des congruences de droites et de surfaces. — M. Rudolf Konig : Détermination de la trajectoire de la comète 1857 IL. La comète télesco- pique découverte à Gættinge le 22 juin 1857 put être observée seulement pendant 28 jours, elle arriva au petihélie dès le 18 juillet. La discussion des observa- L das … toits end dise dé mess a ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 63 tions permet néanmoins à l’auteur de donner comme très probables les éléments de la trajectoire parabolique de la comète, — M. Ed. Mahler : Calcul de l’équinoxe et du solstice dans le calendrier des Juifs. On calcule dans le calendrier hébreu Péquinoxe et le solstice par les deux méthodes inventées 300 ans environ après Jésus-Christ par les rabins Samuel et Adda, Ces deux méthodes at- tribuent cependant à l’année solaire une longueur qui s’écarte assez de l’année tropique pour que les déter- minations des points annuels soient aujourd’hui entiè- rement illusoires, car l'erreur de Samuel est main- tenant de 18 jours et celle de Adda de 7 jours. L’auteur explique comment une nouvelle méthode de calcul peut avantageusement remplacer les anciens procédés. 20 SGIENCES PHYSIQUES. — M. Fray Stogermayr : Les fluides électriques, leur existence et la manifestation de leurs effets. 3° SCIENCES NATURELLES, — M. À. Rosival adresse le résultat des recherches pétrographiques qu'il à pu effectuer grâce aux matériaux recueillis par Teleki dans l'expédition de Hohnel dans l'Ouest Africain. On à avantageusement employé les méthodes optiques et la méthode microchimique de Borickg dans cette étude, L'auteur donne une description tématique des échantillons étudiés : granits et schistes cristallins ; couches éruplives récentes, sédiments chimiques, etc. Séance du 15 janvier 1891, MM. Rudorf Benedikt et Mare Bamberger : Suw: Paction de l'acide iodhydrique sur les substances soufrées. L'acide iodhydrique de poids spécifique 1,70 réduit l’acide sulfurique, le sulfate de potasse, le sul- fate de baryte, le sulfométhylate de potasse et le para- phénolsulfonate de potasse sous forme d'acide sulfhy- drique et de soufre. Si l'on chauffe les substances désignées avec de l’acide iodhydrique et du phosphore rouge, toute la quantité de soufre qui se forme passe à l’état d'acide sulfhydrique. Le mercaptan n'est pas décomposé par l'acide iodhydrique. Les pertes dans la détermination de la quantité de méthoxyle des subs- tances sulfurées sont dues à Ja formation de mer- captan; le Nihoengenol, mêlé au sulfate de potasse, donne très peu de méthoxyle. Il est à recommander de déterminer de préférence le méthoxyle en chauf- fant la substance considérée avec l'acide iodhydrique et le phosphore rouge. L'acide paraphénolsufoné, traité par l'acide iodhydrique à chaud, se transforme en phénol. On doit rechercher si c’est là un mode général pour obtenir les substances mères des acides phénols et des acides-amides, Emile Weyÿr, Membre de l'Acud mie. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séance du 18 décembre 1891 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Pincherle : Sur un système d’intégraux elliptiques, considérés comme fonctions de l’invariant absolu. Dans cette note M. Pin- cherle démontre que les systèmes : (1) 2) (2) FE —3tr+iz(l—e)(l—e)({{—e,;) forment un système récurrent doué de propriétés, qui font rapprocher ce système de celui des fonctions sphériques de seconde espèce, Cependant une par- ticularité en augmente l’intérèt. Tandis que les fonc- tions sphériques et tous les systèmes analogues consi- dérés jusqu'ici,sont liés par des relations récurrentes de second ordre, le système (1), qui satisfait à une relation récurrente de troisième ordre, jouit de propriétés qui portent la question dans un champs tout à fait nou- veau. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Cattaneo à étudié la dilatation thermique du bismuth, à l’aide d’un amal- game très riche de ce métal, pour voir si, comme il a été annoncé par M. Lüdeking, le bismuth liquide présente un maximum de densité à une température voisine de celle de la fusion, c’est-à-dire entre 268 et 270°, Les recherches de M. Cattaneo confirment les résultats obtenus déjà par M, Vicentini, qui avait trouvé que le bismuth à l’état liquide ne présente aucun maximum de densité, — MM. Sella et Oddone, poursuivant les études que M. Keller a exécutées dans la campagne romaine, onf fait des recherches sur les roches magné- tiques qui se trouvent dans les Alpes. Ils ont exploré p'usieurs localités du Canavese, du Biellese et du Mont- Rosa, etils donnent une liste des lieux où existent des Roches possédant des points distincts, c'est-à-dire des zones qui font dévier de 1809 l'aiguille aimantée d’une boussole de poche de moyenne grandeur. Les roches qui ont présenté des propriétés magnétiques sont la magnétite, la serpentine, la diorite, le mélaphyre, la syénite. Une roche magnétique a été observée par M. Sella sur la Punta Guifetti (m. 4561 dans le groupe du Mont-Rosa); mais comme elle présente sur sa sur- face des traces de fusion due à la foudre, il n’est pas improbable que ses propriétés magnétiques dépendent le cette dernière cause. — M. Ciamician développe quelques considérations sur la théorie de la dissociation électrolytique, En ce moment on agite en chimie une question très intéressante, sur l'état où se trouvent les électrolytes lorsqu'ils sont dissous par l’eau. Pour expliquef certaines anomalies présentées par ces solu- lions quand on les compare avec les solutions de corps qui ne conduisent pas le courant électrique, le chimiste suédois Arrhénius, se référant aux anciennes idées de M. Williamson et de Clausius, à imaginé une thforie qui admet que les électrolytes en solution aqueuse seraient dissociés en leurs ions. Cette hypothèse qui semble en contradiction avec les données ordinaires de l’affinité chimique, sert à expliquer plusieurs faits obscurs jusqu'à ce moment. Dans la dissociation des ions, ces derniers ne peuvent être complètement libres ; mais il estnécessaire d'admettre qu'ils sont retenus par les polarités électriques qui se manifestent au moment de la scission. M, Ciamician, tout en acceptant la théorie de M. Arrhénius, s'efforce de la rendre moins contraire aux idées prédominantes en chimie, et pour cela il recherche les causes qui peuvent produire, en certains cas, une telle scission des molécules, Il observe que la dissociation électrique se manifeste surtout en solution aqueuse, parce que dans d’autres dissolvants mêmes les acides les plus énergiques sont de mauvais conducteurs du courant; et il admet qu'entre les mo- lécules des électrolyles et les molécules de l'eau il se produit une action, analogue à celle qui donne origine aux hydrates ordinaires, Les molécules de l’eau causent la scission des électrolytes, parce que les ions de ces derniers peuvent s'unir aux premières ef former des groupements, dans lesquels les fractions positives et négalives des molécules du corps dissous, sont entou- rées par celles de l’eau qui n'éprouvent aucune altération. Les ions, de cette manière, restent séparés, et leurs charges électriques en empêchent l’action sur les molécules de l’eau, L'idée dé M. Ciamician relative à l'existence des ions libres s'appuie sur la supposi- tion que ces derniers peuvent s'unir à des molécules entières, de même qu'ils s'unissent entre eux, Appli- quant cette hypothèse aux états liquide ef solide, il arrive à la conclusion que dans les électrolytes (sels) solides et en fusion, peuvent encore se trouver des ions libres, parce que ces derniers ont la propriété de s’en- tourer de molécules entières du même électrolyte, qui en empêchent, pour quelque temps la réunion, — MM. Ciamician et Angeli entretiennent l’Académie d’une réaction qui permet d'apprécier la stabilité chi- mique relative des dérivés du thiophène, en mesurant la résistance que ces composés présentent à la scis- sion. Le thiophène est formé par un anneau de quatre 64 NOUVELLES atomes de carbone et un de soufre reliés entre eux de CH —- CH D àù CH Ne 4 celte façon :Qy . Faisant agir l'acide nitrique sur le thiophène ou sur.ses dérivés, on obtient seule- ment les produits de substitution avec le résidu nitri- que; mais si au contraire on emploie des composés dans lesquels tous les atonnes d'hydrogène sont rem- placés par le brome, l'acide nitrique ouvre Le noyau, et le soufre est transformé en acide sulfurique. Les au- teurs espèrent qu'à l’aide de cette propriété,ils pourront déterminer, par la quantité des produits de scission, la résistance du noyau, parce que les divers thio- phènes bromurés ne sont pas décomposés à un même degré par l’acide nitrique. Pour le moment MM. Cia- mician et Angeli n’ont étudié que la partie qualitative du phénomène, et ils ont reconnu que le tétrabromo- thiophène et les deux tribromothiophènes, sont trans- formés par l'acide nitrique en composés qui contien- nent une chaîne ouverte d’atomes de carbone. IL est intéressant d'observer que ces produits de scission sont en étroite relation avec les substances d’où l’on tire ces composés thiophéniques. De manière que la décomposition par l'acide nitrique pourrait être consi- dérée comme une inversion du procédé synthétique de ces corps. — M. Fileti, étudiant la paradipropylbenzine, a examiné d'autres dérivés de cet hydrocarbure, et dans une Note il met en relief l’analogie complète qui existe entre les sels des sulfoacides de la dipropylis benzine et de la propylisopropylbenzine, — MM. Filet- et Crosa donnent la description d’une modification dontils font usage pour préparer l'acide bromhydrique en forte qualité, On prépare l'acide avec la méthode ordinaire, par l’action du brome sur le phosphore rouge en présence de l’eau; mais, pour libérer le gaz des vapeurs de brome, on le fait passer dans un tube en verre, rempli d’un mélange intime d'amiante, im-. bibée d'acide bromhydrique, et de phosphore rouge: Cétte disposition peut servir longtemps, et lorsque tout le phosphore est tout à fait détruit, on n'a qu'à mêler l'amiante avec une nouvelle quantité de ce corps. De cette manière les plus petites traces de vapeur de brome sont arrêtées, même sile gaz se produit rapi- dement, et il n’y a pas besoin de surveiller Popéra- tion. — MM. Fileti et Basso : sur les acides homocu- minique et homotéréphtalique. — M, Errera : Acides nitrocymènsulphoniques. 9° SCIENCES NATURELLES. — M, Pigorini présente une carte paléthologique italienne, dans laquelle on peut observer la distribution géographique des habitations lacustres qui existaient dans la vallée du Pô pendant l’âge du bronze, et celle des nécropoles du premier âge du fer. — M. De Zigno : Poissons fossiles de Lumeyzane en Val Trompia, Ernesto Maxcxr. NOUVELLES LA CONFIRMATION EXPÉRIMENTALE DE LA THÉORIE DE FRESNEL La dernière séance de l’Académie des Sciences (26 jan- vier) a été marquée par un événement sur lequel il importe d'attirer tout spécialement l'attention de nos lecteurs. M. A. Cornu y a rendu compte, dans les termes les plus élogieux, d’un travail de M. Wiener, de Strasbourg, destiné, croyons-nous, à un grand retentissement, L’éminent académicien en a fait res- sortir le haut intérêt pour la théorie de la lumière. Depuis l'expérience célèbre d’Arago et Fresnel dé- montrant la transversalité des vibrations par la non interférence des rayons polarisés à angle droit (1816), une question reslait à résoudre, à savoir la direction du rayon polarisé relativement au plan de polarisation. Fresnel admettait que cette direction était normale au plan. Mais cette hypothése, à laquelle l'avait conduit l'étude de Ja polarisation par réflexion, et qui lui sem- blait nécessaire, avait été rejetée par plusieurs physi- ciens, partisans du parallélisme des vibrations et du plan de polarisation. Aucune observation directe ne tranchait le débat. Cependant le problème était fonda- mental, L'Académie des Sciences de Paris le proposa comme sujet du prix Bordin pour 1867. Ce prix ful décerné à peu près en entier à M. W. Zenker, de Berlin, pour une réponse à cette question, Le mémoire cou- ronné n’apportait pas, à proprement parler, une solu- tion expérimentale; mais il indiquait comment on pouvait espérer la réaliser. La méthode du savant allemand, approuvée par la Commission du prix Bordin, alors présidée par M, Fi- zeau, vient de recevoir la confirmation des faits, grâce à un di-positif élégant, imaginé par M. Wiener. Ce dispositif consiste à diriger sur un miroir, sous une incidence de 45°, un large faisceau de lumière pola- risée : une partie du faisceau réfléchi, formant alors un angle de 90° avec le faisceau incident, interfère avec ce dernier. M, Zenker avait démontré que, si le plan de vibration est rormal au plan de polarisation, il devait en résulter une série de franges obscures séparées par des bandes lumineuses. Mais ces franges devaient être si rapprochées qu'il était extrèmement difficile d'en constater l'existence, C’est cette constatation que M. Wiener à pu faire au moyen d’une pellicule sensible (d'une épaisseur de 1/30 de longueur d’onde) impré- gnée d'un sel d'argent : il est parvenu à y relever la trace d'un système de plans nodaux et de plans ven- traux alternatifs, Mais afin d’éviter la confusion d'images qui se serait naturellement produite si Ja pellicule sensible avait été placée normalement aux plans obscurs, M. Wiener a eu l'ingénieuse idée d'orienter cette pelli- cule de telle sorte qu’elle leur fût presque parallèle. Dans ces conditions leurs traces peuvent être considé- rablement espacées et deviennent parfaitement visi- bles à l'œil nu. Tels sont les curieux résultats dont M. Cornu vient de signaler toute la portée au point de vue de la théorie de la lumière, C’est en même temps la confirmation des conceptions de Fresnel et l’infirmation définitive des diverses interprétations basées sur l'hypothèse du plan de vibration parallèle an plan de polarisa- tion. Louis OLIVIER. Erratum : Dans notre précédent numéro (page 10, première colonne, ligne 8) une coquille nous a fait écrire au sujet des Rubis artificiels : Cont environ quatre millimètres et demi d'épaisseur ». Il faut lire : « quatre millimètres de largeur et un millimètre et demi d’é- paisseur ». Le Gérant: OcraAve Don. Paris.—]mprimcrie F. Levé, rue Cassette, 17. | ANNEE N° 3 15 FÉVRIER 4891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCE PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER À PROPOS DES LECONS DE GÉOMÉTRIE DE M. DARBOUX Les gens qui veulent apprendre les mathéma- tiques, non pour être en mesure de satisfaire aux exigences limitées d'une profession, mais pour les savoir, sont quelquefois bien embarrassés, En comptant les volumes déjà parus des grands jour- naux de mathématiques, des collections publiées par les académies et les sociélés sa- vantes, on dépasserait sans peine le nombre mille, et d'habitude, ces volumes sont très gros. Huy a là dedans beaucoup de mémoires admirables, que l’on relira toujours; il y a aussi quelque fatras : que l’on compte maintenant ce qui se publie chaque année dans les diverses langues de l'Europe el qu'il faudrait lire pour se tenir au courant, à sup- poser que l'on y fût déjà, et l’on ne manquera pas ajoutez à celà que ceux qui sont diverses d'être eflrayé : en mesure de lire au moins une partie de ces mé- moires sont habituellement dévorés du désir d’en écrire d’autres! eux-mêmes; supposez maintenant que celle activité scientifique continue et que, comme il est probable, elle s'accélère, et demandez- vous ce que ce sera dans deux ou trois siècles : la tête s’y perd. Remarquons en outre que les vrais et importants progrès dans le développement mathé- matique ne se font guêre par ceux qui se sont en- fermés dans un petit coin spécial, mais bien plutôt par ceux qui ont des vues d'ensemble, qui savent éclairer l’une par l’autre chaque partie de la science, et qui approchent de cette unité supérieure qui domine la multitude des vérités particulières, comme les lois générales de la physique dominent l'infinité des phénomènes. Il semble que la science mathématique, en se développant comme elle l’a fait, devrait nécessiter la division, la spécialisation des recherches : tout au contraire, ce développe- ment mème s'est fail en grande partie par la fusion de concepts qui paraissaient appartenir à des bran- ches éloignées de la science. Dans la belle Notice sur Halphen que M. Brioschi a lue à l’Académie des Lincei, le savant italien s'exprime comme il suit : (La note caractéristique du progrès moderne des études mathématiques se trouve dans la con- tribulion que chaque théorie spéciale, des fonc- lions, des substilutions, des formes, des transcen- dantes, et aussi la géométrie, apportent à l’élude de problèmes pour lesquels autrefois une seule de ces théories aurait semblé nécessaire. » Assuré- ment, si celte vue synthétique de l’ensemble de la science n’élail nécessaire qu'à ceux qui doivent réa- liser de grandes découvertes, beaucoup de person- nes, même sans avoir une modestie excessive, pourraient se consoler de ne pas avoir la culture étendue qu'elle exige ; mais en vérité la conception nette des rapports et de l’unité des diverses parties de la science est presque adéquate à l'intelligence même de cette science et cette culture étendue qui semble si difficile, il faut à tout prix l’acquérir. A coup sûr, cela n'est pas impossible, et les termes mêmes du problème en font ressortir la solution; l’existence de concepts très généraux AVIS. — M. C. Naud, auquel une importante situation vient d’être faite dans la librairie, va se trouver prochainement empêché de continuer ses fonctions de secrétaire à la Revue. Depuis la fondation du journal, M. Naud lui avait consacré tout son temps. C’est pour nous un devoir et un plaisir de le remercier ici de son préeieux concours. M. Naud, ne pouvant plus nous le continuer comme secrétaire, nous le donnera, de temps à autre, comme collaborateur. L. REVUE GENERALE, 1891, 3 J. TANNERY. — LES LECONS DE GÉOMÉTRIE DE M. DARBOUX contenant d'innombrables vérités particulières, d'ordre très différent, nous assure qu'il est pos- sible de posséder l’ensemble de ces vérités : et il est très remarquable que l'intelligence de ces con- cepts ne suppose en aucune façon les efforts extra- ordinaires qu'il a fallu pour y arriver : leur dé- monstration est souvent plus simple, plus voisine des principes, que la démonstration de telle vérité particulière qui a conduit à les découvrir: c'était précisément ce qu'il y avait de particulier dans cette vérité qui masquait la simplicité de la dé- monstration vraie. Il y a donc, dans le travail scien- tifique des siècles, une partie caduque : elle a été nécessaire historiquement, comme les mesures des physiciens ont été nécessaires à l’établissementdes lois de la physique, comme les caleuls dont Kepler raconte qu'il était presque rebuté ont été néces- saires à la découverte des lois qui ont rendu son nom immortel : ces calculs, il est assurément inu- tile de les recommencer. Cette caducité relative des recherches scientifiques, qui devrait contribuer à donner aux savants quelque modestie, en même temps qu'une idée plus haute du but impersonnel vers lequel ils conduisent lentement l'humanité, est laraison profonde de l'indifférence qu'ils éprou- vent d'habitude, et parfois d'une facon bien exa- gérée, pour l’histoire de la science, qui est souvent l'histoire de ce qu'il convient d'oublier !. Mais, s’il est possible de s’instruire, comment y arrivera- L-on? Comment ceux qui étudient distingueront-ils les parties caduques, les livres et les mémoires qu'ils n’est pas nécessaire qu'ils lisent, ceux par lesquels il faut commencer, et ceux vers lesquels ils reviendront plus tard, mieux armés pour lutter avec leurs difficultés, ou simplement désireux de savoir comment on est parvenu à découvrir des vérités qu'ils possèdent déjà? Une première facilité leur était déjà offerte par les publications qu'ont commencées ou achevées les Académies, les So- ciétés savantes, les États ou les particuliers, des œuvres des grands mathématiciens : les œuvres de Lagrange, de Laplace, de Gauss, d'Abel, de Jacobi, de Riemann, de Steiner, de Cauchy, de Lejeune-Dirichlet, de Fermat sont, les unes entiè- rement publiées, les autres en bonne voie. Quel- ques mathématiciens, encore heureusement vivants, ont même bien voulu présider eux-mêmes à la con- fection d'une édition définitive de leurs œuvres, dispersées dans des recueils que bien peu peuvent avoir à leur disposition : la postérité justifiera sans doute le jugement qu'ont porté sur la grande valeur de ces œuvres ceux qui ont poussé leurs 1 Je me place, bien entendu, au point de vue scientifique ; au point de vue philosophique, au contraire, rien n'est plus important que l’histoire de la science, ou des idées, qui domine l’histoire de la civilisation, auteurs à les réunir et l’on ne saurait trop souhaiter que l’exemple donné par M. Cayley fût suivi dans notre pays, au moins par le maitre illustre à qui l'arithmétique, l’algèbre et la théorie des fonctions doivent des découvertes si fondamentales. Quoi qu’il en soit, la publication des œuvres des grands géomètres est loin de suflire. Sans doute, le contact avec le génie sera toujours utile, sans doute ces œuvres contiennent des mé- moires achevés, définitifs, qu'il faudra toujours relire, tant qu'il y aura des géomètres; mais déjà la lecture de ces œuvres est une besogne effrayante pour un commencant, qui risque de s'y perdre, et, sur bien des points, les résultats obtenus par des hommes dont la plupart sont déjà « entrés dans l'histoire » ont été dépassés et de beaucoup, par des savants dont la gloire est moins consacrée. Les livres qui sont indispensables aujourd’hui, si l’on veut que le travail scientifique s’étende et se poursuive, ce sont des livres d'ensemble, se sufli- sant à eux-mêmes et suscilant d'autres lectures par des renseignements bibliographiques assez complets, susceptibles d'être étudiés sans autre secours par ceux qui possèdent la forte culture élémentaire que donnent nos Facultés, tenus au courant des découvertes les plus récentes de la science etmenant quelquefois leur lecteur jusqu'au point où il peut travailler lui-même sur un terrain encore inexploré, l’élevant assez haut pour qu’il ait des vues générales, lui fournissantassez de faits par- üiculiers pour enrichir son esprit d'exemples sur les- quels il puisse s'exercer, lui montrant comment les sujets qu'il croyait rebattus peuvent être renou- velés, comment les vues des autres peuvent de- venirdes vues personnelles, lui donnant l'exemple de la façon dont on arrive à des vérités nouvelles, l'initiant au travail de la découverte, embras- santenfin un champ assez vaste et des points de vue assez divers pour exigerou permettre l'emploi et le rapprochement de méthodes différentes. Quelle science ne faut-il pas pour écrire un pareil livre, et quel désintéressement pour celui qui en est capable, de se résoudre à l'écrire aulieu de poursuivre des recherches personnelles où il ne peut manquer d’exceller et qui doivent l’attirer à chaque instant! ll Cet idéal que j'essayais de tracer, il s’est pré- senté à mon esprit en lisant le livre dont M. Dar- boux a entrepris la publication sous le titre : Leçons sur la théorie générale des surfaces et les applications géométriques du calcul infinitésimal . L'œuvre est 1 G, DarBoux. Leçons sur la théorie générale des surfaces et les applications géométriques du calcul infinitésimal. 1er et 2e vo- lume, 1° fascicule du 32 volume. Paris, Gauthier-Villars, et fils, 1887-1890. J. TANNERY. — LES LEÇONS DE GÉOMÉTRIE DE M. DARBOUX 67 déjà considérable : deux volumes et un fascicule ont paru : on ne sait trop ce qu'il y faut admirer davantage, ou les recherches propres à l’auteur, ou l'extraordinaire richesse des informations, ou l'élégance toute personnelle avec laquelle sont exposés les travaux des autres, ou l'art de lexpo- sition, ou la hauteur des vues, ou l'abondance el l'intérêt propre des applications. Il ne saurait être question ici d’un compte rendu détaillé de l'œuvre de M. Darboux : la matière est trop spéciale; je me contenterai d'en indiquer rapidement les grandes lignes. Le premier ‘volume débute par l'étude appro- fondie du déplacement d’un trièdre trirectangle ; cette étude, qui appartient à la cinématique, do- mine en fait une bonne partie de l’exposition adoptée par M. Darboux et permet de rapporter à une origine commune et d'obtenir avec une rare élégance les formules de la théorie générale des surfaces : c’est elle en particulier qui conduira, dans le second volume, au groupe de formules fondamentales dues à M. Codazzi et à toutes celles qui se rapportent au même objet. Cette mème étude conduit aussi à la considération d'un sys- tème d'équations linéaires du premier ordre dont une intégrale s’oblient en égalant à une constante une fonction homogène et du second degré des inconnues : l'étude de ce système, dont l’intégra - tion dépend d'une équation de Ricecali, est aussi importante en mécanique qu’en géométrie. La définition de quelques surfaces par leurs pro- priétés cinématiques achève de mettre en lumière l'importance géométrique du déplacement d'une figure de forme invariable. Les coordonnées eurvilignes sont introduites en prenant pour point de départ la considération des systèmes conjugués dont l'importance ressort immé- diatement, parce que la définition de ces systèmes est à la fois projective et dualistique. Une belle application de cette étude consiste à obtenir d’une façon presqu'immédiate les surfaces dont les lignes de courbure sont planes. Aux systèmes conjugués se rattachent immédiatement les lignes asympto- liques, chaque famille de lignes asymptotique étant conjuguée à elle-même. A cette étude se rat- lache aussi étroitement celle des systèmes ortho- gonaux et isothermes et le célèbre problème des cartes géographiques. Là se trouve mis en évi- dence le rôle essentiel que joue en géométrie la théorie des fonctions d’une variable imaginaire : l’auteur résume à ce propos les belles recherches de M. Schwarz sur la représentation conforme des aires planes. Le système orthogonal fourni par les lignes de courbure est l’objet d'une étude ap- profondie, tant en coordonnées reclilignes qu'en coordonnées tangenlielles : on y prévoit déjà en particulier, par quelques belles propositions dues à l’auteur, le rôle fondamental que jouera l'équation de Laplace dans la (héorie des surfaces. Signalons en passant un intéressant chapitre sur les coor- données pentasphériques, dont l'emploi donne à la théorie analytique des lignes de courbure son véritable fondement : on y trouvera en particulier la belle proposition de M. Sophus Lie, qui rattache les lignes asymptotiques aux lignes de courbure. Ce premier volume se termine par une étude détaillée des surfaces minima. Le beau problème posé par Lagrange intéresse à la fois la phy- sique, la géométrie, la théorie des fonctions d’une variable imaginaire : il a été, dans notre siècle, l’objet d’admirables développements dus à Monge, à Legendre, à Riemann, à M. Bonnet, à M. Schwarz, à M. Sophus Lie, à M. Weierstrass, à M. Beltrami, et à bien d’autres géomètres éminents. Nul autre peut-être ne fait mieux ressortir la mystérieuse unité de la science, nul autre ne s’est trouvé avoir des liens plus étroits avec les progrès récents de l'Analyse, et l’on comprend bien que l’auteur s'y soit attaché avec une sorte de prédilection; lui-même apporte une contribution capitale au problème étudié expérimentalement par Plateau dans le cas où le contour qui doit limiter la lame mince de liquide glycérique est formé par une chaine de droites ou de plans, en montrant com- ment ce problème peut être entièrement résolu quand on sait former le groupe d’une certaine équa- tion différentielle linéaire du second ordre. Il Le second volume commence par des notions générales sur les congruences de courbes ou de droites : on y trouvera une élégante interprétation géométrique de celte méthode, due à Laplace, qui transforme l'équation aux dérivées partielles d°: d: D j D1D/ == (1) SA LD ; à laquelle le nom de l'illustre astronome est resté atlaché, en une double suite d'équations de même forme, dont il suffit de savoir intégrer une pour que l'intégration de toutes les autres s’ensuive immédiatement. Cette double suite est aussi étudiée analytiquement avec détails ; M. Darboux donne, en particulier, la forme générale des équa- tions de Laplace pour lesquelles la double suite se ferme d’un côté et de l’autre. M. Moutard avait obtenu des résultats analogues ; mais son mémoire a disparu en 1871 dans les incendies de la Com- mune, et M. Moutard n’a publié depuis, sur ce sujet, que des résultats partiels. Après avoir exposé les principaux résultats obtenus surun cas particulier {très important de l'équation de Laplace 6 J. TANNERY. -— LES LECGONS DE GÉOMÉTRIE DE M. DARBOUX par Euler, par Poisson, et plus récemment par M. Appell, M. Darboux montre comment Riemann a étendu aux équations linéaires aux dérivées par- tielles la notion d'équation adjointe que l’on doit à Lagrange pour les équations différentielles li- néaires à une seule variable, comment l'illustre géomètre a fait dépendre l'intégration de l’équa- tion de Laplace, le mot d'intégration étantentendu dans le sens, bien connu des physiciens, où inter- viennent des conditions aux limites, de la déter- mination d’une certaine solution de l’équation adjointe satisfaisant à des conditions relalivement simples, et comment enfin il a réussi à déterminer cette fonction dans le cas de l’équation d’Euler. Une intéressante digression sur les propriétés de l'équation adjointe de Lagrange permet ensuite de compléter divers résultats donnés antérieurement sur l'équation de Laplace. Les équations du Lype particulier 2: De ui (1) sont l’objet d’une étude spéciale : l'une des plus belles propositions concernant ces équations est due à M. Moutard ; M. Darboux en fait ressortir toute l'importance par les conséquences diverses et quel- quefois vraiment singulières qu'il en tire. Parmi les équations qui appartiennent au type précédent, les équations harmoniques où À à la forme Q(E + y) == LE — y) possèdent des propriétés analytiques extrèmement intéressantes, qui sont développées avec détail : le problème de reconnaitre si l'équation (1) peut être ramenée à une équation harmonique rapproche l'auteur du domaine de la géométrie; ce problème en effet est identique à celui-ci : reconnaitre si l'élément d’une certaine surface peut être ramené à la forme [D (uw) — Y'(v)] (du? + dv?), considérée par M. Liouville et étroitement liée à la théorie des lignes géodésiques. Parmi les applications géométriques que fait M. Darboux des théories qui viennent d’être ana- lysées sommairement, je signalerai l'étude des sur- faces à lignes de courbure isothermes, où les ré- suitats fondamentaux sont dus à M. Christoffel, l'étude des trajectoires orthogonales d’unsystème de surface, celle, en particulier, des droites normales à une surface, qui donne à l’auteur l’occasion de revenir sur le beau théorème d'optique que l’on doit à Malus, l'étude des surfaces dont les plans principaux sont conjugués par rapport à une sur- face du second degré, étude qui est liée intime- ment au théorème d’Abel et qui fournit de belles généralisations des théorèmes de Chasles sur les polygones de périmètre maximum où minimum inscrits ou circonscrils à l’ellipse, enfin l’étude des congruences de cercles et des systèmes cycliques. Après ces applications, M. Darboux revient à la théorie générale des surfaces, pour établir, en par- lant des considérations cinématiques qui ont été développées au début, les formules de M. Codazzi; il traite ensuite de la courbure normale et de la torsion géodésique, puis des lignes géodésiques ; celles-ci nous rapprochent de la mécanique et c'est à cette science que sont consacrées les trois derniers chapitres du volume. Le lecteur ne pourra manquer d'éprouver un vif plaisir en voyant de quel jour s’éclairent les proposilions générales de Jacobi et d'Hamilton en se plaçant au point de vue géométrique où le conduit M. Darboux. III Du troisième volume le premier fascicule seul est paru. La détermination des lignes géodésiques d'une surface dont on donne l’élément linéaire dépend, d’après la proposition générale de Jacebi sur les équations de la dynamique, amplement étudiée dans les chapitres précédents, de la détermination d'une solution contenant une constante arbitraire d’une équation aux dérivées partielles du premier ordre : Jacobi lui-même a indiqué un artifice in- génieux qui réussit assez souvent et qui réussit en particulier, comme l’a montré M. Liouville, dans le cas où l'élément linéaire a la forme qui a été signalée un peu plus haut: c’est en particulier, le cas des surfaces du second ordre. D'autres mé- thodes, plus générales et plus régulières sont dé- veloppées par M. Darboux : M. Massieu, Bour, M. Bonnet, M. Maurice Lévy ont étudié les cas où l'équation aux dérivées partielles admet des inté- grales d’une forme simple donnée à priori. M. Dar- boux ratlache quelques-unes de ces recherches à la solution du beau problème de M. Beltrami : Étant donnée une surface, peut-on la représenter sur le plan de telle manière que les lignes géodésiques de la surface correspondent aux différentes droites du plan? Bien d’autres questions se posent à propos de ces lignes géodésiques : signalons seulement l'étude si importante de la courbure géodésique, l'examen approfondi du problème du plus court chemin entre deux points d’une surface et la théo- rie des triangles géodésiques, dont Gauss a posé les fondements dans les admirables disquisitiones circa superficies curvas. M. Darboux aborde ensuite le problème de la déformation des surfaces. Il prend pour point de départ la notion des paramètres différentiels, d’après M. Beltrami, et montre en particulier com- ment elle conduit à la définition d'une fonction M Ly 20 {rer il) J. MASSART. — LA PRESSION OSMOTIQUE ET LA PHYSIOLOGIE DE LA CELLULE 69 complexe sur une surface pareille à la définition | ces caractéristiques sont les asymptotiques de la habituelle sur un plan. Il établit ensuite comment la considération des paramètres différentiels per- met d'obtenir la solution du problème fondamen- tal de la théorie : Reconnaître si deux surfaces sont applicables l’une sur l’autre, ou si deux for- mes de l'élément linéaire sont équivalentes. A cette question se relie celle-ci, non moins essen- lielle : déterminer toutes les surfaces ayant un élé- ment linéaire donné; cette déterminalion dépend d’une équation aux dérivées partielles du second ordre. M. Darboux, reprenant les principes du mémoire de Gauss, montre comment on peut en lirer un système de formules équivalant à celles de M. Codazzi el comment de ces formules on aurait pu tirer l'équation aux dérivées partielles. [donne ensuite diverses autres méthodes pour parvenir à cette équation, celle en particulier qu'il avait fait connaitre en 1872, dans son beau mémoire sur une classe remarquable de courbes et de surfaces algébriques. L'étude de cette équation fournit à M Darboux l'occasion de préciser la notion des courbes dites carastéristiques, d’après Monge, qui interviennent dans l'intégration des équations aux dérivées par- lielles du second ordre : dans le cas particulier, surface qu'on déforme, d’où le rôle essentiel de ces lignes dans la théorie de la déformation. Enfin le dernier chapitre, interrompu dans le fascicule, se rapporte à la déformation des surfa- ces gauches. J'aurai atteint mon butsi l'analyse très sommaire qui précède a pu donner aux lecteurs de la Revue quelque idée de la richesse des matières mises en œuvre dans le livre de M. Darboux, de la variété el de l'importance des méthodes employées, el du service extraordinaire qu'il a rendu à tous ceux qui aiment les mathématiques, en mettant à leur portée sa science profonde. Espérons que l’exem- ple qu'il a donné trouvera des imilateurs. On dit que M. Émile Picard prépare un trailé général sur la théorie générale des équations différentielles. IL y a tout lieu de croire que son livre sera, lui aussi, un de ces livres #adispensables dont je parlais en commencant. Rien ne peut mieux honorer notre pays qu'une pareille liftérature, qui, dans l'état actuel de la Science. vient véritablement à son heure, Jules Tannery Sous-directeur des études scientifiques à l'Ecole normale supérieure, LA PRESSION OSMOTIQUE ET LA PHYSIOLOGIE DE LA CELLULE 1e LES On sail que la plupart des cellules végétales adultes sont constituées (fig. 1, À, page 70) par une membrane de cellulose 4, une couche de proto- plasma d contenant des plastides, un noyau e et une grande vacuole 4 remplie d'une solution complexe à laquelle on donne le nom de suc cellulaire. Cette cavité à contenu liquide occupe souvent la presque lolalité de la cellule; elle est entourée de tous côlés par une couche de protoplasma el en dehors de celle-ci par la membrane cellulosique. Le proto- plasma jouit de la propriété singulière d’ètre per- méable à l’eau tout en étant presque complètement imperméable aux substances dissoutes. Il cons- titue donc une de ces parois que les physiciens appellent semi-perméables. Gräce aux travaux de MM. Pfeffer, Van'{ Hoff, Ar- rhénius, etc. magistralement exposés par M. Etard dans cette Revue (n° du 15 avril 1890, page 193), on sait qu'une solulion entourée de toutes parts par une membrane semi-perméable exerce sur cette paroi une pression variable. Ce sont uniquement les molécules dissoutes dans le liquide qui déter- VACUOLES DES CELLULES VÉGÉTALES minent celle pression. Celle théorie purement physique s'applique entièrement aux phénomènes qui se passent dans la cellule végétale. En effet, cette dernière contient une solution complexe entourée complètement par une paroi semi-per- méable, l’utricule protoplasmique. I Dès lors, que doit-il arriver lorsqu'une cellule est plongée dans l’eau? Les molécules dissoutes dans le suc cellulaire exercentsur la membrane de protoplasma une pression qui a pour premier effet de distendre l’utricule protoplasmique et de la presser fortement contre l'enveloppe de cellulose. Si celle-ci était aussi extensible que le proto- plasma, l'accroissement de la cellule se poursui- vrait jusqu’à la rupture. Mais il n’en est pas ainsi : l'enveloppe est peu extensible; elle est par contre très élastique. Il arrive done bientôt un momentoù sa tension fait équilibre à la pression osmotique. Depuis ce moment plus d'augmentation de volume : la cellule est furgescente. La pression interne qui 70 J. MASSART. — LA PRESSION OSMOTIQUE ET LA PHYSIOLOGIE DE LA CELLULE s'exerce dans la cellule peut dans certains cas atteindre des valeurs très élevées, allant jusqu'à une vingtaine d’atmosphères. Si au contraire la solution qui baigne la cellule cellule d’une — Schéma d'une crande vacuole : À, normale; B, C, D aux divers stades de la plasmolyse provoquée par une solution diluée de nitrate de potasse (d’après M. Hugo de Vries). — a, membrane de cellulose; 4, couche protoplasnique; €, noyau; d, grande vacuole Fig. 4. végétale pourvue est suffisamment concentrée, l’eau du sue cellu- laire traverse la couche du protoplasma et quitte la cellule; le volume de celle-ci diminue et sa mem- brane se reläche (fig. 1, B). Puis, à mesure que la sortie de l’eau se poursuit, le protoplasma ne rem- plit plus entièrement l’espace délimité par la membrane revenue sur elle-même, et l’on voit le protoplasma se détacher de son enveloppe de cel- lulose (fig. 1, C). Bientôt l'ensemble de la vacuole, du noyau et du protoplasma avec toutes ses enclaves, est réduit à une masse arrondie (fig. 1, D). L'ensemble de ces phénomènes a reçu le nom de plasmolyse. Comme le protoplasma est sensiblement imperméable aux substances dissoutes, l’eau seule abandonne la cellule, et le suc cellulaire se con- centre; ainsi s'établit l'équilibre entre la concen- tration du suc cellulaire et celle de lasolution exté- rieure. Dès cet instant l'élimination de l’eau cesse. Un appareil très simple a été employé par M. le professeur Errera ! pour démontrer d'une façon 1 L. ErRERA. Sur des appareils destinés à démontrer le méca- nisme de la turgescence et les mouvements des stomates. Bull. de l'Acad. Roy. de Belgique. 3e série, t. XVI, p. 458, 1888. assez parfaite le mécanisme de la turgescence et de la plasmolyse. Cet appareilse compose (fig. 2) d'une ampoule de caoutchouc a entourée d’un solide ré- seau en fil de soie à. En insufflant de l'air dans cette ampoule, on la voit s'appliquer contre le réseau et le tendre à sontour. Mais celui-ci, peu extensible, s’oppose bientôt à tout accroissement nouveau de volume, et le système est tendu, rigide, turgescent,. L'air insufflé représente le suc cellulaire ; l'ampoule Fig. 2. — Appareil de M. Léo Errera pour représenter les phénomèmes de plasmolyse. — 1, appareil gonflé; 2 et 3 montrent les phases successives du dégonflement, jusqu’à la plasmolyse (4). — a, ampoule en caoutchouc avec réseau en fil de soie; #, t', tubes; », robinet; s, support métal- lique; à, insufflateur. de caoutchouc, l’utricule protoplasmique très ex- tensible et de faible élasticité ; enfin le réseau de soie, la membrane de cellulose peu extensible et à forte élasticité. Si nous laissons maintenant échap- per lentement l'air contenu dans l’ampoule, le ré- seau de soie et le ballon de caoutchouc suivent d’abord ensemble la diminution de volume de l'air et restent appliqués l’un sur l’autre. Bientôt le ré- seau est arrivé à ses limites naturelles; mais le caoutchouc continue à revenir sur lui-même, et se détache par conséquent du filet de soie : ainsi en est-il quand, dans la cellule, la plasmolyse a lieu. Dans l’accomplissement de ces phénomènes cel- lulaires le rôle principal est évidemment dévolu à l'utricule protoplasmique. Mais celle-ci n’a pas une structure homogène. Elle est limitée aussi bien en dehors, contre la membrane de cellulose, qu'en de- dans, du côté de la vacuole, par une mince couche hyaline. La zone granuleuse intermédiaire renferme un grand nombre d'éléments variés : noyau, grains d’amidon, grains de chlorophylle, etc., dont nous n'avons pas à nous occuper. On admet, en effet, que ce sont précisément les deux couches hyalines qui interviennent dans les échanges de liquides. Il M. Hugo de Vries attribue à la couche limi- Lante interne, c'est-à-dire à la paroi des vacuoles, une existence propre; il la considère comme un organe différencié au même titre que les plastides ou leucites et lui donne le nom de fonoplaste. Cette théorie est basée principalement sur deux ordres de faits : 1° le tonosplate peut être isolé ns td J. MASS \RT. — LA PRESSION OSMOTIQUE ET LA PHYSIOLOGIE DE LA CELLULE 71 du restant du corps protoplasmique et on peut le conserver vivant alors que tous les autres organes de la cellule sont morts ; 2° les tonosplates nais- sent toujours par division d'un tonoplaste anté- rieur. Pour isoler les tonoplastes M. de Vries ! plonge la cellule dans une solution de nitrate de potassium à 100}, légèrement colorée en rose par l'éosine. Une algue vulgaire, le Spirogyra nitida (fig. 3), con- L Fig. 3. — Cellules de Spirogyra nitida plongées dans une solu- tion concentrée de nitrate de potassium contenant un peu d’éosine. — +, bandes de chlorophylle; », vacuoles: — A, la contraction du protoplasma à été faible. La vacuole unique de la cellule normale s’est divisée: B, le protoplasma s'est contracté davantage. Les bandes chlorophylliennes se sont désagrégées. La vacuole supérieure porte un peu de proto- plasme mort; C, la cellule a été tuée dès son immersion dans la solution : le protoplasma n’a pas subi de contraction ; les bandes chlorophylliennes ont conservé leur position nor- male, Dans ces trois figures, les vacuoles sont restées par- tout incolores et vivantes, tandis que le reste de la cellule se colorait par l'éosine. Le noyau cellulaire n’est pas repré- senté, (D’après M. de Vries.) vient tout particulièrement à ces expériences. Sous l'influence de ce liquide, la turgescence disparait ; le corps protoplasmique se contracte et ne tarde pas à se colorer en rouge, ce qui démontre qu'il est mort. On voit apparaître alors, soit à l’intérieur du protoplasma, soit sur ses bords, une ou plu- sieurs vésicules claires remplies de sue cellulaire et entourées d'une membrane hyaline et incolore. Ces vésicules dérivent de la vacuole que conte- nait la cellule de Spirogyre. Le protoplasma, en se contractant, les expulse ordinairement de sa masse et il arrive même à ne plus avoir aucun rap- port avec elles. Chose singulière, la paroi de ces vacuoles est restée incolore alors que le noyau el le protoplasma (out entier sont imprégnés d’éosine; seule dans le contenu cellulaire, elle s'est mainte- 1 H. pe Vies. Plasmolytische Studien über die Wand der Va- cuolen, Jahrbücher f. wissensch. Botanik. Bd. XVI, S. 465, 1885, nue en vie. Dans de bonnes conditions, les vacuoles ainsi isolées peuvent persister pendant plusieurs jours après la mort du protoplasma et l'on peut faire sur elles les diverses expériences de tension osmotique; elles augmentent de volume lorsque la concentration du liquideextérieur devientmoindre; elles se contractent, au contraire, quand on rem- place cette solution par une autre plus concentrée. Ces résultats ne s’obtiennent d’une façon bien nette qu'avec des lonoplastes récemment isolés. En effet, la vitalité de ces organes s’affaiblit peu à peu dans la cellule morte et au bout d’un temps variable ils sont devenus perméables aux substances dissoutes. La mort lente et graduelle de la paroi des vacuoles peut être activée par des poisons, tels que l’iode, le chlorure mercurique, le sulfate de cuivre, l’é- ther, ete. Nous avons vu antérieurement que dans chaque cellule de spirogyre se produisent d'ordinaire plu- sieurs vacuoles hyalines. Or il est de règle que ces cellules ne contiennent à l'élat normal qu'une seule grande cavité à suc cellulaire. Lors de l'im- mersion de l'élément dans la solution de nitrate de potassium à 16 "/,, la vacuole s’étrangle d’or- dinaire en son milieu et se divise finalement en deux vacuoles-filles qui peuvent à leur tour se diviser, Nous assistons donc ici à la multiplication de ces organes (fig. 3, À, B, C). Ces divers fails conduisirent M H. de Vries à ad- mettre que le tonoplaste forme dans Ja cellule végé- tale un organe différencié du protoplasma. Par ses caractères de semi-perméabilité, il se rapproche de la couche limitante externe du protoplasma, mais il résiste beaucoup mieux qu'elle aux in- fluences nocives. Tandis que cette dernière a pour fonction essentielle de sécréter la membrane de cellulose, le tonoplaste sécrète les matériaux du suc cellulaire. L'un et l’autre sont des organes spéciaux qui ne prennent naissance que par divi- sion, absolument comme les plastides. A l'appui de sa thèse, M. H. de Vries ap- porte principalement des preuves fournies par l'étude plasmolytique du tonoplaste. D'autre part, M. Went! s’est occupé surtout de la division. Il a d’abord étudié les cellules très jeunes du point végélalif d'un certain nombre de plantes. En employant la méthode de M. H. de Vries qui con- siste à tuer tout le protoplasme en ne laissant intacts que les tonoplastes, ila montré que ceux-ci existent déjà dans des cellules jeunes où il n’ya pas encore de traces de suc cellulaire. Ils s’y présentent sous forme de petits organes disséminés dans le protoplasme. Plus tard lorsque la cellule com- 1F, A.F, C. Wen. Les Premiers États des vacuoles, Arch. Néerland. d, sciences exactes et naturelles, T, XXI, p. 283, 1887. 72 J. MASSART. — LA PRESSION OSMOTIQUE ET LA PHYSIOLOGIE DE LA CELLULE mence à croître, une gouttelette de suc est sé- crétée dans chacune de ces granulations et à mesure que l'élément tout entier augmente de volume, les vacuoles nouvellement formées se dilatent jusqu'à venir au contact les unes des autres. La cellule offre alors un aspect écumeux caractéristique. Dès ce moment les vacuoles se fusionnent peu à peu et ainsise constilue fina- lement la grande vacuole centrale qui remplit presque entièrement la cellule adulte. Les petites vacuoles virtuelles qui existaient dans les jeunes cellules du point végétalif naissent toujours par division des vacuoles préexistantes. Dans un second travail ! M. Wenl rapporte ses expériences antérieures, puis il montre que des vacuoles pathologiques peuvent se former au sein du protoplasme dans diverses conditions; elles n'ont pas de tonoplasie et doivent être considé- rées comme des produits de désorganisation du protoplasme. Voici les conclusions que l’auteur tire de ces deux travaux : « 1° Toutes les cellules végétales vivantes contiennent des vacuoles (sauf, peul- être, les Spermatozoïdes, les Cyanophycées et les Bactéries). 2 Toutes les vacuoles d’une plante pro- viennent par voie de division de la vacuole de l'oosphère de la plante-mère. Les Lonoplastes se trouvent donc, comme organes du protoplasme, sur la même ligne que les noyaux el les chroma- tophores. Les vacuoles normales ne se forment ja- mais aux dépens du protoplasme. » HI On a objecté à M. Went que dans les cellules reproductrices des algues, les vaeuoles ne peuvent certainement pas naître par division. Dans un der- nier mémoire ? cet auteur s'est efforcé de montrer que la théorie de M. de Vries était entièrement ap- plicable à ces vacuoles. Ses observations sont très nombreuses; en voici un exemple : la cellule-mère des zoospores d’une algue marine, le Codium tomen- tosum (fig. 4) possède une grande vacuole centrale fig. 4, A). À un deuxième stade, la vacuole esl élranglée au milieu, puis elle se divise (fig. 4, B). Plus tard, le morcellement de la vacuole primitive donne naissance à un nombre de plus en plus consi- dérable de vacuoles-filles jusqu'à ce qu'enfin il + en aitune pour chacune des jeunes zoospores (fig. 4. C). Pendant que se poursuivent ces multiples subdivi- sions, l'une des premières vacuoles-filles reste intacte au fond de la cellule primilive (fig, 4, »'). 1 F, À, EF. C, Wexr. Die Vermehrung der normalen Vacuo- len durch Theilung. Jahrb. f. BA xXIX. S. 295. 1888. 2 À, A. F,. C. WExr. Die Entstehung der Vacuclen Fortpllanzungszellen der wissensch, Botanik, in den lgen. Ibid. Bd XXI, S. 299, 1890, Lorsque les zoospores sont müres, cette vacuole se dilate énormément el expulse ainsi les éléments reproducteurs. D'après M. Went, chacune des va- cuoles des zoospores provient donc de la vacuole primitive. Fig. 4. — Cellules-mères des zoospores du Codinm tomentosum. À, cellule jeune; p, protoplasma; », vacuole centrale; B, la vacuole s’est divisée en donnant deux vacuoles-filles : #' et r",p. protoplasma; C, p,z, le protoplasma s'est divisé en un grand nombre de zoospores dont chacune est pourvue d’une petite vacuole (»") dérivant de la vacuole v! de la figure précédente, La vacuole »' est restée indivise. (D'après M. Wen.) Cette conclusion a été attaquée par M. Klebs !. Pour cel auteur, le fait n'est pas aussi général. Ainsi, chez une algue assez répandue dans l'eau courante très aérée, l'Æydrodictyon, la vacuole qui se trouve au fond de la cellule-mère des zoospores, lors de la maturité de celles-ci, représente en son entier la vacuole primitive de cette cellule, et les vacuoles des zoospores elles-mêmes paraissent se former sans sa participation. Malgré cette objection, il reste acquis que dans beaucoup de cas les vacuoles naissent par division. Même chez | Æ/ydrodictyon, il.est possible que les ré- sullats négalifs ne soient dus qu'à la difficulté de l'observation. Mais un travail récent de M. Pfeffer ? vient tout remettre en question. Par des recherches très nom- breuses el très bien faïles, ce botaniste établit qu'on peut sur les Myxomycètles, parliculièrement chez le Chondrioderma difforme Mg. 5), faire naitre une vacuole partout où on le désire. Les Myxo- mycètes sont des champignons en quelque sorle sarcodaires à peu près uniquement composés de masses protoplasmiques 7#es, sans enveloppe de cellulose (voir fig. 5). Pour y créer des vacuoles proloplasmique dans une solution saturée d’un corps peu soluble el con- on plonge la masse NLeus. Linige Bemerkungen über die Arbeit von W'eut « DieEntstehung den Vacuolen in der Fortpflanzungszellen der Al- gen. » Botanische Zeitung, 29 August 1890. Vovez plus loin p. S6, 2 W. PrerrEer. Zur Kenntniss der Plasmahaut und der Vacuo- en, nebst etc. Abhand}. d.math.-phys. Classe der Kôünigl, Sach= sischen Gesellschaft d, Wissensch, Bd, XVI, S. 185, 1890, J. MASSART. — LA PRESSION OSMOTIQUE ET LA PHYSIOLOGIE DE LA CELLULE 13 tenant de très petits fragments de ce même corps. L'expérience réussit le mieux avec la solution sa- turée à froid d'asparagine. Après une phase de contraction, le protoplasme reprend ses mouve- ments de reptation et il absorbe par sa surface des particules d’asparagine qui sont lentement trans- portées vers l’intérieur du corps. Lorsque l’orga- nisme à ainsi incorporé un nombre suflisant de particules solides, on le replace dans l’eau. L’aspa- ragine dissoute qui imprégnait le plasmode est éliminée par suite de la diffusion, et les petits frag- ments solides de cette substance peuvent se dis- soudre. Aussitôt on voit se former autour de cha- Fig. 5. — Portion de Chondrioderma difforme ayant absorbé des fragments cristallins d’asparagine. Autour de chaque par- ticule s’est formée une vacuole. (D’après M. Pfefter. cun de ceux-ci, une pelite vacuole dont le volume croit progressivement jusqu'à la complète dissolu- tion du fragment. Ce n’est que dans des cas assez rares que les particules sont de nouveau excrétées par la surface du corps. La production et l'accrois- sement de ces vacuoles sont évidemment dues à la tension osmolique exercée par l’asparagine dis- soute. Ce qui le prouve, c'est que l'augmentation de volume des vacuoles est très rapide lorsque la température s'élève : la solubilité de l’asparagine augmente; sa tension osmotique et par conséquent les dimensions des vacuoles suivent la même pro- gression. Ces vacuoles prennent aussi naissance autour des particules de gypse qui ont été ingérées parles plasmodes déposés dans une solution saturée de ce sel. En raison de la faible solubilité de ce corps, les vacuoles se forment lentement et n’atteignent ja- mais que de faibles dimensions. M. Pfeffer a pu aussi produire des vacuoles en faisant absorber au Myxomycète des sphéro-cris- taux de vitelline. Cette substance, tout en élant REVUE GÉNÉRALE, 1891. presque totalement insoluble dans l’eau, se dis- sout assez bien dans le liquide protoplasmique. On peut, en colorant d'abord la vitelline par le bleu d’aniline, obtenir autour des sphéro-cristaux ainsi préparés des vacuoles teintées en bleu qui per- sistent pendant plusieurs jours. Les vacuoles formées par l’un quelconque de ces procédés se comportent dans toutes leurs mani- festations comme des vacuoles normales. Elles se divisent et donnent naissance à des vacuoles-filles ; lorsque deux d’entre elles se touchent, on les voit parfois se fusionner, Les plus petites présentent des pulsations, absolument comme les pelites va- cuoles qui existent normalement chez les Myxo- mycètes. Leur volume diminue lorsqu'on plonge le plasmode dans une solution concentrée. Un point reste pourtant douteux. M. Pfeffer n’est ja- mais parvenu, par le procédé de M. H. de Vries, à isoler la paroi d’une de ces vacuoles artificielles. Ces expériences mettent hors de doute que chez les Myxomycètes des vacuoles peuvent se former mécaniquement au sein du protoplasma. L'auteur a pu suivre la régénération de la couche limitante externe du Myxomycète aux dépens du protoplasma, et mème la transformation de cette couche en paroi de la vacuole. Il conclut en disant que probablement les couches hyalines qui li- mitent le protoplasma du côté de l'extérieur et du côté des vacuoles n'ont aucune autonomie, et qu'elles représentent une portion de protoplasma d’où les granulations se sont retirées. La théorie de M. de Vries et celle de M. Pfeffer sont-elles aussi contradictoires qu'elles la pa- raissent ? Nous pensons que, si chez des organismes aussi inférieurs que les Myxomycètes, la spéciali- sation du protoplasma n’est pas opérée, si chez eux une portion quelconque peut indifféremment fonc- tionner comme paroi des vacuoles ou comme couche limitante externe, rien ne prouve qu'il en soit de même pour les cellules hautement différenciées des plantes supérieures. Nous voyons partout, lorsque nous parcourons la série des êtres vivants, que des fonctions primilivement diffuses ou rem- plies par une partie quelconque du corps, se loca- lisent en devenant l'apanage exclusif d'organes déterminés, mieux adaptés à ce but spécial. Jean Massart, Docteur ès sciences de l'Institut Solvay (Université de Bruxelles). ai 74 CH.-ED. GUILLAUME. — LES IDÉES MODERNES SUR LA THERMOMÉTRIE LES IDÉES MODERNES SUR LA THERMOMÉTRIE Il y a quelques années à peine, le mot »étrologie n'était compris que par son sens étymologique. Aujourd'hui la science qu'il désigne s’aflirme nette- ment; elle se sépare de la physique générale, à laquelle elle emprunte la connaissance expérimen- tale de la Nature, tandis que ses méthodes ont été créées de toutes pièces, ou puisées à un état plus ou moins avancé dans les sciences les plus ancienne- ment exactes, dans l’Astronomie en particulier. La Métrologie est la science des mesures. Rigou- reusement, ce n'est pas une science : c'est un ensemble de méthodes. Mesurer n'importe quoi avec précision, tel est son but; c’est, comme on le voit, de l’art pour l’art. Un métrologiste détermine la longueur d'une règle, sa dilatation, les défauts de ses subdivisions; il mesure la masse d'un mor- ceau de métal ou cherche les corrections d’un thermomètre; puis, cela fait, il abandonne la règle, qui servira à un géodésien, ou le thermomètre dont un physicien tirera profit dans ses recherches. Présentée ainsi dans son squelette, la Métrologie doit paraitre à l'esprit non prévenu la plus ingrate et la plus stérile des sciences. Cependant, en y regardant de plus près, on est étonné de la diver- sité des méthodes qu'elle emploie, ainsi que de la complication des problèmes qu'elle attaque et qu'elle parvient à résoudre. Les phénomènes en apparence les plus simples et les plus élémentaires sont toujours accompagnés d’une foule de phéno- mênes accessoires, qui troublent le résultat princi- pal, et que la physique ordinaire élimine du mieux qu'elle peut par ce que l’on nomme l'expérience. La Métrologie effectue l'épuration plus complète, ou, que l’on me permette celte comparaison, elle opère comme une nouvelle distillation fractionnnée d’un résidu que la physique ordinaire renferme dans un terme général, causes d'erreurs; des phénomènes qui avaient échappé au physicien se révèlent au métrologiste, qui cherche à les isoler et à établir leurs lois. La Métrologie devient alors, par les résultats qu'elle met au jour, une physique supé- rieure et raflinée; laconnaissance des phénomènes qu'elle étudie uniquement pour servir à ses méthodes, permet d'entrer plus avant dans la con- naissance exacte des propriétés des corps, et peul servir de base certaine à des théories élevées. On pourra dès lors dire, sans être trop paradoxal, qu'une bonne mesure de précision enseigne sou- vent plus qu'une théorie nouvelle. Elle a sur celle- ei l'avantage de n’enregistrer que des faits acquis. La Thermométrie est une branche de la Métro- logie; aride pour elle-même dans son but immédiat, elle est éminemment utile aux sciences d'obser- vation; elle devient intéressante par l'étude de tous ies phénomènes qu'elle rencontre sur sa route, et dont elle recherche les lois surtout pour réussir à se défaire de leur influence pertur- batrice. Nous allons chercher à en préciser l'étal actuel, et à en caractériser les tendances. I Échelle thermodynamique et échelle pratique des tem- pératures. — I] n’est presque pas une propriété des corps qu'un changement de température ne mo- difie: les dimensions, la résistance électrique, le pouvoir radiant ou absorbant, l’élasticité pour les solides, la viscosité pour les liquides ou les gaz augmentent ou diminuent avec les fluctuations de la température, et peuvent servir à les indiquer. Tous les phénomènes que nous venons d’énumérer, et beaucoup d’autresencore ont effectivement servi de base à des méthodes de mesure, qui s'adaptent parliculièrement à certains besoins de la science et de l'industrie. L'indicateur de température le plus ancienne- ment employé est le thermomètre à gaz. Attribué par les historiens du thermomètre à Galilée ou à Santorio ou encore à Drebbel !, il fut repris par Gay- Lussac, qui le proposa aux physiciens dans un but d'unification d’abord, puis aussi parce que la grande dilatation des gaz rend les mesures assez indépendantes de la dilatation de l'enveloppe. L’é- tude duthermomètre àgaz poursuivie par Regnaull, a fait de nouveaux progrès à l’occasion des travaux exigés par le programme de la Convention du mètre. C'est encore, comme nous le verrons, au thermomètre à gaz que les températures sont rap- portées, il est vrai, en précisant et en limitant son emploi. Définir la température par les propriélés d’un corps serait un procédé arbitraire et opposé aux tendances modernes de la Science. On s’en est libéré par la considération du cycle de Carnot. On sait que le rendement maximum d'une machine ther- mique est défini par les températures de la source de chaleur et du réfrigérant ?. Inversement, la valeur numérique de ces températures peut être 1 Voir à ce sujet un travail aujourd’hui très rare de M. F, Burckhardi et l'excellente Histoire du thermomètre de M. Renou (Gauthier-Villars). 2 Voir dans cette Revue, t. 1,1890, n°* { et5, pages 2 et 129. les articles de M. Witz et de M. Dwelshauvers-Ders. | CH.-ED. GUILLAUME. — LES IDÉES MODERNES SUR LA THERMOMÉTRIE 75 donnée par le eyele. La définition la plus ordinaire consiste à considérer comme donnant la valeur numérique des températures les rapports des cha leurs empruntées au foyer et rendues au réfrigé- rant !; c'est la définition par les coefficients de perte. Mais on peut aussi, comme l’a fait M. Lucas ?, envisager le coefficient économique comme une fonc- lion de la différence des températures. La tempé- ralure { ainsi définie est alors reliée à la tempéra- ture T d’après la première définition par la formule 1 = log, aT, ou B—;+5 log (1 +100). Cette dernière définition conduit à attribuer les valeurs - æ et + 493 aux tempéralures cotées habituellement — 273° (zéro absolu) et 1000° vul- gaires. La définition de M. Lucas n’est, « priori, ni plus ni moins rationnelle que la première. Mais celle-ci à l'avantage de donner pour la majeure partie des variations thermiques des corps des fonctions sensiblement linéaires. Elle donnerait une fonction rigoureusement linéaire pour la dila- talion des corps fictifs nommés gaz parfaits, tandis que, pour ceux-ci, la seconde définition conduirait à une relation logarithmique beaucoup plus incom- mode. Nous nous en tiendrons à la première, en insistant sur ce fait qu'elle n’est pas la seule pos- sible. Pour définir complètement l'échelle thermomé- trique il faut encore donner la valeur de deux de ses points. Dans le système centigrade, on fixe le zéro par la température de la glace pure fondant sous la pression atmosphérique, et le point 100 par la température de la vapeur d'eau bouillant sous la pression de 760 millimètres de mercure à 0° et réduite aux conditions dites normales de la pesanteur, c'est-à-dire à la latitude de 45° et au niveau de la mer. * Dans la pratique, on définit fréquemment la va- leur numérique de la température par le rapport entre une variation thermique, et le centième de la variation totale entre entre 0° el 400°. Un grand nombre de variations thermiques se rapprochent assez de la forme linéaire pour que, dans la plupart des applications, on puisse ne pas tenir compte de la différence ?. 1 Lippmann, Journal de Physique, 2e s., 1. LI, p. 53. * La Solution du problème des températures (Gauthier-Vil- lars). 3 Pour éviter toute ambiguïté, nous désignons par le mot échelle une fonction linéaire d’un phénomène thermique. La désignation de système cest réservée à l’ensemble des notions qui définissent les points fondamentaux et la division de leur in- tervalle. Soit T une température dans l'échelle thermodynamique. C'est ce qui aurait lieu pour la dilatation des gaz parfaits, elce qui se trouve réalisé sensiblement pour l'hydrogène dans de larges limites. Un grand nombre de variations thermiques, comme par exemple la dilatation du mercure, s’en rapprochent assez pour que, dans la pratique ordinaire, on puisse négliger le terme correctif. On n’a rien fait de mieux jusqu’à ces dernières années; mais cette approximation ne suffit plus à la Métrologie mo- derne !. I Thermomètre à gaz. — Nous ne pouvons nous attar- der à discuter les expériences de thermodynamique parlesquelles on parvient à déduire de la dilatation des gaz une échelle thermométrique rigoureuse ; il nous suffit de savoir que, pour ces corps, le terme correctif de l'équation (3) [mise en note] peut être calculé. Comme nous le disions tout à l'heure, ce terme est très petit pour l'hydrogène ; si petit que, aux températures ordinaires, on n'en connait même pas le signe. C’est guidé par ces considéra- tions que, dans sa session de 1887, le Comité inter- national des poids et mesures décida d'adopter pro- visoirement dans service, comme échelle thermométrique normale, l'échelle donnée par une fonction linéaire de la variation de tension de l'hydrogène. C'est done au thermomètre à hydro- gène que toutes les températures doivent être rap- portées, et tous les appareils servant à les mesurer doivent être gradués d’après cet instrument Ici se place une restriction. La décision du Comité international doit être prise non à la lettre, mais dans son esprit. Le thermomètre à hydrogène fait loi, comme représentation matérielle la plus son L'état d’un corps en fonction de la température scra donné par une certaine fonction : A NLes F\0),, (1) Er =f(T)= A (0 n+ nee } =Eo li +aT+pT2+..]. Si nous déterminons l’état du corps à deux points fixes 0° et 1009 par exemple, l’état à toute température nous ser- vira à établir une échelle arbitraire t définie par la relation linéaire en f(T). FT) = #(0 F (00) — F (0) Les degrés seront donnés alors par des fractions égales de la variation considérée. En développant, on réduit aisément cette équation à la forme 2 t—100 3) PT POI AE BTE CT") La température £ apparait alors comme étant égale à T avec un terme additionnel, dont la grandeur dépend des coefficients A, B, C,... Lorsque la fonction (T) est linéaire, A, B, C.... sont nuls, et les échelles T et # coïncident. ! On propose encore de temps en temps d’adopter, pour la définition des températures, une variation thermique dé- terminée, que l’on puisse aisément mesurer dans de très larges limites. Mais il ne faut pas oublier que l'emploi d'une pareille échelle ne permettrait aucune conclusion théorique relative aux coeflicients thermiques des corps. 76 CH.-ED. GUILLAUME. — LES IDÉES MODERNES SUR LA THERMOMÉTRIE simple et la plus exacte possible de l'échelle ther- modynamique, dans les limites des températures auxquelles la condition d'identité est suffisamment remplie. Mais que se passe-t-il lorsqu'on abaisse la température? Le regretté Wroblewski, dans un travail magistral, dont les résultats n’ont été publiés qu'après sa mort, a montré que, à des températures très basses, l'hydrogène suit une loi de compres- sibilité analogue à celle à laquelle obéissent les autres gaz. Le produit pv diminue d’abord lors- que l’on augmente la pression, puis augmente ensuile, ainsi que le veut la loi de Van der Waals', première approximation après celle de Mariotte. Cette constatation ne suflit pas pour prévoir les erreurs de l'échelle thermométrique donnée par la dilatation de l'hydrogène, et, en attendant que des expériences très délicates sur la détente des gaz aient pu être faites, on a cu recours à une méthode empirique pour déterminer le point où l'échelle de l'hydrogène s'écarte franchement de sa marche régulière. Ce procédé est très intéressant el nous allons tächer d’en donner une idée. L'hydrogène présente des irrégularités dans sa dilatation lorsqu'il s'approche de son changement d'état; il en est de même de toutes les propriétés des corps dans les mêmes circonstances. À des températures très basses, tous les corps se solidi- fient; par conséquent, il n’y a plus aucun change- ment d’élat, entre les températures ordinaires et le zéro absolu, pour tous les corps qui, aux premières, sont déjà solides. Leurs propriétés se modifient régulièrement sans éprouver aucun saut brusque. Si, par conséquent, on a déterminé par l'expérience les coefficients de l'équation (1) [en note ci-dessus] pour un intervalle de température considérable, on pourra en revanche employer cette équation pour calculer l'état du corps à une température plus basse pas trop éloignée de la limite inférieure de la gra- duation; on en déduira les écarts entre l'échelle normale et l'échelle thermométrique fournie par la variation considérée. Nous n'insisterons pas sur les conditions pratiques de celle extlrapolation que nous en détail ?; seulement que, pour être faile avec quelque proba- bilité, elle doit être appliquée à une équation dans laquelle Le terme correctif de l'équation (3) petit. Des recherches dans ce sens ont été faites par Wroblewski, jusqu'à — 216°, el par MM. Cailletet Les derniers ont avons traitée ailleurs disons est très et Collardeau jusqu'à — 102°. démontré que le thermomètre à hydrogène est 1 Voir dans cette Revue, l'article de M. Ph.-A. Guye, tome I 1890, n° 12, p. 365 et suiv. 2 Archives de Genève, octobre 1888 ct Trailé de thermométrie (Gauthier-Villars). exact à — 100°: d'après l'opinion du premier, il deviendrait suspect à — 193° ; mais une discussion serrée de ses expériences montre que, bien plutôt, son phénomène de contrôle (pouvoir thermo-élec- trique du couple maillechort-cuivre) doit être sus- pecté, et que, d'après d’autres variations qu'il a étudiées (résistance électrique du cuivre), le ther- momètre à hydrogène donnerait encore des indi- cations sensiblement exactes à — 210°. A cette température, l'oxygène et l'azote sont déjà liquides sous une pression de quelques centimètres de mercure. On peut donc dire que l'hydrogène seul fournit, par sa dilatation, une échelle normale des températures dans tout l'intervalle étudié jusqu'ici. III Mais il est temps d'aborder la construction d'un thermomètre à gaz. Cet instrument peut revèlir el revêt en effet des formes multiples suivant l'usage auquel on le destine. Pour des températures élevées, le réservoir doit avant tout être réfractaire ; pour des températures très basses, il est nécessaire de donner au réservoir un volume relativement fai- ble, car on n’a pas pu, jusqu'ici établir, ces tempé- ratures dans un espace un peu étendu. La descrip- lion de tous ces instruments, ou seulement leur nomenclature nous entrainerait trop loin. Nous nous en tiendrons (que lon nous pardonne cette préférence) au thermomètre de précision. Un thermomètre à gaz se compose d'un réservoir rigide, relié à un manomètre par l'intermédiaire d'un tube fin et d'une chambre formant ensemble ce que l’on nomme très justement lespace nuisible. La tempéralure est définie par la variation de ten- sion du gaz; c'est celte variation qu'il s’agit de mesurer avec toute l’exactitude possible. On sup- pose implicitement que l'enveloppe estabsolument invariable, et que tout le gaz contenu dans l’appa- reil est soumis à la température à mesurer. Ces conditions ne sont jamais remplies; mais mieux elles le sont, plus petites sont les corrections qui y ramènent. Il faut donc opérer avec un espace nui- sible très petit relativement au réservoir. Celui-ci doit être peu déformable par la pression ou la température. Le manomètre doit être construit de facon à enfermer toujours le gaz dans un même espace, afin que l’on n'ait à considérer que les va- rialions de la tension du gaz et non celles de son volume. Voici comment notre collègue, M. P. Chappuis, a résolu ces divers problèmes dansles longues recher- ches qu'il a faites au Bureau international des poids et mesures. Le réservoir du thermomètre à gaz est formé d'un tube de plaline iridié de 4" 12 de longueur né hotte imitsiss#Ssénths cities dits CH.-ED. GUILLAUME. — LES IDÉES MODERNES SUR LA THERMOMÉTRIE dpi et de 1 litreenviron de capacité !. Il est relié (fig. 1, détail fig. 2) à la branche fermée du manomètre mn par un tube fin de platine € traversant la pièce P. Dans la branche ouverte de celui-ci, plonge le tube d'un baromètre B, commandé par e \ Uk hi = —Ù hi D IT 0 | | j | || | | || LL |l m\|| | |-m’ | | | | c ù | / rl 1 Qu] 72 NN TT J.BLANADET Fig. {. — Baromètre et manomètre du thermomètre à gaz (ensemble). la vis e. La pression lotale agissant sur le gaz est donnée directement par la différence des lectures dans les tubes du baromètre et du manomètre situés dans la même verticale. Les ménisques de mercure qui sont très larges ne sont pas directe- 1 Ce tube qui est une pièce unique appartient à l’Institut de France. ment visibles dans une lunette. On détermine leur posilion par la réflexion d’une petite pointe sombre auprès de laquelle on ramène la surface inférieure à l’aide du réservoir auxiliaire (fig. 1 à gauche), ou en déplaçant verticalement le tube du baromètre. Dans l'appareil de M. Chappuis, la pointe soudée sous la pièce P n’a que 0", 7 de longueur; l’espace nuisible total est égal à <= environ du réservoir. Le tube »! communiquant avec » permet d’em- ployer l'appareil comme baromètre. Cet instrument, manœæuvré avec habileté, donne une exactitude de quelques millièmes de degré. Le thermomètre à gaz de précision n'est pas employé directement dans les mesures; on ne s’en ds e la piéec P de la figure précédente. His 2— Détail « sert que pour graduer d’autres appareils dans des expériences préliminaires. En revanche, on l’em- ploie fréquemment comme pyromètre dans des recherches nécessairement assez grossières. IV Thermomètre à mercure. — Aucun instrument de physique n’est aussi répandu que le thermomètre à mercure; il n’est presque pas une expérience dans laquelle il n'intervienne comme instrument essentiel ou accessoire d’une mesure. La cause en est dans la simplicité de son maniement et l’exacti- tude des indications qu'il fournit. Il faut distinguer, dans l'histoire du thermomètre à mercure, trois phases bien distinctes. 1° Période dans laquelle on ne demandait à cel instrument que des indications approximatives, et où le thermomètre suffisait pleinement à son but. 2 Période transitoire où, la métrologie devenant plus exigeante, le thermomètre était trop peu exact; d'erreurs n'était la connaissance de ses causes 18 CH.-ED. GUILLAUME. — LES IDÉES MODERNES SUR LA THERMOMÉTRIE point encore assez avancée pour que lon püût appliquer des corrections certaines à ses lec- tures. Le thermomètre à mercure était {très discré- dité et l’on n'était pas éloigné de renoncer à son emploi dans les recherches de précision. 3 Enfin, par une étude approfondie, on a débrouillé les causes d'erreurs auxquelles le ther- momètre est soumis; toutes ses lectures peuvent être corrigées très exactement, et il occupe désor- mais un rang élevé parmi les instruments délicats. Le thermomètre à mercure estentièrement réhabi- lité. D'après sa définition, le thermomètre à mercure (à tige) est un instrument donnant la température en fonction de la dilatation du mercure dans le verre, mesurée en centièmes du volume compris dans le tube capillaire entre les points 0° et 100°. Conformément à ces définitions, les fractions du vo- lume [0-100] doivent pouvoir êtreestimées à l’aide de la division gravée sur la tige, et le réservoir du thermomètre ne doit subir aucune déformation étrangère à la dilatation thermique. On ramène les lectures à ces suppositions en leur appliquant des corrections appropriées. L'une est déterminée par une opération longue et minutieuse, terreur des commencants, et que l’on nomme le calibrage. La seconde se calcule à l’aide du coefficient de pression du réservoir; ce coefficient exprime la variation de l'indication du thermomètre correspondant à une variation de pression de 1" de mercure sur le réservoir. Le phénomène qui, pendant longtemps, a fait désespérer de pouvoir jamais tirer une indication exacte du thermomètre à mercure, est la variabi- lité de Un même thermomètre, exposé à diverses époques à une même tempéra- ture ne donne pas la mème indication. ses éléments. En y regardant de plus près, on areconnu cepen- | dant que, lorsque le thermomètren'est pas soumis à un traitement trop brutal, les variations que l’on observe sont les mêmes en tout point de l'échelle; si done on peut fixer à un instant quelconque un point de repère sur cette échelle, tous les autres seront déterminés. Or, la température très cons- tante de la glace fondante nous fournit un de ces points. C'est à lui que l’on se rapporte en général (dans certains cas exceptionnels, il est cependant avantageux d'avoir recours à d’autres points fixes, ébullition de l’eau, de la naphtaline, ete.), et loutes les variations de l'échelle se traduisent dans la pratique et dans le langage par des variations du zéro. Nous signalerons quelques-unes des lois qui les régissent: Lorsqu'un thermomètre est exposé à une température constante, le zéro s'élève cons- tamment en s’approchant d’une limite, sensible- ment atteinte après quelques années. Si, à un moment donné, le thermomètre est porté à une température supérieure à £, le zéro s’abaisse très rapidement. Si l’on ramène le thermomètre à f, le zéro s'élève de nouveau, beaucoup plus lentement, et rejoint après quelque temps sa courbe régulière d’ascension. Les températures très élevées pro- duisent d’abord un abaissement très rapide, puis, l'effet continuant, le zéro remonte sur une courbe plus inclinée qu’à une température basse; il se produit un recuit du verre, et, sil’on revient à la température primitive {, l'ascension du zéro, inverse de la dépression, ramène le zéro au-dessus de la courbe régulière d’ascension relative à #. Ce mouvement terminé, l'ascension régulière peut se produire encore, mais elle est entravée au moins en partie, souvent en totalité par le recuit. La position du zéro, à une époque donnée, est fonction de la température. Les variations du zéro des thermomètres diffèrent beaucoup d’un verre à l’autre : très fortes pour le cristal à base de plomb et les verres conte- nant des quantités comparables de soude et de potasse, elles sont beaucoup moindres pour les verres durs ne contenant que l’un des alcalis. En ce moment les verres les plus appréciés pour le thermomètre sont le verre dur francais, un verre industriel très robuste, et le verre normal d’Iéna, encore un peu moins variable, mais qui est resté jusqu'ici un verre de laboratoire assez coûteux. Citons quelques chiffres. Si l'on maintient un thermomètre en verre dur à la température ordi- naire, le zéro remonte de 0,05 degré environ en trois où quatre années, puis il s'arrête sensible- ment. Chauffé indéfiniment à 200°, il s'élève de 0,4 degré ; à 360°, il remonte de 3 degrés. Pour les thermomètres en cristal, l'ascension à 360° dépasse souvent 20 degrés. Lorsqu'on porte un thermomètre en verre dur de 0° à 100°, le zéro se déprime complètement en 2 minutes. Dans un thermomètre en cristal, on peut suivre ce mouvement pendant plus d’une heure. La relation entre la position du zéro et la lem- pérature peut être représentée par une fonction du second degré f (f), dont le second terme diminue lorsqu'on passe des verres mous aux verres durs. Pour le verre dur français, et le verre d’Iéna, la relation est sensiblement linéaire. La dépression totale de 0° à 100° est un peu inférieure à 0,1 degré pour le premier, et égale à 0,07 degré environ pour le second. Ces variations sont assurément génantes, mais on s'en garantit complètement en comptant toujours les températures à partir d'un zéro variable, que l’on déter- mine en principe après chaque expérience. La CH.-ED. GUILLAUME. — LES IDÉES MODERNES SUR LA THERMOMÉTRIE 19 figure 3 représente l'appareil employé dans ce but. La glace très propre finement rapée est placée dans la cloche, ou elle est lavée à l’eau distillée. Après avoir laissé écouler l'excédent d'eau, et comprimé la glace avec un morceau de bois, on y perce un trou dans lequel on introduit le thermomètre. La glace doit rester trempée d’eau. AVE Supposons que nous ayons complètement étudié deux thermomètres étalons du mème verre. Nous avons déterminé leurs corrections de calibre, leur coefficient de pression, la valeur de l’inter- valle [0-1001. Nousles plaçcons dans un bain, côte à Kig. 3. — Apparol pour la détermination du point zéro des thermomètres. côte, et après avoir relevé leurs indications, nous déterminons la position de leur zéro. Nous appli- quons alors aux lectures les corrections déter- minées individuellement sur chacun des thermo- mètres. Quelle sera la concordance des lectures ainsi corrigées ? On concoit qu'il y a là une question vitale pour la thermométrie. Si les lectures sont identiques, nous pourrons établir, avec les thermomètres à mer- cure étudiés individuellement une échelle déter- minée, la réduction à l'échelle normale pourra être faite pour tous les thermomètres dès que l'on aura donné les corrections pour un d’entre eux. Dans l’autre cas, il faudra pour chaque instrument faire une graduation par comparaison, opération très laborieuse, et impraticable avec toute installalion qui n’est pas de premier ordre. L'ancienne Thermométrie était très peu rassu- rante à ce sujet; mais les recherches de ces der- nières années ont conduit à des résultats des plus encourageants. Un grand nombre de thermomètres à mercure furent étudiés individuellement et com- parés entre eux. Les indications réduites des ther- momètres du même verre se sont trouvées iden- Uques dans les limites des erreurs d'observation, c'est-à- dire à 3 ou 4 millièmes de degrés près. La différence probable en un point quelconque d’un ther- momètre, et la moyenne d’un nombre infini de thermomètres du même verre s’est trouvée, dans un grand nombre d'observations, de l’ordre de 0,001 degré. Les indications des thermomètres de verres différents ne sont pas semblables, mais elles s’écar- tent d'une manière systématique, etles divergences peuvent être résumées dans une équation [telle que 3), note p. 75], dans laquelle il suffit d'introduire un, deux, où au maximum (rois paramètres pour représenter très exactement toutes les observations. Le diagramme (fig. 4) montre les divergences entre Crista/ +015 Que Nerre dur ide carboni Lo pcide que Fig. 4. — Excès de diverses échelles thermométriques sur l'échelle normale. diverses échelles thermométriques et l'échelle nor- male prise comme axe des abscisses. Le verre d’'Iéna suit de très près le verre dur. VI Procédés divers. — Le thermomètre à mercure est l'instrument idéal dans tout le domaine qui lui convient. Mais, d’une part, ses indications sont nécessairement limitées à la température de con- gélation du mercure (— 39° environ), et à sa lempé- rature d’ébullition. sous les pressions que l'on 80 CH.-ED. GUILLAUME. — LES IDÉES MODERNES SUR LA THERMOMÉTRIE peut tolérer dans les thermomètres; à notre con- naissance, on n’a pas encore dépassé utilement 480° avec cet instrument. Enfin la sensibilité du thermo- mètre à mercure est limitée par les forces capil- laires exercées sur le ménisque. Nous ne croyons pas que l’on puisse jamais appliquer cet instru- ment à la mesure de variations de la température comprises dans les limites du millième de degré. Le nombre des procédés de mesure proposés pour remplacer le thermomètre à mercure est légion. Comme nous l'avons dit en commençant, on a utilisé les phénomènes thermo-électriques, les résistances électriques, la dilatation desliquides, tels que l'alcool pour les basses températures, l'analyse spectrale des corps incandescents, puis aussi l'écoulement des gaz par des tubes capil- laires, la chaleur emmagasinée par un corps et rendue à un calorimètre, l’'échauffement d’un cou- rant d’eau, et beaucoup d’autres; enfin, comme nous l'avons dit, le thermomètre à gaz est employé quelquefois directement aux mesures. La mesure des températures élevées offre des difficultés particulières à cause des déformations et des modifications moléculaires qu'éprouvent les corps bien avant leur fusion, C'est à la cristalli- sation des fils de platine, accompagnée de chan- gements permanents et bientôt suivie de rupture que l’on doit de ne guère pouvoir dépasser, dans la pratique courante, la température de 1200°, dans la mesure par les procédés électriques. En revan- che, la méthode calorimétrique fournit de très bons résultats à des lempéralures encore plus élevées. C'est en mesurant la chaleur rendue à un calorimètre par un morceau de métal pris au mo- ment de sa solidification que M. Violle est parvenu à déterminer avec une grande exactitude la tem- pérature de fusion du platine (1775°), de l'iridium (1950°), et de plusieurs autres métaux réfractaires. Mais cette méthode demande toute une expérimen- tation, et exige une grande habileté. Pour les températures inférieures à 1200°, le couple thermométrique Le Chatelier (platine-pla- line rhodié) en connexion avec un galvanomètre d’Arsonval parait rendre de très bons services !. La mesure de très petits intervalles de tempéra- ture à élé essayée par divers procédés, en particu- lier par les résistances électriques, et les couples thermo-électriques. En ce moment, les premières sont en honneur. Il semble en effet qu'elles s'adap- lent mieux que les autres à ces mesures; mais ce 1 L'appareil complet est construit par M. Carpentier à Paris. qui, surtout, leur constitue actuellement une supé- riorité marquée, c’est l'étude très approfondie qu'en a faite le professeur Langley. Le bolomètre, appareil de mesure basé sur la variation de résistance pro- duite dans un fil de métal par la température, est un instrument d'une merveilleuse sensibilité, grâce auquel il a été possible d'aborder des études jugées impraticables il y a quelques années, telles par exemple que celles du spectre de la lune, ou des radiations émises par des corps terrestres à des températures basses. VII Le désir de donner une idée un peu complète des tendances modernes de la Thermométrie et des conditions expérimentales qui lui sont imposées par les lois mêmes auxquelles obéit la matière, nous ont obligé à noyer les grandes lignes du sujet dans une foule de détails d’où il convient de les dégager; nous allons les résumer en quelques mots. La thermodynamique donne le moyen de définir une échelle thermométrique indépendante de tout corps réel ou ficlif. La dilatation de l'hydrogène nous donne une représentation matérielle très exacte de cette échelle, jusqu'aux températures les plus basses que l’on ait encore établies; ce phéno- mène fournit l'échelle thermométrique normale. Le thermomètre à mercure est un instrument délicat et précis, susceplible de donner, entre — 39° et + 100° et plus, une exactitude réelle de quelques millièmes de degré. Tous les thermo- mètres du même verre étudiés rdividuellement coïncident entre eux dans leurs indications corri- gées. Une table de correction, {& même pour tous, ramène leurs indications à l'échelle normale. Pour la mesure des températures élevées, ou basses, une foule de procédés peuvent être substi- tués à l'emploi du thermomètre à mercure. Les plus généralement applicables sont les procédés électriques. Ces derniers sont les seuls qui permet- tent de mesurer avec une cerlaine précision rela- tive des variations de la température inférieures au millième de degré. Depuis dix ans la (hermométrie s’est entière- ment transformée ; un grand domaine est bien fixé, el conquis pour longtemps. Les regards se tournent vers de nouvelles questions dont l'étude est en boune voie. Les tendances sont nettement caracté- risées; mais telles ont été dans le passé les sur- prises en bien ou en mal, qu'il serait téméraire de dire ce qui restera de tout ce grand travail. Ch.-Ed. Guillaume, Docteur ès sciences, £ ot the. mn nach ul “nier nées dd, boit J. VAN BREDA DE HAAN. — LES EXPÉRIENCES DE M. BEYERINCK 81 LES EXPÉRIENCES DE M. BEYERINCK SUR LES BACTÉRIES LUMINEUSES ET LEUR NUTRITION ! Quand on étudie les conditions de la nutrition des microorganismes, on introduit habituellement les substances à étudier dans le liquide ou la géla- tine employés pour la culture, et l'on apprécie ensuite leur action soit par la pesée ou le dénom- brement des cellules nouvellement formées, soit par l'estimation de l'étendue des colonies ou des lignes d’inoculation. Cette méthode est longue, difficile et entourée de causes d'erreurs. M. Beyer- inck, directeur du laboratoire bactériologique de Delft, a imaginé une méthode nouvelle, l'Aurano- graphie, qui permet d'éviter quelques-unes des influences perturbatrices. Elle est fondée sur les deux observations suivantes : 1° la gélatine et la gélose (agar-agar purifiée) ne sont pas des matières nutrilives pour la plupart des microbes; 2° dans les couches coagulées, solides, de gélaline ou de gélose, l'hydrodiffusion des matières dissoutes se fait à peu près de la même manière que dans l’eau. Il Les matières qui doivent être ajoutées au milieu de culture pour permettre le développement des microorganismes sont: des substances minérales, des composés azotés assimilables et des aliments carbonés. Si, sur une couche de gélatine pure, uniformément ensemencée, on dépose une goutte d'une solution de ces trois ordres de substances, chacune d’elles diffuse peu à peu dans la gélatine; c’est seulement là où les trois aires de diffusion se rencontrent, que les germes trouvent un milieu nutritif complet et qu'ils se développent; l'aire opaque nettement circonscrile sur laquelle s’est développée la colonie est un «uranogramme. Si la plaque de culture ensemencée contient déjà deux des substances nécessaires (minérale et azo- tée par exemple) et si l’on dépose à sa surface une goutte de la troisième substance (curbonée par exemple), une colonie se développe dans l'aire de diffusion de celle-ci. Si cette troisième substance esl en solution trop concentrée, la colonie se développe suivant un anneau; si la matière essayée n’est pas assimilable, son champ de diffusion reste parfai- tement clair. En combinant les dispositifs d’expé- rience, on peut done varier à l'infini l'étude des milieux nutritifs et aussi des antiseptiques. (1) Nous utilisons pour cet article des documents inédits fournis par l'auteuret ses Mémoires des Archives néerlandaises des Sciences exactes et naturelles, tome XXIII, M. Beyerinck a appliqué sa méthode de l’auxa- nographie à l'étude des Batéries photogènes, qu'il a réunies dans le genre Pholobacterium. On en con- nait six espèces, dont trois sont dues à M. Beyer- inck; ce sont : le PX. phosphorescens qui rend le poisson phosphorescent, le Ph. Indicum de la mer des Indes, le P}. luminosurm des côtes de Hollande et les Ph. Balticum, Fischeri et Pjlügeri de la mer Baltique ; elles se distinguent l'une de l’autre par la forme, leurs propriétés liquéfiantes de la géla- tine, ou l’assimilalion différente de diverses subs- tances, mais {toutes exigent que l'aliment contienne au moins 3°/,de sel marin ou des proportions iso- toniques d’autres sels minéraux, et que le milieu de culture soit neutre ou faiblement alcalin, car une trace d'acide suflit à éteindre la lumière; elles se cultivent facilement sur de la gélatine ou de la gé- lose préparées dans une décoction de poisson dans l'eau de mer. IL Par l’auxanographie on peut facilement recon- naitre quelles sont les substances plastiques, per- mettant le développement des cultures, et les substances photogéniques, provoquant la phospho- rescence. Ainsi, comme élément azoté, la peptone suit aux 2h. luminosum el Ph. indicum pour se multiplier et produire de la lumière. Au contraire des peptones seules ou des amides ne suflisent pas à la nourriture des Ph. phosphorescens, Ph. Fischeri et Ph. Balticum ; mais les colonies s’accroissent et de- viennent lumineuses avec un mélange de ces deux sortes de substances. Les substances carbonées peuvent être des solutions de glucose, de lévulose, de maltose, de galactose, de lactate de calcium et surtout de glycérine,quiestla matière photogénique parexcellence. Cependant 1 °/, de glucose ou des proportions un peu plus fortes de lévulose ou de mallose, arrêtent la liquéfaclion de la gélatine et éteignent la lumière en même temps que la bacté- rie prend une forme irrégulière et variable. M. Beverinck attribue cette perte de lumière à la production d’une petite quantilé d'acide formée aux dépens du glucose. L’amidon soluble, le saccha- rose, le lactose, ne peuvent servir à la nutrition. D'une manière générale, en même temps qu'elles produisent de la lumière, ces bactéries absorbent une certaine quantilé de peptone, même si elles ne se multiplient pas; la production de lumière est une cause de consommation de malière nutritive. + 82 J. VAN BREDA DE HAAN. — LES EXPÉRIENCES DE M. BEYERINCK La proportion dans laquelle on laisse la peptone d’une part et la gélatine d'autre part diffuser dans la gélatine n’est pas indifférente ; autrement dit, il faut observer un certain rapport entre les quan- tités d'aliment albuminoïde et d'aliment carboné ; une nourriture photogénique trop abondanteéteint la lumière. Si par exemple on laisse tomber une goutte de glycérine sur une culture lumineuse de PA. phosphorescens renfermant ‘/, °/, de peptone, le champ de diffusion de cette goutte s'éteint, forme un auxanogramme obscur ; mais après quel- que temps, la glycérine en excès est absorbée par les bactéries, et au moment où la proportion rela- tive de peptone et de glycérine redevient favorable la lumière réapparaît, et le champ de diffusion de la glycérine est plus lumineux que les parties voi- sines. Inversement, une culture peut renfermer trop de peptone pour que la bactérie soit lumineuse et une goutte de glycérine suffit alors pour faire apparaitre un auxanogramme lumineux. Il existe done des proportions d’aliment qui permettent l'accroissement, d’autres qui provoquent l'émission de lumière. Quant aux aliments minéraux, nous avons dit que le terrain de culture doit ètre neutre ou alca- lin ; dela gélatine au bouillon de viande peptonisé reste stérile et obscure ; mais si l’onajoute3à3!/,°/, de sel marin, de chlorure de potassium ou de ma- gnésium, les colonies se développent et la lumière peut prendre la même intensité que sur les décoc- Lions de poisson. D'après des expériences faites sur le Ph. phosphorescens, M. Beyerinck croit pouvoir affirmer que tout dépend ici de la grandeur des tensions osmotiques ; il a trouvé en effet que, pour cette espèce, des dissolutions de sels inorganiques très différents peuvent entretenir le dégagement de lumière et même la croissance, à la seule con- dition d'être isosmoliques à une solution de ehlo- rure de sodium à 3°/,. III Des résultats qu’il a obtenus, M. Beyerinck tire la conclusion que la fonction photogénique des bactéries lumineuses est intimement liée à la ma- tière vivante, de la même manière que les fonctions de fermentation, de réduction, de contraetilité, etc. La lumière qu'elles émettent n’a pas de significa- tion biologique : elle n’est pas nécessaire à la vie de ces bactéries; elle est la conséquence acciden- telle de processus chimiques internes. D'ailleurs toutes ces bactéries ne se comportent pas de la même manière sous le rapport de l’émis- sion de lumière, Ainsi les Ph. Pfliügeri. el Ph. phos- phorescens ne liquéfient point la gélatine; mais, tandis que le premier reste obscur avec le maltose et ne l’assimile point, le maltose est au contraire pour le second une nourriture à la fois plastique et photogénique. M. Beyerinck a tiré de cette observa- tion une élégante méthode de diagnose de l’action des diastases : on prépare deux séries de culture sur de la gélatine renfermant de l’amidon avec les deux bactéries précédentes, et l’on ajoute la dias- tase à essayer; siles cultures restent obscures, c'est qu'il se forme du glucose ; si les cultures de Ph. Pflügeri rentent obscures, tandis que celles du Ph. phosphorescens donnent un auxanogramme lu- mineux, c’est que du maltose s'est produit. On peut imaginer des recherches du même genre avec: les Ph. Balticum et Ph. Ficheri qui se distinguent l’un de l’autre par l'assimilation du saccharose. Enfin tout récemment M. Beyerinck a fait de l'étude de ces bactéries lumineuses une application purement technique à propos d'une discussion sur les qualités désinfectantes du filtre Chamberland. Il fit passer dans un filtre une culture de diverses espèces de Photobactéries; toute infection prove- nant du dehors était impossible, car elles ne se trouvent jamais dans l'atmosphère. Placée ensuite à l'obscurilé, la bougie Chamberland était com- plètement obscure sauf en deux points de très pe- lite étendue, rendus lumineux par l'accumulation des bactéries de plus petite taille qui avaient d’ail- leurs passé dans le liquide fiitré. Une minutieuse inspection montra qu’une fissure microscopique existait en ces deux points !. Ces bactéries peuvent donc être employées à reconnaitre les qualités d'un filtre. Gràce aux intéressantes recherches de M. Beye- rinck, la méthode auxanographique et aussi l'em- ploi des bactéries lumineuses peuvent done rendre de nombreux services en microbiologie. J. van Bréda de Haan. Naturaliste au laboratoire de botanique de Leyde, 1 Il s’agit ici, comme on le voit, d’une bougie brisée. Celles qui sont intactes sont absolument imperméables aux microbes. Note de la Direction.) PPS PRET Te BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 83 1° Sciences mathématiques. Puiseux (P.) — Leçons de Cinématique. — Méca- nismes, Hydrostatique, Hydrodynamique. Un vol. in-4° de 310 pages (9 fr.). — Georges Carré, éditeur, 58, rue Saint-André-des-Arts, Paris, 1890. 4 Les lecons que M. P. Puiseux, maitre de Conférences . à la Faculté des Sciences, professe à la Sorbonne, ont été recueillies et rédigées par deux de ses élèves, comme cela a été déjà fait pour plusieurs autres pro- fesseurs ; c’est là une excellente idée que nous vou- drions voir s'étendre à tous les cours de notre ensei- gnement supérieur et qui doterait certainement notre littérature scientifique de remarquables ouvrages. Le livre de M. Puiseux n’est pas un livre de re- cherches, mais bien, comme il le dit lui-même dans sa préface, un livre d'enseignement, À ce titre il est intéressant; sur chaque point il met bien en relief l’idée importante, présente nettement les théories et à de réelles qualités de clarté. Il sera fort utile aux can- didats à la licence, et nous ne saurions trop le leur recommander. J. Pouzer. Leconte, Professeur à Gand, — Etude expérimentale sur un mouvement curieux des ovoides et des ellipsoïdes. (0 fr. 50). Hoste, éditeur à Gand, rue des Champs, et Gauthier-Villars et fils, 55, quai des Grrands- Augustins, Paris, 1890, Ce petit opuscule donne, sous une forme humoris- tique, le récit d'expériences faites sur le mouvement de rotation des ovoides; le point de départ de ces ex- périences réside dans le fait suivant : lorsqu'on com- munique à un ovoide un mouvement rotatoire rapide, le grand axe étant horizontal, il arrive qu'au bout de quelques instants, l’ovoide se dresse brusquement pour tourner autour de son axe de symétrie devenu vertical ; puis, dans une troisième période, l'axe décrit un cône qui s’élargil jusqu'à ce que la vitesse soit devenue nulle, L'auteur à étudié l'influence qu'avait sur le phéno- mène l’état physique de la masse intérieure à l'ovoïde, ainsi que la différence des densités aux deux bouts de cet ovoide, Son petit travail, sans prétention, s'adresse plutôt aux gens du monde qu'aux physiciens. AO} XWitz (M. A.), Docteur és sciences. — Moteur à gaz Simplex, système E. Delamare-Deboutteville et Malan- din. Procès verbal d'expériences el parallèle entre les moteurs à gaz et les machines à vapeur de méme puis- sance (6 fr.). Bernard et C, T1, rue de la Condmine. Paris, 1890, Le moteur étudié par M. Wilz est le plus puissant moteur à gaz monseDAAAIQRE que ait été construit : sa : à A Te \ la course est de 950 indie et le nombre de tours est 100, Jusque dans ces dernières années les machines à gaz détonnant ont rendu de grands services dans les ate- liers qui n'exigent que l'emploi de machines de faible puissance ; mais elles wétaient pas en usage pour les fortes puissances, malgré les tentatives des inv enteurs. La machine à gaz est plus commode que la machine à vapeur pour les petites industries, parce qu’elle n’exige ni foyer, ni chaudière, ni chauffeur, ni approvisionne- ment de combustible et par consé iquent ne demande que peu de place, De plus, elle ne consomme rien dans l’inaction. Mais la machine à gaz demandait une ANALYSES BIBLIOGRAPHIE ED INDEX grande quantité d’eau, et étant sujette à une grande usure exigeait un graissage très fréquent, très abon- dant et par conséquent très coûteux; enfin la consom- mation de gaz était considérable. Toutes ces imperfe c- tions ont été successivement atténuées au point qu’il a été permis d'aborder les grandes puissances. L'étude faite par M. Witz sur le moteur E. Delamare- Deboutteville semble prouver que ce moteur, alimenté au gaz Dawson, peut rivaliser avec les machines à vapeur les mieux construites et les plus économiques. Elle débute par un procès verbal d'expériences faites sur cette machine el se termine par un parallèle eutre les machines à gaz et les machines à vapeur. Ce parallèle est établi d’une manière complète : au point de vue du rendement, du prix de revient et de l’unité de travail. Il faut encore craindre de juger avec précipitation les moteurs à gaz, tout en reconnaissant les grands progrès qu'ils ont faits et en espérant qu'ils en peuvent laire de plus grands. M. Witz, en raison des expériences qu'il vient de faire, est tout à fait affirmatif et la con- clusion de la comparaison qu'il poursuit entre les ma- chines à vapeur et les machines à gaz est celle-ci : « Le moteur à gaz réalise donc une économie quoti- dienne considérable ; il coûte un peu moins cher, occupe un peu moins de place, consomme moins d’eau et marche aussi bien, » AL, GOUILLY. Poulain (A). — L'Unification des heures et les fuseaux horaires. — Angers, 1890. Après un historique de la manière de compter le temps depuis l'antiquité jusqu'à nos jours, l’auteur examine plus p articulièrement le système des fuseaux horaires qui Énnsiste. comme on sait, à tracer sur le globe vingt-quatre méridiens équidistants entre eux de (3°: on délimite ainsi v ingt-quatre fuseaux égaux dont le premier est à cheval sur le méridien choisi comme ori- uine, Quand il est midi dans ce fuseau, il est une heure dans le fuseau contigu à l'Est, deux heures dans le sui- vant, etc, Toutes les horloges indiquent donc la même minute, le chiffre seul des heures varie, Pour distin- vuer les fuseaux entre eux, on les numérote ou on les désigne par des lettres. Ce système, appliqué en Amé- rique avec l’origine de Greenwich a eu principalement en vue la conc ordance desheures de chemins de fer : M. A. Poulain lui attribue, en outre, de grands avantages mécaniques au point de vue de l’enseignement de la géographie. Il pense aussi que ce système résoudra de la facon la plus pratique le problème de l'heure uni- verselle pour les télégraphes et la physique terrestre. Il admet d’ailleurs fort sagement, ce qui semble bien acquis aujourd'hui, que l'astronomie, la navigation et la topographie sont en dehors de cette question d’uni- fication. Enfin, tout en rejetant l’heure unique préco- nisée par l’Académie de Bologne, qui implique la con- servation simultanée de l'heure locale pour la vie civile, il emprunte à ce corps savant le méridien de Jérusalem sur lequel il propose de baser le système des fuseaux. On sait que cette question doit être soumise prochai- nement à une conférence qui se réunira à Rome. Sans vouloir préjuger du succès que peut avoir cette tenta- tive, nous rappellerons que c'est précisément à Rome. en 1883, que la conférence géodésique international: recommandait le méridien et l’heure de Greenwich. Il est vrai que ce vote, aussi bien que celui de Washing- ton en 1884 et celui de cette année à Fribourg, n’a pas clos le débat. 84 BIBLIOGRAPHIE. , — ANALYSES ET INDEX On presse la France de prendre position, la mena- cant d’un véritable isolement si elle n'adopte pas l'heure universelle de Greenwich ou de Jérusalem, La question ne paraît pas assez importante pour que nous | ne puissions affronter les chances d’un pareil isole- | ment, à supposer qu'il se produise. Avec le système américain, nous aurions l'heure du Havre ou de Tarbes : avec les fuseaux dépendant de Jérusalem, celle de Marseille et de Carpentras; l'heure nationale mainte- nant adoptée se règle sur le méridien de Paris, qui occupe à peu près le milieu entre les précédents. On peut s'y tenir sans inconvénient. E. C. 2° Sciences physiques. Anney (J. P.), Ingénieur électricien. — Manuel pra- tique de l'installation de la lumière électrique. Un vol, in-8° de 344 pages avec 135 fig. dans le texte (5 fr.). B. Tignol, éditeur, 53 bis, quai des Grands-Auqustins. Paris, 1890, Le volume de M, Anney sur linstallation de la lu mière électrique porte le n° 37 de la Bibliothèque des Actualités industrielles; près de la moitié des ouvrages qui l'ont précédé dans cette bibliothèque se rapportent à l'électricité ; le transport de la force, les accumula- teurs, les dynamos, l’électrolyse, la télégraphie, la té- léphonie... elc., ont été successivement étudiés, La question si importante aujourd’hui de l’installa- tion de la lumière électrique tiendra deux volumes ; celui qui vient de paraître est relatif aux installa- | tions privées; le second traitera des stations cen- trales. L'ouvrage est sans prétentions théoriques; il vise uniquement à être un bon livre pratique et y réussit. Tous les renseignements que peuvent désirer l'ingé- nieur, le contre-maître et même l’ouvrier, y sont don- nés. Nous sommes convaincu qu'il ser a utile aux électriciens et leur fournira de précieuses indications sur le calcul de leurs projets, exécution de leurs tra- vaux, l'entretien ou les réparations de leurs machines, J. Poucer. Gouré de Villemontée, — Recherches sur la différence de potentiel au contact d'un métalet d’un liquide. Journal de physique, t. IX, p. 65. Paris, 1890. Le mémoire de M. Gouré de Villemontée est le ré- sumé d’une thèse soutenue devantla Faculté des Sciences de Paris, De nombreux expérimentateurs, après Volta, ont établi qu'il se produit une différence de potentiel électrique au contact de deux substances conductives: dans le cas où l’une des substances est un métal M et l’autre un liquide L, et la différence est très pelite, et par suite plus difficile à mesurer, en outre ilest malai- sé d'obtenir un isolement considérable, Aussi les nombres précédemment obtenus présentent-ils des divergences considérables, l'auteur est parvenu à des résultats très nets et très concordants grâce à de nom- breuses et ingénieuses précautions. Après plusieurs essais il s’est arrèté à un procédé de mesure simple en théorie : Une lame du métal en expérience M est reliée à un plateau P formé du même métal, ce plateau cons- | titue lune des armatures d’un condensateur dont l’autre armature est au sol ; la lame métallique plonge dans le liquide L, qu'on laisse s'écouler par la pointe d’un entonnoir de verre au travers d'un tube en métal ; ce tube est est porté à un certain potentiel V qu'acquiert également leliquide parle jeu de l'écoulement; dèslors le plateau P devra se charger d'électricité à moins toute- fois'que la différence de potentiel existant normalement entre le métal M etle liquide Lne soit précisément égale etdesigne contraire à V ; delà le moyen d'évaluer cette différence en constatant simplement que le plateau reste à l’état neutre, En cherchant à mettre en pratique cette méthode, on recontre des difficultés nombreuses que M. Gouré de Villemontée tées. IL est nécessaire d'opérer avec des corps parfai tement définis ; les métaux sont obtenus par voie galm vanoplastique, pourvu que les déports ne soient pas poreux, on à par ce moyen des échantillons toujours identiques au point de vue considéré; les liquides sont des dissolutions de sels purs dans de l’eau distillée provenant toujours de la même usine, les dissolutions ne sont jamais filtrées mais simplement décantées, Les résultats concordants auxquels l’auteur est arrivé désormais que la valeur de la. permettent d'affirmer différence de potentiel au contact d’un métal et d'un liquide est un nombre parfaitement défini et mesu- rable. On peut faire sur ces nombres quelques re= marques intéressantes, en particulier on constate que la valeur de cette différence de potentiel est en relation directe avec les équivalents chimiques, LUCIEN Poincaré. Langley (S. P.). — On the observation of sudden Phenomena (Sur l'observation des phénomènes sou- dains). American Journal of Science, 1890, Fixer avec précision l'instant auquel a lieu un phé- nomène soudain qui nous est révélé par le sens de la vue, est un problème difficile, On peut admettre que l'image se peint instantanément sur la rétine, mais il faut un certain temps pour que l'impression se trans- mette au cerveau, et ce temps dépend de l'observateur. M. Langley fait remarquer que l'équation personnelle dépend, en outre, du genre de phénomène chservé, et qu il n’est point évident qu'elle sera la même pour un mème observateur, si on considère l'apparition d’un astre caché derrière la lune, par exemple, et l’occul- tation de cet astre. Le problème se simplifie si l’on cherche à déterminer non plus quand, mais où se voit le phénomène, projeté en quelque sorte sur un champ de vision mobile. Un exemple fera comprendre la pensée de l’auteur : si un accident arrive à un voyageur emporté par un train rapide et qu'on l’apercoive d’une chambre où se trouvent deux fenêtres donnant sur la voie, on pourra toujours dire à travers quelle fenêtre on a vu l’acci- dent et si la vitesse du train est uniforme entre deux points auxquels il passe à des instants connus, on pourra, par celte simple observation, resserrer linter- valle de temps dans lequel Pace ident a dù se pro- duire. Qu'il s'agisse maintenant de l'apparition d’une éloile cac hée derrière la lune; regardons le point où elle doit apparaître à travers un diaphragme circulaire divisé en quatre quadrants et lournant en une seconde, un mécanisme d'horlogerie, indépendant de l'obser- vateur, et muni au besoin d'un appareil enregistreur, est disposé de telle sorte que le point étudié entre dans le premier quadrant au commencement de chaque seconde : puis il les parcourt tous les quatre succes- sivement. Il suffira, pour avoir l'instant de l'apparition à 2 de seconde près, de savoir dans quelle seconde elle a eu lieu, et dans quel quadrant on à d’abord vu l'étoile. jo divisant chaque quadrant en cinq secteurs, on à le £ de seconde, Pour appliquer cette disposition à un télescope, on interposera sur le trajet des rayons lumineux un double prisme à réflexion totale, dont l'effet est de déplacer les rayons lumineux parallèles à l'axe, parallèlement à eux-mêmes et de les rejeter laté ralement. Le prisme tourne autour de l'axe optique : il est mü par un mou- vement d'horlogerie. L'image réelle de l’astre visé dans le plan focal principal, paraît ainsi décrire une cir- conférence sur un diaphragme fixe situé sur ce plan et divisé’en secteurs, La méthode dont M. Langley donne là le principe est susceptible d'une grande précision, et peut s'ap- pliquer à des phénomènes soudains de nature quel- conque, Bernard BRUNHES. . a heureusement surmorns BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX é 85 MWinkler (Clemens). — Réduction des combinai- sons oxygénées par le magnésium. Berichte … der deutschen chemischen Gesellschaft, pages 44, 120, D 12. 1890. Dans ce mémoire, qui sera suivi de plusieurs autres, “l'auteur s'est proposé de compléter sur la série des “combinaisons binaires oxygénées les résultats déjà connus relativement à l’action réductrice du magné- “sium à la température du rouge pour y rechercher une nouvelle preuve en faveur de la périodicité des élé- ments. M. Clemens Winkler à adopté dans cette étude la “division en familles telle qu'elle résulte de la classifi- “cation de M. Mendeleeff et nous résumerons sous forme “de tableaux les résultats obtenus pour chacun de ces sont facilement réduits par le magnésium sous l'influence de la chale ur, mais le bore n’est pas le produit final de la réaction : on obtient ainsi un borure de magnésium qui ne se comporte pas toujours de la méme manière vis-à-vis des acides. L’acide chlorhy- drique dégage de ce borure un composé gazeux de bore et d'hydrogène que l'auteur n’a pu jusqu’à présent obte- nir pur et dans certains Cas on à comme résidu de l’at- taque une combinaison solide de bore et d'hydrogène ayant pour formule ‘BSH. groupe est très vive et d’au- tant plus énergique que le poids moléculaire est plus élevé. Le thallium seul pré- sente une exception tenant à ce que le peroxyde de thal- lium se dédouble en oxygène et sous-oxyde avant que la température de réduction ne soit atteinte. Ce dernier oxyde est irréductible, mais si on le transforme en car- bonate la réduction s'effectue avec explosion. groupes. Groupe principal Carbonates COR? Lithium : 7.01. — Réac- tion explosive accompagnée de flamme. Le métal réduit disparait sous forme de va- peurs. Sodium : 23.00. — Vio- lente explosion et vaporisa- tion complète, mais conden- sation partielle sur les parties refroidies. Potassium : 89.03. — Réduction tranquille et sans danger, commencant à une chaleur modérée, sans flamme et sans vaporisation sensible du métal. Rubidium : 85.20. — Pas de réaction à une cha- Jeur modérée; à une tempé- rature plus élevée, réduction tranquille avec une faible incandescence et vaporisa- tion partielle du métal. Césium : 132.70. — Pas de réaction. PREMIÈRE FAMILLE Groupe :econdaire Oxydes R?0 Cuivre : 63.18. Détona- ton assez forte accompagnée de flamme et de projection partielle de la masse. Argent : 107.66. — Ré- duction presque explosive ac- compagnée de crépitements et de lucurs. Or : 196.20. — Décompo sition tranquille de l'oxyde sans intervention du magné- sium. Il est à remarquer que ces résullats sont en contra- diction avec ceux d’un travail de M. Warren (1) d’après lequel le magnésium ne doit réduire ni les alcalis, ni les terres alcalines. DEUXIÈME FAMILLE Groupe principal Oxydes RO La réduction par le mawné- sium des oxydes de ce groupe présente la, gradation sui- vante : Elle diminue du béryllium au magnésium pour lequel elle est nulle, augmente fai- blement de ce dernier au cal cium puis d'une manière plus sensible jusqu’au stron- tüum VJaugmentation étant enfin très marquée du stron- tüum au baryum. Laugmentation à partir du mawnésium eroit donc en méme temps que le poids atomique. Pour aucun de ces corps on n’observe la vaporisation du métal. TROISIÈME Groupe principal Oxydes R203 Bore : 10.90. — L'an- hydride borique et le borax Groupe secondaire Oxydes RO La réduction des oxydes de ce groupe secondaire est en wénéral très vive. Du zinc pour lequel elle estexplosive, elle diminue jusqu? au cad- mium pour croitre ct re- prendre à peu près la même intensité avec le mercure Le désagsement de chaleur qui accompagne la réaction vaporise partiellement ou totalement le métal libre. FAMILLE Groupe secondaire Oxydes R? 05 L'action réductrice du ma- gnésium sur les oxydes de ce (4) Warren, Chemicul News, 1889, 187. Aluminium : 27.04. L'alumine donne une poudre brune que lauteur regarde comme de laluminate de magnésium ou spinelle Mg AlO4. H. GAUTIER. Poisson (Albert). — Cinq traités d'Alchimie des plus grands philosophes. Traduits du latin (5 fr.). Chacornac, 11, Quai S. Michel, Paris, 1890. Nous signalons à nos lecteurs cet intéressant volume qui à une “grande importance au point de vue de l’his- Loire de la C himie. Avec la « Collection des Alchimistes grecs » de M, Berthelot on avait appris à connaitre les théories chimiques de l'antiquité (ur, 1v et ve siècle; avec l’ouvrage de M. Poisson ce sont les traités d’AI- chimie de Roger Bacon, Arnauld de Villeneuve, Para- celse, Raymond Lulle, Albert le Grand. Arnaul de Villeneuve émet dans son traité « Le Chemin du Chemin » des idées particulières sur la dis- tillation ; dans tout corps qu'on distille l’eau, le feu et l'air passent; la terre reste comme résidu. Le traité de Roger Bacon est surtout théorique : on y ue clairement exposées les idées fondamentales de la philosophie hermétique : tous les corps sont compo- sés de soufre el de mercure, principes particuliers cor- respondant aux propriétés physiques et chimiques des corps. Mais ces deux principes eux-mêmes ne sont que moditications de la mälière, une en son essence. Albert le Grand brille surtout par la pratique et explique dans son chapitre « de la sublimation du Mer- cure», la préparation du sublime corrosif aussi nettement que possible; de mème pour l’eau régale et l'acide azo- tique. Raymond Lulle, dans la « Clavicule » parle de la chaux d'argent et de divers acides, Enfin, Paracelse faisant agir à chaud l'eau régale sur le Cinabre, signale le dégagement d'un esprit coloré, qu'il appelle lion rouge, fumée rouge, élément du feu. C'est le gaz hypoazotique. Tel est en résumé l'ouvrage de M. Albert Poisson. Ce n’est, il est vrai, qu'une traduction : mais ce livre fait connaître l'Alchimie sous un jour nouveau ; à ce titre ilintéressera vivement{ous ceux qui étudient la chimie, G. Nav. 8° Sciences naturelles. Be Stefani (C). — Le Pieghe delle Alpi Apuane, Contribuzione agli studi sull’ origine delle Mon- tagne. gr. ün-8, 115 p. deuæ planches de coupes etune carte géol. en couleurs au 4:25,000€, Florence, Le Mon- nier, 1890. (Pubblicazioni del R. Itituto di Studi Supe- riovi pralici in Firenze, Sezione di Sc. fis. e. nat.). Les Alpes apuennes des géologues italiens ne font pas partie de la chaine des Alpes proprement dites, mais bien de la zone intermittente de massifs anciens qui accompagnent à distance la chaine des Apennins, du côté de la mer Tyrrhénienne; ce petit groupe mon- lagneux se dresse entre les vallées du Serchio et de la Magra, au N. de Pise et à l'E, de Carrare. L’excellente 86 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX monographie de M. de Stefani est principalement desti- née, comme son titre l'indique, à l'étude de ses carac- tères lectoniques. Dans une première partie, l’auteur passe en revue les terrains successifs, en commencant par les plus an- ciens ; la série stratifiée des Alpes apuennes présente denombreuses lacunes; elle commence avec le Silurien moyen fossilifère (Orthoceras, Crinoïdes) dans lequel sontintercalés de véritables gneiss microcristallins, ana- logues aux roches considérées par M. Zaccagna comme permiennes, dans les Alpes Occidentales, Au-dessus vient une série triasique extrêmement puissante, comprenant des calcaires, des dolomies, des cipolins, des Jaspes, des phyllades, quartzites, micaschistes, etc.. et dont font partie les célèbres marbres de Carrare ; des fossiles assez nombreux permettent de paralléliser ces couches avec le Trias moyen et supérieur des Alpes Orientales. L'infralias, puis différents termes de la sé- rie jurassique et crétacée, enfin des étages tertiaires très variés affleurent successivement sur les bords du noyau triasique. Passant ensuite à l'étude des faits de structure, M. de Stefam fait connaitre en détail les plis quientrent dans la constitution de ce petit groupe montagneux. Pour faciliter la description, il désigne les anticlinaires par des majuseules se suivant dans l’ordre de l'alphabet et les synclinaux par la réunion des deux lettres affec- tées à chacun des anticlinaux adjacents, Par le soin apporté au dessin des contours, la carte de la partie centrale des Alpes apuennes jointe au texte est un vrai modèle; l’auteur n'a pas négligé, comme on le fail trop souvent, d'y indiquer la trace des coupes et Paf- fleurement du plan axial des plis, ainsi que le sens dans lequel ces derniers sout déjetés. Parmi les faits les plus intéressants que cette carte permet de constater, on doit signaler l'allure curvili- gne des axes anticlinaux autour des deux centres de Monte Corchia et surtout du Monte Sumbra : les deux ailes de plis tournants sont amenées à s’y opposer l’une à l’autre, comme dans les exemples récemment dé- couverts en Provence par M. Bertrand. L'examen du même document met en pleine lumière, bien que sur une petite échelle, plusieurs vérités capitales, dont toutes les recherches orogéniques contemporaines tendent de plus en plus à faire ressortir l'importance : telles sont: l’absence de vraies failles comme dans toutes les régions plissées typiques, -— le rôle des ren versements et des actions horizontales, — la nécessité où l’onse trouve de conclure avecprudence,dans les pays dont la coupe-type n’est pas connue, si l’on ne veul pas s’exposer à confondre les plans de superposition normale et les plans de superposition mécanique, sen- siblement parallèles aux premiers et irrégulièrement découpés comme eux par l'érosion, —la fréquence des plis couchés, — l’absence de parallélisme rigoureux pour les plis synchroniques, — la formation des vallées transversales ef de l’ensemble du modelé topographique par voie de simple excavation superficielle, sans rap- ports directsavecles phénomènes d'origine interne, etc. Ces points, et beaucoup d’autres conséquences intéres- santes des faits observés, sont traités avec les dévelop pements nécessaires dans la seconde partie de l’ou- vrage, qui justifie pleinement, comme on le voit, son sous-titre de Contribution à l'étude du mode de formation des montagnes. Emm. de MARGERIE Klebs, Expériences sur la reproduction de l’Hy- drodictyon utriculatum. Ein Beitrag zur Physio- logie der Fortpflanzung. Flora, 1890, n. 5. L'auteur s’est proposé de rechercher dans quelle me- sure les conditions extérieures influencent la repro- duction. Ses recherches ont été faites sur l'Hydrodic- tyon utriculatum, algue de la famille des Cénobiées, dont le thalle consiste en un réseau à larges mailles formant un sac irrégulier, Les Hydrodictyées se multiplient par reproduction asexuelle au moyen de zoospores et par reproduction sexuelle à l’aide de gamètes dont la fu- sion produit un œuf, Les recherches de l’auteur dé= montrent que l'alternance des générations asexuelles et sexuelles n'est pas régulière, ni déterminée d'une facon immuable par lhérédité ; elle est sous la dépen- dance immédiate du milieu : ce sont les conditions ex- térieures qui font apparaître tantôt l’un, tantôt l’autre de ces deux modes de multiplication. La méthode suivante permet de provoquer à coup sûr la formation de zoopores : on cultive l’algue quel= que temps dans une solution de sels nutritifs à 0,5 04, ou à 4 2/4, puis on les porte dans l’eau pure. Le mé- lange de sels est fait d'une partie d’azotate de potas= sium, 1 p. de sulfate de magnésie, 1 p. de phosphate de potassium et # parties de nitrate de calcium, Au bout de quelque temps de séjour dans la solution, les cellules acquièrent une tendance marquée à la produe- tion de zoospores; mais le phénomène s'arrête là : pour qu'il aille plus loin, pour que les zoospores se for: ment, il faut faire passer les cellules de la solution sa- line dans l’eau pure. Cependant l’eau pure peut être remplacée par une solution de sucre même à 10 0, : ceci prouve que ce n'était pas la concentration du mi- lieu qui empêèchait la production de zoospores lorsq:e les cellules se trouvaient dans la solution saline. La tendance à la production de zoospores s'établit dans tous les réseaux d’Hydrodictyon, quelle que soit leur provenance, quelles que soient les conditions dans les- quelles ils ont vécu antérieurement à l'expérience : le phénomène S'accomplit avec la certitude et la constance d'une réaction chimique. D'autres sels, moins importants au point de vue de la nutrition, ont peu ou n’ont pas d'action, La chaleur intervient dans le phénomène comme dans toute autre manifestation vitale. La lumière est un facteur indis- pensable ; il est probable qu'elle agit en favorisant les actions chimiques dans la cellule et surtout en aeti- vant les oxydations et les réductions. M. Klebs cherche en vain à expliquer pourquoi le pas- sage de la solution saline dans l’eau pure permet aux cellules de produire des zoospores. D’après lui, l’action des sels nutritifs sur la formation des zoospores impli- que leur passage au travers du protoplasme et leur pénétration dans le suc cellulaire. Croyant que l’action de Peau était due à un changement dans la pression osmotique du suc cellulaire, il a employé la méthode de la plasmolyse pour déterminer la valeur de cette pression, Il a constaté que la pression osmotique qui règne dans les cellules de l'Hydrodictyon varie considé rablement suivant les conditions dans lesquelles les cellules ont antérieurement vécu. Ce fait, intéressant en lui-même, ne donne nullement l'explication du phé- nomène. L'auteur recherche ensuite linfluence de substances organiques sur la formation des zoospores. La maltose et la dulcite ont une action favorisante, mais cette action diffère essentiellement de celle des so- lutions salines en ce que ces corps déterminent d’em- blée la production des zoospores; de plus, la maltose et la dulcite n’agissent que lorsque les cellules ont déjà par elles-mêmes une certaine tendance à la re- production asexuelle. Pour former des zoospores l’algue doit nécessaire- ment se trouver dans un milieu liquide; cultivée dans une atmosphère humide, sur de la tourte par exemple. elle n’en produit pas. Passons maintenant à la reproduction sexuelle, Il est plus difficile de forcer l'Hydrodictyon à donner des ga- mètes que de lui faire produire des zoospores. En gé- néral, on y réussit en cultivant l’algue dans une solu- üion de sucre à 5 ‘/,. On peut aussi emp'oyer la glycé- rine, Certaines conditions de milieu prédisposent à la reproduction sexuelle : ainsi la culture dans un cris- tallisoir contenant peu d’eau et placé devant une fenê tre ensoleillée, La lactose, la mannite et l'érythrite fa. vorisent la production de gamétes; la glycose, la dextrine, la lévulose sont sans action. Fait important, la formation de gamètes est indépen- dante de Paction de la lumière, PER BIBLIOGRAPHIE. Vient ensuite une série d'expériences fort intéres- santes, Toutes les cellules d’un même réseau d’Hydro- dictyon sont des cellules sœurs ayant vraisemblablement les mêmes tendances héréditaires ; si donc on parvient à faire produire aux unes des gamètes, aux autres des zoospores, on est en droit de conclure que seules les conditions extérieures déterminent l'apparition de l'un ou de Pautre mode de reproduction. Or il est aisé de faire produire des zoospores à des Hydrodictyon dont certaines cellules sont en train de donner des gamètes, Il suffit pour cela de les placer dans la solution saline en pleine lumière, Il n’est pas aussi facile d'opérer la transformation inverse; cependant on y parvient de la facon suivante : un réseau d'Hydrodictyon est cultivé dans une solution de maltose ou de dulcite; il s'y dé- veloppe une tendance à la formation de 200Spores, on divise le réseau en deux moitiés ; on en laisse une part à la lumière, tandis qu'on porte l’autre à l'obscurité ; la prémière donne des zoospores, la seconde des ga mètes ; replacée à la lumière, cette dernière se remet à produire des zoospores, Il y a une restriction à faire à ce propos : il faut, dit l’auteur, pour que la transfor- malion s'opère, que les cellules n'aient pas au préala- ble une tendance trop marquée soit à la formation de zoospores, soit à la production de gamètes. Nous ferons remarquer qu'il y a là une certaine obscurité résultant de l'impossibilité où l’on se trouve de reconnaitre à des caractères apparents si la cellule possède telle ou telle tendance, Autre expérience imporlante : on prend des Hydro- dictyon qui ont séjourné dans la solution saline; ils y ont acquis, comme on sait, une grande tendance à la production de zoospores on la place dans Peau ou dans une solution de sucre à 5 (/, devant une fenêtre où la lumière est faible et Ja température basse, et qu'après une dizaine de jours on les transporte dans un thermostat à 28°, on voit se former très rapidement une grande quantité de gamètes. Dans la Nature, les facteurs se mélent et leurs com- binaisons varient constamment; il est donc bien diffi- cile d'obtenir de l'observation des résultats précis, Les conclusions finales de l’auteur sont les suivan- tes : il n’y à pas chez l’'Hydrodictyon de générations destinées d'avance à produire des gamètes ou des z00s- pores; bien plus, chaque cellule peut être amenée à présenter Fun ou l’autre de ces deux modes de repro- duction ; lPapparilion de corps reproducteurs asexués ou sexués dépend uniquement des conditions extérieu- res. Il n'y à pas non plus de succession régulière el déterminée de générations sexuées ou asexuées. Ch. Bonrper. Montillot(Louis), — L'amateur d'insectes, — Pr6- face par le Professeur Laboulbene, (Bibliothèque des Con- naissances uliles) 4 fr.J.-B. Baillière et fils, 19, rue Hau- tefeuille, Paris, 1890. Ce petit volume est, comme son titre l'indique, des- {iné aux amateurs; il débute par des notions succinctes de l’organisation des Insectes et les procédés de chasse et de récolte, L'auteur décrit ensuite les espèces que le collectionneur est susceptible de rencontrer, C'est en somme un bon pelit livre pratique. G. Naun. Bernard (Félix), Aude-nathwraliste au Muséum. — Recherches sur les organes palléaux des Gasté- ropodes Prosobranches. Thèse pour le doctorat és sciences, in-8° de 315 pages et 10 planches. Annales des Sciences naturelles, 7° Série, tome 9. G, Masson, 120, Boulevard Saint-Germain. Paris, 1890, Ce travail fait partie d’une série d’études compara- tives sur les Gastéropodes Prosobranches, M. Bernard à étudié pour sa part le manteau et les organes qui en dépendent : branchie, organe de Spengel (fausse bran- chie) et glande à mucus. La constitution typique d'un organe de Spengel bien ANALYSES ET INDEX 87 différencié (Cassidaire) est la suivante; c’est un organe allongé, dont la partie médiane est ‘occupée par un gros ganglion et qui porte latéralement des feuillets disposés par paires ; sur le côté inférieur de chaque feuillet se trouve un gros nerf, dont les ramifications se terminent dans de nombreuses cellules neuro-épi- théliales (cellules de Flemming). Chez les Prosobranches inférieurs (Diotocardes) l’or- gane de Spengel est rudimentaire ; une portion seule- ment d'un des nerfs émis par le ganglion branchial devient sensorielle (minimum chez Fisswrella,maximum chez Haliotis). I ne peut être question d° homologuer cette région sensorielle à des branchies rudimentaires, comme on l'avait proposé pour l’Haliotis. Chez les Monotocardes, Lypes plus normaux, il n'y à plus de gangiion branchial : la zone sensorielle des types précédents s’est différenciée en un organe ter- minal,où aboutissent de gros nerfs (organe de “Spengel. organe de Lacaze- Duthiers). Chez les Pulmonés aqua. tiques, comme l’a découvert M. de Lacaze-Duthiers, il y a une invaginalion épithéliale pénétrant dans un gan- glion ; chez la Paludine, le long bourrelet qui repré- sente l organe de Spengel montre jusqu'à une vingtaine de culs-de-sac. Enfin toute trace de cet appareil manque complètement chez les Pulmonés terrestres (sauf Cyclostoma), les Hélicinidés et Cyclophoridés, également terrestres, et chez les Succinées aquatiques, L'auteur étudie ensuite la branchie, dont il décrit avec soin l’épithélium externe, avec ses cellules indif- férentes, mucipares et neuro-épithéliales ; lamembrane de soutien qui s’épaissit considérablement (tissu con- jonctif anhiste) au pourtour de la lacune efférente ; la couche musculaire et notamment les trabécules, tra- versant la branchie perpendiculairement aux faces, et enfin le système nerveux. Comme l’auteur le fait remar- quer avec raison, il ne faut point parler de capil- laires branchiaux ; c'est un réseau entièrement lacu- naire. A propos de la glande à mucus, M. Bernard s'occupe du processus même de la sécrétion du mucus; les cel- lules mucipares sont toujours dépourvues de cils ; la sécrétion s'opère par le rejet du mucus, s'échappant par une ouverture pratiquée au sommet de la cellule : le noyau et le protoplasma restent en place et peuvent continuer à sécréler. M. Bernard termine par la synthèse de ses résultats histologiques et morphologiques : 1° Il montre que. partoutouüil y a des cellules sensoriellesde Flemming,ii se manifeste une certaine sensibilité tactile et une 1r- ritabilité que lon peut considérer comme olfactive ; les organes de Spengel représentent un haut degré de dif- férenciation sensorielle, 2° L'histologie du tissu con- jonctif montre une identité complète pour les Proso- branches avec les résultats obtenus par Brock chez les Pulmonés et les Opistobranches. 3° Les lacunes san- guines sont des espaces creusés dans le tissu conjonctif : dans quelques cas elles paraissent dépourvues d’endo- thélium ; chez quelques types (Cassidaire, Buccin) les imprégnations d'argent révèlent dans les sinus un vé- ritable endothélium, 4° Un chapitre sur la comparaison morphologique du système veineux palléal chez les Diotocardes et les Monotocardes, 5° Enfin les applica- tions à la classification ; M. Bernard adopte complète- ment la classification proposée par M. Rémy Perrier (modification de celle de M. Bouvier) dont le travail a été résumé récemment dans celte Revue. Par ses recherches si détaillées et si précises, M. Félix Bernard a ajouté un chapitre des plus intéressants à l'histoire si compliquée et si difficile du grand groupe des Gastéropodes. L. CuÉNoT. Duval (Mathias). — Le Placenta des Rongeurs. — Jowrnal de l'Anatomie et de la Physiologie. Juillet 1889, novembre 1889. janvier 1890. Comptes-rendus de la So- ciété de Biologie, octobre, novembre el décembre 1890. Paris. Le savant professeur äe la Faculté de Médecine a + “ ve - LR 88 BIBLIOGRAPHIE. -— ANALYSES ET INDEX entrepris l'étude du placenta des Rongeurs; dans un premier mémoire, il a fait connaître ses recherches sur l’évolurion du placenta du lapin, et il vient de publier récemment quelques notes qui nous promettent d'aussi intéressants résultats en ce qui concerne le placenta du rat et de la souris. Le fait fondamental, celui qui domine tous les autres, c’est que l'élément anatomique du placenta est d'ori- gine ectodermique et fœtale, Au cours du développement du placenta, les éléments anatomiques maternels sont graduellement remplacés par les éléments ectoder- miques fœtaux, si bien qu'à la période d'achèvement du placenta celui-ci est, pour ainsi dire, lout entier de constitution fœtale. C’est un composé de lacunes et de canaux remplis de sang malernel, mais dont la paroi est formée d'éléments dérivés de l’ectoderme du fœtus; dans ces lacunes et ces canaux baiïgnent à nu, e’est-à- dire sans autre intermédiaire que leur endothélium, les capillaires fætaux. Suivant l'expression de M. Mathias Duval le placenta « représente à son origine une hémor- rhagie maternelle circonscrite et enkystée par des élé- ments fætaux ectodermiques », formule qui, d’après les récentes recherches de M. Duval, est chez le rat et la souris, non plus une image schémalisant la signifi- cation du placenta, mais l'expression même des faits. Dans un chapitre critique du plus haut intérêt, le savant embryologiste montre que ces notions si nou- elles sont applicables non seulement aux Rongeurs mais à tous les mammifères. L'auteur divise en trois périodes Ja marche de l’évo- lution du placenta : 1° période de formation, 2° période de remaniement, 3° période d'achèvement. Tout à fait au début, l'œuf est complètement libre dans la cavité utérine, mais la muqueuse de lPutérus offre sur son bord mésométrique (bord adhérent de la corne utérine) deux lobes renflés ou cotylédons mater- nels séparés par un sillon intercotylédonaire, Il faut connaître la structure de ces cotylédons pour com- prendre les diverses phases de l’évolution du placenta. Ils résultent d'une hypertrophie du chorion de la muqueuse utérine et consistent en un tissu cellulaire lâche, très vasculaire, Les vaisseaux profonds se dis- tinguent, par une adventice formée d’une ou plusieurs couches de cellules vésiculeuses, des vaisseaux super- ficiels réduits à leur paroi endothéliale. Il y a donc à distinguer deux régions dont nous verrons s’accentuer ultérieurement les caractères distinctifs. Une troisième région est représentée par l’épithélium de la muqueuse qui forme de nombreuses saillies et des invaginations ou glandes peu profondes. Point important à noter : dès cette époque, l’épithélium au niveau des saillies de la muqueuse est profondément altéré, Ses cellules ont perdu leurs limites et constituent un revètement homo- gène où les noyaux occupent la face profonde, _ Période de formation. — De la fin du septième jour au neuvième Jour, l'œuf se fixe aux cotylédons mater- nels. A cet effet, l’'ectoderme à une certaine distance de l’embryon s'épaissit en formant de chaque côté de celui-ci une sorte de croissant (croissants ectoplacen- taires). Ces deux croissants qui sont la première ébauche de Pectoplacenta correspondent en position aux colytédons maternels et l'embryon se trouve par suite entre eux en regard du sillon intercotylédonaire. L'ec- toplacenta en s’épaississant se moule sur les saillies des cotylédons, y détermine la disparition de l’épithélium et pénètre dans les invaginations glandulaires. En même temps, sa structure se modifie considérablement. D'abord formé de cellules uniformément polyédriques, il se montre bientôt divisé en deux assises, une pro- fonde dont la structure n’a pas varié, et une superficielle où les parois des cellules ont disparu ne laissant plus qu'une couche protoplasmique homogène avec nom- breux noyaux. L'auteur désigne cette couche sous Le nom de couche plasmodiale de l’ectoplacenta pour la distinguer de la couche cellulaire profonde. Cette couche plasmodiale va prendre dorénavant une importance considérable. Elle pénètre tout d'abord dans les invaginations glan- dulaires des cotylédons maternels et envoie, d’autre part, après la disparition de l’épithélium de la muqueuse, des poussées de prolifération dans l'épaisseur du cho- rion, Ces poussées arrivent au contact des vaisseaux superficiels, les engiobent, déterminent l’atrophie de leur endothélium et les transforment ainsi en lacunes. L’ecloplacenta est donc à cette époque une sorte de coulée ectodermique, épaisse, d’origine fœtale, par- courue de lacunes remplies de sang maternel (lacunes sangui-maternelles). Période de remaniement. — Elle s'étend du dixième jour au vingt-cinquième jour. Au début de cette période, les cotylédons maternels ont encore augmenté d'épais- seur, L'’adventice des vaisseaux profonds s’est accrue et ceux-ci forment une zone bien distincte que l’auteur désigne sous le nom de région des sinus utérins des coty- lédons. Les vaisseaux superficiels étaient, avons-nous dit, limités simplement par leur endothélium. Nous avons vu que les plus proches de la surface de la muqueuse ont été envahis par la couche plasmodiale ectoplacentaire. Or, entre la région des sinus utérins et l’ectoplacenta en développement, on voit se diffé- rencier une végion intermédiaire caractérisée par la transformation des cellules conjonctives étoilées en volumineuses cellules vésiculeuses à plusieurs noyaux. Ces cellules vésiculeuses forment un tissu homogène dans lequel se voient les sinus vasculaires. Ceux-ci se font remarquer par la structure de leur paroi dont l’en- dothélium est bientôt remplacé (onzième jour) par une couche protoplasmique parsemée de noyaux et qui n'est autre chose qu'un revêtement formé par l’ectopla- centa ayant coulé pour ainsi dire des lacunes sangui- maternelles décrites précédemment dans les sinus intermédiaires qui leur font suite. Ici comme là, il détermine la disparition de l’endothélium et forme aux sinus une couche plasmodiale endovasculaire, En même temps que progresse celte invasion de la couche plasmodiale, l’ectoplacenta est le siège de profondes modifications qui caractérisent la période de remanie- ment et qui ont pour point de départ l'entrée en jeu des éléments mésodermiques de la lame fibro-cutanée. Ceux-ci pénétrant l’ectoplacenta perpendiculairement à sa face fœtale y envoient des prolongements qui tendent à le morceler. Bientôt des vaisseaux allantoïdiens se joignent aux éléments mésodermiques et il se forme ainsi une série de colonnes comprenant chacune une lacune sangui-maternelle séparée des voisines par une cloison mésodermique vasculaire. La hauteur de ces colonnes est limitée, les cloisons mésodermiques ne s'étendant jamais jusqu'à la région intermédiaire des cotylédons dont leur extrémité profonde reste séparée par une lame d’ectoplacenta non morcelée formant la lame limilante ectoplacentaire. Les colonnes ectoplacen- taires ou lobes passent, du douzième au quatorzième jour, à l’état de compleæus tubulaire. Le mécanisme de cette transformation est le suivant : d’une part, des lames mésodermiques émanées des cloisons interco- lonnaires pénètrent la masse de la colonne et la divisent en segments. D'autre part, il se fait des végétations plasmodiales sur les parois ectoplasmiques des lacunes colonnaires sangui-malernelles. Finalement, chaque colonne primitive est subdivisée en plusieurs tubes à peu près parallèles limités par une couche plasmodiale ectoplacentaire et séparés par des cloisons mésoder- miques vasculaires. Chaque colonne est donc devenue un complexus tubulaire ou lobe, Ajoutons que le pro- cessus s’est localisé dans les régions moyennes des colonnes, de telle sorte que ces complexus tubulaires aboutissent à leurs deux extrémités à des lacunes plus larges non cloisonnées, les confluents. Vers le quinzième jour commence un nouveau fra- vail semblable au précédent qui aboutit à la division des lobes ou complexus tubulaires en lobules ou com- pleæus canaliculaires. Chaque tube se divise en plusieurs canalicules. Mais tandis que pour la formation des tubes, le tissu mésodermique envoyait à la fois des PR 7 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 89 éléments cellulaires et des vaisseaux, pour la formation des canalicules, il n’envoie que des vaisseaux. Un lobule n'est done qu'un complexus de canalicules à paroi plas- - modiale séparés par des vaisseaux fœtaux. Période d'achèvement. — Elle se caractérise par une dernière simplification consistant dans la fonte et la résorption graduelle de la couche plasmodiale des canalicules si bien que le placenta consiste en défini- live en canaux remplis de sang maternel dans lesquels baignent directement les vaisseaux fœtaux, L'endothé- lium des vaisseaux sépare seul ainsi Le sang fœtal du sang maternel, condilion particulièrement favorable et que nous avions annoncée au début de ce résumé, Si l’on examine ce qu'est à celte époque le placenta, on constate que par suite du développement énorme qu'a pris l’ectoplacenta, la région intermédiaire puis la région des sinus utérins se sont considérablement atrophiées jusqu'à permettre de considérer le placenta comme à peu près entièrement formé par l'ectopla- centa. En fait, ies cotylédons ulérins ont disparu, M. Mathias Duval appelle toutefois l’attention sur une couche peu épaisse (couche vésiculeuse permanente ou protectrice) qui s’est différenciée dès le début de la période de remaniement à la face profonde des cotylé- dons, au contact de la musculature, Cette couche est caractérisée par l’état vésiculeux de ses cellules et par ses lacunes peu dilatées que n’envahit jamais la couche plasmodiale ectoplacentaire, Aussi ne subit-elle pas les phases de régression qui détruisent les autres parties des cotylédons maternels, Elle constitue une sorte de plateau solide où le petit calibre des vaisseaux aura pour but de réduire au minimum l'hémorrhagie au moment où celle couche se séparerà de la musculature pour suivre les autres parties du placenta lors de la parturilion. Chez le lapin, lorsque le placenta s'est détaché, la plaie produite est immédiatement recou- verte par la muqueuse voisine qui glisse et vient revè- tir la surface mise à nu, Il n’en est pas de même chez le ral et la souris où il reste toujours au niveau de la plaie placentaire une petite région à nu, Dans ses ré- centes recherches, M. Duval à pu établir que la répara- tion de l’épithélium en cette région s'opère par trans- formation des cellules conjonctives du chorion de la muqueuse. Ce mode, invraisemblable au premier abord, s'explique fort bien si, avee M. Duval, on se souvient que l’épithélium utérin est d'origine mésoder- mique, et que, dès lors, rien n'empêche d'admettre qu'il peut se réparer par transformation de cellules mésodermiques. M. Mathias Duval donne encore d’intéressants détails sur le sens de la cireulation dans le placenta. Le sang fœtal marche en sens inverse du sang maternel. Divers points relatifs aux autres formations fætales sont aussi traitées avec soin. Nous signalerons en particulier la description du singulier phénomène de l’invagination de lhémisphère supérieur de l'œuf dans l'hémisphère inférieur, mais sans y insister, l'analyse de ce point pouvant être reprise à propos de la question de l'inver sion des feuillets chez les Rongeurs que l’auteur doit traiter tout au long dans un futur mémoire et à laquelle linvagination en question chez le lapin peut être com- parte, D' H. BEAUREGARD. 4° Sciences médicales. Cristiani (Hector). — Gastrostomie pour carcer de l’æœsophage. Revue médicale de lu Suisse Romande, Genève, 20 juillet 1890. L'opération faite par M. Cristiani est un succès opé- ratoire de plus à l’actif de la gastrostomie, qui fait peu à peu son chemin malgré Îles réquisitoires violents qu'on a dressés contre elle. M, Cristiani adopte le principe de l'invasion très petite de lesto- mac, posé par M. Terrier, mais rejette la suture de la muqueuse à la peau, qu'a préconisée le même chirur sien. Il place une sonde dans la fistule, ce qui nous semble inutile; la sonde ne pouvant, comme le fait s’est du reste produit dans l'observation relatée, que dilater l'orifice fistuleux, Un orifice petit placé près du cardia, reste parfaitement ferme et ne laisse abso- lument rien sortir du contenu stomacal comme nous avons pu le constater chez une de nos opérées; c'est là un fait d’une importance capitale, car il permet de laisser de côté toutes les discussions sur les auto-di- gestions de la peau, que M. Cristiani croit dues à l’action d’un suc xastrique acide. Malgré le succès qu'il a ob- tenu, M. Cristiani pense qu'on ne doit recourir à la gastrostomie que dans les cas de rétrécissements in- franchissables, opinion qui nous semble un peu timide, convaincu que nous sommes de l’absolue bénignité de cette opération lorsqu'elle est pratiquée sous le couvert de certaines précautions, D' HENRI HARTMANN. Lannelogue ct Achard. — Étude microbiologi- que de dix kystes congénitaux. Annales de l'Institut Pasteur, 1890. Les auteurs, dont la compétence en fait de kystes congénitaux est de premier ordre, ont mis à profit leurs savantes recherches sur ces curieuses productions pathologiques pour tàcher d'élucider quelques notions encore obscures de bactériologie. L'organisme à l'état normal est-il absolument protégé contre l'invasion mi- crobienne par l'intégrité de son revêtement epithélial interne et externe? Les tumeurs susceptibles de géné- ralisation à distance peuvent-elles avoir une origine pa- rasitaire ? ï Les auteurs ont étudié à ce point de vue dix kystes congénilaux, variables quant à leur espèce, Sur ces dix cas, huit ont donné un résultat tout à fait négatif comme recherche bactériologique. En ce qui concerne les deux cas où l'examen bactériologique a révélé l'existence des microbes, il semble que les micro-orga- nismes n'ont pénétré dans le kyste que secondaire- ment, Dans un cas, en effet, il y avait un orifice com- muniquant avec l'air extérieur; dans l'autre on voyait une cicatrice, indice très probable d'une communica- lion antérieure. MM. Lannelongue et Achard sont donc autorisés à conclure que la cavité des kystes congénitaux ne ren- ferme pas de microbes, tant qu'elle n’a pas été mise en communication avec le monde extérieur, D' H. Durir, Æchistowitch (D), — de Saint-Pétershourg. Etudes sur la pneumonie fibrineuse, Awnales de l'Institut Pasteur, 1890. Ce travail, fait à l’Institut Pasteur sous lPinspiration et la direction de M, Metchnikoff, est une contribution à l'étude de la phagocytose. L'auteur s’est demandé quelle part prennent les phagocytes dans la lutte de l'organisme contre le Streptococcus lanceolatus. Ses conclusions se résument ainsi: On trouve la même différence dans les rapports du Diplococeus avec les éléments cellulaires chez les animaux réfractaires et non réfractaires dans les poumons, le tissu sous-cu- tané et la chambre antérieure de l'œil, Chez les animaux non réfractaires, les coccus n'amènent qu'une réaction inflammatoire locale insignifiante, peu de réaction phagocylaire. Au contraire chez les animaux réfrac- taires, il se développe à l'endroit de l’inoculation un très vif processus inflammatoire local, avec mobilisa- tion en masse des leucocytes et un phagocytisme plus ou moins prononcé, En outre l'introduction des diplo- coques dans la chambre antérieure de l'œil permet de constater que ce milieu dépourvu de leucocytes est un milieu favorable pour leur développement aussi bien chez les animaux réfractaires que chez les non-réfrac- taires. C'est là, on le voit, un résultat qui vient donner un appui sérieux à la théorie phagocytique, Il est bien entendu que l'organisme étudié sous le nom de Streplococcus lanceolatus par M. Tchestowitch est le Diplococcus pneumonæ, de Weichselbaum Stern- berg etc... et de tous les auteurs, Dr H. Dugier, 99 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADEMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 26 janvier 1891 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M, E. Picard : Sur la représentation approchée des fonctions. — M. E. Amigues : Démonstration purement algébrique du théorème fondamental de la théorie des équations, — M. H. Minkowski : Théorèmes arithmétiques. — M. À. de Saint-Germain ajoute quelques détails à la théorie donnée par M. Resal sur le mouvement d’un double cône qui parait remonter sur deux droites éga- lement inclinées. — M, A. Potier donne une solution générale du problème que soulève l'énoncé du principe d'Huygens : Rechercher comment doivent être distri- buées sur une surface enveloppant les centres d’ébran- lement, les sources fictives qui leur sont équivalentes pour les points extérieurs à cette surface, ainsi que la nature du mouvement produit par chacune de ces sources. — M. Phillips avait obtenu l’isochronisme des oscillations du pendule, petites ou grandes, en y adaptant un ressort agissant sur la tige du pendule par une bielle, I avait établi la théorie de ce mécanisme dans une note que M. Wolf présente à l’Académie, en ajoutant que les expériences faites à l'Observatoire sur cet appareil ont fait constater que l’isochronisme esl réalisé, — M. G. Defforges a déterminé la loi de varia- tion de la durée d’oscillation et de l'amplitude des pendules de Brunner, en fonction de la pression du fluide environnant. — M. F. Gonnessiat : Sur l’équa- tion personnelle dans les observations de passages. — MM. G. Rayet et L. Picard : Observalion des comètes Zona et Brooks (1890, ID) faites au grand équatorial de l'Observatoire de Bordeaux. — M. Flammarion fail observer que l’astre signalé par M. Lescarbault dans la constellation du Lion, comme une étoile nouvelle, n’est autre que Saturne. 20 SGiENCES PHYSIQUES. — M. A. Cornu entretient l'Académie d’une expérience récente de M, Wiener qui, en faisant tomber un faisceau de lumière pola- risée sur un miroir à 45° et imterposant une pellicule photographique transparente près du point d’inci- dence, oblient des franges lorsque le plan de polari- sation coïncide avec le plan formé par le rayon incident et le rayon réfléchi; l'interférence qui se produit dans ce cas démontre que les vibrations de la lumière pola- risée se font normalement au plan de polarisation ; M. Cornu remarque, en outre, que cette expérience précise par un fait palpable le caractère dynamique de la vibration lumineuse, — M. Ch.-Ed. Guillaume éla- blit une formule destinée à la détermination exacte de la résistance d'une dérivation, pour servir dans les cas où on emploie une caisse de résistance à double entrée à donner des valeurs fractionnaires de lunité, — M. Renou, à propos de la note de M. Guillaume du 12 janvier, rappelle que la tige correctrice sans réser- voir, appliquée à la correction de la tige émergente d’un thermomètre, est employée à l’Observaloire du Pare Saint-Maur depuis 1881, — M. Moureaux signale que la courbe du magnétographe de l'Observatoire du Parc Saint-Maur a présenté le 15 janvier une légère oscillation en coïncidence exacte avec le tremblement de terre qui s’est fait sentir ce jour-là en Algérie. — M. E. Semmola présente diverses considérations sur la différence des hauteurs barométriques entre Naples et l'Observatoire du Vésuve, — M, D. Gernez : Re- cherches sur l'application de la mesure du pouvoir rotatoire à la détermination des combinaisons formées par les solutions aqueuses d'acide malique avec les phosphomolybdates alcalins blancs, — M. Ostwald introduit une réclamation de priorité en son nom et en celui de ses élèves, relativement aux lois signalées par M. D. Berthelot (Comptes Rendus, 5 janv. 1891) sur les conductibilités des acides organiques isomères et de leurs sels, — M. D. Berthelot indique les diffé= rences qui distinguent son travail de celui de M. Ostwald, — M. A. Minet décrit un nouveau dispositif pour l'électrolyse du fluorure d'aluminium fondu, au moyen duquel il obtient un bien meilleur rendement. — M. Scheurer-Kestner, en employant la bombe calo- rimétrique, avec les méthodes récentes, à la détermi- nation de la chaleur de combustion de la houille, a obtenu des chiffres inférieurs de 1 à à 0/0 à ceux qu'il avait obtenus il y à vingt ans avec l'appareil de Favre et Silbermann. Il fait remarquer que cette correction w'infirme pas les conclusions qu'il avait posées relati- vement à la perte de chaleur par les chaudières à va- peur. — M. Prud'homme a étudié les divers oxydes métalliques employés en teinture comme mordants; il montre que les nuances obtenues avec ces mordants sont en relation avec le poids atomique du métal et que les gammes de nuances répordent à la classifi- cation de Mendeleieff, — MM. Berthelot et André ont étudié la facon dont les terres végétales, soumises à des traitements variés par les alcalis et les acides, forment de l’ammoniaque; des résultats complexes qu'ils ont obtenus, ils tirent des conclusions sur l’état dans lequel se présente l’azote de l'humus, et l'utili- sation de cet humus par les plantes. — M. Berthelot a continué ses recherches sur les composés azotés vola- tils émis par la terre végétale, En opérant cette fois sur des sables argileux ou des argiles pauvres en azote, il a constaté encore une exhalaison notable de ces composés; mais, à l'inverse de ce qu'avait donné une terre végétale vingt fois plus riche en azote, la propor- tion de l'azote organique, dans ces composés, l’em- porte sur l'azote ammoniacal. : 39 SCIENCE: NATURELLES. — MM. Vaillard et Vincent présentent les conclusions d’un ensemble de recher. ches expérimentales sur le tétanos; les accidents sont dus à la toxine sécrétée par le mierobe et non à la pullulation du microbe dans l'organisme; cette pullu- lation n'a pas lieu, car les tissus ou humeur de lani- mal inoculé ne peuvent servir à transmettre l'infection ; le microbe spécifique ne peut se développer sur une plaie et de là empoisonner l'animal que s'il y est asso- cié aux divers microbes vulgaires: ce fait, nouveau, explique comment la souillure des plaies par la terre ne produit que rarement le tétanos, malgré l'abondance du bacille de Nicolaier. — MM. M. Arthus el C. Pa- gès exposent une théorique chimique de la coagula- tion du sang, se basant sur ce fait, que le sang traité par les oxalates ou les fluorures alcalins en petite quan- lité ne se coagule pas. Ils considèrent que la formation de fibrine solide résulle de la combinaison d’une subs- lance fibrinogène, sous l'influence d’un ferment, avec la chaux, qui serait la substance fibrinoplastique de Schmidt, — M, H. Arnaud pense que la propriété du sang qui disparaît par l’ablation du pancréas n'est pas la propriété de détruire le sucre, comme le veut M. Lé- pine, mais bien de tranformer ce sucre en glycogène. — M.X. Roule a étudié le développement des fibres musculaires chez le Porcellio (Crustacés) ; chaque fais- ceau primitif est formé par une cellule mésodermique autour du noyau de laquelle le dépôt de matière con- tractile se fait symétriquement. —M. V. Willem a observé les Gastéropodes pulmonés sous le rapport de la vision, les yeux de ces animaux sont extrèmement myopes; leur tégument est sensible à la lumière, — M, A, Mil- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES : 91 | ne-Edwards signale les ravages que le froid de cet hiver a causés dans la Ménagerie du Muséum ; beaucoup - de mammifères et d'oiseaux sont morts; d’autres au contraire qui n’élaient pas mieux protégés, ont résisté ” parfaitement. Parmi ceux-ci, il y à diverses espèces de - ruminants que leur résistance désigne pour l’acclimata- - Lion dans nos forêts; des expériences sont commencées à ce point de vue, —M. Emile Mer a suivi sur diverses » espèces de Conifères d’une station des Vosges les va- riations de la quantité d’amidon dans les feuilles. Les phases d’abondance ou de rareté sont multiples et ne - peuvent pas s'expliquer toutes par les conditions exté- rieures ou les actes importants de la végétation, tels que la floraison. — M. Dangeard décrit une nouvelle bactériacée verte; il présente diverses considérations sur les affinités de cette plante, — M. A. Lacroix ex- pose les conclusions générales, tirées de ses études sur les enclaves des trachytes du Mont-Dore, relativement aux modifications subies suivant que l’enclave est de nature quartzeuse ou volcanique, — MM. Ch. André el J. Raulin ont éludié sur des parcelles de terrain cons- tiluées artificiellement l'influence de la nature du ter- rain sur la température du sol. Mémoires présentés. — M, L. Cormerois adresse un Mémoire sur un nouveau système de ponts suspendus rigides, — M, Dabancourt adresse un Mémoire inti- tulé : Projet d’un hydromoteur aérien, — M, P. Juil- lard adresse une « Etude sur la circulation des élé- ments et la formation des Mondes, » Séance du 2? février 189 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. Mannheim : Remar- ques sur le déplacement d’une figure de forme inva- riable dont tous les plans passent par des points fixes. — M. H. Poincaré : Sur le développement approché de la fonction perturbatrice. — M. P. Tacchini : Sur la distribution en latitude des phénomènes solaires observés à l'observatoire royal du Collège romain, — M.Derrécagaix offre à l'Académie,au nom du ministre de la guerre, un recueil des tables de logarithmes à huit décimales que le service géographique vient d’é- diter; ce recueil contient les lagarithmes des fonctions circulaires dans le système de la division centésimale du quadrant et ceux des nombres entiers de 1 à 120,000: c'est un extrait vérifié des tables manuscrites à 14 dé- cimales de Prony, — M. Faye présente à l’Académie les deux volumes de la Connaissance des temps et l'Annuaire pour 1891 que le Bureau des longitudes vient de publier; il signale les documents nouveaux dont s'est enrichi ce recueil et Les notices qui le ter- minent. 2° SCIENCES PHYSIQUES, — M. G. Lippmann obtient l’image du spectre avec ses couleurs, image fivée et inaltérable, en se servant des procédés courants de la photographie actuelle, au moyen du dispositif suivant : la couche d’émulsion sensible, qui doit être d’une transparence parfaite, est mise en contact pendant l'exposition avec du mercure formant miroir; la lu- mière réfléchie sur ce miroir interfère avec la lumière incidente et forme un système de franges dans l’épais- seur de la couche sensible; à ces franges répondent après le développement et le fixage une série de dé- pôts d'argent dont l'intervalle est égal à une demi-lon- gueur d'onde de la lumière incidente ; la couche d’'é- mulsion est partagée par ces dépôts en lames minces qui ont précisément l'épaisseur nécessaire pour repro- duire par réflexion la couleur incidente; elles consti- tuent un réseau en profondeur; la pureté de la cou- leur est en raison du nombre des couches. — M. Edm. Becquerel fait remarquer que ce procédé de photogra- phie en couleur est entièrement différent de celui qu’il a découvert en 1848; les images qu'il obtenait sont inaltérables, mais à la condition d'être conservées à l'obscurité, — M. Ch. Antoine indique la facon dontil faut modifier les coefficients dans les formules qu'il a données de l’équation caractéristique des gaz et des vapeurs, pour accorder ces formules avec les expé- riences récentes de M. Amagat aux pressions élevées. — M. J. Léotard remarque que la température moyenne de l’année 1890 ayant été à Marseille au-des- sous de la normale, la moyenne du maxima a été au- dessus de la normale; c’est aux basses températures nocturnes qu'il faut rapporter la faiblesse de la tem- pérature générale. — M. E. Grimaux à étudié les dé- rivés oxyallylés de la diméthylaniline; il a constaté que les réactions et les couleurs formées diffèrent no- tablement sous l'influence du groupement oxyalcoo- lique et suivant la position de ce groupement par rap- port au groupe Az (CH#). — M. C. Tanret a isolé de la farine de seigle un hydrate de carbone du groupe des dextrines bien défini par ses propriétés physiques et chimiques: il lui donne le nom de Levasine, à cause de son pouvoir rotatoire gauche; il a retrouvé ce prin- cipe immédiat dans le blé et dans l'orge. 3° SCIENCES NATURELLES, — M. Viault, dans une précédente communication, avait signalé la richesse globulaire exceptionnelle du sang de Phomme et des animaux vivant sur les hauts plateaux du Pérou; des analyses des gaz du sang faites sur place au moyen de la pompe à mercure montrent que la quantité d'oxy- sène contenu dans le sang n’est pas inférieure à la nor- male, etque par suite l’anoxhémie des basses pressions n'existe pas pour les animaux acclimatés ; M. Viault, d'après ses recherches sur la capacité respiratoire, conclut que c’est moins à l'augmentation de celle-ci qu'à la grande division de l’hémoglobine qu'il faut rapporter cette adaptation, — M. Müntz rappelle que P. Bert avait constaté l'augmentation de la capacité respiratoire du sang chez les herbivores vivant aux grandes altitudes ; lui-même vient de vérifier le fait sur des lapins établis depuis sept ans au Pic du Midi ‘2877 m.); la proportion de fer du sang est presque doublée par rapport aux lapins vivant dans la plaine ; un séjour de six mois suffit pour produire une augmen- tation du mème genre, comme il la constaté sur les moutons transhumants; il rappelle que d’ailleurs la richesse du sang en hémoglobine varie considérable- ment suivant les conditions de la nutrition générale. — M, Giard discute l'opinion de M. Pizon sur le bour- seonnement des larves d’Astellium spongiforme (G. R. 19 janv. 1891), Il montre que chez les Synascidies, comme d'ailleurs chez d’autres invertébrés d’embran- chements divers, le processus embryologique est plus ou moins riche en phases suivant les conditions de la nutrition ; il propose le nom de pacilogonie pour cette particularité intéressante au point de vue de lembryo- génie comparée, — M. H. Fischer fait l'étude anato- mique du Nudibranche qu'il a décrit sous le nom de Corambe testudinaria se basant sur cette étude, il dis- cute la place du genre Corambe dans la classification. — M. J. Kunckel d'Herculais signale l'invasion de l’ex- trème sud algérien par le criquet pèlerin (acridium peregrinum); ces acridiens sont mangés par les indi- gènes, — M, G. Raulin a étudié comparativement la végétation du mais et de la betterave dans des terrains constitués artificiellement au moyen d'éléments divers. — M, H. Devaux a constaté la présence de l'oxygène, dans une proportion voisine de la composition de Pair, au sein des tissus des végétaux les plus massifs, tuber- cuies de pommes de terre, betteraves, potirons; il en résulte que les cellules de ces tissus ont une vie par- faitement aérobie. — M. E. Bastit a étudié l'influence de l’état hygrométrique de l’air sur la position de la feuille des mousses; il y a étalement par l'humidité, reploiement par le sec; à la position étalée correspond une activité respiratoire et chlorophyllienne beaucoup plus intense, — M. À. de Lapparent examine la facon dont a pu se former l'argile à silex du bassin de Paris, — M.F. A. Forel décrit, d’après des observations récen- tes qu'il a faites sur le lac de Genève, le procédé sui- vant lequel l'agitation des vagues produit ces glacons arrondis et bordés que les Anglais appellent glacons- sâteaux, M, J. Bertrand lit une notice sur le général 92 Hañez, correspondant de la section de géographie et de navigation. Mémoires présentés : M. F. Ivison O’Neale adresse une note relative à un procédé pour déterminer la pré- sence du bisulfate de potasse ou de l'acide sulfurique libre dans les vins, — M. H. T'éron adresse une note relative à un procédé pour empêcher les explosions de grisou. M. P. Digaat adresse une note intitulée « Variations d'intensité qu'on peut observer dans un même courant galvanique d'intensité initiale donnée. et passant dans le corps vivant à travers les tégu- ments. » — M. E. Delaurier adresse une note intitu- lée : « Les théories chimiques de Stahl et de Lavoi- sier, » M, E.des Rieux adresse de Villebourg (Algérie) une note relative aux désastres produits par les tremblements de lerre du mois de janvier, dans ce village, et à Gouraya. L. Lapicour. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 27 ganvier 1891. M. Olivier : Rapport sur un mémoire de M. Chau- mier (de Tours), surles tumeurs adénoïdes du pharynx nasal qu'il considère comme : hériditaires, pouvant ap- paraître avant l’âge de 7 ans et disparaissant vers {8 à 20; indépendantes dela scrofule, cause de troubles nerveux, asthmes, insomnies, M. Olivier n’admet pas sans conteste ces deux dernières propositions, — M, Le Dentu, rapporteur d'un travail de M. Para (de la Ferté-Alais), sur le traitement de l'endométrite par le curage et l’écouvillonnage, admet les propositions de l’auteur contre l’usage de la cautérisation au chlorure de zinc même employée prudemment et dans des cas spéciaux d'utérus très malades ou de femmes âgées, comme le soutient M. Polaillon. — Présentation par M. Guéniot d’un fœtus né à terme, mort à la suite d’ex- traction difficile par développement de l'abdomen causé par deux kystes du foie. Anomalies des doigts observées déjàchez d’autres enfants de la même mère, — M, Brouardel considère comme absolue la nécessité d'une loi sur la vaccination et la revaccination. Un vac- ciné a vingt six fois plus de chance d'échapper à la mort qu'un non vacciné. Les épidémies de variole don- nent dans les pays où elles ont régné une immunité de 10 ans environ. La revaccination est donc nécessaire tous les 10 ans. La théorie de M, Le Fort relative à la liberté individuelle est insoutenable : l'intérêt général prime l'intérêt particulier, Séance du 3 février 1894. M. Le Dentu présente une pièce provenant d'un homme qui s'était tiré un coup de revolver à la tempe droite, D’après les symptômes, il avait localisé les lé- sions sur le pied de la deuxième circonvolution fron- tale gauche et même un peu sur la troisième. A lau- topsie le diagnostic à été confirmé. Si la trépanation avait eu lieu, le chirurgien serait arrivé à la bonne place. — M. Routier dans un cas d'ictère intense, avec vomissements incessants, état général très précaire à la suite de coliques hépatiques, a pratiqué la laparo- tomie exploratrice, ayant trouvé la vésicule non dis- tendue, aucun calcul dans les canaux, par suite, n'ayant aucune indication à fistule, fermeture de l'abdomen, A partir de cette opération, cessation des vomissements, diminution de l’ictère, guérison. —M. Léon Colin rap- porte que de 1883 à 1890, il n’y a eu dans l’année que 104 décès par variole, En 1888 on a pratiqué 308.540 vac- cinations, Celles-ci, avec la vaccine animale et les pré- cautions antiseptiques, n’offrent plus aucun danger. Son opinion est absolument conforme à celle des partisans de la vaccination et revaccination obligatoires, de Ja déclaration, de l'isolement et de la désinfection comme mesures prophylactiques de la variole. Dr Ed, DE LAVARENNE, ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 31 janvier 1891 M. Laveran présente des photographies d'hémato= zoaires du paludisme et d’hématozoaires du geai, — di M. Ch. Féré obtient chez les épileptiques une tolé rance exceptionnelle pour le bromure et le borax, en pratiquant chez ces malades l’antisepsie intestinale continue; il à fait par cette pratique disparaître de son service les éruptions bromiques et boriques. — MM. Déjerine et A. Thuilant font l'analyse d'un cas de syringomyélie suivi d’autopsie, dans lequel la sen- sibilité thermique était conservée au-dessous de 20 et abolie au-dessus de cette température, — MM. Ca- diot, Gilbert et Roger rapportent un cas de tumeurs blanches produites chez un lapin par inoculation péri- tonéale du virus de la tuberculose aviaire ; ce cas s’est présenté isolé dans la série, — M, Malassez décrit divers perfectionnements qu'il a introduits dans la construction des seringues dont il se sert dans les re- cherches bactériologiques; il s’est attaché surtout à obtenir un jaugeage exact et une grande facilité pour la stérilisation sans perdre la simplicité de construc- tion et de maniement des appareils primitifs. Séance du 7 février 1891 M. Galezowski a constaté dans un cas de paralysie agitante un rétrécissement du champ visuel très ac- cusé dans trois directions du champ et laissant intact le côté externe, — M. Viault : Sur la quantité d’oxy- gène contenu dans le sang des animaux des hauts pla- teaux de l'Amérique du Sud. (V.C.R. 2 février 1891.) — M. Laborde à pu observer sur le dernier guillotiné, d'une facon très nette,un fait qu'il avait déjà plusieurs fois remarqué : la persistance de réflexes énergiques dans le tronc après la décollation, sans mouvements, respiratoires;on ne peut donc dire, lorsque les réflexes persistent ainsi, que c'est par suite de l’inhibition gé- nérale que les centres respiratoires supposés de la moelle cervicale n’exercent pas leur action, — M. d’Ar- sonval signale les services que peut rendre à la technique physiologique le procédé de platinage du : verre de M, Cailletet, — MM. Mairet et Bose ayant pu isoler la matière colorante de l'urine, ont constaté qu'une part considérable de la toxicité revient à cette matière colorante; ce serait elle en particulier qui fe- rait contracter la pupille. — M. Thoyer adresse une note sur la valeur digestive des divers acides. L. LAPiCQuE. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 6 février 1891. M. le Secrétaire général lit une lettre où M. Desro- ziers fait remarquer qu'un appareiltout à fait sem- blable à l’ingénieux cyclostat de M. Thury décrit dans la dernière séance, a été proposé et construit, il y à déjà plusieurs années par M. Napoli.— M. Le Chatelier rend compte de ses recherches sur l'emploi des mesures de résistances électriques dans l'étude des transforma- lions moléculaires du fer et de ses alliages. IL expose d’abord que les propriétés mécaniques des corps ne sont pas déterminées lorsque l'état chimique (compo- sition, état moléculaire) et les tensions d'énergie (pres- sion, température) sont définis; tous les corps sont formés d’agrégats de cristaux dont la forme, la dimen- sion, l'orientation peuvent varier à l'infini, et ces changements de structure interne entraînent des varia- tions considérables dans les propriétés mécaniques, il semble possible d’arriver à suivre ces changements de structure par l'étude d’une propriété physique du mé- tal qui se prête à des mesures rigoureuses : la résis- tance électrique, M. Le Chatelier examine ensuite en détail et séparément les nombreux alliages qu'il a ainsi étudiés; les conclusions auxquelles il arrive sont d'accord avec les résultats précédemment obtenus par MM. Osmond, Pionchon, Hopkinson, Dans le cas de l’a- ACADÉMIES ET SOCIÉÈTÉS SAVANTES cier, par exemple, les mesures de résistance permettent de reconnaitre l’état du carbone dans le fer, et même de doser, en quelque sorte, la proportion transforméoa dans les aciers trempés. — M. Cornu explique à la Société Ja méthode par laquelle M. Orto Wiener dé- montre la perpendicularité des vibrations lumineuses au plan de polarisation. La Rewue à déjà exposé ces remarquables recherches. — M. Pellat présente au nom de M. Collot fils, un appareil de projection lu- miueuse, applicable aux machines de précision, à l'effet d'obtenir des pesées rapides. La modification apportée à la balance consiste à déplacer le centre de gravité du fléau de facon à diminuer la sensibilité, et par suite, à obtenir une vitesse d’oscillation plus grande; par des procédés optiques on augmente, au contraire, l’ampli- tude des oscillations. Au lieu d'observer les oscillations au microscope, on les projette sur un écran divisé, for- mant cadran, dont la division est vue par transparence, Lucien Poincaré. SOCIETE CHIMIQUE DE PARIS Séances du 23 janvier et du 4 février 1891. M. Zune présente divers appareils destinés aux ana- Iyses industrielles; un appareil pour obtenir rapide- ment les extraits secs à basse température, un spec- {roscope servant en même temps de réfractomètre ; il propose de déterminer les indices de réfraction des corps gras en les dissolvant dans l'alcool méthylique. — MM. Béhal el Choay ont obtenu par laction du brome sur le chloralimide deux isomères stéréochi- miques du corps C‘H6A72H'O dont ils étudient les dédoublements. — M. Guillaume a étudié les varia- lions des thermomètres à mercure ; il indique une nou- velle méthode permettant d'effectuer exactement les corrections dues à la colonne émergente par l'emploi d’une colonne auxiliaire, — M. Villiers appelle l’at- tention sur le procédé de recherche de l'acide sulfu- rique dans les vins adopté au ministère de la justice, et montre que ce procédé fournit des résultats inexacts. M. Lindet montre que, pendant la fermentation d’un moût sucré, les alcools supérieurs se produisent après l'alcool ordinaire et sont dus à la présence de ferments étrangers. — M. Horsin-Déon présente une théorie de triple effet qui lui permet de calculer les dimensions à donner à ces appareils. II montre que la présence de l'acide carbonique dans la vapeur d’eau diminue le pouvoir condensant d’un appareil de chauf- fage à la vapeur. L'acide carbonique doit done être éliminé par les procédés qu'il détaille. M. Hanrior, SOCIETE MATHEMATIQUE DE FRANCE Séance du T janvier 1891 M. d'Ocagne : Sur la liaison entre les expressions du rayon de courbure en coordonnées ponctuelles (cartésiennes ou parallèles) et en coordonnées tangen- tielles (pluckériennes ou parallèles). — M. Vicaire Sur les oscillations troublées d’un système matériel autour d’une position d'équilibre. Application à lPex- plication d'un phénomène qui s’observe dans le mou- xement des locomotives, Séance du 21 janvier 1891 M. Humbert : Déterminalion du nombre des sys- tèmes de suriaces algébriques d’un ordre donné qui sont inscrites dans la surface de Kummer. Séance du % février 1891 M. Laisant : Sur l'extension de la géométrie carté- sienne aux figures imaginaires, au moyen de la méthode des équipollences, — M. Béghin : Démonstration arithmétique de limpossibilité d’une fonction d’une seule variable à plus de deux périodes, —M. d'Ocagne : Sur une détermination particulière du centre de cour- bure des lignes planes, Application aux courbes algé- briques d’ordre quelconque. Propriété générale de celles-ci. MAURICE D'OCAGNE, 93 SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 22 janvier 189 SCIENCES PHYSIQUES. — M, H. Wilde fait une com- munication sur la distribution asymétrique du magné- lisme terrestre, Dans un précédent mémoire sur « les causes des phénomènes de magnétisme terrestre », il avait montré qu'en couvrant sur un globe terrestre tout l'espace occupé par la mer, d’une feuille de fer mince où l’on à grossièrement découpé les contours des conti- nents, on obtient un ensemble de lignes qui coïncide presque exactement avec les lignes asymétriques de déclinaison, déterminées par l'observation, On voit par là que la distribution irrégulière des continents et des mers à la surface de la terre est la cause principale de la distribution asymétrique du magnétisme terrestre. Les observations faites récemment sur la température des mers profondes ont mis en lumière ce fait impor- lant, qu'aux grandes profondeurs, la température du fond de l'océan est très voisine du point de congélation de l’eau, Certaines anomalies, relevées dans les obser- vations faites avec le pendule pour déterminer la forme de la terre et la densité de son écorce dans les régions continentales et dans les régions océaniques, ont con- duit M. Faye et d’autres géologues à la conclusion que les oscillations positives et négatives du pendule, cons- tatées respectivement sur les terres et les mers, à des latitudes comparables, ne peuvent s'expliquer que par une plus grande épaisseur de l'écorce terrestre sous la mer, La proportion considérable de fer qui entre dans la composition de l’écorce terrestre a été bien établie par l'analyse des matières éruptives volcaniques de toutes les parties du globe. On sait aussi que les propriétés magnétiques du fer s'accroissent considé- rablement à mesure que la température S’abaisse, et décroissent rapidement aux hautes températures, L’au- teur montre que la basse température du fond de l'océan et l'épaisseur de la couche ferrugineuse qu’il recouvre constituent les conditions précises qui sont requises pour produire dans les éléments magnétiques les différences que l’on peut mettre en évidence sur un 2lobe terrestre dont toutes les mers sont recouvertes d'une feuille de fer, — M. Thomas Andrews fait une communication sur l’état passif du fer et de l'acier. La première parlie de ce travail à paru dans les Proc. de la Soc. Roy. vol. 48, p. 116; l’auteur avait montré l’influence exercée par laimantation sur l’état passif du fer et de l'acier, Il à recherché depuis lors quel était l'effet de la température et de quelques autres conditions sur la passivité de ces métaux, traités par l'acide nitrique concentré. Les expériences ont montré que le fer forgé est moins passif dans l’acide chaud que l’acier doux (densité, 1,42); des observations sur l'influence exercée par l'acide nitrique à différentes concentrations montrent que le fer forgé est moins passif dans lacide nitrique faible (densité 1,50) que la plupart des aciers essayés. L'acier Bessemer doux est, d'après les expériences, de passivité égale à celle du fer forgé. Séance du 29 janvier 1891, Le professeur Georges Darwin a fait la « Bakerian Lecture » sur la prédiction des marées, Il y a 50 ans, Whewell avait choisi le même sujet. On ne savait pas alors cependant que les marées de l’Atlantique septen- trional, que nous observons, par exemple, en Europe, sont si anormales, qu'elles ne présentent presque aucune variation diurne. Cette anomalie rend suffi- sante une table où sont calculées les variations moyennes de quinzaine de hauteur et d'intervalle après le passage de la lune, augmentée de tables de correc- tion pour la déclinaison et la parallaxe des corps per- turbateurs. Mais, lorsqu'il y à une variation diurne considérable, comme c’est d'ordinaire le cas dans d'autres mers, les hauteurs et les intervalles sont très différents après les passages inférieur et supérieur de la lune : les deux moitiés de chaque lunaison diffèrent 9% ACADÉMIES ET SOCIËTÉS SAVANTES beaucoup dans leurs caractères, et la saison de l’année a uue grande influence. Aussi de simples tables, comme celles dont on peut se servir en labsence de marée diurne, ne sont-elles, dans ce cas, d'aucun usage. Il n'y a pas de méthode arithmétique actuellement en usage, qui permette de construire une table spéciale de ma- rées sans beaucoup de travail et de frais. La machine à calculer les marées, inventée par sir William Thom- son en 1872, et employée par le gouvernement indien. permet de réduire beaucoup les frais de calcul, parce qu’elle fournit une courbe qui représente toutes les marées de n'importe quel port pour tois les jours de l’année, en quatre heures environ, mais l’instrument coûte fort cher et la publication des données fournies par les courbes atteint un prix si élevé qu’on ne peut s’en servir, ou tout au moins qu'on ne s’en sert pas pour les ports peu fréquentés. Aussi le professeur Darwin a-t-il imaginé une table générale des marées, applicable à tous les temps, à l'aide de laquelle qui- conque à une connaissance élémentaire de l’Almanach Nautique, peut, en quelques minutes, calculer deux ou trois marées pour un jour donné, Ces tables sont faites de telle sorte qu'on peut aussi construire une table spéciale de marée pour n'importe quelle année, avec relativement peu de peine. Pour vérifier l'exactitude de la méthode, on a fait quelques comparaisons entre les temps et les hauteurs obtenus ainsi, ceux qu'avait fournis la machine sus-mentionnée et les marées réel- lement observées pendant certaines années déter- minées. Les comparaisons ont montré, qu'avec des valeurs exactes pour les constantes des marées, les tables permettent de formuler d'excellentes prédic- tions, plus exactes même que les besoins de la naviga- lion ne l’exigent, Richard A. GREGORY. ACADEMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 31 janvier 1891, 1 SCIENCES MATHÉMATIQUES, — MM. Schcute et Bierens de Haan, nommés rapporteurs sur un mé- moire de M.J.C. Kluyver présenté dans la séance précédente du 28 décembre 1890, donnent un apercu de ce travail intitulé-: Sur les langentes d'inflerions d'une courbe Ri, (courbe biquadratique gauche de première es- pèce). Ce mémoire contient des résultats nouveaux d’une haule importance déduits à l’aide des fonctions elliptiques pu el ou de M. Weierstrass. Il sera publié par l’Académie. — M. J. de Vries: Les involutions dans le plan complee. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Lorentz s'occupe de la théorie du mouvement de l'électricité donnée par M. Maxwell et développée par MM. Heaviside et Hertz. D’après quelques phénomènes bien connus, par exemple, lPexpérience faite par M. Fizeau du rayon de lumière tombant sur l’eau en mouvement, il sup- pose que l’éther est entraîné par le mouvement de la matière pondérable, ce qui le mène à une extension des équations obtenues par M. Hertz. (Annalen der Physik und Chemie de G. Wiedemann, t. XLI, p. 369), — M. Hoogewerff communique les résultats de recherches faites par lui-même et par M. van Dorp sur l'influence des sels d'acide hypochlorique et hypobromique sur les imides. Les imides dont il s’agit sont la phtalimide et la phtaldiamide, dont les formules synthétiques sont : = 0 =; \Al8l C C CH NH CH So Xe” c/ ef —= et (de AzH? NT CAR? CeHŸ CHE ER LA C— AzH? C0 Dans une forme symétrique ou dansune forme asymétrique Il décrit la déduction de l'acide anthranilique de la phtaldiamide en partant de la formule asymétrique, | | | présente plusieurs nouveaux sels de cuivre et de chaux de cet acide et montre comment l'acide anthranilique qu'il compare à l'acide salycilique, mène à la prépa- ration synthétique de l’indigo, Enfin, il déduit l’ortho: phénylènediamide et l'acide orthoamidobenzoïque de la phtaldiamide, SCHOUTE, Membre de l'Académie, SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE BERLIN Séance du 23 ganvier 1891. M. Bornstein a examiné les observations barométri- ques faites aux stations météorologiques de Berlin, de Hambourg et de Vienne pour voir si la position de la lune à une influence sur la pression de l'atmosphère, surtout s'il est pussible de constater un phénomène analogue à la marée de la mer. Le résultat de son tra= vail est qu'un tel phénomène n'existe pas et que les observations de quelques stations littorales qui le constataient sont douteuses à cause de linfluence de la marée sur l'atmosphère. — M. Kreichgauer a fait des pesées très exactes pour décider la question de savoir si par une combinaison chimique le poids des substances mises en réaction change ou non, Il a sus- pendu au fléau de sa balance deux flacons fermés her- métiquement qui contenaient du mercure, et dans un petitvase soudé à la lampe, du brome. Le volume des deux flacons était le même. Dans l’un des deux flacons on fit réagir le brome chimiquement sur le mercure en PP cassant par secousses légères le petit vase rempli de. brome, La différence de poids des deux flacons était : I IT avant la réaction 9.310 9.344 après la réaction 9.313 9.336 Le poids ne change donc pas. Séance du 6 février 1891. MM. Arons et Rubens se sont occupés de la déter- mination de la vitesse des ondes électriques dans des liquides diélectriques. Pour leurs mesures ils se servent de deux quadrilatères en fil de cuivre parallèles entre eux, dont les côtés représentent une longueur d'à peu près six mètres et dont le côté inférieur à une interrup- tion. Chacun de ces deux quadrilatères est en contact à l’aide d’un fil métallique avec l’un des pôles du con- ducteur primaire. L'énergie des vibrations électriques dans les côtés de deux quadrilatères est mesurée à l'aide du bolomètre. Cet arrangement a l'avantage que les ondes électriques se propagent exclusivement dans l’espace compris entre les deux quadrilatères, de sorte que les observations sont indépendantes de l'influence du conducteur extérieur. Chaque quadrilatère repré- sente une onde entière comme on l’a prouvé à l’aide du bolomètre. Si le contact qui mène au conducteur pri- maire se trouve exactement vis-à-vis de l’interruption du côté inférieur, on y observe un minimum d'énergie: c'est le point que M. Hertz a nommé le point d’interférence ; la position change dès que la symétrie du système est altérée soit par des conducteurs soit par des capacités qu'on intercale, Les auteurs prouvèrent d'abord qu'à l'aide des déplacements du point d’interférence on est en état de mesurer la vitesse des ondes dans l'air et dans les liquides diélectriques qui baignent les fils, Le rapport de ces deux vitesses donne la réfrangi- bilité des ondes électriques. Les valeurs qu’on a trouvées de cette sorte se rapprochent beaucoup de la racine carrée de la constante diélectrique des liquides mesurée par M. Hopkins et par MM. Cohn et Arons. Voici les valeurs : u Huile de ricin........ se 0249082:05 Huile td’olinves etre 4.18; 1571 NNICIPA RER ARRETE EE CES 4:53 "4.50 Pétrole RER rec … 4:45: 4:50 La célèbre proposition de Maxwell est donc confirmée avec une approximation tout à fait satisfaisante. Dr Hans Jan, CHRONIQUE 95 : EUR Ü T INNE ACADEMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 22 janvier 1891. SCIENCES PHYSIQUES. — M. Fr. Emich présente deux mémoires de chimie : 4° sur la biguanide; 2° note sur … La guanidine. Le travail sur la biguanide renferme dans la première partie l'indication que ce corps forme par l'ébullition avec une solution de baryte de la guanidine et de l’urée; on à par exemple: Phénylbiguanide CG HS H Az — CAzH-— ÂzH — C AzH Guanidine Urée AzH? — CAzH — Az H? MÉrivecos Az H° J + Phénylguanidine + Phénylurée CGHS — AzH — CAzZH— AzH? CSH°HAz Dans la seconde partie l’auteur montre que la réaction de Herth produite jusqu'à présent avec les monamines primaires seulement (production d’ammoniaque et de dicyandiamide dans la formation de biguanide) à lieu tout aussi bien ee les bases secondaires (diéthyl et diphénylamine). Ces remarques auxquelles cette réac- tion conduit prouvent que la formule donnée par Bam- berger pour la phénylbiguanide et qui vient d'être écrite est bien la véritable. L'auteur décrit enfin quelques sels de diéthyl et diphénylbiguanide. Dans le second mémoire on remarque les observations suivantes : 1° le picrate de guanidine forme un préci- pité jaune difficilement soluble qui peut servir à recon- naitre et à doser cette base, Les cristaux de picrate de guanidine sont d’un aspect très caractéristique surtout après que l'on a repris par l’eau chaude, 2 Dans l’ac- tion de la guanidine sur une solution froide en excès d'hypobromite de sodium, les deux tiers de l'azote con- tenu dans la guanidine sont mis en liberté; la réaction est probablement la suivante : Az H2— CAZH — AzH? +30 — Az? +2H20 + COAZH On ne peut pas faire fermenter la guanidine, elle constitue un antiseptique faible, Az HER Emile Weyr, Membre de l'Académie. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séance du 1° février 489. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Tacchini s'occupe de la distribution en latitude des phénomènes solaires observés à l'Observatoire du Collège romain en 1890. Des tableaux relatifs à chaque trimestre donnent la fréquence des protubérances, des fac ules, des taches et des éruptions, En examinant ces tables, ‘on arrive à la la conclusion qu'en 1890 les protubérances furent, comme en 1889, plus abondantes dans l'hémisphère austral, et que la zone de la plus grande fréquence se trouve comprise entre — 40° et — 509, tandis que pour les facules et les taches, la fréquence ‘fut plus grande au nord. Les protubérances se montrèrent à des latitudes élevées, où l’on n’observe jamais ni facules, ni taches, ni éruptions, loujours rares à l'équateur. Les éruptions, défini pour les réunir avec en petit nombre, restèrent dans la région des laches. 29 SCIENCES PHYSIQUES, — Dans une autre note, M. Tac- chini s'occupe encore de MeURR du vent sur les séismographes enregistreurs. Avec l'appareil à enre- gistrement photographique et continu, modilié par M. Agamennone, on a obtenu des tracés dont l’ampli- tude se montre en relation avec la vitesse du vent, Comme la tour du Collège romain est très solide et peu élevée, on doit admettre que le vent peut exercer son action sur des édifices plus petits et, en conséquence, sur les modernes appareils enregistreurs dont on me- sure, à l’aide du microscope, les plus petites oscilla- tions, Pour trancher cette question, M. Tacchini se propose de faire exécuter dans les principaux Observa- PIE ON AUes, des observations continues avec l'appareil de M. Agamennone, qui présente une très grande se nsibilité — M. Tacchini entretient l'Académie du froid du mois de Janvier à Rome, et il montre que le froid a été, pour le même mois, plus rigoureux en 1880. MM. Oddone et Sella développent, dans une deuxième note, des observations et des considéra- tions sur les roches magnétiques. [ls arrivent à la con- clusion que, dans ces roches, le magnétisme ne pré- sente pas une distribution en ‘relation avec l'influence de la terre, ou qui conduise à penser que ces roches ont subi auparavant cette action, et qu'après, elles ont changé de place. La distribution du magnétisme dans les roches est très compliquée, très variable, et n'obéit à aucune loi, Les auteurs donnent les résultats de leurs recherches ; ils observent que lorsqu'on veut faire la détermination des constantes du magnétisme terrestre, il est nécessaire de répéter les mesures sur une grande aire pour éviter les actions perturbatrices locales, Il faut encore abandonner les sommets rocheux, qui pro- bablement ont été frappés par la foudre, et les terrains d'origine erratique ou alluvionale, — M. Del Lungo adresse un travail sur la pression et sur le volume spécifique des vapeurs saturées, et il fait une analyse des formules de Dupré, Regnault, Bertrand et Zeuner, 3° SCIENCES NATURELLES, — M. Gartini à {rouvé dans les muscles du Palæmoneles varians, vivant en grand nombre dans les eaux du Mincio près de Vérone, une espèce de Sarcoporides, qui présente une grande ana- logie avec celle que M. Henneguy a découvert dans les museles du Palæmon rectirostris. Les Sarcoporides ont la forme d’un kyste, allongé comme un fuseau, et ils contiennent huit corpuse ules. M. Gartini donne des détails sur l’état des fibres musculaires que contiennent ces parasites ; il est d'avis que les fibres n’éprouvent aucune altération el que, à cause des inclusions, la substance musculaire est seulement étirée, En obser- vant avec attention les sections exécutées sur des groupes de Sarcoporides, on voit qu’ils présentent des différences, ce qui pourra servir à étudier la reproduc- tion de ces parasites. Les Sarcoporides ne sont donc pas restreints aux mammifères seulement, comme on croyait jusqu'ici, mais il n'y a aucun caractère bien les Myxosporides. Ernesto Mancinr. CHRONIQUE LES Lorsque, en 1854, on construisit les premières batlte- ries flottantes revêtues de cuirasses en fer de 11 centi- mètres et que Dupuy de Lôme créa la Gloire, on ne se doutait point alors de l’importance que prendrait plus tard le cuirassement à terre dans les forteresses, sous forme de réduits, de casemates protégées par des revyê- tements métalliques, de tourelles cuirassées : la cons- truction des coupoles va de pair avec l'établissement des blindages de navires épais de #5 centimètres et pesant près de 4000 tonnes. L'emploi des cuirasse- inents se généralisant ainsi, les études se poursuivent RÉCENTES EXPÉRIENCES SUR LES PLAQUES DE BLINDAGE plus acharnées sur les différents métaux à employer. Avant 1869, le fer seul était utilisé : M. Schneider donna alors l'exemple de l'emploi de l'acier, Bientôt on à créé le métal mixte où compound, suivant le mot anglais, formé d’un sommier en fer assurant l'homogénéité, sur lequel on soude une couche d’acier très dur pour amener la rupture des projectiles; on a multiplié les types, obtenant le métal doux, demi- dur ou dur : en marine notamment, où l’on doit par- ticulièrement craindre les fentes entraînant les voies d’eau, on doit réserver les métaux malléables, du 96 NOUVELLES moins dans les œuvres vives où immergées, Enfin nous pouvons citer un nouveau métal, le métal Schneider, en ucier fondu de qualité spéciale, offrant une résistance homogène, Eu ces malières notre industrie semble présenter une supériorité assurée, Il y a deux années, des expé- riences concluantes ont été faites en Roumanie ; plus récemment la Belgique, désirant semer de forts cui- rassés le cours de la Meuse, tout en commandant les ouvrages à l'usine Cockerill de Seraing, à spécifié que le métal serait fourni par l’industrie française, Un autre exemple se présente. Dans les premiers jours du mois d'octobre, ont eu lieu à Annapolis (Maryland) des épreuves de tir sur plaques de blindages d’origine européenne, pour décider quelles sont les meilleures plaques destinées à la pro- tection des navires de guerre. On se servait, pour les épreuves, d'un canon rayé construit spécialement dans ce but à Washington; c’estune bouche à feu de 6 pouces (4150 mm.) longue de 17 1/2 pieds (ou 5 m. 334); ses di- mensions respectives assurent au projectile une forte vitesse iniliale de 207 pieds (environ 633 m.) à la se- conde, avec une charge de ## 1/4 livres, environ 20 ki- logs de poudre ; le projectile était de 100 livres (à peu près 45 1/3 kilogrammes), en acier forgé avec pointe en acier chromé, long de 17 pouces (432 mm) et de la fabrication de MM. Holtzer et Cie, de France. Beaucoup d'officiers des armées de terre et de mer, ainsi que le secrétaire du ministre au département de la marine, assistaient à l'expérience. Trois plaques de méme épaisseur ont été essayées, dont 2? en acier Schneider (lune contenant une petite proportion de nickel) et un compound Cammell. Sur chacune des trois plaques éprouvées, on à tiré 4 obus. La plaque mixte Cammell, au premier choc, a été brisée en frag ments qui ont volé dans toutes les directions. Au con traire les plaques françaises ont résisté avec succès aux projectiles. On à complété l'essai par une seconde expérience celte fois, avec un canon de 8 pouces (200 mm.) et pro jectile de 210 livres (environ 95 kilogs), en acier forgé et chromé de Firminy. On à liré, au centre de chaque plaque, un de ces obus, doué d’une vitesse de 564 mètres au choc. La première plaque Schneider fut tout juste pénétrée par le projectile, qui se brisa en trois mor ceaux, en produisant quelques fentes légères. Pour Jan seconde plaque (celle qui contenait du nickel) la péné lation fut à peu près la même; mais le projectile se brisa en menus morceaux, sans produire aucune fente Quant à la plaque mixte anglaise, elle fut entièrement perforée, ainsi que le matelas qui la supportait; la cou verte d'acier était tombée et Le projectile était demeuré entier, En somme, en l’élal, deux mélaux sont en présence, « le compound et le Schneider, Les essais obtenus en. mainte occasion sur ce dernier paraissent supérieurs à ceux qu'on à pu obtenir sur le compound, principales ment au point de vue de la pénétration; et c'est ce qui est le plus important peut-être, si l’on songe qu'actuel- lement l'artillerie cherche la fusée retardatrice. Avec cette fusée, le projectile pénétrerait le blindage et n'éclaterait qu'après pénétration ! Si la plaque ne ré- siste point et se trouve traversée, quels ravages le pro-. jectile ne pourra-til pas alors exercer derrière les cui- rassements, que ce soient des tourelles de navires ou de forts, D'ailleurs Le métal Schneider semble présenter double qualité : homogénéité et difficile pénétration. D. BerLer. NOUVELLES LA PHOTOGRAPHIE La séance de PAcadémie des Sciences du lundi 2 fé6- vrier 1891 à été marquée par un fait considérable dans lhistoire de la science : M. Lippmann a annoncé à l'Assemblée qu'il venait de découvrir le moyen de fixer sur une plaque photographique toutes les cou- leurs du spectre. Voici le principe remarquablement ingénieux sur lequel s’est appuyé l’éminent physicien : Considérons un miroir parfait, dont la face réfléchis- sante soit recouverte d’une couche sensible continue el exempte de grains, où tout au moins dont les grains, s'ils existent, aient des dimensions négligeables vis-à- vis de la longueur d'onde de la lumière : une couche de collodion et d’albumine, servant de support à la matière sensible, remplit parfaitement ces conditions. L’onde réfléchie va interférer avec l’onde incidente, et produire, dans l’épaisseur même de la couche im- pressionnable, une succession de plans nodaux et ven- traux, les uns brillants, les autres obscurs, séparés par un intervalle égal à. Sur les plans brillants, se déposera une couche d'argent réduit, qui, une fois l'impression fixée par les procédés de fixage usités en photographie, constituera un plan réfléchissant, dis- se à A EE LIEU PTENES tant du plan voisin d’un intervalle égal à +. Cet in- tervalle variera naturellement avec la nature de la lumière incidente. Dans l'épaisseur même de la couche photographique, il y aura donc des plans équidistants de 5 ou, si l’on veut, des lames minces d’une épaisseur de 3 condition précisément nécessaire pour donner la frange de la couleur correspondante, de sorte qu’en regardant DES COULEURS l'image par réflexion, on devra avoir l'impression de là couleur correspondante. L'expérience a réalisé complètement les prévisions de M. Lippmann, qui a, du reste, présenté à l’Aca- démie des Sciences des photographies de spectres solaires avec toutes leurs couleurs. Par transparence on voit le spectre complémentaire. Tels sont les points priscipaux de la communication de M. Lippmann. Cette découverte donne la solution définitive, parce qu'elle est rigoureusement scienti- fique, du fameux problème de la photographie des cou- leurs, si longtemps et si vainement cherché par des procédés empiriques, Seebeck en 1810, Herschell en 1841, M. Ed, Becquerel en 1848, Nièpce de Saint-Victor en 1851, Poitevin en 1865, ont fait dans ce sens des tentatives plus ou moins approchées; les épreuves de : Poitevin sont sur papier, et ne reproduisent, d’une : facon instable d'ailleurs, que les couleurs voisines du rouge, M. Becquerel a bien, à la vérité, obtenu sur une couche de sous-chlorure d’argent violet recouvrant une lame de plaqué d'argent un spectre complet; mais cette image n'est pas fixable, et disparaît par l’expo- sition à la lumière Il est facile d'expliquer l’instabilité de l'impression dans l'expérience de M. Ed. Becquerel : les plans d'in- terférence se produisent bien, comme dans l'expé- rience de M, Lippmann ; seulement, au lieu de se pro- duire dans la masse de la gélatine ou du collodion, formant une charpente destinée à les supporter, ils se produisent dans la substance sensible même : si done | on traite la plaque par un fixatif qui détruit les couches intermédiaires non efficaces, les plans réfléchissants s’effondrent les uns sur les autres, les franges des lames minces ne se produisent plus, et tout disparaît. Alphonse BERGET, Docteur ès sciences, Le Directeur- Gérant : Louis Orivier Paris.— Imprimerie F, Levé, rue Cassette, 17. 2 ANNÉE N° 4 28 FÉVRIER 1891 REVUE GÉNÉRALE ES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LES ÉQUILIBRES CHIMIQUES PREMIÈRE PARTIE : La loi des proportions définies est la base d'une des branches de la Chimie, de celle qui s’est assu- rément le plus développée, parce qu'elle a trait à des phénomènes très apparents. On peut l'appeler l'architecture chimique, si l’on s’en tient au mode de représentation géométrique, connu sous le nom de théorie atomique. Les corps que l’on consi- dère sont, ou des corps simples : hydrogène, oxy- gène, ou des composés définis : eau, acide carbo- nique; dans tous les cas, des corps d'une composi- tion chimique invariable. Dans la Chimie, consi- dérée à ce point de vue, on laisse de côté les phé- nomènes intermédiaires qui s’accomplissent quand un système chimique à un état déterminé, tel que le mélange gazeux d'hydrogène et d'oxygène, passe à un autre état déterminé, tel que l'eau. Dans l’autre branche de la Chimie, {4 mécanique chimique, on éludie les états intermédiaires et les condilions dans lesquelles la succession de ces élats intermédiaires se réalise. On le fait au même point de vue qu'en physique, lorsqu'on étudie les changements d’état des corps, la vaporisation, la fusion, etc. Ces changements physiques etles chan- gements chimiques sont, d'ailleurs, soumis aux mêmes lois, et l’on admet généralement aujourd'hui qu'il n'y à pas lieu de scinder en deux sciences l'étude de ces deux ordres de changements. Nous donnerons donc à ces divers phénomènes la déno- mination commune de phénomènes chimiques. [ L'étude de la mécanique chimique a été abordée pour la première fois en France par Berthollet REVUE GÉNÉRALE, 1891. MÉCANIQUE CHIMIQUE; PRINCIPES EXPÉRIMENTAUX dans ses recherches sur les lois des doubles dé- compositions salines, et elle a été la raison de sa lutte contre les exagérations de l’école de Proust Mais Berthollet n’a été qu'un précurseur, et il était réservé à Henri Sainte-Claire-Deville, par sa dé- couverte des lois de la dissociation, et par les conclusions qu'il en a Lirées, de fonder définitive- ment celte nouvelle branche de la Chimie. A la suite de cette découverte, M. Peslin et M. Moustier ont les premiers, en France, rattaché les change- ments chimiques aux changements d'états étudiés par Sir William Thomson et Clausius. Puis, les Pro- fesseurs Gibbs ! en Amérique, et von Helmholtz en Allemagne, ont appliqué d’une façon systématique aux phénomènes de la Chimie les lois de la Ther- modynamique. Pius tard, Van’t Hoffet l’un de nous ont formulé quelques corollaires de ces lois géné- rales, corollaires plus directement applicables aux LJ. Willard Giees. On the Equilibrium of Heterogeneous subs- tances. Transactions of the Connecticut Academy, Vol. I, Part. I. p. 108, New-Haven (U. S.), 1876. — Le Professeur Gibbs a certainement de beancoup la part la plus considérable dans l'étude des lois rationnelles de la mécaniqne chimique ; mais le mémoire fondamental qui vient d’être cité a été rédigé sous une forme si générale et si abstraite, et avec un tel luxe de formules mathématiques, que la lecture en est peu at- trayante. Aussi ce travail, bien que cité souvent de confiance, est à peine connu, et tous les extraits qui en ont été donnés sont incomplets, parfois même inexacts. Il en résulte que les ré- sultats obtenus par le Professeur Gibbs ont du étre décou- verts à nouveau. Tel a été le cas de la loi d’isodissociation et celle du sens du mouvement chimique, données comme nou- velles par l'un de nous. Elles sont en réalité implicitement contenues dans les formules du savant professeur, mais per- sonne ne les y avait apercues jusqu'ici; à ce point méme que l'on a été jusqu à contester leur exactitude en invoquant l’au- torité du Professeur Gibbs lui-même. 4 J8 LE H. LE CHATELIER ET G. MOURET. — LES ÉQUILIBRES CHIMIQUES recherches de laboratoire, et rétablissant ainsi le trait d’union qui doit exister entre la pratique et la théorie pour que l’une et l’autre puissent se prêter un mutuel secours. La mécanique chimique n’est elle-même qu'une branche particulière d'une science plus générale, semblable par ses raisonnements à la mécanique rationnelle; c'est la science des déplacements et de la transformation de l'énergie. Mais, laissant de côté ce point de vue un peu abstrait, nous nous attacherons spécialement, dans ce travail, aux ré- sultats concrets, applicables spécialement à la Chimie. Ces résultats n'ont pas seulement un intérêt théorique; ils ont aussi une grande importance pratique. Dans bien des cas, notamment lorsqu'il s'agit des procédés industriels, les réactions ne s'accomplissent pas entièrement, parce qu'elles sont limitées par la présence de corps, qu'on ne peut évacuer immédiatement et directement; dans d’autres cas, elles s’accomplissent avec une grande lenteur. Dans tous ces cas, les lois de la mécanique chimique trouvent une application directe. Dans le laboratoire, elles sont encore d’un utile secours, car elles permettent de prévoir le sens des réac- tions qui doivent s’accomplir, et la nature des com- posés stables qui se forment dans des conditions données; de plus, elles unifient des phénomènes, considérés trop souvent comme dislincts ou nou- veaux, et elles apportent ainsi une grande simpli- fication dans la connaissance et la classification des réactions. Le but de cette étude est de faire connaître aussi simplement que possible, mais sans rien sacrifier à la rigueur, les lois fondamentales nécessaires de la mécanique chimique, c'est-à-dire celles qui ne présentent rien d'empirique, soit qu'on puisse les déduire de lois plus générales dont elles constituent une nouvelle vérification, soit que, spécialement applicables à la Chimie, elles aient pour eritérium unique l'expérience directe. Ces lois présentent un caractère de certitude aussi grand que le com porte l’élat actuel de nos connaissances scienti- fiques; on ne saurait contester aujourd’hui leur exactitude sans révoquer en doute les loi fonda- mentales de la Thermodynamique. On exposera les lois en question en écartanl toutes les formules dont on a encombré sans né- cessité la Thermodynamique et qui masquent si malheureusement le caractère presque évident de la science créée par Sadi-Carnot sur une pure in- tuition. I L'étatsouslequel seprésenteunsystème chimique homogène ou non, se range nécessairement, au point de vue mécanique, dans l'une des trois classes suivantes : Élat de repos chimique. État d'équilibre chimique. État de mouvement chimique. L'état de mouvement chimique est bien connu des chimistes, c'est l’élat d'un système dans lequel destransformations s’accomplissent spontanément. C'est par exemple l'élat d'un système composé d'une dissolution saline non saturée en présence d'un excès de sel, ou l’étal d'un système composé d’eau et de vapeur d’eau non saturée, ou encore l'élat d'un mélange gazeux d'hydrogène et d'oxy- gène porté subitement à une température élevée, capable de provoquer la combinaison. La distinction entre l’équilibre et le repos est une notion relativement récente. Saisir cette dis- tinclion, c'est comprendre les principes fonda- mentaux sur lesquels repose tout l'édifice de la nouvelle science chimique. Aussi est-il nécessaire d'entrer dans des explications un peu détaillées, en faisant connaitre d’abord ce qu'est le repos, puis précisant cette notion par celle de l'équilibre. Repos chimique. — Une première étude des con- ditions dans lesquelles s’accompiissent les change- ments chimiques semble révéler l'impossibilité de classer et de relier ces conditions. Les réactions peuvent être produites dans des circonstances les plus diverses : variation de pression, de tempéra- ture, d'état électrique ; rayonnement lumineux, ca- lorifique, ou chimique ; chocs, frottements, et autres actions mécaniques, etc. Il n’est pas jusqu'aux phé- nomènes de la vie qui ne déterminent des transfor- malions, el les organismes les plus simples en ap- parence, tels que les ferments, ont cependant un effet chimique puissant. Non seulement les causes des phénomènes chi- miques sont variées; mais leur effet est aussi va- riable, et, pour ainsi dire, contradictoire. Ainsi la chaleur qui détermine la combinaison de l'hydro- gene et de l'oxygène, agit aussi pour décomposer l’eau. Ces complications, ces contradictions ne sont qu'apparentes et disparaissent si l’on a soin de distinguer les causes directes des changements chimiques, des causes indirectes ou occasionnelles. C'est une distinction que l’on comprendra mieux par un exemple emprunté à la mécanique. Dans la manœuvre d’une sonnette à déclic, servant au ballage d'un pieux, le déclenchement du mouton de la sonnelte rend possible le mouvement de celte masse, et la pesanteur agit pour produire ce mouvement. Le déclenchement et l’action de la pesanteur sont deux phénomènes qui comportent pareillement la mise en jeu de forces; mais les deux forces mises en jeu n’ont pas cependant la “même relation avec le mouvement du mouton. La ‘première rend les mouvements possibles, mais “Cest la seconde qui doit être regardée comme la | cause déterminante. Aussi longtemps que la force “qui fait marcher le déclic n’agil pas, le mouton est maurepos. Il est au repos, non pas seulement parce “qu'il ne se meut pas, mais encore parce qu'une “augmentation de la force qui tend à produire sa chute n'enlrainera aucun mouvement, tant que l'intensité de cette force ne sera pas sufisante pour rompre l'appareil d'enclenchement. — D'une manière générale le repos, en mécanique, est dû à ce que les forces actives, ou puissances qui peuvent produire le mouvement, sont inférieures “aux forces passives, ou résisfances qui, sans pro- duire le mouvement par elles-mêmes, le peuvent modifier. Ces résistances proviennent soit de liaisons, Lelles que celles réalisées par un déclie, soit du frottement, de la viscosité, etc. Or cette distinction entre les puissances et les résistances trouve son application en chimie. Il y a souvent, dans les systèmes chimiques, des résis- lances ou liaisons intérieures dont la nature nous est inconnue, mais qui se révèlent par les obstacles qu'ellesapportent aux transformations. Cest à cause de ces résistances que lhydrogène, le carbone, et les matières organiques ne se combinent pas à Poxygène de l'air, aux basses températures, bien que l'état stable de ces systèmes, à ces tempéra- tures, soit l’eau et l’acide carbonique. La plupart des actions énumérées plus haut, varialions de pression, de température, rayonne- - ment, elc., ont pour effet de rompre les liaisons internes qui s’opposaient à toute transformation “chimique. C'est ainsi qu'une élévation de tempé- ralure de 50°, ou que la présence de la mousse de platine, provoque la transformalion en eau du mé- lange d'hydrogène et d'oxygène, que l'acide chlo- rhydrique se forme sous l'influence d’un rayon solaire agissant sur le mélange de chlore et d'hy- drogène, que les ferments dédoublent le sucre en alcool et acide carbonique, que la présence de l'acide carbonique provoque l'oxydation du fer par l'oxvgène de l'air, etc. Dans tous ces cas, les actions qui se sont exer- cées sont suivies de transformations chimiques el - cependant elles ne sont pas ce qu'on peut appeler la cause de ces transformations, car, après avoir détruit les haisons, elles cessent d'intervenir. L'état final du système est indépendant de ces actions, el les énergies qu'elles mettent en jeu n'ont pas de relations déterminées avec les énergies déplacées _ par le changement chimique; elles sont, le plus souvent même, négligeables vis-à-vis de celles-ci. Cest ainsi que le travail nécessaire pour déclen- cher un mouton où un marteau pilon n'est en rien H. LE CHATELIER ET G. MOURET. — LES ÉQUILIBRES CHIMIQUES 99 comparable à la force vive acquise par la masse du mouton où du marteau pilon. Les résistances chimiques ne s'opposent pas toujours complètement aux transformalions; elles ne font parfois que les retarder et limiter la vi- tesse des réactions; celle-ci varie, en effet, beau- coup suivant la nature des systèmes. Dans les composés explosifs, la suppression des liaisons est brusque, el aucune résistance n'intervient pour re- tarder la transformation qui s'accomplit dans une durée extrèmement courte, D'autres fois, le même système setransforme {très rapidement à une tempé- rature élevée, très lentement à basse température ; l’éthérificalion, qui s’accomplit en quelques heures à la température de 250°, demande des années pour s’accomplir à la température ordinaire. La notion de liaisons ou de résistances chimi- ques entraine la notion du repos chimique. Toutes les fois qu'un système contient de telles liaisons, la transformation ne peut s'accomplir si les facteurs qui la déterminent ne peuvent sur- monter l'obstacle créé par les liaisons. [II Dissociation.— Quand, sous l'influence de certains agents:chaleurs, lumière, ferments, etc., les liaisons sont rompues, le système sort du repos etprend un mouvement chimique. Mais ce ne sont pas là les seuls agents qui aient un effet chimique; nous avons fait connaitre les résistances; il nous faut maintenant exposer ce que sont, dans l’état actuel de nos connaissances , les puissances, c’est-à-dire les causes directes, immédiates des phénomènes chimiques. Quand il ne s'agit que de changements d'états, vaporisation de l’eau, fusion de la glace, ces causes sont depuis longtemps connues ; ce sont les varia- tions de pression, de température et d'état élec- tique. Or ce sont encore ces mêmes causes, et seu- lement ces causes, qui interviennent dans les réac- tions chimiques. Les expériences sur la dissocia- Lion ont simplement permis d'étendre aux systèmes chimiques proprement dits les lois des change- ments d'état; ajoutons qu'elles n’en constituent pas moins, dans l’ordre scientifique, une révolution comparable, par son importance, à la découverte de la loi des proportions définies. La dissociation est un phénomène bien connu: il n'est pas inutile cependant d'en citer un exemple pour montrer quel en est le véritable caractère et en faire ressortir les analogies. Soit, comme exemple, la dissociation de l’iodure de mercure. Supposons ce corps renfermé dans un récipient en verre dont le volume puisse varier, au moyen d’un piston par exemple, la pression étant maintenue constante. Si l’on élève la température 100 H. LE CHATELIER ET G. MOURET. LES ÉQUILIBRES CHIMIQUES graduellement, le corps se volatilise, et la vapeur incolore ne subit d’abord aucun changement chi- mique; son volume augmente conformément à la loi de dilatation des gaz, en même temps que la chaleur absorbée suil une progression semblable. Mais vers la température de 500°, la vapeur com- mence à se colorer en violel, ce qui indique un commencement de décomposition et la mise en li- berté d’iode à l’état de vapeur. Si l’on élève un peu plus la température, la proportion d'iodure décom- posé augmente, puis la composition chimique reste stationnaire, tant que la température ne varie pas. Si, au lieu d'élever la température, on l'abaisse, c’est au contraire une combinaison d'iode et de mercure qui à lieu, et la proportion d’iodure dé- Aussi faible que soit une varia- une certaine composé diminue tion de température, il y a toujours quantité d'iodure décomposé ou reconstitué, quan- tité qui est d'autant plus petite que la variation de température est plus faible et qui, autant que les mesures chimiques permeltent de le constaler, tend vers zéro quand la variation de température tend elle-même vers zéro. Si au lieu de faire varier la température, sail varier la pression en laissant la température constante, on constlalerait des faits analogues Ces traits généraux de la dissociation ne s'ob- servent pas seulement dans les phénomènes de mais aussi dans des phé- on fai- simple décomposition, nomènes plus complexes de substitution, de double décomposition, etc., comme le déplacement par le chlore du brome d'un bromure métallique, ou la réaclion de la vapeur d'eau sur l’oxyde de carbone. La dissociation nous montre done que les vraies causes de la transformation chimique sont les varia- tions de pression et de température. Du moins, ce sont avec les variations d’élat électrique, les seules que nous connaissions, Tant que la pression, la tem- péralture et la force électro-motrice restent cons- lantes, un système chimique, même libre de toute liaisons intérieures, ne subira aucun changement. que l’une de ces quantités varie, le sys- transformalion chi- Mais dès tème subit, en général, une mique, et la quantité de malière transformée dé- pend uniquement de la grandeur de la variation, quelles que soient les autres modifications des circonstances extérieures. La pression, la lempérature et la force electro-motrise sont donc trois facteurs ou causes des changements chimiques par dissociation, et, pour mieux marquer en mème temps que pour le ce caractère commun, simplifier le langage, nous les réunirons sous nom de Zensions, en généralisant ainsi la significa- tion de ce mot, appliqué usuellement aux efforts de déformations élastiques par allongement, Equilibre chimique, — On peut, en résumé, expri- mer comme il suit les lois de la dissociation 1° L'état chimique d’un système est stationnaire, quand les tensions extérieures: pression, tempé= ralure et force électro-motrice, ne varient pas. 2° Il y a transformation chimique du système quand les tensions, ou l’une d'elles, varient, mé d’une quantité infiniment petite. Il est impossible de méconnaitre, dans cet ét Slationnaire, un véritable cas d'équilibre d’un nouvelle espèce, mais comparable à un équibbr mécanique, thermique ou électrique. Ce n’estpa À un cas de repos chimique, car lorsqu'il y a re c'est une varialion finie des ten= sions qui détermine une réaction chimique, {an dis que dans la dissociation, la variation la plus pos chimique, faible de pression, de température ou de force électro-motrice est suffisante pour entraîner une modification chimique du système. k La notion d'équilibre chimique est ainsi la cons séquence directe des faits de dissociation. : Réversibilité chimique. — La dissociation est un phénomène réversible !. L'expérience montre et effet que quand, après avoir fait varier une desk tensions ou toutes les tensions, on les ramène à leurs valeurs primitives, le système reprend le mème élal chimique. Quand après avoir passé d’ un. élal quelconque à un état différent, par voie de dissociation, un système repasse en sens inversem par les états intermédiaires, les tensions qui satis font à l'équilibre reprennent leurs valeurs primis lives. Cette existence de la réversibilité dans les équi=« chimiques est indispensable pour qu'on appliquer certaines des lois de la ther- libres puisse leur modynamique. IV Mouvement et déplacements chimiques. — On peul« maintenant, gràce à la distinction qui vient d’être élablie entre le repos et l'équilibre, faire une clas- sificalion rationnelle des modifications de toute nature qui s'accomplissent dans un système. 1° Changement physique. — Ce système peut subir des modifications d'ordre purement physique (mé- caniques, thermiques ou électriques), sans cesser d'être en état de repos chimique; il suffit pour cela que le système contienne des liaisons ou des résis- lances intérieures capables de s'opposer aux trans- 1 La réversibilité implique l'équilibre, mais c'est une pro- priété distincte de la stabilité de l’équilibre. Un équilibre peut être stable sans que la succession des états d'équilibre seit c’est le cas des corps imparfaitement élas- tiques, La réversibilité exprime ce fait que les valeurs des tensions qui satisfont à l'équilibre, pour un système donné, ne dépen- dent que de l’état du système, et un phénomène réversible n'est pas autre chose que la succession, l’ensemble des états d'équilibre des systèmes susceptibles de réversibilité, réversible ; La formations chimiques. C’est ainsi qu'un mélange d'oxygène et d’acide chlorhydrique peut être com- primé, échauffé sans devenir le siège d’aucune réaction chimique. En général, la transformation chimique s'accomplit plus lentement que les chan- gements mécaniques et thermiques, et quand les variations des tensions extérieures sont suflisam- ment rapides, le système peut être considéré, dans cet intervalle de temps, comme restant au repos chimique. - Dans ces changements, le système passe d’un état de repos à un autre état de repos, identique -àu point de vue chimique. Ces changements peu- vent d'ailleurs être réversibles ou non, suivant qu'il y a ou non équilibre entre les tensions du système et les tensions extérieures. 2° Mouvement chimique. — Le même système à l’état de repos, c'est-à-dire hors d'équilibre chi- mique, pourra, s'il est abandonné à lui-même après qu'on a supprimé les liaisons qui s'opposent aux transformations, éprouver des modifications chimiques spontanées, phénomène qui n’est jamais réversible, puisqu'il ne consiste pas dans une suc- cession d'états d'équilibre. Dans ce cas, le corps part d’un état de repos, pour se rapprocher d'un état d'équilibre. Ainsi le mélange d'oxygène et d'acide chlorhydrique, qui, chauffé à la tempéra- Lure de 400°, reste à l'état de repos, entrera en réaction au contact d'une petite quantité d'oxyde de cuivre qui suffit pour annuler l'action des liai- sions internes (procédé Deacon pour la fabrication du chlore); il se produit alors du chlore et de la vapeur d'eau. Le retour d’un système à l’état d'équilibre par voie irréversible peut se faire dans des conditions différentes au point de vue des circonstances exté- rieures. Les deux cas les plus importants à consi- dérer sont celui où le système chimique est isolé, et où la transformation chimique s'effectue à vo- | lume invariable et sans échange de chaleur avec l'intérieur (combinaison de H -H O en vase clos),et celui où le système est maintenu sous 7ensions fixes : c'est-à-dire où la transformation chimique s’accomplit sans que la pression, la température et la force électro-motrice extérieures varient. C'est le cas de la plupart des réactions effectuées dans nos laboratoires. Les quantités de chaleur et de travail dégagées ou absorbées par le fait de la réaction chimique dans une transformation s’effectuant à Tensions fixes sont appelées chaleur latente, travail latent à Tensions fixes C'est cette chaleur latente que l’on mesure dans les ‘opérations calorimétriques qui s'effectuent presque toujours à Tensions fixes. 3° Dissociation. — Un système chimique sans liai- sons intérieures ou dontlesliaisons ont été rompues H. LE CHATELIER ET G. MOURET. — LES ÉQUILIBRES CHIMIQUES 101 par un arlifice convenable (action de présence,action de la lumière, ete.), et qui est par suite à l'état d’é- quilibre chimique, peut éprouver des modifications réversibles à la fois d'ordre physique et chimique. Ce sont en fait les changements subis dans la dis- sociation (dissociation de l’iodure de mercure, du carbonate de chaux, dissolution des sels, vaporisa- lion de l'eau). Dans ce cas, l’état chimique du sys- tème varie avec son état mécanique, thermique et électrique. Syslèmes à tensions fixes de dissociation. — L'équi- libre chimique peut être stable, et alors si l’une des tensions varie infiniment peu, le coefficient de dissociation varie d'une quantité infiniment petite, et sa valeur est entièrement déterminée pour des valeurs déterminées des Tensions d'équilibre ; c'est le cas de la dissociation de l’iodure de mer- cure, de l'acide iodhydrique, ete. Il n’y a pas de cas d'équilibres chimiques instables; mais il y a des équilibres chimiques indifférents; toute varia- lion d’une Tension entraine alors la transforma- lion chimique d’une masse finie du système, et le coefficient de dissociation peut varier, sans que les Tensions d'équilibre varient. De plus ces variations ont pour limite même, les états limites du système. C'est là la dissociation à Tensions fixes, où l’on peut faire passer le système d’un état chimique défini à l'état faire varier les tensions d'équilibre. Ainsi, l’eau peut être vaporisée com- plètement, par exemple à 100° et sous la pres- et le carbonate de chaux peut être dé- opposé, sans sion 760, composé totalement dans les mêmes conditions de lixité des tensions, à la température de 812° et sous la pression 760", Dans ces systèmes à lensions fixes de disso- cialion, on observe, et c’est là ce qui constitue la loi des Tensions fixes, que les éléments libres ho- mogènes qui composent les états intermédiaires du système (eau et vapeur dans le premier exemple cité; sel, acide et base dans le second exemple) conservent un état et une composition invariables, quel que soit le degré de dissociation. Mais toutes les fois que la transformation chimique a pour effet de faire varier l'étal chimique des consti- tuants homogènes du système, soit en créant ou supprimant des composés définis, soit en dimi- nuant ou augmentant le titre des mélanges, soit en modifiant l’état d'agrégalion des éléments(con- densation, cristallisation, ete.) l'expérience a fait reconnailre que les tensions d'équilibre varient avec le degré de dissociation. Cest le cas des sys- tèmes totalement homogènes, tels que celui formé par la dissociation de la vapeur d'iodure de mer- cure, ou de systèmes formés de la juxtaposition d'éléments homogènes dont la composition peut varier. Tel est le cas de la dissociation du carbo- 102 nate de baryte; en effet le carbonate de baryte, sel fusible, dissout la baryte, en sorte que le système comprend un mélange dont le titre varie avec le degré de dissociation. De même une dissolution saline non saturée, dont la concentration est va- riable, aura à température fixe une lension de vapeur variable avec cette concentration. L'existence des tensions fixes de dissociation n’a done lieu que dans des cas particuliers d'équilibre chimique et n'a pas la généralité qu'on lui a sou- vent attribuée. Mais l’étude des systèmes à ten- sions fixes présente un grand intérêt, parce que, d'une part, tout système à tensions variables peut être considéré comme un système à tensions fixes, s'il s’agit d’un changement chimique infiniment faible, et que, d'autre part, les lois numériques des systèmes à tensions fixes sont les plus simples et les données numériques qui s’y rapportent, les plus faciles à recueillir. En outre, cette loi des ten- sions fixes formulée par M. Debray a été le point de départ de la majeure partie des recherches rela- tives à la dissociation qui ont été effectuées par les élèves de H. Sainte-Claire-Deville. Du caractère de la dissociation à tensions fixes résulle cette conséquence que tout élément libre R. KŒHLER. — LES ÉCHINODERMES A & homog ène engagé dans un système en équilibré n'inte rvient pas par sa masse, On peut, dans | système, ajouter une certaine masse de cet élément ou en enlever sans troubler l'équilibre ; on peut fair varier, par exemple, la quantité de sel au contael d’une solution saturée, la quantité de chaux au con: tact du carbonate de chaux dissocié. Tandis qu'en mécanique la masse intervient dans l'équilibre, e est un facteur de la force mécanique, en chimie l& masse est sans influence, el la force chimique d'u corps, c’est-à dire sa capacité de réaliser un éta d'équilibre, ne dépend pas de sa masse. Dans les systèmes à tensions variables, dans les systèmes homogènes par exemple, toute variations dans les proporlions de l’un des corps engagé dans. un mélange détruit l'équilibre; en sorte que la densité apparente du corps (c'est-à-dire la densité du corps supposé occuper le volume total dun mélange), est un facteur interne de l'équilibre M c’est ce que l’on appelle l’action de masse, expression: impropre puisque la masse absolue du corps es sans influence sur l'équilibre. (La fin prochainement.) H. Le Chatelier, Ingénieur en chef des Mines, G, Mouret, Ingénieur des Ponts et Chaussées. LES IDÉES NOUVELLES SUR LES ÉCHINODERMES | Nos connaissances sur l’organisation des Échi- nodermes ont fait en ces dernières années des progrès considérables, et la morphologie générale du groupe peut être indiquée dès maintenant, au moins dans ses traits essentiels. Après avoir lu les importants travaux qui ont paru depuis dix ans sur ce sujet, on pourra bien reconnaitre qu'il reste encore cerlains problèmes de détail à élucider; on remarquera que les idées de l’école française différent sur des points importants de celles des naturalistes allemands et anglais; mais il est pos- sible de prévoir un moment où l'accord se fera. Combien nos connaissances sont plus complètes qu'à l'époque, peu, éloignée cependant puisqu'elle remonte à quelques années à peine, où l’on croyait à l'existence d’un cœur et d’un système circula- toire, où l’on confondait ce système avec l'appareil aquifère ! Nous ne pouvons rappeler ici les trans- formations successives des données classiques sur les Échinodermes, malgré tout l'intérêt que pré- senterait cette revue historique; nous nous propo- sons seulement d'indiquer, non pas tous les détails de l’organisation de ces animaux, mais seule- ment les traits de structure caractéristiques, de montrer sous quelle forme plus ou moins modifiée les mêmes dispositions fondamentales se retrou- vent dans chaque classe, el de rechercher les ren- seignements que fournissent l’embryologie et la paléontologie réunies sur l'évolution du groupe. L'embranchement des Echinodermes constitue l'un des groupes les plus nalurels et les plus homo- gènes du règne animal. Sans parler, pour le mo- ment, de l’organisation interne dont nous aurons à montrer l'uniformité remarquable, l’incrusta- tion calcaire des téguments et la symétrie, ordi- nairement pentlaradiée, sont des caractères qui frappent immédiatement, le dernier surtout, L’As- térie (fig. 1) a cinq rayons; le Crinoïde (fig. 2, À et B) a cinq bras ramifiés; l'Oursin (fig. 3) constitue une sphère avec cinq bandes renfermant toutes les mêmes organes; el l'Holothurie (fig. 4) offre un corps cylindrique avec cinq bandes analogues. Quelle que soit la forme du corps d'un Échino- derme. il est toujours possible de faire passer par la bouche cinq plans verticaux également dis- tants l’un de l’autre, et qui renferment les organes les plus importants ; ce sont les plans radiaires ou radius, entre lesquels se trouvent cinq plans inter- médiaires ou énterradius. La bouche est située au point de réunion des - cinq rayons; souvent l’anus occupe une position diamétralement opposée el ces deux ouvertures correspondent aux pôles oral et aboral qui déter- minent l'axe principal au corps !. Echinaster sentus. Fig. 1. — Type D'ASTÉRIE : Quoique la forme du corps des Échinodermes varie considérablement d'une classe à l’autre, on s'explique très facilement comment les différentes formes dérivent l’une de l’autre. Prenons, par exemple, l'Owrsin que tout le monde connaît : son corps représente une sphère un peu aplatie vers l'un des pôleset cette forme voisine de la sphère caractérise tout le groupe des Échinides (fig. 3). Si l’aplatissement s'exagère beaucoup, l’axe prin- cipal deviendra très court et le corps sera discoïde ; les rayons s’accroissant plus que les parties inter- radiaires et devenant des bras, on obtiendra une étoile comme chez les Stellérides ou Etoiles de mer (fig. 1). Ces bras sont excessivement longs chez les Ophiures, tandis que dans le groupe des Crinoïdes (fig. 2) ils se ramifient en même temps que la partie du corps opposée à la bouche donne naissance à une longue tige qui sert à l’animal à …. se fixer (fig. 2, A). Enfin si l’axe principal, au lieu - de se raccourcir, s’allonge beaucoup, l'organisme ! La position habituelle des Échinodermes est d'avoir la bouche en bas; mais chez les Crinoïdes fixés, la bouche est dirigée vers le haut : il faut donc préférer, dans les descrip- tiens, les termes oral et aboral à ceux de ventral et de dorsal, R. KŒHLER. — LES ÉCHINODERMES 103 perd la forme globuleuse et devient cylindrique c’est ce qui arrive chez les Holothuries (fig. 4). ji b hi a V3 Il Fig. 2.— Type DE CRINOÏDE : Pentacrinus asteria Lin. Il Une des particularités les plus caractéristiques des Échinodermes consiste dans leur appareil aqui Fig. 3. — Typs8 n’Ecninine : Hemicidaris crenularis. fère. Cet appareil est situé près de la bouche; il entoure l’œsophage à la facon d’un anneau . — Tyre D'HororauRie : C'ucumaria pentacta. 104 R. KŒHLER. — LES ÉCHINODERMES (fig. >, 6 et 7, f.0.). Cet anneau porte des branches radiaires (f.r.), qui fournissent des ramificatiuns Fig. 5. — Coupe sagittale d'une Ophiure, d'après Kœhler. — f.0., cercle aquifère oral; f.r., troncs aquiféres radiaires ; k., canal hydrophore; a. 0., cercle oral sous-ambulacraire ; a.T., Cavité sous-ambulacraire-radiaire; p.0., cercle oral plastidorène ; p r , ses prolongements radiaires ; g.p., glande ovoïde; g.s., son enveloppe; n.0., cercle nerveux oral; n.r., nerfs radiaires ; t. d., tube digestif. latérales s'ouvrant à la base des tubes ambula- craires ; l'eau ambiante pénètre dans cet appareil par un tube (k) autrefois appelé canal du sable, qui s'ouvre sous la plaque madréporique criblée de trous, et provoque ainsi l'érection des tentacules !. L'importance phylogénétique de cet appareil est indiquée par son apparition précoce chez la larve. Fig.6. — Coupe sagittale d’un Oursin régulier, d’après Kæhler. — h., canal hydrophorc; t. d., tube digestif (æsophage); J. 0, cercle aquifère oral; f. r., ses prolongements ra- diaires ; p. o., anneau plastidogène oral; p. r., ses prolonge- ments radiaires; e. k., canal de Kæhler ; g. p., glande plas- tidogène ou madréporique; ». 0., cercle nerveux oral: n. r., ncrfs radiaires. L'ébauche de l'appareil se constitue de bonne heure sous forme d’un anneau périæsophagien qui pousse rapidement un prolongement latéral; ce dernier ne tarde pas à s'ouvrir au dehors; il fonc- tionne dès lors comme canal hydrophore. Il con serve chez l’adulte les mêmes relations que chez la larve; il se complique seulement dans sa région distale par le développement de nombreuses rami- fications secondaires qui traversent la plaque ma- dréporique et s'ouvrent au dehors par des enton- noirs vibratiles. Le trajet du canal hydrophore ! La dénomination de canal du sable, qui rappelle l’incrus- tation calcaire tout à fait anormale de ses parois, doit être remplacée par celle de tube ou canal hydrophore proposée par M. Perrier. (fig. 5, 2.) varie d’ailleurs suivant la position de la plaque madréporique qui peut êlre située sur la face orale ou sur la face aborale. Lorsqu'il. existe plusieurs plaques madréporiques, on trouve aussi un nombre correspondant de canaux hydro- phores ; c'est ce qui arrive chez les Asléries à plus de cinq bras. Cette augmentalion des canaux hydrophores, tout à fait anormale chez les Astéries, devient la règle chez les Crinoïdes (fig. 7). Ici le système aqui- fère offre un haut degré de complication; mais on peut facilement se rendre comple des transforma- tions à la suite desquelles ils’estétabli. Tout d'abord il se forme chez la larve un seul canal hydrophore comme d'habitude, puis, à côté de lui, en apparais- sent successivement d'autres qui vont tous s'ouvrir au dehors par des entonnoirs vibratiles. De plus la région moyenne de ces canaux se modifie étrange- ment : elle se développe, s’élargit, se cloisonne en tous sens, et entre en rapport avec des canaux dé- pendant de la cavité générale pour former un plexus intercalé entre les extrémités distale et proximale des canaux hydrophores, le plezus labial (fig.7,p.1.). Le système comprend donc,en définitive,desenton- noirs vibratiles (fig. 7, ».) (extrémités distales des canaux hydrophores primitifs) amenant l’eau dans les cavités du plexus labial, dans lesquelles plon- gent à leur tour les fubes hydrophores (h) qui par- tent de l'anneau aquifère (extrémités proximales de ces mêmes canaux). Chez les Holothuries, la communication du canal hydrophore avec l'extérieur, qui s'établit chez la larve, s’oblitère chez l'adulte et le canal s'ouvre dans la cavité générale. Le système aquifère constitue un appareil bien distinct et d'une étude facile, sauf chez les Cri- noïdes, où on l’a méconnu pendant fort long- temps. Il nen est plus de même de ces for- malions importantes, très caractéristiques, elles aussi, des Échinodermes, et dont on désignait au- trefois l’ensemble sous le nom très impropre de système circulatoire. De combien de recherches ce prétendu système circulatoire a été l'objet, com- bien de descriptions différentes en ont été données, c'est ce qu'on imaginerait difficilement. Disons de suite que les formations décrites sous ce nom ne constituent pas moins de trois systèmes distincts. Le premier système est composé de canaux en relation avec la cavilé générale et comprenant un anneau œsophagien ou labial (fig. 5, &.0.) dans le- quel s'ouvrent cinq branches radiaires (a... Ces canaux sont placés en-dessous ou en dehors des vaisseaux aquifères : aussi M. Perrier leur a-t-il donné le nom de cavilés sous-ambulacraires, mieux choisi que celui de cavités péritoneales sous lequel on les désignait jadis. Un diverticulum de l'anneau R. KŒHLER. — LES ÉCHINODERMES 105 labial, formant une sorte de sac (g.s.) qui enveloppe - la glande ovoïde, appartient aussi à ce système. Ces cavités constiluent des gaines protectrices aux nerfs et à l'appareil plastidogène dont nous parle: rons plus loin. Bien qu'elles communiquent avec la cavité générale, elles ont une origine embryogé- nique différente. La cavité générale s'établit aux dépens de diverticules de l'intestin de la gastrula : - elle est d’origine entérocælienne; les cavités sous- ambulacraires apparaissent au contraire sous forme de fentes, de lacunes, dans le tissu conjonctif, les- quelles s'organisent ensuile en canaux ; elles sont d’origine schizocælienne et entrent secondairement en rapport avec la cavité générale. Ces cavités ment peut seule montrer la signification. Enfin, ces canaux peuvent acquérir une ouverture externe ; certains d’entre eux s'ouvrent sur les faces latérales ou dorsales du disque à l'aide d’entonnoirs vi- bratiles(v')detous …. x 3 ÿ Fig. 8. — Coupe transversale d’une points compara- zone ambulacraire d'Echinide régu- bles à ceux dont lier, d'après Prouho; ». r., nerf ra- à : diaire ;f.r., canal aquiféreradiaire ; nous parlions ad p.r., cordon plastidogène radiaire; propos desc tone a. r., cavité sous-ambulacraire. aquifère. Il en résulte donc que les Crinoïdes Fig. 7. — Coupe sagittale d’un Crinoïde (Comatule), d’après M. Perrier. Mémes lettres que dans les figures précédentes; g. c., parties endiguées de la cavité générale formant l'organe cloisonné; d. n., anneau nerveux dorsal; d. ». prolongements radiäires; h., tubes hydrophores; p conduisant dans le plexus labial: v', peuvent d’ailleurs rester simples (Échinides) (fig. 8) ou se diviser en deux (fig. 9) par une cloison verli- cale (Astéries) ou horizontale {e.) (Ophiures, Holo- thuries), ou former un grand nombre de cavités secondaires. C’est ce qui arrive chez les Crinoïdes dont les bras renferment plusieurs cavités (fig. 10, a.r.) et chez lesquels l'anneau labial s’est trans- formé en un plexus labial; l'enveloppe de la glande ovoïde s'est creusée de canaux anas- tomosés qui forment le plerus génital (fig. T, p.q.) el qui communiquent avec le plexus labial. De plus, les choses se compliquent chez les Crinoïdes par le cloisonnement de la cavité générale elle- même, qui se divise en nombreux compartiments, prend même par place une structure spongieuse (g.e.); aussi existe-{-il chez l'adulte un enchevêtre- ment inextricable de canaüx qu'on appelait autre- fois des vaisseaux, et dont l’étude du développe- REVUE GÉNÉRALE, 1891, es; p. d:, plexus labial; p: g., entonnoirs vibratiles conduisant dans les cavités des bras. SES plexus génital; »., entonnoirs vibralles adultes possèdent deux sortes d’enlonnoirs vibra- tiles : les uns (v), qui s'ouvrent sur la face orale, conduisent l’eau dans le plexus labial et de là, parles tubes hydro- phores, dans l'anneau aquifère : ils corres- pondent aux canaux hydrophoresprimilifs; € les autres (') condui- sent l’eau, après un Fig. 9 — Coupe transversale d’un bras d'Ophiure, d’après long cireuil à travers les cavités du corps, dans les cavités sous- ambulacraires des bras. Kæhler; ».7r., nerf radiaire ; f.x.; canal aquifère radiaire; p.r., cordon plastidogène ra- diaire ; «., cloison divisant en deux étages la cavité sous- ambulacraire. Chez les Holothuries et les Oursins, l'anneau labial a disparu. 106 R. KŒHLER. — LES ÉCHINODERMES III Un autre appareil très importänt pour la physio- logie de l'échinoderme est l'appareil plastidogène, qui donne naissance aux corpusecules figurés, ou amæbocytes, du liquide de la cavité générale. Cet appareil comprend une glande centrale volumi- neuse {fig. >, 6 et 7 g. p.), appelée indifféremment glande ovoide, dorsale où madréporique, — c'était le cœur des anciens zoologistes — qui fournit un prolongement (fig. 6, c. Æ.) formant autour de l'æso- phage un anneau particulier (p. 0.), l'anneau de Ludwig, duquel partent cinq prolongements ou cordons radiaires (y. r.). Toutes ces parties sont renfermées dans les cavités sous-ambulacraires. La glande el ses prolongements radiaires présen- tent d'ailleurs la même structure : des trabécules conjonctives formant des mailles dans lesquelles sont logées des cellules. À mesure qu’elles se déve- loppent, les cellules se rapprochent de la péri- phérie, se chargent de pigment et se délachent de l'organe qui leur avait donné naissance pour tomber dans le liquide de la cavité générale sous forme d'amæbocytes. Cette formation d'éléments figurés a surtout son siège dans la glande ovoïde qui est l'organe plastidogène par excellence. Il est important de remarquer que cet appareil est constitué par des formations plei- nes; cependant, en certainspoints, les mailles du tissu conjonctif peuvent s'élargir au point Fig. 10, — Coupe transversale d’un de former de véri- bras de Comatule, d’après Hamann. , 4: Mèmes lettres que dans les figures tables canaux à pa- précédentes ; n. e., système nerveux RATE rois irrégulières. épithélial des bras; d. »., nerf dor- a sal des bras; a. r., cavités des bras L'appareil plas- dont l’ensemble répond au système 4: Te A e des cavités sous-ambulacraires: #., tidogène offre ie testicule. plus grande sim- plicilé chez les Stellérides. Chez les Échinides réguliers, l'anneau de Ludwig est élargi et creusé d'une cavité, et il est en rapport avec l'appareil absorbant. Il en est de même chez les Holothuries où l'anneau est diffus et très mal limité; ici la glande est alrophiée et n’est plus représentée que par une trainée cellulaire dans le mésentère dorsal. Chez les Crinoïdes, les dispositions sont plus com- pliquées. Outre les cordons radiaires qu'elle envoie dans les bras, la glande fournit un certain nombre de branches qui pénètrent dans les canaux du plexus labial, et s'y ramifient (y', fig. 7): l'anneau plastidogène est donc ici diffus et spongieux. L'appareil plastidogène ne fournit pas seulement les corpuscules figurés du liquide de la cavité gé= nérale; il donne aussi naissance aux organes génilaux. Chez les Crinoïdes, les cordons radiaires des bras, autrefois appelés les rachis génitaux, en= voient à droite et à gauche des branches qui pénè= trent dans les pinnules et y constituent les orga= nes génitaux. Chez les Astéries et les Échinides, c'est un prolongement de la glaude ovoïde qui, chez la larve, constitue l'ébauche des organes gé= nitaux ; mais les connexions de ces organes avec la glande disparaissent de fort bonne heure et lon n'en retrouve plus de traces chez l'adulte. k Les deux appareils que nous venons de décrire, l'appareil plastidogène et le système des cavités sous-ambulacraires, se présentent chezles Stelléri- des sous leur forme la plus simple et en quelque sorte la plus typique. Mais dans les autres classes, il vient s’y ajouter un système absorbant formé de lacunes développées dans les parois de l'intestin, et dont l'apparition cause des troubles plus ou moins profonds dans les dispositions primitivement sim ples des deux autres systèmes, avec lesquels il peut mème entrer en communication. Chez les Echini- des, la disposition de ces lacunes et des canaux dans lesquels elles se déversent est très compliquée; mais ces canaux se réunissent en définitive en un canal qui s'ouvre dans le cercle plastidogène oral. Comme ce cercle est creux, les substances absorbées par les lacunes intestinales pourront le traverser facilement et de là elles pénétreront, par l'intermédiaire du canal appelé par M. Perrier canal de Kæhler Mg. 6, c.k.), dans l'organe plastidogène, auquel elles fourniront les matériaux nécessaires à la formation des amæbocytes. Les systèmes plastidogène et absorbant possèdent donc en commun le même anneau œsophagien, et c'est grâce à cetle circonstance qu'on a si longtemps confondu ces deux systèmes; mais il est fort im- portant de les distinguer et de savoir que l’appa- reil absorbant ne fait qu'emprunter à l'appareil plastidogène son anneau œsophagien. De plus, l'appareil absorbant entre aussi en relation avec l'appareil aquifère par des communications qui s'établissent au niveau des vésicules de Poli chez les Réguliers, et de la glande ovoïde, à la suite d'une disparition partielle du tube hydrophore, chez les Irréguliers. Chez les Holothuries, le système absorbant est très développé; il emprunte aussi à l'appareil plas- tidogène son anneau œsophagien, mais il ne pa- rait contracter aucune relation avec l'appareil aquifère. Chez les Crinoïdes, les parois de l'intestin renferment également de grandes lacunes qui se continuent dans les feuillets mésentériques et sont ainsi en communication avec les cavités des plexus labial et génital. D'autre part, ces dernières sont en communication avec les cavitéssous-ambulacraires; aussi, par suile de l'établissement de ces connexions mulliples, le système absorbant est-il moins dis- tinct que dans les deux groupes précédents. L'apparition de l'appareil absorbant chez les Echinodermes a done modifié, à des degrés divers, lesrapports entre eux et la séparation originelle des systèmes aquifère, sous-ambulacraire et plastido- gène, qui est encore conservée chez les Stellérides. Mais quelles que soient les modifications qui sur- viennent,et malgré les connexions qui s’établissent secondairement, tous ces appareils n’en conservent pas moins leur autonomie. L'étude que nous en avons faite nous a montré qu'il ne saurait plus main- tenant être question d'un système circulatoire chez les Echinodermes. Il y a un appareil destiné à pro: duire les amæbocytes; un appareil absorbant qui apporte à celui-ci les substances assimilées; un appareil aquifère qui permet l'entrée et la sortie de l’eau de mer, c’est-à-dire l’extension ou la ré- traction des tubes ambulacraires: enfin des lacunes schizocæliques ou des portions endiguées de la cavité générale formant des canaux ou des plexus, mais il n'ya ni sang, ni vaisseaux, ni système circu- latoire, ainsi que M. Perrier l’a nettement indiqué le premier. Les quatre appareils que nous venons de décrire sont absolument caractéristiques des Echino- dermes, et l’on rechercherait en vain des disposi- tions analogues dans d’autres groupes; il était donc important d’en connaitre les modifications dans les quatre classes de ce groupe. Quant aux autres appareils, leur importance est beau- coup moindre pour la morphologie générale du groupe ; ils n'offrent guère qu'un intérêt descrip- tif et ils sont d’ailleurs suffisamment connus par les descriptions classiques. Je dirai cependant quelques mots du système nerveux qui a été fré- quemment l’objet de descriplions inexactes et qui offre une évolution particulièrement intéressante. IN F C'est chez les Astéries que le système nerveux offre la disposition la plus primitive et la plus em- bryonnaire : il est peu dévelcppé et encore peu distinct de l’épithélium. Il consiste en cinq rubans sous-épithéliaux radiaires qui partent d’un an- neau sous-épithélial péribuccal. Dans les autres groupes, le système nerveux abandonne sa situa- tion superficielle pour s'enfoncer dans les tissus sous-jacents, condition que fait déjà présager la migration, chez les Astéries, de cellules nerveuses dans la cloison médiane qui divise la cavité sous- ambulacraire. Le système nerveux offre la même disposition chez les Ophiures, les Échinides et les R. KŒHLER. — LES ÉCHINODERMES 107 = Holothuries (fig. 5 et6,».0. et n.r.); mais chez les Crinoïdes, il est beaucoup plus compliqué. Il existe d’abord un anneau buccal avec branches radiaires (lig. 7,7. 0. el n.r.) ayant la même disposition que dans les {rois classes précédentes, avec cette dif- férence que les branches radiaires sont doubles (fig. 10, ».r.). De plus il existe dans chaque bras, au niveau de la ligne médiane, un système nerveux sous-épithélial (7. e.) Les Crinoïdes offrent donc réunies les dispositions observées chez les Astéries d’une part, chez les autres Échinodermes d'autre part. Mais il existe en plus un gros anneau ner- veux aboral (fig. 7, d. n.), envoyant de nombreuses ramifications dans les bras e{ dans le pédoncule. L'apparition de ce système nouveau est sans doute lié à la présence d’un pédoncule. Le système nerveux a donc subi chez les Échi- nodermes un perfectionnement depuis les As- téries, chez lesquelles il garde une structure très simple, jusqu'aux Crinoïdes qui ne possèdent pas moins de trois systèmes nerveux. Mais si nous lais- sons de côté le cercle nerveux aboral et ses dépen- dances des Crinoïdes, qui représentent une forma- lion tout à fait spéciale, nous voyons que le système nerveux, lui aussi, est composé chez les Echinodermes, de parties très semblables et dis- posées de la même manière. En résumé, l’étude des systèmes organiques les plus importants et les plus caractéristiques nous révèle, dans tout le groupe de Échinodermes, une très grande conformité de structure. Tous les re- présentants actuellement vivants de ce groupe sont construits, non seulement suivant le même plan de structure radiaire, mais aussi suivant le même plan organique. Les différences les plus importantes que l'on observe d’une classe à l’autre sont ordinaire- ment des modifications introduites secondairement (sauf bien entendu des différences dues, par exem- ple, à l’absence de système absorbant ou à l'état de simplicité du système nerveux), et elles ne vien- nent point troubler le plan de structure primitive- ment établi. Les principaux phénomènes du développement restent identiques dans les différentes classes d'Échinodermes, ell’on trouverait difficilement dans le Règne animal un autre exemple d’une embryo- génie présentant une aussi grande uniformité. Tous les Échinodermes sont des Æntérocæliens, c'est-à- dire qu'après une segmentation totale il s'établit un gastrula par embolie avec deux diverticules en- térocæliens; mais ce qui caractérise le groupe, c'est qu'une seule de ces vésicules formera la ca- vité générale, tandis que l’autre formera l'appareil aquilère. À partir du stade gastrula, les larves prennent les formes de Pluteus, Bipinnaria, Auri- cularia, ete., caractéristiques des différents groupes 108 R. KŒHLER. — LES ÉCHINODERMES et ne différant, en somme, les unes des autres que par la disposilion des bandes ciliées ; elles perdent leur symétrie bilatérale pour acquérir la symétrie radiaire et subissent une métamorphose profonde dans les détails de laquelle nous ne pouvons entrer. Or, malgré les ressemblances que présentent entre elles, dans leur organisation et leur dévelop- pement, les différentes classes d'Échinodermes, et sur lesquelles nous venons d'attirer l'attention, il n'en est pas moins fort difficile de les rattacher les unes aux autres par un lien phylogénétique et de nous rendre compte de l’évolution du groupe. La difficulté tient à ce que l'embryologie ne nous fournit à cet égard aucun renseignement précis, et à ce que les données fournies par la paléontologie ne peuvent avoir l'importance qu'elles auraient, n'élait une circonstance qui rend leur interpréla- ton beaucoup plus délicate. C’est qu'en effet la morphologie externe des Échinodermes et la dis- position des plaques du test ne sont pas du toul ne accord avec la morphologie interne : ainsi nous trouvons les plus srandes ressemblances analo- miques entre les Astéries et les Ophiures, tandis qu'il est impossible d'homologuer d'une manière satisfaisante certaines de leurs plaques. Or le groupe le plus ancien des Echinodermes, celui des Cystidés, ne nous est connu que par des restes fossiles; et non seulement nous ne con- naissons pas leur organisalion, mais même nous trouvons leur test des structures particu- lières, àes ouvertures, que nous ne pouvons rap- porter à des appareils connus chez les autres Échinodermes. Et qui nous dit que ces formes sur que nous considérons comme voisines, à les ju- ger par leurs caractères extérieurs seuls, ne dif- féraient pas l’une de l’autre par leur organisation interne? Si nous ne connaissions les Crinoïdes qu'à l’état fossile, nous ne supposerions certes pas que leur organisation est plus compliquée que celle des Échinides, qui cependant ont fait leur appari- tion longtemps après les Crinoïdes. Est-ce à dire qu’il faille pour cela renoncer à chercher, et surtout à trouver, des liens de parenté entre les cinq classes d'Échinodermes connues ? Non, incontesta- blement, et je veux en terminant cet article, exa- miner rapidement les renseignements que nous fournissent à cet égard, l’embryologie et la paléon- tologie. V L’anatomie comparée et l'embryologie mettent Loutes deux en lumière un fait important, c’est que tous les Échinodermes actuellement vivants des- cendent d'une souche unique : le fait est mainte- nant indéniable. Mais quel a été cet ancêtre unique, qui, bien entendu, n'existe plus actuelle- ment? La réponse la plus satisfaisante à cette question a été fournie par Semon. Cet auteur a montré que toutes les larves d'Échinodermes, avant d'acquérir leurs caractères différentiels, passaient toutes par un même stade auquel il donne le nom de Pentactula (fig. 14). Cette phase est caracté- risée par la présence d'un tube digestif dont l'ouverture antérieure est entourée de cinq tenlacules (les tenta- cules primaires), d'un anneau aquifère en- voyant des branches dans les tentacules, et d'un tube hydrophore qui s'ouvre au dehors par un pore dorsal, en- fin par la présence d'un anneau nerveux. La constance du stade Pentactula dans tout le groupe doit le faire considérer comme un stade palingénésique, et Semon en conclut que tous les Échinodermes ont eu pour ancêtre la même forme primilive représentée dans l'ontogé- nie par la Pentactula et à laquelle il donne le nom de Pentactwa. Cel ancêtre unique a fourni toutes les classes d'Échinodermes qui s'en sont détachées en direction divergente, car l'anatomie comparée, pas plus que l'embryologie ne permet de rattacher les Holothuries aux Échinides, les Crinoïdes aux Astéries et aux Échinides par des liens de descen- dance. Cette Pentactæa devait avoir avec les larves des autres Entérocæliens, du Balanoglossus et des Chordati en particulier, des relations très étroites, mais qu'il nous est absolument impossible de pré- ciser actuellement. L’étude de l’organisation et du développement des Échinodermes permet done de reconslituer l'ancêtre Lypothélique du groupe. La Paléontologie à son tour, et dans un tout autre domaine, nous fournit des données qu'on ne peut comparer avec celles de l'embryologie puisqu'il s'agit d'un ordre de faits lout différent, mais qui, tout au moins, ne sont point incompalibles avec elles. On a admis pendant longtemps que les Crinoïdes — auxquels on ratlachait, comme sous-ordre, les Cystidés — élaient les ancêtres de tous les Échino- derires. Loven en particulier a cherché, avec un grand talent, à homologuer l'appareil apical d’un ichinide avec celui d’un Crinoïde. Mais cette ma- nière de voir ne s'appuie que sur un petit nombre de preuves paléontologiques, et, de plus, la com- plexité anatomique que nous avons rencontrée dans l'organisation des Crinoïdes, en ce qui concerne particulièrement le système nerveux, l'appareil aquifère, etc., s'oppose absolument à ce qu'on Fig. 11. — Larve Pentactula, d'aprés Semon, mé mme ré tn tte titi R. KŒHLER. -— LES ÉCHINODERMES 109 fasse de cette classe la souche des autres Échino- dermes. À ce point de vue, il serait plus ralionnel de considérer les Astéries, comme le type le plus primitif puisqu'elles offrent l'organisation la plus simple; de plus les Astéries se retrouvent jusque dans les terrains les plus anciens. D'ailleurs cette hypothèse a été maintes fois développée; elle est abandonnée aujourd'hui. Les études paléontologiquesles plus récentes ont montré que les Échinodermes ne constituent pas, par leur ensemble, une série linéaire, et ce résultat est parfaitement d'accord avec les résultats fournis par l’embryologie et l’anatomie comparée. Il existe cependant un grand nombre de formes de passage, mais ce sont les Cystidés qui représentent en quelque sorte le point commun vers lequel con- vergent tous les Lypes de transition. La connais- sance de ce fait important est due en grande partie aux recherches de Neumayr qui s’est appliqué à faire ressortir les liens qui unissaient les Cystidés aux autres classes d'Échinodermes. Ainsi que l’a montré ce savant, les Crinoïdes se rattachent par le Cystocidaris, et les Stellérides par le Palæodiscus, aux Cystidés dont le test est formé de plaques nombreuses et irrégulièrement disposées Lels que l'Agelacrinus et le Mesiles, Llandis que les Cystidés à plaques peu nombreuses et régulièrement disposées sont reliés aux Crinoïdes par le Porocrinus et l’Hybocystites, et aux Blastoïdes par les genres Codo- naster el Asterosblastus. Il est à remarquer que toutes les formes de passage que nous connaissons apparliennent aux terrains les plus anciens, et qu'on n'en trouve aucune dans les terrains plus ré- cents, circonstance qui vient encore justifier la va- leur que nous accordons à ces formes. Cest donc avec raison que Neumayr a exprimé dans le tableau suivant les relations de parenté des cinq classes d'Échinodermes. Stellérides, Blastoïdes S Cystidés Echirides” \Crinoïdes Les Crinoïdes se sont détachés des Cystidés les premiers, etàäune époque cerlainement très reculée, car les deux groupes nous apparaissent presque en même temps dans les terrains les plus anciens. On remarque que dans ce tableau il n’est pas question des Holothuries. C’est que ces Échinodermes, manquant de squelette cohérent, et dont les tégu- ments ne renferment que des corpuscules calcaires isolés, ne sont guère susceptibles de conservation; leur parenté avec les autres groupes reste donc incertaine. Certaines formes encore actuellement vivantes présentent cependant un squelette assez développé et qui rappelle celui des Cystidés, les Psolus par exemple, et il est possible que l’origine des Holothuries puisse être rapportée à ce même groupe. Les premiers Échinodermes qui ont apparu à la surface du globe devaient être des animaux fixés. Ainsi les Cystidés présentent presque tous un pé- doncule, et les restes de formes que nous considé- rons comme libres sont fortrares. De plus les formes qui se sont délachées ensuite des Cystidées possé- daient également un pédoncule: ainsi non seule- ment les Crinoïdes fossiles, mais encore un grand nombre de Crinoïdes actuellement vivants sont fixés, et les genres qui n'ont pas de pédoncule à l'élat adulte en possèdent un pendant leur déve- loppement. Certaines Astéries offrent un prolonge- ment de leur face dorsale à l'aide duquel elles se fixent aux corps étrangers, et qui est de tous points comparable au pédoncule des Crinoïdes : tels sont les Caulaster pedonculatus que nous a fait connaitre M. Perrier et les Æyaster mirabilis étudiés par Danielssen et Koren. Or les Crinoïdes et les Astéries sont les deux classes qui se sont détachées le plus anciennement des Cystidés; chez les Echi- nides et les Holothuries qui sont plus récents, on ne connait pas un seul exemple de forme pédon- culée. Celle fixation à été un phénomène si général et si constant qu'elle a très bien pu avoir une certaine influence sur l’organisme tout entier et la dispo- sition des parties. Semon a même cherché à mon- trer que la fixation seule avait déterminé le chan- gement de symétrie bilatérale en symétrie radiaire. Mais on doit convenir que cette explication n'est pas du lout satisfaisante, et dans l’état actuel de la seience, il nous est malheureusement impossible de trouver une explication à cette symétrie ra- diaire qui nous apparait si brusquement dans le groupe des Échinodermes. C’est bien là la raison pour laquelle ce groupe nous semble isolé et sans lien génésique avec le reste du Règne animal, car c'est évidemment la connaissance des causes qui ont déterminé cette symétrie pentaradiée à laquelle est subordonnée toute l’organisation, qui sera pour nous la clef des affinités des Échinodermes. L'embryologie et la paléontologie ont pu nous fournir quelques données précieuses sur les rela- tions entre elles des différentes classes; ces don- nées sont encore bien incomplètes: au moins en coneluons-nous à une unité d'organisation et à une forme ancestrale commune de laquelle se sont détachées, en divergeant, toutes les classes du groupe. Mais ces deux sciences restent absolument muettes sur tout ce qui concerne l'origine du groupe lui-même. R. Kœhler, Chargé d'un Cours complémentaire de Zoologie à la Faculté des Sciences de Lyon. 110 G. BIGOURDAN. — REVUE ANNUELLE D'ASTRONOMIE REVUE ANNUELLE D'ASTRONOMIE Dès que Daguerre eût fait connaître son procédé de photographie au mercure, en 1839, on fit diver- ses tentatives pour l'appliquer à l’astronomie. Les progrès furent d'abord très lents, surtout jusqu'à la découverte du procédé au collodion (1851) ; mais dès lors tous les perfectionnements qui ont aug- menté la sensibilité des plaques ont en même temps élargi le champ de la photographie astronomique. Enfin la découverte, récente encore, des plaques si sensibles au gélatino-bromure d'argent, vient de modifier profondément diverses méthodes d’obser- vation, el même nous a révélé des astres qui par leur faiblesse échappent à notre œil. Non point que la plaque photographique soit, comme on le dit quelquefois à tort, plus sensible que la rétine; elle l’est même beaucoup moins, mais parce qu'elle utilise un élémentnouveau, le temps ; cet élément, presque sans importance pour l'œil, permet au contraire à la plaque sensible (qui emmagasine l'é- nergie lumineuse envoyée pendant de longs inter- valles) de compenser et au-delà sa moindre sensi- bilité, et de révéler ainsi des objets que l'œil ne perçoit qu'à l’aide d'instruments beaucoup plus puissants. Aussi nous consacrerons celle revue prin- cipalement à la photographie astronomique, aux grandioses projets qu'en ce moment même elle permet d'entreprendre et aux découvertes dont elle vient d'enrichir la science. Ainsi limitée, cette revue pourrait paraitre trop restreinte, mentir même à son titre ; mais il n’en sera rien à cause de la multiplicité des circonstan- ces où l’on a appliqué avantageusement la photo- graphie à l'astronomie. D'ailleurs nous parlerons d'abord de deux questions importantes, partielle- ment élucidées en 1890 et auxquelles la photogra- phie est jusqu'ici restée étrangère : la rotation de Vénus et la variabilité des latitudes terrestres. ÏJ. — ROTATION DE VÉNUS L'abservation de cette planète, toujours voisine du Soleil, présente de véritables difficultés, el c'est à grand'peine qu'on y découvre de temps à autre un repère dont le déplacement révèle le mouvement de rotation. Herschel lui-même s'efforça vainement de saisir quelque indice permettant de se pronon- cer sur sa durée de rotation. Aussi les résultats obtenus par les astronomes depuis deux siècles sont-ils complètement contradictoires: Jean Domi- nique Cassini (1667) avait trouvé 23 jours pour la durée de rotation de Vénus sur elle-même. observations de Bianchinus (1728) et celles de Flaugergues (1822) conduisirent à une durée d’en- viron 24 jours. Jacques Cassini (1732), ayant repris Les la discussion des observations de son père et celle de Bianchinus, trouva qu'elles étaient représentées par une période de 23 h. 20 m. ; ce nombre fut alors accepté définitivement, passa dans les trailés d’as- tronomie el se perpétua d’autant mieux jusqu'à nos jours qu'il parut confirmé par les observations de Schræter (1793 et 1796). puis par celles des as- tronomes du Collège romain, qui donnaient cette durée à un dix-millième de seconde près. En 1877, M. Schiaparelli à son lour essaya de saisir quelques détails sur Vénus, qu'il observa non dans le crépuscule, comme on le faisait généra- lement avant lui, mais en plein jour, même quand la planète était voisine du Soleil. La comparaison des nombreux dessins fournis par les observations qu'il a poursuivies pendant plus de dix années, lui a montré que la rotation de Vénus est très lente : elle doit être égale au temps de sa révolution au- tour du soleil qui est d'environ 295 jours. Cette durée de rotation a.été confirmée par les observations faites du 15 mai au 4 octobre 1890 à l'Observatoire de Nice par M. Perrotin, qui trouve que la véritable durée de rotation de Vénus ne peut pas différer de plus de 30 jours de la durée de sa révolution sidérable (295 jours', c'est-à-dire serait comprise entre 495 et 255 jours : on voit que nous sommes encore loin de la précision des fractions de seconde, avec laquelle on croyait avoir fixé au- trefois la durée de rotation voisine de 23 heures. IT. — VARIATION DES LATITUDES Si l’axe idéal autour duquel tourne la terre en 21 heures venait à se déplacer dans l'intérieur du globe, il en résulterait un changement de posi- tion des pôles géographiques, qui sont les points de la surface par lesquels passe cet axe idéal. Ce déplacement de l’axe de rotalion entraïnerait donc nécessairement le changement de distance de tous les points de la terre aux pôles, à l'équateur, c'est- à-dire le changement de leurs latitudes. Or on conçoit sans peine l'importance d'une variation de latitude de 10° ou 15° par exemple, puisque sui- vant le sens de ce changement Paris se trouverait transporté sous le climat de la Norwège ou sous celui de l'Algérie. Mais hätons-nous de dire que des varialions de cet ordre ne sont pas à prévoir; même les observations les plus précises n’ont pu mettre en évidence un changement progressif et certain. Cependant M. Nyrén a trouvé, par l’en- semble observations de Pulkova, l'indice d'une variation de latitude qui pourrait monter en cent ans à 1”, ce qui correspond à 30 mètres sui- rant le méridien. Un tel changement est actuelle- des G. BIGOURDAN. — REVUE ANNUELLE D'ASTRONOMIE ii ment sans importance au point de vue climatolo- : gique; mais il n'est pas négligeable pour les “ hesoins de l'astronomie, qui détermine aujourd'hui “ les positions des astres à 0”,1 près, et qui a besoin - de connaitre à chaque instant la latitude du lieu — d'observation avec une précision au moins égale. — De là toute l'importance que l’on attache à cette “ question de la variabilité des latitudes. —._ Déjà,en 1865, M.Gaillot avait déduit des observa- lions faites à Paris de 1856 à 1861 une variation annuelle de la latitude, le maximum correspondant à l'été, le minimum à l'hiver, et l’amplitude de - l'oscillation autour de la valeur moyenne étant de +0,25. Au Congrès géodésique de Rome, en 1883, M. Fergola attira de nouveau l'attention sur la variabilité des latitudes et proposa un plan d'étude qui fut approuvé par ce congrès, mais qui ne reçut pas même un commencement d'exécution. Des observations faites de 188% à 1886 par M. Küstner à Berlin, pour déterminer le coeflicient de l’aberration annuelle, conduisirent pour ce coeffi eient à une valeur qui parut inadmissible; et l’on ne vit d'autre explication de celte anomalie que l'hypothèse d'une variation de la latitude de Berlin. Devant ce résultat les observatoires de Berlin, Potsdam, Prague et Strasbourg, se concertèrent à partir de 1889 pour déterminer fréquemment leurs latitudes respectives suivant une méthode uni- forme : les observations ainsi faites en 1889 el 1890 ont conduit à un résultat analogue à celui qu'avait obtenu M. &aillot en 1865. On a également discuté à nouveau les anciennes déterminations de latitude de Greenwich, de Pulkova, ete., et presque toujours on à trouvé une variation de la latitude avec les saisons; de sorte que, malgré quelques discordances, le fait même de la varia- tion se trouve à peu près définitivement établi. Mais quelle en est la cause? Deux explications très admissibles ont été proposées : 4° La variation serait réelle et l’axe de rotation se déplacerait à l’imtérieur de la terre, sous l’in- fluence des phénomènes météorologiques, qui ont pour effet de transporter d’un point à un autre de la surface du globe des masses considérables d'air ou d’eau sous ses divers états. 2° La variation ne serait qu'apparente et due à ce que nous observons nécessairement les étoiles à travers l'atmosphère, dont la constitution peut ne pas répondre toujours et complètement aux hypo- thèses sur lesquelles est basée la théorie de la réfraction. Cette théorie suppose en effet une cons- litution parfaitement régulière de l’atmosphère, un élat de repos qui n’est jamais complètement réalisé. La question est donc loin d’être résolue; mais elle attire de plus en plus l'attention et sans doute dans peu d'années on aura le mot de l'énigme. III. — PHOTOGRAPHIE CÉLESTE Les premières lunettes servirent tout d’abord, parait-il, à regarder la Lune et c’est de là que dérive leur nom. La Lune est également le premier objet céleste dont on ait obtenu l’image par la photo- graphie. Dans l’année mème (1839) où Daguerre fit con- naître son procédé de photographie au mercure, il essaya de fixer l’image de notre satellite; mais, malgré une pose prolongée, il n’obtint que des résultats bien imparfaits, une image très faible où les détails manquaient complètement. En 1845, MM. Fizeau et Foucault obtinrent de bonnes images du Soleil. Cependant, comme nous l'avons dit, les progrès de la photographie astro- nomique furent d'abord très lents. Mais après la découverte du procédé au collodion (1851) les essais se multiplièrent et on obtint assez rapide- ment, dans les diverses branches, des résultats à peu près parfaits. Pour la Lune, Warren de la Rue oblünt, de 1852 à 4859, les belles photographies que tout le monde connait. Pour le Soleil, dès 1858, on avait installé près de Londres le célèbre photo-héliographe de Kiew destiné à fournir jour par jour des images du Soleil indiquant la position el la grandeur des taches. Cependant la photographie du Soleil a pré- senté des difficultés considérables qui n'ont été surmontées que par M. Janssen en 1877; la préci- sion de ses photographies n’a pas été dépassée. Enfin pour les étoiles, G. P. Bond obtenait en 1857 à l'observatoire de Cambridge, près de Boston, des images de couples stellaires comportant des mesures précises. Ses résullals firent mème con- cevoir la possibilité de construire photographique- ment une carte du Ciel, et en 41861 W. de la Rue entrelint de ce projet l'Association britannique réunie à Manchester. Les essais de Rutherfurd, de Gould achevèrent de montrer la possibilité d'exé- culerune telle carte, el seul le peu de sensibilité du procédé au collodion humide rendait ce travail diflicile. Aussi quand on eut découvert (vers 1879) les plaques si sensibles au gélatino-bromure d’ar- gent, tout était à point pour l’entreprise d’un tel travail. Toutefois, si personne alors ne doutait que la photographie permettrait d'exécuter une carte du Ciel avec bien plus de facilité que les anciennes méthodes, beaucoup d'astronomes craignaient qu'elle ne pût donner la position des étoiles avec une grande précision; mais tous les doutes furent bientôt levés par les travaux entrepris à l'Obser- vatoire de Paris et par le succès de M. Pritchard 4142 G. BIGOURDAN. — REVUE ANNUELLE D'ASTRONOMIE dans les délerminations photographiques de paral- laxesstellaires, déterminations quiexigent, comme on sait, la plus haute précision. IV. — CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL. Chacornuc avail entrepris, à l'Observatoire de Paris, de faire des cartes de larégion écliptique du Ciel, contenant toutes les étoiles jusqu'à la 13° gran- deur inclusivement. À partir de 1873, MM. Henry frères continuèrent ce travail qui, dans le voisinag de la Voie lactée, devenait très laborieux, à cause du nombre immense d'étoiles à placer sur les cartes. Ces astronomes essayèrent alors, en 1884, d'employer la photographie, en se servant d'un de leurs objectifs de 0",16 de diamètre, employé déjà pour le passage de Vénus de 1882, et achro- matisé pour les rayons chimiques : ils oblinrent ainsi, dès les premiers essais, de beaux clichés d'une région dela Voie lactée. «Je fus si frappé, dit M. l'amiral Mouchez, directeur de l'Observatoire, de la beauté exceptionnelle de ce début, et de son extrème importance pour l'avenir de l’astrono- mie, que, malgré quelques difficultés administra- üves, je n’hésitai pas à accepter la proposition de MM. Henry, de faire construire immédiatement un grand appareil photographique spécial de 0,35 d'ouverture, dont ils se chargeraient de faire la partie optique, notre habile artiste Gautier devant en faire la partie mécanique. » Le nouvel instru- ment, installé à l'Observatoire de Paris en 1885, donna les meilleurs résultats. Aussi sur la proposi- lion de l’amiral Mouchez, l'Académie des Sciences, par une lettre du 15 octobre 1886, invita les astro- nomes des divers pays à un Congrès international pour diseuter et proposer un plan en vue de la photographie du Ciel tout entier. Cinquante-six astronomes, représentant 16 na- tions différentes, se rendirent à l'invitation de l’Académie, el la première réunion, présidée par le Ministre des affaires étrangères, eut lieu à l'Ob- servatoire de Paris, le 16 avril 4887. Ce Congrès avait deux résolutions fondamentales à prendre d'abord : la première, sur le genre d'’ins- trument à choisir, réflecteur ou réfracteur; la se- conde, sur l'étendue du travail à entreprendre, On sait que les instruments réflecteurs, les é- lescopes comme on les appelle en France, ont l’a- vantage de pouvoir réunir en un seul point tous les rayons lumineux émanés d'un point éloigné, d'un astre quelconque quelle que soit la couleur de ces ‘ayons. Il n’en est pas Lout à fait de même des ré- Jracteurs où luneltes, dans lesquels les rayons sont condensés par un objectif achromatique ?. Mais le 1 Une lentille sonple, agissant comme on sait à la facon d’un prisme, dévie plus fortement les rayons violets que les rayons rouges. Il en résulte que si, comme à l'ordinaire, l’ob- maniement des télescopes exige, de la part de l'observateur, plus de soin et d’habileté que celui des lunettes ; aussi, étant donné le grand nombre. de personnes dont la collaboration serait néces- saire pour exécuter la carte du Ciel, on décida unanimement de donner, pour ce travail, la pré férence aux lunettes. Même, remarquons-le immé- diatement, on adopta les objectifs à deux verres seulement, achromatisés pourlesrayons chimiques. Quant aux dimensions pour lesquelles l'instru- ment de Paris servit de type, elles furent fixées à 0®,33 d'ouverture et 3,43 de distance focale, de sorte qu'une minute d’arc est représentée sur les clichés par une longueur de 1 millimètre. La carte entière couvrirait un globe de 3",43 de rayon ou 7 mètres environ de diamètre. Sur l’étendue du travail à entreprendre, on dé- cida qu'il serait fait pour tout le Ciel deux séries de clichés : la première série à pose courte, qui comporte plus de précision dans les mesures, ren- fermant les étoiles jusqu'à la 11° grandeur et des- tinée à former un catalogue de toutes ces étoiles, au nombre d'environ un million et demi; la seconde série contenant les éloiles jusqu’à la 14° grandeur, dont le nombre est de 15 à 20 millions. D'ailleurs il fut entendu que chacune de ces deux séries se- rait faite en double. Pour juger de l'étendue de ce travail, rappelons que l'étendue du Ciel tout entier, renferme un peu plus de 40.000 degrés carrés; d'autre part, avec l'objectif adopté, les plaques ne doivent être utili- sées que jusqu'à 1° environ du centre du champ, c'est-à-dire sur une étendue de 4 degrés carrés. Pour couvrir le Ciel tout entier il faut 10.000 celi- chés, répétés deux fois pour chacune des deux séries, ce qui monte au total énorme de 40.000 eli- chés. Le Congrès discula ensuite les moyens pour assurer la conservation et la reproduction de ces jet regardé émet de la lumière de diverses couleurs, les bords de son image sont irisés, ce qui est très nuisible à la visibilité des détails. On évite, en grande partie, cet inconvénient capi- tal par l'emploi combiné d’au moins deux lentilles formées de verres différents (crown ct flint). En donnant aux deux len- ülles des courbures convenables, on peut amener en coïnci- dence rigoureuse au foyer deux espèces différentes de rayons; alors les autres radiations subissent des déviations presque égales à celles des deux premitres, de sorte que lirisation des images disparait presque complétement. Un objectif ainsi formé de plusieurs lentilles est un objectif achromatique , c’est-à-dire sans couleur, Si l'objectif est destiné à la photo- craphie, on amène en coïncidence parfaite les foyers des rayons qui agissent le plus fortement sur la plaque sensible, les rayons chimiques, et l’on dit que l’objectif est achromatisé pour les rayons chimiques. Quand l'objectif doit servir à l'œil, on fait coincider les radiations les plus brillantes du spectre, le jaune et le vert. Comme les miroirs amènent en coïnei- dence au foyer tous les rayons, quelle que soit leur couleur, ils sont complètement achromatiques, ce qui n'a jamais lieu qu'à peu près par un objectif. G. BIGOURDAN, — REVUE ANNUELLE D'ASTRONOMIE 113 clichés, les procédés pour remédier à la déforma- tion de la couche sensible après son exposition à la chambre noire, ete. Mais beaucoup de ces ques- tions ne pouvaient être résolues qu'après des études nouvelles dont furent chargés divers as- tronomes. Avant de se séparer, le Congrès nomma un Comité permanent chargé de poursuivre l’exé- eution du travail et formé de 11 membres élus, auxquels furent adjoints, comme membres de droit, les directeurs des Observatoires participant au travail. En fait le Congrès primitif a été remplacé par ce Comité permanent qui s'est réuni de nouveau à Paris en septembre 1889, pour prendre des déci- sions sur les questions élucidées, et qui doit s’y réunir une dernière fois le 31 mars 1891, pour régler définitivement les derniers détails de l’exé- cution, pour prendre une décision sur les moyens d'utiliser le plus tôt possible les clichés obtenus, enfin pour assurer leur conservation. Les Observatoires participants, au nombre de 19, sont les suivants, en allant du nord au sud : Helsingfors (Finlande) ; Potsdam (Prusse); Oxford (Angleterre); Greenwich (Angleterre); Paris ; Vienne (Austriche); Bordeaux; Toulouse; Vatican (Rome); Catane (Sicile) ; San-Fernando (Espagne); Alger; Tacubaya (Mexique); Rio de Janeiro (Bré- sil); Santiago du Chili; Sidney (Australie); Le Cap (Afrique Australe); La Plata (République Argen- tine) ; Melbourne (Australie). V. — CONGRÈS DE PHOTOGRAPHIE CÉLESTE Avant de se séparer en 1887, le Congrès de la Carte du Ciel émit le vœu qu'il fût créé un Comité spécial s’occupant, d'une manière générale, des applications de la photographie à l'astronomie, et ne laissant en dehors de son action que la cons- truction de la Carte du Ciel. Ce Comité, que MM. Common et Janssen furent chargés d’orga- niser, s'est réuni pour la première fois à Paris du 20 au 24 septembre 1889, sous le nom de Con- grès de photographie céleste. Il a examiné les nombreux sujels qui dépendent de son action el émis des vœux sur la manière dont leur étude deit être poursuivie. VI. — TRAVAUX ET PROJETS DES ASTRONOMES AMÉRICAINS Comme on a pu le remarquer, la liste des Obser- vatoires qui collaborent à la Carte photographique du Ciel ne renferme aucun de ceux des États-Unis. C'est que pour construire cette carte les astronomes nord-américains donnent la préférence aux objec- tifs photographiques à 4 verres, analogues à ceux qu'on emploie pour les paysages, à l'exclusion de ceux à deux verres adoplés par le Congrès de Paris en 1887. Ces derniers ne donnent en effet qu'un champ bien petit (2° de côté ou 4 carrés), tandis qu'on peut construire des objectifs à 4 verres de grandes dimensions et donnant de bonnes images sur toute l’étendue d'au moins 5° de côté, 25° carrés, ou environ 6 fois plus que les objectifs ordinaires. Déjà en 1882, M. E. C. Pickering, direc- teur de l'Observatoire de Harward College près de Boston et bien connu par ses travaux photomé- triques, avait entrepris une Carte du Ciel avec un objectif à 4 verres de 0"20 de diamètre et de 1"15 de distance focale. Plus récemment (1888) il a reçu d'une généreuse américaine, Miss Bruce, une somme de 250.000 frances,destinée à la construction d'une grande lunette photographique qui sera munie d’un objectif à 4 verres de 0"60 d'ouverture et de 343 de distance focale : avec cet instrument, transporté successivement en 3 ou 4 points bien choisis de notre globe, M. Pickering compte faire seul la carte entière du Ciel, découvrir les nébu- leuses qui n’ont pas encore été vues, ete. VII. — PHOTOMÉTRIE ASTRONOMIQUE Un des éléments qu'il importe le plus de con- naitre, après les positions exactes des étoiles dans le ciel, c’est leur éclat relatif, leurs grandeurs. Déjà, en 1867, G. P. Bond remarquait que le diamètre des images photographiques des étoiles augmente avec le temps de pose, avec l'éclat de l’astre, et que ce diamètre peut être employé pour la mesure des grandeurs stellaires. Mais c'est surtout depuis 1887 que des travaux nombreux ont élé entrepris en vue de créer un moyen pratique pour déduire la grandeur de chaque éloile du diamètre de son image sur les clichés, particulièrement sur ceux de la carte du Ciel. Cette question, qui offre les plus grandes diffi- cullés, est encore à résoudre; on peut même dire qu'elle est insoluble, telle du moins qu'elle a été posée, c'est-à-dire en cherchant à faire cadrer les grandeurs photographiques avec les grandeurs optiques fournies par l'œil et par le photomètre, On sait, en effet, que les rayons jaunes qui impres- sionnent fortement l'œil, sont presque sans action sur les plaques sensibles ordinaires, tandis que les rayons violets impressionnent fortement les plaques, sans paraitre intenses à l'œil; une belle éloile jaune pourra done produire sur la plaque une image beaucoup plus faible que telle autre faible à l'œil, mais riche en rayons violels. Tandis que l'œil est impressionné par l'énergie lumineuse de la portion du spectre comprise entre les raies G et F, la plaque photographique enregistre celle qui s'étend de F à N. Il résulte presque nécessai- rement de là qu’en général les grandeurs photo- graphiques ne sont pas comparables aux gran- deurs opliques, et sans doute, l'échelle photogra- 11% G. BIGOURDAN. — REVUE ANNUELLE D'ASTRONOMIE phique devra être construite d’une manière indépen- dante, sans rien emprunter à aucune autre méthode. VIIT. — PHOTOGRAPHIE DES NÉBULEUSES Pour les nébuleuses, même les plus belles, l'éclat intrinsèque en chaque point est presque toujours faible; aussi n'est-on parvenu à photo- graphier ces astres qu'à l'aide des plaques au gélatino-bromure. H. Draper, le premier, obtint une photographie de la nébuleuse d’Orion, Île 30 septembre 1880, après 51 minutes de pose : elle ne représentait guère que la partie la plus bril- lante. Mais en mars 1882, après 132 minutes de pose, il en obtint une qui représentait la nébu- leuse sur une bien plus grande étendue. A la même époque (30 janvier 1882), M. Common, à Ealing, près de Londres, obtint de la même né- buleuse la belle photographie qui lui valut la médaille de la Société royale astronomique. Une photographie de la nébuleuse d’Andromède, obtenue par M. Roberts à Maghull en 1888, a révélé la constitution de cette nébuleuse que les meilleurs dessins laissaient inintelligible : elle montre une constitution qui rappelle celle du sys- tème des anneaux de Saturne et confirme ainsi l'hypothèse nébulaire : on sait que cette hypothèse, due à Kant et à Laplace, attribue l’origine du sys- tème solaire à une nébuleuse animée d'un mouve- ment de rotation et qui, par condensation gra- duelle, aurait donné naissance aux planèles et au soleil. Enfin, les photographies de la célèbre nébuleuse annulaire de la Lyre, faites l’élé dernier dans les Observatoires d'Alger, de Bordeaux et de Toulouse, ont révélé sur sa constitution des particularités qui avaient échappé à l’œil armé des plus puis- santes lunettes. Avec des instruments de moyenne grandeur, la photographie a montré des nébuleuses très difti- ciles à voir, soit à cause de leur faiblesse, soit par suile du voisinage de brillantes étoiles; dans ce dernier cas sont les nébuleuses qui, en 1886, se sont révélées sur les clichés de MM. Henry, autour des principales étoiles des Pléiades. De son côté, M. Pickering a découvert également quelques nébuleuses par la photographie, et il compte en découvrir un bien plus grand nombre à l'aide de la grande lunette qu'il doit à la générosité de Miss Bruce. IX. — APPLICATIONS DE LA PHOTOGRAPHIE A LA SPECTROSCOPIE ASTRONOMIQUE Le jour même (19 août 1839) où fut communiqué à l'Académie des Sciences le procédé photogra- phique de Daguerre, Arago citait, parmi les prin- cipales applications astronomiques du nouveau procédé, la possibilité d'obtenir une image com- plète du spectre solaire. Pour les spectres des étoiles, les premiers essais de photographie datent de 1863 (Huggins et À. Miller); mais ils ne de- vaient donner de résultats vraiment importants qu'après la découverte de plaques très sensibles; aujourd'hui on obtient le spectre des belles étoiles avec des détails aussi nombreux que ceux que donnait le Soleil il y a quelques années. M. Picke- ring a presque terminé la photographie des spectres de toutes les étoiles jusqu'à la huitième grandeur. Dans ses mains et dans celles de M. Vogel, direc- teur de l'Observatoire astro-physique de Potsdam, la photographie spectroscopique vient de révéler des résultats qui ouvrent des horizons tout à fait inattendus. Mais disons d’abord sur quel prineipe est basée la méthode employée, qui est juste- ment appelée la Méthode Doppler-Fizeau !. Examinons au spectroscope un corps lumineux en repos relalif par rapport à l'observateur et dont le spectre soit formé d’un cerlain nombre de raies brillantes, par exemple. Si ce corps vient à s'éloigner de l'observateur avec une vitesse suflisante, toutes ces raies se porteront vers l'extrémité rouge du spectre; si, au contraire, le corps lumineux vient à se rapprocher, les raies seront déviées vers le violet. La déviation est pro- portionnelle à la vitesse relative du corps lumi- neux et de l'observateur, cette vitesse étant comptée sur la ligne qui les joint. C’est sur ce principe qu'est basée la méthode qui permet d'évaluer le mouvement d’un astre suivant le rayon visuel ; ilest bien remarquable que, pour la mesure des espaces, elles n'exige pas, comme les autres mé- thodes, la connaissance d’une base. L'application de celte méthode à une étoile va- riable bien connue, Algol ou £ Persée, a donné des résultats extrêmement remarquables: M. Pickering avait montré que, si la variation d'éclat de cette étoile était due au passage d’un satellite sombre sur le disque de l'étoile principale et produisant une éclipse partielle, les deux astres devaient avoir des dimensions peu différentes, être peu écartés et tourner rapidement autour de leur centre de gravité. Comme conséquence, l'éloile brillante devait tantôt se rapprocher et tantôt s'éloigner rapidement de la Terre. Or, M. Vogel, ayant photo- graphié fréquemment le spectre de cette éloile, a constaté, par le déplacement des raies, que la vitesse de l'étoile suivant le rayon visuel est de sens contraire avant et après l’époque du mini- mum d'éclat; c'est une confirmation complète de l'explication déjà ancienne de la variabilité de cer- 1 Voyez sur cette méthode et sur ses applications la savante Notice insérée par M. A. Cornu dans l'Annuaire du Bureuu des Longitudes pour 1891. : 1 : : ] 1 | G. BIGOURDAN. — REVUE ANNUELLE D'ASTRONOMIE taines étoiles par le passage d’un satellite obscur. Si l'orbite du compagnon d’Algol était assez in- clinée sur notre rayon visuel, l’astre obscur ne se projelterait jamais pour nous sur l’éloile brillante, et rien n’aurait fait soupçonner son existence. On doit donc se demander si beaucoup d’autres étoiles n'ont pas aussi des compagnons, brillants ou obsurs et que nos lunettes sont impuissantes à montrer: la spectro-photographie vient de répondre, de four-- nir trois exemples d'étoiles ayant des compagnons que rien jusqu'ici n'avait fait soupconner : deux (8 Cocher et € Grande Ourse) ont été signalés par M. Pickering et le troisième {à Vierge) par M. Vogel. Pour & Vierge, les choses se passent comme pour Algol sauf la variation d'éclat; et la période est d'environ 4 jours. Pour € Grande Ourse, on a remarqué dans un spectre une raie sombre {située à l’extrème violet et qui occupe la place de la raie K de Fraünhofer), qui estordinairement simple, mais qui d’autres fois paraît double, et le phénomène se répète environ tous les 52 jours : cette éloile est donc double et formée de deux astres brillants. Pour $ Cocher, la période est de 4 jours; pour Algol, dont on vient de parler, elle est très exacte- ment déterminée par les observalions photomé- triques el égale à 2 jours 20 heures 49 minutes. On ne connaissait jusqu'ici aucune étoile double dont la période fût inférieure à 41 ans : laspectros- copie, aidée de la photographie, vient d'en révéler dont la période est seulement de 3 à 4 jours. Comme le dit M. Cornu, dans la Notice déjà citée, « tous ces résultats sont vraiment prodigieux et ouvrent des horizons inattendus ; en même temps ils confirment jusque dans les moindres détails cette unité de structure, de substance et de mouve- ments dont la découverte et surtout la démonstra- lion sont l'honneur de la science contemporaine ». On voit, par cet exposé, qu'on eût pu développer encore en parlant des applications de la photogra- phie à l'observation des éclipses, à la représentation de la couronne solaire, ete., quels progrès nombreux doivent à la photographie les diverses branches de l'astronomie, tant l'astronomie de position que l’as- tronomie physique. Aussi l'application de la photo- graphie à l'astronomie a des partisans dont l’exelu- sivisme voit déjà partout la plaque sensible substi- tuée à l'œil de l'observateur, et les astronomes, ou ré- duits à l’inaction, ou transformés en photographes. Il n'en sera pas ainsi de si {ôt cependant parce que la plaque photographique n’est pas aussi sen- sible que l’œil, comme nous l'avons dit, de sorte que les changements très rapides lui échappent, excepté lorsqu'il s'agit du Soleil, où la surabon- dance exceplionnelle de lumière lui donne certains avantages sur l’observation directe, 115 Ainsi, malgré des tentatives déjà anciennes, elle n'a pu encore remplacer l’astronome dans les observations de passages, ni, en général partout où il y a un astre mobile. Contrairement à ce qui avait élé annoncé, elle n’a pas encore fait décou- vrir des pelites planètes, parce que cellés-ei se déplacent par rapport aux éloiles, bien lentement sans doute, mais trop rapidement encore pour laisser des traces sur la plaque sensible. Pour les comètes on n’a pu les photographier qu'en les sui- vant avec l'instrument dans leur mouvement pro- pre ; alors les repères indispensables, c’est-à-dire les étoiles, qui viennent en même temps sur la pla- que, sont représentées par de petites lignes qui ne sont ni bien droites ni bien continues, à cause de la discontinuité inévitable du déplacement imprimé à la lunette ; en outre, le moment auquel se rap- portent les coordonnées oblenues n’est pas connu avec assez de précision. Pour les étoiles doubles, la photographie n’a pu aborder les mesures des couples très serrés, qui sont les plus intéressants, ni de ceux dont les com- posantes sont un peu inégales, ce qui est le cas géné- ral, parce que dans le temps de pose nécessaire pourque le compagnon laisse une trace,le petitcerele donné par l'étoile principale s’est déjà trop agrandi et à ainsi envahi et caché Pimage du compagnon. La plupart de ces observations, où la photographie est encore impuissante, lui deviendraient acces- sibles si l’on venait à obtenir des plaques beaucoup plus sensibles que celles d'aujourd'hui; mais il n'est pas à prévoir de progrès comparable à celui qui à lieu quand on à passé du collodion à la gé- latine ; et d’ailleurs de telles plaques ne seraient plus maniables : elles se voileraient pendant les manipulations. Ce qu'il faudrait poursuivre plutôt, c'est la cons- truction d'instruments plus appropriés au but : Pour faire la Carte de régions étendues, employer des objectifs à grand champ ; pour photographier les astres mobiles, diminuer les distances focales tout en conservant les ouvertures, ce qui accroît l'intensité des images ; pour les étoiles doubles à composantes inégales, remplacer par de bons mi- roirs les objectifs, dont le spectre secondaire agrandit démesurément l’image focale des belles étoiles sur la plaque. Malgré ces perfectionnements, les vieilles mé- thodes d'observation trouveront longtemps encore dans les Observaloires un champ assez étendu ; toutefois ceux qui les utilisent, loin de se montrer exclusifs, devront suivre avec soin les progrès des nouvelles et leur abandonner tout ce qu'elles permettent de faire ou mieux ou plus vite. G. Bigourdan, Astronome adjoint à l'Observatoire de Paris. 116 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Cauchy. — Œuvres complètes. Il: série, tome VII, (25 fr.) Paris 1890, Gauthier- Villars éditeur, 55, quai des Grands-Augustins. Ce volume contient les « Exercices de Mathématiques » pour l’année 1828. Il est consacré principalement à la mécanique des fluides et des solides élastiques ou non élastiques. Toutefois la Géométrie y est représentée : d’abord une théorie des centres, des plans et axes principaux des surfaces du second ordre, où l'on peut admirer une exposition extrèmement simple des propriétés de la classique « Equation en s », ensuite la discussion des lignes et des surfaces du second ordre et enfin la repré- sentation de diverses familles de surfaces par leurs équations en termes finis, ou par celles aux dérivées par- tielles ; tels sont les exercices consacrés à la Géométrie. L'intérêt de cette partie de l'ouvrage réside non dans les résultats mais dans le style du maitre, un style d'une netteté que nos élèves de mathématiques spéciales ne connaissent peut-être plus en dépit de l'étendue de leur programme, Quant à l'analyse pure, trois courts chapitres lui sont réservés : l’un donne l'expression de la différence finie A" x, l’autre celle de la somme finie XXE ... x"; le troisième déduit des précédents soit les différences, soit les intégrales finies des fonctions entières d’une ou de plusieurs variables. Les « Exercices » de Physique mathématique peuvent se diviser en deux class 1° Exposition des équations fondamentales de la Mécanique des fluides ou des so- lides; 2 Intégration de ces équations dans des cas relativement simples. Cette seconde classe comprend : l’étude des petits mouvements d'une lame solide, celle plus difficile des vibrations d’une plaque solide, d'où Cauchy fait découler les lois des vibrations d’une verge rectangulaire. Parmi les résultats je rappellerai particulièrement les beaux théorèmes fournissant une échelle des sons qui peuvent être rendus par une lame élastique dont la fibre moyenne serait successivement courbée en une fraction quelconque de cercle. Les « Exercices » de l’autre classe, malgré leur très grande généralité, offrent un intérêt d'un autre genre ; ils montrent nettement les deux points de vue sous les- quels on à jusqu'ici envisagé la distribution de la matière dans les corps. Ou bien l’on regarde la matière comme continue, ou bien on la distribue en centres de forces isolées. Le premier point de vue est développé dans deux chapitres; lesconditions thermiques hnposées, bien qu'artiticielles, suffisent cependant pour les appli- cations mentionnées plus haut. Cauchy définit pour les solides l’état naturel et montre qu'il y a lieu dese donner quelque relation capable de rattacher les six compo- santes des pressions aux éléments cinémaliques de la déformation, 11 suppose d’abord la relation suivante : « La tension (ou pression) exercée contre un élément « de surface admet une composante normale à cel « élément, qui est proportionnelle à la dilatation (ou « condensation) relalive à cette même direction, » Puis il combine celle hypothèse avec celle de la pres- sion normale des fluides. Celte superposition de deux systèmes de pressions introduit deux coeflicients k et K figurant dans les équations qui gouvernent les compo- santes : E, 0, €, d’un petit déplacement de la molécule dont les coordonnées cartésiennes à lPépoque 4 sont æ, y, 2, et qui, sous une densité iniliale A, est soumise ET INDEX par unité de masse à la force dont ces composantes sont X, Y,Z, Si l’on désigne par @& la dilatation cubique de déformation, c’est-à-dire si l’on pose : chaque composante Ë, 1, €, vérifie une équation de la forme suivanle : en Fos CC ue. D°E 24 ri 1) |, USA NOT INR Ces équations se réduisent par la supposition : k —2K à celles données par Navier (Mémoire de 1821). Si au lieu de considérer le corps dont l’élastieité a élé définie plus haut, on envisage un corps entièrement ds CP AR da dépourvu d’élastieité et si Pon fait : u — PTE h=— const. chaque équation précédente est remplacée par une autre telle que celle-ci : Du Du vu DD, 2a , - 2A DE DT MD Dr dr ROPUTATEEST d'où l'on peut déduire celte autre : = en 5x 2Y 2) De? à PT es RE Dé Celle-ci dans le eas particulier où X=Y=—7Z=—0 est précisément celle du mouvement de la température ; c’est encore celle qui régit la densité d’un fluide, Ainsi dans deux hypothèses extrêmes où la chaleur serait assimilée soit à un fluide élastique, soit à un corps dénué d’élasticité on retrouve toujours celte équation fondamentale : dont les propriétés les plus importantes ont été rigou- reusement établies par M. Poincaré (Comptes rendus. 1888.) Dans l'hypothèse de la discontinuité, c’est-à-dire celle où l’on considère des points matériels isolés, soumis à leurs attractions ou répulsions mutuelles, l'espèce de postulatum qui constitue la notion de la pression n'est plus nécessaire, Il suffit pour composer les ac- lions moléculaires de connaitre la distribution initiale des masses du système; ce calcul se simplifie dans l'étude des pelits mouvements, et en raison de la peti- esse du rayon d’aclivilé moléculaire; ces circonstances permetllent, dans le calcul des différences géométriques des déplaceme uts, c'est-à-dire dans le calcul des quan- lités : AE, "An, A Fe s'arrêter aux termes du second ordre, ceux du premier disparaissant fréquemment d'eux-mêmes, Si l'état initial est un état d'équilibre, et si dans cet élat la distribution des masses est symé- tique par rapport à chacune d’entre elles (il ne s’agit pas ici des équations aux limites), les composantes des actions moléculaires sont des for mes linéaires des déri- vées du second ordre des déplacements, considérés comme fractions des coordonnées initiales à, b, €, Les 15 coefficients de ces formes dépendent de 9 constantes, qui se réduisent à 3, dans le cas parti- culier où la distribution des masses autour de chacune BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 117 d'elles admet une symétrie par rapport à 3 plans per- pendiculaire entre eux. Si de plus la symétrie consi- dérée a lieu par rapport à tout système de 3 plans, cette distribution sphérique réduit les 3 constantes à deux. Chacune de ces constantes estune somme triple à nombre fini d'éléments; mais par un artifice fréquem- ment employé en physique mathématique, Cauchy remplace cette somme triple par une intégrale simple; de plus Cauchy établit que les deux constantes de la distribution sphérique se réduisent même à une, quand les forces mutuelles varient avec la distance des masses 1 comme la fraction ue (0 Le X 1). Le” Une remarque essentielle a été aussi faite par Cau- chy, c'est que les équations des petits mouvements des systèmes discontinus sont plus générales que celles déjà données dans l'hypothèse de la continuité. Dans un autre chapitre, Cauchy montre comment il faut concevoir la tension ou la pression dans les sys- tèmes discontinus. Enfin, pour terminer ce résumé, je dois mentionner le beau chapitre : Quelques théorèmes relatifs à la dilata- tion, ou à la condensation des corps; une sphère infi- niment pelite pleine de la matière d'un corps continu, fluide ou non, se change, même après une déforma- tion forcée, en un ellipsoïde, Cauchy a tiré de cette correspondance des propriétés qu'on peut regarder comme les fondements naturels des travaux posté- rieurs de Dirichlet, d'Helmholtz, et de Beltrami; la simplicité et l'élégance des interprétations de ces géo- mètres, lient surtout à ce qu'ils ont considéré une dé- formation infiniment petite. Jules ANDRADES. Leautey (Eug.) et Guilbault (Ad.).— Traité théo- rique et pratique de copmtabilité, 1 vol, Ge édition, revue et complétée (7 fr. 50). Librairie comptable el administrative, 5, rue Geoffroy Marie, Paris 1890. Résumer en un volume les principes et les applica tions innombrables de la comptabilité et de la tenue des livres ne doit pas être une tâche facile, puisque tous les auteurs qui l'ont entreprise jusqu'ici n'y ont guère réussi. Le livre de MM. Léautey el Guilbault vient de com- bler heureusement une véritable lacune, Il contient un exposé ralionnel, clair et précis de la matière, La pre mière parlie est consacrée à la fixation du langage comptable et des principes élémentaires. Dans la seconde, de beaucoup la plus substantielle, sont étu- diées, au point de vue théorique, les relations qui pré- sident, soit à la formation, soit au jeu des comptes entre eux, ainsi que leur expression synthétique ou bilan. L'établissement de l'inventaire sur la base d’un prix de revient réel, quelles que soient les valeurs mises en mouvement par l'industriel ou le commer cant, y fait l’objet d’une discussion où les auteurs font preuve d'une haute compétence et d'une grande nelteté de vues, Enfin une série d'applications fournies par des exemples variés et judicieusement choisis, constitue une troisième et dernière division, utile à consulter pour ceux que les formules purement abs- traites découragent ou sont impuissantes à convaincre, En somme, l'ouvrage se recommande par un esprit de méthode, une rectitude de principes, une mesure dans les développements et une facilité de style qui en font à tous égards, sinon un traité complet, du moins un excellent cours élémentaire de comptabilité. F. LOUGaRRE, 2° Sciences physiques. Boltzmann (L). — Ueber die Hertz schen Ver- suche. Sur les expériences de M. Hertz, (Wiedem. Ann. 1890, t. X. L p. 399.) Pour démontrer à un nombreux auditoire la décharge qui se produit dans le conducteur secondaire de M. Hertz, l’auteur relie l’un des pôles de l'interruption de ce conducteur, celui qui est arrondi, à un électros- cope sensible; l’autre, la pointe de la vis micromé- trique, à une pile sèche (200 volts environ de tension) reliée à la terre. Dès que les étincelles jaillissent dans l'interrupteur, du résonateur elles y forment un pont conducteur qui relie la pile à l’électroscope et font agir celui ci, Paur que l’expérience soit bien visible, il suftit de trois où quatre étincelles du primaire. Le poli des boules entre lesquelles jaillit l'étincelle primaire ne subit donc que peu d’altération et l'intensité du phénomène reste par ce fait longtemps constante, Cu. Ep. GUILLAUME. Ritter (R.). — Bemerkung zu den Hertz’schen Versuchen, ele... Remarques sur les expériences de M. Hertz relatives aux rayons de force électrique. (Wie- dem. Ann. 1890, t. XL, p. 53.) L'auteur à réussi à mettre en évidence, au moyen de la grenouille, la décharge qui se produit dans un con- ducteur secondaire de M, Her{z. Pour cela il relie à un mince fil conducteur l’un des deux pôles de l’interrup- üon du résonateur à l’un des deux cordons nerveux qui courent de part et d'autre de l’épine dorsale de la grenouille, préalablement sectionné et proprement préparé. Cela étant, dès que les étincelles jaillissent dans l'interruption du résonateur, la patte correspon- dant au nerf en contact subit des contractions re- pides. On peut ainsi démontrer de jour et à un nom- breux auditoire l’action électrique à distance qui se produit dans le conducteur secondaire, CH. Ep, GUILLAUME. Rubens (H.) c{ Ritter (R.) — Ueber das Ver- halten von Drahtgittern etc. De l'action que les réseaux de fils conducteurs exercent swr les ondulations électriques. (Wiedem. Annal. 1890,t. X L, p. 55.) MM. H. Rubens et R. Ritter ont repris les expériences de M. Hertz sur la polarisation des rayons de force électrique par des réseaux de fils conducteurs paral- lèles et cela en remplacant l'observation de Pétincelle dans les conducteurs secondaires par l'emploi du bo- lomètre de MM. Paalzow et Rubens. Ils ont confirmé, par cette méthode, les résultats annoncés par M. Hertz, c’est-à-dire que le réseau laisse passer à peu près com- plètement uneondulation perpendiculaire à la direction des fils, absorbe au contraire complètement une ondu- lation parallèle à cette direction et enfin décompose une ondulation de direction oblique, laissant passer la composante perpendiculaire aux fils, tandis qu’il arrête celle qui leur est parallèle, Ils ont aussi étudié l’action du réseau comme écran réflecteur, Lorsque l'ondulation électrique est parallèle aux fils, elle est à peu près intégralement réfléchie; dans le cas d’une position oblique il en est de même de la composante qui n’est pas transmise par le réseau. Cu. Ep. GUILLAUME. Ostwald (W.). — Outlines of general chemistry. (Essai de Chimie générale). — Traduction anglaise de James Walker, 4 vol. 395 p. (12 fr. 50), Londres, 1890, Macmillan el Cie, 39, Bedfort Street Covent Garden. M. Walker publie une édition anglaise du traité de chimie générale de M. Ostwald. Ce livre, qui est malheu- reusement, peu connu en France est un exposé magis- tral de l’état actuel des connaissances chimiques. Outre un résumé fort clairement écrit des résultats anciens, il contient, sous une forme {rès concise, l’en- semble des travaux récents de MM. Van © Hoff, Arrhé- nius, Ostwald, Guedberg et Waage, etc. L'ouvrage est divisé en deux parties. La première est consacrée aux lois relatives à la masse, On y trouve les lois des combinaisons chimiques, les pro- priétés de la matière pondérable à l’état solide, liquide, gazeux, où dissous, la théorie cinétique des gaz, la théorie de M. Vant’ Hoff sur la pression osmotique et ses principales conséquences, enfin un apercu des idées 118 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX actuelles sur la constitution des composés. La deuxième partie comprend les lois relatives à l'énergie, M. Ostwald réunit sous ce titre l'ensemble des résultats auxquels à conduit l'étude des équilibres chimiques, par les dif- férentes méthodes qui ont été employées, thermo- chimie, électrochimie, etc., et les théories de l’affinité basées, soit sur l'application aux phénomènes chi- miques des lois de la thermodynamique, soit sur la considération de la vitesse de réaction. IL est impossible de donner en quelques lignes une idée d’un aussi important ouvrage autrement qu'en indiquant les matières qu'il contient, Bornons-nous à signaler cette nouvelle édition de l’œuvre d'un des chimistes qui ont le plus contribué aux progrès récents de la chimie physique. Georges CHARPY, 8° Sciences naturelles. Fouqué, de l'Institut. — Le Plateau Central de la France. In-4°, 23 p. (Lu dans la séance publique an- nuelle des cinq Académies du 25 octobre 1890 ) Dans cette rapide esquisse le savant professeur du Collège de France résume les notions que la science pos- sède aujourd'hui sur l’évolution physique du Plateau (ou mieux du Massif) Central. Deux résultats paraissent se dégager nettement de cette élude : 1° la continuité du développement de la région à travers les âges, depuis les périodes les plus reculées de l’histoire du globe; 2° la contemporanéité des éruptions et des grands mouvements du sol, qui, à deux reprises diffé- rentes, ont déterminé les linéaments principaux de son relief, d’une part à l’époque permo-carbonifère (ride- ment hercynien, porphyres et porphyrites du Morvan, Forez, Beaujolais) et d'autre part vers le milieu des temps tertiaires (contre-coup du plissement alpin, épanchement volcanique de l'Auvergue et du Velay). D’après M. Fouqué, la direction N.-0. ou armoricaine aurait été déterminée dès l’époque cambrienne, c’est-à- dire bien avant la direction N.-E. ou hercynienne {va- risque de M. Suess), qui est celle d’un grand nombre de bassins houillers; le massif ancien de la France cen- trale représenterait donc le point de jonction, le nœud de deux systèmes de dislocation d'âges très différents. Peut être pourrait-on objecter à cette manière de voir l'absence complète, dans l'Ouest du massif, de lam- beaux siluriens et dévoniens, permettant de fixer par leur allure concordante ou transgressive une limite su- périeure pour la date du mouvement correspondant, la continuité des plis archéens avec ceux qui affectent l’ensemble des terrains paléozoïques en Bretagne par- lant d’ailleurs en faveur d’un âge plus récent pour les premières. Quoiqu'il en soit, et contrairement aux vues émises sur ce point par Magnan, Ebray et M. Bleicher, l’'émer- sion du massif aurait été ininterrompue pendant toute la durée des temps secondaires. Un changement impor- tant signale l’époque oligocène : de grand lacs, com- muniquant avec les lagunes ambiantes, recouvrent alors de larges espaces. Les sédiments accumulés au fond de ces nappes d’eau ont été plus {lard dénivelés par des cassures multiples, dont la production, con- comitante du mouvement qui faisait émerger une grande partie de la France, a coïncidé avec les débuts de l’ère volcanique; le paroxysme des éruptions, suc- cédant à un intervalle de repos prolongé, s’est au con- traire manifesté après la cessation complète de tout mouvement de dislocation dans la Haute-Auvergne. Cette seconde phase d'activité beaucoup plus impor- tante que la première au point de vue du volume et de la variété des produits rejetés, a commencé avec les explosions qui ont couvert le Cantal de Cinérites, à la fin de l’époque miocène; elle s’est poursuivie jus- qu'aux abords de l’époque actuelle, avec les cratères post-glaciaires du Tartaret, du lac Pavin, de Montci- neyre et du puys de Clermont. Le phénomène du creusement des vallées semble avoir atteint son maximum d'intensité durant le qua: ternaire, grâce au climat rigoureux et humide qui a caractérisé cette période, Il ne faut pas oublier toute- fois que le creusement äe la haute vallée de l'Allier, comme l’a récemment démontré M. Boule, est beaucoup plus ancien : des dépôts sous-basaltiques contenant la faune du pliocène moyen ont été observés à 30 mètres seulement au-dessus du thalweg. On pourra comparer avec profit au tableau tracé par M. Fouqué une étude que M. Frech a récemment con- sacrée au même thème dans le Zeitschrift de la Société de géographie de Berlin. (Das Franzosische Central pla teau Eine Skizze seiner geologischen Entwickelung, 1889, p. 132-165). Emm, DE MARGERIE, Ficheur (E,). — Description géologique de la Kabylie du Djurjura. Etude spéciale des terrains tertiaires. Thèse de Doctorat présentée à la Faculté des Sciences de Paris, Masson, 1890. La grande Kabylie, dont M. E. Ficheur vient de pré senter la description géologique, comme thèse de doc- torat à la Faculté des sciences de Paris, estassurément une des régions de l'Algérie les plus difficiles et les plus ingrates à étudier, La haute chaîne du Djurjura, qui en forme le massif principal, constitue une bar- rière presque infranchissable dont les sommets, cou- verts de neige pendant la plus grande partie de l’année, ne sont abordables qu'au cœur de l'été. Sa charpente est formée par de puissantes masses rocheuses, assez uniformes, très disloquées et enchevêtrées, presque complètement dépourvues de fossiles et dont la classi- fication présente des difficultés toutes particulières. Cependant grâce à des recherches poursuivies avec méthode et persévérance, M. Ficheur est parvenu à dé- brouiller le chaos de ces diverses formations, Les terrains azoïques, schistes cristallins et étage archéen, des terrains jurassiques appartenant vraisem- blablement à l’époque du Lias, puis des terrains cré- tacés, restés jusqu'alors inexplorés, ont été reconnus et décrits par M. Ficheur. Mais la partie essentielle de son mémoire consiste dans l'étude des terrains tertiaires inférieurs. C'est la formation éocène qui occupe la place la plus impor- tante dans le grand massif du Djurjura. Ses assises très diverses, et dont l'énorme épaisseur dépasse en to- talité le chiffre de 1800 mètres, étaient jusqu'ici réunies dans un seul horizon et confondues sous le nom vague de terrain nummulilique. Les Nummulites sont à peu près les seuls restes or- ganisés qu'on y rencontre; aussi, a-{-il fallu que l’au- teur se livràät à une étude approfondie de tous ces foraminifères pour en lirer les éléments d’une classifi- cation qui s’est trouvée d’ailleurs corroborée par des différences lithologiques et des discordances de strati- fication entre les divers termes de la formation. Cette heureuse mise en œuvre des Nummulites, comme docu- ments de classification, constitue pour lAlgérie un travail tout nouveau et original. En s'aidant ainsi de tous les moyens à sa disposition, M. Ficheur a pu établir que le terrain tertiaire le plus inférieur, c’est-à-dire l'étage suessonien des auteurs, n'était pas représenté dans la Kabylie du Djurjura. La série de l’Eocène moyen, composée de trois étages transgressifs ou discordants, l’un par rapport à l’autre, est complètement distincte de celle de l'Eocène supé- rieur qui comprend elle-même deux divisions, indé- pendantes lune de Pautre. Tandis que l’Eocène moyen est, dans tout son en- semble, une formation nummulitique, l'Eocène supé- rieur, composé de grès quartzeux, n’est caractérisé que par des empreintes de Fucoïdes. L'ensemble de ces terrains éocènes algériens parait constituer une série spéciale qui ne présente pas d'équivalence exacte avec les formations nummuliliques du versant nord de la Méditerranée, C'est seulement dans l’Andalousie qu’on retrouve son analogue. Après les terrains éocènes l’auteur a décrit les ter- BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 119 rains miocènes, également représentés en Kabylie par des assises variées, Il a observé dans cette nouvelle série un terme inférieur, constitué par le grès de Dellys, qui lui paraît correspondre à l'étage ohgocène des auteurs. Ce n’est-là toutefois qu'une présomption basée sur de simples données stratigraphiques, car les documents paléontologiques font complètement défaut dans ces grès. C’est aussi sans doute pour cette raison que M. Ficheur à jugé utile d'introduire dans la no- menclature stratigraphique algérienne le terme nou- veau d'étage dellysien pour désigner cette formation, Un autre fait intéressant a été constaté dans l'étude des terrains miocènes. C’est à cette époque qu'il y a lieu de rapporter ces puissants dépôts alluvionnaires étalés sur le versant sud du Djurjura et que jusqu'ici l’on considérait comme appartenant à l'époque quater- naire. Le mémoire de M. Ficheur, qui ne contient pas moins de 475 pages, comprend encore la description des terrains pliocène et quaternaire, celle de nom- breuses roches éruptives, Granites, Liparites, Andésites, Labradorites, etc., et se termine par des notes paléon- tologiques sur les Nummulites de l’'Eocène algérien. Deux cartes géologiques, celle de la chaîne du Djur- jura et celle du Massif des Beni-Khalfoun complètent cet important fravail et permettent, concurremment avec les nombreux diagrammes intercalés dans le texte, de suivre avec facilité les descriptions de l’auteur. A. PÉRON. WWæchting (H.). — De la transplantation sur le corps de la Plante. Nachrichten v. J. Kün. Gesellsch. d. Wassensch. u. d. Georg. August. Universit. zu Güttingen, 1889, n° 14, 1890, récemment paru. Le travail de M. Wæchting, bien que s'appliquant à la végétation et paraissant au premier abord avoir été fait dans un but purement pratique, peut avoir des conséquences {héoriques très étendues au point de vue de la physiologie animale, L'auteur étudie les questions suivantes : phénomène histologique de la prise de la greffe sur le sujet; influence de l’affinité systématique des parties réunies par la greffe; effet exercé mu- tuellement par les formes différentes réunies par la greffe. Les expériences ont été faites sur des tiges ligneuses et sur des racines charnues, comme la betterave ; elles ont porté d’abord sur la réunion de parties d’un même nom. Ainsi, la racine latérale d'un système radiculaire peut être déplacée à volonté sur la racine principale dans le sens longitudinal ou périphérique ; elle se soude complètement à l’organe-mère, De même, on peut couper l'extrémité de la racine principale et en faire une racine latérale. Si l’on découpe dans une betterave de petits mor- ceaux de tissu et qu'on les introduise dans des trous de mème forme et de même grandeur, la soudure se fait parfaitement, La transplantation peut avoir lieu dans le sens transversal ou longitudinal, Il n’en est plus de même si l’on change l'orientation du fragment transporté, Un prisme découpé dans une betterave et planté dans un trou correspondant, mais dans une position relative différente, ne se soude plus et il se forme tout autour des bourrelets pathologiques. Les plantes ligneuses se comportent en général comme les racines charnues. Les tissus de nature différente se greffent comme ceux du même nom : la tige sur la racine, la racine sur la tige, les feuilles sur la ra- cine, etc.; mais, comme dans le cas précédent, il n’est pas possible, sans de grands désordres, de placer la greffe dans une orientation anormale, Ces expériences montrent qu'il existe une polarité de la cellule, que la cellule à un haut et un bas. La loi qui régit ces phénomènes peut s'exprimer, comme en physique, en disant que les pôles de même nom se repoussent, que les pôles de nom contraire s’attirent, A. HÉgerr, Gautier (Armand), de l’Institut. — Les Perfection- nements de la vinification dans le Midi de la France. Conférence faite le 48 mai 1890, au Congres de lAssociation Pyrénéenne. Annales agronomiques ; tome XVI; p. 433, La conférence de l’éminent académicien n’est, à vrai dire, qu'une suite de conseils pratiques sur l’art de faire le vin. Elle commence à la vendange pour se ter- miner à la mise en pièces en passant par toutes les opérations intermédiaires; M, À, Gautier s'occupe éga- lement de la fabrication des vins de seconde cuvée et des maladies auxquelles sont sujets les vins. Nous ne pouvons analyser d’une facon détaillée l'intéressante conférence du savant auteur; nous nous bornerons à en donner un apercu général, M. Gautier recom- mande expressément de vendanger un peu avant la maturation du fruit, quand la quantité de sucre et par suite la densité du jus n’augmentent plus sensi- blement, ce qu'on reconnait par les glucomètres, les mustimètres ou simplement par l’aréomètre de Baumé ; une vendange trop mûre donne un vin plus alcoolique, mais dénué de bouquet et difficile à conserver. L'opé- ration du foulage peut être évitée, car la cueillette, le transport et la chute à la cuve écrasent assez de grains pour mettre en train la fermentation; la pureté de la levüre doit être oblenue en excitant son aclivité, de facon à détruire les autres germes parasitaires ; on l’obtient surtout en cueillant avant la maturité de facon que le jus étant acide, favorise le développe- ment des levüres alcooliques, et en aérant lemoût par trois ou quatre insufflations pendant les deux pre- mières journées de cuvaison, La fermentation doit être conduite rapidement entre 20° et 28°, la décuvaison doit s'effectuer quand la tem- pérature décroit et que la mousse s'abaisse; au-dessus de 28° il se forme des alcools supérieurs; au-dessous de 20°, la fermentation est trop longue et il se déve- loppe des moisissures. Pendant cette opération, il faut tenir immergé le chapeau ou gâteau de mare; le vin est ainsi mieux fait, plus coloré et le marc est plus apte à faire des vins de seconde cuvée. M. Gautier s'élend longuement sur le plâtrage des- tiné à augmenter l'acidité du vin, à en aviver la cou- leur, à précipiter les albuminoïdes, à entraîner les ferments et à assurer ainsi la conservation de la liqueur. Le plâtre introduit réagit sur la crème de tartre et forme du tartrate de chaux qui se précipite et de l’acide tartrique et du sulfate de potasse qui se dissolvent. Le plâtrage, bien qu'absolument nécessaire, est regret- table parce qu'il altère le goût du vin, le rend plus àpre, qu'il y introduit du sulfate de potasse purgatif, enfin parce qu'il rend nos vins méridionaux suspects; c'est pourquoi on à cherché à remplacer le plâtrage par le phosphatage ou le tartratage, procédés nouveaux sur l’eflicacité desquels on ne peut encore se prononcer définitivement, — Après décuvaison, on doit procéder à deux ou trois soutirages avant le milieu du printemps, puis au collage — M. Gautier aborde ensuite l’étude des vins de seconde cuvée ou vins de marc pour la fabrication desquels il donne une recette qui consiste à délayer le marc dans l’eau, à soutirer le liquide, à y introduire des quantités convenables de sucre et d'acide tartrique, à faire bouillir pour intervertir et à parfaire avec de l’eau le volume à obtenir. On rejette le liquide sur le marc et on fait fermenter. Le marc restant peut encore donner de très bonne eau-de-vie. M. Gautier s'occupe en dernier lieu des maladies qui frappent nos vins du Midi : l’ascessence, causée par le mycoderma aceti; la tourne ou cassure qui dé- compose le tartre et l'acide tartrique en acides tar- lronique, acétique ef lactique et qui fait tourner le vin au marron; enfin la pousse des vins qui transforme leur acide tartrique en acides carbonique, acétique et propioniq 1e. Le traitement pastorien du chauffage est le meilleur pour combattre toutes ces maladies, A. HÉBERT. 120 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Fabre-Domergue (P.) — Manuel pratique de l'analyse micrographique des eaux (1 fr.50). Paris, B, Tignol, 53 bis, quai des Grands-Augustins. 4890. Le petit livre de M. Fabre-Domergue est un ouvrage de vulgarisation ; aussi l’auteur à pris soin de le dégager de toute discussion scolastique. Il s’est contenté, et on ne saurait trop l'en féliciter, de prendre dans les diverses méthodes d'analyse micrographique des eaux celles qui lui paraissaient les meilleures, et de les expo- ser succinctement. Disons tout de suite que le choix qu'il a fait nous parait excellent, car il a donné la pré- férence aux méthodes de M. Miquel qui sont à l'heure actuelle les plus parfaites connues, si bien que ce petit manuel est en grande partie un résumé fort bien fait des travaux de M. Miquel. Ce manuel peut servir de guide pour l'analyse bactériologique des eaux et aussi de premier livre à consulter pour connaître le sujet, que l’on pourra ensuite approfondir dans les divers ouvrages plus importants qui traitent de la matière. D' H. Dusrer. 4° Sciences médicales. Cornevin (Ch.), — Des plantes vénéneuses et des empoisonnements qu'elles déterminent. Un vol. in-8° de 500 pages, avec fig. dans le texte (6 fr.). Paris 1890, Firmin Didot et Cie, 56, rue Jacob. Depuis que la Toxicologie est entrée dans une phase véritablement scientifique, elle a surlout visé, en ce qui concerne les végétaux, l'étude de leurs principes aclifs, Jaissant volontiers de côté la plante elle-même Cette tendance, reflet évident de celle que manifeste la thérapeutique moderne, dont nous n'avons pas à faire ici le procès, n'est pas sans offrir de sérieux inconvé- nients : il est certain, en tout cas, que l’on ne peut conclure de l'effet des principes foxiques considérés isolément à l’action générale de la plante. Ces effets se produisent souvent dans des sens divers, parfois même contraires, et il s'ensuit que la résultante ne peut pas en être déterminée par la simple addition des uns et des autres. Sans prétendre qu'on puisse négliger l'étude de ces principes eux-mêmes, il est donc nécessaire, tout au moins lorsqu'ils sont multiples, d'envisager l'action directe et générale de la plante, — Telle nous paraît avoir été l’idée directrice de M, Cornevin. Son ouvrage est divisé en deux parties, l’une générale, l’autre spéciale. La première présente un examen d'ensemble des poisons d’origine végélale ef des intoxications qu'ils occasionnent, On y trouve d’abord l’exposé de nos con- naissances actuelles sur le déterminisme de la toxicité : l'auteur, étudiant l’évolution du végétal toxique et ses conditions vitales, met notamment en relief ce fait in- téressant que la toxicité ne semble pas être une pro- priété primordiale, mais une propriété acquise sous l'influence du milieu, Il tend à expliquer de la sorte comment des plantes appartenant à des genres très différents d’une même famille naturelle produisent un poison identique, tandis que des espèces d’un même genre, vivant dans un milieu différent, sont douces de propriétés très éloignées, Témoin les Strychnos d'Asie, qui sont convulsivants, alors que ceux d'Amérique sont paralyso-moteurs, — Les réactions de l’organisme animal en présence des poisons sont ensuite étudiées avec un soin tout particulier : M. Cornevin examine en premier lieu les conditions de l'empoisonnement spon- tané et montre que si l’espèce humaine — surtout dans le jeune âge — paye un sérieux tribut à cette cause d'accidents, l'instinct «1 vanté des animaux est loin de leur constituer une sauvegarde absolue, principale- ment dans l’état de domesticité. Il nous fait voir en- suite les variations d'activité que présente le poison lorsqu'il est introduit dans l'organisme animal : avec M. Bouchard, il adopte pour étalon, à ce point de vue, la torie, c’est-à-dire la quantité de substance véné- neuse nécessaire pour tuer un kilogramme de matière vivante. Cette base admise, il étudie les variations de la toxie suivant la voie d'introduction du poison, l'âge du sujet, son sexe, son espèce, sa race elson indivi- dualité. Il aboutit, en ce qui concerne les espèces do- mestiques, à ce résultat quelque peu contraire aux idées recues, qu'on doit les classer, relativement à leur susceptibilité générale en face des poisons, dans l'ordre suivant: Équidés, Carnivores, Porc, Oiseaux, Cobaye, Ruminants, Lapin. La seconde partie de l'ouvrage passe en revue, d’après une classification purement botanique, environ deux cents espèces de végétaux indigènes, toxiques à des degrés divers. Chacune de ces espèces est décrite d’une facon sommaire, souvent même figurée, puis analysée au point de vue de ses effets sur l'organisme, du traitement des accidents qu'elle détermine, voire du danger que peut présenter la consommation de la chair des animaux empoisonnés, Toutes ces données sont basées à la fois sur de nom- breux documents bibliographiques rassemblés par l’auteur, ainsi que sur les résultats de ses recherches personnelles. Il y a là, en somme, une foule de rensei- gnements utiles, surtout pour les habitants de la cam- pagne, et le livre de M. Cornevin est appelé à rendre de sérieux services, en particulier, aux médecins, aux vétérinaires et aux agriculteurs, A. RAILLIET. Springer (D Maurice). — Etude sur la croissance et son rôle en pathologie. — Essai de pathologie générale. 1 vol. in-8° (6 fr.), Félix Alcan, Edit., 108, Boulevard Saint-Germain, Paris, 1890. Il n'est peut-être pas d'idée plus générale dans la pathologie que celle attribuant à la croissance tout un cortège de phénomènes morbides apparaissant dans cette période de la vie où l'organisme 5e forme, où, le nombre des cellules du corps augmentant sans cesse, une suractivité fonctionnelle devient nécessaire. Mais jamais peut-être les conséquences de cet état physiolo- gique spécial n'avaient été exposées avec une aussi grande limpidité et autant de conviction réfléchie. Pour qui connaît l’auteur, il est facile de retrouver là les caractères principaux de son esprit: habileté par- ticulière dans l'observation, dialectique ingénieuse et serrée dont la synthèse aboutit à des idées quelque- fois théoriques, mais toujours séduisantes et origi- nales. Toutes ces qualités rendent bien facile et attrayante la lecture du livre de M. Springer: On peut trouver qu'il se laisse souvent emporter par son sujet, mais on constate avec plaisir que, si souvent l'idée est un peu paradoxale, elle repose sur un fonds d'observation vraie qui engage à se laisser séduire. L'auteur estime que la période de croissance joue un rôle prépondérant dans l’évolution du futur indi- vidu et bien souvent la constitution de ce dernier ne serait que le résultat de la manière dont s’est opérée la croissance. Il se fait dans la croissance un véritable surmenage cellulaire, et, si la nutrition n’est pas suffi- samment active pour réparer les pertes, organisme se {trouve en instance morbide, Si au contraire lorga- nisme à pu faire les frais de la croissance, il en ré- sulte pour lui la constitution d’un état de santé plus ou moins vigoureux. M. Springer a étudié successivement le rôle de la croissance dans les maladies des divers systèmes os- seux, vasculaire, lymphatique, ete... Quelques cha- pitres intéressants sont consacrés à l'étude du sevrage de la puberté et de l'influence des maladies infec- tieuses. D’après l’auteur, d’ailleurs, le médecin est loin d’être désarmé en présence des troubles causés par la croissance, et l’on peut dans une certaine mesure la diriger ou la corriger suivant le cas. En somme cet ouvrage est fort intéressant à lire et il porte bien la marque de l’homme spirituel et éclairé qui Pa écrit. D' H. Dumrer. ee PT 1. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 194 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 9 février 1891, 1° SGiIENGES MATHÉMATIQUES. — M. G. Leveau à cal- culé les corrections à apporter à la valeur admise pour la masse de Jupiter (Leverrier) et celle de Mars (Hall) pour que la théorie de Vesta, établie sur ces éléments, s'accorde avec les observations méridiennes de cette planète; la correction introduite est notable, 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Poincaré montre que l'expérience de M. Wiener exposée à l'Académie par M. Cornu comme démontrant que les vibrations de la lumière polarisée se font normalement au plan de polarisation peut être interprétée autrement, Sui- vant la facon dont on comprend la quantité physique- ment mesurable que nous appelons intensité lumineuse, celte expérience justifie l'hypothèse de Fresnel ou celle de Neumann: si l’on considère que ce qui est mesuré dans l'expérience, c'est le pouvoir photochi- mique des radiations, c’est-à-dire la force qui tend à séparer les atomes matériels, et que l’on étudie la facon dont les radiations interviennent dans un système de deux atomes, on voit que si c'est l'énergie ciné- tique qui impressionne la substance photographique, l'expérience de M. Wiener donne raison à Fresnel contre Neumann; si c’est l'énergie potentielle, lexpé- rience donne raison à Neumann. — À propos du pou- voir photochimique des radiations, M. Berthelot remarque que la lumière ne joue, dans les réactions chimiques qu'elle provoque, que le rôle d’un agent excitateur: ces réactions sont en réalité exothermiques; le seul fait qui subsiste de réaction photochimique endothermique serait la décomposition de l'acide car- bonique par la chlorophylle, mais il y a encore des réserves à faire, si l'on considère l'ensemble des réaclions se produisant en même temps dans l’orga- nisme végétal. — M. Edm. Becquerel montre quelques spécimens d'épreuves du spectre solaire avec ses cou- leurs propres, qu'il a obtenues il y a plus de quarante ans. — M. D. Berthelot a reconnu que la conducti- bilité électrique d'une solution d'un sel neutre de polasse à acide organique ne change pas par l'addition d'un excès d'acide si l'acide est monobasique, elle est i cet acide est bibasique. Les abaisse- diminuée si ments successifs de la conductibilité produits par des excès croissants d'acide se prolongent plus longtemps dans le cas d’un acide tribasique. Ces observations peuvent servir de base à une méthode pour déterminer la basicité d'un acide dont on connaîtrait seulement le poids moléculaire. — M, Joannis à recherché s'il existait des combinaisons de l’ammoniaque avec les chlorures de potassium, de sodium et de baryum: il a déterminé ces combinaisons pour les deux derniers chlorures., — M. R. Varet montre que les cyanures métalliques proprement dits donnent naissance avec l'acide picrique à des isopurpurates, comme les cya- nures alcalins ou alcalino-terreux, lorsque leur acide cyanhydrique peut être déplacé par lPacide picrique (zinc) dans le cas contraire (argent, mercure, cuivre), iln’y à pas formation d'isopurpurate. — M, L. Magnier de la Source discute l’opinion de MM. Roos et Thomas qui se refusent à admettre qu'un vin plàtré puisse à un moment quelconque renfermer du bisulfate de potassium; il expose les considérations qui lui font admettre l'existence possible de l'acide sulfurique libre dans le vin. — M. l'inspecteur général de la navi- gation adresse les états des crues et diminutions de la Seine observées chaque jour au pont Royal et au pont de la Tournelle pendant l'année 1890, | 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Ch. Henry à imaginé un olfactomèlre qui consiste essentiellement en un tube de papier dont une partie plus ou moins grande laisse diffuser les vapeurs odorantes, la quantité d’essence évaporée est évaluée au moyen d’un aréomètre particu- lier; l'auteur a déterminé le minimum perceptible pour un cerlain nombre d’'essences. — M. L. Butte à cons- taté que l'extrait de valériane, soit in vitro, soit dans l'organisme, ralentit la destruction du sucre dans le sang, — M. A. Chobaut a pu observer l’évolution lar- vaire complète de lEmenadia flabellata (Coléoptères Rhipiphorides); il existe une première forme (triongu- lin) qui s'attache aux Hymenoptères pour se faire transporter dans leur nid; puis une deuxième forme, inerme, qui vit en parasite dans la larve de l'hyménop- tère jusqu'à sa transformation en nymphe. Les Eme- nadia sont parasites des guèpes solitaires. — M. T. Gui- tel décrit le développement des nageoires paires, pec- torales et ventrales, du Cyclopterus lumpus, et la trans- formation de ces dernières en disque adhésif. M. Stanislas Meunier délermine comme appartenant à une nouvelle espèce de Cycadospadir, le C. Virei, une empreinte de feuille recueillie dans le corallien supé- rieur de Verdun, — M. Gosselet conteste les conclu- sions de M. Olry sur les relations du bassin houiller du Boulonnais, le facies de tous les horizons du Bou- lonnais le rattache au bassin de Namur et non à celui de Dinant, — M. J. Seunes attribue au dévonien supé- rieur les marbre de Jeteu (vallée d'Ossau, Basses-Pyré- nées) et au dévonien moyen les calcaires à polypiers sous-jacents rapportés au carbonifère; la série devo- nienne serait ainsi complète et normale dans celle région, Mémoires présentés. — M. J. Carvallo adresse un mémoire portant pour titre : Essai sur la théorie des mouvements internes et de translation des cyclones. M. G. Barbey adresse une note relative à un nouveau dérivé de la résorcine, — M. J. Dettiveiler adresse une note relative à un appareil pour uliliser la dilata- tion de l'air sous l’action des rayons du soleil, Séance du 16 février 1891 1° SGIENGES MATHÉMATIQUES, — Mile D. Klumpke : Ob- servations de la planète Charlois (Nice, 14 février 1891) faites à l'observatoire de Paris. — M. Rod. Wolf rap- pelle que l'idée fondamentale de l'appareil Ibañez-Brun- ner, usilé en géodésie, a été déjà réalisée à Ja fin du xvu® siècle par Tralles et Hassler à Berne. M. Rod. Wolf montre que la statistique solaire et Les variations magnétiques, calculées suivant les formules qu'il a établies, offrent pour l’année 1890 un parallé- lisme remarquable; il ya eu un minimum à la fin de 1889 ou tout au commencement de 1890. — M. Pros- per Heury mesure la varialion de la réfraction atmos- phérique avec la longueur d'onde lumineuse en placant devant l'objectif d'une lunette un réseau perpendicu- laire à l'axe et dont les lignes sont parallèles au plan vertical passant par cet axe. En examinant à l’aide de ce système un point lumineux non affecté par la ré- fraction astronomique on remarque au foyer de la lunette, outre l’image centrale du point, une double série de spectres linéaires horizontaux; l’étude des deux spectres de premier ordre fournit la mesure cherchée, — M G. Defforges a éludié la résistance qu'opposent divers gaz (acide carbonique sec. oxygène sec, hydro- gène humide) aumouvement d'un pendule; la for- mule que M. Defforges avait donnée dans le cas de l'air s'applique avec les mémes coefficients. Si donc on ad- met suivant l'hypothèse de sir Georges Stokes que la couche de fluide immédiatement en contact avec le corps = 19 19 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES oscillant offre une adhérence parfaite, il en résulterait que le coefficient du frottement extérieur est le même pour tous les gaz; ce résultat est en contradiction avec les conclusions d’un grand nombre de recherches sur lefrottement extérieur. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Cornu traduisant dans la langue des physiciens l’analyse que M. Poincaré a faite de l'expérience de M. Wiener, montre que le point resté douteux, est en réalité éclairei par une expérience accessoire du même auteur: dans le cas où les deux théories en présence, celle de Fresnel et celle de Neu- mann, s'accordent pour affirmer l’existence d’un nœud au même point (incidence normale à la surface d’un corps de pouvoir réfléchissant égal à 1, cas théorique, dont un miroir d'argent poli se rapproche beaucoup), limpression photographique n'a pas lieu en ce point nodal. Ce sont donc les déplacements vibratoires (éner- gie cinétique), et non les forces correspondant au glis- sement relatif (énergie potentielle) qui affectent les substances photographiques. En effet, l'amplitude des glissements est maximum en ce point. - Ce cas de l’in- cidence normale sur une surface réfléchissante de pou- voir réflecteur égal à l’unité est étudié dans la note de M. Potier qui montre que l’indétermination signalée par M. Poincaré disparait quand on étudie un milieu limité et qu'on introduit les conditions à la surface, — M. Multzer : variabilité du nombre des vibrations des notes musicales selon leurs fonctions — M, Ostwald maintient la réclamation de priorité qu'il a formulée à propos de plusieurs des faits publiés par M. D. Berthe- lot sur la conductibilité des acides organiques et de leurs sels. — M. D. Berthelot répond à celte note, — M. R. Varet a formé et étudié les combinaisons de la pyridine avec divers sels métalliques halogènes, — M. D. Joannis à DonduLé que le sodammonium se dé- compose spontanément à la température ordinaire en hydrogène et amidure de sodium, qui se présente sous la forme de petits cristaux blancs, 1l a obtenu un chlo- rure de disodammonium., — M. Scheurer-Kestner indique que l'huile pour rouge renferme des proportions variables des deux produits principaux qu ‘il a signalés dans cette préparation; le tournesol n'étant pas sen- sible à l’acide gras non sulfoné, tandis que la phé- nolphtaléine ne se colore que quand cet acide a été saturé, un dosage acidimétrique comparatif avec ces deux indicateurs donne la proportion du composé sul- foné et du composé non-sulfoné qui ont une valeur in- dustrielle inégale, 3° SCIENCES NATURELLES. — M.G. Colin a fait des ex- périences comparées sur la résistance des animaux domestiques au froid; le lapin résiste admirablement, à moins qu'il ne soit très jeune; il en est de même des oiseaux; le bouc et le porc, à toison rudimentaire pourtant, istent aussi fort bien; le chien vient après; les solipèdes supportent beaucoup moins bien le froid. — M, A. Pizon nie la réalité chez les Ascidies composées du développement LEURS admis par M. Giard (V, Comptes rendus, 2février 189); il main- tient, en s'appuyant sur les observations récentes de M. Lahille que les Diplosoma ont spécifiquement deux ascidiozoides et jamais (rois au moment de l’éelosion. — M. Sirodot, dans des fouilles pratiquées au Mont- Dol (Ille-et-Vilaine) a trouvé les débris d'un grand nombre d'éléphants, dont l'Elephas primigenius repré- sente la forme type; ces débris, très fragmentés, portent des traces qui font reconnaître nettement des restes de cuisine; d'après les molaires, classées d’une facon É stématique, on peut reconnaitre que ces ossements FEES d'au moins centindividus, — M.Levasseur lait hommage à l’Académie du second volume de son ouvrage : « La Population francaise ». — M.le Secrétaire perpétuel entretient l'Académie des résultats déjà ob- tenus par la mission Crampel au Congo ; en particulier, les relevés de la mission reporteraient le cours de l'Ou- banghi de près d’un degré plus au Nord.— M. le Secrétaire perpétuel informe l Académie de la perte quela Science vient de faire dans la personne de Mme Kowalewsky. Mémoires présentés. — M. D. Monclar adresse une note relative à un mode de traitement de la tubercu- lose, — M, Lembert-Roguin adresse une nofe re- lative à la direction des aérostats, L. LAPicQuE. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 10 février 18H M. Jaccoud à injecté à un cobaye 0,50 de lymphe de Koch en deux séries de 10 jours chacune , puis lui a ino- culé la moitié d'un ganglion tuberculeux. Mort après un mois, c’est-à-dire ‘dans le temps minimum d'évolu- tion de la tuberculose chez le cobaye; — constata- tion à l’autopsie de lésions à l’état maximum, D'autre part un cobaye inoculé avec l'autre moitié du gan- glion, le mème jour, survivait encore 40 jours après. Donc, l'imprégnation préalable avec la Iymphe de Koch n’a en aucune action préventive. — M. Du- jardin-Beaumetz en collaboration avec M. Dubief a inoculé deux séries de cobayes : chez les uns, la lymphe d’abord, puis la tuberculose, l'inverse chez les autres, Aucun des animaux n'a survécu, aucun n'a marqué la moindre amélioration. — M. Valude présente un traitement simple des ulcères cornéens de toute nature, consistant en un pansement occlusif au salol, après lavage au sublimé à 1/5,000, pansement rare, renouvelé tous les trois ou quatre’ jours. — M. La- gneau revient sur la nécessité de prendre des me- sures énergiques contre les maladies transmissibles : vaccination et revaccination gratuites, généralisation des mesures d'isolement et de désinfection, groupe- ment dans une même direction de tous les services d'hygiène etc., etc. — M. Créquy présente les résul- tats obtenus relativement à la variole à la Ci du che- min de fer de l'Est où la revaccination est obligatoire; auparavant il y avait 15 varioleux par an et 3 décès en moyenne, maintenant il n’y a plus que quelques vario- loïdes légères et pas de décès. Séance du i7 février 1891. M. Lefort montre d'après les statistiques anglaises (D: Barry de Sheffield, hôpital des varioleux) que dans les épidémies de variole les vaccinés sont atteints dans la proportion d'un quart, les non vaccinés, des trois quarts; la mortalité de 35 0/0 chez les non vaecinés tombe à 3 chez les vaccinés. Les revaccinés deviennent aussi réfractaires que s'ils avaient eu la variole. Il faut donc propager la vaccination et la revaccination et améliorer ce service en France. En Prusse, citée comme exemple par MM. Brouardel et Proust, il y a non seulement la vaccination mais l'isolement obligatoire. La vaccination obligatoire seule n'empêche pas les épi- démies, exemple à Sheffield, ville réalisant l'idéal à cet égard où sur une population de 274,112, il y avait 268, 397 vaccinés, il y a eu 7,001 cas de variole dont D,8: 1 chez des vaccinés, 633 décès dont 279 chez les vac- cinés; mais pendant l'épidémie l'isolement et la dé- sinfeclion n'avaient pas été pratiqués. Quoiqu'on fasse une loi rendant la vaccination et surtout la revaccina- tion obligatoire, il y aurait toujours de nombreux ré- fractaires qui pourraient devenir l’origine d’une épi- démie. Ce qui serait beaucoup -plus pratique, serail une installation modèle du service vaccinal, et l’isole- ment des varioleux, Dr Ed. De LAVARENNE. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 1891 M. A. Raïlliet a éludié un cas de strongylose bron- chiale du cheval; le parasite qui produit cette affection est le Strongylus Arnfieldi, comme chez l'âne. — M. E. Gley a reconnu que le cœur du chien électrisé, revient à son rythme après avoir présenté des trémulations ventriculaires: 1° chez les chiens refroidis:; 2° chez les chiens fortement chloralisés; 3° chez les nouveau-nés. La nature transitoire des trémulations dans ces condi- Séance du 14% février nb, 1 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES : 1923 tions tend à démontrer qu'elles sont sous la dépen- dance d’un appareil nerveux. — MM. A. Mathieuet A. Rémond présentent les conclusions de leurs re- cherches sur le suc gastrique ; ils signalent ce fait que la plupart des sues gastriques ne sont capables de pep- toniser qu'une très faible partie de l’albumine de lali- mentation. — MM, J.Grancher, H. Martin et Ledoux- Lebard obtiennent chez le lapin, par injection intra- veineuse de cultures tuberculeuses, des tubercules, pourvu que la dose de virus injectée soit très petite, Les cultures atténuées donnent des formes à évolution lente. — M. H. Dubief a injecté de la lymphe de Koch à des cobayes tuberculeux; il n’a pu observer aucune action curative, — M. E. Retterer a éludié la forma- tion de la double gaine preputiale du cheval. — MM. Gil- les de la Tourette el Cathelineau ont dosé la capacité respiratoire du sang, par le procédé de Schützenberger, chez des hystériques non chlorotiques. Les chiffres obtenus ne s’écarten t pas de lanormale, — M. L. Olivier présente des protographies colorées suivant le procédé de M. Lumière, destinées à mettre bien en évidence les connectifs protoplasmatiques inter-cellulaires des végélaux, Séance du 21 février 1891. M. Hénocque a vu sur un singe tuberculeux une aggravalion suivre l'injection de lymphe de Koch, — M. Capitan a pratiqué aussi des injections de lymphe de Koch sur des singes tuberculeux; il n’a pas observé de réaction nette, — MM, Charrin et Roger ont cul- tivé le micro-organisme trouvé dans le cas d’angiocho- lite suppurée signalé récemment par M. Bouchard; il s’agit du bacterüium coli commune avec quelques carac- tères atypiques qui ont disparu dans la succession des cultures. Ces cultures, injectées dans les voies biliaires des lapins, reproduisent l’angiocholite suppurée., — M. Darsonval emploie pour obtenir dans les expé- riences de physiologie des excitations loujours de même intensité une bobine de fil de cuivre dans la- quelle se déplace un barreau aimanté, — M, Laguesse a étudié l’anatomie du pangréas chez divers poissons ; cet organe est très diffus et forme un réseau dispensé dans le mésentère; dans un type, il pénètre dans le foie, sous forme d'invaginations recouverles de péri- toine accolées aux branches de la veine-porte, — M. Vaillard vaccine les lapins contre le télanos en leur injectant de grandes quantités de liquide de culture chauffé à 60° ou du trichlorure d’iode. — M. Mcntané décrit la structure et le mode de formation du lym- phangiome vrai, — MM. Dor et Courmont adressent une note sur la production expérimentale de tumeurs blanches chez le lapin, au moyen d’injections intra- veineuses de cultures tuberculeuses. — MM. Bruhl et Dubief ont étudié les lésions particulières que présen- tent les cellules hépatiques dans la diphtérie expéri- mentale, L. LAPICQUE. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 20 février 1891 M. le Président lit une lettre de M. Caïlletet qui renferme l'indication sommaire d’un procédé pratique permeltant de produire un froid considérable et très prolongé par ladétente del’acide carbonique. - M. Lip- pmann fait une communication sur la photographie des couleurs; la Revue a déjà exposé la belle décou- verte qui fait l’objet de cette communication. M. Lip- mann s'attache à exposer de la facon la plus élémen- faire et la plus accessible à tous, le principe simple et élégant dont il est parti, il montre ensuite plusieurs des épreuves qu'il a obtenues Les spectres sont assez intenses pour pouvoir être projetés. Si l’on fait tomber sur la plaque photographique, développée et fixée, un faisceau de lumière blanche, les rayons réfléchis viennent former sur letableau, un spectre vivement co- loré, — M. Hospitalier décrit les différents types de compteurs électriques actuellement en usage. La véri- table dépense d'énergie électrique faite par le consom- at mateur à pour expression l'intégrale | Eldé (E étant Vo la force électromotrice, I l'intensité, { le temps); c’est donc cette intégrale que devrait effectuer et enregistrer le compteur théoriquement parfait, Au début, on sup- posait que les machines possédaient une puissance invariable, le produit EI étant alors constant, il suf- fisait d'évaluer le temps. Une telle solution était évi- demment grossière, aujourd’hui des appareils spé- ciaux sont employés, Un premier groupe convient au cas où la tension E demeure sensiblement fixe. t les compteurs effectuent simplement l'intégrale fer Les uns sont fondés sur l’action chimique (Edison) d’autres sur les rotations électromagnétiques, (Ferran- li,ete.) d'autres encore surle décalage de deux pendules primitivement synchrones et dont l’un est retardé par une attraction électromagnétique (Aron). Ces compteurs peuvent donner de bons résultats, mais aussi causer de sérieux préjudices au consommateur si lusine vient à fournir l'électricité sous des tensions plus faibles. Un second groupe comprend les appareils destinés aux machines à intensité constante, mais en France, l'em- ploi de ces machines est très limité Enfin les comp- teursles plus utiles sont les watts-heure-mètres qui permettent d'évaluer l'intégrale exactement. Is sont aujourd'hui assez nombreux, on peut citer ceux de MM. Richard, Marès, Aron, Meylan. etc ; presque tous ces instruments ressemblent à des électrodynamomètres, l'une des bobines étant en dérivation. l'autre parcourue par le courant principal; ils conviennent, avec de lé- gères modifications, aussi bien dans l’emploi des courants alternatifs, à cause des phénomènes de self induction se passant dans les bobines. Lucien Poincaré. SOCIETE FRANÇAISE DE MINERALOGIE Séance du 12 février 189, M. Friedel présente de la part de MM. Duparc et Le Royer une série de déterminations cristallogra- phiques de substances organiques. — M. Friedel signale l’existence dans la mine d’anthracite de La Mure (Isère), d’un carbonate de magnésie hydraté dont la composition correspond à la formule Co? Mg + 3 H20. Sa composition ainsi que ses propriétés cristallogra- phiques le font rapporter à la Nesquehonite, récem- ment découverte en Amérique par MM. Genth et Penfield. IL est probable que cette espèce est identique avec la Landsfordite, — M. Wyrouboff, cherchant à démontrer que la molécule cristalline subsiste en solution, à examiné à ce point de vue la courbe de solubilité du sulfate de soude anhydre (à partir de 33° environ). Il la considère comme la résultante des courbes représentant les proportions relatives des deux formes « et 8 les plus stables sous lesquelles peut exister ce sel tétramorphe. Cette considération est appuyée par les faits suivants : en faisant cristalliser une solution à chaud, on obtient en même temps des cristaux de chacune des deux formes et la proportion de la forme 8, la plus stable à chaud, va en augmentant à mesure que la température s'èlève. En outre la forme « (thenardite), étant moins soluble à chaud, doit cristalliser la première, ce que lexpérience confirme. Au-dessus de 1309, la forme & n’existant plus, la courbe doit cesser d’être anormale, et c’est en effet ce qu'a montré M. Læwel, Enfin, l'addition d’alcool dans une solution portée à la température de 50° précipite en mème temps les deux formes. M. Wyrouboff conclut de ces faits que les molécules cristallines existent dans la solution. C’est un argument à l'appui de sa théorie du polymorphisme, d'après laquelle la molécule chi- mique n'aurait pas de propriétés optiques, mais seule- ment la molécule cristalline, — M, Malard répond ACADÉMIES ET SOCIÈTES SAVANTES que cette hypothèse est contraire au fait que certains corps ont le pouvoir rotaloire à l'état de cristaux et ne l’ont plus en solution. — M, Friedel ajoute que la con- clusion de M Wyrouboff n’est vraie que si les formes d’un corps polymorphe ne proviennent pas de groupe- ments différents des atomes dans la molée ule chimi- que, ce qui est loin d’être démontré; qu'en outre la théorie du carbone asymétrique de MM. Lebel et Vant- Hoff met en évidence l’influence prépondérante de la molécule chimique dans les propriétés optiques des corps dissous, G. FRiEnEL. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 18 février 1891 M. Raffy : Délerminalion de toutes les surfaces moulures qui sont applicables surune surface de révo- lution. Il n'y en à pas d’autres que celles qui ont été signalées par M. Dini et qui sont engendrées par une tractrice dont le plan roule sur un certain cylindre, — M. d'Ocagne : sur les substitulions linéaires sueces- sives à une seule variable dans le cas où les coefficients se reproduisent périodiquement. MAURICE D'OCAGNE, SCIENTIFIQUES COAST INSTITUTION OF ENGINEERS AND SHIPBUILDERS 1890-1891. M. W. Hok présente un travail sur l’Insubmersibilité des navires, ayant pour objet de rechercher dans quelle mesure les compartiments étanches, établis selon les règlements du Lloyd, peuvent remédier au danger d'une collision. Laissant de côté la question de stabi- lité, il se borne à calculer l'enfoncement qui résulterait de l’envahissement de chacun des compartiments par l’eau. Il établit à cet effet des formules très simples qui donnent cet enfoncement en fonctions de quantités faciles à déterminer, Afin de tenir compte de la diver- sité des formes de carène, l’auteur fait d’ailleurs varier . coefficient de finesse de 0,70 à 0,79 et le rapport de la longueur au creux de 12 à 15. IL suppose en oulre que le” chargement consiste en charbon, dont le volume occupe 60 0/, de la capacité des cales. Les recherches ont porté sur 7 types de navires : les navires à un, ou trois ponts soit privés de superstructures, SOCIÉTÉS MARITIMES NORTH-EAST Session deux, soit pourvus des combinaisons les plus usitées de du- nettes, rouffles et gaillards ; les navires à spardeck, à hurricanedeck ou pont abri; enfin les voiliers. Les ré- sultats sont représentés par des séries de courbes don- nant pour chaque type et pour chaque longueur lim- mersion produite en supposant successivement chacun des compartiments envahis. La seule inspection de ces courbes permet de conclure que le cloisonnement recommandé aujourd'hui encore par le Lloyd et pra- liqué par les constructeurs qui se conforment. à son règlement, est le plus souvent inefficace. En premier lieu, les voiliers ne peuvent rester à flot dans aucun cas. IL en est de même pour les vapeurs à pont-abri au-dessous de 106 mètres de longueur; ce n’est qu'à partir de 122 mètres qu'ils deviennent insub- mersibles ; or, peu de navires de ce genre atteignent de telles dimensions, Viennent ensuite les well-decks, type très répandu dans le Nord de l'Angleterre, insub- mersibles au-dessus de 103 mètres ; puis les différentes espèces de navires à superstructures, Les plus favorisés sont les spardecks, et pourtant l’envahissement de la cale arrière leur serait encore fatal au-dessous de 97 mètres, et c’est seulement à partir de cette longueur qu'ils continueraient à flotter, quel que soit le com- partiment touché, En résumé, à ne considérer que l'immersion due à une perforation de la carène, la subdivision de la coque en compartiments étanches est insuffisante pour les navires de faible et de moyen tonnage. Il y aurait lieu en outre de rechercher, dans les cas où le navire reste encore à flot théoriquement, si les cloisons pourraient résister à la pression de l’eau, On verrait alors combien est illusoire la sécurité attribuée aux compartements élanches, tels qu'ils sont actuellement établis. — M. W. Russell Cummins pré- sente une étude sur laugmentation de la pression et de la vitesse du piston dans les machines marines. La supériorité de la triple détente sur le type Compound à deux cylindres peut être attribuée à trois causes : {à l’accroissement de la pression de régime qui aug- mente la détente : 2° à la réduction des écarts de tem- pérature et par suile des condensations dans chaque cylindre ; 3° à l'accroissement de la vitesse du piston. On trouve en effet que la vapeur à 415 par exemple produit dans la détente adiabatique un travail supé- rieur de 18 0/, à celui que produirait de la vapeur à 8 kil. renfermant le même nombre de calories. Il est facile d'expliquer également LÉ RCNE des détentes successives sur la détente unique au point de vue des condensations, Quant aux pauses vitesses, leur avan- age résulte surtout desce que la proportion de la va- peur condensée à la vapeur admise dans un cylindre, est d'autant moindre que l'allure est plus rapide, En pratique, c’est surtout à la haute pression que doit être attribuée l’économie de 20 ©}, qui est réalisée en moyenne par les machines à triple expansion par rap pese aux machines Compound. En portant la vapeur à 5 kilos, on réaliserait une nouvelle économie de 100/;; à 48 kil., elle serait de 16 0/,. Le type convenant le mieux à ces régimes serait la machine à quatre cylin- dres et quatre manivelles, Le nombre de tours doit ètre aussi grand que possible; mais il est limité par deux condilions particulières : l'une consiste en ce que la pression nécessaire à l'accéléralion des pièces à mouvement alternatif au début de la course ne sau- rait dépasser la pression initiale, sous peine de chocs; l’autre limite provient du mouvement de la bielle qui exerce sur les glissières des pressions alternatives ayant pour résultat d'échauffer la tige du piston. Le rapport des cylindres devrait en outre, selon l’au- teur, Être déterminé, non par la répartition égale de la puissane e, mais par la condition de l'égalité des charges initiales, Prenant pour exemple une machine à triple expansion, il établit alors, d’après les prineipes exposés plus haut, le projet d' une machine à quadruple expan- sion, produisant la mème puissance. Il trouve que la pre mière, à 11 kilos de pression et 65 tours par minute pourrait être remplacée par la seconde, fonctionnant à 17 kilos et 100 tours, avec une économie de vapeur d'environ 15 ®/, et une sensible économie de poids. — M. Cummins termine par la description d’une chau- dière destinée à produire la vapeur à 17 kilos. La crande difficulté étant la construction d’un foyer capable de résister à une telle pression, il imagine de revenir aux foyers extérieurs; le corps de la chaudière ne contient plus que le faisceau lubulaire, En réunis sant deux corps bout à bout avec leurs foyers adossés, on réduit d’ailleurs au minimum la perte par rayonne- ment, Enfin l'encombrement de cette chaudière est moindre que celui des types ordinaires, à égalité de surface de chauffe, L. Viver. SOCIÈTE ROYALE DE LONDRES Séance du 5 février 1891, 1° SGENCES PHYsiQues. — M. J. Norman Lockyer étudie la raie principale du spectre des Nébuleuses. II montre que les observations publiées par M. Keeler sur ce sujet (Publications de la Société astronomique du Pacifique n° 11) permettent d’assigner à cette raie une longueur d'onde de 500%,68. Elle est donc de 1,18 moins réfrangible que la raie du plomb dont le D' Huggins se servait antérieurement comme raie de comparaison, et de 0,82 plus réfrangible que le bord de la cannelure du magnésium, Les mesures montrent aussi que la raie la plus brillante du spectre des diverses Nébuleuses peut être plus ou moins réfran- gible que la cannelure du magnésium qui est en ? 5006,5. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 125 M. Maunder (dans le journal de l'Association astrono- mique anglaise) à fait la remarque que toutes les Nébuleuses observées se trouvent dans cette moitié de la sphère céleste sur laquelle se déplace le soleil, et qu'un mouvement de 36 milles à la seconde suffirait à faire coincider la raie des nébuleuses avec la canne- lure du magnésium, La conclusion, c’est que nous ne savons pas assez exactement la position de la raie des Nébuleuses pour déterminer si elle coïncide ou non avec la cannelure du magnesium et que les résultats numériques obtenus par M. Keeler ne peuvent être considérés comme définitifs. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. J. P. Anderson Stuart décrit une membrane qui limite la fosse patellaire du corps vitré. On admet d'ordinaire que le cristallin et la paroi postérieure du canal de Petit sont en contact immédiat avec la substance du corps vitré, D’après M. Stuart au contraire il existe une membrane distincte qui les sépare du corps vitré. Une des preuves de ce fait, c’est que cette membrane hyaloïde se colore en rouge par le picro-carmin et le corps vitré en jaune. Si l’on concentre les rayons solaires sur la membrane hyaloïde, elle prend un aspect fluorescent comme si sa surface avait été humectée avec une solution de sulfale de quinine. Si l’on fait une déchirure dans la membrane hyaloïde, on constate que dans ce cas on ne peut observer un semblable phénomène à la surface du corps vitré, qui reste transparent el garde l'apparence du verre, On peut au reste isoler la membrane à l'orifice d'un tube à essai, et la soumettre à l'examen microscopique. Il ne semble donc pas douteux que dans l'œil parfaite- ment frais et qui n’a subi aucune altération, il n'existe derrière la paroi postérieure de la capsule cristalloide une couche de structure membraneuse qui offre toutes les propriétés d’une membrane distincte très analogue à la membrane hyaloïde, mais qui diffère à plusieurs égards de la substance vitrée. M. Sluart étudie ensuite les connexions qui existent entre la cristalloïde et le ligament supérieur du cristallin. L'opinion générale c'est qu'il y a continuité de substance entre la zonule et la capsule. M. Stuart rapporte une observation qui montre que la zonule est seulement unie par un ciment à la capsule, — M. Stuart expose ensuite un procédé simple pour faire voir que la forme du thorax est par- tiellement déterminée par la pesanteur, On prend un cercle fait d’une bande d'acier, tel qu'on lemploie pour les crinolines, d’un 1/2 pouce de large et de 6 pieds de long, et on le dispose de telle sorte qu'il soit placé dans un plan vertical; il affecte alors la forme d’une ellipse. On serre alors fortement le cercle entre l'index et le pouce et on fait graduel- lement tourner la face interne de la partie que l’on tient jusqu'à ce qu'elle regarde en avant. La partie antérieure du cerele sera naturellement plus basse, ce qui correspondra en quelque mesure à la forme des côtes. En même temps les deux diamètres se rap- procheront l’un de l’autre, Si on continue le mouve ment de rotation jusqu'à ce que la face qui regardait en avant regarde en haut et en avant, de telle sorte que le plan de la portion du cercle que l’on tient corres- ponde à celui dans lequel se trouve la partie inférieure de la région dorsale de la colonne vertébrale, lobliquité diminuera, le diamètre transversal l'emportera sur le diamètre antéro-postérieur, et la courbure ainsi que la direction de la surface des basses côtes seront exacte- ment reproduites. On peut alors voir la torsion du long axe de la côte et ce grand creux de la colonne verté- brale, qui à un caractère si marqué du thorax humain. Cette simple expérience semble suffire à expliquer les formes du thorax chez les quadrupèdes et chez l’homme et indique que la pesanteur a une plus large part qu'on ne le suppose d'ordinaire dans les conditions qui les déterminent. — M. G. Johnson fait une communica- lion sur la physiologie de l’asphyxie et l’action anesthé- sique de l'azote pur, La cause immédiate de la mort par asphyxie, pour lui, est larrèt de la circulation pulmonaire, Voici les faits qui le prouvent : 1° Quand on ouvre la poitrine d’un animal asphyxié par liga- ture de la trachée, immédiatement après la mort, on trouve le cœur droit très distendu tandis que le cœur gauche est relativement vide, 2° Quand on met à nu le cœur d'un animal pendant l’asphyxie, on voit le cœur droit se distendre peu à peu, tandis que le cœur gauche, d'abord gorgé de sang, s’affaisse et se vide presque. 3° Dans la dernière période de l’asphyxie, il y à un continuel accroissement de pression dans l'artère pulmonaire. tandis que la pression tombe dans le système artériel. L'auteur a fait aussi quelques expériences sur l’action anesthésique de l’azote pur et de l’azote mêlé à une faible proportion d'oxygène, Il a constaté que l’inhalation de ces gaz détermine l’anesthésie complète et des phénomènes généraux précisément semblables à ceax qui accompagnent l'inhalation de protoxyde d’azote. Séance du 12 février 1891. 1° SCIENCES PHYSIQUES. —. MM. Alder Wright et C. Thompson communiquent le résultat de leurs re- cherches sur certains alliages ternaires. C’est leur troi- sième communication ; elle porte sur les alliages de bismuth, zinc et étain et sur ceux de bismuth, zinc et argent. On remarque que lorsque l’on compare les effets relatifs à la solubilité du zinc dans le bismuth et du bismuth dans le zinc par la présence simultanée de l’étain ou de l'argent, on arrive au même résultat général que dans le cas des alliages de plomb, d’ar- gent et de zinc, de plomb, d’étain et de zinc, c’est- à-dire que l’on constate que dans l’un et l’autre cas la solubilité est plus augmentée par la présence d’une proportion donnée d’élain que par celle de la même proportion d'argent, — MM. Alder Wright, C. Thomp- son et J. G. Léon présentent une note sur une mé- thode pour représenter graphiquement la manière dont certains mélanges de trois métaux fondus ensemble se séparent d'eux-mêmes en deux alliages ternaires. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. W. D. Williamson fait une communicalionsur l’organisation des plantes fossiles des couches carbonifères (coul measures). IL avait anté- rieurement appelé Paltention sur l'existence dans les plus anciennes roches carbonifères d’une forme remar- quable de fruclification qui semblait appartenir à la famille des Calamites, Cette fructificalion à été 1den- tifiée avec celle du genre Bowmanites par le professeur Weiss. et le professeur Williamson a accepté cette iden- tification, La découverte d'un certain nombre de nou- veaux spécimens a jeté beaucoup de lumière sur la nature de la plante et a conduit le professeur William- son à refaire son histoire, Il donne aussi une descrip- tion d’une plante désignée par le nom de Rachiopteris ramosa et qui appartient à l’une de ces espèces à typede fougères, qu'on a provisoirement rangées dans le uroupe des Rachioptérides. — M. Schafer traite de la structure du pratoplasma amiboïde, compare la con- traction des cellules amiboïdes et dutissu musculaire ; il expose une hypothèse sur le mécanisme des mouve- ments ciliaires. Les observations montrent que le pro- laplasma est composé de deux parties morphologique- ment distinctes, dont l’une présente une disposition réliculée et possède une affinité pour l’'hæmatoxyline landis que l’autre ne laisse apercevoir aucune difré- rencialion et se comporte d’une facon différente à l’é- gard desréactifs chimiques. Si l’on compare la structure du protaplasma à celle du muscle strié, on trouve de nombreux points de ressemblance, La substance per- forée des muscles ressemble d’une facon frappante à la substance réticulée ou lacuneuse (sponge-like) qu'on peut regarder comme composant les cellules ami- boïdes, telles que les globules blancs du sang, et la substance claire qui dans le muscle non contracté oc- cupe les intervalles entre le « sarcous element » et la membrane (ransverse semble posséder des fonctions analogues à celles du « zooïde » hyalo-plasmique de Bruecke. La structure et le mode d'activité de la cel- 126 ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES lule amiboïde et du muscle semblent donc les ranger dans la même catégorie, — M. Frenton Evans pré- sente une note sur la mise en évidence par la coloration du « fungus » pathogène de la malaria, sur sa culture artificielle et les résultats obtenus par son inoculation. Il croit avoir élabli en se servant de certaines méthodes de coloration, l'existence d'organismes dans le sang et dansles tissus dans la malaria, Il a réussi à isoler ces or- ganismes et à les cultiver artificiellement; l’inoculation des cultures sur divers milieux nutritifs à des cabayes, à des singes et à des lapins ont déterminé une maladie qui aété mortelle en plusieurs cas. Il conclut que le « fungus » de la malaria peut être cultivé hors du corps et qu'il possède des propriétés pathogènes. Richard À, GRÉGoRY. SOCIÉTÉ ROYALE D'EDIMBOURG Séance du 16 février 1891. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — Le professeur Tait lit un mémoire de M. Robert Brodie sur la valeur de la méthode de démonstration par superposition. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — Le professeur Taït lit une note sur le viriel. Dans une communication précédente il avait déduit de l'expression du viriel une équation générale reliant la pression, le volume et la tempéra- ture d’un corps et il avait donné les valeurs numéri- ques des constantes de cette équation, de facon qu elle représentait assez grossièrement les lignes isothermi- ques de l'acide carbonique. Dans la note actuelle, il donne d’autres valeurs des constantes avec lesquelles l'équation représente avec une grande exaclitude les isothermes au voisinage du point critique. — Le D' Haycraft décrit une méthode pour déterminer la den- sité d'un liquide dont on ne possède qu'une fable quantité. Une goutte du liquide est placée dans un autre plus dense, on ajoute un liquide de densité moindre jusqu'à ce que la goutte reste suspendue dans le mélange. — Le professeur Cargill G. Knott communique un mémoire sur l’action mutuelle des aimantations longitudinales et circulaires des fils de fer et d'acier, Dans un mémoire précédent sur ce sujet, le professeur Knott a décrit les effets que l'on peut ob- server quand un courant constant est lancé dans un fil qui est soumis à une variation formant un cycle dans son aimantation longitudinale. Il à depuis trouvé que plusieurs des résultats étaient dus à une augmentation néyligée de la torsion qui avait été donnée au fil avant son aimantation, Une torsion, qui ne dépasse pas quel- ques minutes d'arc par centimètre de longueur cause une modification profonde dans la grandeur, de la po- larité qui est développée dans le fil par le processus de l’aimantation, quand on maintient un courant constant, L'effet du courant est de diminuer l’hystéresis, — Le Dr Berry Hayeraft discute les critiques adressées par Salkowski et Jolin à son procédé pour doser l'acide urique. Il cite les avis favorables de Hermann Czapek et Camerer et conteste que les résultats contraires puissent ètre considérés comme cerlüns. — Le D” Hugh. Marshall décrit un procédé de préparation, et montre un spécimen de persulfate de potassium. La découverte inattendue de la stabilité d’un sel dacide persulfurique èst d’une grande importance théorique. — Le D' John Murray communique un memoire sur la température du golfe de Clyde; entre autres points il décrit l'action d’une brise en été sur l'accumulation de chaleur à la surface de l’eau au voisinage de la rive et l'action d’une brise de mer qui éloignant les surfa- ces chaudes de la côte cause le refroidissement de l’eau. Cette action est renversée en hiver. Dans un cas on a observé une variation de température de plusieurs degrés, à deux jours de distance d’un changement dans la direction du vent. Séance du 26 février 1S91. Le professeur Rutherford sur la demande du conseil de la Société fait une conférence sur le sens de louie. W. P£ppte, Docteur de l'Université d'Edimbourg. SOCIÉTÉ PHILOSOPHIQUE DE MANCHESTER Séance du 10 février 1891. M. P. F. Kendall a trouvé dans l’ile de Man des blocs composés d'une espèce particulière de horn- blende bleue qui ne se trouve nulle part ailleurs, que sur le rocher d’Ailsa Craig sur la côte d’Ecosse, Il conclut que ces blocs ont été apportés en Man par un glacier venant du bassin du Clyde pendant Pépoque glaciale. Cette conclusion appuie les théories de MM. J. Horne et M. James Geikie sur la direction géné- rale des glaciers dans le bassin de la mer irlandaise, Philippe Harroc.* SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES (SECTION DE MANCHESTER) Séance du 6 février 1894 M. C. O. Weber. — Sur les ciments magnésiens. L’au- teur à cherché à améliorer le ciment de Sorel qui est formé par un mélange de magnésie très dense avec une dissolution de chlorure de magnésium à 80 0/,. En variant les proportions des constituants, il a trouvé que les meilleurs résultats s’obtiennent en prenant des quantités égales de chlorure et d'oxyde, avec un minimum d'eau, On ne peut pas se servir de ce ciment à l'extérieur des bâtiments, ete., car il est attaqué par l'eau. Le chlorure de magnésium n’y peul pas ètre remplacé par d’autres chlorures de métaux alcalins ou alcalino-terreux, Le ciment magnésien le plus dur qu'il ait pu obtenir se compose ainsi Magnésie, 100 parties ; chlorure de magnésium, 9 parties (en forme d'une dissolution à 80 ‘/,); silice anhydre, 15 parties. Le ciment ne se rompt qu'avec une tension de 1,788 livres anglaises par pouce carré, L'auteur s’en est servi avec succès pour construire des bases pour les machines à vapeur. Il ne peut guère servir dans la construction des réservoirs à acide, car les aci- des étendus l’attaquent, quoique les acides concentrés soient sans action sur lui. Philippe Harroc. SOCIETE DE PHYSIQUE DE BERLIN Séance du 20 février 1891 M. Feustner présente un nouveau galvanomètre construit dans les ateliers de l’Institut impérial-de Phy- sique technique. Le but qu'on poursuivait était d’avoir un instrument qui joignilt à une construction aussi simple que possible une sensibilité égale à celle des instruments anglais, Ce but parait être atteint en choï- sissant un système magnélique aussi léger que pos- sible, La meilleure forme des aimants est celle de petites plaques ou de petits gobelets comme ceux des anémomètres, qui sont aimantés en sens opposé, de sorte que le tout constitue un système astatique. M. Kundt remarque, à ce propos, que les galvano- mètres astatiques de Siemens et Halske égalent el surpassent mème quelquefois en sensibilité les instru- ments anglais, si lon remplace les aimants un peu trop lourds par des aimants plus légers. — M. Rubens a construit un électrodynamomètre, d'après le prin- cipe du galvanomètre de Rosenthal, La partie essen- üelle est un S en fils de fer suspendu par un fil de cocon dont les deux bouts se trouvent vis-à vis de deux pélites bobines qui lattirent dès qu'un courant les parcourt. L'instrument est très sensible; les courants d'un téléphone dans lequel on parle donnent d'assez grandes déviations, Le dynamomètre, cependant, ne peut être employé que pour des courants faibles; dès que les courants sont plus forts, le magnétisme réma- nent des fils en fer rend illusoires les observations, — M. Kundt décrit quelques expériences qu'il a fait faire pour examiner la formule connue pour le flux entre ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 127 deux sphères dont le rayon est égal à p et dont la dis- lance est grande par rapport à leur rayon. Si le mi- lieu est supposé indéfini, la résistance totale R du milieu a pour expression : 1 7 2xcp! Si creprésente le coefficient de conductibilité (voir Mas- cart et Joubert : Leçons, etc., I, 238). Dans un vase de 1",5 de longueur, plongeaient deux sphères en cuivre dont le rayon élait de 4%®, Pour une solution de sel commun on trouvait, si la distance des deux sphères variait entre 80 et 10 cm., la résistance sensiblement constante. Les valeurs limites sont : POUF 80e... Pour 10\en,: 89.8 R = 88.3 D: Hans Jan. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE | Séance du 5 février 1891. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Albert Obermayer. … Explication de certains phénomènes d'attraction en rela- tion avec les décharges électriques. L'auteur a effectué des recherches qui mettent hors de doute que l'adhésion de plusieurs feuilles de papier contre un plateau mé- tallique, adhésion produite par le passage d’étincelles électriques, est due à l'électrisation du papier, les deux faces de la feuille de papier se chargeant alternative- ment d'électricité positive et d'électricité négative. 2° SCIENCES NATUKELLES. — M. J. Kusta. Sur les ani- maux fossiles invertébrés des terrains carbonifères de Bohème. —M. Holl. Sur le développement et les changements de position des articulations chez l'homme. L'auteur étudie la formation des articulations, il examine le processus de cette formalion chez l'embryon et chez l’adulte: il passe en revue les articulations du bras, de la main, de la jambe et du pied. La forme des os est bien con- forme à la nécessité pour l’homme de marcher droit: elle se distingre nettement de la forme correspondante chez les animaux; chez l'embryon déjà apparaissent les mêmes caractères, mais les articulations ne sont pas encore dans leur position définitive, le développement est accompagné d’un changement de position. Emile WEyr, Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE SAINT-PETERSBOURG Séance du 16 décembre 1890 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Imchenetsky, membre de l’Académie, présente une note intitulée : L'intégration des équations linéaires, homogènes, par les révolutions partielles des autres équations de même “espèce, de même ordre ou d'un ordre inférieur. Cette note à pour but de démontrer qu'il peut y avoir autant d'équations adjointes analogues à celles qu'avait décou vert Lagrange, qu'il y a d'unités dans l’exposant de l’ordre de l'équation y compris équation de Lagrange. On y trouve la conclusion suivante : on peut toujours déduire de l'intégrale de l’une des équations adjointes, l'intégrale générale d’une équation donnée, 29 SCIENGES PHYSIQUES. — M. Th. Beiïlstein, membre de l'Académie, présente un travail fait en collaboration avec M. R. Luther sur la séparation de l'oxyde de fer et de l’alumine, d'après une nouvelle méthode. Cette mé- thode est basée sur la différence de solubilité dans l'eau, des nitrates basiques obtenus par l’évaporation dans un bain-marie. d’une solulion d’alumine et d'oxyde de fer dans l'acide nitrique. Le mémoire i-ertenso sera prochainement publié dans les Mélanges physiques el chimiques tirés du Bulletin de l Académie. — M.N. Be- ketof, membre de l’Académie, entretient la savante compagnie de ses expériences sur la combustion des mélanges, secs et humides, d'oxyde de carbone el d'oxygène, Les expériences sont destinées à expliquer le phénomène découvert par Dickson d’après lequel la présence de la vapeur d’eau est une condition indis- pensable pour la propagation de la combustion, en vertu du principe que la décomposition est d'autant plus facile qu'est plus grande la différence du poids atomique entre les parties composant le mélange. — M. Chenrok : Recherches sur la crue et les hautes eaux à Pétersbourg pendant la période de 18T8 à 1890. En rele- vant l’état de l'atmosphère dans les journées d’inonda- ions et de hautes eaux, l’auteur arrive à la conclusion que les inondations ont lieu par suite des vents de l’ouest produits par les cyclones passant au nord de Saint-Pétersbourg et que par conséquent elles peuvent ètre prévues d'avance, — M. Godmann. Sur la marche journalière de la température et de l'humidité dans la ville de Pavlousk pendant les journées claires et les journées bru- meuses . 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Khronchtchef lit une communication préliminaire sur les roches recueillies par M. Lopatin sur les bords dela rivière Toungous-Ka pierreuse (Podhamennaïa Toungousko.) Les roches de plagroclase, de structure diverse mais toujours très anciennes, pré- sentent une grande analogie avec les basaltes typiques. L'auteur les décrit sous l’ancien nom Trapp. L'étude micrographique de ces roches faite avec grand soin pré- sente une grande importance si l'on se rappelle qu’elles s'étendent sur une grande partie de la Sibérie et de la Russie du Nord. Séance du 30 décembre 1890. 1° Sciences PHYs1QuEs. — M. Wild, membre de l’Acadé- mie, lit un rapport sur deux notes. L'une de ces notes, due à M. Bergstresser, est intitulée: La comparaison du climat de Pavlosk, de Saint Pétersbourg et de Kronstadt,. L'auteur y a prouvé d’après les observations pendant une période décennale (1878-1887) que mème malgré une distance aussi faible qui existe entre Kronstadt et les deux autres villes, le climat est plus continental dans ces dernières. En outre, pendant l’hiver, quand Kronstadt est bloqué par les glaces, son climat se rap- proche davantage du climat continental. La deuxième note de M. Leist est relative à l'influence de la tempéra- ture de la colonne de mercure dans les (hermomètres à maxima et dans les psychromètres-thermomètres humides. Dans ces deux instruments la température de ja colonne de mercure n’est pas la même au moment de sa séparation de la boule du thermomètre et au moment où se fait la lecture; les différences dépassent lerreur admise dans les observations méléorologiques (09,1). M. Leist a calculé la correction pour la plupart des cas et l’a déterminée empiriquement. 2e SCIENCES NATURELLES. —M. Khronchtchef : sur une nouvelle roche leucitique trouvée en dehors de l'Europe (en Sibérie, sur le fleuve Podkamennaya Tounyonyka, par M. Loposin). On peut rapporter cette roche aux phono- loïthes. C'est la première fois que l’on signale la leu- cite de l’autre côté de l’Oural.— M. Schrenk, membre de l’Académie, présente à l’Académie le manuscrit prèt à l'impression, du second volume de son travail sur les indigènes de la région du fleuve Amour. Le pre- mier volume decet ouvrage, publié il y quelques années, contient comme on le sait, des renseignements géogra- phiques, historiques et anthropologiques d'un intérèt considérable. Le deuxième est consacré entièrement à l’ethnographie. Il comprend la description des mœurs et du genre de vie des indigènes : leurs habitations, leur vétement, leur nourriture, leurs occupations (chasse, pêche); enfin les rapports des indigènes, tant entre eux, qu'avec les Russes et les Chinois. Ce volume est accompagné de 37 planches et de quelques figures dans le texte. Dansune séance ultérieure dont bientôtnousrendrons compte, M. le Président annonce à l'Académie la mort de M. K. Maximoviez survenue le 16 février. Cette mort 128 NOTICE NÉCROLOGIQUE prive l'Académie d’un de ses membres les plus émi- nents. C’est cet infatigable savant qui à fait connaître la flore de l'Asie orientale en explorant lui-même cette partie du monde, et en étudiant aussi les collec- tions des autres voyageurs. Parmi ses travaux il faut surtout citer : Primitiæ floræ amuwrencis, Diagnoses breves plantarum novarum Japoniæ et Mandehuriæ, Diagnoses, plantarun asiaticarum bien connues des botanistes. I s’occupait des collections du célèbre Przevalski, quand O, BAGkLUND, la mort est venue le surprendre. | Membre de l'Académie. NOTICE NÉCROLOGIQUE SOPHIE KOWALEVSKY M. Hugo Gylden, Correspondant de l'Académie des Sciences de Paris, a récemment annoncé à la savante compagnie la mort de Mme Sophie Kowalevsky. Gette nouvelle a douloureusement ému le monde savant. Mme Kowalevsky avait cultivé les mathématiques avec éclat; notre Académie des Sciences avait tenu à lui donner il y a quelque années une marque particulière de haule estime en linvitant à assister à l’une de ses séances, où d'ordinaire les femmes n'ont poinl accès. Le journal anglais Nature (17 février 91) vient de pu- blier sur la défunte la notice suivante, qu'ilnous à paru intéressant de faire connaître à nos lecteurs : « Les journaux suédois nous apportent la triste nou- velle de la mort de Mme Sophie Kowalevsky, profes- seur de mathématiques à l'Université de Stockholm. Mme Kowalevsky se trouvait, au moment des fêtes de Noël, dans le Midi de la France; elle revint à Stock- holm le 4 février, et commenca son cours le 6. Le soir de ce même jour, elle tomba malade, et mourut le 10 février, d’une attaque de pleurésie. Elle était née en 1853, à Moscou, et avait passé son enfance dans une petite ville de la Russie-Occidentale, où se trouvait alors son père,le général d'artillerie Corvin-Krukowski; plus tard, elle habita les terres de son père, dans la mème partie de la Russie. La première instruction lui fut donnée par son père ; mais il semble que c’est son oncle maternel, Schubert, jngénieur de renom, qui développa en elle le goût de la science. Elle perdit de bonne heure son père el sa mère, et, éprouvant une ardente sympathie pour le mouvement qui se produi- sait alors parmi la Jeunesse russe, elle parvint à obte- nir la permission d'étudier à Saint-Pétersbourx.L'année suivante, — c'était en 1869, et elle n'avait alors que seize ans, — elle fut admise comme étudiante à l'Univer- sité d'Heidelberg, et commenca l'étude des hautes ma- thématiques. Cest à celte époque, bien qu'extrème- ment jeune, qu’elle épousa Kowalevsky, le professeur bien connu de paléontologie à Moscou. De 1871 à 1874, elle revint de nouveau en Allemagne, à Berlin cette fois, où elle étudia les mathématiques sous la direction de Weierstrass; et à l’âge de vingt et un ans, elle recul le grade de docteur en philosophie, à Gottingen. Elle perdit son mari en 1883; l’année suivante, au mois de juin, on lui offrit la chaire d'Analyse mathématique à l'Université de Stockholm, à la condition qu'elle ferait le cours en allemand la première année, en suédois les années suivantes. C’est ce qu’elle fit, et avec beau- coup de succès; beaucoup de ses élèves suédois sont actuellement devenus professeurs eux-mêmes, Ses principaux travaux mathématiques sont: Sur la théorie des équations aux différentielles partielles (Journal für Mathematik, 1874); Sur la réduction d’une classe d'in- tégrales abéliennes du troisième degré en intégrales elliptiques (Acta Mathematica, 1884) [Ces deux mémoires sont reliés aux recherches de Weierstrass|; Sur la transmission de la lumière dans un milieu cristallin (paru d’abord dans le recueil suédois Forhandlingar, et ensuite dans les Comptes rendus, 1881). Ce mémoire n'est qu'un fragment d'un travail plus étendu, dans lequel Mme Kowalevsky donne le moyen d'intégrer certaines équations différentielles qui jouent un rôle important en optique. Enfin : Sur un cas particulier du problème de la rotation d’un corps pesant autour d’un point fixe (Mémoires des Savants étrangers. Académie des Sciences le Paris, 4888). Ce dernier mémoire reçut de l’Académie des Sciences le prix Bordin dont la valeur fut doublée, en raison du « service tout à fait extraor-. dinaire » rendu à la physique mathématique par l’'œu- vre de Sophie Kowalevsky. Elle fut aussi nommée membre correspondant de l'Académie des Sciences de. Saint-Pétersbourg. «Outre sestravaux mathématiques, Sophie Kowaleysky avait commencé récemment à produire des œuvres littéraires, L’autobiographie de sa première enfance (Souvenirs d'enfance) publiée l’année dernière dans une revue russe, est une des plus belles reproductions de la littérature russe moderne, En 1887, elle publia dans la revue suédoise Norna l'introduction à une nouvelle Væ Viclis ; et dans les derniers numéros du Mor- disk Tidstkrift elle donna, sous le pseudonyme de Tanya Kerevski, un fragment d’une nouvelle plus longue, « la Famille des Vorontsoffs » dont elle laisse le manuscrit entièrement prêt pour l'impression. Dans sa dernière lettre à l'auteur de ces lignes, en décembre 1890, elle parle de faire une version anglaise de cette nouvelle, qui, quoique écrite en russe ne pouvait pas être publiée dans sa patrie. «Il n’est pas besoin de dire qu'une femme aussi bril- lamment douée que Sophie Kowalevsky était de la plus grande modestie. Elle prit un grand intérêt à la vie intellectuelle suédoise, et se fit beaucoup d’amis, tant à Stockholm que dans ce pays qu'elle visita l’année dernière, Elle laisse une fille âgée de onze ans. Les journaux suédois parlent avec beaucoup de sympathie et de regret de lewr professeur « Sonya » (diminutif de Sophie) Kowalevsky. « Dans ses « Souvenirs d'enfance », Mme Kowalevsky raconte une anecdote digne d’être citée. Elle avaitalors dix ans et demeurait dans la maison de campagne de son père, La maison eut besoin d’être réparée, et l’on fit venir de Saint-Pétersbourg des papiers de tenture. Mais il se trouva qu'il n’y en eut pas pour la chambre des enfants. dont les murs furent recouverts avec le cours lithographié d’Ostrogradski sur analyse mathé- matique, cours qui provenait des années d'étude de son père; et la petite Sophie, qui dévorait toutes les feuilles imprimées qui lui tombaient sous la main, au grand désespoir de sa gouvernante anglaise, passait son temps à lire ces dissertations mathématiques, mèlées d'incompréhensibles hiéroglyphes. « Il est assez étrange, dit-elle dans ses mémoires, que, lors- L qu'à seize ans je commencai l'étude du calcul diffé- rentiel, mon professeur fut étonné de la rapidité avec laquelle je le compris, comme si j'avais une réminis- cence d’avoir déjà connu ce qu'il me disait. La conti- nuelle lecture des papiers collés sur les murs avait certainement laissé des traces inconseientes dans mon esprit d'enfant. » Le Directeur- Gérant : Louis OLivier A Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. D | “ 2° ANNÉE N° D) 15 MARS 1891 DES SCIENCES. PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER > LA NATURE DES SÉCRÉTIONS MICROBIENNES L'élude des sécrétions microbiennes comporte divers points de vue, le point de vue physiolo- gique, par exemple, ou encore le point de vue chi- mique. Malheureusement, quel que soit le côté par lequel on considère la question, on saisit bien vile les lacunes el le manque de précision de nos connaissances relatives à ce sujet. Et cependant depuis quelques années, les notions vont s’accu- mulant, en particulier touchant le groupe de ces sécrélions qui jouent un rôle dans les phénomènes pathologiques. Aussi n'est-il pas inutile de donner quelque aperçu sur ces produits nés des infiniment petits. Il Dans la genèse des accidents morbides, les pig- ments offrent jusqu'à ce jour une imporlance mé- diocre. Cependant, dans certains flux diarrhéiques, dans des expectorations spéciales, dans des exsu- dations plus ou moins anormales, dans la méla- némie, la coloration parait attribuable à des mi- crobes où plutôt à leurs matières solubles. La teinte du pus bleu nous en offre un exemple. On peut, comme chacun le sait, retirer de ce pus bleu un corps aujourd'hui nettement défini, la pyocva- nine, Corps qui se dissout en bleu dans le chlo- roforme, en rose dans l’eau acidulée, en vert dans quelques bases, elc., corps qui, d’après Leder- rhose, posséderail laformule suivante : C#H!*Az20, Cette substance s'éloigne un peudes ptomaïnes par le chiffre élevé de son carbone relativement à l'hydrogène ; elle doit être considérée, toujours d'après Lederrhose, comme appartenant au groupe anthracique des éléments aromatiques. — Cette pyocyanine relativement peu toxique, du moins REVUE GÉNÉRALE, 1891. aux doses que l’on a injectées, sert en outre à dépister el à reconnaitre avec certitude l'existence du bacille qui lui donne naissance, bacille dont le rôle, en expérimentalion, a pris une grande extension. Les agents des putréfactions fabriquent surtout des bases. On doit à Brieger la connaissance de la neuridine, de la putreseine, de la gadinine, toutes trois extraites des viandes pourries; on lui doit également la connaissance de la cadavérine, de la saprine, retirées des cadavres. À côté de ces prin- cipes d’une toxicité nulle ou médiocre, il convient d'en placer de plus dangereux, dont la découverte appartient au mème Brieger; telles sont la cho- line, la neurine, la muscarine. Nencki nous arévélé, la collidine; Gautier et Etard, l’'hydrocollidine; Mosso, Guareschi, la parvoline, etc. — Nous citons et nous omettons pour arriver plus vile aux sécré- tions que nous avons principalement à considérer, [I Déjà Bergman, Schmiedberg, en 1868, avaient mis en évidence l’existence, dans le pus, d’une matière azolée; déjà Zuelzer, Sonnenschein, au sein des tissus putréfiés, ont dépisté un corps my- driatique. Plus près de nous Pouchet, Villiers, ont isolé, des déjections des cholériques, des alcaloïdes toxiques. Toutefois, c'est encore et surtout Brieger, qui a pu aboutir, en étudiant les cultures des différents microbes, à quelques résullats posilifs. — Dans les milieux, où avait véeu le bacille d'Eberth, il a trouvé la {vphotoxine, base à chlorhydrate déliques- cent, provoquant chez le cobaye l'entérite, l’accé- 5] 130 D' A. CHARRIN. — LA NATURE DES SÉCRÉTIONS MICROBIENNES lération respiratoire, enfin la mort par arrêt du cœur en systole. — Il a également retiré des bouillons du bacille-virgule plusieurs bases; on peut citer, parmi elles, la gadinine, la putrescine, la cadavérine, toutes trois connues antérieurement, et dont les deux dernières provoquent l’inflamma- tion, la nécrose de l'intestin, la suppuration, par- ticulièrement la cadavérine, d'après Grawitz, Behring; une quatrième base jusque-là ignorée paraît être hypothermisante, à l’inverse de la my- daléine ou de la diastase de Roussy. — A signaler encore, à propos du choléra, les travaux de Lesage et Winter (Acad. Méd., 1889), et ceux de Scholl (Klin. int. Rundsch. 1890). Pour le tétanos, Brieger opérant sur des cultures malheureusement impures du microbe de Rosen- bach, a découvert quatre toxines : la tétanine, la tétanotoxine, la spasmotoxine, en outre un principe innommé. Ces corps offrent un intérêt d'autant plus grand qu'ils agissent d'une façon in- tense sur l’appareil nervo-museulaire, en provo- quant des convulsions, et parfois des paralysies. Leur injection est suivie de phénomènes qui rap- pellent les accidents qui se développent à la suite de l’inoculation du bacille tétanique. — Kitasalo et Weyl, Knud Faber, Tizzoni et Catlani, plus ré- cemment Vaillard et Vincent {Soc. Biol. 1890) ont repris l'étude chimique des cultures du tétanos. La conclusion dernière est que la toxine se rap- proche singulièrement des diastases. Traversa et Manfredi ont retiré du bouillon du streptocoque de l’érysipèle des éléments convul- sivan(s et paralytiques. Convenons que ce genre d'accidents est cependant chose rare au cours de cetle infeclion. Il existe à côté des corps alcaloïdiques, si en hon- neur depuis Selmi, Gautier, Battistini, Nencki, ete, et dont en ce moment la faveur pâlit pour faire place à celle des toxalbumoses, il existe d’autres principes d'origine microbienne doués d'action sur l’organisme. Christmas (Ann. Inst. Pasteur, a constaté que la culture pure du staphylococcus aureus contient une substance albumineuse précipitable par l'alcool et pouvant provoquer la suppuration, lorsqu'on l’in- troduit dans la chambre antérieure de l'œil du lapin. De cette même culture, Leber a obtenu un alcaloïde pyogène. Arloing a signalé une diastase phlogogène attribuable à l'agent de la péripneu- monie et une diaslase pyrétogène fabriquée par le bacillus heminecrobiophilus. Hoffa avait isolé une ptomaïne du bouillon de la bactéridie. — Hankin (Brit. Med. J. A2 oct. 1889), dans une série de recherches faites au laboratoire de Koch, a reconnu la nature albumineuse d'une substance toxique extraite des milieux où avail 4 $ $ vécu la mème bactéridie charbonneuse. Il a obtenu cette substance en précipitant le bouillon à l'aide de l'alcool ou du sulfate d'ammoniaque. Le pré= cipité élail ensuite dialysé pour le purifier du sel employé, desséché dans le vide, dissous dans l’eau, enfin filtré sur porcelaine; la quantité dissoute était estimée approximativement à la fa- veur de la réaction du biuret et d’une solution de peptone titrée. Le corps obtenu est très toxique vis-à-vis des cobayes et des souris ; à doses faibles il est capable de vacciner ces mêmes animaux ainsi que les lapins. Dans une expérience quatre lapins reçurent en injection sous-cutanée des spores de charbon vi- rulent ; l'un d’eux servit de témoin et mourut au bout de quarante heures. Deux animaux reçurent dans le sang, au moment de l'inoculation, un cinq- millionième de leur poids du principe albuminoïde, et le quatrième un dix-millionième; l’un d'eux suc- comba après trois jours, les autres résistèrent. Malheureusement les faits négatifs sont, paraïit-il, assez nombreux. Roux et Yersin (Ann. Inst. Pasteur, t. III, 1889) ontrencontré dans les cultures du bacille de Lôf- fler un poison ayant « beaucoup d’analogie avec les diastases ; sonactivité est tout à fait comparable à celle de ces substances ou encore à celle des ve- nins ». Comme les diastases en effet, ce poison est coagulable par l'alcool, il est entraîné par des précipilés tels que celui du phosphate de chaux par exemple, produits dans le liquide qui le con- lient; la chaleur à 58°, le séjour à l'air, à la lumière, le détériorent. Des mêmes cultures de ce mème microbe diph- téritique Brieger et Fränkel (Berlin. Klin. Woch. 1890,91 et 92) ont isolé une matière qui serait une matière albuminoïde à rapprocher de l’albumine du sérum. Cet isolement s’oblient en faisant arriver goutte par goutte dans de l’alcool la culture du bacille de Klebs, culture au préalable filtrée sur porcelaine ; une dose minime d’acide acétique favo- rise le coagulum que l’on sépare après un séjour de douze heures dans la glace. Ce coagulum est ensuite redissous dans l’eau, puis reprécipité par l'alcool. En recommencant sept à huit fois l’opéra- ion et en terminant par l'emploi de la dialyse, on obtient par dessiccation dans le vide à 40° une poudre blanche, amorphe, granuleuse, de faible densité. Sa solution se précipite par l’acide carbonique à saturation, par les acides minéraux concentrés, par le phénol, le nitrate d'argent, le sulfate de cuivre; la réaction du biuret, de Millon, la réac- tion xanthoprotéique, la polarisation, montrent qu'il s'agit d'un dérivé de l'albumine. Ce corps conserve longlemps ses propriélés de Loxicité, D' A. CHARRIN. — LA NATURE DES SÉCRÉTIONS MICROBIENNES 131 “même après l'action de la chaleur à sec, à 70°. Sa i ne ; à è “composition moléculaire est la suivante : C— 45,35 = 18 Az — 16,33 S 1,39 O — 29,80 Cette toxalbuminose diminue dans les vieilles cultures au sein desquelles on rencontre un autre principe précipitable par l'alcool fort, de couleur brune, mais inoffensif, Duclaux (Ann. Jnst. Pas- teur, juin 1890) a formulé des réserves sur la pureté du produit. Ce fait, qu'il est nécessaire d’'injecter, pour tuer un cobaye, 10 milligrammes de la toxine, tandis que 2/10 de milligramme de la substance isolée par Roux et Yersin suflisent à amener la mort, ce fait donne à penser qu'il y a mélange de plusieurs éléments. Car, lorsqu'on veut un terme de comparaison pour un poison tel que celui de la diphtérie, qui peut agir spéciliquement et rapidement sous une dose des plus minimes, ilest naturel de chercher d’abord parmi les diastases où on trouve des exemples de spécificité et de cette disproportion entre la cause et l'effet, avant d’a- border le groupe des matières albuminoïdes, dont la teneur est capable de varier d'une façon notable, sans trop faire souffrir l'organisme. Brieger et Fränkel n'ont pas limité leurs re- cherches au bacille de la diphtérie : ils les ont étendues à des sécrélions analogues provenant d'autres microbes et ont établi deux grandes divi- sions parmi les toxalbuminoses : celles qui sont in- solubles ou peu solubles dans l’eau, celles qui sont solubles dans ce liquide. Les bacilles de la fièvre typhoïde, du choléra el le staphylococcus aureus fabriquent des toxalbul- minoses du premier groupe. Ces toxalbuminoses ressemblent aux globulines, dont elles diffèrent cependant par leur peu de solubilité en présence dn chlorure de sodium. Elles se présentent sous l'aspect de masses amorphes, se précipitent par les sels neutres à la température de 20° et produisent des accidents locaux ou généraux chez le cobaye et le lapin. Les toxalbuminoses du charbon bactéridien, de la diphtérie, du tétanos, constituent la catégo- rie des produits solubles dans l’eau. II Ces principes sont avant tout morbifiques, la plupart, à l'inverse du corps étudié par Hankin, ne sont nullement vaccinants ; tel était Le cas de la to- xine du bacille de Klebs. Dans ces derniers temps, la théorie chimique de l'immunité a réalisé de sensibles progrès, Après les travaux de Lewis, de Traube, etc., ceux de Grohmann, de Fodor, de Flügge, de Nuttal, de Nissen, de Behring, de Lu- barsch, de Zässlein, de Petruschky, de Charrin et Roger, etc., ont amené à penser que les défenses de l'organisme proviennent en partie de ce que nombre de nos humeurs, le sérum sanguin en par- ticulier, possèdent des propriétés bactéricides, qui varient suivant les espèces animales, suivant les germes, etc. Il faut remarquer que le terme de bactéricide ne doit pas être pris dans son sens grammatical, absolu; une humeur est réputée bac- téricide, si les agents que l’on y sème ne se déve- loppent ni en quantité, ni en qualité voulues; les formes, les sécrétions peuvent être plus ou moins modifiées, la pullulation entravée à des degrés di- vers, sans que pour cela les microbes soient né- cessairement tués. Quelle est la nature chimique de ce corps ou de cés corps microbicides du sérum du sang. On ne peut répondre d'une façon précise. On sait d'après Buchner (Arch. f. Hyg. 1 et II, 1890) que la propriété antiseptique disparait si, comme l’a vu Nuttal, on chauffe le liquide au delà de 60°, et c’est là une des raisons qui font que les tissus des animaux artificiellement vaccinés constituent des milieux de culture très fertiles, quand au préalable on les a stérilisés. Cette même propriété défavorable à la vie des microbes se supprime par la dilution ou la dialyse avec l’eau distillée, à moins qu'on n'ajoute du chlorure de sodium à 6 p. 1000; les congélations successives l’altè- rent également. On a lieu de penser qu'il s’agit là d’un principe albuminoïde éminemment fragile, délicat, comme le sont d’ailleurs d’autres toxal- bumens que le simple contact de l’eau peut éga- lement détruire ou modifier. Chose curieuse, des cultures chauffées à 100 et 120° confèrent l’immu- nité, alors qu'une des modifications, qui sont les conséquences de cette immunité, consiste dans la production d’une substance détruite à 60°. Cette substance nouvelle n’est donc pas une matière directement ajoutée. Behring, Fodor, ont invoqué la réaction des humeurs pour expliquer, dans quelques cas au moins, la résistance de l'animal, Le premier de ces .auleurs a supposé que certains rats devaient à l’alcalinité de leurs plasmas leur état réfractaire contre le charbon, opinion et fait d’ailleurs com- battus. Mais il s’agit là du reste d’un élat réfrac- taire naturel. Or, si à propos des sécrétions microbiennes, on peut formuler quelques considérations relatives à ces conditions chimiques de l'immunité, c’est que, du moins pour l’immunité acquise, ces conditions font suite au passage des microbes ou de leurs pro- duits au travers de l’organisme. Assurément, il n'est pas question de substances directement four- nies par les agents pathogènes et demeurant en 132 D' A. CHARRIN. — LA NATURE DES SÉCRÉTIONS MICROBIENNES permanence pour jouer le rôle d’antiseptique empêchant ; l'expérience a fait justice de cette manière de concevoir les choses. Il reste cependant établi que les élats microbicides, créés par la vac- cination, sont le résultat d’une nutrition cellulaire plus où moins changée, et changée sous l'influence des matières sécrétées par le germe. IV Une question se pose aujourd'hui. Les microbes fabriquent-ils un même corps à la fois morbifique et vaccinant, ou bien, comme le soutient M. Bou- chard, existe-t-il des éléments morbifiques et des éléments vaccinants ? Ces expressions de morbi- fiques et de vaccinants n’élant du reste usitées que pour simplifier le discours et sans idée préconçue. Au début, quand on a commencé à soupçonner le rôle des sécrétions bactériennes. la plupart des auteurs ont eu tendance à admettre que la même substance, à des doses diverses, provoquait tantôt limmunité, tantôt des phénomènes pathologiques. variés. M. Bouchard, le premier, a soutenu que ces matières à effets divers étaient bien distinctes. Ces notions dérivent des remarquables travaux de ce savant sur l'élimination, par les urines, des éléments fabriqués dans le corps des animaux par le bacille pyocyanique. Les recherches de Gama- leïa sur le vibrion de Metchnikoff, celles d'Arnaud et Charrin sur le microbe du pus bleu, plus ré- cemment celles de Carl Fränkel sur la diphtérie, de Vaillard, sur le tétanos ont montré que la cha- leur détruit la plus grande partie des principes nocifs, tout en laissant intacte au moins une portion des principes susceptibles d'augmenter la résistance aux virus. Depuis lors cette démonstra- tion s’est étendue et a gagné en précision; on est allé jusqu'à entrevoir la multiplicité des corps propres à créer l'immunité absolue ou relative. Cette première partie du problème une fois ré- solue. la distinction entre ce qui vaccine et ce qui tue une fois établie, on devait nécessairement arriver à se demander, en poursuivant l'analyse, si le produit morbifique était unique ounon, autre- ment ditsi la fièvre, l’albuminurie, les convulsions, les hémorrhagies, les entérites, ete., relevaient de l'action de la même sécrétion bactérienne, ou si au contraire le microbe, pour réaliser les prinei- paux symptômes d'une pyréxie, donnait naissance à des sécrétions diverses. Là encore, à l’origine, les esprits ont pensé plus volontiers que, dans chaque affection, l'agent pathogène correspondant fabriquait une substance spéciale, cause commune des accidents et des lésions. Les travaux de plusieurs expérimentateurs, ceux de Brieger en particulier, ont d’abord incri- miné les substances alcaloïdiques, variant avec tel ou tel germe, la typhotoxine pour le bacille d’'Eberth, la spasmotoxine pour celui de Nico“ laïer, ete. Dans ces derniers temps, nous l’avons indiqué, ces ptomaïnes semblent passer au secon plan, et laisser la place aux toxalbumines; J microbe de Klebs et Lüffler par exemple provo querait les phénomènes de la diphtérie, à l’aide d'une albumine toxique, d'après Fränkel ek Brieger, à l’aide d'une diastase d’après Roux et Yersin. Nous estimons que, dans celte question comme dans beaucoup d’autres, il convient de ne pas être exclusif; la vérité est pour une part dans l’une et dans l’autre opinion. Nos recherches, en collabora= lion avec MM. Arnaud, Gley et Guignard, permettent d'affirmer que le bacille pyocyanique engendre des produits susceptibles d’être différenciés et par la chimie et par l’expérimentation. Ces“ recherches confirment pleinement les doctrines émises à plusieurs reprises par M. Bouchard dans son enseignement. Ces produits microbiens peuvent se diviser au moins en trois grands groupes. Dans le premier entrent tous ceux qui sont précipitables par lal- cool, allérés par la chaleur et incapables de dialy- ser; dans le second ceux qui inversement sont solubles dans l'alcool et dialysent; le troisième comprend les parties volatiles. Injectées au lapin, les matières du premier groupe déterminent de la M diarrhée, de l’amaigrissement. de la fièvre, quel- quefois de l’albuminurie, des hémorrhagies; larapi- dité de leurs effets est proportionnelle à la quan- lité employée. — Les corps du second groupe agissent principalement sur le système nerveux ; ils font apparaître les convulsions, et, si l'animal ne succombe pas immédiatement, il peut se réta- blir d’une facon définitive, tandis qu’il devient de plus en plus malade dans le cas où, sans aller jus- qu'à la dose mortelle, on s’est servi des substances de la catégorie précédente. — Restent les éléments du troisième groupe, éléments que la distillation permet de séparer, el qui, entre autres principes, contiennent des produits ammoniacaux ; une action très nette les caractérise. Si, par exemple, à l’aide du nitrile malonique de M. Heymans, on déter- mine, comme l’a fait Gley. au maximum la vaso- dilatation chez le lapin et qu'on vienne à injecter dans les veines, au moment où l'oreille est absolu- ment rouge, une minime fraction de ces éléments du troisième groupe, on observe aussitôt un resserre- Lg ab AA RR Etre .ment manifeste des vaisseaux. L'effet obtenu est beaucoup plus intense que lorsqu'on introduit la culture stérilisée dans son ensemble, vraisembla- blement parce qu'il existe dans cette culture des corps dilalateurs, ou des corps qui tout au moins inhibent la constriclion. C’est du reste ce qui D' A. CHARRIN. — LA NATURE DES SÉCRÉTIONS MICROBIENNES 133 ressort des recherches de M. Bouchard d’une part, de -celles de M. Gleyet des nôtres, d'autre part. Alors même qu'il s'agit d'influencer un autre germe, d’entraver son évolution, un microbe peut se servir de plusieurs sécrétions. Pour s'opposer au développement de la bactéridie, le bacille du pus ble, placé en présence, in vitro, usera des principes volatils qu'il fabrique, mais bien plus des albuminoïdes, et des éléments solubles dans l'alcool auxquels il donne naissance. Ces données découlent de recherches que nous avons poursui- vies avec M. Guignard. Resterait, entre autres desiderata, à préciser le groupe de ces sécrétions qui renferme la matière dont la pénétration, dont le passage dans l’orga- nisme est suivi de la création de limmunité. Au cours de quelques tentatives, divers extraits ont semblé capables d'accroître la résistance aux vi- rus. Peut-être, par impureté ou vice de technique, chacun de ces extraits contenait-il une fraction minime et pourtant suffisante ! de la matière en question, alors qne cette matière, à moins d’être multiple, existe en réalité ou prédomine singuliè- rement dans une seule des catégories auxquelles nous avons fait allusion, de préférence dans celle des produits que l’alcool précipite. Toutefois, pour ne pas masquer l'effet utile, l'effet vaccinant, il est mieux, nous l'avons noté, de se débarrasser d’une part de la toxicité, en utilisant la chaleur, car, on le sait, ces substances insolubles dans l'alcool et dans lesquelles le protoplasma des germes lient une place de plus en plus grande sont douées d'une activité considérable. Coneluons done que, de par les effets physiolo- giques, ici simplement indiqués, il y a, a un instant précis, dans un bouillon donné au sein duquel a véeu le bacille pyocyanique, au minimum, trois ou quatre ordres de substances toxiques variables d'importance, variables de quantité; les plus ac- tives biologiquement ne sont pas toujours les plus abondantes ni les mieux connues. Chimiquement, on peut dire, d'une façon grossière assurément, qu'on y rencontre en premier lieu des toxalbumen, des diastases, des peptones; en second lieu des ma- tières alcaloïdiques ; en troisième lieu des parties volatiles, des ammoniaques, etc. Même, à ne s'appuyer que sur la chimie, il est aisé d'aller plus loin et d'établir, d’une façon aussi 1 Des expériences de M. Bouchard, des analyses de M. Ar- naud prouveront à quel point peut être restreinte la dose de la substance dont l'introduction est suivie de l’état réfractaire. — Nous reviendrons d’ailleurs prochainement sur ces données fondamentales, quand nous exposerons, avec M. Arnaud, par quels procédés le bacille pyocyanique attaque et détruit la matière. ? L'action des extraits varie suivant les microbes, suivant les milieux, etc. précise que possible e{ non par à peu près, que les agents pathogènes microbiens, que certains agents pathogènes microbiens, pour rester étroite- ment dans les faits, fabriquent des corps mul- tiples. — Des cultures du bacille du pus bleu on retire un principe défini, dont nous avons déjà parlé, la pyocyanine ; sa formule, ses réactions, ses combinaisons, tout nous est connu ; nous avons pu photographier ses cristaux. Or, des mêmes cul- Lures, grâce à M. Arnaud, des sels ammoniacaux, eux aussi parfaitement purs, ont été extraits. Et nous ne comptons bien entendu ni les diastases, ni les peptones, ni les toxalbumines, que nous venons de rappeler, ni quelques pigments, ni les alcaloïdes ou autres principes que l'expérimentation permet de soupconner. Nous ne parlons que de deux subs- tances, qui ne sont peut-être pas les plus intéres- santes, les plus actives, bien qu’elles ne soient pas inertes, mais qui sont absolument irréprochables dans leur nature, dans leur composition. Ces deux substances permettent en outre de se rendre compte, non plus approximalivement, non plus par de simples réactions, mais par la pesée, par la balance, par les mesures les plus exactes de la chimie moderne, des oscillations dans les élé- ments sécrélés. — Suivantles conditions physiques, ou chimiques de la culture, suivant la vitalité de l'agent producteur, des variations de quantité etde qualité peuvent s'introduire dans les sécrétions, et c'est là une des bases de la virulence. Le même microbe semé dans des ballons renfermant sensi- blement le même liquide, mais à des époques dif- férentes, a produit dans un cas, d'après Arnaud du Muséum, 0 gr. 250 d’ammoniaque par litre, et dans un second cas 0 gr. 170 seulement, la teneur normale du bouillon employé étant avant l’ense- mencement de 0 gr. 025 à O0 gr. 030. En usant d’un autre milieu, on obtient jusqu'à 1 gr. Il est pro- bable que, dans l'organisme, pareils changements ont lieu; de là des modifications dans les symp- tômes, les lésions, la marche, la gravité de la ma- ladie. Chose digne de remarque, il fut un temps, nous y avons fait allusion, où l’on accusait les bactéries d’engendrer surtoutdes alcaloïdes, des pLomaïnes, et, au même moment, on rattachait à la vie de nos propres cellules la création de matières analogues, de leucomaïnes. Aujourd'hui les mêmes bactéries donnentprincipalement naissance à des albumines; or, pendant ce temps, Rummo et Bordoni ", Richet?, Charrin ?, Roger ?, reconnaissent que les extraits de sang ou de tissus, à l’état sain ou à l’état de mala- die, doivent spécialement leur toxicité à des élé- ments précipitables par l'alcool, nesupportant pas 1 Riforma medica, 1890. 2 Soc. de Biol., 1890. 134 G. SALET. — L'HYPOTHÈSE MÉTÉORITIQUE DE M. NORMAN LOCKYER ou supportant mal de très hautes températures, ne dialysant pas ou dialysant à peine. Le parallélisme, à cet égard, et du reste à beaucoup d’autres, se trouve donc être assez complet, — On peut même ajouter que si d’un côté les microbes fabriquent des principes toxiques pour eux-mêmes, tels que les matières empêchantes des cultures, et toxiques pour nos cellules, comme par exemple les toxines, L'HYPOTHÈSE MÉTÉORITIQUE C'est une synthèse générale du monde que nous offre aujourd'hui le savant spectroscopiste, syn- thèse fondée sur une hypothèse nouvelle, d'après laquelle l’espace céleste ne devrait plus être ap- pelé le vide planétaire, mais bien le plein météoritique. La matière des météorites, dispersée en une infi- nité de peliles masses primitivement froides, mais tendant à former des amas plus considérables et plus chauds sous l'influence de la gravitation, voilà la commune origine de tous les astres, que ceux- ci s’appellentcomètes, soleils, nébuleuses ou même étoiles filantes. L'hypothèse proposée sert encore à expliquer les diverses coloralions des étoiles, les variations de leur éclat, les spectres des étoiles doubles et aussi ceux de la lumière zodiacale, de l'aurore boréale et d’une classe particulière d’éclairs. En somme tous les phénomènes lumineux qui se passent au-dessus de nos (êtes, sont rapportés à une cause unique : l’incandescence par les agents physiques dérivés eux-mêmes-de l'attraction New- tonienne, des divers éléments contenus dans les pierres méléoriques. Mais il nous est facile de nous procurer dans les collections des échantillons des principales pierres tombées du ciel et de les illuminer par la chaleur ou par l'électricité; nous devons done par ce moyen pouvoir reproduire dans le laboratoire la lumière des éloiles, des comètes, de l’aurore bo- réale, etc. : c'est ce que M. Lockyer pense avoir réussi à faire, Il Son livre débute par l'examen des spectres des métaux à différents degrés de chaleur, dans la flamme du chalumeau à oxygène, dans l’are élec- trique et dans l’élincelle des condensateurs. Les résultats de ces recherches sont résumés dans un tableau fort clair où les principales raies ou bandes sont figurées avec leur température d'apparition. Puis vient la comparaison de ces spectres avec ceux ! The Metcoritic Hypothesis, a statement of the results of à Spectroscopic inquiry into the origin of cosmical systems, par Norman Lockyer. — Un vol. in-8° de 360 pages, avec nombreuses figures. Prix : 21 fr. 25 net. Londres, Mac- millan, 1890, d’un autre côté, nos cellules fabriquent égalemen des principes toxiques pour elles-mêmes, les inj tions de sérum le prouvent, et toxiques pour microbes, l'état bactéricide des humeurs le dé À montre. È D' A. Charrin, Chef du Laboratoire de Pathologie général à la Faculté de Médecine de Paris. DE M. NORMAN LOCKYER. obtenus en traitant les météorites de la même fa con. Comme on pouvait s’y attendre, d'après le recherches antérieures de l’auteur, ce sont les raie de basse température, appartenant aux éléments le plus volatils du mélange, qui apparaissent en pre mier lieu dans le spectre. En ce qui concerne le gaz el vapeurs que les météorites peuventémettre, on a recours pour les étudier au procédé déjà usité des tubes de Geissler. La substance, enfermée dan ces appareils rigoureusement privés d'air, esb chauffée plus ou moins, pendant que l'on y fai passer l’étincelle d’induction ; on compare ensuite les bandes et raies observées avec celles de l'hydro= gène,des hydrocarbures,de l’oxyde de carbone, etc. Il est bon de signaler à ce sujet que M. Lockyer continue à attribuer au carbonemédiocrement chaud! les cannelures généralement considérées comme caractéristiques de l’oxyde de carbone et qu'il se range aussi à l'opinion de Wüllner et d'Hasselberg selon laquelle le spectre à raies nombreuses attri- bué par MM. Berthelot et Richard à l’acétylène est dû à l’Aydrogène relativement froid. Le mode de préparation du gaz hydrogène décrit dans le nou- vel ouvrage ne semble d’ailleurs pas propre à faire rejeter l’opinion des savants français, car aucune précaution n'est prise pour éliminer une impureté carbonée ; on produit le gaz dans le tube même en y chauffant simplement du magnésium ou un morceau de sodium « n’ayant jamais subi le con- tact des hydrocarbures ». Enfin la bande ombrée commençant au À : 300 et décrite habituellement depuis les travaux de Liveing, comme appartenant à la magnésie, aussi bien que la raie 521 qui appa- rait dans la flamme du magnésium avec 4! eb (Lockyer) et dont MM. Liveing et Dewar assignent l'origine au magnésium ex présence de l'hydrogène, sont attribuées toutes deux au métal magnésium plus ou moins chaud. La section II contient une discussion très com- plète des différentes opinions professées sur l’ori- gine de l’aurore boréale. On y compare le spectre de celle-ci, déterminé par les meilleurs observa- teurs, 4° au spectre de l'air produit dans un large . | G. SALET. — L'HYPOTHÈSE MÉTÉORITIQUE DE M. NORMAN LOCKYER 435 * tube de Geissler fonctionnant à des pressions va- riées et examiné dans le sens de sa longueur; 2 au spectre du carbone froid (C0) ; 3° au spectre de l'oxygène. Il n’y a pas de coïncidences. On peut au contraire, selon l’auteur, arriver à reproduire les diverses raies de l’aurore en superposant les bandes du carbone chaud et froid (mais pas toutes), la bande 431 du spectre de Swan, les deux cannelures im- portantes du magnésium (500 et 521) la cannelure la plus visible du fer et enfin la cannelure prinei- pale du manganèse et une ligne du même élément. Ces deux dernières radiations apparaissent les pre- mières lorsqu'on chauffe le manganèse. La bril- lante cannelure 558 de ce métal, ou plutôt, semble- t-il, de son oxyde, serait donc, ce qui paraît sur- prenant, identique avec la raie la plus caractéris- tique de l’aurore boréale, celle dont Angstrôm avait donné le À : 556.7, valeur que les observa- teurs subséquents avaient tous d’ailleurs trouvée un peu trop faib'e. En somme c’est à la fine pous- sière de météorites suspendue dans les hautes ré- gions de l'air et illuminée par l'électricité que M. Lockyer ressuscitant la théorie de Olmsted et de Groeneman attribue le phénomène de l'aurore polaire. Vogel avait déjà signalé la coïncidence assez exacte des lignes de l’aurore avec celles d’un métal qui existe précisément en forte proportion dans toutes les météorites, mais ce métal — le fer — possède des raies si nombreuses dans presque toutes les parties du spectre que cette coïncidence ne lui a paru qu'accidentelle. Mais les décharges électriques qui constituent les éclairs peuvent se rapprocher, lorsqu'elles sont relativement faibles, de celles de l'aurore polaire ; aussi M. Lockyer fait-il remonter aux météorites, c'est-à-dire aux mélaux, — parmi lesquels le thal- lium(? —-l’origine des raies observées par M. Schus- ter dans le spectre des éclairs au Colorado. Il va sans dire que les éclairs les plus vifs sont, comme les traits de feu de nos machines, dus à l’incandes- cence de l’air lui-même et en fournissent le spectre. Il Dans la section [IV on considère les essaims mé- téoritiques en dehors de l'atmosphère terrestre ; on y passe en revue tous les arguments en faveur de la théorie aujourd’hui classique de M. Schiapa- relli, selon laquelle ces essaims constituent les comèêtes, et l’on y résume les récents mémoires de M. Roche de Montpellier et M. Bredichine de Mos- cou sur les causes qui peuvent expliquer la forme de ces astres, de leurs enveloppes et de leurs queues. On explique ensuite les différentes appa- rences que présentent leurs spectres selon leur plus ou moins grande distance du soleil et par suite selon leur lempérature. On y signale l’appa- rilion successive des raies suivantes. 1° Bande can- nelée du magnésium froid (500) remplacée bientôt par celles du carbone froid (C0).2° Ces bandes font place à leur tour aux bandes du carbone chaud (spectre de Swan) qui s'associent généralement à la cannelure du magnésium chaud (521). 3° Les mêmes bandes subissent des changements de posi- tion et d'aspect par l'adjonction de bandes d’émis- sion voisines dues au manganèse ou au plomb, ou au contraire par l’absorption des mêmes radia- tions; absorption qui masque la bande cilron du carbone. Cette dernière hypothèse ne sera évidem- ment pas recue sans discussion, 4° La température croissant, on voitencore apparaître en 421 une bande que M.Lockyer attribue à un nouveau spectre du car- bone (carbone B; Cy0 de Watlis) en même temps que se manifeste l'absorption parles vapeurs de fer. 5° Toutes ces bandessontabolies dans le voisinage du soleil et les métaux fer, magnésium el sodium manifestent seuls leur présence par l'apparition des plus visibles parmi leurs lignes, soit à l’état de raies lumineuses, soit à l’état de raies d'absorption. Si l’on compare les principales raies observées dans les spectres de différentes comètes avec celles de l’aurole boréale, on arrive à cette conclusion que la plupart coïncident, et spécialement 500 et 921 (Mg), 558 (Mn) et 546 (Pb), ce qui ajoute un ar- gument en faveur de l'origine météoritique du phénomène auroral. Quelle est la cause de la chaleur et de la lumière développée dans les comètes? M. Lockyer en énumère plusieurs qui font toutes intervenir les chocs des météorites. Ces chocs ont lieu non seu- lement entre les éléments d'un même essaim, mais surtout entre l’essaim circulant antour du soleil et le plein méléoritique d'autant plus dense qu'on se rapproche plus de l’astre central. L'auteur voit une confirmation de ses vues dans la forme en croissant que prennent les comètes, encore très éloignées de nous quand elles quittent l’apparencenébuleuse. Quant aux queues de ces astres elles sont pro- duites parles gaz ocelus dans les météorites(hydro- gène et composés carbonés) lesquels sont chassés par la force répulsive du soleil; aussi ne reparais- sent-elles plus dans les comètes qui ont été souvent dans le voisinage du soleil, celles à courte période. Leur lumière est semblable à celle de l'aurore boréale, non seulement dans la plupart de ses ca- ractères — variations rapides d'éclat, spectre, etc. — mais dans son origine elle-même. Dans un cas en effet on a affaire à un gaz se mouvant dans une poussière de métoriles, dans l’autre à un nuage de poussière méléorilique se mouvant dans l’atmos- phère : dans les deux phénomènes la production de lumière parait due à l'électricité. Après avoir considéré les météorites dans le 136 G. SALET, — L'HYPOTHÈSE MÉTÉORITIQUE DE M. NORMAN LOCKYER laboratoire, dans l'atmosphère terrestre et dans le système solaire où elles forment les comèles, M.Lockyer étudie celles-ci dans l'espace céleste d’où elles viennent et où la plupart retournent. Elles lui apparaissent comme tout à fait semblables à ces autres amas de poussière cosmique qu'on nomme nébuleuses : c'estl’opinion de M.Schiaparelli. Il est difficile en effet de distinguer au télescope un nébuleuse planétaire d'une comèle très loin de son périhélie. De plus M. Lockyer affirme que les spectres sont semblables. M. Huggins, qui découvrit en 1864 le spectre des nébuleuses, le trouva com- posé de raies brillantes peu nombreuses, parmi lesquelles il signala la plus caractéristique dans le vert, à la longueur d'onde 500 ; il Pattribua par la suite à l’azote. En 1882 il réussit à photographier le spectre de le nébuleuse d’Orion et il donna les longueurs d’onde suivantes pour les quatre lignes enregistrées : 371, 434, 486, 495 et 500. La première de ces lignes n'existe dans la nébuleuse d'Orion que par places, en revanche certaines par- ties de la même nébuleuse en donnent d'autre. Il est extrêmement probable que les raies 434 et 486 appartiennent à l'hydrogène, ce sont G' et F du soleil; quant à 495 elle est d’origine inconnue el on ne l’a pas signalée dans les spectres comélaires. Reste la forte raie 500, caractéristique des nébu- leuses et qui, d'après sa longueur d'onde et une comparaison directe faite par M. Huggins, coïncide avec la moins réfrangible des deux raies voisines les plus brillantes de l'azote. On avait été surpris de la trouver seule dans les nébuleuses, M. Lockyer explique ce fait très simplement. Ce n'est pas une raie de l'azote, elle est identique avec la raie 500,6 des comètes el appartient au € magnésium froid ». À l'appui de son opinion il cite de nom- breuses comparaisons de lectures micrométriques, mais, ce qui est plus probanl encore, il décrit une expérience personnelle faite avec un spectroscope très dispersif et où l’on a juxtaposé les spectres du magnésium brûlant et de l’azote avec un réti- cule exactement centré sur la raie de la nébuleuse d'Orion. Celle-ci est sensiblement moins réfran- gible que la raie de l'azote 500,5; elle coïncide parfaitement avec la raie du magnésium 500,6; enfin elle est dégradée vers le violet comme elle. IT Il est certain que cette comparaison est d’un grand poids en faveur de la similitude des comètes et des nébuleuses : ce sont des nuages cosmiques. M. Lockyer pense qu'ils sont rendus visibles par la collision des petiles masses qui les composent et il essaye de préciser cette notion. Selon lui, si les orbites elliptiques des météorites se coupent régulièrement sur la surface d’une sphère, celle-ci devenant lumineuse par la chaleur due aux chocs; prend l'apparence d'une nébuleuse planétaire, Après le choc les masses météoritiques peuvent parcourir d’autres orbites également régulières dont l'intersection fournirait une autre surface sphérique intérieure à la première; telle serait lo= rigine des nébuleuses globulaires el des étoiles nébuleuses. Ce chapitre singulièrement hypothé= tique est illusiré de magnifiques photographies dues à M. Roberts. | Certaines étoiles, dont le spectre présente des raies brillantes, doivent, d’après les idées exposées. ci-dessus, être aussi considérées comme des es- saims méléoriliques un peu plus condensés que les nébuleuses. La comparaison des spectres est en faveur de cette assimilation : les raies brillantes sont en effet pour la plupart celles des comètes, el on y reconnail presque toujours le spectre de Swan (carbone chaud) et celui de l'hydrogène, qui, s'il n'apparait guère dans le spectre des comètes, ne fait jamais défaut dans celui des nébuleuses. Une autre classe d’astres, celle des petites étoiles à bandes sombres dégradées vers le rouge (& d'Hercule, Mira Ceti) parait devoir être rapprochée de la précédente; au moins distingue-t-on dans leurs spectres les cannelures brillantes du carbone (516 et 474) accompagnées de bandes d'absorption des métaux (Mg, Mn, etc.). Il y a done un lien de parenté entre tous les corps célestes puisque nous sommes arrivés de proche en proche à considérer les étoiles, où du moins certaines d'entre elles comme des amas de méléorites. Mais M. Lockyer, rompant ici avec la théorie classique de Laplace, selon laquelle la température des nébuleuses et des étoiles irait constamment en s’abaissant, insisle sur cette con- séquence de ses propres idées, qu'il y a des astres dont la température augmente (par la condensa- tion des éléments météoritiques) et d’autres où elle diminue (par rayonnement). De sorte qu'un même astre passe deux fois par le même degré de chaleur, une fois avant d’atteindre et une autre après avoir dépassé son maximum delempérature. La structure d'un spectre ne peut donc pas nous renseigner exactement sur l’âge d’une étoile, et un soleil fournissant de nombreuses lignes d’absorp- tion comme le nôtre pourrait aussi bien dans la suite des siècles devenir plus chaud et présenter alors le spectre moins compliqué des éloiles les plus brillantes, que se refroidir et donner en con- séquence les bandes d'absorption — surtout celles du carbone — des étoiles déjà vieilles. Si done on partage les corps célestes en divers groupes d’après le degré de condensalion de la malière météorilique primilive, on sera amené à en établir sept, non compris celui des météorites G. SALET. — L'HYPOTHESE MÉTÉORITIQUE DE A M. NORMAN LOCKYER 137 “non lumineuses qui servent de point de départ et “dont on n’explique pas du lout la formation. Je Astres à spectres possédant des raies ou des - bandes brillantes (Nébuleuses ; étoiles à raies bril- jantes — y d’Argus, Étoiles de Wolf et Rayet dans le Cygne, etc.). 2% Étoiles à spectre mixte d'émission el d'ab- “sorption. Ce sont celles sur lesquelles les remar- ques de Dunér ont surtout porté (x d'Orion el 2 de la Baleine par exemple). Elles donnent des bandes et lignes obscures, mais aussi, d'après M. Lockyer, des bandes lumineuses; en effet, selon lui, les bandes de 4 à 8 de la nomenclature de Dunér sont bien des bandes d'absorption et appar- liennent vraisemblablement au magnésium, au manganèse, au baryum, au plomb et au fer; mais celles qui portent les n° 9, 10 et 11 ne paraissent noires que par contraste, ce sont de simples inter- valles obscurs qui séparent les bandes d'émission du carbone : 473 (Bande de Swan), 460 (carbone B ou cyanogène) et 431 (Bande de Swan). 3 Étoiles où les bandes ombrées ont disparu pour faire place aux lignes noires. La cannelure du magnésium y est remplacée par le triplelt à, les raies métalliques sont très fortes (x du Taureau, @ d'Ophiueus); elles le sont d'autant moins que la température s'élève davantage et que les raies de l'hydrogène deviennent plus visibles (5 de Persée et à de l'Aigle). Il est facile de suivre cette grada- tion intéressante dans un tableau très démonstratif qui illustre le chapitre. % Étoiles les plus brillantes et les plus chaudes (2 de la Lyre), caractérisées par de très fortes raies noires de l'hydrogène et des raies métalliques, fines et peu nombreuses. M. Lockyer suppose que l'énorme excès d'hydrogène qu’elles renfer- ment est dû à la dissociation des éléments mélal- liques. 5° Étoiles en voie de refroidissement, analogues à notre Soleil, et présentant comme lui de nom- breuses raies métalliques, accompagnées de celles de l'hydrogène. Il serait intéressant de trouver un critérium pour placer ces étoiles dans ce groupe plu- tôt que dans le groupe troisième. M. Lockyer pense l'avoir trouvé dans l'absence ou la présence de certaines raies particulières. par exemple, de la raie 499, qui, très faible dans la Chèvre, Areturus et notre soleil, est très forte chez d'autres étoiles; mais il confesse qu'il serait désirable de trouver d’autres caractères de classification plus impor- tants. 6° Étoiles à spectre d'absorption cannelé, Comme l'a reconnu Secchi, ces cannelures sombres corres- pondent aux cannelures brillantes du carbone. On les a toujours considérées comme caractérisant une température fort basse. REVUE GÉNÉRALE, 1891. 1° Étoiles non lumineuses analogues aux pla- nètes. IV Dans la section VII de son livre, M. Lockyer traite de l’origine des étoiles doubles où mul- liples. Elles peuvent provenir, soit de la conden- salion d’une double nébuleuse, soit d'un essaim méléoritique, sorte de comète gigantesque,devenue satellite d’une étoile déjà formée. Dans le premier cas, si la couleur diffère plus ou moins, on peut supposer que le premier Compagnon, quoique formé en même temps que l’autre, a accompli plus vile que celui-ci, supposé plus gros, les phases de son existence, il a donc passé par sa température maxima avant que l’autre leût alteinte. Tel serait le cas, par exemple, d’une étoile jaune du cin- quième groupe, associée avec une bleue du premier I de Cassiopée). On peut ainsi expliquer la colo- ration de presque (ous les groupes sans avoir recours à la seconde hypothèse. Malheureusement, l'étude spectrale des étoiles doubles n’est pas assez avancée pour permeltre de pousser plus loin la discussion. Les éloiles variables (section VII) peuvent être considérées comme des systèmes mulliples d’amas méléoriliques gravilant les uns autour des autres et dont les orbites se coupent en quelque point, Lorsque là rencontre des essaims a lieu, la Llempé- rature s'élève et l'on voit apparaitre de nouvelles radiations, principalement celles de l'hydrogène et des gaz carbonés. Si l'un des astres est une véritable éloile, l'hypothèse devient analogue à celle par laquelle Newton expliquait l'apparition des Nov, qui élaient pour lui des étoiles en voie d'extinction auxquelles la chute d’une comète apportait tout à coup de nouveaux aliments. Evidemment, les vues de M. Lockyer s'appliquent mieux aux astres à raies brillantes qu'à tout autre corps céleste; or, on remarque précisément que presque tous les exemples de variabilité sé rapportent à cette classe d'étoiles, 6 de la Lyre appartenant au groupe pre- mier et Mira Geli au groupe deuxième. D’autres causes de variabilité peuvent être d’ailleurs in- voquées, par exemple, l'existence d’un satellite obseur, par laquelle M. Pickering explique les va- riations d’Algol. Tels sont les points principaux traités dans le nouvel ouvrage; M. Lockyer le clôt par un résumé magistral où apparait toute la grandeur de lédi- fice qu'il a mis vingt ans à élever. Nul doute que ce livre ne soil très lu, mais aussi {rès discuté, au moins dans quelques-unes de ses parties. Du reste, contradicteurs ou adeptes n'auront pas à chercher ailleurs des argumerts en faveur de leurs propres idées. Il contient, en effet, une masse + ù L LA 138 H. LE CHATELIER ET G. MOURET. considérable de documents ef d'informations sous forme de notes, de citations, de tables numé- riques, de tableaux et de graphiques. Il est enri- chi, de plus, de magnifiques photographies stel- laires dues à M. Roberts; à tous ces points de — LES ÉQUILIBRES CHIMIQUES ; vue encore, il deviendra un des livres les pluss consultés de l’astronomie physique. G. Salet, Chargé de Cours à la Faculté des Sciences de Paris” ÉQUILIBRES CHIMIQUES DEUXIÈME PARTIE Dans un précédent article ! nous avons ex- posé les principes fondamentaux spéciaux à la mécanique chimique. Il faut maintenant combiner ces principes spéciaux avec les principes généraux de la thermodynamique pour en tirer les lois appli- cables directement aux transformations et aux équilibres chimiques, [ Les principes de la thermodynamique sontassez connus pour qu'il soit suflisant de les rappeler sommairement. Les deux premiers principes, celui de Joule et celui de Carnot, s'expriment simultanément par la relation du = tds — pdv où du, ds, dv,sontles variations d’énergieintérieure, d’entropie et de volume dans une transformation réversible quelconque, à la température absolue £ el sous la pression p. Pour simplifier, nous ne considérerons que des systèmes où les variations de quantité d'électricité et de vitesse sont nulles. Le troisième principe de la thermodynamique est le principe de Clausius ; ce principe a reçu des énoncés différents qui ne sont pas toujours suffi- samment précis ; il doit être formulé comme suit : Toute transformation spontanée d'un système hors d'équilibre et isolé, c'est-à-dire dont le volume ne varie pas, et qui ne peut emprunter ni abandonner de chaleur à l'extérieur, est accompagnée d'un accroissement d’en- tropie ?, Le principe de Clausius n’a d'autre crilérium que l'expérience ; il ne se peut déduire des principes de Joule et de Carnot. Il représente en thermody- namique la première loi du mouvement de Newton, car l’entropie joue ici le même rôle que la vitesse 1 Voyez: H, Læ Cuarezter et G. Mourer. Les Equilibres chi- miques ; Lre partie : La Mécanique ue principes fondamen- taux, dans la Revue du 28 février 1891, t. II, page 97. 2 On peut encore énoncer ce ee sous Ja forme sui- vante où l’entropie n'intervient pas explicitement Toute transformation susceptible d'être accomplie spontanément dans un système isolé peut servir à transformer en travail, si elle est accom- plie par voie reversible, une certaine quantité de chaleur empruntée à l'extérieur. APPLICATION DES PRINCIPES DE LA THERMODYNAMIQUE en mécanique. Ce principe forme la base de toute la mécanique chimique, et l’on peut en déduirem presque immédiatement la loi du mouvement chi= mique. 2.08 Lois du mouvement et de l'équilibre chimique. Pour faire usage des lois fondamentales de lan thermodynamique, il convient de faire intervenir une notion spéciale, celle de l'énergie utilisable qui. a le grand avantage de donner à ces principes une forme en quelque sorte tangible sans modifier en rien la rigueur des raisonnements. Avant de défi nir exactement cette nouvelle grandeur et celles : qui s’y ratlachent, on en donnera une idée géné- rale en s’aidant d'exemples familiers. Toute l'énergie dont nous pouvons disposer dans la Nature, et que nous pouvons utiliser à notre gré sous forme de travail mécanique ou d'électricité nous est fournie directement ou indirectement par des corps primitivement hors d'équilibre pendant qu'ils reviennent à leur posilion d'équilibre ou simplement s'en rapprochent. Ainsi l’eau qui tombe des montagnes pour se rendre à la mer, la vapeur qui se refroidit de la température de la chaudière à la température du ‘condenseur, sont les sources principales de travail dont nous dis- posons. Les systèmes chimiques hors d'équilibre peuvent aussi remplir le même office : tel est l'explosif qui lance le projectile dans le canon, ou le charbon qui par sa combustion échauffe l’eau de la chaudière à vapeur. Tout svstème hors d'équi- libre est un réservoir de travail disponible : c'est là une loi expérimentale très générale dont le prin- cipe de Clausius n’est que l'application aux phéno- mènes thermiques. Ceci dit, passons à l'exposé rigoureux de la question, el rappelons tout d’abord que, pour sim- plifier, nous n'envisageons que les phénomènes qui ne comportent pas de variations sensibles de vitesses des systèmes ou des éléments des sys- tèmes considérés, comme nous faisons abstraction des changements électriques, magnétiques et de capillarité. De mème que le mouvement en ramène à celui qui a lieu sous des forces cons général se 1 H. LE CHATELIER ET G. MOURET. — LES ÉQUILIBRES CHIMIQUES 139 {fanltes, de même toute transformation chimique peut se ramener à celle qui se produit sous ten- sions fixes. Mais un système chimique qui se trans- forme sous tensions fixes n’est pas un système isolé, et, pour appliquer le principe de Clausius, il faut tenir compte du système extérieur qui exerce les tensions fixes, et dont le volume, l’entropie et lénergie peuvent varier quand le système chi- mique subit une transformation. Ce système, que lon appellera le milieu, peut être d’ailleurs quel- conque, et les raisonnements et résullats qui vont suivre sont indépendants de sa nature particulière. Si donc l’on suppose un système chimique hors d'équilibre, abandonné à lui-même dans un milieu à tensions fixes, l’ensemble constitue un système isolé auquel s'applique le principe de Clausius, c'est-à-dire que la transformalion chimique qui s'accomplira sera celle qui répond à une augmen- tation de l’entropie totale du système et du milieu. Reste à évaluer cette augmentation ou plutôt une certaine énergie qui s’y trouve liée et qui est pré- cisément l'énergie utilisable, comme on va le voir. Afin de mieux faire saisir l’enchainement des idées et l'esprit de la démonstration, reportons- nous d'abord à un cas simple et bien connu de la mécanique. Quand un corps en mouvement se rapproche de la position d'équilibre stable, il y a, conformément à la première loi du mouvement de Newton, ac- croissement de sa vitesse, el par suite, augmenta- tion de sa force vive. Si, au lieu de laisser le mou- vement s'accomplir spontanément, on intervient pour rétablir l'équilibre, le corps accomplit un cer- ain travail positif et son énergie initiale se trouve diminuée d'une égale quantité; le théorème des forces vives, ou si l’on veut, le principe de la con- servation de l'énergie, nous apprend d'ailleurs que la quantité de travail mis en liberté, dans ce déplacement réversible, c’est-à-dire sans variation de vitesse, est égale à l'augmentation de force vive qui a lieu dans le mouvement spontané. Dans la thermodynamique ou la mécanique chi- mique, le raisonnement reste sensiblement le même ; il suffit de substituer à la vitesse et à la force vive les notions thermiques équivalentes, entropie et quantité de chaleur. Et si l’on se res- treint par exemple au cas de la transformation chi- mique, on doit, au lieu de. comparer des change- ments de position dans l’espace, comparer des changements d'état chimique. Répétons donc le raisonnement précédent, avec ces notions différentes. Nous avons vu que quand le système passe spontanément d’un état chimique À à un autre état chimique B, l’entropie augmente; d’ailleurs, puisque le système et le milieu forment un ensemble isolé, l'énergie totale ne varie pas. Mais on peut aussi faire subir à cet ensemble une transformation réversible qui amène lesystème chimique au même état final que par la transfor- mation spontanée, sans qu'il en soit nécessaire- ment, au reste, de même du milieu. En outre, de même qu'on peul faire passer le mobile de sa posi- tion iniliale à sa position finale sans changement de vitesse, on peut, dans l'opération réversible ac- complie sur le système et le milieu tout entiers, faire en sorte que l’entropie totale de l'ensemble ne varie pas. Or l’état final de l'ensemble après la transfor- mation à énergie constante, et l’état final après la transformation à entropie constante ne diffèrent que par l’entropie du milieu, puisque l’état final B du système este même dans les deux cas. Mais on vient de voir que l’entropie totale du système et du milieu est plus grande dans le premier cas que dans le second; par suite l’entropie du milieu sera plus grande après la transformation spontanée qu'après la transformation réversible, et pour ramener, dans le premier cas, l’entropie à sa valeur primilive, c’est-à-dire pour revenir à l’état final de la transformalion réversible, il faudra enlever au milieu une certaine quantité de chaleur, ce qui diminue d’autant l'énergie initiale. Ainsi donc le principe de Clausius, uni à celui de la conserva- tion de l'énergie conduit à cette conséquence que dans la transformation à entropie constante ! l'énergie de l'ensemble a diminué el que cetle diminution d'énergie est égale à la quantité d'énergie corres- pondant, à l'accroissement d’entropie totale, dans la transformation chimique. Cette conclusion n'est pas autre chose, en thermodynamique, que le théorème correspondant à celui des forces vives ; on voit aussi que cette transformation réversible à entropie totale constante, est en thermodynamique l'équivalent du mouvement uniforme en méca- nique. Puisque l'énergie, dans la transformation à entropie constante a diminué, c’est qu'une certaine partie de l’énergie iniliale a été déplacée à l’exté= rieur, et il est facile de voir que cette énergie dé= placée est précisément l'énergie utilisable qu'une machine théorique parfaite mettrait en liberté sous forme de travail. En eflet, pour extraire du système hors d’équi- libre toute l'énergie susceptible de passer à l’exté- rieur, il faut évidemment procéder par voie réver- sible, sinon une certaine partie de l'énergie serait transformée en force vive, ou déplacée sous forme de chaleur, l’une et l’autre inutilisées; mais il faut de plus que l'agent extérieur, ou machine, qui intervient pour assurer la réversibilité, n’absorbe aucune part de l'énergie, el revienne par consé- 1 I est bon de remarquer que le volume total est aussi invariable, 130 H. LE CHATELIER ET G. MOURET. — LES ÉQUILIBRES CHIMIQUES quent à son état initial, car il ne sert que d’inter- médiaire, et il doit être utilisé indéfiniment. Il est donc nécessaire que les échanges de chaleur effec- tués par cet agent entre le système et le milieu, pour maintenir l'équilibre thermique, se fassent par des cycles fermés, qui sont des cycles de Carnot; d’où il suit que les variations d'entropie du système et du milieu sont égales et de signes contraires, c’est-à-dire que l’entropie totale reste constante. Ainsi donc l'énergie mise en liberté par une telle machine, c’est-à-dire l'énergie utilisable est bien celle qui répond à une transformation à entropie constante. De la même manière, quand on utilise la force d'une chute d’eau par exemple, la vitesse de l’appareil doit être constante, el égale à la vitesse initiale. On appelle énergie potentielle, où simplement poten- tiel du système chimique; celte part de l'énergie totale qui varie dans la transformation réversible à entropie constante, et qui est, en mécanique, l'énergie de posilion. L'énergie utilisable est donc la variation de l’énergie potentielle, et le principe que nous venons d'établir peut s’énoncer en disant que dans toute transformation qui tend vers l'étal d'équilibre stable, l'énergie potentielle diminue, et la diminution est compensée par une augmenta- tion d’entropie (énergie actuelle) si la transforma- tion est spontanée, par une énergie utilisable ou travail mis en liberté, si elle est réversible !. Quant à la valeur 7 du potentiel, elle s'exprime simplement en fonction de l’état du système chi- mique. Ce potentiel est en effet, par définition, la somme de l'énergie intérieure « du système chi- mique, et de l'énergie intérieure #, du milieu dans le changement réversible ?; mais puisque le milieu 1 Cette loi est absolument générale. Dans tout phénomène complexe, mécanique, thermique, électrique, chimique, le mouvement vers la position ou l'état d'équilibre stable est accompagné d'une transformation d'énergie potentielle (c’est- à-dire ne dépendant que de la position et du volume), en énergie actuelle (qui ne dépend que de la vitesse et de l’en- tropie). C’est ce qu’on peut appeler la loi de transformation de l'énergie, qui ne comprend comme cas particuliers le théorème des forces vives et le principe de Clausius. 2 Le calcul du potentiel d’un système chimique suppose donc qu'il est possible, comme cela a lieu dans les systèmes méca- niques, de passer par voie réversible d’un état chimique hors d’équilibre à un état d'équilibre. Pour réaliser ce mode de chan- gement, il suflit de faire varier les Tensions, saus laisser la transformation chimique s’accomplir, jusqu'à ce que l'équi- libre soit établi, puis de ramener les Tensions à leurs valeurs primitives par voie de dissociation, c’est-à-dire en laissant les réactions s’accomplir librement. Soit, par exemple, le système CaO + CO? formé de chaux et d'acide carbonique; ce système est hors d'équilibre à la pression et à la tempéra- ture ordinaires ; pour le ramener, par voie réversible, à l'état d'équilibre, on chauffera les deux corps séparément jusqu’à la température de 8129 qui est la température de dissociation sous la pression atmosphérique, puis on mettra les corps en présence, et on laissera l’ensemble revenir à la température ordinaire. La chaux et l’acide se combinecront alors pour former le système Ca0.CO0? en équilibre sous les Tensions ordinaires. conserve toujours les mêmes tensions /, et p,, l'é- nergie #, varie proportionnellement aux variations: de volume et d'entropie du milieu, et par suite aux variations de volume v et d’entropie s du système prises en signe contraire, car les unes et les autres sont égales en valeur absolue. On a done : 1 Uy = — (sl — up) et par conséquent : T = üu — st + vp C’est la fonction H’ de M.[Massieu, appliquée à la transformation chimique sous tensions fixes. | Grâce à cette notion du potentiel, le principe” de Clausius peut s'exprimer simplement en disant que dans une #ransformation spontanée d'un SyS- tème chimique dans un milieu à tensions fixes, le. potentiel du système diminue. Il devient mini: mum quand l'équilibre stable est atteint, car, par. définition, le système écarté de sa position d’é- ‘quilibre stable y revient spontanément; dans le cas d'équilibre instable, le potentiel serait maxi- mum ; il est constant si l'équilibre est indifférent. On peut donc énoncer les lois suivantes sur l’é= quilibre et le mouvement : Critérium d'équilibre. — Pour qu'un système chi- mique soit en équilibre, à faut et il suffit que l'on ait : . du = tds — pdv pour toule transformation quelconque infiniment petite du système. L'énergie utilisable est, dans ce cas, un infini- niment petit du second ordre, négalif, si l’équi- libre est instable, positif, s’il est stable. Dans l’é- quilibre indifférent, celte quantité est du troisième ordre, ou bien nulle. Loi du mouvement chimique. — Quand un système chimique est hors d'équilibre, la transformation chi- mique qui s'accomplira, sans l'intervention d'énergie étrangère, à pression et température extérieures cons- tantes, sera celle pour laquelle on a : EP TT et PU an D Éd du — tds + pdv L0 c'est-à-dire que l'énergie utilisable est positive. On peut déduire de ces expressions une formule intéressante parce qu’elle comprend la chaleur la- tente de réaction rapportée à l'unité de masse. Le principe de Joule nous fournit en effet la relation : Ldm = du + pdv dm étant la masse transformée, Lam la chaleur ab- sorbée. On peut donc écrire : dr = Ldm — tds quantité qui n’est pas nulle, quand le système est hors d'équilibre, A l’état d'équilibre, car dr est nul, on a : las dm E a , H. LE CHATELIER ET G. MOURET. — LES ÉQUILIBRES CHIMIQUES 141 “formule qui montre que la chaleur latente est pro- “portionnelle, dans ce cas, à la variation d’entropie. h Il Energie chimique. — L'énergie utilisable d’une transformation infiniment petite d’un système à l'état d'équilibre a une expression simple. Soit un système à l’état d'équilibre chimique sous les ten- “sions y et { du milieu. Faisons varier sa composi- “tion chimique, c’est-à-dire son degré de dissocia- tion, d'une quantité din; l'énergie utilisable du système écarté ainsi de sa position d'équilibre, dans le milieu à tensions p et #, a pour valeur : du — tds + pdv du, ds et dv, élant les variations correspondant à un changement de composition chimique du sys- tème passant de la position d'équilibre à la posilion hors d'équilibre. Si maintenant le système, pris dans son état initial est placé dans un milieu dont les lensions p + dp, t + dt, sont égales aux tensions d'équi- libre de l’état final, son énergie utilisable est égale à — du + (t+ dt ds — (p + dp) do. Or ces deux énergies utilisables sont égales à un infiniment petit du second ordre, et par suite cha- cune est égale à la demi-somme des deux quantités précédentes, c’est-à-dire que l'énergie utilisable du système quand il est à un état infiniment voisin de l’état d'équilibre, a pour expression : E = 3 (dt.ds — dp.dv) Dans cette formule dé et dp sont les variations des tensions de dissociation, et ds et dv sont les variations de volume et d'entropie uniquement dues à la transformation chimique à tensions fixes; toutes ces variations étant mesurées dans le sens suivant lequel on s'éloigne de la position d’équi- libre. Puisque la quantité « est l'énergie utilisable du système amené à l’état hors d'équilibre chimique, c’est une quantité toujours positive si l'équilibre est stable. Dans ce cas, on peut donc écrire la rela- tion suivante : ds.dt — dv.dp > 0. On peut mettre encore cette formule de dissocia- tion sous une autre forme, plus directement appli- cable aux recherches chimiques. Désignons par L la chaleur latente dégagée et par N le travail accompli dans la transformation chimique qui s'effectue sous les tensions extérieures fixes p et {, quand les Tensions initiales du système sont ÿ — dp et + dt. On a Ldm = tds (voir précédemment) N = — pdv et par suite l'énergie chimique latente, pour une va- riation de tensions df, dp, a pour expression : Ê fL N — —5(- dt — d ) dm (7 Get p 4 t quantité toujours positive, en sorte que la relation devient : Ldt : Ndp l p > 0 Loi sur le sens des réactions réversibles. — Les données de la thermochimie font connaître les quantités de chaleur et de travail mises en jeu dans une transformation chimique s’accomplissant dans un sens déterminé, et les signes de ces quantités. Si d'autre part on se donne les varialions d et dt des tensions on voit que la formule permet de déterminer le signe des quantités Let N et par suite le sens de la transformation chimique qui s’accomplit sous l’action d’une variation donnée des tensions. Quand une seule des tensions varie, on peut énoncer sous une forme très simple la loi sur le sens des transformations. Si en effet dans la for- mule ci-dessus on fait dp — 0, où dt — 0, on obtient les relations suivantes : Ldt> 0 ou Ndp > 0 c'est-à-dire que les signes de L et deNsontrespec- tivement les mêmes que ceux de dp et de dt. On peut donc énoncer la loi suivante : Quand un système chimique est en équilibre, si lon augmente l'une des tensions, l'autre restant constante, la réaction chimique qui s'accomplit est celle qui se fait avec une absorption d'énergie latente de même espèce que celle de la tension qui a varié. Si cette énergie latente est nulle, la variation de tension est sans influence sur l'état chi- mique du système. C'est ainsi qu'une augmentation de pression en- traine la réaction qui répond à une diminution de volume (fusion de la glace, transformation de l’io- dure d'argent, dissolution du chlorure de sodium, précipitation du chlorhydrate d’ammoniaque, etc.); — qu'une élévation de température provoque une transformation avec absorption de chaleur (vapo- risation, décomposition du carbonate de chaux, dissolution de l'hydrate de baryte, précipitation de l'hydrate de chaux, ete.). Quand la chaleur latente est nulle, une varia- tion de température ne trouble pas l'équilibre (dissolution de sulfate de chaux hydraté, vers 35°), et quand la transformation chimique s’accomplit sans changement de volume, l’état d'équilibre n'est pas modifié par une variation de pression (combinaison de l'iode et de l'hydrogène). 142 H. LE CHATELIER ET G. MOURET. — LES ÉQUILIBRES CHIMIQUES La loi de Lenz, l'effet Peltier sont des exemples d'application de cette loi dans le domaine de l’é- lectricité. Loi d'isodissociation. — En général, des variations simultanées de pression etde température modifient l'état chimique d’un système en équilibre. Mais si ces variations ont entr’elles un certainrapport, l'état chimique reste invariable. Il ÿ a ce que l'on peut appeler isodissociation ; le système chimique, sans qu'aucune liaison intérieure S'oppose à la transfor- mation chimique, se comporte cependant comme un système au repos. Dans ce cas, l'énergie utilisable de transforma- tion chimique est nulle et l’on a par conséquent la relation dt dp 2% L—+N (l] AE n Cette formule d'isodissociation fait connaitre la direction d'isodissociation, c’est-à-dire le rap- port qui doit exister entre les variations de tem- pérature et de pression, pour que le système conserve toujours le même état chimique !, Cette forinule, établie d’abord pour les phéno- mènes de vaporisalion, avait été étendue ensuite à la dissociation des systèmes à tensions fixes. On voit, comme l’un de nous l'avait déjà montré, qu'elle est absolument générale et applicable aux systèmes homogènes; elle subsiste, d’ailleurs,même dans le cas où l'équilibre serait instable. La formule d'isodissociation trouve des appli- cations pratiques dans le calcul des variations des points de transformation des corps (fusion de la glace, transformation de l’iodure d'argent, ete.). II] Les lois sur le mouvement chimique et sur la dissociation ont trail uniquement aux relations qui lient les lensions extérieures à l’état du sys- tème chimique considéré comme un tout. Mais un système chimique est un tout complexe, soit qu'on le considère comme formé par des éléments homo- gènes distincts, s’il est hélérogène, — soit, s'il est homogène, qu'on le considère comme constitué par des composés chimiques, engagés dans le mélange. Et il convient de rechercher les relations qui exis- tent entre l’état des éléments constituants lorsque l'équilibre est établi, c’est-à-dire de définir les condilions d'équilibre intérieur. On doit étudier d’abord l'équilibre des systèmes à tensions fixes, puis l'équilibre des systèmes ho- 1 Pour tenir compte des changements d'état électrique, il faudrait ajouter, sans avoir rien à modifier aux démonstra- j W de tions, le terme de ———, W étant l'énergie électrique de trans- e formation chimique, et e la force électromotrice. On retrou- Yérait ainsi la formule des piles, établies par le Professeur +*on Helmholtz, mogènes, ceux-ci pouvant être ramenés à ceux-là Systèmes à tensions fires. — Dans les systèmes à tensions fixes, l’état chimique de chaque élément libre homogène du système reste invariable, quelle que soient les modifications chimiques subies pan le système. Or il est aisé de voir que si l’on con= vient de définir l'énergie et l'entropie d’un système de masse variable, mais à un état physique et chimique invariable, comme proportionnelles à la masse —, l'énergie, l’entropie, et par suite le potentiel d’un système à tensions fixes sont res- pectivement égaux à la somme des énergies, en- tropies et potentiels de ses éléments. Il suffit, pour qu'il en soit ainsi, que toutes ces quantités soient" rapportées à un même état initial d'équilibre du système. Cette conclusion s'établit facilement quand l’état chimique du système varie sans que ses tensions varient, et aussi quand les tensions varient sans que l’état chimique soit modifié ; par suite elle est vraie pour une transformation ré= versible quelconque. Or, dans un système du genre de ceux que nous considérons, une transformation chimique réversible à tensions fixes, s'accomplit sans variation de potentiel. Done, si les élats li- miles sont des composés définis, le potentiel de chaque composé est le même. D'où cette loi que : La condition nécessaire et suffisante d'équilibre inté- rieur d’un système à tensions fixes est que les potentiels des états opposés du système, rapportés à des masses égales, soient égaur. Ainsi les potentiels de deux états différents d’une substance à son point de transformation, sont égaux, si l'on a soin de mesurer les entropies et l'énergie comme il vient d’être dit, On lire de là le corollaire connu sous le nom de Loi du point triple : lorsque deux corps ou systèmes chimiques font équilibre à un troisième système, ils se » C'iré =eretbe GS 27 ee eyh dmatyte bei: font équilibre entre eux. C'est ainsi que l’eau et la glace, à la température où leurs Lensions de vapeurs sont égales, sont res- pectivement à leur point de fusion et de congéla- tion, et les trois points de transformation se con- fondent en un seul, qui est le point triple. Pour l'eau, la tempéralure du point triple est très voi- sine de zéro, Dans les dissolutions salines, où le changement de volume dû à la dissolution est peu considérable, le point triple est aussi voisin du point de transformation. Systèmes homogènes. — Pour appliquer la condi- tion générale d'équilibre de minimum du potentiel aux systèmes homogènes de composition variable, il faut tenir compte des éléments engagés dans le mélange, et établir la relation qui doit exister entre la composilion du système à l’état d’équi- libre, et la valeur de son potentiel. Or il est toujours possible de concevoir qu’on ! puisse passer par voie réversible d'un état initial homogène À à un état final hétérogène B qui ne diffère de l’état inilial, qu'en ce qu'une masse infiniment petile dn, de l’un des éléments, a été isolée du système homogène. Pratiquement, cette transformation réversible peut s’accomplir par osmose, liquéfaction, cristallisation; il est facile ensuite d'imaginer des liaisons s’opposant au mé- lange de la masse séparée dm ou même simplement de l’isoler complètement du système B. Il est évidemment possible, dans ce cas, de donner à la masse dm des tensions / et p, telles que le potentiel de l’ensemble hétérogène formé du système B'pris sous les mêmes tensions que le système À, et de cette masse 4m, soit égal au po- tentiel du système A. Rien ne s'oppose alors à ce qu'on définisse l'état de l'élément engagé dans le système homogène, par l’état de la masse infini- ment petite isolée, salisfaisant à cette condition. De cette manière, le potentiel total n'a pas varié dans la transformation réversible, et le potentiel de l’élémentengagé dans le mélange, potentiel rap- porté à l'unité de masse, est égal à celui du système. Grâce à ces conventions, les transformations infi- niment petites d’un système homogène sont sou- mises à la même loi que celles des systèmes à ten- sions fixes, et cette loi peut s'appliquer dès que l'expérience a permis de mesurer les tensions £ et p, qui caractérisent l’état de l'élément considéré. Il est d’ailleurs à remarquer que la condition qu'on s'estimposéene suffit pas pour définir com- plètement ces tensions, et qu'il faut y ajouter une autre condition. Du choix de cette condition dé- pend la simplicité des formules et des lois. Loi de l'action de masse. — Si, par exemple, l’on admet que la température de la masse isolée reste la même que celle du système homogène, on a pour la condition d'équilibre, en procédant comme on l’a déjà fait pour élablir la formule d'isodis- sociation, la relalion : eu D FE TT?) Vi — Vo) dp = où L est la chaleur latente de réaction à tensions fixes correspondant à un changement chimique din ; — (v,-v,) les changements de volumes de chaque corps isolé, mesurés sous des tensions individuelles peté, quirésultent du changement chimique dm, — dp les variations de pression qu'il faut faire subir à chaque corps isolé pour maintenir l'égalité du potentiel dusystème des corpsisolés et du mélange quand la pression ou la composition de ces derniers varie. Cette formule, établie dans le cas où la masse des éléments en présence est invariable et où leur état de combinaison seul varie, est encore exacte pour H. LE CHATELIER ET G. MOURET. — LES ÉQUILIBRES CHIMIQUES 143 le cas où la masse des éléments varie ; cela résulte de ce que l’on peut, après avoir isolé du mélange un certain nombre de corps, faire varier leur masse sans troubler l’état d'équilibre du système total. Dans les cas particuliers desmélanges de gaz par- faits, on verrait aisément que les pressions à attri- buer à chaque gaz composant sont celles qu'ils auraient s'ils occupaient le volume total du mé- lange. En attribuant cette valeur à la pression, on trouve pour la condition d'équilibre des systèmes formés de gaz parfaits, la relation : dp - LE Neue = + ReN Die) Z e LT+N pi dans laquelle Rest laconstante des lois de Mariotte et de Gay-Lussac déterminée par la formule : pu—= Ré el rapportée à une molécule du gaz. n, lenombre de molécules de chacun des gaz qui apparait ou disparait par le fait de la réaction dé- gageant{ les énergies latentes L et N. e, le rapport du volume de chaque gaz au volume total du mélange, volumes mesurés l’un et l’autre sous les mêmes tensions. Loi du point triple. — La possibilité d'isoler ainsi les divers éléments d’un mélange par voie réver- sible, permet également d'étendre à ce système la condition d'égalité des potentiels des états opposés d’un système en équilibre, et par suite la loi du point triple, déjà établie pour les systèmes à ten- sions fixes. Cette loi du point triple, étendue aux systèmes homogènes, comporte des applications pratiques nombreuses et importantes. Par exemple, dans un système complexe formé de vapeur d’eau, acide carbonique, hydrogène et oxyde de carbone, la condition d'équilibre pourra être déduite des lois de la dissociation de l’acide carbonique et de la vapeur d'eau, pris isolément. IV Résumant les applications des principes de la Thermodynamique, on peut énoncer leslois géné- rales suivantes, qui régissent les transformations des systèmes chimiques quelconques : À. La transformation chimique qui s’accomplit à tensions fixes, sans l'intervention d'énergies étran- gères autres que celles échangées avec le milieu est celle qui répond à une diminution de potentiel, quantité exprimée par la formule T—=U— SI Up où w, s, el, sontl’énergie intérieure, l'entropie et le volume du système, { etpla température et la pression du milieu. C. X. — L'ŒUVRE DU 144 NIVELLEMENT GÉNÉRAL DE LA FRANCE 2, Pour qu'un système chimique soit en équili- bre, il faut et il suffit que le potentiel soil mini- mum,maximum ou constant. 3. Quand les lensions de dissocialion varient de dp et dt, la transformation qui s’accomplit est celle pour laquelle l'énergie utilisable chimique est posi- üve, c'est-à-dire celle pour laquelle on a la relation : I dt .dp = 5 —+N — Ta P (] où L et N sont les énergies de transformation chi- mique, chaleur latente el travail,pet { les tensions. En particulier : si la pression seule augmente, la température restant constante, la transformation chimique qui s’accomplit est celle qui comporte une contraction de volume; — si la température augmente, la pression restant constante, la trans- formation chimique estcelle quise fait avec absorp- tion de chaleur; — si la chaleur latente est nulle (ou si la réaction se fait sans changement de volume), une variation de température (ou une variation de pression) est sans aclion sur l'élat chimique du système. : 4. Pour qu'il y ait isodissociation, c’est-à-dire pour que les varialions simultanées des tensions de dissociation ne puissent pas modifier l'état chi- mique du système supposé libre de toute liaison, il faul que ces variations satisfassent à la relation dt dp L—+N t p 0. 5. Pour qu’un système chimique homogène ou à tensions fixes soit en équilibre, il faut, et il suffit, que les potentiels de ses éléments, rapportés à l’u- nité de masse, soient égaux. entre eux. Ces lois, en y joignant celle qui a trait à l’action de masse dans les systèmes homogènes, représen- néraux de la thermodynamique dans les applica- cations chimiques. Mais elles ne suffisent évidem- ment pas pour déterminer d’une facon complète les conditions des réactions. Il existe sans aucun doute des principes expérimentaux spéciaux à la chimie qui achèvent de définir ces conditions ; mais ces principes sont encore complètement inconnus, et en dehors dela loi des tensions fixes, nous n’en connaissons que quelques cas parliculiers (lois des gaz parfaits). 1l reste donc encore, au double point de vue expérimental et théorique, beaucoup à faire dans le domaine de la mécanique chimique pour rendre, au moins dans une certaine mesure, cette science.comparable, par ses méthodes, à la méca- nique ralionnelle. H. Le Chatelier, lugénieur ea chef des Mines, G. Mouret, Ingénieur des Ponts et Chaussées. L'ŒUVRE DU NIVELLEMENT GÉNÉRAL DE LA FRANCE Les nivellements généraux se multiplient de plus en plus sur la surface de l'Europe, on pour- rait mème dire du monde,-puisque le Japon lui- même a commencé sa triangulation depuis cinq ou six années. Mais, fiers à juste titre de l'exemple que nous avons donné, nous ne devons point laisser oublier que c’est la France qui a ouvert la voie aujourd’hui universellement"suivie. Il n’est point nécessaire d’insister sur l'urgence de connaitre exactement le relief du sol pour l'étude comme pour la construction des voies de commu- nicalion, l'aménagement des eaux, la défense du territoire. De toute obligation des nivellements spéciaux doivent être exécutés pour les divers travaux de l’art de l'ingénieur. Il faul au point de départ une base à ces nivellements spéciaux, et le nivellement général de tout un pays a précisément pour but de fournir une base certaine, de facililer ainsi ces éludes, d’en assurer l'exactitude. Le premier nivellement d'ensemble de la France fut confié à l'ingénieur Bourdalouë : c'est lui-même qui, après avoir doté le département du Cher d'un nivellement général, avait proposé d'entreprendre un travail semblable pour chacun des départe- ments; il s'était déjà fail connaître par des per- fectionnements notables apportés aux instruments travail énorme qu'il entreprenait. Un nivellement général doit comprendre une {ri- ple opération : 1° Établissement d’un réseau prin- cipal de lignes de base, tracées de facon à pénétrer dans tous les départements et procurant pour les nivellements ultérieurs des repères rapportés à une même surface du niveau; 2 établissement de réseaux secondaires dans les grands comparti- ments formés par les lignes de base ainsi tracées ; — 3° enfin nivellements de détail. De 1857 à i864 Bourdalouë terminait la première partie de ce tra- | vail:les lignes de base avaientun développement de 14.980 kilomètres, suivant les principaux fleuves, les canaux navigables, les grandeslignes de chemins de fer, reliant entre eux tous les chefs-lieux de dé- partement de la France continentale ; le tracé en était indiqué par des repères immuables portant De là s'ensuit que deux systèmes chimiques qui font équibre à un troisième et qui sont suscepti=" bles de passer de l'un à l’autre, se font équilibre" tent tout ce que l’on peut tirer des principes gé- comme aux méthodes de nivellement. C'était un C. X. — L'OEUVRE DU NIVELLEMENT GÉNÉRAL DE LA FRANCE 145 d'ordinaire l'altitude inscrite, la distance entre deux repères consécutifs étant environ de 1 kilomètre. Chacune des lignes principales était parcourue et nivelée trois fois par deux opérateurs observant indépendamment l’un de l’autre. On se servitexelu- sivement de grands niveaux à bulle et à lunette,en procédant par visées horizontales, avec une portée de coup de niveau de 125 à 130 mètres ; on faisait usage de mires parlantes divisées en parties de 0%02 de hauteur ; l'objectif de la lunette avait une longueur focale de 0"48; enfin les niveaux, rela- tivement très sensibles, donnaient de 3" à 7" par millimètre de course de la bulle, permettant d’ap- précier 1” d'inclinaison. On avait obtenu .des résultats d'une précision inespérée pour celte époque; les divers polygones formés par les li- gnes du réseau se fermaient avec de très pelils écarts, et l’on pouvait être autorisé à conclure qu'aucune des altitudes obtenues n’était affectée d'une erreur dépassant trois centimètres. Les résultats oblenus par Bourdalouë avaient été réunis en un volume spécial les présentant par département.Mais notons un pointintéressant : toutes les allitudes relevées par Bourdalouë ont élé rapportées au riveau moyen d'abord de l'Océan à Saint-Nazaire, puis de la Méditerranée à Mar- seille. Cette mer n'a que des mouvements peu sen- sibles, et l’on a été conduit à prendre comme ni- veau moyen la surface du niveau passant à 0740 au-dessus du 0 de l'échelle des marées à Marseille. Mais les résultats obtenus par Bourdalouë avaient besoin d'être complétés; puis, tels sont les progrès - de la science que l’on pouvait, quatorze ans à peine après les travaux si remarquables de cet in- génieur, légitimement aspirer à une précision bien plus grande dans le nivellement. Aussi, en 1878, une Commission élail-elle nommée pour arrêter les bases d’un nivellement général de la France ré- pondant mieux aux besoins, en rapport avec l’état actuel de la science. Cette Commission fontionne par l'intermédiaire d’un Comité émané de son sein et composé d’autorités scientifiques, MM. Cheys- son, Goulier, Durand-Claye, Prompt, Lallemand ?. D'après le programme de 1878, le nivellement doit s'étendre à tout le territoire, de manière à fournir 12 à 15 points de repère parfaitement défi- nis par commune, permetlant l'établissement de cartes à grande échelle indiquant le relief du sol dans tous ses détails. Les opérations ont été répar- lies en trois ordres, et on a établi pour chaque 1 Ministère des Travaux Publies. Nivellement général de la France. — Réseau fondamental. — Répertoire graphique défi- nissant les emplacements et altitudes des repères. — 4er Li. vraison Opérations effectuées sous la direction de M. Lalle- mand, président de la Commission du nivellement pendant les campagnes de 1884, 1835 et 1886. — Un volume grand in-4°, 32 grandes planches, Marchadier et Cie, 150, rue de Lafayette, ordre la nécessité d’une précision différente. On doit obtenir : 1° Un réseau de premier ordre, ou réseau fondamental, d’un développement de 12.000 ki- lomètres environ, composé de lignes se recoupant pour former des polygones de 400 à 500 kilomètres de contour chacun; pour ce réseau il faut la plus grande précision qu'il soit possible d'atteindre, justement parce qu'il est fondamental. 2 Un ré- seau de deuxième ordre ou éntercalaire, de 800.000 ki- lomètres environ de développement; il embrasse les cours d’eau, les voies de communication, comme avait fait Bourdalouë; les lignes en sont transver- sales et s'appuient sur le réseau fondamental. Bien entendu, une exactitude moins rigoureuse est suffi- sante ici. 3° Pour définir complètement la configu- ralion du sol, on relèvera une série de courbes de niveau rattachées aux deux réseaux et suffisam- ment rapprochées. La France se trouve divisée, pour l’établisse- ment du réseau fondamental, en #3 polygones, dé- signés chacun par une lettre ; chacun des côtés communs à deux polygones forme une section du réseau fondamental, et cetle section est dési- gnée par les deux lettres représentant les deux polygones adjacents. Avant loule opération, on scelle les repères fixes aux endroits qu'ils doivent occuper; on intercale du reste des repères provi- soires entre les repères définitifs, généralement éloignés de 500 à 1.000 mètres. Le nivellement de chaque section est fait deux fois en sens inverse, aller et retour, les opérations d’une même journée étant limitées à une section. Au début ou à la fin d'une section aboutissant à d’autres sections anté- rieurement nivelées, où à la rencontre d’une ligne appartenant au réseau Bourdalouë, on rattache les nouvelles opéralions aux anciennes, en recommen- çant le nivellement entre deux ou plusieurs des repères anciens les plus proches, pour contrôler leur invariabilité depuis leur scellement. Puis les résultats sont soumis à un travail de bu= reau, à des calculs pour vérifier l'exactitude des opérations; on recommence le nivellement qui a fourni des différences partielles de niveau à l'aller et au retour, entre deux repères consécutifs, ne concordant pas suffisamment. Les repères employés diffèrent complètement, quant à leur forme, des repères actuellement en usage et notamment de ceux du nivellement Bour- dalouë. Ceux-ci avaient la forme d’un cylindre en fonte peinte à génératrices horizontales, faisant une légère saillie sur le plan des murs où ils sont scel- lés, et portant dans leur milieu un peu évidé la cote d'altitude. Les nouveaux repères se composent d’une console en bronze ou en fonte oxydée, faisant une forte saillie sur les murs ; au-dessus et plaqué contre le mur est une tablette verticale en fonte. La s 146 C. X. — L'OEUVRE DU NIVELLEMENT GÉNÉRAL DE LA FRANCE console porte une pastille en forme dé calotte sphé- rique, et la mire trouve ainsi un point d'appui fixe; la cote correspond à un point bien déterminé, le sommet de la calotte ; la pastille est assez éloignée de la paroi pour que la mire puisse être tenue verli- calement, le milieu du {talon correspondant au som- met de la pastille. Deux cavités ménagées, l’une sur la face antérieure de la console, l’autre sur la tablette verticale appuyée contre le mur ou la cons- truclion en général où est scellé le repère, sont destinées à recevoir des plaques de porcelaine où seront inscrits, d'une part le #atricule du repère, composé à la fois de l’ensemble des lettres défi- nissant la section à laquelle il appartient, et du chiffre indiquant sa place dans cette section; d'autre part l'altitude du sommet de la pastille. La tige en T de ces repères est scellée au ciment dans les parois verticales de constructions solides, im- muables par leur nature. Outre ces repères princi- paux, on place, ‘sur le seuil de certains bâtiments et sur les plinthes des ouvrages d'art, des repères secondaires formés de simples rivets en bronze. Les niveaux employés aux opérations sont du type connu sous le nom de niveaux à fiole indépen- dante, avec quelques améliorations spéciales, no- tamment au pied; le pivot de l'instrument peut être plus aisément amené dans la verticale. Pour per- fectionner le niveau à bulle d'air, on y a simple- ment ajouté quatre prismes isocèles rectangles à réflexion totale, servant de muroirs, el renvoyant à l'œil de l’observateur placé près de l’oculaire l'i- mage des extrémités de la bulle d’air et des divi- sions correspondantes de la fiole; l'observateur vérifie ainsi lui-même, sans déplacement, l’exacti- tude du calage de la fiole. Les mires sont du système compensateur, permettant de connaître à tout mo- ment la longueur réelle de la mire et, par suite, la valeur rigoureusement exacte des lectures faites ; la longueur de la mire peut varier de plusieurs centimillimètres par mètre. Au 31 décembre 1889, la longueur totale nivelée des lignes du réseau fondamental était de 7.945 ki- lomèires. Aujourd'hui près des 2/3 du réseau fon- damental sont achevés, et l’on peut en espérer l'achèvement complet pour 1892: il reste le travail à faire sur 4.355 kilomètres. La précision obtenue est à peu près triple de celle des opérations de Bourdalouë; l'erreur aeci- dentelle probable est de 0001 par kilomètre, en moyenne. L'erreur svstématique probable ne dé- passe nulle part 03 par kilomètre. Le nouveau réseau fondamental est dès à présent relié avec le nivellement suisse à la Cure et Anne- masse, avec le réseau italien à Vintimille, avec le nivellement espagnol aux deux extrémités de la chaine des Pyrénées, à Hendaye et au col de Per- thus; enfin les rattachements sont fails avec la Belgique à Baisieux et Blanc-Mineron. D'autres rat- tachements sont préparés à Ghyneld, Givet, Mont- Saint-Martin, Ars-sur-Moselle, Avricourt, Petit- Croix, Delle, Morteau, Bardonnèche, Mont-Ge- nèvre, enfin Bomport en pleines Pyrénées. Les nouvelles opérations ne coûtent que 32 francs par kilomètre, tandis que le kilomètre des opé- rations de 1857-64, revenait à 50 francs. Le réseau fondamental nouveau croise déjà le réseau Bourdalouë en un grand nombre de points, el des comparaisons ont pu facilement s'établir. Pour la partie du réseau terminé au 1°" janvier 1888, M. le colonel Goulier a rapproché les altitudes an- ciennes et nouvelles des repères communs aux deux réseaux; et il a mis en reliefune discordance qui, avec quelques alternalives, va en croissant de Marseille à Lille; à Marseille, elle est de 007, simplement égale à la différence des niveaux de comparaison des deux réseaux; à Lille, elle atteint environ 0"80. : Depuis 1877 est institué un Service de conser- valion des repères confié aux ingénieurs des Ponts et Chaussées; ce Service a eu à faire remplacer ou reposer 930 repères; enfin il a été publié deux édi- tions des rectifications au catalogue des repères Bourdalouë, l’une en 1881, l’autre en 1888. Le nouveau service du nivellement (nous disons nouveau par rapport à Bourdalouë), publie tout naturellement, lui aussi, un Recueil de ses travaux, un calalogue des altitudes trouvées, des repères posés, sous la forme d'un répertoire graphique : ce répertoire est constitué par un plan itinéraire du nivellement reporté sur des feuilles successives : chaque repère est figuré à sa place sur ce plan par un point accompagné du matricule du repère ; dans la marge, des croquis représentent le profil du repère, l'élévation du bâtiment qui le porte et la position qu'il y occupe; le premier volume de ce nouveau répertoire vient de paraitre. Ce rapide aperçu aura suffi, nous l’espérons, à donner une haute idée de l’œuvre accomplie et du programme qu'on se propose de remplir complète- ment : la France qui s’est mise à Ja tête des na- tions dans le mouvement en faveur des nivelle- ments généraux, qui la première a heureusement accompli le sien avec l'ingénieur Bourdalouë, la France à su conserver sa place ; elle peut être fière du développement qu'ont pris les nivellements de précision en Europe, puisqu'elle en a été l'initia- trice. : GARXETE BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 141 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Mangeot M,-S.— Dela symétrie courbe. — Thèse souténue devant la Faculté des Sciences de Paris le 22 jan- vier 1891, Gauthier- Villars et fils. En géométrie élémentaire on étudie les figures sy- métriques par rapport à un axe, par rapport à un point ou par rapport à un plan. Deux figures symétriques par rapport à un axe sont égales; il n’en est pas de même, en général, de deux figures symétriques par rapport à un point ou un plan : ces figures ont leurs éléments de volumes, surfaces et longueurs équivalents, mais autrement disposés. M. Mangeot étend cette notion de symétrie de la fa- con suivante 4 Soit une surface S donnée ; deux points sont appelés symétriques par rapport à cette surface quand la droite qui Les joint est normale à S et divisée par elle en deux parties égales, Deux RASE sont dites symétriques par rapport à la surface S, quand leurs points sont deux à deux symétriques GA rapport à S : on suppose, dans cette délinilion, que si deux points de Pune des figures sont infiniment voisins, on choisit comme normales issues de ces deux points deux nor- males infiniment voisines, de telle manière que les deux points symétriques soient aussi voisins, On re- trouve évidemment les trois modes élémentaires de symétrie en supposant que la surface S se réduise à un axe, un point ou un plan. M. Mangeot .est naturellement conduit à deux pro- blèmes principaux : 1° Etant donnée une figure, trouver ses surfaces de symétrie, certaines de ces surfaces pouvant, bien en- tendu, se réduire à des lignes droites ou courbes, ou même à des points, 2 Etant donnée une surface, étudier les propriétés des figures symétriques par rapport à cette surface. Le premier problème est résolu par M.Mangeot, pour les courbes et surfaces du second ordre, à l’aide de formules simples dont quelques-unes avaient déjà été obtenues par Monge : comme application, lPauteur dé- termine, parmi les surfaces de symétrie d’une qua- drique, celles qui sont algébriques, celles qui sont ré- glées, celles qui sont d’étendue minimum; ces dernières ne peuvent exister que si la quadrique estune surface de révolution ou un cylindre parabolique. Dans le deuxième problème, l'étude des figures sy- métriques par rapport à une surface donnéeS, l’auteur a principalement porté son attention sur les cas dans lesquels certains des éléments des deux figures symé- triques,éléments de longueurs,de surfaces ou de volumes sont équivalents. Lorsque cette condilion est remplie, M. Mangeot dit qu'il y a symétrie matérielle pour les lignes, Tes aires, ou les volumes, Envisagé à ce point de vue, le problème a de nombreux points de contact avec la théorie des déblais et des remblais des lignes, aires ou volumes, L'auteur se trouve ainsi amené à (traiter incidemment certaines questions de la théorie des dé- blais et des remblais, par exemple à rechercher les sur- faces dont les normales découpent des aires équiva- lentes sur un cylindre de révolution; la détermination de ces surfaces se ramène à l'intégration d’une équa- tion linéaire aux dérivées partielles, identique à son adjointe, que l’on peut intégrer par la méthode de Rie- mann, comme l’a déjà montré M. Boussinesq. Pour donner une idée de la nature des théorèmes établis dans cette seconde division de la thèse, nons citerons le suivant dont Steiner et M. Goursat avaient indiqué une partie : Soit S une surface d'étendue müvimum ; ilest ET INDEX possible de construire, d'une infinité de facons, deux figures continues, symétriques par rapport à cette surface et pré- sentant la symétrie matérielle dans toutes leur parties, vo- lumes, faces el arêtes : cette proposition confirme, sous le point de vue de la symétrie, l’analogie bien connue entre le plan et les surfaces d’étendue minimum. P, APPEL, Æhomzæ (Johannes), in Jena. — Abriss einer Theorie der functionen einer complexen Veranderlichen und der Thetafunetionen. rite, erheblich ver- mehrte Auflage. Mit in den Text eingedruchten Holz- schnitten und 1 lithogr. Esgurentafel. Halle a. S, 4890; Verlag von Louis Nebert grand in-4° de 144 pages. La troisième édition de l’esquisse d'une théorie des fonctions d'une variable complexe et des fonctions Theta que vient de publier M. Thomæ diffère sur plus d'un point de celles qui l'ont précédée; certaines parties, devenues tout à fait classiques, presque élémentaires, ont été réduites, tandis que les fonctions doublement périodiques et les intégrales elliptiques sont traitées avec un plus grand déy eloppe ment. Sous Sa nouvelle forme l'ouvrage du savant pro- fesseur de l'Université d'Iéna s'adresse spécialement à ceux qui ont déjà des connaissances assez étendues sur ces matières ; ce nest pas un livre destiné à initier les débutants; mais, sous sa forme concise, il rendra de grands services à ceux qui, ayant des notions exactes sur fonctions elliptiques, voudront connaitre les propriétés fondamentales des fonctions théta, Après avoir rappelé dans un premier chapitre les propositions RsÈte nsables à posséder de la théorie des fonctions, Thomæ aborde les fonctions double- ment dd des. puis il examine successivement les intégrales de première, de deuxième et troisième espèces. L'ouvrage se termine par une collection de formules qui lui donnent nettement un caractère pratique; c’est d’ailleurs ce caractère que l'auteur à cherché certainement à réaliser ef qui constitue l'utilité de sa publication à côté des œuvres considé- rables et nombreuses que Pon possède sur ce sujet. IÉPNO). Caspari (M.E.), secrétaire. — Congrès internatio- nal de Chronométrie. — Comptes rendus des travaux, procès-verbaux, rapports et mémoires, publiés sous les aus- pices du bureau du Congrès, Gauthier- Villars et fils, 55, quai des Grands-Augustins, un vol, grand in-4 de 213 pages, 1890, 7 fr. 50 Le Congrès international de Chronométrie qui, à l’occasion de l'Exposition Universelle, s’est réuni à l'Observatoire de Paris le 7 septembre 1889, a tenu, sous la présidence du regretté Phillips, six séances fort importantes pour les progrès de la Chronométrie ; les comptes rendus qui viennent de paraître en font foi. Nous ne pouvons songer à donner ici une appréciation détaillée de tous les Mémoires qu'ils contiennent et nous devons nous contenter d'en énoncer les titres : Note sur l'horlogerie à l'Exposition de 1889, par M. Paul Garnier, — Rapport sur la question : construc- tion des pièces chronométriques par M. Ernest Antoine. — Sur la production mécanique en chronométrie, par M. Rodanet. — De la compensation des températures dans les thermomètres, par Phillips. — Rapport sur les perturbations et le réglage des chronomètres, par M. Éespot — Note complémentaire sur l’isoc hronisme, par M. Caspari, — Sur la construction et le réglage des chronomètres et montres de précision, par M. PROZÉ. — 148 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Etude sur les programmes des concours pour l’acqui- sition dés chronomètres, par M. Rollet de l'Isle. — Expé- riences et observations sur les chronomètres de la ma- rine néerlandaise, par M, leD'Kaiser, — Sur les varia- tions dans la marche deschronomètres en dépendance des changements dans l'amplitude des oscillations du ba- lancier par M. Nyrén. — Sur l'emploi des chronomètres à la mer et les perturbations de leurs marches, par M. Aved de Magnac. — Sur l’emploiet les variations des chronomètres à la mer, par M. Mouchez. — Note sur la méthode chronométrique, par M. Serres, —Sur le ré- glage des balanciers de chronomètres et la synchroni- sation, par M. Cornu, — Exposé sommaire des travaux qui ont été faits à l'Observatoire de Paris pour le ré- glage électrique des horloges, par M. Wolf. — Le Télé- chronomètre, par M. Ungerer. — Sur l'entrainement du support par le pendule en mouvement, par M. le Comm. Deflorges. — Chronographe astronomique, Régulateur isochrone, Plume enregistrante, par M. Richard, — De la mesure de la vitesse, Nouveaux indicateurs absolus par M. Richard, J. Poucer. 2° Sciences physiques. Guebhard (le D' Adrien), L'auréole photographi- que. (Moniteur de la photographie, 1° août 1890.) Depuis qu’elle a été magistralement traitée par M. Cornu !, la question de l’auréole ou du halo photographique parait être d’une extrême simplicité, et l'on s'étonne volontiers des longs tâätonnements que sa solution complète a exigés. La lecture du très intéres- sant mémoire du D' Guebhard, l’un des premiers qui s’occupa de cette question, nous renseigne abondam- ment sur ce point. Attaquant le problème par le pro- cédé purement empirique, il établit d’abord les faits suivants : L’auréole se produit seulement sur les pla- ques de verre, et jamais sur le papier sensible employé comme négatif ; on l’observe dans la photographie sans objectif; par conséquent sa cause unique doit être cherchée dans la plaque. L'auteur était dans la bonne voie, en ce qui concerne les causes du phénomène, lorsque parut le mémoire où M. Cornu en indiquait en même {temps le remède, M. Guebhard nous révèle que, outre les frères Henry, un astronome anglais de grand mérite, le capitaine Ahey avait apercu, il y a déjà une quinzaine d’années, la véritable raison du halo, qu’il nomme « irradiation photographique » et avait indiqué le moyen de le di- minuer, sans cependant le supprimer complètement. ù Ch. Ed, GuiILLAUME. Richardson (E). — Le poids spécifique d'un liquide considéré comme fonction de son point d’ébulli- tion et de son poids moléculaire, Chemical News. 30 janvier 1891. Le point d’ébullition d'un liquide à une certaine re- lation avec son poids moléculaire, Ceci s’observe net- tement dans les séries homologues de la chimie orga- nique, où une élévation constante du point d’ébullition correspond à une augmentation constante dans le poids moléculaire, Mais entre le poids spécifique et le point d'ébullition ou le poids moléculaire, aucune relation nette n'a été observée. Cela ne prouve pas qu'il n’en existe point, et peut résulter de ce fait que la comparaison a été faite dans des condi- tions défavorables. M- Richardson a eu l'idée de com- parer la température d’ébullition des liquides à la tem- pérature -à laquelle, par suite de la dilatation, leur poids spécifique deviendrait égal à l'unité. En calculant les températures auxquelles le poids spécifique devient égal à l’unité d’après les tables de densités et de dilatations du professeur Thorpe?, 1 Voyez sur ce méme sujet l’article de MM. Lumière dans la Revue du 30 sept. 1890, page 568. 2 Journal of Chemical Society, 1880. M. Richardson est arrivé aux conclusions suivantes, qu'il ne donne que comme une première indication sur les relations possibles : z 1° La température à laquelle le poids spécifique est égal à l'unité croit régulièrement quand le poids spé- cifique du liquide augmente. 2° Les nombres obtenus en divisant celte lempérature par le poids moléculaire varient relativement peu. Beaucoup d’entre eux sont très voisins de 2, Il est pro- bable que l'examen d’un très grand nombre de liquides permettrait de les séparer en un certain nombre de classes, chacune d'elles conduisant à une valeur déter- minée de ce rapport. 3° Le même fait s’observe si l’on examine les valeurs du rapport des températures absolues d’ébullition etde poids spécifique égal à l'unité. Ce ne sont là que des approximations, même assez lointaines, mais étant donnée la grande variété des li- quides examinés, on peut espérer déduire de ce mode de recherche des relations intéressantes. Georges CHARPY. Heumann (Karl). — Nouvelle synthèse de l'indi- gotine. Berichte der deutschen chemischen Gesellschaft, 1890, page 3043, M. Baeyer, dans le cours de ses remarquables re- cherches sur l’indigotine et ses dérivés, a montré que certains modes de production de ces composés con- duisent à admettre l'existence d’un corps [intermé- diaire, qu'il a nommé pseudo-indoxyle et auquel ül attribue la formule suivante : : Quand on essaie de mettre ce composé en liberté, il se transforme immédiatement en sonisomère l’indoxyle : L'auteur à cherché à obtenir ce pseudo-indoxyle par déshydratation interne du phénylglycocolle : 5 ‘2 __CO'OH: AzH CERN CHE COOB Gen CHERE ER M ! NIGO A1 l 1 L'emploi de substances déshydratantes telles quele chlorure de zinc, l'acide sulfurique concentré, ete., n'a donné que des résultats négatifs; au contraire les alcalis caustiques semblent conduire au but, bien que l’on n'ait pas isolé le corps en question, mais seule- ment son produit d’oxydation, l’indigotine, Voici com- ment il convient d'opérer pour préparer synthétique- ment cette importante matière colorante. On fond à l’abri du contact de l’air une partie de phé- nylglycocolle avec 2 parties de potasse caustique ; dès la température de 2609 la masse se colore en jaune: en prélevant de petites quantités de matière et les pro- jetant dans l’eau, onarrive à un moment où l’on obtient à la partie supérieure du liquide une pellicule bleu foncé avec des reflets rouge cuivre : c’est l’indigotine, Quand ce point est atteint, il faut interrompre rapide- ment l’action de la chaleur pour ne pas décomposer le corps qui fournit l’indigo. En faisant dissoudre dans l’eau le produit de Ja fu- sion à l'abri du contact de l’air, on obtient une cuve jaune qui se change lentement à l’air en indigo; si l’on agite la masse au moyen d’un courant d'air la transformation est plus rapide et il se dépose un volu- mineux précipité d'indigo. Jusqu'à ce jour l’indigotine n’a pas été préparée in- dustriellement par synthèse : il semble que les re- cherches de M. Heumann sont appelées à combler cette lacune ; car le brevet pris par l’auteur a été acheté par | mie 4 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX [19 une fabrique, bien connue, de matières colorantes : « Die Badische Anilin und Sodafabrik, in Ludwigshafen a, Rh. » H. GAUTIER. Conférences faites au laboratiore de M. Friedel. (2° fascicule.) Un vol. in-8° de 190 pages (5 fr.), Georges Carré, éditeur, 58, rue Saint-André-des-Arts. Paris, 1891, À une époque où il est si difficile de se tenir au courant des progrès incessants de la chimie, on doit accueillir avec beaucoup d'intérêt toutes les “publica- tions où se trouvent condensés et systématisés les ré- sultats les plus récents relatifs à une question à l’ordre du jour. En évitant des recherches bibliographiques, presque toujours fatigantes et difficiles, on gagne ainsi un temps précieux. Tels sont précisément les avantages qu'on peut retirer de la lecture de chacune des conférences pu- bliées dans le recueil que nous signalons aujourd’hui à l'attention des chimistes. Le volume qui vient de paraître n’est que la suite de celui dont il a déjà été question dans cette Revue. Nous n'avons donc pas à le présenter au lecteur, La variété des sujets traités ne laisse rien à désirer. On y trouvera des conférences de MM. Chabrié sur les rela- tions entre la composition chimique et la tension superfi- cielle des corps; Béhal, sur les dérivés azoïques el sur les oximes, Patein, sur les sulfines, Auger, sur les migralions moléculaür'es, À. Combes, sur les dicétones. L Il est presque inutile d'ajouter que tous ces (travaux se font sous le haut patronage scientifique d’un maitre éminent, aimé et vénéré de tous. C’est la meilleure ga- rantie du succès de cette publication, qui, nous n’en doutons pas, sera très favorablement accueillie dans le monde des chimistes. Ph. A” Guxe. Berther (A). — L’Iconogène (1 fr.) J. Michelet, 25, Quai des Grands-Augustins, Paris, 1890, Sous ce titre l’auteur a réuni les formules de prépa- ration de l’Iconogène et son emploi dans le dévelop- pement. Il montre combien il facilite les manipulations photographiques si lentes avec l’hydroquinone, si salis- santes avec l'acide pyrogallique, le fer, etc. L'Iconogène est le nom donné au sel de soude de l'a- cide amido B naphtol 6 mono-sulfonique. C’est peut-être le meilleur révélateur connu et il fautremercier M. Ber- thier d’avoir mis à la portée de tous son mode d’em- ploi en photographie, C. Naun. 8° Sciences naturelles. Æhoulet (J.), Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy. — Océanographie (Statique). 4 vol. in-8°, de X-492 p. avec 103 fig. dans le texte, Prix : 10 fr, Paris, L. Baudoin et Cie, 30 Rue et Passage Dauphine, 1890, L'on sait combien les études relatives à la physique des mers ont pris de développement dans ces dernières années en Angleterre, aux Etats-Unis, en Norvège et en Allemagne ; les résultats de la longue campagne du Challenger, en particulier, sont dans toutes les mé- moires. Malgré les efforts qui ont abouti aux expédi- tions du Travailleur et du Talisman, si fructueuses sur- tout pour la zoologie, la France est restée fort en retard, à ce point de vue, sur les grandes nations maritimes de l'Europe et de TAmé rique. M. Thoulet, après être allé s'initier aux méthodes de recherches auprès des maîtres de la science nouvelle, s'est donné pour tâche de populariser l'océanographie dans notre pays et d’y intéresser l'esprit public. L’ou- vrage qu'il fait paraître aujourd'hui vient combler une fâcheuse lacune de notre littérature scientifique : grâce 1 Revue générale des Sciences. 1890 ATOS DMDATS à M. Thoulet, les lecteurs désireux d'acquérir des no- tions exactes et précises sur les phénomènes compli- qués dont l'Océan est le siège ne seront plus obligés d’avoir recours aux manuels étrangers, tels que ceux de Boguslawski, Krümmel, Wyld, etc. qui jusqu'à présent n ‘avaient point d’ équivalentsdansnotre langue. Ce premier volume ne comprend que la Statique ; il est divisé en une série de chapitres consacrés à la topo- graphie de Ja mer et aux instruments qui servent à la déterminer, à la minéralogie et à la géologie sous-ma- rines, à la chimie des eaux et des dépôts, aux questions de température, de densité et de pression, ainsi qu'à l'examen des propriétés optiques. Un chapitre sur la biologie de la mer met bien en évidence les services que les études d’ océanographie théorique sont suscep- übles de rendre à l'industrie de la pêche, dont l’im- portance est devenue si considérable pour le commerce et pour l'alimentation du monde entier. Dans une der- nière section, l’auteur s'occupe enfin des glaces, de leurs divers modes de formation et de leur rôle dans l’économie générale de l'Océan, Quelles que soient les critiques de peu que l'on puisse relever dans ce premier essai, M. Thoulet n’en mérite pas moins toute la reconnaissance des natura- listes et des géographes. Nous attendrons avec impa- tience la publication du second volume qui, sous le ülre de Dynamique, doit terminer l'ouvrage et com- prendre l’étude des mouvements de la mer et des modi- lications qu'ils apportent à la forme de la surface ter- restre. Emm. de MARGERIE, Vuillemin (D' P.) — Le type floral des Grami- nées. — Bull. Soc. Sciences de Nancy. 1890. Dans une courte Note l’auteur expose les raisons qui lui permettent de considérer la fleur des Graminées, suivant la théorie d'Eichler, de Celakowsky, etc., comme une fleur dont le perianthe serait représenté par les glumellules. Nous ne pouvons analyser cette Note dont chaque phrase exigerait des développements que l’auteur nous promet bientôt. Bornons-nous à Tap- peler que M. Vuillemin compare l’épillet à la calathide des composées dont le réceptacle commun est allongé au lieu d'être étalé. Les glumes correspondent aux ièces du péricline, les glumelles inférieures aux pail- lettes et les fleurs, au lieu d’être sessiles, ont un axe assez allongé pour former une préfeuille’ représentée par la glumelle supérieure; chaque fleurette est plus réduite que chez les composées; le calice étant tou- jours nul et la corolle rudimentaire. Pour M. Vuillemin, les Graminées ne seraient pas un type primitif, elles formeraient le terme extrême d’une série de Monocotylédones anémophiles de laquelle se sont sans doute détachés les Palmiers, les Isunés, les Cypéranes. L. ManGix, Beauregard et Galippe, — Guide pratique pour les travaux de micrographie. 1 vol. in-8°, G. Masson, 120, boulevard Saint-Germain. Paris, 2e édi- lion, entièrement refondue (45 fr.). Les auteurs de cet ouvrage, au moment où ils en ont écrit la première édition, avaient eu pour but de réunir fous les renseignements relalifs aux divers su- jets que peuvent avoir à étudier tous ceux qui par leurs études ou leur profession ont besoin de recourir à l'usage du microscope. C'était faire un livre utile, répondant à des besoins nouveaux, la preuve en est dans le succès qu’il eût auprès du publie et dans ce fait, qu'il a eu depuis de nombreux imitateurs, aussi bien en France qu'à l'étranger. Mais une deuxième édition était devenue nécessaire en raison du chemin parcouru dans ces dernières années par la science du microscope. C’est de ce second ouvrage dont nous dé- sirons dire quelques mots ici, Signalons d’abord les modifications et les additions 150 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX que les auteurs ont fait subir à leur première publica- tion. En premier lieu, tous les chapitres qui forment le Guide pratique de micrographie ont été remaniés et mis en harmonie avec l’état actuel de la science. En second lieu, les auteurs ont écrit un chapitre nouveau pour la bactériologie ; comme le cadre de cet ouvrage ne leur permettait pas de donner une étude complète des bactéries, ils ont dû se borner à donner les ca- ractères généraux de ces organismes, les divers pro- cédés qu'on emploie pour les cultiver, les- observer, et les classer, C’est ainsi que l’on trouvera dans cette seconde édition les indications nécessaires à la re- cherche des parasites, soit dans les liquides patholo- giques (pus, crachats) soit dans les eaux employées pour l'alimentation. Enfin, les auteurs ont ajouté à leur ouvrage un chapitre de technique appliquée à l'histologie:; le mode d'examen et de préparation des différents tissus a été traité avec tous les détails né- cessaires, Le plan général de l'ouvrage n’a pas été changé. Il est divisé en deux parties : Histoloqie végétale et Histo- logie animale. Dane l’histologie végétale on étudie la cellule, les tissus, les appareils, la structure des di- vers or ganes de la plante et les organes de reproduc- tion dans les différents groupes du règne végétal. La deuxième partie, qui a pour litre ja histologie ‘animale, est plus tôt l’étude des applications du microscope à la clinique, à l'hygiène et à la médecine légale, La plu- part de ces chapitres sont très consciencieusement traités et renferment une foule de détails précieux ; le clinicien consultera surtout les chapitres relatifs au sang et aux sédiments wrinaires; le médecin légiste, ceux qui traitent du sperme, et de l'examen des cher eur et des poils; lhygiéniste ceux qui sont relatifs aux parasites, aux corpuseules et miasmes de Pair, et à l'era- men microscopique des eaux. Les auteurs ont voulu faire de leur ouvrage, ainsi qu'ils le disent eux-mêmes dans leur préface, «une « sorte de bibliothèque réduite à sa simple expression, dans laquelle le chercheur aussi bien que le prati- cien auraient sous la main des renseignements pré- « cis », faciles à compléter, si cela était nécessaire à l’aide des nombreuses indications bibliographiques qu'ils n'ont pas manqué de donner au lecteur, Il nous suffira de dire pour terminer qu'ils ont pleinement réussi, J. HÉRAIL. 4° Sciences médicales. Baudouin, L’asepsie et l’'antisepsie à l'hôpital Bichat. Service de chirurgie de M. Terrier (5 fr.). Paris, Lecrosnier, place de l'Ecole de Médecine. 1890, C’est avec une réelle satisfaction que nous avons par- couru le livre que vient d'écrire M. Marcel Baudouin. A une époque oùbeaucoup de chirurgiens ne sont encore antiseptiques que de nom, il é taità désirer qu'un de ceux qui savent opérer et soigner leurs malades, ou, à leur défaut, un de leurs élèves, résumät sous une forme succincte les notions fondamentales de la nou- velle pratique chirurgicale qui, en 15 ans, a changé du tout au tout le pronostic opératoire, Elève de M. Ter- rier, dont l'autorité est aujourd’hui universellement reconnue, M. Baudouin était mieux placé que qui que ce füt pour écrire un traité sur la matière. Il a su rendre le sujet intéressant en nous montrant com- ment, par des améliorations successives, M. Terrier est arrivé, de 1883 à 1889, à créer à l'hôpital Bichat, sinon un service modè le, tout au moins ul service dont les résultats ne le cèdent en rien à ceux des meilleurs hôpitaux étrangers, L'installation des salles, les substances employées, les étuves à stérilisation, etc. , Se trouvent très complè- tement décrites dans la première partie de l'ouvrage, qui constitue en quelque sor Ê un traité de l’asepsie et de l antisepsie en chirurgie. La lecture de ces pages, écrites d’une plume alerte, nous montre bien Ja diffé- rence, méconnue par quelques-uns, entre l’asepsie et l’antisepsie ; la première est le but, la deuxième n’est qu'un des moyens d'y parvenir. Dans une dernière partie, M. Baudouin passe en revue les diverses régions sur lesquelles on peut avoir à opé- rer ef nous donne la manière de les rendre asepti- ques. L’antisepsie de la peau, celle de l’œil, de l'oreille, du nez, dela bouche, de l'intestin, du rectum, du vagin et de l'utérus, des voies urinaires, forment autant de chapitres des plus intéressants à consulter. L'ouvrage se termine par la statistique intégrale de toutes les “opérations faites à ss Bichat depuis sa fondation, seule manière de prouver la valeur incontes- table de Ja pratique suivie. D' Henri HARTMANN. Brivois (L.).— Manuel d’électrothérapie gynécolo-. gique. 6 fr. 0. Doin, Paris, 1890. À une époque où le {raitement électrique des affec- tions utérines fait l’objet de discussions dans tous les pays, le manuel de M, Brivois vient combler une lacune en donnant aux médecins un exposé clair et concis de la technique à suivre. A ce titre nous pouvons recom- mander cet ouvrage qui permet aux plus ignorants des lois de la physique d'appliquer pratiquement le traite- ment électrique. Nous ne pouvons malheureusement approuver l’auteur qui, avec tous les spécialistes du reste, applique son traitement un peu à toutes les affections. Dans bien des cas le traitement chirurgical reste le-plus simple et le moins grave, en dépit de la sécurité apparente que donne la cure électrique plus aveugle que le bistouri, D' Henri HARTMANN, Manacéine (Marie), — Le surmenage mental dans la civilisation moderne, effets, causes, remédes. Traduit du russe par E. JAUBERT, avec une préface par Cu. Ricuer.— 1n-12, (3 fr.) G, Masson, Paris, 1890. Ce livre estsurtout une élude de sociologie. Il est di- viséen trois parties. Dans la première, intitulée Les Effets l’auteur cherche à démontrer l’affaiblissement nerveux et l’anémie générale des générations actuelles et indi- que les inconvénients sociaux qui en résaltent, épidé- muies du vol, augmentation du nombre des suicides, etc. Dans la seconde, intitulée Les Causes, il est difficile de saisir l’idée générale qui relie entre elles les diverses questions qui y sonttraitées: les réflexes, lessentiments, la conscience, la liberté morale ; dans les chapitres x, x1 et xt il est question du surmenage des enfants par l’école, La troisième partie intitulée Les Remèdes com- mence par indiquer en trois chapitres les symptômes et le diagnostic du surmenage mental; puis viennent quatre pages sur le traitement, et enfin, après la des- cription de la balance psycho- phy siologique de Mosso, des considérations sur l'essence de l’hérédité et lim- portance des phénomènes d’héridité, I y a cà et là de la physiologie, mais souvent un peu étrange, Une des meilleures preuves que l’auteur eroit donner de la dégénérescence contemporaine, e’est qu'on a élé obligé “d'abandonner la saignée et le calo- mel, traitements héroïques, excellents, mais que nous ne sommes plus en éfat de supporter... ! L'auteur «ne peut s'empêcher de supposer » que di- vers actes automatiques, comme, par exemple, les pulsations du cœur » ont été à l’origine » des mou- vements plus ou moins volontaires ou spontanés » (p. 188). Elle dit : « Emmanuel Kant a démontré que l'homme en tant que noumenon est complètement libre, » du mème ton dont elle rapporte les observations de Broca ou une expérience de Wundt. Ce qu'il y a de plus intéressant dans ce livre, c’est la préface que M, Ch. Richet a mise en tête. Cette pré- face contient en substance ce que devrait être un livre sur le surmenage mental. On ne peut que regretter que Mme Manacéine n'ait pas concu son ouvrage sur ce plan et dans cet esprit. L. LAPICQUE. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 151 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADEMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 23 février 1891. 49 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. M. d'Ocagne : Sur la représentation plane des équations à quatre variables. — M. L. Raffy : Sur une classe de surfaces harmoni- ques. — M. Andrade : Sur le mouvement d’un vortex rectiligne dans un liquide contenu dans un prisme rec- tangle de longueur indéfinie, — M. Charlois : Observa- tions de deux nouvelles planètes découvertes à l'obser- toire de Nice, les 41 et 16 février 1891. — M, B. Baïllaud : Observations de la planète Charlois (11 février 1891) faites à l’équatorial Brünner de l'observatoire de Toulouse, —M. Em. Marchand : Observations desfacules solaires faites en 1889 et 1890 à l’équatorial Brünner (0",18) de l'observatoire de Lyon ; le -classement systématique des groupes observés donne lieu à diverses remarques relatives à la distribution de l’activité solaire par zones et à la variation de ces zones depuis le minimum. -— Les photographies du spectre de « Lyre prises par M. A. Deslandres lui permettent de nier le dédouble- ment périodique de la raie K du calcium dans ce spectre, dédoublement annoncé par M. Fowler, 2° SCIENGES PHYSIQU -— M. Mascart étudie les anneaux colorés par réflexion pour une lumière pola- risée dans l’un des azimuts principaux ; posant, d’après des théorèmes connus, que la vibration finale dans ce cas se réduit à deux vibrations dont la différence de phase comprend : 1° la perte de phase à qui correspond à deux passages de la lumière dans la lame mince ; 2 la sommé des pertes de phase par réflexion inté- rieure sur les deux surfaces à qui limitent cette lame, il examine les variations du phénomène avec les variations de l'incidence, — M. Monnorry à entrepris des expériences pour vérifier sur le quartz comprimé une conséquence de la théorie de M. Gouy surles effets simultanés du pouvoir rotatoire et de la double ré- fraction ; les expériences ont concordé avec les chiffres que l’auteur avait antérieurement calculés à priori : une compression qui croit à partir de zéro a pour effet de diminuer ou d'augmenter la rotation de la vibration émergente, suivant la valeur de lépaisseur de la lame de quartz soumise à la compression, — M. E. Carvallo établit par Pexpérience que les lois de la double ré- fraction ne sont pas altérées par la dispersion ; il mon- tre par le calcul que le système de M. Sarrau jouit de cette propriété que les termes de dispersion de Briot n'introduisent aucune perturbation aux lois de la double réfraction monochromatique, et qu'il est des systèmes proposés le seulà jouir de cette propriété ; il resterait à prouveranalytiquement qu'il enest de mème des autres termes de dispersion, —M.U. Lalaacontinuéses recher: ches sur la compressibilité des mélanges gazeux; il étu- dieles mélanges d'airetd'hydrogène, — M. Ch. Blarez a étudié la solubilité du bitartrate de potassium, dans l'eau, dans diverses solutions salines, dans un mélange d’eau, d'alcoolet de sels, — M. A. Berg a préparé la butylamine normale en faisant agir, suivant la méthode d'Hofmann, l’'ammoniaque en solution hydro-alcouli- que sur le chlorure de butyle normal : il étudie quel- ques sels de la base primaire et de la base secondaire ainsi obtenues.— M. A. Villiers, en faisant fermenter l’'empois d’amidon sous certaines conditions par le fer- ment butyrique a vu que le produit principal de la fer- mentation consiste en dextrines. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. R. Lépine et Barral ont constaté que, si on lavè avec de l’eau salée à 70), les globules sanguins séparés du sérum, cette eau salée prend un pouvoir glycolytique supérieur à celui du sérum où ce pouvoir est {très faible ; une deuxième eau de lavage prend un pouvoir glycolytique encore plus marqué, — M, Lavocat : Détermination rationnelle des pièces sternales chez les animaux vertébrés. — M. E. Laguesse : Structure du pancréas et pancréas intra-hépatique chez les poissons. (V. Soc. de Biolo- gie, 21 février). — M. E. Faurot par l'étude des cloi- sons mésentéroides du Cerianthus membranaceus est con- duit à rapprocher ce type des Coralliaires fossiles classés dans les Zoanthaires rugueux comme l'avait déjà fait J. Haime. — Dans des recherches ayant porté sur 16 espèces très éloignées les unes des autres, M. P. Lesage a reconnu que dans la racine, à partir du sommet, le liber se différencie plustôt que le bois. — M. E. Jannetaz a fait l’élude des divers échantil- lons de roches rapportés par M, Thollon du Congo fran- cais ; il y signale la présence de largent natif, — M. A. Muntz fait voir par des analyses comparatives que leau de pluie recueillie dans les vallées contient plus de sel marin que celle recueillie sur les monta- ones ; par suite, les plantes fourragères croissant sur les montagnes renferment moins de sel que les mêmes espèces de la vallée; ce fait explique la nécessité d’une ration de sel en nature aux bestiaux des palurages éle- vés ; malgré cette distribution, le sang et le lait de ces animaux est plus pauvre en chlorure de sodium que chez les animaux des basses altitudes. — M, G. Stefa- nesco signale la relation manuscrite d’une chute de météorites qui a eu lieu en Roumanie en 1774, Présentations : M, Bouquet de la Grye présente à l’A- cadémie un exposé des idées de M. Faye sur la théorie des tempêtes dans l’american Meteorological journal. — M. E. Fremy présente un volume qu'il vient de publier sous le titre : Synthèse des rubis. — M. Chauveau, en présentant son ouvrage : Le travail musculaire et léner- qie qu'il représente, explique que s'il n’a communiqué à l’Académie qu'une partie des recherches inédites con- tenues dans cet ouvrage, c’est qu'il tenait à ne pas déta- cher les autres de l’ensemble et à ne pas exposer des idées nouvelles sans leur démonstration complèt Mémoires présentés : M. D. A. Casalonga adres nouvelle note relative à l’inexactitude du mm "D To une coefficient économique du rendement de la chaleur. Séance du 2 murs 4891 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. A. Mannheim : Transformation de démonstration, — M. Schenfiies : Sur les surfaces minima limitées par quatre arêtes d’un quadrilatère gauche, — M, Mouchez communique plusieurs séries d'observations de petites planètes, faites par M. Callandreau au grand instrument méri- dien de l'Observatoire de Paris pendant le deuxième trimestre de 1890, — M, G. Bigourdan a retrouvé une nébuleuse, qui découverte par W. Herschel en 1785 et revue par J. Herschel en 1831, a été cherchée vaine- ment par les astronomes de Birr Castle en 1854 et 186% et par d’Arrest en 1863 ; on est ainsi obligé d'admettre la variabilité de cette nébuleuse; elle est située dans le voisinage d’Algol. — A propos de lanote de M, Rod, Wolf sur l’histoire des appareils à mesurer les bases, M. A. Laussedat rappelle la part importante qui re- vient à l'ingénieur français d’Aubuisson de Voisins dans le perfectionnement de ces appareils. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — Revenant sur la discussion qui s’est élevée dans l'Académie à propos des expé- riences de M, Wiener, M. H. Poincaré remarque que les derniers éléments apportés à cette discussion ne permettent pas encore d'éliminer d’une façon absolue 152 l'hypothèse de Neumann; la note de M. Potier à ra- mené la question générale à celte question parficu- lière : sous l'incidence normale, tout plan réfléchissant est-il un plan nodal? M, Potier résolvait la question par l’affirmative, mais l'analyse permet de démontrer qu'il peut en être autrement; la théorie de Neumann oblige seulement à faire une hypothèse plus compli- quée que pour la théorie de Fresnel, et encore, la simplicité dont jouit la théorie de Fresnel pour une lumière homogène est-elle en grande partie perdue dans le cas où l’on doit tenir compte des diverses lon- gueurs d'onde, D'ailleurs, M. Poincaré tient à dire que personnellement il penche pour la théorie de Fresnel. — M. Savelieff expose les résultats qu'il a obtenus re- lativement aux variations diurnes de l’intensité de la radiation solaire ; il a étudié cette radiation à Kief pen- dant tout le cours de l’année 4890 au moyen de l’actino- mètre enregistreur de M Crova.— M. Crova a propos de cette note, fait remarquer à quelle précision on est arrivé dans ces études. — M. À, Imbert a éludié les vibrations des anches doubles, disposées en anches en dehors; en général, les deux anches vibrent à l’unisson, diverses conditions déterminant celle des deux qui doit donner le ton; mais dans certains cas, on obtient un double son, qui est toujours un accord musical. —M.de Forcrand a formé etétudié quelquesdérivés alealins de l’érythrite. — M. Léo Vignon a étudié les phénomènes thermiques auxquels donne lieu la teinture du coton; Ja chaleur dégagée est faible, relativement à celle dé- gagée par la teinture des fibres animales ; on sait d’au- tre part que le coton fixe faiblement les couleurs. Si l’on combine de l'azote ammoniacal à la cellulose, comme MM. Schützenberger et Thénard ont montré qu'on pouvait le faire, on obtient une substance qui sans avoir sensiblement perdu de ses qualités textiles dégage trois fois plus de chaleur sous l’action des ma- tières colorantes à caractère acide el retient énergique- ment ces matières. — M. G. Linossier a isolé le pig- ment noir des spores de l’Aspergillus niger ; la compo- sition chimique de ce pigment n’a pas été déterminée; l'auteur a seulement reconnu qu'il contenait du fer, mais l’ensemble de ses caractères physiques, ses ca- ractères de solubilité, la transformation que lui font subir les réducteurs et sa réoxydation spontanée à l'air tendraient à l'identifier avec l’hématine du sang des vertébrés. 39 SCIENCE: NATURELLES. — M. Zwaardemaker si- gnale la susceptibilité que présentent les chats et les rats à l’action convulsivante du phénol. — M. Joannes Chatin a fait l'étude de l'épithélium hépatique de la Testacelle (Gastéropodes); il fait remarquer la trans- formation graduelle: de cet épithélium, en passant du fond des cæcums aux canaux excréteurs, de la forme cylindrique à la forme pavimenteuse, — M. de Lacaze- Duthiers annonce que lesessais d’ostréiculture tentés ‘au vivier du laboratoire de Roscoff, ont donné des ré- sultats inespérés; en un an, grâce à des soins assidus, et malgré la rigueur exceptionnelle de lhiver, la plus grande partie du naissain implanté a acquis la taille marchande, — M. P, P. Dehérain a continué à étudier les pertes en azote nitrique que leseaux de drainage font subir aux terres; malgré des conditions météoro- logiques défavorables; il à pu vérifier que létablisse- ment en automne d'une cullure dérobée empêche presque absolument celte perte, comme il lavait annoncé à priori. — M, À. de Lapparent a cherchéà déterminer l’âge du conglomérat à ossements de Gou- berville (Manche); les débris de lamantin qui y abon- dent proviennent du remaniement d’une couche anté- rieure ; il y existe d’ailleurs des éléments provenant de remaniements bien plus anciens; l’âge du dépôt dans sa forme actuelle est déterminé par la présence de la Terebratula grandis en excellent état de conservalion et par la découverte toute récente d'une dent de Di- notherium ; il est donc miocène, — M. H. Douvillé a fait l’étude d'une série d'échantillons fossilifères re- cueillis par M, Canelle sur le tracé du canal de Panama; ACADÉMIES ET SOCIÈTES SAVANTES toutes les couches entamées se rattachent aux divers élages du tertiaire des Antilles. — M, de Montessus par le classement systématique du plus grand nombre possible d'observations de tremblement de terre, est arrivé à cette conclusion, qu'il n'existe aucun rapport cuire la fréquence des secousses sismiques et les sai- sons astronomiques, — M. J. Thoulet a étudié l’action de l’eau en mouvement sur quelques minéraux. Nouvelles et présentations. — M. Geïkie est élu cor- respondant pour la section de Minéralogie en remplace- ment de feu M. Favre. — M. C. Wolf présente le deuxième tome des : « Mémoires sur le- pendule » pu- bliés par la Société française de Physique, — M. Lar- rey présente à l’Académie de la part de sir James Paget un livre anglais intitulé : « Etudes de vieux ca- hiers d'observations. » Mémoires présentés, — M. Rey de Morande adresse une note intitulée : « Les variations du niveau de la mer pendant les temps géologiques. » —M. l'abbé Ton- dini annonce l’adhésion de plusieurs puissances au projet d'une conférence internationale pour régler la question de l'heure universelle. — M. E. Serrant adresse une note intitulée: « La nitro-crésoline, ou acide trinitrocrésylique et les trinitrocrésylates. » L. LAPIcQuE. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 28 février 1891 MM. P. Launay el P. Langlois présentent un lac- tomètre qui est combiné avec un thermomètre de telle facon qu'on peut lire la densité sans avoir besoin de faire de correction relative à la température. — M. Hu- gouneng et Eraud ont étudié l’action de diverses ma- tières colorantes, dérivées de la houille, sur le dévelop- pement et la virulence de quelques microbes; ils signa- lent particulièrement la puissance antiseptique du bleu de méthylène et de la safranine. —M.Déjerine fait l'ana- Lyse de deux cas d’aphasie motrice, avec autopsie, dans lesquels une lésion sous-corticale avait été exactement diagnostiquée pendant la vie; l'écorce de la circonvo- lution de Broca n'étant pas lésée, les images motrices élaient conservées; sur ces deux mémes cas, il étudie la localisation chez l'homme des centres moteurs cor- ticaux du larynx, —M.F, Lataste : Des varialions de durée de la gestation chez les mammifères et des cir- constances qui déterminent ces variations : théorie de la gestation retardée. —M. Nicati présente son ouvrage intitulé : « La Glande de l'humeur aqueuse (glande des procès ciliaires ou glande uvée), » < 71 mars 1891, M. Laborde fait une communication sur le dévelop- pement de la circonvolulion de Broca et des circonvo- lutions frontales en général corrélativement au dévelop- pement de l'intelligence et du talent oratoire. M. Dupuy rappelle divers casde lésion de la troisième frontale gauche sans aphasie qui luisemblent incompa- tibles avec la fonction spéciale de cette circonvolution. — M. Beauregard remarque que si l’on étudie la série animale, on voit dans diverses familles à cerveau généralement lisse des circonvolulions apparaître chez les espèces les plus grandes, sans qu’elles soient pour cela les plus intelligentes; mais il faut noter que lors- qu'une fonction disparait, on remarque l’atrophie dela circonvolution où la science actuelle localise le centre psycho-moteur de cette fonction, — M. Darsonval pré- sente un moteur électrique pour cylindres enregistreurs avec régulateur automatique, la régularité de la rota- tion est contrôlée à chaque instant par un téléphone, —M.Gréhant présente un réservoir de caoutchouc avec insufflateur destiné à recueillir des échantillons d’air pour une analyse ultérieure; il expose le procédé par lequel il dose l'acide carbonique ; ce gaz est toujours en proportion faible dans les airs les plus viciés. — M. Darsonval rappelle que d’après les recherches qu'il a faites avec M, Brown-Séquard, c’est à des produits Séance du SC te ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 153 organiques qu'il faut rapporter la toxicité de l'air vicié par la respiration animale; leurs dernières expériences de contrôle, encore en voie d'exécution, confirment pleinement ce fait. — M. Beauregard, en présentant diverses planches phototypiques d'anatomie, fait re- marquer que des documents de ce genre doivent être étudiés à la loupe, etque, par cet examen, leur supé- riorité sur les lithographies devient éclatante, — M. Ga- lippe, à propos d’une note d’un médecin viennois qui attribue la formalion des calculs à une action micro- bienne, rappelle qu'il a exposé entièrement cette théo- rie il y a plusieurs années sans trouver alors d’écho, LL. LAPICQUE. SOCIÉTÉ FRANCAISE DE PHYSIQUE 1891. M. A. Berget présente un modèle portatif de l’élec- tromètre capillaire de M. Lippmann. Tel qu'il est cons- truit d'ordinaire, l’électromètre de M. Lippmann cons- litue un instrument de laboratoire parfait, mais son transport est chose très délicate, Pour rendre l'instru- ment plus portatif sans diminuer sa sensibilité, M. Ber- get a eu l’heureuse idée de séparer la partie essentielle de l'appareil, c’est-à-dire la partie capillaire, et la cuvette contenant le mercure et l’eau acidulée, des autres parties qui constituent surtout la monture el l'appareil d'observation, La cuvette, en verre soufflé, à laquelle est soudé un tube de même diamètre, qui se termine par la pointe capillaire, se dispose sur la pla- tine d'un microscope; pour exercer une pression sur le mercure contenu dans le tube et le faire pénétrer dans la pointe, on se sert de deux réservoirs de verre réunis par un tube de caoutchouc et placés à des ni- veaux différents, que l’on peut faire varier à volonté. — M. d’Arsonval décrit les expériences qu'il a entre- prises pour déterminer l'équivalent mécanique de la chaleur, La méthode mise en œuvre avait déjà été pro- posée par l’auteur et par M. Marcel Deprez il ya quelques années; elle consiste à faire fourner un ai- mant autour de l’axe d’un cylindre de laiton ; des cou- rants de Foucault naissent dans le cylindre, qui ten- draient à le faire tourner, on s'oppose à celte rotation et l’on évalue le travail ainsi absorbé; d’autre part, on mesure la chaleur qui apparait à l’aide d’un calori- mètre à température constante. Le calorimètre est formé par la partie annulaire comprise entre deux cy- lindres concentriques; dans ce calorimètre plonge le cylindre de laiton, dans la partie centrale tourne l’ai- mantou mieux un électro-aimant, Le eylindre de laiton est suspendu par un fil de torsion dont le couple de tension a été préalablement mesuré ; angle de torsion est évalué par la rotation de l’image d'un point lumi- neux sur un miroir solidaire du cylindre. Pour main- tenir le calorimètre à température constante, à chaque instant, on introduit une quantité d’eau à 0° suffisante pour empêcher tout échauffement, l'écoulement de cette eau peut être réglé automatiquement par le jeu de la dilatation d’un liquide contenu dans un serpentin; on évalue ainsi aisément la chaleur produite. Bien en- tendu, il faut lenir compte des échauffements parasites dus au courant qui parcourt le fil de l’électro-aimant; il faut aussi empêcher la production des courants de Foucault sur les parois du calorimètre. Pour donner à l’aimant un mouvement de rotation uniforme, M. d’Ar- sonval se sert d’un petit moteur électrique. sur lequel il dispose un très simple, mais très efficace régulateur de vitesse; ce régulateur est combiné par un ressort d'acier enroulé en cercle, et qui, porté par l'axe du moteur, se déforme par la rotation, il se rapproche ou s'éloigne ainsi d'une vis établissant ou rompant une communication électrique, suivant que la vitesse dit minue ou augmente. Le courant qui traverse ce sys- tème est une dérivation du courant principal qui ac- tionne le moteur ; on évite ainsi l'inconvénient de trop fortes étincelles de rupture à la pointe de la vis, — M. Ch.-Ed. Guillaume, après avoir, dans ses remar- Séance du 6 mars quables recherches antérieures, précisé les conditions d'emploi du thermomètre à mercure, a été naturel- lement conduit à s'occuper des procédés de mesure de la température au moyen des phénomènes électriques ; la mesure de résistance et celle des forces thermo- électriques peuvent être utilisées dans ce but; M. Guil- laume s’est jusqu'à présent occupé du premier de ces moyens Avant tout, ilconvient d'observer que, quelque commodes et avantageux que puissent être ces pro- cédés, ils restent néanmoins tributaires du thermo- mètre, et réclament son emploi pour leur graduation, Quand on aura déterminé exactement la fonction qui lie le phénomène physique auquel on à recours, à la température du thermomètre à mercure, 1l conviendra de rapporter les mesures au thermomètre normal; un procédé très élégant de calcul permettra de faire cette substitution sans qu'il soit nécessaire d'introduire des termes trop nombreux et illfisoires dans les formules ; le calcul se fait, d’ailleurs, à l’aide de coefficients indé- pendants de la nature du phénomène considéré. La mesure des résistances est effectuée par la méthode du pont, tel qu'il a servi dans les recherches classiques de M. Benoît sur la construction de l’ohm légal; diverses modifications rendent encore plus précis l'emploi de ce pont. M. Guillaume discute complètement la ques- tion : il établit en particulier un théorème important relatif au caleul de la résistance d’une dérivation, qui permet de faire assez exactement la correction relative aux chevilles des bobines indirectes employées en dérivation. Lucien Poincaré. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 13 février 1891. M. Béchamp expose ses recherches sur le résidu insoluble qu'on obtient en traitant la fibrine du sang de bœuf par l'acide chlorhydrique dilué. Ce résidu possède des propriétés chimiques remarquables : il décompose l’eau oxygénée très rapidement, il fluidifie l'empois d’amidon très rapidement; ces actions sont relardées par les agents antiseptiques, mais non em- pêchées, M. Béchamp en conclut que ce résidu qui constitue les microzymas de la fibrine est une matière organisée vivante : la chaleur la tue et supprime les réactions indiquées ci-dessus. — M. Lebel fait obser- ver à ce propos qu'il a été démontré qu’un grand nom- bre de microbes de l’air et de l’eau résistent à des doses de phénol considérable, et que ce réactif peut même servir à les isoler, les faits observés par M. Bé- champ peuvent être attribués aussi bien aux microbes de l'air, de l’eau ou du sang qu'aux microzymas ; les expériences de M.Béchamp ne peuvent donc,à son avis, démontrer ni infirmer l'existence des microzymas. — M.Wyrouboff,pour vérifier l'explication qu'il a donnée du polymorphisme [voir ce recueil n° 4 p.123] a étudié les hydrates de chlorure de Cobalt et a trouvé que le sel dissous existe à l'état d'hydrate CGoCl,H20.En étudiant le sulfate de soude, il pense trouver l’explication de sa courbe de solubilité anormale dans ce fait que le sul- fate de soude est polymorphe et que dans les solutions les deux formes peuvent exister simultanément, l’une se détruisant et l’autre se produisant à mesure que la température monte; en effet si l'on fait cristalliser ce sel à une température supérieure à 35° on trouve les deux formes du sel et on trouve d'autant plus du sel 8 que la température est plus élevée; si cette tempéra- ture devient supérieure à celle à laquelle le sel 4 cesse d'exister la courbe redevient normale, M. Wyrouboff en conclut que les corps conservent, au moins dans certains cas, leur forme propre en solution. — M. Le Chatelier n'admet pas l'interprétation que M. Wy- rouboff donne de ses expériences sur le sulfate de soude, et montre que ses résultats peuvent s'expliquer sans hypothèses nouvelles en tenant compte des phé- nomènes de sursaturation qui se produisent dans l’é- vaporation rapide des solutions salines. — M.0O. Saint- 154 ACADÉMIES ET SOCIËÈTÉS SAVANTES - Pierre à fait réagir le potassium sur le diphénylmé- thane à 230° et préparé divers dérivés du composé potassé ainsi obtenu, par l’action des chlorures de benzyle et de benzoyle. — M. D. Vladesco, en étudiant l'action du chlore sur la méthyléthylacétone a obtenu un dérivé monochloré qui lui a permis la synthèse d’une série d’éthers du méthyl-acétyl-carbinol. L'action de l’ammoniaque lui a donné la {étraméthylpyrazine. — M. Friedel présente une note de M. Causse sur la transformation du phosphate monocalcique en phos- phate bicalcique par les acétates alcalins. Séance du 27 février 1891. M. Béchamp, au sujet des observations présentées dans la dernière séance par M. Le Bel rappelle rapide- ment quelques points historiques de l'étude des anti- septiques, et de leurs applications. — M. Tanret a ex- trait de diverses céréales un nouveau principe immédiat qu'il appelle lévosine et auquel il aftribue la formule [C6H100Ÿ]; cette substance est soluble dans l’eau et lalcool étendu ; sa solution aqueuse est précipitée par la baryte, Ce nouvel hydrate de carbone fond à 160° en s’altérant ; son pouvoir rotatoire est — 36°, il ne ré- duit pas la liqueur de Fehling et n’est altéré ni par la levure de bière ni par la diastase. Son hydratation par les acides étendus donne du lévulose, — M. Moureu a réussi à obtenir le chlorure d’acrylyle CH2= CH — COCL par l’action de l’oxychlorure de phosphore sur le sel de sodium de l'acide acrylique ; c’estun liquide bouillant à 189, — M. Hanriot a préparé le nickel tétracarbonyle de MM. Mond, Langer et Quincke et constaté que ce corps présente un pouvoir toxique considérable, bien supé- rieur à celui de l’oxyde de carbone, — MM. Béhal et Choay ont constaté que le chloral-ammoniaque s’al- tère spontanément à la longue, et qu'il se forme du chlorure d’ammonium, du chloroforme et des cristaux de chloral diformiamide. — M, Béhal a obtenu l’«-mé- thyl,-éthylpyridique par l’action de la paraldéhyde sur la formiamide, — M. Villiers a commencé l'étude de l’ac- tion de quelques ferments figurés sur les hydrates de carbone et constaté que le ferment butyrique transforme la fécule de pommes de terre en dextrines dontil indique les propriétés, — M. Ph. A. Guye, en s'appuyant sur l'équation des fluides telle qu'elle a été donnée par M. Sarrau indique une nouvelle méthode pour déter- miner le poids moléculaire au point critique ; cette méthode consiste à calculer la densité critique d par rapport à l'air ramenée à 0° et 760% au moyen de la FRUITS CEE Er (1070 + 6)? ments du point critique (densité, pression et tempéra- ture.) On à alors M — 4 X 28,88. Appliquée à l’eauet à l'alcool méthylique, cette méthode conduit aux poids moléculaires correspondants à [H?0}°et [CH*0P, ce qui est en harmonie avec les précédentes déterminations de M. Guye. — M. Friedel présente à la Société : 40 le Cours de chimie analytique de M. Silva publié par M. En- gel; 2° le traité de métallurgie de M. Juptner de Jonstorff traduit de l'allemand par M. Vlasto: 3° deux volumes de Conférences faites par divers sayants à son laboratoire et publiées par M. Georges Carré. formule : r et 0 sont les élé- A. COMBES. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 4 mars 1891. M. d'Ocagne : Sur la représentation graphique des équations à quatre variables, Application à la cons- truction d’un abaque permettant de résoudre lPéqua- tion complète du 3° degré (développement d’un sujet indiqué dans une note présentée à l'Académie des sciences dans la séance du 23 février). — M. Fouret : Démonstration simplifiée, en coordonnées cartésiennes, du théorème de Chasles relatif à l'invariabilité du cen- tre des moyennes distances des points où une surface algébrique est touchée par les plans parallèles à un plan quelconque. — M. Humbert : Autre mode de dé- monstration du même théorème. — M. Carvallo : Simplification de la démonstration de Cauchy pour le théorème dit de d’Alembert, — M. Carvallo fait voir que les arguments invoqués par MM. Cornu et Potier pour tirer des expériences. de M. Wiener sur la lumière polarisée une conclusion favorable à l'hypothèse de Fresnel sur l'orientation de la vibration lumineuse, suf- fisenf à légitimer cette conclusion, indépendamment mème des expériences de M. Wiener, en se basant sur la classique expérience des anneaux colorés de Newton. — M. Raffy : Détermination des surfaces moulures dont les lignes d’égale courbure sont parallèles. — M. Collignon présente un abaque donnant à vue la dis- tance de deux points sur une sphére en fonction de leurs latitudes et de la différence de leurs longitudes, et montre le parti qu'on peut tirer de cet abaque pour l'étude du joint universel. Il présenteencore un abaque pour la résolution des triangles rectilignes, — M. Kæ- nigs donne l'interprétation géométrique, au moyen de l'équation tangentielle des coniques, de l'intégrale de l'équation d’Euler mise sous la forme que lui a donnée M. Stieltjes. — M, Humbert : Détermination de toutes les courbes algébriques tracées sur une surface de Kummer, Ces courbes sont toutes de degré pair. Elles se répartissent en familles, de la manière suivante : | 19 — 16 familles de courbes passant par | 6 points singuliers (obtenues au moyen de surfaces &e degré mm +1 passant par une Courbes de conique singulière) ; degré 4m + 2 € 2% — 16 familles de courbes passant par (32 familles). 10 points singuliers (obtenues au moyen de surfaces de degré »% + 2 passant par 3 coni- | niques singulières se coupant en un point | singulier); | 19 — 30 familles de courbes passant par 8 points singuliers (obtenues au moyen de surfaces de degré 3 + 1 passant par 2 co- niques singulières) ; 20 —_ 4 famille de courbes passant par les 16 points singuliers (obtenues au moyen de surfaces de degré m + 2 passant par # co- niques singulières dont les plans forment un {étraèdre de Rosenhain). Pour m = {, cette famille n’existe plus. 3° — 1 famille de courbes qui sont les inter- sections complètes de la surface avec des surfaces d'ordre mn. Courbes de degré 4m (32 familles). Maurice D'OGAGNE, ROYALE DE LONDRES Séance du 19 février 1891. SOCIÉTÉ 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — Lord Rayleigh pré- sente une note sur la sensibilité de la méthode du pont appliquée aux courants électriques périodi- ques. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. Liveing et Dewar font une communication sur l'influence de la pression sur les spectres des flammes. Quand on fait brûler une colonne d'hydrogène dans l’oxygène, on obtient un spectre continu, coupé de nombreuses bandes obscures; les bandes sont peu marquées à la pression de 5 atmos- phères, mais elles deviennent très nettes à la pression de 20 atmosphères. Des observations ont montré qu'elles étaient dues à la présence du bioxyde d’azote, qui provenait des traces d'air atmosphérique, mêlées à l'hydrogène et à l'oxygène. A l'exception des bandes et des raies brillantes du sodium, le spectre est con- tinu ; il s'étend environ de x6200 à x 4150, la partie la plus brillante est à peu près en à 5150. Il croît en éclat et en étendue à mesure que la pression augmente, Il n'y à pas d'indice qu'il existe aucune relation entre le spectre continu et le spectre linéaire de l'hydrogène, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 155 ebil n’y a aucun accroissement d'éclat au voisinage des raies de l'hydrogène, C, F, G, La flamme de l’hydro- gène brûlant dans l'oxygène est jaune. Quand-l’oxygène brûle dans l'hydrogène, la flamme a une couleur de lavande. Dans ce cas, on a un spectre parfaitement continu, dont le maximum d'éclat se trouve dans le vert, et dont l'intensité va s’affaiblissant graduelle- ment de chaque côté de ce maximum, Aux pressions ordinaires, il va de 26150 dans le rouge à à 4285 dans le violet. Les raies du sodium font défaut. À mesure que la pression s’accroit, le spectre augmente beaucoup d'éclat, et à8 atmosphères, 1l s'étend de 26630 à à 3990, Des expériences faites sur de l’hydrogène chargé de vapeurs de sodium, ont montré qu'aucun effet net n’est produit sur la largeur des raies par l’élévation de la pression à 60 atmosphères, Un bee oxyhydrique, brû- lant dans l'acide carbonique en présence d’un excès d'oxygène, donne un spectre qui ne contient ni raies, ni bandes obscures ou brillantes, excepté la raie D du sodium. L'éthylène brûlant dans l'oxygène donne, quand la flamme est petite, le spectre habituel d'une flamme de bougie, avec une bande dans l’indigo (à #31), qui s’obscurcit vers le violet; quand la pression aug- mente, le spectre continu devient plus brillant, les bandes disparaissent, et en même temps apparait le spectre d'absorption du bioxyde d'azote. Le spectre du cyanogène, qu'on fait brûler dans l'oxygène est con- tinu ; il présente les raies du fer, du calcium, du potas- sium et du sodium, mais il n’a pas les bandes du cya- nogène, ni du carbone, ni les raies du carbone. IL semble donc que le trait caractéristique de la lumière émise par les flammes à haute pression est de fournir un spectre très continu, — M. Silvanus P. Thompson fait une communication sur la focométrie des lentilles et des combinaisons de lentilles et sur un nouveau foco- mètre. L'auteur a imaginé une méthode de focométrie, dans laquelle on n’a pas à effectuer une double mani- pulation toujours ennuyeuse, ni à mesurer les dimen- sions d'images optiques, ni à déterminer les positions ou les distances approchées d’aucun point, sauf celles des deux points principaux (points de Gauss), mais qui permet de déterminer la vraie longueur focale et la distance entre les deux points principaux par des men- surations directes de longueur. Il indique les résultats qu'il a obtenus avec son focomètre en appliquant sa méthode à diverses lentilles, objectifs de microscopes, lentilles de chambre noire, etc, — M, W. Abney pré- sente une note sur la classification numérique des cou- leurs. Une couleur est déterminée quand sa teinte, sa luminosité et sa pureté sont connues, Cette dernière constante est déterminée par la comparaison de la lumière colorée avec la lumière blanche qui n’a pas encore traversé le corps coloré transparent sur lequel on expérimente ou avec la lumière blanche réfléchie par une surface blanche, s’il s’agit d'un corps opaque, tel qu'un pigment. La longueur d'onde dominante, la proportion de lumière blanche et la luminosité de la lumière passant à travers divers verres colorés et réfléchie par divers pigments, a été déterminée par l’auteur, — MM. Francis Gotch et Victor Horsley ont pris pour sujet de leur eroonian lecture le système nerveux des mammifères, ses fonctions et leur locali- sation déterminée par une méthode électrique. Cette lecture est un résumé d’un mémoire développé dans lequel les auteurs ont donné l'historique des recherches sur les modifications électriques des centres et du sys- tème nerveux périphérique et une description complète de la méthode d’expérimentation, en s’attachant spé- cialement aux modifications qui y ont été introduites, Les résultats obtenus par la méthode actuelle sont comparés à ceux qu'on avait atteints antérieurement par la méthode graphique, et les auteurs exposent les faits qu'ils ont découverts relativement à la physiologie de la moelle épinière et qui rendent plus claires ses relations avec les centres supérieurs et les nerfs péri- phériques. Richard A, GRéGoRY, SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance générale annuelle. {Séance du 13 février 1891.) M. Blakesley lit un mémoire de Sir John Conroy sur les changements dans le spectre d’absoption du verre de cobalt produit par la chaleur. Le spectre d’ab- sorption du verre de cobalt quand il est froid consiste en trois bandes obscures dans le rouge, le jaune et le vert avec une augmentation considérable d'absorption entre les deux premières. Lorsqu'on chauffe un échan- tillon jusqu'au voisinage du rouge, l’absorption entre les deux premières bandes sombres diminue et la bande si- tuée dans le rougese déplace du côté dela partie la moins réfrangible du spectre, tandis que les bandes du jaune et du vert gardent leur position mais deviennent moins distinctes. Pendant l’échauffement du verre, intensité de sa coloration diminue et quand il est refroidi il re- prend sa couleur première et présentele mème spectre d'absorption. Des diagrammes et des nombres, montrant le caractère et la position de ces bandes, ainsi que les nombres obtenus antérieurement pour le verre de cobalt à froid par le D' W. J. Russel, accom- pagnent le mémoire, Comme conclusion l’auteur pense que ses observations, ainsi que celles de Feussner sur les solutions montrent que les spectres d’absongtion de plusieurs substances varient avec la température. Dans les solutions, on pourrait attribuer ce fait à la forma- tion d'hydrates différents ou à une démonstration poin- tillée, mais dans un solide tel que le verre de cobalt, un changement de constitution chimique à une température très inférieure au point de fusion semble bien peu pro- bable. — Le D'Gladstone dit que généralement la cha- leur change le pouvoir colorant des substances, et que dans les solutions l'absorption est plus grande aux tem- pératures élevées. Des effets analogues à ceux produits par la chaleur peuvent être obtenus en faisant varier les dissolvants dans le cas des dissolulions, mais comme l’auteur, M. Gladstone pense qu'on ne sauraitexpliquer par les mêmes considérations les phénomènes obscurs dans le cas des liquides et dans le cas du verre, Le professeur Thompson fait remarquer l’analogie des résultats de Sir John Conroy avec ceux obtenus par M. Ackroy qui a démontré que les couleurs réfléchies par des substances opaques telles que la porcelaine tendent, quand on chauffe le corps réfléchissant, du côté rouge. — Le professeur Minchin fait devant la Société diverses expériences décrites dans la séance précédente, et relatives aux phénomènes photochi- miques. Une batterie sélénium-aluminium illuminée par la lumière d’une bougie dévie l'aiguille d’un élec- tromètre, actionne un relai et fait sonner une cloche. On constate aussi très nettement qu'un excitateur de Hertz placé à distance rétablit la sensiblité des piles usées, — M. Tungcehmann rappelle que Kalischer et von Uljenin ont les premiers entrepris des expériences sur la force électromotrice produite par léclairement du sélénium; dans les éléments qu'ils constituaient, le jaune orange du spectre prismatique ou le jaune vert du spectre de diffraction produisaient les forces élémentaires maxima; il est à remarquer que la force électromotrice ne semble pas en rapport avec la quan- tité d'énergie correspondant à la réaction inactive éva- luée au moyen des expériences de Langlay. — MM. Wal- ler et Burton insistent sur l'application possible de ces expériences à l'interprétation du mécanisme de la vision. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 15 janvier 1891. M. W.Ostwald : Rotation magnétique.La rotation ma- unétique des composés organiques, d’après Perkin, est une fonction additive deleur composition. Ce fait ne se retrouve pas pour les composés inorganiques. M. Ost- wald voit là une preuve de plus à l’appui de la théorie d'Arrhenius sur la dissociation des électrolytes. — MM.Franck Pullinger et J,A, Gardner. La densité de 156 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES vapeur du chlorure d'ammonium. La densité de vapeur du chlorure d'’ammonium a été prise à diverses tempéra- ratures, dans une atmosphère d'ammoniac. La valeur caleulée pour une dissociation complète étant 0,921 on a trouvé : ‘ à 3609 c. à 448° c 1,198 et 1,141 0,939, 0,494, (,009 au rouge, dans l'air, la moyenne de cinq expériences a donné 0,926. — M. Hewitt. Phénylhydrazines chlorées. — M. Vernon, Une nouvelle modification du phosphore. M. Vernon croit avoir oblenu une nouvelle modifica- tion du phosphore. MM. Pickering et Tutton trouvent cette conclusion trop hâtive, les modifications obser- vées dans les propriétés phy siques étant très faibles et attribuables à des traces d'impuretés. Séance du 5 février 1891, M. Clève. Formation d'une substance explosive dans l'éther. Le professeur Clève décrit une substance pro- duisant de violentes explosions, et qu'on trouve dans les résidus de distillation de l'éther commercial. M. Clève croit que ce doit être du peroxyde d’éthyle. — MM. Orme Masson et U. T. M. Wilsmore. Le magné- sun forme-t-il des composés avec les radicaux hydro- carbonés? Les recherches de Hallwachs et Schaparik, Cahours, Vantelyn ont donné des résultats peu concor- dants ; MM. Masson et Wilsmore ont vainement essayé de préparer le magnésium-éthyle : 1° par le magné- sium etl'iodure d'étyle ; 20 par le couple magnésium cuivre et l’iodure d° éthyle : 3° par l’alliage de magné- sium et de sodium et l'iodure d’éthyle ; ao par le ma- gnésium et le zinc-éthyle ; 5° par le magnésium et le mercure éthyle ; 6° enfin par le zinc-éthyle et l’iodure de magnésium anhydre. Les auteurs sont amenés par ces résultats à conclure que le magnésium employé dans les recherches antérieures contenait quelque im- pureté probablement du zinc. Le D° Armstrong fait re- marquer que Lohr à pu récemment obtenir le magné- sium-éthyle et le magnésium-méthyle, par action de l’iodure d’éthyle ou de l’iodure de méthyle sur le ma- gnésium seul ou associé au cuivre, en ayant soin d’opé- rer à haute température. L'action peut commencer à froid et se terminer vers 1100, si l’on ajoute au mé- lange, un peu d’acétate d éthyle. — M. Adie. Composés formés par les oxydes de phosphore avec l'anhydride sulfu- rique. L'action de l’anhydride sulfurique sur l'acide phosphorique donne un liquide visqueux dont l’auteur représente la composition par la formule PO“ (SO#H). Le phosphore réagit violemment sur l'anhydride sul- furique et donne le corps 3P204, 2S03%, — M. G. T. Movdy. Combustion du magnésium dans la vapeur d'eau. L'auteur décrit les précautions à prendre pour réussir cette expérience, SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE BERLIN Séance du 6 mars 1891. M. Kundt présente une méthode aussi simple qu'élé- gante pour démontrer à un auditoire les vibrations d’une corde ou d’une membrane. On place un mono- corde devant la fente d’une lampe électrique et on en projette l’image sur un écran à l’aide d'une lentille qui est fixée au balancier d’un interrupteur de Foucault en usage aussi dans les appareils de Ruhmkorff, Si l'interrupteur est mis en mouvement, on voit une image allongée de la corde, et si l’on met celle-ci en vibration, soit par un coup d’archet, soit en la pincant ou en la frappant, on voit des courbes différentes dues aux sons harmoniques différents. L'expérience réussit également très bien avec une membrane qu’on place devant la fente de la lampe et qu'on munit d'un point lumineux, par exemple d'un petit morceau de carton percé où d’un petit fil métallique, La membrane est fixée sur un tube lequel à son tour est uni à l’aide d’un tube en caoutchouc à un cornet acoustique. Aussi longtemps que la membrane est en repos on ne voit qu'une ligne droite sur l'écran laquelle se change en courbes caractéristiques dès qu’on chante devant le cornet où qu'on y faitentrer les sons d’un tuyau d'orgue ou d’autres instruments de musique. La différence des voyelles par exemple se démontre d'une manière frap- pante, quand on chante dans le cornet, par la diffé- rence des courbes. M. Raps, collaborateur de M. Kundt, a réussi à photographier ces images de sorte que cette méthode si simple pourrait peut- être servir pour des mesures.— MM.Friedlænderfrères présententunesérie de photographies qu'ils ont obtenues en placant une plaque photographique entre les disques d’un petit condensateur joints aux deux pôles d'une machiue électrique de Holtz. On obtient de cette facon les figures de Lichtenberg avec une grande netteté. Des médailles placées sur la “plaque photographique se reproduisent entourées d’une auréole, La question est encore indé- cise de savoir si ces images sont dues au phénomène purement électrique ou si peut-être ce sont des effets lumineux qui les provoquent, Dr Hans Janx. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 19 février 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, Oppenheim : Elé- ments de la trajectoire de la planète (290) Bruna. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — Le D' Klémencic : Sur la réflexion des rayons de force électrique sur des plateaux de soufre ou des plateaux métalliques. L'auteur à entrepris des recherches qualitatives et quantitatives sur la ré- flexion des rayons de force électrique sur un diélectri- que tel que le soufre ou sur un conducteur tel qu'un plateau de zinc; il a cherché à comparer les propriétés de ces rayons à celles des rayons lumineux. Il se sert pour cette étude d’un inducteur secondaire avec un élément thermoélectrique, comme il a été expliqué dans une précédente communication, La réflexion était produite sur des plaques de soufre réunies de facon à former une surface de 1 m. 20 de hauteur sur 0 m. 80 de largeur l’épaisseur ; était de 0 m. 09. On pouvait sub- stituer au soufre une feuille de zinc de même dimen- sion, mais naturellement moins profonde. On à aussi étudié la réflexion mé tallique sur un treillis de fils de fer et sur un plateau de zinc replié en cylindre. Les dimensions des différentes parties de l’appareil per- mettant l'étude de la tÉORUE sous des incidences va- riant entre 30° et 65°, Entre la réflexion sur le plateau de zinc et celle sur le plateau de soufre, on a constaté la même différence que pour les rayons lumineux. L’in- tensité de la réflexion change avec la direction de vi- bralion des rayons. Avec le plateau de soufre on obtient sous toutes les incidences une réflexion énergique, si les ondulations sont perpendiculaires au plan d’inei- dence ; au contraire si elles sont parallèles à ce plan on n'obtient de réflexion énergique que sous un petit angle ; l'intensité des radiations réfléchies diminue beaucoup quand l'incidence augmente et s’annule complètement pour un angle compris entre 60° ef 65°, Ce fait est d'autant plus remarquable que dorer de réfraction du soufre à une valeur telle que ce corps doit posséder un angle de polarisation totale compris entre les mêmes valeurs 60° et 65°, La comparaison des observations avec les résultats que l'on déduirait de la formule de Fresnel sur l'intensité des radiations réfléchies par le soufre ne conduit pas à des résultats très satisfaisants, sauf pour une valeur particulière de l'angle d° incidence, mais on ne saurait attacher grande importance à ce désaccord si l’on a égard aux mauvaises conditions où l'on se trouve nécessairement placé, les dimensions du miroir réfléchissant étant plus petites que la longueur d'onde des radiations incidentes. — M. A. Von Ober- meyer. Recherches sur les décharges électriques entre des pointes placées dans différents gaz sous diverses pressions. Ces recherches relatives aux distances explosives et à la mesure de la résistance opposée à la décharge ont été CHRONIQUE effectuées avec l’électromètre absolu de MM. Bichat et Blondlot.— MM. Goldschmidt et Egger. Action du cya- mure de potassium sur l'acide opianique. Si l'on traite l'éther de l’acide en dissolution alcoolique par le cya- nure de potassium, il se forme un composé très difficile- ment soluble de couleur jaune C2H60$8, un autre lé- gèrement soluble C2H®0$ et est un éther neutre de l'acide hémipicrique. Le composé C20H1608 à une struc- ture analogue au diphtalyle CH#0O OCH° CH O —C = C— OCH >0 0< LÉ C= Il Il (®) [0] et doit être considéré comme un tétraméthoxyldi- phtalyle; quant au second il parait être un tétramé- thoxylhydrodiphtalyle. — MM. Goldschmidt et Ja- lioda. Swr les produits de réaction de la benzylamine et de la glycolchlorhydrine. — M. Tschermak. Seconde com- munication sw le groupe des chlorites. L'auteur examine les rapports entre la constitution et la composition de ces minéraux; ce travail renferme un grand nombre d'analyses chimiques, qui se rencontrent parfois avec celles de M, Luduwiz, SCIENCES NATURELLES, — Le D' Adamkiewicz. Sur le virus et les cellules des tumeurs malignes (cancers). Le vi- rus cancéreux qui se forme dans la substance du carcinome et que l’auteur a déjà décrit se développe beaucoup plus aisément dans le sang que dans le sys- tème lymphatique. Ainsi une dose qui, introduite dans le sang, tue immédiatement l'animal en expérience, ne produit le même effet qu'au bout de plusieurs jours introduite dans le système lymphatique. Dans les deux cas on observe toujours la paralysie avant la mort. Tandis que (surtout dans lintroduction par le système lymphatique) les phénomèmes d'incitation peuvent faire complètement défaut, Si l’on inocule des particules cancéreuses, prises sur un malade, à des animaux vi- vants, on remarque souvent l’apparilion de cellules cancéreuses à des endroits même assez éloignés du point d’inoculation, Emile Weyvr, Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE SAINT-PÉTERSBOURG Séance du 28 janvier 1891. 1° Screxces puysiques. — M. G. Wild lit une note sur l'adaptation des lampes électriques Edison aux appa- reils enregistreurs qui fonclionnent à l'aide de photogra- phie, Les résultats des expériences sont complètement favorables au remplacement du mode d'éclairage ordi- naire (gaz, lampes à pétrole) par l'éclairage électrique. Avec ce dernier, les dessins des courbes des magnéto- graphes sontbeaucoup plus nets, les interruptions dans l'éclairage sont réduites au minimum (grâce aux aver- tisseurs électriques), la lecture des indications des ins- truments $e fait plus rapidement, ete. En outre les lampes Edison n’échauffent point les appareils et coù- tent moins cher. 22 SGIENGES NATURELLES, M. A. Famintzin fait la décla- ration suivante : « L'année passée, au mois de mai, j'ai présenté à l'Académie un mémoire sur le phénomène de symbiose des cellules vertes et des infusoires. Dans ce mémoire je contirmais l'existence d’une enve- loppe et d’un noyau chez la Zoochlorella et je décrivais une algue vivant librement, semblable en tout point à cette dernière, J'en concluais que les cellules vertes des infusoires étaient des algues, el je disais que, mal- gré tous mes efforts et les expériences de deux années, Je n'ai pu réussir à faire vivre ces algues en dehors de l'organisme de l’infusoire, D'ailleurs les autres observateurs n'élaient guère plus heureux que moi et ne pouvaient que constater la mort plus ou moins rapide des cellules en question isolées du corps de l'infusoire, Continuant depuis mes expériences, en variant les conditions dans lesquelles elles se faisaient, j'ai pu découvrir quelques indices qui permettaient d'espérer des résultats plus favorables en essayant une culture des cellules dans des solutions de sels inorga- niques, soit purs, soit mélangés avec l’agar-agar, Enfin en septembre dernier j’ai réussi à oblenir une végéta- tion superbe de cellules vertes extraites du Paramæ- cium Bursaria, et en décembre des cellules vertes de la Zoochlorella et du Stentor polymorphus. » O. BAckLUND, Membre de l'Académie. CHRONIQUE LES FÊTES DU CINQUANTENAIRE DE LA FONDATION DE LA SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE LONDRES Notre éminent collaborateur, M. A. Gautier, vient de rendre compte en ces termes à la Société chimique de Paris de la réception faite par la Société chimique de Londres à la délégation francaise qu'il présidait : Vers le commencement du mois de février dernier Ja Société chimique de Paris recevait de la Société chimique de Londres l'invitation de se joindre à elle pour célébrer le cinquantenaire de la fondation de la célèbre Société chimique anglaise. Nos sympathies pour les savants Anglais, et le souvenir que la Société chimique de Londres avait servi, pour ainsi dire, de modèle à la Société chimique de Paris, fondée par Würtz en 1858, nous firent accepter avec plaisir cette invitation, d’ail- leurs faite en termes pressants ettrès flatteurs pournous. Les fêtes devaient avoir lieu les 24 et 25 février, M. H. Armstrong, secrétaire général de la Société chi- mique anglaise, fut averti de notre adhésion et la délé- gation française composée de MM. A. Gautier, président actuel de la Société chimique de Paris, Haller (de Nancy), Correspondant de l'Institut, de Clermont et À. Combes arrivait à Londres le lundi 23 février au matin. Ce n'a pas élé sans peine qu'au milieu d’un brouillard épais et jaunätre que ne parvenait pas à percer la lumière des bec de gaz sans cesse allumés, ni celle des torches à pétrole portées à main d'homme, nous ayons pu nous rendre au siège de la Société, à Burlington House, puis chez son honorable président M. W. J. Rus- sel. La Société chimique anglaise avait voulu nous faire complètement les honneurs de sa ville, et loger les délé- gations étrangères chez les savants londoniens ; MM. Gau- tier et Combes chez M. le D'Gladstone, MM. de Clermont et Haller chez M. Ramsay. Au milieu de la fumée de houille qu’une absence complète de vent laissait se rabattre sur la grande ville, ce n’a été qu'après bien des péripéties et un retard très sensible que nous avons pu arriver chez nos aimables hôtes. Le mercredi 2% les fètes ont commencé par une assemblée générale des membres de la Société chimique et des délégations étrangères, tenue l'après-midi dans l'amphithéätre de l'Université de Londres (Burlington Gar- dens): La belle salle était comble, et à 3 heures, M. le président Russel déclarait la séance ouverte et souhaitait à tous la bienvenue. 158 CHRONIQUE J'ai dit quelle était la délégation francaise. La délé- sation allemande était composée de MM. V. Meyer, (d'Heidelberg), Will (de Berlin), Hollz et un quatrième délégué représentant l’industrie chimique. Les Sociétés de Saint-Pétersbourg, New-York, etc., avaient envoyé des adresses et des félicitations. Après les speeches très applaudis du président actuel, de MM. Grove et sir Lyon Playfair, membres fondateurs de la Société chimique anglaise et anciens présidents de cette Société, M. le professeur Odling a prononcé un fort intéressant discours exposant les progrès de la chi- mie depuis la fondation de la Société de Londres, c’est- à-dire depuis un demi-siècle. Nous espérons que ce discours, aussi savant qu'équitable ef pondéré dans ses jugements, plein de points de vue originaux, sera publié dans l’une de nos Revues francaises !. Le président a donné ensuite successivement la parole aux présidents des délégations étrangères. Voici comment s’est exprimé M, Gautier, au nom des chimistes français : « C’est toujours un nouveau regret pour moi, lorsque « je me retrouve à Londres, de ne pas assez par- « ler la langue anglaise pour oser laborder devant « vous : mais (et c’est un peu notre excuse) vous parlez « ou entendez tous le français, et vous me par- « donnerez aisément, je l'espère, de vous dire en « français les senfiments qui nous ont conduits ici. « Quelle que soit la différence de nos mœurs et de « nos inslilulions, quels que soient les événements et « les révolutions qui nous ont séparés autrefois, l’on « peut dire que rien n’est parvenu à diminuer l'estime, « l'amitié particulière que les savants de notre pays « portent à ceux du vôtre. Ce sentiment vif et persis- « tant qui date d'avant le commencement de ce siècle, « et que je crois être partagé par vous» (oui, oui) « tient à des causes multiples: « Ce que nous estimons dans les savants anglais, « c’est la grande originalité de leurs idées et de leurs « méthodes; c’est la portée pratique aussi bien que « théorique de leurs découvertes; c’est la elarté de « leur exposition, et la netteté de leurs résultats; c’est « la conscience, le manque de hâte avec lesquels sont « publiés leurs travaux; c’est l’équité complète de « leurs jugements, leur loyauté vis à-vis de leurs con- « frères étrangers; c'est lhospitalité généreuse qu'ils « offrent dans leurs journaux aux publications des « autres pays. « De cette hospitalité anglaise nous en avons une « preuve plus sensible encore aujourd’hui, et nous « vous remercions de la grâce aimable avec laquelle « vous nous recevez dans vos maisons, et nous faites, pour ainsi dire, participer à vos fêtes de famille. « Les plus illustres d’entre nous auraient voulu ve- « nir assister à ce Jubilé et célébrer ici le cinquantième « anniversaire de la création de votre célèbre Société « chimique ; mais diverses raisons les en ont empêchés « et je suis chargé de vous en exprimer le regret : de « M, Pasteur, dont la santé, quoiqu'un peu affermie, « n'est plus celle de la jeunesse; de M. Berthelot retenu « au Sénat et an Ministère par des commissions d’étu- « des où ses connaissances spéciales sont indispen- « sables ; de M. Friedel, en cemoment fatigué. — Mais « ils se joignent de cœur à vous dans cette fête, comme « le font les membres de la Commission française ici « présents, MM. de Clermont, Haller, Combes et moi- « Inème. « La Société chimique de Londres a été le modèle et « la grande sœur de la Société chimique de Paris. « Cest ici que son fondateur, Würtz, est venu se ren- « seigner, et c’est au Président actuel de notre Société « qu'incombait le devoir, l'honneur et le plaisir de se « mettre à la tête de la Commission venue pour vous « complimenter et vous apporter l'expression de notre « estime et de notre admiration pour vos savants les 1 On trouvera l'analyse de ce discours à la suite de cet article. (N. de la Réd. « plus célèbres, nos souhaits les plus cordiaux pour la « prospérité à venir de votre Société. » Après ce discours, très applaudi, M. le D' Will a lu au nom de la Société de Berlin une adresse de la Deutsche chemische Gesellschaft à celle de Londres et il a déposé sur le bureau cette adresse, écrite sur vélin, en caractères gothiquesetmagnifiquementreliée. Une belle illustration était peinte en tête de ce livre; la Société chimique de Londres, sous les traits d’une femme, assise, recevait la Société chimique de Berlin, repré- sentée par une belle et luxuriante fille voulant bien descendre d’un piédestal pour aller féliciter celle qui l’attendait assise au-dessous d'elle, Après la lecture d’une nouvelle adresse de la Société pharmaceutique de Londres,la séance a été levée. Le soir du même jour les membres des Sociétés an- glaises et étrangères étaient invités à une soirée età une exposition scientifique tenues dans les magnifiques salons que la corporation des Orfèvres de Londres avait mis à la disposition de la Société chimique. Je ne par- lerai ni de la cordialité dela réception, ni de la présence du Lord-Maire auquel nous avons eu l'honneur d’être présentés, ni de l'exposition intéressante des portraits des divers Présidents de la Société chimique anglaise depuis sa fondation, ni de l'excellente musique de Par- tillerie de la garde, mais seulement de lexposition des produits et appareils, principalement due aux anciens Présidents de la Société anglaise, Parmi les pièces les plus curieuses de cette exposition historique je me bornerai à ciler : 1° L'échantillon original de phosphore préparé en 1680 dans le laboratoire de Æ. Boyle par le célèbre alchimiste Godfrey Hanckwitz. C’est le premier échan- üllon de phosphore produit industriellement, avant mème la publication posthume de la méthode de Boyle faite en 1693. 20 Le fourneau à coupellation de sir Isaac Newton, alors Maître de Mines, 3° La balance de poche de W. Scheele, el la balance de Cavendisch. 4° La batterie galvanique avec laquelle sir H. Day découvrit les métaux alcalins, Les premiers spécimens de ses lampes de sûreté pour les mines. = 5e Les appareils originaux de J. Dalton, ses manus- crits, ses baromètres, eudiomètres ; les tubes gradués dont il se servit dans les travaux qui lui firent décou- vrir la loi des proportions multiples, 6° La première photographie du spectre solaire prise par Draper. 1° Les appareils originaux de Faraday pour la liqué- faction des gaz. Le dispositif qui lui servit pour la pre- mière fois à découvrir la relation du plan de polarisa- ton sous l'influence du magnétisme, Le premier échantillon connu de benzine. 8° Les tubes de graphite et d'hydrophane employés par Th. Graham lorsqu'il découvrit la diffusion des gaz; ses osmomètres, ses appareilsà dialyse ; ceux qu'il em- ploya pour étudier la capillarité, la séparation des gaz par athmolyse et dialyse. 9° Les appareils utilisés par C. Brodie pour ses élu- des sur l'ozone, 10° Du Dr Gladslone : divers produits, tels que l'hydrate de tébébenthine préparé en 1846; la xyloï- dine (4847), l’éthylate d'aluminium; diverses acétones ; le couple zinc-cuivre original, la première batterie élec- trique à air, efc., etc. 11° De Warren de la Rue : l'une des premières photo- graphies de la lune et des premières applications de la photographie à l'étude du ciel. 12 De S. Frankland: les échantillons originaux de radicaux organométalliqueset son boréthyle. L'appareil qui lui a permis de déterminer l'énergie potentielle des diversaliments ; les appareils qui lui ont servi à mesurer la chaleur de combustion de l'hydrogène et de l’oxyde de carbone sous de hautes pressions. Les produits de ses recherches, faites avec Duppa sur les éthers diacé- toacétiques et autres. Les appareils employés (avec és. CHRONIQUE 159 M. Armstrong) pour doser l'azote des nitites, nitratts et celui des composés organiques des eaux potables, 13° De sir Frédérick Abel : les spécimens originaux de coton poudre préparés en 1846; les échantillons primi- tifs de coton poudre granulés, comprimés, nitroglycé- rinés. Les bombes et appareils à explosion d’Abel et Noble. Le premier échantillon de cordite, ou poudre anglaise sans fumée, | 449 De J. H, Gilbert : Les premiers appareils imaginés par Lawes, Gilbert et Pugh de 1837 à 1860, pour savoir si les plantes absorbent ou non l’azote libre de Pair, 15° De sir Henry Rosceæ : la première série complète d'échantillons des composés du Vanadium. 16° De W, H. Perkins : une série très intéressante de produits chimiques, parmi lesquels l'échantillon origi- nal de Mauvéine, la première couleur obtenue avec le goudron de houille en 1836. 17° De Hugo Müller : divers composés : acide mala- nique, homopyrocatechine, quercite du Chamerops loni- lis, matières colorantes diverses. 48° De W. Crookes : les premiers échantillons de dé- pôts sélénifères où il decouvrit le thallium, et une série très complète des dérivés de ce métal. Des échan- tillons de minerais thallifères (Crookenite, séléniure de cuivre et de thallium, contenant 17,25 °/ de thallium). Pyrites thallifères du Cumberland, Padiomètres. Appareils nombreux el ingénieux, des- tinés à l'étude de la matière radiante ; Appareils pour étudier les phénomènes de phospho- rescence dans le haut vide, Spécimens des terres rares et de leurs sels : Gadoli- nite, Samarskite, Allanite, Thorite, Eudyalite, Orthite, Albite, Rhabdophane, Colombite, Hjelmite, ete. 19° De Æ. Daniell : Les premières piles électriques ; ses batteries à gaz; son pyromètre. 205 De Th. Andrews : la collection deses appareils de recherches sur l'ozone, la liquéfaction des gaz, la con- tinuité des états gazeux et liquide, et le point criti- que; son calorimètre pour déterminer la chaleur des combustions. 21° De J. Joule : le modèle du calorimètre qu'il em- ploya pour déterminer l'équivalent mécanique de la chaleur. 220 De W. Weldon, E. Schenck, W. Francis, R. Wa- rington, J. Spiller, G. Matthey, diverses expositions de portraits, manuscrits, en particulier les pre- miers appareils de platine, fabriqués en 1816, et ceux de la maison Johnson Matthey and C°, Des coins et mé- dailles de platine frappés en 1826, à Saint-Pétersbourg, et de beaux spécimens de platine, paHladium, rhodium, ruthénium, iridium, etc. Le lendemain de cette belle et intéressante soirée, fut consacré par les délégués français à visiter les éta- blissements scientifiques de Londres y compris les la- boratoires particuliers : Nous ayons rapidement par- couru l'Ecole des Sciences, véritable Faculté des Sciences de Londres, mais d’où l’on a exclu les sciences non expérimentales (mathématiques, astronomie, ete.) qui s’enseignent ailleurs ; l'Ecole des Mines, l’Institut des Ingénieurs civils : la Monnaie qu'a bien voulu nous montrer dans tous les détails de son fonctionnement ingénieux sonsavant directeur M. Roberts Austen etc.Le temps de cette seconde journée s’est donc fortutilement passé et nous avons été ainsi conduits jusqu’au grand diner qu'on nous offrait Le soir dans les salons de Whit- tehall, sans que nous ayons pu nous soustraire un ins- tant à l’attrait de l'étude du fonctionnement de tant d'institutions nouvelles pour nous. J’étonnerais nos compatriotes si je leur disais que cette réception, à laquelle avait bien voulu assister Lord Salisbury lui-même, ainsi que M. l’Attorney général sir Robert Webster et divers membres du Parlement, ne nous à pas particulièrement intéressés, Certes les formes que les Anglais aiment à conserver ne sont pas exclusives, dans ces grands diners d’apparat, d'une certaine simplicité et de beaucoup de cordialité, et lorsque le toast Master proclame successivement les noms de ceux qui vont prendre la parole; cette solen- nité n'empêche pas l’orateur de parler à son auditoire attentif et bienveillant avec cette familiarité que nous aimons et que cultivent aussi nos voisins d'Angleterre. Je regrette bien de ne pas pouvoir faire passer sous les yeux des lecteurs les toasts prononcés successive- ment au dessert par M. le Président Russel; celui de M. le Marquis de Salisbury, qui lui a répondu, a été publié par le Times, et nous pouvons en donner un ex- trait assez complet; on verra que l'humour britan- nique ne perd jamais ses droits. Après ce discours, M. l’Attorney général à parlé avec beaucoup d'esprit de ses relations de collège avec di- vers membres de la Société chimique de Londres, au- jourd’hui ses amis; puis, sir Lyon Playfair, avec sa verve oraloire toujours nouvelle et toujours jeune, nous à charmés à son four. Enfin ont successivement pris la parole, M. le représentant de la Société des Orfèvres de Londres, et M. Frankland, chargé de porter un toast aux délégations étrangères. F M. Gautier lui a répondu le premier par les paroles suivantes : « Lorsqu'il y à trente années {un peu plus peut-être) « je commençais à étudier avec M. Chancel, le succes- « seur de Gerhardt à Montpellier, et M. Bérard, le col- « laborateur de Delaroche, la chimie de ces temps « lointains, les noms de H. Davy, Dumas, Liebig,-Ber- « zélius, revenaient sans cesse, el l’on commencait à « nous faire connaitre alors, comme des nouveautés, « devenues depuis classiques, les beaux travaux de « M. Williamson sur l’éthérification, et de M, Frankland « sur les radicaux organométalliques, Que j'étais loin « alors de m'attendre au périlleux honneur qui m'est « échu ce soir de répondre à l'illustre savant que je viens « de nommer le dernier, et de lui répondre dans son « pays même, dans cette hospitalière et heureuse An- « gleterre qui vit tranquille, protégée par ses vieilles « institutions, et qui a bien raison d’être fière de ses « savants, alors qu'elle peut compter parmi eux « l’homme d'Etat qui a bien voulu ce soir assister à no- « tre fête, Lord Salisbury, Lord Raleigh et le due « d’Argyll lui-même. « À cet honneur très grand et dont je rapporte tout « le prix à votre pays et au nôtre, permettez-moi de « répondre d’abord par un vœu : celui de pouvoir nous « retrouver tous, sans qu'il en manque un seul, lors- « que nous célébrerons à notre tour à Paris le cin- « quantenaire de la fondation de notre Société chimi- « que. Elle date de 1858, et par conséquent c’est 17 « années que je demande au Ciel d'accorder à chacun « de nous, Nul ne s’y opposera sans doute, et nous es- « saierons alors, unis dans une fèle semblable, de « vous recevoir à notre tour avec les mêmes sentiments « de cordialité et la même hospitalité, « Messieurs, qu'elle le veuille ou non, la science « arrive à deux résultats distincts : elle étudie les faits, « ellé essaie de les généraliser et d’en déduire les lois « qui permettent d'agrandir le champ des connaissan- « ces humaines et de les appliquer à l’accroissement « du bien-être commun. Mais elle devient aussi un « moyen d'union entre les hommes et les nations. Des « fêtes comme celle-ci en sont la preuve sensible. Elles « permettent de se tendre la main, elles rapprochent « ceux qui resteraient éloignés; elle fait se juger et « s’estimer personnellement des hommes qui se con- « naissent souvent depuis longtemps sans se voir, s’en- « tendre, ni songer à s’'entr'aider, « Par nos publications, nos livres, nos cours publics, « nous possédons aussi des moyens d’étre utiles en « jouant ce rôle de pacification. De ces moyens croyez- « le bien, nous ne nous faisons pas faute en France. Je « vous ai dit hier quels sont nos sentiments vis-à-vi « des savants de l'Angleterre; qu'il me soit permis, « puisque l’occasion s’en présente, de dire aussi notre « pensée aux savants allemands ici présents. Nous pro- « fessons tous le culte scientifique qu’elle mérite pour la travailleuse et érudite Allemagne, et nos élèves 160 CHRONIQUE | «savent bien tout le cas que nous faisons de nombreu- « ses publications qui nous en viennent, et l’admira : « lion que nous avons pour ses plus célèbres chi- « mistes. « C’est ainsi que la Science arrive peu à peu à apai- « ser et unir les hommes et les nations. Les peuples « auront beau échanger leurs obus sur les champs de « bataille, ils échangent aussi leurs idées, et les conqué- « tes scientifiques, d’où qu'elles viennent, resteront un « patrimoine commun. De cette communauté de, goûts, « de ces échanges, naîtra tôt ou tard, bientôt peut-être, « la pacification désirable, le règne de l'équité et de la « raison, « Messieurs, l’on a dit que la science n’a pas de pa- « trie, c’est ainsi qu'il faut l'entendre ; c’est dans cette « pensée, et sous l'égide de l'hospitalité anglaise, que « dans cette fête pacifique je bois à l’union des hom- « mes de bonne volonté par la science et pour le bien « général. » Après ce toast, M. V. Meyer a pris la parole au nom de l’Allemagne. Le nom de l'illustre chimiste de Hei- delberg a soulevé des hurrahs bien mérités, M. V. Meyer à developpé avec beaucoup d’éloquence ce thème que la Société chimique de Berlin, la plus nombreuse comme membres inscrits, la plus productive en publi- cations, était certainement la Société chimique inter- nationale par excellence. Elle est ouverte à tous, dit-il; elle a eu pour Présidents des hommes tels que W,. Hof- mann, qui s’est presque formé en Angleterre; Kekulé, qui a fait à Londres ses premières observations sur la loi des valences. La Société chimique allemande est donc heureuse de tendre une main amie à celle de Londres, etc, Après d’autres toasts encore, prononcés par M. Abel, pour remercier les membres étrangers et les visiteurs, par sir Andrew Clark et le Président de la Société pharmaceutique de Londres, la séance a été levée. Notre rôle de délégués était terminé, mais nous n'a- vons pas voulu quitter l’Angleterre sans assister à Pune des séances de la célèbre Société Royale de Londres, qui devait avoir Jieu le lendemain. Notre aimable hôte M. H. Gladstone, F. R. S., a bien voulu nous présenter, durant le thé qui précède chaque séance, aux plus il- lustres des savants anglais, et nous avons pu assister ensuite à une très intéressante lecture (Croonian Lecture) de M. Vicior Horseley, sur le système nerveux des mammifères, et les localisations des centres fonction- nels, déterminés durant la vie, par une nouvelle mé- thode d'inscriptions électriques ; cette lecture a été illus- trée de nombreuses et remarquables projections lu- mineuses. Tel est le résumé très succinctde notre court séjour à Londres. La délégalion francaise en revient très satis- faite, très touchée de l’hospitalité et de laffabilité des savants anglais, de la connaissance qu'ils ont de notre langue, de nos hommes et de nos travaux ; très frappée de l’activité de leurs institutions privées et publiques d'enseignement supérieur. Elle fait des vœux pour que l’occasion se renouvelle le plus souvent possible de resserrer encore les nœuds de ces vieilles et amicales relations qui datent de plus d’un siècle; relations fon- dées sur une estime réciproque et une commune con- ception que la Science doit rester en dehors et au-des- sus de la considération des intérêts matériels des partis el des races. DISCOURS DE M, ODLING Parmi les nombreux discours prononcés au jubilé de la Société chimique de Londres, l’un des plus remar- qués et des plus applaudis a été celui du professeur Odling, sur le développement de la chimie depuis la fondation de la Société, En voici le résumé, d’après la revue anglaise The Chemist and Druggist : Si l’on étudie les progrès qu'a faits la chimie depuis cinquante ans, on est frappé de ce fait que la théorie et l'application avancent toujours simultanément et la main dans la main. Les développements de l’industrie chimique moderne sont dus en grande partie aux re= cherches de laboratoire, et, d'autre part, l’industrie, en fournissant à la science, des corps nouveaux et variés en quantités considérables, a forcé le chimiste à se rendre compte de la futilité de ses convictions sur la constitution chimique des corps. Mais après un examen sévère, on peutdire que les doctrines chimiques actuel- les reposent sur une base beaucoup plus solide que cela n’arrivait autrefois. La science nous à permis de pénétrer beaucoup des secrets de la nature : l'étude de la synthèse, commen- cée par Wôbler puis par Berthelot, a conduit à d’admirables résultats pratiques ; citons la synthèse - industrielle de lessence de Wintergreen et de la Ga- rance. Les travaux de Fischer sur la synthèse des su- cres ont fait disparaître pour toujours la vieille idée de la force vitale, Car tous ces corps, aujourd'hui obtenus par synthèse, étaient considérés comme des produc- tions de cette force mystérieuse. Sur ce sujet, nos idées ont subi non pas un simple changement, mais une véri- table révolution. Passant en revue, les principales découvertes effec- tuées dans ces cinquantes dernières années, le profes- teur Odling, cite la théoriede la dissociation, à laquelle est attaché le nom de Sainte-Claire-Deville, la théorie de la dissolution des sels, de la diffusion, de la pression : osmotique ; les découvertes de Graham sur l’osmose et de Faraday sur l’électrolyse. Les recherches sur l’état de la matière aux températures élevées ont conduit Bunsen et Kirchoff à l'analyse spectrale, en étendant la chimie au delà des limites terrestres et en créant une science cosmique. Quel pas énorme, dit l'orateur, a fait faire cette dé- couverte à nos idées sur la nature et la relation mu- tuelle des éléments, Elle a permis à certains chimistes, dont plusieurs sont des savants de premier ordre, de se lancer dans létude de la nature des éléments, étude qui, si elle ne conduit pas encore à des résultats bien clairs, peut mettre en évidence dans l'avenir des véri-. tés dela plus grande importance, Puis est venue la question des rapports de combinaison des éléments. Les travaux de Gehrard, Wurtz, Faraday, ont produit la révolution des poids atomiques, d’où sont sorties les idées sur la valence, le pouvoir de substitution et enfin la loi périodique de Newlands et Mendeleeff, Cette conception, qui établit entre les éléments un lien, au lieu de les laisser complètement isolés les uns des autres, estune des plus grandioses de lapériode scientifique actuelle. Elle a ouvert la voie à de nombreux travaux, et c’est en partant de recherches qui en déri- vaient que Kékulé à élé conduit à l’idée de la satura- tion mutuelle des affinités, idée qui a transformé la chimie organique. Le professeur Odling ne fait que mentionner l’œuvre de Le Bel et Vant-Hoff, qui est d’une très grande portée et ouvre des vues nouvelles sur lhypothèse atomique de Dalton; maïs il croit en avoir assez dit pour montrer la nature et l'étendue des progrès qu'a accomplis la science depuis la fondation de la Société chimique, Erratun : Cest par erreur que dans notre dernier numéro (28 février 1891), les trois analyses des ou- vrages de MM. Boltzmann, Ritter, Rubens et Ritter ont été signées du nom de M. Guillaume. Nous les devons à M. E. Sarasin, de Genève. Le Directeur- Gérant : Louis Onvier Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 2° ANNÉE 30 MARS 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES /. DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER Ke LES DÉCHARGES ÉLECTRIQUES DANS LES GAZ RARÉFIÉS ET LA CONSTITUTION DE LA MATIÈRE Je vais exposer, dans les pages suivantes, des recherches dans lesquelles l'électricité est em- ployée comme un instrument ou comme un moyen de rendre appréciables à nos sens, des phéno- mènes qui, autrement, ne nous seraient pas ac- cessibles ; par l'emploi judicieux de cet instrument nous ajouterons quelque chose au peu que nous sa- vons des atomes et des molécules de matière et des formes de l'énergie qui, par leurs réactions mu- tuelles, constituent l'univers, tel qu’il se manifeste à. nos cinq sens. Je dois d'abord rappeler brièvement la théorie généralement acceptée sur la constitution de la matière. Î. — THÉORIE CINÉTIQUE DES GAZ La matière à son dernier degré d'extension est considérée comme n'étant pas continue, mais gra- nulaire. Maxwell illustre cette hypothèse de la façon suivante : Pour un constructeur de chemin de fer, creusant un tunnel dans une montagne sablonneuse, le sable peut être considéré comme une substance continue. Pour un vermisseau ram- pant à travers le sable, cela n’est plus possible, qu'il pousse devant lui un grain de sable ou se dirige à travers les interslices. Pour ce vermisseau, en aucune manière le sable ne peut être considéré comme continu ou homogène. Je ne veux pas parler ici des hypothèses sur la constitution de la matière à l’état solide ou liquide, et j'aborderai directement le troisième REVUE GÉNÉRALE, 1891. état de la matière ou état gazeux. La théorie ciné- tique des gaz enseigne que les molécules consti- tuantes se déplacent dans toutes les directions possibles, avec des vitesses très grandes et conti- nuellement variables, et se choquent, sans cesse, entre elles. La distance que chaque molécule par- court sans en rencontrer une autre est appelée son libre parcours. La distance moyenne, parcourue sans choc par le nombre total des molécules d’un gaz à une pression et une température donnée sera le libre parcours moyen. Les molécules exercent des pressions dans toutes les directions, et la gravi- tation seule les empêche de se répandre à travers l'espace. Dans les gaz ordinaires, la longueur du libre parcours moyen est excessivement petite, comparativement aux dimensions du vase, et les propriétés que nous observons, et qui caractérisent l’état gazeux de la matière, dépendent de ces con- tinuelles collisions. Mais si nous réduisons beau- coup le nombre des molécules contenues dans un espace donné, le libre parcours des molécules, soumises à une impulsion électrique, est si grand que le nombre de leurs collisions mutuelles dans un temps donné, peut être négligé par rapport au nombre de fois qu’elles peuvent parcourir, sans choc, tout l’espace qui leur est offert. Par suite, la molécule moyenne peut suivre, sans interruption, son propre mouvement. Quand le libre parcours moyen des molécules devient comparable aux dimensions du vase qui contient le gaz, les pro- priétés qui constituent l’état gazeux sont réduites 162 W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS à un minimum, la matière atteint l’état w/tra-gazeur ou radiant, et nous obtenons des conditions dans lesquelles les mouvements des molécules soumises à une impulsion électrique, peuvent facilement être étudiés. Le libre parcours moyen des molécules d'un gaz augmente très rapidement lorsque la pression diminue. Tandis qu'il est d’un dix-millième de millimètre pour les molécules de l’air à la pression ordinaire, à une pression d’un millionième d'at- mosphère (pression que l’on atteint facilement avec les appareils actuels, et qui est celle de lat- mosphère à une distance de 90000 kilomètres de la terre), le libre parcours moyen est d'environ 9 mètres. À 200 terre il serait de 10.000.000 de kilomètres, et à des millions de kilomètres dans l'espace il devient pra- tiquement infini. On pourrait pousser plus loin la spéculation dans cesens, en dépit d’Aris- tote qui dit « Au l'Univers il n'y a ni espace, ni vide,nitemps.» En discutant kilomètres de la surface de la delà de les mouve- ments des mo- lécules, nous devons guer le Abrepar- du libre parcours moyen. Rien ne nous est encore connu relativement à la distin- Cours longueur absolue du libre parcours, non plus qu'à la vitesse absolue d'une molécule. On peut même démontrer que ces grandeurs peuvent varier de zéro à l'infini. Nous nous servirons exclusivement du libre parcours moyen et de la vitesse moyenne. II. — LA POMPE A VIDE Comme la plupart des expériences que je vais décrire sont effectuées dans des gaz très raréliés, il n’est pas inutile d'indiquer l'appareil au moyen duquel le vide a été fait dans ces tubes. On a beaucoup parlé récemment en faveur de la pompe de Geissler et de ses perfectionnements, mais je préfère encore la pompe de Sprengel avec laquelle le vide peut être poussé plus loin. Je tiens à faire | remarquer que l’action de cet appareil ne cesse pas lorsqu'on ne voit plus d'air s'échapper à la partie inférieure des Lubes, mais continue encore longtemps après. Enfin, le vide non conducteur, que l’on obtient si facilement avec la pompe de ig. 1. ces Sprengel n’est pas dû à la présence de la vapeur de mercure, car on l’oblient aussi rapidement quand des précaulions spéciales sont prises pour éliminer des tubes les vapeurs mercurielles. Un des grands avantages de la pompe de Spren- gel résulte de ce que sa capacité intérieure peut ne pas dépasser quelques centimètres cubes, et qu'il existe par suite moins de surfaces libres, capables de condenser les gaz. PASSAGE DE L'ÉLECTRICITÉ A TRAVERS LES GAZ RARÉFIÉS Les phénomènes variés que présente le passage de l’étincelle d’induction à travers un gaz à diffé- rentes pressions, conduisent à admettre qu'à des pressions très faibles correspond une condition par- ticulière de la matière.Je prends trois tubes exacte- ment sembla- bles; les élec- trodes sont en aluminium et pressions intérieures sont respecti- vement de 0M075, 022002 et O""001. Si j'envoie succes- sivement le courant d'in- duction dans différents tubes, il se pro- duit dans chaque cas un phénomène lumineux particulier. La figure 1 représente un tube où le vide n'a pas été poussé très loin comme dans le premier de la série dont je viens de parler (0""075). les L'étincelle d’induction passe d’une extrémité à l’autre, AB, et la décharge nous apparait comme une ligne de lumière, se comportant comme un conducteur flexible. Sous le tube, j'ai un électro- aimant C; lorsqu'on le fait agir, la ligne lumi- neuse se courbe en son centre pour se rapprocher des pôles de l’aimant, puis redevient de nouveau rectiligne lorsque l’action cesse. En renversant le courant, la ligne de lumière se courbe de l’autre côté. Il faut noter que l’action de l’aimant dans ce cas est seulement locale. Dans un tube où le gaz est très raréfié, l’action est tout autre. La figure 2 représente un tube où j'ai poussé le vide Jusqu'à 0% 001. Quand on fait passer le courant d'induction, on aperçoit les mo- léeules électrisées, qui se déplacent en ligne droite, comme la ligne de lumière dans le premier tube, et rendent leur parcours apparent en frappant un W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS 163 écran phosphorescent DE. Si on les soumet à l’ac- tion d'un aimant, CG, leur conduite est différente. La ligne s'abaisse jusqu'en F, mais ne reparait plus ensuite. I! semble que dans le premier tube, nous observions la conduite moyenne de la totalité des molécules du gaz. Dans le second cas, où le gaz a été raréfié, nousexaminons simplementla marche indi- viduelle des molécules qui le composaient primiti- vement. [V. — LA DÉCHARGE STRATIFIÉE Quand le gaz est plus raréfié que cela n’est né- cessaire pour donner la ligne lumineuse flexible, obtenue dans la première expérience, latrainée lu- mineuse devient tout à fait discontinue, ou, comme on l’a dit, stra- tifiée. Une très bon- ne illustration de ce fait peut èlre lirée du mouvement qui se produit dans une rue très fréquen- tée. Si à cer- tains moments, lorsque le cou- rant des affai- res se produit également dans les deux directions, nousobservons d'une fenêtre allants el lFiv les venants, pouvons remarquer que la foule n’est pas unilormé- nous ment répartie sur la chaussée, mais forme une série de groupes, ou, pour ainsi dire, de paquets, On peut aisément concevoir de quelle manière sont formés ces paquets el ces groupes. Les quelques séparés par des espaces relativement vides, personnes qui marchent plus lentement que la moyenne relardent le mouvement des autres qui se déplacent dans la mème direction ou dans la di- rection opposée. Par suite, un encombrement tem- poraire se trouve créé. Les passants qui arrivent par derrière augmentent la foule en ce point, tan- dis que ceux qui sont devant et conservent la même vitesse, laissent derrière eux un espace relative- ment vide. Si la foule se déplace tout entière dans la même direction, la formation de ces groupes devient moins distincte. Dans rues très fré- quentées, les voitures produisent le mème résul- lat, comme chacun a pu le remarquer. les On conçoit donc comment de simples différences de vitesse ‘suffisent à résoudre une multitude de passants en un certain nombre de groupes et d’in- tervalles alternés. Au lieu d'examiner des hommes ou des femmes en mouvement, supposons que nous expérimen- lions sur de petites particules d'une substance, de sable par exemple, de dimensions approximative- ment égales. Si l’on met ces particules en suspen- sion dans l’eau, dans un tube horizontal, et qu’on leur imprime un mouvement rythmique, nous ob- tiendrons encore des résultats semblables, la poudre se disposant, régulièrement etd’elle-même, en monceaux séparés par des espaces libres. Passons enfin à des substances encore plus té- nues, et obser- vons la façon dont se com- portent les mo- lécules d'un gaz raréfié, quand soumel à l’ac- lion d'un cou- rant on le d'induc- lion. Les molé- cules sont ici libres de toute volonté capri- cieuse, el sui- vent la loi que je cherche à il- lustrer;et quoi- qu'elles soient toul 2, dans un désor- d'abord dre complet, sous l'influence du rythme électrique, elles se ras- semblenten stratificalions bien définies.Les portions lumineuses indiquent les régions où se produit l’arrèt du mouvement et par suite des frottements, tandis que les intervalles sombres correspondent aux régions de l’espace que les molécules traver- sent en subissant un nombre relativement faible de collisions. COLORÉES V. — STRATIFICATIONS PARTIELLEMENT Comme autre exemple des stratifications pro- duiles dans un gaz modérément raréfié (P gmn) jé prendrai le cas de l'hydrogène, préparé par le zinc et l’acide sulfurique, soumis à l’action de divers agents purificateurs, séché à la manière ordinaire, et raréfié au moyen de la pompe à mercure (fig. 3). Quand je fais passer le cou- rant d’induetion, les stratificalions sont tricolores, 164 W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS bleues, roses et grises. Près du pôle négatif A est une zone lumineuse, puis vient un intervalle sombre, l’espace obscur de Faraday (voir plus loin), et ensuite se trouvent les stratifications, la première portion de chacune (4) étant bleue, la suivante (c) rose, et la troisième (4) grise. Les disques bleus sont mobiles jusqu'à un certain point. À un certain degré de raréfaction, toutes les parties bleues desstratifications passent subitement en avant, et forment un seul disque bleu très bril- lant, et laissent les portions roses et grises. Le tube représenté par la figure 4 est à ce degré par- ticulier de ra- réfaction. Si l’on y fait pas- ser le courant, on observe un C ï i colorées. Si, à ce moment, on introduit dans le conducteur la résistance d’une colonne d’eau, de facon à abaisser le potentiel, le même phénomène se produit. Le disque bleu est produit par le mer- cure ; son spectre est celui du mercure seul, sans trace des lignes rouges brillantes de l'hydrogène. Des expériences, non encore terminées, me font regarder comme très probable que ce disque rose est dû à l'hydrogène, et que les disques gris indiquent la présence du carbone. Le tube dont je viens de parler ne contient que de l’hydro- gène, du mercure et de faibles traces de carbone. Mais, avec les ressources dontje dispose, il ne m'a pas élé possible de seul disque Se préparer de en) nn) | vant. Lorsque a a complètement letubecontient dépouillé de un résidu ga- touteimpureté. zeux de cette sorte, la forme des stratifica- tions peut va- rier considéra- blementavecle potentiel de la décharge. Ces changements dans for- mes de stratifi- cations ont été remarqués tout d'abord par Gassiot (1865, B. A. Extraits), qui donne une description très complète et des dessins des mo- difications produites en faisant varier la résis- ces tance par l'interposition dans les conducteurs de colonnes d’eau distillée de diverses longueurs. L'expérience suivante montre très clairement que la modification ne dépend que de la différence de potentiel : Je prends un tube donnant, avec ma bobine, les stratifications généralement attribuées à l'hydrogène, mais que je crois être dues à un mélange d'hydrogène, de mercure, et de vapeurs d'hydrocarbures. Si je modifie l'interrupteur, de facon à produire des décharges rapides à faible potentiel, les stratifications changent graduelle- ment d'aspect et deviennent toutes roses. Pla- çons maintenant l'interrupteur de façon à obte- nir des décharges plus lentes et des potentiels plus élevés les stratifications ; nous retrouvons Je pense même que l'hydrogè- ne absolument pur n’a jamais été obtenu dans un tube à vide. J'ai pu parve- nir à éliminer complètement le mercure et à faire dispa- raitre presque complètement toute trace de carbone. Si l’on k. prend un tube contenant ce gaz, il donne des stratifications uniformément roses, ne montrant ni disques bleus ni disques gris, quel que soit le potentiel du courant. VI. — L'ESPACE OBSCUR Après l’élat stralifié, nous arrivons à un très cu- rieux phénomène, appelé l’espace obscur. En étu- diant, en 1838, les phénomènes électriques dans les gaz, Faraday remarqua une discontinuité de la décharge lumineuse, séparant la lueur de l’élec- trode positive de celle de l’électrode négative. C'est ce qu'il appela « l’espace obscur. » On le voit dans les tubes qui contiennent un gaz modéré- ment raréfié; dans ces tubes (fig. 5, P —6"") on peut observer que la lueur positive, s'étendant comme une bande rose à partir de l’électrode po- W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS 165 sitive B, s'arrête à environ dix millimètres de la tache lumineuse bleue, qui représente la lueur né- gative. Cette lacune, cet intervalle non lumineux, d'est « l’espace obscur » de Faraday. Il y a un autre espace qui sépare la lueur néga- tive de son électro- de. Dans ce tube, il est si petit que la lueur semble en con- tact direct avec l’é- lectrode; mais si l’on pousse un peu plus loin la raréfac- lion, la séparation s'effectue rapide- ment; dans le nou- veau tube (fig. 6) qui contient de l'air à une pression un peu plus faible (P — 3"") cet es- pace obseur E s'est étendu au point de repousser la lueur négative à environ quatre millimètres de l’électrode A. C'est de ce second espace obscur que je compte m'occu- per particulière- ment ici; quand je parlerai dorénavant d'espace obscur, il s'agira de celui qui est compris dans la lueur négative. Dans les expé- riences, que je viens de citer, surles stra- tifications dans l'hydrogène, le con- tenu du tube soumis aux décharges élec- triques, obéit en- core aux lois rela- tives aux propriétés moyennes d’un très grand nombre de Fig. lorsque le gaz est moins raréfié. Aux faibles raré- factions, elles se comportent comme les molécules d’un gaz, au sens ordinaire du mot; mais à ces vides extrêmes, sous l'influence de l'impulsion électrique, 7. elles arrivent à un état wléra gazeux, où se manifes- tent très nettement des propriétés mas- quées jusqu'alors. Le rayon de l’es- pace obscur varie avec le degré de ra- réfaction, avec lana- ture du gaz dans le- quel il est produit, avec la température du pôle négatif, et, à un degré moindre, avec l'intensité de la décharge. On m'a attribué, à tort, l’idée de con- sidérer l'épaisseur de l’espace obscur comme représen- tant le libre par- cours moyen dés molécules dans léur condition ordinaire, et l’on a remarqué que l’espace obscur est notablement plus grand que la valeur calculée pour le libre parcours moyen des molé- cules. J'ai mesuré avec soin le rayon de l’espace obscur à différentes pres- sions; je l’ai compa- ré avec le libre par- cours moyen des molécules, non sou- mises à l'influence électrique, à la mé- me pression, et je n'ai trouvé aucune relation constante entre ces deux gran- molécules se déplaçant dans tous les sens avec des | deurs. La longueur de l’espace obseur n’est pas, vilesses d’une inimaginable grandeur. Mais, si l’on pousse plus loin la raréfaction, l'espace sombre E, autour du pôle négatif, devient visible, croit de plus en plus, et finit par remplir entièrement le tube. Les molécules, à ce moment, sont dans une condition différente de celle où elles se trouvent comme on l'a dit, égale à vingt fois le libre parcours moyen, mais un multiple de plus en plus grand à mesure que la raréfaction est poussée plus loin. . — EXPLORATION AVEC DES PÔLES AUXILIAIRES Dans le but d'obtenir une indication sur la con- 166 W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS dition électrique de la matière à l'intérieur et à l'extérieur de l’espace obscur, je construisis un tube (fig. 7) possédant, entre les extrémités posi- tive et négative A et B, deux pôles intermédiaires Cet D.Je pus constater avec ce tube que, lorsqu® la raréfaction était telle que les pôles auxi- liaires C et D fussent tous deux exté- rieurs à l’es- pace obseur, il se produisail entre ces deux pôles une dif- férence de po- tentiel dérable, diffé- consi- rence que l’on pouvait appré- cier avec galvanomètre. Silararéfaction était assez loin pour que l’un pôles auxiliai- res fût exacte- ment bord un = NET poussée x, nor RE à e A $ RE Lx: des sur le de l’es- pace obscur, aucun courant ne se produi- sait. Si le vide était poussé RS rs AH IH Ft l} encore plus loin, de façon à HA 4 Le enfermer com- plètement l’un des pôles dans l’espace obs- cur, on retrou- vaitune grande différence de potentiel, mais en sens inver- se ; le pôle qui avait tout à l’heure le potentiel le plus élevé, pos- sédant maintenant le potentiel le plus faible. En explorant ensuite l’espace obscur, d’une fa- çon plus complète, avec un pôle négatif mobile, j'ai trouvé que ces effets ne sont pas en rapport avec la raréfaction, et sont dus en réalité à la position occupée par le pôle auxliaire par rapport à l’espace obscur. Ces phénomènes sont difficiles à comprendre sur une simple description. Je vais essayer cependant d'éclaireir ces explications un peu compliquées. Un tube cylindrique (fig. 8,9, 10, P —0""95) pos- sède, outre les pôles ordinaires A et B à ses extré- mités, deux pô- les auxiliaires placés l’un près de l’autre en C et D. Le pôle A Se peut se dépla- jte cer dans l'axe " du tube, de fa- 5 çon qu'après avoir fait le vide, on puisse amener l’es- pace obscur dans une posi- tion quelcon- que par rap- port aux pôles auxiliaires. Les signes + et — montrent la distribution des électricités positive el né- gative dans le tube. Je place le pôle négatif À aussi loin que possible des pôles auxiliai- res (fig.8).J’en- voielecourant; l’espace obscur entoure le pôle A et reste exté- rieur aux deux pôles auxiliai- res. Les signes montrent que ces pôles sont placés dans la & #+ #4 +++ Ton g. 10. région positive, et on peut re- connaitre, avec un électroscope à feuilles d’or, qu'ils sont chargés d'électricité positive. Mais les signes montrent aussi que C est plus positif que D, et en reliant C et D par un galvanomètre, on peut en effet constater l’existence d’un courant allant de C en D, D étant négatif par rapport à C. L'espace obscur est maintenant dans une posi- tion telle que le pôle CG lui soit intérieur (fig. 8). W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS 167 Un changement s’est produit dans les indications ; le galvanomètre indique un courant inverse de ce- lui qu'on observait tout à l'heure. C est maintenant négatif, et D positif, mais l'électroscope à feuille d'or nous montre encore que ces deux pôles sont chargés d'électricité positive. Dans une certaine position de l’espace obscur, contour se trouve sur le pôle C quand son on observe un élat neutre dans lequel l’électros- cope à feuilles d’or indique encore de fortes charges positi- ves, et aucun courantne pas- se dans le gal- vanomètre.Les courbes mon- trent (fig. 8 comment se P roduisent, dans les diffé- rentes parties du tube, des courants néga- tifs ou positifs, tandis que la courbe des po- tentiels reste positive. Lors- qu'une tance, tible de devenir subs- suscep- phosphores- cente sous l'in- fluence de l’é- lectricité, introduite dans letube.,ontrou- ve que le point le neux se frouve sur le bord de est plus lumi- | | | Fig. l’espace som- bre, c’est-à-dire au point où les deux armées de molécules négatives et positives se trouvent en Je phénomène à propos de la phosphorescence de l'yttria. conflit et recombinent. reviendrai sur ce se VIIT. — MATIÈRE RADIANTE Au moyen de ce lube (fig. 11) je puis montrer qu'un courant de particules ultra-gazeuses, ou de matière radiante, ne transporte pas un courant électrique, mais se compose d’une succession de molécules électrisées négativement, dont la répul- sion électrostatique surpasse l'attraction électro- magnétique, probablement parce que leur vitesse | le long du tube est inférieure à la vitesse de la lu- mière. Le tube possède deux électrodes négatives AA’, au moyen desquelles je puis envoyer le long du tube deux courants parallèles de matière ra- diante qui deviennent visibles en frappant un écran de substance phosphorescente, après avoir tra- versé les trous d'un diaphragme en mica. La raré- faction a été poussée jusqu'à 0"1. Je réunis un seul des pôles négatifs A à la bobine d'induction, et le courant d'induction s’allonge dans le tube de C en D, parallèle- ment l'axe. Je pourrai, de mème, l'autre oblenir un se- à avec pôle, cond courant de malière ra- Si diante. ces courants sont comparables à des fils trans- portantun cou- rant électri- que, ils doivent s'attirer; si ce sont au con- traire des files de molécules électrisées, ils doivent se re- pousser. Aussi- tôt que l’on fait le passer se- cond courant, on voit le pre- mier se dépla- cer et prendre la direction CE, montrant To Earth l'existence d’u- ne forte répul- sion et prouvant ainsi qu'ils n’agissent pas comme des courants électriques, mais simplement comme des corps chargés de la même électricité. Il est pro- bable, cependant, que si la vitesse des molécules était plus grande que celle de la lumière, elles se comporteraient différemment, et que l’on observe- rait une attraction, comme avec des conducteurs transportant un courant. Pour étudier l’état électrique des molécules rési- duelles dans un tube fortement raréfé, tel que celui dont je me suis déjà servi, j’introduis un pôle auxi- liaire ou électrode exploratrice entre les électrodes positive et négative, de facon que le courant molé- culaire puisse le rencontrer. Mon intention était de 168 W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS savoir si les molécules, en frappant sur un obstacle, lui abandonnent une partie de leur charge élec- trique. Dans cette expérience (fig. 19, P — 00001 on a trouvé que le pôle auxiliaire C, placé sur la droite joignant les pôles positif et négatif A et B, et recevant par suite la totalité des molécules par- ties du pôle négatif, manifeste une forte charge positive. Dans plusieurs autres expériences, faites pour décider cette question, l'électricité obtenue fut toujours trouvée posilive au moyen de l'élec- troscope à feuilles d’or, ou de l'électromètre-de Lippmann; lorsque le pôle auxiliaire fut réuni à la terre, avec in- terposition d’un galvanomètre, on constata l'existence d’un courant tel qu'on l'aurait obtenu si au lieu du pôle auxiliaire on a- vait pris le pôle cuivre d'un élé- ment Daniell; si, au lieu d'envoyer le courant à la terre, on réunis- sait le fil au pôle négatif du tube, un courant plus puissant passait dans le même les pôles négatif et positif d'un tube à gaz forte- ment raréfié, fut toujours fortement positive, et ce n’est que tout récemment que de nouvelles expé- riences sont venues éclairer ce sujet. Quelques-uns des résultats contradictoires sont dus à ce que la raréfaction n’était pas la même dans tous les cas. Dans mes tubes à vide, la direc- tion du courant qui se produit entre le pôle auxi- liaire et la terre change du négatif au positif, lorsque la raréfaction est poussée de plus en plus loin. Si l'on suit la variation du courant, lorsque le vide se fait graduellement, on trouve un point où la déviation du galvanomè- tre, qui était né- gative, devient nulle, montrant qu’à ce point le potentiel estégal à zéro. À ce mo- ment, le passage de quelques gouttes de mer- cure dans la trompe suffit à rendre le cou- rant positif. Ce changement se produit à une pression d'envi- ron 0""002. Une fois que sens. Xe L'EFFET EDISON ë ToEarlth® — Uneexpérience exactement pa- rallèle a été effec- tuée par M. Edi- son, M. Preece et le Professeur Fleming, en em- ployant comme tube à vide une lampe à incan- descence. Ils trouvèrent que, d’un pôle auxiliaire placé entre les extrémités du filament, l'électricité s'écoule comme si le pôle était le zinc d'un élé- ment Daniell; j'ai répété leurs expériences et suis parfaitement d'accord avec eux. J'obtiens un cou- rant puissant, d’une direction déterminée, en par- tant d’un pôle placé entre les extrémités d’un fila- ment de charbon incandescent, et un courant de sens inverse, en partant d'un pôle auxiliaire placé dans un tube où la raréfaclion a élé poussée très loin. Ce désaccord était très embarrassan, et j’es- sayai, sans changer le résultat, un grand nombre de tubes, construits de différentes facons. L’élec- tricité obtenue sur un pôle auxiliaire placé entre Fig. 14. ce point a été at- teint, lorsqu'on fait passer le cou- rant d'induction dans le {ube, les parois se char- gent rapidement d'électricité po- sitive, probablement par le frottement du courant moléculaire contre le verre, et cette électrisation se transmet à la surface de tout objet placé à l’in- térieur du tube. Je vais essayer de montrer com- ment cette électrisation des parois intérieures du tube agit sur le courant moléculaire aux très faibles pressions. Dans ce tube (fig. 13, P —0""001), sont fixés deux écrans phosphorescents G et D, exactement sem- blables. À l'extrémité de chacun d’eux est fixée une lame de mica, EE’, et en face se trouve un pôle négatif AA’. L'un des écrans, C, est dans la partie cylindrique du tube et se trouve en contact avec les parois; l'autre, D, est dansla partie sphérique, et par conséquent assez éloigné des parois. Lors- qu'on fait passer le courant, on apercoit sur l’écran W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS 169 D une bande de lumière phosphorescente, mon- trant que, dans cette région, les molécules suivent librement leur course rectiligne en partant du pôle négatif. Mais dans la partie cylindrique du tube, l'attraction des parois est assez forte pour disper- ser le courant moléculaire de facon qu'il recouvre la totalité de l'écran C et le rende phosphorescent. Si un pôle auxiliaire CC (fig. 14, P — 0""0001 protégé sur toute sa surface, sauf en un point, par une épaisse COU- trique, à une extrême raréfaction, au moyen d’un certain nombre de signes + et —. Le vide a été poussé à 00004, et l’on voit que, | dansle voisinage du pôle positif, el presque jusqu’au pôle négatif, le tube est fortement chargé d’électri- cilé posilive, les molécules négatives s’élançant du pôle négatif, sous forme d'un cône qui disparait ra- pidement., Si un pôle auxiliaire est placé dans la positionindiquée par la figure 15, l'afflux des mo- lécules, positives che de verre, est le cou- dans du placé centre rant moléculai- re, face du pôle négatif A, et si la totalité des parois inté- et exté- rieure du tube estrecouverte de métal en munication avec la terre, de facon à éliminer l’élec- en rieure com- tricité positive aussirapidement que possible, on observe que les molécules par- tant du pôle né- galif qui vien- nent le pôle auxiliai- rencontrer ou négatives, est peu le même, et aucun à près courant ne se produit, à tra- vers le galvano- mètre, vers la 15. terre. Ceci cons- titue le point neu- tre. Mais si nous imaginons que le pôle auxiliaire est placé comme dans la figure 16, les molécules é- ru HE ++ +4++ ft lectrisées positi- vement sont en nombre beau- coup plus consi- dérable que les molécules néga- tives, et l’on ob- üient de l’électri- To Earth = ‘ @ £ cilé positive. En- re, transportent, dans leur dépla- cement à travers le tube une char- fin, si le pôle au- xillaire est placé comme dans la fi- gure 17, ce sont ge négative, el LI . communiquent! les molécules né- gatives qui domi- de l'électricité nent, et le pôle LS | Fix. 17 3 LE négative au pôle 16e) fournira de l’élec auxiliaire. tricité négative. L'effet produit dans ce tube est intéressant, car c'est le premier qui me permit de comprendre pourquoi, dans mes expériences antérieures, J'avais toujours oblenu une charge positive sur un pôle auxiliaire placé dans le courant qui venait directe- ment du pôle négatif. Arrivé à ce point, il était facile d'imaginer une forme d'appareil qui püt vérifier complètement la théorie, et jeter, en même temps, une vive lumière sujet. figures 15, 16, 17, représentent un tel tube, et sur ce Les sur ces figures, j'ai essayé d'indiquer l’état élec- REVUE GÉNÉRALE, 1891, A mesure que la raréfaction augmente, la charge positive du tube augmente, et le point neutre se | rapproche du pôle négatif, et l’on peut obtenir un degré de non-conduetibilité, où l’électricité posi- tive domine tellement qu'il est impossible de recueillir de l'électricité négative sur le pôle auxi- liaire à moins de l’amener au contact du pôle négatif. C'est ce qui arrive dans le tube qui est devant vous, et je vais maintenant vous montrer le changement de direction qui se produit dans le courant, lorsqu'on déplace le pôle auxiliaire. 6* 170 M. D'OCAGNE. — LE RÉPERTOIRE BIBLIOGRAPHIQUE DES SCIENCES MATHÉMATIQUES Je n'ai pu réussir, en produisant le courant « d’Edison » dans les lampes à incandescence, à obtenir ce changement de direction, même aux raréfactions les plus élevées que je puisse atteindre avec ma pompe. Le sujet demande de nouvelles recherches, el, comme les autres phénomènes résiduels, ces désaccords promettent une riche moisson de découvertes futures aux expérimenta- teurs, de même que les produits résiduels de la chimie ont souvent été une source de corps nou- veaux el intéressants. (La fin prochainement.) W. Crookes, de la Société royale de Londres. LE RÉPERTOIRE BIBLIOGRAPHIQUE DES SCIENCES MATHÉMATIQUES De toutes les branches du savoir humain ce sont peut-être les sciences mathématiques qui présentent la plus grande diversité de théories; celles-ci se sont d’ailleurs considérablement mul- tipliées dans le siècle qui va finir. Bien que ratta- chées les unes aux autres par des liens parfois assez cachés dont la découverte n'est pas un des moindres attraits qui s'offrent à l'esprit du Géo- mètre, elles se ramifient dans des directions tel- lement différentes, qu'il est de toute nécessité d'établir entre elles une coordination rationnelle, propre à faciliter l'intelligence générale de la science. Le nombre des travailleurs, et, par une consé- quence forcée, celui des recueils destinés à faire connaitre le fruit de leurs recherches, ne se sont pas accrus dans de moindres proportions. Les écrits mathématiques se multiplient de toute part. Ils ne sauraient évidemment lous intéresser au même degré les progrès de la science; pourtant il peut se trouver, dans le plus moceste d’entre eux, le germe de quelque idée féconde qui mérite de ne pas passer inaperçue. Or, il est matériellementim- possible, même pour l'esprit le plus vaste et le mieux doué, d'embrasser une telle somme de ma- tières. De là la nécessité d’un guide propre, le cas échéant, à permettre au chercheur d’arriver rapidement à connaitre, sur un pointparticulier, les résultats d'ores et déjà acquis et lui four- nissant à cet effet des indications bibliogra- phiques complètes. Ce sont ces considérations qui ont amené la So- ciété mathématique de France à prendre l'initia- tive de la préparation d’un inventaire général de tous les mémoires et notes publiés depuis le com- mencement du siècle sur toutes les branches des sciences mathématiques, dans tous les recueils qui leur sont ouverts, ou même dans des volumes à part. Mais ce n’élail pas lout que de poser le principe d'une telle œuvre, dont l'importance ne pouvait échapper à personne: il fallait aviser aux moyens de la réaliser. Tant sous le rapport financier que sous celui de la besogne matérielle à effectuer, la | Société mathématique ne pouvait à elle seule as- sumer tout le poids de l’entreprise. Par bonheur on était à la veille de l'Exposition universelle ; les savants de tous les pays allaient affluer à Paris pour assister à cetle grande fète des sciences et des arts; l’occasion était toute trouvée de les réu- nir en des assises solennelles pour jeter les bases de l’œuvre projetée, en les conviant à en prendre leur part. Cette idée trouva auprès du Pouvoir l'accueil le plus favorable et le Comité d'organisation du Congrès international de bibliographie des Sciences mathématiques fut constitué parles arrêtés minis- tériels des 9 novembre 1888 et 1° mars 1889. Il s'agissait de préparer la matière des délibé- rations de ce Congrès, en dressant un projet de classification des diverses branches ‘des sciences mathématiques. Le Comité y pourvut, principale- ment par les soins de son président, M. Poincaré, et de son secrétaire, M. Humbert. Un premier travail fut imprimé et adressé aux Géomètres de tous les pays, avec prière de l’exa- miner soigneusement et de le retourner ensuite avec toutes les corrections et additions jugées utiles. Les personnes auxquelles le Comité s'était ainsi adressé répondirent en grand nombre à son appel, ce qui attestait l'importance de l’œuvre, et lui fournirent les données les plus précieuses. La classification fut alors refondue pour tenir compte de ces éléments nouveaux, el amenée au point où devait la trouver le Congrès en se réunissant. Ce document n'occupait pas moins, à lui seul, d’une soixantaine de pages in-8°. Il présentait déjà, indé- pendamment de l’objet en vue duquel il avait été préparé, un très grand intérêt au point de vue de la philosophie de la science. Les séances du Congrès, présidées par M. Poin- caré, furent tenues au siège de la Société mathé- matique les 16, 17, 18 et 19 juillet 1889. La classification proposée, examinée avec le plus grand soin, fut remaniée pour quelques détails, puis approuvée dans son ensemble. Le Congrès prit en outre un certain nombre de réso- lutions en vue de la réalisation de l'œuvre projetée. mr: Li sule” M. D'OCAGNE. — LE RÉPERTOIRE BIBLIOGRAPHIQUE DES SCIENCES MATHÉMATIQUES Nous ne croyons pouvoir mieux faire que de les reproduire ici ir exlenso. Elles nous semblent, en effet, de nature à intéresser les savants de toute spécialité qui se trouveront peut-être amenés un jour, dans leurs domaines respectifs, à suivre l'exemple des mathématiciens !. 14°1l y a lieu de publier un répertoire bibliographique des sciences mathématiques, destiné à épargner aux travailleurs de longues et pénibles recherches. Ce répertoire devra con- tenir les titres des mémoires relatifs aux mathématiques pures et appliquées, publiés depuis 1800 jusqu’à 1889 inclusivement, ainsi que des travaux relatifs à l’histoire des mathématiques, depuis 1600 jusqu’à 1889 inclusivement. Ces titres seront classés non par noms d’auteurs, mais d’après l'ordre logique des matières. 20 Il sera publié successivement des suppléments à ce répertoire; le premier sera consacré aux travaux publiés de 1889 exclusivement à 1899 inclusivement, et les suppléments suivants, aux périodes décennales qui suivront. Dans chaque supplément, les omissions découvertes dans le répertoire ou dans les suppléments précédents seront réparées. 30 Sont exclus du répertoire les ouvrages classiques ne contenant pas de résultats originaux et destinés aux élèves - des divers établissements d'instruction ou aux candidats aux divers examens. Seront pareillement exclus les mémoires publiés dans des recueils spécialement destinés à ces candi- dats. Cependant, comme divers recueils présentent un carac- tère mixte et contiennent à côté de nombreux exercices qui ne peuvent être utiles qu'aux étudiants, quelques travaux originaux, ces derniers travaux seront mentionnés dans le répertoire, après que le triage en aura été fait par l’Admi- nistration de ces recueils et que la Commission permanente instituée par la dixième résolution aura émis un avis favo- rable, 40 Les travaux relatifs aux mathématiques appliquées ne devront étre mentionnés au répertoire que s'ils intéressent les progrès des mathématiques pures. Les travaux relatifs à l'astronomie, déja mentionnés dans la bibliographie de MM. Houzeau et Lancaster, sont exclus du répertoire. 59 Le Congrès adopte pour le répertoire la classification proposée par son Comité d'organisation avec les modifi- cations votées dans les séances des 17 et 18 juillet 1889. Les divers titres mentionnés seront répartis en un certain nombre de classes subdivisées en sous-classes, divisions, sections et sous-sections. Les classes seront désignées par une lettre capitale : elles pourront être subdivisées en sous-classes désignées par une lettre capitale affectée d’un exposant. Les classes ou sous-classes se subdiviseront en divisions désignées par un chiffre arabe, et celle-ci en sections désignées par une minuscule latine, lesquelles peuvent elles-même être parta- gées en sous-sections représentées par une minuscule yrecque. Ainsi la sous-section x de la section D faisant partie de la division 3 de la sous-classe LI serait notée ainsi dans son encadrement rectangulaire : [L13b | 6° Les titres des travaux écrits en d’autres langues que l'allemand, l'anglais, l'italien, l'espagnol, le latin, seront suivis de leur traduction francaise. To Attendu qu'il pourrait arriver que, pour une raison quelconque, un savant crüt devoir adopter un mode différent de classification, le Congrès émet le vœu que ce savant em- ploie une notation qui ne puisse être confondue avec celle décrite dans la cinquième résolution et évite, en tout cas, l'emploi de l'encadrement rectangulaire figuré ci-dessus. 8° Attendu que le travail du répertoire demandera encore plusieurs années et qu’il importe de fournir aux chercheurs de nouveaux instruments dans le plus bref délai possible, le Congrès émet le vœu que les divers recueils périodiques consacrés aux mathématiques publient une table générale des matières contenues dans leurs volumes, en se conformant à la classification adoptée plus haut. Le Congrès sera très reconnaissant aux administrateurs de ces recueils de vouloir 174 Ajoutons {out de, suite que, par application d’une des clauses de la 40° résolution, la Commission permanente a appelé depuis lors, dans son sein, une délégation de la Société mathématique qu'il était juste, comme ayant eu l'initiative de la publi- calion du répertoire, d'inviter à suivre officielle- ment les opérations que comporteront celle-ci. Cette délégation a été composée, en outre du Pré- sident de la Société en exercice, de MM. Laisant, Fouret, Raffy el Kænigs. Plusieurs savants étran- gers MM. Craig, Le Paige, Schoule ont également été introduits dans la Commission. On aura sans doute remarqué que parmi les points auxquels s’est attaché le Congrès ne figure pas la question des moyens financiers. Elle est pourtant d'importance, le nerf de la guerre étant aussi celui des entreprises scientifiques. Mais elle avait été réservée comme se rattachant à la caté- gorie des mesures d’exéculion sur lesquelles la Commission permanente aurait à statuer. Les premières dépenses avaient généreusement élé couvertes par la Société mathématique ; mais celle-ci était tenue de mettre un terme à ses sacri- fices. Il s'agissait de trouver une autre caisse prête à s'ouvrir pour les besoins durépertoire. L'embarras de la Commission fut de courte durée. Le Président en exercice de la Société mathématique, M. Haton de la Goupillière, en sa qualité de membre du Co- mité des travaux historiques et scientifiques, plaida chaleureusement auprès de celle-ci la cause du répertoire. M. Darboux invité à présenter des con- bien, dans la plus grande mesure possible, préter pour ce classement leurs concours à la Commission permanente. 90 Afin de faciliter l'établissement des suppléments con: sacrés aux travaux postérieurs à 1889, le Congrès émet le yœu que chaque auteur fasse suivre le titre de son mémoire de la notation définie dans la cinquième résolution; que si l’auteur a négligé de le faire, les administrateurs des divers recucils périodiques, ou, à leur défaut, les rédacteurs des recueils analytiques qui rendront compte de ces iravaux, veuillent bien se charger de ce soin. 109 IL est institué une Commission permanente qui veillera à l'exécution des résolutions précédentes. Elle est composée de membres francais : MM. Poincaré, Désiré André, Humbert, d'Ocagne, Charles Henry; membres étrangers : MM. Catalan, Bicrens de Haan, Glaisher, Gomes Teixcira, Holst, Valentin, Emil Weyr, Guccia, Enestrom, Gram, Liguine, Stephanos. Le siège de la Commission permanente est à Paris, où devront résider le président et le secrétaire. Si des vacances se pro- duisent dans son sein, la Commission se complétera par coop- tation ; elle est également autorisée à s'adjoindre de nou- veaux membres en nombre quelconque. Elle statuera au sujet des additions à la classification adoptée que les progrès de la science pourraient rendre nécessaires, et au sujet des difü- cultés que soulèverait Pinterprétation des résolutions précé- denies. Dans le cas où, pour une raison quelconque, une entente nouvelle entre les mathématiciens des divers pays lui semblerait nécessaire, la Commission organiserait un nouveau Congrès international, soit à Paris, soit dans toute autre ville d'Europe. 41° Le Congrès émet le vœu que, tant en France qu'à l'Etranger, les divers journaux mathématiques donnent la plus grande publicité possible aux présentes résolutions et aux décisions futures de la Commission permanente, L. OLIVIER. -— REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE clusions sur la question fit un rapport entièrement favorable dont les considérants constituent assu- rément l’encouragement le plus flatteur qui puisse stimuler le zèle des collaborateurs du répertoire, et sur sa proposition, le subside demandé fut accordé. Rien ne manque donc plus à la mise à exécution du projet dont l’idée est née à la Société mathé- matique de France. Les savants dont là bonne volonté a été dès la première heure acquise à ; l’œuvre, se sont attelés courageusement à la beso- gne. Le dépouillement des recueils mathématiques de toutes les langues avance rapidement, et avant qu'il soil longtemps, les Géomètres se trouveront en possession d’un des plus utiles instruments de travail dont ils puissent avoir à disposer. Nous ne manquerons pas de signaler son apparition aux lecteurs de la Revue. Maurice d'Ocagne, Ingénieur des Ponts et Chaussées. REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE Rousseau disait de l'Hygiène qu'elle est moins une science qu'une vertu. Pour lui, comme pour beaucoup de ses contemporains, l'art de se pré- server de la maladie était en quelque sorte facul- tatif, principalement fondé sur la tempérance et la sagesse. Les grands fléaux qui avaient désolé l'An- tiquité et le Moyen-Age, depuis longtemps étaient passés. On avait oublié la nécessité de la défense collective qu'ils avaient imposée aux hommes, les travaux gigantesques de la civilisation romaine, les mesures draconiennes du Moyen-Age contre les pestes et les épidémies. Il semblait que, pour maintenir à l’état sain un corps bien constitué, il eût suffi à chacun de nous de connaitre sa propre organisation et d'en respecter les exigences. C'est ainsi que jusqu'à nosjours l'Hygiène est arrivée à ne plus guère comprendre que des préceptes d'ordre individuel. La révolution biologique accomplie par Pas- teur a singulièrement élargi cette conception. Nous savons aujourd'hui qu'un très grand nombre de maladies sont causées par des parasites microbiens susceptibles, pour la plupart, d'évoluer tantôt dans le milieu physique qui nous entoure, tantôt dans le corps des animaux, peut-être aussi chez les plantes. Contre de tels fléaux l'individu est impuis- sant à se prémunir; c’est à la Sociélé qu'il appar- tient de les combattre. Pour les détruire ou s'opposer à leur envahisse- ment, il convient de rechercher leur origine, de déterminer leurs conditions d'existence, leur mode d'introduction dans l’économie, les circonstances qui s’opposent à leur développement. C'est un ap- pel non plus à la seule connaissance du corps hu- main, considéré isolément dans la Nature, mais à la Biologie tout entière. Nous allons essayer d'indiquer les progrès princi- paux qu'a réalisés, en ces derniers temps et surtout depuis un an dans le domaine de l’'Hygiène, cette science précise des biologistes. Les pouvoirs publics ont mis à profitles découvertes de ces savants pour prendre des mesures d'intérêt général, sur les- quelles nous devrons aussi attirer l'attention de nos lecteurs ‘. Pour la commodité de l'exposition, nous les considérerons successivement aux points de vue international, national, local et individuel. Î. — CHOLÉRA ET GRIPPE Parmi les maladies à grande extension, qui ne sont qu'épidémiques dans nos pays, il faut surtout citer le choléra et la grippe : La soudaine apparition du choléra en Espagne pendant l'été 1890 a ramené l'attention des hygié- nistes sur l’étiologie et la prophylaxie de cette ma- ladie. Son contage est très probablement le bacille- virgule, trouvé par Koch en 1884 dans l'intestin des cholériques. Que devient ce microbe quand l'épidé- mie a disparu? Peut-il la faire renaître longtemps après s'être conservé soit dans le sol à l’état inerte de spore, soit dans l’eau ou le corps de quelque ani- mal à l’état actif de bacille? Cette question se posait l'an dernier : le choléra avait en effet ravagé l’Es- pagne en 1883 et depuis lors aucun cas d'importation du fléau n'avait pu être signalé à l’intérieur de la péninsule. Le D Colvée ? s’est livré à ce sujet à une intéressante enquête : relevant les dates et lieux des décès, il a pu retrouver la marche que l’épidé- mie avait suivie dans la province de Valence. Cette étude l’a conduit à affirmer l'importation récente du fléau. Il nous semble cependant que cette con- clusion ne s'impose pas, l’auteur lui-même décla- rant ignorer la voie d'introduction du germe cho- lérique eu Espagne *. ? Le danger dont cetie épidémie menaçait la { Nous nous abstiendrons de traiter certaines questions d'hygiène auxquelles, vu leur importance, la Revue consacrera dans le courant de 1891 des articles spéciaux. 2 Dr Colvée (de Valence). Le choléra dans la province de Valence, Médecine moderne. t. I, p. 105 et 918, 1890. 3 D’après certains médecins, il paraîtrait que, depuis l’épi- démie de 1885, des cas sporadiques se seraient manifestés à Riga de Puebla à la suite de terrassements en des lieux où avaient été jetés en 1885 des déjections de cholériques. sms here EL Sifos L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 173 France a été conjuré, grâce, sans doute, à l'intel- ligente prophylaxie instituée par notre Gouverne- ment. Autrefois lesdifférentes nationsétablissaient, en cas de choléra, des cordons sanitaires destinés à maintenir absolument en dehors des frontières les voyageurs venant des pays infestés. Les besoins du commerce, l'état de nos mœurs et la multipli- cité des voies de communication ont rendu cette interdiction de passage impraticable ou illusoire. De tous les étrangers contaminés les plus dan- gereux sont précisément ceux qui s’introduisent en fraude, car, l'Administration ignorant leur rési- dence, le mal qu’ils propagent se répand sans que personne, au début, essaie de l’enrayer. C'est pourquoi les hygiénistes ont pensé qu'au lieu d'imposer à la frontière des quarantaines que le voyageur a toujours: intérêt à éluder, il valait mieux le laisser passer, à la condition d'obtenir de lui la déclaration de son lieu de résidence et de l'y soumettre pendant quelque temps à l'observation d'un médecin ‘. Les règlements que l’Administra- tion a édictés pour assurer cette inspection, obli- gent l’autorité municipale à la faire faire. Nos lecteurs se rappellent peut-être le cas d’un magis- trat municipal qui fut, l'été dernier, suspendu de ses fonctions pendant 15 jours pour avoir négligé de faire visiter par un médecin un étranger venu d'Espagne etrécemment installé dans sa commune. En vérité la peine est légère, si l’on songe aux ter- ribles conséquences qui eussent pu résulter de cette infraction au règlement. Souhaitons que nos lois sanitaires édictent une sanction plus sévère, propor- tionnée à l'importance des pouvoirs dont les maires sont armés et à la responsabilité qu'ils acceptent, L'examen médical, quotidien pendant les pre- miers jours de la résidence, a été une innovation importante, car il est relativement facile d'étouffer en quelque sorte dans l'œuf une épidémie, et à peu près impossible de la maitriser lorsqu'on l’a laissée irradier de tous côtés. Ilsemble donc que le cordon sanitaire soil appelé à disparaître de nos mœurs, et quon doive lui substituer une période d'isolement avec désinfection, s’il y a lieu. Une autre mesure de grande efficacité et tout à fait nouvelle à consisté dans l'emploi d’étuves à vapeur pour désinfecter le linge, les habits, les objets suspects de contaminalion. Dès 1868 Pas- teur en avait indiqué l'utilité : il avait découvert deux faits importants : 1° Le degré de chaleur nécessaire pour tuer une spore desséchée est très supérieur à la température requise pour tuer, en milieu humide, la spore de même espèce ; ! Voyez à ce sujet : D' Charrin : le Choléra en Espagne et les mesures prophylactiques, dans la Revue du 39 juillet 1890. t I; p. 441. ' 2 Certaines spores résistent quelque temps à l'ébullition de l'eau sous la pression normale, Toutes au contraire sont rapidement détruiles par la vapeur à 140°, souvent même à 120°. L'autoclave, sorte de marmite de Papin, que Chamberland a fait construire d'après ce principe, pour réaliser une prompte et complète stérilisa- tion, se trouve aujourd'hui dans tous les labora- toires. La vapeur y est employée sous pression et portée à une température qui peut atteindre 150°. En France ce mode de stérilisation n’a cessé d’être considéré comme absolument efficace. Mais en Allemagne on s’en défiait depuis que Koch, Gafïky et Loeffler, en 1881, avaient annoncé l'avoir pris en défaut. Leurs assertions à ce sujet repo- saient sur une erreur, qui n'a été relevée que l'an dernier: ils n'avaient pas complètement chassé l’air de l’autoclave. Straus ! en France, Rohrbeck ? en Allemagne, ont fait à ce sujet, en 1890, une série d'études critiques fortintéressantes. Indépendamment l’un de l’autre ils ont prouvé que les appareils à vapeur sous pression (Geneste : et Herscher, Washington-Lyon, Leblanc-Overbeck) donnent une stérilisation plus rapide et plus cer- taine que les appareils (Henneberg, Flugge) qui emploient le courant continu de vapeur à 100. Quant aux étuves à air sec, installées à grands frais dans nos hôpitaux il y a quelques années, elles ne donnent qu’une sécurilé illusoire et doi- vent être rejetées. C'est pourquoi, sur l’avis du Conseil d'Hygiène, l'Administration à prescrit l'emploi des systèmes sous pression, pour stériliser à la frontière franco: espagnole les vêtements des voyageurs. Bien que cette désinfection n'ait pu porter sur la totalité de leurs effets, il est très problable qu'elle a contri- bué à la préservation de notre pays. Aucune mesure de ce genre n'a pu êlre prise contre l’épidémie de grippe (Znfluenza) qui s’est étendue l'hiver précédent sur toute l’Europe. Quoique celte maladie ait été l’objet de nombreux travaux, dont plusieurs ont été exposés ici même #, la microbie n’a encore conduit qu'à éclairer le mé- canisme de ses complications. L'étiologie presque tout entière est à faire. Les seules observations nouvelles qu'il nous parait utile de signaler sont relatives à la question, souvent controversée, des rapports de la grippe et de la fièvre dengue, si répandue en Orient, Is. Srraus, De la stérilisation et de la désinfection par la chaleur, Arch. de Méd. experim. 17 mars 1890. ? Ronr8Eeck, Zur Lüsung der Desinfektungsfrage mit Was- serdampft, Gesundheit-Ingenieur, 1890. 3 Sur ce sujet, voyez notamment dans la Revue du 30 dé- cembre 1890, page 753, la Revue annuelle de médecine de notre collaborateur le Dr De Lavarenne, 174 L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE . De Brun, professeur à l'Ecole de Médecine de Beyrouth, qui a plusieurs fois eu l’occasion de les comparer, à bien voulu nous communiquer les résultats de cette étude. Voici, d’après lui, quelles sont, au point de vue clinique, les ressemblances et les différences des deux maladies : 1° Ressemblances : Invasion brusque, rapide élé- vation de température, courbature, douleurs mus culaires, céphalalgie. 2° Différences : La courbature et la sensation d'a- néantissement, capitaux dans la dengue, ne sont que de second ordre dans la grippe. -— L'éruption, parfois œdémateuse ou érythémateuse, mais toujours passagère dans la première de ces mala- dies, se montre, au contraire, dans la seconde, franche, active et remarquable par ce fait qu’elle est suivie de desquammation et de démangeaisons. — Dans la grippe les douleurs commencent par un point de côté, s’accusent souvent dans la région rétrosternale avec sensation d'oppression, tandis que dans la dengue elles apparaissent d'emblée beaucoup plus étendues. — En outre la dengue est caractérisée par une convalescence beaucoup plus longue, avec prostration et inappétence absolue. — Jamais la toux, si fréquente dans la grippe, ne s’y observe. — Quant aux complications et au pro- nostic, la dengue est essentiellement bénigne, pou- vant toucher des centaines de milliers d'individus sans tuer personne ; on sait qu'il en est tout autre- ment de la grippe. Pour ces raisons de Brun conclut à une difré- rence spécifique, profonde, absolue entre la grippe et la dengue, ne permettant pas de considérer la grippe comme une dengue modifiée. « Quand la grippe, retour d'Europe, nous est parvenue en Syrie, remarque-t-il, la tempéralure à Beyrouth pendant toute la durée de la maladie a oscillé autour de + 14 C, et n’est jamais descendue au- dessous de + 9, et cependant les formes de la maladie et ses complications ont été absolument semblables à ce qu'on les avait observées en Eu- rope par les froids de l'hiver précédent, » L'ori- gine et le mode d'extension des deux épidémies sont aussi très différents : « Tandis que la grippe, naissant souvent des régions circumpolaires, s’é- lance deux ou trois fois par siècle avec une rapi- dité souvent inexplicable pour couvrir en peu de temps d'immenses étendues de territoire et parfois s'étendre sur toutes les terres des deux Continents, la dengue, au contraire, gagnant chaque année du terrain, s’installe définitivement dans les pays une première fois visités, à mesure qu’elle a pu s’accli- mater dans des zones plus tempérées. — La pre- mière est une maladie capable de sévir en toute saison, mais aimant particulièrement l'hiver; la seconde est une affection des pays chauds, à la- quelle le froid a toujours opposé jusqu’à présent une barrière infranchissable t, » Ces intéressantes remarques ne sont que le point de départ des recherches variées qui restent à ef-. fectuer pour découvrir l’agent spécifique de l'épi- démie et mettre les différentes nations en situation de s’en préserver mutuellement. IT. — VARIOLE Dans les limites mêmes de chaque État la lutte contre les infections endémiques est toujours dif- ficile à organiser. L'histoire de la variole en atteste cependant l'efficacité. En France, l'application, de plus en plus répandue, de la prophylaxie d'usage, a continué de réduire la fréquence de cette mala- die. Elle est en décroissance marquée dans la popu- lation ouvrière de Paris, comme le montrent les chiffres suivants, relatifs aux varioleux admis de- puis quatre ans dans les hôpitaux de la Capitale? : 1887 1.496 admissions 215 décès 1888 1.079 — 152 — 1889 706 — 63 — 1890 363 — 31 — Dans nos colonies au contraire le fléau sévit avec une intensité désolante. Plusieurs médecins résidents, Prengruebec *, Dicquemare #, Dupard ?, Hublé°, Henri Girard ?, Hocquard 5, Paul Gouzien *, Léon Canolle et Pujol "°, ont présenté à l'Académie de Médecine d'importantes études sur les ravages et la prophylaxie de la variole en ces pays. Her- vieux résume ainsi les conclusions de leurs tra- Vaux : «1° La variole règne à l'état endémique et épi- démique dans la plupart de nos colonies : l'Algérie, la Tunisie, le Sénégal, les îles de la Réunion, de Madagascar et de Nossi-Bé, la Cochinchine et le Tonkin. «2° Ces endémies et ces épidémies ne sont pas seulement une source d'infirmités pour les indi- gènes et une cause de dépopulation pour le pays. Elles constituent un danger permanent pour les | Communication manuscrite du Pr de Brun. ? Ces chiffres ont été cités par le Pr Léon Lefort à l'Aca- démie de Médecine, dans la séance du 13 janvier 1891 ; page 37 du Bulletin. $ PRENGRUEBEC, De la variolisation chez les indigènes de l'Algérie. iDrcQuemaARE, Communication analysée à l’Académie de Mé- decine, dans la séance du 13 février 189. ° Duparp, Relation de deux épidémies de variole.… analysée à l’Académie de médecine dans la séance du 13 février 1890. 6 Hueré, Mémoire sur les vaccinations et revaccinations pra- tiquées en Algérie et en Tunisie, de 1888 à 1890. 7 Henri Girar», Variole et vaccine au Sénégal (1889). $ Hocquarp, Rapport à l’Académie de Médecine en 1887. % Ce travail a été analysé à l’Académie de Médecine dans sa séance du 13 février 1890. 10 Léon Caxozze et Puror, Rapport sur l'épidémie vario- lique qui à régné à Nossi-Bé, du 20 octobre 1886 au 20 juin 1888. À È À j dd AR 8 gt L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 175 Européens établis dans ces contrées; elles y jettent le trouble dans les relations commerciales et compromettent ainsi la prospérité de chaque colonie. » 3 La résistance des indigènes à la pratique de l'inoculation vaccinale et de certaines mesures hygiéniques provient surtout d’un sentiment de défiance à l'égard de tout ce qui leur vient de l'Etranger. « 4° L'expérience a démontré que, dans les co- lonies, l'inoculation vaccinale n'est facilement acceptée par les indigènes qu'autant qu'elle à été préalablement imposée manu militart ». 5° Pour échapper à la vaccination, lesindigènes recourent à des subterfuges, «les uns se dérobant par la fuite, comme ies Malgaches ; les autres détruisant les pustules vaccinales à l’aide de la chaux ou d'un extrait de papayer, comme les Annamites » ; elc., etc. Aussi Hervieux déclare-t-il que «la vaccination obligatoire, si obstinément et si unanimement réclamée par tous les médecins de l’armée et de la marine, est le seul moyen eflicace de triompher de toutes les résistances et d’affranchir nos colonies du fléau variolique ! ». Cette importante question de lobligation de la vaccine n'intéresse pas seulement nos colonies : elle se pose partout où la maladie peut exercer ses ravages. L'Académie de Médecine vient de lui consacrer une longue discussion : en général le bienfait de la vaccine n'y a point été contesté; mais deux opinions se sont produites quant au droit de l’imposer par une loi : Lefort et Lagneau ? on£ exprimé la crainte d’attenter ainsi à la liberté individuelle. Lefort a soutenu en outre que la vaccine est le moins efficace des procédés préven- tis, très inférieure à l'isolement et « impuissante à empêcher les épidémies de variole * ». Brouar- del, Proust et Colin ont combattu cette opinion, montrant que la «toute-puissance presque absolue de la vaccine contre le mal ressort: 1° de la «rareté de la variole dans les groupes soigneusement vaczinés »; 2 de ce fait que les épidémies sont arrêlées par les vaccinations en masse. Au con- traire l'expérience a établi que les mesures d’isole- ment sont insuflisantes, qu'il est difficile, pres- qu'impossible de les appliquer.en temps d’épidé- mie. L'apport du germe ne pouvant être complè- tement empêché, il est nécessaire de rendre ré- fractaire à son développement le terrain où il 1 Hervieux, La vaccine obligatoire et la question des résis- ances, Académie de Médecine, séance du 13 janvier 1891. 2 Séances des 10 février et 13 janvier 91. 3 Séance du 13 janvier 91, page 69 du Bulletin, 4 Léon Corix. Sur la vaccination, Acad. de Méd, séance du 13 février 91. risque d’être introduit !. Dans une société civilisée où personne ne devrait avoir le droit de constituer un danger pour ses semblables, l'obligation de la vaccine ne serait done discutable que si l’inocu- lation pouvait conférer quelquefois des infections, par exemple la tuberculose et la syphilis. Mais il y a, suivant Brouardel?, toute sécurité à cet égard, à la condition d'observer les précautions aujourd’hui bien connues, que réclament le choix de l’animal vaccinifère et le mode d’inoculation. Remarquons qu'à ce dernier point de vue il im- porterail d'accorder quelque attention au vaccin de chèvre, préconisé l’an dernier par Conneux et Dubuisson. D’après Hervieux, qui a consacré un intéressant rapport aux observations de ces méde- cins, le vaccin de la chèvre vaudrait celui de la gé- nisse %, On peut ajouter qu'il offrirait l'énorme avantage de provenir d'un animal réfractaire à la tuberculose. Ce n’est pas seulement la vaccination, mais aussi la revaccination, que réclame aujourd’hui avec ar- deur la grande majorité des hygiénistes. Depuis que le service militaire s'impose à tous les Fran- çais, les revaccinations sont devenues chez nous assez nombreuses; cependant elles n’ont encore porté que sur la moitié de la population. À Paris le maire du XIII arrondissement, M. Thomas, s’est efforcé de les propager : dans toutes les écoles de son ressort les enfants âgés de 10 ans ont été revac- cinés !. Il faut souhaiter que les autorités municipa- les suivent son exemple. Les résistances des pa- rents sont loin d'être aussi nombreuses qu'on pour- rait le croire. Dans le XIII arrondissement, où 900 enfants ont été revaccinés, le D' Mangenot n'a trouvé que 2 parents réfractaires à cette mesure prophylactique *. Le Conseil supérieur de l’Instruction publique a tenu à l’imposer à tous les étudiants en méde- cine arrivant à l’École ou déjà en cours d’instruc- tion. Nous regrettons que cette prescription ne s’étende pas aux autres étudiants. Un curieux travail du D' Goldsehmidt{6, paru 1 Prousr, sur la vaccination obligatoiré et la prophylaxie de la variole, Acad. de Méd., 20 janvier 91. 2 BRoUARDEL même sujet, t#idem, 3 mars 91, page 347 du Bulletin. 3 Hervræux, Du vaccin de chèvre, Bull. del’Acad. de Médecine séance du 20 mai 1890. 4 Le règlement des écoles primaires, modifié par l’arrété municipal du 29 décembre 1888, prescrit ainsi cette revac- cination : « Lorsque l'enfant a atteint sa dixième année, il doit, pour être admis ou maintenu à l'Ecole, être revacciné parle médecin attaché à l'établissement. » 5 Dr MaxGeNoT, Sur la revaccination obligatoire, Société de Mé- decine publique, et Revue d'Hygiène, juillet, octobre, décembre 1890. 5 Gozpscaminr, Vaccine obligatoire et yacine animale, in Revue de médecine, 10 avril 1890, page 315. 176 L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE en 4890, sur la nécessité de la revaccination montre bien l'urgence absolue de dispositions légales à ce sujet. L'auteur y relève les décès par variole en Allemagne depuis 1875, époque à partir de laquelle la revaccination est devenue obliga- toire en ce pays, el il en compare le nombre à celui des décès varioliques antérieurs à cette date. Avant l'obligation, la moyenne annuelle de ces décès était en Prusse de 34 sur 100.000 habitants. Sous l'influence de la loi, ce chiffre est tombé à 2,25, et en Bavière à 1,1. Goldschmidt fait observer qu’en 1886, alors que Marseille comptait 2.051 décès de varioleux, soit 543 pour 100.000 ha- bitants, il n'y avait qu'un seul dècès de ce genre à Berlin. En Alsace, la variole a presque disparu depuws l'application de la loi. Remarquons que même en Allemagne on ren- contre encore de nombreux insoumis; près de 10 !/, arrivent à l’âge de 12 ans sans être vaccinés; mais bien peu (3,5 °/;) échappent alors à la nouvelle série de vaccinations. Aussi les décès d'enfants d’un à trois ans interviennent-ils pour près de moitié dans la mortalité par variole en 1887. : D'après les dépenses faites en Belgique et en Allemagne, une première mise de fonds de 15.000 francs et une dépense annuelle de 260.000 francs sufliraient pour assurer en France le service de la revaccination ‘. 1] serait, croyons- nous, difficile de trouver, pour l'argent de l'État, un placement plus productif : à Paris, la mor- talité par variole, même dans les années favo- rables, dépasse 150 décès. III. — TUBERCULOSE Plus encore que de la variole, l'hygiène natio- nale doit se préoccuper de la tuberculose, infini- ment plus répandue dans la sociétè française. Le commencement de 1890 a vu finir la grande discussion à l’Académie de Médecine sur la pro- phylaxie de cette maladie. La même année s’est terminée par la nouvelle que le D' Koch avait trouvé le moyen de la guérir. La Société d'Hygiène de Berlin, qui projetait alors d'édifier des hôpitaux spéciaux pour les phtisiques, déclara, dans un élan d'enthousiasme fort exagéré, qu'en présence de la grande découverte du D' Koch, il n’y avait plus lieu de songer à cette création, la tuberculose étant appelée à disparaitre à bref délai. IL à fallu en rabattre sur l’efficacilé du remède proposé par l’éminent bactériologiste. L'innocuité même de son traitement esl encore loin d'être établie. Aussi toutes les questions soulevées tant à l'Académie de Médecine que dans les autres sociétés françaises et étrangères touchant l’étiologie et la prophylaxie 1 Gorpscamipr, Jhidem. de la tuberculose, conservent-elles encore leur actualité. Nous n’indiquerons que les parties les plus neuves de ces intéressantes discussions. Le caractère transmissible de la tuberculose, établi en 1868 par Villemin, la nature animée du contage, démontrée en 1882 par Koch, sont au- jourd’hui hors de doute. La connaissance de ces faits permet déjà de prendre contre la maladie d'importantes mesures préventives. Verneuil et Villemin, chargés par le Congrès de 1889 ! de formuler à ce sujet des /nstructions à l'usage du public, soumirent leur rédaction à l'Académie de Médecine. Elle y souleva de longs débats. Leroy de Méricourt, Hardy et Jaccoud exprimèrent la crainte que la promulgation solennelle des dangers de la contagion effrayät l'entourage des tubercu- leux et mit ces malheureux dans une situation ana- logue à celle que la Société faisait jadis aux lé- preux. Cette considération sentimentale fut com- battue par Verneuil, le regretté Trélat, Vallin et Ollivier, et finalement l’Académie adopta, à l’'una- nimité moins 2 voix, la proposition du D' Bergeron de signaler au public les conditions, actuellement connues, de la contagion ?. Voici les principales : L'agent spécifique de la tuberculose, — Bacille de Koch, se trouve en abondance dans les crachats des phtisiques pulmonaires : il faut éviter que ces malères se dessèchent, car c’est alors que les bacilles expectorés sont transportés par l'air. Les expériences de Gerlach sur divers animaux ont prouvé que linhalation du bacille spécifique produit la tuberculose des voies respiratoires. Il est donc nécessaire de le détruire. Dans les Zns- tructions il est recommandé d'employer dans ce but l’eau bouillante ou les antiseptiques. — L'Acadé- mie prescrit aussi de ne point coucher dans le lil d'un tubereuleux, de ne point habiter sa chambre; elle a émis le vœu que dans les stations hivernales les chambres occupées par les phtisiques fussent désinfectées après le départ des malades. Enfin elle a insisté sur la contagion par les viandes ou le lait provenant d'animaux tuberculeux. Les travaux bien connus de Galtier, les re- cherches plus nouvelles de Bang ?, enfin les ré- centes expériences de Heim ont montré que le. ! Congrès pour l'étude de la Tuberculose, tenu à Paris en 1889, 2? Les adversaires des /nstructions prétendaient que le but pouvait être atteint par le médecin traitant, capable d’obtenir des familles lapplication des mesures prophylactiques sans effrayer le malade et son entourage. Cette action salutaire du médecin est possible dans certaines familles aisées qni ré- clament fréquemment ses soins; mais que devient-elle chez les pauvres, qui ne voient guère le médecin qu’à la consulia- tion hospitalière, ou, forcés de garder le lit, ne le demandent qu'après être devenus depuis longtemps des foyers de conta- gion ? 3 Banc. Communication au Congrès pour l’étude de la tu- berculose. Comptes-rendus du Congrès de 1889. -# po à L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 17 bacille de la tuberculose, comme les microbes du choléra et du «typhus abdominal, » ! peuvent con- server leur virulence dans le lait pendant un temps variable compris dans les limites où ce produit alimentaire est utilisé, c’est-à-dire plus de trois jours. Remarquons toutefois que, d'après certaines expériences de Gebhart ?, la dilution trés grande du bacille de Koch dans le lait l'y rendrait presque inoffensif. C'est ainsi que du lait, recueilli direc- tement du pis sain d’une vache tuberculeuse ef qui donnait par inoculation lu tuberculose, restait sans effet quand il était étendu de quarante fois son volume d'eau ou de lait sain. On peut craindre que cette dilution n'ait pas toujours lieu, surtout à Paris, té de crèmeries sont exclusivement par les vacheries industrielles de la banlieue. Dans ces écuries insalubres où les animaux sont entas- sés, ne prennent aucun exercice, respirent un air insuffisamment renouvelé et sont, en général, mal nourris, la tuberculose est très répandue. Veys- sière, inspecteur des abattoirs de la ville de Rouen, signalait l’an dernier au Conseil central d'Hygiène la nécessité de soumettre ces établissements à des inspections périodiques pour y constater l’élat des sujets. Il citait dans son rapport* une vacherie an- nexée à un couvent, vacherie qui fournit une grande quantité de lait à Rouen et où la tuber- culose est endémique, ainsi que le prouve l’état des animaux qu'elle envoie à l’abattoir. Alors mème d'ailleurs que les vaches offrent toute l'apparence d'une santé parfaite, elles peuvent, suivant la remarque récente de Nocard, être tu- berculeuses, engendrer des produits tuberculeux et donner du lait contaminé. On doit suspecter non seulement le lait de ces animaux, mais aussi le beurre, peut-être même les divers fromages qui en dérivent. Tous ces produits paraissent susceptibles de constituer d'excellents véhicules du bacille de Koch. Duclaux, dans la critique qu'il a consacrée aux travaux sur ce sujet ‘, a fait observer que les expériences pro- bantes font encore défaut. Dans le doute il se range à l’opinion de l'Académie de Médecine qui signale le danger du lait contaminé el conseille de le faire bouillir. réparatrice où quanti- alimentées 1 Herm. Sur la manière d’étre des bacilles du choléra, du typhus abdominal et de la tuberculose dans le lait et le beurre etc. 41b. A. D. K. Gesundh. 1890. 2 Gegxarr, De l'influence de la diiution sur l’activité du vi- rus tuberculeux, Munch. Médic. Woch. 1889 et Ann. de l’Ins- titut Pasteur 1889 p. 690. 3 VEyssièRE, L’inspection périodique des vacheries au point de vue de la tuberculose bovine in. Revue Sanitaire de la Province, avril 1890. 4 Duccaux. Sur la vitalité de divers microbes pathogènes dans le lait. — Ann. de l’Institut Pasteur, mars 1890. REVUE GÉNÉRALE, 1891. Ces idées sur la contagion ont déjà reçu une sanction pratique. Sous l'inspiration de Panum il s'est formé à Copenhague, à Stockholm et dans plusieurs autres villes scandinaves, des sociétés pour l'achat du lait qui imposent à leurs vendeurs de se soumettre aux visites el expertises de leurs délégués. Observées dans leur ensemble, ces mesures pa- raissent appelées à réduire dans une proportion énorme la diffusion de la tuberculose. Mais le rôle de l’'Hygiène n’est pas seulement de s'opposer à la contagion : elle doit intervenir aussi dans le trai- tement de la maladie déclarée. Les enfants notam- ment réclament sous ce rapport des soins particu- liers. Parmi les traitements hygiéniques de la tu- berculose, principalement de la tuberculose gan- glionnaire et osseuse, si fréquente dans le jeune âge, on a depuis longtemps, mais surtout en ces dernières années, préconisé le traitement marin. C'est pour permettre aux indigents d'en bénéfi- cier que la ville de Paris a créé l'hôpital de Berck. L'œuvre nationale des hôpitaux marins de France, organisée et mise par l'Administration sous la haute direction du savant secrétaire perpétuel de l'Académie de Médecine, le D' Jules Bergeron, à augmenté cette année le nombre de ses lits aux sanatoriw de Banyuls, d'Arcachon et de Pen-Bron près du Croisie). Cependant Iscovesco a récemment contesté les espérances fondées sur ce traitement !. Il à rapporté un certain nombre d'observations d'après lesquelles la mer aurait joué un rôle absolu- ment déplorable dans l'évolution des lésions tuber- culeuses. Les abcès froids, les gommes ne seraient pas améliorés. Il dit bien que le rachitisme subit une modification heureuse, mais on voit aujour- d’hui dans cette affection une modification de la nutrition, Ses aflirmations contredisent done l'opi- nion accréditée depuis près de 30 ans par les obser- valions du D' Rochard, que n’ont cessé d’affermir les travaux de Casin, Armengaud, Gibert, Vidal, Van Merris. En Italie où l’organisation des hôpi- laux marins se poursuit avec une grande activité, les médecins sont unanimes à les recommander aux scrofuleux, à tous les malades atteints de tuberculose ganglionnaire. On ne saurait donc accueillir qu'à titre d'incitation à de nouvelles observations les conclusions d'Iscovesco, Du reste l’Assistance publique ayant récemment organisé un service d'enfants tuberculeux à la station chlo- rurée sodique de Salies-de-Béarn, on pourra, dans un avenir rapproché, juger dans le traitement ma- ! Iscovesco, Sur l’action thérapeutique de la mer chez les sero- fuleux, Acad. de Méd., 16 septembre 4890. CE 178 L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE rin la part curative de l'élément minéral el celle du séjour au bord de la mer. Au Congrès de Berlin la question des hôpitaux spéciaux pour les phtisiques a été discutée. La majorité des orateurs s’est prononcée pour cette créalion. Les docteurs Weber de Londres, Leyden de Berlin, Dettweiler de Falkenstein l'ont ap- puyée, recommandant surtout les établissements très bien aérés, placés, autant que possible, au voisinage des bois et pourvus de médecins rési- dents pour surveiller continuellement les malades. Le Conseil municipal de Berlin a été saisi de cette question, quand la découverte du D' Koch est venue iout arrêter. En France, à l'instigation de Verneuil et de Potain, l’'Administralion a créé l’an dernier le sanatorium de Vernet, au pied même du Canigou (Pyrénées-Orientales). Cette station a élé inaugurée au mois d'octobre 1890. Ces traitements hygiéniques ne sont pas, comme on pourrait le croire, d'invention récente. Avant d'être scientifiquement démontré, le caractère contagieux de la tuberculose avait été, à des dates diverses, notamment au xvu° siècle, entrevu et af- firmé par quelques cliniciens isolés !. Mais,en dépit de leur perspicacité, ces observaleurs n'avaient pu prescrire que des mesures empiriques contre un mal dont la vraie cause leur était inconnue. C'est l'introduction de la méthode expérimentale, c'est- à-dire de la science, dans les choses de la méde- cine, qui seule nous a désigné d'une façon précise l'ennemi mème que nous devons combattre. IV. — FIÈVRE TYPHOÏDE Sur la fièvre typhoïde nos connaissances se sont peu enrichies depuis un an. Cependant quelques faits intéressants ont été observés, d'importantes mesures prophylactiques ont été prises, et déjà on peut en apprécier les heureux effets. Dans l’ordre théorique plusieurs questions ont élé agitées. On sait que depuis 1880, époque à la- quelle Eberth découvrit un bacille particulier à l’autopsie des typhoïdiques, on considère ce bacille comme la cause de la fièvre lyphoïde. On fonde celle opinion sur la présence constante de ce mi- cro-organisme, pendant la période d'état,d'une part dans la rate, les ganglions mésentériques et les plaques de Peyer du cadavre, d'autre part dans la rale des malades (Eberth, Gaffky, Klebs, Chante- messe et Widal, etc.). Ce qui semble renforcer cette manière de voir, c'est que souvent la présence du bacille incriminé a été constatée dans l’eau qui avait servi de boisson à des personnes devenues peu de temps après typhoïdiques. l Voyez à ce sujet: Dr DE LavarexxEe, Tuberculose el Auscullalion, dans la Revue du 15 janvier 4890, t. 1, p. 49. S'il y a done une forte présomption en faveur de la spécificité typhoïgène du Bacille d'Eberth, on doit reconnaitre que la preuve scientifique de cette spécificité n'existe pas. L'inoculation du microbe aux animaux ne permet pas de trancher la question, pour cette raison qu'on ne connaît aucun animal susceptible de contracter, avec ses caractères cli- niques etanatomo-pathologiques,la fièvre typhoïde de l’homme. Les symptômes de la maladie conférée par inoculation ne sont décisifs en aucun sens. À défaut de preuve absolue, c'est donc la comparai- son avec ce que l’on sait des maladies microbiennes mieux connues, une sorte deraisonnement inductif, qui à conduit à admettre comme presque dé- montrée une relation de cause à effet entre la fièvre typhoïde et le bacille d'Eberth, Aussi devons-nous accueillir avec un vif intérêt tous les travaux relatifs à la spécificité de cette bactérie. Sur ce sujet Rodet et Roux, de Lyon, ont publié dans le courant de 1890 des observations importantes !. Déjà en novembre 1889 ils avaient signalé d’étroites analogies entre le bacille dit ty- phique et le Bacillus Coli communis, l'un des hôtes habituels de notre gros intestin. Poursuivant cette étude, ils affirment, cette fois, non plus seulement la ressemblance, mais l'identité spécifique des deux formes bacillaires. Les cultures, quoiqu'un peu différentes, n’offrent aucun caractère rigoureuse- : ment distinctif. Suivant les conditions du milieu le Coli communis se rapproche plus ou moins du bacille d’Eberth ; dans certains cas il se confond avec lui. Chez les typhoïdiques on trouverait le ba- cille d'Eberth dansla rate, le Coli communis dans les intestins. Ce dernier acquierrait sa virulence dans un subslratum extérieur, l’eau ou le sol. Le fait serait d’une importance considérable pour l'étiologie de la fièvre typhoïde. Mais il est encore touthypothétique : remarquons en effet que lares- semblance morphologique des deux bactéries et celle deleurs cultures n’impliquentaucunement leur identité : pour êtreen droit de l’affirmer, il faudrait montrer qu'après le passage du Colicommunis dans l'eau ou le sol, les deux microbes se comportent exactement de la même manière à l'égard des réac- üifs colorants et aussi en culture et inoculation, excréltant les mêmes produits en même quantité et déterminant dans l'organisme de leur hôte mêmes symptômes, même évolution morbide, même mé- canisme de mort et mêmes lésions. En attendant le résultat de cette comparaison, le commencement de démonstration de Rodet et Roux ramène l'attention des hygiénistes sur la difficulté d'opérer la diagnose du bacille d’Eberth 1 Roper et G. Roux. Sur les rapports du Bacillus Coli communis et du Bacille d’Eberth, Socivlé des Sciences médi- cales de Lyon, 1890. . ss CLR E 0 de EURE ET Tu L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 179 en dehors du corps humain. Cassedebat! a récem- ment insislé sur cette difficulté, citant plusieurs bactéries dont le développement #x vitro est à peu de chose près identique. Mais il ne semble pas avoir assez tenu compte de ce principe que, pour différencier ouidentifier deux bactéries, il ne suffit pas de les comparer dans leurs cultures en un même milieu; il faut surtout le faire dans la série de leurs évolutions à travers le cycle complet de tous leurs modes connus de culture et d'inocula- Lion. Quand on observe cette précaution, en ayant soin, dans l'espèce, de prendre comme témoin le bacille d’'Eberth extrait à l’état de pureté de la rate d’un typhoïdique, on réussit, croyons-nous, à évi- ter Loute erreur. La diagnosé du bacille dit typhique s'est d’ail- leurs enrichie depuis un an de quelques observa- tions intéressantes. Ogier et Bordas ? ont montré qu'au lieu de jouir d’un anaérobisme facultatif, comme on l'avait admis à la suite des expériences de Eriedlander, il est exclusivement aérobie. A la vérité il se contente, pour évoluer, de quantités d'oxygène extrêmement faibles; mais en l'absence complète de ce gaz, il cesse dese multiplier, C'est là une acquisition importante. D’autre part Gasser * a indiqué un procédé de culture qui le distingue de toutes les Bactéries connues, à l'exception du Bacillus Coli communis. La science paraît donc posséder aujourd'hui une série de réactions dont l'ensemble permet de reconnaitre avec certitude, en quelque milieu qu'il évolue, le bacille d'Eberth non dégénéré. Quant aux véhicules du contage en dehors de notre organisme, des observations récentes sem- blent en montrer la pluralité. Contrairement à l'opinion vers laquelle hygiénistes et microbiolo- gistes penchaient depuis quelques années, on commence à soupçonner la transmission possible du germe typhique par l'atmosphère. Avant que les idées sur la nature parasitaire de la fièvre tvphoïde se fussent affermies, certains cliniciens, en particulier Potain, Jaccoud et Lépine avaient signalé des formes primilivement pneumoniques de cette maladie. Après eux le D" Richardière avait décrit quelques cas de fièvre typhoïde du poumon sans lésion intestinale, Mais, comme le bacille d'Eberth n'avait pas été cherché, la certi- tude du diagnostie semblait discutable, et lon avait tendance à incriminer les éngesta à l'exclusion de l’air. Depuis quelque temps cette idée se mo- difie. Nos lecteurs se rappellent sans doute l’inté- | Annales de l’Institut Pasteur, 1890. 2 Voyez à ce sujetla Revue du 45 mars 1890, t. 1, p. 144, 5 Gasser, Thôse inaugurale de la Faculté de Médecine de Paris, 1890. ressante expérience par laquelle le D° Bordas a prouvé que le bacille d'Eberth peut être trans- porté par l'air chargé de vapeur d’eau ‘, Ce trans- port est-il capable de déterminer la contagion? Certains cas de fièvre typhoïde relevés depuis peu paraissent exiger cette interprétation. Vaillard l’a soutenue au sujet de deux épidémies étudiées à ce point de vue, l’une par lui à l'hôpital Saint- Louis, l’autre par le Dr Chour, médecin militaire russe, dans la caserne Hammermann à Jetomir ?. À Saint-Louis l'analyse bactériologique de l’air de la salle y décela le bacille d'Eberth, et il suffit de désinfecter les locaux pour faire cesser l'épidémie. À Jétomir deux régiments recevaient la même eau potable et néanmoins la morbidité pour fièvre typhoïde était de 3,2 °/,, chez l'un et 155 °/, chez l’autre ! Les locaux, ainsi que les effets d’habille- ment et de literie, furent soumis à une désinfection très soignée dans une aile du bâtiment. Les plan- chers furent enlevés, le sol imprégné de phénol à o !/,, les murs lavés avec cette solution, le plafond démoli et remplacé, les chambres remplies ensuite de vapeurs de chlore. Une partie des troupes fut ensuite installée dans ce logement désinfecté; la morbidité typhique tomba immédiatement parmi ces troupes à 1,7 °/,,; au contraire, dans les bâti- ments non désinfectés de la caserne, la maladie continua de sévir d’une façon déplorable. L'ana- lyse bactériologique des poussières de leurs plan- chers y décela la présence du bacille typhique *. Les observations de ce genre sont encore peu nombreuses,ce qui porte à penser que dans la majo- rilé des cas ce n’est pasl'air qui opère la contagion. Le lait a élé incriminé.Deux faits constatés l’année dernière militent en faveur de cette suspicion : Depuis l'excellente distribution d’eau dont la ville de Genève est dotée, la fièvre typhoïde y est devenue très rare. En mai 1890 éclata une petite épidémie, localisée à quelques rues du quartier des Pacquis. Une enquête établit que tous les individus alteints élaient servis par le même laitier. Le Pro- fesseur Vincent, directeur du Bureau de Salubrité, réussit à remonter à l’origine même de l'infection #: en février deux cas de fièvre typhoïde avaient eu lieu dans la ferme d’où provenait le lait; le linge du personnel avait été lavé dans un bassin dont ! Borpas, Recherches sur le Bacille typhique et la trans- mission de la fièvre typhoïde par l'air, dans la Aeyue du 15 mars 1890, t. I, page 145. 2 Varzcarp : Contribution à létiologie de la fièvre typhoïde, Gazette hebdomadaire de médecine et de chirurgie, 18 décem- bre 1889. 3 La constatation de ce même microbe dans les poussières d'appartement avait déjà été faite dans des cas semblables par Salomonsen à Copenhague en 1884 et par Utpodel à Aussbours, 5 Vixcexr. Sur unc épidémie de en 1590, lièvre typhoïde à Genéve 180 L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE l'eau servait à nettoyer les récipients employés pour le transport du lait. La plupart des malades de Genève avaient bu ce lait cru; deux cependant ne l'avaient consommé qu'après ébullition: la fièvre typhoïde de l’un de ces derniers fut très bénigne. À Gotlembourg, Almquist ! a signalé quatre épidémies de fièvre typhoïde qui, d’après lui, au- raient eu pour origine du lait provenant de fermes contaminées *. Dans ces cas ce n’est pas le lait naturel qu'on suspecte d'avoir fourni le germe typhique, mais seulement, comme on le voit, le lait baplisé ou l’eau employée au lavage des vases. L'auteur de cet article a montré qu'on peut ren- contrer le même germe dans le cidre, quand cette boisson à été préparée, suivant la coutume des paysans normands, avec de l’eau de mare, laquelle, en cas de fièvre typhoïde, est souvent contaminée par les déjections des malades *. Ces observations doivent ramener l'attention des hygiénistes sur l’eau qui, en effet, semble jouer le rôle principal dans l’étiologie de la fièvre typhoïde. Depuis les admirables études de Budd sur ce su- jet, on a cité un grand nombre de cas consécutifs à l’ingestion d’eau polluée par infiltration de selles typhiques. Le bacille d'Eberth abonde dans ces selles. On le trouve aussi, suivant l’observation de Bouchard, dans les urines des malades quand elles sont albumineuses : le rein est alors attaqué et ne constitue plus un filtre à l’égard du microbe. Neumann * a insisté l'an dernier sur les dangers de contagion qui peuvent résulter de la présence, souvent abondante, de l'agent infectieux dans les urines : l’élimination du bacille se continuerait, d’après lui, pendant la convalescence. Aussi Gutt- mann * demande-t-il que le convalescent typhique ne puisse sortir de l'hôpital qu'après disparition constatée du bacille de ses urines. En de nombreuses régions de la France cer- laines eaux de boisson sont constamment pollutes par les déjections humaines. Nous avons constaté cet état de choses, il y a deux ans, à Sainte- Adresse (Seine-Inférieure) où régnait alors une cruelle épidémie de fièvre typhoïde ©. Une partie lAzLmqQuisr, Einige Erfahrungen ueber Verschleppung von Typhusgift durch Milch, analysé in Revue d'Hygiène, fév. 1890. ? Notons toutefois que le bacille d’Eberth n’a pas été cher- ché, — A Gottembourg toute ferme infectée est mise en inter- dit, etil est défendu de livrer du lait en provenant. % Louis Orivier, Socicté de Biologie, 1890. i NEUMANN, Le bacille typhique dans les urines, Société de Médecine interne de Berlin, 22 janvier 1890. 5 GuTTMANN, Société de Médecine interne de Berlin, vier 1890. 6 Louis OLivier, Application des données bactériologiques à l'extinction d’un foyer de fièvre typhoïde à Sainte-Adresse (Seine-Inférieure). Association francaise pour lav. Sciences, session de Limoges, 1890. 929 jan- des de la ville, alimentée par des sources canalisées, était indemne, tandis que dans l’autre où sévissait le fléau, les habitants buvaient des eaux de puits ou de sources non captées. Dans ces dernières nous avons lrouvé en abondance le bacille d’Eberth el reconnu qu'il pouvait y avoir été introduit par les bétoirs, trous à fond perdu dans lesquels étaient quotidiennement déversées les déjections. La craie où se trouvaient établis ces béloirs présente de nombreuses fissures et ne fait pas l'office de filtre: d’où la contamination des eaux sous-jacentes,. Nous nous empressèämes de signaler ce danger à M. de Quérohant, maire de Sainte-Adresse, Gràce à lui, les bétoirs furent comblés, les puits curés, et immédiatement la fièvre typhoïde cessa. Elle ne s’est plus représentée depuis à Sainte- Adresse. Les mesures prophylactiques, dont le P' Brouar- del s’est fait en France l'éloquent défenseur, montrent que partout où l’eau de boisson a été préservée des infiltrations de matières fécales, la fièvre typhoïde a disparu. L'armée offre un excellent critérium à cel égard. Depuis 20 ans les conditions du recrutement n’ont pas changé : rien n’a été modifié quant à l’âge des soldats, aux exercices el fatigues qui leur sont imposés. Mais ilen a été autrement des conditions hygiéniques. Le minisire de la guerre, M. de Frey- cinet, a pris à cœur la lutte contre la fièvre typhoïde. Grâce aux crédits qu’il a obtenus du Parlement, d’imporlants travaux ont été entrepris dans les lieux de garnison : ils ont eu pour principaux objets la suppression des fosses fixes, l'adduction d'eau non contaminée, ou la filtration pastorienne de l’eau suspecte. Les bougies Chamberland, adop- tées dans ce but, exigeant une certaine pression pour assurer un débit suffisant dans les casernes, l'Administration a installé, aux endroits où cette pression faisait défaut, une pompe à bras donnant 3 atmosphères. Enfin le règlement de 1856 qui fixait à 6 litres la quantité d’eau à délivrer par jour et par homme a élé heureusement modifié : désormais chaque homme doit avoir 30 litres à sa disposition. Les travaux, commandés par ces innovations, ne sont pas encore complètement achevés; déjà cependant les résultats sont sensibles. Dans son rapport de 1889, M. de Freyeinet écrivait : «Je ne crois pas m'avancer en disant que la mortalité et la morbidité par la fièvre Lyphoïde seront diminuées des trois quarts, sinon en 1890, au moins en 1891. » L'année suivante (rapport du 16 février 1890), l’'éminent homme d'État constatait un progrès con- sidérable : le chiffre des décès typhiques s'était abaissé d'un quart; celui des malades, d’un liers. L. OLIVIER. — REVUE Nul doute qu’en 1890 l’état sanitaire se soit encore amélioré. À défaut de statistique ! indiquons seu- lement que dans le mois de mai 1890 on n’a pas constaté un seul cas de fièvre typhoïde dans les troupes cäsernées à Paris, ces troupes ne rece- vant plus que de l'eau de source. Au contraire la maladie s'est nettement manifestée pendant ce même mois parmi les troupes du Gouvernement de Paris cantonnées à Vincennes, à Courbevoie el à Saint-Denis, lesquelles n'ont point reçu une eau irréprochable. A Paris où l'insuflisance des eaux de sources force trop souvent l'Administration à distribuer l'eau de rivière, les instructions les plus formelles ont été données aux chefs de corps pour que Îles troupes, pendant la période de substitution, ne consomment que de l’eau préalablement soumise à l'ébullition. Cette ébullition à 100° n’assurant pas la destruc- lion complète de tous les microbes de l'eau, MM. Rouart, Geneste et Herscher viennent d'ima- giner un appareil d'usage pratique qui la stérilise à 120°-130° sous pression. Ce système, récemment éprouvé par G. Pou- chet, réalise, d'après ce savant, un progrès consi- dérable : il présente plus de sécurité que les meilleurs filtres, loujours sujets au bris et à l'écrasement, et fonctionne d’une manière plus régulière. L'opération, ayant lieu sans émission de vapeur, ne diminue guère la quantité des sels et gaz dissous dans l’eau; elle est de plus « très économique, puisqu'il n'y a pas à fournir la cha- leur latente de vaporisation de l’eau... ; 1 kilo- gramme de charbon suffit à stériliser 100 litres d'eau... » «MM. Rouart, Geneste et Herscher contruisent actuellement un appareil dont le débit de 500 litres d’eau stérilisée par heure permettra d'assu- rer l’alimentalion en eau potable d'aggloméra- tions importantes, telles que casernes, hôpitaux. etc... » A la sortie, l’eau stérilisée peut être obtenue, à volonté, chaude ou froide, avantage qui sera certainement très apprécié « dans les services de chirurgie et d'accouchements ». En résumé, Pou- chet proclame la supériorilé marquée de cet appareil « sur tous les systèmes proposés jus- qu'ici » pour fournir aux grandes agglomérations humaines de l’eau salubre, parfaitement ‘stérili- SÈCEe | La statistique officielle de notre armée pour 1890 n’a pas encore été publiée, ? Nous remercions ici M. Pouchet de ces renseignements, encore inédits, L’auteur publiera prochainement dans les ANNUELLE D'HYGIÈNE 181 V. — TRAVAUX PUBLICS RELATIFS A L'EAU Si pratiques que puissent être ces dispositions, l'ignorance et l’incurie de la majorité des particu- liers prévaudront longtemps contre elles. C'est pourquoi les hygiénistes cherchent les moyens de produire en grand la stérilisation de l’eau, avant de la livrer au publie. Dans ce but on a songé de- puis quelques années à la filtration des cours d'eau par le sable. La réapparition dela fièvre thyphoïde à Berlin sous la forme épidémique a soulevé de nouvelles discussions à ce sujet *. Toute l’eau de la Sprée et du lac de Tegel qui est distribuée aux Ber- linois est en effet filtrée à travers le sable. Cette disposition semblait donner toute sécurité aux con- sommateurs. En 1887 l'Institut d'Hygiène dirigé par Koch avait en effet déclaré, à la suite d’expé- riences faites par Plagge et Proskrauer ? que la filtration par le sable est parfaite el fournit tou- jours une eau absolument exempte de microbes. Fort de cette déclaration, Pettenkofer, le célèbre et tenace défenseur de la théorie tellurique, voulut expliquer l'épidémie par la siccité du sol de Berlin, drainé pour provoquer l'évacuation totale des immondices dela ville dans des canaux isolés.Cette siccité serait, selon lui, favorable au développe- ment des bactéries du sol. Mais les recherches plus récemment poursuivies à l’Institut d'Hygiène par Frankel et Piefke * ont infirmé les conclusions de Plagge et Proskrauer. Toutes les bactéries, di- sent ces expérimentateurs, notamment celles du choléra et de la fièvre typhoïde, passent au travers des filtres à sable. La quantité de micro-organismes qui traversent le filtre dépend du nombre de ceux qui existent dans l’eau non filtrée et surtout de la ‘apiditéde la filtration. Le commencement et la fin de la période d'un filtre constituent les moments où il se montre le moins efficace. Ces observations font ressortir l’intérèt qu'ont les grandes villes à faire venir des campagnes en- vironnantes une eau d'alimentation, privée d’im- puretés. A Paris la question de l’adduction des eaux de l’'Avre a élé décidément tranchée par un vote du Parlement. Cela n’a pas élé sans lutte. La Cham- bre précédente, malgré le rapport lumineux et dé- Annales d'Hygiène l'étude détaillée du stérilisateur Rouart Geneste et Herscher. 1 Voyez : ArNOULD, La fièvre typhoïde et l'eau à Berlin. Revue d'hygiène, mars 1890. 2 PLacGe Er Proskauer, Bericht über die Untersuchung der Berliner Teitungswasser in Zeischrift. f. Hygiene, 1887, p. 401. 3 FRANKEL ET PIEFKE, Versuche über die Leistungen der Sandfiltration, Zeitschrift f. Hygiene, décembre 1889. 182 L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE cisif de M. Gaddaud ‘, n'avait pas osé trancher le différend soulevé à ce sujet entre Paris et les dé- partements de l'Eure et d’'Eure-et-Loir. La nou- velle assemblée ne s’est pas laissé arrêter par les protestations peu justifiées de ces départements, et le projet de loi, depuis si longtemps préparé par les ingénieurs du service des eaux de la ville de Paris, notamment par MM. Bechmann et Hum- blot, a pu recevoir en 1890 un commencement d'exécution. Les queslions de caplation des eaux pures pour les grandes villes sont devenues tellement importantes que la discussion soulevée à ce sujet pendant la session de 1890 offre, au point de vue del'hygiène, une importance exceptionnelle. Deux intérêts se trouvent en présence : d'une part celui des grandes agglomérations humaines, d'autre part celui des petites villes ou villages situés à proximité des sources. C’est seulement à ces der- nières que les villes sont obligées de recourir pour avoir de l’eau salubre. L’objection qu'op- posent à cette prétention les communes rura- les et, dans l'espèce, le syndicat des intérêts de la vallée de l'Avre, est qu'il s’agit de l'intérêt privé de la ville de Paris, auquel on ne saurait sans in- justice sacrifier celui d'une petite commune. L’ar- gument parait spécieux : en hygiène il n'existe pas d'intérêt particulier. La suppression d’un foyer typhique intéresse la France entière. Ilest évident que par suite des échanges incessants qui se pro- duisent entre les villes et les campagnes, toute maladie contagieuse menace d’autant plus d’irra- dier que l’agglomération humaine où elle sévit est plus considérable, A tout moment elle peut se communiquer aux populations avoisinantes. Si donc on ne les prive de la quantité d’eau que ré- clament leurs besoins légitimes, et qu’on les in- demnise convenablement, ce n’est pas les spolier que leur emprunter un élément indispensable de vie et de santé, qui fait défaut ailleurs. Il faut seu- lement tenir compte du tort matériel qu'on peut causer à leur industrie, à leur commerce, à leur agriculture, en leur enlevant, avec l’eau, de la force motrice, des voies de transport, un agent de fertilité pour les prairies, etc. Ces considérations, que M. Gaddaud a fait valoir dans son Rapport, ont enfin entrainé le vote du Parlement. Souhaitons qu’on en tienne compte quand l'accroissement de la population parisienne rendra nécessaire l'adduction des eaux de la Voul- zie et du Durteint. Sans doute on ne se heurtera plus aux résistances locales qui, pendant 3 ans, ! Gappaup, Rapport fait au nom de la Commission chargée d'examiner le projet de loi ayant pour objet l’adduction à Paris des sources de la Vigne. (Chambre des députés, An- nexes de la séance du 24 janvier 1889.) ont paralysé les efforts des ingénieurs et du Conseil municipal, et amené, — n’hésitons pas à l’affirmer, — un certain nombre de décès lyphi- ques, qu’une eau pure eût sans aucun doute pre- venus, ’ IL faut espérer que le jour où les cent mille mètres cubes des eaux de l’Avre arriveront à Paris, ses habitants ne seront plus exposés à boire l'eau de la Seine ou de l'Ourcq. A l'heure actuelle, la pureté de l’eau distribuée et facturée sous la rubrique eau de source n'est peut-être pas absolue. Ce doute parait du moins résulter des intéres- santes recherches de M. Livache !. Ce chimiste a fait une série d'examens hydrotimétriques en prenant comme types d'une part les eaux de la Seine, de la Marne et de la Vanne, puisées directe- ment dans leurs réservoirs, et d'autre part l'eau des robinets alimentés par des concessions décla- rées par la Compagnie des Eaux comme recevant de l'eau de source. Or, dans une même journée, les dosages ont présenté des variations sensibles : tantôt ils se rapprochaient du degré de l’eau de Seine (19°,5 en moyenne), tantôt de celui de l’eau de Vanne (20°,3). De cette constatation, M. Livache conclut qu'on mélange l'eau de la Vanne à celles de la Marne et de la Seine. Cette interprétation s’impose-t-elle absolument ? Elle a été critiquée à la Société de Médecine publi- que par MM. Bechmann et Humblot ?. Suivant eux le mélange dénoncé ne pourrait se produire; les conditions de pression s’y opposeraient, au moins en ce qui concerne la rive gauche. Pour M. Hum- blot, les écarts observés dans les dosages, étant faibles, tiendraient peut-être 1° aux dosages eux- mêmes, 2° aux variations des eaux de la Vanne, résultant de la multiplicité et de la différence de débit des sources qui alimentent cette rivière; enfin 3° à des variations de composition de l’eau pendant son parcours dans les tuyaux. Dans ces conduites en effet se déposent des concrétions cal- caires, qui, pouvant en être balayées par le cou- rant, quand sa vitesse varie, échappent par là même au dosage. Ces concrétions peuvent d'ail- leurs se conserver ou se dissoudre suivant la teneur de l’eau en acide carbonique. Ces objections semblent très plausibles. Il serait donc intéressant de reprendre, en en tenant compte, les dosages de l'eau aux diverses étapes de son parcours. Il faudrait aussi, croyons-nous, pour mieux apprécier les écarts de titre, substituer à la méthode hydrotimétrique, trop peu précise, les procédés usuels de l’analyse minérale. 1 Livacne. Variation de la composition de l’eau en divers points de la canalisation à Paris, Société de Médecine publique, 26 mars 1890. 2 Voyez cette discussion dans la Revue d'Hygiène, avril 4890, x 3 { L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 183 Il serait utile aussi de faire, en même temps, le dénombrement des bactéries contenues dans l'eau. Cette numération constituerait, selon toute vraisemblance, un indice de l’absence ou du mé- lange de l’eau de Seine *. L'énorme quantité de microbes que l’eau de Seine contient nous porte à douter de l’exactitude des expériences dont Pettenkofer et ses élèves Emmerich Kraus el Karlenski? s'’autorisent pour affirmer que les bactéries pathogènes ne vivent pas dans l’eau, qu'elles y sont détruites par oxydation. Ces bactéries sont pourtant constituées à la façon des espèces banales; au moins pour ce qui est de leurs spores, l'oxygène dissous dans l’eau semble incapable de les tuer. Aussi nos hygiénistes se gardent-ils d'appliquer les idées que Pettenkofer émettait l'an dernier, lorsqu'il conseillait à la ville de Munich de déverser ses déjections dans l'Isar3. D'une facon générale, ce savant nie le dan- ger pour les populations d’aval, quand la rivière contient, comme dans le cas de l'Isar, au moins quinze fois autant d’eau que les égouts et coule avec une vitesse supérieure à 0"60 par seconde. Durand-Claye s'élevait, au nom de la salubrité publique, contre les théories de celte sorte ; il ré- pétait: CIlne faut pas contaminer la rivière. Il faut la garantir contre le retour des eaux résiduaires. Il faut traiter ces eaux etne les rendre qu'à l'état de pureté aux cours d’eau naturels.» D’autre part M. Mille écrivail à propos de l’immense quantité d'azote perdue parles déjections et les nettoyages de la population parisienne : « Tout cela passe à la rivière et de là va se perdre dans la mer. Recueil- lons donc ces richesses que l'agriculture réclame avéc instances. » Pour éviter la pollution des cours d’eau par les eaux-vannes, deux procédés sont actuelle- ment employés. L'un, qui répond directement au vœu de M. Mille, consiste dans la création de champs d'irrigation. C'est le meilleur, le moins coù- teux; mais il exige une grande étendue de terrain et un sol convenable. L'autre procédé, moins expé- ditif, plus compliqué, consiste dans l’épuration chimique. L'efficacité en est encore discutée. Weigmann *, de Kiel, s’en est occupé l’année l Comme cette opération exige quelque soin, on pourrait sans inconvénient la simplifier en se bornant à la méthode des plaques et n’employant qu’un même milieu solide de cul- ture. On diminuerait ainsi les nombres absolus de bactéries, mais sans changer sensiblement leurs rapports, essentiels dans l'espèce. 2 Voyez surtout : Karzinsxi, de Stolac (Herzégovine) : Contribution à l’étude de la facon dont se comporte le bacille typhique dans l’eau? Arch. für Hygiene, 1890. 3 Max PETTENKOFER, Société des Médecins de Munich, 7 mai 1890. 4 WelGMANN, Action de la chaux caustique dans l’épura- ont des eaux-vannes, G'esundheit-Ingénieur, mai 1890, dernière; il a surtout étudié l'influence de la chaux, qui est de tous les agents chimiques le plus employé en raison de la modicilé de son prix. Il a constaté que la putréfaction continue dans les bassins de décantation; les matières précipitées par le carbonate de chaux formé se redissolvent; l’épuration n'est réalisée que si l’eau est immédia- tement décantée après l'addition de chaux. Quant à l'action bactéricide, il parait qu'elle se produit en effet. Mais quand bien même elle serait absolue, l’'ensemencement continu des bassins suflirail à entretenir la fermentation des matières orga- niques demeurées en dissolution. D’autres procédés ont été proposés pour désin- fecter les égouts, les matières fécales, les déchets de toute espèce qui polluent les agglomérations urbaines. Von Gerloisy, de Budapest, a éprouvé dans ce but les antiseptiques réputés les plus actifs !, Cette étude l’a conduit à rejeter le sublimé. Ce sel ne mériterait en aucune façon, selon lui, la confiance qu’on lui accorde. Notamment en ce qui concerne la désinfection des fosses d’aisance, c'est le sulfate de cuivre au 1°/,, qui donnerait les meilleurs résultats. Il purifie, désodorise et stérilise rapidement les eaux d’égout. Cette propriété, la modicité de son prix et son peu de toxicité devraient donc le faire préférer aux sels de mer- cure, toujours dangereux. A Wimbleton, en Angleterre, on emploie {ke Amine process pour épurer les eaux d'égout, y com- pris les matières fécales. Ces matières sont addi- tionnées d’un mélange de lait de chaux et de saumure de harengs, laquelle agit par'sa triméthyla- mine. D’après M. Godfrey? on obtient ainsi un produit commercial (aminol) ; les gaz dégagés pen- dant la formation de cette matière exerceraient un action germicide réelle. L'eau des servages ne contiendrait par suite aucun microbe à ‘la sortie des bassins de décantation. Ce résultat nous paraît trop beau pour être exact. On sait. combien il est difficile de détruire les spores des bactéries. En général il faut, pour les tuer, employer soit la chaleur, soit les acides, les alcalis, ou les antisep- tiques à forte dose. VI. —— DIPHTÉRIE ET ROUGEOLE Après avoir assuré la salubrité de l'eau de boisson et désinfecté les égouts, l'hygiène locale n'a point tout fait. [Il lui reste notamment à lutter contre plusieurs affections contagieuses dont le 1S. vox GerLorsy. Recherches sur la désinfection pra- tiquo des matières usées. Rapport à la Section d'Hygiène publique de l'Association Hongroise, 1890. 2 Goprrey, The « Amine process » of servage treament, in the Sanitary Record Act, 1889. 184 L. OLIVIER. — REVUE mode de transmission esl encore peu connu, La plus cruelle de toutes est la diphtérie. Cette maladie continue d'être de la part des microbiologistes, des hygiénistes el des médecins l'objet d'importants travaux. On sait qu’elle est causée par un bacille, trouvé par Klebs en 1883 dans les fausses membranes du croup.L'année suivante, Lœffler démontra la spécificité pathogénique de ce micro-organisme en l’isolant, le cultivant et repro- duisant par inoculation de la culture les fausses membranes caractéristiques de la maladie. En 1888 Roux et Yersin vinrent renforcer cette démonstra- tion. IIS firent voir en outre que les matières excré- tées par le bacille de Lœæffler dans ses cultures dé- terminentchezles animaux des paralysiescroupales. En 1889 ces savants constatèrent que les tissus des individus ayant succombé à la diphtérie et les uri- nes des diphtéritiques renferment le poison para- lysant. ILs'y trouve légèrement atténué, en ce sens que son action est ralentie. L'atténuation se pro- duit dans les milieux acides. Le poison offre une grande analogie avec les diastases; son activité est comparable à celle des venins ‘, D'où celte conclusion que dans la diphtérie il faut agir au début, détruire par les antiseptiques les fausses membranes dès qu’elles apparaissent et stériliser les muqueuses de façon à empêcher le bacille d'y excréler une dose de toxine suffisante pour pro- duire l’empoisonnement de l'organisme. On voit par là combien les recherches des labo- atoires ont modifié les idées systématiques des cliniciens. Autrefois la diphtérie élait considérée comme une maladie locale (croup); plus tard, avec Bretonneau et Trousseau, comme une maladie générale à manifestations locales, surtout pharyn- gée et laryngée. Aujourd'hui l'expérience nous force de voir en elle une intoxication générale, due à une infection locale, pharyngée ou laryngée. Quant à l'étiologie de la maladie, elle est encore fort obscure. Nous vient-elle des oiseaux de basse- cour, principalement des poules et pigeons, qui, on le sait, présentent assez souvent une affection d'apparence diphtéritique? On a plusieurs fois supposé (Nicati, Orly, Teissier, etc.) une identité absolue entre la diphtérie aviaire et la diphtérie humaine, par suite la contagion possible de l’ani- mal à l’homme. C'est ainsi que l'an dernier le bruit s'était ré- pandu que des enfants avaient contracté la diphté= rie en allant au Jardin d’Acclimatation, où les volières sont quelquefois infestées. Saint-Yves Ménard ? qui, pendant dix-sept ans a élé le direc- EP EP RE “| 4 1 Roux et Yersix, Contribution à l'étude de la diphtérie, Ann. Institut Pasteur, juin 1889. 2 Revue d'hygiène, 1890, p. M0, ANNUELLE D'HYGIÈNE à teur-adjoint de ce jardin, s’est élevé contre cette supposition. S'appuyant sur l’autorité de Straus, Læffer, Cornil et Mégnin, il a montré qu’il n'existe aucune identité entre les deux affections. Straus a recherché si les ouvriers qui exercent aux Halles le mélier de gaveurs de pigeons et font du gavage de bouche à bec présentaient parfois des acei- dents diphtéritiques ; le résultat de son enquête a élé complètement négatif, bien que les pigeons, surtout les italiens, offrent souvent le rhancre, c'est- à-dire la diphtérie aviaire. Les caractères morphologiques des deux mi- crobes sont très différents. L'inoculation de leurs cultures permet encore plus nettement de les dis- tinguer; l'inoculation du bacille humain entraine la mort de l'animal avec production d’exsudat fibrino-hémorrhagique ; au contraire l’inoculation du microbe aviaire produit tout au plus un abcès caséeux, mais sans terminaison fatale. Cependant on peut se demander s’il n’y aurait pas plusieurs diphtéries aviaires, dont l’une au moins atteindrait l’homme. La coïncidence, plu- sieurs fois signalée, de maladies diphtéritiques dans les basses-cours et chez les personnes qui les fré- quentent, semble indiquer l'intérêt qu'il y aurait à entreprendre des recherches dans cette direction. Quoi que l'avenir nous apprenne à ce sujet, la contagion de la diphtérie d’individu à individu dans l'espèce humaine demeure un fait quotidien- nement observé. Les ravages causés par cette af- fection et en général les maladies contagieuses, — variole, rougeole, scarlatine, coqueluche, etc. dans toutes les agglomérations de malades, surtout dans les hôpitaux d'enfants, ont depuis longtemps aitiré l’attention des médecins, et enfin celle des administrateurs. En ces dernières années l'opinion étail en géné- ral favorable au système d'isolement. Dans les hô- pitaux l’Assistance publique avait fait construire des pavillons spéciaux, destinés à recevoir les enfants atteints de diphtérie. Des salles particu- lières furent ensuite réservées à la rougeole. Enfin, sur le rapport du D'Chautemps, le Conseil municipal de Paris décida de créer des hôpitaux de contagieux sur les terrains possédés par la Ville dans le territoire de plusieurs communes suburbaines (Vitry, Ivry, etc.}. Cette décision sou- leva parmi les populations de ces communes une vive opposition : les maires, arguant de la loi mu- 1 On sait que dans tout le grouye des Pigeons les jeunes introduisent leur bec dans le gosier de leurs parents pour y prendre la nourriture que ceux-ci leur apportent. Aussi, pour gaver ces oiseaux, faut-il introduire leur bec, on pourrait presque dire leur tête, dans la bouche'du gaveur, remplie de la pâtée destinée aux oiseaux, L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 185 nicipale de 1884, prirent des arrêtés interdisant la construction de ces établissements. D'autre part, le Comité consultatif d'Hygiène, sol- licité par le Ministre de l'Intérieur, de donner son avis sur la nécessité de cette création, en contesta l'opportunité. Chargé du rapport sur celle ques- tion, Grancher ! soutint que, dans la plupart des cas, ce n'est pas l'air qui est le véhicule du contage. Il fit observer qu’à l'Hôpital des Enfants la mé- thode d'isolement n'avait pas réussi à diminuer le nombre des cas intérieurs de contagion. Celle- ei serait surtout produite, d'aprés lui, par le con- tact direct des malades ou des objets qu'ils ont souillés. Le microbe de Lœæffler peut s'v conserver fort longtemps : il résiste à la dessiccalion, à ce point qu'on a pu constater qu'après qualre ans de séjour sur un pinceau il n'avait rien perdu de sa virulence. L'éminent professeur rappela enfin que parmi les cas dits intérieurs, c'est-à-dire se présen- tant chez des enfants entrés à l'hôpital el soignés pendant quelque temps pour d’autres affections, tous ne sontpeut-être pas exclusivement imputa- bles à la contagion dans l'Établissement. Lœæffler a décrit en effet sous le nom de « pseudo-bacille di- phtéritique » un microbe analogue à celui de la di- phtérie vraie, microbe que l’on rencontre quelque- fois dans la bouche d'enfants sains. Il demeurerail souvent inoffensif. Sous une influence morbide telle que la rougeole, entrainant une modificalion du térrain humain et peut-être du microbe lui- mème, ce dernier deviendrait virulent et provo- querait un état diphtéritique. Le microbe se con- fond-il alors avec le bacille authentique el mainte- nant assez bien connu de la diphtérie, ou s’en distingue-t-il sous quelque rapport? Bien que l'expérience soit muette à ce sujet, remarquons incidemment que la crainte d'une complication vraiment ou pseudo-diphtéritique au cours des exanthèmes épidémiques de l'enfance, doil sug- gérer la précaution de pratiquer à intervalles rap- prochés l’antisepsie de la bouche pendant l’évolu- tion de ces maladies. Concluant que la diphlérie est surtout trans- mise par les objetset les contacts directs, Grancher rejette le projet d'un hôpital suburbain pour l’ad- mission exclusive des diphtéritiques; mais il lui pa- rail indispensable de créer des hôpitaux de conva- lescents où l’on pourrailisoler les enfants pendant un certain temps. Au Congrès de Berlin, en effet, Læffler et Roux ont fait remarquer que l’enfant, même entré en convalescence, porte encore en lui, sur sa muqueuse buccale, des germes con- tagieux. Aussi Roux voudrail-il que l'accès à 1 GRaNcnER, Rapport au Comité consultatif d'Hygiène pu- blique de France, séance du 10 novembre 1890, l’école fût interdit pendant 2 où 3 semaines à tout enfant qui vient de guérir de la diphtérie. En attendant que la méthode d'isolement ait trouvé sa formule définitive, le P' Grancher a tenté d'appliquer dans son service, comme me- sure préventive contre la diphlérie et la rou- geole, l’antiseptie médicale. Ce système consiste à écarter le plus possible des malades rassemblés en une même salle les objets suspects. Chaque lit est entouré d'un paravent en toile métallique à larges mailles, qui s'oppose au contact diret des enfants. Tous les objets ayant servi aux malades sont stérilisés à l’étuve. Enfin les infirmières ne doivent passer d'un enfant à un autre qu'après s'être lavé les mains et le visage avec un liquide an- tiseptique. L'expérience a élé conduile avec une rigueur toute scientifique. En voici les résultats : 1° L’antisepsie médicale s’est montrée efficace contre la contagion de la diphtérie et de la scarlatine. Malgré 6 diphléries soignées en salle commune en 1889, il n’y a pas eu un seul cas intérieur de contagion. Le D' Hutinel a pu, d'autre part, constater en 1890, dans le pavillon des scarla- tineux, les heureux effets de l’antisepsie. 2 11 en a été tout autrement pour la rougeole : de même que l'isolement, l’antisepsie parait n’avoir exercé aucune influence sur la contagion de cette maladie. Ce résultat négalif a vivement frappé le D' Sevestre, qui dès 1888 avait organisé dans son service l'isolement par antisepsie. D’après lui, la contagion de la rougeole se ferait par l'air. — De très nouvelles recherches sont évidemment nécessaires pour préciser l’étiologie de celte maladie et en assurer par suite la prophylaxie radicale. VII. — INSTITUTIONS MUNICIPALES D'IYGIÈNE Jusqu'à ces derniers temps les indigents atteints de maladies contagieuses étaient transportés de leur domicile à l'hôpital dans une voiture de louage, un fiacre quelconque, qui reprenait ensuile son ser- vice ordinaire. Parfois cependant, lorsqu'il s'agis- sait de la variole, un semblant de désinfection élait opéré. Cet état de choses a été très heureusement mo- difié depuis un an. Le Conseil municipal de Paris, qni ne cesse de s'occuper des questions d'hygiène, a inshtué un service régulier de transport pour les contagieux !. Ce service est fait par deux sta- tions de chacune 7 voitures : celle de la rue de Stael dessert la rive gauche; celle de la rue de Chaligny, 1 La première délibération du Conseil date du 17 juin 1887 mais le service n’a été inauguré que le 3 octobre 1889 et n’est entré dans son cours régulier qu’en 1890 180 L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE la rive droite. Les parois de ces véhicules sont en tôle peinte et vernie, de façon à ce qu'on puisse. après chaque transport, les désinfecter par un la- vage au sulfate de zinc additionné de phénol ou de thymol. Le malade est couché sur un matelas que l’on passe ensuite à l’étuve. Autant que possible chaque voilure est affectée à une maladie déter- minée. La voiture est, en effet, réquisitionnée télé phoniquement par les commissariats de police, lesquels doivent indiquer (autant que possible), d'après un certificat du médecin traitant, la nature de la maladie infectieuse. Le nombre des transports a élé de 2.128 pendant l’année 1890. Le tableau ci-joint en donne la sta- tistique par maladie et par mois. oo os IEEE Ie ao ES £ = o Es FA s MOIS ns 0 a = 5 S % a = & EU ENT © 2 mA Z A Le A E ES JANVICÉ 24 ar: 11 16 99 34 91 Février ...:.. : 19 29 14 15 39 22 1% J 21 26 95 1# 12 ab 23 29 30 37 26 16 53 1% 28 21, 54 28 33 51 30 RTE 15 15 19 36 36 39 22, Jet... 27 19 33 23 39 13 97 Août ..... 39 3 12 8 25 22 30 Septembre... ,,| 44 (nl % 11 10 33 18 Octobre... « 37 2 6 14 21 29 )9 Novembre...... 35 20 1 10 28 32 17 Décembre... 48 14 7 9 38 25 17 ToTAUx . 366 | 246 | 253 | 210 | 379 419: | 255 19128 Nombre des malades alleints d'affections conlagieuses el transporlés dans les hôpitaux aw moyen des voitures spéciales mises par la Préfeclure de police à la disposi- tion du public, pendant l’année 1890. Ce tableau est extrait du Bulletin de statistique municipale (15 janvier 1891). Beaucoup de contagieux se rendent encore à l'hôpital dans des voitures quelconques, par igno- rance de la nouvelle création ou par ineurie, Re- marquons à ce propos qu'en Angleterre et en Alle- magne la loi punit tout individu qui, atteint de maladie contagieuse, monte dans un fiacre sans en prévenir le cocher; elle punit aussi le cocher qui, prévenu, ne fait pas désinfecter sa voiture. Le Conseil municipal de Paris a pris une excel- lente mesure d'hygiène en mettant à la disposition du publie de grandes étuves à désinfection. Les ap- pareils Geneste et Herscher ont été adoptés, parce qu'ils réunissent ces deux avantages de stériliser complètement les objets, même la literie, les mate- las, et de les dessécher ensuite trèsrapidementsans les détériorer. Si l'habitude se répandait dans la population de stériliser, au moyen de ces étuves, la literieet le linge des femmes sur le point d’ac- coucher, nul doute que cette précaution, jointe à l'antisepsie prescrile ici-mème par Budin !, con- ! Bunix. Les sases-femmes et l’antisepsie, dans la Revue du 28 Février 1890, t. I, page 106. tribuerail puissamment à diminuer les cas de fièvre puerpérale encore fréquents chez les parti- culiers. Mais jusqu'à présent ces étuves ont surtoul été employées pour stériliser les objets que le malade à pu contaminer. Quelques-unes ont d’a- bord été installées dans les hôpitaux ; puis le Mont-de-Piété en a été doté, et pendant un certain temps il ses‘ produit ce fait curieux que, pour ob- tenir la désinfection de la literie, les médecins de- vaient conseiller de l’engager au Mont-de-Piété. Le directeur de cet élablissement dut prier de ne point trop divulguer le procédé, craignant de ne pouvoir accueillir les demandes d'engagements formulées dans ce but. Depuis, l'Administration municipale et la Préfec- ture de police ont établi des étuves en plusieurs endroits : rue du Chateau-des-Rentiers, rue Fessart et enfin rue des Récollets. Sur un simple avis la désinfection peut y être obtenue. Des voitures her- métiquement closes, tirées à bras d'hommes, se rendent à l'endroit désigné. Les étuvistes prennent les objets et les transportent à l'établissement; là on les soumet à une température de 115°; on dé- sinfecte les voitures et, dans la mesure du pos- sible, les étuviers eux-mêmes ; puis on replace les objets dans les voitures et on les rapporte à domi- cile. L'organisalion de ce service parait simple et pratique. En réalité la chinoiserie administrative la complique. Les étuves municipales dépendent de la Préfecture de la Seine ; la désinfection à do- micile ressort de la Préfecture de police. Cette dua- lité rend souvent impossibles, par les formalités qu'elle entraine et les conflits qu’elle soulève, les mesures de désinfection. Quant aux désinfections à domicile, elles sont, la plupart du temps, illusoires ou impossibles à obtenir. Aucune loi ne les impose, même quand le danger de la contagion est évident. Le P' Pinard cite le cas de trois décès diphtériliques surve- nus successivement dans une famille qui, malgré les objurgations du médecin, s'était refusée à la dé- sinfection.Après le troisième décès,la famillese con- tenta d'envoyer ses meubles à la salle des ventes ! D'autre part, quand médecin et client sont d’ac- cord pour demander la désinfection, il se heurtent souvent à des difficultés administratives telles qu'ils doivent y renoncer. Il résulte en effet des discussions récentes que beaucoup de commis- saires de police et de maires sont hors d'état de renseigner directement le public; faisons cepen- dant une honorable exception pour M. Thomas, le maire si zélé du XIT° arrondissement, qui, non content d'assurer un service régulier de désinfec- lion dans son arrondissement, se charge encore de la désinfection dans les autres quartiers de L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 187 Paris. Souhaitons que son exemple soit bientôt suivi. A Lyon, grâce à l'Administration générale des hospices, le service du transport et de la désin- fection est admirablement réglé. Le cocher de fiacre que son client na point prévenu à temps de sa maladie contagieuse doit pénétrer dans l’hôpi- tal et faire désinfecter sa voiture ; s'il est prévenu, il doit faire monter le malade dans une voiture spéciale, qu'on désinfecte ensuite à lhospice. — Notons qu'à Lyon le publie s'est plié très volon- tiers aux désinfections pratiques au bichlorure de mercure et au soufre. VIII. — EMPOISONNEMENTS ALIMENTAIRES Les maladies produites par les aliments solides semblent relever surtout de l’hygiène individuelle, Cependant l'utilité de l'intervention de l'Autorité ressort de l'impossibilité où se trouvent les par- ticuliers d'apprécier la salubrité des matières vendues. Cette année encore les tribunaux ont eu à juger des fournisseurs militaires qui n'avaient pas craint de donner aux hommes de troupe des viandes malsaines. Il est regrettable que de tels agisse- ments n’entrainent qu'unecondamnation à quelques mois de prison et à une amende dérisoire. Les médecins militairessurtout se sontpréoccupés de cette importante question des empoisonnements alimentaires. Parmi les travaux publiés en 1890 sur ce sujet il convient surtout de signaler la très consciencieuse étude de Polin et Labit !. ‘Ces médecins se trouvaient au camp d'Avor en 1889 et y observèrent une véritable épidémie qui atteignit 227 hommes, en rendit beaucoup très malades el provoqua un décès. La maladie offrit tous les ca- ractères cliniques récemment signalés dans les empoisonnements par les ptomaïnes : embarras gastro-intestinal aigü, diarrhée, vomissements, sueurs profuses, tendance au coma, dilatation pu- pillaire, ete. L'enquête, habilement menée, montra que seuls les hommes qui avaient mangé de la viande provenant d'une même origine suspecte -avaient été frappés. Dans l'épidémie d'Armentières 30 personnes qui avaient mangé des pâtés pris chez le même char- cutier présentèrent des symptômes analogues. En- fin à Lille 70 personnes furent atteintes d'accidents toxémiques, et 3 saccombèrent. L'’autopsie montra des lésions intestinales rappelant celles de la fièvre typhoïde ; mais les recherches microbiologiques de Gærtner n'y ont mis en évidence que le Ba- cillus Enteridis, distinct du bacille de la fièvre tv- 1 H. Porax et H. Lamir. Etude sur les empoisonnements ali- mentuires (microbes et ptomaïnes), { vol, chez Doin, Paris, 1890. phoïde. Jusqu'à présent on n'a pas pu prouver la thèse soutenue en 1879 par Zubler, que « la fièvre typhoïde est due à l'ingestion de la viande alté- rée ». Les manifestations morbides semblent dans ce dernier cas entièrement différentes !, À priori on doit supposer que les viandes cor- rompues agissent de deux manières : 1° d'une façon directe, par les pltomaïnes nées de leur fermentation, ptomaïnes dont l’action sur notre organisme est à peu près immédiate; 2° par leurs ferments figurés, susceptibles de se cultiver dans notre tube digestif, d’envahir nos humeurs et d’y excréler des poisons. Demayer ? à Bruxelles, Moulé et Nocart * en France, ont montré que les viandes putréfiées peuvent en effet agir de ces deux facons sur les animaux qui les consomment : elles renferment souvent des bactéries d'une extrême nocivilé, = Pour se meltre en garde contre l’incurie ou la mauvaise foi des fournisseurs, Polin et Labit demandent que la viande soit achetée sur pied, examinée par les médecins, les vétérinaires et les hommes du métier, qui ne manquent jamais dans les régiments. L'expérience a d’ailleurs été tentée avec succès au 94° de ligne ‘ : les rations y sont devenues plus riches, plus nutritives, surtout plus saines. Mieux achetée, la viande revient à meilleur compte, de sorte que la quantité peut en être augmentée sans grever la caisse du régiment. Au même point de vue devraient être examinées les viandes de conserve, ear, s'il était établi qu'elles fussent inoffensives, elles seraient appelées à jouer un grand rôle en cas de mobilisation géné- rale. Cassedebat y a cherché des bactéries et en x trouvé qui, par inoculation, entraînent la mort des animaux Ÿ. Il nous semble que l'étude bacté- riologique d’un aliment doit êlre autrement con- çue : nous avons {ous ou presque tous dans la bouche, par exemple, des micro-organismes, ordi- nairement inoffensifs, qui deviennent dangereux lorsqu'ils évoluent dans le tissu du poumon de- venu, pour une raison quelconque, lerrain de cul- ture. Quand donc on désire se rendre compte de la salubrité d’un aliment, il convient surtout de chercher s’il contient des microbes pathogènes par simple ingestion et non pas quelque bactérie sus- ceptible de produire une septicémie par inoculation, ce qui peut porter cette bactérie dans un terrain 1 Voyez à ce sujet : 654. 2 DrMAyer, Congrès d'Hygiène, 1889. 3 Mouré Er NocartT, Congrès des Sociétés savantes, 1890. 4 Boucuer, Arch. de méd. et de Pharm. militaires, 1890. 5 CassepEBAT, Bactéries et ptomaïnes des viandes de con- serve'in Revue d'hygiène, août et septembre 1890. RicnarD, Revue d'Hygiène, 1899, page 188 L. OLIVIER. -- REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE propice à sa culture. Il importe aussi de détermi- ner le degré d'abondance de chaque sorte de micro-organismes, leur nombre pouvant être un facteur important de l'infection. Enfin si des microbes même inoffensifs y sont abondants, la conserve devra être tenue tout au moins pour fort suspecte, car ces agents, tout en étant incapables de produire eux-mêmes une infection, ont pu excréter des poisons énergiques dans le milieu où ils se sont développés. Disons à ce propos que Cassedebat a trouvé dans les conserves des pto- maines qui exercent principalement leur action sur le système nerveux. C'est à elles qu'il attribue les accidents observés, fondant son opinion sur la rapidité de l'invasion, la marche décroissante de l’intoxication et l'absence de lésions. Pour la prophylaxie il importe de rechercher l’origine de l'infection de la conserve. Au Congrès d'Hygiène tenu en 1889, Brouardel et Bapst avaient acceplé l'hypothèse que microbes et ptomaïnes s'étaient développés avant la ferme- ture des boites. Telle était aussi l’opinion de Gær- iner qui attribuait l’empoisonnement de Franken- hausen au Basillus Enteridis préexistant dans les animaux ulilisés. Cassedebat fait remarquer que la plupart des micro-organismes déterminés par lui ne résistent pas longtemps à la température de 100° employée pour faire la conserve. Aussi pense-t-il que la contamination s’est faite pen- dant le temps très court qui s'écoule entre la cuis- son de la viande et la fermeture des boites. Il se- rait utile d'étudier jusque dans le détail cette très intéressante question. IX. — QUESTIONS PENDANTES Les empoisonnements par les excrétions micro- biennes nous amènent à parler de l’action vacci- nante de certaines de ces substances. Cette aclion est encore fort obscure. Il nous paraît cependant utile d'indiquer la tendance des nombreux travaux dont elle est actuellement l'objet, car ces recher- ches sont en train de transformer la théorie de l'i- noculation préventive et promettent une applica- tion, en quelque sorte inespérée, au traitement, non seulement prophylactique, mais même curatif, de plusieurs, peut-être de toutes les maladies contagieuses. Les idées qui s’élaborent à ce sujet ont leur ori- gine dans les travaux de Charrin, Salmon et Smith. Chamberland et Roux, Roux, Chantemesse et Widal, Roux et Yersin, sur les propriétés vacci- nantes de certaines excrélions microbiennes. Charrin indiquait tout récemment dans cette Revue, que l'animal, rendu par ces matières ré- 1 Dr À, Cuarrix : La nature des sécrétions microbiennes, Revue générale des Sciences, 15 mars 1891, p. 129. fractaire à l'infection du microbe, ne cesse cepen- dant d’être sensible à l’inoculation de ses excré- tions toxiques. D'où celte idée que l’immunité conférée consiste au moins en partie dans un état chimique des humeurs tel que la culture du mi- crobe ne peut s'y faire. Cette hypothèse a conduil à essayer de produire l’immunité en inoculant soil des substances artificiellement préparées, soit des liquides organiques provenant d'animaux naturel- lement réfractaires. Cette dernière méthode avait été concue en 1884 par Rondeau!. Le P'Ch. Richet en à fait le premier l’heureuse application. Avec le concours de son préparateur, le D' Héricourt, il est arrivé à produire chez le lapin une sorte d’im- munité relative contre l'infection pyoseptique ? par transfusion rectale ou intrapéritonéale de sang de chien. Enfin il a reconnu que semblable transfusion retarde chez le lapin l’évolution de la tuberculose aviaire *. C’est là un résultat singulièrement sug- geslif, Il donne à espérer que, de prophylactique qu’elle a été jusqu'ici, la vaccination contre beau- coup de maladies pourra devenir curative. Déjà l'injection de sérum de chien faite à des tubercu- leux semble avoir amélioré leur état. Dans cet ordre d'idées il convient de citer les tentatives faites par les D' Picq et Bertin (de Nantes) pour guérir la tuberculose par injection de sang de chèvre. Ces traitements sont encore trop nouveaux pour qu’on soit en droit d'en juger la valeur. Quant aux récents travaux du D' Koch, on en a tant parlé qu'il serait superflu d'y revenir ici. Fai- sons cependant remarquer que, si le célèbre bac- tériologiste a réellement fait connaître toute sa méthode, elle ne renfermait aucune invention et se trouvait même en retard sur le mouvement con- temporain, puisqu'il se bornait, a-t-il dit, à inoculer sans sélection les matières que son bacille | excrète dans les cultures. Son insuccès ne doit cependant pas faire oublier un fait important, mis par lui en lumière : l'injection quil pratique exerce presque toujours, sinon toujours, outre un effet général sur l'organisme, une action locale élective sur les éléments pathologiques du tuber- cule. Ily a là une notion nouvelle dont les ex- périmentaleurs devront lenir compte. L'emploi de substances solubles pour produire limmunité contre d'autres maladies virulentes a été tenté tout récemment par plusieurs physiolo- gistes. Frænkel, Behring, Gamaleia, Behring et Ki- lasato, Vaillard et Vincent, ete. sont arrivés ainsi à des résultats remarquables. Le premier de ces | savants essaya d'abord de rendre réfractaires à l Soc. de Biologie, 1890. 2 C. R. delu Soc. de Biologie, 1888. 5 Jbidem, 1889 et 1890. L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 189 la diphtérie des cobayes par injection d’agents chimiques !. Après avoir vainement éprouvé bon nombre de substances fabriquées dans les labo- ratoires, il renonça à cette méthode et fut plus heureux en employant dans le même but des cul- tures stérilisées à différentes températures. Ce sont : les cultures 2x vitro du bacille diphtéritique, por- tées à 65° pendant une heure, qui ont donné les meilleurs résultats. Au-dessous de 60° les effets toxiques subsistent, quoiqu'atténués, Au contraire, si l'on chauffe jusqu'au voisinage de 100°, les propriélés vaccinantes disparaissent. On peut se demander, avec l’auteur, s’il existe plusieurs toxal- bumines jouissant de propriélés physiologiques différentes, ou si c’est la même substance dont l'action est subordonnée à la température. D'autre part, Behring - à réussi à rendre les co- bayes réfractaires à la diphtérie en leur injectant le liquide pleural de cobayes morts eux-mêmes de cette maladie. Loin d’être sans danger, celte inocu- lation provoque la mort d'un grand nombre d’ani- maux. Mais il est intéressant de constater que ceux qui survivent deviennent réfraclaires à l’in- fection. Plus heureux que Frænkel, Behring annonce avoir obtenu l'arrêt de l'infection virulente par injection de substances chimiques. La plus énergi- que serait le trichlorure d'iode en solution à 2 0/0. Malheureusement l'injection est suivie de spha- cèle, d’eschare, et, fait plus grave, elle ne parait pas agir quand l'infection diphtéritique a eu lieu par le larynx ou la trachée, ces deux points d'élec- üon de la diphtérie humaine. Peut-être y aurait-il lieu de chercher dans le sang ou le sérum des souris ou des rats, une subs- tance conférant l'immunité contre la diphtérie, puisque ces rongeurs se montrent naturellement réfractaires à l'infection. Il semble que chez les animaux de cette sorte, c'est-à-dire naturellement réfractaires, les humeurs - sont à l« fois rebelles à la culture du microbe el destructives de ses toxines’. Gamaleia a fait à ce ! FRÆNKEL, Untersuchungen über Bakterungifte. Emmun- sirungversuche bei Diphterie. Berlin. Xlin. Wochenschrift,3 dé- cembre 1890. ? BenrixG, De la vaccination contre la diphtérie chez les animaux, Deutsche Medicin. Wochenschrift, 10 décembre 1890. 3 Remarquons toutefois que les faits qui ont conduit à cette hypothèse sont encore trop peu nombreux pour nous per- mettre de formuler une loi générale. sujet de curieuses observations, en éludiant la ré- sistance naturelle du lapin au Vibrion de Metsch- nikoff ! : il a constaté que les produits toxiques du vibrion sont réellement neutralisés ou détruits dans les lissus du lapin, car, après injection, on ne les retrouve plus dans l'urine ; il suffit, d'autre part, de triturer les tissus avec le liquide vaccinal pour faire perdre à ce dernier ses propriétés ac- lives. — Gamaleia s'aulorise de ces expériences pour établir une distinction fondamentale entre limmunité naturelle et l’immunité acquise. Dans ce dernier cas, comme Charrin l’a observé le premier en étudiant la maladie pyocyanique, la vaccination n'augmenterait pas la résistance des animaux aux toxines directement injectées; elle les rendrait seulement incapables de cultiver l'agent microbien qui exerète ces poisons. Cependant Behring et Kitasato? sont arrivés à vacciner contre les toxines du tétanos avec le sang de lapins rendus réfractaires. Le sérum de ces ani- maux posséderait la propriété de neutraliser les poisons excrétés par les bacilles virulents et con- serverait cette propriété quand il est transporté dans d’autres animaux. Pour le {étanos l'action est immédiate : chez la souris infestée présentant déjà des contractures, l'injection de sang de lapin devenu réfractaire fait disparaitre immédiatement les phé- nomènes morbides. C’est là un résultat considérable, sur la portée duquel, en terminant ce long article, nous appe- lons tout particulièrement l'attention du lecteur. Bien que les méthodes que nous venons d'exposer n'aient encore conduit à aucune application pra- tique, il importait, croyons-nous, de les signaler en raison de l'avenir qu'elles préparent à Hygiène. Gràce à elles, en effet, nous entrevoyons aujour- d'hui, avec la possibilité de conférer au moyen de substances solubles ? l'immunité contre les affec- tions contagieuses, l'espoir d’enrayer ces maladies lorsqu'elles sont déjà déclarées. Louis Olivier. 1 GamaLerA, De l’immunité pour le Vibrion de Metschnikoff, Bulletin médical, 14 décembre 1890. 2 BenrixG ET KiTASATO, in Deutsche medecine Wochenschrif, du 4 décembre 1890. 3 L'emploi aseptique de ces substances, lorsqu'elles seront chimiquement déterminées et dosées, aura l’ayantage de pré- server à la fois de tout risque soit d'infection, soit d’intoxica- ton, 190 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques. Appell (P.), — Professeur: à la Sorbonne. — Surles lois des forces centrales faisant décrire à leur point d'application une conique, quelles que soient les conditions initiales. — (American journal of Mathc- matics, vol, XIII, n° 2.) L'auteur présente une application de la curieuse transformation qu'il avait exposée précédemment dans le même journal, et qui fait correspondre au mouve- ment d’un point sous l’action de forces données un autre mouvement dont la trajectoire est homogra- phique de la première, Il s’agit, cette fois, comme le montre le titre même de l'article, d’un problème bien connu, posé par M. Bertrand et résolu par MM. Darboux et Halphen. La transformation homographique permet de ramener cette question à une autre tout analogue, mais où les forces centrales sont remplacées par des forces paral- lèles. Au problème ainsi simplifié on applique encore la solution d’Halphen; mais les calculs assez complexes quiinterviennent dans cette solution se trouvent, ainsi qu'il était à prévoir, notablement réduits M. Appell termine son article en signalant une transformation voisine de la précédente, et par laquelle on passe d'un mouvement plan à un mouvement sphéri- que. On obtient ainsi les lois des forces qui font décrire au point mobile sur la sphère une conique sphérique, quelles que soient les conditions initiales du mouve- ment. F, Hapamarp, Mathieu (Emile), — Théorie de l'Elasticité des corps solides, 2° partie In-4° Ge 184 pages, Gauthier- Villars et fils, 55, quai des Grands-Augustins, 1890, (Prix de ce 2° volume, 9 fr.; 4°* vol., 11 fr.) Emile Mathieu, le savant professeur de la Faculté de Nancy, que la science a perdu le 19 octobre dernier et auquel la Revue a consacré une Notice nécrologique dans son numéro du 15 novembre, a pu terminer avant de mourir le second volume de la Théorie de l’élasti- cité des corps solides. Nous avons dit tout le bien que nous pensions du premier !; le second nous oblige à répéter les mêmes éloges. L'auteur s'occupe d’abord de la propagation du mouvement dans un milieu indéfini et examine succes- sivement les vibrations longitudinales des tiges et des lames droites, la vitesse du son dans un cylindre ou dans une plaque plane, le mouvement transversal des lames encastrées ou libres, la propagation d’un mouve- ment vibratoire dans une lame indéfinie, el termine le premier chapitre par l'étude des mouvements vi- bratoires d’une tige cylindrique. Ce sujet avait déjà été traité partiellement dans la première partie à propos de la déformation des tiges minces; on sait que les procédés de Kirchoff et de Clebsch et l'application qu'ils ont faite dans ce cas des formules de de Saint-Venant sur la flexion et la torsion des prismes, laissent à désirer; cependant lorsque la tige est droite et la déformation petite, l'erreur parait faible; Mathieu reprend la question, d’une part à l’aide d'un procédé analytique qui lui est propre et, d’autre part, à l’aide d’une méthode de calcul due à Poisson; il arrive ainsi à des résultats différents entre eux et dif- férents de ceux de Kirchoff; 1l les étudie, les compare, explique les contradictions et montre avec une grande clarté que les opérations obtenues par sa méthode re- l Revue, n° 11, 15 juin 1890, page 340, présentent avec une grande approximation les équa- tions du mouvement vibratoire. IL aborde alors l’équilibre d’élasticité et le mouve- ment vibratoire des lames courbes, en les supposant homogènes et d'épaisseur très petite. C’est là un sujet difficile que Mathieu parvient à traiter, même dans le cas de l'épaisseur variable, en supposant que les dé- placements s'effectuent perpendiculairement aux gé- nératrices des cylindres qui limitent la lame et de la mème manière tout le long de la même génératrice. Il termine enfin le volume par deux études, l'une sur le mouvement vibratoire des cloches, l’autre sur l’équi- libre d’élasticité d'un prisme rectangle, dont les résul- tats lui appartiennent à peu près en propre. La pre- mière est la reproduction d’un beau Travail paru en 1882 dans le journal de l'Ecole Polytechnique, la seconde est la solution complète, dans le cas où le problème ne dépend que de deux dimensions, de cette grande question, non résolue encore dans le cas géné- ral de l'équilibre du prisme rectangle. Ce Traité de l’élasticité des corps solides est à la hau- teur des meilleures œuvres d'Emile Mathieu ; il contri- buera avec la Dynamique analytique, le cours de Phy- sique mathématique, les théories de la Capillarité, du Potentiel, de l’Electrostatique, et de l'Electrodynamique que la maison Gauthier-Villars a successivement pu- bliés, à maintenir le nom du regretté savant à un haut rang dans la science, L°A0; Voyer. (J). — Capitaine du Génie. Des ascensions aéronautiques libres en pays de montagnes et particulièrement à Grenoble. (1 fr. 50). Berger- Levrault, 1891, 5, rue des Beaux-Arts. Les esprits aventureux, si vivement attirés par les traversées des mers, n’ont jamais songé à l’aérostation en pays de montagnes. Les difficultés sont pourtant de même ordre, et les qualités à déployer, identiques. Et en même temps, quel beau voyage! Ces vues su- perbes que l’alpiniste s’en va chercher au prix des plus grandes fatigues sur les pics élevés, l’aéronaute, tran- quillement assis dans sa nacelle, en jouirait sans effort, et les verrait se renouveler à chaque instant devant ses yeux. Ce que l'esprit d'aventure n’a pas tenté à temps, la science aéronautique est maintenant en mesure de le réaliser méthodiquement, La solution de cette question s'impose pour parvenir à doter nos places fortes des régions montagneuses de l'Est et du Sud-Est des mêmes moyens de communications avec l'extérieur que celles des pays de plaine. Le travail du capitaine Voyer ouvre la voie dans cette nouvelle circonstance de navigation aérienne, Le pro- blème étant neuf, l’'auteuren examine et en discute toutes les conditions. Il montre dans quels cas il est réalisable et il a le mérite de pouvoir en formuler les règles pré- cises, Ce qu'il faut posséder avant tout, c’est une con- naissance parfaite de la topographie de la contrée, que peut fournir seule l'étude préalable et approfondie des cartes d'Etat-major, afin de pouvoir se rendre compte dès le début d'une ascension aussitôt la direction re- connue, des difficultés à vaincre et de la distance qu'on peut espérer parcourir, Pendant le voyage la carte ne sera pas moins utile à l’aéronaute : elle lui permettra de repérer à chaque instant sa position, de mesurer la vitesse du vent, la hauteur de lobstacle à franchir, et de manœuvrer avec précision pour s’éleyer à temps au-dessus d’un obstacle sans le heurter, mais sans cependant commencer trop tôt pour ne pas perdre un lest précieux, La connaissance du régime des vents 4 à rat ENORE TA 4 "ti _ L _ DAT ne" BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Lo en pays de montagnes permettra aussi dans certains cas de se laisser porter sans crainte vers une cime In- franchissable, si l’on sait qu'au voisinage de cet obs- tacle le vent s'infléchit et dirige de lui-mème l’aérostat vers un col aisément praticable, En outre le souci de l'atterrissage prend une importance bien plus consi- - dérable qu’en terrain plat, car il faut éviter d'aller s’é- chouer sur une région inabordable ou dépourvue de moyens de communications. Il faut parfois avoir la prudence de s’arrêter en avant d’une montagne acces- sible lorsqu'en arrière s'étend une région inhospita- lière, ] Eye M. Voyer applique ensuite ces considérations géné- rales à la place de Grenoble, Cette ville, entourée de montagnes dont quelques-unes atteignent 3000 mètres, offre un champ d'expériences des mieux appropriés. Le ballon normal des parcs militaires francais, destiné avant tout aux ascensions captives, permettra déjà, malgré ses faibles dimensions, d'atteindre des distances considérables. On pourra, suivant la direction du vent, franchir en entier Le massif de la Grande-Chartreuse el gagner Chambéry, ou remonter le Grésivaudan et la Haute-Isère jusqu'aux ouvrages d’Albertville, ou en- core, au Sud, triompher du massif du Dévoluy pour parvenir à la région de Gap. Ce dernier itinéraire est le seul que M. Voyer ait eu l’occasion d'effectuer jus-- qu'ici. Il s’est accompli rigoureusement dans les con- ditions prévues, et a fourni ainsi la confirmation expérimentale des principes établis par l’auteur. Enfin, à l'intérêt scientifique qu'il présente, le tra- vail de M. Voyer en joint un nouveau, car il est l'œuvre tout à la fois d'un officier passionné pour son art el d’un alpiniste fervent, EpGarn Haunié. 2° Sciences physiques. Thiesen (Max.).—Beitrage sur Dioptrick (contribu- tion à ladioptrique). Académie de Berlin, volume de 1890, Dans cet important travail, l’auteur part du théorème de Fermat : « la lumière emploie toujours le tempsle plus court pour passer d’un point à un autre », pour résoudre un certain nombre de problèmes relatifs aux systèmes centrés. En désignant par n une quantité inversement proportionnelle à la vitesse de la lumière, par ds l’élé- ment du chemin parcouru, ffnds sera proportionnel au temps employé, et la condition du minimum sera con- tenue dans l’équation. à [nds =!) En ne conservant, dans le calcul pour un système cen- tré, que les termes de premier ordre, on trouve très facilement les principaux théorèmes de la dioptrique de Gauss, tandis que les termes de second ordre don- nent la raison des observations aux surfaces sphéri- ques, montrent les inconvénients des diaphragmes non symétriques, etc. La plupart des calculs ne sont qu’in- diqués ; l’auteur se propose de les publier prochaine- ment in-extenso. Ch. Ed. GUILLAUME. Schumann (Victor). — Sur la détermination de la sensibilité des plaques photographiques au moyen du spectroscope. Chemical News, 16 janvier 1891, L'emploi des plaques isochromatiques, qui sont sen- sibles aussi bien aux radiations rouges ou jaunes qu'aux radiations bleues et violettes, ne permet plus l'usage des sensitomètres anciennement employés, et notam- ment du plus pratique, le sensitomètre Warnecke. Ces appareils ne laissent passer en effet qu'un petit nom- bre de radiations et ne donnent pas, par conséquent, la sensibilité absolue d’une plaque impressionnable dans toute l’étendue du spectre. On est obligé alors d'avoir recours au spectroscope, et de préparer au moyen de la plaque à examiner une photographie du spectre solaire, M, Schumann, en étudiant cette opéra- lion, est arrivé aux conclusions suivantes : 1° Il faut avoir soin d'employer des spectroscopes ne contenant pas de flint lourd qui absorbe fortement les radiations violettes ou ultra-violettes. La partie optique doit être construite en quartz ou sinon en verre léger. 2° On ne peut comparer les sensibililés de deux pla- ques d’après les intensités des images formées dans un mème temps. Certaines substances, difficilement réductibles par la lumière, donnent au développement, dès qu'il y à commencement de décomposition, des images très in- (enses, Pour obtenir une comparaison rationnelle, il faut ti- rer une série de clichés, correspondant à des temps de pose différents, en commencant par des durées très courtes, et les augmentant graduellement. En opérant de cette facon, on constate que ce ne sont pas du tout les plaques qui donnent en un temps donné les images les plus intenses, qui permettent d'obtenir dans le plus court temps de pose une image nettement déve- loppable, Georges CHARPY. Sur le poids atomique de l'oxygène. Cooke (J.-P) et Richards (Th, W,), — Chem. Amer, Join. 10.81 et 191, Keiser (E.H.). — Chem. Amer. Journ. 11.398. Noyes (WW. À). — Chem. Amer. Journ. 11.155 et 12.441. Ë Crafts (J.). — Comptes rendus. Acad, Se, 106.1662, Le poids atomique de l’oxygène est depuis quelque temps l’objet de travaux de revision, sinon définitive- ment concluants, du moins très importants, On sait qu'on s'en est rapporté pendant de longues années au résultat du célèbre Dumas. Ses recherches l'avaient conduit à la valeur O0 —15,96. Mais, en raison d’une cause d'erreur découverte après les expériences, et peut-être aussi de l’idée préconçue qu'on avait alors de regarder tous les poids atomiques comme des mul- tiples entiers de celui de l'hydrogène, Dumas avait adopté la valeur 0 — 16. Ce nombre a été accepté sans discussion jusqu'à l’époque des travaux de M. Stas. C’est alors seulement qu’on s’est demandé s’il ne con- viendrait pas de revenir à la valeur 15,96 plus con- forme aux données de lexpérience. On se rappelle que les recherches classiques sur la composition de l’eau consislaient à diriger un courant d'hydrogène pur et sec sur un poids donné d'oxyde de cuivre chauffé, et à peser l’eau formée, La perte de poids de l’oxyde de cuivre étant égale à la quantité d'oxygène contenu dans l’eau recueillie, le poids de l'hydrogène s’estimait « par différence ». Cette estima- tion était évidemment entachée d’une double incertitude provenant des erreurs que l’on pouvait commettre sur le poids de l’eau et sur celui de l'oxygène. C’est ce qui faisait dire à Dumas ! que « de toutes les analyses qu'un chimiste peut se proposer, celle de l’eau est celle qui comporte le plus d'incertitude. En effet, ajou- tait-1l, une partie d'hydrogène se combine avec huit parties d'oxygène pour former de l’eau, et rien ne serait plus exact que l’analyse de l’eau, si l’on pouvait ! peser l'hydrogène et peser l’eau qui proviendrait de sa combustion », C'est précisément de ce principe si clairement énoncé par Dumas que sont inspirées les recherches récentes entreprises sur le poids atomique de l'oxy- gène. MM. Cooke et Richards ont pesé l'hydrogène dans un ballon de verre, en prenant toutes les précautions indiquées par Regnault pour la pesée des grands appa- reils de verre, M. Keiser a utilisé la propriété du palladium de condenser l'hydrogène à basse température et de le laisser se dégager lorsqu'on vient à le chauffer, La perte de poids de l'appareil contenant l’hydrure de —————— l Ann, Chim, Phys, (3) 84198. 192 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX alladium est égale au poids de l'hydrogène contenu ans l’eau recueillie. Enfin M. Noyes dirige un courant d'hydrogène aussi our que possible dans une ampoule A contenant de ‘oxyde de cuivre chauffé, À la suite de cette ampoule est soudé un tube B fermé à FA. =—« son extrémité a, dans lequel : l’eau formée vient se conden- ser, On concoit aisément que l'augmentation de poids de B l'appareil, après la combus- tion, représente le poids de l'hydrogène brûlé. On fait ensuite le vide dans le tube, en le portant à une tempéra- ture uu peu élevée pour chas- ser toute l’eau formée, La perte de poids de l'appareil est égale à la quantité d’eau formée, Tels sont les dispositifs fort ingénieux par lesquels on à cherché à réaliser la pesée directe de l'hydrogène. Il nous reste à examiner les résultats qu'ils ont donnés. MM. Cooke et Richards avaient trouvé comme moyenne de 16 déterminations O — 15,953. Lord Ray- leigh fit remarquer que la pesée de l'hydrogène dans un ballon de verre comportait une erreur résultant de la poussée de l'air extérieur sur le ballon vide. MM. Cooke et Richards déterminèrent alors la correc- tion relative au ballon qu'ils avaient employé, ce qui les conduisit à la valeur O — 15,869. M. Keiser, dont la méthode est celle qui comporte le moins de corrections, a trouvé la valeur O0 —15,949 comprise entre les limites extrêmes 15,958 et 15,943 (10 déterminations). Enfin M. Noyes donne comme résultat de ses re- cherches O0 — 15,896 (24 déterminations). Eu égard à certaines réserves formulées par M. Noyes lui-même sur ses propres expériences et sur celles de MM. Cooke et Richards, il semblerait que les résultats de M. Keiser sont jusqu’à présent les plus rapprochés de la vérité, Il est assez diflicile de se prononcer sur cette ques- üon, Mais il faut cependant reconnaître que cette der- nière conclusion paraît confirmée par une observation de M. Crafts. Après avoir appliqué aux observations de Regnault la correction relative à la déformation des ballons vides par la poussée de l'air, ce savant trouve pour densité de l'oxygène 15,91 pour H— 1, Or, si l’on admet d’après M. Scott qu'un volume d'oxygène se combine avec 1,9965 volume d'hydrogène pour former de l’eau, on déduit pour le poids atomique de l’oxy- gène la valeur O—15,94. Ce nombre est très voisin de 15,95 trouvé par M. Keiser, très voisin lui-même du résultat O0 — 15,96 des expériences de Dumas, L'avenir nous dira si ces résultats peuvent être considérés comme définitifs. Ph: A GUxE. Doelter (Corn). — Minéralogie chimique géné- rale. 1 vol. in-8° de 278 p. avec 14 fig. dans le texte Leipzig, W. Engelmann, 1890, broché, 8 fr. T5; relié, ORNO; Ce livre est un traité de minéralogie considérée ex- clusivement au point de vue de ses relations avec la chimie ; il se divise en six chapitres. Le premier, intitulé introduction, rappelle les lois fondamentales qui président à la composition des es- pèces chimiques, la théorie atomique, la nomenclature chimique, en prenant, autant que possible, les exem- . ples parmi les minéraux. Le deuxième chapitre, sous le titre de cristallochimie expose principalement les théories du polymorphisme et de l’isomorphisme. Le troisième est consacré à l'analyse chimique des miné- raux, analyse qualitative, particulièrement essais au chalumeau, analyse pyrognostique, réactions micro- chimiques, tableaux des réactions données par chaque élément dans ces divers genres d'essais ; puis analyse quantitative, comprenant la description des procédés d'analyse immédiate des espèces minérales, suivie de vingt ef un exemples détaillés d'analyses quantitatives complètes d'autant de minéraux choisis parmi les plus importants. — Le chapitre suivant présente un résumé bien complet de ce qu’on sait aujourd’hui des procédés de synthèse des minéraux, méthodes usitées dans les la- boratoires, aussi bien que reproductions purement acei- dentelles. Dans la division du livre qui vient ensuite, on ° trouve l'exposé des transformations ou altérations que subissent les minéraux sous l’action des agents physi- ques ou chimiques, naturels ou artificiels, On est ainsi bien préparé à comprendre la portée du chapitre vr qui traite de la formation des minéraux dans la nature. Ces trois parties du livre sont d’autant plus intéres- santes que M. Doelter y a introduit les résultats four- nis par un très grand nombre d’expériences et d’obser- vations personnelles, On sait en effet que ce savant minéralogiste a notamment réussi à reproduire beau- coup d'espèces minérales en s’astreignant à ne mettre en œuvre que des procédés empruntés au grand labo- ratoire de la nature, — Enfin le septième et dernier chapitre, faisant plus particulièrement suite au premier et au troisième, traite de la composition et de la cons- titution chimique des minéraux et se termine par une liste étendue donnant, sous une classification chimique, les noms et les formules de toutes les espèces bien définies, avec la mention de leur système cristallin. Nous croyons devoir recommander ce livre aux lec- teurs francais à cause de l’élégance et de la clarté du style de l’auteur; on y trouvera rassemblés sous un petit volume et une forme agréable bien des renseigne- ments qu'on ne trouverait ailleurs que plus difficile- ment, Léon BourGeors. 8° Sciences naturelles. Fisher (Rev. Osmond), — Physics of the Earth's Crust (Physique de l'écorce terrestre) (42 fr. 50),2 ed. altered and enlarged. In-8°, xvi—391 p. London, Mac- millan, and C° 29, Bedford Straet Covent Garden, 1889, Depuis les travaux d'Hopkins et de Sir W, Thomson, les savants anglais ont plus d’une fois essayé d’appli- quer les méthodes mathématiques aux données de la géologie : Mallet, G. Darwin, M. Davison et d'autres se sont successivement fait connaître à ce point de vue, Dès 1881, M. O. Fisher publiait sous le titre de Physics of the Eurths Crust, une série d’études sur les problè- mes, delicats entre tous, qu’offrent aux méditations du penseur l’état de l’intérieur du globe et le mécanisme de son évolution. La seconde édition de cet ouvrage, que l’auteur s’est décidé à faire paraître avant l'épuisement com- plet de la première, s'en distingue par de nombreuses modifications de détail et par d'importantes additions. Assurément, les résultats de spéculations comme celles auxquelles M, Fisher s’est livré ne sauraient pré- tendre en aucune manière, dans l’état actuel de la science, à obtenir l’assentiment unanime des-personnes compétentes : rien n'est plus obscur, comme on sait, que tout ce qui a trait aux régions profondes de l'écorce terrestre, aux conditions de température et de pression qui y règnent, à la manière dont les substances miné- rales s’y comportent, ete, On peut même se demander, en présence de l'incertitude forcée des données numé: riques, si l'emploi du calcul intégral, en partant d’une base aussi mal assurée, ne constitue pas une dange- reuse illusion, Ne serait-ce pas le cas de répéter le mot célèbre d'Huxley, stigmatisant avec tant de justesse l'application inopportune de Poutil mathématique? Malgré ces réserves, visant comme on le voit l'esprit même de l'ouvrage, la lecture de ce livre n’en sera pas moins profitable aux géologues : M. Fisher aborde, en effet, une foule de questions et remue beaucoup d'idées, dont plus d’une peut se trouver porter juste. Repous- sant l'hypothèse de la solidification complète, l’auteur admet qu'il existe, au-dessous d’une croûte très mince, une zone liquide continue formée d'un magma conte- CNP ART TE € " détnh dun it dis hat ac BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 193 nant des gaz en dissolution, conformément à la loi de Henry; dans ce « substratum » fluide, sur lequel l'écorce repose en état d'équilibre hydrostatique, se produisent des courants de convection, que M. Fisher considère comme une cause adéquate pour expliquer tous les mouvements différentiels dont la géologie a découvert les traces[?]. Les révélations récentes fournies par le fil à plomb, le pendule et le thermomètre sont invoquées tour à tour, comme venant à l'appui de cette théorie, destinée, aux yeux de l’auteur, à remplacer l'hypothèse communément admise de la contraction de l’intérieur du globe par suite de son lent refroidis- sement, hypothèse dont M. Fisher croit être parvenu à démontrer l'inanité. Toute appréciation de tendances mise à part, on regrettera que le savant géophysicien d’Harllon n'ait pas cru devoir tenir compte davantage des travaux publiés en dehors de son pays : à cet égard, l'ouvrage manque un peu d'actualité; il est cependant facile aujourd’hui de se renseigner sur les publications con- cernant la physique terrestre, grâce aux excellents rapports spéciaux que MM. Hergesell et Rudolph insè- rent tous les deux ans dans le Geographisches Jahrbuch de Gotha. Emm. DE MARGERIE. Schultze. — Sur les principes ternaires de re- serve de quelques graines de Légumineuses. Berichte der deutschen botanischen Gesellschaft, vol, VII, 1889. L'étude au microscope a récemment montré que les graines des Légumineuses peuvent contenir quatre principes ternaires de réserve figurés : 1° Pamidon sous forme de grains contenus dans les cellules des cotylédons ; 2° une cellulose particulière, ou cellulose de réserve, sous. forme d’épaississements des, mem- branes; 3 de l’amyloïide sous le même état et qui se distingue de la cellulose particulièrement en ce qu'il bleuit directement par l’iode et 4° des épaississements mucilagineux gonflables par l’eau. Ces quatre subs- tances sont utilisées par la graine, comme le montrent les observations faites avant et pendant la germination. M. Schultze à retrouvé ces principes par Panalyse chimique directe, Ses recherches l’ont en outre conduit à reconnaître la présence de deux autres substances ternaires de réserve. On savait déjà qu'en outre de lhuile dont la pré- sence est générale, on trouvait du saccharose dans les graines de Fève et de Vesce. M. Müntz avait isolé dans la luzerne un hydrate de carbone soluble qu'il avait appelé galactine et qui donnait du galactose par l'acide sulfurique étendu et de l'acide mucique par l'acide nitrique, L'un des deux nouveaux hydrates de carbone isolés des Lupins par M. Schultze est la G-galactone, soluble, l’autre la paragalactane qui fait partie des épaississements des parois cellulaires, Tous deux pos- sèdent les deux réactions signalées précédemment pour la galactine; ce sont des matières de réserve consommées pendant la germination, car tandis qu’ils existent dans les graines, 1ls ont complètement disparu dès les premiers jours de la germination. Les graines de Légumineuses sont donc riches en matières de réserve et elles doivent être le siège de réactions chimiques particulièrement nombreuses et intéressantes pendant leur germination. C. SAUVAGEAU. Thouvenin (Maurice). — Recherches sur la structure des Saxifragacées. Thèse présentée à la Faculté des sciences de Paris, 1890. Les Saxifragacées constituent une famille très hété- rogène dans laquelle des botanistes de bonne volonté ont cru devoir faire rentrer des types très divers. C’est ce qu'on appelle une famille par enchaînement, c’est-à-dire dont les représentants se relient plus ou moins les uns aux autres par des caractères secondaires sans qu'il soit possible de leur attribuer une caracté- ristique générale, Ceci nous explique amplement ce fait que les classificateurs ne s'accordent aucunement sur les limites qu’il faut assigner à la famille des Saxi- fragacées et nous ne sommes pas étonné de voir M. Maurice Thouvenin chercher dans les caractères anatomiques une caractéristique que n’a pu fournir l'é- tude des organes extérieurs. L'auteur a fait dans ce but une étude complète et étendue des dix tribus que M. Van Tieghem fait rentrer dans les Saxifragacées; et la conclusion de son travail, c’est que lescaractères anatomiques sont aussi variés que les caractères extérieurs, Si cette étude n’a pas fourni à M. Thouvenin les caractères généraux qu'il en attendait peut-être au début de son travail, elle lui a procuré du moins l’occasion d'établir la structure ana- tomique des principaux représentants de cette famille et son mémoire accompagné de 22 planches constitue un travail complet et consciencieux que pourront con- sulteravecfruitlesbotanistes,nombreuxaujourd’hui, qui cherchent dans les caractères anatomiques le com- plément naturel des caractères extérieurs, M. Thouvye- nin ne s’est pas borné d’ailleurs à cataloguer les dé- lails de structure qu'il a observés : il a cherché à les utiliser pour établir ou confirmer les formes de passage, soit entre les diverses plantes composant une même tribu, soit entre deux tribus différentes, soit enfin entre la famille des Saxifragacées et les familles voi- sines, C’estainsi qu'il a trouvé chez les Vahlia Capensis, Donatia Magellanica (Saxifragées) et Roussea simplexæ (Brexiées) un appareil sécréteur spécial qui établit un lien anatomique entre les plantes herbacées et li- gneuses de la famille des Saxifragacées. Enfin il a mis en évidence un certain nombre de caractères qui per- mettent de relier la famille des Saxifragacées aux fa- milles des Crassulacées, Rhamnées et Sambucées, Henri LEcouTE. Hugo de Vries. -— Die PlanzenundThiere in den dunklen Raumen der Rotterdamer wasserleitung. (Les Plantes et les animaux dans les espaces obscurs des conduites d’eau de Rotterdam). Bericht über die biologis- chen Untersuchungen de Crenothrix-Commission zu Rot- terdam vom Jahre 1887, lena 1890, La ville de Rotterdam utilise les eaux de la Meuse après les avoir purifiées par un repos et une filtration à travers des couches de sable. Depuis l'établissement des travaux de filtration en 1874 jusqu’en 1887, cette eau, ainsi purifiée, servait à tous les besoins de la ville; lorsqu’au printemps de 1887, les conduites d’eau furent envahies par une algue de la famille des Bactériacées, le Cvenothrixæ Kuhniana ou bactérie ferrugineuse qui communiqua aux eaux une couleur de rouille, L'in- vasion du Crenothrix n’éfait pas un fait nouveau, on l'avait déjà constatée dans les conduites d’eau des villes de Berlin, de Hambourg, et M. Giard l'a signalée à Lille. A Rotterdam, cette invasion coïncida avec l'extension des bassins deréception et de filtration qui devaient décupler la quantité d’eau pure livrée à la ville. Le Crenothrix à déjà été étudié par M. $S. Winogradsky !; il est formé de filaments très tenus invisibles à l'œil nu et formant, en masse, des houppes brunes, dont les plus volumi- neuses atteignent un centimètre de longueur. Les cellules qui composent les filaments sont réunies par une gaine, d'abord très mince, mais cette gaine s’é- paissit peu à peu et prend une couleur brune par suite de la précipitation d'oxyde de fer dans sa masse; cette circonstance explique le nom de bactérie ferrugineuse donnée à cette plante. On la nomme aussi la peste des conduites d'eau, car elle rend en effet, par sa présence, les eaux impropres aux usages domestiques et son apparition prend les proportions d’une véritable cala- mité. Une commission fut nommée pour étudier les causes de cette invasion ef les moyens d’y remédier ; elle s’adjoignit M. Hugo de Vries, professeur à lUni- versité d'Amsterdam. 1 S, Winogradsky Ucber Eisenbacterien Bot. Zeit. 1888. 194 BIBLIOGRAPHIE, — ANALYSES ET INDEX C'est dans le travail publié par ce savant que nous puisons les indications suivantes, L'examen de la terre située entre les bassins de fil- tration montre que le Crenothrix n’y végète pas : le sol n’est donc pas à incriminer dans cette circonstance, Par contre, l’eau des bassins est très impure et contient une végétation et une faune variées, parmi lesquelles le Crenothix est abondant. Des bassins ouverts où elle se dépouille de ses sédiments, l’eau arrive à la pompe élévatoire en circulant dans des conduits fermés, obscurs, où la végétation des organismes verts est sup primée, mais la faune est encore richement représentée par des Mollusques, des Crustacés, des Bryozoaires, des Polypes hyraires, des Eponges, et la flore par des Diatomées, des Desmidiées, des Bactéries, ete, Ces êtres forment un revêtement plus ou moins épais sur les parois des canaux et abritent des Crustacés, des Infu- soires, etc. Cependant malgré ses impuretés, l'eau qui sort des bassins de filtration était restée pure pendant long- temps (de 1874 à 1887). M. Hugo de Vries rappelle à ce propos le travail de M. Piefke ! sur le rôle des Bactéries dans la purification des eaux. Dans les bassins de filtration, il se développe, en effet, à la surface du sable, des Bactéries agrégées sous l'aspect de zooglea gélatineuses; la masse de gelée qu'elles constituent pénètre peu à peu et très lente- ment dans le sable et recouvrant les grains de quartz d’un enduit visqueux, joue un rôle très important dans Ja filtration en retenant tous les organismes que l’eau renferme. Quand cette couche de Bactéries gélatineuses manque, la filtration est incomplète et l’eau qui sort du filtre renferme encore beaucoup d’impuretés. De temps en temps on est obligé de nettoyer les filtres en enlevant une partie du sable, la couche des Bacté- ries, qui exige un certain temps pour sa reconstitution, est alors très mince, et la filtration est incomplète; aussi à ce moment fait-on circuler l’eau très lentement. Mais quelque précaution que l’on prenne, chaque net- toyage du filtre amène un certain nombre de spores dans le sable pur du filtre, dépouillé de Bactéries géla- tineuses; ces spores sont entraînées par un courant plus rapide et l’eau est ainsi contaminée. Toutes les causes qui déchirent le voile gélatineux de la partie supérieure du filtre auront le même résultat; telles sont notamment la formation de bulles d’air introduites à chaque nettoyage et qui remontent à la surface au moment du remplissage du filtre; l’affouil- lement du sable par les vers, les anguilles, ete. Mais si ces dernières circonstances peuvent amener, en pelite quäntité d’ailleurs, les spores de Crenothrix dans l’eau des conduites de la ville, les matières nutri- tives font défaut et l’Algue ne se multiplie pas. C’est ce que démontre nettement le fait constaté plus haut, que l’eau se soit maintenue pure pendant plusieurs années à Rotterdam, avant l'établissement de nouveaux travaux. C’est dans les travaux neufs que devait être cherchée la cause de l'invasion. La commission a constaté en effet que les nouveaux bassins de filtration, établis sur un sol meuble, se sont crevassés et par les crevasses l’eau impure à pénétré dans les conduites d’eau en les contaminant, En effet, non seulement le Crenothrix étaitabondant, mais de petits crustacés Asellus aquaticus, Gammarus Puler accompagnaient l’Algue en proportion considérable. D'autre part la Commission démontra que le bois employé dans la construction des conduites d’eau se décomposait lentement, les produits de décom- position servant à la nourriture des Crustacés et de l’Algue et se mélangeant aux détritus de ces êtres ont souillé l’eau dans toute la ville, 1 C. Prerke. Die Principien der Reinwassergewinnung ver- mittelst Sandfiltration Berlin 1887, und Aphorismen über Wasserversorgung. Zeitschrift. f. Hygiène von Koch und Flügge, 1889, La réfection des travaux, la suppression du bois dans les conduites d’eau s’imposait dès lors, et la com- mission, d’après ses observations à pu affirmer que la pureté des eaux n'aurait plus rien à craindre après l'achèvement des travaux qu’elle proposait. L. Max, Ray Lankester (EE). — The advancement of Science, occasional Essaysand Adresses, (13 fr.) London, Macmillan et C°, Bedford Street 29, Covent Garden, Londres, 1890. Sous ce titre l’auteur a réuni en un volume un cer- {ain nombre de conférences et d'articles de revues. Quelques-uns de ces articles publiés il y a plus de 10 années n’ont guère plus qu’un intérêt historique, tels : l’article « Parthenogenesis » ef celui qui a pour titre « A theory of Heredity »; le premier parut en 1872 à propos d’un mémoire de Siebold sur la Parthénoge- nèse des arthropodes, le second en {876 à propos d'une brochure de Hæckel « Perigenesis der Plastidule », D’autres questions traitées il y a quelques années éga- lement sont mises au courant de la science au moyen de notes additionnelles; par là ce livre acquiert un vif intérêt en ce qu'il montre succinctement les progrès réalisés en un temps relativement court. On peut citer particulièrement sous ce rapport les chapitres intitulés « Pasteur and Hydrophobia » et « The international Fisheries exhibition ». C’est dans cette dernière confé- rence que M. Ray Lankester, en 1883, fil voir l’utilité pour l'Angleterre de fonder des laboratoires maritimes sem- blables à ceux de France et au laboratoire de Naples. Il existait rien de pareil à cette époque en Angleterre et l’auteur nous fait connaître dans un appendice l’heureuse suite donnée à son idée, Une association dite « Marine biological Association ofthe united King- dom » fut créee et le professeur Huxley en fut nommé président. La compagnie des marchands de poisson (Fishmongers company), les principales compagnies de Londres (merciers, drapiers, orfèvres, épiciers), les universités d'Oxford et de Cambridge, l'Association britannique pour l'avancement des sciences, les pou- voirs publics enfin, apportèrent leur concours à l’œuvre nouvelle et bientôt fut créé le laboratoire de Plymouth. L'outillage de ce laboratoire ne laisse rien à désirer et il a été publié déjà quatre fascicules d’un journal consacré aux travaux du laboratoire et aux rapports du conseil de l’association. Nous voyons là un des effets de Flinitiative privée si puissante en Angleterre, mais qui, au dire de l’auteur, s'exerce plus souvent en faveur des questions purement mercantiles qu'en faveur des questions de science. D'ailleurs ce n’est pas seulement au public anglais qu'il s’en prend. Dans un chapitre intitulé «Biology and the State » M. Ray Lankester compare dans les diffé- rents pays la part prise par les gouvernements au pro- grès des sciences. Il remarque qu’en Angleterre, plus peut-être que partout ailleurs, les particuliers favorisés de la fortune se vouent aux investigations scientifiques, mais que le gouvernement ne fait rien ou à peu près même pour les «sciences susceptibles d'applications directes dans les services publics. À propos des institu- tions scientifiques soutenues en France par le Gouverne- ment, il citetout particulièrement le Collège de France. Il voudrait voir une semblable institution à Londres et il estime que ce serait un grand pas fait pour combler le vide dont souffre la science anglaise, Il fait remar- quer qu'en Angleterre pour %5 millions d'habitants il n'y à que quatre universités dotées et pourvues de chaires par le gouvernement, savoir : Oxford, Cam- bridge, Durham et Victoria (Owens’ College), Dans un appendice il rappelle toutefois la part prise plus récemment parles pouvoirs publics qui ont fait les frais de l'expédition du Challenger et des publications rela- tives aux découvertes réalisées dans cette mémorable campagne. Citons encore parmi les plus intéressants chapitres de ce livre, celui qui a pour titre « Degeneration, a BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX chapter in Darwinism ». L'auteur établit que la mise en jeu des forces connues sous le nom de « Sélection naturelle » peut aboutir à trois résultats : 4° Le statu quo (balance). 20 L'accroissement de complexité de structure (éla- boration), 3% La simplification de structure (dégénération). On ne s’est pas suffisamment préoccupé de ce dernier cas, bien que, suivant M. Ray Lankester, il soit très utile à considérer et permette d’élucider nombre de questions douteuses. La « dégénération » peut être définie : un changement graduel de la structure dans lequel l’orga- nisme s'adapte à des conditions de vie moins variées et moins complexes, tandis que l’ « élaboration » est un changement graduel de structure dans lequel l'orga- nisme s'adapte à des conditions d'existence plus variées et plus complexes. L'élaboration d’un organe peut être l'accompagnement nécessaire de la dégénération de tous les autres; en fait c’est généralement le cas; et c’est seulement lorsque le résultat total de l’élabora- tion de quelques organes et de la dégénération des autres est tel qu’il laisse l'animal dans une condition inférieure à celle de la forme ancestrale à laquelle on le compare, que l’on dit de cet animal qu'il est en état de dégénération. — L'auteur cite un certain nombre d'exemples ef montre qu'il existe quatre causes prinei- pales de dégénération savoir : 1° le parasitisme; > la lixité ou immobilité; 3° le mode de nutrition; 4° l’ex- cessive réduction de taille; chacune de ces causes pou- vant intervenir séparément ou agir en commun avec une ou plusieurs des autres, — Une note additionnelle traite de ce qui peut être considéré comme dégénéra- tion dans le langage. : Somme toute, cet ouvrage, bien qu’il aborde des ques- tions très diverses et qui n’ont aucun lieu commun, offre un réel attrait que vient augmenter une édition soignée où les figures nécessaires à la clarté du texte sont données en quantité suffisante. D' H, BEAURECARD. Albert LE, Prince de Monaco. — Zur Erforschung der Meere und ihrer Bewohner — Gesammelte Schrif- ten, aus dem Franzüsischen von D' Euiz VON MARENZELLER, 1 vol. in-8 de xvi-206 pages avec 39 fig. dans le texte. Vienne Alfred Hülder, 1891, Le public scientifique de langue allemande manifeste depuis plusieurs années un grand intérêt pour les études relatives à l'exploration des mers. Sans parler du traité classique d'Océanographie d'Altmayer, auquel ont collaboré quelques-uns des savants les plus distin- gués de l'Autriche, de celui de Bognslawski, Krümmel et Züppritz, etc., il suffira de rappeler que ce sont les Allemands et les Autrichiens qui ont fait en 1889 et en 1890 les deux campagnes de recherches maritimes les plus récentes. (Voyage du National, plus connu sous le nom d'expédition du Plankton, dirigé par le P' Hen- sen; voyage de la Pola, effectué sous les auspices de l’Académie des Sciences de Vienne.) — C'est à ce mou- vement d'opinion que répond le présent ouvrage et l’on peut dire que le DrE, von Marenzeller, conservateur au Musée zoologique de Vienne, a été bien inspiré en traduisant et en groupant en un volume la plupart des notices publiées par le Prince de Monaco à l’occasion des voyages du yacht l'Hirondelle. Sa traduction, extrème- ment fidèle, se recommande en outre par une grande clarté et un respect absolu de la pensée de l’auteur. On sent qu'elle est l’œuvre d’un spécialiste convaincu, pour lequel les divers sujets traités par le Prince offraient un réel intérêt. — Le D' Von Marenzeller a été en effet l’un des principaux organisateurs de l'expédition de la Pola, à laquelle il a du reste pris part comme z0ologiste. Son livre sera lu avec plaisir par toutes les personnes qui suivent quelque peu le mouvement scientifique el beaucoup garderont volontiers, réunis en volume, les travaux du prince de Monaco, plus ou moins épars dans les publications francaises telles que les comptes rendus de l’Académie des Sciences, la Revue des Deux- 195 Mondes, le Bulletin de la Société Zoologique de France, les comptes rendus de divers congrès scientifiques, etc. Négligeant avec raison l'ordre chronologique, le tra- ducteur a classé les sujets en cinq catégories : Naviga- tion, Océanographie, Récits de Voyages, Biologie, Technique, comprenant ensemble 16 articles, On remar: quera entre autres une Lettre à l’amüral Cloué sur l'usage de l'huile pour calmer la mer, une note Sur l'alimentation des naufragés en pleine mer, divers documents relatifs à l'étude du Gulf-Stream et l'intéressant mémoire où le Prince a résumé les progrès accomplis sur son yacht dans l'outillage spécial destiné aux recherches z00lo- giques en eau profonde. Une courte préface du traducteur sert d'introduction au volume que précède également un Index bibliogra- phique comprenant toutes les publications spéciales faites par un grand nombre de savants d’après les ma- tériaux ou les observations recueillis à bord de l’Hiron- delle. Gette liste, déjà très longue, bien qu’elle n’ait été commencée qu'en 1885, n’est pourtant plus complète, car l’étude des collections zoologiques en particulier se poursuit avec beaucoup d'activité. Il convient d'ajouter que le D'E. von Marenzeller a eu l’heureuse idée d'évoquer en tête de l’ouvrage le Souvenir de l'Hirondelle (Dem Andenken der Hirondelle). La carrière scientifique de cette goélette semble en effet terminéé; un nouveau yacht destiné à la rem- placer, de dimensions très supérieures et spécialement aménagé pour le travail à la mer, s'achève en ce mo- ment mème, Voici un mois à peine qu'a eu lieu à Londres (le 12 février 1891), le lancement de ce beau navire, Il a recu le nom de Princesse Alice. Sous ce gracieux et sympathique patronage, nul doute que longtemps encore, le Prince de Monaco ne tienne à honneur de servir la science, — C'est l'espoir qu'ex- prime le D' E, von Marenzeller, lequel est certainement, dans ce cas, l'interprète des savants de fous les pays. Jules DE GUERNE. Sergueyeff (S.).— Le sommeil et le système ner- veux. Physiologie de la veille et du sommeil. 2 vol. in-8° (20 fr.), Paris, F. Alcan, 1890. En dépit du titre, on ne trouvera dans ce volumineux ouvrage rien qui puisse constituer la physiologie du sommeil. Après avoir fait table rase des quelques no- tions, bien incomplètes, sans doute, que nous possé- dions sur cel élat, l’auteur édifie de toute pièce par une méthode à priori la théorie complète d’une fonction hypothétique dont les rapports avec le sommeil sont difficiles à saisir. Cette fonction, en deux mots, c’est la captation du dynamisme ambiant par les ganglions sympathiques : la veille est cette captation même, le sommeil, le rejet du dynamisme capté pendant ja veille. Il serait inutile de discuter ici une telle théorie obte- nue par une telle méthode, mais le raisonnement fon- damental du livre est intéressant et vaut la peine qu’on en donne une idée. Toute fonction indispensable, dit M. Sergueyeff, est une fonction de nutrition ; or le sommeil est indispen- sable, donc c’est une fonction de nutrition. Mais un acte de nutrition consiste nécessairement dans l’assimila- tion, puis le rejet de quelque chose; done, la veille et le sommeil, deux termes inséparablement liés, sont un l'absorption, l'autre le rejet de quelque chose. IL ne nous reste plus qu'à « découvrir ces trois choses : 1° l'aliment ou la substance, objet de la veille et du sommeil; > l'organe plus ou moins spécial afférent à ce groupe fonctionnel; 3° enfin, le mécanisme qui sub- vient à la réalisation nécessaire des deux phases al- ternantes. » (Tome premier, p. 14.) Cet aliment, cet organe et ce mécanisme, M. Ser- gueyeff va les découvrir sans peine. Ce n’est pas sans raison qu'il a donné comme épigraphe à son livre cette phrase de Bernard : « Ge sont toujours les faits encore inexpliqués qui recèlent en eux les germes des vérités scientifiques de Pavenir, » Il entend cette maxime 196 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX d’une façon toute spéciale. Voici par exemple commen il trouve l'organe cherché, « Que nous faut-il? il nous faut un organe nécessaire, végétatif, et presque totale- ment nerveux, mais dont en revanche la fonction prin- cipale demeurerait encore à tous égards indéterminée, Or un organe existe qui satisfait à ces conditions, et, comme nous avons vu, c'est précisément l'appareil sympathique où ganglionnaire. Les ganglions seraient donc des organes assimilateurs d’une forme éthérée, sthénique où dynamique, et cette œuvre s’exercerail par deux phases alternantes d'emprunt ou de rejet qui sont la veille et le sommeil. Je cherche un motif vala- ble pour leur refuser à priori une semblable destina- üon fonctionnelle, et en vérité je n’en découvre pas. » (Tome premier, p, 26.) 1700 pages sont employées à démontrer cette théorie, le procédé restant toujours purement géométrique ; une masse énorme de travaux physiologiques sont cités, mais l’auteur en prend les conclusions comme des théorè- mes, ou plutôt comme des vérités révélées dont il fait des axiomes, car il semble se préoccuper fort peu de la démonstration, C'est la lettre du texte qui lui sert de base; quelque fois même ce sont des métaphores qu'il élève au rang d’axiomes. L. LapPicque, 4° Sciences médicales. Debierre (Ch.), Professeur d'anatomie à la Faculté de Lille.— Traité élémentaire d'anatomie del Homme, à l'usage des médecins et des étudiants en médecine. 2 vol. in-8° (40 fr.), Alcan, 108, boulevard Saint-Germain. Paris, 1890, Le traité d'anatomie que vient de nous offrir M. De” bierre diffère de la plupart de ceux qui l'ont précédé, par l'esprit philosophique qui l’anime. Au lieu de se borner à donner bout à bout une série de descriptions arides et sèches, M. Debierre a cherché à éclairer les diverses questions qu’il traitait par le rapprochement méthodique des données de l'anatomie comparée et de l’embryologie, Très au courant de la science moderne, VPauteur résume ou, fout au moins, mentionne la plu- part des travaux publiés dans ces dernières années. Les descriptions pures sont en gros caractères, les notions d'anatomie générale et d'évolution en texte fin. Grâce à ces dispositions matérielles, ces diverses ma- tières ont pu être condensées en deux volumes, illus- trés de nombreux dessins et de figures schématiques. Le premier volume, qui contient les os, les articula- tions, les muscles, les vaisseaux et les nerfs périphéri- ques, constitue un manuel de l’amphithéâtre, qui s'adresse surtout aux étudiants de première année de dissection; le deuxième, qui traite du sysième nerveux central, des organes des sens, de la splanchnologie et de l’embryologie générale, correspond au programme de la deuxième année de dissection. Bien qu’écrit sur- tout en vue de public médical, ce traité mérite d’être consulté par tous ceux qui s'intéressent à l’anatomie. D: Henri HARTMANN. Farabeuf (L.-H.), Professeur à la Faculté de médecine et Varnier (H.). — Jntroduction à l’etude chi- mique et à la pratique des accouchements. — Préface de M. le Professeur Pinarp, À vol. gr. jésus (15 fr.), Steinheil, Paris, 1891. Malgré le caractère un peu spécial de cet ouvrage, nous croyons devoir l’annoncer dans cette Revue, à cause de son importance et du grand intérêt qu’il pré- sente. D'une exactitude absolue, illustré de 362 figures dues à l'habile crayon du Professeur Farabeuf, ce traité est destiné à rendre aux médecins les plusgrands services. Tout y est d'une précision mathématique étant donné un fœtus placé dans une certaine situation et un bassin présentant des diamètres invariables, il faut de toute nécessité, pour que l'enfant sorte, qu'il évolue d’une certaine facon. Après avoir étudié très complètement le canal pelvigénital d’une part, les di- mensions et les positions du fœtus de l’autre, les au- teurs nous montrent la manière dont celui-ci évolue pour traverser celui-là, Ils nous enseignent ensuite la manière de se comporter pour rectifier les positions vicieuses et extraire les fœtus qui se présentent dans une mauvaise situation. Les dessins sont d’une netteté et d’une exactitude que l’on n’estguère habitué à rencon- trer. Ce livre parle aux yeux et permet de suivre sans le moindre effort les divers temps de l’actouchement normal ou artificiel. Aussi, lorsqu'on en a feuilleté lés pages, est-on immédiatement porté à dire avec le Pro- fesseur Pinard que les auteurs « nous ont donné un beau livre, scientifique et didactique, unique en son genre, et dont fous ceux, qui aiment l'obstétrique, leur seront profondément reconnaissants. » \ Dr Henri HARTMANN. 3, Masselon. — Examen fonctionnel de l'œil (8 fr.). O. Doin, 8, place de l'Odéon, Paris, 1890. Le manuel de M. Masselon répond à une nécessité ; l'étudiant et le médecin y trouveront condensés tous les renseignements désirables sur le diagnostic et la cor- rection des ametropies de l’œil., On peut même le con- seiller à ceux qui ont l'intention de se spécialiser dans les maladies des yeux, ils y trouveront exposés d’une facon très pratique beaucoup de renseignements qu’ils chercheraient avec peine ailleurs. Après un bon chapitre sur l’acuité visuelle M. Masse- lon expose le système de numérotage des verres cor- recteurs. Ici je ferai une observation; ce n’est pas une critique, c'est une question d’appréciation.Une personne habituée aux constructions de l’optique et à l'étude de l'œil lit ce second chapitre avec la plus grande facilité; peut-être n’en sera-t-il pas de même pour tout le monde. Cette difficulté aurait été évitée si en quelques pages, quatre ou cinq, M. Masselon avait rappelé les principaux résultats de l'étude de la réfraction a tra- vers les lentilles et les dioptres. Dans le chapitre suivant, de la réfraction de l'œil, j'aurais mieux aimé, au lieu d'étudier successivement l'œil emmetrope, hypermetrope et myope, traiter les trois cas parallèlement ; ou bien les faire précéder d’une petite étude d'ensemble, lacomparaison me semblerait plus facile. A part ce détail, il n’y a que des éloges à donner à la facon dont le sujet est traité. Excellent chapitre sur le choix des lunettes pour les opérés de cataracte. ; L'astigmatisme aussi-est bien exposé; ici encore je regrette une petite étude préliminaire des lentilles cylin- driques. 1 La suite, perception des couleurs, champ visuel, mouvements des yeux, est très facile à lire, très claire, très pratique. Enfin nous arrivons à un dernier chapitre des plus importants. la Kératoscopie. \ La première partie qui traite des images fournies par la cornée, des vices de courbure, en particulier de l’as- tigmatisme cornéen et du Keratocône est extrêmement bonne, La seconde partie où l’auteur expose la méthode de l'ombre pupillaire imaginée par M. Cuignet, pourrait être rendue un peu plus claire. Je erois aussi, contrai- rement à M. Masselon que l’on peut donner de ce phénomène une théorie à l'abri de toute objection; c’est celle que je donne dans mes conférences à la Faculté de Médecine, Enfin pourquoi prendre l’oph- {almoscope concave qui peut donner lieu à des er- reurs lorsqu'on les évite toujours à l’aide de l’ophtal- moscope plan. En somme quelques indications des résultats obte- nus dans l'étude de l'optique géométrique, mettraient le manuel de M. Masselon à la portée de tout médecin. Celui qui possède ces notions ou qui veut se donner la peine de les chercher dans un traité de physique, le lira avec le plus grand profit. Docteur G, Weiss, de. DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 9 mars 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Schœnñics : Sur les équations de deux surfaces minima pério- diques, possédant la symétrie de l’octaèdre. — M. L. Raffy : Sur les spirales harmoniques. — M. Charlois : Observation de la nouvelle planète (308 découverte à l'observatoire de Nice le 5 mars 1891. — M. B.Baiïllaudet E. Casserat : Observations de la planète Millosevich (1891 ,1*mars) faites à l'observatoire de Toulouse(équatorial Brunner).—M. Andoyer : Obser- vation de la planète Charlois (1891, 5 mars) au grand télescope du même observatiore, — Mlle Klumpke : Observation de la planète Millosevich faite à l’observa- toire de Paris (équatorial de la tour de l'Est). — M.Vé- nukoff annonce la publication par les géodésiens russes du travail dont ils étaient chargés relativement à la mesure du 52° parallèle en Europe; il indique les conditions dans lesquelles à été exécuté ce travail; parmi les résultats, il signale ce fait que la valeur moyenne du degré de longitude n’est pas la même que pour la portion du parallèle qui à été mesuré en An- gleterre; des différences s’observent même entre les différentes portions de l’arc russe qui a une longueur de 39; ce parallèle n’est pas un cercle, mais une courbe irrégulière voisine du cercle. — M, A. de Coligny expose les résultats obfenus pendant l’année 1890 avec l'appareil hydraulique de l’écluse de l’Auboïis; il montre en quoi ces expériences doivent faire modifier la théorie. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. Carvallo démontre que les termes de dispersion autres que les termes de Briot n’introduisent non plus aucune perturbation dans les lois de la double réfraction monochromatique tirées du système de M. Sarrau. — M. C. Décharme a obtenu des spectres d’aimantation transversale superposée à une aimantation longitudinale dans un même barreau d'acier. — M. G. Rousseau à étudié la série de man- ganites hydratés qui se forment successivement à partir du manganate de soude chauffé à des températures crois- santes; entre 1200 et 1300 degrés, on retombe sur le produit primitivement formé à 300° — M. E. Amat a étudié la vitesse avec laquelle le pyrophosphite de soude en solution se transforme en phosphite de soude et les variations de vitesse de cette transformation sous Fin- fluence de conditions diverses, — M. A. Besson à obtenu le silicibromoforme pur distillant sans décom- position dans un gaz inerte à 109°-111°, — M. de For- crand donne les valeurs de la chaleur de formation et de dissolution des dérivés alcalins de lPérythrite qu'il a étudiés dans sa précédente communication, — M. R. Varet a préparé diverses combinaisons ammo- niacales du cyanure de mercure avec des sels halogénés, — M. A. Villiers a retiré, comme produit accessoire, de la fermentation par le Bacillus amylobacter de la fécule de pomme de terre donnant de la dextrine comme produit principal, un hydrate de carbone eris- tallisé, qui présente la composition centésimale et diverses propriétés des saccharines, mais s’en distingue par d’autres propriétés ; il propose pour ce corps le nom de cellulosine. 3° SCIENCE“ NATURELLES. — M. Catrin a étudié au point de vue de l'anatomie pathologique les lésions de la peau dans la rougeole. — M. L. Guignard a reconnu l'existence des sphères attractives dans les cellules des végétaux; il a même pu pousser l'étude de ces corps plus loin qu’on ne l'avait fait dans les cellules ani- males; les sphères attractives avec leur centrosome existeraient toujours au nombre de deux auprès de chaque noyau, à l’état de repos ou non; leur entrée en jeu précède la dissolution de la membrane nucléaire et c’est de la disposition qu'elles affectent que dépend l'orientation des pôles du fuseau; les deux sphères attractives normales préexistent dans l’oosphère à la pénétration du noyau mâle, — M. J. Vesque montre par la monographie du genre Clusia, comment les ca- ractères anatomiques des tissus végétaux peuvent être appliqués à la classification. — En comparant la craie à Baculites du Cotentin, la craie blanche de Meudon, et le tuffeau de Maestricht, M. A. de Grossouvre con- clut que ces transformations sont contemporaines ; leurs facies différents s'expliquent par la situation des dépôts plus ou moins rapprochée des rivages de la mer crétacée pendant le mouvement d'émersion qui à terminé cette période. — M. Wanzel en signalant un crâne d'ours des cavernes, qui porte la trace d’une blessure, indique les raisons qui lui font admettre que cette blessure à été faite par une hache de silex. M. G. Sire est élû correspondant pour la section de mécanique. Mémoires présentés. — Mme A, M. Albert adresse un mémoire sur la construction de tables numériques, destinées à fournir les résultats de divers calculs d’a- rithmétique, — M. Fr. Witz adresse une note intitulée : Attraction, force centrifuge, par l’électrodynamique. — M. G. Barbey adresse une note intitulée : Deux nouveaux dérivés de la résorcine, la camphorésorcine et l’eucalyptorésorcine. — M. Willot adresse une note ntitulée : Maladie de la betterave, destruction de l’He- erodera Schachtii. Séance du 16 mars 1891, 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. Autonne : Sur une application des groupes de M. Lie. — MM. Lœvy et Puiseux ont commencé des observations dans le but de déterminer la constante de l’aberration au moyen de l’appareil imaginé par M. Lœvy, appareil dont ils ont fait l'étude théorique dans plusieurs com- munications antérieures, La valeur de la constante de laberration avait besoin d'être fixée, car depuis la détermination de Struve en 1843, les astronomes qui ont entrepris des recherches de vérification ont abouti à des résultats disordants dont l'écart est bien plus con- sidérable que l’approximation théoriquement obtenue par chaque observateur, La question se pose donc de savoir s’il existe des causes d'erreurs systématiques, dépendant par exemple d’une théorie imparfaite du mouvement de la terre autour de son centre de gra- vité. Les résultats fournis par l'appareil de M. Lævy sont indépendants de cescauses d’erreur. Les premières observations effectuées au moyen de cet appareil con- duisent à un chiffre très voisin de celui de Struve, Elles ont donné accessoirement la vérification de l'hy- pothèse de M. Fizeau, que les rayons réfléchis se com- portent au point de vue de l’aberration comme les rayons directs. 20 SGIENGES PHYSIQUES. — M. A. Berget décrit un procédé photographique pour enregistrer les oscilla- tions du pendule ; il propose d'utiliser ces graphiques pour comparer l'intensité de la pesanteur aux divers points du globe. — M. H. Poincaré étudie la fa- con dont se comportent les équations de l’hydrosta- tique, lorsque, pour faire la théorie d’un fluide diélec- trique placé dans un ehamp électrique, on introduit dans ces équations des termes complémentaires qui traduisent l’action de ce champ d’après la théorie de M. Von Helmholtz. — M. M. Brillouin examine les hypothèses principales que l’on peut faire sur la cons- 198 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES litution de la molécule gazeuse et ses rapports avec l’éther, pour expliquer les périodes des raies du spec- tre des gaz et des vapeurs incandescents. — M. H. Bec- querel a étudié comparativement lespectre de la phos- phorescence excitée par la chaleur et celui de là phos- phorescence excitée par la lumière, dans divers corps qui présentent ces deux sortes de phosphorescences réunies ; il tire de cette étude diverses conclusions re- latives à la nature de la phosphorescence., — MM. L. Cailletet et E. Collardeau indiquent que la détermi- nation de la pression et de la température critique de Veau, impossible à obtenir par l'examen du ménisque, les tubes de verre étant attaqués et dépolis avant la température critique, peut être obtenue dans un tube métallique muni d'un manomètre ; par la comparaison des courbes de pression données par diverses expé- riences ; la courbe en effet est constante jusqu’au point critique, à partir de ce pointelle varie dans chaque cas suivant la quantité de liquide employée. — MM. Ph. Barbier et L. Roux complètent leurs recherches sur la dispersion dans les composés organiques en étudiant à ce point de vue les éthers proprement dits. — M.F. Osmond a cherché à éclairer le mécanisme de la car- buration du fer, en examinant les réactions qui se pro- duisent entre le fer et le diamant dans une atmos- phère d'hydrogène pur ; la combinaison s'effectue à la température de fusion de la fonte, avec transformation moléculaire préalable du diamant. — M. L. Vignon a continué ses recherches sur l'influence de l'énergie des fonctions chimiques des corps dans les phénomènes de teintures par l'étude des laques; l'acide stannique, qui est un acide fort, forme avec la safranine une laque vivement colorée ; le phénomène n'a pas lieu avec l'acide métastannique. — M. Œchsner de Coninck a terminé l’étude chimique de la ptomaïne C!0H15Az en déterminant la composition de différents sels de cette base. — M. Ch. Blarey donne une formule empirique pour calculer la teneur en alcool des spiritueux du com- merce en fonction de la densité et du poids de l'extrait. 3° SCIENCES NATURELLES. MM. J. Héricourt el Charles Richet ont constaté que les matières solubles des cultures de tuberculose aviaire précipitables par l'alcool sont plus toxiques pour les lapins tuberculeux que pour les lapins normaux. — M. A.F, Marionindi- que la facon dont les diverses espèces de poissons nourris en captivité au laboratoire d'Endoume ont sup- porté les froids de l'hiver ; beaucoup sont morts: dans les aquariums, ces animaux étaient soumis à des tem- pératures plus rigoureuses qu'ils ne l’eussent été en mer libre; au contraire les poissons des lagunes sont dans des conditions assez analogues. M. Marion a pu constater dans l’étang de Bern la disparition totale de plusieurs espèces. — M, A. Gaudry signale quelques nouvelles trouvailles de fossiles dans le conglomérat de Gourbesuille, qui confirment les conclusions de la note publiée récemment par M. de Lapparent sur l’âge de ce conglomérat. ; Mémoires présentés : M. P. Berger soumet au juge- ment de l’Académie une note relative à une « Machine fondée sur le même principe que la presse hydrauli- que ». — M. G. Barbier adresse une note sur les «Com- binaisons des phénols avec la diméthyloxyquinizine ». — M.J. P. Metzler adresse un Mémoire ayant pour titre : « La Terre, sa formation et celle de ses êtres, » L. Laricour. É. : ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 24 février 1891. M. Galezowski a employé avec succès les badigeon- nages avec une solution d’apyonine (pyoktanine des Allemands) dans le traitement de l’épithélioma des paupières, des ulcères rongeants et des abcès de la cornée. — M. Ollivier cite un cas de méningite tuber- culeuse foudroyante chez une jeune fille de 20 ans, ayant fait usage de lait non bouilli provenant d’une vache tuberculeuse, — M. Nocard cite un cas de tu- berculose ganglionnaire provenant d’un jeune veau, dont la NE A magnifique, d’une excellente santé apparente, avait de nombreux tubercules dans les ma- melles, les poumons, les ganglions mésentériques, il en conclut à la nécessité de toujours faire bouillir le lait, la tuberculose étant compatible chez la vache avec le meilleur état de santé apparent, MM, de Brun (Beyrouth) et Trastour (Lyon) sont élus membres correspondants nationaux. Séance du 3 mars M. Ollivier, à propos de sa communication de la séance précédente, donne des renseignements complé- mentaires desquels il résulte que la malade dont il a parlé appartenait à un pensionnat de Chartres dans lequel, en quatre ans, il s’est développé douze cas de tuberculose. Bien que le docteur Lelong (de Chartres) n’y voit qu'une simple coïncidence, il est utile de si- gnaler que pendant un temps assez long une vache tu- berculeuse à fourni du lait à cet établissement. — M. Brouardel, au sujet de la vaccination obligatoire, répond à M. Le Fort, en s'appuyant sur les documents que lui-même a fournis. Se placant au point de vue de la liberté individuelle, il démontre que les mesures de désinfection, d'isolement, de déclarations obligatoires que M. Le Fort réclame comme lui-même, sont elles aussi, attentatoires à la liberté individuelle. Nous per- dons en France 10,000 varioleux par an, ce qui est une raison plus que suffisante pour imposer aux intérêts, ou mieux aux préjugés particuliers, de s’incliner de- vant l'intérêt général. — M. Le Fort demande, quelles que soient les mesures prises, que linnocuité absolue des vaccinations en temps d’épidémie y soit bien spé- ciliée. — M: Quenu expose un nouveau procédé de thoracoplastie. dans les cas de vieilles pleurésies avec fistule pleurale consistant en la résection, en arrière de la ligne axillaire et en avant, un peu en dehors de la ligne mamelonnaire, de deux centimètres d'un certain nombre de côtes, de facon à faire une sorte de plastron mobile, Guérison le quarantième jour. — M. Picot (de Bordeaux) lit un travail sur le traitement de la tuber- culose pulmonaire et de la pleurésie tuberculeuse par les injections hypodermiques d’une solution de gayacol et d'iodoforme dans l'huile d'olive et la vaseline : l’état général se relève, la toux, les expectorations et les ba- cilles diminuent, les cavernes peuvent mieux se des- sécher, Ce sont des résultats précieux, mais cependant on ne peut affirmer qu'il y a guérison absolue. Dr Ed, ne LAVARENNE. Séance du 10 mars 1891, Présentations d'ouvrages manuscrits et imprimés de M. Greuell : Rapport sur l'épidémie de rougeole qui a sévi pendant l'été de 1888 à Gérardmer (Vosges) et Note sur la revaccination des enfants des écoles du canton de Gérardmer âgés de dix ans et la revaccination du per- sonnel des usines en 1890, — M. Balestre : Cours d'hygiène pratique. — M. Ed. Pepper : de la malaria (contribution à l'étude des maladies infectieuses d’ori- gine cosmique), — M. Desnos : De l'æœdème rhuma- üsmal. — M. Gavoy : Traitement de la bronchite tuber- culeuse par les injections hypodermiques d’iodoforme, — M. E. Duval : Traité pratique et philosophique du pied-bot, — M. L.Crié: Note sur des Ruptures décha- faudages par l’altération du bois sous l'influence des champignons hymenomycètes, entre autres par les filaments mycéliens du Polyporus vaporarius. — MM. Lan- nelongue et Menard : Traité des affections congéni- tales, — M, Laborde : à propos d'une communication faite par M. le Pr Picot à la dernière séance, fait savoir à l'Académie que M. Pignol, chef de clinique à la Fa- culté, a commencé, il y a {rois mois, par appliquer aux tuberculeux le traitement par les injections d’un mélange d’eucalyptol, de gaïacol et d’iodoforme, dissous dans l'huile d'olive ou l'huile d'amandes douces stérilisées ; ce mélange lui a donné le plus rapidement des bons résultats, — Rapports : M. Mathias Duval : Sur des ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 499 mémoires de M. le D' Le Double (de Tours) concernant lusieurs anomalies musculaires.—M.J. Rochard :Sur e faible accroissement de la population en France, — M. F. Terrier rapporte une observation d’ablation de la vésicule bilaire pour combattre des accidents d’ic- tère à répétition avec coliques hépatiques, datant de sept années, Il décrit les phéomènes succédant à l’ablation de la vésicule, la production spontanée d’une fistule biliaire, et il en lire des indications au point de vue de la conduite à tenir dans des cas analogues. Séance du 17 mars 1891, Présentations d'ouvrages manuscrits et imprimés de MM. Baudin et Jeannot : Démographie de Besancon; M. Bretet: Eaux minérales; M. Leloïir : Lupus etlymphe de Koch ; M. Laborde : Revue mensuelle de l’Ecole d'Anthropologie. — Rapports : M. Bouchardat: Sur la vente des eaux minérales par les pharmaciens, et sur les demandes d’aulorisation pour des eaux minérales; M. Dujardin-Beaumetz : Sur un travail de M. le D' Maurel concernant la stéthométrie nor- male et l’hypohématose; M. A. Guérin : Sur une observation de résection du cancer du rectum commu- niquée par M. le D° Houzel, — M. Proust fait une lon- guëe communication sur le choléra de la mer Rouge en 1890; il en arrive aux conclusions suivantes : « 4° Le «choléra de Camäran a été importé par un navire « anglais venant de l'Inde ; 2° Le choléra du Hedjaz « semble avoir été importé par la voie maritime; 3° Le « pèlerinage de la Mecque est une menace constante « pour l’Europe; 4° Les mesures prescrites à l'égard « des pèlerins se rendant à la Mecque n'ont pas em- « pèché le choléra de s’y développer; il est done néces- « saire de perfectionner les moyens employés jusqu'ici; « »° Les mesures de prophylaxie preserites par le Con- « seil d'Alexandrie au moment du retour des pèlerins « ont empêché cette année le choléra de gagner « l'Egypte et l’Europe. Il y a done lieu non seulement « de maintenir ce Conseil, mais encore de lui donner « plus d'autorité etde le rendre réellementinternational. « Il y a lieu également d'augmenter le nombre des « lazarets de la mer Rouge et les moyens d’assainisse- « ment et de désinfection, » SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 14 mars 1891 M. Déjerine fait l'analyse d’un cas très pur d’aphasie sensorielle; il y avait surdité ef cécité verbales, dépen- dantes d’une lésion de l'écorce dans la région pariétale ; la circonvolution de Broca était intacte, — M, E. Gley présente un lapin dont la cornée est insensibilisée par la section intra-crânienne du trijumeau sans qu'il se soit développé de troubles trophiques. — MM. Cam- bemale et Brunelle ont étudié l’action physiolo- gique de la triméthylamine, — M. Pignol signale qu'il a obtenu de bons effets dans le traitement de la tuberculose pulmonaire par les injections sous-cutanées d’eucalyptol, de gaïacol et d'iodoforme dissous dans l'huile stérilisée ; il a eu plusieurs guérisons complètes par un traitement prolongé. — A propos de la note de MM. Hergounencq et Eraud, M. Morax rappelle ses recherches sur le pouvoir antiseptique des couleurs d’aniline. — M. L. Guignard : Sur l'existence des sphères attractives dans les cellules végétales (Voir C. R. de l’Académie des Sciences). — MM. Physalix et Contejean ont étudié physiologiquement l’innervation des glandes à venin de la Salamandre terrestre, — MM. Hanriotel Ch. Richet ont constaté que le nickel tetracarbonyle est toxique à la facon de l'oxyde de carbone. 1 Séance du 21 mars 1891. M. Netter rapporte un cas de surdité verbale pro- duite par le ramollissement de la première sphénoïdale gauche; il y avait aphasie malgré l'intégrité de la cir- convolution de Broca. — M. Déjerine rapporte un cas de cécité verbale ayant entrainé l'agraphie; à propos de ce cas, il fait l'étude de l’agraphie, et conclut qu'il n'existe pas de centre spécial dans l'écorce pour l’écri- ture; l'agraphie résulte de la perte des images visuelles des mots. — MM. Rodet ct Courmont ont constaté l'existence dans les cultures du Sfaphylococeus pyogenes d’une substance soluble favorisant l'infection ultérieure par le microbe; la modification de l'organisme pro- duite par l'injection de cette substance peut per- sister au delà de 90 jours. — MM. Gilbert et Girade ont trouvé dans un cas de cholecystite suppurative le pneumocoque et le staphylocoque blanc; ces deux microbes se retrouvaient dans le duodénum, à l’exclu- sion de foutes les espèces habituelles, — M. Couvreur conclut de ses recherches sur la glycosurie consécutive à la section des deux pneumogastriques du cou qu’elle doit être rattachée au phénomène de Ja glycémie asphyxique; en effet, chez les animaux qui survivent à la section des vagues, elle disparait avec les troubles respiratoires consécutifs à l'opération. — M. Patin signale quelques erreurs possibles dans la recherche de l’albumine dans l'urine au moyen de la chaleur et de l'acide acétique. — M. Langlois a constaté, en me- surant la capacité respiratoire du sang, au moyen de l'appareil de M. Schützenberger, que le nickel tétroxy- carbonyle fait baisser cette capacité respiratoire, et peut même la réduire à zéro. — MM. Cadéac et Meu- nier ont étudié la toxicité de l’eau d'arquebuse: ils rap- portent tette toxicité principalement aux essences que renferme cette liqueur. — M, Luys fait une communi- cation sur le fonctionnement isolé des hémisphères dans l’état hypnotique., — M. Abelons a constaté que la plupart des antiseptiques n’entravent nullement l’action saccharifiante de la diastase pancréatique. M. Kalt fait une communication sur les lésions tro- phiques de la cornée sous la dépendance d’altérations légères du trijumeau; la disparition de la sensibi- lité et Papparition des troubles trophiques ne sont pas nécessairement liées. L. Lapicque. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 20 mars 1891, Le Président donne lecture d’une lettre où M, Weiss indique sommairement comment il est arrivé à l’aide de deux appareils différents à étudier les ondes périodi- ques produites par une machine à courants alternatifs. — A cepropos, M. Paul Janet annonce qu'il alui-même en- trepris une série d'expériences sur la forme descourants produits par une dynamo Gramme à courants alternatifs à l’aide d’une méthode dérivée de la méthode strohos- copique. Au lieu de procéder aux mesures électriques, comme l’a fait M. Joubert par exemple, à une même phase de la période, ilétablit les contacts en des points dont la position varie d’une facon continue ; l’enregis- trement photographique permettra d'obtenir directe- ment la forme de la courbe sans qu'il soit besoin de recourir à une construction graphique. — M. L. Favé présente un marégraphe plongeur. L'importance de la détermination des hauteurs de la marée sur les rives et au large est considérable; la connaissance exacte du phénomène intéresse non seulement le géographe et l'astronome mais aussi le navigateur qui pourra, s’il possède de suffisantes données, régler sa route par des sondes lorsque le mauvais temps ne permettra pas l'observation des astres. Les appareils actuellement en usage sont de deux sortes, les uns permettent la lec- ture de la hauteur de l’eau au moyen d’échelles verti- cales divisées, les autres mesurent les variations de la pression sur le fond de la mer, d’où l’on peut déduire les variations de niveau. Ces divers types d'appareils ont été transformés en appareils enregistreurs, mais alors, leur disposition est telle qu'ils ne plongent plus entièrement dans l’eau et ne peuvent généralement être utilisés qu'à de faibles profondeurs et au voisinage des côtes. M. Favé a imaginé un marégraphe qui peut être complètement immergé et qui enregistre les varia- tions de pression; il est essentiellement constitué par 200 ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES une capsule manométrique dont l'organe sensible est une plaque de métal analogue aux plaques de Vidi des baromètres anéroïdes, les changements de courbure sont enregistrés sur un disque animé d’un mouvement de ro- tation, et repérés, une fois l’appareil sorti de l’eau, à l’aide d’un microscope et d'une vis micrométrique. Une disposition très simple permet d'employer l'appareil à des profondeurs considérablessans que sa sensibilité soit diminuée ; la capsule manométrique n'étant sensible qu'aux différences de pression entre son extérieur et son intérieur, on établira une communication de pres- sion entre l’intérieur et l'extérieur jusqu'au moment où un poids suspendu à une chaîne de longueur con- venable viendra à toucher le fond, et ne maintiendra plus ouvert le robinet permettant la communication, — M. Vieille fait une communication sur la compressibi- lité des fluides dans les phénomènes explosifs. Pourles gaz à grande densité et à température qui résultent de la décomposition des explosifs, la formule de Clausius se réduit à p — a étant le covolume, A le poids 1-a A? spécifique du mélange, p la pression ; M. Sarrau, le pre- mier, eut l’idée de comparer à cette formule les résul- fats des expériences antérieures. M. Vieille pour véri- fier de son côté les conséquences de la théorie, a étudié la vitesse de propagation de l’onde explosive, si les ébranlements sont assez petits pour que log puisse négliger le carré des dilafations, la vitesse est donnée par la formule V — VAE E représentant l’élasticité à température constante du milieu, p sa densité et y le rapport de ses deux chaleurs spécifiques; E pourrait d'ailleurs se déduire de la formule de Clausius. Les expériences sont faites en produisant dans un tube d'acier très résistant l'explosion d’une charge dissymmé- triquement disposée, l'onde explosive vient se réfléchir aux deux extrémités du tube, produisant ainsi une série d’oscillations. À ces extrémités sont disposés des mano- mètres à écrasement, l’écrasement du petit cylindre de cuivre est enregistré sur des tambours animés d’un mouvement de rotation; des courbes obtenues, on déduira la vitesse de propagation, Pour étudier la con- densation on déterminera les déplacements du centre de gravité de la masse gazeuse, déplacements qu'il sera facile de connaître puisque, le système n'étant soumis qu'à des forces intérieures, le centre de gravité du système total reste invariable et les déplacements du centre de gravité du tube permettent de déduire ceux de la masse gazeuse, Les expériences fournissent des résultats entièrement conformes aux prévisions que l’on peut déduire de la formule; pour les explosifs tels que le coton-poudre dont le covolume est très voisin de l'unité, la vitesse de propagation est énorme ; on retrouve ainsi un résultat déjà signalé par M. Berthelot, Lucien Poincaré. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 4 mars 1891. M. Hanriot présente une note de M. De Clermont sur la préparation industrielle du sulfure vert de man- ganèse ; le sulfure précipité est séché et chauffé ensuite dans un courant d'hydrogène sulfuré ou simplement d'acide carbonique. Le produit ainsi obtenu est d’un beau vert inaltérable à la lumière. — M. De Clermont présente à la Société des échantillons de papier peint faits avec ce sulfure, — M. Lepierre a modifié le pro- cédé hydrotimétrique d'analyse des eaux, de manière à en rendre l'application facile et les indications cons- tantes. — M. Lepierre signale également une curieuse propriété du soufre en fusion; si on le coule sur du papier présentant des caractères tracés avec diverses encres, ou au crayon, le soufre se charge de matière colorante, et donne une excellente épreuve renversée de la gravure primitive. L'auteur espère que ce procédé pourra être utilisé en lithographie. Séance du 13 mars 1891. M. Friedel indique une modification au procédé Doyère pour l'analyse des gaz, qui simplifie considéra- blement la manipulation, et permet d'opérer sur des gaz facilement solubles dans l’eau. Il emploie pour cela une éprouvette graduée, entourée d'un manchon en verre rempli d’eau, dont la température est facile à maintenir constante. Ce petit appareil se manœuvre facilement sur la cuve à mercure, — M. Friedel signale également l'emploi de l'alcool amylique comme dissol- vant pour l'analyse des gaz hydrocarbonés; la solubilité de ces derniers va rapidement en croissant avec leur richesse en carbone. — M, Riban, à propos de la com- munication de M. Friedel, indique un disposilif permet- tant de manœuvrer la pipette Doyère automatiquement. — M. Friedel fait observer que M. Salet a depuis long- temps fait connaître une pipette Doyère automatique. — M. Rousseau à obtenu par fusion du manganate de soude avec de la soude, les composés suivants cris- tallisés : ; ANS OO RENTE ET E 8MnO?2Na20 5H20 A 800°.. 16MnO2Na20 8H20 AMIODO ARLES 12MnO2Na20 4H20 Si l’on porte la température successivement à 13009 et au delà de 14009 on obtient de nouveau les hydrates à 5H?20 et puis à 4H?0. Ces composés une fois formés perdent leur eau de constitution entre 150 et 200 degrés. — M. Friedel et M. Wyrouboff font remarquer que ce fait paraît anormal; et qu'il serait plus vraisemblable d'admettre que l'hydratation se fait quand on traite la masse solide obtenue après fusion, par l’eau, — M. Rousseau dit qu'il croit à la formation de ces corps àune température supérieure à celle où ils se dissocient, fait dont il y a des exemples bien établis. —MM. Hanriot et Bouveault ont étudié l’action de l’hydroxylamine CHER surlenitrile propionyl-propionique CH—CO— CHF, CAz et obtenu un composé ayant la formule brute de l’oxime correspondante; ils pensent cependant, en raison des propriétés basiques de ce composé, que ce n'est pas CH NC CR l’oxime, mais un amidoisoxazol : | [l AzH?C Az Ney 0 Ils ont étudié quelques réactions de ce composé, en particulier l’action du chlorure d’acétyle, du brome et de l’acide azoteux, et proposent des formules de cons- litution pour les dérivés ainsi obtenus. — M. A. Combes fait observer que le point de départ du raison- nement de MM. Hanriot et Bouveault qui consiste à ne pas envisager les oximes comme pouvant présenter des propriétés basiques ne lui paraît pas exact; et que les réactions indiquées par les auteurs ne sont pas d'accord avec les formules de constitution qu’ils pro- posent, mais s'expliquent bien si l’on admet qu'ils ont simplement l’oxime : CH, ŸCH—0—CHs CAz Il AzOH — M. A. Villiers a séparé des produits de l’action du fer- ment butyrique sur la fécule un composé cristallisé, la Cellulosine [C'2H 100 10 3HO0] [Notation en équiva- lents]; dans l'alcool il a obtenu le composé également cristallisé [C12H 10010] 6C1H602, 1 O HO. — M. À. Gau- tier présente une note de M. Popof intitulée : Contribu- tion à étude de la formation de l'urée. L'auteur n’a pu obtenir de traces d’urée en faisant digérer des sels ammoniacaux divers, avee du foie frais broyé dans l’eau, — M. Bertrand a modifié le procédé d'extraction du xylose et se sert simplement de la paille; il a ob- tenu quelques dérivés de cet hydrate de carbone : l’acétal dibenzoïque, et des combinaisons cristalli- 2 dot ta nds be Sert 2 2 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 201 RE EEE—E—————————————————— EEE sées de xylose et de chlorure et bromure de cadmium ; il a soumis la xylose à l’hydrogénation, et obtenu ainsi la xylite, alcool pentatomique. — M. Tissier a obtenu l'alcool triméthyléthylique (CH#)? = C — CH? OH qui bout à 112°-113° et fond à 48°, A. ComBEs. SOCIÉTÉ FRANCAISE DE MINÉRALOGIE Séance du 12 mars 1891 M. Jeannetaz présente à la Société un échantillon de dioptase avec cristaux octaédriques d'argent natif, sur gangue calcaire, provenant des environs de Brazza- ville (Congo francais). Il présente en second lieu un échantillon de tale fibreux provenant de Madagascar, composé de fibres très fines peu biréfringentes étei- nant parallèlement à l’allongement.—Il signale enfin Ponneté du procédé de blanchiment des diamants au moyen de l’indigo; ce procédé a été décrit par Fer- randus Imperatus il y a 200 ans. — M. Frossard à trouvé de gros cristaux opaques de corindon dans une pegmatite des environs de Pouzac. [1 signale un certain nombre de gisements de cette substance dans les Pyré- nées. — M, Wyrouboff a oblenu de beaux cristaux de bi- chromate de strontiane, ainsi que de deux hyposulfates de cerium à une et cinq molécules d’eau. En fondant en- semble des mélanges en proportions variées de carbo- nates et sulfates alcalins, il a observé que les propriétés optiques de la substance cristalline ainsi obtenue va- rient d’une manière continue depuis celles du carbo- nate jusqu’à celles du sulfate, Il cite cette expérience comme une preuve à l'appui de sa manière de voir sur l’isomorphisme. L’isomorphisme serait un phénomène purement réticulaire et cristallographique, dans lequel la constitution chimique de la molécule serait sans influence. G. FRIEDEL. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 18 mars 1891. M. Fouret donne une démonstration élémentaire du théorème suivant : Toutes les droites d’une congruence du premier ordre et de la première classe rencontrent deux mêmes droites fixes. 11 en déduit le théorème de SchünemannetMannheim sur les normales aux surfaces trajectoires des points d'un solide de forme invariable mobile dans l’espace, — M. Collignon rappelle la dé- monstration mécanique qu'il a donnée de ce dernier théorème, en se fondant sur le principe du travail vir- tue]. Il s'étend, à ce propos, sur l'usage qui peut être fait des principes de la mécanique dans les questions du pure géométrie, et montre, en particulier, comment la recherche de la distance sphérique de deux points, en fonction de leurs latitudes et longitudes, peut se ramener à une détermination de centre de gravité. — M. d’Ocagne indique une simplification de l'abaque décrit, dans Ja précédente séance, par M. Collignon, pour la résolution à vue du même problème. Il fait voir que la construction de cet abaque simplifié résulte directement de l'application du principe général qu'il a récemment présenté à l'Académie des sciences (23 fé- vrier)., — M. Picard développe une démonstration nouvelle du théorème fondamental de la théorie des équations différentielles, relatif à l'existence même de l'intégrale générale d’un système d'équations simulta- nées. Cette importante démonstration, dont il a indiqué le principe dans son grand Mémoire sur les équations aux dérivées partielles (Jowrn. de Math., 1890), repose sur l’emploi d’une méthode d’approximations succes- sives. Elle présente sur celle de Cauchy l'avantage de conduire à la représentation analytique de la solution cherchée sous forme de développements convergents à la manière d’une progression géométrique; elle donne toutefois une étendue plus restreinte au champ où les intégrales se trouvent définies. — M. Carvallo : Sur les différences finies des fonctions. Application à la démonstration de la formule de Taylor. Formes nou- velles du reste, — M. Antomari : Extension aux cour- bes gauches de la notion de diamètre de Newton. Les diamètres de Newton d’une cubique gauche se con- fondent avec les sécantes doubles d’une autre cubique gauche, — M. Fouret fait observer que la proposition générale énoncée par M. Antomari est encore vraie lorsque la courbe gauche considérée ne constitue pas l'intersection complète de deux surfaces algébriques, attendu qu'on sait, d’après M. Cayley, que, dans ce cas, le reste de l'intersection ne comprend que des droites. Maurice Db'OCAGNE. SOCIÉTÉS MARITIMES SCIENTIFIQUES INSTITUTE OF MARINE ENGINEERS M. Thomas Drewry, Ingénieur en chef de la Com- pagnie Péninsulaire Orientale, lit une étude sur les propulseurs. Dans les navires à aubes, on doit s'attacher tout particulièrement à bien proportionner les divers éléments des roues. Eu égard à l'influence que les va- riations du tirant d’eau exercent sur ce mode de pro- pulsion, il importe de calculer très exactement, pour une résistance relative moyenne, le diamètre de la roue ainsi que la hauteur des pales, leur immersion et leur angle d'attaque. Passant à l’hélice, il insiste sur la né- cessité de tenir compte de la finesse des formes de la carène pour la détermination du pas. On néglige aussi trop souvent, une fois l’hélice achevée, d’en relever et d'en rectifier avec assez de précision, les éléments. Il arrive presque toujours que, soit dans la coulée, soit par suite d'un ajustage défectueux, le pas diffère sen- siblement d’une aile à l’autre, et il en résulte une in- fluence notable sur l’utilisation. Au point de vue du métal, le bronze semble avoir donné les meilleurs ré- sultats. Mais quelle que soit la matière employée, le poli de la surface est une qualité essentielle. Plusieurs théories ont été émises pour expliquer les piqûres du métal qu'on observe fréquemment au dos des ailes. L'auteur les attribue à l’action érosive de l'air, quand l'hélice est animée d'une grande vitesse. Les opinions sont très partagées sur les formes à donner aux hé- lices. Il semble qu'il y aurait intérêt à augmenter la fraction de pas vers le tiers de la distance comprise entre le moyeu et l'extrémité de l'aile, NORTH-EAST COAST INSTITUTION OF ENGINEERS AND SHIPBUILDERS M. James Spence : Sur la résistance des chaudieres. Beaucoup d'ingénieurs sont d'avis que la formule usuelle pour les enveloppes des chaudières conduit à des épaisseurs beaucoup plus fortes qu'il ne serait néces- saire. Le but de ce travail est d'exposer un autre mode de calculer les efforts auxquels sont soumises les enve- loppes : les conséquences de celte méthode justifie- raient l'opinion précédente, La théorie sur laquelle } PI repose la formule en usage e = K DE suppose expres- sément que l’on a affaire à une enveloppe cylindrique ouverte à ses deux extrémités, ne résistant à la pres- sion intérieure que par la section d’un plan diamétral suivant deux génératrices opposées, Mais comme en réalité le cylindre est fermé à ses deux extrémités, il est difficile d'admettre que les fonds ne contribuent pas dans une certaine mesure à la résistance. Il est probable que leur action dépend beaucoup de la lon- gueur de la chaudière, La véritable section de résis- tance à considérer est donc celle de l’enveloppe et des fonds par un plan diamétral, La charge totale est égale au produit de la pression par la surface du rectangle. Quant à sa répartition sur le périmètre de cette sur- face, elle dépendra de la forme du rectangle, et non de celle du couvercle, de telle sorte que pour deux chaudières dont chacune aurait pour diamètre la lon- gueur de l’autre, l’effort sera le même en deux points homologues du périmètre, Si l’on admet que l'effort en chaque point soit inversement proportionnel à sa dis- tance au centre du rectangle, ou point d'application de la résultante, il sera maximum aux milieux des grands ” 202 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES côtés et minimum aux angles. Les courbes des efforts le long du petit et du grand côtés seront donc des si- nussoides, et l'aire de chacune d'elles représentera l'effort total sur le côté correspondant, Les chaudières marines ont en général une longueur voisine de leur diamètre. Dans le cas de l'égalité, l'effort est partagé également entre l'enveloppe et les fonds. Si le dia- mètre est égal aux deux tiers de la longueur, on trouve que le rapport des aires est à peu près le même que celui des côtés eux-mêmes : les fonds supportent 3 de l'effort total; les 2 de l'épaisseur actuellement exigée seraient suffisants. La conséquence est que non seulement on donne en général aux enveloppes une surépaisseur inutile, mais que l’on néglige trop d'autre part l'affaiblissement produit dans la facade par les ouvertures des foyers et des portes. Il est à présumer que la résistance du foyer lui-même et la valeur élevée du coefficient de sécurité sont nos seules garanties à cet égard. En outre, on est moins à l'abri d’une explo- sion avec cette inégalité de résistance, excessive d’un côté, insuffisante de l’autre, que si, la résistance étant proportionnée à la fatigue, le métal arrivait presque partout en même temps à sa limite d'élasticité, ce qui n'aurait d'autre effet que d'occasionner des fuites par les trous de rivets agrandis, L'expérience rapportée par M. John Scott à l « Insti- tute of Naval Architects » confirme ces vues, Un cylindre de 325 de longueur sur 235 de diamètre, en acier de 25 à 290/, d'allongement à la rupture, fut soumis à une pression croissante, À 43 k. 1/2 par centimètre carré, les fuites ne permirent pas d'aller plus loin. La pres- sion resta stationnaire pendant cinq minutes. D’après la théorie ordinaire, l'enveloppe aurait alors été sou- mise à un effort de #1 kilos par millimètre carré suivant la ligne des rivets. D’après la nouvelle théorie, 63 gr seulement de l'effort portait sur l’enveloppe, qui tra- vaillait à 25 k. 1/2, Or la limite d'élasticité de ce joint est à environ 24 kilos selon M. Manuel. Comme Ja fuite a dû se produire peu après que cette limite à été dé. passée, on voit que la théorie nouvelle est bien mieux que l’autre d'accord avec les faits, En résumé, l'auteur croit avoir établi que l'épaisseur des enveloppes est exagérée dans les chaudières marines et qu’elle devrait dépendre essentiellement de la longueur, L. Viver. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 5 mars 1890. 19 SCIENCES PHYSIQUES. — Le professeur Ramsay. Quelques considérations sur les solutions. L'auteur énonce divers faits relativement à l'analogie surprenante entre les manières d’être d'un liquide et de sa vapeur en présence l’un de l’autre et de deux dissolvants capables de se dissoudre mutuellement, La courbe représenta- tive d’un liquide et de sa vapeur avec son inflexion au point critique ressemble à une courbe de solubilité avec son inflexion au point critique de dissolution ; ces ressemblances donnent la preuve que les deux phéno- mènes sont essentiellement de même nature et le ré- sultat de la pression osmotique. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. Frank G. Beddard. Sur une forme nouvelle des organes excrétewrs dans un annélide oligochacte, Les observations de la disposition des organes segmentaires dans un annélide apparte- nant à un nouveau genre d'Eudrilides montrent que le système segmentaire des parties génitales consiste presque entièrement à un système complexe de tubes qui se ramifient dans l'épaisseur du corps, qui s'ouvrent par de nombreux pores à l'extérieur et sont reliés par des tubes assez courts avec les cavités intérieures. — Les D Lauder Brunton et J. Théodore Cash. Contribution à l'étude de la connexion entre la constitution chimique et l'action physiologique (2° partie). Dans un précédent mémoire, les auteurs ont discuté les chan- gements qui sont produits dans l’action de l’ammonia- que par la substitution de radicaux alcalins à l’hydro- gène et que la combinaison des ammoniaques composées avec les différents radicaux acides. Dans le présent mémoire, ils ont examiné sur un plan semblable l'action physiologique des divers corps de la série aromatique, Ils trouvent que l’action de la benzine et de ses com- posés s'exerce surtout sur l’épine dorsale quoiqu’elle aille jusqu’au cerveau et s'étende ensuite des nerfs aux muscles. Cette action sur le cerveau est rendue mani- feste par la léthargie et la perte des mouvements volon- laires observées sur des grenouilles et des rats, L'ac- tion sur l’épine dorsale semble consister dans la pro- duction d’une augmentation de l'excitabilité, une plus grande diffusion de l'excitation produite par de moin- dres causes et de la précision des mouvements, Les effets de diverses benzines composées sur la durée des réflexes ont été observés. L'action générale est plutôt un ralentissement de cette durée, mais on observe sou- vent une première excitation avec la chloro-benzine et surtout avec la méthyl-diméthyl-éthylbenzine. La respiration est considérablement atteinte et rendue plus fréquente chez les animaux à sang chaud (rats) par la benzine el ces composés, Habituellement cette ac- célération est suivie d’un ralentissement. Le cœur est donc atteint avant la respiration dans l’empoisonne- ment par la benzine et ses composés haloïdes, par l'éthyl-benzine, l’amido-benzine et la nitro-benzine, tandis que la respiration est d'ordinaire atteinte ayant le cœur où presque en même temps dans l'empoison- nement par l'éthyl-benzine ou l’oxy-benzine. Le pre- mier effet des composés de la benzine sur le pouls ou la pression du sang est habituellement une accéléra- tion du pouls el une augmentation de pression qui est suivie par un ralentissement et une chute. — Le D'Théo- dore Cash et le protesseur R. Dunstan. Action phy- siologique des paraffines nitrées considérée en rapport avec lewr constitution chimique (4° partie). Action des paraffines niîlrées sur la pression du sang. Ces recher- ches ont pour but d'étudier lPaction de ces corps introduits dans l'organisme animal etparticulièrement de déterminer de quelle manière cette action dépend de la constitution chimique des diverses substances nitrées employées. En premier lieu on établit que de faibles doses de substances amylées causent une chute dans la pression du sang résultantprincipalement, sinon entiè- rement, d'une dilatation des artères réduisant ainsi la résistance périphérique dans une grande proportion. Les auteurs ont institué diverses expériences pour déterminer la cause de cette dilatation. Cet effet sem- ble résulter d'une action sur les vaisseaux du système nerveux. L'action des paraffines diffère de celle-ci par les résultats suivants : 1° Toutes les substances exami- nées produisent, par quelque moyen qu’elles soient admi- nistrées, une réduction de la pression du sang qui est variable, suivant le composé employé dans son exten- sion et ses progrès aussi bien que dans la guérison consécutive, 2° Une accélération du pouls est d’ordi- naire accompagnée et continuée par une chute dans l’inhalation, cette chute variant d’ailleurs avec la nature de la substance, 3° La respiration est temporai- rement affectée pendant et immédiatiatement après l’inhalation et d’une facon permanente par des admi- nistrations répétées de la même substance ou de subtances différentes. Les auteurs donnent un tableau montrant l'ordre différent des différents corps admi- nistrés à des animaux par inhalation sous des volumes égaux. — M. G. H. Howard Mummery. Quelques points relatifs à la structure el du développement de la dentine. L'auteur montre que certaines apparences de la dentine donnent à penser qu’elle est formée par une calcifica- tion du tissu conjonctif et que son développement.est très analogue au mode de formation que l’on attribue généralément aux os. Séance du 12 mars 1891, 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. R. J. Glazebrook com- munique un mémoire de feu M. J. C. Mac Connel. Sur la plasticité de la glace. Les expériences montrent ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 203 qu'un cristal soumis à uneffort de tension se comporte comme s'il était constitué par une infinité de feuilles de papiers infiniment minces normales à l'axe optique attachées les uns aux autres par quelque substance visqueuse et qui glissent l’une sur l’autre avec grande difficulté. Un barreau formé par un simple cristal dont l'axe est perpendiculaire à deux faces planes se tend franchement dans le plan de l’axe au-dessous du point de fusion et non dans un plan perpendiculaire, Dans le cristal tendu, l’axe optique en un point se trouve nor- mal aux faces tendues; mais unesérie de lignes tracées dans la substance de la glace qui étaient primitivement parallèles à l’axe optique restent toujours parallèles les unes aux autres, et non pas d'ordinaire à l’axe opti- que. Ceci est mis en évidence par les longues et étroi- tes bulles qui se forment fréquemment à angle droit avec les plans de congélation et par ce fait que les faces terminales du barreau restent parallèles pen- dant l'effort, — M, W. Cassie. Sur les effets de la tem- pératuwre sur l'indice de réfraction de certains liquides. Le tableau suivant montre les résultats obtenus à des tem- pératures variant de 16°C à 40°C et quelques autres donnés par l’auteur dans un mémoire précédent « sur l'effet de la température sur la capacité inductive spé- cifique d’un diélectrique (Phil, hrans. 1890). » Variation pour 1eC Capacité inductive Indice de spécifique. Réfraction Térébenthine.......... - 0.012 — 0.003 Sulfure de carbone... — 0.04% — 0.006 Gifcérine te. ne — 0.06 Ü.002 BEN ZANE EAN se — 0.01% — 0:(1043 RSTAnere eee rec + 0.023 — 0.0017 M. Georges Higge. Les composés hisulfurés de l'aliza- rine comme Sensibilisaewrs pour les rayons de faible réfran- gibilité. L'auteur montre une belle photographie des lignes À du spectre solaire et décrit la préparation des plaques rendues ainsi sensibles même aux rayons infra- rouges. Richard A, GREGoRY. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 27 février 1891. MM. Ayrton et Taylor. Démonstration de la géné- ralité de certaines formules données pour un cas spé- cial par M. Blakesley. Application aux transformateurs. En 1888, M. Blakesley publia un certain nombre de formules relatives à la mesure de l’énergie des courants alternatifs au moyen d’électrodynamomètres constitués par deux bobines indépendantes et placées dans diffé- rents circuits. Ces formules sont déduites de certaines hypothèses; on suppose, en particulier, que les courants et l’aimantation varient d’une facon harmonique, que l'induction magnétique dans le fer est proportionnelle à l'intensité des courants. Dans leur mémoire les au- teurs montrent que ces hypothèses ne sont pas néces- saires ; ils traitent en particulier le cas des transfor- mateurs; des ampèremètres étant placés dans le circuit primaire, dans le circuit secondaire et un dynamomètre à lecture directe ayant une bobine dans chaque circuit, si l’on désigne par D,,Ds et Ds les lec- tures des trois instruments, l’on a - #4 OR: Dos a 4 = ApAsdt TY, A9 et As étant les valeurs des courants primaires et secondaires à chaque instant, et T le temps d’une oscillation complète. Si i est l'induction totale au centre, PetS le nombre de tours de fil sur les circuits pri- maires et secondaires, V, et Vs les pressions finales, e et « les résistances des bobines primaires et secon- daires, on à à chaque instant di CO et — = -— As dt dt $ Me o A5 + P on lirera de là 1 aT l aT 2 Pr aT ni A5 Vodt — T ] Ao dt + = — [l ApAsdl û CS D } Te 0 de sorte que le nombre de watts dans le courant pri- D 2 FRA RC IRERARE PE . maire — pD, + go Des. Le mémoire indique aussi les formules qui conviennent au cas de transformateurs contenant des aimants; des expériences ont été insti- tuées avec un transformateur de Mordey et ont conduit à des résullats en accord avec les prévisions du caleul, — M. Blakesley. Contribution à la dynamométrie, L'objet de ce mémoire est de montrer que certaines quantités physiques peuvent avantageusement être éva- luées à l’aide d’électrodynamomètres à deux bobines de petites résistances dans des circuits électriques. Un NAT tel appareil mesure l'intégrale T | CG, C, dt où C, et G, 0 sont les valeurs des courants à chaque instant; comme cas particulier,ces deux valeurs peuvent, bien entendu, être identiques. Un certain nombre de quantités phy- siques peuvent ètre évaluées ainsi comme un produit C, X C,, deux quantités qui peuvent d’ailleurs être in- dépendantes du temps. L'auteur montre l'application de cette conception au cas de transformateurs en série ou parallèles, ou l'emploi de la méthode indiquée à la mesure de l'énergie dans des appareils divers tels que des voltamètres soumis à des courants de diverses sortes, générateurs parallèles, etc, — M. Swinburne fait, à l’occasion de ces deux communications, diverses remarques relatives au rôle de la self-induclion dans les transformateurs. — M. Mordey dit que les résul- tats obtenus par MM. Ayrton et Taylor confirment en- tièrement les expériences qu'il avait lui-même faites, au moyen d'une méthode très différente. Séance du 6 mars 1891. M. James Swinburne : Nofe sur les wattmélres élec- trostatiques. Après avoir rappelé l'historique de l’appli- cation de l’électromètre à la mesure de la puissance dans les courants alternatifs, l’auteur remarque que l’on peut obvier à la nécessité de faire deux lectures pour déterminer le nombre de watts dépensés en sépa- rant les quadrants au lieu de les réunir en paire comme dans la méthode ordinaire. Des résistances sans induc- tion sont reliées au transformateur ou au moteur où à tout autre appareil où l’on veut mesurer la puissance, de facon à être placées en série avec l'appareil et en op- position, les quatre extrémités des deux résistances sont en communication avec les quatre quadrants. Dans ces conditions la déviation de l'aiguille mesure le nom- bre de watts. — M. Smith remarque qu’il n’est pas né- cessaire de faire deux observations, dans la méthode électrométrique ordinaire, si l’on emploie un faux zéro. — M. Swinburne répond que l'observation de ce zéro revient en somme à une seconde lecture. —MM. Ayrton et Sumpner. Interférences avec des courants alternatifs. Le mémoire est relatif aux phénomènes que l’on observe en communiquant des tensions électriques alternatives à des circuits constitués par des combinaisons variées de résistances, condensateurs, ares ou bobines d’in- duction ; il traite aussi des propriétés des transforma- teurs et des particularités observées dans les appareils Ferranti. Dans l’une de ces expériences, une bobine dinduction et un condensateur étaient reliés en séries etune tension de 25 volts, mesurée au voltmètre Cordew, était communiquée aux deux extrémités; la tension des deux parties, mesurée de la même facon était respective- ment de 110 et de 194 volts; en joignant un condensa-. teur et une bobine d'induction parallèlement, un am- 204 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES pèremètre placé dans le circuit principal indique ÿampères 5 tandis que l’on constate que 6ampères 4 traver- sent le condensateur, et 10ampères Ja bobine. D’autres expériences analogues ont été faites sur des courants alternatifs, des arcs électriques etc.; ily a lieu de remar- quer que ces faits ont une grande importance dans l'estimation de l'énergie dépensée dans les lampes; l'erreur que l’on pourraitcommettre de ce chef dépend de la qualité du charbon et du caractère de l’are. Ces phénomènes peuvent se calculer théoriquement, si l’on connaît la différence de phase des tensions dans les deux parties, différence qui est fonction de la résis- tance et de la self-induction de la bobine, Au sujet des caractéristiques des courants alternatifs, les auteurs décrivent un procédé pour obtenir graphiquement la courbe des forces électromotrices. Les auteurs ont aussi étudié l'effet Ferranti, et il résulte de cette étude qu'ils pensent devoir attribuer cet effet à une sorte d'action réciproque entre le condensateur et la self- induction du transformateur et non à des réactions des armatures dans la dynamo, Une discussion au sujet de cette communication s'engage entre MM. Swinburne, Smith el Blakesly. SOCIETE DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 19 février 4891. MM. Stanley Kipping et Perkin Junior. — Action des agents réducteurs Sur la x diacétylpentane. Synthèse du diméthyldihydroxyheptaméthylène. — M. Adie. La pression osmotique des sels en dissolution. — L'auteur étudie directement la pression osmotiquedes solutions salines par la méthode de Pfeffer, Ce mémoire sera analysé plus longuement dans la Revue, — M, Adie. Comparaison directe des constantes physiques qui entrent en jeu dans la détermination des poids moléculaires par la méthode de Raoult -— M. Frederick Perkin. Dérivés du pipéronyle. — MM. Armstrong et P. Wynne. Etudes su la constitution des dérivés trisubstitués de la naphtaline. — Acide $ naphtylamine-disulfonique d'Andresen. Séance du » mars 1891, M. Tutton. Forme cristalline du sel de chaux de l'acide glycérique optiquement actif. — Les cristaux appartien- nent au système monoclinique et présentent l'hémié drie, comme tous les corps cristallisés, doués du pou- voir rotatoire, examinés jusqu'ici. — MM. Percy, Frankland, A. Stanley, W. Frew. Fermentalion pro- duite par le pneumocoque de Friedlander. — M. Brauner. Dosage volumétrique du tellure (2° partie), L'auteur donne comme conduisant à des résultats satisfaisants l’em- ploi du permanganate de potasse pour transformer en acide tellurique, le bioxyde de tellure, en solution dans l'acide sulfurique, — MM. Armstrong et Rossiter Dérivés chlorés et bromés du naphtolet de lanaphtylamine. SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 16 mars 1891 Le D' John Murray lit un mémoire de M. Robert Irvine et de lui-même sur la formation de la silice et \des silicates dans les mers actuelles. Il y a une grande difficulté à se rendre compte de cette formation à cause du grand nombre des organismes qui renferment de l'acide silicique et des débris de ces organismes qui se rencontrent dans l'Océan et sur le lit de l'Océan, La totalité de silice qui existe en dissolution dans l’eau de mer est bien loin de suffire à l'immense développe- ment de tels organismes dans les diverses parties de l'Océan. Les auteurs prouvent que l'argile et la vase que charrient les flots au bords de la mer se retrouvent dans les parties les moins azotées de l'Océan; et l’on peut extraire des diatomées de ces vases en quantité suffisante pour former les couches siliceuses, Les auteurs montrent aussi que ce pouvoir de suspension de l’eau de mer pour de tels limons diminue d'une facon très marquée quand la tempéra- ture s'élève et ceci explique la raison de la grande abondance des diatomées dans les mers les plus froides, — M. W. G. Aitchison Robertson fait une comimuni- cation sur les nerfs des dents et leurs relations avec la croissance de la dentine, W. PEDDIE, Docteur de l'Université SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES (SECTION DE MANCHESTER) Séance du 6 mars 18H. M. Knecht a trouvé que l’on peut séparer la laine de la soie dans les tissus mixtes, en les chauffant pen- dant trois heures avec de l’eau sous pression à 130, La laine se désorganise, la soie reste intacte, — M, Knecht lit une seconde note sur la fixation d’une tartrazine insoluble sur la laine. — MM. Horace Kæchlin et Kzrecht ont réussi à teindre le cuir avec de l’alizarine à froid, en renversant l’ordre des opérations généra- lement employé. Ils traitent le cuir d’abord avec de l'alizarine en dissolution alcaline, puis avec le mordant. Les couleurs obtenues sont franches et de bon teint. — M. Davis propose de purifier les eaux d’égout de Salford par une modification du procédé dit à la chaux. On précipite les impuretés en grande partie par la chaux, et l’on se débarrasse de l’excès de chaux en traitant ensuite avec un courant d'acide carbonique. Les matières précipitées sont utilisées pour faire du ci- ment, et ce sont les fours à ciment qui fournissent l'acide carbonique dont on a besoin dans le début du procédé. Les matières organiques qui restent en dis- solution sont oxydées en pulvérisant les eaux en con- tact avec de l’air chaud. Le volume des eaux est de 45,400 mètres cubes par jour. Elles conennent: {°en suspension, 5,5 tonnes de matière dont 3,5 sont de nature organique : 2° en dissolution, 58 tonnes de ma- tière, dont 13,5 de nature organique. — M. Rowland Williams a trouvé qu'un excès d'apprêt sur les tissus de coton ne favorise pas nécessairement, comme on l’a supposé, le développement du mildew. La présence d’une quantité suffisante de chlorure de zinc protège complètement le tissu dans tous les cas. P.J. Hartoc. ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE Séance du T février et du 7 mars 1891. Dans la séance de février M. de Heen a exposé les résultats de ses recherches sur la vitesse d’évaporation des liquides dont la surface est soumise à l'influence d’un courant gazeux. Voici ces conclusions : 1° La vitesse de vaporisation est proportionnelle à la racine carrée de la vitesse du courant gazeux. 2° Pour une vitesse de courant déterminée, la quantité de liquide vaporisé est directement proportionnelle à la tension de la vapeur. 3 Si l’opère sur les liquides de natures différentes la quantité de liquide vaporisée varie comme le produit de la tension de vapeur par le poids molé- culaire, 4° Si l’on opère à l’aide de gaz de natures dif- férentes on constate que l'aptitude vaporisatrice d’un gaz est d'autant plus grande que son frottement inté- rieur est lui-même plus grand. 5° On peut admettre, à titre de loi limite, que la quantité de liquide vaporisé sous l'influence d’un courant gäzeux ne dépend que de la vitesse du courant et qu’elle est indépendante de sa pression. Cette conclusion, absolument contraire à l'opinion généralement admise jusqu’à ce jour, semble ètre une conséquence naturelle de ce fait que la faculté vaporisatrice d’un courant gazeux dépend essentiel- lement du frottement intérieur du gaz en mouvement ; or on sait que le frottement intérieur est sensiblement indépendant de la pression. L'indépendance, au moins presque complète, qui existe entre la vitesse d’évapo- ration et la pression intérieure permet de tirer cette 4 répéter ln k ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES conclusion intéressante que, toutes choses égales d’ail- leurs, l’évaporation ne se produit pas plus rapidement sur les montagnes élevées que dans les plaines, 6° En étudiant la vitesse d’évaporation de l’eau dont la sur- face est soumise à l'influence d’un courant d’air ren- fermant déjà une certaine quantité de vapeur, M, de Heen trouve que cette vitesse v peut se représenter par l’ex- pression. D — 100 — 0,38f f représentant la tension de la vapeur rapportée à la tension de la vapeur saturée prise égale à 109, Un cou rant d’air saturé de vapeur d’eau est donc encore sus- ceptible d'enlever des molécules à la surface de ce même liquide, De l’ensemble des faits observés, il résulte que la vitesse d’évaporation v d’une surface d’eau, soumise à l'influence du vent, peut s'exprimer par v = AF (100 — 0,88) VV A représentant une constante, F, la tension de la va- peur saturée, V la vitesse du vent. Il est inutile d’in- sister sur l'importance de ces résultats, qui sont garantis par l’habileté expérimentale de M. de Heen, — M. le marquis de Caligny (Versailles) a adressé à l'Académie royale de Belgique, dont il est associé, deux lettres sur les modifications et les expériences qui ont été faites en 1890 à son système d’écluse à épargne d’eau construit à l’Aubois. Ces lettres ont été présentées dans les séances des 7 février et 7 mars. Afin de ne pas entrer dans des détails qui ne pour- raient être bien compris sans la reproduction de ces lettres, où sont indiquées d’ailleurs des simplifications pour d’autres localités, il suffira de dire que l'appareil a été manœuvré sans fatigue par un seul homme, ainsi que cela est constaté officiellement. Les tubes mobiles eussent été depuis longtemps déchirés, leurs parois étant très peu résistantes, s'il y avait eu des coups de bélier, rendus impossibles parce que les sections transversales ne sontjamais bouchées. Il résulte de ce fait que la crainte d'employer le mouvement acquis des grandes colonnes liquides est supprimée au moyen des principes de M. de Caligny. —M.Vander Mensbrugghe, a appliqué le principe de la tension superficielle des li- quides au cas des inondations. La conséquence de ce principe est que {out rétrécissement dans le lit d’une rivière (rétrécissement qui arrive très généralement au confluent de deux cours d’eau) a pour conséquence une augmentation très considérable de la force vive du courant. Il en conclut qu'on pourrait appliquer l'huile avec succès à diminuer les ravages produits par les inondations. — M. l'abbé Renard donne lecture d’un travail qu'il a fait avec son élève M. Cornet, fils du re gretté géologue, sur la nature et l’origine des phos- phates qui se rencontrentsi abondammenten Belgigue. L'examen microscopique leur a permis d'y reconnaitre des moules de foraminifères, où le phosphate s’est déposé, ainsi que des débris d’ossements de reptiles et de poissons, C’est à la décomposition de ces verté- brés qu'est due la formation des phosphates. Cette faune vivait sur les côtes de la mer crétacée, où elle s’est décomposée; les matières phosphatées ont été entrainées au large et mélangées aux matières cal- caires qui se déposaient plus loin des rivages. FF. Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 28 février 1891 1° SGIENCES MATHÉMATIQUES, — M. D. J. Korteweg : Sur la position des 24 points de plissement qui se réunissent en un point conique d’une surface soumise à une déformation continue, immédiatement avant et après le passage par le point conique. L’auteur com- plète la théorie des points de plissement (Cayley’s tacnodal points) donnée par lui il y a deux ans (Ver- slagen en Mededeelingen, 3° série, t, V, p. 402 et Sifzungs- 205 berichte d. k. Akad, in Wien, t. XCVIIT, p. 1154). Ces points de coïncidence des deux points de contact (connodes) d’un plan bitangent sont des points de contact de la courbe connodale (lieu des connodes) et de la courbe spinodale (courbe qui sépare les parties de courbure positive et de courbure négative). Par un point conique il passe six branches de la courbe spinodale qui divisent chacune des deux nappes de la surface dans le voisinage du point conique en six segments angulaires de cour- bure alternativement positive et négative, de manière que deux segments opposés des deux nappes sont de courbure différente. Au point conique chacune des branches de la courbe spinodale est touchée par une branche de la courbe connodale; les points de ces branches ont le point conique pour connode commune. Et par rapport à la distribution de ces six branches sur les segments de courbure différente, tous les cas sont possibles. Si le point conique de la surface qui se transforme est la transition de deux parties réunies (hyperboloïde à une nappe) à deux parties séparées (hyperboloïde à deux nappes), la transformation fait croître les segments positifs aux dépens des autres. Ainsi en passant du cas intermédiaire du point conique au cas des deux parties séparées, les branches de la courbe connodale situés sur les segments négatifs dis- paraissent, tandis que chacune de celles situées sur les segments positifs se fend en deux branches sensible- ment parallèles sur chacune des deux nappes ; une d’entre elles possède un point de plissement tout près du point conique disparu. Avant le passage tous les points de plissement qui vont coïncider se trouvent sur les segments négatifs, tandis qu'après le passage tous les points de plissement issus du point conique sont situés sur les segments positifs. Et la somme des nombres des deux groupes est toujours égale à deux fois le nombre pair des branches réelles de la courbe spinodale au point conique, Enfin l’auteur considère le cas spécial des surfaces du troisième ordre. —M. H, Gr. van de Sande Bakhuyzen : Sur la variation de la latitude d’après des observations faites à Greenwich et à Leyde, L'auteur donne un apercu historique du point en question, Il rappelle les manières différentes dont on a tâché de se rendre compte de la marche pério- dique de la latitude de Greenwich, d’après les obser- vations depuis 1851. Il revient à sa supposition de l'influence de Ja différence de température de l’ob- servatoire et celle de l’air environnant. IL à évalué l'influence de cette différence pour les observations de 1851 à 1882. Des représentations graphiques mon- trent qu'il y a une concordance frappante entre la marche annuelle moyenne de la différence de température et celle de la variation de la latitude. Après avoir tenu compte de l'influence indiquée de la différence de tem- pérature, la variation restante de la latitude se compose d’une partie moyenne à période annuelle et d’une partie irrégulière. La première partie peut être mise sous la forme 0,09 cos 2 ({—22}, où £ représente le nombre des jours à partir du jour de l'an, Et la seconde partie qui renferme des oscillations plus importantes de + 0°,4 à — 0,6 a été évaluée d’après les observa- tions faites à Greenwich et Leyde. Ces résultats con- cordent avec les observations de M. F. Küstner à Berlin en 1884 et celles faites à Berlin, Potsdam, Prague et Strasbourg en 1889. Au sujet de ces observations et de leur importance on fera bien d'attendre les résultats de l’expédilion à Honolulu. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — Au nom de M. H. Kamer- lingh Onnes, M. H.A. Lorentz fait connaitre les résultats principaux obtenus par M. L. M. J. Stoel, relativement à l'influence de la température sur la résistance de frot- tement des liquides, sous des tensions différentes. Il a expérimenté sur le chlorure de méthyle à des tempé- ratures variant de — 28° à + 1239. Les résultats sont exprimés dans quelques formules empiriques. — M. J. M. van Bemmelen montre deux nouveaux sels d'oxyde de mercure et d’acide sulfurique préparés par M. C. Hensgen dans le laboratoire de chimie inor- 206 2 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ganique de l’Université de Leyde dans le cours de ses expérimentations sur l'équilibre chimique entre ces matières et l’eau. Ces mêmes recherches lui ont montré qu'une solution de chlorure d’antimoine dans l'acide sulfurique dilué se sépare en deux couches sous l’in- fluence de la chaleur. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. Th. H. Behrens fait connaitre les résultats des recherches de M. J. N. Ret- gers, ingénieur des mines à la Haye, sur la consti- tution du sable des dunes néerlandaises. En traitant ce sable par des liquides de poids spécifiques différents, il a réussi complètement dans la détermination des roches originaires, parmi lesquelles le spath d'Islande joue un rôle très important. D’après ces recherches il n’est plus possible d'admettre que le Rhin, la Meuse et l’Escaut ont déposé ces sables. Ces sables ont été apportés probablement par des glaciers scandinaviens. SCHOUTE, Membre de l’Académie. ACADEMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 12 mars 1891. 1° SGIENCES MATHÉMATIQUES, — M. Ferdinand Los- chardt. Les nouvelles hypothèses sur la rotation de la planète Vénus. 20 SCIENCES NATURELLES. — M, V. Ettingshausen. Sur les espèces tertiaires de hélres dans l'hémisphère Sud. L'auteur cherche à apporter une contribution à l'étude des espèces de hètres dont une partie est déjà bien connue; mais il estime que l’on arrivera à une connais- sance plus exacte par l'étude des transformations aux diverses périodes geclogiques. Il montre que les espèces actuellement vivantes dans l'hémisphère Sud peuvent ètre déduites des espèces tertiaires. — M. le baron V. Foullon. Sur les roches et les minéraux de l'ile de Rhodes. L'auteur décrit les roches et les classe dans les groupes suivants : Roches éruptives (Diabase et por- phyres). Dépôts fluviaux du pliocène moyen; Serpentine, Feldspaths, Asbeste ligneux etSilicates. —M. le D' Adam- kiewiez. Principes d’un traitement rationnel des tumeurs malignes (cancer). Les travaux antérieurs de lPauteur sur le virus et la contagion des cancers lui permettent aujourd'hui de donner une base solide à un traitement rationnel de ces affections. Il y a lieu de distinguer deux parties distinctes dans ces affections, d’une part le cancer lui-même localisé en un point, d'autre part une infection générale qui ne disparaitrait pas avec la tumeur; l’auteur établit comment le traitement qu'il propose, après avoir agi directement sur les parties malades, influe sur l'économie générale. Il cite l'exemple de plusieurs inalades avec des observations cliniques qui montrent, par exemple, l'accroissement progressif du poids au fur et à mesure du traitement. Emil WEÿr. Membre de l'Académie. ACADEMIE DES SCIENCES DE SAINT-PETERSBOURG Séance du 23 février 1891 Le président fait part à l'Académie de la perte dou- loureuse qu'elle vient de faire dans la personne de son correspondant pour la section mathématique, Mme So- phie Kovalevsky, professeur à l'Université de Stockholm, morte le 29 janvier (10 février). 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Backlund, membre de l’Académie, présente un mémoire contenant les résultats des déterminations des points astronomiques faites en 1890 pendant l'expédition dans les montagnes du Timan (bassin de la Petchora, nord-est de la Rus- sie). Grâce à ce travail on aura la position géogra- phique exacte de vingt-cinq points (dont sept détermi- nés par des observations répétées deux fois) dans une des régions les moins connues de l’Europe. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. N. Beketoff présente une uole de M, Borzilevsky intitulée : Combinaisons des | aldéhydes avec les composés azotiques. —M. Wild présente les traductions russes des mémoires suivants, publiés en allemand dans le t. XV du « Repertorium fur Meteo- rologie » : M. Nassakin, Les tempêtes de la Baltique ; M. Sreznevsky, La corrélation entre la température et l'humidité absolue de l'atmosphère à Saint-Pétersbourg. Séance du 9 mars. SCIENCES NATURELLES, — M. À, Famintzin présente à l'Académie son mémoire modifié ! sur la symbiose des alques et des infusoires. Le texte russe de ce travail for- mera le premier fascicule d’un recueil intitulé Travaux du laboratoire de botanique de l'Académie des Sciences, tandis que la traduction allemande paraîtra dans les « Mémoires » de l’Académie, — MM, Ovsiannikoff et Strauch, membres de l’Académie, présentent un mé- moire du professeur Klolodkovsky, sur le dévelop- pement embryonnaire de la phyllodromia (Blatta) germa- nica (en allemand). Ce mémoire est divisé en 6 cha- pitres 1° historique, bibliographie, méthode et premières phases du développement; 2° formation des deux premiers feuillets embryonnaires; 3° développe- ment des formes extérieures de l'embryon; 4° les dérivés de l’ectoderme; 5° formation de la cavité générale du corps, de l’ectodermeetde différents organes internes; 6° déductions générales relatives à la question de la segmentation de l'œuf, à la morphologie des feuillets embryonnaires, et à la morphologie et la physiologie des insectes, Voici les principales conclusions de ce travail : 19 Le ganglion sus-æsophagien est composé de plusieurs parties. 2 La tèle des insectes est formée probablement de plus de quatre segments ainsi qu'on l'admettait jusqu'à présent. 3° Les antennes sont des ap- pendices post-oraur et, par conséquent, des homologues de tous les autres appendices ventraux. 4° Certains organes que l’on observe pendant le développement embryonnure des iasectes sont les homologues des entonnoirs ciliés des organes segmentaires des vers. 5 Le développement de la Blatla est toujours accom- pagné par l’apposition dans l'œufde corpuscules en forme des bätonnels (probablement des bactéries), leur pré- sence parait surtout être liée à la liquéfaction du vi- tellus nutritif et à la formation du corps adipeux. Le fait avait été déjà signalé par d’autres observateurs, mais ce n'est que dans le présent travail qu'il fut démontré et observé dans sa totalité. 6° Les affinités des insectes et des myriapodes sont des plus étroites. 1° Les différentes formes du blastopore peuvent ètre rattachées à un type commun dans tous les œufs méroblastiques. O. BAGKkLUND, Membre de l’Académie. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séance du 1°mars 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M, Betti présente un théorème de mécanique, qui lui permet d'arriver aux équations données par M. Hertz pour les forces élec- triques et les forces magnétiques. Dans ces équations les forces de translation seraient les forces électriques, et celles de rotation, les forces magnétiques. — M. Vol- terra, dans une note sur les équations fondamentales de l’électrodynamique, observe que de même que les questions de dynamique dépendent d’un système unique d'équations différentielles (les équations de Lagrange), de mème, d’après les formules de Hertz, toutes les questions d’électrostatique, de magnétisme et d'élec- trodynamique, dépendent d'un seul système d'équa: tions différentielles. Lorsque les forces admettent un potentiel, les équations de la dynamique de Lagrange peuvent être déduites, comme on sait, d'un problème de caleul des variations. C’est ce qui constitue le prin- cipe de l’action stationnaire, M. Volterra démontre que dans le cas des systèmes én repos, les équations de DE CT CET 1) Voy. la séance précédente. A2 end » cr nie CM. à PART PPT OT ACADÉ MIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Hertz sont encore reliées à des questions de calcul des variations. Quand les équations relatives à une question de physique dérivent d'un problème de calcul des variations, on peut chercher à établir des relations entre ces équations et les équations de la dynamique. 11 suffit pour cela que la quantité qui parait sous l'in- légrale, dont la variation doit s’annuler, puisse se sé- parer (comme l’action de Hamilton) en deux parties, telles que leur différence représente l'énergie du sys- tème ; et que l’une d'elles dépende {comme le potentiel) des paramètres qui individualisent l’état du système, et que l’autre (comme la force vive) soit une fonction quadratique des dérivées de ces mêmes parametres, par rapport au temps. Lorsqu'on arrive à faire cette décom- position, on peut trouver, comme l'a observé M. Poin- caré, un nombre infini d’interprétations mécaniques de la question. Une décomposition de ce genre peut ètre exécutée pour quelques-unes des intégrales que lon obtient quand onrelie les équations de Hertz à des questions de calcul des variations. — M. Ciani fait connaitre le résultat des recherches qu'il a exécutées en reliant entre eux les éléments de la figure que lon obtient en combinant et groupant de différentes ma- nières les faces, les arêtes et les sommets d'un pen- taèdre complet. Dans cette figure se trouve compris le groupement de M. Cremona, formé par quinze droites placées par trois dans quinze plans. — M. Padova : Sur les équations générales de la dynamique. — Inter- prétation mécanique des formules de M. Hertz. — M. Capelli : Sur l'extension du développement par po- laires des formes algébriques à plusieurs séries de va- riables, — M. Millosevich informe l'Académie que le soir du 12 février, il a découvert une petite planète de douzième grandeur, dont la position dans le ciel ne correspond, même d’une manière approximative, à au- cune des petites planètes dont l'orbite a été déterminée d’une manière satisfaisante. 11 s’agit donc d’une nou- velle planète, à moins qu’elle ne soit identique à Pune des petites planètes perdues, ce que l’on pourra recon- naître à l’aide d’une première série d'éléments ellip- tiques. Actuellement la petite planète découverte par M. Millosevich porte le numéro 304. Les observations que l’on à pu faire avant et après la pleine lune. sont les suivantes : Temps moyen AS91 de Rome ÆR appar. Déclin. appar. LOUE SU DEMO CUT Févr. 12 9.51.27,20 (8.843) —H16.52.41,2(0 ) DIX 9.19.45,16(8.386n) —+16.57.39,8 (0.568) DE 9.38.54,15(8.439n) +17. 0. 5,9(0.568) » 26 17.22. 0,4(0.662 DE2T 9.39. 5,07(9.521n) —17.23.50,7 (0.628) — M. Narducci entretient l’Académie d’un ancien manus- crit que M. Maes a trouvé à la Bibliothèque Angélique de Rome, en rédigeant le catalogue des manuscrits grecs, et qui contient le traité De quatuor Mathematicis scientiis de Georges Pachymeres, historien et mathé- maticien du xiv° siècle, A la bibliothèque Nationale de Paris existent cingexemplaires du traité de Pachymeres, plus modernes cependant et moins complets que celui possédé par la bibliothèque romaine, dont ils doivent être des copies. M. Narducci donne des détails sur le manuscrit; il rapporte les erreurs et les contradictions des savants qui se sont occupés des œuvres de Pachy- meres et de l’histoire des mathématiques, au fait d’a- voir omis de prendre connaissance des documents ori- ginaux, 29 SCIENCES PHYSIQUES. — Est approuvée, après leclure du rapport de MM. Blaserna et Righi, la publication, dans les volumes des Mémoires, d’un travail de M. Ban- ti sur l’aimantation du nickel, scumis à des actions mécaniques spéciales. M. Banti a repris les recherches de M. Nagaoka sur l’inversion de polarité magnétique qui se manifeste dans un fil de nickel, convenablement tordu et tendu. À l’aide d’observations et de mesures répétées, M, Banti démontre que l’on peut produire le phénomène à la suite d’un grand nombre de {orsions 207 et détorsions du fil, sans qu’il soit nécessaire d'exercer sur ce deraier une tension quelconque. Le phénomène dépend donc de létat d’élasticité où se trouve le fil à Ja suite des opérations qu'ila subies; d'autre part on sait déjà, par les expériences d'Ewing, que la tension n’est point capable, à elle seule, de produire l’inversion, — MM. Ciamician et Silber ont commencé l'étude des substances d’origine végétale que l’on tire de l'écorce du Coto et qui appartiennent encore aux «corps à sé- rier » de Gherardt., Quelques-unes de ces substances, dont on ignore la constitution, sont douées de remar- quables propriétés thérapeutiques. MM. Ciamician et Silber ont commencé leurs recherches par l'étude de l’hydrocotoine, et ils ont reconnu l'exactitude de la composition C#HtO0'et du poids moléculaire 258 donnés par Jobst et Hesse, Pour ce qui concerne la constitution de la substance, les deux auteurs considèrent l'hydro- cotoine comme un dérivé du benzophénone, et en don- nent la formule suivante : OCH: 6 re N OCHS CS H? | oH CO:C6H*. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. Arcangeli s'occupe des nodosités qui se forment sur les racines des Légumineuses, et des microbes qui s’y trouvent. Il commence par relever que c’est à Gasparrini qu'ap- parlient la découverte des microbes en 1851, tandis que Woronine, à qui l’on attribue cette découverte, ne vit les bactéries des tubercules que quinze ans plus tard. M. Arcangeli résume ensuite les divergences existant entre les auteurs qui considèrent les bactéries des Légamineuses comme capables d’assimiler l'azote libre de l'air, et de fournir de cette manière à la plante lalimentalion azotée qui lui est indispensable, et les observateurs qui ont reconnu que les microbes des tubercules perdent leur propriété de fixer l'azote de l'air, lorsqu'ils se trouvent hors des nodosités, On pourrait même énoncer, dit M, Arcangeli, une nou- velle hypothèse, en supposant que les bactéries des tubercules, libres dans le sol, puissent fixer l'azote du terrain, qui ensuite serait absorbé par les racines, Les nodosités constilueraient un simple phénomène de parasitisme, capable d’exalter la fonction assimila- trice des racines et des feuilles. Enfin, si la question n'est pas encore résolue, on peut admettre que les tubercules sont des productions anormales, de nature parasitaire ou symbiotique, semblables à celles qui se produisent dans l'olivier et dans la vigne, et qui, en exaltant les fonctions assimilatrices des plantes, ren- dent le terrain plus riche en matières azotées, el en augmentent la fertilité, — M. Mingazzini adresse à l'Académie le résultat de ses observations sur les Sporozoaires, qui lui ont permis de reconnaitre de nouveaux faits relalifs au développement des Cocci- diens. L'auteur à étudié en outre le développement des Grégarines Monocistidées, et il a trouvé que la loi de Haeckel sur le développement des Métazoaires est vérifiée aussi pour les Protozoaires; c’est-à-dire que les Grégarines Monocistidées, avant d'arriver à la forme adulte, passent par des états rappelant des espèces dont l’évolution n’est pas encore accomplie. M. Min- gazzini apporte des modifications à la classification actuelle, et il en propose une nouvelle qui s'appuie sur ses nouvelles recherches; il ajoute enfin de nouvelles espèces à celles déjà connues. — M. Lovisato commu- nique à l’Académie les recherches qu’il a exécutées en Sardaigne, sur la constitution géologique de l'ile. Se re- portant aux stratifications observées et aux fossiles re- cueillis, M. Lovisato avait déjà affirmé que le Pliocène n'existe pas dans l’île, et que tout ce qui a été signalé par Lamarmora dans sa carte comme appartenant au Pliocène, doit être rapporté au Miocène. Dans la pré- sente note M. Lovisato donne de nouveaux détails qui confirment ses premières déductions. Ernesto Mancini. 208 CHRONQUE CHRONIQUE LE GÉNÉRATEUR TUBULAIRE A L'appareil réalisé par M. G. Séguy présente sous un faible volume une remarquable puissance de produc- tion, et de plus se distingue des appareils similaires par la simplicité et la régularité du fonctionnement, Il se compose essentiellement d'une série de tubes de verre entourés extérieurement d’une hélice d’alu- minium et traversés intérieurement par une tige du même métal !, Toutes les hélices extérieures sont réu- nies entre elles, et constituent l'un des pôles, l’autre étant constitué par l’ensemble des tiges intérieures. Chacun des tubes forme ainsi un appareil à ozone com- plet; leur ensemble, enfermé dans un tube de verre unique, qui dans le modèle ordinaire a un diamètre de 3 centimètres et une longueur de 12 centimètres, pré- sente ainsi sous un volume restreint un appareil d’un débit très considérable. Cel instrument offre un autre avantage au point de vue de la circulation des gaz, Les appareils précédents exigeaient Héspie fort incommode de soufflets ou de pompes à air. lei l'appel de gaz se produit régulière- | C’est M. Seguy père qui, le premier, a signalé en 1875 la supériorité de l’aluminium pour cet usage, et l’a adopté dans la construction des tubes à ozone de M. Houzeau. OZONE DE M. GASTON SEGUY ment et d’une facon automatique sans aucun dispositif encombrant, par l’utilisation de la forceascensionnelle de l'air chaud provenant du ballon de verre muni laté- ralement d’une prise d’air {voir fig.) et qu'il suffit de chauffer légèrement. Dans l'emploi de tout appareil à ozone, il est indis- pensable de prendre quelques précautions qui se jus- tifient d’elles-mêmes par la connaissance des proprié- tés et des conditions de stabilité de ce gaz. On doit proscrire les raccords en caoutchouc, éviter de chauffer trop fortement, et se mettre à labri ‘de l'humidité, par suite bien se garder de mettre en présence de l'eau l'ozone produit, et ne le conserver que sur le mer- cure. L'appareil de M. Seguy, déjà à l’essai à l’Institut Pas- teur, est appelé à rendre de grands services en méde- cine, car l'oxygène ozonisé constitue peut-être un agent thérapeutique trés efficace, Dans le traitement de l’anémie, les inhalations d’ozone produiraient un effet bienfaisant en augmentant, ainsi que l’a montré le D Labbé, la quantité d’oxyhémoglobine du sang !, On préconise également l’emploi de l'ozone dans les affections du laryax et du pharynx, dans la tubercu- lose, pour le pansage des plaies comme traitement préventif contre la gangrène, enfin pour la désinfec- lion des chambres de malades atteints d’affections épi- démiques. Au point de vue industriel, le même appareil per- mettra également d'utiliser plus souvent l'ozone. On sait qu’il peut jouer un rôle actif dans la rectification LE :s alcools, le vieillissement artificiel des eaux-de-vie, la fabrication du vinaigre, des huiles, de la caféine et des parfums, Edgard HAUDIÉ. Nous recevons le premier numéro de la Revue des sciences naturelles de l'Ouest, paraissant à Paris, 14, bou: levard Saint-Germain, tous les trois mois. « Cette revue a pour objet de mettre en relation tous ceux qui dans l'Ouest de la France s'occupent des questions du do- maine des sciences naturelles, Laissé dans l'ombre, l'Ouest mérite qu'on s'intéresse à ses savants et aux recherches qu’ils y poursuivent chaque jour. La Revue, dont chaque fascicule comprendra 80 pages, s’efforcera de faire connaître les travaux des spécialistes de cette région et sera exclusivement consacrée à des articles ayant trait surtout aux anciennes provinces de Bre- lagne, Anjou, Maine, Poitou, Aunis et Saintonge ». Nos lecteurs ont sans aucun doute appris la mort de M, Cahours survenue le 17 de ce Nous consacrerons prochainement une mois. notice nécrologique à l’illustre chimiste que la Science vient de perdre, 1 Le mémoire du Dr Labbé sur le traitement de l’anémie et de la chlorose par l'ozone contient des détails précieux sur son mode d'emploi. 7e Directeur- Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. « À 2° ANNÉE INF Wl 15 AVRIL 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCE PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LA CAUSE DE L'ÉQUILIBRE DANS LA MOLÉCULE Il y a deux manières de concevoir la molécule : ou bien elle est composée d’un chaos d'atomes tournant sans ordre autour d’un centre de gravité commun, où bien elle a (au moins en parlie) une forme géométrique fixe, c'est-à-dire que chaque atome oscille autour d'un point fixe. Celte dernière manière de voir s'appuie sur les découvertes de M. Pasteur relatives au rapport qu'il y a entre la dissymétrie des cristaux et le pouvoir rotatoire des corps dissous; elle est confirmée par la découverte que j'ai faite en 1874, en même temps que M. Van T’Hoff, d'une règle pratique permettant de prédire d'après la formule de constitution le pouvoir rota- loire d’un composé organique carboné, car cetle règle est déduile de la dissymétrie de la molécule, qui ne peul exister que si sa forme est invariable. De nombreux corps actifs nouveaux fabriqués de toutes pièces ont vérifié ces lois, et, en dernier lieu est venue la remarquable découverte de M.Bayer, qui a trouvé dans les composés d'addition de la benzine une série nouvelle d’isomères diffé- rents, suivant que les atomes qui s'ajoutent sont tous situés du même côté du plan de l'hexagone (corps cis ou trans) ou bien les uns d’un côté el les autres de l’autre (corps à la fois cis et trans). I L'élude des isoméries et des pouvoirs rotatoires qui résultent de la fixité de la forme moléculaire, constitue ce que M. V. Meyer a appelé la sferéo- chimie, c'est-à-dire la géométrie de la molécule chimique ; il y avait utilité, je crois, à trailer cette question géométrique indépendamment de la REVUE GÉNÉRALE, 1891. question dynamique, car la vérilicalion de ces faits géométriques n’impliquait aucunement la vérifi- cation des hypothèses faites sur les causes qui main- tiennent l'équilibre moléculaire. Il est vrai que le problème dynamique n'en existe pas moins en lui-même et l'on doit se poser la question de savoir pourquoi le gaz des marais CH“ etses dérivés ne sont pas à l’élat d’un chaos formé de cinq atomes. À cette question M. Van T’Hoff et l'école allemande répondent que le carbone a la vertu de maintenir en place les quatre atomes d'hydrogène ou les radicaux substitués au moyen de quatre pôles attractifs correspondant aux an- ciennes valences. Ce sysième de la valence dans l'espace consiste donc à expliquer le fait par une hypothèse nouvelle, inventée expressément pour satisfaire à cette condition. L'action de ces quatre pôles ramènerait les quatr2 atomes d'hydrogène du gaz des marais aux sommets d'un tétraèdre dont le carbone estle centre, et les forces qui agissent sont, de l’aveu de M. V. Meyer, perpendiculaires àla direclion qui va du carbone à l'hydrogène, ce qui exige que l'atome de carbone occupe un volume appréciable. Ces difficultés à elles seules justifient le soin que j'ai pris de ne pas mêler la question dynamique à la stéréochimie. Il y en a d’autres en- core, car si le carbone et l'azote sont doués de pôles attractifs, les atomes ou les radicaux qui leur sont combinés vont se placer forcément en face de ces pôles ; d'où résulteraient deux choses : 1° Les dérivés iodés, bromés ou chlorés d’un car- bure d'hydrogène, devraient avoir la même forme géométrique et par conséquent la même forme cris- [l 210 A. LE BEL. — LA CAUSE DE L'ÉQUILIBRE DANS LA MOLÉCULE talline que le carbure lui-même. J'ai déjà dé- montré par des exemples, la plupart anciens et quelques-uns nouveaux, quil n’en est rien !. 99 Il résulte de la théorie des pôles que dans tous les dérivés du carbone et de l'azote, la molé- cule a une forme géométrique invariable, quelle que soit la nature des alomes ou radicaux combi- nés à l'azote. Ceci parait en effet exact pour le car- bone, quoique l’on n'ait pas encore fait les corps actifs les plus simples, comme le gaz des marais, substitués de fluor, de chlore et de brome : C(H,F1,CL Br). Mais pour les sels ammoniacaux,nous savons, au contraire, qu'il en est tout autrement. L'azote étant uni dans le chlorure d’ammonium à cinq atomes, on doit lui supposer cinq pôles qui ne peuvent être symétriquement situés dans l’espace; de là il ré- sulte qu’il devrait y avoir deux méthylamines, par exemple, et une foule d’isomères dont on ne trouve aucun échantillon, du moins dans le bas de la série. J'étais moi-même si persuadé que la molécule a une formeinvariable,queje préférais admettre qu'un seul des isomères prévus était stable, chose qui, dans le système des pôles, était déjà inexplicable ; mais, si l’on renonçait à l'hypothèse des pôles, on pouvait concevoir facilement que le corps substitué possède une seule forme d'équilibre et que cet iso- mère unique ait une forme géométrique invariable; j'ai cherché à prouver ce point par une recherche sur le pouvoir rotatoire. En effet, si nous substi- tuons, dans le chlorure d’ammonium Az HCl,quatre radicaux différents, quel que soit leur arrange- ment dans l’espace (que le chlore ou l'azote soil au centre) pourvu que la forme géométrique soit | stable et pas plane, il y aura dissymétrie. J'ai donc préparé le corps Az(H,CHS,C2H5,C*H7)CI, sel qui (en comptant l'hydrogène) renferme quatre radicaux distincts, et qui constitue un excellent milieu pour les moisissures ; or, après avoir fait des cultures considérables, le résidu resta,contre mon attente, absolument inactif. Nous sommes donc bien obligés d'admettre que dansles premiers dérivés de substitution du chlorure d’ammonium, la molécule n'a pas une forme invariable, en d'autres termes que les radicaux alcooliques ou du moins quelques- uns d’entre eux, permutent à la température où nous opérons. L'effet de ces permutations est de transformer les isomères chimiques et optiques l’un dans l'autre; après tout, la même chose a lieu dans la série grasse, puisque l’acide tartrique, 1 Voyezle Bullelin de la Société chimique de Paris, 1890: l'alcool amylique, etc., perdent leur pouvoir rota- toire el se racémisent.à des températures plus éle- vées, il est vrai. Dans le système des valences dans l’espace on peut fort bien admettre que les pôles de l'azote à la température habituelle et ceux du carbone à une température plus élevée,sonttrop faibles pour maintenir en place les radicaux alcooliques ; mais au moins les faits devraient se passer de la même manière pour tous les termes la série, et c’est ce qui n’a pas lieu. Tout récemment en effet j'ai démontré que les choses changent de face lorsque les substitutions sont au nombre de quatre et que les radicaux substitués sont des termes suffisamment élevés de la série alcoolique! : à ce moment, l'isomé- rie et le pouvoir rotatoire deviennent possibles. La cause qui maintient les radicaux à leur place semble donc résider en eux-mêmes et l’on est naturellement amené à l’idée que lorsqu'ils sont suffisamment grands,ils se callent réciproquement. Comme on ne savait pas à quel moment la molé- cule devait acquérir une forme invariable, le ha- sard seul pouvait fournir cette indication; elle m’a été donnée par les deux isomères du chlorure de triméthyl-isobutyl-ammonium découverts en 1890. Il y avait donc lieu de tenter de nouveau d’ob- tenir des corps aclifs en choisissant quatre radi- caux différents et plus élevés que les précédents, de facon à augmenter encore la solidité de la mo- lécule. Cette expérience m'a réussi ? dès la pre- mière tentative sur le corps : Az (CH°,C2H°,CH!,C*H”) C1 qui a acquis par les moisissures un pouvoir rota- toire considérable. Il : Nous allons à présent rechercher si l'équilibre de la molécule ne peut pas s'expliquer autrement que par l'hypothèse des pôles. M. Mendelejeff depuis longtemps avait posé le principe que dans une molécule tous les atomes réagissent les uns sur les autres; mais,comme l’affi- nité n’est qu'une force attractive, il fallait pour maintenir les atomes à une certaine distancelesuns des autres, l'intervention d'une force répulsive. M. Guye, dans ses recherches sur le changement de signe du pouvoir rotaloire, a montré que ce change- ment coïncide avec le déplacement du centre de gravité, en calculant ce dernier d’après l'hypothèse du tétraèdre régulier de Van T'Hoff. Certaines contradictions se présentèrent dès l’abord; la plupart ont disparu quand, au lieu de supposer le tétraèdre régulier, on admit que le radical uni au 1 Comples rendus, Académie des Sciences de Paris, avrili891. ? Comptes rendus, Académie des Sciences de Paris, 1890. à E METCHNIKOFF. — STRUCTURE, DÉVELOPPEMENT ET REPRODUCTION DES BACTÉRIES 211 carbone était situé dans la direction du pôle, mais à une distance variable. Cette distance, M. Guye la caleulait avec les sphères répulsives de M. Van der Vals etposait aussi en principe que parmi les for- ces répulsives qui agissent à l’intérieur de la mo- lécule, 1! fautcompter celles qui empêchent les gaz sous haute pression de se comprimer suivant la loi de Mariotte etsur lesquelles on à basé la théorie du point critique. J'ai établi de mon côté que le jeu de ces forces répulsives pouvait remplacer les pôles et suflisail dans les composés saturés du carbone à maintenir l'équilibre intérieur de la molécule ’. Ce système, qui peut être généralisé, est exempt des deux dé- fauts que j'ai signalés dans la théorie des pôles. En effet : 1° le calcul démontre que les sphères répulsives des atomes de chlore, de brome et d’iode, sont fortement différentes ; de là résulte que les formes d'équilibre des carbures perchlorés, perbromés ou périodés, doivent être différentes dans certains cas, el cela explique les différences observées dans les formes cristallines. 2° Dans les composés dérivés du chlorure d'am- monium, on comprend que, si les sphères répul- sives sont assez pelites, elles cesseront à un mo- ment donné de se toucher et que dans le bas de la série les permutations des radicaux deviennent possibles. Néanmoins, si la plupart des faits connus s’expli- quent en dehors de l'hypothèse des pôles, il est possible, soit par suite d’une rotation de l’atome, soit par quelque autre manière, que ce dernier agisse d'une facon particulière dans une direction donnée et possède deux pôles ou davantage. Mais on ne devra recourir à cette hypothèse que lorsque les forces connues ne suffiront plus pour expliquer les phénomènes observés. A. Le Bel. Docteur ès sciences. LES IDÉES NOUVELLES SUR LA STRUCTURE, LE DÉVELOPPEMENT ET LA REPRODUCTION DES BACTÉRIES ‘ Un grand intérêt s'attache en ce moment à la morphologie des Bactéries. Pour la bien étudier, il convient de considérer ce pelil groupe de micro- organismes non seulement en lui-même, comme s’il était isolé el constiluait quelque chose de par- ticulier dans la Nature, mais aussi dans ses rap- ports avec d’autres groupes voisins d’Animaux et de Plantes. = [ Quant on découvrit les différents représentants des Bactéries sous forme de petits êtres doués d'une mobilité extrême, on ne douta pas que ce fussent des animalcules appartenant à la grande classe des Infusoires. Alors, en effet, tous les orga- nismes doués de mobilité spontanée furent consi- dérés comme des animaux. Bientôt cependant la découverte d'un état mobile chez de véritables plantes devait montrer que ce caractère de mobi- lité ne pouvait nullement servir à déterminer la nature des organismes inférieurs. En ce qui con- cerne spécialement les Bactéries, on devait, en outre, être frappé de ce fait qu'un grand nombre d’entre elles se présentaient souvent sous forme de filaments et d’autres états analogues à ceux de beaucoup de plantes inférieures. On fut donc obligé de soustraire les Bactéries au Règne animal pour les classer parmi les Végétaux. Leur place était désignée parmi les Thallophytes 1 Bulletin de la Société chimique de Paris, 1890, 2 Lecon faite à l'Institut Pasteur. possédant un état mobile, c'est-à-dire parmi les Champignons ou les Algues. L'absence presque constante de chlorophylle chez les Bactéries cons- tiluant un caractère commun avec les Champi- gnons, on élait tenté de les considérer comme un groupe de cette classe, et c'est pourquoi on les désigna longlemps sous le nom de Schizomycètes. Une élude plus approfondie de ces organismes devait cependant montrer d'une facon tout à fait claire, que ce sont les Algues qui présentent les liens de parenté les plus accusés avec les Bactéries. Ce résultat, actuellement accepté par presque tous les botanistes, mérite examen. Déjà la forme extérieure de la plupart des Bactéries offre une ressemblance frappante avec celle de beaucoup d'Algues, d’un groupe de celles-ci nolamment, CDD Fig. 1. — Différentes formes de Cyanophycées. connu sous le nom de Cyanophycées où Phycochre- macées, Algues colorées en vert bleuàtre (fig. 1). Dans 212 E. METCHNIKOFF. — STRUCTURE, DÉVELOPPEMENT ET REPRODUCTION DES BACTÉRIES ce groupe il existe, comme chez les Bactéries, des formes en filaments ou en bâtonnets(fig.1{,B), ainsi que des cellules rondes réunies en amas différents, formant des chapelets (D) ou des corps quadran- gulaires, ronds et irréguliers. Mais ce qui est sur- tout à noter, c'est le fait que parmi les Cyanophy- cées nous louvons, des formes spiralées, des Spi- rulines (C) comme on les appelle, qui ressemblent beaucoup aux Spirilles parmi les Bactéries. Ce trail de ressemblance nous est d’autant plus pré- cieux que la classe des Champignons est entière- ment dépourvue de formes roulées en spirale. Un autre lien de parenté entre les Cyanophy- cées et les Bactéries nous est fourni par la fré- quence des formes glaireuses, qui produisent si souvent chez les Bactéries des z0oglées et qui repré- sentent chez les Cyanophycées des formes dites palmellacées (A). Il est bien établi déjà que les zoo- glées ne sont qu'un état plus ou moins passager de beaucoup de Bactéries et qu'elles ne peuvent être, par conséquent, considérées comme un genre par- üculier. Une zooglée peut se produire aux dépens de bactéries filamenteuses, dont les cellules se recouvrent par une ou plusieurs couches glaireuses qui se réunissent pour former des amas de dimen- sions souvent très considérables. Des masses ana- logues se rencontrent fréquemment parmi les Cya- nophycées, dont quelques-unes, commeles Nostoca- cées, forment des amas ronds très fréquents dans les endroits humides. Quoiqu’on ne connaisse pas jusqu’à présent d'exemple bien établi d'une forme cyanophycée, dont l’état palmellacé se ratlache- rait sûrement à un état filamenteux, il est bien probable néanmoins que de pareils exemples exis- tent, car des phénomènes analogues ont élé obser- vés dans le groupe des Algues chlorophylliennes, notamment dans la famille des Ulothrichées. Des filaments de ces dernières éprouvent, à un moment donné, un changement de forme {rès considérable qui consiste en ce que leurs cellules sécrèlent une gaine glaireuse, se multiplient rapidement et se transforment en un élat palmellacé véritable (fig. 2, A et B). En étabiissant ce parallèle dans le cycle du développement des Algues et des Bac- téries, nous abordons un problème qui a été lon- guement discuté et qui n’esl pas encore définilive- ment résolu dans toute son étendue. Je veux par- ler de la question du pléomorphisme des Bactéries. Tout le monde est unanime à accepter que cer- laines bactéries peuvent se présenter sous difé- rentes formes selon l'état de leur développement ou bien selon les influences directes du milieu extérieur. Ainsi on reconnait facilement que le bacille charbonneux s’allonge en filaments et ne reste en état de bâtonnets que dans l'organisme animal ou dans quelques autres circonstances. L'état de bacille n’est dans ce cas qu'un stade du développement d'une bactérie en forme de leplo- thrix. Mais tandis que pour beaucoup d’observa- teurs, avec M. Cohn en tête, ce poly ou pléomor- .2. — Ulolhrix mucosa. Transformation en état palmellacé, d’après Cienkowsky. phisme n'est que très restreint, pour d’autres, il se présente d'une manière beaucoup plus géné- rale. M. Nägeli a prétendu même que peut-être toules les bactéries n'étaient que les différents états d'une seule et même espèce ou bien d’un nombre très restreint d'espèces, qui prenaient des formes particulières suivant les condilions spé- ciales de leur existence. Ainsi, par exemple, la même bactérie pourrait provoquer, lantôt la fer- mentation lactique, tantôt la fermentation buty- rique, tantôt une maladie tantôt une autre. Ce n'élaient pour lui nullement des transformations d'espèce en espèce comme l'ont prétendu beau- coup de ses interprélateurs, mais bien des change- ments d'états différents d'une seule et même espèce, comme le passage d’une bactérie filamen- teuse à une zooglée. Je n'ai pas besoin d'insister sur le fait que cette supposition de M. Nägeli ne s'est aucunement réalisée. Des recherches très nombreuses faites pendant les treize années écou- lées depuis l'apparition de l’ouvrage du célèbre bota- niste,ont pleinement démontré que dans le groupe de Bactéries il existe non seulement plusieurs, mais un très grand nombre d'espèces bien délimitées qui ont chacune son propre cycle de développe- ment. On pense souvent que ce résullat, bien soli- dement établi, a complètementébranlé lathéorie du pléomorphisme des Bactéries, ce qui n’est pas vrai pourtant. Il existe en réalité beaucoup d’espèces de Bactéries et même d'espèces bien différentes; mais il exisle aussi des Bactéries véritablement pléomorphes, c'est-à-dire des Bactéries, dans Île cours du développement desquelles nous retrou- vons des bätonnets, des coccus ou des spirilles. Ainsi, par exemple, des bacilles à bouts arrondis, végélant dans un milieu favorable, se divisent très rapidement et finissent par donner des formes M E. METCHNIKOFF. — STRUCTURE, DÉVELOPPEMENT ET REPRODUCTION DES BACTÉRIES 213 ovales, très petites qui deviennent ensuite de véri- tables coceus. C'est le cas pour le microbe du cho- léra des poules, pour le micrococcus prodigio- sus, ele. Des milieux moins appropriés ralentis- sent la multiplication, de sorte que les bacilles ne se transforment plus en coccus et conservent leur forme bucillaire, comme cela a lieu pour le Micro- coceus prodigiosus, cullivé dans un milieu acide. Il est tout naturel queles bacilles à bouts tranchés, comme par exemple le bacille charbonneux, ne présentent pas cetle transformation en coceus et, se divisant de plus en plus, conservent néanmoins leurs formes rectangulaires. Dans ces cas nous pouvons avoir à faire encore à des bacilles pléo- morphes, mais ce ne sont plus des coccobarilles, c'est-à-dire des bacilles se transformant en coccus. D'un autre côté, il est bien démontré que cer- taines Bactéries filiformes peuvent donner nais- sance à des spirilles. Ainsi M. Zopf a vu des spirilles se développer au bout des filaments d’un Cladothryx ce qui a été dernièrement confirmé par M. Billet. Plusieurs espèces de spirilles présentent dans leur premier élal l’aspect de vérilables bacilles. Parmi les Bactéries à cycle de développement des plus pléomorphes il faut citer un espèce saprophytique qui a élé découverte par M. Kurth, décrite par lui sous le nom de Bacterium Zopfi et dont les différents états A OOÈ ont élé observés dans des û C9 D D DES cultures pures sur des milieux artificiels (fig. 3). = Il s’agit d'un bacille à RER bouts arrondis et d'ordi- ——— 5 naire assez court, qui se divise en cellules de plus Fig. 3. — Bacterium Zopfi, en plus petites, qui finis- l'après M. Kurth. à : = mr 0 nr sent par ètre tout à fait rondes et semblables à des coccus. D'autre part les baciiles s'allongent pour former des filaments droits ou recourbés, souvent en forme de spirales. Quoiqu'on n'oblienne pas de véritablesspirilles dans le cyele de développement du B. Zopfi, il s’y pro- duit néanmoins des stades analogues aux vibrions. La plupart des observateurs qui sont opposés à l'admission du pléomorphisme des Bactéries cherchent à prouver que les formes les plus pléo- morphes ne sont pas des Bactéries véritables, comme le Crenothrir, qui habite les eaux douces, ou bien que le pléomorphisme ne se rencontre que parmi les Bactéries saprophyles, comme chez le Bacterium Zopfi. Mais l’exemple du microbe du choléra des poules nous montre déjà que cette idée ne peut êlre acceptée, car il s’agit ici d’une Bacté- rie tout à fait pathogène. Je veux ciler encore un autre cas. J'ai eu la chance de rencontrer une Bactérie pathogène chez les Daphnies, qui présente de la facon la plus dé- monstrative le passage des bacilles aux spirilles (fig. 4.). Dans les premiers stades de la maladie, le petit crustacé entièrement transparent et par conséquent commode à étudier à l’état vivant, est envahi par une Bactérie ovale d'assez grandes di- mensions ; en se divisant successivement,celle Bac- lérie se transforme d’abord en bätonnets {rès ré- guliers qui se courbent et prennent la forme de petits saucissons; ces derniers se transforment ensuite en de véritables spirilles qui finissent par se dissocier en filaments de très petites dimen- sions. Voilà donc une Bactérie tout à fait pléo- morphe eten même Lemps si exclusivement patho- gène que jusqu'à présent on n’a point réussi à la cultiver en dehors de l'organisme. Il ya bien d’autres exemples encore de Bactéries pléomorphes que je ne puis citer ici. Je me conten- terai seulement de dire que le pléomorphisme des Bactéries est un phénomène constaté aussi bien Fis. 5. — Bacilles Fig. 4. dans leur gaine. — Spirobacillus Cicnkowsky. S bacillus Cienk ki que chez beaucoup d'autres Algues et que l’exis- tence de cette variabilité de formes ne prouve nul- lement que toutes les Bacléries soient capables de se transformer en tous les états différents : coccus, bacilles, spirilles, filaments. Je n'ai pas besoin d'indiquer qu'il ne s’agit ici nullement de transformation de Bactéries en Champignons ou en Algues supérieures, comme on l’a prétendu au- trefois, ni de mutabilité d'espèces s'opérerant sous l'œil de l'observateur. Le pléomorphisme des Bactéries est tout simplement un phénomène du développement qui présente une grande impor- tance pour l'étude de ces microbes, et qui en même temps sert à élablirles liens de parenté qui existent entre les Bactéries et les Algues véritables. Ces liens peuvent être démontrés, non seulement par l'étude du cycle évolutif, mais aussi par l'exa- men de la structure de la cellule bactérienne. Cette dernière est toujours enveloppée par une mem- brane mince, composée d’une substance voisine de la cellulose, quoique ne donnant pas, dans la ma- jorité des cas, la réaction caractéristique de cette dernière. Le plus souvent on trouve la cellule bac- térienne enveloppée en dehors de la membrare par une gaine gélatineuse plus ou moins épaisse et consistante (fig. 5). Dans un grand nombre de 214 E. METCHNIKOFF. — STRUCTURE, DÉVELOPPEMENT ET REPRODUCTION DES BACTÉRIES cas elle frappe les yeux comme chez les palmella- cées ; dans d’autres, son existence ne peut être dé- montrée qu’à l’aide de colorations ou réactifs spé- ciaux. Jusqu'à ces derniers temps, on considérait le contenu de la cellule bactérienne comme tout à fait homogène et composé uniquement du proto- plasme. Mais des recherches minutieuses de M. Bütschli ont prouvé que les Bactéries se sou- mettent à la règle générale établie pour tous les organismes, c'est-à-dire que le contenu de leurs cellules se compose d’un protoplasme et aussi d'un noyau. Ces Bactéries présentent seulement cette particularité, c’est que la quantité du proto- plasme est minime en comparaison de la dimen- sion du noyau (fig. 6). Chez beaucoup de Bactéries on à même de la peine à retrouver le protoplasme, parce que le contenu de la cellule presque tout en- tier est occupé par le noyau. Les mêmes procédés qui ont permis de discerner cette structure de la cellule bactérienne ont suffi pour démontrer que flagellum noyau Fig. 6. — Bactérie avec noyau, Fig. 7. — Spirillum d’après Bütschli. avec des flagella. les Cyanophycées possèdent également un noyau véritable, fait qui a été méconnu pendant long- temps et qui, au point de vue de la structure intime, permet de ranger les Bactéries tout à fait à côté des Cyanophycées. Les cellules bactériennes, souvent comme chacun sait, sont pourvues dans ces cas de cils vibratiles, qui se trouvent tantôt à l’une, tantôt aux deux extrémités de la cellule à la fois; quelquefois ils sont placés sur les côtés ou forment des touffes aux extrémités de la cellule (fig. 7). On pensait longtemps que ces cils ne se trouvaient que chez les bacilles et les spirilles, et faisaient complètement défaut chez les coccus; mais, après la découverte d'Ali-Cohen, confirmée par d’autres observateurs, on s'est assuré que les coceus ne présentent nullement une exception à la règle générale. mobiles, Il Passant à la Reproduction, nous devons signaler d’abord la division comme le mode universelle ment répandu parmi les Bactéries et qui forme encore un lien de parenté indiscutable avec les Algues. Souvent, lorsqu'on a affaire à un microbe dont on ne connait pas la position systématique, il suffit d'examiner son mode de reproduction pour déterminer la place qu'il occupe. Ainsi le bour- geonnement est caractéristique pour les levüres, tandis que la division accuse la nature bactérienne ou celle d'une algue véritable. Dans la plus grande majorité des cas, les Bactéries se äivisent transver- salement dans une seule di- rection (fig. 8, A), ce qui amène à des formes bacil- laires ou filamenteuses com- me des Zeplothrir, strepto- coccus, Spirilles et autres. Dans des cas plus rares, la division s'opère dans deux direclions opposées (fig. 8, B), ce qui a pour résullat des formes membraneuses, Lelles que Aerista. Quelquefois les cellules bactériennes se divisent suivant les trois directions de l’espace, comme chez les sarcines (fig. 8, C). Cet exemple nous montre que la division longitudinale n'est point contraire à la nature bactérienne et par conséquent ne peut servir d’ob- jection contre l’admission dans ce groupe de formes qui ne se divisent que de cette manière. Ce mode de division est caractéristique pour les Pasteuria- cées (fig. 8, D), bactéries qui forment des colonies très riches en individus. La division longitudinale, s’opérant d’une facon incomplète, permet la pro- duction de formes ramifiées, qui au premier abord ne ressemblent en rien à des bactéries ordinaires. Mais après l'achèvement de la division, les indivi- dus se séparent de la colonie et accusent nette- ment leur nature bactérienne. On voit donc que, même dans les cas les plus anormaux, la règle générale d'après laquelle les Bactéries se multiplient par division, persiste. Il serait toutefois imprudent de nier complète- ment la possibilité du bourgeonnement dans le groupe des Bactéries. Plusieurs représentants de ce groupe, se trouvant dans des conditions défavo- rables, acquièrent souvent des formes insolites, bien modifiées, qui ont été désignées par Nägeli comme des formes d’érvolution. Elles prennent tantôt l'aspect de massues ou de corps fusiformes, tantôt celui de masses arrondies et bien d’autres encore (fig. 9). Dans cet état involutif quelques bactéries deviennent capables de produire des bourgeons véritables el de donner ainsi naissance à des formes ramifiées. Comme exemple nous pou- vons citer le bacille tuberculeux qui, cultivé à des températures élevées, apparait sous l'apparence de petits mycéliums avec des ramifications véri- tables, dues à un processus de bourgeonnement Fig. 8. — Types de division des Bactéries. | | Æ. METCHNIKOFF. — STRUCTURE, DÉVELOPPEMENT ET REPRODUCTION DES BACTÉRIES 215 fig. 9, A). Ces formes, dites involutives, pourraient 5 ul 2 peut-être servir de trait d'union avec un petit groupe de plantes ramifiées, connues sous le nom Ÿ Fig. 9. — Formes d’involution. Fig. 40 — S/reptothrir, d'après M. Gasperini. de Sfreptothrir (fig. 10) et présentant une ressem- blance parfois très grande avec des Bactéries véri- tables. Les représentants de ce genre ont été trou- vés dans le canal lacrymal de l'homme ainsi que dans l’eau de rivière, dans l'eau de mer, dans l'atmosphère, etc.; ils peuvent être facilement rencontrés dans le courant des recherches bac- tériologiques et présentent encore un intérêt tout spécial par rapport au microbe de lActi- nomycose. Quoique ces formes de filaments non cloisonnés, mais véritablement ramifiés, soient encore fort peu connues, elles ont droit certaine- ment à l'attention des observateurs. Comme on n'a pas encore découvert ni dans le groupe des Bactéries, ni dans celui des Cyanophycées de reproduction sexuelle, on serait tenté de supposer dans ces formes ramifiées un état précédant la formation d'organes sexuels. Je ne veux pas entrer ici dans des spéculations sur ce sujet, mais je crois avoir le droit d'attirer l'attention sur ces états ramiliés, parce qu’en tous cas ils présentent des formes bactériennes rappelant certains champi- gnons. Il yadonc, dans l'histoire naturelle des Bactéries, des faits qui ne concordent pas tout à fait avec la théorie qui en fait des Algues si voisines des Cyano- phycées. Je dois mentionner encore un autre point de dissemblance des deux groupes. Les Cyanophycées se reproduisent à l’aide de spores constituées sim- plement par des cellules renflées et munies d’une enveloppe protectrice, formant ainsi ce que l’on appelle des arthrospores. Chez les véritables Bacté- ries ce mode est le moins répandu et ce n’est que chez descoccus(Zeuronistæ)etchez quelquesspirilles (du choléra) qu'on a pu découvrir des arthrospores formées par des cellules entières (fig. 11). Chez la plupart des bactéries, dont on connait l’état de spores ou de germes, ces éléments apparaissent sous forme d’endospores, c'est-à-dire de spores qui se produisent non à la suite d'une transformation totale d'une cellule entière, mais bien à la suite d’un acte de croissance aux dépens du contenu de la cel- lule. L'endospore apparait d'abord comme un pe- tit grain au milieu du contenu de la cellule; il s’y Fig. 12. — Formation d'en- Fig. 11.— Vibrion cholérique dospore dans un bacille. avec arthospores, d’après Hüppe. développe comme un parasite intercellulaire et finit par remplir toute ou presque toute la cellule (fig. 12). Ces endospores, qu’on n’a pas encore re- trouvées d’une manière suffisante chez les coccus. mais qui sont répandues parmi les spirilles et sur- tout les bacilles, se munissent d’une enveloppe très solide qui permet de supporter les influences exté- rieures les plus défavorables, telles que la dessic- cation, haute température, elec. L'absense totale d’endospores parmi les Algues nous montre done que l’analogie avec les Bactéries est loin d'être aussi complète qu'on aurait pu le prétendre d’abord. Il est vrai que, d’après les re- cherches de M.Klein. il existe chez les Bactéries un mode de formation des spores intermédiaire entre les arthro et les endospores, mode qu'il a pu ob- server chez plusieurs bacilles, où la jeune spore, se trouvant logée dans la cellule bactérienne, pré- sente dès le début son volume définitif. Les véritables endospores, très rares en général, se retrouvent encore parmi quelques monades, c’est- à-dire les Infusoires flagellés, qui sous plusieurs points de vue rappellent les Bactéries mobiles, ainsi que les zoospores d’Algues et de Champi- gnons. On ne pourrait donc nier un certain lien de parenté des Bactéries avec les Infusoires flagellés. L’endospore des Bactéries, transportée dans des conditions convenables, donne naissance à une jeune Bactérie qui apparaît d'abord sous forme d’un petit corps ovale. L'acte de la germination est précédé d’un gonflement de la spore, dont l'enve- loppe éclate pour laisser sortir la cellule bacté- rienne. Les botanistes ont attribué une grande im- portance morphologique aux phénomènes de cette éclosion. Ils ont distingué les cas où l'enveloppe de la spore éclate à l’un des pôles (fig. 13), d’autres où elle éclate au milieu de la spore (fig. 14). L'exa- men de ce phénomène nous montre cependant que les deux modes se rencontrent dans une seule et même espèce, ce qui prouve que l'importance en a été beaucoup exagérée. 216 W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉL ECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS La cellule, d'abord ovale, s'allonge bientôt et la Bactérie nouveau-née ne tarde pas à se diviser de 5, Fig. 13, — Germination Fig. 14. — Éclosion trans- polaire de la Bactérie. versale chez le Bacillus sublilis. la façon habituelle et à donner la forme déve- loppée. Nous voyons donc, en résumant les connais- sances acquises sur la Morphologie des Bactéries, que ce groupe (qui est loin d’être encore suffisam- ment étudié), se rattache surtout aux Algues infé- rieures, telles que les Cyanophycées, présentant des formes analogues et une ressemblance dans le mode de production d'états gélatineux et de la reproduction par division. En même temps les Bactéries par leurs formes ramifiées se rattachent aux Champignons inférieurs, et par la production d'endospores touchent aux Infusoires flagellés. Cependant comme le plus grand nombre des ca- raclères rapproche les Bactéries des Algues, on doit les considérer comme un ordre particulier de cette classe de plantes thallophytes. E. Metchnikoff, Chef de service à l'Institut Pasteur. LES DÉCHARGES ÉLECTRIQUES DANS LES GAZ RARÉFIÉS ET LA CONSTITUTION DE LA MATIÈRE (Suite Dans un précédent article ! nous avons essayé de déterminer la répartition des molécules électrisées dans les gaz raréfiés. Continuant ces recherches, nous allons appliquer le même mode d’investiga- tion à l'étude des propriétés dela matière radiante, de la phosphorescence dans les vides extrêmes et de la génèse des éléments. Î.—MATIÈRE RADIANTE ET MATIÈRE ÉLECTRODE-RADIANTE Une des propriétés les plus caractéristiques de la matière radiante, propriété qui lui. a donné son nom, est qu'elle se meut approximativement en ligne droite et dans des directions à peu près la de l’électrode. Si faisons passer, d'une manière continue, le courant normales à surface nous d’induction à travers le tube à vide, nous pouvons imaginer deux façons différentes dont se produira Ou le gazeuses qui se trouvent près du pôle négatif, diminuera graduellement, et alors le phénomène son aclion. bien nombre des molécules ou bien les molécules reviendront en arrière par un moyen cessera au bout d’un certain temps; quelconque. Je vais employer un tube qui met en évidence ce retour des molécules. Voici un tube (fig. 4) où la pression est de 0001. Au milieu est un mince diaphragme de verre CG, percé de deux trous DetE. D'un côté du tube, est un pôle en forme de miroir concave ayant son foyer sur le premier trou D; derrière le trou D et en avant du 1 Voyez la Revue du 30 mars 1891 t. II, page 161: et Fin). trou E, se trouvent deux petits moulinets très mobiles, que le moindre courant de gaz à travers les trous peut meltre en mouvement. Fig. 1, | Lorsqu'on fait passer le courant en prenant le pôle concave comme pôle négatif, les deux mou- | linets entrent en rotation et montrent ainsi qu'un | courant le trou inférieur du diaphragme, en même temps qu'un de molécules passe à travers courant de molécules fraichement électrisées est : lancé parle pôle négatif à travers le trou supérieur. L'expérience parle d'elle-même et montre, aussi nettement qu'une expérience peut le faire, la vérité de la théorie. Cet apercu de l’état ultra-gazeux de la malière est une simple hypothèse qui, dans l’état actuel de nos connaissances, peut être re- | gardée comme une aide nécessaire à garder aussi longtemps qu'elle sera utile. Dans les recherches e W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS 217 expérimentales, les hypothèses premières doivent nécessairement être modifiées ou adaptées aux faits, ou même complètement abandonnées à me- sure queles observations deviennent plus précises. Dumas a dit très justement que les hypothèses sont comme des béquilles, que nous jetons aussi- tôt que nous pouvons marcher sans leur soutien. En résumant mes recherches sur la matière radiante et l’état des résidus gazeux fortement raréfiés soumis à un courant électrique, je dois répondre à certaines attaques contre les idées que j'ai émises. La plus importante de ces objections est contenue dans un volume de Mémoires de physique choisis et traduits de différentes sources sous la direction de la Société de Physique (Nol.T, 2% partie). Ce volume contient deux mémoires; l'un de Hittorf, sur la « conductibilité électrique des gaz »; l’autre de Puluj sur «la matière élec- trode radiante, et le soi-disant quatrième état ». Le mémoire du docteur Puluj me regarde plus particulièrement, et l’auteur y atlaque énergique- ment mes conclusions. L'espace dont je puis dis- poser icine me permet pas de discuter les diffé- renis points critiqués. Je tiens seulement à faire observer, en passant, que le docteur Puluj n’a nul- lement le droit de relier ma théorie du quatrième état de la matière à la théorie tout à fait trans- cendante de l’espace à quatre dimensions. J'ai déjà répondu à propos de la supposition inexacte que l’on m'attribuait, d’assimiler la lon- gueur de l’espace obscur qui se produit sous l’in- fluence de l’étincelle d’induction, dans un gaz fortement raréfié, avec le libre parcours moyen des molécules du gaz, à son élat naturel et à la même pression. Je pourrais citer de nombreux passages de mes écrits pour montrer que j'admels que le libre parcours moyen est modifié, et augmenté par l'électrisation !, 1 La longueur de l’espace obscur qui entoure le pôle négatif mesure la longueur moyenne de l’espace que parcourent les molécules entre deux chocs successifs. Les molécules élec- trisées sont projetées par le pôle négatif avec une vitesse connue, qui varie avec la pression et l'intensité du courant d’induction. (Philosophical Transactions, 1879, page 540.) La vitesse excessive des molécules qui rebondissent du pôle négatif leur permet de rejeter en arrière les molécules qui se meuvent plus lentement en s'avancant sur ce pôle. Le conflit se produit à la limite de l'espace obscur, où l’auréole lumi- neuse met en évidence l'énergie de la décharge. (Philosophical Transactions, 1879, page 507.) Ici donc nous voyons l’étincelle d’induction illuminer îes lignes de pression moléculaires produites quand on excite le pôle négatif. (Lecture faite à l’Institution Royale le 4 avril 1879.) L’excitation électrique du pôle négatif fournit la « force majeure » qui change, entitrement ou partiellement en une action rectiligne une vibration irréguliére dans toutes les directions. (Proceedings of Royal Society, 1880, page 412.) IL est aussi probable que la vitesse absolue des”molécules est augmentée de facon à rendre la vitesse moyenne avec REVUE GÉNÉRALE, 1891. Je suis appuyé, dans cette vue, par le Professeur Schuster, qui admet que le libre parcours moyen d'une molécule électrisée peut différer de celui d'une molécule à son état normal". La grande divergence entre Puluj et moi tient à ce qu'il suppose que : Za matière qui remplit l'espace obscur est formée de particules délachées mécaniquement des électrodes, chargées d'électricité statique négative, et se déplaçant progressivement en ligne droite. À ces particules détachées mécaniquement des électrodes, « de dimensions différentes, souvent assez considérables », Puluj attribue tous ces phé- nomènes de chaleur, de force, de phosphorescence que, à plusieurs reprises, j'ai décrits dans mes publications. Puluj s'oppose énergiquement à l’adoplion de la dénomination de « matière radiante » et propose à sa place le terme mal choisi de « matière élec trode radiante. » Je dis « mal choisi » parce que sa définition comme la mienne admet l'existence de la matière radiante, mais y accroche l'hypothèse que la matière radiante est la matière désagrégée des pôles. Puluj déclare que les phénomènes que J'ai décrits comme se produisant dans les gaz très raréfiés, sont produits par les fragments irréguliè- rement taillés de «matière électrode radiante »: ma conviction est qu'ils sont dus à la « matière ra- diante » c’est-à-dire aux molécules résiduelles du gaz. Si le sujet ne comportait pas de preuve expéri- mentale, je ne le soumettrais pas à mes lecteurs. Ce n'est pas ici l’occasion de discuter une contro- verse ; aussi me contenterai-je de décrire quelques nouvelles expériences qui démontrent la vérité de mon hypothèse. Permettez-moi d’abord d’en finir avee l'hypo- thèse de « l'Électrode Radiante ». Il estbien connu que quelques métaux, lels que l'argent, l'or, le platine se volatilisent, plus ou moins rapidement, dans un tube vide, quand on les emploie comme électrodes négatives, et couvrent d’un légerenduit les objets qui les entourent. C'est de ce fait que l'on a déduitla méthode bien connue pour prépa- rer électriquement de petits miroirs. L’aluminium, cependant, semble exempt de cette volatilité. Pour laquelle elles quittent le pôle négatif plus grande que la vitesse ordinaire des molécules gazeuses. (Philosophical Trans- actions, 1881, page 719.) 1 On a émis l'idée que l'étendue de l'espace obscur repré- sente le libre parcours moyen des molécules... Il a été noté, d'autre part, que l'étendue de l’espace obseur est, en réalité, béaucoup plus grande que le libre parcours moyen calculé de la manitre ordinaire. Mes mesures montrent qu'il est environ vingt fois plus grand. Cette remarque, cependant, ne constitue pas, en elle-même, une objection concluante : car, ainsi que nous l'avons vu, le libre parcours moyen d'union peut différer de celui d’une molécule en mouvement parmi d’autres molécules. (Scausrer. Proceedings of the Royal Society; XL VII, pp. 566-7.) 218 W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS cette raison, et d’autres encore, on l'emploie géné- ralement à la fabrication des électrodes. Si donc les phénomènes observés dans les gaz très raréfiés sont dus à la matière des électrodes, le métal le plus volatil doit donner les effets les plus intenses. Voici un tube (fig. 2 P — 0""00068) contenant Fig. 2, deux électrodes négatives AA’, disposées de façon à projeter deux taches lumineuses sur le verre phosphorescent qui forme le tube. L'une des élec- trodes, A”, esten argent pur, métal volatil, l’autre, A, est en aluminium, qui est, pratiquement, non volatil. On doit projeter du pôle d'argent une cer- laine quantité de « matière électrode» ,tandis qu'il n’en sortira pratiquement pas du pôle d'aluminium ; cependant, on constate que les deux lueurs phos- phorescentes, C, C', sont identiques. Si la «Matière Electrode Radiante » eût été l'agent actif, la phos- phorescence la plus intense aurait dû émaner du pôle le plus volatil. La figure 3 représente une autre disposition Fig. 3. expérimentale; un tube de verre allemand en forme de poire contient, près de sa plus petite ex- trémité, un pôle négatif À en argent pur, disposé de façon que son image renversée se projette sur l'extrémité opposée du tube. En face de ce pôle, se trouve un écran de mica, C, au centre duquel est. percé un petit trou, de façon qu’un étroit pinceau de rayons partant du pôle d'argent, puisse seul passer et former à l’autre bout du tube une tache brillante D. Le vide est à peu près le même que dans le tube précédent, et le courant a été main- tenu dans le tube pendant assez longtemps pour enlever une certaine quantité d'argent de l’élec- trode; on trouve en effet que l'argent s’est déposé dans le voisinage immédiat du pôle, tandis que la portion C, du tube, qui est restée continuellement phosphorescente, est pratiquement dépourvue de métal. L'expérience est longue à répéter, et je me con- tenterai d'en montrer les résultats. L'identité d'action de l'argent et de l'aluminium dans le premier cas, et la non-projection de l’ar- gent dans ce deuxième exemple, sont des faits suflisants pour condamner l'hypothèse du docteur Puluj, puisqu'ils prouvent que la phosphorescence est indépendante de la matière de l'électrode néga- tive. Nous allons employer une série de tubes (fi- gures 4 à 10) qui, à mon avis, résolvent, la question de façon à ne plus laisser aucun doute. Ces tubes ne contiennent pas d'électrodes intérieures, au milieu des molécules gazeuses résiduelles; ils vont me servir à répéter les principales expériences sur la matière radiante, sans pôle métallique inté- rieur. Dans tous ces tubes les électrodes, qui sont en argent, sont à l'extérieur, le courant agissant à travers le verre. Le premier tube contient le gaz assez peu raréfié, à l’état qui donne les stratifica- tions. C'est un simple cylindre de verre, sur les extrémités duquel on a déposé une couche d'argent, et où l’on a abaissé la pression jusqu'à 0" 002. L'apparence du tube est représentée dans la figure 4. Je fais passer le courant, et l’on voit que les stralifications, quoique faibles, sont parfaite- ment formées. Le tube suivant (fig. 5), montre l’espace obs- cur. C’est comme l’autre un cylindre de verre, avec une portion centrale rentrée, formant une sorte de gousset, et divisant le tube en deux com- partiments. Cette poche, argentée sur la-partie extérieure, forme un diaphragme de verre creux, qui peut être électrisé et former un pôle négatif. Les deux extrémités du tube, également argentées à l'extérieur, forment les pôles positifs, B',B. Je fais passer le courant, et l’espace obscur devient distinctement visible. La pression est ici de Om 076. L'élat suivant, correspondant à une matière plus W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS 219 raréfiée, est celui de la phosphorescence. Voici (fig. 6) un ballon ovoiïde, contenant de l'yttria pure et quelques rubis bruts. L'électrode positive B est sous la portion du tube qui renferme les ma- tières phosphorescentes. L’électrode négative A est à la partie supérieure du tube. Cette expérience montre le dé- veloppement de phosphores- cence des rubis et de l’yttria, sous le bom- bardementmo- léculaire - que l’on obtient a- vec une pres- sion intérieure de 0""00068. L'ombre d'un objet contenu dans un bal- lon, peut aussi être projetée sur la paroi 0p- posée au moyen de pôles exté- rieurs. Une croix de mica est soutenue au milieu du ballon (fig. 7), et si l’on réunit le pôle négatif à une petite tache d'argent À sur une paroi du ballon, en prenant comme pôle positif une autre plaque B, la paroi du ballon s’il- lumine d'une lueur phosphorescente, sur laquelle se découpe nettement l'ombre de la croix de mica. La pression intérieure est ici de 0"”00068. Passant aux phénomènes suivants, nous allons montrer la production de phénomènes mécaniques dans un tube ne contenant pas de pôle intérieur. Il est représenté dans la figure 8 (P — 0" 001). Il contient une petile roue en aluminium, portant des ailes de mica transparent, les pôles A et B étant dans une position telle que le foyer moléculaire tombe sur les ailes, et d'un côté seule- ment. Le bal- lon est placé dans la lanter- neetsonimage projetée sur l'écran ; on voit le moulinet tourner rapi- dement, chan- geant de sens quand on ren- verse le cou- rant. Voici un ap- pareil (fig. 9) qui montre que les molécules gazeuses résiduelles, concentrées en un foyer, y produisent de la cha- leur. Il consiste en un tube de verre, avec un ballon soufflé à une extrémité, et contenant un petit 220 W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS paquet de charbon de laine C, fixé en son centre. Le vide a été poussé à 0%" 000076. L’électrode Fig. 8. négative a été formée en revêtant d'argent la par- lie extérieure du ballon, et se trouve dans une position telle que son foyer se forme sur le mor- Fig. 9. ceau de charbon. L’électrode positive est un autre dépôt d'argent, à l'extrémité du tube. Je fais pas- ser le courant, et en regardant d’assez près on peul voir les étincelles brillantes du charbon, porté à l'incandescence par le courant moléculaire. Les anciens effets de la « matière radiante » peuvent donc être obtenus dans des tubes ne contenant pas d’électrode métallique suscepti- ble de se volatiliser. On pourrait dire que les parois des tubes, en contact avec les électrodes, deviennent elles-mêmes, dans ce cas, des élec- trodes, et que des particules du verre lui-même peuvent en être arrachées, et projetées de façon à produire les effets observés. C’est là un argument sérieux, qui peut heureusement être soumis à l'expérience. Dans le tube que voici (fig. 40. P— 0" 00068), le ballon est fait avec du cristal donnant sous le bombardement moléculaire une phosphorescence bleue. À l’intérieur du tube, de Fig. 10. façon à couvrir complètement la partie qui forme le pôle négatif À, j'ai déposé une couche compacte d’yltria, de façon à interposer une certaine épais- seur de cetle terre entre le verre et l'intérieur du tube. Les pôles négatif A, et positif, B, sont deux disques d’argent placés à l'extérieur du tube. Si des particules sont arrachées et projetées sur le tube pour produire la phosphorescence, ces par- ticules ne seront pas du verre, mais de l'yttria, et la tache de lumière phosphorescente, C, présen- tera, non pas la couleur bleue que donne le cristal, mais la teinte jaune d'or de l’yttria. On remarque qu'il n’y en a pas trace ; le verre présente sa phos- phorescence bleue habiluelle, et il n’y a pas d'indication que la moindre particule d’yttria soit projetée. En présence de ces expériences, on comprendra, W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS 221 je pense, que je continue d'admettre ma théorie originale, d'après laquelle ces phénomènes sont dus à la matière radiante des molécules gazeuses résiduelles, et certainement pas aux particules arrachées à l'électrode négative. II. — PHOSPHORESCENCE DANS LES VIDES EXTRÈMES J'ai déjà fait remarquer que les mouvements moléculaires qui sont rendus visibles dans un tube vide, ne sont pas les mouvements des molécules dans les condi- tions ordinaires, mais sont compo- sés à la fois de ces mouvements ordi- naires ou cinéti- ques et du mouve- ment dù à l’impul- sion électrique. L'expérience montre que dans de tels tubes, quel- ques molécules peuvent parcourir plus de mille fois le libre parcours moyen, avec des vitesses augmen- tant d’une facon correspondante, jusqu'à ce qu’elles soientarrêtées par des chocs. En fait, le libre parcours peut varier dans un même tube, et même pour un de- gré donné de raré- faction. Beaucoup de corps, tels que le rubis, le diamant, l'émeraude, l’alumine, l’yttria, beaucoup de sul- fures et d'oxydes terreux deviennent phosphores- cents dans le vide, quand ils sont placés dans le courant des molécules électrisées, qui partent du pôle négatif. La composition du résidu gazeux n’affecte pas la phosphorescence. Ainsi, Pyttria devient également phosphorescente dans le résidu obtenu par la raréfaction de l'air atmosphérique, de l’oxygène, de l’azote, de l’anhydride carbonique, de l'hydrogène, de l’iode, du soufre et du mercure. Quand on place l’yttria dans un tube vide, le point où la phosphorescence est maximum se trouve à la limite de l’espace obscur. Le dia- gramme de la figure 11 représente approximative- 9 a |-- 14 Le 6 | 5 4l ÿ; 2 1% ‘0 Fig, 11. ment la variation de la phosphorescence dans les différentes parties du tube, à une pression inté- rieure de 0"%,25. Sur la figure, on voit les pôles négatif et positif, A et B, le premier étant en- touré par l’espace obscur que limite la ligne poin- tillée C. La courbe DEF montre les intensités rela- tives de la phosphorescence à différentes dis- tances du pôle négatif, etsa position, à l’intérieur de l’espace obscur, dans laquelle la phosphores- cence ne se produit pas. Les ordonnées de la courbe représen- tent le degré de phosphorescence ; les effets les plus décisifs sont obte- nus en employant tubes assez larges que les parois soient extérieures à l’es- des pour pace obscur, tan- ma- soumise à dis que la tière l’expérience se trouve précisé- ment à la limite de cet espace obs- cur, Jusqu'ici, j'ai parléseulement de la phosphorescen- ce de substances placées au-des- sous du pôle néga- tif. Mais de nom- breuses expérien- ces m'ont montré que la phospho- rescence peut se produire au con- tact même du pôle négatif. Ceci est seulement un phénomène temporaire, et cesse aussitôt que la raréfaction est poussée à un degré très élevé. L'expérience est assez difficile à réaliser; je me bornerai à la décrire sommai- rement. Un tube en U, possède un pôle d'aluminium, aplati en forme de représenté dans la figure 12, disque à chaque extrémité; ces deux pôles sont re- couverts d'une couche d’yttria. Lorsque la pres- sion intérieure approche de 05, la surface du pôle négatif À devient faiblement phosphores- cente. Lorsque l’on continue à faire le vide, cette lueur diminue de plus en plus, non seulement en intensité, mais aussi en étendue, se contractant à W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS partir du bord du disque, jusqu’à ce qu’elle se ré- duise à un point brillant silué au centre, Ce fait vient contredire une théorie récente, d’après la- quelle, à mesure que la raréfaction augmente, la décharge abandonne le centre du pôle, et ne se fait plus qu'entre les bords et les parois du tube. Si on pousse plus loin la raréfaction, au moment où la surface du pôle négatif cesse d’être lumi- neuse, le pôle positif commence à devenir phos- phorescent ; l'intensité de cette lumière augmente ensuite continuellement jusqu'à ce que le courant ne puisse plus passer dans le tube, le plus grand éclat se produisant précisément à ce degré de ra- réfaction. L'explicalion la plus probable de ce phé- nomène est que les molécules errantes, que j'ai considérées dans l'expérience pré- cédente, venant à pénétrer dans la sphère d’acti- vilé du pôle po- sitif, se précipi- tent violemment sur lui, et pro- duisent la phos- phorescence de l’yttria, en même temps perdent charge négative. qu'elles leur Je ne puis in- sister sur les nombreuses expériences qui rendent très clair ce résultat, et je vais employer, tout de suite, un appareil qui met nettement en évidence la cause de la phosphorescence au pôle positif. Un dessin de ce tube est représenté figure 13; lais- sez-moi expliquer l'effet que j'en veux obtenir et que donne aussi l'expérience. ACB est un tube en U portant à ses extrémités des pôles AB; Det E sont deux éc’ans de mica re- couverts d'une poudre phosphorescente ; en F et G sont deux autres écrans, percés de peliles ouver- tures, de façon à ne laisser passer qu’un étroit pin- ceau de molécules électrisées. La pression intérieure est réduite, tout d’abord, à 0,076 el vous voyez sur l'écran D une trace lumineuse peu divergente, landis qu'aucune phosphorescence n'apparait sur l'écran E. Je pousse maintenant le vide jusqu’à le rendre non conducteur (P == 0"",000076) et le phénomène change. La ligne lumineuse que nous obtenions tout à l'heure sur D devient plus large et s’affaiblit, tan- dis qu'auprès de l'ouverture À, une phosphores- cence très nelle se manifeste sur l'écran E. Cette lueur diverge d'une façon considérable, beaucoup plus que ne le faisait le courant de molécules élec- trisées observé dans la première portion du tube, lorsque la raréfaclion était moindre. On pouvait s'attendre à obtenir ce résultat, car les quelques molécules qui sont parvenues à l’ex- trémité du tube, ne sont pas maintenues littérale- ment et se déplacent d'une façon différente de celle que l’on observe à de moindres raréfactions. III. — LA RÉSISTANCE DES VIDES EXTRÈÊMES. Je ne veux qu’effleurer ce phénomène aujourd'hui. C'est un sujet de beaucoup d'intérêt, et auquel j'ai récemment consacré beaucoup de temps. J’es- père publier prochainement un compte rendu dé- taillé des résultats obtenus. Le passage d'un courantd’in- duction à travers un tube forte- ment raréfié dé- pend de la ma- tière qui consti- tue le tube et de la substance qui y est enfermée. Pour une même raréfaction et une même dis- tance entre les pôles, la force électro-motrice nécessaire pour faire passer le courant, peut varier de 3.000 à 20.000 volls suivant les matériaux dont on s’est servi. Voici un exemple frappant qui servira à montrer ce phénomène. La figure 14 représente deux tubes réunis par un canal étroit et, par suite,exactement au même degré deraréfaclion (P — 0"%,02). Chaque tube contient une paire de pôles AB, A'B', L'un des tubes contient de l'yttria phosphorescente, l’autre du carbone finement divisé. Je réunis d’abord le tube à yttria à la bobine d’induction, en interpo- W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS 223 sant une jauge à étincelles. On donne tout d’abord, à cette jauge, un écartement de 1"®, La force élec- tro-motrice nécessaire pour vaincre la résistance de 4"" d'air est de 920 volts. La différence de po- tentiel aux pôles du tube à yttria est done de 920 volts. On voit qu'elle n’est pas suflisante pour faire passer le courant à travers le tube. J'augmente graduellement l’écartement de la jauge, jusqu’à ce que la différence de potentiel des pôles soit assez considérable pour faire passer l'étincelle à travers le tube, et rendre ainsi l'yttria phosphorescente. Je trouve ainsi une distance de 7"", correspon- dant à une force électro-motrice de 6.440 volts. J'attache maintenant les fils venant de la bobine sur le tube D qui contient le carbone, et laissant à la pression la même valeur que précédemment, je répète l'expérience. On remarque maintenant que l’on a dû aller jusquà un écartement de 307, corres- pondant à une force électro- motrice de 27.600 volts. Le fait de met- tre dans le tube soit de l’yttria,soit du carbone, pro- duit une différence de 21.160 volts sur la force électro-motrice nécessaire pour faire passer la dé- charge entre les pôles. Une autre expérience donne encore une démons- tration plus nette de ce phénomène. L'idée que la variation des matériaux et par suite de la conducti- bilité des différents tubes que je vous ai montrés, peut modifier les résultats observés, se présente d'elle-même. Voici (fig.15)un long tube cylindrique, en verre de Bohème phosphorescent, contenant deux pôles A et B.Il contient aussi un court cylindre de verre CC, argenté intérieurement. La pression intérieure est de 0®,00068. Le cylindre argenté est maintenant à l'extrémité du tube, en dehors de l'espace qui sépare les pôles ; ceux-ci sont donc en- tourés de verre phosphorescent. Je mets la bobine en marche, et je constate que la force électro-mo- trice nécessaire à faire passer le courant, mainte- nant que les pôles sont dans une chambre phos- phorescente, est de 1380 volls. Je fais glisser le cylindre à l’autre bout du tube, de facon qu'il en- ferme ces pôles dans une chambre d’argent métal- lique, et l’on voit que la force électro-motrice nécessaire pour faire passer le courant s'élève à 6.440 volts. L'argent métallique ne devient pas phosphorescent, tandis que le verre de Bohême le devient très nettement. Il semble que plus grand est le pouvoir phosphorescent de la substance qui Fig. 45 entoure les pôles et plus facilement peut passer l’étincelle. Si l’on entoure les pôles avec du verre de Bohème ou de lYttria, deux corps phospho- rescents non-conducteurs, l’étincelle passe facile- ment. Aussitôt que j'entoure ces pôles avec une substance non phosphorescente, l'étincelle refuse de passer. IV.—-QUELLE EST LA CAUSE DE LA PHOSPHORESCENCE ? Je voudrais intéresser mes lecteurs à une ques- tion qui me préoccupe depuis fort longtemps; c’est de savoir ce qui cause la phosphorescence de l'yltria et des autres corps dans le vide, sous le bombardement moléculaire. J'ai trouvé que cette phosphorescence était un attribut des corps non-conducteurs seulement. Nous savons que, lors de la phosphorescence, les molécules de lyttria sont dans un état de vibration intense. Cha- que molécule peut être con- sidérée com- le centre rayonne me d’où tout un ceau derayons qui, lorsqu'on fais- le décompose par le prisme, s'étale en un spectre discontinu. Nous pouvons supposer aussi que les atomes rési- duels de gaz chargés d'électricité négative, aban- donnent leur électricité en venant choquer un corps phosphorescent, et retournent ensuite pren- dre une nouvelle charge. L'hypothèse du passage de l'électricité, à travers les gaz raréfiés, par voie électrolytique, présente un certain caractère d’évidence. Elle a été émise par le professeur Schuster devant la Société royale, le 20 mai 1890 !. Une molécule de gaz hydrogène, par exemple, peut être considérée comme formée d'un groupe d’atomes, chargé d’une certaine quantité d’électri- cité négative,et d'un autre groupe d’atomes, chargé d'une quantité équivalente d'électricité positive. Ces atomes peuvent, en outre, être chargés de quantités additionnelles d'électricité positive ou né- gative, qu'ils transportent comme un navire trans- porte son chargement. Nous n'avons pas à nous occuper de la charge inhérente aux atomes, sur laquelle nous ne savons rien, mais de la charge supplémentaire. Imaginons une molécule d'hydrogène, placée dans un tube à vide, auprès du pôle négatif. Si l’on fait passer le courant, les atomes de la molécule l Proceedings of Royal Society, XLVII, 526. 997 224 W. CROOKES. -— LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS d'hydrogène sont entrainés séparément. L’atome posilif est alliré vers le pôle négatif, où la violence de son arrivée, où la décharge de l'électricité le rend apparent avec production de lumière. L'espace lumineux intérieur, qui est directement au contact du pôle négatif, est done produit par les atomes positifs se précipilant surle pôle négatif, et non pas, comme la lueur qui entoure l’espace obs- cur, par les atomes négatifs émanant de ce pôle. L'atome négatif, d'autre part, est projeté violem- ment loin du pôle négatif, en vertu de la répulsion qui se produit entre deux. corps, semblablement électrisés, avec une vitesse qui dépend de l’inten- sité de l’électrisation et du degré de raréfaction. Plus le vide sera parfait, plus sera grande la vitesse, les -atomes s’élançcant en ligne droile, jusqu'à ce qu'ils rencon- trent un obs- tacle. Cet obs- tacle peut être une série d’a- tomes chargés positivement venantdu pôle positif. Dans ce cas, les deux sortes d’alomes neutralisent mutuellement leurs charges avec production de lumière. Ge phénomène se pro- duit à la limite de l’espace obscur, quand le vide est seulement modéré. L'obstacle peut provenir de ce que le vide est poussé trop loin pour que les atomes de gaz restants puissent former une proces- sion continue. On ne conçoit pas exactement pour- quoi les vides extrêmes ne sont pas conducteurs ; mais le fait en lui-même est hors de doute. Il est probablement relié à l'impossibilité qu'éprouvent les atomes électrisés de quitter les pôles. Enfin, l'obstacle peut être un corps phosphorescent comme l'yttria. Dans ce cas les alomes chargés négativement abandonnent leur charge à l’yltria, qui est constituée de telle sorte (peut-être à la manière d’un résonnateur de Hertz) que la charge et la décharge des atomes, s’effectuant 550 bil- lions de fois par seconde, et produisant dans l’éther des ondulations d'une longueur sensible- ment égale à 574 dix millionnièmes de millimètres, donne à l'œil l'impression dela lumière jaune citron. Nous ne sommes pas obligés de supposer que ce nombre d'atomes d'hydrogène vient frapper l'yt- tria dans chaque seconde, quoique même aux vides extrêmes, il y ait bien assez d'atomes dans le ballon pour fournir cette quantité. Il faut seule- ment qu'une succession de chocs, qui ne sont pas nécessairement rythmiques, vienne frapper Fig. 16. l’yttria assez rapidement pour la faire entrer en vibrations, de même qu'une série de coups frappés lentement sur un gong, lui fait émettre des ondes sonores d’une fréquence beaucoup plus grande. A une faible raréfaction, il n’y a que peu d’atomes qui puissent se frayer un passage à travers la foule des atomes, les quelques-uns qui arrivent jusqu'à l'yttria ont alors une vitesse très réduite, et la phosphorescence qu’ils produisent est tellement faible, qu'elle est complètement éclipsée par la phosphorescence brillante du résidu gazeux.Quand le vide est poussé davantage, le nombre des atomes qui peuvent passer outre devient de plus en plus grand, et leur vitesse augmentant en même temps, la phosphorescence augmente graduellement d’in- tensilé. Quand le vide est sufli- sant, la plu- part des ato- mes vient frap- per l’yttria, leur vitesse est considérable, et l'excitation rythmique at- teintson maxi- mum. V. — L'ESPACE OBSCUR DANS LA VAPEUR DE MERCURE Pour exposer l'hypothèse de l’électrolyse, j'ai pris comme exemple le résidu gazeux de l’hydro- gène, qui est, comme on sait, un gaz diatomique. J'ai observé, cependant, le phénomène de l’espace obseur, etc., dans la vapeur de mercure qui est un gaz monoalomique. Get important résultat m'a conduit à étudier soigneusement ce sujet, et voici le résultat d’une des expériences effectuées (fig. 16). Le tube contient des pôles d'aluminium, et il est disposé de facon qu'on puisse faire passer l’étin- celle d’induction, en même temps que l’on fait le vide, pour éliminer les gaz inclus. Quand la raréfaction à été poussée aussi loin qu'il est pos- sible, on remplit le tube de mercure pur, par simple élévation du réservoir. On chauffe le tube et l'on fait bouillir le mercure tout en faisant le vide. Quand tout le mercure a distillé dans le vide, sauf une pelite quantité qui s'est condensée à la partie supérieure du tube, le passage de l’étincelle d'in- duction donne les résultats suivants : sile tube est froid, le courant d’induction ne passe pas; si l'on chauffe doucement avec un brûleur à gaz, le cou- rant passe, et l’on peut apercevoir distincte- ment l’espace obscur. Si l’on continue à chauffer, de façon à volatiliser les gouttes de mercure qui sont adhérentes aux parois, le tube se remplit W. CROOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS 225 complètement d’une lueur phosphorescente verte, l’espace obscur devient de plus en plus petit, et finalement le pôle négatifse recouvre d’une brillante lumière. Pendant le refroidissement, les mêmes phénomènes se reproduisentensensinverse. Le halo lumineux s’élargit laissant voir l’espace obscurentre le pôle et lui, et cet espace obscur devient graduel- lement plus grand à mesure que le tube devient plus froid. Le mercure se condense de nouveau sur les parois du tube, la phosphorescence verte parait de plus en plus pâle, jusqu’à ce qu’enfin l’étincelle d’induction fournie par la bobine refuse de passer. A première vue, ce résullat semble fatal pour la théorie de l’électrolyse, car si la molécule de mer- cure contient un seul atome, comment le courant électrique peut-il la séparer en atomes positifs et négatifs. Il ne faut pas oublier, cependant, que nous ignorons totalement la masse de l’atome d’un élément. Tout ce que nous pouvons dire, c'est que la molécule de l'hydrogène libre est partagée en deux lorsque ce gaz se combine chimiquement avec d’autres éléments, tandis qu'une molécule de mer- cure libre ne se divise pas en formant l’un quel- conque des composés connus du mercure. Les atomes physiques du premier se présentent en deux groupes séparés, ceux du second en un seul groupe. Il a été convenu par les chimistes, pour simpiifier et faciliter les calculs, de prendre l’unité la plus faible qui permit d'éviter les nombres frac- tionnaires. Nous disons donc que dans la molécule de l'hydrogène libre les atomes agissent chimique- ment comme deux groupes séparés, le poids relatif minimum de chacun d’eux étant égal à 1, tandis que les atomes de la molécule de mercure libre agissent comme un groupe unique dont le poids relatif minimum est de 200. Mais à quel nombre d’atomes, les poids 1 et 200 correspondent-t-ils respectivement, c'est ce que le chimiste ne peut pas dire. VI. — GENÈSE DES ÉLÉMENTS Il est reconnu aujourd'hui qu'il existe plu- sieurs rangées dans la hiérarchie et qu'entre les groupes bien définis des éléments chimiques, viennent se placer un certain nombre de sous- groupes. À ces sous-groupes, on à donné le nom de méta-éléments. La genèse originelle des élé- ments suppose l’action de deux formes d'énergie, agissant dans le temps et dans l’espace, l’une va- riant uniformément, en raison de l’abaissement continuelde la température, l'autre, ayantdescycles périodiques d'augmentation et de diminution, et intimement liée à l'énergie électrique (fig. 17). Le centre de cette force créatrice projeta dans son travail à travers l’espace des germes ou sous- atomes qui s’agglomérèrent finalement dans les groupes que nous connaissons comme éléments chimiques. À cette période génésique, les parti- cules nouvellement produites oscillant dans toutes les directions et avec toutes les vitesses, les plus rapides atteignant les trainardes, les plus lentes arrêtant les autres, il a dû se former des groupes dans certaines parties de l’espace. Les particules de chaque groupe, dont la forme d'éner- gie produisant le poids atomique n'était pas d’ac- cord avec la valeur moyenne de la masse des par- ticules de ce groupe, sont reparties à la recherche d’autres groupes avec lesquels elles seraient mieux en harmonie. À la longue s’est établi un équilibre stable, et nous avons notre série actuelle d'éléments chimiques à poids atomiques définis, définis comme poids moyen d'un nombre énorme de sous-atomes ou méta-éléments, tous très voisins de la moyenne. Le poids atomique du mercure, par exemple, est pris égal à 200, mais l'atome du mercure, tel que nous le connaissons, doit être regardé comme formé d'un nombre énorme de sous-atomes, le poids de chacun d’eux variant très peu, de part et d’autre, du nombre 200. Nous nous sommes souvent demandé pourquoi, si les éléments ont élé ainsi formés, nous n’avons jamais vu l’un d’eux transformé, ou être en voie de se transformer en un autre. C’est là une question aussi futile que de demander pourquoi, dans le monde organique, on n’a jamais vu un cheval mé- lamorphosé en vache. Avant que le cuivre, par exemple, puisse être changé en or, il faudrait qu'il fût ramené à un état plus simple et plus primitif de la matière et alors, pour ainsi dire, lancé sur le chemin qui conduit à l'or. Le schéma atomique (fig. 17) suppose un mou- vement alternatif d’une forme de l'énergie, réglant l'état électrique de l'atome. On a trouvé que les éléments formés quand elle approche de la posi- tion centrale sont électro-posilifs, et que ceux qui ont pris naissance pendant le mouvement d’éloi- gnement sont électro-négatifs. En plus le degré de positivité ou de négativité dépend dela distance de l'élément à la ligne centrale ; par suite, en suppo- sant l’atome dans la position moyenne électrique- ment neutre, les sous-atomes qui sont d’un côté de la moyenne seront chargés d'électricité positive, ceux qui sont de l’autre côté, d'électricité négative, l’atome total étant neutre. Ceci n’est pas une simple hypothèse et peut prendre le rang d’une théorie. La vérification ex- périmentale a été poussée aussi loin qu'on peut le faire, pour déchiffrer une telle énigme. Des recher- ches de laboratoire, longuement poursuivies, ont montré que dans la matière qui répond à l'état d’élément défini, on peut trouver des traces diffé- rentes qui conduisent à admettre la résolution en méta-éléments ayant exactement les propriétés 226 WE requises par la théorie, L'yttria, qui nous a été si utile dans les recherches électriques pour montrer les atomes électrisés négativement, ne présente pas moins d'intérêt au point de vue de la chimie, car c’est le premier corps au moyen duquel on à È œ S = = eo $ Zver. S. ne ma reel CES pu démontrer l'existence de ces sous-groupes ou méta-éléments J'admets franchement que je n'ai nullement épuisé le sujet qui me préoccupe jour et nuit. J'ai ardemment recherché des faits sur lesquels il me fût possible de baser ma théorie, Je me suis trouvé CKOOKES. — LA DÉCHARGE ÉLECTRIQUE DANS LES GAZ RARÉFIÉS aux prises avec des problèmes dont il faut achever la conquèle avant d'arriver à des conclusions exactes, conclusions qui, autant qu'on peut con- naître la nature inorganique, ne seront obtenues que par l’harmonieuse fusion de nos deux sciences Le À IN N à N N Ÿ Ÿ Q K S Oct. N Dia magèelre. Jumelles, la chimie et l'électricité. J'ai essayé de pressentir dans quel sens cette fusion se fera, et d'indiquer la part considérable, peut-être prépon- dérante, que l'électricité doit prendre dans ces recherches de haute physique. William Crookes, de la Société royale de Londres, BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 19 19 ee! BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. G. F. Matthews, B. A, Late scholar of st. Peters College, Cambridge. — Manual of logarithms, treat- ed in correction with arithmetic, algebra, plane trigonometry, and mensuration, for the use of students preparing for army and other examina- tions. Un volume de 126 pages (6 fr. 25). Macmilian and C° London. Bedford Street, 29, Covent Garden and New-Yorh, 1890, Ce manuel est un recueil de nombreuses questions relatives aux logarithmes et à leurs applications ; il contient plus de treize cents problèmes, tirés, pour la plupart, des examens d’entrée à Sandhurst, Woolwich etau collège de Staff, Admirablement imprimé, d'une clarté parfaite, composé d'exemples bien choisis et élégamment disposés, il est de nature à rendre service aux élèves qui veulent se familiariser avec les calculs de logarithmes, LEO, Sinigaglin (Francesco), — Influenza delle Masse che si muovono di moto alternativo nelle mac- chine a vapore. Ati el R. istituto d'incoraggiamento di Napoli, vol. III della 4* série, Les constructeurs de machines sont entrés depuis quelques années dans une nouvelle voie en adoptant deplus en plus les machines à grandes vitesses; ils ont pour cela deux raisons : d’une part les grandes vitesses conviennent spécialement à cerlaines installations spéciales, d'autre part elles correspondent à une éco- nomie de vapeur. On concoit que dans ces nouvelles machines, dont les types se répandent et se multiplient chaque jour, les efforts produits peuvent devenir con- sidérables et qu’il y a un intérêt tout particulier à les déterminer, même d’une facon seulement approximative, leur calcul rigoureux étant inabordable. M. Sinigaglia, après avoir considéré les diagrammes prévus ou probables sur les deux côtés du piston, les transforme de facon à obtenir la force effective sur une des faces de ce piston etdans le sens de marche ; tenant compte alors du diagramme d'inertie construit d’après ses formules, il établit un nouveau diagramme qu'il appelle corrigé et par lequel il déduit aisément les courbes des efforts tangentiels. Il termine son mémoire par divers exemples qui montrent l'importance pratique de cette étude. J, Poucer, Marrecas Ferreira (M. L. F.). — Sur la pro- jection Zzénithale équivalente de Lambert. — Lisbonne. 1889, On sait que, par suite de l'impossibilité de donner sur un plan la représentation exacte des figures tracées sur la sphère, les géoimètres ont été conduits à ima- giner un grand nombre de systèmes différents de pro- jections pour cartes géographiques. Ne pouvant con- server à la fois les angles, les distances et les surfaces, il faut faire un choix suivant le but qu’on se propose en construisant la carte. Parmi les projections qui conservent les surfaces sans altération, la projection zénithale de Lambert est celle qui altère le moins les angles et les distances, Pour représenter une portion de la sphère d'après ce système, on fait choix d’un point central O, sur l'horizon duquel la carte sera figurée en placant chacun des autres points M dans la même direction azimutale que sur la sphère $ à une ET INDEX distance du centre égale à la corde du grand cercle qu joint &e point M au centre O. Les auteurs, notamment M. Germain, dans son Traité des projections des cartes géographiques, ont donné des formules trigonomé- triques pour calculer la position des points de la carte, connaissant leurs longitudes et latitudes, On connaît aussi un procédé pour tracer graphiquement le canevas des méridiens et parallèles, au moyen d’une transfor- mation de la projection stéréographique. M. Marrecas Ferreira indique une méthode graphique directe pour tracer le canevas et placer les points. Cette méthode consiste à prendre pour plan vertical de pro- jection le méridien du lieu central O et pour plan hori- zontal son horizon, On construit facilement la projec- tion verticale d’un point M donné par sa latitude et sa longitude. L'auteur ne dit pas comment on en déduit la projection horizontale de OM et son azimut. Il suppose, sans doute, que la lecture suppléera à cette omission ; mais il n'eût pas été bien long de donner celte cons- truction, La corde OM se trouve sur la projection ver- ticale ; connaissant la corde et l’azimut, la construction s'achève facilement. Pour le cas où l'échelle de la carte ne permettrait pas de représenter la sphère en- tière sur le papier, et où l’on ne peut plus employer le rapporteur, on se sert des tables des sinus naturels, En plus de son utilité pour la géographie, cette construction simple comporte une application géomé- trique intéressante. On arrive facilement à copier une figure tracée sur la sphère, en mesurant directement les azimuts des points du contour par rapport à une origine arbitraire et prenant leurs distances rectilignes à cette origine au moyen du compas. Ayant obtenu ainsi une figure plane équivalente à celle de la sphère, on peut en faire la quadrature par les procédés connus, E, C. 2° Sciences physiques. Nils Ekolm,. — Sur la chaleur latente de vapo- risation de l'eau et sur la chaleur spécifique de l’eau liquide. Bihang till K. svensna vet, akad. hand- lingar. Band 15, Afd. 1, n° 6. Régnault a donné pour la chaleur totale Q et la cha- leur latente de vaporisation À de la vapeur d’eau satu- rée des formules devenues classiques, mais qui pré- sentent le double inconvénient de donner des valeurs pour la plupart supérieures aux résultats de ses expé- riences et d’être exprimées en vieilles calories. Relativement au premier point, l’auteur discute la valeur respective des différents groupes d'expériences de Régnault; il en déduit le poids qu'il faut attribuer à chaque observation et calcule pour Q une nouvelle formule au moyen de la méthode des moindres carrés. Cette formule, bien qu’elle contienne un terme de plus que celle de Regnault, n'offre pas une supériorité mar- quée sur cette dernière : sans doute les écarts ne sont plus presque toujours p'rexcès, mais se présentent aussi fréquemment dans les deux sens; cependant ils ne sont pas sensiblement plus faibles que ceux de la formule de Régnault. L'intérêt de ce travail réside surtout dans la seconde partie consacrée à l’évaluation de la vieille calorie en calories moyennes, et à la transformation des formules résultant de l'adoption de cette nouvelle unité, Les recherches récentes de MM. Rowland et Dieterici ont montré que, avec l'échelle de températures fournie par le thermomètre à gaz, la chaleur spécifique de l’eau ne reste pas constante, même dans un intervalle 228 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX restreint: aussi la détermination précise de la vieille calorie, c’est-à-dire de la calorie définie au moyen de l'intervalle de 0° à 1°, présente-t-elle des difficultés très grandes, Dès lors il est préférable d'adopter comme unité la calorie moyenne, qui est le centième de la quantité de chaleur qu'il faut fournir à un gramme d’eau pour l’échauffer de 0° à 1000. t Or si l’on représente par C, la chaleur spécifique moyenne de l’eau entre ®et te en calories de Régnault, la valeur de la-calorie moyenne en calories de Régnault 100 : sera précisément C, . Un calcul correct des expérien- ces de Regnault conduit à la formule t c, — 1 + 0,000.009.29 £ + 0,000.000.265 £2, d'où l’on tire : 100 C_ — 1,00358. 0 L'identité de cette valeur avec celle de la vieille calo- rie calculée au moyen des expériences de M. Rowland confirme, en passant, que c’est rigoureusement de la vieille calorie que s'est servi Régnault, En mettant à profit les expériences de Rowland sur la chaleur spécifique vraie de l’eau et les d‘termina- tions de M. Dieterici sur la chaleur latente de l’eau à 09, les combinant avec celles de Régnault, et adoptant comme unité la calorie moyenne, l’auteur arrive aux formules suivantes, Q — 602,02 + 0,3348/ — 0,000.135 /2, Q — 596,77 + 0,4220 £ — 0,000.478 /2, À — 602,02 — 0,6822/ + 0,000 308 /2—0,00000474 3, À — 602,02 — 0,6616 4 + 0,000.144 {2 —0,00009264 #2, La première est calculée au moyen des seuls nom- bres de Régnault. La seconde représente, avec une fidé- lité plus grande que la première, les expériences de Régnault comprises entre 60° et 430°; au delà elle s’en écarte davantage, mais à 0° elle s'accorde avec les nombres de M. Dieterici, La troisième est relative à l'intervalle de 0° à 100° ; enfin la dernière est relative aux températures supérieures à 1000. Entre les limites de température qui se présentent en météorologie, — 30° à —- 30°, on peut se contenter de la formule simplifiée, À = 598,7 — 0,574. Edgard Haunié. Dittmar (W.). — Chemical arithmetic, (7 fr. 50,)— William Hodge et Cie. 25 Bothwell Strat, Glasgow, 1890, Cet ouvrage est un recueil des données numériques nécessaires aux chimistes pour les calculs courants de laboratoire. On y trouve des tables de logarithmes à trois, quatre et cinq décimales, tables des inverses, des racines carrées, etc. Dans les données physiques, un certain nombre de tables sur la densité des solu- tions et des solides, les corrections aux pesées, la me- sure des volumes gazeux, l'absorption et l'analyse des gaz, la thermométrie et le jaugeage des récipients, Toutes ces données sont mises sous une forme com- mode, et l'ensemble constitue un memento qui peut rendre de grands services. Georges CHarpy. WWoodward (C.). — Arithmecal Chemistry. (2 fr. 50). — Londres. Simpin Marshall, Hamilton, Kent et C° 4 Stationers’hall Court, London. 1890. Ce petit livre s'adresse aux jeunes gens qui com- mencent l’étude de la chimie. Il contient un exposé très net des principaux problèmes de calcul que l’on rencontre en chemin et des méthodes par lesquelles on les résout. De nombreux exemples complètent cet exposé. Georges CHARPY. Bourgeois (Léon), — Analyse microchimique, 2° supplément du Dictionnaire de Chimie de Wurtz= Friedel, Hachette et Cie, Paris, novembre 1890. L'application du microscope à l’étude des minéraux et des roches a permis d'aborder l'examen de subs- tances extrêmement petites auxquelles les essais chi- miques ordinaires n'étaient plus applicables. Il a donc fallu,pour ce cas particulier, modifier les méthodes d’a- nalyse qualitative.C’est au microscope qu’a été deman- dée la solution de cet intéressant problème.Un grand nombre de réactions chimiques donnent naissance à des corps parfaitement cristallisés dont les formes et les propriétés optiques sont suffisamment caractéris- tiques pour qu'on puisse les employer au diagnostic des éléments qui les composent. Ces réactions s’effec- tuent facilement dans une goutte de liquide, placée sur une lamelle de verre qu’on examine au microscope : elles ne demandent qu’une quantité extrêmement faible de la substance à analyser. Les avantages des méthodes microchimiques n’ont pas tardé à frapper l'attention des chimistes auprès desquels elles commencent à devenir aussi populaires qu’auprès des minéralogistes et pétrographes qui les avaient employées les premiers. De nombreux mémoires et même des traités spé- ciaux ont été consacrés à la description des réactions les plus caractéristiques des principaux éléments. Les noms de Boricky, Behrens Streng, Hanshofer, Klé- ment, Renard, etc., sont attachés à ce genre de re- cherches. M. Léon Bourgeois, à qui cette branche de la Chimie doit d'intéressants progrès, en a réuni les principes généraux dans un court et substantiel article. 0 Après avoir rapidement indiqué les précautions à prendre pour purifier la petite parcelle de substance à essayer, le mode d'attaque, les procédés de filtration sur une lamelle de verre des quelques gouttes de la dissolution, M. L. Bourgeois passe en revue les prinei- pales réactions caractéristiques des divers métalloïdes et métaux. Ces réactions peuvent être groupées en trois classes, suivant que les cristaux se produisent par voie humide, par fusion suivie de refroidissement (au sein de borax, sel de phosphore, ete.) ou par sublimation. Cet intéressant travail, par sa nature condensée, se prète difficilement à l’analyse. Il suffira de rappeler ici deux des réactions décrites qui donneront une idée de ce genre de recherches, . Recherche du potassium, sodium, calcium (procédé Boricky).— Un petit fragment de la substance à essayer, de la grosseur d’une pointe d’épingle est placé sur une lamelle de verre enduite de baume du Canada, puis attaqué par l'acide hydrofluosilicique. L’évaporation lente de la solution donne, suivant les cas, des cristaux (fluosilicates), qui sont cubiques pour le potassium, hexagonaux pour le sodium, fusiformes ou arbores- cents pour le calcium, rhomboïdiques pour le magné- sium, etc. Recherche de la zircone (procédé Michel Lévy et Bour- geois). — La substance à essayer est fondue dans un creuset de platine, avec un excès de carbonate de so- dium. La masse est reprise par de l’eau acidulée; on constate au microscope la formation de lamelles hexa- gonales de zircone. Ce travail, terminé par une indication de l'appli- cation possible des réactions microchimiques aux subs- tances organiques, est enrichi de figures dessinées d’après nature et montrant les cristaux et les formes cristallitiques qui prennent naissance au cours des réactions décrites. Grâce à une habile sélection qui a fait passer sous silence les réactions peu süres ou difficiles à obtenir, ce précis d'analyse microchimique rendra de grands services aux chimistes et les encouragera dans une voie qui ne peut qu'être féconde en résultats. Alf. Lacroix, ot IT ÉD MATE ARE AN À v mé pre d BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 229 8° Sciences naturelles. Carta geologica d'Italia nella scala di 1: 1,000,000, pubblicata per cura del R. Ufficio geologico, ? feuilles, (10 francs) Rome, 1889. Le Comitalo geologico d'Italia avait publié en 1881, à l’occasion du Congrès de Bologne, un premier essai de carte géologique générale de la Péninsule, en deux feuilles. La nouvelle carte d'ensemble livrée à la publi- cation l’année dernière se distingue de la précédente par des perfectionnements importants : les divisions stratigraphiques, au nombre de vingt-quatre, sont, il est vrai, restées les mêmes — sauf la distinction du Rhétien, introduite dans les Alpes Lombardes et Véni- tiennes — mais l'échelle du millionième, un peu plus rande que celle qui avait été adoptée tout d’abord 1,144,111°) a permis d'apporter dans le tracé des con- tours une précision plus grande, en même temps que les progrès du levé de la carte détaillée amenaient souvent à les modifier d’une manière notable. Sous ce rapport, il y a lieu de signaler particuliè- rement, dans les Alpes Occidentales, le long de la frontière francaise, la diminution des surfaces rap- portées au Trias, et l’attribution des schistes lustrés de Lory au Précambrien : c’est Ja solution définitive d'un des problèmes les plus difficiles de la géologie alpine, solution qui est due surtout aux efforts persévérants de M. Zaccagna. Dans les Alpes Maritimes, aux environs de Savone, on remarque que la teinte du terrain pri- mitif est remplacée par celle du Permien; ce résultat est dù au même géologue. Dans les Apennins, l'extension du Crétacé de 1881 a du être fréquemment restreinte au profit du Juras- sique (chaînes calcaires des Abruzzes et de la Sabine, Capri, Pouille, etc.); en Toscane, dans l’Ombrie, le Miocène a pris un grand développement, aux dépens de l’'Eocène et même du Crétacé, En Sardaigne, de larges espaces attribués au Pliocène ont recu la couleur du Miocène, de même que dans les Calabres, où les roches amphiboliques ont pris en outre une extension toute nouvelle. Seule la partie de la carte relative à la Sicile n’a eu à subir aucune modification, les levés détaillés de cette île étant déjà terminés lorsqu'on préparait la première édition du travail. Par contre, le coloriage de la Corse a dû être transformé du tout au tout, d’après les minutes communiquées par le Service de la Carte géologique détaillée de la France : le Crétacé des anciens documents a fait place aux schistes cristallins archéens. Quant au littoral dalmate, il a été figuré d’après les cartes autrichiennes, Enfin, les études récentes de M. Rolland ont été mises à contri- bution pour représenter les grands traits de la géologie tunisienne, du golfe de Hammamet au cap de Fer. Avec la belle carte de l'Italie au 1: 1,500,000° que M. Vogel, l’'éminent cartographe de Gotha, vient de faire paraître dans la nouvelle édition de l'Atlas de Stieler, la carte d'ensemble du Comitato de Rome cons- titue une base excellente pour l'étude de la géologie et de l’orographie de la Péninsule, dont les matériaux sont malheureusement encore éparpillés dans une foule de publications diverses, Il serait temps,croyons- nous, que quelqu'un songeàt à coordonner ces ri- chesses : la préparation d'un Manuel de géologie ita- lienne ne pourrait-elle pas être confiée à l’un des col- laborateurs du service officiel? C’est là un vœu que nous souhaitons vivement de voir bientôt réalisé. Emm, pE MARGERIE, Askenasy (E.), — Quelques relations entre l'ac- eroissement et la température. Berichte d, deutsch. bot. Gesellsch, VIII; 61-94, 1890. Cette étude a porté sur les racines de jeunes plan- tules de maïs. Après avoir observé l'accroissement des racines qu’il trouve être de 1,7 à 3,8 millim. par heure et à la température de 26 à 29°, l’auteur a déterminé le degré de turgescence des racines qui ont été portées à des températures différentes. Cette turgescence est mesurée en observant le raccourcissement de l’organe lorsqu'on la supprime, ce qu’on obtient en plongeant l'organe dans de l’eau à 7#-80° pendant 10 minutes ou dans une solution de salpêtre à 15 0/0 pendant 80 mi- nutes. M. Askenasy a constaté ainsi que le raccourcis- sement des racines de maïs a la même valeur, quelle que soit la température à laquelle ces racines se sont trouvées et quel qu'ait ét5 l’accroissement en longueur correspondant. Ces expériences modifient donc com- plètement les idées qui avaient cours actuellement et d’après lesquelles on faisait de l’accroissement des membranes cellulosiennes une dépendance de la tur- gescence, L'auteur examine e.suite l'influence de certains changements de température sur l'accroissement. Il à constaté que l’accroissemen‘ cesse quand on refroidit la plante à + 5°. En outre, les racines ayant séjourné une demi-heure dans l’eau à cette basse température et qu'on porte ensuite à la température la plus favo- rable à l'accroissement croissent beaucoup moins vite qu’elles ne devraient le faire normalement, Ce fait, que l’accroissement s'arrête rapidement à une certaine température semble être une réaction du protoplasma vivant, ce qui conduit M. Askenasy à expliquer l’ac- croissement général des cellules et des organes, non plus par celui de la membrane cellulaire, mais par l'accroissement du protoplasma qui serait, dans tous les cas, le phénomène primaire, dominant et réglant celui de la membrane cellulaire. A. HÉBERT Michotte (F.). — Traité scientifique et industriel de la Ramie. (10 francs.) J. Michelet, 2, quai des Grands-Augustins. Paris, 1891. M. Michotte, inventeur d’une machine à décortiquer la Ramie a entrepris d'écrire l’histoire complète de ce remarquable textile. La première partie, qui vient de paraître, traite des caractères botaniques de la plante, de la cu ture, du rendement et du décorticage. Certai- nement l’auteur a rassemblé un grand nombre de documents dont plusieurs sont fort intéressants : comptes-rendus des séances de la Commission de la Ramie, rapports de MM. Tisserand, Favier, Rivière, etc. Malheureusement tous ces documents, au lieu d’être résumés et condensés, ont été simplement juxtaposés, de telle sorte qu'une même question se trouve traitée plusieurs fois au grand détriment de la clarté. Nous ne reprocherons pas à M. Michotte les quelques obscurités ou erreurs de sa description botanique; l’auteur n’est pas botaniste; il devait simplement reproduire les textes sans y rien changer comme il a reproduit les figures, La partie qui traite de la culture dans nos colonies et du rendement probable a son importance; mais nous ne faisons aucune difficulté d’avouer que nos préférences vont tout droit au chapitre très complet du décorticage. L'auteur évoluait là dans un milieu connu ; il n’est pas difficile de’s’en apercevoir dès les premières pages. Certes il ne faut pas demander à un inventeur d'admirer l’idée de ses concurrents : M. Mi- chotte s’en est bien gardé. Mais il a suffisamment esquissé leurs procédés pour éclairer le lecteur : c’est déjà beaucoup. De nombreuses figures de machines accompagnent d’ailleurs le texte et en facilitent lintel- ligence. Le deuxième volume, annoncé par l’auteur, com- prendra le dégommage et la filature de la Ramie, Henri LECOMTE. Blanchard (D' R.). — Compte-rendu des séances du Congrès internaticnal de Zoologie, (15 francs), au siège de la Société zoologique de France, 7, rue des Grands-Augustins, Paris, 1890. La publication du compte rendu des séances du Congrès international de zoologie couronne dignement 230 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX les travaux des nombreux savants qui ont pris part à ces réunions, Le Congrès était divisé en trois sections : 1° Zoologie ; 2° Anatomie, histologie, embryogénie ; 5° Paléontologie. Chacune de ces sections a apporté sa part aux travaux que publie le secrétaire général du Congrès, le D'R, Blanchard. : Signalons en particulier un très intéressant rapport du professeur Ed. Perrier « sur les services que l’em- bryogénie peut rendre à la classification » et un tra- vail très substantiel du D' P. Fischer sur « la détermi- nation des régions du globe dont la forme est insuffisamment connue. » M. Filhol et M. F. Topinard se sont chargés de montrer de leur côté les liens qui existent entre la paléontologie d'une part. Fanthro- pologie d'autre part et la zoologie. Il nous est impos- sible de donner mème un apercu de ces rapports, on le comprendra si l’on songe que chacua d'eux est un exposé documenté de l'état actuel de la science pour chacun des points traités. Plusieurs mémoires originaux importants sont éga- lement publiés dans le volume que nous analysons. Citons entre autres : dans la section de zoologie, les recherches sur la production du saumon de la Dor- dogne, par M. Künstler: une communication sur la station zoologique de Cette par le professeur Sabatier ; la recherche des animaux marins avec la description de l'outillage spécial employé à bord du yacht l’Hiron- delle, par le prince de Monaco. Dans la section de paléontologie, nous relevons un important mémoire du D'V. Lemoine : « Considérations générales sur les Vertébrés fossiles des environs de Reims et spécialement sur les mammifères de la faune cernaysienne. » Le volume comprend enfin une importante étude du Dr R,. Blanchard sur « la nomenclature des êtres orga- nisés ». Cette question, proposée par la Société zoolo- gique de France, a fait le sujet de longues discussions au sein du Congrès. Des propositions fortement moti- vées ont été votées. C’est là, on peut le dire,un résultat sérieux qui fera époque dans l’histoire de la zoologie. Nous ne saurions trop féliciter la Société zoologique de France de l'initiative qu’elle a prise, et son actif secré- taire général, le professeur, R. Blanchard, du soin qu'il a apporté dans l’étude dent il a fait adopter la plupart des conclusions, D' H, BEAUREGARD. 4° Sciences médicales. Duplay (Simon), Professeur de clinique chirurgicale, et Cazin, — Recherches expérimentales sur la nature et la pathogénie des atrophies muscu- lairesconsécutives aux lésions des articulations, Archives générales de médecine, janvier 1891, p. 1. On a proposé successivement pour expliquer la pathogénie des amyotrophies consécutives aux lésions articulaires de nombreuses théories : Théorie mécanique, une hydarthrose de l’épaule comprimant le deltoiïde par exemple; inactivité fonctionnelle, l’atrophie muscu- laire étant due à l’immobilisation du membre; propa- gation aux muscles de l'inflammation articulaire ; névrite par propagation, etc. En présence de l'insuffisance de ces diverses théories, la plupart des auteurs se sont ralliés à la théorie réflexe, imaginée par Vulpian, qui, placant le point de départ du réflexe dans l’irritation des extrémités des nerfs articulaires, admet que cette irritation retentit par la voie centripète sur les centres spinaux au niveau des foyers d'origine des nerfs des muscles frappés d'a- trophie et y détermine une modification dynamique, d’où résulte l’amyotrophie, Cette théorie explique la rapidité avec laquelle se produit l’atrophie et qui semble exclure «a priori l'idée d’une lésion matérielle ; elle concorde avec les résultats de l'observation clinique qui semble bien démontrer que l'affection spinale est purement dynamique, en permettant de constater l'absence de réaction de dégé- nérescence; enfin elle trouve un dernier appui dans l'examen micrographique des muscles qui ont toujours présenté les caractères de l’atrophie simple, Il lui manquait pour être établie d'une manière définitive la sanction d’une série d'examens sérieux démontrant d’une manière péremptoire l’état de la moelle et des nerfs, C’est pour combler cette lacune que, dans ces deux dernières années, MM. Duplay et Cazin ont entre- pris un grand nombre d'expériences méthodiquement poursuivies, au niveau de l'articulation du genou, sur dix chiens et cinq lapins, faisant chaque fois com- paralivement l'examen des tissus du côté sain et de ceux du côté malade. Les lésions articulaires élaient produites par l'in- jection de solutions de nitrate d'argent, de teinture d'iode, par l'introduction d'un thermocautère rougi ou par des mouvements forcés. La recherche des lésions des troncs nerveux, des racines rachidiennes et de la moelle resta constamment négative: les fibres museu- laires présentèrent, dans tous les cas, les caractères de l’atrophie simple sans processus irritalif. Les seules lésions constatées furent celles de filets nerveux arti- culaires dans leur partie terminale, : Aussi, en l'absence de lésions ascendantes s’éten- dant aux nerfs musculaires, se trouve-t-on amené à admettre un retentissement de l'irritation des nerfs périarticulaires sur les centres médullaires, retentis- sement qui se propagerait aux foyers où les nerfs centrifuges prennent naissance. La pathogénie des amyotrophies d’origine articulaire réflexe, nettement indiquée par Vulpian, se trouve donc aujourd’hui établie sur des recherches anatomo-pathologiques rigoureuses, Dr HENRI HARTMANN. Rouvier (J.). — Revue internationale de biblio- graphie médicale, pharmaceutique et vétéri- naire, Paris et Beyrouth, 1891, n° 1. 1 L'an dernier, M. Rouvier (de Beyrouth) fondait une revue bibliographique trimestrielle donnant l’indica- tion des divers travaux afférents aux sciences médi- cales. 11 lui adjoint aujourd’hui un bulletin mensuel analytique, dont le but est, nous dit:l, « de donner beaucoup en peu de lignes, de faire connaître avec impartialité les principaux travaux publiés par la presse médicale du monde entier ». Le premier nu- méro,contenant 32 pages de texte fin, imprimé surdeux colonnes, contient un grand nombre de renseignements. D° Henri HARTMANN, Salomonsen (D: C. J.). — Technique élémentaire de bactériologie. Traduit par le D° Ray. Duraxn- Fanpez (4 francs). Chez Rueff et Cie, éditeurs, Paris. es recherches microbiologiques sont devenues d’une nécessité absolue dans la pratique courante de la médecine et dans bien des circonstances, elles sont indispensables avant d'affirmer le diagnostic. Pour être complète, l'éducation du médecin d'aujourd'hui doit donc comprendre l'étude de la bactériologie. Pénétré de cette idée, le docteur Salomonsen (de Copenhague) a publié le résultat des travaux qu il avait entrepris pour acquérir par lui-même les notions de bactériologie qui lui étaient nécessaires; c’est dire que sa technique élémentaire est conçue dans un esprit essentiellement pratique et mise à la portée de tous les médecins auxquels elle indique les mani- pulations courantes en bactériologie et les moyens de réaliser, très simplement, une installation de labora- toire suffisante pour leurs besoins, Un ouvrage de ce genre manquait dans la littérature française; en nous donnant une traduction de Salomonsen aussi claire qu’exacte, le D' Ray. Durand-Fardel a comblé cette lacune de la facon la plus heureuse. Ë - D: Ed. pE LAVARENNE, Giccolini (S. A.). — L'inspiration profonde active (2fr. 50). G. Masson, 120, boulevard Saint-Germain, Paris, 1590, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 231 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER Par exception le présent numéro ne contient pas le compte rendu des séances de plusieurs Académies et Sociétés savantes, dont la Revue analyse ordinairement les travaux, — ces Sociétés venant de prendre vacance à l’occasion des fêtes de Pâques. ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 23 mars 1591, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. —MIle Klumpke: Observa- tion de la planète Millosevich (304), faites à l'Obser- toire de Paris (Equatorial de Ja four de l'Est), — M. J. Weingarten : Sur la théorie des surfaces appli- cables. Extrait d’une lettre de M. J. Weingarten à M. Darboux. — M.J, Verschañffelt présente une note sur les déformations que présente après l’imbibition un système formé par la superposition de deux lames hygroscopiques, minces et homogènes, à propriétés diflérentes. Toutes les formes que peut affecter le système peuvent être classées en deux groupes : au premier se rattachent toutes les formes présentant des courbures principales de même signe, au second toutes celles présentant des courbures principales de ‘signe contraire. Le cylindre peut être considéré comme une forme de transition et la sphère est un cas particulier du premier groupe. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. R. Colley, N.Michkine et M. Krazine rendent compte des observations acti- nométriques faites à l'observatoire de l’Académie Pe- trowsky, près de Moscou, dont le but principal était de déterminer l'intensité totale des radiations émises par le Soleil et de celles diffusées par toute l'étendue du ciel, sur l'unité de surface horizontale du sol, Les au- teurs se sont servis du pyrhéliomètre de M. Crova qui a été observé comparativement aux indications de lactinographe de MM. Richard frères, Ils ont trouvé que la marche diurne de la radiation, par des jour- nées très sereines, présente, à Moscou, les mêmes caractères typiques que ceux trouvés par M. Crova à Montpellier ; ainsi : 1° La courbe de la marche diurne n'est pas symétrique par rapport à l’ordonnée de midi; 2° Les maxima principaux ont lieu, en été, vers 10 heures du matin et à 3 heures après midi; ils sont séparés par un minimum secondaire, En automne les deux maxima se rapprochent de l'heure de midi. De l’ensemble de ces observations il résulte que l'insola- tion est plus intense pendant le mois de juillet que pendant les mois de juin et d'août, tandis que théori- quement, elle devrait être la plus forte en juin; la transparence atmosphérique est donc plus faible pen-- dant le mois de juin que pendant les deux mois suivants, et cependant la durée totale de linsolation est plus ue en juin qu'en juillet.Le mémoire est accompagné de 23 tableaux, donnant, pour tous les jours de chaque mois, la radiation totale recue sur l'unité de surface horizontale, ainsi que du calcul des degrés de précision que l’on peut atteindre dans ces observations, — M. A Crova, au sujet des observations précédentes, fait remar- quer que ces dernières ne sont pas directement compa- rables à celles qu'il a faites à Montpellier et à celles de M. Savélief à Kief, car elles donnent les radiations totalisées du Soleil et du ciel, tandis que celles de Montpellier et de Kief donnent seulement celles du Soleil. De la comparaison du nombre de calories entre Moscou et Montpellier on peut conclure que la transpa- rence atmosphérique a été pendant les mois de juin et de juillet plus grande à Moscou qu'à Montpellier, Ces résultats rapprochés de ceux obtenus pendant l'hiver à Kief, permettent de conclure que la situation continentale des deux stations russes donne à leur atmosphère une transparence calorifique plus grande qu'à Montpellier, dont la situation, plus méridionale et au bord de la mer, augmente la masse des vapeurs absorbantes de son atmosphère, Quoique le soleil y brille plus souvent, la transparence atmosphérique y est moindre. — M. Berthelot, en étudiant l’action de la chaleur sur l’oxyde de carbone renfermé dans des tubes de verre scellés à la lampe, a reconnu que si l’on soumet ce gaz à des températures de plus en plus abaissées, il arrive un degré tel que l'acide carboni- que continue à se manifester, précisément comme à une température plus haute, mais sans qu'il apparaisse la moindre trace de charbon. La dose d’acide carbonique formée ainsi vers 500° à 550° est comparable à celles que l’on obtient en faisant passer très lentement l’oxyde de carbone dans des tubes de porcelaine chauffés au rouge; mais au rouge vif, et même au rouge modéré, il se dépose vers les extrémités des tubes deux an neaux de charbon très visibles, tandis que vers 500° à 550°, avec une dose comparable d'acide carbonique formé, il est impossible d'observer la moindre trace de charbon. L’acide carbonique formé ne saurait résulter ici d’une dissociation directe de l’oxyde de carbone, mais bien d'une décomposition proprement dite, qui doit être précédée par une polymérisation, le produit condensé se séparant aussitôt en acide carbonique et sous-oxydes. Le mécanisme de cette transformation singulière rentrerait dès lors dans les mêmes lois que les polymérisations et décompositions pyrogé- nées des carbures d'hydrogène, — M. Berthelot, dans le cours des recherches précédentes, a observé une réaction caractéristique de l’oxyde de carbone. Ce gaz réduit l’azotate d'argent ammoniacal, Cette réaction est extrêmement sensible et s'effectue même en présence d'une grande quantité d'air. Elle pourra donc servir à reconnaître la présence d’une trace d'oxyde de carbone, dans une atmosphère gazeuse, pourvu qu'il n’y ait pas d’autre substance réduc- trice, Cette réaction fournit un nouveau rapproche- ment entre l’oxyde de carbone et les aldéhydes. — MM. Berthelot et André, d’après quelques essais ayant pour but de rechercher l’origine de l'odeur spéciale émise par la terre végétale récemment mouil- lée, établissent que le principe essentiel de cette odeur réside dans un composé organique, neutre, de la famille aromatique, et qui est entraîné par Ja vapeur d’eau, à la facon des corps possédant une très faible tension, — M. Besson étudie l’action de l'acide iodhydrique sur le chlorure de silicium. Le produit de la réaction, soumis à une série de distillations frac- tionnées, lui a donné les chloroiodures Si2CIST, Si CP12 et quelques gouttes d'un composé se rapprochant de la formule S2CIB. — M. L. Amat continue ses recherches sur l'influence des acides dans la trans- formation du pyrophosphite de soude en phosphite. Il étudie les influences de la dilution, de la quantité d'acide, de la nature de l’acide, Dans l’action des alcalis sur le pyrophosphite de soude, la vitesse de transformation à été trouvée à chaque instant pro- portionnelle, non seulement à la quantité de pyrophos- phite qui se trouve dans la dissolution, mais encore à la quantité de soude qui provoque cette transforma- tion. — M. Vèzes rend compte du résultat de ses recherches sur les sels bromoazotés du platine.Il décrit 232 | ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES les modes de préparation du platibromonitrite, du plati- bromonitrosonitrite et du bromoplatinate de potassium. — M. Albert Colson présente une note sur la désagré- galion par l’eau des sels neutres d'amines de la série grasse. Il montre que les sels constitués par des amines capables de ramener au bleu le tournesol rougi par l'acide minéral auquel elles sont combinées sont sen- siblement dissociées par l’eau, même vers 50°, et leur désagrégation est réglée par les lois que M. Berthelot a établie pour les sels faibles, La méthode employée ne s'applique pas aux alcalis fixes, potassez chaux, — M. Raoul Varet fait connaître un certain nombre de nouvelles combinaisons de la pyridine; il décrit les bromozincate et cuivrate de pyridine ainsi que Jes argentoiodure, bromure et chlorure de pyridine, — M. Léo Vignon synthétise les résultats de ses précé- dentes communications relatives à la théorie des phé- nomènes de teinture. Tous les phénomènes de teinture obtenus avec les matières colorantes solubles, qu'ils se manifestent avec les textiles ou avec les oxydes métal- liques, nécessitent : 1° La présence de fonctions acides ou basiques dans les absorbants ; 2° La présence de ces mêmes fonctions dans les matières colorantes. En faisant abstraction des matières colorantes tétrazoïques, que le coton absorbe sans mordant dans un bain alcalin, on peut dire que les phénomènes de teinture obtenus avec les matières colorantes solubles sont d'ordre purement chimique, et que les règles de l'action chimique suffisent à les expliquer, 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. d’Arscnval décrit une méthode générale pour enregistrer simultanément onde électrique d’excitation et la contraction mus- culaire résultante. La méthode permet de faire varier isolément d’une facon continue les trois facteurs, potentiel maximum de la décharge, temps de variation du potentiel et quantité délectricité, dont est fonction la courbe qui représente la caractéristique d'excitation (forme de l’onde électrique). Elle permet en outre de combiner ces variations deux à deux ou trois à trois et d'inscrire directement sur un cylindre enregistreur la courbe de l'onde électrique, et, immédiatement au- dessous, la courbe de la secousse musculaire provoquée par cette excitation. — MM. Simon Duplay et Maurice Cazin, au cours de recherches dirigées dans un autre but, ont reconnu, par une série d'expériences nombreu- ses, queles phénomènes convulsifs, que produit chez les souris, les rats et les cobayes, l'injection de lymphe de Koch diluée, suivant la technique employée en Alle- magne dans une solution d'acide phénique à 5 pour 1000, provenaient uniquement de laction de l'acide phénique. Ils signalent de plus que pour un même poids d'animal, la souris est beaucoup plus sensible à cette action que le rat, le cobaye, le lapin et le chien. Mémoires présentés. — M. Paraire adresse une note « Sur le maximum de rendement de la vapeur. » — M. J. Dettweiler adresse une note relative à un projet d'utilisation comme force motrice, de la déviation du mouvement d'un pendule par la rotation de la Terre. — M. Déclat adresse une note tendant à établir qu'il a, le premier, fait usage d’injections hypodermiques antiseptiques, dans le traitement de la tuberculose. Séance du 31 mars 1891, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Painlevé : Sur la théorie de la représentation conforme, — M. G. Sire présente sous le nom de gyroscope alternatif à mouve- ments réciproques, un appareil destiné à mettre en évi- dence le fait connu : lorsqu'un tore en rotation est assujetti à tourner autour de deux axes rectangulaires entre eux, une rotation autour de l’un de ces axes n’est possible que si l'axe du tore est parallèle à cet axe, et si cette rotation est de même sens que celle du tore. — M. A. Gaïllot a relevé une série d’observations faites à Paris au cercle de Gambey d’août 1824 à sep- tembre 1857 dans des conditions particulièrement fa- vorables pour mettre en évidence, le cas échéant, une variation de latitude; les moyennes ne montrent au- cune variation annuelle, mais une variation diurne nette, avec minimum à 9 heures, — M. G. Bigourdan donne la liste, avec description sommaire, des nébu- leuses nouvelles qu'il a découvertes à Paris depuis 1887. — M. Mouchez annonce que la première séance du Comité international permanent pour l'exécution photographique de la Carte du Ciel vient d’avoir lieu ; après celte troisième session, les travaux vont com- mencer immédiatement, 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. P. Duhem donne briè- vement les résultats auxquels il aboutit dans un ou- vrage en cours de publication sur les pressions à l’in- térieur des milieux magnétiques ou diélectriques. — MM. E. Sarrazin et L. de la Rive ont repris la vérifi- cation des expériences de M. Hertz relativement aux ondes électriques réfléchies dans l'air; comme pour les ondulations des fils conducteurs, ils ont trouvé que la longueur d'onde varie avec le résonnateur et non avec la source; et qu'elle est sensiblement constante pour un résonnateur donné; de plus, avec un même résonnateur, elle est sensiblement la même dans l'air et le long d’un fil conducteur. — M. A. de Tillo signale des anomalies magnétiques considérables dans une région très limitée de la Russie d'Europe, entre Charkow et Koursk, — M. H. Deslandres, prenant le spectre des hydrocarbures ou du carbone comme exemple, montre que l’on peut par le calcul à partir d’une série de bandes bien connues, calculer la position des autres bandes du même spectre, et par suite déterminer si des raies observées doivent bien être attribuées au spectre du corps étudié. — M. K. de Kroustchoff a fait la synthèse de l’amphibole par la voie humide. — A propos de la note de M. G. Linossier sur l'hématine végétale, M. T. L. Phipson rappelle qu'il a découvert dans certaines algues en 1879 un pigment rouge con- tenant du fer et donnant un spectre d'absorption ana- logue à celui du sang. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. L. Lindet communique plusieurs expériences nouvelles à l’appui de Popinion émise antérieurement par lui, à savoir que les alcools supérieurs produits par la fermentation alcoolique résultent de la vie de microorganismes distincts de la levure de bière. — M. A. d’Arsonval présente un appareil destiné à filtrer à la bougie de porcelaine les liquides visqueux provenant de tissus animaux; c’est la pression de l'acide carbonique liquéfié qui pousse les liquides à travers la porcelaine; l'acide car- bonique à ces pressions élevées jouit d’un pou- voir antiseptique propre considérable, — M. R. Mo- niez a pu observer les mäles chez un certain nombre d'espèces d’Ostracades d’eau douce qui passaient pour se reproduire exclusivement par parthénogé- nèse, — M.A. F. Marion expose ses nouvelles ob- servalions sur la sardine de Marseille; il explique l'apparition successive de bandes de tailles variées par l'irrégulatité de la maturité sexuelle qu’on peut obser- ver chez les adultes ; il pense que l’œuf pondu est flot- tant, et c'est à la sardi ne qu'il faut rapporter les œufs à grande chambre périvitelline décrits par Raffaële à Naples. — M. P. Lesage continuant ses recherches sur la physiologie des plantes du littoral, a reconnu que la présence du sel diminue la formation d'hydrate de carbone dans les tissus des plantes; ce fait est à reprocher de cet autre, signalé par le même auteur, qu'une forte salure s'accompagne d’une diminution de la chlorophylle. — M. E. Aubert a constaté sur des plantes grasses (Cactées) exposées à la lumière dans une atmosphère dépourvue d'acide carbonique un dé- gagement simultané d'oxygène et d'acide carbonique, — M. A. de Tillo comparant des pressions baromé- triques observées par un voyageur au centre de l'Asie, avec la marche générale de la pression sur ce conti- nent, conclut à l’existence d'une dépression dans ces régions d'environ 50 mètres au-dessous de la mer. — M. A. Pomel expose d’après un grand nombre d’in- formations qu'il a recueillies, les grandes lignes du tremblement de terre des 15 et 16 janvier en Alvérie, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Mémoires présentés, — M. Pellerin adresse une note sur la réduction de la résine commune par l'hydrogène naissant. M, A. B. Mac Donall adresse un relevé des quantités de pluie tombées à Paris pendant sept an- nées consécutives, de 1870 à 1876. L. Laricoue. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 10 avril 1891. M. Engel à remarqué que si l’on mélange une solu- tion d'acide chlorhydrique concentré à une solution saturée d'hyposulfite de soude, on obtient, après sépa- ration du chlorure de sodium, une solution limpide, qui se conserve longtemps, mais jaunit peu à peu; puis il se forme un dépôt de soufre qui offre cette particu- larité remarquable qu'il se redissout si l’on ajoute un excès d'eau; ce soufre est soluble dans le chloroforme et le sulfure de carbone et cristallise facilement par évaporation; mais les cristaux ainsi obtenus fondent au-dessous de 100° en se transformant en soufre mou insoluble dans le sulfure de carbone. La forme cristal- line de cette nouvelle variété de soufre n’a pas encore pu être déterminée, — M. Engel a étudié l’action de l’eau oxygénée sur le permanganate de potassium en présence d'acide sulfurique, et constaté qu'il n’y à pas dégage- ment d'oxygène si l’on emploie des réactifs purs ; mais si l’on amorce la réaction au moyen d’une trace de sulfate manganeux, elle se continue d’elle-même. — M. Béhal rappelle la suite des recherches qu'il a faites en commun avec M. Choay sur le chloralimide el donne comme formule de constitution de ce corps le schéma : CH — CCE AzH/ \AzH — CH CH — CC Az H CCE et explique les isomères que présente le chloralimide en construisant cette formule dans l’espace; on re- marque alors qu'il ne peut y avoir que deux isomères stéréochimiques. M. Béhal fait ensuite observer que dans un certain nombre de cas la symétrie du schéma construit dans l’espace concorde bien avec la symé:- trie cristalline observée. Malheureusement il y a des exceptions bien difficiles à expliquer. — M. Bertrand pipe que par hydrogénation du xylose il a obtenu la xylite; l'hydrogénation se fait au moyen de l’amal- game de sodium, et la purification de la xylite au moven de Pacétol dibenzoïque. Traitée par l'acide iodhydrique, la xylite donne naissance à l’iodure de pentine correspondant au méthylpropylcarbinol. — M. Prunier décrit une nouvelle méthode d'analyse élémentaire permettant de doser à la fois le soufre et le carbone, — M. Grimaux a étudié en collaboration avec M. Lefèvre l'influence qu’exerce l'introduction d’un groupe oxyméthylé dans les molécules aroma- tiques, au point de vue de la formation des matières colorantes. Il a comparé les réactions et les matières colorantes que donnent la diméthylaniline, la méta- anisidine diméthylée et l’ortho-anisidine diméthylée, et conclut que l'introduction d'un groupe méthoxyle influe sur la nature de la couleur : ainsi l'oxydation de la diméthylaniline donne du violet, les deux anisidines donnent du bleu très pur; il faut ége alement tenir compte de la place qu'occupe le groupe méthoxylé : un pareil groupe en position orlho s'oppose presque absolument à la formation des colorants qu’on obtient très facile- ment avec le dérivé méta. M. Verneuil décrit un dispositif qu'il à imaginé pour alimenter automatique- ment une trompe à mercure, en faisant remonter le mercure dans le réservoir supérieur au moyen d’une trompe à eau, A. CouBEs, 233 SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 1e avril 1891. M. Fouret fait connaitre l'extension aux courbes al- gébriques gauches d’une propriété qu'il a déjà donnée pour les courbes algébriques planes : Le lieu des points pour lesquels la somme des carrés des normales me- nées à une courbe algébrique gauche quelconque est consfante, éstune surface du second ordre. — M. Kobb indique un critérium applicable à la distinction entre les maxima et les minima d’intégrales définies. Il en fait l'application à l'intégrale qui se rencontre dans la démonstration du principe de la moindre act'on. — M, Raffy : Détermination du caractère des sur- faces applicables sur des surfaces spirales. Maurice D'OGAGNE. SOCIÉTÉS MARITIMES SCIENTIFIQUES NORTH EAST COAST INSTITUTION OF AND SHIPBUILDERS ENGINEERS M. Weighton : Puissance indiquée normale des ma- chines et chaudières marines. Bien des formules ont été employées à diverses époques pour exprimer la puis- sance des. machines. La force indiquée sur les pistons, que l'indicateur permet toujours d'obtenir, est l'expression, aujourd’hui adoptée en pratique, de cette puissance. Mais elle ne donne aucune indication sur la chaudière, ni par conséquent sur l'ensemble de l'appareil moteur. Une commission fut chargée en 1885 d'établir une formule qui servit de terme de compa- raison des valeurs relatives des appareils moteurs, M. Weighton expose le résultat de ses travaux. — Le but de la nouvelle formule étant d'exprimer non la puissance absolue, mais la valeur relative d’un appareil moteur, ou son degré d'utilité pour larmateur, il importe de choisir avant tout une unité convenable, La force indiquée d'une machine n’est pas une mesure de sa valeur; elle ne le serait que dans des conditions de fonctionnement identiques pour toutes les machines. Ainsi deux machines de dimensions différentes pourront bien, avec même pression, et même nombre de tours être amenées à produire la même puissance en faisant varier l'introduction, Mais leurs conditions économiques ne seront plus les mêmes. Celle qui aura la plus forte introduction dépensera plus de vapeur, et, par suite, de combustible; et la plus grande course entrainera le plus d'usure. La valeur d’un appareil est done, dans une large mesure, indépendante de la force indiquée, On pourrait la représenter par des nombres proportionnels abstraits, Mais il a paru com- mode d'attribuer à ces nombres un sens concret; on est convenu de prendre pour unité de la valeur la puis- sance en chevaux; seulement celte puissance sera celle que développeraient les machines dans des con- ditions moyennes et identiques bien déterminées, Or, en étudiant d’une part les éléments d’où dépend la valeur d’un appareil moteur, le port en lourd, la vitesse, la consommation de combustible, l'usure, les frais d'entretien, le poids de l'appareil, et, d'autre part, les facteurs d’où dépendent à leur tour ces éléments, on a reconnu que le principal de ces facteurs était la force indiquée, unité arbitrairement choisie de la valeur. Parmi les autres facteurs, les uns exercent une influence considérable sur la force indiquée : on les a donc fait entrer dans la formule, sous forme de fonctions qui réduisent leur influence à être uniforme ou proportionnelle à la valeur. Quant aux autres facteurs, qui n’ont qu'une influence indi- recte, on les à éliminés au moyen de plusieurs hypo- thèses qui leur attribuent une certaine valeur moyenne constante, On est ainsi arrivé à la formule suivante de la puissance indiquée normale : 19 ce EE ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES (p2 ŸS + 3H)ŸP 100 où D est le diamètre du cylindre de basse pression en pouces, S la course du piston en pouces, H la surface de chauffe en pieds carrés, et P la pression en livres par pouce carré au-dessus de l'atmosphère. Il est d’abord évident que la valeur de l'appareil étant exprimée en puissance indiquée, la formule doit ren- fermer D?, et comme on suppose la consommation uniforme pour une pression donnée et indépendante de la détente, le grand cylindre est seul à considérer. En outre une table des pressions montre qu'entre 50 et 250 livres (entre 3 et 17 k. par centimètre carré), VP est sensiblement proportionnel à l'ordonnée moyenne, en supposant que la contrepression et l’utili- sation soient les mêmes. En pratique, il est certain que l'utilisation variera; mais cette variation échappe à l'évaluation et rentre dans la catégorie des facteurs auxquels on attribuera une valeur moyenne constante. Quant à VS, ce facteur, qui représente la vitesse du piston, suppose cette vitesse proportionnelle à la racine cubique de la course. Ici encore, dans la pra- tique, on s’écarte de cette loi d’une facon sensible, car on peut donner la vitesse que l’on veut entre des limites très larges sans s'inquiéter de la course. Mais si, ayant toujours en vue la valeur de l'appareil, on cherche d’où doit dépendre la vitesse, on trouve que c’est de l’usure et de la durée, par conséquent de la course, Eu effet, lorsque la vitesse dépasse certaines limites, la machine est soumise à des chocs et à des vibrations, La précision de l’ajustage et de l'équilibre, qui peut les atténuer, demande des soins et entraine par suite une diminution proportionnelle de valeur, D'autre part, si on limite la vitesse, cette limitation dépend de la course, du poids des pièces mobiles, de la solidité de la construction. Mais la difficulté d’amortir ces vibrations augmente avec la pression par unité de surface du piston nécessaire pour accélérer et retarder alternativement les pièces mobiles. Or cette pression dépend du poids de ces pièces, de la course et du carré du nombre de tours, sans parler du rapport des longueurs de la bielle et de la manivelle qui est supposé uniforme. Et comme le Br : SE Fe 5 ë s 8j— poids des pièces mobiles varie à peu près comme YS, la pression nécessaire à leur accélération ne sera cons- lante que si les vitesses de piston, pour toute valeur de la course, sont proportionnelles à VS. Cest ainsi que se trouve justifié l’emploi de cette fonction de la course. Les frottements des pistons, des patins et de la ligne d'arbre sont une autre cause d'usure, Ils dépendent de la vitesse, mais ne sont pas aussi nui- sibles que les chocs et les vibrations, On ne pourrait en uniformiser les effets que par une vitesse de piston constante pour toute valeur de la course. Quant à la surface de chauffe, c'est l'élément qui représente le mieux l'influence de la chaudière, Sous un volume donné de l’enveloppe, la surface de grille peut en effet varier beaucoup sans entraîner de variation correspondante dans la valeur de la chaudière. La surface de chauffe, au contraire, ne peut pas beaucoup augmenter, et si elle est réduite, la puissance l’est aussi, ou l'importance de la chaudière, puisque la consommation est supposée constante. En outre, multüipliée par YP, la surface de chauffe aura plus ou moins de valeur suivant la pression, comme dans la machine. La formule n'étant qu'un instrument de comparaison, le coefficient est arbitraire. On à choisi 100 non seulement par commodité, mais aussi parce que le nombre résultant représente à peu près la puissance en chevaux dans des conditions normales. L'emploi de la nouvelle formule est facilité par un diagramme qui, étant donnés les quatre facteurs, fournit à simple lecture la valeur de la puissance indiquée normale, Léon Viver. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 19 mars 1891. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — Professeur John A, Mac- William : Un nouveau réactif pour l’albumine et les autres matières protéiques. L’acide salicyl-sulfonique possède à un très haut point la propriété de précipiter les substances protéiques. C’est un réactif extrêmement délicat pour la recherche des corps protéiques en solu- tion, et il agit sur tous les corps de cette classe. Le professeur Mac-William a examiné l’action de l'acide salicyl-sulfonique sur lalbumine naturelle et les albu- mines dérivées, la globuline, la fibrine, sur les pro- téines et les peptones; il donne les résultats obtenus dans ces différents cas, et lorsque le réactif est em- ployé pour rechercher la présence de corps protéiques dans l'urine. La conclusion à laquelle il arrive est que l'acide salicyl-sulfonique est probablement le plus délicat et le plus précis de tous les réactifs connus pour la recherche des corps protéiques en solution. — D'° William Hunter: Influence de l’oxygène sur la for- mation des ptomaines, — L'auteur a étudié cette ques- tion dans le but de déterminer jusqu’à quel point les propriétés pathogènes d’une certaine classe de bacté- ries (aérobies facultatives) sont en connexion avec le pouvoir qu'elles possèdent d'emprunter l'oxygène au milieu nutritif lorsqu'on empêche l'accès de Pair. Les résultats des observations ont montré que: 4° le libre accès de l’oxygène empêche complètement la formation des ptomaïnes, la seule base obtenue dans ces circons- tances étant l'ammoniaque, 2° Sauf une exception, toutes les expériences concordent pour montrer que, d’après les quantités correspondantes de diamines formées, la formation la plus considérable de pto- maines à lieu quand l’oxygène est entièrement sup- primé. 3 Des observations furent aussi faites sur les résultats obtenus en prolongeant la durée de la putré- faction en l'absence complète de l'oxygène. Les résul- tats montrèrent que le treizième jour, les diamines formées étaient réduites au quart de la quantité exis- tante dans la même quantité de liquide, le septième jour. 4 Dans tous les cas, le seul composé aromatique obtenu était la cadavérine (CSH1A7?), La putrescine (C{H12A7?) n'existait qu'à l’état de traces. 5° Les résul- tats d'observations sur les qualités des bases produites ne sont pas aussi nettes. Les symptômes d’empoison- nement les mieux définis furent obtenus par linjec- tion d’un liquide putréfié à l'abri de l'oxygène. Ils mon- trèrent de la prostration, de la diarrhée, et dans une autre occasion, une élévation de température. — M. A. Mallock : Mesures du module de Young pour les cristaux. — L'auteur à construit un appareil avec lequel on peut déterminer le module de Young sur de petits spécimens. Il a obtenu, pour un certain nombre de cristaux, les résultats suivants : TABLE DES VALEURS DU MODULE DE YOUNG Riscarboucle Er ere ce seeeeter so. 9 280 MOIE Escarboucle (autre spécimen) 2,372 PMErANTO ER TÉL Ltee 2,076 Hourmalnei(a) eee tee DOUCE 1,294 MopazerentmeenN(a) TEE PRET CR EEE 1,207 Fluorine 1,200 Fluorine 4 1,185 Topaze jaune ! 1,430 ;, Topaze jaune !.. 9,515 10 Mopareqaunent(b) MIE TE RNEREERTEES 8,80 Tourmalneei(b) rec he CR 8,135 OUAREZINP A SNS RER TETE se . 7,46 Verre blanc dur terre ET 6,96 ! La position des faces du cristal employé par rapport aux axes cristallographiques n’est pas connue. Les spécimens marqués (b) sont à angle droit avec ceux marqués (a). 2 Cristal noir de l’Oural. (a) Section parallèle aux faces du prisme. (b) Section normale aux faces. 3 Parallèle à la diagonale du cristal cubique. 4 Parallèle aux faces du cube. * Parallèle aux faces du prisme. DE PR PS ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 235 Arate et de eee come etes Pierre blanche d’Arkansas !...... UT 10,8) — M. James E. Keeler: Sur les principales lignes du spectre des nébuleuses. Par l'étude de la nébuleuse d'Orion, M. Keeler a pu comparer la raie Ho de l’hy- drogène avec la troisième ligne des nébuleuses et déterminer la véritable position de la principale ligne des nébuleuses, Il trouve que la position normale de cette ligne correspond à > 5005,93 avec une erreur probable de 0,03. La position de la magnésie sur la même échelle est x 5006,36, elle diffère done de 0,43 dans la position normale de la ligne nébuleuse. De ces faits et d’autres analogues, l’auteur conclut qu'il n'existe aucun rapport entre la ligne des nébuleuses et celles du magnésium. 2° SCIENCES NATURELLES. — Professeur J. Wood- Mason et Surgeon-Alcock : Sur les papilles utérines du Pteroplatea micrura et leurs relations avec l'embryon. Les auteurs ont trouvé que, dans le Pteroplatea micruwra, nous avons un Batoide qui développe un embryon simple dans un utérus muni d’une membrane mu- queuse de structure complexe; et que, tandis que les caractères histologiques de certaines portions de la muqueuse utérine sont ceux des glandes à sécrétion, la disposition de ces portions glanduleuses montre, sans laisser de doute, que la majeure partie de leur sécré- tion s'écoule dans le pharynx de l'embryon pendant son séjour dans l’utérus, Richard A. GrÉGoRY, SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 20 mars 1891. M. Pickering lit une note sur « la théorie de la dissociation des ions et ses conséquences ». Il montre que la théorie en vertu de laquelle les électrolytes sont entièrement dissociés en leurs ions dans les solutions très étendues, soulève une multitude d’objections. Pour n’en citer qu'une, il y a des cas où, en diluant encore plus une solution déjà étendue, on dégage de la cha- leur : dans cette théorie, on devrait dissocier quelques molécules de plus, ce qui absorberait de la chaleur. Il conclut en montrant qu’il ne doit même pas y avoir, comme le voudrait une théorie de Clausius, quelques molécules décomposées en leurs atomes dans une solu- tion, — M. J. Swinburne fait une communication sur « quelques points de l’électrolyse ». L'application du principe de Carnot à une pile réversible à un seul dE liquide donne la formule EE 0% E force électro- motrice, E- part due à l’action chimique, 0 tempé- rature absolue. Si n et p se rapportent aux deux pôles, on peut écrire : dE dE ñn L0 p dô oi Eu + Ep = Ere + Epe se on peut, en plongeant les deux pôles dans deux vases différents, et les chauffant à différentes températures, dEn ÿ dE». dd La connaissance des données thermochimiques, ob- tenues dans des conditions qu'on aurait soin de bien préciser, pourrait être intéressante, Mais il faut, pour que la pile soit réversible, qu'il n’y ait pas d'action secondaire, et c’est ainsi que l’auteur attribue le rôle principal dans les piles secondaires à la formation du sulfate de plomb et non à la formation intermédiaire de PbO, Quant à la production de gaz dits « à Pétat déterminer séparément les effets Peltier 0 l Pierre onctucuse à grain très fin. 2 Parallèle au clivage principal. naissant », un raisonnement fondé sur le principe de la conservation de l’énergie montre qu’ils n'existent pas. Dans l'expérience qui consiste à réduire le sulfate ferrique en présence de lacide sulfurique par un métal comme le magnésium, il y a ou réduction du sel de fer, ou dégagement d'hydrogène : il y a entre les deux faits une relation d’alternative, non un rapport de cau- salité, — Sur la manière de voir de M. Lodge sur la force électromotrice de contact entre métaux, il ob- serve que si la tendance à l'oxydation peut produire une tension électrique qui empècherait foute action ultérieure, la combinaison actuelle doit charger le métal, s’il est isolé, Le sodium, en s’oxydant continuel- lement, se chargerait ainsi à un potentiel énorme, ce qu'on n’a jamais observé, Dans la discussion de ces notes, M. Pickering dit que les chimistes ne croient plus à l’état naissant et qu'il ne faut pas voir dans la prédominance d’une réaction sur une autre une simple question de quantités de chaleur, mais une sorte de sélection chimique. M.S. P. Thompson appelle l’atten- tion sur le fait que la force électromotrice produisant l'électrolyse peut être prise pour mesure de l’affinité ; il ne partage pas l'avis de M. Swinburne sur les piles secondaires ; deux actions identiques aux deux pôles ne devraient rien ajouter à la force électromotrice, si l’on pouvait la calculer par les données thermochi- miques. Le Président, sans être de l’avis du D' Lodge, croit que l’oxydation d’un morceau de sodium isolé ne produirait pas, dans ses idées, une grande différence de potentiel, car il ÿ a production de chaleur, — Le Professeur Perry lit une note « sur la variation de la tension superficielle avec la température ». L’appli- cation du principe de la conservation de l’énergie donne la relation dH+dW=kdt +(l+ T)dS pour un chan- gement à volume constant; (dH chaleur absorbée, dW travail effectué, 4 chaleur spécifique à volume cons- tant, { chaleur latente d'extension, T tension super- ficielle, S surface, { température); on en déduit que T—c—bt, « et b constants; et {—bt. Si cet b sont indé- pendants du volume spécifique, on a, à la température critique (—#. — M. Blakesley décrit un effet de la ) température sur la tension superficielle, non encore signalé, En chauffant une extrémité du tube d’un uiveau à bulle d'air. même à la main, on voit la bulle se dé- placer immédiatement vers l'extrémité. — Le Profes- seur S, P. Thompson fait une communication sur les «pièces d'épreuve et les plans d'épreuves magnétiques. » Il montre, par des expériences directes faites avec la bo- bine plate et le galvanomètre balistique, que, dans la méthode d'arrachement (méthode du elou), la distribu- lion magnétique est très fortement altérée par la pré- sence de la pièce d’épreuve : le champ, après l’intro- duction de cette pièce, peut atteindre # ou 6 fois la valeur du champ primitif : on ne sait donc pas ce qu'on mesure; la méthode de la bobine plate exploratrice, ou plan d’épreuve magnétique, est seule correcte. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 19 mars 1891 M. J.-H. Gladstone : Réfraction et dispersion molécu- laives de diverses substances. L'auteur compare, pour un grand nombre de substances organiques, la réfraction et la dispersion moléculaires observées, et celles que l’on peut déduire des valeurs déjà déterminées pour les éléments constituants. Le plus souvent il y a concor- dance, sauf dans certains cas où la différence est trop grande pour pouvoir étre attribuée aux erreurs d’expé- rience ; on est conduit à admettre alors une consti- tution spéciale pour les corps considérés. — MM, Duns- tan et W. Ince: Contribution à l'étude des alcaloïdes de l’aconit. 1" partie, — Sur l’alcaloïde cristallisé de l’Aconitum napellum. — M. Tutton : Caractères cristallo- graphiques de l’aconitine retirée de l’Aconitum napellum. — M. B. Schryver : L'asymétrie de l'azote dans les 236 1 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES composés substitués de l'ammonium. L'auteur conclut que les composés des ammoniums quaternaires peuvent présenter des stéréo-isomères, dans lesquels la varia- tion de forme cristalline est due à l’arrangement des radicaux éthyle, méthyle, isoamyle et chlore autour de l'atome d’azote, — M. Perkin junior: Acétylcarbinol, — L’acétate de potasse, en solution alcoolique, réagit sur la monochloracétone pour donner l’éther acétique de l’acétylcarbinol : CH3 — CO — CH? — O0 — C2H30. L’ac- tion du carbonate de baryle promet ensuite d'isoler l’acétylearbinol. — MM. W. Bishop et Perkin junior : Action du dichloracetate d’éthyle sw: le dérivé iodé du malonate d'éthyle. — MM. Perkin j. et James Sten- house : Acide benzoylacétique el quelques-uns de ses dérivés. — MM. Perkin ;. et Bertram Prentice : Syn- thèses effectuées à l'aide du pentane télracarboæylate d'é- thyle. — M. Easterfield : Oxydation du mannitol par l'acite nitrique. SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 6 avril 1891. Sir Douglas Maclagan lift une notice nécrologique du professeur Campbell Swinton sur lord Monerieff, — Le professeur Crum Brown lit un mémoire qu'il a fait en collaboration avec le D' James Walker sur la synthèse des acides bibasiques par électrolyse. Ils ont opéré déjà sur les sels éthylpotassiques des acides bibasiques. Ils étendent leurs recherches à un acide à chaîne latérale, l'acide méthylmalonique. L'électrolyse du sel éthylpotassique de cet acide donne de l’anhy- dride carbonique et un acide diméthylsuccinique symétrique : COOEt COOEt 20H CH — K? + 2C0? + CHCHS Cook Pôle — Hour Coort Pôle —<- L’acide diméthylsuccinique obtenu a, au point de vue de la disposition des carbones asymétriques, une cons- titution qui rappelle celle de l'acide tartrique, Le corps obtenu dans la réaction doit done être un mélange d’acide inactif et d'acide corresponpondant à l'acide racémique, c’est-à-dire inactif par compen- sation, Les auteurs sont arrivés, en effet, à séparer deux isomères, l’un fondant à 193 C, identique à l'acide paradiméthylsuccinique de Bischoff, l’autre à 120°, identique à l'acide antidiméthylsuccinique. L’'é- lectrolyse du sel éthylpotassique de l'acide éthylmalo- nique a donné de même deux acides diéthylsucciniques. —— Le professeur Taït lit un mémoire sur le viriel et spécialement sur les lignes isothermiques de l'acide carbonique. Il montre que la manière dont on écrit ordinairement l’équation avec p (v — 8) au premier membre (le terme p8 fait partie du viriel) est incor- recte, excepté en l'absence de forces moléculaires, La vraie forme de l'équation (approchée) est : (v — v)3 p=pli— ne CE V(U + a) (0 + B), \ v+ a) v : où p, v, € sont les données caractéristiques du point critique. On déduit des expériences d’Amagat, les valeurs p — 72,6 atm., v — 0,0046, pour l'acide carbo- nique {= 30° 9 C. Les valeurs des autres constantes sont : 4 — 0,001 ; 8 — 0,008 : R — 0,00371 : e— 0.000021. Avec ces nombres, la formule représente bien les iso- thermiques entre 0° et 100° pour des pressions de 1 à 500 atm. Elle repose sur une double hypothèse : 1° que les particules du corps sont des sphères solides ; 2 que la température absolue mesure l'énergie moyenne des particules libres ; sa concordance avec l'expérience peut ètre regardée comme une preuve en faveur de la se- conde de ces hypothèses, W. PEDDIE, Docteur de l'Université SOCIÉTÉ PHILOSOPHIQUE DE MANCHESTER Séance du 2% février 1891 M.Osborne Reynolds parle de la difficulté de calculer la force nécessaire pour des arbres de couche et leurs supports. Tant que les forces qui leur sont appliquées sont statiques, les méthodes de calcul actuelles suffisent, mais il n'en est pas ainsi pour des organes soumis à des vibrations. Si la vitesse de rotation d’un arbre vient à coïncider avec sa période de vibration naturelle, il quitte ses coussinets. M. Reynolds a calculé la période naturelle pour un arbre de couche dans le laboratoire d'Owens College et a soumis son calcul à l’épreuve au moyen d’un instrument très simple. Il consiste en une tige d’acier terminée par une boule et dont on peutrégler la longueur effective en la faisant glisser horizontalement dans un trou percé dans une grosse tige de bois qui lui sert de support. On ajuste la tige d'acier, de facon qu’elle soit à l'unisson avec l'arbre de couche et l’on en détermine ensuite la période de vibration. — M. Reynolds à trouvé que pendant un brouillard épais, une nouvelle courroie de machine bien propre fonctionnant avec une vitesse de 65 à 80 kilomètres à l'heure est devenue tout à fait noire par un contact de quatre heures avec le brouillard, C’est ainsi que les trains se noircissent dans les tunnels. — M. Faraday lit un mémoire sur l’analogie entre les théories du bimétallisme et celle des ions. Séance du 10 mars 1891. M. W. Brockbank annonce qu'il a découvert à Frizington dans le Cumberland des couches de calcaire du Spirorbis analogue à celles que l’on a découvertes à Levenshulme près de Manchester. — M. T, P. Kirk- man lit un mémoire sur la théorie des groupes. P, J. Hartoc. ACADÉMIE DES SCIENCES DE SAINT-PÉTERSBOURG Séance du 11 mars 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. Backlund, membre de l’Académie, présente, pour être publiés dans le « Bulletin » et dansles « Mélanges astronomiques » de l’Académie, les résultats de ses recherches sur Le mou- vement des petites planètes dont le mouvement moyen est à peu près le double de celui du Jupiter. L'on sait que celte question présente plusieursdiflicultés ; or, M. Back- lund a réussi d’aplanir ces difficultés en trouvant pour la détermination des orbites des planètes en question des formules fort simples et en même temps suffisamment approchées pour un temps assez long. Le ca'cul de ces orbites d’après la méthode de M. Backlund n’exige que le recours aux tableaux bien connus des transcendants de Laplace, Afin de vérifier ses formules le savant aca- démicien les a appliquées au calcul de l'orbite de la planète Hécube ; il va dresser les tableaux qui s’y rap- portent aussitôt qu'il aura terminé les calculs relatifs à l'apparition de la comète d'Encke, qui va avoir lieu dans le courant de cet été, 2° SCIENCES NATURELLES. — M, Th, Schmidt, membre de l’Académie, présente pour être publiée dans le « Bulletin » et les « Mélanges géologiques, » une note sur les couches géologiques des iles Oesel, Dago et Got- land (dans la Baltique) qu’il accompagne des réflexions suivantes : © Il y a un an j'ai présenté, pour être pu- blié dans les Mémoires de l’Académie, un rapport sur mon voyage en Suède fait dans le but de comparer Le. rt + CHRONIQUE 231 les couches supérieures du Silurien de notre île Oesel avec celles de l’ile suédoise de Gotland. Afin d’éclair- cir les dissentiments qui existent à propos de ces couches entre moi et le géologue suédois, le professeur Lindstrüm, j'ai publié les premiers résultats de mes recherches dans le Jahrbuch fur Mineralogie, Geolo- gie und Petrefoctenkunde, en me réservant de publier le travail ineætenso dans notre Bulletin. Cette publica tion a été retardée par l'apparition, vers la fin de l’année passée, d'un ouvrage de M. Dammes sur la structure géologique de l'ile Gotland, ouvrage dans lequel le prpfesseur berlinois, tout en cherchant à élu- cider les points en discussion entre moi et M. Linds- trôm, se range plutôt de l’opinion de mon savant adversaire, Dans la présente note j'ai tâché de répondre aux objections de M. Dammes et J'espère que la ques- lion sera définitivement tranchée après une prochaine excursion dans les îles que nous nous proposons de faire, M. Dammes et moi, cet été. » La note de M. Schmidt est accompagnée d’une carte géologique du bassin silurien russo-suédois qui occupe la plus grande partie de Ja Mer Ballique, depuis la côte de l'Ehstonie et l’île Oesel jusqu'à la côte suédoise située en face des iles Gotland et Oeland, O. BackLunp, Membre de l'Académie. CHRONIQUE LES RECHERCHES DE MM. LOEWY ET PUISEUX POUR DÉTERMINER LA CONSTANTE DE L'ABERRATION Les mémorables découvertes de Képler, de Newton et de Bradley conduisent à quelques relations d’une extrême simplicité, qui unissent entre eux les princi- paux éléments dont la connaissance importe à l'As- tronomie. Tels sont les moyens mouvements des pla- nèles, les grands axes de leurs orbites, les rapports de leurs masses à celle du Soleil, la vitesse de propaga- tion des ondes lumineuses, La détermination numé- rique de ces grandeurs diverses ne constitue en réalité qu'un problème unique aux aspects multiples, et toute addition précise à nos connaissances sur les di- mensions du système solaire a pour conséquence un progrès équivalent dans les autres branches de l’As- tronomie, On voit par là que la direction à donner aux recher- ches scientifiques ne doit pas être déterminée par l'in- térêt immédiat que telle ou telle grandeur, considérée en elle-même, peut nous offrir. Un résultat, en appa- rence aride et d’une signification difficile à saisir,peut avoir des conséquences qui se fassent sentir dans toutes les parties de la science, Tous les éléments numé- riques du système du monde présentent donc aux yeux de l’astronome un égal intérêt, et il importe avant tout de discerner ceux dont la détermination peut s'ef- fectuer avec la plus grande exactitude relative, Dans cet ordre d'idées, trois catégories de recherches apparaissent : 1° L'évaluation des masses, qui est du ressort de la Mécanique céleste. 29 La détermination des distances ou des parallaxes, fondée sur les observations du Soleil et des planètes en divers lieux de la Terre, 3° L'analyse des apparences qui résultent du mouve- ment de l'observateur et affectent les positions mesu- rées des étoiles fixes. Il ne saurait entrer dans le cadre de cette chronique de présenter une esquisse, même abrégée, des travaux entrepris dans les deux premiers ordres de recherches. Pour atteindre dans la détermination des masses une précision supérieure à celle qui résulte des calculs de Hansen et de Le Verrier, il faudra réunir un nombre immense d'observations, attendre que l'effet des pertur- bations séculaires se soit accentué, se livrer à une dis- cussion longue et délicate. Pour la recherche des pa- rallaxes, on doit saisir les occasions favorables offertes par les oppositions de certaines planètes ou par les passages de Vénus sur le Soleil. Les dernières tenta tives faites dans ce sens ont laissé après elles quelque déception et ne permettent pas encore aujourd’hui de fixer la distance de la Terre au Soleil avec la certitude que faisaient espérer il y a plus d’un siècle les travaux de Halley. M, Tisserand a publié dans le xvr volume des Annales de l'Observatoire un intéressant résumé de ces recherches, Il arrive à la conclusion que la voie in- directe, fournie par l’Astronomie stellaire, sera sans doute préférable, Toutes les étoiles nous présentent, en effet, dans la suite de leurs positions apparentes, l’image des difré- rents mouvements dont l'observateur est animé : rota- lion diurne de la Terre autour de son axe, circulation annuelle de la Terre autour du Soleil, déplacement d'ensemble du système solaire par rapport aux étoiles voisines, déplacement commun des étoiles formant avec le Soleil le Système de la Voie lactée. IL est possible de séparer ces divers effets et de s’at- tacher spécialement à celui du mouvement annuel de la Terre. On sait depuis Bradley qu'en vertu de ce mouvement, chaque étoile décrit dans l’espace d'une année une petite ellipse autour de sa position moyenne, La cons- tante de l'aberration, c’est-à-dire la valeur du demi- grand axe de cette ellipse, est liée simplement à celle du grand axe de l'orbite terrestre et à la vitesse de la lumière, L'explication théorique du phénomène n'est pas encore dégagée de toute difficulté. On ne saurait douter cependant que la relation qui vient d’être in- diquée ne soit exacte. On peut donc arriver à détermi- ner certains éléments du système solaire par l’ob- servation d’astres éloignés, qui semblent n'avoir avec lui aucune connexion, Les avantages de cette troisième méthode sont mani- festes. Il ne s’agit plus, comme dans la recherche des masses, de meltre en œuvre des matériaux immenses, de lulter contre la complication et l'insuffisance des développement analytiques. On n’est pas, comme dans l'évaluation des parallaxes, à la merci de phénomènes rapides, exceptionnels, observés le plus souvent dans des conditions de visibilité imparfaite, On est toujours en mesure de déterminersoitles positions apparentes des étoiles, soit la vitesse de la lumière, Ces opérations peuvent être répétées autant de fois qu'il est néces- cessaire, et permettent d'utiliser toute la précision des appareils micrométriques. Toutefois ce dernier avantage est plus apparent que réel, si l’on entreprend de fixer des positions absolues, c’est-à-dire de rapporter les étoiles à l’Equateur ou à l'horizon pris comme plans fondamentaux. Que l’on détermine la direction horizontale par la combinaison d'observations directes et réfléchies, la direction verti- cale par le nadir ou le niveau à bulle d'air, le lieu du pôle par les observations de circumpolaires, on aug- mente dans une forte proportion la longueur et la dif- ficulté des mesures. L'obligation d'évaluer des arcs étendus entraine celle d'étudier laflexion des lunettes, les erreurs de la division des cereles, l'orientation de leurs axes, L'exactitude des mesures faites exige que l’on tienne compte en toute rigueur de la réfraction. Ce n’est pas tout : les plans fondamentaux adoptés ne 238 NOTICE NÉCROLOGIQUE sont pas invariables dans l’espace. Vu l'ignorance où nous sommes de la constitulion intérieure du globe, lathéorie du déplacement des pôles célestes doit em- prunter ses principales données à l’expérience, el demeure toujours sujette à revision. Enfin linvariabi- lité de la verticale d'un lieu par rapport à l'axe du monde est devenue l'objet de doutes très sérieux à Ja suite des résultats discordants qui se sont présentés dans la mesure des latitudes, On voit quelle est la variété des problèmes que sou- lève la recherche de la constante de l’aberration. Aussi cette question a-t-elle exercé la sagacité des plus ha- biles astronomes, et servi, par sa difficulté même, de stimulant efficace pour le perfectionnement des mé- thodes et des appareils. Pour n’en citer qu’un exemple, c'est précisément une tentative de ce genre, faite à l'Observatoire de Berlin par M. Küstner, qui a donné une importance nouvelle à la question des latitudes géographiques. Cet élément, traité comme invariable dans toutes les recherches anciennes, serait sujet, dans l'opinion d’un grand nombre d’astronomes, à des fluc- tuations très appréciables, tant séculaires que pério- diques. Ni M. Küstner, ni M. Nyren, qui ont le plus contribué à mettre en lumière ces varialions appa- rentes, n'ont entrepris d’en fixer la loi. Il convient d'at- tendre le résultat du travail d'ensemble entrepris par les observatoires allemands ainsi que de l'expédition scientifique envoyée à cet effet dans l’océan Pacifique. Mais ce simple apercu donnera une idée de la com- plexité du problème et du nombre d’inconnues que l’on doit dégager ou mettre hors de cause si l’on veut déterminer la constante de l’aberration par des me- sures absolues. Quelles que soient les précautions prises, les chiffres trouvés n'auront qu'une valeur pro- visoire, subordonnée à l'exactitude des hypothèses faites sur la réfraction, sur les déplacements de laxe du monde et de la verticale, Sans nul doute, c’est à cette complication fatale, à ce cortège embarrassant d'inconnues auxiliaires qu'il faut s’en prendre, si les déterminations faites à diverses époques offrent des discordances très supérieures à l'incertitude que chacune d'elles, prise à part, semble comporter. En 1843, W, Struve proposait de s'arrêter au chiffre 20”,#45 etaccompagnait cette communication, faite à l’Académie de Saint-Pétersbourg, du commen- taire suivant : « Je suis persuadé que jamais, jusqu’à ce jour, aucun élément astronomique n'a été déterminé avec une précision égale. » D'autre part, les résultats de travaux récents, exécutés avec beaucoup de soin par MM. Nyren et Küstner, accusent un écart supérieur à 0,2, soit vingt fois l’erreur probable annoncée par W. Struve. De l’aveu des auteurs, il est indubitable que des causes d’erreur systématiques entachent encore les résultats, et qu'aucune des méthodes suivies jusqu'à ces dernières années n'est à l'abri du même reproche. Si l’on veut y échapper, il est indispensable d’aban- donner létude des positions absolues pour celle des positions relatives. Mais ce changement radical de mé” thode est-il possible, et de telles mesures sont-elles. propres à mettre en évidence l'effet de l’aberration, dégagée de toute autre inconnue ? On doit répondre affirmativement depuis que M. Lœwy a réduit à de simples pointés micrométriques, eflectrés dans le champ d’une lunette, l'étude des variations de distance de deux étoiles séparées par un arc étendu sur la sphère céleste, L'appareil qui sert à effectuer ces me sures est un double miroir-plan, taillé sur un bloc de verre unique en forme de prisme. Les propriétés de ce système optique ont fait l’objet de plusieurs com- munications à l’Académie des Sciences !. La haute va- leur du nouveau moyen d'étude a été unanimement reconnue par le monde savant, Depuis, M. Læwy et M. Puiseux ont exécuté une série d’études qui ont fait disparaître toutes les difficultés relatives à la théorie et à l’usage du double miroir, Une détermination complète de la constante de l’aberration a été entreprise dans le courant de 1890 et menée à terme dans un intervalle de dix mois. Les premières conclusions de ce travail viennent d’être présentées par MM. Lœwy et Puiseux à l'Académie, en attendant l'achèvement des calculs ?, Dans l'esprit des auteurs, cetle première campagne n'avait que le caractère d’une reconnaissance préalable, destinée à éclairer la route à suivre. Toutefois, l'examen des résultats permet de considérer la nouvelle re- cherche comme pouvant soutenir la comparaison avec tout ce qu'ont donné les anciennes méthodes. Dès au- jourd’hui, les auteurs croient pouvoir énoncer les con clusions suivantes : 1° Le chiffre donné par W. Struve en 1843 est très voisin de la vérité, et il serait encore prématuré de vouloir le modifier ; 2 Les rayons réfléchis se comportent, au point de- vue de l’aberration, comme les rayons directs. Cette constatation expérimentale confirme les vues théoriques émises en 1887 par M. Fizeau ; 3° La nouvelle méthode pour la recherche de l’aber- ration peut être considérée comme fixée dans tous ses traits essentiels, Une nouvelle application, faite en profitant de l’ex- périence acquise, permeltra sans doute de répondre du centième de seconde sur la constante. Ce sera un pro- grès des plus sensibles dans la connaissance que nous possédons du Système du Monde. Louis OLIVIER. NOTICE NÉCROLOGIQUE AUGUSTE CAHOURS Dans le développement scientifique qui sera l’une des gloires principales du x1x° siècle, nulle science ne sera plus remarquée que cette portion de la chimie qui con- cerne les composés organiques. À l’obscurité, à la mi- sère qui la caractérisaient au commencementdu siècle, ont succédé des richesses presqu'infinies, un ordre in- comparable qui prévoit presque tout. Les méthodes les plus ingénieuses, les plus délicates en même temps que les plus simples et les plus pratiques ont remplacé les grossières et difficiles opérations d'autrefois. De si grands progrès ont demandé les efforts de plusieurs générations d'hommes illustres et l’on peut s'étonner à bon droit qu’il n’en ait pas fallu davantage pour une pareille tâche. De ces hommes il en est peu auxquels on puisse rendre l'hommage d’avoir autant contribué à ce résultat que Auguste Cahours. Dans les vastes trai- tés d'aujourd'hui on retrouve partout son nom au com- mencement des chapitres, comme inventeur de nou- velles méthodes et créateur d'innombrables composés. Né le 2 octobre 1813 à Paris, entré en sortant du lycée Henri IV à l'Ecole Polytechnique en 18:3,1l la quittait officier d'état majoren octobre 1835. Mais la carrière militaire ne put plaire à cet esprit déjà sincèrement et profondément épris de science. 1 Loewy et Puiseux, Comptes rendus Acad. des Sciences, 14 et 21 avril et 2 juin 1890. ? Comptes-rendus Acad, des Sciences, 16 mars 1891. NOTICE NÉCROLOGIQUE 239 Au bout d’un an, malgré une situation assez précaire, il abandonnait cette carrière toute faite et embrassait, pour ne le plus quitter, l’état plus aventureux de savant. Il débuta comme préparateur de Chevreul au Muséum en 1836 et c’est une marque de la vivacité de son goût pour la chimie que les interminables et ennuyeuses opérations, auxquels son maitre lemploya avec rigueur pendant# ans,ne purent le diminuer, Mais son inclina- tion ne le laissait pas se plaire à ce genre d’occupa- tions et le fit sortir bientôt de cette ornière, Un flacon d'huile de pomme de terre abandonné sur une étagère poussiéreuse fut l’occasion pour lui d’un brillant tra- vail de début (1839) et quelque temps après de son pas- sage dans le laboratoire où Dumas présidait à de si brillantes découvertes. Dans ce travail Cahours montrait que la portion principale de lhuilede pomme de terre était constituée par un nouveau corps bien défini, de propriétés sem- blables à celles de trois alcools déjà connus (l'ethal, les alcools éthylique et méthylique) et lui donnait le nom d'alcool amylique. La notion de série ressor- fait avec évidence de l'existence de ce quatrième terme alcoolique et l'importance de ce travail fut tout de suite appréciée à sa valeur. A partir de ce moment et jusqu’à son départ de PEcole Polytechnique en 1882, il necessa de publier des études, la plupart devenues clas- siques et le point de départ de recherches aussi nom- breuses que l'alcool amylique, sa première découverte, devait en susciter. Il serait impossible de tout citer ici, je dois me con- tenter d’effleurer les points principaux. Ses travaux sur les essences, débuts de tant d’admira- bles mémoires sur les combinaisons aromatiques, datent de 1841, avec Gerhardt, sur l'essence de cumin. Il étu- dia seul les essences d’'anis, de badiane, de fenouil, l'huile de gaultheria, plus tard celle de girofle. Ces recherches poursuivies de longues années furent inter- rompues plusieurs fois et l'amenèrent à la découverte d’un nombre considérable de dérivés, du mode d’éthé- rification des phénols, de certains cas d’isomérie qui ont contribué pour une large part à l’éclaircissement de ces fonctions mixtes et n’ont été clairement expli- quées qu’à la longue. Ces essences d’anis, de fenouil, de badiane sont en effet, pour la plus forte portion, constituées par un produit, l'aldéhyde anisique, qui se rattache étroitement aux composés les plus importants de la série aroma- tique. C'est en effet l’aldéhyde méthylparaoxybenzoïque ; par oxydation il fournit l'acide anisique (C5H*. OCH3,. CO?H) isomère des salicylates de méthyle C6H*OH CO2CH:), de l'acide méthylsalicylique (CFHOCH#COH), de l'acide oxytoluique (CH, CH, OH. CO?H), etc; l'étude de ce corps, de ses dérivés menait à la conception de fonctions avec plus de clarté et de facilité qu'en aucun autre cas peut-être, Les dérivés nitrés, leur transforma- tion en acides amidés indiquaient, avec plus de netteté encore, l'existence de ces composés à fonctions mixtes. Aussi ne peut-on exagérer la lumière que ces recher- ches ont jetée sur nombre de points alors incertains. Ces isoméries si nettes de produits de même formule, de même fonction, se dédoublant en donnant les mêmes composés, posaient de nombreuses questions que la théorie de Kekulé devait résoudre avec tant d'éclat, L'étude de l'essence de gaultheria que Cahours mon- tra formée de salicylate de méthyle et qu'il reproduisit de toutes pièces se rattachait ainsi étroitement aux mêmes questions. C’est aussi de ses premières années de laboratoire qu'il faut dater (18 le travail mémorable, tant de fois et si justement cité, sur les anomalies des densités de vapeur de quelques acides gras au voisinage de leur point d’ébullition. Il y montrait que cette densité normale à haute température et répondant comme nous dirions à deux volumes de vapeur, augmentait à basse température plus qu'on n'avait pu jusqu'alors le prévoir. Plus tard il revint sur ce sujet en 1847, en 1863 au sujet d’une autre classe de faits (densité du perchlo- rure de phosphore, des chlorhydrates d'hydrocarbures, des sels ammoniacaux), qui ont exercé le plus latten- tion et l’ingéniosité des chimistes et n’ont trouvé qu’a- vec peine leur signification véritable. On sait, en effet, quelle énorme importance a, pour la chimie d’abord mais encore et autant pour la science en général, la question des densités de vapeur. Cahours était le premier à montrer qu'il existait des anomalies régu- lières de ces densités. Il indiquait que décroissantes d'abord, ces densités, dans le cas des corps stables, ne tardaieut pas à devenir constantes. Il en concluait avec raison que, lorsqu'on les trouvait variables, il fallait en inférer un changement de la moïécule, Ces consé- quences restent aujourd'hui telles que Cahours les avait alors tirées. On ne peut faire un plus bel éloge de ce travail après que tant de savants souvent illustres ont examiné la question, De 1848 et 1849 sont ses recherches sur l'action du perchlorure de phosphore sur les composés organiques qui introduisirent en chimie un réactif fréquemment usité et donnaient la préparation classique d’une classe importante de composés, les chlorures des radicaux d'acides, dérivés chlorés correspondant aux aldé- hydes aromatiques, etc. On sait en effet combien le per- chlorure de phosphore a été employé pour déceler dans les molécules organiques les orhydryles (— OH) ; l’im- portance des dérivés chlorés qu'il obtenait si aisément dans ce travail ne saurait non plus s’exagérer, tant leur emploi s’est depuis généralisé grâce à leur facile obtention, De 1847 est le début de ses belles études sur les dé- rivés bromés et pyrogénés que l’on peut retirer de l’acide citrique. À l'heure qu'il est, dans ce fourmillement de composés organiques qui pullulent sous les mains des chimistes, il est facile d’être injuste pour les fonda- teurs de cette science. Il faut relire leurs mémoires, se remettre dans ce milieu obscur, pauvre et pourtant encombré, pour juger sainement du progrès qu'ils réalisaient. Les mémoires de Cahours sur les stannéthyles, esquis- sés avec M. Riche, repris et développés plus tard seul, mirent la lumière dans une question embrouillée et fu- rent d'une grande importance pour les questions alors si débattues de la valence, des équivalents et des poids atomiques. C’est ce même ordre d'idées qui le guida dans ses autres travaux sur les combinaisons organo- métalliques, arsines, stibines, plombéthyle, etc, sur les sulfines, auxquels l'avaient amené peut-être des études antérieures (1847) sur les polysulfures alcooli- ques. On sait en effet qu'à celte époque beaucoup de chimistes, occupés un peu exclusivement peut-être de la chimie du carbone, pensaient que chaque corps simple devait avoir une valence ou capacité de satu- ration (faculté d'attirer un certain nombre d’atomes) unique, ou tout au moins de parité constante, Les recherches sur les composés organométalliques sem- blaient indiquer qu'au moins pour beaucoup d’autres corps métalliques fort différents il en était encore ainsi, Elles montraient en outre que les combinaisons de ces métaux devaient (à moins de forcer les analogies les plus évidentes) être rapportées à 4 vo- lumes de vapeur (aujourd’hui nous dirions 2) comme les composés organiques bien définis, Il n’en fallait pas tant pour expliquer l'intérêt qu’elles présentaient, sans parler du fait encore rare à ce moment de voir des corps comme l’étain, le soufre, l’arsenic, l’antimoine former dans certains cas des alcalis caustiques, compa- rables à la potasse ou à la soude. Vinrent ensuite les découvertes de la pipéridine, du xylène, d'importants mémoires sur les acides amidés, où se trouve la première synthèse d’un acide amidé gras, celle du glycocolle, sur le furfurol, sur les acides sulfonés, les aldéhydes sulfurés, etc. Entre temps se placent des collaborations fructueuses, comme le mé- moire sur les matières azotées neutres de l’organisme où avec Dumas il abordait l'étude des albuminoïdes si 2 240 NOTICE NÉCROLOGIQUE complexe et aujourd’hui encore si ténébreuse, malgré les belles recherches de M. Schutzemberger et de tant d’autres. Les deux collaborateurs y montraïent l’analogie des produils végétaux et animaux, mettant une: sorte d'unité dans la vie intime de tous les êtres vivants. Plus tard, rapprochés par une passion commune, Cahours avait lié avec M. Hoffman, l’illustre savant allemand, une étroite amitié et, attiré par lui, alla passer à plu- sieurs reprises quelques mois en Angleterre, Cette amitié qui dura jusqu'à sa mort donna lieu à la dé- couverte de l'alcool allylique, à de belles études sur les phosphines qui mirent alors en lumière tout lintérèt de l’inléressante découverte de Paul Thénard. C'est aussi en collaboration avec Pelouze qu'il publia son examen des pétroles d'Amérique ; des mé- moires sur les phosphines, sur certaines combinaisons de l’éther cyanique furent faits avec M. Gal; de belles recherches sur la nicotine avec M. Etard; les combi- naisons butyliques de l’étain, certains pétroles et acides gras dont ils dérivent, furent examinés avec M. Demarcay. On n'aurait cependant qu’une idée imparfaite de l’activité de Cahours si l’on se bornait à considérer ses mémoires originaux. Le professorat qu'il aimait tint une large part dans sa vie. Nommé répétiteur à l'Ecole centrale en 1838, à peu près à la même époque, profes- seur suppléant à l'Ecole d'application des tabacs, c’est là qu'il débuta dans la carrière professorale; il aimait souvent à parler de ces lointains débuts qui lui avaient laissé de gais souvenirs. En 1845, il devint professeur à l'Ecole centrale en remplacement de Dumas et garda cette position jusqu'en 1872. I1 y laissa le meilleur souvenir tant auprès des élèves qu'auprès de ses collègues et des directeurs de l'Ecole. Il professait en effet avec passion, et cette ardeur, jointe à de vives convictions, au feu de son débit et à son extrême clarté, (qualité qui, chez lui, passait avant toutes les autres), assura partout à son cours un succès éclatant. IL éveilla ainsi chez bien des élèves le goût d’une science dont l'attrait avant lui leur était demeuré tout à fait étranger. A l'Ecole Polytechnique, il retourna en qualité de répéliteur en 1841 ; il y devint examina- teur de sortie en 1852 et professeur enfin en remplace- ment de Regnault en 1871. Dans tous ces postes, sa science, son talent de professeur et enfin sa justice et son indulgence le firent regretter universellement lorsqu'il les quitta définitivement en 1881. Il a laissé son enseignement dans ces deux écoles dans ses deux traités de chimie.Ces volumes, où se reflètent les idées de l’époque où ils ont paru, se font remarquer par la qualité maîtresse de l’enseignement de Cahours, je veux dire la clarté: cette qualité, si nécessaire dans les plus hauts enseignements de la science, ne peut guère y régner dans l'obscurité où nous enferme notre igno- rance; elle s’achète, dans des cours moins élevés, au prix d’une certaine allure schématique imprimée à l’enseignement tout entier, Il faut savoir reconnaître que tout l’enseignement est à ce prix et ce n’est que bien plus tard que l’on peut aborder, avec la critique, toutes les lacunes, toutes les obscurités, toutes les con- tradictions qu'elle doit signaler dans nos sciences humaines, Mais jamais Cahours ne fut à proprement parler un polémiste; alors même que ses travaux, ses idées penchaient vers une hypothèse, il n’abandonnaïil pas pour cela complètement l'hypothèse contradictoire. Il pensait que toute supposition trouvée bonne ren- ferme quelque part de vérité, qu'il est dans la nature d’étranges concilialions qui étonnent les savants, et que, dans une certaine mesure, il est de leur devoir de garder au prix de contradictions apparentes le souvenir des aspects sous lesquels leur est apparue d’abord l'ombre de la vérité, Au fond il préféra toujours un travail bien fait à la plus belle théorie; sans vouloir écarter les hypothèses, il les considéra toujours comme l'accessoire et le côté variable de la science, On ne sau- rait dire qu'il ait eu tort. Les brillants travaux de Cahours avaient depui longtemps attiré sur lui les honneurs les mieux mé- rités. Membre des Académies de Pétersbourg, de Berlin, membre d'honneur de nombreuses sociétés savantes, -Commandeur de la Légion d'honneur, il vit s’ouvrir pour lui les portes de l’Académie des Sciences en 1868, le 11 mai. C'était là son désir le plus cher, le couronne- ment d’une lointaine ambition. Mais, malgré cette joie, à peu près à la même époque, sa vie fut attristée par les plus cruels malheurs. Il s'était marié et avait eu deux fils.Il eut la douleur, de 1867 à 1871,de perdre coup sur coup son frère, puis sa femme et enfin ses deux fils, arrivés à l’âge de 23 ans. Il ne put se relever de pa- reils chagrins et bien que, plus tard, il se fût re- marié pour mettre dans sa solitude les affections et l'animation d’une nouvelle famille, on ne devait jamais revoir l’homme d'avant ces années néfastes. Depuis longtemps d’ailleurs, une cruelle et presque conti- nuelle maladie était venue continuer par ses attaques persistantes le travail qu'avait commencé le chagrin, et quand la mort vint le prendre, il l’attendait sans peur depuis des années, peut-être même la trouvait-il bien lente, Je parlais plus haut de l’indulgence que Cahours savait allier à la plus stricte justice dans ses fonc- tions d’examinateur à l'Ecole Polytechnique. C’est, en effet, le côté le plus saillant de sa personnalité mo- rale que son extrème bonté et ses vives affections. Incapable de tenir rancune (par bienveillance plus encore que par religion) à un solliciteur, je l'ai vu s’employer pour des gens qui venaient de le desservir. Il poussait le dévouement à ses dernières limites pour ses amis et ses élèves. Toujours prèt à les aider de ses conseils, de son appui auprès de ses nombreux amis, de sa bourse même, et plus ardent s’il fallait lutter pour eux que s’il s'agissait de lui-même. A cette bonté, et sans doute c’en était une conséquence, s’alliait une grande tolérance, tant au point de vue scientifique qu'au point de vue religieux. Cahours était, en effet, très sincèrement et profondément catholique, et ces idées furent un appui réel et bien précieux pour lui dans les cruels malheurs qui assombrirent si profon- dément son existence, Mais, quelque vif et convaineu que fût son sentiment religieux, ii n’en fut jamais dé- tourné de ceux qui pensaient autrement que Jui. Cette tolérance s’étendait aux questions scientifiques qui le passionnèrent pourtant toujours; prêt à discuter et à admettre à la discussion quiconque lui paraissait de bonne foi et de capacité à y prendre part, il n'usa ja- mais des prérogatives de l’âge et de la position pour imposer une opinion, La largeur de sa bonté sut tou- jours pardonner une divergence de vues, même lors- qu'elle n’était pas à son avantage et attaquait les opi- nions qu'il avait le plus défendues, Toujours modeste pour ses travaux, prèt à encourager ses élèves, à exalter leurs mérites, tel m'a paru cet excellent Maitre, ce grand savant dont le nom vivra et sera respecté pour. ses découvertes et sa largeur de cœur, Eugène DEMARÇAY. Notre distingué collaborateur, M. J. Thoulet, profes- seur de Minéralogie à la Faculté des Sciences de Nancy, fera, pendant le second semestre scolaire, un cours libre d'Océanographie à la Faculté des Lettres de Paris. L'enseignement de l'Océanographie, depuis longtemps officiel en Allemagne, va faire ainsi sa première apparition dans l'Université de France. Jusqu'alors il n'avait été l’objet, dans notre pays, que de conférences, données par M. J. Thoulet, en dehors de l'Université, et sous les auspices de lAmiral Mouchez, directeur de l'Observatoire, aux officiers de marine détachés à l'Observatoire de Montsouris. Le Directeur- Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 2" 1 2° ANNÉE Noms 30 AVRIL 1891 EE ——— REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCE PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER SUR DEUX APPAREILS NOUVEAUX DE MÉCANIQUE La transformalion des mouvements est le pro- blème essentiel de la cinématique. Les systèmes articulés sont les organes les plus simples qui con- courent à la solution de ce problème. Ce sont ceux que l’industrie préfère en raison de leur précision, de leur solidité, de la facilité de la construction. qui en réduit considérablement le prix de revient. Dans cerlains cas même une solution approchée. obtenue avec des systèmes articulés, est préférée à une solution rigoureuse qui exigerait des méca- nismes plus délicats où plus compliqués. De là l'intérêt qui s’est originairement attaché à la réali- salion de mouvements donnés au moyen de sys- tèmes articulés. Plus tard, suivant en cela l'évolution commune à toutes les branches des mathématiques, ce but ulilitaire a été perdu de vue, el les systèmes arti- culés ont fait l’objet de recherches théoriques de l'ordre le plus élevé. Cette dernière phase de l’évo- lution est relativement récente; elle a eu pour origine les recherches sur le mouvement recli- ligne d'un point. C’est, en effet, un caractère bien particulier de cette doctrine que la réalisation du mouvement le plus simple est celle qui a coûté le le plus d'efforts. Depuis Watt on en cherchait la solution ; certains avaient cru en démontrer l’im- possibilité, lorsque Peaucellier, en 1867, puis Hart et Kempe donnèrent plusieurs solutions de ce problème si éludié. Le plus simple de ces appareils est celui de Hart; mais il est moins commode que celui de Peaucel- lier. L'appareil de Hart n’exige que cinq tiges articulées mobiles, et celui de Peaucellier sept. REVUE GÉNÉRALE, 1891, On s’est proposé bien d’autres problèmes au sujet des systèmes articulés : le pantographe en est un exemple des plus curieux et des plus répandus. Mais loutes les questions que l’on a traitées Jus- qu'ici ont pour objet des mouvements dans le plan; aucune n'a pour but un mouvement dans l’espace. En transportant à l’espace les systèmes articulés, le problème acquiert plus de variété; on peut, en effet, se proposer de décrire au moyen de tiges arliculées non seulement des courbes, mais encore des surfaces déterminées. À cet égard le premier problème à résoudre, qui correspond tout à fait à ceiui résolu par Paucellier, c'est le suivant : guider au moyen de tiges articulées le mouvement d'un point dans l'espace, de sorte qu'il décrive un plan. La solution de ce problème est contenue dans la remarque suivante due à M. Darboux : 455 trois points E, G, H d'une même tige T (fig. 1) décrivent respective- ment des sphères dont les centres À, C, D soient sur une même droite T', tout autre point M de la tige T décrit une sphère dont le centre M'est un point de la droite T'; en particulier il y à un point P sur la tige T dont le centre de la sphère correspondante est à l'infini sur la droite T”, en sorte que ce point P décrit un plan normal à la droite T”, Voici comment nous avons réalisé cet appareil. La droite T' est figurée par une tige de laiton (fig. 1 et fig. 2) : des tiges AE, CG, DH sont reliées à cette tige T' au moyen de joints à la Cardan, de sorte que les axes de ces troisliges peuvent tourner libre- ment autour des points A, C, D. Les extrémités E, G. H des tiges sont reliées par un procédé identique aux points E, G, H de l’axe d’une tige de laiton 8 242 mobile qui figure la droite T. L’extrémité de celle tige, terminée par un style. décrit librement ! un Fig. 1. — ACD figurent la tige fixe T’; EGH la tige mobile T: AE, CG, DH les tiges qui relient les deux tiges T et T. UK est le cercle limite extérieur de Ja 6 l'extrémité du style. plan représenté par une planchette sur laquelle la tige A CD (ou T') est calée perpendiculairement. On a donné à cet appareil le nom de planigraphe. On observera que cet appareil ne ren- ferme que quatre li- ges articulées mo- biles, fait bien re- marquable si l'on songe que le plus simple des appa- | G. KŒNIGS. — SUR DEUX APPAREILS NOUVEAUX DE MÉCANIQUE zone décrite par tiges articulées, et en y joignant S, on voit qui faudra rrezEe tiges articulées pour décrire p points un ellipsoïde !. Le second appareil dont je voudrais parler e d'un toul autre genre que le précédent. Il est sa doute, comme lui, fondé sur des propriétés cin! matiques, mais il n’a pas simplement pour ob); la réalisation des éléments géométriques d'u mouvement : il a pour but de représenter complè tement, ex y comprenant ie lemps, le mouvement d'un corps solide. Apparemment, pour représenter complètement le mouvement d’un corps solide, le mieux serail: de placer le corps dans les conditions naturelles; et de l'’abandonner ensuite aux forces qui doivent produire son mouvement. C'est aussi ce que lon fait dans certaines expériences bien connues sur la rotation des corps; exemple. la toupie, le gyro- scope. Mais dans ces représentations naturelles on est forcément limité par une foule de circonstances qui altèrent la sincérité des expériences, et dans tous les cas les rendent très éphémères. Il est im= possible, dans ces expériences, d’'ob- tenir avec une exac- litude et une durée suffisantes la réali- salion des circons- lances lhéoriques; certaines sont mé- me entièrement ir- réalisables. Puisque done on ue peut produire reils à ligne droite, celui de Hart, con- tient cinq tiges mo biles. Faisons encore re- aisément par des procédés dynami- ques cerlains mou- vement que le cal- marquer que cet ap - cul nous permet de concevoir, mais que pareil conduit à une description de l’el- lipsoïde au moyen de tiges articulées. Si, en effet, trois points P, P,,P, d'une tige S décrivent respectivement trois plans rectangulaires, on sait depuis longtemps que loul point M de la tige S décrit un ellipsoïde dont ces plans sont les plans principaux. On assujettira le point P à rester dans un plan au moyen de quatre tiges mobiles en articulant à la Cardan au point P la tige S avec l'extrémité de la tige d’un planigra- phe ; de même pour les points P, et P,. On guidera done le mouvement de la tige S au moyen de douze 1 En réalité, par suite des limites dans lesquelles est con- tenu l’appareil et son mouvement, l'extrémité de la tige décrit une zone comprise entre deux cercles concentriques. la Nature est trop rebelle à réaliser, on est conduit à les engendrer avec une précision mathématique au moyen d'appareils cinémaliques, qui transforment dans le mouvement voulu un mouvement plus facile à produire, par exemple un mouvement de rotation uniforme. Et quand nous 1 En se servant des appareils de Hart, il en faudrait onze pour une ellipse. Mais si l’on remarque que le milieu I du segment AB dont les extrémités décrivent les axes de lellipse, décrit un cercle concentrique à l’ellipse, on peut guider le mouve- ment de AB de la facon suivante : un appareil de Hart pour guider le point A, et une manivelle pour guider le mouvement de I; en tout sept tiges. Cet appareil permettrait de trans- former un mouvement rectiligne en un mouvement rectiligne rectangulaire au premier. G. KŒNIGS. — SUR DEUX APPAREILS NOUVEAUX DE MÉCANIQUE 243 disons mouvement, nous n’entendons pas seule- ment les éléments géométriques, les trajectoires, mais encore la loi même du mouvement, celle qui relie les éléments géométriques au temps. Par exemple, on pourrait chercher à construire un appareil cinématique qui, mû par un rouage d’horlogerie d’allure uniforme, forcerait un point à décrire une ellipse suivant les lois de Képler. On aurait ainsi une réalisation cinématique du mou- vement des planètes. Peut-être les problèmes de ce genre offriraient- ils quelque intérêt, car leur solution fournirait en quelque sorte un diagramme vivant de l'allure normale des machines. Poinsot, on le sait, est le premier qui se soit posé des questions de cet ordre, à propos du mou- vement d’un corps solide tournant librement autour d’un point fixe O (fig. 3). Considérant l'ellipsoïde central E relatif à ce point, Poinsot remarqua que dans tout le cours du mouvement, l’ellipsoïde E roule sur un plan fixe P, et que si M désigne le point de contact du plan et de l'ellipsoïde à un instant donné, d’abord OM est l’axe instantané de rotation, et ensuite la vitesse angulaire instantanée autour de OM est précisément proportionnelle à la longueur de OM. Le lieu de M sur l’ellipsoïde est une courbe gauche fermée, appelée par Poinsot polhodie ; le lieu de M dans le plan est une courbe compliquée, dont les spires tournent autour du point O', projection du point O sur le plan P, et qui ne se ferment généralement pas. Cette courbe a été appelée par Poinsot herpolhodie. Le roulement d’un ellipsoïde sur un plan est aisé à réaliser ; ce qui l’est moins, c’est de s'ar- ranger de telle sorte qu'à chaque instant la vitesse angulaire autour de OM soit proportionnelle à OM. Voici comment cette condition a pu être réalisée: Menons par ie point O un plan Q parallèle au plan fixe P, et projetons le point de contact M en N sur ce plan Q. Menons ON. Dans le cours du mouvement, ON change soit dans le corps, soit dans l’espace. Dans le corps il décrit un cône C du second ordre {non de révolution), et, dans l’espace il décrit le plan Q. Or la rotation instantanée au- tour de OM peut se décomposer en une rotation autour de O0’(perpendiculaire aux plans parallèles P et Q) et en une rotation autour de ON. Ces rota- tions sont proportionnelles respectivement à 00 et à ON. La première est donc constante ; dési- gnons-la par &. La rotation instantanée se compose ainsi d'une rotation constante & autour de O0', et d’une ro- talion autour de ON, proportionnelle à ON. Sup- posons alors que le plan Q soit animé d'une rota- tion uniforme & autour de O0", et que le cône C roule sur ce plan avec une vitesse angulaire pro- portionnelle à ON; le mouvement ainsi défini sera le même que celui dont le corps est supposé animé, en sorle que pendant le mouvement, pendant le roulement de l’ellipsoïde central sur le plan P, le cône C, entrainé par le corps, roulera sur le plan Q, tandis que celui-ci sera animé d'un mouvement uniforme de rotation sur lui-même. Si parle moyen d’un engrenage le cône C etle plan Q sontassujettis à rouler l’un sur l’autre, le plan Q tournera uni- formément sur lui-même, et fournira une représen- tation du temps à la facon d’une véritable horloge. Mais alors disposons ainsi les choses: d’abord construisons un ellipsoïde E (ou une polhodie), que nous assujettirons à rouler sur un plan P (fig. #), tandis que le centre O de l’ellipsoïde restera fixe ; ensuite figurons le cône C comme le primitif d’un engrenage sphéro-conique qui viendra engrener avec une roue plane dont le profil sera un cercle D du plan Q, ayant O pour centre; supposons le cône Cinvariablement lié à l’ellipsoide (ou à la polhodie de contact, qu'il est seul utile de repré- senter) ; enfin, par un mouvement d'horlogerie im- primons au cercle D'un mouvement uniforme de rotation. Que va-t-il arriver? Le cercle D, en lour- nant, engrénera avec le profil du cône C, celui-ci entrainera la polhodie qui roulera sur le plan P, et possédera à chaque instant la vitesse angulaire proportionnelle à OM, comme le veut la loi de Poinsot. C'est cet appareil qui a été construit. La remar- que relative à la rotation uniforme du plan Q est due à Poinsot, qui proposa de représenter le mouvement en faisant rouler le cône C sur le plan Q animé d'une rotation uniforme. M. Sylvester a ensuite montré que les deux représentations de Poinsot sont des cas particuliers d’une infinité d’autres, dans lesquelles un ellipsoïde homothé- tique à un ellipsoïde homofocal à l’ellipsoide central roule sur un plan parallèle au plan P et animé d’une rotation uniforme. Mais à M. Dar- boux revient le mérite d’avoir remarqué qu'il suffit d'employer simultanément les deux représentalions de Poinsot pour obtenir une réalisation cinémali- que complète de toutes les circonstances mécaniques du mouvement d'un corps solide. Je n’insisterai pas sur les détails de construction, \ 24% Je qui ont exigé beaucoup de lact et de savoir de la part du constructeur, M. Château. La réalisation de l'ellipsoïde eût été pénible, coûteuse et peu précise; nous avons préféré figurer la polhodie. Cette courbe est le lieu des extrémités d'une série de pointes d’acier dont les axessont les génératrices du cylindre elliptique qui conkient la 1 AP) NN SN ST NRA EDNN SS Q { NET \ 2 Z G. KŒNIGS. — SUR DEUX APPAREILS NOUVEAUX DE MÉCANIQUE a été ajouté pour diminuer le travail produit par le poids de l'appareil (fig. 5). Sans cela Lout eût été illu- soire dans le jeu de l'instrument, dont tout l'intérêt" repose sur une rotation parfaitement uniforme du cercle D. Un volant muni d’ailettes régularise ce mouvement. On obtiendrait sans doute plus de régularité en Fig. #. — À, engrenage formé du cercle D et de la roue gauche trace du cône C sur une sphère concentrique; E, équipage mobile constitué par l’ensemble de la roue gauche et de la polhodie rouiante; P, plan sur lequel roule la polhodie;+, con- trepoids destiné à relever le centre de gravité de L'équipage et à le maintenir dans un plan horizontal sensiblement fixe. Dans le haut de la figure on voit un volant muni de deux grandes ailettes régulatrices (Voir fig. 5). polhodie. Les pointes viennent mordre sur une pla- | que métallique qui figure le plan P. L’engrenage qui produit le roulement du cône consiste en uue roue horizontale dont le primitif est dans le plan .Q; le cône C n’est pas figuré, il suffisait de représenter et de construire la courbe sphérique de ce cône qui roule sur le cercle D : cette courbe sphérique est une conique sphérique ; elle constitue le primitif d’une roue gaurhe qui vient engrener avec D. Enfin l'équipage formé de la roue gauche et de la polhodie est suspendu à la Cardan, par l’extré- mité de son axe, au point fixe O. Un contre-poids introduisant un pendule à échappement dans le | mouvement d’horlogerie qui anime le cercle D. L'appareil, tel qu'il a été construit, peut fonc- tionner plus de 20 minutes. En réduisant de moi- tié ce laps de temps, on obliendrait encore plus de précision et de régularité. Je terminerai par une remarque relative aux limites entre lesquelles peut varier la vitesse angu- laire. La loi de la vitesse élant le but essentiel de l'appareil, je devais souhaiter que les variations en. fussent assez sensibles pour être perçues à l'œil. Malheureusement il se trouve qu'on est très limité à cel égard. Si l’on fait rouler sur un plan un PE E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES 245 ellipsoïde quelconque dont le centre demeure fixe, suivant la loi de Poinsot, c’est-à-dire avec une vitesse angulaire proportionnelle au diamètre du point de contact, le rapport de la plus petite valeur de la vitesse angulaire à la plus grande peut pren- dre toutes les va- leurs voulues entre : 5 0 et 1. Il suffit de | choisir convenable- ment l’ellipsoïde et | l le plan sur iequel il I RTE DT AIT chent autant qu'on le veut de ces deux limites. On peut prendre Z pour valeur approchée de —? 16 | Io et dire que la vitesse angulaire dans le mouvement d'un corps solide ne varie pas de plus des # de sa valeur maximum, z1 soitidecette valeur. La variation, on le voit,estassezfaible, et demande forcé- ment, pourêtre per- roule. On peut ain- si obtenir des va- riations de vitesse angulaire allant du simple au double ou au quintuple et très facilement percep- tibles. çue, une attention un peu soutenue. On pourrait ren- dre la variation plus sensible en faisant rouler un ellipsoïde quelconque;mais on n'aurait plus alors à Mais, dans le cas du mouvement d’un proprement parler la représentation corps solide, l'ellip- du mouvement d'un soïde roulant est un qu LIT corps solide. ellipsoïde d'inertie et si &, b, e sont les longueurs de demi-axes rangées dans l’ordre décroissant, on sait que l’on a : ses Cette inégalité limite le choix que l’on peut faire de l’ellipsoïde roulant, et il arrive que Le rapport de la plus petite valeur de la vitesseanguluire à la plus grandeest [l alors nécessairement compris entre À et = (1). On peut, V2 du reste, réaliser des condilions qui s’appro- Fig. L'inégalité Se AE 1 Bat a donc pour effet, d'une part, comme on sait, de supprimer les inflexions dans l'herpolhodie, el d'autre part d'assurer une certaine stabilité à la valeur de la vitesse angulaire. L'instrument que je viens de décrire et qui a reçu le nom d’herpolhodographe, a figuré à l'Expo- sition universelle de 1889. Un modèle appartient à la Faculté des Sciences de Paris; d’autres ont été construits pour l’Ecole Polytechnique, le Conser- vatoire des arts el métiers et plusieurs Universités étrangères. G. Kœnigs, Maitre de Conférences à l'Ecole Normale et à la Sorbonne, THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES ET DE LEUR FIXATION SUR LES FIBRES TEXTILES Parmi les corps simples ou composés, certains jouissent de la propriété de réfléchir également tous les rayons lumineux : ce sont les corps blancs s'ils sont opaques, où incolores s'ils sont transparents. D'autres absorbent indistinctement tous les rayons lumineux : ils sont noirs. D’autres enfin absorbent 1 J'ai démontré ce fait dans le Bullelin de la Sociélé mathé- malique de France, tome XVIIT, p. 163 et p. 181, une parlie des rayons lumineux dont se compose la lumière blanche et en réfléchissent une autre : ils sont colorés. La couleur de ces corps se compose de la résullante des rayons lumineux réfléchis. Parmi les corps simples, nous en avons qui sont incolores, tels que les gaz oxygène, hydrogène, azote; d'autres sont colorés, tels que le chlore, le soufre, le cuivre et quelques métaux. Certains d'entre eux sont incolores ou blancs dans un cer- 246 | E. NOELTING. — THÉDRIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES lain état physique, colorés ou noirs dans d’autres. Ainsi le carbone est incolore el transparent comme diamant, noir à l'état de graphite ou de\charbon ; l'argent est blanc quand il est fondu ou poli; il est noir à l'état finement précipité; il en est Je même pour beaucoup d'autres métaux. Le phosphore existe sous une modification blanc-jaunätre. une rouge et une grisätre (cristallisée). Quant aux combinaisons, celles de certains éléments sont toutes. ou à peu près toutes, colorées; telles sont celles du chrome, du nickel, du cobalt et de quelques autres métaux. D'autres éléments fournissent sur- tout des combinaisons blanches ou incolores, à moins qu'ils ne soient unis à un élément qui leur apporte la propriété colorante; tels sont les mé- taux alcalins, alcalino-terreux et quelques autres. Parmi les corps organiques qui conliennent les éléments carbone, hydrogène, oxygène, azote et parfois certains autres, la plupart sont incolores. Les carbures d'hydrogène, les corps organiques les plus simples, sont tous incolores; ceux que l'on considérait comme colorés étaient générale- ment souillés de petites quantités d’impuretés. Parmi les corps contenant de l'oxygène à côté du carbone et de l'hydrogène, certains sont colorés; enfin les colorants les plus nombreux contien- nent en plus de l'azote !. La couleur des corps, surtout des corps orga- niques, est évidemment en relation très étroite avec l’arrangement des atomes dans la molécule ; car nous connaissons un grand nombre de subs- tances colorées dont il existe des isomères blanes ou incolores. On connait, par exemple, quatre corps de la formule C! H!$ AzC]l; deux sont inco- lores, le {roisième est jaune orange; le quatrième est vert à l’état solide, rouge intense en solution. Ce sont les chlorhydrates de la triphénylguani- dine, de l’amidine paramidobenzoïque, de la dia- midobenzophénone-phénylimide et de la pararo- saniline ; leurs constitulions, qui ont été établies avec certitude, s'expriment par les quatre for- mules suivantes : AT e /. NCSEHe CS Hi Az? C—Az—CSH;, H CI C—Az— CS H?, HCI NS H \ H Az A7 NC NGHs ACSENA ZE CS Hi Az H? C—Az— CSH*, HCI c —CSHtAzH? NC HI A7H° \ :CéHiA7zH2 NC] 1 I] paraïtrait néanmoins que la matière colorante de la carotte rouge, la carotine, est un hydrocarbure de la formule C?6 HS; d’après les recherches récentes de M. Arnaud, la carotine ne contient pas d'oxygène. chimique, LXXX VIII, p. 64.) Bulletin de la Socict Il La plupart des matières colorantes organiques, presque toutes, appartiennent à la série aroma- tique ou pyridique, quelques-unes à la série du fur- furane, du thiophène ou du pyrrol; à peu près. toutes paraissent contenir un noyau d’atomes en enchainement annulaire. La plupart sont transformées par les agents réducteurs en dérivés incolores, « leucodérivés », qui, sous l'influence des oxydants, régénèrent en général le colorant primitif. MM. Graebe et Lieber-. mann, qui dès 1868 ! firent remarquer ce fait, encon- clurent que dans les corps colorés, l'enchaîinement des atomes devait être plus intime. Ainsi laquinone jaune, dans laquelle on admettait deux atomes d'oxygène liés entre eux Cf 7 _ se transforme DO OH par réduction en hydroquinone C5H* À blanche ; OH CH Az l’azobenzol, qui est orangé || CSHS Az CH AZH zobenzol | CSH°AZH La connaissance plus approfondie de la consti- tution des matières colorantes que nous ayons acquise depuis vingl ans, a confirmé d’une manière générale les idées de Graebe et Liebermann, ainsi que le fera voir-la comparaison des formules de quelques colorants avec celles de leurs leucodérivés, bien que nos vues actuelles sur la nature des qui- nones diffèrent de celles qu’avaient les auteurs en question. Tandis que la quinone. d'après eux, appartenait au type des peroxydes, également blane. (o] Ca NZ (e) la plupart des chimistes la considèrent mainte- nant comme une dicétone dérivée de la dihydro- benzine : La formule de l'hydroquinone reste, d'autre part, ce qu'elle était : OH 7 OH 1 Deutl, Chem. Gesell. 1, p. 106. donne l'hydra- ni ditins“utn ent datés. Tous les produits de substitution des quinones sont colorés, tandis que les dérivés correspondants des hydroquinones sont incolores. Les quinones de structure plus compliquée, comme l’anthraquinone Lo je ne donnent pas seulement par réduction des - hydroquinones simples, mais des produits de constitution plus compliquée, tels que à y C.OH\ 0 C7 SOA \/ \ €. oH“ Oxanthranol Anthrahydroquinone 7 C-0H, / < 7 DALRN UN ER () ë NC.oH ” V VAT 0-4 Anthranol Dihydroanthranol dont les dérivés hydroxylés ne sont plus des ma- lières colorantes ou seulement des colorants d'une intensité beaucoup moindre. Le caractère chimique de l’anthraquinone diffère d’ailleurs sous beau- coup de rapports de celui des quinones ordinaires, Les matières colorantes azoïques, pour ainsi dire inconnues en 1868, et dont le nombre esl devenu maintenant extrêmement considérable, dérivent toutes d’une manière plus ou moins directe, du type R — Az — A7 — R' où R el R'sont des radicaux aromatiques subs- titués. Par réduction, elles se transforment en produits incolores dérivés du type R — AzH — AzH — R:. Les indamines dont le prototype es CHA Az H° / C5 Hi Az H° \z—CèH'Az2H? ou Az—C6H1AzH, HCI N | | CI donnent des leucodérivés de la forme CS Hi AzH° A7—C5H' Az. NH De même les {hisindamines (violet de Lauth. bleu de méthylène CS H? Az H° _ CH RARE AC >S ou AZ \ C6 H3 Az H2 SN C6 fs 2H, H CI CI Dr | E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES gènes. {1 / | 247 donnent par réduction C5 H3 Az H2 A7 S ae NREERSE H La rosaniline donne la leucaniline : CS Hi AzH? CSH'AzH? C, —C$ Hi Az H° C —CéHtAzH? donne \ C5 Hi A7 2 QUE CH1 Az H°. OH Nous pourrions multiplier les exemples à l'infini : ceux que nous venons de citer, empruntés à diverses classes de colorants, sufliront pour mon- trer la généralité de cette loi. Des idées précises sur les rapports entre la cons- titution chimique de ces corps et leur couleur furent émises pour la première fois par M. Otto N. Witt”. Les hydrocarbures sont incolores; par l'introduc- tion de certains groupes tels que AzO*, Az — Az, O—O0, Az—AzH, etc., que l’auteur appelle cro- mophores. ils acquièrent la propriété de pouvoir fournir des colorants, ils deviennent des ckromo- Ainsi la nitrobenzine, CSH° (Az O?) l’azo- benzel CSH° Az — AzCSHS, la quinone CH*{(0O?), la AZ phénazine cn | ,CfH*. etc., sont des chromo- Az gènes. Les chromogènes eux-mêmes sont en général peu colorés, et ne montrent aucune aflinilé pour la fibre. Ils deviennent colorants par l’introduc- tion des groupes salifiables OH et AzH°; et ceux- ci.en même temps qu'ils leur donnent une coloration intense, rendent possible leur union avec la fibre textile. D’autres groupes salifiables. tels que SOSH et COOH, ne possèdent cette propriété qu'à un très faible degré. M. Witt propose d’appeler les deux groupes OH et Az H?, exaltant la couleur et le pou- voir colorant, groupes « auxochromes » (au£aver. augmenter). Le nombre des groupes chromophoriques, ainsi influe considéra- Ainsi que des groupes auxochromes, blement sur le pouvoir tinctorial des corps. les phénols mononitrés sont des colorants faibles, landis que le trinitrophénol (acide picrique) est un colorant intense. Le monamidoazobenzol CGH — Az C6H (A7 H? a un pouvoir tinetorial bien moins intense que le diamidoazobenzol CSH5ÿAz — Az C5 H° (Az H°?}? {chrysoïdine) et que le triamidoazobenzol C5 H4 (A7 H2) Az — Az CSH® (A7 H?)? brun de Bismarck, de Manchester). 1 Deut. Chem. Gesell. 9, p. 522, 1876. 248 E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES td à Ÿ fs : D — La coloralion est en général beaucoup plus intense si le colorant est à l'état de sél que s’il est libre. L'acide picrique est jaune clair, les picrates sont jaune orange; la rosaniline libre ést incolore, tandis que ses sels monoacides sont verts à l’état solide, rouges en solution; mais, chose curieuse, les sels triacides ne présentent qu'unè couleur jaune peu intense. Si le caractère salifiable des groupes auxo- chromes est détruit, pour l’amide Az H? par acétyla- tion, pour l'hydroxyle OH par éthérifitation, le pouvoir colorant disparait, et le corps reprend en général la couleur du chromogène ou mème une teinte moins intense. Tous les chromogènes, par le fait qu'ils contien- nent des groupes auxochromes, ne deviennent cependant pas nécessairement des matières colo- rantes ayant la propriété de se fixer sur la fibre. Tels sont les divers isomères de l’alizarine. Nous reviendrons plus loin sur ce fait extraordinaire, qui cependant a trouvé, jusqu'à un certain point, son explication, grâce surtout aux recherches de M. de Kostanecki ‘. 2 Il Mais avant de disculer ces anomalies, précisons ce que l’on nomme pouvoir tinctorial d'un corps, et en général ce que l’on entend par fandre. La meil- leure définition nous parait être celle donnée par Chevreul : (L'art de teindre consiste à imprégner aussi profondément que possible le ligneux, la soie, la laine, la peau, de matières colorées qui y restent fixées mécaniquement ou par affinité chimique, ou à la fois par affinité el mécaniquement. » Ajoutons que pour qu'il y ait réellement feinture, il faut que le colorant soit fixé de telle manière qu'il ne soit pas éliminé par lavage. La teinture est dite solide au savon, aux alcalis, aux acides, si ces agents n'enlèvent pas le colorant, solide à la lumière, si elle ne pâlit pas et ne se détruit pas sous l'influence de cet agent. Du coton plongé dans une solution de bichro- mate de potasse, en sort jaune; mais un lavage à l’eau enlève complètement le sel, dont la solution était seulement absorbée par capillarité. IL n’y. a pas teinture. Si au contraire on plonge dans le même sel un échantillon de laine, il en sort jaune. et le lavage n'enlève pas la totalité du sel absorbé ; il y a teinture. Si l’on plonge dans une solution de carmin d’indigo, d'un sel de rosaniline ou de certains autres colorants artificiels, des tissus de soie, laine, coton et lin, ils en sortent colorés. Au lavage 1 Bullelin de la Société industrielle de Mulhouse 1888 et 4889. les fibres végétales abandonnent complètement le colorant, tandis que les fibres animales le retien= nent ; elles sont leintes. L'adhésion mécanique d’un colorant au tiss par l'entremise d'un agent fixateur, tel qu'u vernis, une huile siccative comme dans la peinlur à l'huile, l’albumine usitée dans l’industrie de toiles peintes, n’est pas une teinture non plus. L'impression des couleurs au moyen d'un épais- sissant neutre (amidon, gomme), qui esl élimin dans les opérations subséquentes, repose sur les mêmes principes que la teinture ; c’est une teinture locale. : ë Voyons maintenant quelques exemples des divers modes de teinture cités par Chevreul : 1° Teinture par imprégnation mécanique. — Si l’on manœuvre de la laine dans des bains contenant en suspension el à l’état finement divisé des corps tels que l’outremer, le vert de Guignet, le vermil- lon, etc., on obtient des nuances, très claires il est vrai, mais inaltérables. Le colorant est absorbé mécaniquement par les pores des fibres. Le bleu- lage du linge, usilé dans les ménages, en est un autre exemple tout à fait frappant. 2° Teinture par imprégnation chimique. — Si l'on plonge pendant quelques heures des étoffes de laine, de soie ou de coton dans une dissolution d’un sel de peroxyde de fer, elles en sortent colo- rées en brun. Elles ont enlevé au bain une cer- taine quantité de sesquioxyde de fer, car dans la solution restante on trouve que la proportion relative d'acide est plus forte que primitivement. Le tissu, par affinité chimique, a enlevé à la solu- tion une partie de son oxyde; il s’est teint en peroxyde de fer. Avec un sel d’alumine basique, le phénomène est le même, bien qu'il ne se manifeste par aucun changement de couleur, à cause de la nuance blanche de l'alumine. Aussi bien que dans le cas du fer, on est en droit de dire que le tissu s'est leint en alumine. | Il en sera de même pour les sels de sesquioxyde. de chrôme, et en général pour les sels des oxydes de la formule M°0*. Quant aux sels de protoxyde MO, sels de cuivre, de fer au minimum, etc., ils sont fixés, surtout à l’élat de tartrates, par la laine et la soie, mais peu ou pas par les fibres végétales. Les protoxydes peuvent cependant se fixer, comme uous le verrons, mais par affinité chimique el mécaniquement à la fois, par précipitation sous une forme insoluble. Non seulement les sels métalliques peuvent être absorbés par la fibre et y adhérer d’une manière résistante au lavage, mais il en est de même pour certaines substances organiques, en particulier pour les {annins et les sels des acides oxyoléiques À ee E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES 249 ou oxystéariques, connus dans l’industrie sous le nom de «sulfoléates ». Le coton se teint en tannin el en acide sulfoléi- que; mais ici, comme pour l’alumine, la teinte blanche des corps en question empêche le phéno- mène d'être visible. Enfin un grand nombre de substances organiques colorées se fixent sur les fibres en leur communi- quant les teintes les plus variées. Vis-à-vis de ces substances, les fibres d’origine végétale et animale montrent des différences très marquées et caracté- ristiques pour chacune de ces deux classes. En effet un nombre très considérable de colo- rants se fixent directement, sans intervention d'aucun autre agent, sur la fibre animale, en bain neutre ou acide, quelquefois, mais plus rarement, en bain légèrement alcalin. Tels sont les dérivés nitrés des phénols et des amines, les matières colorantes azoïques basiques et acides, les dérivés du triphénylméthane basiques, acides et sulfonés. certaines phtaléines, les amidophénazines, les safranines, les thioindamines, les dérivés phé- noxaziniques ‘bleu de Meldola, gallocyanine), les dérivés phénylacridiniques (phosphine), les dé- rivés quinoléiques, les hydrazines, les cétoni- mides (auramine), el parmi les couleurs naturelles le carmin d'indigo, le rocou, la berbérine, le safranum, le curcuma, l’orseille, le cachou. La plupart de ces colorants ne se fixent que peu ou point sur les fibres végétales. Les couleurs se fixant directement sur la cellulose sont en nombre relativement restreint : certaines matières azoïques amidées, le brun de phénylène-diamine, les chrysoïdines, le bleu de méthylène, les safra- nines : et encore la fixation n'est-elle pour tous ceux -ci que très imparfaite. Enfin un grand nom- bre de dérivés azoïques de la benzidine, du di- amidostilbène, de la paraphénylène-diamine, du diamidoazobenzol, de la déhydrothiotoluidine et de leurs homologues, la canarine (produit d’oxyda- tion des sulfocyanures), les couleurs sulfurées de Croissant et Bretonnière, et, parmi les couleurs naturelles, le curcuma, le rocou ou orléans, le safranum, le cachou, se fixent directement et d'une manière solide sur les fibres végétales. Il existe, en dernier lieu, un certain nombre de colorants, qui, aussi bien sur soie et laine que sur coton, ne se fixent que peu ou pas, ou bien ne donnent que des nuances faibles et de peu de valeur, mais qui se fixent, en donnant des nuances à la fois solides et belles sur la fibre teinte, ou, comme on dil en terme d’atelier, « mordancée », au moyen d'oxydes métalliques, en particulier d’alumine, d'oxyde ferrique et d'oxyde de chrôme. Ce sont certaines phtaléines, les dérivés de l’an- thraquinone(alizarine, purpurine, etc)., de lanthra- REVUE GÉNÉRALE, 1891, quinoléine (bleu d’alizarine), et presque tous les colorants naturels. On a désigné les colorants qui teignent directe- ment la fibre animale sous le nom de substantifs, el ceux qui ne teignent que la fibre préalablement mordancée sous le nom d’adjectifs. M. Hummel ! se basant sur le fait que les couleurs substantives ne donnent jamais qu'une seule teinte, et les couleurs adjectives, au contraire, suivant la nature del’oxyde métallique, des teintes différentes, désigne les pre- mières sous le nom de monogénétiques, les secondes sous le nom de polygenétiques. Ainsi la fuchsine teint toujours en rouge; l’alizarine, au contraire, donne avec l’alumine des rouges, avec le fer des violets et des noirs, avec le chrôme des grenats, avec l'urane des gris et des noirs, avec l’étain des oranges, avec le nickel des violets clairs. Certains colorants se fixent à la fois directe- ment sur soie et laine, et, par l'intermédiaire de mordants, sur coton; tels sont la gallocyanine el certaines matières azoïques carboxyliques. Parmi les couleurs mentionnées ci-dessus nous n'avons pas encore parlé de l’indigo; son mode de: fixation est spécial, mais repose en somme sur les mêmes principes. L’indigo, par lui-même, est in- soluble dans les dissolvants usuels; mis en sus- pension dans l’eau, il n’est absorbé que très faible- ment par la fibre, à peu près comme les poudres métalliques (ocre, vermillon, etc.,\ dont nous avons parlé plus haut. Sous l'influence des réducteurs, l'indigo se transforme en leucodérivé soluble dans les alcalis et facilement réoxydable à l’air.Si, dans la solution de l’indigo réduit on plonge un lissu quelconque, d’origine animale ou végétale, il se teint en indigo blanc; si on l’expose ensuite à l’air, l'indigo blane se réoxyde à la surface et à l’inté- rieur de la fibre à l’état d'indigo bleu, qui y reste intimement fixé et n'est plus éliminé ni par le savon ni par les alcalis ou les acides. Quelques autres matières colorantes peuvent, d’une manière semblable, se fixer par la cuve, par exemple l'in- dophénol et le bleu d’alizarine, mais ce mode opératoire n’est usité que pour l’indigo, seul ou mélangé avec l’indophénol. La teinture en noir d’aniline se rapproche aussi, jusqu'à un certain point, de celle en indigo. Les malieres colorantes substantives que nous avons énumérées plus haut comme ne teignant pas le coton, peuvent cependant être fixées sur celte fibre après mordançage préalable. Si le coton, par l’action des oxydants, a été transformé en ozycellulose, il acquiert la propriété d'attirer les matières colorantes basiques. Comme le tannin, l'acide sulfoléique, les oxydes 1The dyeinq of textile fabrices, p. 147. g* 250 E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES métalliques, certaines malières colorantes substan- tives ont aussi la propriété d'attirer d’autres colo- rants, de se teindre une seconde fois. La nuance obtenue est généralement la résultante de celles des deux colorants. Nous proposons d'appeler ce genre de fixation feinture secondaire. Le mor- dançage rentrerait dans la finture primaire; la fixation de toutes les couleurs à mordants appar- tiendrait à la feinture secondaire. Ces définitions nous semblent avoir l'avantage de montrer l’ana- logie entre la teinture des couleurs substantives et la fixation des mordants. Des colorants fixés par teinture secondaire peu- vent encore attirer un second colorant; ainsi la laque violette d’alizarine et de fer peut se com- biner au violet de méthyle en donnant une laque triple plus brillante (en terme d'atelier, remon- tage). La laque rouge d’alizarine, d’alumine et de chaux, un peu terne, peut attirer l'acide sulfo- léique et donner une laque quadruple plus bril- lante, plus solide. Enfin l’étoffe imprégnée de celle-ci, bouillie dans une solution de savon addi- tionnée de sel d’étain, absorbe encore de l’étain. 3° Teinture par ümprégnation mécanique et chimique simultanées. — Nous avons vu plus haut qu’en plongeant un tissu dans la solution d’un sel fer- rique basique etle lavant ensuite, il reste imprégné de peroxyde de fer et leint en jaune ocre. Si, au lieu de le laver à l’eau, on le passe en savon ou en alcali {ou en un sel doni l’acide forme avec l’oxyde ferrique un sel insoluble), il sera teint également, mais la nuance sera beaucoup plus foncée, et à l'incinération on pourra constater que la quantité d'oxyde ferrique fixé est beaucoup plus considé- rable. Au lieu de précipiter l'oxyde ferrique sur la fibre par un passage alcalin, on peut encore procéder autrement. On imprègne le lissu de la solution d’un sel ferreux, à acide volatil, en particulier d’a- cétate ferreux, puis on l’expose à une douce cha- leur humide. Sous l'influence oxydante de l'air, Le sel ferreux passe à l’état de sel ferrique basique ; celui-ci perd encore par dissociation, à l'air hu- mide et chaud, une partie de son acide et se transforme en un sel très basique insoluble que le lavage r’enlève plus. Par un dernier passage en bouse, craie el silicale, phosphate ou arséniate alcalin, on fixe enfin les parties du sel que l’expo- sition à l’air seule n'aurait pas rendues insolubles. La fixation de l’alumine s’effectue d’une manière analogue ; seulement il n’y a pas ozydation lors de l'exposition à l'air humide et chaud. Les oxydes des métaux tels que le plomb, le nickel, le cuivre, qui ne se fixent pas directement, sont toujours précipités sur le tissu par un passage en alcali ou en un sel avec l’acide duquel ils forment une combinaison insoluble. On fixe de même par insolubilisation les acides stannique, tungstique, sulfoléique, le tannin. III La fixalion des colorants mentionnés dans la deuxième catégorie, fixation que nous considérons comme un phénomène chimique, est envisagée par certains auteurs comme un phénomène plutôt physique, dû à l'attraction moléculaire de la fibre. Ils assimilent la fixation des sels ou oxydes métal- liques et des matières colorantes à l’absorption des mêmes substances par les corps poreux comme le noir animal. Ce dernier ne retire pas non plus en général un sel métallique de sa solution sans l’altérer; le plus souvent le liquide contient plus d'acide qu'avant, ce qui prouve que le sel absorbé est un sel plus basique. D’autres corps finement divisés comme la silice gélalineuse, la terre d’in- fusoires, le soufre précipité, le sulfate de baryte, se laissent teindre également; on peut même sur la terre d’infusoires ou le sulfate de baryte, fixer d’abord un mordant et teindre ensuite au moyen d'un colorant adjectif; mais, il faut bien le dire, les nuances sont loujours beaucoup plus claires que celles obtenues sur la fibre. Un argument sur lequel s'appuient tout parti- culièrement les adversaires de la théorie chimique de la teinture, est qu'il n’y a aucun rapport cons- tant entre le poids de la fibre et le poids du colo- rant. On peut teindre avec un colorant toute la gamme des nuances, depuis la plus claire jusqu'à la plus foncée. On pourrait répliquer qu'il en est de mème des alliages : on peut fondre ensemble bien des métaux en proportions quelconques, el cependant il existe entre eux des combinaisons dé- finies. L’alliage à proportions arbitraires est la dissolution d’un ou plusieurs de ces composés dé- finis dans un excès de l’un des mélaux ou dans l’un des alliages. De même sur la fibre teinte il pourrait y avoir une ou plusieurs combinaisons définies mélangées à un excès de la fibre. La struc- ture histologique de celle-ci s'oppose déjà à une combinaison tout à fait uniforme ; la partie exté- rieure d’une fibre est toujours teinte d’une ma- nière plus intense que le noyau. La quantité de matière colorante qu'une fibre peut absorber varie essentiellement avec la nature de la fibre et la na- ture du colorant. Les arguments qui parlent en faveur de la théorie chimique de la teinture, arguments très concluants à notre avis, sont nombreux; les principaux sont les suivants : Les colorants basiques ou acides se fixent sur la fibre non avec la coloration de la base ou de l’a- 0x Lire s. Sons il E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES 251 cide, mais avec celle du sel. Vis-à-vis de la base, la fibre animale fonctionne comme un acide, vis-à- vis de l'acide comme une base. Si l’on teintun échantillon de soie ou de laine dans une solution incolore de la base rosaniline, le tissu prend, d’a- près M. Jacquemin, la teinte rouge des sels de ro- saniline. Étant donnée la composition chimique des fibres animales, ces actions s'expliquent assez bien. Ces fibres appartiennent au groupe des substances protéiques, qui paraissent être des amido-acides compliqués, ayant à la fois les fonctions base el acide. La cellulose, ayant plutôt un caractère alcoo- lique, n'attire directement que cerlains oxydes métalliques, des acides comme le tannin et l'acide sulfoléique; elle est indifférente vis-à vis de la plupart des colorants. Si on la transforme en oxYy- cellulose, elle acquiert la propriété de fixer direc- tement les colorants à caractère basique; mais elle se montre plus rebelle vis-à-vis des colorants acides ou phénoliques. Quant au mécanisme de la fixation des colo- rants teignaut directement la cellulose, nous ne le connaissons aucunement. Il paraitrait que c’est une simple juxtaposition des éléments, comme dans la formation des sels doubles, de la combi- naison du sucre avec certains sels mélalliques, etc. Un grand nombre de matières colorantes à ca- ractère acide ou phénolique donnent avec les oxydes métalliques des précipités, des laques inso- lubles dans l’eau. Si l’'oxyde métallique est fixé sur le tissu et qu'on plonge celui-ci dans un bain contenant le colorant, souvent l’oxyde latlire ; c’est le cas de l’alumine qui se teint en alizarine sur le tissu. Mais tous les oxydes n’agissent pas de même, les sels de magnésium précipitent l'aliza- rine; mais la magnésie, une fois sur le tissu. n'attire pas celte couleur. Enfin, les isomères de l'alizarine, qui donnent des laques, ne sont pas fixées par les étoffes mordancées. Pour qu'un colorant teigne les mordants, la con- dition essentielle est que ses laques soient abso- lument insolubles. Mais, même s’il en est ainsi, il y a des différences marquées, comme, par exemple, entre l’alizarine et ses isomères. La cause de ces différences nous est absolument inconnue. Cepen- dant, dans ces derniers temps, on est arrivé à établir certaines régularités touchant la fixation des colorants sur les mordants. MM. Liebermann et de Kostaneeki ! ont observé que, de tous les dé- rivés hydroxyliques et de l’anthraquinone, il n°y à que ceux qui ont deux groupes hydroxyles OH en position ortho qui teignent les mordants. C'est le | Ann. der Chemie, vol. 240, p. 245. cas pour l’alizarine, mais pour aucun de ses sept isomères connus. M. de Kostanecki a étendu ces observations ; il a démontré ! que tous les colorants possédant deux groupes OH en ortho se fixent surles mordants. Cette règle parait tout à fait générale. Si dans les dérivés orthohydroxylés de la benzine, les plus simples, la pyrocaléchine et le pyrogallol, on introduit un groupe chromophorique tel que AzO?, on a des co- lorants teignant les mordants. Disons, pour terminer, quelques mots sur les conditions dans lesquelles les matières colorantes se fixent sur la fibre : La teinture réussit généralement mieux à chaud ; nous croyons que cela vient du fait queles sels des colorants sont dissociés à chaud et qu'alors la base colorée se fixe plus facilement sur la fibre. Dans le cas des colorants acides, cela pourrait provenir, comme pour l’alizarine, de leur solubilité plus grande à chaud. Les colorants basiques, qui se trouvent dans le commerce en général sous la forme de chlorhy- drates ou de chlorozincates, se leignent le plus souvent en bain neutre. L’affinité de la fibre ani- male ou de la fibre végétale mordancée au tannin fixé ensuite à l’émétique), est telle que le sel est décomposé; la base s'unit à la fibre fonctionnant comme acide, où à la laque stibiotannique. Pour certaines bases énergiques, comme celle du vert méthyle, l'affinité de la fibre de laine n’est plus suffisante; on alcalinise le bain à l’ammoniaque. Pour la soie cela n’est pas nécessaire. Les colorants à caractère faiblement acide, ou phénolique, ne se fixent en général que sur mordant métallique; quelques-uns {gallocyanine) teignent directement la fibre animale ou le coton mordancé au lannin. Les colorants à caractère acide, qui se trouvent dans le commerce à l’état de sels alcalins, teignent le coton mordancé en nuances peu solides; sur la laine et la soie ils se fixent sans mordant, mais à la condition que le bain soit acide, c’est-à-dire que l'acide coloré soit mis en liberté. L’affinité de la fibre fonctionnant comme base n’est, en effet, pas suffisante pour décomposer les sels alcalins du co- lorant, Quant aux couleurs de benzidine, elles sont fixées sous forme de leurs sels alcalins sur la fibre végé- tale. (La suite prochainement.) E. Noelting. Directeur de l'École de Chimie de Mulhouse, 1 Bull. Soc. [Indus. de Mulhouse, 1888-1889. 252 D' G. WEISS. — L'OMBRE PUPILLAIRE L'OMBRE PUPILLAIRE MESURE DE Peu de médecins se servent de l’ophtalmoscope; la plupart n’en possèdent même pas; cela tient à la difficulté qu'il y a de voir la rétine et à tirer avantage de cet examen sans un exercice préa- lable assez long. Le procédé que nous allons dé- ecrire, imaginé par M. Cuignet, de Lille, et perfec- Hionné par M. Parent et M. Leroy, permet au con- traire, sans étude spéciale et sans apprentissage, de diagnostiquer avec grande précision l’état de réfraction d’un œil. Avec un peu d'habitude on ar- rive à une rapidité d'observation qu'aucune autre méthode ne donne. On conçoit les services que ce mode d'examen peut rendre aux médecins et en particulier à nos confrères de l’armée; c’est ce qui nous a engagé à écrire cel article, le phénomène de l’ombre pupillaire étant encore très peu connu en dehors des ophtalmologistes. Pour bien faire ressortir les avantages de la méthode de M. Cuignet, indiquons en quelques mots les procédés subjectifs employés autrefois pour reconnaître la myopie ou l'hypermétropie. IL fallait, après avoir éclairé le fond de l'œil à l’aide de la lumière réfléchie par le miroir de l’oph- talmoscope : 1° Voir nettement la rétine. 2% Placer devant l’œil observé verres convergents ou divergents de puissance allant en croissant d’une facon régulière, jusqu’à ce qu'un verre déterminé ne permit plus de voir nettement la rétine,dont l’image était encore nette avec le verre précédent. 3° De ce verre, de la distance de l'œil observé à l'œil observateur et de l’état d'accommodation de ce dernier, conclure au degré de myopie ou d'hy- permétropie de l'œil observé. On voit combien l'opération était compliquée; d’ailleurs iln’estpas donné à tout le monde de voir la rétine sans de laborieuses études ; enfin il faut être absolument maitre de son accommodation, Dans la méthode de M. Cuignet, on ne cherche pas à voir la rétine, et, l’œil observateur n'inter- venant que par sa position el non par son accom- modation, les deux grandes difficultés de la mé- thode précédente sont éliminées. L'observation est plus rapide et moins fatigante pour le patient. Voici comment il faut opérer. L’observateur se met à un mètre de la personne qu'il examine et, à l’aide d’un ophtalmoscope,plan une série de , LA MYOPIE, DE L'HYPERMETROPIE ET DE L’ASTIGMATISME de préférence, il éclaire l’œil de façon à ce que la pupille paraisse rouge et lumineuse dans toute son étendue. Pour arriver à ce résultat il faut en- gager le patient à regarder par-dessus lépaule de l'observateur, à la hauteur de son oreille environ, les noms de cette épaule et de l'œil étant de même espèce, c'est-à-dire droit ou gauche. On dit aussi à la personne de fixer un objet placé derrière soi, le mur par exemple. Cela fait, la pupille paraissant bien lumineuse, on déplace légèrement l’ophtal- moscope par un mouvement de rotation autour de son manche, de façon à promener très lentement la tache lumineuse qui se trouve sur la figure de la personne soumise à l'examen, à droite et à gauche de læil, comme font les enfants quand à l’aide d’une glace ils s’envoient des rayons solaires à la figure. On voit dans ce mouvement la pupille ces- ser d’être lumineuse dans toute son étendue. Trois cas peuvent alors se présenter ! : 1° L'ombre qui envahit la pupille se déplace dans le même sens que la tache lumineuse sur la figure. — L'œil observé est accommodé pour une distance plus grande que celle à laquelle se trouve l’obser- valeur. 2 L'ombre et la tache lumineuse se déplacent en sens inverse. — L'œil observé regarde à plus courte distance que celle à laquelle se trouve l’ob- servateur, 3° On ne peut pas dire dans quel sens se déplace l'ombre ; elle envahit pour ainsi dire la pupille en masse. L'œil observé regarde précisément à la dis- tance à laquelle se trouve l'observateur, c’est-à- dire à un mètre, si l’on adopte une fois pour toutes cette distance. Supposons que l'ombre se déplace dans le sens inverse, c'est-à-dire dans le sens contraire à celui de la tache lumineuse, le patient étant invité à re- garder par-dessus votre épaule le plus loin pos- sible. D'après ce que nous venons de dire, il résulte de l'observation que l'œil ne peut voir à un mètre ; on pourrait alors se rapprocher jusqu'au moment où il serait impossible de dire le sens dans lequel se déplace l'ombre pupillaire; l'observateur serait alors au punctumremotum de l'observé et par consé- quent connaitrait sa myopie. Mais il vaut mieux opérer autrement pour une détermination exacte. Plaçons devant l'œil observé des verres divergents 1 Il est bien entendu que nous supposons l’ophtalmoscope plan, car avec un miroir courbe il peut y avoir inversion du phénomène, comme nous le ferons voir plus loin. PP el cl D' G. WEISS. — L'OMBRE PUPILLAIRE 253 de plus en plus forts : il arrivera un moment où l'œil, étant par cette adjonetion de verres devenu de moins en moins myope, pourra voir nettement à un mèêtre ; l'ombre envahit alors la pupille en masse;le verre de numéro inférieur donnera encore l'ombre directe, le verre supérieur l'ombre inverse. Connaissant ce verre, nous connaitrons le degré de myopie de l’œil observé ; en effet,ce verre laisse encore à cet œil une myopie d'une dioptrie; au- trement dit, un verre d’une dioptrie de plus le cor- rigerait absolument et marquerait par suite son degré d’amétropie!. Admettons maintenant que l'ombre se déplace dans le sens direct; l'œil voit à plus d'un mètre, ilest emmétrope, hypermétrope ou très légèrement myope. Placons devant lui un verre d’une diop- trie convergent, il arrivera souvent de ne plus voir le déplacement de l’ombre pupillaire. Il est évi- dent que l'œil était emmétrope, car il a maintenant une myopie d’une dioptrie, précisément celle que lui a donnée le verre.Rarement l'ombre deviendra inverse ; on aurait alors affaire à une myopie insi- gnifiante et il faudrait essayer des verres plus faibles. Si l'ombre reste directe, l'œil était hyper- métrope; en prenant des verres de plus en plus forts on arrivera à un numéro donnant à l'œil une myopie d'une dioptrie, ce que l'on reconnaitra à l’'envahissement en masse de la pupille. Le verre a donc corrigé l'œil par excès de son hypermé- tropie, c'est-à-dire qu'un verre convergent ayant une dioptrie de moins le corrigerait exactement. Parsuite le procédé est des plus simples. Chercher l’ombre pupillaire comme nous l’avons dit; si elle est directe, placer devant l'œil des verres convergents de plus en plus forts jusqu'à dispa- rition du déplacement de l'ombre. En retranchant une dioptrie au verre qui produit cet effet, vous aurez en dioptries la valeur de l’hypermétropie de cet œil. Si l'ombre est inverse, faites la même opé- ration avec des verres divergents : vous aurez la valeur de la myopie en ajoutant une dioptrie au verre trouvé. ! La dioptrie est l’unité de puissance, comme le mètre est Punité de longueur. C'est la puissance d’une lentille de un mètre de distance focale. La puissance d’un systéme réfrin- gent évaluée en dioptries est l'inverse de sa distance focale évaluée en mètres. Ex. Une lentille de # mètres de distance focale a L de SORLACS de puissance. Une lentille de 20 centi- mètres c’est-à-dire = de mètre de distance focale à 5 di jes de puissance. Le signe + indique la convergence te — la divergence. e La valeur en dioptries de l’amétropie d’un œil est la puis- sance du verre qui le corrige exactement. Les puissances des lentilles accolées exactement s'ajoutent quand elles sont de méme espèce, se retranchent quand elles sont d’espèces contraires. Ex. Une lentille de + 2 dioptries ac- colée à une lentille de + 3 d. donne un système équivalent à une lentille de +5 dioptries. — Une lentille de + 9 d, et une autre de — 3 d. donnent une lentille de — 44, Ce procédé permet aussi de déterminer avec la plus grande facilité l’astigmatisme. En effet, supposons que l’on ait trouvé un verre donnant lieu àl’envahissement de l'ombre en masse, lorsque nous déplaçons la tache lumineuse sur la figure du patient dans le sens horizontal. Pro- duisons alors un déplacement dans le sens vertical; si l'ombre reparaît, le méridien vertical n’a pas la même réfraction que le méridien horizontal; nous pouvons chercher aussi le verre qui lui convient. On peut'ainsi rechercher et étudier les méridiens de plus grande et de plus petite courbure et trou- ver les verres sphériques qui les corrigent. La dif- férence entre ces deux verres donne la valeur de l’astigmatisme. Telle est la méthode de l'ombre pupillaire ; elle est des plus simples dans la pratique et n’exige aucune connaissance spéciale. Avec un peu d’ha- bitude elle donne non seulement des renseigne- ments très précis, mais aussi des indications très rapides, car l’exercice permet de déduire l’amétro- pie de l'intensité de l’ombre,au moins d’une façon assez approximative pour éviler des tätonnements trop longs. L'apparition de l'ombre pupillaire lors du dé- placement de l’ophtalmoscope ne peut s'expliquer que par une variation de forme du faisceau émer- gent de l'œil observé, ou par un déplacement de ce même faisceau. Une expérience très simple montre que c'est à cette deuxième hypothèse qu'il faut attribuer le phénomène. Au lieu d'employer un ophtalmoscope ordinaire, prenons un miroir dans lequel nous aurons pratiqué, par un grattage du ain, une fenêtre horizontale sur tout un dia- mètre, et, pour être certain de ne pas le déplacer, fixons ce miroir dans un support, de façon à ce que la pupille d'une personne nous paraisse lumi- neuse. Il nous suffira de déplacer horizontalement notre œil derrière la petite fenêtre pour voir appa- raîitre l'ombre pupillaire, dans un sens variable avec la distance à laquelle l’œil observé accom- mode. Pour voir ce qui se passe, cherchons la forme du faisceau. Lorsque, devant un œil, on place une source lu- mineuse, il se forme une tache lumineuse sur la rétine, quel que soit d’ailleurs l’état d’accommo- dation de cet œil; lasource peut, bien entendu, être un objet réel ou une image comme dans le cas de l'éclairement au miroir. Soit ab (fig. 1) la tache lumineuse sur la rétine; elle va à son tour émettre des rayons lumineux qui se perdront en partie sur la surface intérieure, mais dont un faisceau sortira par la pupille. Quels 254 D' G. WEISS. — L'OMBRE PUPILLAIRE sont les rayons passant en un point p de la pupille ? Ils partent de tous les points de 4b et forment un petit cône «pb, qu'on pourrait figurer en bleu. Or, supposons que l'œil accommode sur un plan MN; on sait alors que, par suite du principe du retour trouve plus éloigné que le point sur lequel l’'observé accommode, en RS par exemple, et que s’il est en MN, la pupille devient brusquement lumineuse ou obscure dans toute son étendue. inverse des rayons, l’image de la rétine se formera dans le plan MN; ab aura pour image AB, si O est le centre optique de l'œil. Tout rayon partant de ab passera par le point correspondant de AB, et par suite à la sortie de l'œil les rayons formant le cône «pb donneront le cône AypB. Il y aura un On peut vérifier l'exactitude de cette théorie à l’aide de l’ophtalmoscope à fenêtre el constater que dans tous les cas elle est d'accord avec l’expé- rience. On conçoit qu'il revient absolument au même de déplacer l'œil par rapport au faisceau lumineux, ou de déplacer le faisceau lumineux par rapport à l'œil; c’est ce dernier dispositif que l’on réalise dans la pratique. En déplaçant l’opthalmoscope, Mt pal \ i in ( \ n ï on k in À 1 H 1n nl 11 ; \ \\ ‘ po ( \ 3 14 ; y wat l 1 FN ' NON | JL RU \ VONZ 2, 1 1 f) { 1 1 4 ! 1 j | L J ! 1 \ 1 ! | Vi ! ur 0 let ! UE ir ! \ m AE RATE 11 1 14 U \1 jt! (1 . Kig. 3 Fig, 4 on déplace la tache lumineuse 4b au fond de l'œil et cône analogue pour chaque point de la pupille, entre autres le cône AgB, qu'on pourrait figurer en rouge, correspondant à l'autre extrémité du diamètre de la pupille. Soit maintenant un observateur placé dans le plan TV : pour une certaine position de son œil il entrera dans sa pupille des rayons rouges et des rayons bleus, les points p et g lui paraîtront lumi- neux, il en sera évidemment de même pour les points intermédiaires. Mais si l'observateur se dé- place vers la droite par exemple, ilsortira du fais- ceau rouge avant de sortir du faisceau bleu ; il lui semblera donc voir une ombre envahir la pupille observée par la gauche. S'il se déplace à gauche, l'ombre viendra par la droite. La simple inspection de la figure fait voir que le phénomène est renversé lorsque l'observateur se par suite le faisceau émergent, comme le fait voir la figure 2; il est facile, en regardant cette figure, de prévoir les divers cas qui peuvent se présenter. On voit aussi sur les figures 1 et 2 que le phéno- mène est d'autant plus net que l’on s'éloigne d’a- vantage du plan MN. Pour terminer, il faut encore montrer comment se déplace la tache lumineuse ab dans les divers cas de la pratique. Pour cela il suffit évidemment d'étudier le déplacement d’un seul point lumineux. Prenons d’abord un opthalmoscope plan; la lu- mière est en L (fig. 3).Dans une certaine position du miroir elle donne une image L, etsur la rétine L, si O est le centre optique. Faisons tourner le mi- roir de droite à gauche : MN viendra en M'N'et l'i- mage de L en L',.Sur la rétine nous aurons /' c'est- à-dire que la lumière se déplace sur la rétine comme sur la figure de la personne observée. L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 255 Supposons maintenant que nous ayons un mi- roir concave à foyer assez long pour que l’image L L; kig. 5. se forme en L, en arrière de l'œil observé (fig. 4). La figure montre que le déplacement de la lu- mière suit la même loi que dans le cas pré- cédent. Mais si (fig. 5) l'image L, se forme en avant de l'œil observé, le sens du phénomène est renversé ; en effet si L, se déplace vers la gauche par suite de Ja rotation du miroir de droite à gauche, son image se déplace vers la droite. On voit donc pourquoi avec un miroir concave on est dans l'incertitude, le phénomène pouvant changer de sens suivant la distance focale du mi- roir, C'est pour cela que nous conseillons l’usage de l’ophtalmoscope plan. D' Georges Weiss. Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE Les travaux d'anatomie et de physiologie végé- tales sont toujours très nombreux chaque année; mais en dehors de ceux qui embrassent une étude générale, la plupart ne sont pas susceptibles d’être résumés dans l’espace restreint de cette revue. Nous nous bornerons donc à indiquer les ten- dances principales que révèlent ces travaux. I Les relations entre la structure anatomique et le rôle des diverses parties du corps chez les plantes sont, comme on le sait, beaucoup moins nettes que chez les animaux; de là la notion de membres substituée en botanique à la notion d'organes. On a cependant distingué depuis longtemps des sys- tèmes de tissus dans lesquels la structure anato- mique correspond à un but physiologique défini : tels sont par exemple le tissu assimilateur, le tissu conducteur, le tissu de soutien, etc. M. Muller ‘ vient augmenter nos connaissances sur ce sujet, par l’étude de la structure et des fonc- tions du collenchyme. Le tissu qui porte ce nom est formé de cellules plus ou moins allongées, à parois incolores, fortement épaissies et réfrin- gentes, susceptibles de se gonfler beaucoup en absorbant de l’eau ; on le rencontre dans les tiges, les pétioles, immédiatement appliqué contre l'épi- derme ; il y forme la région corticale externe. Après une critique des travaux déjà publiés sur ce sujet, 1 C. Müzcer. Ein Beitrag zur Kenntniss der Formen des Collenchyms. Berichte d. Deuts. Bot. Gesellsch., Bd. VII, 1890, p. 150. M. Muller décrit les formes principales du collen- chyme, au nombre de sept, qu'il a cru distinguer et il conelut en indiquant le rôle physiologique de ce tissu. Le collenchyme est avant tout un tissu de réserve d’eau; il est en même temps un organe de soutien, non seulement pendant l'accroissement intercalaire, mais encore dans les tissus adultes de beaucoup de plantes charnues. M. Schenck ! de son côté, en étudiant les plantes aquatiques (Jussiea, Epilobium, Cleome, etc.), a fait connaitre l'existence d’un tissu constituant une réserve d'air, qu'il a désigné sous le nom d’aéren- chyme ; ce tissu se développe dans la région externe de l’écorce, aux dépens d’une assise génératrice analogue à celle du liège; mais les cellules externes de cette assise génératrice, au lieu de former le liège, s'allongent beaucoup en direction radiale et laissent entre elles de larges méats où la circu- lation des gaz est très facile; les cellules internes fournissent, comme d'habitude,du parenchyme cor- tical secondaire. Le tissu lacuneux ainsi formé par le cloisonnement externe de l’assise génératrice, n’est pas seulement destiné à jouer le rôle de flotteur : il forme encore une réserve gazeuse uti- lisée par la plante. Le rôle physiologique des tissus ne saurait être suffisamment établi par de simples considérations anatomiques, et l’on doit toujours chercher à véri- fier les conclusions déduites de la structure par les 1 Sonencx. Ueber das Aërenchym, ein dem Kork homologes Gewebe bei Sumpfpflanzen, Pringhs. Jahrb., t. XX, p. 526. 256 L. MANGIN, — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE observations comparées de plantes croissant dans les milieux différents. Des tentatives nombreuses ont été faites depuis un certain nombre d'années dans cette voie. M. Johow, en étudiant les plantes privées de chlo- rophylle et humicoles qui vivent dans les régions chaudes du globe !‘, montre que ces plantes sont caractérisées par la réduction de l'appareil végé- tatif aérien, constitué par une simple hampe flo- rale. Les appareils souterrains sont plus déve- loppés et forment des stolons portant de nom- breuses racines à structure très réduite. Dans ces organes, en effet, l'écorce très développée, dé- pourvue de poils absorbants, enveloppe un cylindre central où le système libéro-ligneux perd peu à peu son apparence radiée, pour former un système concentrique à bois central. Les formes hibernales de l'appareil végétatif, si fréquentes dans les plantes humicoles des régions tempérées, manquent dans les espèces des régions chaudes en raison de l’absence de saison froide. Chez toutes ces plantes, qui représentent 160 espèces réparties en à familles (Orchidées, Burmanniacées, Triuriacées, Ericacées, Gentianées), l’auteur a re- trouvé (excepté chez une Orchidée,le Wul/schægelia) les mycorhizes de M. Frank ?. Ces formations ser- viraient chez les Holosaprophytes, non seulement à assimiler les substances humiques, mais surtout à préparer les détritus en voie de décomposition dans le sol, de manière à les mettre sous la forme d’ali- ments utilisables directement par la plante. En somme la réduction des organes aériens, la rareté des stomates témoignent de l’affaiblissement de la transpiration; l’absence de chlorophylle, com- pensée par le développement des mycorhizes, sont les caractères de ces plantes dont la végétation est plus étroitement liée à la présence des matières humiques que celle des arbres de nos forêts. Tous ceux qui ont herborisé dans des régions de montagnes, surpris d’abord par des formes végé- tales différentes de celles qu’on a coutume de voir, ne tardent pas, en se familiarisant avec la flore de ces régions, à reconnaitre parmi ces formes, des types de transition avec des espèces des plaines. Sont-ce là des espèces nouvelles ou seulement des formes d'une seule espèce, modifiée dans son aspect et sa structure, par les différences de milieu? Les Botanistes descripteurs se posent rarement ces questions; ils se bornent à décrire et à cata- 1 Jonow. Friedr. Die chlorophyllfreien Humuspflanzen nach ihren biologischen und anatomisch entwickelungsge- schichtlichen Verhältnissen. Pringsh. Jahrb., 1889, Bd, XX, p. 415-625. ? Voyez à ce sujet : P. Vuizcemix : Les Mycorhizes, dans la Revue du 15 juin 1890, t. [, p. 326 et suiv. loguer toutes les formes nouvelles. L'encombre- ment des catalogues ou des flores est devenu tel. qu'une revision des espèces s'imposait depuis long- temps; mais cette revision ne peut donner de résultats que si elle s'appuie sur les expériences culturales faites dans les milieux différents. Ces cultures méthodiques, réalisées depuis long- temps en Allemagne sur des sols différents par M.Hoffmann, ont élé entreprises dans les régions montagneuses en 1884 par M.G. Bonnier. A cet effet, des espèces indigènes vivaces ont élé plantées dans les Alpes et les Pyrénées, où les stations de culture se trouvent à des altitudes variant de 1.000 mètres à 2.400 mètres; ces plantes ont élé comparées à des espèces semblables poussant dans la plaine; pour un grand nombre d'espèces vivaces, les échantillons comparés dans les hautes et les basses altitudes, ont été obtenus en dédoublant un même pied, l’une des moitiés ayant été plantée dans des régions élevées, l’autre dans les plaines. Dans le Mémoire où M. G. Bonnier ‘ vient de publier la première partie de ses recherches, l’auteur n’a indiqué que les modifications externes des plantes soumises à l'expérience en ne comparant entre elles que les formes qui paraissent vigoureuses, toutes les fois que l’absence des fruits n’a pas permis d'affirmer leur vitalité. Pour beaucoup d'espèces, les résultats sont très remarquables. En général les formes des stations supérieures offrent une taille plus pelite, des entrenœuds plus courts, des organes souterrains plus développés, des feuilles plus petites, plus épaisses et plus vertes el enfin des fleurs plus colorées. Les modifications les plus nettes ont été observées sur l’Æelianthus luberosus, dont la forme alpine très réduite et constituée par une rosette de feuilles aplalie et étalée sur le sol, était si mécon- naissable, que l’auteur avait d’abord marqué cette espèce comme ayant péri dans les stations alpines. Le Lotier corniculé, la Potentille, l’Alchémille ont offert des différences presque aussi nettes et les formes alpines étaient presque méconnaissables ; par contre le 7hymus Serpyllum et le Chenopodium Bonus Henricus ont été à peine modifiés depuis le début des cultures. Ces diverses modifications, observées dans les espèces des stations élevées, constituent ce que l’on a nommé /e nanisme. Connues depuis longtemps, de nombreuses observations ont montré qu'elles sont éminemment favorables à l’utilisation de la plus grande somme de radiations pendant la période estivale, et qu’elles favorisent la survivance en permettant à la neige de protéger les plantes contre les effets pernicieux de la gelée. ! Cr, Bonnier, Revue générale de Bolanique, 1890, p. 513. L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 257 Les changements apportés par le climat alpin dans la morphologie externe des végétaux en- trainent-ils des différences anatomiques impor- tantes ? M. Bonnier ne parle pas de cette question qu'il a réservée pour de prochaines publications. IL à d'ailleurs été devancé dans cette étude par M. Leist ! qui vient de publier ses observations sur les différences de structure des feuilles vertes dans les plantes des stations alpines et des stations de plaines. M. Leist, tenantcompte desrésultats publiés par M. Johow il y a quelques années, sur les diffé- rences de structure des feuilles insolées et des feuilles croissant à l'ombre, a comparé entre elles les feuilles des régions insolées et des régions om- bragées. Il a surtout étudié les modifications du parenchyme en palissade; tantôt le nombre des assises demeure constant; mais dans les feuilles des plantes alpines, les cellules de ce parenchyme deviennent moins longues et plus larges; tantôt le nombre des assises diminue jusqu'à devenir nul et les cellules deviennent sphériques ou polyédriques. Ces modifications amènent l'auteur à constater que les feuilles des plantes alpines des régions ensoleillées concordent, pour la forme et la struc- ture du mésophylle, avec les feuilles qui, dans les plaines, croissent dans les régions ombreuses. La seule différence réside dans le développement con- sidérable de la cuticule chez les plantes alpines, tandis que, comme on le sait, la cuticule des or- ganes vivant à l'ombre est ordinairement très mince. Les expériences entreprises par M. Leist pour expliquer ces modifications, rapprochées des ob- servalions de MM. Stahl, Haberiandt, Vesque, Eberdt, démontrent que l'allongement des cellules du parenchyme en palissade, la multiplication de ses assises, sont provoqués par une transpiration très active ; au contraire, l’amoindrissement de la transpiration détermine la réduction des assises ainsi que le raccourcissement des cellules de ce même parenchyme. L'auteur montre alors, d’après les conditions météorologiques réalisées dans les stations alpines pendant la bonne saison, que les feuilles doivent leur structure spéciale à la diminu- tion de la transpiration et à la grande humidité du sol. M. Leist n’a rien dit de l'assimilation. Peut-être pourrait-on remarquer qu’en raison de la réduction des entrenœuds, les feuilles, presque toujours éta- lées sur le sol, ne peuvent pas présenter les mou- vements qui permettent aux plantes des plaines de ! Leisr K. Ucber der Einfluss der alpinen Standortes auf die Ausbildung der Laubblätter. Separat abdruck aus den Mittheilungen der naturforschenden Gesellschaft, von Bern 1889. REVUE GÉNÉRALE, 1891. recevoir les radiations sous une incidence presque normale ; demeurant immobiles, elles sont donc forcées d'utiliser les radiations sous les incidences les plus variées et la forme polyédrique des cel- lules du mésophylle parait mieux adaptée à ces conditions spéciales. Il serait intéressant de véri- fier cette hypothèse, Quoi qu'il en soit, les recherches sur la culture et la comparaison d'espèces semblables végétant dans des condilions différentes, en nous faisant con- naitre la limite des varialions anatomiques et morphologiques des plantes cultivées, nous per- mettront de mieux préciser les caractères spéci- fiques des formes diverses, et de réduire ainsi le nombre des espèces que certains botanistes ont contribué à exagérer. L'anatomie topographique a pris depuis quel- que temps une importance considérable dans la botanique systématique. Dans les cas très nombreux où la morphologie externe est insuffisante à distinguer les formes vé- gétales, l'emploi judicieux des caractères anato- miques apporte un secours que les botanistes des- cripteurs ont trop longtemps dédaigné. Nous devons signaler les observations de M. Van Tieghem sur la classification des Diptérocarpées, des Primula- cées et plus récemment les communications rela- lives aux Mélastomacées ! et aux Podocarpées ?, ainsi que celles de M. Vesque sur les Clusiacées ?. Les applications de l’anatomie à la classification exigent des connaissances très complètes et une subordination très judicieuse des caractères anato- miques. En effet, parmi ceux-ci, les uns sont sous la dépendance directe des conditions de milieu et varient plus ou moins rapidement avec elles, tandis que d’autres, héréditaires, possèdent une grande constance. À cet égard les observations de M. Van Tieghem sur les canaux sécréteurs ont une grande importance : l'existence ou l'absence deces canaux, leur distribution topographique, constituent les meilleurs caractères que l’anatomie puisse fournir pour la caractéristique des genres et des familles, M. Van Tieghem en a fait une application très remarquable à l'étude de la famille des Diptéro- carpées et tout récemment à l'étude des Podocar- pées. Si quelquefois l'anatomie ne fournit, au point de vue de la classification, que des caractères néga- tifs, comme M. Thouvenin vient de le constater #, L Van TieGnem Ph. Sur la classification des Mélastoma- céces. Bull. Soc. Bot. de France, mars 1891. ? Van Tiecnem Ph. Sur les Podocarpées. Bull. Soc. Bol. France, avrii 1891. 3 Vesque. Comples-Rendus, mars 1890. 1 Tuouvexix M. Sur la structure des Saxifragacées, Ann. Se, nal. Bol., t. XIL, 1890. g"* 258 L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE cela tient sans aucun doute à l’'homogénéité des groupes étudiés. Par contre, dans certains cas où la morphologie externe est insuffisante à réaliser la distinction des espèces, l'anatomie seule peul nous permettre d'établir nettement la spéeification; c'est ce que M. Sauvageau a montré par une étude très complète de la feuille de certaines Phanéro- games marines (Cymodocea, Zostera, Posidonia *. Hydrocharidées marines *). Ces plantes ne fructi- fient pas toujours et les échantillons d’herbier, réduits souvent à l'appareil végétatif, sont telle- ment semblables par le port et les dimensions que la spécification est impossible. D'après les obser- vations de M. Sauvageau, la seelion d’un fragment de feuille permet, dans la plupart des cas, de re- trouver le nom spécifique des échantillons incom- plets. Il Parmi les substances produites par l’activité du protoplasme des cellules libres ou agrégées en tissus, les diastases, dont l'importance est si grande dans les phénomènes de nutrition, attirent depuis longtemps l'attention. L'ignorance dans laquelle nous sommes de la composition de cescorps, la dif- ficulté de les isoler, l'impossibilité de reconnaitre souvent leur présence dans les tissus vivants, sont autant de raisons qui, semble-t-il, devraient im- poser aux naturalistes la plus grande réserve. Néanmoins la liste de ces corps s’accroit tous les jours, bien que beaucoup d'entre eux n'aient qu'une existence purement nominale. Aussi peut-on se féliciter de la publication des travaux destinés à caractériser ces substances au sein des tissus vivants. On sait que les graines de l’Amandier, les feuilles du Laurier-Cerise peuvent produire de l’a- cide cyanhydrique qui résulte de l’action de l'é- mulsine où synaptase sur l'amygaaline en présence de l’eau. Les matériaux nécessaires à cette réaction depuis longtemps déterminée par les chimistes, existent dans les tissus des plantes; mais comme l'acide cyanhydrique n'est jamais produit dans la plante vivante, on a conclu que l’émulsine et l’amyg- daline sont localisées dans des régions différentes et ne peuvent ainsi réagir l’une sur l’autre; mais leur lieu d'élection est resté longtemps inconnu. MM. Thomé, Porte et surtout M. Johannsen ont cherché à résoudre cette question. Ce dernier au- teur #, vérifiant les idées de M. Thomé, a montré 1 SauvaGEau. C. Observations sur la structure des feuilles des plantes aquatiques. Zostera, Cymodocea et Posidonia. Journal de Botanique, 4° année , 1890, p. A et suiv, 2 SauvaGEAu C. Sur la feuille des Hydrocharidées marines, Journal de Bot., 4° année, 1890, p. 269. 3 JoHaNNseN, W. Sur la localisation de l'émulsine dans les amandes. Ann. Sc. nat. Bot., Te série, bVI, 1887. que dans les amandes, l’émulsine est renfermée dans les faisceaux, tandis que l’amygdaline se rencontre exclusivement dans le parenchyme. M. Guignard ! vient de compléter les résultats. de M. Johannsen et les a étendus aux feuilles du Laurier-Cerise. S'il n’a pas élé possible de trouver un réaclif capable de déceler l’amygdaline au mi- lieu des tissus, par contre la localisation de lémul- sine a pu être établie par l’auteur avec une grande netteté. Le réactif de Millon fournit les meilleurs résultats pour ces études microchimiques ; le mé- lange d’orcine et d'acide chlorhydrique qui colore l'émulsine en violet, à la température d'ébullition, donne des résultats moins nets, à cause de la dif- fusion de la coloration violette ; par contre le mé- lange de Schænbein (teinture de Gayac et sulfate de cuivre) est plus avantageux. A l’aide de ces divers réactifs, M.Guignard a pu constater que, dans les feuilles du Laurier-Cerise, l’émulsine est con- tenue dans des cellules spéciales d'assez grandes dimensions, formant l’endoderme qui entoure les faisceaux ; elle peut aussi exister dans les cellules du péricycle, quand celles-ci nesont pas sclérifiées;les jeunes rameaux offrent la même localisation, quoi- que l’endoderme y soit moins nettement délimité. Dans les amandes amères. l’'émulsine existe dansle péricycle des faisceaux; mais, tandis que dans la partie axile de l'embryon, le péricyele seul a mani- festé la présence de cette substance, dans les faisceaux cotylédonaires, l'émulsine envahit aussi en petite quantité les cellules de l'endoderme. Il y a donc entre la feuille du Laurier-Cerise et les Amandes une différence d'élection, peu importante d’ailleurs, due seulement à la sclérification du pé- ricycle. Toutes les observations microchimiques ont été vérifiées par l’auteur en isolant des portions de tissus et en les broyant dans une solution d’'amyg- daline à 4 0/0. Si le tissu employé appartient à l'endoderme des feuilles du Laurier-Cerise ou à la région péricyclique des faisceaux cotylédonaires des Amandes,on perçoit distinctement,en chauffant, l'odeur d'acide cyanhydrique ; si l’on emploie au contraire le parenchyme ou la partie ligneuse des faisceaux, l'acide cyanhydrique n'apparait pas. M. Guignard ? a réussi également à localiser les principes qui fournissent les essences sulfu- rées chez les Crucifères. On sait que la graine de moutarde doit ses propriétés à la présence de deux substances : la myrosine et la sinigrine où my- ronate de potassium qui, placées dans l’eau froide ou 1 Gurexar» L. Sur la localisation des principes de lacide - cyanhydrique. Journal de Botanique, 1890, p. 5 et suiv. 2 L.Gurenarp. Recherches sur la localisation des principes actifs des Crucifères. Journal de Botanique, 4 année 1890, page 385. éteint us tds L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 259 mieux tiède, réagissent l’une sur l’autre ; le myro- nate de potassium est décomposé en donnant de l'essence de moutarde (sulfocyanate d’allyle), du glucose et du sulfate acide de potassium. Chez les autres Crucifères, la myrosine existe aussi, mais elle réagit sur des substances différentes de la sinigrine,en fournissant d’autres essences sulfurées. La localisation des principes destinés à former l'essence de moutarde n’était pas connue ; on soup- connait seulement, sans en avoir la preuve, qu'ils devaient exister dans des cellules différentes. La méthode employée pour étudier ces subs- | lances est celle que nous avons indiquée plus haut. En ce qui concerne la myrosine, l’auteur aban- donne l’emploi du réactif de Millon, car il colore aussi les matières azotées, quoique d'une manière un peu différente; M. Guignard préfère employer l'acide chlorhydrique, qui seul, sans adjonction d’orcine, communique à la myrosine une belle coloration violette dès qu'on chauffe légèrement. Pour déceler la présence du myronate de potas- sium, M. Guignard emploie deux procédés. Le pre- mier consiste à transformer le myronate de potas- sium en essence de moutarde et à colorer l'essence produite au moyen de la teinture d’orcanette; mais, comme celte teinture se fixe aussi sur les corps gras, il faut, au préalable, enlever ceux-ci au moyen de l’éther anhydre. Le second procédé consiste à traiter les tissus par l'acide tartrique en solution alcoolique; s'ils renferment du myronale de po- tassium, la potasse est précipitée à l’état de bilar- trale cristallisé en tétraèdres ou en prismes du système orthorhombique, facilement reconnais- sables au microscope. Comme l'alcool détermine en même temps la précipitation des sels minéraux ou organiques, on doit toujours faire deux essais comparatifs entre les deux moiliés d’une même coupe, dont l’une a été débarrassée du myronate de potassium par la macération dans l'alcool fort. Les résultats de ces diverses réactions micro- chimiques ont été vérifiés en isolant les cellules à myrosine ou les cellules à myronate de potas- sium, autant que cela était possible, et en produi- sant directement l'essence sulfurée, par l'immersion des fragments de tissus dans une solution de my- ronale de potassium ou de myrosine. La distribution des cellules à myrosine dans les tissus desCrucifères,diffère un peu de la localisation de l’émulsine dans les Amygdalées : tandis que cette dernière substance se rencontre exclusivement dans le péricycle ou l'endoderme des faisceaux libéro- ligneux, la myrosine existe non seulement dans le péricycle, son lieu d'élection habituel, mais on la trouve encore dans le parenchyme foliaire, | dans le parenchyme cortical et médullaire de la tige, dans le parenchyme cortical et libérien de la racine. C’est toujours dans la graine que les cellules à myrosine sont les plus nombreuses; là elles existent ordinairement dans l’embryon, surtout dans les cotylédons où elles offrent la même dis- tribution que dans la feuille; cependant chez les Lunuwria, Matthiola, etc., la myrosine est presque exclusivement localisée dans le tégument, tandis que le myronate de potassium existe dans le pa- renchyme des tissus de l'enveloppe. Quelques Cru- cifères sont dépourvues de ces substances; tel est par exemple lArabis alpina ; M. Guignard a cons- taté que, dans ces conditions, le ferment et le glucoside font également défaut. La même où la myrosine est en faible proportion, elle suffit ce- pendant à opérer le dédoublement dela totalité du myronate de potassium; en effet, comme loutes les diastases, la myrosine peut décomposer un cer- tain nombre de fois son poids de myronate. Le rôle de ces substances dans la nutrition géné- rale de ia plante est encore problématique. Sont-ce des réserves destinées aux premiers développe- ments de l'embryon? Sont-elles destinées à pro- téger les plantes qui les contiennent ? Ce sont là des hypothèses qu'on ne saurait discuter en l’ab- sence de recherches spéciales sur celte question. Quoi qu'il en soit, les observations de M. Gui- gnard fournissent des indications précises sur la méthode générale à suivre dans l'étude si com- plexe des diastases. Dans une communication intéressante sur la graine des Graminées M. Haberlandt ! n’a employé pour caractériser l’amylase renfermée dans les tis- sus, que sa réaction spécifique sur l’amidon. On sait que dans les graines des Graminées, l’albu- men est entouré d’une couche de tissu formé de cellules à contenu plasmique, la couche protéique « Xleberschicht», dont le rôle estencore peu connu. Est-ce un tissu à réserves nutritives, comme on l’a parfois désigné (Speichergewebe)? Est-ce, comme le croit M. Tangl, une couche destinée à distribuer la diastase fabriquée par le scutellum? Les recher- ches de M. Haberlandt démontrent que cette couche ne renferme pas de réserves nutritives, car si l’on examine les graines à divers stades de la germina- tion, le contenu des cellules qui la composent est encore intact, alors que les couches amylacées voi- sines sont déjà digérées. D'autre part, en isolant des fragments de tissus de la graine auxquels cette 1 HagerLanpr G. Die Kleberschicht des Grasendosperms als Diastase ausscheidender Drüsengewebe. Berichte. d. Deutsch Bot, Gesells., 1890, p. 40-48. 260 J. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE EE couche était adhérente, et dans une région éloi- gnée de l'embryon, l'auteur a constaté que ces fragments provoquent une dissolution rapide des grains d’amidon. La couche protéique qui enve- loppe l'albumen, est capable de sécréter la diastase, malgré l'opinion de Sachs qui localisait cette production dans l'embryon seul. Il existerait donc, dansles graines des Graminées une couche périphérique de cellules diastäsigènes, et d'après M. Haberlandt, elle se rencontrerait aussi dans le Sarrasin et vraisemblablement chez beaucoup d’autres graines où la couche protéique a été signalée et désignée sous des noms différents (Stickstoffschicht Noble ; Pseudoproteinschicht Harz; Piasmaschicht ete.). Il serait intéressant de vérifier et d'étendre les vues de M. Haberlandt par la mé- thode d'investigation de M. Guignard. Parmi les produits solubles formés par les bac- téries et auxquels ces algues doivent leurs pro- priétés toxiques ou leur activité chimique, les diastases seules nous intéressent ici parce qu'elles nous montrent que l’action de ces organismes dans les tissus, est du même ordre que celle des cellules diastasiques qu'on rencontre aussi bien chez les végétaux que chez les animaux. MM. Brunton el Macfadyen ! viennent augmenter nos connaissances sur ce sujet, en étudiant les propriétés diastasiques d'un certain nombre de bactéries (Spirillum de Koch, Spirillum de Vinckler, Micrococcus de la pu- tréfaction, Bacille de la teigne, ete.). Les liquides de culture obtenus avec ces diverses bactéries de- viennent inactifs après avoir été portés à la tem- perature de 400°, parce que les bactéries sont Luées, et que les diastases, si elles existent, sont décom- posées; mais si l'on filtre les liquides de culture et qu'on les soumette en même temps à la tempéra- ture de 60° à 75°, les bactéries sont encore tuées, mais les liquides de culture filtrés ont conservé la propriété de liquéfier la gélatine : c'est donc à une diastase sécrétée par les organismes étudiés qu'est due la liquéfaction de la gélatine servant de terrain de culture. Il est probable que les produits de sécrétion fournis par ces algues sont multiples, car elles li- quéfient et peptonisent la fibrine dans un milieu légèrement alcalinisé ; en même temps, elles trans- forment l’amidon soit en maltose, soit en dextrine. D’après les auteurs, les conditions d'activité de ces diastases les rapprochent des produits de sécrétion du pancréas. Ilya quelques années, M. Wiesner annonçail RARES D ER RE A 1Brunron T. L. et Macranyen A. The ferment action of Bacterioæ. Proceedings of the Royal Society of London, Y. XLVI, p. 542. l'existence, dans les gommes, d’un ferment qui se- rait capable de transformer la cellulose en gomme ou en mucilage et dont l'existence dans les tissus serait nécessairement antérieure à la formation de ces produits ; la présence de ce ferment serait dé- montrée par la coloration violette que donnent les gommes quand on les chauffe avec un mélange d’orcine et d'acide chlorhydrique. M. Reinitzer !,en étudiant cette question, vient de constater que le réactif proposé par M. Wiesner ne suflit pas pour affirmer la présence d’un ferment dans les subs- tances examinées, car une coloration d’un rouge plus ou moins violacé, due probablement à la forma- tion du furfurol, est obtenue aussi quand on chauffe les hydrates de carbone, tels que la dextrine,la glu- cose et surtout la lactose avec le même réactif. Pour M. Guignard, cette coloration serait due à la phloroglucine. D'ailleurs, M. Keiïnitzer parait avoir trouvé dans la gomme arabique un ferment dont l'activité n’est pas celle que lui attribue M. Wies- ner, Car s’il transforme l’amidon en dextrine eten sucre, il est incapable de provoquer la transfor- malion de la cellulose en mucilage. La formation des gommes et des mucilages est une des questions les plus obscures dela physiologie végétale. Cela lient sans doute aux idées fausses qui règnent sur la constitution chimique dela mem- brane, malgré les travaux de Mulder, Harting,Payen, Frémy, publiés il y a plus de quarante ans. J'ai montré dans plusieurs communications ? que dans tous les tissus jeunes et dans les tissus adultes qui n'ont pas été modifiés par la lignification ou la cuti- nisalion, la membrane renferme toujours des com- posés pectiques purs ou associés à la cellulose. Ces composés, représentés par la pectose et l'acide pec- tique, peuvent éprouver une série de modifications dans lesquelles ils offrent toute la série des états physiques intermédiaires entre la solubilité com- plète et l'insolubilité absolue; ils jouent alors un rôle très important dans la gélification des mem- branes. On sait, d'autre part, que les gommes et un certain nombre de mucilages sont rattachés étroitement, par leurs propriétés physiques et chimiques, aux composés pecliques, et que l'acide métapectique notamment est très difficile à distin- guer de l'acide arabique. Il faut donc chercher dans les modifications des composés pecliques de la membrane, comme je me propose de le montrer prochainement, l'une des causes de la dégénéres- cence gommeuse des tissus et de la gélification, et si la cellulose se rencontre dans ces produits, 1 Rerrzer Frid. Ueber die wahre natar des Gummifer- ments.Zeitsch. f. physiolog. Chemie, Bd. XIV, p. 453. 2? L. Mann. Sur la présence des composés pectiques dans les végétaux. Comptes rendus, octobre 1889. Sur la substance intercellulaire. Comptes rendus, février 1890. bic æ nl L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 261 c’est à l'état de substance étrangère, au même litre que les substances minérales qui s’y trou- vent mélangées. Vouloir, comme on le dit encore, faire de la cellulose le point de départ des trans- formations chimiques de la membrane, c'est rétro- grader de cinquante ans, avant Mulder et Harting, car ces savants ont exprimé sur la nature de la membrane, des idées très nettes qu'on est surpris de voir aujourd'hui si profondément ignorées. L'une des diastases les plus anciennement con- nues est l'anylase, qui transforme l’amidon en mal- tose. Le mode d'action de cette diastase sur les grains d’amidon, pendant la nutrition des plantes aux dépens des réserves, est exposé depuis long- temps, d’après les observations de Nägeli et de Sachs. M. Krabbe ‘est amené, par l'étude complète qu'il vient de publier, à des conclusions différentes de celles qu'on accepte aujourd'hui. La dissolution des grains d’amidon, telle qu'on l'observe au microscope, se présente sous des as- pects différents. Dans le grain de Blé, la diastase agit inégalement à la surface des grains : certaines régions demeurent intactes ou peu altérées, tandis que d’autres plus fortement atlaquées montrent des trous cylindriques ou en forme de cratères, qui s’approfondissent peu à peu, et forment des canaux très fins, plus ou moins ramifiés, qui se croisent en tous sens dans la masse du grain, et déterminent bientôt sa rupture en un certain nombre de frag- ments irréguliers, qui se dissolvent à leur tour. Dans d’autres plantes, écailles du bulbe de Jacinthe, graines de Légumineuses, la dissolulion se produit dans des cavités qui s'agrandissent peu à peu, de manière que le grain d’amidon se trouve réduit à une mince membrane, entourant une cavité oceu- pant toute la masse primitive; mais, même dans ce cas, on aperçoit toujours la trace des canaux qui ont permis à la diastase de pénétrer dans l’inté- rieur du grain. Chez d’autres plantes enfin et en plus petit nombre, la dissolution a lieu régulière- ment par toute la surface extérieure, et le grain conserve à peu près sa formeen diminuant peu à peu de volume, sans offrir les trous ou les cratères que présentent le Maïs, la Moschatelline, le Col- chique, elc. De ces diverses observations, M. Krabbe conclut que la diastase agit toujours par l'extérieur sans imbiber la substance du grain, comme onle croyait avant lui. Il s'est assuré, pour rendre la démons- tralion plus complète, de la nature colloïdale de la diastase : en effet cette substance en dissolution | Kragge. Untersuchungen über das Diastaseferment unter specieller Berücksichtigung seiner Wirkung auf Stärke- kürner innerhalb der Pflanze. Pringsh.Jahrb. Bd. XXI, 1890, p. 520, filtre très lentement à travers le papier parchemin ; elle ne filtre pas à travers la porcelaine dégourdie ou le bois de sapin du Nord, à moips qu’on exerce sur le liquide une pression assez considérable, Il est évident qu'une substance qui ne peut traverser les pores encore volumineux de la porcelaine dé- gourdie, ne saurait pénétrer à travers les inters- tices des micelles d’un grain d’amidon. La dissolution des grains d’amidon est donc, pour M. Krabbe, un phénomène purement physique comparable à la dissolution des cristaux; celle-ci offre en effet Lous les modes que l’auteur a décrit plus haut: tantôt elle est régulière, tantôt au contraire, la surface des cristaux se creuse de cavités cylindriques ou cratériformes plus ou moins régulières, qui présentent la plus grande ressemblance avec les phénomènes de corrosion des grains d’amidon des Graminées. Mais on n'explique pas plus les irrégularités de l’action diastasique que les corrosions produites par les dissolvants sur les cristaux. En aucun cas, M. Krabbe n’a oblenu, à l’aide des solutions diastasiques, des squelettes de granu- lose comparables à ceux que présentent les acides, car ceux-ci, en imbibant la masse totale du grain, dissolvent complètement l'amylose avant la gra- nulose, L'auteur a enfin comparé l’action de la diastase à celle des Bactéries qui, pour une certaine École, jouent un rôle important dans les phénoménes digestifs. D'après ses observations, les Bactéries sont incapables de provoquer une dissolution rapide; d’ailleurs leur activité fût-elle démontrée, il faudrait établir qu’elle n’est pas due à une dias- lase fabriquée par elles-mêmes et dont l'action, dans ce cas, serait comparable à celle de la dias- tase des cellules animales ou végétales. La liste des matériaux de réserve utilisés par les plantes aux diverses périodes de la végétation s’accroit de jour en jour, La Dulcite qui se trouve chez le Fusain du Japon et chez un grand nombre de Célastracées parait avoir, d’après les observations de M. Borodin !, le rôle d'une réserve transiloire formée pendant la période de végétation active. On peut la re- connaitre en traitant les coupes par l'alcool ; elle se présente sous l'aspect de cristaux analogues à ceux du nitre ou de l’asparagine, mais on peut les distinguer de ces substances par leur insolubilité dans une solution saturée de Dulcite et par leur transformation, à la température de 190°, en une 1 BoroniN. Ueber die mikrochemische Nachweisung und die Verbreitung des Dulcits im Pflanzenreich. Revue des scien. nal. de St-Pétersbourg, 1890. 262 L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE masse brune. La Dulcite se rencontre dans tous les organes, excepté dans les graines mûres, chez les Scrofularinées et les Célastracées, où l’on peut toujours la reconnaitre, même sur des échantil- lons d’herbier. L'auteur ne se prononce pas sur son mode de formation et son ulilisation ultérieure; il se borne à constater sa disparition des feuilles du Fusain avant la chute. On sait combien la constitution et les propriétés de la membrane dans les tissus des graines sont différentes de celles des tissus dans les organes végétatifs adultes. Après le travail important de M. Reess surla cellulose de réserve, signalé l’an der- nier dans la Revue, nous devons aujourd'hui consa- crer quelques lignes aux observations étendues de M. Nadelmann'sur les albumens mucilagineux des Légumineuses. L'auteur consacre d'abord quelques pages à l'étude critique des mucilages, de la cellu- lose de réserve et de l’amyloïde, qui se rencontrent dans un grand nombre de graines. Les réactifs em- ployés pour caractériser ces substances sont peu précis, notamment en ce qui concerne les muci- lages, chez lesquels M. Nadelmann n'a pas retrouvé les réaclions recommandées par MM. Barcianu el Szyslowicz. Aussi l’auteur adopte-il la classifica- tion, purement artificielle, de M. Tschirch, des mu- cilages, en mucilages vrais et mucilages cellulosi- ques; les premiers, jaunissant en présence de l’iode et de l'acide sulfurique, les seconds manifestant la coloration bleue de la cellulose. Les graines de Légumineuses ne présentent, d'après M. Nadel- mann, que des mucilages vrais qui forment contre la membrane primaire collulosique, des revête- | ments plus ou moins épais que le chlorure de zinc iodé, ou la solution iodo-iodurée ne teignent pas en bleu. Lorsque l’on examine les graines présentant cet albumen, à divers stades de germination, on constate que les épaississements mucilagineux dis- paraissent peu à peu de manière à réduire le | parenchyme, au réseau formé par les membranes primaires; ces dépôts de mucilage sont donc des | matériaux de réserve suppléant l’amyloïde ou la cellulose de réserve. Le développement de quelques-unes de ces réserves a lieu, d’après l’auteur, par un méca- | nisme bien singulier. Dans l’Zndigofera hirsuta par | exemple, les jeunes cellules renferment, au sein du protoplasma granuleux,de nombreuses sphères de mucilage qui se fusionnent peu à peu en une seule ; celle-ci est ensuite comprimée par le proto- plasme contre la membrane primaire, puis la méta- morphose du contenu de la vésicule en mucilage se produit sous forme d’épaississement secondaire de la membrane cellulosique. On peut se demander, puisque l’auteur n’a d’autres réactifs que les liqueurs iodées, comment il a pu distinguer les sphérules mucilagineuses des masses protoplas- miques qui les entourent, et comment il peut affirmer que les globules renfermés dans le pro- toplasme, sont de même nature que les épaissis- sements qui, plus tard, tapissent la membrane cellulosique. Le mode de formation de ces épais- sissement exigeait, par sa singularité même, des développements que l’auteur n’a pas cru pouvoir donner. Nous ne pouvons donc que faire des réserves complètes à ce sujet. III La réalisation des cultures pures d'organismes inférieurs (Levures, Moisissures, Bactéries), a permis d'aborder l’étude d'un certain nombre de questions de physiologie générale. Dans cet ordre d'idées, M. Elfving vient de publier un mémoire remarquable sur l'influence exercée par les radia- tions sur la nutrition et la croissance de quelques Moisissures (Aspergillus, Penicillium) \. Dans les recherches que nous avons publiées, M. Bonnier el moi, en 1884, nous avons montré que, sous l’action des radialions, la série des phé- nomènes d’oxydation qui se traduisent à l’exté- rieur par les échanges gazeux respiratoires, est notablement affaiblie.Ces résultats ont été obtenus non seulement avec des Champignons, qui nous ont servi d’abord pour nos recherches, mais avec un certain nombre de Phanérogames sans chloro- phylle. M. Elfving a recherché si les radiations influent aussi sur les phénomènes de synthèse qui précèdent et favorisent la croissance. Dans ce but il a cultivé le Penicillium glaucum, le Briarea, ele. Dans des liquides de culture renfermant quelques sels minéraux (nitrate d’ammoniaque, nitrate de potasse, sulfate de magnésie, phosphate de potasse et chlorure de calcium), additionnés de substances organiques variées : des substances hydrocarbo- nées pures (dextrose, mannite, acide malique), des substances azotées (peptone, asparagine) ou un mélange de dextrose et de substances azotées. Les liquides de culture étant stérilisés, ainsi que les ustensiles qui servent à l’ensemencement des spores, on sème la même quantité de spores dans les divers milieux nutritifs, en les acidifiant avec un peu d'acide phosphorique pour empêcher le dé- veloppement des Bactéries. 1) NapezMaNx. Ueber die Schleimendosperme der Legu- minosen. Pringsh. Jahrb., 1890, t. XXI, p. 609. 1 ELrvixG Fred. Studien über die Einwirkung des Lichtes auf die Pilze, Helsingfors, 1890, L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 263 Les séries d'expériences, très nombreuses, sont disposées de manière que chaque milieu nutritif occupe deux vases : l’un exposé à la lumière, l’autre à l'obscurité dans les mêmes conditions de tempé- rature {optimum de 25° environ). Au bout d’un cer- tain temps on extrait les Lissus développés et on les pèse après dessiccation. Dans presque toutes les séries d'expériences, le résultat est à peu près constant : la formation du mycélium est plus faible dans les cultures éclairées que dans les cultures maintenues à l’obs- eurité; mais les différences varient avec la nature des matériaux de nutrition. Dans les cultures réa- lisées avec la dextrose, la mannite, l'acide mali- que, le poids de matière sèche formée à l’obscu- rité est au moins double, parfois quadruple ou sextuple du poids des tissus formés dans les cultures éclairées. Au contraire avec la peptone ou l’aspa- ragine pures ou mélangées de dextrose, le poids des matières sèches est à peine plus grand à l'obscurité qu’à la lumière. Les phénomènes de synthèse organique sont donc affaiblis sous l'influence des radiations. Ce résultal concorde avec les observations bien con- nues, relatives au retard de croissance observé chez les Phanérogames éclairées. Les diverses radiations influent, d’ailleurs, d’une manière inégale sur les phénomènes de synthèse. M. Elfving s'en est assuré en exposant des cultures sous des cloches doubles renfermant des liquides destinés à absorber certaines radiations. Le poids de substance formée est plus faible avec les radia- tions les moins réfrangibles (lumière tamisée avec une solution de bichromate de potasse); au con- traire avec les radiations les plus réfrangibles (lumière tamisée par une solution ammoniacale d'oxyde de cuivre), la croissance s’accomplit pres- que aussi énergiquement qu'à l'obscurité. L'action des radiations ultraviolettes est parti- culièrement remarquable, car elle est comparable à celle de la moitié la moins réfrangible du spectre; cette action se manifeste nettement en tamisant la lumière avec une solution de sulfate de quinine. On pourra se rendre compte de ces influences diverses par le tableau suivant que nous emprun- tons au travail de M. Elfving : POIDS DE LA RÉCOLTE EN GRAMMES Briarea Obseurité Eau Bichromate Solution Sulfate 2 0/0 dextrose de ammonicale de potasse deCuO quinine 7-11 juin 1890 0,0669 0,0232 0,0354 O0,0485 0,0343 11-16 juin 1890 0,0585 0,0350 0,0%42 0,0582 0,0381 Les matériaux qui constituent le mycélium sont de nature diverse : on y trouve des matières azo- tées qui forment le protoplasme, des composés hydrocarbonés qui forment la membrane, des pro- duits solubles dans l'eau ou dans lalcool et enfin des cendres.La proportion de ces corps reste-t-elle la même dans toutes les cultures? D’après les observations de M. Elfving, la proportion relalive de malières azotées est un peu plus grande à la lumière qu'à l'obscurité, tandis que l'inverse a lieu pour les corps cellulosiques. Par conséquent, la composition centésimale des récoltes éclairées ré- vèle dans celles-ci plus de substances azotées et moins de cellulose que dans les cultures mainte- nues à l’obscurité. La diminution de croissance que provoquent les radiations, quoique répartie sur tous les matériaux des plantes cultivées, reten- tit donc plus fortement sur la formation des corps cellulosiques. Y a-t-ilindépendance dans ces actions mulliples que les radiations exercent sur la forma- tion des diverses substances qui composent les plantes? C’est ce que les recherches de M. Elfving ne nous montrent pas pour l’inslant,. Quoi qu'il en soit, cette première partie des re- cherches de l’auteur, tout à fait originale, ouvre une voie nouvelle aux physiologistes, et, à en juger par les résultats que nous venons de rappeler, les recherches tentées dans cette direction seront fé- condes. M. Elfving étudie ensuite l'influence de la lu- mière sur la respiration des Moisissures, en em- ployant les méthodes que nous avons fail con- naître, M. Bonnier et moi, il ÿ a quelques années. La première série de recherches, réalisée simple- ment en dosant l'acide carbonique à l’aide des liqueurs titrées, a donné des résultats qui pa- raissent en contradiction avec les nôtres. En effet, dans les cultures de Briarea, de Penicillium qlau- cum, d'Aspergillus riger, de Mucor racemosus, ete., le dégagement d'acide carbonique demeure sen- siblement constant; quelles que soient les varia- tions de l'éclairement, les différences observées, toujours très faibles, se produisent tantôt dans un sens, tantôt en sens opposé. Si l’on remarque que ce résultat, en contradiction formelle avec ceux que nous avons publiés, a été obtenu par les mèmes méthodes, on doit rechercher la cause de cette contradiction dans les conditions de végé- tation. Les moisissures étudiées par l’auteur avaient mûri leurs spores, el par suite, la croissance était achevée, tandis que les échantillons qui ont servi dans nos recherches étaient des plantes ou des parties de plantes en voie de croissance. M. Elfving a montré que c’élait là l'unique cause de la discor- dance entre ses résultats et les nôtres, car en recommencantune deuxième série d'expériences de culture avec des Moisissures en voie de croissance, il a vérifié exactement nos résultals et constaté que les radiations provoquent un affaiblissement 26% L. MANGIN. -- REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE des échanges gazeux. Les chiffres obtenus mon- trent une corrélation très étroite entre l’affaiblis- sement du phénomène respiratoire et la diminu- tion du poids de substance sèche observés dans les cultures exposées à la lumière. Ainsi, les cul- tures des milieux nutritifs formés de dextrose, de mannite, d'acide malique sont celles qui montrent les différences les plus grandes dans la proportion de gaz échangés à la lumière ou à l’obscurité, tandis que dans les cultures contenant de la pep- tone ou de l’asparagine, l'intensité des échanges gazeux est à peine modifiée. Les conditions dans lesquelles s'exerce l’action des radiations, qui n'avaient pas été précisées dans nos recherches, se trouvent ainsi nettement éta- blies par le beau travail de M. Elfving. En somme, dans les Moisissures en voie de crois- sance, les radiatiations exercent une influence modératrice sur les échanges gazeux, et cette action marche parallèlement avec la diminution des produits de synthèse organique, et par suite, de la croissance; au contraire, dans les organes dont la croissance est achevée, chez lesquels d'’ail- leurs les échanges gazeux sont faibles, l'influence des radiations est très faible, pour ne pas dire nulle. L'auteur nous donne ensuite une série d’obser- vations très intéressantes sur le polymorphisme des moisissures qu'il a étudiées, et notamment sur l’Aspergillus glaucus. Cette moisissure se comporte, en effet, de manières très différentes sous l’in- fluence de la lumière. Sans action sur les cultures lorsqu'elles ont une faible intensité, les radiations, sielles sont intenses, tuent les spores aux premiers stades de la germination, tandis que les radiations d'intensité moyenne suspendent la germination sans tuer les spores. Si l’on examine les cultures soumises à un éclairage moyen, on y observe un développement particulier:les filaments mycéliens, encore vivants, se cloisonnent et forment des cel- lules arrondies qui bourgeonnent comme des cel- lules de levure. M. Elfving a isolé et cultivé, à l'état de pureté, trois formes de levures qu'il désigne sous les noms de Levure À, Levure B et Levure C. La levure À, cultivée dans certains milieux, a fourni un mycélium sur lequel se sont développés des organes conidifères semblables à ceux du Penicillium glaucum; la forme ainsi obtenue et, à diverses reprises, dans des cultures pures, s'est montrée identique à elle-même; l’auteur la dé- signe sous le nom de Penicillium Eurotium. M. Elf- ving ajoute ainsi à l'histoire déjà si curieuse de l’Zurotium herbarium, un chapitre très intéressant et apporte une nouvelle preuve de l’analogie des Levures et des Moisissures, soupçonnée depuis longtemps. L'Æurotium herbarium présente donc, suivant les variations du milieu ambiant, des formes de déve- loppement diverses : connu d’abord sous le nom d'Aspergillus glaucus par sa forme conidienne ha- bituelle, il peut former, dans certaines conditions, la forme ascosporée Æurotium, et enfin, sous l’in- fluence des radiations de moyenne intensité, cette espèce donne naissance à diverses levûres dont l’une reproduit une forme considérée jusqu'ici comme spécifiquement distinete : le Penicillium Eurotium. Les autres formes d’Aspergillus sont-elles ainsi reliées aux Penicillium? C'est ce que nous ne sau- rions dire quant à présent, car la question néces- site de nouvelles recherches. La levure B liquéfie la gélatine, comme d’ailleurs la levure A, mais elle n’a pas donné jusqu'ici la forme Penicillium; enfin la levure C, assez difficile à distinguer de la précédente, en diffère au point de vue physiologique parce qu’elle ne liquéfie pas la gélatine, même après plusieurs semaines. Le Penicillium glaucum, dont on vient de voir les relations avec l'Aspergillus glaucus, est formé d'in- dividus très différents, que M. Elfving ramène à trois formes. Sans se prononcer sur la valeur spé- cifique de ces formes, il les désigne sous les noms de Penicillium T, IT et TITI. Les différences qu'il ob- serve entre elles sont du même ordre que celles que M. Hansen a signalées entre les formes du Sac- charomyces Pastorianus, c'est-à-dire sont fondées sur la dimension des spores, la différence d'influence de température, l’activité fermentescible; à ce der- nier point de vue, M. Elfving signale les faits sui- vants : Le Penicillium glaucum I est toujours aéro- bie, et par conséquent ne peut dédoubler le sucre en alcool et en acide carbonique ; au contraire, le Penicillium IT et le Penicillium IIT peuvent être anaérobies, el par suite, provoquent la fermenta- tion alcoolique, mais la quantité d'alcool formé est toujours plus grande avec la forme III qu'avec la forme II. On conçoit la difficulté d'identifier les formes dé- crites_-par M. Elfving avec celles que d’autres ob- servateurs, MM. Brefeld, Wiesner notamment, ont étudiées ; cependant, l’auteur pense que la forme [ est peut-être semblable à celle dont M. Brefeld a fixé les températures extrèmes de végétation. Le Penicillium IT n’est autre que le Penicillium Eurolii dont on a vu l’histoire plus haut. Le Penicillium III a élé obtenu par la culture d’une levure rose, ren- contrée en 1886 au laboratoire de Carlsberg. Le mycélium de cette forme est remarquable par la variété des organes de propagation qu'il déve- loppe, lorsque les condilions de culture changent. PE CE À I D ee _à 7 L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 265 M. Elfving y a trouvé en effet les formes suivantes : 4° spores d’Atternaria, 2 spores de Verticillium, 3° des conidies engendrant les levures, et enfin % une formation selérotique dont la nature n’est pas encore bien connue. Ces diverses formes mon- trent bien le cyele de développement d'un Asco- mycèle; mais M. Elfving n'a pas encore obtenu la forme ascoporée qui, seule, permet une détermi- nation spécifique certaine. Le travail de M. Elfving, par l'importance des résultats, par sa précision, par sa méthode, est un modèle à suivre; il contraste heureusement avec les publications hâtives d’une nouvelle école de biologistes, dont la caractéristique parait être un besoin immodéré de réclame, La méthode des cultures,limitée jusqu'alors aux organismes privés de chlorophylle, vient d'être appliquée aux Algues vertes, grâce aux efforts de M. Beyerinck ‘. Ces cultures d’Algues unicellu- laires ont fourni à l’auteur des résultats d’un grand intérêt en physiologie. Les espèces cultivées sont le Chlorococeum progenitum et le Raphidium naviculare, très communes dans les eaux stganantes aux envi- rons de Delft; elles ont élé séparées, non sans peine, des nombreuses bactéries avec lesquelles elles se trouvent mélangées et les cultures pures ont été réalisées sur la gélatine. L'étude du CAlorococcum permet à l’auteur de don- der quelques renseignements sur les z0ochlorelles dont la signification a été l’objet de bien des con- troverses. Considérées d’abord comme des corps chlorophylliens permettant aux animaux de faire la synthèse des hydrates de carbone, on les envisage aujourd’hui comme des algues parasites. M. Dan- geard ? après avoir constaté leur mode de multi- plication par division et leur enkystement, les range dans les Protococcacées près du Palmella hyalina. D'après M. Beyerinck le CAlorococcum présente de grandes analogies avec ces zoochlorelles. T’auteur signale leur reproduction par scission comme pour les corps chlorophylliens : c’est le mode le plus rare ; il décrit ensuite leur division en huit masses protoplasmiques par trois segmentations succes- sives, ces masses sont mises en liberté par la disso- lution de la membrane de la cellule-mère. Mais la division n'est pas toujours régulière, de sorte qu'on peut voir souvent des familles de 5,6 ou 7 individus, comme cela s’observe fréquemment dans les z00- chlorelles de l'Hydre verte. Ces recherches, en dé- montrant l’analogie des zoochlorelles et des algues du genre Chlorococcum viennent encore appuyer ! BeyeriNCKk M. W. Over gelalineculluren van éicellige groenweren, Utrecht, 1889. ? DANGEARD P. A. Contributions à l'étude des organismes supérieurs. Le Botanisle, 1890. l’idée si longtemps contestée de l’autonomie de ces organismes. Mais le parasitisme provoque chez elles, comme M. Kleinenberg l’a déjà montré, des phénomènes de dégradation; en tous cas il ne parait pas qu'on ait affaire à un phénomène de symbiose. Les cultures de M. Beyerinck offrent un intérêt bien plus grand au point de vue physiologique, car elles rendent possible l’étude des phénomènes de nutrition cellulaire qu'on n’avait tenté jusqu'ici qu'avec des organismes privés de chlorophylle. Déjà l'auteur a réalisé des expériences très origi- pales sur les échanges gazeux. En mélangeant une culture pure de Chlorococcum à de la gélatine fondue et en coulant le mélange dans des tubes à essai ou entre des plaques de verre, on obtient après re- froidissement, des tubes ou des lames de gélatine qui se prêtent admirablement aux expériences sur le phénomène chlorophyllien. On sait que les tissus compacts des végétaux, placés dans une atmosphère privée d'oxygène, dégagent néanmoins de l'acide carbonique qu’ils produisent aux dépens des hydrates de carbone contenus dans leurs tissus : ce phénomène, dési- gné sous le nom de respiration éntracellulaire, existe-t-il chez les algues unicellulaires? C’est ce que M. Beyerinck a vérifié d’une manière ingé- nieuse. Dans trois tubes à essai renfermant une solution de gélatine à 20 0/0, on ajoute quelques gouttes d’une culture de CAlorococeum et un peu de carmin d'indigo avec un excès d'hydrosulfite de soude. La couche supérieure au contact de l'air ne tarde pas à prendre une teinte bleue due à l’action directe de l'oxygène. L'un des tubes, placé dans l'obscurité, ne montre pas d'autre changement que la teinte bleue superficielle ; un second tube, exposé au soleil à l'abri d’une solution ammoniacale d'oxyde de cuivre, qui arrête comme on le sait, les radiations les moins réfrangibles (rouge, orangé, jaune), ne montre pas non plus de changements, tandis que le troisième tube, exposé à la lumière tamisée par une solution de bichromate de potasse (qui arrête les radiations les plus réfrangibles) manifeste, après quelques minutes, une coloration bleu-foncé dans toute sa masse. L'algue placée dans un milieu dépourvu d'oxygène a donc dégagé de l’acide carbonique qui, réduit par les grains de chlorophylle sous l’action des radiations, à produit de l'oxygène qui a bleui l'indigo. Pour réussir ces expériences, il faut toujours ajouter un léger excès d’hydrosulfite; sans cela, la pénétration directe de l'oxygène de l'air amène en peu de temps un bleuissement com- plet. Dans ces conditions l’algue ne végète pas long- 266 L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE temps : l'absence d'oxygène détermine rapidement l’asphyxie. Si l’on veut obtenir un développement continu de l’algue, il faut pouvoir lui fournir l'acide car- bonique destiné à l'assimilation. Dans ce but, M. Beyerinck mélange, avec la gélatine, une culture pure de Chlorococcum et une culture d'un champi- gnon,le Wycoderma sphæromyces,qui peut décomposer la lévulose, en présence de l'oxygène, en vapeur d’eau et en acide carbonique. On dépose alors la gé- latine additionnée de lévulose, de Chlorococcum et de Sphæromyces dans des tubes à essai, et si l'on expose le mélange à la lumière solaire, l’algue et le myco- derma végètent très vigoureusement, de sorte qu'au bout de quelques semaines, la gélatine est devenue d’un vert foncé presque noir. Le mélange d’algue et de champignon est assez sensible pour déceler, par sa végétation plus ou moins luxuriante, des intensités lumineuses diffé- rentes. Ainsi M. Beyerinck, ayant placé le mélange précédent entre deux plaques de verre recouvertes de papier noir percé de petites ouvertures, a cons- taté, après l'exposition à la lumière, que les colonies d'algues s'étaient développées seulement en face des ouvertures, de sorte que la plaque de culture offrait des laches vertes de même grandeur et de mème forme que les orifices pratiqués dans la feuille servant d’écran. On voit ainsi que la méthode des cultures si in- génieusement réalisées par M. Beyerinck, se prête admirablement à des recherches spectrales sur l’activité des radiations dans le phénomène chlo- rophyllien. La chlorophylle a longtemps été considérée comme l'organe exclusif de l’assimilation du car- bone, mais les belles observations de M. Wiesner ont montré que, dans les tissus à chlorophylle, la transpiration est beaucoup plus accélérée sous l’in- fluence des radiations que dans les tissus où ce pigment fait défaut. M. Van Tieghem a même donné un nom à celte influence que la chlorophylle‘exerce sur l’exhalation de la vapeur d’eau: il l’a désignée sous le nom de «chlorovaporisation »; iln’apportail d’ailleurs, à l'appui de son opinion, d'autres faits que les résultats de M. Wiesner. La démonstration directe de l'influence de la chlorophylle sur la va- porisalion a été fournie par M. Jumelle !. Dans un premier travail l’auteur a montré qu'il existe une l JumeLLe. Revue générale de Botanique, 1889-1890. relation entre l'assimilation et la transpiration des tissus verts, car si l’acide carbonique fait dé- faut à ces tissus, la chlorophylle ne pouvant plus | utiliser à la décomposition de ce gaz, les radia- tions absorbées, les emploie à vaporiser une plus grande quantité d’eau. La chlorophylle serait alors un écran absorbant, et l’augmentation de la trans- piration serait due à un phénomène purement phy- sique. Dans une seconde communication, M. Ju- melle emploie les anesthésiques, qui, comme on le sait, à une certaine dose suppriment l’assimila- tion sans modifier le phénomène respiratoire. L’au- teur a comparé des lots égaux de plantes placés, l'un, dans une atmosphère privée d'éther, l’autre soumis à l’action des vapeurs anesthésiques ; il a trouvé, en opérant avec les végétaux les plus diffé rents (Chêne, Charme, Hêtre, Pomme de terre, Fougère,) que la quantité d’eau transpirée est tou- jours plus grande avec la plante anesthésiée, dans laquelle, suivant la dose, l'assimilation estaffaiblie ou supprimée, qu'avec la plante où l’assimilation a conservé son énergie. On est done en droit d’ad- mettre, avec l’auteur, que les radiations absorbées par la chlorophylle sont employées en partie à dé- composer l'acide carbonique, en partie àprovoquer une accélération dela transpiration : si l’on vient à diminuer ou à supprimer l'assimilation, soit au moyen d’un anesthésique, soit en supprimant l’a- cide carbonique, les radiations, qui auraient dû décomposer ce gaz, portent toute leur activité sur la transpiration, qui se trouve ainsi exagérée. Les observations de M. Elfving ont montré que l’éther exerce une action manifeste sur les proprié- tés du proloplasme. En est-il de même ici? M. Ju- melle a constaté en effet cette action spécifique de l'éther en étudiant les plantes à l'obscurité ; elle se traduit par un résultat inverse de celui qu'on ob- serve à la lumière : la transpiration est, toutes choses égales d'ailleurs, plus faible chez les plantes anesthésiées que chez les plantes normales. Cette action, qu'il est impossible d'expliquer en l'état ac- tuel de nos connaissances, rend plus probante encore, l'influence que la chlorophylle exerce sur la transpiration. Il nous resterait encore, pour terminer cette re- vue, à examiner les recherches récentes sur l’ali- mentalion azotée; mais l'importance du sujet, la valeur des résultats acquis dans ces dernières an- nées, exigent des développements qui feront l’objet d'un article spécial. L. Mangin, Professeur au Lycée Louis-le-Grand. L | | | | BIBLIOGRAPHIE, “ __ ANALYSES ET INDEX 267 BIBLIOGRAPHIE ANALYS 1° Sciences mathématiques. Bertrand (3.), de l'Académie francaise, Secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences. — Blaise Pascal, un vol. in-8° de 400 pages. (Prix : 7 fr. 50.) Calmann- Lévy, éditeur, 3, rue Aubert, Paris, 1891. Tallemant des Réaux à écrit quelque part : « Je n'aurais jamais soupconné que les Provinciales nent de Pascal, car les mathématiques et les lettres ne vont guère ensemble, » L'étrangeté de ce jugement apparaîtra surtout aux lecteurs du beau livre que M. J. Bertrand vient de consacrer à Pascal. Ce n’est pas la découverte de documents nouveaux, mais la méditation des œuvres du grand penseur qui a conduit l’illustre Secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences à revenir sur un sujet que l’on pouvait croire épuisé. Une sorte de parenté intellectuelle le disposait d’ailleurs à comprendre mieux qu'on ne l'avait fait jusqu'à présent la vie et les idées de cet étonnant génie qui fut Pascal, Comme lui, M. Ber- trand, après avoir été « célèbre à dix ans » et s'être acquis «une véritable gloire dans le monde des ingé- nieurs et des géomètres ! », à prouvé par l'exemple que les mathématiques et les lettres ne se font point de tort. Aussi se plaît-il à étudier dans Pascal tout l’homme : le théologien, l'écrivain et le savant. Ce der- nier seul devant nous occuper ici, nous n’essaierons pas d'éclairer la psychologie du physicien et du géo- mètre par des emprunts aux pages lumineuses et fines que M. Bertrand a écrites sur sa vie et ses croyances. Contentons-nous de signaler cette pénétrante étude aux amis de la science, de la philosophie et des lettres. L.0. Hermite, Membre de l'Institut, — Cours professé à la Faculté des Sciences de Paris. (15 fr.) Librairie scientifique A. Hermann, 8, ruerde la Sorbonne, Paris, grand in-4° de 293, autographié, 1894. Nous n'avons pas à faire l’éloge du volume dont la 4° édition vient de paraitre; depuis l’année 1882, où M. Andoyer, élève à l'Ecole Normale, l’a rédigé, il est devenu classique et tous ceux qui ‘étudient le calcul intégral l'ont entre les mains. La nouvelle édition a été revue par l’auteur; elle est digne de l’illustre Maitre dont elle reproduit l'enseignement. L, O. Sinigaglia (Francesco), — Diagrammi previsti delle machine a vapore. — Ati del R. istituto d’in- coraggiamento di Napoli, vol. II della 4 serie, Le but que s’est proposé l’auteur dans cet intéressant mémoire est d'indiquer la construction de diagrammes tenant compte de certains éléments négligés d'ordi- naire dans le calcul du travail d'une machine à vapeur, Après avoir analysé plusieurs diagrammes d’indica- teur relevés sur des machines monocylindriques ec polycylindriques, il fait voir comment l’on peut arriver à fixer les chutes de pression à la fin de l’admission aussi bien qu'entre les cylindres des Woolf et Com- pound, Or le point figuratif où commence la détente a son importance, car la grandeur du diagramme théori- que en est sensiblement affectée, M. Sinigaglia donne une méthode géométrique très simple, très pratique et qui ne permet guère à des erreurs de passer sans être apercues, 1 L, Pasreur, Réponse à M. J. Bertrand, lors de sa récep- tion à l’Académie francaise, le 10 décembre 1885, ES ET INDEX Il donne ensuite les diagrammes totalisés pour les machines à cascade et traite quelques exemples pour montrer comment on arrive à une répartition approxi- mative du travail dans les différents cylindres, J. PouLer. Service géographique de l’armée. — Tables des lo- garithmes à 8 décimales des nombres de 1 à 120,000, et des sinus et tangentes de 10 secondes d'arc, dans le système de la division centésimale du quadrant, publiées par ordre du MINISTRE DE LA GUERRE. (40 fr.) Paris, Imprimerie Nationale, 1891. 1 vol. grand in-49 jésus en vente chez Gauthier-Villars et fils, imprimeurs-libraires, 55, quai des Grands-Auqgustins, Paris, 1891. Le système décimal dans ia mesure des arcs, intro- duit par Borda dès l'établissement du système métrique dans la division des instruments et pratiqué par De- lambre et Méchain dans les opérations de la mesure de la Méridienne de France, est employé exclusivement depuis bientôt un siècle par le Service géographique de l’armée (anciennement Dépôt de la Guerre) pourses observations et pour ses calculs géodésiques. Une aussi longue expérience à démontré les avantages que procure cette échelle de division au point de vue de l'exactitude et de la rapidité des calculs, et a établi dé- finitivement sa supériorité sur le système de la division sexagésimale. Pour remplacer les tables de Borda, aujourd'hui épuisées, qui donnaient les logarithmes à 7 décimales des fonctions circulaires avec la division centésimale du quadrant, le Service géographique vient d'éditer de nouvelles tables, dans le même système, en les éten- dant à 8 décimales, pour donner satisfaction aux exi- gences des calculs modernes. Cette table contient les logarithmes des nombres de 1 à 120.000, ceux des fonctions circulaires, (Sinus et Tangentes) ‘de 10 sec ondes en 10 secondes centésimales, sin & tang x les logarithmes des ef rapports pour les 5 premiers grades, une table des multiples de M et de 1 M rithmes vulgaires et réciproquement, enfin une table de conversion qui permet de convertir d’un système dans l’autre les arcs exprimés, soit dans le système sexagésimal, soit dans le système centésimal. Elle a été extraite des grandes tables manuscrites qui ont été calculées à la fin du siècle dernier par le service du cadastre sous la direction de Prony. Malgré la haute autorité du manuscrit, on a soumis tous les nombres à un contrôle rigoureux : : chaque logarithme a été l’objet de deux vérifications indépendantes l’une de l’autre. En plus de ces précautions minutieuses prises pour assurer l'exactitude, nous signalerons les soins qui ont été apportés à l'exécution typographique, dont l'im- portance est capitale dans les publications de ce genre, L'ouvrage sort des presses de l’Imprimerie nationale, qui à créé pour sonimpression des caractères d’un type nouveau, dont la disposition dans les nombres ne peut laisser place à la confusion : le papier est légèrement coloré en jaune, teinte reconnue la plus favorable pour amortir sur les yeux l'effet de la lumière réfléchie. Ces perfectionnements, et d’autres encore que reconnai- tront les spécialistes, tendent à rendre les recherches faciles et sûres et à diminuer la fatigue du calculateur. En résumé, la nouvelle table à 8 décimales du Service géographique est appelée à rendre les plus grands pour convertir les logarithmes naturels en loga- 268 services en comblant une lacune que ne remplissait jusqu’à présent aucun ouvrage analogue francais ni étranger, et fait le plus grand honneur à l'Etablisse- ment quien à poursuivi la publication, AAC 2° Sciences physiques. Poincaré (H.), Membre de l'Institut. — Electricité et optique. II. Les théories de Helmholtz et les expériences de Hertz. Lecons professées pendant le second semestre 1889-1890 à la Faculté des Sciences, rédigées par M. Brunhes, 1. vol. 260 pages. (7 fr. 50.) G. Carré, 58, rue Saint-André-des-Arts, Paris. C'est une œuvre considérable qu'a entreprise M. Poin- caré, de publier le cours de Physique mathématique qu'il professe ; d'autant plus utile qu’elle assure la diffu- sion rapide en France des connaissances délicates et profondes nécessaires à l'intelligence de théories qui se sont développées au delà de la Manche ou du Rhin depuis un quart de siècle, et au progrès desquelles notre pays n’a que trop peu contribué, bien qu'il ait fourni, avec Coulomb et Ampère, deux des principaux créateurs de la science électrique. Il y a quelques mois, on rendait compte ici même du premier volume de cet ouvrage, « les théories de Maxwell et la théorie « électromagnétique de la lumière » provenant de l’enseignement du second semestre 1887-88; grâce à l’activité de M. Brunhes, nous voici déjà en possession des lecons de l’an dernier. Le nom de l’auteur nous dispense d'insister sur la pénétration et la finesse de la discussion des théories électrodynamiques de Helmholz et de leurs rapports avec celles de Weber et de Maxwell. ainsi que la sim- plicité et l'originalité des méthodes appliquées à la théorie des expériences de Hertz, Il n’est point un chapitre qui ne mérite une étude approfondie. Mais à cause même de l’autorité de l’auteur, ce n'est pas sur les points nombreux qui me paraissent certains, mais au contraire sur ceux plus rares, mais impor- tants, qui me semblent contesftables, que j'attirerai l'attention dans ce compte-rendu, me réservant d’en faire ailleurs la discussion trop spéciale pour cette Revue. Les trois premiers chapitres sont relatifs à la for- mule d'Ampère, à la théorie de l’Induction exposée avec toutes les précautions nécessaires et à la théorie de Weber. Le quatrième est consacré à la (héorie électro- dynamique de Helmholtz, dans laquelle on admet que deux es) de courant ont un potentiel de la ii dsus' forme TEA [(1 + k)cos + (1 — &) cos 8 cos 0')], en appelant € l’angle des deux éléments de courant, et 6, 9', l'angle de chacun d’eux avec la droite qui les joint; Æ est une constante que l'étude des courants fermés ne permet pas de déterminer ; on obtient à peu près la théorie de Weber en prenant k — 1, et celle de Maxwell en faisant À — 0. Toutefois, à cette der- nière condition il en faut ajouter une autre, comme M. Poincaré le montre le premier dans l'important chapitre V : « Passage de la théorie de Helhmoltz à celle de Maxwell. » Cette condition nouvelle est élec- trostatique : Prenons l’action directe à distance de deux masses électriques e e’, à travers un espace inca- et considé- pable de se polariser, comme égale à —— ra, rons avec Maxwell le vide même comme un diélectri- que susceptible de polarisation intense ; l’action appa- rente sera beaucoup plus faible que l’action directe, et d'autant plus que l’espace vide sera plus polarisable, Toute variation dans la polarisation entraîne un dé- placement d'électricité qui agit à distance comme un courant. Pour passer à la théorie de Maxwell il faut sup- poser à nul ; il faut admettre que l’action directe de deux masses électriques à distance serait infinie, s’il n’y BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX avait pas entre elles un milieu — même le vide — qui se polarise au point de compenser presque intégrale- ment l’action directe et de rendre finie l'action appa- rente. Cette conception d’un vide énergiquement pola- risable, bien loin de fournir un mécanisme de trans- mission de proche en proche des actions électriques — exige au contraire que l'action directe à distance soit infinie, Vient ensuite un frès important chapitre sur « l'U- nité de la Force électrique » quelle qu’en soit l’origine, d’après M. Hertz ; et enfin six chapitres consacrés aux expériences de M. Hertz ; Ch, VIT : Description des expériences par M. Blondin. — Ch, VIIT : Théorie de l’ex- cilateur. — Ch. IX : Etude du champ produit par l’exci- lateur, Radiation de l’énergie. Propagation d’une per- turbation électro-magnétique dans un fil rectiligne., — Ch. X : Théorie du résonnateur. — Ch. XI : Réflexion des ondes électro-magnétiques.— Ch. XII : Notes et complé- ments, — Impossible de résumer tout ceci; je ne veux parler que d’une question très importante et sur la- quelle M. Poincaré est revenu en plusieurs endroits de son livre. Lorsque les courants sont périodiques, et de pério- des très courtes, la force magnétique est nulle dans l’intérieur des conducteurs, sauf tout près de la surface ; il en résulte que la partie du courant qui est due aux phénomènes d’induction électrodynamique se localise très près de la surface du conducteur, tandis que celle qui est due aux phénomènes d'influence électrostatique reste répartie dans tout l’intérieur du conducteur. Or cette dernière partie est proportionnelle à }; elle est donc nulle dans la théorie de Maxwell, et le courant périodique estalors toutentier confiné près dela surface, C’est ce que M, Poincaré établit solidement, Malheu- reusement il porte son attention sur ce fait que le cou- rant est nul à l’intérieur ; il oublie en partie le courant superficiel, et la force électromotrice, tangente à la surface, qui reste nécessaire pour produire ce courant, force d'autant plus grande pour une même intensité totale que l'épaisseur de la couche dans laquelle le courant se propage est plus faible; il traite le conduc- teur comme ayant une conductibilité infinie pour des oscillations très rapides, ce qui est vrai pour linté- rieur, mais non pour la couche superficielle, dont au contraire il faudrait, si l'intensité totale était donnée, traiter la résistance comme infinie. Mais lorsque le conducteur est isolé dans un espace soumis à des va- riations périodiques très rapides, il semble bien que la densité du courant doive être très petite, même très près de la surface, M. Poincaré, regardant cette den- sité comme rigoureusement nulle jusqu'à la surface même du conducteur, en tire la conséquence que la force électrique dans lisolant doit aboutir normale- ment à la surface du conducteur, dans la théorie de Maxwell. Cette propriété qui ne s'applique certaine- ment pas dans le cas où l'intensité totale du courant dans le conducteur serait donnée, ne me paraît pas solidement établie, M. Poincaré est revenu d’ailleurs à plusieurs reprises sur cette question, et malgré l’im- portance qu'il y attache à juste titre, paraît encore in- décis (p. 217). Toutefois il l’emploie en quelques en- droits de la théorie des expériences de Hertz; il importe donc de lire ces chapitres avec une extrème attention. Je ne saurais mieux faire, pour terminer, que de re- produire les conclusions mêmes de M. Poincaré : « La « théorie est incomplète, les expériences sont peu nom- « breuses et contradictoires, Il est impossible de déci- « der s'il y a accord ou désaccord, Je termine encore « par un point d'interrogation. Toutefois, s'il m'est « défendu de conclure, je puis parler de l'impression « que me causent les plus récents progrès de la « science, et que le lecteur partagera sans doute après « avoir lu ces notes. Cette impression, encore bien « vague, est que l’ensemble des résultats est plus favo- « rable aujourd’hui à la théorie de Maxwell qu'il y a « quelques mois, au moment où j'ai clos mon cours, » Marcel BRILLOUIN, 4 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 269 Barbier et Roux, — Recherches sur la disper- sion dans les composés organiques. — Comptes Rendus, 1889-1890. Bulletin de la Société chimique, 1890. Brühl, — Sur la relation entre la dispersion et la constitution chimique des corps. — Nouvelle détermination des réfractions atomiques. — Zeitschrift fur physikalische Chemie, 1891. Gladstone, — Réfraction et dispersion molécu- laires de diverses substances. — Jowrnal of chemical Society, 1891. Les premières recherches sur la réfraction et la dis- persion dans les composés organiques ont été effectuées à peu près simultanément vers 1860, par Schrauf d’une part, Gladstone et Dale d'autre part. Schrauf caleulait au moyen de ses expériences les coefficients de la for- mule de Cauchy réduite à deux termes. B CE et employait alors les formules suivantes : D] TR M, d étant la densité, M le poids moléculaire, représentait le pouvoir réfringent moléculaire. Œ M représentait le pouvoir dispersif moléculaire. Ces expressions ne sont pas indépendantes de la tem- pérature ; de plus les données expérimentales sur les- quelles s’appuyait Schrauf étaient peu nombreuses et peu exactes, Aussi n’a--il pas obtenu de résultat bien net, Gladstone à recherché, dans de nombreux mémoires, la relation qui existe entre la réfraction et la disper- sion d’un composé et celle de ses composants, Il étu- n—1 d dante de la température comme le font voir de nom- breuses observations. Le pouvoir dispersif est mesuré par la différence des valeurs de cette expression pour les raies extrêmes du spectre, die l'expression qui est sensiblement indépen- — n ! H d d d le produit de cette expression par le poids moléculaire sera la dispersion moléculaire, Gladstone éludie simultanément la réfraction molé- n.__—1! n — # à nA RL ; ; DA culaire TR et la dispersi.n HOROU ARE RE d M. Brühl, dans ses recherches sur la même question, à adopté comme expression du pouvoir réfringent la mn — 1 (n° + 2) d' Les recherches théoriques de Lorenz et Lorentz en particulier ont montré que cette expression devait être indépendante de la température et de l’état d'ag- grégalion des corps. Le dernier mémoire de M, Brühl contient un certain nombre de tableaux destinés à montrer comment les observations faites jusqu'ici vérifient cette constance, Les variations produites sur la réfraction et la dispersion par la température et le passage d’un corps à l’état de vapeur par exemple, sont sensiblement plus petites que pour la formule de Gladstone ; elles sont tout à fait de l’ordre des erreurs à craindre sur les mesures. La dispersion moléculaire est donc, pour M, Brühl, représentée par la formule 2 2 He x = .) M \n} + 2 na +2) d Les résultals obtenus pas MM. Gladstone et Brühl concordent dans leurs grandes lignes. M. Gladstone a reconnu d’ailleurs que la formule de M. Brühl présen- tait plus d’exactitude que la sienne, mais ne changeait valeur pas le sens des résultats. Les faits principaux qui res- sortent des mémoires de ces deux savants sont les suivants : Dans un grand nombre de cas, la réfraction et la dispersion moléculaire peuvent être obtenues en fai- sant la somme des réfractions ou dispersions atomi- ques, des éléments du corps considéré, L'étude des cas où cette règle ne s'applique pas montre qu'il faut tenir compte du mode de liaison des atomes qui cons- tituent la molécule. Ainsi la réfraction atomique ou la dispersion atomique du carbone ne sera pas la même suivant que l’atome de carbone considéré sera attaché, dans la formule de constitution, par une liaison simple double, ou triple. La dispersion atomique des éléments monovalents est done constante. IL n’en est plus de mème pour les éléments plurivalents, et l'étude de la réfraction et de la dispersion moléculaires d'un com- posé peut donner des indications précieuses sur sa constitution, Il n’y a pas de relation entre les variations de la réfraction et celles de la dispersion. Ces deux grandeurs donnent des indications qui se complètent mutuelle- ment. Voici d’après M.Brühl, les valeurs qu'il convient d'adopter pour les réfractions et dispersions atomiques. ' REA RE à RÉFR ACTION | DISPERSION DRE CICEMENX ATOMIQUE | ATOMIQUE ———— Carbone à liaison simple........... 0.039 Hydro rene Mr nee nr 0.036 Oxygène (du groupe oxhydrile)....…. 0.019 Oxygène (liaison éthérée double)... 0.012 Oxygène (du groupe carbonyle\...… 0.086 CHOC 0.176 Brome..... : 0.348 LOT Es RS OO SR RER A 13.808 0.77% Maison éthylémque— "rt". 1.836 0.23 Liaison acétylénique = ........ 2.22 0.19 MM. Barbier et Roux ont publié depuis quelque temps une série de mémoires sur la dispersion des composés organiques. Le premier débute par cette phrase : « La dispersion n'a jamais été étudiée au point de vue des relations qui lient cette propriété physique des corps à leur composition, leur poids moléculaire et leur cons- titution chimique. » Cette ignorance des travaux de leurs prédécesseurs explique le choix de la constante adoptée par MM. Barbier et Roux, Ces savants prennent : ; ; ; B comme pouvoir dispersif l'expression Fu B étant le 2° coeflicient de la formule de Cauchy. C’est, à un fac- teur près, l'expression de Schrauf, Or B n’est pas indé- pendant de la température et de l’état du corps, et de plus, M. Brühl à montré que la formule de Cauchy, même développée, ne pouvait représenter avec exacli- tude le phénomène de la dispersion, sauf pour les corps très faiblement dispersifs comme les gaz. Cette objec- ion diminue beaucoup l'intérêt des recherches de MM. Barbier et Roux, les relations qu'on peut déduire de leurs mesures n'étant plus que des approximations plus ou moins lointaines. D'ailleurs ces savants n'ont pas cherché de relation entre le pouvoir dispersif d’un composé et celui de ses éléments et se sont bornés Jusqu'ici à signaler que, dans les séries homologues, cette grandeur varie à peu près régulièrement avec le poids moléculaire. Georges CHARPY. Keïiser (E, H.). — Sur le poids atomique du palladium, Chemical American Journal, 11 p. 398. Mallet (J. W.). — Sur le poids atomique de l'or. Chemical American Journal, 42. p. 99 et 182. Les recherches de M. Joly ! ayant démontré que le poids atomique du ruthénium est seulement de 101,4 1 Comptes rendus 108.94. 270 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX el non pas 103,5 à 104 comme on l’admettait jusqu'alors, il y avait un certain intérêt de répéter la détermination du poids atomique du rhodium et du palladium, Ces deux éléments appartiennent en effet à la même famille naturelle que le ruthénium, et l'on peut se demander dans quel ordre ces trois corps simples doivent être classés, M. Keiser a entrepris ce travail de revision, én ce qui concerne le palladium seulement. Il à préparé avec beaucoup de soin une combinaison double cris- tallisée du chlorure de palladium et de l’ammoniaque. Il y a ensuite dosé le palladium par calcination, Deux séries d'expériences très concordantes lui ont donné Pd — 106,35, résultat qui confirme et vient préciser les valeurs trouvées précédemment 105,7 à 106,5. Ce résultat est calculé dans l'unité 0 — 15,96. Le poids atomique de l'or a été l'objet de travaux importants de M. Mallet, bien connu par ses recherches antérieures sur le poids atomique de l'aluminium, Jusqu'en 1887 on ne possédait sur cette question qu’un très petit nombre de données sérieuses, à savoir : Deux déterminations de Berzélius remontant à l’année 1813 : Au — 196,7 ; cinq analyses du chlorure double d'or et de potassium, également dues à Berzélius (184%) : Au — 196,2; enfin deux dosages de Levol (1850) donnant comme résultat: Au — 195,8. Il y avait donc nécessité absolue de reprendre cette question restée si longtemps sans solution définitive. On $e rappelle que c'est en 1887 que de nouvelles dé- terminations ont été faites d’une facon tout à fait indépendante par M. G. Krüss en Allemagne el par MM. Thorpe et Laurie à Londres. M. Krüss, en employant cinq méthodes différentes, arrivait au résultat Au — 196,669 comme moyenne de 30 détermi- nations, MM. Thorpe et Laurie qui ont opéré par trois méthodes, ont trouvé Au — 196,85 (moyenne de 25 déterminations). Ces deux résultats sont calculés dans le système O0 — 15,96. M. Mallet à cherché à varier encore davantage les procédés et à pu faire ainsi sept séries de nouvelles déterminations. Voici les méthodes adoptées par le savant américain : 1° Déterminer le rapport de l’or à l'argent en trans- formant un poids donné d'or en son chlorure et en précipitant le chlore par l'argent préalablement dissous dans lacide azotique : Au = 196,722. 2° et 3° Déterminer le même rapport en passant par le bromure d’or et par le chlorure double d’or et de potassium : Au — 196,79 et Au — 196,775, 4° Calciner un poids donné de chlorure double d’or et de triméthylammonium et peser le résidu d’or Au — 197,225. 5° Déterminer le rapport de l'or à l'argent en élec- trolysant par le même courant deux solutions conte- nant l’une un sel d’or, l’autre un sel d'argent; peser ensuite les quantités de ces deux métaux déposées dans le même temps : Au — 196,823. 6° Transformer un poids donné d’or en cyanure double d'or et de potassium; électrolyser la solution de ce sel et mesurer le volume d'hydrogène dégagé, ce qui donne tous les éléments pour calculer le rapport direct de l’or à l'hydrogène, unité des poids atomi- ques : Au — 197,137, 1° Transformer un poids donné d’or en chlorure ou en bromure Déplacer l'or dans les solutions de ces sels par un poids connu de zinc pur. Dissoudre l'excès de zinc par l'acide sulfurique et mesurer le volume d'hydrogène dégagé. Traiter ensuite par l'acide sulfu- rique le même poids de zinc pur que celui employé dans la première expérience et mesurer le volume d'hydrogène dégagé. La différence des deux volumes correspond au volume que l’or peut théoriquement dégager en se transformant en chlorure ou en bro- mure : Au — 196,897. De l’ensemble de ses expériences M. Mallet déduit la valeur finale Au — 196,910, toujours dans le système O — 15,96. Pour donner une idée de la précision avec laquelle le poids atomique de l'or se trouve ainsi déterminé, nous réunissons dans le tableau suivant les moyennes obtenues par M, Krüss, MM, Thorpe et Laurie et M. Mallet. M. Kruss. 196.622 » 196.619 » 196.620 n 196.743 » 196.7#1 MM. Thorpe et Laurie. 196.876 » 196.337 | » 196 842 | M. Mallet 196.722 | » 196.790 » 196.775 k 197.295 K » 196.823 » 197.137 X » 196.897 En éliminant les deux séries marquées d’un signe X (qui s’écartent beaucoup de la moyenne), on trouve comme valeur la plus probable du poids atomique de l'or: Au — 196,76, avec une incertitude de + 0,14, soit 1 de Go donner une plus grande exactitude. Les méthodes actuelles ne peuvent guère Ph. A. GUYE. | 3° Sciences naturelles. ietze (D' Emil). — Die Geognostischen Verhælt- nisse der Gegend von Krakau. (La Géologie des environs de Cracovie), In-8, #16 p. mit einer Karten- beilage, bestehend aus 4 Blættern (Extrait du Jahrbuch der K. K. Geol, Reichsanstalt, 37. Bd.) Vienne, A. Hoœl- der, 1888. La géologie des environs de Cracovie a déjà fourni la matière de nombreuses publications, parmi lesquelles la carte de Hohenegger et Fallaux et la description de | la Haute-Silésie due à F. Rômer sont justement con- sidérées comme classiques. M. Tielze, reprenant ces anciennes observations et les combinant avec les résul- tats de ses études personnelles, entreprises au cours du levé de la carte géologique détaillée de Autriche, nous donne cette fois une monographie des plus complètes ; la région examinée présente d’ailleurs un grand intérêt, à cause de sa situation à la limite entre deux zones dont l’histoire a été bien différente : d’une part, l'Eu- rope centrale, avec ses couches secondaires peu déran- uées; de l’autre, la zone des plissements alpins, repré- sentée ici par le bord des Karpathes, et où une grande partie de la série tertiaire a été disloquée d’une ma- | nière énergique. | Le massif de collines qui s’étend au Nord de la Vis- tule appartient à la première division : on y trouve des couches dévoniennes et carbonifères, prolongement oriental des terrains similaires de la Silésie; puis, en discordance, une série lacunaire de couches transgres- | sives, débutant par un étage (calcaire de Karniowic) dont l'attribution soit au Permien, soit à la base du Trias, est encore douteuse; au-dessus vient un Trias assez développé, du type germanique, et dontles termes successifs débordent les uns sur les autres. Le Lias est absent et les dépôts marins, de plus en plus calcaires, ne recommencent qu'avec l’oolithe inférieure : c’est au Bathonien et au Callovien qu'appartient le célèbre gi- sement de Balin. A la fin de la Période jurassique, la région se disloque légèrement, et en même temps com- mence une période d’émersion prolongée, interrompue seulement par la transgression marine du Crétacé supé- | rieur, | Quant au bord des Karpathes, les données positives | n'apparaissent qu'avec le Jurassique supérieur, dont | les affleurements constituent au milieu du Flysch les singuliers pointements rocheux que les géologues alle- mands ont désignés sous le nom de Klippen (récifs); vÉttetnttt: BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 274- aussitôt après le dépôt des puissantes assises calcaires correspondantes, il semble y avoir eu production d'une ride saillante, formant comme la première indication de la chaine future; cette ligne de relief, dont lexis- tence permet d'expliquer simplement lorigine des bloes exotiques que l’on rencontre au milieu des dépôts plus récents, a été ensuite enterrée sous la masse épaisse des sédiments crétacés et éocènes. Les mouvements de plissement, s’accentuant de plus en plus, ont atteint vers la fin de la période oligocène leur maximum d'in- tensité : c'est de cette époque que date l’émersion défi- nitive du pays, abstraction faite de quelques golfes étroits qui proiongeaient vers le sud la mer miocène, reléguée dans emplacement des plaines du nord. Les mouvements ont d’ailleurs continué en s'atténuant, car ces lambeaux miocènes discordants sont eux-mêmes fortement redressés sur les flancs des montagnes, Un dernier épisode correspond à l'invasion partielle des glaces quaternaires; les blocs erratiques d’origine septentrionale s’observent jusque sur la rive sud de la Vistule, à des altitudes comprises entre 300 et 400 mè- tres, L'important travail de M. Tietze est accompagné d’une belle carte géologique en quatre feuilles, à l’é- chelle du 4, et sur laquelle 47 divisions ont été distinguées. Il y a lieu toutefois de regretter l'absence complète de coupes graphiques, qui facilitent toujours singulièrement l'exposition des faits relatifs à l’agence- ment des masses minérales, surtout quand il s’agit d’une structure aussi compliquée que l’est celle de la région décrite par M. Tietze. Emm. de MARGERIE. Kramer (E.). — La maladie visqueuse du vin. OEsterreich. laud. Wochenbl, 1889, XV, 258; Biederm. Centralbl., XIX, 134. On sait que cette maladie attaque surtout les vins blancs, les rend filants, visqueux, et leur donne une saveur fade et mucilagineuse, MM. Pasteur, Neesler, Bersch et Béchamp ont déjà établi que cette affection du vin est due au développement d’une ou de plu- sieurs espèces de bactéries. M. Kramer a reconnu au moins trois bactéries produisant cette altération des liquides : 1°le Bacillus viscosus Saccharti attaquant les solutions de sucre de canne neutres ou alcalines; 2 le Bacillus viscosus Vini rendant visqueuses les solutions de: sucre de raisin acides et le vin; enfin 3° une bactérie à laquelle on doit la viscosité du lait. La maladie du vin n’est pas due au premier bacille qui ne peut supporter ni les solutions acides, ni même le vin, En examinant les vins visqueux au microscope, on observe des bâtonnets fins et allongés, formant sou- vent des chaînes assez longues, et si nombreux qu'on peut dès le premier abord les accuser de la viscosité du vin, L'auteur à pu cultiver ce bacille à l’état de pureté dans du vin stérilisé et garanti du contact de l'air par une couche d'huile; ces vins sont devenus visqueux au bout de # à 8 semaines. La maladie du vin est done bien produite par le Bacillus viscosus Vini; cette bactérie | est anaérobie et se développe surtout entre 15° et 48° de chaleur; elle ne supporte pas une température supé- rieure à 30°; elle exige la présence du sucre de raisin et forme du mucilage, de l'acide carbonique et de la mannite, cette dernière substance étant produite par la combinaison de l’acide carbonique et de l'hydrogène | naissant qui sont les produits primaires de la fermen- | tation visqueuse. A. HÉBERT, Pagnoul. — Travaux de la station agronomique du Pas-de-Calais. Annales agronomiques ; tome XVI, page 307, 1890. G. Masson, 120, boulevard Saint-Germain, Paris. Le mémoire du savant directeur de la station agro- nomique d'Arras comprend plusieurs parties qui trai- tent de divers sujets agricoles et dont nous allons suc- cessivement rendre compte. 4° Note relative à l'analyse et à la vente des betteraves. — L'auteur rappelle que la vente des betteraves de sucre- rie ne se fait plus qu’en prenant sa richesse pour base et il examine les trois méthodes qu'on peut adopter pour évaluer cette richesse, en se contentant d’en signa- ler les avantages et les inconvénients et sans en préco- miser aucune. La plus commode, sinon la plus exacte consiste dans la détermination de la densité du jus : on doit employer un densimètre marquant 0 dans une dissolution saline dont le litre pèse 1000 grammes à 15° et non dans Peau à 15° qui ne pèse au litre que 9996 16, ce qui majore les indications de 0.1 de degré. Les observations doivent naturellement être faites à 159, sinon il faut faire une correction indiquée par des tables spéciales, qui ne sont pas rigoureusement exactes à cause de la variété de la composition et par suite de la dilatation des jus. La lecture se fait sur le prolonge- ment de la surface horizontale du liquide et non au sommet du ménisque; enfin on doit attendre environ un quart d'heure avant de plonger le densimètre dans le liquide afin que la mousse aie le temps de tomber. Connaissant la densité du jus, sachant que le degré 6, 5 du densimètre correspond en moyenne à 14.00 de sucre par décilitre et que chaque dixième de degré et plus équivaut à 0f26 de sucre, on peut obtenir approxi- mativement la richesse de la betterave; mais ces moyennes peuvent s’écarter sensiblement de la vérité pour un échantillon isolé; de plus les résultats varient avee le mode de râpage, la finesse de la pulpe, l’inten- sité de la pression; tous ces inconvénients sont com- pensés seulement par la grande simplicité du procédé. Dans la 2° méthode, par l'analyse des Jus au sacchari- mètre, après purification par les sels de plomb, on admet que le jus représente les %/, du poids de la betterave, ce qui n’est pas toujours exact: de plus, la richesse des jus décroit à mesure que la pression aug- mente, de sorte que le jus analysé est plus riche que celui restant dans la betterave. La méthode la plus exacte : analyse directe de la pulpe au saccharimètre, doit exiger l'épuisement com- plet de la pulpe et l'élimination des substances étran- gères influant sur l’observation saccharimétrique. Le procédé de M. Pellet est le meilleur sous ce rapport : 16#19 de pulpe sont introduits dans un ballon de 100 centimètres cubes avec 5 centimètres cubes de sous-acétate de plomb à 30° B. On remplit presque entièrement d’eau et on chauffe 1 heure environ au bain-marie; on ramène à 15°; on complète le volume à 100 c.c. 9 pour tenir compte du volume de l’insoluble: on agite, on filtre et on observe au saccharimètre Laurent avec le tube de 20 centimètres ; on a direc- tement le sucre pour 100 de betteraves. Dans l'étude de cette première question, M. Pagnoul se livre à d’autres considérations de détail, égale ment intéressantes, mais dont nous ne pourrions ren- dre compte sans dépasser le cadre qui nous est assigné. 2° Observations diverses relatives aux analyses de bette= raves faites pendant la campagne de 1889. — La saison avait été excellente pour les betteraves; les racines obtenues avaient un poids moyen assez fort (688 gram- mes) ; la pureté moyenne était de 87; la densité dujus était 7,56 contenant 17#22 de sucre par décilitre. L'auteur profite de ses nombreuses observations ana- lytiques pour établir une relation entre la densité et la richesse du jus en 1889, et, par comparaison, il fait la remarque que cette année, la pureté des betteraves est plus grande que d'ordinaire. Enfin M. Pagnoul signale les pertes en sucre éprou- vées par les betteraves conservées, surtout quand elles sont coupées. Il attribue ces pertes à une combustion ou à une fermentation des matières sucrées. 3° Note additionnelle relative à l'altération des betteraves coupées. — Revenant sur cette question, l’auteur cite quelques expériences confirmant sa manière de voir déjà citée, notamment la production d'acide carboni- que et d'alcool par séjour de pulpes où de morceaux de betteraves dans des ballons ; de plus M. Pagnoul a constaté que le chloroforme entrave la fermentation sans l’arrêter complètement. L 212 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 4° Expériences sur le blé cultivé dans un sable siliceux stérile. — Les cultures ont été faites dans des vases de 45 litres contenant du sable dans lequel on introduisait par arrosage toutes les combinaisons des principaux engrais (nitrique, ammoniacal, phosphaté soluble et insoluble, potassique). Voici les conclusions de ces expériences qui ont duré de fin novembre à fin juin : L'azote nitrique a été bien préférable à l'azote am- moniacal ; dans ce dernier, la potasse a produit meilleur effet que dans l’engrais nitrique ; enfin la présence de l'acide phosphorique est encore plus nécessaire que celle de l'azote et la meilleure manière de l'appliquer est la forme de superphosphate. 5° Composition de fourrages, pulpes, ete., employés pour la nourriture des bestiaux. — M. Pagnoul rappelle les méthodes qu'il a suivies dans ces analyses et qui sont celles qui servent d'ordinaire dans les laboratoires scientifiques ; il donne le tableau d'une quarantaine d'analyses dont il tire les observations suivantes : Le foin de trèfle est le fourrage le plus riche en azote; quant aux pulpes et aux racines, voici l’ordre décroissant de leurs propriétés nutitrives : drêches de brasserie, pulpes de diffusion, pulpes de presses, bet- teraves. Les matières grasses et l’acide phosphorique sont abondants dans les tourteaux, le son etles drèches; les hydrates de carbone prédominent dans les lentilles, le son, l’avoine, les drèches, les betteraves et lescarottes. 6° Influence des feuilles et de la hunière dans le dévelop- pement des tubercules de la ponvne de terre. — Ces expé- rience ont été faites dans des pots en grès remplis de terre fertile et bien homogène; la variété cultivée a été la «Richter’s Imperator ». L'influence des feuilles a été constatée sur trois plants : l’un non effeuillé, l’autre demi-effeuillé, le troisième complètement effeuillé, et qui ont donné respectivement une récolte de tuber- cules pesant 1,000 grammes, 960 grammes et 610 gr. L'influence de la lumière a porté sur trois plants placés chacun sous une cloche : l’une en verre incolore, la seconde en verre violet, la dernière en verre noir; les poids des tubercules obtenus étaient de 610 gr., 420 grammes ef 210 grammes. M. Pagnoul fait remarquer que ces observations con- firment pleinement les idées émises par M. Aimé Girard qui explique la formation de la fécule en admet- tant qu’elle a pour origine la saccharose sécrétée dans les feuilles sous l'influence de la lumière. A. HÉBERT. NVard (H.). — Plant Organization (0 fr. 15) Ginn et Cie, 7-13 Tremont Place, Boston, 1890, L'ouvrage dont H. Ward fait paraître aujourd'hui la deuxième édition, bien que s'adressant surtout à ceux qui commencent à faire de la botdnique, n’en est pas moins une œuvre originale sur laquelle nous appelons tout particulièrement l’atiention des personnes qui s'intéressent aux choses de l’enseignement. L'auteur s’est proposé en effet de faire servir l’étude de la bota- nique au développement de lesprit d'observation, ce qui doit être, selon nous, le but de l’enseignement des sciences naturelles dans les classes inférieures, Après avoir énumérésommairement, trop sommairement peut- être, les principales formes que peuvent affecter les divers organes d’une plante, l’auteur a reproduit dans chacune des pages suivantes un questionnaire très détaillé auquel l’élève doit répondre après examen d'une plante qu'il a entre les mains. L'ouvrage de H. Ward est essentiellement un cahier d'élève; mais sous sa forme modeste il constitue une méthode origi- nale d'enseignement et c’est à ce titre que nous en re- commandons l'examen. Henri LEcoure. Coues (Elliott), professeur, — Handbook of field and general Ornithology. a Manual of the Struc- ture and Classification of Birds with instruc- tions for collecting and preserving specimens. (Manuel dOrnithologie générale) (42 fr. 50.) London, Macmillan and C°, Bedford Street, 29, Covent Garden (London), 1890. L'ouvrage du professeur Coues publié à Londres est la réimpression de parties importantes d'un livre du même auteur paru en Amérique sous le titre Key to North American Birds. Le nouveau volume est divisé en deux parties, La première, « Field Ornithology », comprend les instructions nécessaires à la récolte et à l'observation des oiseaux dans la campagne, ainsi qu'à la préparation et à la conservation des spécimens pour l'étude et la collection, Cette première partie est rem- plie de détails pratiques clairement exposés; l’auteur a eu soin de placer à côté des méthodes générales des conseils relatifs aux cas particuliers qu’on peut ren- contrer soit dans la préparation des peaux, soit dans la manière de monter les oiseaux. Un chapitre inté- ressant est réservé aux parasites qui s’atlaquent aux collections. La deuxième partie, « General Ornithology », traite de la classification, des caractères zoologiques et de la structure anatomique des oiseaux. Au sujet de la classification l’auteur à écrit un article de généralités, mais n'a pas donné le tableau d’un groupement quel- conque. Il préconise la nomenclature trinominale chère aux ornithologistes et aux lépidoptérologistes qui ont à décrire trop fréquemment des variétés soit de couleur, soit de taille. L'étude des parties exté- rieures, plumes, ailes, pattes et la description du sque- lette forment un des plus importants chapitres de la deuxième partie. Pour le reste de lanatomie, on ne trouve guère que des indications sommaires, que vien- nent compléter de bonnes figures, en grande partie originales. Cet ouvrage sera certainement utile aux ornithologistes et mérite de leur être signalé. L’im- pression en est soignée, bien que les caractères soient un peu petits. D' H. BEAUREGARD. Ménégaux (A.). — Recherches sur la circulation des Lamellibranches marins. Thèse de la Faculté des sciences de Paris. 1890. En étudiant l’appareil circulatoire des Lamelli- branches, M. Ménégaux abordait un sujet qui, certes, n'était pas neuf, mais dans lequel cependant il était certain de trouver du nouveau, Car si la question des capillaires, et celle de la communication de l’appareil circulatoire avec l'extérieur, ontfourni matière à de nom- breux mémoires, il faut remarquer que les recherches avaient presque toujours eu pour objet les mêmes espèces les plus vulgaires, l’anodonte et la moule, tandis que les autres Lamellibranches étaient fortement négligés. M. Ménégaux à apporté dans son mémoire des preuves nouvelles à l'appui de cette opinion que le système circulatoire des Lamellibranches est clos, et dans un chapitre spécial sur la fwrgescence, il montre que l’afflux du sang dans certaines régions suffit pour en provoquer l'érection, et il indique le rôle important joué dans cet acte par l’orifice boyano-pédieux. En étudiant le système circulatoire artériel et vei- neux dans un grand nombre de formes (70 espèces appartenant à 42 genres), M. Ménégaux a comblé une grosse lacune. Nous ne le suivrons pas dans cette étude un peu aride, et qui, parfois, n'offre qu’un intérêt pure- ment descriptif; il faut néanmoins savoir gré à l’auteur d'avoir entrepris et mené à bien cette tâche, car elle était ingrate et exigeait de sa part une grande habileté manuelle dont il convient de le féliciter, Je m'occuperai plutôt d’une partie de son travail qui offre un intérêt beaucoup plus général ; je veux parler de l'étude de la branchie, qui conduit à des considé- rations phylogénétiques sur les relations des Lamelli- branches et à une classification tout à fait naturelle de cet ordre. Toutefois, il est juste de faire remarquer que M. Ménégaux avait été précédé dans cette voie brillante par M. Pelseener qui a, le premier, reconnu l’impor- tance des caractères fournis par la branchie et s’en est servi pour établir une classification en cinq ordres naturels, 11 me semble même que, tout en fournissant sur la structure de la branchie des renseignements plus nombreux que ceux donnés par Pelseener, M Mé- négaux ne lui rend pas suffisamment justice, et ne fait BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX pas ressortir avec assez de générosité l'importance des remarques et des idées de son devancier, t C’est une grosse erreur de croire que les Lamelli- branches possèdent deux branchies de chaque côté; Pelseener a montré qu'ils n’ont, comme les Gasté- ropodes inférieurs (Diotocardes), qu’une seule branchie de chaque côté, qui apparaît sous forme d'une double rangée de tubérosités développées sur un axe longitu- dinal. Chaque rangée, en se développant, forme habituellement une lame comprenant un feuillet direct et un feuillet réfléchi. Mais dans certaines familles (Nuculidés, etc.) dont Pelseener a fait le groupe des Prorograncuiés et M. Ménégaux celui des FOLIOBRANCHES, les tubérosités, en se développant, restent isolées et se transforment en filaments aplatis, dont l’ensemble constitue une branchie identique à la branchie bipec- tinée des Diotocardes, C’est bien la forme la plus simple de l'appareil branchial, qui représente l’état embryonnaire de lappareil chez les autres Lamelli- branches et il est intéressant de remarquer que cette forme s'observe chez les Lamellibranches les plus anciens. Dans un deuxième groupe, les FiciBraNones de M. Ménégaux, se rangent les formes dont les branchies, formées chacune par un feuillet direct et par un feuillet réfiéchi, sont constituées par des filaments, tantôt indépendants les uns des autres (Arcadés, Trigonidés), tantôt reliés par des bouquets de cils ou des tubérosités d'attache (Mytilidés, Ostréidés). Pour indiquer plus net- tement cette différence, M. Pelseener avait établi, avec raison selon nous, deux groupes distincts, celui des FiziBrANCHIÉS et celui de PSEUDOLAMELLIBRANCHIÉS, COr- respondant à ces deux états de la branchie. Dans toutes les familles précédentes l'union des filaments étant très lâche, la branchie, quelle que soit sa complexité, est toujours résoluble en filaments simples. Il n’en est plus de même lorsque les disques d'union interfilamenteux sont traversés par un vaisseau anastomotique, ou que les deux feuillets directs et réfléchis sont reliés par des vaisseaux. Les branchies deviennent alors de vraies lamelles compactes, perfo- rées par des fenêtres, dans lesquelles les vaisseaux offrent un trajet des plus compliqués. Cette disposition caractérise les EULAMELLIBRANCHES de MM. Pelseener et Ménégaux, groupe qui comprend un très grand nombre de familles. Enfin les deux auteurs réunissent sous le nom de SEPTIBRANCHES quelques types dont les branchies, perdant leur structure, deviennent une cloison mus- culaire divisant la cavité palléale en deux chambres. Il est à remarquer que les Filibranches et les Pseu- dolamellibranches correspondent aux Asiphoniens, c'est- à-dire aux Lamellibranches les plus primitifs, et les Eulamellibranches aux Siphoniens, qui sont les der- niers venus sur le globe, La classification de M. Pelsee- ner résume donc très fidèlement l’histoire des Lamel- libranches. Or, si on compare les Lamellibraches aux Gastéropodes inférieurs (Diotocardes), on voit qu'ils ont, comme eux, le cœur traversé par le rectum, les bran- chies paires et bipectinées, les oreillettes et les reins doubles, deux aortes, etc. Tous ces caractères communs indiquent une origine commune : c'est ce que fait remarquer fort à propos M. Ménégaux, mais sans insister sur cette importante question, À notre avis il y avait là matière à un chapitre très intéressant et original, qui aurait fort bien trouvé sa place à la fin du mémoire. R. KŒuLERr, De Boeck et VWerhoogen, — Contribution à l'étude de la circulation cérébrale. Journal de médecine, de chirurgie et de pharmacologie, n° 21, 1890. Les physiologistes qui ont étudié la circulation cérébrale ne l'ont étudiée que dans son ensemble, On savait depuis Duret que les artères cérébrales se par- tagent en deux groupes distincts, à propriétés diffé- rentes (système cortical et système basilaire), Les 273 auteurs montrent que les conditions physiologiques de la circulation dans ces deux systèmes peuvent être différentes, que la quantité de sang qui y passe peut varier dans l’un d’eux indépendamment de l’autre, L'étude des lois physiques de la circulation cérébrale permettait de prévoir qu'il devait en être ainsi, C’est ce que les auteurs font ressortir, en tenant compte des propriétés physiques différentes des artères dans les deux territoires de distribution, cortical et basilaire. Toutes choses égales d’ailleurs, la circulation des liquides dans les canaux capillaires est fonction de la pression et de la viscosité du liquide considéré. La section du tube ef sa longueur, la nature du liquide et sa température, la nature de la paroi et aussi l’état électrique du liquide déterminent la pression-limite à laquelle le liquide commence à se mettre en mouve- ment, Les artères du système ganglionnaire (basilaire ou central) naissenf au voisinage de l'hexagone de Willis, Elles sont nombreuses, généralement disposées en angle droit par rapport au vaisseau d’origine, elles sont volumineuses et courtes au point de rendre minime le trajet du cœur aux ganglions de la base. Les artères du système corlical (périphérique) sont d'un calibre moindre et d’une longueur plus grande, elles constituent les branches terminales des vaisseaux naissant de l'hexagone, Après avoir contourné la sur- face des circonvolutions, elles pénètrent enfin dans leur intérieur et se divisent en une infinité de branches d’une ténuité extrême. La circulation cérébrale peut donc être représentée schématiquement par deux arcs de cercle à origine el à terminaison communes, mais à trajets intermédiaires distincts. Los pressions-limites correspondant à ces deux cireuits sont très différentes. Si l’on abaisse peu à peu la pression générale, on obtient bientôt un moment où il y aura arrêt de la circulation dans les capillaires longs et fins, tandis que le passage du liquide continuera à se faire dans les vaisseaux de la base, C’est ce qu'il fallait constater chez l’animal vivant et par les méthodes physiologiques. Pour faire varier la circulation dans le cerveau, les auteurs se sont servis de trois réactifs : l’éther, l’anhydride ear- bonique et la morphine, L’éther et l’anhydride carboni- que (asphyxie) exagèrent la circulation cérébrale dans son ensemble, mais à des degrés différents : l’éther a une action lente et progressive; l’action de l’asphyxie est beaucoup plus rapide. La morphine abaisse la pression sanguine ; cependant la quantité de sang qui passe par le cerveau en un temps donné reste la même. Conformément au théorème physique exposé plus haut, il fallait s'attendre à voir la répartition du sang se modifier sous l'influence de cet agent, c’est ce que l’on constate : quoique la quantité totale de sang qui traverse le cerveau reste Ja même, la morphine anémie l'écorce tandis qu'elle exagère la circulation dans le système basilaire. Quant au dispositif expérimental très ingénieux imaginé par les auteurs, il serait trop long de le dé- crire ici, Jean Massanr. 4° Sciences médicales. Gilis (D°P.), Agrégé à la Faculté de Médecine de Mont- pellier. — Précis d’embryologie adapté aux sciences médicales, 1 vol, in biblioth. diamant, (6 fr.) G. Masson, Paris, 1891. Dans ces dernières années, la connaissance de l’em- bryologie a pris une très grande place dans les études médicales, On s’est en effet pénétré peu à peu du grand principe formulé par Lamarck que « pour bien con- naître les choses, il faut les voir venir », et l’on a com- pris qu'il n’était possible d’avoir une connaissance approfondie et raisonnée de l’anatomie qu’en l’éclai- rant des lumières si vives de l’embryologie. Si l’anato- 274 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET JNDEX mie nous montre comment sont les choses, l’'embryologie nous dit pourquoi elles sont ainsi, et elle rend tout naturels un grand nombre de faits qui sans elle seraient inintelligibles ou tout au moins nous paraïîtraient bi- Zarres OU an0rmMmaux, De cet état de choses est née la nécessité de mettre entre les mains des étudiants en médecineun livre résu- mant d'une manière claire, exacte et précise l’état ac- tuel de l’embryologie élémentaire. C'est ce qu'a fort bien compris et réalisé M. Gilis dans le livre dont nous donnons ici l'analyse, Elévé à la rude école de l’ensei- gnement, il a appris ce qu'il fallait dire et comment il fallait le dire ; aussi a-t-1l su éviter les digressions inu- tiles et cet entassement chaotique d'opinions discor- dantes, de vieilles théories et de faits douteux qui jettent le trouble et la confusion dans l'esprit du lec- teur. L'ouvrage se divise en deux parties. — La première contient l'étude de l’œuf des Oiseaux et des Mam- mifères; à propos de sa maturation, l'auteur fait un exposé fort clair dela karyokinèse, L'étude de l'œuf de l’Amphioæus lui permet de décrire la formation du blastoderme, la théorie de la gastrula, les théories de Hertwig sur le célome et le mésenchyme. L’ébauche de l’embryon, les formations provenant des divers feuillets du blastoderme, les annexes du fœtus et le pla- centa en particulier sont ensuite soigneusement étudiés. Dans la deuxième partie (organogénie), M. Gilis a étu- dié successivement le développement du squelette, des différents appareils, du système nerveux, des organes des sens; chemin faisant, on trouve l'explication des malformations avec lesquelles les chirurgiens et les mé- decins ont souvent à compter et dont il n’est pas indif- férent de connaître l’origine, origine que lestraités de pathologie n’expliquent pas toujours suffisamment. Le livre de M. Gilis ne sera pas utile seulement aux étudiants en médecine; les élèves des facultés des sciences trouveront en lui un excellent guide pour leurs premiers pas; et plus tard, ils le consulteront encore avec profit quand ils voudront établir le bilan et faire le classement des notions acquises. J. HÉRaIL. Segond (P.). — De l’hystérectomie vaginale dans le traitement des suppurations périutérines. Annales de gynécologie, Paris, 1891, €. I, p. 161. Jusqu'à ces derniers temps la voie abdominale était, pour ainsi dire, seule employée dans le traitement des affections périutérines, M. Bouilly avait bien timide- ment tenté de faire revivre l’incision vaginale, et M. Péan avait publié à l'Académie de médecine une série d'observations de castration utérine., On n’y avait prêté qu'une attention relative. M. Segond, qui vient de faire vingt-trois fois l’ablation vaginale de l'utérus et des annexes, s’en déclare partisan convaincu, Son plaidoyer enthousiaste, s’il n’entraîne pas l'adhésion générale, va tout ax moins faire discuter la question et en provoquer une étude sérieuse qui manquait jus- qu'ici, D: Henri HARTMANN. Lucas-Championnière (J.) — Sur la pratique antiseptique des accouchements. Le nettoyage des mains, Journal de médecine et de chirurgie pra- tiques, Paris, 1891, p. 49 et 129. Nous ne pouvons analyser ce travail que devront lire dans le détail tous ceux qui s'intéressent non seule- ment à la pratique des accouchements, mais à celle de la chirurgie, la désinfection des mains étant capi- tale dans la pratique de l’antisepsie. D' Henri HART#ANx. Danilewsky (de Karkof), — Sur les microbes de l'infection malarique aiguë et chronique chez les Oiseaux et chez l'Homme. Ann. de l'ins- titut Pasteur, 1891. L’infection malarique aiguë chez l’homme diffère de la forme chronique non seulement par les symptômes, mais aussi par la forme des parasites sanguins. Dans la malaria aiguë, on a affaire à un petit hématozoaire amiboïde non pigmenté au début; dans l'infection chronique, on constate surtout Les formes en croissant et le Polimitus flagellé. En ce qui concerne les oiseaux, on retrouve dans la malaria chronique les mêmes formes flagellées que dans le sang de l’homme; les deux formes se déve- loppent dans les pseudo-vacuoles des hématies. Ces faits étaient antérieurement connus par un tra- vail du professeur Danilewsky; il y ajoute aujourd’hui l'étude des formes aiguës de la malaria chez les oi- seaux, Les oiseaux peuvent contracter une infection malarique aiguë, pendant laquelle apparaissent dans leur sang des microbes intracellulaires, tout à fait analogues à ceux de l’homme dans la fièvre tierce ou quarte, La température de l'oiseau s'élève modérément (de 1° à 195), il perd l’appétit, devient apathique; son plumage se flétrit; on observe même des phénomènes de convulsions; le poids du corps diminue. Les symptômes s’aggravent parallèlement à la mul- tiplication du microbe. Tout le cycle de la maladie se termine en quatre à six jours; après quoi survient la guérison, c’est-à-dire la disparition des microbes du sang; l’état général redevient normal; au cours des expériences, plusieurs oiseaux succombèrent. Pendant ces phénomènes morbides, l’examen du sang fait assister à l’évolution du parasite dans les glo- bules sanguins. Les expériences du professeur Danilewsky per- mettent d'affirmer que les hématozoaires des oiseaux sont des microbes malariques pathogènes, semblables à ceux de l’homme. Dr H, Duire, Vincent (Hi). — Présence du bacille typhique dans l'eau de Seine pendant le mois de juillet 1890. Ann. de l'Institut Pasteur. La présence du bacille typhique dans les eaux de la Seine a été constatée maintes fois, et il suffirait de rap- peler à ce sujet les travaux de MM. Brouardel, Thoinot, Loir, Mais c’est une question toujours vitale et inté- ressante pour la population, à laquelle on distribue généreusement la fièvre typhoïde pendant une partie de l’année. Comme certains observateurs ont insisté sur ce fait que la recherche du bacille typhique pouvait conduire à des erreurs résultant de la similitude de quelques micro-organismes entre eux, les recherches de M. Vincent présentent un certain intérêt, puis- qu'elles établissent la présence certaine dans l’eau de Seine du bacille d’Eberth-Gaffky. Dans les analyses d’eau de Seine, on trouve toujours côte à côte le bacille typhique et le Bacillus Coli com- munis ; cela est peu étonnant, puisque ce dernier existe communément dans les matières fécales ; il est d’ail- leurs facile de les distinguer par les cultures sur les pommes de terre. En ce qui concerne les bacilles pseudo-typhiques de M. Cassedebat, M. Vincent leur assigne quelques carac- tères qui permettent de les distinguer facilement du bacille d’Eberth. Le pseudo-typhique n° 1 a liquéfié la gélatine le qua- trième jour : le bacille est immobile. Le pseudo-typhique n° 2 ne pousse pas dans le bouillon phéniqué à 42 et il donne sur la gélatine une culture facile à distinguer du bacille typhique. Le pseudo-typhique n° 3 donne sur la pomme de terre une culture jaune brun, qui ressemble à celle du bactérium coli commune et nullement à celle du bacille d’Eberth. M. Vincent peut donc conclure de ses expériences qu'il n'y aucun doute sur la nature du micro-organisme qu’il a isolé de l’eau de Seine, et que ce microbe est bien celui de la fièvre typhoïde, Dr H. Dugier. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 273 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 6 avril 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Picard : Sur un système A uaTons aux dérivées partielles. — M. J. Weingarten: Sur la théorie des surfaces applicables sur une surface donnée, — M. E. Goursat : Sur la théorie des surfaces applicables. — M. R. Liouville étudie un problème d'analyse relatif à l'expression des mouvements dépendant de trois paramètres. — M. H. Padé : Sur les fractions continues régulières relatives à e, — M. L. Cruls : Loi suivant laquelle la somme des distances de la Lune à deux étoiles quelconques varie en fonction du temps. — M. G. Bigourdan donne la suite des nébuleuses nouvelles qu'il a découvertes à l'observatoire de Paris, — M. Borrelly : Observations de la planète @) découverte à l’observatoire de Marseille. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M, A. Imbert a étudié le mode de vibration des membranes mises en mouve- ment par un courant d’air et soumises à des tractions variables. Des faits observées parlui, il déduit pour di- vers mouvements du larynx dans la phonation un rôle différent de celui qui est admis généralement. — M. H. Moissan a préparé le triiodure de bore par di- vers procédés, dont le meilleur consiste à faire réagir le gaz acide iodhydrique sur le boreamorphe de Deville et Wæbhler; il décrit les principales propriétés de ce corps qui fournit des réactions très énergiques. — M. E. Péchard a cherché à déterminer le composé dont la formation, dans l'action de l’eau oxygénée sur les solutions de molybdates alcalins, donne une colo- ration orangée; il a reconnu un acide permolybdique. — M. G. A. Le Roy décrit une méthode permettant de séparer par l’électrolyse le fer d’avec le cobalt et le nickel. — M. J. A. Le Bel a poursuivi ses recherches sur les isoméries pouvant exister entre les dérivés al- cooliques des chlorures d’ammonium ; dans des travaux précédents, il avait montré en formant deux chlorures de triméthylisobutylammonium, que l’isomérie est réa- lisable à la condition d'opérer sur des radicaux alcooli- ques suffisamment élevés, Pour démontrer que les radicaux unis à l’azote restent dans une position géo- métrique invariable lorsqu'ils sont suffisamment com-- plexes, il a formé des dérivés plus élevés encore et constaté le pouvoir rotatoire caractéristique de l’asymé- trie moléculaire; le chlorure d'isobutylpropyléthylmé- thylammonium, après fermentation par les moisissures, est fortement lévogyre. — M. E. Grimaux et L. Le- fèvre ont étudié les dérivés nitrés de l’orthoanisidine diméthylée pour déterminer l'influence de la position du groupe Az (CH)? sur la position des groupes Az O?, — M. P.Cazeneuve, en traitant par la chaleur les sels barytiques des camphosulfophénols, a obtenu des ho- mologues supérieurs du phénol ordinaire. — M. R. Varet, faisant réagir du brome en excès sur la téré- benthène en présence du chlorure d'aluminium, à obtenu très peu de bromure d'isopropyle, à l'inverse de ce qui se passe dans ces conditions avec le cymène, — M. G.Massol à isolé le malonate acide d’éthyle, et dé- termine ses propriétés optiques etthermochimiques, — MM. A. el P. Buisine étudiant les conditions du blan- chimentà l'air de la cire,ontreconnu que l’action prin- cipale dans cette décoloration revient à la lumière et non à l'ozone: avec la matière colorante s’oxydent di- verses impuretés, telles que l’acide oléique; l oxydation de ces impuretés est facile et entraine c elle des matiè- res colorantes ; ce fait justifie la pratique d’ajouter un peu de suif à la cire pour la blanchir. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Arnaud et A. Char- rin ont étudié la transformation des composés azotés par la vie du bacille pyocyanique dans un milieu ehi- miquement déterminé (asparagine et sels minéraux). L'asparagine est d'abord, par une action diastasique, transformée en acide aspartique, qui est à son tour transformé presque totalement en ammoniaque, par la nutrition même du microbe ; une très petite partie de l’azote reste engagé dans la pyocyanine et les ma- tières organiques encore indéterminées, parmi les- quelles doivent se trouver les substances physiologi- quement intéressantes par leurs propriétés toxiques et vaccinales, — MM. V. Martinand et M. Rietsch ont dé- terminé qualitativement et quantitativement les micro- organismes existant sur la pellicule des raisins de di- vers vignobles français, susceptibles de se développer en milieu acide; il a été obtenu en général des moisis- sures et le Saccharomyces apiculatus, le S. ellipsoideus étant rare. Les mêmes recherches faites sur les moùûts à des époques variées ont montré qu’en général la fer- mentation commence par le S. apiculatus qui est remplacé peu à peu par le S. ellipsoideus; les bactéries etles mycodermes ne sont pas rares ; on les retrouve dans les lies, — M.Ch. Bouchard a fait des essais de vaccination avec des cultures stérilisées et très diluées du bacille pyocyanique chez le lapin pour déterminer l'ordre de grandeur de la quantité minima de substance vaccinante efficace ; il résulte de ces recherches que les substances vaccinantes peuvent agir à la dose d’une minime fraction de milligramme. — M. A. Julien for- mule une loi destinée à rendre compte dans la série animale de la position des centres nerveux et des prin- cipaux organes sensoriels et locomoteurs.— M. L. Ran- vier à vu des cellules lymphatiques de la lymphe péri- tonéale de la grenouille, déposées dans une chambre humide à l’abri des microbes, se transformer en clas- malocytes sous l’action d’une température de 259, — M. Hédon a constaté chez le chien, après l'injection de paraffine dans le canal pancréatique, une glycosurie transitoire et des troubles graves de la nutrition mani- festés par l’amaigrissement et l’azoturie. — M. Gley, cherchant a démontrer le fonctionnement du pancréas comme glande vasculaire sanguine, a obtenu chez le chien dela glycosurie parla lig gature des veines pancréa-, tiques j en injectant dans le canal de Wirsung du suif ou de la gélatine colorés, ce qui permet d’en suivre la marche dans la glande, il a également provoqué chez ses sujets de la elycosurie et une dénutrition générale, — M. G. Pouchet résume ses recherches sur Ta repro- duction de la sardine des côtes océaniques de la France ; en trois ans il n’a pu observer que deux fois des femelles prêtes à pondre, et les banes dont ces fe- melles faisaient partie n’ont fait que passer ; les œufs recueillis sur ces individus sont plus denses que l’eau de mer; jamais M. Pouchet n’a trouvé d'œufs de sardine flottants : enfin l’étude du régime de la sardine au point de vue de la taille ne permet pas d'admettre une pé- riode de frai limitée. — M, E.T. Hamy fait voir par diverses considérations que le cräne étiqueté au Mu- séum comme cràäne de Moctezuma Il est attribué à tort à ce personnage, — M. P. Termier signale l'exis- tence de tufs d'andésite dans le flysch de la Clusaz (Haute-Savoie), — M, Daubrée signale dans un tableau de Raphaël une représentation fort exacte de la chute d’une météorite ; il ajoute quelques considérations his- toriques pour appuyer l'interprétation de cette figure, restée longtemps douteuse. Mémoires présentés. — MM. Badin et Escoffer adres- sent les résultats de leurs recherches sur le cuvage des vins en vase complètement clos .—M. P. Lagrange 276 ACADÉMIES ET SOCIËTÉS SAVANTES adresse un Mémoire ayant pour titre: « Méthode de dosage des matières organiques dans les jus de bette- raves, les sucres etles mélasses, » — M. le Ministre des affaires étrangères transmet une note sur un système de frein pour wagons de chemin de fer, adressée par M. Arnaldi, de Palerme, Séance du 13 avril. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Poincaré : Sur l'intégration algébrique des équations différentielles. — M. E. Vessiot : Sur les équations différentielles linéaires. — M. A. Markof: Sur uneclasse de nombres complexes, — M. Resal lit un rapport sur un mémoire de M. de Sparre ayant pour titre : Sur le pendule de Foucault, M. de Sparre est parvenu à ramener la solu- tion du problème du pendule de Foucault à deux qua- dratures qu’il développe en série, en suivant la mé- thode des intégrales singulières de Cauchy. — M. le général Derrécagaix rend compte des opérations de mesure d'une base fondamentale de la triangulation francaise, effectuée pendant l'été de 1890 par le service géographique de l’armée, dans le but de rapporter cette triangulation à la nouvelle définition du mètre; la base de Delambre, calculée par l’enchainement de la nouvelle, s’est trouvée identique ; mais par le raccor- dement avec les triangulations des pays voisins, on observe une erreur systématique qui tend à faire con- sidérer comme trop courts les différents étalons géodé- siques étrangers, — MM. Rambaud et Sy : Observa- tions de la comète Barnard-Denning et des nouvelles planètes Borelly et Palisa, faites à l'Observatoire d'Alger. 2 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Caïlletet donne la des- cription du manomètre à air libre de 300 mètres établi à la tour Eiffel. — M.B. C. Damien a examiné lafacon dont une pression graduellement croissante jusqu'à 200 atmosphères fait varier le point de fusion de diverses substances; des chiffres qu'il a obtenus il a tiré une loi dont la forme parabolique explique comment la pression peut, suivant le cas, élever ou abaisser le point de fusion d’un corps ; il a pu être constaté expé- rimentalement, pour la naphtylamine, que le point de fusion s'élève d’abord avec la pression pour redescendre avant 200 atmosphères au-dessous du point de fusion normal. — M. H. Pellat a déterminé le rapport entre l'unité électromagnétique et l’unité électrostatique d'’é- lectricité en mesurant une même différence de poten- tiel successivement en unités électromagnétiques et en unités électrostatiques ; deux séries d'expériences ont donné le même résultat, v — 3.009 X 1010, nombre qui ne diffère du nombre trouvé par M. Cornu pour la vitesse de la lumière, que d’une fraction inférieure à l'erreur probable, — M. A. Besson a obtenu les trois chlorobromures de silicium que prévoit la théorie, par l’action de l’acide bromhydrique sur le chlorure de silicium ; il donne les propriétés du tribromo-chlorure, qui est nouveau, — M, L, Pigeon a fait l'étude calori- métrique du chlorure platinique et de ses combinai- sons. — MM. À. Joly et E. Leïidié ont constaté que le rhodium peut être isolé facilement par l’électrolyse dans un milieu acidulé par l’acide chlorhydrique et ne contenant pas d’autres métaux que des métaux alcalins; ils ont déterminé les conditions du dépôt électrolytique en liqueur sulfurique et azotique, — En faisant réagir le chlohydrate d’hydroxylamine sur le proprionylpro- pionitrile en solution dans la potasse concentrée, M. Hanriot a obtenu un corps répondant à la formule centésimale de la monoxime du propionylpropionitrile, mais que diverses considérations doivent faire recon- naître comme le méthyléthylamidoisoxazol, — M. Ma- quenne a étudié les proportions dans lesquelles la phénylhydrazine réagissant pendant un temps donné à 100° précipite les divers sucres; les différences sont suffisantes pour permettre la détermination du sucre par la pesée du précipité obtenu, — M. G. Denigès ayant observé la formation d’une combinaison bien cristallisée de sulfite de zinc et d’aniline, a pu obtenir systématiquement les combinaisons de cette base avec un grand nombre des sulfites métalliques, — MM. E. Grimaux et A. Arnaud ont obtenu la quinine en com- binant un méthyle à la cupréine, alcaloïde à fonction phénolique, dont la quinine est ainsi l’éther méthyli- que ; les auteurs attirent l’attention : 1° sur le rôle joué dans les synthèses de principes immédiats des végétaux par le groupe méthylique à l'exclusion du groupe éthy- lique ; 2° sur la possibilité d'obtenir une série de qui- nines en combinant à la cupréine divers radicaux al- cooliques. — M, P. Cazeneuve par l’action de la paranitrosodiméthylaniline sur la morphine a vu se produire une matière colorante d'un beau violet: l’a- nalyse de cette réaction éclaire quelques propriétés de la morphine. — M. Ch. Blarez établit une formule pour exprimer l'influence exercée par la présence des sels minéraux neutres de potassium sur la solubilité du bitartrate de potassium, — M. P. Carles indique que la présence de la mannite en quantité notable dans l'extrait d’un vin est caractéristique d’un coupage par le vin de figues. — M. R. Lézé décrit un procédé pra- tique pour reconnaitre la margarine dans les beurres; ce procédé consiste essentiellement à fondre le beurre en présence de sirop de sucre concentré et à observer l'aspect de l’émulsion qui se forme, — M, Ellinger, ayant observé un grand nombre d'échantillons de beurre à l’oléoréfractomètre, a vu que l'indice du beurre pur varie beaucoup avec les saisons, — M. Ed. Mohler a analysé, suivant la méthode qu'il a commu- niquée récemment, les diverses portions obtenues par la rectification industrielle d’un flegme d'alcool de mélasse; il résulte de son travail que 80 °/, du flegme passent à l’état d'alcool suffisamment pur; les produits de tête sont bien moins impurs que les produits de queue, — M. St. Meunier a reproduit la daubréelite des météorites en traitant au rouge par l'hydrogène sulfuré un alliage convenable de fer et de chrome. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. G. Linossier montre que le pigment découvert dans certaines algues par M. Phipson n’a aucun rapport avec l’aspergilline, non plus qu'avec l'hématine du sang. — M. J, Vesque : Sur les Clusia de la section anandrogyne. — M. J. Hérail, en s'adressant aux racines des diverses espèces de Per- venche, a retrouvé dans cet organe les faisceaux libéro- ligneux à double liber qui ontété étudiés récemment dans les organes aériens de diverses plantes. Mémoires présentés. — M. de Backer donne lecture d’un mémoire : «Sur les vaccinations antituberculeuses en général et sur le remède du D'Koch en particulier.» — M, J. Gernaërt présente un mémoire ayant pour titre : Conservation des bois, créosotage des traverses de chemin de fer. — M. P. Mauvenu adresse la des- cription d’un « système d’arrèt des steamers, per- mettant d'éviter les collisions en mer. » — M. Ch. L. Deiss, à propos des récentes communications de M. Bouchard et de MM, Arnaud et Charrin, rappelle qu'il a déjà émis l’idée « que les produits de sécrétion des microbes sont susceptibles d’agir comme des ferments et de produire directement, comme les diastases, des dédoublements, » — M. E. Aubert adresse ‘un projet d'appareil pour arrêter les chevaux emportés. L. LAPICQUE. ACADÉMIE DE MÉDECINE 7 avril 1891, Suite de la discussion sur la dépopulation de la France à laquelle prennent part MM. Tarnier, Le Fort, Lagneau, Dujardin-Beaumetz et Guéniot. — Dans le cours de la séance, l’Académie a élu correspondants nationaux : MM. Morvan (de Lannilis) et Bouchard (de Bordeaux). Séance du Séance du 14 avril 1891. M. G. Sée expose les résultats d’un travail sur le traitement de la tuberculose par les atmosphères arti- ficielles sous pression; il donne en outre quelques 4 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES to nl 1 explications sur ce mode de traitement et les résultats cliniques qu'il a obtenus. — M. Cornil rend compte d'une observation d’ostéopériostite post-typhoïde. Les abcès consécutifs à la fièvre typhoïde renferment souvent des bacilles typhiques mélangés parfois au micrococeus de la suppuration. — M. Budin montre des dessins représentant une femme à bassin oblique ovalaire de Nœgelé. — M. Frémont (Vichy), étudiant la nutrition chez les diabétiques, conclut que l’on doit employer les alcalins pour modifier la nutrition, sur- tout chez les malades dont le coefficient d'oxydation est abaissé, — Suite de la discussion sur la dépopula- tion à laquelle prennent part MM. Tarnier, Brouardel et Lagneau. L'Académie a élu correspondants natio- naux : MM, Levieux (de Bordeaux) et Mignot (de Chantelle). SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 11 avril M. Hédon: Sur les phénomènes consécutifs à l’alté- ration du pancréas déterminée expérimentalement par une injection de paraffine dans le canal de Wir- sung.—M.E.Gley : Procédé de destruction du pancréas, troubles consécutifs à cette destruction. (Voir C. R., séance du 6 avril.) — MM. Combemale et Lamy exa- minant l’excrétion urinaire des tuberculeux traités par la lymphe de Koch à la dose de 2 milligrammes, ont trouvé une diminution de l’urée avec une albuminurie légère. — MM. Cadéac et Meunier ont étudié en par- ticulier l’action physiologique d’un des principes cons- tituants de la vulnéraire, l'essence de sauge ; cette substance produit des phénomènes épileptiformes, — M. Onanoff décrit dans les nerfs optiques des Cépha- lopodes une torsion sur l’axe de 180°; cette torsion a pour effet de porter les impressions rétiniennes pro- duites par un objet extérieur au voisinage des centres moteurs des membres situés du côté de l’objet, elle redresse anatomiquement l’image renversée par l’ap- pareil optique. — M. A. Giard signale un Jsaria qui est un parasite dangereux pour la larve du hanneton. M. Giard a réussi à le cultiver sur des milieux arti- ficiels, il compte l’ensemencer sur les terrains infestés par les vers blancs.—M.E. Aubert a constaté chez cer- taines plantes grasses un dégagement simultané d’oxy- gène et d'acide carbonique. À propos de cette note, M. G. Bonnier offre à la Société, en son nom et en celui de M. Aubert une brochure sur un nouvel appareil pour l'analyse des gaz. — M. Boucheron présente un travail sur l'anatomie des nerfs ciliaires superficiels chez l’homme. — M. G. Pouchet annonce avoir obtenu in vitro le pigment mélanique en faisant réagir sur du sang le bichlorure de mercure et l'alcool. —M. Fabre- Domergue est élu membre titulaire de la Société. Séance du 18 avril MM. Gréhant et Quinquaud ont fait des recherches du myographie dynamométrique surle muscle curarisé ; ils ont constaté une diminution de la force sans modi- fication de la forme de la courbe, — M, d'Arsonval fait remarquer l'influence qu'a sur ces phénomènes la nature du courant électrique excitateur, les courants induits excitant surtout les appareils nerveux, en par- ticulierles terminaisons motrices dans le caso les élec- trodes sont en contact direct avec le muscle, — M, La- borde a en effet observé sur des grenouilles empoi- sonnées par la eurarine que la contractilité du muscle excité par un courant induit, baisse en même temps que l’excito-motricité du nerf, sans pourtant tomber à zéro comme celle-ci, — M. Gréhant répond que ses recherches ont été faites avec des courants de pile. — M. Œchsner de Coninck a reconnu que sa ptomaine en C8 H!! Az arrête ou ralentit diverses fermentations diastasiques et bactériennes. — M. d'Arsonval a vu le sang soumis à l’action de l’acide carbonique à haute pression perdre presque toute sa capacité respiratoire, en même temps que lhémoglobine se précipite sous forme de masses brunes amorphes; il s’agit peut-être là de l’action des acides des sels du sang, mis en li- berté par l'acide carbonique.—M. d’Arsonval présente une soupape hydraulique destinée aux recherches phy- siologiques sur la respiration; elle présente l'avantage de fonctionner sous la pression de quelques milli- mètres d’eau, tandis que la soupape de Müller néces- site un effort considérable des muscles respirateurs. — M, d’Arsonval a fait des recherches sur la toxicité des extraits de divers tissus physiologiques, après fil- tration sur son filtre à acide carbonique ; les liquides filtrés sont fort peu toxiques — M. Gley annonce à ce propos qu'il a arrêté les accidents convulsifs chez les chiens thyroïdectomisés en leur injectant dans les veines le suc provenant de corps thyroïdes de mouton. — MM. Grimaux et Arnaud : fransformation de la cupréine en quinine. (Voir C.R.,13 avril.) —M,. Mangin. à propos de la note déposée par MM. Bonnier et Aubert sur un nouvel appareil à analyser les gaz, dit que cet appareil est le même qui a servi aux recherches de MM. Bonnier et Mangin sur la respiration des champi- unons, appareil qui est de l'invention de M. Leclerc. — M, Kronecker, continuant ses recherches sur l’exci- tation électrique du myocarde, apporte de nouvelles preuves à l'appui de lopinion que les trémulations produites par cette excitation sont sous la dépendance d’un appareil nerveux. — M.Arthus, par une série d'expériences variées, démontre que la destruction du sucre par le sang in vitro est un phénomène cadavé- rique analogue à la coagulation; les globules blancs jouent le rôle essentiel dans le phénomène, probable- ment en mettant en liberté un ferment analogue au fibrine-ferment. — M. Giard établit que le Photodrilus phosphorius (Dugés) trouvé quelquefois en Europe dans des terreaux provenant de serres appartient à la faune australienne ; il discute la position de ce genre dans la famille des Lombriciens. L. LAPiCQUE. SOCIÉTÉ FRANCAISE DE PHYSIQUE Séance du 3 avril 1891. M. Amagat fait une communication sur la mesure de l’élasticité des solides et de la compressibilité du mercure, Dans ses recherches antérieures sur la dila- tation et la compressibilité des liquides et des gaz, la nécessité de connaître la variation de volume des enve- loppes l'a amené à en faire une étude spéciale, Cette étude était d'autant plus nécessaire que les résultats obtenus jusqu'ici par les divers expérimentateurs sur l'élasticité des solides eten particulier relativement à la valeur du coefficient de Poisson, sont loin d’être con- cordants, Une première série d'expériences eut pour but de vérifier expérimentalement si les formules dé- duites de la théorie de l’élasticité sont légitimement applicables. L'appareil n’est autre que l'appareil clas- sique de Regnault disposé pour recevoir à la fois deux piézomètres. Ces piézomètres ont la forme de cylindres circulaires à bases plates; le rayon intérieur est le même, les rayons extérieurs seuls diffèrent. Les va- leurs déduites des formules de l’élasticité relatives à ce cas présentent avec les résultats de l'expérience un accord suffisant pour légitimer l’emploi ultérieur de cesformules, Pour déterminer le coefficient de compres- sibilité et le coefficient de Poisson, l’auteur a d’abord repris la méthode de Wertheim. Un dispositifingénieux permet de faire avec précision les mesures d’allonge- ment, Cet élément qui se mesure avec certitude dans le cas des métaux pouvant être travaillés en cylindres réguliers, devient assez incertain dans le cas du verre et du cristal. A la mesure de l’allongement, M. Ama- gat a alors substitué celle de la variation de volume intérieur lorsqu'on exerce une compression par l’exté- rieur, Enfin, dans le cas de pressions extrêmement fortes, il a mis en œuvre une troisième méthode qui consiste à mesurer le raccourcissement d’un tube de la substance à étudier, lorsqu'il est soumis de toutes parts 278 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES à une pression uniforme; ce Lube est plongé dans un liquide quiremplitun cylindre d’aciertrès résistant, Mal- gré l’opacité de ce cylindre, les variations de longueur du tube se mesurent avec précision par l'intermédiaire d’un petit piston traversant le cylindre d'acier et dont le contact avec l'extrémité du tube est contrôlé par un procédé électrique, Les résultats pour le verre sont identiques à ceux que M. Cornu à obtenus par une méthode toute différente. L'ensemble de ces recher- ches montre que le coefficient de Poisson n'a point la valeur constante + pour tous les corps. Ce n'est là qu'une limite inférieure, Ce coefficient théoriquement égal à + pour les liquides prend, pour certains solides mous, des valeurs assez voisines, et décroit en tendant vers la limite + à mesure qu'on considère des corps se rapprochant de plus en plus de l’état solide parfait, c’est-à-dire d’un état absolument réfractaire aux défor- mations permanentes. Les expériences précédentes ont également permis à M. Amagat de déterminer le coeffi- cient de compressibilité du mercure ; la valeur trouvée est identique à celle que M. Guillaume a déduite des expériences de MM. Amaury et Descamps. — M. Blond- lot expose ses recherches sur la constante diélectique du verre. Pour éliminer aussi complètement que pos- sible le résidu, il faut recourir à des durées de charge excessivement faibles. M. Blondlot s’est adressé aux vi- brations de Hertz. Il opère par une méthode directe n’exigeant aucun calcul etreposant immédiatement sur la définition de la constante diélectrique. En regard de la plaque métallique dans laquelle se produisent les oscillations, on place symétriquement, par rapport à l'axe de la première, deux autres plaques d’où partent des fils dont les extrémités sont très voisines l’une de l’autre. Dans ces conditions il ne peut se produire d’é- tincelle. Mais des étincelles éclatent dès qu'on crée une dissymétrie, en interposant par exemple une lame de verre entre la première plaque et l’une des autres. On compense alors par une lame de soufre d'épaisseur convenable. Le rapport des épaisseurs de verre et de soufre donne lerapport des constantesdiélectriques. En mesurant celle du soufre en valeur absolue par le pro- cédé de M. Curie, on en déduit celle du verre. Contrai- rement aux résultats deM. Lecher, M. Blondlot trouve une constante diélectrique parfaitement déterminée, d'accord avec la valeur trouvée par M. J.-J. Thomson, et plus voisine du carréde l’indice que les valeurs anté- rieures, Séance du 17 avril 4891. M. le commandant Defforges expose à la Société la méthode employée récemment par le service géogra- phique de l’armée pour mesurer une nouvelle base de triangulation ; cette base de 8 kilomètres environ est comprise entre Villejuif et Juvisy. Il présente égale- ment l'appareil à règle bimétallique construit par Brünner pour cette mesure, C’est une règle à traits, d’une longueur de 4 mètres, formée de deux barres superposées, l’une en platine, l’autre en cuivre : elle constitue done une règle de Borda et définit sa propre température. Elle a été étudiée avec le plus grand soin par M. Benoît, au Bureau International, tant au point de vue de sa longueur que de ses coefficients de dila- tation ; elle dérive ainsi immédiatement du nouveau mètre international. M. Defforges expose lesopérations à effectuer sur le terrain. On établit d’abord des repè- res verticaux distants de # mètres et rigoureusement en ligne droite. Ces repères ne sont autres que les axes optiques de théodolites excentriques construits par Brünner avec une grande perfection. On amène la règle sous les repères et on mesure au moyen de la vis micrométrique des microscopes verticaux l'écart entre l'axe optique et le trait de la règle métrique, ce qui donne la distance exacte des repères consécutifs, L'in- clinaison de la règle est fournie par un niveau, La base uéodésique a été mesurée deux fois, les deux valeurs n'ont différé que de 1 centimètre, En reliant cette base avec l’ancienne base de Melun, on trouve un accord inespéré et presque parfait, La comparaison avec les triangulations étrangères présente au contraire un écart de beaucoup supérieur aux erreurs possibles ; il offre de plus un caractère systématique, ce qui révèle certainementune erreur de comparaison dans les copies de la toise du Pérou qui ont servi à exécuter ces travaux dans les pays étrangers. — M, Branly indique les par- ticularités curieuses qu'offre la conductibilité électrique des poudres métalliques. Un cylindre de poudre métal- lique agglomérée ou même comprimée présente une conductibilité excessivement faible. Cette conductibilité s'accroît dans une proportion énorme quand on la fait traverser par un courant de haute tension ou mème quand on produit simplement des décharges éleetrosta- tiques au voisinage du circuit. De plus cette condueti- bilité persiste, mais il suffit alors d’ébranlements très faibles, par exemple de petits chocs produits sur le tube avec le doigt, pour le faire revenir à la conducti- bilité primitive. Cependant le corps n’a repris qu'en apparence son état primitif, carune décharge beaucoup plus faible que la précédente lui redonne une conduc- libilité élevée, — M. Ch. Henry s’est proposé de déter- miner le poids minimum de matière perceptible à l’o- dorat dans le cas des différents parfums. La substance introduite dans un vase de verre se diffuse au travers d’une membrane de papierflexible et s'échappe par un tube, On place le nez à l'extrémité du tube et on note le temps nécessaire pour percevoir une première impression. D'autre part un petitaréomètre de Fahren- heit sensible au $ de milligramme permet de suivre la perte de poids de la substance en fonction du temps et par suite de mesurer la vitesse d’évaporation de la substance, Ces deux éléments suffisent pour faire con- naitre par un calcul simple le poids de matière qui a agi sur lPodorat pendant le temps donné, Edgard Haunté. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS 24 avril 1891. M. Béchamp, à propos de la note présentée à la dernière séance par M. Popoff sur le mécanisme de la formation de l’urée dans l'organisme, explique pour- quoi, suivant lui, l'expérience de M. Popoff ne pouvait donner aucun résultat, M. Béchamp envisage Purée comme un produit du dédoublement par l'oxydation des matières albuminoïides : il ne faut donc pas espérer la reproduire dans un milieu réducteur comme celui qu'emplovait M. Popoff. L’urée ne se produit pas, à proprement parler, dans l'organisme; elle est seulement mise en liberté ; le lieu de sa formation, c’est le règne végétal. — M, Friedel présente une note de M. Juil- lard sur les huiles d’aniline, pour rouge, — MM. Gri- maux et Lefèvre ont été amenés à étudier l’action de l'acide nitrique sur l’orthoanisidine diméthylée et ont obtenu une métanitroorthoanisidine, fusible à 999, et des produits trinitrés, qui ont, d’après eux, la cons- titution suivante : Séance du A RE Re DANCE: 2 DNS 9 7 Y“CH2— Az0? / Y“AzO? CHS O0 AzO? et CHO Az O? Az O? AzO? qui tous deux donnent naissance à du dinitrogaiacol. — MM. Grimaux et Arnaud ont réalisé la transforma- tion de la cupréine C19H22A720? en quinine C20HAA720? en traitant la cupréine par le sodium, ou simplement la soude concentrée, et le chlorure de méthyle; ce qui démontre que la quinine est la métho-cupréine, et que ce dernier alcaloïde contient un oxhydrile phénolique. L'iodure de méthyle, dans les mêmes conditions, donne naissance au biiodométhylate de quinine, d’où l’on ne peut régénérer la quinine; c'est pourquoi il faut em- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 279 ployer le chlorure de méthyle pour obtenir la base libre. MM. Grimaux et Arnaud ont comparé les iodométhylates de quinine naturelle et de quinine de la cupréine et les ont trouvés identiques dans toutes leurs propriétés; le pouvoir rotatoire est le même; ils ont comparé les sulfates qui sont également identiques et possèdent tous les deux une belle fluorescence bleue, alors que le sulfate de cupréine n’en a pas. Enfin ils ont commencé la préparation des homologues supérieurs de la quinine en substituant au chlorure de méthyle les autres chlorures alcooliques, — M. Le Bel a examiné la forme cristalline des chloroplatinates de toute la série des ammoniaques composées, afin de voir s’il était possible de mettre en évidence une relation entre la variation des formes cristallines et de la composition chimique; il n'a pu arriver à ce résultat; mais il trouve l'explication de l'irrégularité de la distribution des formes cristallines dans ce fait que les sels examinés ont la plus grande tendance à former des sels doubles, soit en s’asso- clant molécule à molécule, soit en se groupant dans la proportion de trois molécules d'un ammonium pour une de l’autre ; il paraît probable que les isoméries dues aux différences des valences de Pazote donnent naissance à des ammoniums qui s'associent de cette manière. A. COMBES. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE MINÉRALOGIE Séance du 9 avril M. Des Cloizeaux est nommé à l’unanimité membre honoraire de la Société. — M. Lavenir, prépateur de Minéralogie à l'Ecole Normale est nommé secrétaire. M. Georges Friedel a étudié une serpentine prove- nant de Brewster (New-York). Cette substance, qui se présente sous la forme d'une masse à clivages cubiques et octaédriques, avaitété considérée par M. J. D. Dana comme une pseudomorphose. Elle se compose en réa- lité de lamelles cristallines orthorhombiques enche- vêtrées de manière à former des groupements pseudo- cubiques, et de serpentine amorphe remplissant les interstices. Les lamelles sont une forme nettement cristallisée de la serpentine. — M. Lavenir expose une nouvelle méthode permettant de déterminer l’o- rientation des axes de l’ellipsoïde optique dans un cris- tal, en même temps que leur grandeur au moyen du réfractomètre de Pulfrich. Cette méthode est suscepti- ble d’une grande précision. À ce propos M. Dufet com- munique à la Société les résultats d'expériences com- paratives faites par lui sur ladétermination des indices par la méthode du prisme et au moyen du réfractomètre de Pulfrich. On pouvait craindre que, dans la méthode de réflexion totale, le polissage des faces ne masquât leur structure réelle en les recouvrant d’un enduit de matière pulvérisée, de telle facon que l'indice mesuré eût été toujours l'indice moyen. En réalité M. Dufet n’a trouvé aucune erreur sensible pour le quartz, la calcite, le chlorate de soude. Pour le sel gemme, la différence appréciable porte sur les unités du cinquième ordre dé- cimal, —- M. Des Cloizeaux signale des échantillons de Pollux trouvés en assez grande quantité dans la Caroline du Nord. Ils sont identiques de tout point à ceux de l'ile d’Elbe, Le Castor n'a pas été rencontré dans le même gisement, G. FRIEDEL, SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 15 avril 1891. La Société délègue M. d’Ocagne pour la représenter au prochain Congrès des Sociétés savantes. — M. Bio- che : Sur les développables qui passent par une courbe gauche. Cas d'intégration par quadratures de l’équa- tion de Riccati à laquelle se ramène la question, — M. Kobb : Théorème sur la variation d’une intégrale double, Extension au cas des surfaces d’un théorème de Steiner relatif aux courbes isopérimètres. — M. Fouret : lhéorème général sur le maximum ou le minimum d’une fonction symétrique d’un nombre quelconque de variables dont la somme est constante, Démonstration fondée sur l’emploi d’un théorème de Lagrange relatif au centre de gravité d’un système de points, — M, Carvallo : Méthode d'exposition de la théorie des déterminants basée sur la notion de la mul- tiplication extérieure de Grassmann. — M. d'Ocagne : Principe général de la théorie des abaques. Applica- tion au cas d’une équation qui se rencontre dans le calcul des murs de soutènement et qui est représen- table par deux systèmes d’isoplèthes rectilignes et,un système d’isoplèthes circulaires. — M. Raffy dépose sur le bureau de la part de M. Appell une note intitu- lée : Sur les potentiels conjugués. Maurice d'OcAGNe. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 9 avril. SCIENCES PHYSIQUES, — Sir William Thompson fait une communication sur l’action exercée par les écrans, constitués par des grilles, des plaques perforées et des réseaux de substances conduetrices sur l'électricité statique. Il donne les résultats de l'étude mathéma- tique complète de la résistance opposée par une plaque plane, homogène, percée de trous à la force électrique d'un champ uniforme dont les lignes de force sont perpendiculaires à la plaque. Il étudie aussi la résis- tance opposée par un écran, formé par une plaque per- forée de surface inégale, à un champ uniforme de force électrostatique et celle d’une plaque perforée, plane ou non, à la force électrostatique de tout corps élec- trisé donné. Sir W. Thompson a constaté qu'un écran — fait d’une matière imparfaitement conductrice — peut exercer la mème action qu'un écran similaire de métal, si on lui en donne le temps. Mais son action est dimi- nuée, si l’on fait usage d’une force électrostatique qui varie rapidement ; aussi est-il facile de voir que l'ac- tion d’un écran sur les variations périodiques d’une force électrostatique doit être d'autant plus faible que la fréquence de ces variations est plus grande. On peut le démontrer par l'expérience en mettant un morceau de papier ou de métal en rapport avec le disque mobile d’un électromètre, L'attraction disparaîtra quelques secondes après qu'une différence de potentiel a été établie et maintenue constante entre le disque attiré et la plaque métallique qui lui est opposée. Si l’appareil est adapté à mesurer les variations rapides des différences de potentiel, on peut montrer que l’action d'écran exercée par le papier disparaît à mesure que la fréquence des variations s’accroit, Il semble probable qu'un écran de papier blanc ordinaire, propre, dans des conditions hygrométriques ordinaires sera sans action, s’il y à de 50 à 100 variations à la seconde, La résistance opposée par un écran à une force magnétique variable est sou- mise à une loi opposée. Si parfaite que puisse être la conductibilité électrique d’un écran, cet écran est sans action contre une force magnétique constante. Mais si la force magnétique varie, il s’induit des courants dans la substance de l’écran qui tendent à diminuer la force magnétique dans lair du côté opposé à celui où est placé l’aimant. Plus est grande la conductibilité élec- trique de la substance, plus Paction de l'écran est par- faite, pour urie même fréquence de variations, et avec une même substance l’action d'écran est d’autant plus parfaite que les variations sont plus rapides, On fait voir, en s'appuyant sur ce principe, qu'une feuille de cuivre qui enveloppe un aimant à action variable, exerce une action d'écran presque parfaite, si elle a une épaisseur de 2 £centimètres ou davantage, ef si le courantest renversé 80 fois par seconde. SirW,Thompson a mis sous les yeux des membres de la Société Royale un petit appareil, destiné à fournir une démonstration expérimentale de ce fait. Les variations de la force magnétique sont produites par la rotation d’un aimant, contenu dans une enveloppe de cuivre ; on a pu donner à l’aimant une rotation angulaire suffisante pour faire 280 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES disparaître les variations de la force dans l’espace exté- rieur et produire une force constante, comme celle qui serait due à un aimant idéal, Une aiguille aimantée, placée à l'extérieur de l’enveloppe de cuivre, et qui était déviée par l’aimant immobile, lorsque le tambour avec lequel il est en rapport était au repos, subit une action beaucoup plus légère lorsque le tambour est mis en rotation. — MM. W. E. Ayrton et W. E. Sumpner font une communication sur la mesure de la force développée par un courant quelconque dans un circuit quelconque. Ils ont imaginé pour cela une méthode extrèémement simple, Soit une résistance non inductive be der ohms, unie en séries, à un cir- cuit ab, nous voulons mesurer la force qui est four- nie à ce circuit, Si V, V,, V, sont les indications que donne un voltamètre quand il est placé entre a et b, bete, et aet ce, Wbe, les watts moyens fournis au cir- cuit ab, nous avons dans tous les cas, quelle que soit la nature du courant ou du cireuit ab : 2 RS Va we Si la résistance de be n’est pas connue, ou s'il y à lieu de craindre qu'elle n’ait été modifiée par le pas- sage du courant, on peut introduire dans le circuit un ammètre, Soit À l'indication donnée par l’ammeèetre; ellereprésente la racine carrée du carré moyen du cou- rant, nous pouvons donc substituer dans l'équation (1) V,/Aà7r, on aura ainsi! À 2 2 Se Quand on emploie cette formule, la résistance non-in- ductive be peut être celle qui est offerte par les lampes à incandescence, puisqu'elle peut s'appliquer à des ré- sistances qui varient avec les forces moyennes diffé- rentes des courants employés. La méthode que lon vient d'indiquer s'applique bien à la mesure de Ja force fournie à un courant induit de lampe à are et peut vraisemblablement être utilisée pour l'étude de ces courants, Un certain nombre d'expériences ont été faites et il semble établi que la qualité du charbon employé ait une influence sur la différence de, phase qui existe entre les courants passant par l’are et la différence de potentiel entre les charbons. Si l'arc est est tout à fait constant et fait entendre seulement le murmure rythmique qui accompagne le fonctionne- ment d'un are bien construit, tel qu'il peut être établi avec des charbons de bonne qualité (coxed carbons), il se comporte pratiquement comme une résistance simple ; mais si l'arc est constitué par des charbons de qualité médiocre (uncored), et qu'il se produise un sifflement, il y a alors une considérable différence de phase entre le courant et la différence de potentiel qui existe entre les charbons; de plus les expériences montrent que le courant ne varie pas suivant une loi simple, bien qu'il soit produit par une dynamo dont la force électro-motrice suit normalement une loi harmo- nique.—M.Silvanus P.Thompson, fait une communi- cation sur la galvano-histérésis. Si un courant suffisam- ment fort passe à travers un rouleau de fil de fer doux isolé pendant quelques instants, si le fil est alors dé- roulé etau bout d’un peu de temps introduit dans le circuit d’un galvanomètre, et s’il est soumis à une ai- mantation longitudinale ou à une succession d’aiman- tations longitudinales de sens contraire, il se déve- loppe un courant électrique dans le galvanomètre, La direction du courant qui vient du fil de fer estla même que celle du courant qui l’a originairement traversé et est opposée à celle qu'il aurait si le fil agissait comine condensateur. L'auteur a étudié ces phéno- mènes à l’aide d’anneaux de fil de fer (recuit), recou- verts de fils de cuivre isolés et enroulés en hélice re- venant axialement sur elle-même, de telle sorte que le courant qui passe dans le fil de cuivre ne puisse déve- lopper directement aucune force électro-motrice induite dans le fil de fer, Séance du 16 avril 1891. SCIENCES PHYSIQUES, — M. J. Norman Lockyer fait une communication sur les causes qui produisent les phénomènes que présentent les étoiles nouvelles, IL a réuni et discuté foutes les observations d'étoiles nouvelles, s’attachant spécialement à déterminer la suite des changements spectroscopiques depuis la première apparition d’une étoile nouvelle jusqu'à sa disparition finale, Le résultat de ces recherches jus- tifie complètement la conclusion à laquelle il était précédemment arrivé, à savoir : que les étoiles nou- velles, qu'elles semblent, lorsqu'on les voit, en rapport avec les nébuleuses ou non, sont produites par le choc d’essaims de météores. Il existe une étroite relation entre les spectres des comètes et les spectres des étoiles nouvelles, mais tandis que dans les comètes on n’a à considérer qu'un seul essaim de météores, dans les étoilesnouvelles on en a deux, qui peuventèêtre ou n'être pas de densitéet de dimensions égales, Le spectre des étoiles nouvelles est donc un spectre comparé. La Nova Coronæ (1866), lorsqu'elle fut observée pour la première fois, donnait un spectre de raies brillantes superposées à un spectre de raies sombres, Les phé- nomènes d'absorption étaient semblables à ceux qui caractérisent les étoiles telles que & d'Orion, et les raies étaient surtout celles de l'hydrogène, IL y avait dans la partie bleue du spectre deux raies peu mar- quées, qui ont été identifiées avec celles qu'on a trou- vées dans le spectre des comètes el qui sont dues au carbone, Le spectre de Nova Cycni (1876) consistait, quand on l’a observé pour la première fois, en plusieurs raies brillantes et en cannelures; les raies de l’hydro- gène étaient très visibles. À mesure que l'étoile pâlit, les raies devinrent moins nombreuses et moins bril- lantes ; mais ce qu’il y eut de plus frappant, ce fut l'é- clat que prit une raie située dans le vert, en À 500 en- viron, que l’on regarde généralement comme la raie principale du spectre des nébuleuses, à mesure que les autres raies s’effaçaient, A la fin le spectre se réduisit à la raie 500 et l'étoile présenta l'aspect d’une nébu- leuse planétaire, Cette suite de phénomènes est préci- sément celle qui se produirait, si l’étoile résultait de la collision d’essaims de météores, et l'éclat de la raie 500 au moment où l'étoile se refroidit et disparait estun argument en faveur de l’opinion qui veut que les nébuleuses soient à une température comparative- ment basse. La Nova Andromedæ (1885) semble offrir le même spectre que la nébuleuse; la partie la plus bril- lante est due au carbone, IT semble donc que le car- bone est un des éléments caractéristiques du spectre des étoiles nouvelles; c’est aussi un des éléments caractéristiques des spectres des essaims non conden- sés de météores; aussi la théorie de l’origine des nou- velles étoiles par collision est-elle vérifiée par la pré- sence de cette substance dans leur spectre. MM. W. Ramsay et E. P. Perman ont essayé de dé- terminer les relations adiabatiques de l’oxyde d’éthyle. La première partie de leurs recherches porte sur l’é- ther gazeux ; ils ont cherché à déterminer comment se comporte l’éther gazeux à l'approche du point erili- que, lorsqu'on l’échauffe de manière à modilier son état adiabatiquement. Ils ont aussi déterminé les rap- ports entre les chaleurs spécifiques à pression cons- tante etles chaleurs spécifiques à volume constant, Ils ont mesuré la vitesse du son dans l’éther gazeux à. diverses températures, sous des pressions et avec des volumes différents ; ils ont fait usage d’une disposi- tion semblable à celle qu'on emploie pour produire les figures de Kundt, Les différentielles isothermiques obtenues, et les résultats expérimentaux relatifs à la vitesse du son ont permis de calculer le rapport entre les deux chaleurs spécifiques. La conclusion générale est que pour un volume constant, la chaleur spécifique, sous pression constante ou à volume constant, décroîit ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 281 jusqu’à une valeur limite à mesure que la température s'élève, puis s'accroît à partir de ce moment ; et que le changement est d'autant plus rapide que le volume est plus petit, Avec des volumes considérables la chaleur spé- cifique tend à devenir indépendante de la température et du volume, tandis qu'avec de petits volumes l'influence des variations de température et de volume est très grande. — M. W. N. Hartley fait une communication sur les caractères des raies fournies par les spectres électriques (spark-spectrum) des corps simples. Ils sont caractérisés par l'extension de certaines raies au- dessus et au-dessous de cette partie du spectre qui se trouve entre les électrodes, par le nimbe qui entoure les extrémités des raies et par le spectre continu qui sert comme de fond aux raies, M. Hartley est arrivé à cette conclusion que les spectres des corps simples, difficiles à volatiliser et de ceux qui sont mauvais conducteurs de l'électricité, n’offrent pas cette extension des raies ; et qu'inversement les métaux qui sont les meilleurs conducteurs de l'électricité et qui sont les plus vola- tils présentent des spectres dont les raiés principales s’allongent ainsi. M. Hartley croit que le nimbe est en rapport avec la quantité de matière qui est contenue dans l’étincelle et l'intensité de l’action chimique que les rayons émis par sa vapeur incandescente sont ca- pables d'exercer. Le fond continu semble être un carac- tère très net des métalloïdes, Il n'existe pas dans ce spectre des métaux inoxydables, tels que Por, largent ef le platine. Les métaux du groupe du fer, des spec- tres qui présentent ce fond continu près du poïnt des électrodes où se forment les oxydes non volatils. Les métaux très volatils, à oxydes volatils, tels que le mercure, l'iridium, le thallium, le zinc et le cadmium ne le présentent pas. Richard À, GRÉGor. SOCIÉTÉ PHILOSOPHIQUE DE MANCHESTER Séance du T avril 1891, M. P.F. Kendall annonce que l’on a formé un co- mité pour noter les traces de l’action glaciale dans le Nord-Ouest de l'Angleterre, Ce comité travaillera d’ac- cord avec celui de l'association britannique. — M. Fa- raday lit un second mémoire sur les variations dans la valeur monétaire de l'or et de l'argent, 1891 M. H.L. Terry lit une note sur l’action de l'acide nitrique sur le caoutchouc. Il se produit des corps ni- trés explosifs dont quelques propriétésont ét décrites, mais l’auteur ne les pas encore obtenus à l’état de pu- reté.—MM. A.TayloretG. Shawdécriventune nouvelle méthode pourdoser le chlore dans les corps organiques. —M. P. Cameron lil son {roisième mémoire sur les Hy- ménoptères de l'Orient. — M, W. Brockbank lit une seconde note sur l'identité des calcaires de Levenshulme avec ceux de Whitehaven; il est nécessaire de faire des changements considérables dans la carte géologique du Nord-Ouest de l'Angleterre. — M, Davis commu- nique une note sur un nouveau poisson fossile, trouvé dans les calcaires de Levenshulme, le Sfrepsodus Brock- bankii. P. J. Harroc. SOCIETE ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES (SECTION DE MANCHESTER) Séance du 3 1891. M. W. Thomson lit une note sur les meilleures méthodes pour déterminer la valeur des différents systèmes de purification des eaux d’égout. Il critique le rapport officiel sur ce sujet présenté à la municipalité de Salford, — MM. G. H. Bailey et J. C. Caïn décri- vent une nouvelle méthode pour déterminer le poids des précipités sans filtration préalable, On les laisse déposer dans un flacon à densité de 100 e.c ; puis on Séance du 21 avril avril | détermine d'abord la densité du précipité et de la liqueur surnageante pris ensemble, et ensuite celle de la liqueur seule. La méthode présente des avantages lorsqu'il s'agit de précipités qui s’altèrent à l'air, tels que les sulfures. Quoique la méthode soit destinée principalement aux analyses industrielles, l’on peut, | en opérant avec des quantités suffisantes de précipité | (de 2 à # grammes), réduire lerreur d'expérience jusqu'à 0,1 pour cent. Chaque détermination ne demande qu'une demi-heure. Ces recherches ont été suggérées aux auteurs par des expériences analogues (inédites) faites il y a quelques années par M, Gross- mann. P.J. Hanroc. ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE avril 1891. M. Terby lit une quatrième note sur la structure des bandes équatoriales de Jupiter. L'auteur appelle l’at- tention sur un malentendu qui a surgi entre lui et M. Keeler, astronome de Lick Observatory. Ce dernier, dans le n° 11 du vol. II des Publications de la Société as- tronomique du Pacifique, semble dire que M, Terbya simplement signalé la duplicité et la triplicité appa- rentes des bandes équatoriales, fait qui était connu depuis longtemps, apparences que M, Keeler a ex- pliquées par la structure spéciale de ces bandes, qu'il fait connaître, M. Terby rappelle que c’est lui- même, au contraire, qui a le premier signalé cette structure dans le n° 2928 des Astron. Nachr. et dans les Bulletins de l'Académie de Belgique ; M. Keeler à con- firmé ces observations et l’a fait avec succès dans un laps de temps fort court, grâce aux excellents moyens dont il dispose, F.F. Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 28 mars 1891, 19 SCIENCES PHYsiQuEs.— M. J.D.van der Waals étudie la pression p des phases coexistantes de mélanges, surtout de dissolutions de sels. Il à fait connaître au- | trefois une construction pour cette pression à l’aide de | sa surface % (Archives Néerlandaises, t. XXIV, p. 1-66). Aujourd'hui il explique la formule approximalive : Séance du % 7 le £ ) ! ue + (1 EE Le = (L Ux cr — | E FE fn } LE) MRT MKXT P=p\l—+)e où p, et p, représentent les pressions de la vapeur saturée de l’eau et de la matière en dissolution, x le nombre des molécules de cette matière par rapport à l’unité des molécules du mélange, ete, Dans le cas | Fig. 1. simple de dissolutions de sels on a p, — 0, el la for- mule s'approche sensiblement de —472 P=pti —xe représ-ntée dans le système de coordonnées (x,p) par la courbe de la figure 1, En A cette courbe touche la 282 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES droite AB représentée par p — p, (1— x)etle décroisse- Pi — D ; : : ment ———— de la pression à un maximum au point C dont la tangente passe par A. La détermination expéri- mentale de ce maximum (expériences de M. Famman fait trouver la valeur de «, Dans le cas de la dissociation électrolytique on trouve pour les dissolutions de sels : 1 — x —ax” P=M—— e 1 UC où y etc représentent la fraction et la constante de dissociation. Les courbes correspondantes (fig. 2, B Fig. 2. fig, 3), qui dépendent des deux paramètres & et €, tou- chent en A la droite p — p, (1 — 2x). Au sujet de la to forme de la courbe dans le voisinage du point A, il y a deux cas à distinguer. Pour (x — 2)e <1 la courbe (fig. 2) s'étend tout de suite au-dessous de la tangente AB et le décroissement de la pression n’admet qu'un maxi- mum correspondant au point C. Pour (a —2)e>1la courbe (fig.3) s'élève immédiatement au-dessus de la tan- gente AB, de manière que le maximum du décroisse- ment de la pression en C est précédé par un minimum en D. Jusqu'ici les expériences n’ont pas fait trouver ce minimum, à cause de l'extrême petitesse de labs- cisse du point D. —M. Th. H. Behrens s'occupe du rapport entre la cristallisation et la composition chi- mique. 11 en donne les trois exemples suivants : Dans des solutions pures AzH' MgPOï + 6 H20 se présente en cristaux jumeaux (fig. #, a) tendant à devenir rec- tangulaires, Il paraîtrait que les individus hémimor- phes(fig. 4, b)naissent par superposition hémitrope de subindividus en forme de a & c d € Fig. 4. losanges (fig. #, ce, d). Si la solution contient un mé- tal trivalent, l'aluminium p. ex., les individus hémi- morphes se joignent par le côté opposé et les Jumeaux présentent un caractère morphologique hexagonal (fig. 4, e). Cette déformation constitue un cas curieux de cristallogénèse, Les cristaux de C AzS2Hg + OC Az S? Cu H20 sont lancéolés et verts jaunâtres, ceux de CAzS? Hg + C AzS? Zn sont incolores et se présentent sous forme de losanges et de nombreux bâtonnets et aiguilles, Si un mélange des deux solutions contient beaucoup de Cu et peu de Zn, l'addition de C AzS’Hg —- 2 (CAZS Az Hi) fait naître des cristaux bruns violacés de la forme de la combi- naison de Zn, probablement des cristaux d’un mélange contenant l’anhydride de la combinaison de Cu. — Un exemple plus frappant de l'influence de l'isomor- phisme sur les réactions chimiques est fourni par l'action mutuelle de Ag-SO*et de Ag?Cr?07, En joi- gnant à une solution de AgAzO? successivement HAz03, H?SO'et un cristal de K2Cr207, au lieu du dernier des deux sels précités, on voit se former des cristaux monocliniques rouges foncés de Ag? Cr? 07 en- tourés par des cristaux rhomboïdaux incolores de Ag?S0*, Insensiblement ces derniers deviennent jaunes et orangés, évidemment à cause de la pénétration les uns dans les autres des cristaux des combinaisons isomorphes Ag?S0* et Ag?Cr?07, malgré la présence d'une grande quantité d’acide nitrique libre, 2° SCIENCES NATURELLES. — M,M. W.Beyerinck fait une communication sur la fixation de l’azote atmosphérique dans les cultures du Bacillus radicicola. Pour obtenir un milieu nutritif convenable du Bacillus radicicola var, Fabæ fil cultive une décoction de tiges de luzerne ou de fèves avec 20/, de sucre de canne solidifié avec 8 0/, de gélatine. Pour la détermination de l'azote le liquide à culture consiste dans la même décoction mentionnée ci-dessus, mais sans addition de gélatine. Le matras employé est le ballon de Kjeldahl pour l’in- cinération avec l'acide sulfhydrique, parce que la vé- gétation bactérienne se trouve partiellement en con- tact intime avec le verre. Après huit semaines de végétation à 95° — 15°C, ils’est formé un précipité blanc au fond et sur les parois du matras: on procède alors au dosage de lazote. L'aspect microscopique de ces cultures, surtout de celles qui sont en contact avec le verre, est très intéressant, parce qu’on y trouve un élément morphologique tout à fait particulier, les « étoiles bactériennes », Ce sont de petites familles de bactéries ramifiées irradiant d’un seul point, mais dont les branches, à la vérité, s’insèrent sur la base l'une de l’autre. Quand le nombre de ces branches est de trois seulement, on reconnait la forme ordinaire des bactéroïdes des tubercules du Viciu faba. Dans les bonnes cultures, on voit se mouvoir rapidement de nombreux bâtonnets mobiles, dont l'observation se fait sans la moindre difficulté. La détermination de l'azote d’après la méthode de M. Kjeldahl a donné dans un cas particulier les résultats suivants. Une quantité de 1400 centimètres cubes de liquide de culture contenait en azote : Sans infection....-..... re ee 0 er,00495 Avec/Bac-MHabDab nee eric es 0 er, 00612 Le gain en azote est donc.......... 0 gr,00117 Dans d’autres circonstances le gain en azote à été successivement 0,00091 ; 0,00182; 0,00156 ; 0,00104; 0,00208. C’est un gain excessivement petit et la ques- tion de savoir s’il ne serait peut-être pas uniquement dù à l'absorption d’ammoniaque ou de nitrate atmosphé- rique se présente à l'esprit avec d'autant plus de force qu'ila été impossible de démontrer que le sucre de canne exempt d'azote libre est absorbé au milieu d’une uélatine nutritive par la méthode sensible de l’hydro- diffusion décrite ailleurs, —M.C, K. Hoffmann lit le rapport de la commission composée de MM. Hoffmann, Behrens et Weber sur les 7,500 fossiles de l'ile de Java envoyés par M. D. M. Verbeek. D'après ce rapport 1 Le Bacillus Roliniæ a les mêmes exigences nutritives que le Bacillus Fabæ, ce qui n’est pas le cas pour le Bacillus Ornithopi. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAV 283 NTES M. K. Martin se charge de la détermination de ces fossiles, pour la plupart des foraminifères et des gastéropodes. IL déposera ses résultats dans un grand ouvrage à 100 planches, qu'il espère pouvoir achever en dix ans. SCHOUTE, . Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 5 mars 1891. Le professeur Anton Fritsch, à Prague, envoie le tome II (4 cahier) de son ouvrage sur « la faune de la houille et du calcaire de la formation per- mienne de Bohème ». — Le professeur Gegenbauer, à Innsbruck, envoie un mémoire sur « la théorie de la série hypergéométrique ». — Le professeur Maly envoie un travail fait par M. Franz von Hemmel- mayr au laboratoire de l’Université de Prague sur « les dérivés méthylés de l’urée et de la thionurée ». —Le professeur Puluj, de Prague, envoie un mémoire intitulé « détermination du coefficient de selfinduction à l’aide de l’électrodynamomètre et d’un inducteur, » L'auteur commence par décrire un inducteur à cou- rants alternatifs sinusoïdaux obtenus par un circuil magnétique qui est périodiquement interrompu et fermé par des armatures de fer. Puis vient la théorie de la dé- termination de la selfinduction d’une bobine par une méthode qui consiste à mesurer avec un électrodyna- momètre, parcouru par un courant faible, la différence de potentiel aux bornes de la bobine et aux deux bouts d’une résistance sans induction propre. Les résultats que donne cette méthode sont comparés aux valeurs théoriques des coefficients, — Le secrétaire dépose un travail de M. Emil Waelsh sur « la construction des groupes polaires », — M. Josef Maria Eder, fait une communication sur « de nouvelles lignes et bandes dans le spectre d'émission de la flamme de l’ammoniac brûlant dens l'oxygène ». Il a découvert dans l’ultra- violet un premier système de deux bandes, entourées à droite et à gauche de lignes moins nettes; et ensuite, en allant toujours vers la partie la plus réfrangible, cinq groupes à peu près identiques, formés chacun de quatre bandes très nettes : il y a une plus grande dis- tance entre les deux bandes du milieu qu'entre chacune des bandes extrèmes et la bande voisine, et à droite de chaque système, vers la partie la plus réfrangible, est un groupe de lignes plus fines. — Le conseiller direc- teur J. Hann présente un mémoire de M, Eduard Ma- zelle, adjoint à l'Observatoire astronomique et météo- rologique de l’Académie nautique de Trieste, sous le titre : « La marche journalière de la fréquence et de l'intensité des vents de chaque direction à Trieste », — Le vice-président M. le Conseiller J. Stefan commu- nique un mémoire de M. Gustav Jager : « Sur la relation de la constante capillaire avec la température et son importance pour la théorie des liquides. » Séance du 9 avril 4894. Le président annonce la mort du professeur Richard Maly, de Prague correspondant de l’Académie. M. Ffaundler, d'Innsbruck, envoie un mémoire sur « une méthode perfectionnée pour déterminer les cha- leurs spécifiques au moyen du courant électrique. » La méthode publiée par l’auteur en 1869, et fondée sur la loi de Joule, consiste à faire passer un seulet même courant dans une série de spirales plongées dans les liquides dont on veutcomparer leschaleurs spécifiques ; de dégagement de chaleur est proportionnel à la résis- tance des spirales, Cette méthode n'a pu être appliquée jusqu'à ce jour qu'à des liquides isolants, L'auteur l’é- tend aujourd'hui à tous les liquides, en prenant des spirales de verres pleines de mercure. La méthode présente des garanties de précision, car la résistance de mercure peut être prise comme branche d’un pont de Wheatstone et l’on peut ainsi contrôler la constance un courant. L’élévation de température se mesure par une pile thermo-électrique. M. le conseiller professeur, docteur Constantin Baron von Ettingshhausen, à Graz, envoie un mémoire sur « la flore fossile de Schænegg à Weis (Steiermark.) » Le secrétaire dépose des notes sur quelques résidus de plantes de la houille provenant de la République Argentine », par le pro- fesseur Ladislas Srajnocha, à Cracovie, « sur le sys- tème des complexes de rayons variants de deux sur- faces du second ordre », par le professeur Fock, à Prague, — Le secrétaire dépose une note pour établir les droits de priorité, du professeur Hans Hartl, à Rei- chemberg, sur « une nouvelleidée pour un thermomètre indiquant au loin la marche continue de la tempéra- ture. — Le conseiller docteur J. Hann présente un mémoire intitulé : «Etudes sur les relations de la pres- sion atmosphérique et de la température au pic du -Sonnblick, et remarques sur leur importance pour la théorie des cyclones et des anticyclones, » Ce travail renferme les observations faites pendant # ans au pic du Sonnblick (3.105 m.). Nous en signalerons seule- ment quelques points. Les variations brusques de pres- sion à cette hauteur correspondent dans la plupart des cas aux mêmes variations à la surface du sol, La plus haute température en hiver a lieu les jours où il y à le moins de nuages, contrairement à ce qui se passe sur le sol. Les directions du vent au Sonn- blick s’écartent très notablement (45° — 90°) et dans le sens d’une rotation à droite, des directions du vent à la base et confirment ainsi les conclusions tirées par Bronn, Leyet Abercromhy, du mouvement des nuages. — Le professeur Wiesner communique un travail fait par M. Figdor à l’Institut de physiologie végétale de l'Université de Vienne : «Etudes expérimentales et his- tologiques sur le phénomène de la cicatrisation dans le règne végétal. » Il distingue le cas où la réunion des parties incisées est assez complète pour ne pas pouvoir se distinguer ensuite de l'union normale des cellules dans les tissus ; celui où il y a cicatrisation, mais les nouveaux tissus formés sont séparés par le périderme des tissus restés intacts ; et enfin celui où il y a sim- plement réunion par une soudure, les cellules déta- chées se résorbant en une masse gommeuse qui réta- blit l'adhérence, La cicatrisation des plantes exige cer- faines condilions, qu'il ne faut pas dépasser, de pres- sion et de température. — Le colonel Albert von Ober- mayer montre des photographies qui réprésentent les phénomènes lumineux qui accompagnent la réduction en poussière des fils de fer par la décharge électrique. — Le docteur Gottlieb Adler, privat-docent à l’Univer- sité de Vienne, communique un mémoire « sur la va- leur du travail magnétique dans les substances de coefficient magnélique variable, particulièrement dans le fer. » Séance du 16 avril 1891 Le secrétaire dépose un mémoire du D' Horbac- zewski, professeur à Prague : «Contribution à l'étude ‘de l'acide et des bases de la xanthine, et formation de la leucotytose dans l'organisme des mammifères. » —Le prof. Wiesner communique un travail de M. E. Rathay sur l’action de la foudre sur la vigne, le fait signalé par Colladen et contesté par Caspary, à savoir que le coup de foudre rougit les feuilles de la vigne, est vrai pour toutes les variétés de vigne dont les feuilles rougissent à l'automne. Cette coloration n’est pasune conséquence immédiate du coup de foudre, elle est un simple effet mécanique et on produit la même modification des feuilles en blessant les nervures de la feuille par une flexion ou une incision. Les feuilles rougies transpirent beaucoup moins que les feuilles vertes, — Le prof. Bra- ner dépose la deuxième partie de l'ouvrage qu'il a entre- pris avec M. von Bergenstamm sur la « monographie des Muscaria schizometopa. » — Le prof. Adolf. Lieben présente un mémoire du prof. Skraup à Graz : « sur la transformation de l'acide maléique en acide fumari- que. » La théorie de Wislicenus ne rend pas compte de tout, et l’on est conduit à admettre que des liaisons additionnelles de l'acide maléique jouent parfois un 284 . ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES rôle important. Il y a en effet des réactions dans les- quelles la transformation isomérique semble ne pou- - voir être attribuée qu'à des actions catalytiques; c’est ainsi que dans la formation d'acide succinique chloré par l’action de l'acide chlohydrique sur l'acide maléi- que, on à transformation d'acide maléique en acide fumarique ; cette transformation se produit encore dans la décomposition des maléates en solution dans Peau par les acides sulfurique ou sulfhydrique, — Le prof. Lieben présente une seconde communication : « sur la théorie de la double liaison », dans laquelle il cherche à expliquer les propriétés de la double liaison par des mouvements intramoléculaires, — Le prof. E. Weyr présente la seconde partie de son travail : « sur les courbes gauches du sixième ordre et de genre un. » Au compte rendu est annexé un tableau contenant les observations faites à l'observatoire météorologique et magnétique durant le mois de février 91. Le maxi- mum (le la température à Vienne pendant ce mois de février a été de 8% (le 2#)et le minimum— 11°, (le 8). Emil Weyr. Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE SAINT-PÉTERSBOURG mars 1891 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Imchenetski pré- sente un mémoire du capitaine P., Schiff, professeur à l'Ecole d'artillerie, écrit en francais et intitulé : Sur l'intégration d'un système d'équations différentielles li- néaires simultanées aux dérivées partielles d'ordre supé- rieur. Le mémoire sera publié dans un des prochains bulletins de l’Académie. 2e SCIENCES PHYSIQUES. — M, Wild lit sa note : Sw: l'influence de la position du thermomètre sur ses indica- tions de la température de l'air ambiant. A la suite des cbservations faites d'heure en heure, pendant plu- sieurs années, sur des thermomètres posés de diffé- rentes facons, le savant académicien arrive à cette con- clusion, que dans aucune des positions de l'instrument on ne peut déterminer la température réelle de l’atmos- phère avec l’approximation d’un dixième de degré, si l’on r’établit pas un fort courant d'air (de 2 m, 1/2 par seconde au moins) autour de la boule du thermomètre. Même dans ces conditions la détermination n’est exacte que quand on évite le voisinage de grandes masses inertes. D'ailleurs ces conditions sont faciles à rem- plir pour les intruments ordinaires ; on ne rencontre des difficultés que pour les instruments autographiques. — M. Wild présente ensuite un travail du professeur Chwolson relatif aux actinomètres et aux méthodes des observations actinométriques. Ce mémoire intitulé : De la distribution de la chalew dans une boule noire éclai rée d'un seul côté, contient d'abord l'exposé de l’état calorique stationnaire des boules noires, soit homo- gènes, soit formées de plusieurs couches concentriques hétérogènes et éclairées d’un seul côté. Dans une autre partie de son travail, l’auteur considère l’état chan- geant d’une boule, soit dans son passage de la tempé- rature de V’air ambiant à l’état stationnaire, soit pen- dant son refroidissement après que les rayons lumi- neux ont cessé leur action, Séance du 2: Séance du 8 awril 1891. SCIENCES NATURELLES., — M. A. Strauch présente la note de M. L. Kroulikovski intitulée : « Matériaux pour la connaissance de la faune malacozoologique de la Russie ». Cette note comprend la liste de tous les mol- lusques connus, terrestres ou des eaux douces, du gouvernement (province) de Kazan et en partie de celui de Viatka. Les espèces, au nombre de 75, sont décrites brièvement avec l'indication de leurs variétés ; cette description est accompagnée des observations sur leur distribution géographique en général et dans la région étudiée en particulier, En définitive, l’auteur trouve que « la faune des mollusques des provinces de Kazan et de Viatka fait partie de celle de l’Europe cen- trale et ne s’en distingue que par quelques formes locales, peu nombreuses », Cependant le voisinage de la Sibérie se fait déjà sentir : certains genres euro- péens font complètement défaut. La note est complétée par une liste de mollusques des environs de Tachkent (Turkestan russe) et de la péninsule de Manghichlak (mer Caspienne). L'ouvrage de M. Kroulikoyski est une des rares études sur la faune du Nord-Est de la Russie encore si peu connue ; il fait suite à son travail : Con- tribution à létude de la faune malacologique de la Russie, publié dans le tome LX des Mémoires de l’Académie, O. BACKLUND, Membre de l'Académie. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séance du 5 avril 1891. 1° SGIENGES MATHÉMATIQUES. —- M. Millosevich an- nonce que, dix-sept jours après la découverte de la petite planète (30#), il en a trouvé une seconde qui, si elle n’est pas une des petites planètes perdues, doit prendre le numéro (307). L'astre a un éclat plus grand que le précédent et il est de la 11° grandeur. Les posi- tions que M. Millosevich a pu déterminer sont les sui- vantes : Temps moyen Distance de Rome polaire TE o 1! # 12.15 36 #7. 18.23.25.1 11.22. 6 -46.: 18.15.36.0 12.33. 0 Poe 17.50.51 .0 10.10.32 .42 77.43.41.6 9247.97 = 10.42:,2-15 NIET AER 9:58.28 10.23.933.34 "755-6.5 — M. Millosevich communique de plus à l'Académie les observations qu'il a faites au sujet de la nouvelle comète découverte par M. Barnard à l'Observatoire Lick, et par M. Denning à Bristol. Temps moyen Distance de Rome MR polaire h ms oCUr nm 18910 AVR NE 108. 5 A9 NAT HS 22H20 _ PRE 1.13.40.60 50, 4,30.5 La comète a un vif éclat ; elle est ronde avec un noyau de 10° grandeur ; diamètre 2?’ environ. 2 ScrexcEs PHYSIQUES. — M. Vicentini a étudié la résistance électrique des amalgames concentrés d'’é- tain, à l’état de fusion parfaite produite par une tem- pérature élevée. En examinantles variations présentées par le coefficient de la résistance électrique, l’auteur a déterminé la proportion des deux métaux qui est l’ori- gine de la variation plus grande de leurs propriétés phy- siques, Les observations prouvent que l’on obtient des variations de résistance plus fortes avec des amal- games moins riches en étain, et que la résistance des métaux est en relation avec la diminution de volume qui se produit lorsqu'on les mélange ensemble, — M. Grablovitz donne la description d’un séismographe à pendules coniques, qu'il a fait construire en modifiant le modèle proposé par Gray. L'enregistrement des os- cillations est fait sur du papier par un crayon. A l’aide d’une disposition particulière,le plus petit mouvement du sol est multiplié, et la sensibilité de l’appareil est telle qu'il suffit d'appuyer légèrement le doigt sur la console qui le soutient, pour opérer le déclanchement qui fait entrer le séismographe en action.—M,. Piceini poursuit ses recherches sur le molybdène ; il présente une série de composés fluorurés de ce corps et qu'il appelle fluossipermolybdés. M. Piccini fait observer que l'étude de ces combinaisons du molybdène est intéressante à connaître pour déterminer la capacité de saturation des éléments, et pour avoir une connais- sance plus parfaite de cet état spécial de l'oxygène, qu'on à appelé antozonique. 3° Screxcrs NATURELLES. — M, Tizzoni et M° Cattani COURRIER DE BERLIN 285 ont relevé plusieurs faits nouveaux relatifs à la biologie du bacille du tétanos, qui complètent nos connais- sances sur ce microorganisme,et donnent l'explication des différences existant entre les cultures obtenues par les auteurs et celles obtenues par M. Kitasato. Les expériences exécutées par M. Tizzoni, avec la collabo- ration de Me Catlani, démontrent que les spores du lélanos, qu'on laisse sécher dans l’obscurité sur des morceaux de soie, perdent en quelques mois leur pou- voir pathogène et leurs propriétés végétatives. Il est probable que l’atténuation et la mort des spores es due à l’action de Poxygène de l'air, action qui doit empêcher une diffusion étendue du microorganisme Sur la surface de la terre. En faisant des cultures du bacille sur des milieux nutritifs divers et dans des conditions variables, on voit l’atténuation se produire toujours dans un temps plus ou moins long, et les bacilles présenter des modifications importantes et caractéristiques, dont les auteurs donnent une des- cription détaillée. Dans la gélatine à 37°C. par exemple, les bacilles virulents manifestent toujours une réaction alcaline ; lorsque la virulence va s’affai- blissant, la réaction peu à peu devient franchement acide. Les inoculations faites avec des cultures atté- nuées expliquent leur action pathogène dans un temps plus long que pour les inoculations très virulentes. Si l'atténuation augmente, les phénomènes tétaniques se limitent à la partie inoculée ; lorsqu’enfin les phéno- mènes tétaniques font défaut, on observe dans les ani- maux inoculés un amaigrissement progressif, et la mort par marasme survient en 20 à 30 Jours. Les au- teurs ont étudié le développement du microorganisme du tétanos dans le sérum du sang, les actions de dif- ‘férents gaz et de la pression sur les cultures. Ils ont encore cherché la cause de l'acidité des cultures atté- nuées, et ils ont vu qu'elle était due, ainsi que avaient déjà reconnu MM. Kitasato et Weyl, à Pacide buty- rique; mais en ajoutant cet acide aux cultures viru- lentes, la virulence reste inaltérée, ce qui prouve que l'acidité des cultures du tétanos n’est pas la cause, mais l'effet de leur atténuation. Des cultures viru- lentes enfin, filtrées et conservées dans lobscurité, sont devenues inactives et elles ont déterminé seule- ment l’état de marasme chez les animaux inoculés; la toxalbumine du tétanos, au contraire, même. après un temps plus long, a conservé toute son activité. — M. Magini avait cru reconnaitre ! dans les cellules nerveuses du lobe électrique de la torpille adulte, une orientation des nucléoles qui se produisait après l'excitation, Dans une nouvelle note l’auteur répond à M. Coggi 2? (qui attribuait la position du nucléole à une action du liquide fixateur), que l'orientation constante des nucléoles, dans la direction des nerfs électriques, et l'absence du déplacement dans les cellules des tor- pilles très jeunes, confirment son hypothèse et cons- tituent un fait morphologique qu'il se propose d’étu- dier encore. — M. de Stefani rend compte de quelques notices préliminaires sur les résultats qu'il a obtenus en visitant l’île de Sardaigne, pour comparer les forma- tions géologiques de cette île, avec celles de la Tunisie et de la Corse. M. De Stefani passe en revue la consti- tution des roches, la succession des terrains, etc. Ernesto ManaInt, COURRIER LE TRANSPORT ÉLECTRIQUE DF-rA Nos lecteurs connaissent les belles expériences de M. Marcel Deprez, Ils savent qu’en 1882 cet éminent électricien transportait de Miesbach à Munich, c’est-à- dire à une distance de 52 kilomètres, des courants électriques de 1000 à 1300 volts. Ils n’ignorent pas non plus que M. Deprez répétait quelque temps après cette expérience entre Creil et Paris, c’est-à-dire à une dis- tance semblable. Malheureusement ces essais ne pouvaient avoir alors de résultat immédiatement pratique. A bon droit les autorités ne tolèreraient point qu'on introduisit dans les maisons particulières ou même les usines des cou- rants de si haute tension: et d'autre part transporter à distance des courants de quelques centaines de volts seulement exigerait, pour arriver à une quantité sufli- sante d'électricité, des conducteurs d’une si forte sec- lion, ef par conséquent si chers, que le bénéfice résul- tant de l’utilisation des forces naturelles se conver- lirait en perte, Aujourd'hui, grâce aux transformateurs, ces difficul- lés n'existent plus. Rien n’est plus aisé que de trans- former en courants inoffensifs des courants de 10, 20 ou 30 mille volts, et cela au moment où ils pénètrent dans les lieux habités, En outre nous n’en sommes plus réduits à la machine dynamo-électrique à cou- rants continus, Nous avons le dynamo à courants alter- natifs qui paraît plus économique dans le cas spécial, C’est donc sans se lancer dans l'inconnu que l'Al- lgemeine Elektricitats-Gesellschaft de Berlin et la Maschi- nenfabrik d'Oerlikon (Suisse) ont pu projeter le transport de Lauffen-sur-Neckar à Francfort-sur-le- Mein, c’est-à-dire à une distance de 180 kilomètres, des courants électriques d'environ 30.000 volts, et cela au moyen de trois conducteurs en cuivre non isolés d'ensemble 38 millimètres carrés de section et instai- lés sur de simples poteaux télégraphiques. Mais, avant de poser ces trois fils, on a voulu s'assurer du bon DE BERLIN FORCE EN ALLEMAGNE ET EN SUISSE fonctionnement des appareils. Dans ce but les ate- liers d'Oerlikon avaient installé une ligne provisoire d’un développement de sept kilomètres et convoqué, outre la compagnie cointéressée, les représentants de l'administration des télégraphes allemands et le direc- teur de l'Exposition électrique de Franefort, M.de Miller. Voici, d’après l’Electrotechnischer Anzeiger, quelques détails sur l'installation d’Oerlikon, installation qui sera transportée de toutes pièces à Lauffen et à Francfort. Il n’y aura de modifiées que les machines et la longueur de la ligne, détails sans grande importance dans ce cas spécial. La machine primaire à courants alternatifs engendre des courants de 40 à 110 volts et de 4,000 ampères, c’est- à-dire de très faible tension, Ces courants passent dans un transformateur Brown qui multiplie les ten- sions 300 fois, c’est-à-dire qu'il transforme les courants de la machine en courants de 12.000 à 33.000 volts, Au dire de M. Brown, ces transformateurs supporteraient jusqu'à 50,000 volts. Is présentent en outre une innova- tion d’un grand avenir. Le caoutchouc durci ne constitue, avec de pareilles tensions, un isolant sûr que s'il n'offre aucune solution de continuité, ce qu'on ne saurait garan- tir, M. Brown l’a remplacé par un vase rempli d'huile où il loge ses transformateurs. L'huile remplit tous les interstices et chasse l'air qui pourrait compromettre l'isolement. C'est également avec l'huile qu'on est arrivé à garan- üir l'isolement absolu de la ligne. Les isolateurs en porcelaine, système Johnson-Phillips, sont entourés à leur base d’une sorte de rigole pleine d’huile qui sé- pare la surface extérieure de l’intérieure et qui garan- {it un parfait isolement, même lorsque la pluie vient humidifier les isolateurs. ® Voir la Revue du 15 mai 1890. 2 Ibid. du 15 décembre 1899, 286 RAPPORTS Le courant de 33.000 volts passe du transformateur primaire dans la ligne, et de là dans un transforma- teur secondaire qui, au contraire du premier, le réduit à une tension d'environ 100 volts, c’est-à-dire à une tension quile rend propre à tous les usages et ne présente plus aucun danger. À F Pourquoi cette double transformation qui comporte une certaine perte? La publication citée nous apprend que ce sont uniquement des considérations pratiques qui l'ont dictée. Avec des tensions de 40 à 110 volts on travaille à l'usine sans danger; avec celles de 30.000, malgré toutes les précautions, les accidents sont inévi- tables. Je disais que les machines d'Oerlikon sont à courants alternatifs, A Lauffen on installera des machines du même Lypeen somme, mais d’un système toutnouveau, que linventeur M. de Dolivo-Dobrowolsky, de PAIE gemeine Elektricitats Gesellschaft, à baptisé courant ro- tatif (Drehstrom) ou courant à phases multiples (Melwpha- senstrom). Sur ce système les détails précis font encore défaut. A Francfort l'électricité provenant de Lauffen char- gera les accumulateurs de chaloupes électriques, ac- tionnera des wagons de tramways et des machines de tout genre, alimentera des lampes, ete, Si l'expérience réussit, ce sera la solution définitive d'un des plus importants problèmes de notre siècle, G. Vax MUYDEX, RAPPORTS LA LUTTE CONTRE LA FIÈVRE TYPHOIDE DANS L'ARMÉE Dans un récent article sur les progrès de l'hygiène !, nous avons indiqué, d'après les rapports du Ministre de la Guerre pour 1888 et 1889, la diminulion de la fievre typhoïide dans l'armée, consécutive à la filtration pasto- rienne de l’eau au moyen des bougies Chamberland. L’em- ploi plus général de ces filtres dans les casernes a continué d'y abaisser la mortalité par fiévre typhoïde en 1890. M. de Freycinet vient de Signaler ce remarquable résul- tat à M. le Président de la République, dans un rapport qu'il nous parait utile de mettre sous les yeux de nos lec- teurs. Voici cet important document : Dans mes rapports du 16 juin 1889 et du 18 fé- vrier 4890, j'ai exposé les principales mesures prises par mon administration pour atténuer les ravages de la fièvre typhoïde dans l’armée. Ces mesures consistent essentiellement dans la suppression des fosses d’ai- sance fixes et dans l'amélioration des eaux potables. Cette dernière précaution surtout exerce un effet déci- sif sur la naissance et le développement de la maladie. Une expérience de près de trois années a démontré que, chaque fois qu'une eau pure à été substituée dans les casernes à une eau contaminée, l'épidémie qui s'était déclarée n'a pastardé à diminuer el às’éteindre entièrement : et, inversement, chaque fois que l’eau, jusque-là bonne, avait été contaminée par suite de circonstances quelconques, la maladie avait bientôt fait son apparition et s’élait développée tant que la cause elle-même avait duré. C’est cette conviction qui m'a engagé à poursuivre avec persévérance l’installation de filtres perfectionnés dans tous les établissements où il n’était pas possible de faire arriver des eaux naturelles d’une qualité irré- prochable. Au 1* janvier 1889, il existait un nombre de casernements représentant 230.000 places dispo- nibles, dans lesquels l'installation de filtres était re- connue nécessaire, Au 1° janvier 1890, ce nombre était tombé à 153,000 ; il n’est plus actuellement que de 61.000, et j'ai tout lieu de croire qu’il aura disparu à la fin de l'année. En ce moment il existe 18.759 bou- gies filtrantes, fonctionnant dans 264 établissements. Après quelques tàtonnements, l'installation et l’entre- tien n'ont plus rien laissé à désirer et la régularité des appareils est devenue parfaite. La diminution de la fièvre typhoide a suivi une marche parallèle. On en pourra juger par le tableau ci après, dans lequel les nombres des cas de maladie et des décès, pendant chacune des années 1889 et 1890 sont comparés avec la moyenne des deux années 1886 et 1887; je laisse de côté l’année 1888, année de tran- sition, dans laquelle j'ai fait procéder aux premiers aménagements. MOYENNE DÉSIGNATION RES | 1886 £r 1887 | 6.881 Nombre des cas de fièvre typhoïde Nombre des décès par la fièvre typhoide... S6+ ARRETE SERRE PROPORTION ANNEES DIMINUTION POUR % EN MOINS | 1889 1890 en 1889 en 1890 en 1889 en 1890 4.412 | 3.491 2.469 3.390 36 19 641 ÿ12 229 292 25 34 DES ANNEES 1886-1887 GOUVERNEMENT MILITAIRE DE PARIS Nombre de cas de fiévre iyphoïde | Nombre de décès par la fièvre typhoïde.... | ne te PROPORTION ANNÉES DIMINUTION POUR % EN MOINS res ee ES Rd 1859 1890 en 1589 en 1890 en 1889 en 1890 531 309 739 961 5 7 82 12 54 S4 \ Ainsi, en 1890, la réduction sur le nombre des cas est de la moitié, et sur le nombre des décès, d’un tiers. ILest assez remarquable que, dans chacune des an- nées 1889 et 1890, les cas ont diminué dans une pro- porüion plus grande que les décès, Cela tient sans ! Dans la Revue du 30 mars 1890, t. 11, p. 180-181. doute à ce que, parmi les eaux remplacées ou amé- liorées, il s’en trouvait qui contenaient le germe typhi- que en proportion relativement faible et qui détermi- naient peu de cas mortels, Il faut considérer aussi que les soins et précautions de tous genres, qui ont redoublé dans les corps de troupe, sont d'autant plus efficaces que les influences morbides sont moins CHRONIQUE 287 fortes, et qu'il est dès lors plus facile de prévenir les épidémies bénignes que d’arrèter les épidémies meur- trières. ; Les résultats de 1890 auraient été encore plus salis- faisants si l’épidémie d’ «influeuza » qui a sévi dans les premiers mois de l’année n'avait aggravé un certain nombre de cas, ainsi qu’elle a fait pour d’autres mala dies, etssi, d'autre part, des épidémies locales de fièvre typhoïde n'avaient brusquement éclaté dans plusieurs garnisons, où rien ne les faisait prévoir, ar suite de la contamination, constatée après coup, es conduites municipales qui fournissaient l’eau aux casernes. Il y a tout lieu d'espérer que ces accidents deviendront de plus en plus rares à mesure que l’at- tention des autorités civiles est davantage appelée sur cette nature de dangers. à Quoi qu'il en soit, en tenant compte que les amélio- rations introduites en 1890 ont été graduelles et ne porteront leur plein effet qu'en 1891, il est permis de penser, ainsi que je l’indiquais dans mon rapport du 18 février 1890, qu'une fois la réforme terminée, le nombre des cas sera réduit des trois quarts et celui des décès des deux tiers !. Cette prévision est confirmée parles résultats obtenus dans le gouvernement de Paris, où la substitution de la bonne eau à pu être réalisée, dans tous les établissements infra muros, dès la fin de 1889. Quand les établissements extra muros, qui entrent dans cette statistique, seront pourvus des filtres dont l'installation est ordonnée, le résultat annoncé sera largement atteint ou plutôt dépassé. Il n’y a pas de motif pour qu'il n’en soit pas de même sur l’ensemble du territoire, et j’ai la confiance que la statistique gé- nérale de 1892 en fournira Péclatant témoignage. Je suis d'autant plus fondé à l’espérer que je ren- contre de toutes parts dans l’armée les concours les plus dévoués, Le commandement et le service de santé rivalisent de zèle, à tous les degrés de la hiérarchie, pour assurer le bien-être des hommes et améliorer l'hygiène. Ce n’est pas seulement sur la qualité des eaux que leur sollicitude s'exerce; mais elle porte sur divers points qui intéressent le développement des épidémies, tels que surmenage, propreté corporelle, désinfection des casernements, etc. Ces efforts combi- nés auront certainement pour résultat d'abaisser dans une proportion notable la mortalité générale dans l’ar- mée ainsi que le nombre des journées d’hospitalisation!, GC. DE FREYCINET. Président du Conseil des Ministres, Ministre de la Guerre. CHRONIQUE UNE EXCURSION ZOOLOGIQUE AU LABORATOIRE ARAGO ET A ROSAS Pendant les dernières vacances de Pâques, M. le professeur H. de Eacaze-Duthiers a fait, en compagnie de professeurs francais et étrangers et d'étudiants de Paris, une excursion au laboratoire Arago. M. de Lacaze-Duthiers, eh rendant compte il y à quelques temps des résultats obtenus à Roscoff pour la culture des huitres, avait fait allusion à une culture faite, lui avait-on dit, à Rosas, en Espagne. Ayant con- duit le mois dernier les excursionnistes dans cette lo- calité, il vient de faire connaître à l’Académie ? ce que l’on tente sur le versant opposé des Pyrénées. Voici l'emploi du temps des excursionnistes, arrivés à Banyuls le jeudi 26 mars : Vendredi 27, — L’aquarium éfantrichement peuplé, toute la matinée s'est passée en causeries devant les bacs où les animaux vivants et épanouis se présentaient pour la première fois dans l’état naturel aux excursion- nistes parisiens el éveillaient vivement leur curiosité. Le bac des Alcyonaires était particulièrement beau, et l'on y pouvait étudier comparativement quelques types des plus intéressants, tels que Gorgones de plu- sieurs espèces (Gorgornella sarmentosa; Gorgonia gra- minea ; G.subtilis ; G. verrucosa, Muricea violacea, Sympo- dium coralloides variant du rouge au blanc, au jaune, au violet, des Alcyons (Alcyonium palmatum), atteignant dans leur épanouissement la taille d’un pied etformant de véritables bouquets épanouis où leurs caractères étaient faciles à reconnaître et à dessiner en les oppo- sant à ceux du Paraleyonium elegans, P. Edwarsii. Dans ce bac vivaient aussi des Zoanthaires à Polypiers dans un élat d’épanouissement dont les ouvrages ne donnent aucune idée, On avait sous les yeux réunis côte à côte des Balanophyllies et des Dendrophyllies, genres à polypiers poreux dont il était facile d'appré- cier les caractères par les animaux avec ceux des Caryophyllies et des Flabellum, Zoanthaires aussi, mais à polypiers compacts. Parmi les Zoanthaires sans polypiers les Ilyanthes vivant depuis plus d’un an et des Palythoa arinellæ, (ype | On ne peut espérer faire disparaitre entièrement la fièvre typhoide de l’armée, parce qu'elle y est journellement intro- duite par des causes extérieures (arrivée des recrues, des réservistes, alimentation en dehors des casernements, etc). * Académie des Sciences, séance du 20 avril 1891. jadis rare et aujourd'hui commun dans l'aquarium de Banyuls, et de nombreuses espèces d’Actinies offraient un sujet fort intéressant d'observation pour l'étude de la symétrie radiaire de ces animaux. On à pu constater une fois de plus combien sont bonnes les conditions de vitalité présentées par l'aquarium Arago,en voyant les innombrables animaux nés dans les bacs et en particulier des Botrilles ayant produit des plaques grandes comme la main, des Bonellies vertes s’allongeant de près d’un mètre, des Filigranes encombrantes par leur multiplication, tous ayant été portés à l’état d’embryons avec l'eau puisée par la pompe dans la mer, Le corail, ayant vécu pendaït dix mois, était mort par suite de la rigueur des gelées de lhiver; mais M. de Lacaze-Duthiers a fait mieux que de montrer cet alcyonaire : il l’a fait pêcher par les élèves eux-mêmes, Pendant que l’on étudiait ainsi les animaux vivants dans l’aquarium, le bateau du laboratoire sortait et ramenait bientôt son chalut rempli d'animaux et de débris sous-marins de toute sorte, Alors sur le pont, aidés par les marins et guidés par le personnel du laboratoire, Les excursionnistes ont retiré du filet, au milieu de la vase, des Poissons variés, des Ascidies (Cynthiadés, Molgulidés, Phallusiadés) en nombre con- sidérable, des Etoiles de mer, des Ophiures, des Coma- tules, des Holothuries, des Alcyons, des Vérétilles, des Pennatules, des Caryophyllies, des Mollusques Gasté- ropodes et Acéphales, aussi nombreux que variés, Après quoi, chacun a pu porter les objets choisis sur sa table de travail, les déterminer, les étudier, en prendre des dessins et constater la richesse de la faune dans les environs du laboratoire, tout en se rendant un compte exact de la pêche au chalut, Dans la soirée du vendredi les observations ont été continuées dans l’aquarium, à la lumière électrique ; les Vérétilles, les Pennatulés, les Serpuliens péchés le matin causaient par leur épanouissement et leurs belles couleurs, comme par leur délicatesse, l'admira- tion des visiteurs. Les Vérétilles surtout, plantées dans le sable du fond des bacs par la partie de leur Zoan- thodème dépourvu de Polypes, s’élevaient comme des 1 Rapport présenté à M. le Président de la République, le 12 février 1891, 288 CHRONIQUE colonnes de trente et quarante centimètres couvertes de fleurs, dont la transparence permettait, à l’aide de l'éclairage intense d'une lampe à arc, de lire les moin- dres détails de leur organisation interne. Samedi 28, — Au point du jour 4% excursion- nistes, à bord du bateau du laboratoire, se rendaient dans les eaux du cap l'abeille pour pêcher avec la drague et l'engin des corailleurs, Les résultats ont été fort heureux puisque du Corail, des Brachiopodes (Cranie, Argiope) et de nombreux Amphioxus, le tout bien vivant, ont été rapportés par les engins de pêche. Lundi 30 — Visite des ports de Collioure et de Port- Vendres. Dans ce dernier, le long du quai, le directeur fait recueillir des pontes de Mollusques. des Vermets, des Comatules, des Tarets, des Spirographis, des Bulles, des Cérithes, etc, Six personnes sont descendues en scaphandre et ont rapporté des animaux variés, Mardi 31 — Dans la matinée, conférence etexercices pratiques par M. Prouho, sur les Bryozoaires vivant dans les bacs et pêchés pendant les sorties du bâteau. Dans la soirée, conférence sur les Poissons de la localité par M. Guitel. Promenade sur les rochers voi- sins du laboratoire, sous la direction du Directeur, où l’on a recueilli des Oursins, des Actinies et où l’on à appris à trouver le Gadinia Garnotii, siphonaire qui vil avec beaucoup d’autres animaux dans les trottoirs formés à la limite des eaux par une algue calcaire, le Lithophyllum cristatium. Mercredi 1° et jeudi 2 avril, — Excursion en Espagne à Rosas. Le temps, devenu pluvieux, et le vent trop faible ne permirent pas d'effectuer des dragages. En allant visiter l'établissement d'ostréiculture de Rodamar, le long de la grève qui y conduit, on fit de bonnes récoltes; on recueillit en effet, rejetées par la lame, des coquilles d'Acéphales, des Gastéropodes, des tests d’Amphidetus (Echinocardium Mediterraneum) et une Tethys léporine vivante; des Bryozoaires, des Ascidies. L'établissement d'ostréiculture est situé à l'embou- chure de la petite rivière appelée Lloregat. Après être née dans le versant sud du massif du Canigou et avoir coulé assez irrégulièrement dans la grande plaine d'Ampurias,qui s'étend de Figuerras à Rosas, elle a été canalisée non loin du point où elle se jette dans la mer et où les eaux douces et salées se mélangent, ce qui est une des meilleures conditions pour obtenir les huîtres de bonne qualité. C’est là qu'est l'établissement consistant en bassins assez élevés pour être à l'abri des fortes crues de la rivière et des grosses lames de la mer, Ces bassins sont alimentés d’eau de mer par un moulin automoteur actionnant une pompe. Les huîtres sont placées sur des cadres grillagés de fil de fer et peuvent être visitées en soulevant ces derniers avec des crocs particuliers. Leur nombre est considé- rable et leur vente facile et fructueuse à Barcelone et dans les autres villes de la Catalogne. Leur origine est française, Une première fois du naissain a été apporté d'Arcachon à Rodamar et s’y est bien développé. Mais un envoi fait cette année même a été saisi à la frontière par la douane francaise sous le prétexte que les huitresn'avaientpas la taille marchande, A un certain point de vue la chose est fâcheuse, En effet la vente du naissain peut être une source de re- venu fort rémunérateur pour les éleveurs placés dans de bonnes conditions, permettant à l’huitre une repro- duction facile. Il arrivera certainement un moment où l'élevage des huitres d’une part pour la consommation et d'autre part pour la production du naissain, consti- tueront deux branches distinctes de l’ostréiculture ; cette division du travail existe déjà dans quelques localités. Dans le lit de la rivière où la salure est diminuée par le mélange des eaux, des pilotis nombreux ont été implantés et, suivant la méthode usitée dans les baies de Charrons et de l’Aïguillon, on a, à l’aide de sacs, de vieux filets, fait fixer des moules qui prennent une belle taille et sont déjà estimées sur les tables catalanes. Vendredi 3 avril, — La flore du Massif des Albères est fort intéressante; M. Flahault, qui l’a beaucoup étudiée et qui doit au mois de mai guider la Société de Botanique dans cette partie des Pyrénées, était venu pour se rendre compte de l’état de la végé- {ation. Il a passé quelque temps à Banyuls et c’est sous les murs mêmes du laboratoire, au milieu des rochers baignant dans la mer, qu'il fit une herborisation, véri- table conférence des plus instructives pendant laquelle il fit recueillir de nombreuses espèces d'algues. Les excursionnistes, n'ayant pas été favorisés par un calme et une légère brise d'est pouvant amener des animaux flottants de la surface, ont eu néanmoins assez de Beroés de Forskal pour se rendre compte de ce que sont ces animaux pélagiques ayant la transpa- rence du cristal et présentant les irisations de l’arc-en- ciel par la décomposition de la lumière dans leurs organes locomoteurs, Deux observations importantes pour les étudiants ont ont été faites pendant la durée de l’excursion, On sait que beaucoup . de faits relatifs à la reproduction des Céphalopodes ont vivement intrigué les zoologistes. Ces animaux vivent difficilement en captivité, si on ne leur fournit les milieux parfaitement appropriés à leur mode d'existence, Dans le bassin à jet d’eau du milieu de l'aquarium, tous les excursionnistes ont pu voir à loisir une belle Sépia, entourant une tige dénudée de Zoster avec la pointe de ses bras, former peu à peu une grappe de raisins de mer, comme disent les marins. Sa ponte a été faite en un jour; elle avait commencé la veille au soir à la lumière électrique. Mais ce qui surtout a beaucoup été remarqué, c’est la ponte et le développement des Comatules, Le bac où se trouvaient ces animaux était l'objet de l'admiration de tous les visiteurs. La ponte a eu lieu au commence- ment d'avril et en peu de temps les glaces et les pierres du bac, des tiges d'éponge (Axinella) ont été couvertes d'innombrables embryons à tous les états de développement, Après deux jours, les Pentacrines élaient formés et l’on pouvait, à la loupe, contre les pa- rois des glaces, observer leurs bras et leurs pinnules. A Roscoff, c’est surtout dans le mois de juillet, fin. juin etcommencement d'août que la ponte s'accomplit D'autre part, M. de Lacaze-Duthiers se souvient d'avoir trouvé des tapis de Pentacrines sous les pierres de la jetée de Frontignan, à Cette,aux mois d’août et de sep- tembre. En rapprochant ces observations et en s’en tenant à elles, on serait en droit de conclure que dans la Méditerranée la période de reproduction des Coma- tules est plus longue que dans la Manche. Les excursionnistes ont {ous pu vérifier l’obser- vation suivante, l’une des plus curieuses et des plus importantes de la Zoologie moderne, faite par Wywille Thompson et Carpenter, à savoir que la forme Penta- crine est la forme larvaire et embryonnaire des Coma- tules vivant dans nos parages. Ils ont pu tirer cet en- seignement précieux de ce qu'ils constataient que l’étude de l’évolution des êtres est inséparable de l’histoire des animaux et que les expériences s'imposent abso- lument aujourd'hui au zoologiste, Dans ces causeries intimes répétées à tout instant au milieu de la nature même, près des animaux réputés les plus rares et les plus variés, les observa- lions deviennent et plus attrayantes et plus fructueuses. C’est ainsi que furent suivies avec vif intérêt les expé- riences que répétait M. Prouho sur lolfaction des Asté- ries et sur la défense des Oursins au moyen de leurs pédicellaires. L'excursion s’est terminée le 6 avril après une der- uière conférence de M, Prouho sur les Coralliaires, Ed. BELZUNG. Le Directeur- Gérant : Louis Ocivier Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. b 4 2° ANNÉE N°09 15 MAI 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE LA LUMIÈRE PRINCIPES DE CETTE THÉORIE. — PROPAGATION D'UNE ONDE PLANE La théorie électromagnétique de la lumière, due au génie de C. Maxwell, a reçu des briliantes expé- riences de M. Hertz, qui en ont semblé une confir- mation, un regain de notoriété. Toutefois, nombre de personnes, effarouchées par l'appareil mathé- matique qui entoure l'exposé de Maxwell, reculent devant l'étude de sa théorie,malgré tout leur désir d'en connaître quelque chose de plus que le nom. Les pages qui suivent ont été écrites dans le but de les aider à se mettre au courant de ce chapitre récent de la physique; le lecteur est supposé con- naître les lois expérimentales des phénomènes électriques et posséder les notions les plus élé- mentaires du calcul infinitésimal. La lâche que je me suis imposée a été de dé- gager de l'ouvrage de Maxwell ce qui est stricte- ment nécessaire pour établir les principes géné- raux de la propagation des ondes, en y joignant les éclaircissements indispensables, puis d’appli- quer ces principes au cas simple d'une onde plane. Du reste, partout où je l'ai pu, j'ai reproduit le texte même de l'illustre physicien : je crois que personne ne m'en blämera; j'espère même que ces citations inspireront au lecteur le désir d'étudier l'ouvrage original lui-même. I. — THÉORIE DU DÉPLACEMENT DANS LES DIÉLECTRIQUES Considérons un tube d’induction dans le dié- lectrique d’un condensateur (fig. 1). Faraday el Maxwell admettent que lors de la charge du con- REVUE GÉNÉRALE, 1891. densateur,wne section quelconque s de ce tube a été tra- versée dans le sens de + vers — par une quantité d’é- lectricité positive égale à la charge q qui se trouve à l'origine du tube. Fig. 1. « Ceci doit être entendu dans le même sens que « lorsqu'on dit que dans un courant une quantité « d'électricité traverse une section du circuit; quoi « que d’ailleurs puisse être l'électricité, et quoi « que nous puissions entendre par l'expression « mouvement de l'électricité !, » Appliquons la proposition à la surface entière du condensateur : la charge de l’armature positive a traversé sous forme de courant chaque section de la portion conductrice du circuit extérieur au condensateur; d’après Faraday et Maxwell, elle a de même traversé chaque section du diélectrique. Donc, lorsqu'on charge un condensateur, la quantité d'électricité qui traverse une section quelconque est la même, y compris le diélectrique. Revenons au tube d’induction; nous allons exprimer l'hypothèse de Faraday et Maxwell d’une ‘ Clerk Maxwell : Traité d’Électricité et de Magnètisme, 2 vol. Oxford, 1873; traduct. franc. Paris, 1885, 9 290 BR. BLONDLOT. — LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE LA LUMIÈRE autre manière. Soil K la constante diélectrique du ; AT milieu; le flux de force qui sort de s est _- 13 K à donc g— flux de force A. ; par conséquent, la quantité d'électricité qui a traversé un élément de surface quelconque pris dans le diélectrique, est égale au flux de force qui traverse cet élément, >< Te Cette quantité s'appelle le déplacement électrique à travers l'élément. Il y a toutefois un contraste complet entre un conducteur et un diélectrique. Le conducteur n'op- pose aucun obstacle au déplacement qu'une force électrique tend à faire naître dans son intérieur, et n'impose aucune limite à ce déplacement. Dans un diélectrique au contraire, le déplacement même éveille des forces antagonistes qui s'opposent à son accroissement, par un jeu analogue à celui par lequel l’élasticité d’un solide, éveillée par les actions extérieures que subit ce dernier, limite la déformation que ces actions extérieures produi- sent. Par analogie, Maxwell appelle coeficient d'élas- ticité électrique le quotient de la force {par unité de : 4 surface) par le déplacement, soit le nombre £ L'élasticité diélectrique et la constante diélectrique sont par conséquent en raison inverse l’une de l’autre. Tout accroissement de l’état de déplacement est équivalent à un courant d'électricité positive dans le même sens que celui-ci. De même, une diminu- tion de l’état de déplacement est équivalente à un couranten sens inverse. Ces courants de déplace- ment exercent les mêmes actions magnétiques et inductrices que les courants ordinaires, comme MM. Rœntgen et H. Hertz l'ont établi expérimenta- lement *. Considérons un tube d'induction joignant deux conducteurs (fig.2); à travers toutes les sections de ce tube, le déplacement a été le même. A la base initiale du tube, le sens de l’état de déplacement est du conducteur vers le diélectrique ; dans le con- ducteur contigu à cette base il n’y a d’ailleurs au- cun état de déplacement. On dit alors que cette base est électrisée positivement, où chargée positivement. À la base terminale, le sens du déplacement est du diélectrique vers le conducteur; on dit que cette base est chargée négativement. ! D’après le théorème de Gauss, et en se rappelant que dans un diélectrique de constante diélectrique K une charge doit être considérée comme réduite à la Kième partie de sa valeur dans l'air, 2 Remarquons que dire que, sous l'action d’une force élec- tromotrice, toutes les sections d’un circuit sont traversées par la même quantité d'électricité, revient à dire que l’élec- tricité se déplace comme un fluide incompressible. On doit considérer la quantité d'électricité pos tive qui a quitté la base terminale du tube d’indu tion pour entrer dans le conducteur B, com ayant traversé la partie conductrice du circuit po venir combler le vide fait en avant du conducteu A par le déplacement dans le diélectrique. On voit qu'il y a une charge positive là où l’éta de déplacement commence, et une charge néga tive là où l’état de déplacement cesse. En réalité la charge appartient plutôt à la surface du diélec trique qu'aux conducteurs eux-mêmes. Fig. 2. « Concevons qu'une portion quelconque du dié lectrique soit séparée (par la pensée) du reste par une surface fermée; alors, sur chaque élémen de la surface, il y aura une charge, mesurée pa: le déplacement total à travers cet élément, ce déplacement étant estimé de dehors en dedans Si, dans le condensateur tel qu'il est en réalité la portion considérée du diélectrique se trouvé tout entière comprise dans l'intérieur du diélec trique, la charge de la surface sera neutralisé en chaque point par la charge opposée des par ties contiguës; mais si la portion considérée es en contact avec un conducteur, c’est-à-dire ave un corps où l’état de déplacement ne peut exis- ter à l’état permanent, la charge superficielle ne sera plus neutralisée, mais constituera ce qu'on appelle communément la charge du conducteur. « Ce qui précède montre que le déplacement peut être envisagé comme produisant une pola= risalion du milieu, puisque, par le fait du dépla= cement, chaque élément de volume de ce mi- lieu acquiert des charges opposées à ses deux côtés opposés : l’état du milieu diélectrique est analogue à celui d’un aimant, dont chaque par- ticule est elle-même un aimant. « Si le milieu n’est pas un isolant parfait, l’état de polarisation ne cesse de décroître, Le milieu cède à la force électrique, l'état de contrainte se relâche, et l'énergie potentielle qui lui était due est convertie en chaleur. Si, au lieu d’abandon- ner le condensateur à lui-même, on maintient « la différence de potientiel primitive entre les « deux armatures, il s'établit un courant qui res- « taure l’élat de polarisation au fur et à mesure « que la conductibilité du milieu lui permet de « disparaitre. L'agent qui maintient la différence « de potentiel dépense ainsi de l’énergie, qui est « finalement convertie en chaleur !. » II. — ÉQUATIONS DU CHAMP ÉLECTROMAGNÉTIQUE Ce sont des relations qui existent pour chaque point du champ entre les valeurs de certaines quantités physiques en ce point. Elles jouent dans l'étude de la propagation des ondes électriques un rôle analogue à celui que remplissent en acous- tique les équations qui expriment qu'en chaque point de l’atmosphère les lois fondamentales de la dynamique, la loi de Mariotte-Gay-Lussac, etc. sont satisfaites. Nous allons établir plusieurs rela- lions de ce genre. A Relations entre la densité du flux électrique en un point et les dérivées de la force magnétique en ce point. — Soit (fig. 3) un pôle unité placé en un point A (æ, y, 2)et soient «, 6, y, les composantes de l’ac- tion magnétique exercée sur ce pôle. Imaginons que ce pôle décrive le rectangle ABCD dont les côtés sont dy et dz; le travail des forces électro- magnétiques s’évalue comme il suit : le long de AB, on a y4z, | ONE le long de CD, on à (r er dy da, dont la somme algébrique est +. dz dy; les [el À dP côtés BC et DA donnent de Hem dy de, et le travail total cherché est ainsi : Si l’on considère un courant fermé ? quelconque extérieur au rectangle, ou encore un pôle magné- 1! MaxwELL. 2 D’après la théorie du déplacement tous les courants sont fermés. 1 R. BLONDLOT. — LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE LA LUMIÈRE 291 tique quelconque, la force exercée sur le pôle con- sidéré par le courant ou le pôle accomplit un travail nul lorsque ce dernier parcourt le contour fermé ABCD. Si maintenant, et c'est le cas le plus général, la région qui avoisine le point A est le siège de courants électriques, le périmètre du rectangle dydz embrasse un filet du courant, et le travail accompli par un pôle unité parcou- rant ce périmètre n’est plus nul : il a, comme on sait, pour valeur l'intensité < 4r,avec le signe + suivant le sens du parcours. Nous allons écrire cette relation : soit + l’angle du courant avec l’axe des z; sa section droite est cos + dy d2 et, en désignant par D sa densité, son intensité a pour valeur : dy dzD cosy; posons D cos? = w; le travail devient : + 4nu dy ds; w peut s'appeler la composante suivant OX de la densité du flux d'électricité ; nous appellerons de même v et w les composantes suivant OY et OZ de cette même densité. En égalant les deux valeurs du travail accompli par le pôle, nous avons : d d CIE) AU 4nru, et de même DD 7 d d (1) LATIN LE 4Erv, dr 3 DER TE —— — = TU dy Da Ces relalions expriment bien le lien qui existe entre le flux %, v, w, et la force magnétique (œ, Ê, v). 2° Relations entre les dérivées des intégrales électro- motrices en un point et la force magnétique en ce point — Soit (fig. 4) un circuit rectangulaire ABCD, en- tourant l'élément de surface dydz. Imaginons que l’on annule le champ magné- tique dans la région où se trouve le rectangle ABCD ; il naitra dans les 4 côtés de ce rectangle des forces électromotrices, que nous allons éva- luer. ra 292 Désignons par F, G, H les composantes de la force électromotrice totale qui serait produite par la suppression supposée du champ, dans un élé- ment recliligne passant par le point A, celte force électromotrice étant rapportée à l'unité de lon- gueur. J'adopterai pour F, G, H, le nom d’intégrales électromotrices *. La force électromolrice totale induite est le long de BA — G dy, nl d (c ci SR de) dy; le long de DC, : dG la some algébrique ie dy de. Les côtés CB et AD donnent de même la somme ol dy dz, en sorte que la force électromotrice dy totale induite dans tout le circuit par la suppression supposée du champ est D'autre part, la loi de l'induction nous apprend que cette force électromotrice totale doit être égale au flux d'induction magnétique (ou nombre de lignes de force) qui traverse le cireuit ABCD en entrant par la face négative. En désignant par fr la perméabilité magnétique, ce flux est po dy,dz. On obtient ainsi : DG DH ; ua = RE T et de mème, dH 2 LB —= <= — = dF DdG = dy EST Ces équations expriment bien une relation entre la force magnétique (x, &, y), et les intégrales élec- tromotrices F, G, H. 3 Relations entre le flux uw, v,w, et les intégrales électromotrices F, G, H. — Ces relations sont des conséquences des deux groupes (1) et (2) : nous les obtiendrons en éliminant &, $, y, entre ces deux groupes, Considérons par exemple l'équation du groupe (1) DT ru, et remplaçons y, 8 et y par leurs valeurs tirées des équations (2); nous obtenons : d°G (3) _— — — — - = 4rpu. dy dz EE — 1F,G, H, sont les composantes d’un vecteur que Maxwell appelle le moment électrodynamique, et que nous n'avons pas à considérer ici. R. BLONDLOT. — LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE LA LUMIÈRE Les deux autres équations du groupe (1) nous don- neraient deux équations toutes semblables à cette dernière. Le but que nous allons maintenant poursuivre est l’élimination de w, v, w, composantes du flux électrique, en les exprimant à l’aide de F, G, H et du potentiel électrostatique. Evaluation du fluc électrique u, v, w. —- Le flux électrique dépend des forces électromolrices et des propriétés du milieu dans lequel ces forces font naître le flux: on pourra donc exprimer ce flux en fonction de F, G, H et des constantes du mi- lieu. De cette façon, nous pourrons faire dispa- raître #, v, #, des équations (3) et, ne plus conser- ver comme fonctions que F, G, H. Le flux électrique dépend de deux conditions : 1° La conduction, 2° La variation avec le temps du déplacement diélectrique. Nous allons évaluer successivement ces deux portions du flux. Montrons d’abord que w, v, w qui ont été définis comme les composantes d’une droite ayant la direction du flux électrique, et pour longueur la valeur D du flux électrique rapporté à l'unité de sa section droite, ont aussi une autre signification : pour cela, considérons un tube de flux électrique infiniment délié, et soit w sa section par un plan parallèle à Y O Z; sa section droite est, en dési- gnant par 4 l'angle du flux avec l’axe des x, w Cosg; done, le flux à travers w est w CoscD—w.”. Ainsi le flux à travers une seclion normale à OX, rap- porté à l'unité de section est égal à w; » et w ont des significations toutes pareilles. Revenons à l'évaluation de w, v, w. Soient Ex, Ey, E: les composantes de la force électrique au point considéré et à l'instant considéré. La por- tion de , due à la conductibilité, s’obtiendra, d'a- près la loi d’Ohm, en écrivant que le flux d’élec- tricité est égal au produit du flux de force par le coefficient de conductibilité C1. Si nous considé- rons un élément w du plan des 72, le flux de force qui le traverse est w E,; donc, le flux d’électri- cité à travers cet élément est C vw E, : telle est la part de la conduction dans la valeur de «, Passons à la part due au déplacement : si l'étal de déplacement varie, il en résulte un flux à tra- vers w; le déplacement a pour valeur à chaque instant le produit du flux de force par —, c'est-à- 4m dire — E, w; si pendant le temps d£il éprouve la AT ER Re: ee variation — w dE,, cela signifie que cette quantité AT 1 Nous ne considérons ici que des corps isotropes. él R. BLONDLOT. — LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE LA LUMIÈRE d'électricité traverse w; en divisant par d£ el par w, on aura l'intensité du courant rapportée à l'unité de surface : la portion de # due au déplacement PROD est ainsi — : AT © On a donc : K DEz À u = CEz + = = , t de même K ÔE, TOO = 2h. IT Dé n K DE: DORE — ET D, Il reste à évaluer E, E, E. E, se compose de deux termes : l’un est dû aux actions électrostatiques exercées par des charges électriques et s'écrit, en désignant par 4 le poten- Un: : dY ., tiel électrostatique : _— l’autre Lerme est dû à CFA l'induction électromagnétique; soil que nous allons évaluer. c a une double signification : d'après la défi- nilion précédente, c'est la composante parallèle à OX de la force exercée à l'instant considéré par suite de l'induction électromagnétique sur l'unité (électromagnétique) d'électricité placée au point considéré; mais on peut dire aussi : & est la force électromotrice induite à l'instant considéré le long d'un élément dx mené par le point considéré, cette force électromotrice étant rapportée à l’unité de longueur; en effet, d'après la première définition, la force électromotrice, le long de dx, autrement dit, le travail de la force électromotrice pour trans- porter l'unité de l'électricité le long de dr est ed, et si l’on rapporte cette force électromotrice à l'unité de longueur, on retrouve &. La seconde manière d'envisager « nous en donne immédiatement la valeur, d’après la définition même de F, Rappelons que F est la force électro- motrice totale qui serait engendrée par la sw- pression fictive du champ, tandis que € est celle qui correspond à la variation acluelle de ce champ. F est l'intégrale par rapport au temps de :; donc ce terme, On a donc en définitive : BE — dy Evr Dr dt En substituant dans la valeur de #. il vient : Du = KT É 22 Con or \oet u—=—C 293 que l’on peut écrire symboliquement : l ( ÉTÉ 2 dy . U= — — — =— — |}, Zn NE ASE Si nous substituons à « cette valeur dans l’équa- tion (3), il vient : On a de même deux autres équations toutes semblables à cette dernière. Ce sont les équations (4) que nous voulions ob- tenir et que nous allons maintenant appliquer. IIT. — APPLICATION DES ÉQUATIONS Dans ce qui suit, nous considérerons seulement ce qui se passe à une très grande distance de la source des phénomènes électriques et magné- tiques, cette source étant d’ailleurs quelconque. Nous prendrons pour origine (fig. 5) un point de la source, et pour axe des z la droite menée de cette origine à l'observateur A, Si l’on considère le plan Fig. 5. mené par À perpendiculairement à OA, tous les points de ce plan sont sensiblement dans les mêmes conditions par rapport à la source O, du moins s'ils ne sont pas fort éloignés de A. Il résulte de là que, dans un tel plan, F, G, H ont partout la même valeur, autrement dit que ces quantités sont indépendantes de yet æ et sont fonctions unique- ment de zet de £. Nous considérons d'abord le cas où le milieu est un isolant parfait; dans ce cas, C — 0, et les équations ne contiennent plus le potentiel : d'une part, en effet, la source étant très loin ne contribue en rien à la valeur de 4, qui par conséquent ne peut dépendre que de charges réparties dans le diélec- trique; et d'autre part comme celui-ci n'a aucune 294 conductibilité, les charges ne s’y déplacent pas, et d les termes de la forme — — sont nuls. Les équa- Di Dz tions (4) deviennent ainsi : DIE —=Ky PAR Dz2 De? (4 bis) Le —= 0 2e D=2 De ? I=Ky ES La première et la seconde de ces équations sont, comme on sait, les équations de propagation d’une onde plane, normale à O7 et dont la vitesse est VE lessolutionssontde la forme bienconnue : VK F=f(—Vh+fR(G+Ve, G= fe Vi) + fi + V6); f, et f, représentent des ondes planes voyageant avec la vitesse V; £ et f,, des ondes planes voya- geant avec la vitesse — V. La solution de la troisième équation est : FA + où À et B sont des fonctions de z seul ; done, d'après cette équation, H est ou constant ou proportionnel au temps, et par suite, dans le cas où les perturba- tions sont périodiques, H — 0 : il n’y a pas de propa- gation de perturbations électromotrices parallèles à l'axe Oz. On a ainsi un système d’ondes planes se propageant avec la vitesse — , et constituées VK p exclusivement par des perturbations électromo- trices transversales. , Dans le cas spécial considéré, les équations (2) se réduisent à dG Ua = —, “ ne (2 bis) dF uB = — — D: EY=Ur ces équations indiquent que la force magnétique et, (puisque le corps est isotrope), l'induction ma- gnétique, sont situées dans le plan de l’onde. Les équations (1) se réduisent de même aux suivantes, d8 THE (4 bis) ou FO TE » &rw— 0; ici #, v, # sont dus uniquement au déplacement, puisque le milieu est absolument isolant ; la troi- sième des équations (1 4is) indique que le mou- vement électrique est dans le plan de l’onde. On voit par là que les perturbations dont nous nous occupons ressemblent à celles de la lumière en ce qu'elles sont transversales par rapport à la direction de la propagation. R. BLONDLOT. — LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE LA LUMIÈRE Si de plus G— 0, alors 4 —0, en vertu de (2 bis), ce qui indique que la force magnétique, et par suite la perturbation magnétique, sont parallèles à OY; la perturbation électrique est, d'autre part, parallèle à OX, puisque d’après les équations (1 bis), v est la seule composante du flux qui ne soit pas nulle. Done dans le cas particulier actuel, qui correspond en optique à un rayon polarisé, la per turbation électrique est perpendiculaire à la per- turbation magnétique. La figure 6 ci-jointe représente les valeurs de la force magnétique et de la force électromotrice àun instant donné, aux différents points d’un rayon, dans le cas d'une perturbation harmonique simple. Signification de N — Ee — Considérons le cas \Ky où le milieu est l’air ou le vide, et adoptons les unités électromagnétiques; alors = 1 : quelle est dans ce système la valeur de K, qui est 1 dans le système électrostatique? La constante diélec- trique étant, à un facteur près, l'inverse du coef- ficient d’élasticité électrique, a pour dimensions : Quantité d’électricité (déplacée) Force électrique Si l’on applique cette équation de dimension au passage du système électrostatique au système électromagnétique, on a la proposition suivante : le rapport de variation de l’unité de constante dié- lectrique est égal au quotient du rapport de varia- tion de l'unité d'électricité par le rapport de va- riation de l’unité de force électrique. Donc on a 1 K _ Rapport de variation de l’unité de force (4) LS à LE 1 Rapportdevariationdel’unitéd’électricité _ U . ue NE: 1 le rapport de variation de l’unité de force est bien Tv’ en e _Q Fe q effet, l'énergie = eg = EQ, d'ou Es R. BLONDLOT. — LA THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE LA LUMIÈRE 295 en désignant par U le rapport des unités électro- magnétique et électrostatique. Si nous substituons à K cette valeur dans l’éga- lité V — ne, il vient V = U; autrement dit, {a vi- tesse de propagation des ondes électromagnétiques est égale au rapport des unités électromagnétique et électrosta- tique. Relation entre l'indice de réfraction et la constante diélectrique. — Pour tous les diélectriques connus, u a la même valeur à une quantité négligeable près. On aura donc pour deux diélectriques : 1 V VKy VE Vie Pur VE VKy Si le premier milieu est le vide, NT est l'indice de réfraction du second pour les ondes électroma- gnétiques; or, si l’on emploie le système électro- statique, K — 1; donc e carré de l'indice est égal à la constante diélectrique. IV. — THÉORIE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DE LA LUMIÈRE L'étude que nous venons de faire nous a montré qu'il peut exister des ondes électromagnétiques qui, comme celles de la lumière, sont constituées par des perturbations transversales par rapport à la direction de propagation et voyagent d'un mouvement uniforme. Maxwell a émis l'opinion qu'il y a, non seulement analogie, mais identité entre les deux ordres de phénomènes ; selon lui, la vibration lumineuse consiste en perturbations périodiques du champ électromagnétique : c'est la théorie électromagnétique de la lumière. « Dans cette théorie, dit Maxwell, V doit être «la vitesse de la lumière, quantité mesurable « directement. D'autre part, le même V doit repré- «senter le rapport des unités électromagnétique «et électrostatique. Voilà deux genres d'expé- «riences absolument dissemblables qui doivent «donner la même valeur de V. Il y a là un crité- «rium de la valeur physique de la théorie électro- «magnétique de la lumière. » Voici quelques-uns des nombres trouvés par différents expérimentateurs pour le rapport des unités : Weber et Kohlrausch.... 3,1074 X 1010 centim. ME OLanan dans doc a Tee 2,8800 X 1010 PROMIS ON EE eee rec 2,8250 X 1010 JL Thoninéboconoentosc Ippon 2,9630 X 1010 RTE CICR er AM 3,0160 X 4010 EMA IEEE Se cerner eee -ne ce 3,0074 X 1010 ES -BOR OS Beer nee der legs no 3 0004 X 1010 D'autre part, M. Cornu a trouvé pour la vitesse de la lumière 3,004 X 10: centimètres par se- conde. Ce nombre diffère à peine des derniers nombres du tableau précédent, lesquels sont vrai- semblablement les plus exacts. La vérification expérimentale est donc complète. Nous avons vu qu'il existe aussi une relation entre l'indice de réfraction des ondes électroma- gnétiques et la constante diélectrique. Cette rela- tion ne se vérifie pas exactement, sauf pour les gaz. Il devait en être ainsi. En premier lieu, l'in- dice » et la constante diélectrique K, qui d’après la loi devraient satisfaire à l’équation K — »?, se rap- portent à des vibrations de même période; or les mesures de constantes diélectriques ne peuvent s'exécuter que par des opérations relativement lentes, et par suite l'indice » correspond à de très grandes longueurs d'onde. Comme on ne connaît pas l'équation exacte qui relie les indices aux lon- gueurs d'ondes, on n’a aucun moyen de déterminer avec quelque précision la valeur de » dont on aurait besoin. En second lieu, la mesure des cons- tantes diélectriques des solides et desliquides pré- sente de grandes difficultés : c’est une nouvelle source d'erreurs. Les gaz au contraire échappent aux deux espèces de difficultés qui viennent d’être signalées : d’une part leur dispersion est extrê- mement faible et par suite » est presqu'indépen- dant de la longueur d'onde; d'autre part leurs constantes diélectriques se mesurent facilement. Le tableau suivant contient les valeurs de VK et de x pour un certain nombre de gaz; les valeurs de K sont empruntées à M. Bolzmann. VK n INF SRE RE EL LEE AU 1,0002955 1,00029% ACITeNCATDONIQUE.. rer 1,000473 1,000%49 Hydro rene ere te rte een 1,000132 1,000138 Oxydetdelcarhone "near. 1,000345 1,000340 ETOtOxY AC 220. eme rec 1,000492 1,000503 Bicarbure d’hydrogène............ 1,000656 1,000678 Protocarbure d’hydrogène........ 1,000472 1,000443 L'accord est très satisfaisant. Comme le dit Maxwell, « nos théories de la « structure des corps devront être perfectionnées « de beaucoup avant que l’on puisse déduire les « propriétés optiques d’une substance de ses « autres propriétés physiques; en tout cas, dès «maintenant on peut affirmer que si VK n’est pas « l'expression complète de l'indice de réfraction, « c'en est néanmoins le terme le plus important. » R. Blondlot, Professeur adjoint de Physique à la Faculté des Sciences de Nancy. 296 D: H. VINCENT. —- LA PATHOGÉNIE DU TÉTANOS 1 LA PATHOGÉNIE DU TÉTANOS Entrevue depuis longtemps et fondée sur quel- ques faits non douteux de tétanos épidémique, la spécificité de cette affection s’est trouvée vérifiée à la suite les recherches de Nicolaïer !, Ayant inoculé des parcelles de terre recueillies dans les champs, les jardins, les rues à des souris, des lapins, des cobayes, cet expérimentateur détermina fréquem- ment chez ces animaux l'apparition du tétanos avec ses symptômes bien caractéristiques : vio- lentes contractures musculaires, spasme des mus- cles masticateurs (trismus), de la nuque et du dos (opisthotonus), dyspnée intense et cyanose, con- vulsions cloniques ; la mort survenait au troisième jour chez la souris, un peu plus tard chez le cobaye et le lapin. Le pus de la plaie d’inoculation ren- fermait, en proportion variable, mais d’une façon constante, parmi des organismes éfrangers, des bâtonnets droits terminés à une de leurs extré- mités par un renflement arrondi, volumineux, brillant, — une spore donnant au bacille l'aspect d’une épingle. Les essais de culture de ce microbe échouèrent, et, bien que la confirmation de la découverte de Nicolaïer se fût trouvée établie par les travaux de Rosenbach, Beumer, Bonome, Raum, Lampiasi, Bonardi, Hochsinger, etc., on n’était cependant pas encore autorisé à affirmer sans réplique que le «bacille à spore terminale »est bien l'agent patho- gène du tétanos. En isolant et cultivant cet orga- nisme à l’état de pureté, en inoculant avec succès les cultures obtenues après une série de généra- tions dans les milieux nutritifs, M. Kitasato ° a réalisé le premier la confirmation du rôle étiolo- gique du bacille de Nicolaïer dans la production du tétanos. Lorsqu'en effet on inocule une ou deux gouttes de culture à un animal réceptif, on déter- mine, en moins de 24 heures, l'apparition de symptômes tétaniques auxquels l'animal ne tarde pas à succomber. l Mais l'infection tétanique a ses conditions à elle et ne saurait obéir aux lois qui régissent les affections microbiennes déjà connues. La tubercu- lose, la septicémie, le charbon, etc... sont indé- finiment transmissibles en série : le tétanos ne l’est pas, et, lorsqu'on prélève, après la mort des ani- maux, le liquide séro-hématique exsudé au point inoculé avec la culture, pour l'injecter à d’autres 1 Dissertation inaugurale, Güttingue, 1885. ? Zeitschr. f. Hyg., nov. 1889 animaux très réceplifs, il est impossible d'effectuer plus d’un ou deux passages. Quand on pratique, en effet, chez les lapins où les cobayes tués avec des cultures du bacille, l’exa= men microscopique du liquide ou des tissus pris au. point d’inoculation, on retrouve très rarement le bacille du tétanos : il faut une recherche persévé- rante pour rencontrer un ou deux bâtonnets dans l’ensemble des préparations. Si même la mort est tardive, aux cinquième, sixième ou huitième jours, les micro-organismes ont disparu. D'autre part, l'examen microscopique du sang, des viscères, du système nerveux, de la moelle osseuse, reste néga=M tif, et les ensemencements faits avec ces tissus fécondent exceptionnellement le bouillon de cul- ture. Lesiège variable de l'inoculation sous la peau, sous la dure-mère, dans les muscles, le péritoine, la chambre antérieure de l'œil, n’influence en aucune facon ce résultat bien singulier : lorsqu'on inocule une culture pure, l’agent pathogène du tétanos ne se mulliplie pas dans l'organisme et il en disparait rapidement. Comment concilier ce fait anormal avec les symp- tômes tétaniques présentés cependant par l'animal inoculé? Comment, surtout, expliquer, dès lors, que chez l’homme ou les animaux qui succombent à un tétanos contracté à la suite d’une plaie acei- dentelle, on rencontre, dans la plaie provocatrice, une grande quantité de bacilles de Nicolaïer qui témoignent manifestement de leur pullulation? Ainsi que plusieurs expérimentateurs, nous avons essayé, M. Vaillard et moi, de trouver cette expli- cation #. IT Les savants qui ont tenté de reproduire le tétanos chez les animaux à l’aide de produits tétanigènes tels que la terre, ont constaté, d’une facon presque unanime, que le pus seul de la plaie se montrait virulent. On en a donc induit que le bacille sécrète, au foyer restreint de sa cul- ture, un poison qui se diffuse dans l'économie et va intoxiquer les centres nerveux. Pareille interprétation doit-elle être formulée lorsqu'on inocule, non plus des matières tétani- gèens impures, mais des cultures pures du bacille de Nicolaïer? M. Kitasato et, plus récemment, MM. Sanchez Tolédo et Veillon, frappés de la rareté des bacilles, avaient admis néanmoins qu'ils se 1 L. VarcLarD et H. Vincenr. Acad. des Sc., 27 janv. 1891 et Ann. de l'Inst. Pasteur, janv. 1891. D' H. VINCENT. — LA PATHOGÉNIE DU TÉTANOS 2017 mulipliaient. Mais cette assertion, vraie pour le tétanos contracté à la suite de plaies accidentelles, ne l’est pas pour le tétanos expérimental consécutif à l'injection des cultures. Il n'existe alors aucun foyer de multiplication, même fugace, du microbe ; car si, après inoculation, on sacrifie les animaux d'heure en heure; si l’on fait la mème inoculation dans la chambre antérieure de l'œil du lapin et du cobaye et qu'on pratique l'examen méthodique de l'humeur aqueuse à des intervalles très rapprochés et jusqu'au moment de la mort de l'animal, on constate que le nombre des bacilles diminue de plus en plus, déjà au bout d’une heure, pour disparaitre très rapidement chezles animaux les plus réceptifs. En réalité les signes du télanos et la mort con- sécutive des animaux sont dus, dans ce cas, à une intoxication par les produits solubles déjà élaborés dans le liquide de culture. Les preuves en sont faciles à donner : pour cela, séparons l’action du microbe de celle de la toxine qui l'accompagne et inoculons comparalivement deux cobayes, l’un avec 1/100 de centimètre cube de culture du ba- cille de Nicolaïer en bouillon, l’autre avecla même dose du même bouillon filtré sur porcelaine et privé ainsi des bacilles qui s’y sont cultivés. On détermine, chez l’un et l’autre animal, des signes identiques de tétanos dont les premiers phéno- mèênes apparaissent sensiblement dans les mêmes délais, c’est-à-dire 18 à 24 heures après l’injection. On peut, inversement, inoculer des cultures pures du bacille dépourvues de toxine, sans déter- miner de signes de télanos : ce fait est important. Pour réaliser des cultures sans toxine, il suffit de cultiver le bacille à la température de 20 à 22° : Je bouillonse trouble abondamment, mais les bacilles ne commencent à sécréter leur loxine qu'à partir du dixième jour environ. Si donc l’on inocule à un animal une forte dose de cette culture prise au cinquième jour, on ne délermine aucun symptôme tétanique. On peut aboutir à la même démonstra- tion et injecter sans dommage de grandes quan- tités de bacilles sans toxine en inoculant des cul- tures chauffées au préalable à 65°. Cette tempé- rature n'affaiblit en rien la vilalité des spores tétaniques et détruit au contraire le poison micro- bien. Ces mêmes bacilles, recueilliset simplement lavés dans une grande quantité d’eau stérilisée pour entrainer la toxine, se montrent encore inoffensifs. Et cependant les bacilles du tétanos, cultivés à basse température, lavés ou chauffés à 65°, n’ont nullement perdu leur virulence, car, cultivés dans le bouillon à la température oplimum (38°), ils donnent une culture d’une activité consi- dérable, capable de luer le cobaye à la dose de 1/500 de centimètre cube et même moins! De là résulte une double conclusion : 1° les cul- REVUE GÉNÉRALE, 1891, tures pures n’agissent que par les poisons solubles déjà sécrétés par les bacilles; 2 ces bacilles, intro- duits seuls et en grande quantité sous la peau d'un animal très sensible sont impuissants à germer et à provoquer la maladie. Nous pouvons par conséquent, déjà comprendre la non-inocula- bilité en série des produits prélevés chez un ani- mal rendu télanique par l'injection des cultures. Le second de ces faits montre que les lois générales du parasitisme subissent, à l'égard du tétanos, une exception des plus singulières, puisque, à l'état pur, les bacilles ou les spores du tétanos sont incapables de se multiplier dans un organisme cependant très réceptif. Il y a donc, dans l’infec- tion accidentelle ou chirurgicale des plaies par des produits qui recèlent le germe du tétanos, des conditions particulières que ne réalise pas l’inocu- lation expérimentale avec les cullures pures et qui méritent d’être élucidées. IT Le microbe du tétanos est très répandu; on le rencontre surtout à la surface du sol, particulière- ment des terres cultivées ou fumées (Nicolaïer), des routes. [existe encore à la surface du foin (Rietsch), dans les matières fécales des herbivores (Sanchez Tolédo et Veillon), dans le lube digestif de la plu- part des animaux, el c’est la souillure des plaies par ces produits naturels, qui détermine leur con- tamination par le germe du tétanos. Les plaies profondes, anfractueuses, favorisent surtout la multiplication de ce microbe, qui est anaérobie. Or dans le sol, dans les fèces des herbivores, le microbe pathogène se rencontre à l’état sporulé et c'est exactement cetle condition qu'on imite lors- qu'on inocule au lapin ou au cobaye les spores télaniques dépourvues de toxine soit par le lavage, soit par le chauffage à 65°, Cependant on ne pro- voque pas le tétanos dans ce dernier cas : les bac- téries disparaissent en quelques heures, englou- lies, dévorées par des légions de phagocytes qui en ont rapidement raison. Comment l’inoculation avec une très petite quantité de terre, contenant certainement une proportion infiniment plus petite de spores tétaniques, peut elle au contraire être pathogène ? Cest qu'il y a des circonstances toutes naturelles qui favorisent la multiplication de l'agent patho- gène et qu'on peut reproduire expérimentalement. Si l’on désorganise les tissus en injectant, au préa- lable, quelques gouttes d'acide lactique au cin- quième, l'inoculation d’une très petite quantité de spores sans {oxine amène chez l'animal un tétanos rapide et violent. D’autres substances chimiques, la triméthylamine par exemple, possèdent la même vertu et l’on voit les lapins, beaucoup moins sen- 9 298 D' H. VINCENT. — LA PATHOGÉNIE DU TÉTANOS sibles pourtant que les cobayes, succomber après quelques jours d'un tétanos formidable. La contusion des muscles, précédant l'injection d'une faible quantité de spores, détermine bientôt un télanos débutant par le membre traumatisé et se généralisant ensuite. Dans tous les cas précédents, l'examen des tis- sus inoculés avec les spores seules dénote une multiplication abondante des bacilles du tétanos. L'association d'un microbe vulgaire tel que le Microbacillus prodigiosus n’est pas moins propice à l'infection tétanique. Ces phénomènes si curieux d'association microbienne, cette alliance offensive et défensive, contractée entre le microbe du téta- nos et certaines bactéries banales, sans lesquelles il ne pourrait pas se développer, peuvent être mis en évidence par une expérience bien simple : dans une poche sous-cutanée faite dans la région abdo- minale du cobaye, on insère une petite boulette d'ouate imprégnée d’une petite quantité de spores privées de toxine par lavage ou chauffage à 65°. La plaie est suturée incomplètement et abandonnée à elle-même sans asepsie préalable el sans panse- ment, de manière à faciliter sa souillure secondaire par les germes saprophytes. Dans un délai variant entre 5 et 10 jours, l'animal présente les premiers signes d’un tétanos qui progresse bien vite et le tue en 28 ou 36 heures. L’autopsie montre la petite plaie remplie de pus et contenant, outre le bacille de Nicolaïer qui s’est abondamment multiplié, un grand nombre de bactéries pyogènes dont l'im- mixtion adventice a favorisé la pullulation du pre- mier. L'association microbienne intervient donc manifestement dans la pathogénie du télanos et permet d'émettre cette opinion, en apparence pa- radoxale, que le danger de l'infection tétanique est dû peut-être autant aux saprophytes qu'au bacille du tétanos lui-mème. Ainsi le traumatisme, la désorganisation des tissus, les phénomènes de symbiose microbienne sont donc nécessaires pour permettre au microbe tétanique de végéter, alors que seul il ne pourrait pas se mulliplier. Et ne sont-ce paslà, précisément, les conditions habituelles de l'infection tétanique en pathologie humaine.ou animale ? Le microbe du tétanos n'est-il pas accompagné d’un grand nombre de bactéries existant avec lui dans les terres téla- niques ? N'y a-t-il pas enfin, très souvent, dans les accidents suivis de télanos, traumatisme violent, attrition musculaire, désorganisation des parties molles ? Toutes ces circonstances interviennent done, à titre d'adjuvants indispensables, pour per- mettre le développement du bacille du tétanos, et dès l'instant qu'il s'est multiplié, c'en est fait de l'individu infecté. Le bacille pathogène sécrète, en effet, un poison d'une prodigieuse violence qui jouit de propriétés chimiotactiques négatives, chasse les leucocytes, brave leurs propriétés phago- cylaires et se répand dans l’organisme. C’est ce poison dont il nous reste maintenant à parler. MI Si l’on filtre sur porcelaine une culture en bouil- lon, faite dans le vide à la température de 38°-39°, et datant de 15 à 20 jours, on obtient un liquide à odeur butyrique, à réaction alcaline et qui tue le cobaye à la dose d'un millième de centimètre cube, la souris blanche à la dose d’un cent mil- lième de centimètre cube; la mort arrive en un à quatre jours, précédée des signes typiques du téta- nos. Les recherches de Brieger ! sur la nature du poi- son tétanique tendaient à montrer la nature alca- loïdique des toxines fabriquées par le bacille de Nicolaïer. Dans un travail plus récent, Kitasalo et Weyl disaient avoir extrait par la méthode de Brieger deux composés ptomaïques dont l’inocu- lalion à la souris déterminait, à dose assez forte, des convulsions ou des paralysies ; mais les auteurs font eux-mêmes des réserves sur la valeur patho- génique de ces ptomaïnes qui déterminent des symptômes très peu semblables à ceux du tétanos. Des recherches faites parallèlement au labora- toire de bactériologie du Val-de-Gràce ont montré que les alcaloïdes ainsi isolés n’ont rien de com- mun avec le véritable poison tétanique ?. Déjà Knud Faber, de Kopenhague, dans des recherches inspirées des beaux travaux de MM. Roux et Yersin sur le poison diphtéritique, avait constaté sur des cultures impures, il est vrai, que la toxine du té- tanos se comporte comme les ferments diastasiques ou enzymes el qu'elle est sans effet lorsqu'on l’in- troduit par la voie digestive. Cette toxine présente, en effet, toutes les réac- lions des diastases et du venin des serpents : elle est précipilable par l'alcool, détruite par une chaleur de 65°, atténuée ou annihilée par l’oxy- gène, ele. Elle possède la propriété d’adhérer aux précipités phosphatiques. Enfin elle agit à des doses dont la petitesse dépasse l'imagination. Si de lextrait sec obtenu par évaporation dans le vide d’un centimètre cube de bouillon où a pullulé le microbe et qu'on a filtré sur porcelaine, on défalque le poids des cendres obtenu par la cal- cination, la différence, soit 0 gr. 025 représente le poids de la matière organique. Or, en admettant que ces 25 milligrammes (il yentre, pour une large part, des substances étrangères au poison téta- ! Berl. Klin. Woch., 1887, n° 17 et Deutsche med. Woch., 1887, n° 15. ?L. Varcrarp et H. Vixcenr. Sur le poison tétanique, Soc. de Biol., nov. 1890. PAPA À E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES 299 nique) représentent entièrement la toxine elle- même, il ressort néanmoins que ce poids de ma- tière organique suffirait pour tuer au moins mille cobayes ou cent mille souris. De tels chiffres témoignent de l’activité extraor- dinaire de la diastase tétanique etilest facile de s'expliquer, dès lors, combien la plus faible multi- plicalion, même passagère, du bacille de Nicolaïer peut déterminer à bref délai les phénomènes téta- niques par intoxication du système nerveux cen- tral. D'H. Vincent, Chef du laboratoire bactériologique à l'Hôpital du Dey, à Alger. THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES ET DE LEUR FIXATION SUR LES FIBRES TEXTILES ! (Suite et fin.) Les matières colorantes, dont le nombre s’ac- croît de jour en jour et dépasse déjà bien des mil- liers, peuvent se âiviser d'après leurs chromo- gènes dans les classes suivantes : 1° Dérivés nitrés, 2 Dérivés azoïques, 3° Oxyquinones, 4 Dérivés de loxyde de diphénylène-célone, 5° Quinoneoximes, 6° Dérivés du triphénylcarbinol, 7° Phtaléines, 8° Dérivés quinonimidiques, 9° Dérivés aziniques, Safranines, 10° Cétonimides, 11° Hydrazones, 12 Dérivés quinoléiques, 13° Dérivés acridiniques. 14 Indulines, 15° Indigo, 16° Divers, 17 Colo- rants de constitulion inconnue. Nous nous contenterons de donner un aperçu très sommaire de la constitution de ces anatières colorantes, ce qui permettra au lecteur d'acquérir rapidement une idée de l’état actuel de cette par- tie de la Chimie. ‘ Il 1° Dérivés nitres. — Par introduction des grou- pes AzH? ou OH dans les carbures nitrés on obtient des matières colorantes jaunes ou orangées, qui teignent directement la laine et la soie, mais ne se fixent nullement sur coton, mordancé ou non. Les phénols et les amines mononitrés n’ont qu'un pouvoir tinctorial faible et ne se fixent que très peu solidement sur la fibre ; seuls les dérivés plus for- tement nitrés ont pu trouver des applications pratiques. Les principaux sont, pour les amines nitréés, Phexanitro-diphénylamine AzH[CSH?(Az0?) }7; pour les phénols nitrés, l'acide picrique CSH2Az0°); OH, le binitronaphtol C!H°(AzO?} OH et son acide sulfonique. Quelques dérivés des malières azoï- ques, de l’alizarine, des amidotriphénylcarbinols trouvent aussi leur application; mais dans ces 1 Voyez la première partie dans la Revue du 30 avril 1894, page 245. colorants c'est l’autre chromophore qui donne son caractère à la combinaison; le groupe nitro ne fait que varier la nuance ou modifier plus ou moins les propriétés. 2° Dérivés azoïques. — Les dérivés azoïques con- tiennent le groupe chromophorique Az—Az, uni à deux noyaux benzoliques ou aromatiques en géné- ral; le chromogène le plus simple de ce groupe est donc l'azobenzol C°H°Az — AzCSHŸ. Le groupe azoïque peut être contenu deux et même aussi trois fois dans la molécule ; on a alors les chro- mogènes : C5H5— Az— Az — CSHiAz— Az— C6HS et CS H5 — Az — Az — CGHi Az — Az — C5 HA Az — AzC6HS. dans lesquels les noyaux benzoliques peuvent être remplacés, tout ou en partie, par des noyaux naph- tyliques C!H7, diphényliques — CH —-C£Hi— ete. Ces chromogènes sont fortement colorés, mais n'ont aucune affinité pour la fibre; ils deviennent colorants par l'introduction des groupes auxo- chromes AzH°? et OH. Dans le cas des groupes OH, les colorants obtenus sont insolubles dans l’eau et souvent même dans les alcalis ; pour pouvoir les fixer sur la fibre on les solubilise en faisant les dérivés sulfonés. Les groupes sulfo introduits influent d’ailleurs aussi sur la nuance, suivant la position qu'ils occupent dans la molécule. La pré- sence du carboxyle dans un colorant oxy ou ami- doazoïque lui communique souvent la propriété de teindre les mordants, surtout quand ce earboxyle se trouve en ortho vis-à-vis de l’hydroxyle. Comme toutes les amines basiques se laissent diazoter, et que les dérivés diazoïques ainsi obte- nus, peuvent se combiner à la plupart des amines et des phénols, ainsi qu’à leurs dérivés sulfoniques et carboxyliques, le nombre des matières colo- rantes azoïques possibles est pour ainsi dire illimité. En fait on en a déjà préparé bien des 300 E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES milliers, et plusieurs centaines ont trouvé un em- ploi industriel. Les colorants azoïques montrent toutes les nuances; dans ces derniers temps on à même pré- paré des veris qui avaient manqué jusqu'ici. La nuance ne dépend pas seulement de la nature des noyaux aromatiques unis aux groupes Az — Az, mais encore à la position des AzH?, des OH, des SOSH et des COOH dans ces noyaux. Des groupes tels que CH*, OCH*, etc., peuvent aussi influencer sensiblement la nuance. Certaines malières azoïques, dérivées des para- diamines, de la benzidine et de ses homologues, du diamidostilbène, etc., ont la propriété de tein- dre les fibres végétales, sans mordants, en bain neutre ou plutôt alcalin. La cause de cette pro- priété intéressante n'est pas connue; mais On à observé que seules les bases symétriques sont susceptibles de fournir des colorants de ce genre ; par exemple : AzH? AH? AzH? AYH2 AzH? \ A 7N | be USE 8 ' / AN AzH2 | AzH° CH Az A7H2 tandis que les dérivés dissymétriques tels que AzH? AzH° fournissent des colorants qui se fixent bien direc- tement sur laineet soie, mais non sur coton. Pour qu'un colorant direct tire bien, il faut en outre que les deux groupes AzH? se trouvent en para vis-à-vis de la liaison des deux noyaux. La substitution des H en ortho vis-à-vis des AzH° par des radicaux CH?, OCH®, etc, influe sur la nuance, mais non sur l’affinité du colorant pour le coton; sila substitution de ces radicaux a lieu en méta vis-à-vis des AzH?, l’affinité pour le coton est sen- siblement diminuée, et la nuance est généralement différente de celle que fournit l'isomère ortho-sub- slitué. 3 Oxyquinones. — La quinone ordinaire, la benzoquinone, n'est qu’un chromophore très fai- ble: les propriétés chromophoriques s’accentuent avec la complication de la molécule, dans la naph- toquinone et surtout dans l’anthraquinone. 0 (9) a [NX \ 7 ESA Ü (5 Ds ü Ô Nco Benzoquinone &-naphtoquinone Anthraquinone On ne sait pas jusqu’à présent si les orthoqui- nones, f-naphtoquinone, phénanthrène- quinone, chrysène-quinone, sont des chromophores, mais cela est probable : (o) XX B-naphtoquinone Phénanthrènequinone Par l'introduction de un ou de deux hydroxyles dans le noyau de la naphtoquinone contenant les deux oxygènes, on obtient des colorants qui tei- gnent les mordants (oxynaphtoquinone et acide naphtalique) ; tandis que la juglone, qui contient l’'hydroxyle dans l’autre noyau, ne montre pas cette propriété. La naphtazarine est une dioxynaphtoquinone dont la constitution n’est pas encore éclaircie; on ne sait même pas avec certitude si elle dérive de l'& ou de la f6-naphtoquinone; la première hypo- thèse est cependant la plus probable. Les oxyanthraquinones sont toutes des corps colorés ; mais seules les dioxyanthraquinones ayant deux hydroxyles voisins, l’alizarine et l’aystazarine, OH he \ 0 co Lo. sa Dco sont de véritables matières colorantes, teignant les mordants métalliques; encore cela n’a-t-il lieu que très faiblement pour l'hystazarine. L'introduction d’autres groupes dans le noyau de lalizarine modifie la nuance, mais non le carac- tère tinclorial en général. La ffavo- et l'anthra-pur- purine montrent des nuances analogues à celles de l’'alizarine; les ritroalizarines sont plus orangées, l'antragallol teint les mordants d’alumine en brun: OH \ OH co Ru (C10) a ei 0 \ d (e) H \7 \co” \co” Anthrapurpurine Flavopurpurine OH de 00. Nitroalizarine Anthragallol E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES 301 L'introduction du groupe quinoléique donne une matière colorante bleue, le Bleu d’alizarine. ce ne. à Ü Aux dérivés anthraquinoniques se rattachent les dérivés de l’anthracoumarine ; le produit de substi- tution monohydroxylé n’est pas un colorant, mais un dérivé dihydroxylé ayant les deux hydroxyles voisins, le styrogallol, teint les mordants : Le phényloxanthranol 7 COX on Ve He parait être également un chromophore. Le vert phtalique d'Otto Fischer en est probablement un dérivé : co CH C5HS Az (CH)2 C | \CSHS Az (CH)? cl de même que la céruléine, à laquelle on attribue la constitution : COX bre Ci HA = ce — 0/ 4° Dérivés de l'oxyde de diphénylène-cétone. — L'oxyde de diphénylène-cétone, (xanthone) AN est un chromogène dont la galloflavine est peut-être un dérivé. L’euxanthone, lique, qui en est le dérivé dihydroxy- n'est pas en elle-même une malière colorante. Elle ne le devient que dans sa combinaison avec l’acide glucoronique C°H!07, en donnant l’acide ewrna- thique CH1O", ° Quinoneoximes (nitrosophénols). — Les qui- nonoximes sont pour la soie et la laine de faibles matières colorantes substantives jaunes, sans emploi industriel, Leur intérêt pratique se base sur la propriété qu’elles possèdent de former avec certains oxydes métalliques, en particulier ceux du fer et du cobalt, des laques insolubles suscep- tibles d’être fixées sur les fibres animales ou végé- tales. Ainsi que nous l'avons développé plus haut, seules les orthoquinonoximes jouissent de cette propriété ; par exemples la dinitrosorésorcine, le @-nitroso-4-naphtol, l’4-nitroso-B-naphtol : AzOH 0: .ÿ Ÿ ni x) AzOH tandisque le nitrosophénol et l’z-nitroso-4-naphto, en sont dépourvus. (o) 0 AzOH AzOH Les dérivés sulfoniques des deux orthonitroso- naphtols forment des sels doubles de sodium et de fer solubles et susceptibles dans cet état de tein- dre les fibres animales en vert foncé. IT ° Groupe du lriphénylméthane. — Le triphényl- méthane n’est pas un chromogène, mais son pro- duit d’oxydation le triphénylcarbinol possède ce caractère. Cependant par introduction d’un seul groupe salifiable dans le carbinol-on n'obtient qu'un colorant rouge faible, n'ayant aucune affinité pour la soie et la laine, et ne se fixant que sur coton mordancé au tannin. Encore faut-il que le groupe AzH? de l’amidotriphénylcarbinol se trouve en para vis-à-vis du carbone fondamental. Dans la formation des sels du monamidocarbinol il n’y a pas d’anhy- drisation. Ce chlorhydrate rouge est (CS Hs 2 4 < _ÿAzH, HCI NE les colorants dérivés des di- et tri-amidotriphényl- carbinol sont au contraire des anhydrides. Le chlorhydrate de rosaniline est : — (C5 Hi Az H2} (Q NoH (Bæyer); , HCI — HO. 302 E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES L'anhydrisation du chlorhydrate de triamidotri- phénylcarbinol peut avoir lieu de différentes ma- nières. E. et O. Fischer estiment qu'elle a lieu entre l’hydroxyle et l’un des hydrogènes rattachés à l'azote, et qu'il se produit alors une liaison entre l'atome d'azote et le carbone fondamental : C5 Hi Az H2 CCS Hi AzH2 [For Hi Az H° CI ma le Niétzki croit probable une formule analogue à celle des quinonimides : L C (C5 HA Az H2)2 CGHi= AzHH CI Enfin Rosenstiehl, et après lui von Richter, ad- mettent que l’anhydrisation a lieu entre l’hydroxyle et l'hydrogène de l’acide (CS H4 A7 H°)2 CZCéH' Az HE Ni le radical de l'acide prenant la place de cet hy- droxyle. Le groupe AzH° ou OH se trouve en para vis-à- vis du carbone fondamental; dans les groupe Az H? un ou deux atomes d'hydrogène peuvent être rem- placés par des radicaux alcooliques, et l’un, peut- être même les deux, par des radicaux aroma- tiques. Dérivés du chlorure d'amidotriphénylcarbinol CéH? C CH \ Dre cl Si nous remplaçons un hydrogène d'un des groupes phényle par un AzH°, en position para, nous obtenons le chlorure de diamidotriphénylcarbinol qui est une matière colorante violette d’un faible pouvoir tinctorial. Les dérivés tétraméthyliques et tétréthyliques sont des matières colorantes vertes (Vert malarhite, et Vert brillant) d’un pouvoir tinctorial considé- rable et très employées dans l’industrie, On obtient tous ces corps par oxydation des leu- codérivés correspondants, le diamidodiphénylmé- thane et ses dérivés méthyliques ou éthyliques : CES LT DArCH 2 A 32 | LT Dar CH ainsi que par certains autres procédés. Pour qu'il se forme de cette manièreune matière colorante, il faut que le second groupe AzH? soit également en position para vis-à-vis du carbone fondamental; s’il est en méta ou en ortho comme dans : Co Hs CS H> 7 ici 2 . ie — He RU A7 DAz (CH) < >Az(CH®) on n'en oblient pas par oxydation. Mais si l’on acé- tylele groupe AzH? en ortho ou méta et qu’on oxyde ensuite, on obtient des colorants -de nuance rou- geätre, comme le diméthylparamidotriphénylear- binol lui-même. Si dans le chlorure de diparadiamidotriphényl- carbinol nous introduisons un groupe AzH? dans le troisième noyau phénylique, nous obtenons une nouvelle série de colorants, rouges cette fois, les rosanilines, si cette introduction se fait en position para : Les dérivés alcooliques de la rosaniline sont d'un violet plus ou moins bleuâtre suivant le nombre de groupes alcooliques, le dérivé hexamé- thylique étant le plus bleuâtre ; les dérivés phény- liques sont des colorants bleus. Si l'introduction du troisième groupe AzH? a lieu en position méta ou ortho dans le diamidotriphé- nylearbinol, la nuance du colorant n’est pas sensi- blement changée ; ainsi Az H? 5 PAINRU ES CCS Az (CHS) VD" 0:0 Di dr est un vert ressemblant au corps diamidé, et AzH? A > NET a N Az (CHS)2 € Az (CHE) IN Az (CH): est un vert bleuâtre, E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES 303 Si la basicité du troisiène groupe AzH? en para est neutralisée par acétylalion ou transformation en ammonium, ou sice groupe est transformé en groupe pyridique, la nuance violette repasse éga- lement au vert, toutcomme si le groupe C6H n'était nullement substitué. Ainsi : PRES LL > Az H (C2H3 0) CE DAz (CH?) (C2H5 0) C—<7 DaAz(CHS): C—< Az (CH)? IN S IL Ar(CH5)2 ce DAz(CHSR : a < A2 (CH) 7 DAz(CH*)2 CHE CI se CC arcCHs) 7 {Ar | DEN CC PIN SAT (CHE)2 NC dAz(CH5)2 sont des matières colorantes vertes. Si dans le chlorure de tétraméthyldiamidotri- phénylcarbinol, un des atomes d'hydrogène du troisième phényle est remplacé par un hydroxyle en ortho, méta ou para, la nuance du colorant ne change pas : elle reste verte; seulement dans le dernier cas le colorant se dissout dans les alcalis avec une coloration violette. Le remplacement d’atomes d'hydrogène par des méthyles en ortho vis-à-vis des groupes AzH°, en méla par conséquent vis-à-vis du carbone fonda- mental, n'altère pas le caractère général de la ma- lière colorante; ainsi : MCE * CH3 CON Az N CH: a“ \; (CH) DA CHE MMS A7 FE CH | NA L » CN CRRSALEE CH° est un rouge comme la fuchsine, seulement d'une nuance un peu plus bleuàtre. La fuchsine méthylée en ortho vis-à-vis du car- bone fondamental n'a pu être préparée jusqu'à présent; mais on connait ses dérivés méthylés dans l’amide, tels que : CH: _ “ Eu | / <__DA(CH® | = QT Az CH): | “ C —<__ Az (CH) SE È OH CH° NUE: et Œ 1 70 :) on De l'examen de leurs nuances en teinture, il res- sort que les méthyles en ortho vis-à-vis du carbone fondamental font virer la nuance plus vers le bleu, que ceux qui se trouvent en méta. (Noelting, Bulle- tin de la Soc.chim.de Paris (2).t.2, p.391 ett.5, p.387. Le remplacement des hydrogènes par des mé- thoxyles fait virer la nuance du colorant au bleu; ainsi : OCH° C=— «@ DAzH? LC MOCHE est un bleu véritable. Le remplacement par des halogènes rend la nuance plus violette ; la tétra- bromorosaniline (de constitution inconnue) est violette. 1° Dérivés de l'anhydride de l'oxytriphénylearbinol. JACSHE): C4 0 Par remplacement d’un hydrogène d'un noyau phénylique par l'hydroxyle, en position para, on oblient la benzaurine, colorant jaune orange : et, par remplacement de deux hydrogènes des deux noyaux phényliques par deux hydroxyles, l'au- rine : A __D)OH CR OH DR —< 0 colorant orange. Les sels de ces deux corps sont oranges pour le premier, rouges pour le second. Le second hydroxyle parait pouvoir aussi se trouver en ortho sans que la nuance en soit sensiblement changée ; car Liebermann ct Schwarzer ont obtenu un corps tout à fait analogue à l'aurine par l'action ,OH1 de l’aldéhyde salicylique C°H*: ŸCOH 2 nol en présence de l'acide sulfurique. (Deut. Chem. Gesell., 9. 800 1876.) sur le phé- 8° Phtaléines. — Les phtaléines sont le produit de substition de la phtalophénone, l’anhydride de l'acide triphénylearbinol-carboxylique : Cë H°}? C—CSHiCO NE put La phtalophénone n'est pas un chromogène, car ses produits de substitution hydroxylés et amidés ne sont pas des matières colorantes, bien que leurs sels soient colorés. Quand les phtaléines sont des malières colo- rantes, c'est qu'il ya un autre groupe chromopho- 304 E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES rique. Ainsi dans la fuorescéine et la rhodamine c’est probablement le noyau anhvdrisé DA7z H° No SON DR @=—= >OH C ed >AzH° | NciHiCO \CHtÉo | HA EE que l'on retrouve aussi dans la diphénylène-cétone- oxyde : k LORS Fe ADSI(6) EN On attribue à la galléine la formule <__>0H DO On: 7710 —<__ÿoH ie ÿHiCO (0) qui toutefois, à notre avis, n’explique pas suflisam- ment les différences marquées entre ses propriétés et celles de la fluorescéine. Quant à la céruléine, elle n'appartient pas à la fa- mille de phtaléines; c’est un dérivé du phényl- oxanthranol. IT 9° Dérivés quinone-imidiques (Indamines, Indophé- nols, Thioindamines, Oxindamines, Oxindophénols.) — Cette classe de colorants nombreux et intéressants dérive de la quinone-imide et de la quinone- diimide, qui, elles, ne sont pas connues. (®) AzH l Il ) Cl GS Il Il AzH AzH Tndamines. — Les indamines dérivent de la qui- none-diimide dans laquelle l'hydrogène d’un des groupes AzH est remplacé par un groupe amidophé- nylique CH‘AzH?, l'AzH? se trouvant en para vis- à-vis de l'Az : J £ QE A4 > AH? >AzH Des isomères où AzH? serait en méta ou en ortho n’ont pas encore été préparés, Les sels se forment par addition de l'acide au groupe AzZH, (Nietzki.) : S Az H, HCI 4 AZ (CH) CI > re € AH: NS JAr(CH3) V. von Richter admet que dans ces sels le radi- cal acide est directement lié à l'azote, comme il l’est au carbone dans les colorants rosaniliques : 2 Sd AzH: <= > Az (CH:}: CS au ne D Ar (CH: Les indamines sont des colorants peu stables; elles n’ont aucun emploi industriel, mais elles sont importantes comme produits intermé- diaires de la préparation des safranines. Indophénols. — Ts dérivent de la quinone-imide de la même manière que les indamines de la dii- mide. L'’indophénol le plus simple est : | A Dr > Az H? L'indophénol industriel est le dérivé correspon- dant de la naphto-quinone-imide, dans lequel en outre le groupe AzH? est méthylé : NC Dar (CHsy Des indophénols isomères pourraient dériver de la quinone-diimide par remplacement de l'hydro- gène du groupe AzH par l’oxyphényle CH OH. AR SAzH LA Nr AZ È- >OH Ils ne sont pas connus jusqu'à présent, mais on en connait les dérivés sulfurés. (Voir plus bas.) Enfin la théorie fait prévoir des oxyphényl- quinone-imides telles que PAR) AZ NS OH Les colorants formés par l’aclion de la quinone- eus = 0 > me K —() \20H SU les phénols en solution alealine, chlorimide ou nitrosophénol CSHE — appartiennent probablement à cette classe. Les indophénols sont solides à la lumière et au savon, mais très sensibles aux acides. Si dans les indamines et les indophénols les deux noyaux benzoliques sont réunis par un atome de soufre ou d'oxygène en ortho vis-à-vis de l'Az fondamental, on obtient des colorants d'une grande stabilité : les éhivindamines (colorants de Lauth), les oxindamines et les oxindophénols. E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES 305 Thioindamines et Thioindophénols. — La thioin- damine typique est le Violet de Lauth ou thionine le dérivé tétraméthylique est le Bleu de méthylène. EN 7 DaAr(CH?Cl NCA Y S < Ar(CHP Par l’action des alcalis sur celui-ci on obtient les deux indophénols, la diméthylthionoline (dimé- thylthiorindophénol, Violet de méthylène) : JS D Az N ?S NÉ arr) 2 C1 et le fhionol : Oxindamines etoxindophénols. À la première de ces deux classes appartient le Bleu de naphtol ou de | Meldola : << Az(CH)? CI DE à la seconde la gallocyanine et le prune. Az NX © ee Die € So se et 0 do | É \ COOCHE 0 Ces deux derniers colorants sont à la fois sub- stantifs et adjectifs. La propriété qu'ils ont de teindre les mordants provient de la présence dans la molécule de deux hydroxyles en position ortho. D'après les recherches récentes de Nietzki, la diazoréscrufine apparliendrail également à cette | classe et aurait la formule : 7 NE JT D=0 \z N NS 7 Ne >OH IV | 10° Azines ; safranines.— Les azines aromatiques | sont des chromogènes; par introduction d’un AzH? on obtient les ewrhodines, colorants faibles et | sans applications industrielles ; par l'introduction de deux AzH° on a le Violet de phénylène, et les colorants analogues, appelés dans l'industrie | couleurs neutres. Le remplacement d’un hydrogène | par un OH fournit les ewrhodols : À NZ ’ | ANA TEN H477 4 Me (4) A4 N NA V ee Phénazime Eurhodine (CH)? 0 4 Az H° Vu Violet neutre Les noyaux phényliques de la phénazine peuvent être remplacés par des noyaux naphtyliques, phénanthréniques, ete. Les safranines sont des dérivés du chlorure de phénylphénazonium, inconnu lui-même; la safra- nine la plus simple ; la phénosafranine en est le dérivé diamidé asymétrique : La mauvéine (Violet de Perkin) est sans doute une safranine phénylée. 11° Cétonimides. — Les cétonimides dérivent des cétones simples de la même manière que les quinonimides des quinones, par remplacement de l'oxygène du groupe CO par le groupe AzH; dans ce dernier l'hydrogène peut être remplacé par des | radicaux aromatiques et sans doute aussi par des radicaux alcooliques. L'avramine lypique est jaune ; ses dérivés aromatiques, la phénylauramine, et ses homologues, sont orangés ou bruns. | L’auramine est: SAz(CH3)2 | La base est incolore, les sels sont jaunes. La cétone | /C5H*Az(CH°)? CO NC& Hi Az (CH)? | dont dérive l’auramine, fournit aussi des sels | jaunes, mais ils n’ont qu'un pouvoir tinetorial très 306 E. NOELTING. — THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES peu considérable. Il paraitrail donc que non seule- ment le groupe C — AzH, mais même le groupe CO estun chromophore, ce dernier très faible, il est vrai. 12° Hydrazones. — Les hydrazones formées par l'action des hydrazines sur les corps contenant le radical CO ont le groupement chromophorique C — Az — AZHR, où R est un radical aroma- tique. Pour leur donner le caractère de colorants, il n'est pas nécessaire d'y introduire un groupe salifiable, le groupe Az —- Az semble en tenir lieu: mais pour les rendre solubles à l’eau, il faut y introduire des groupes sulfoniques. Les hydrazones peuvent être considérées comme pal des cétone-imides C—AzH, dans lesquelles l'atome R’ d'hydrogène uni à l'azote est remplacé par le groupe AzHR. Les hydrazones simples ne contenant qu’une fois le groupe C—Az— AzHCSH® sont, en général, d'un jaune peu intense et d'un pouvoir colorant peu prononcé; la nuance devient plus vive et le pouvoir tinctorial augmente considérablement, si le groupe en question y est contenu deux fois et si les deux atomes de carbone sont reliés entre eux C— Az — AzHCSH° | . Tel est le cas, par exemple. C=— Az — AzHCSH® pour la fartrazine. ,COOH C—=A7— AzHCSH{(SOS Na C=— Az— Az HCSH4 (SOS Na NcooH M. Fischer appelle ces hydrazones doubles des os{z0nes. Il semble cependant que même des hydrazones simples peuvent être des colorants d’une certaine intensité, si le reste de la molécule ajoute au carac- tère chromogène. Ainsi l'isaline, elle-même un corps coloré, donne une hydrazone qui est une belle malière colorante jaune : A7 con Ncon NAY— A7 H(CHiSOH) Dans certains cas les hydrazines, réagissant sur des corps contenant deux fois le groupement CO, ne donnent pas d’hydrazones ou d’osazones, mais des matières oxyazoïques; ainsi l’x et la f-naphto- quinone donnent avec la phénylhydrazine les deux phénylazo-2-naphtols, para et ortho. oH OH fetes k AE TS: | | Â2 = Az CUHS Les produits qui se forment par l’action des hydrazines sur la phénanthrène-quinone, ne sont pas encore suffisamment étudiés. 13° Dérivés quinoléiques. — La quino'éine est un chromogène, mais très faible, Les amidoquinoléines fournissent en effet des sels orangés rougeâtres. Le caractère chromogène est augmenté par le rem- placement des hydrogènes du noyau par des radi- Caux; ainsi la méthylamidophénylquinoléine est est une matière colorante jaune, la #avaniline : CH° = SAzH?2 Z À La constitution des autres colorants quinoléiques est peu connue. Ce sont la guinophtalone, peut-être | îl Ne D H# la cyanine, les rouges de quinoléine et la berbérine. A celte série se rattachent encore les rosindols. 14° Dérivés acridiniques. — L’acridine et surtout ia phénylacridine sont des chromogènes. Parintro- duction de groupes AzH? on obtient des matières colorantes jaunes ; la phosphine ou chrysaniline est : Az ; \ AzH°? | | (PUR NGC AN AzH? Le benzoflavine en est un isomère, n'en différant que par la position d'un des groupes AzH? ! : Az K H>Az/ NI | je br | VAIPAS 15° Zndulines. — Les indulines, dont la consti- tution n’est pas encore entièrement éclaircie, pa- | raissent être en relation étroite avec l’azophénine qui est un produit intermédiaire de leur forma- | tion. D'après Fischer et Hepp (Deut. Chem. Gesell. 1 (Œhler; comparez Nietzki, Die organischen Farbstoffe. 2e édi- tion p. 186. E. NOELTING. -- THÉORIE GÉNÉRALE DES MATIÈRES COLORANTES 307 21,2617, (1888), nonanilide l’azophénine est la dianilido-qui- — Az C6 H°)2 (— Az H CO H5)2 L'induline 6B, C'SH?7Az;, (Es HO C6 H5 Az ùS A4 serait Ncini | CS5H° et se rapprocherait par conséquent de la phénazine. La rosinduline, obtenue par l’action de l'anilido- Az CS Hÿ naphtoquinonanile C!°H%— AzC'H5.H sur l’aniline, No a la formule : PAN C6 H5 Az— C0 Hr4 CS Hi N 477 Je CS HS 16° Zndigo. — L'indigo, dont Bayer a réalisé de nombreuses synthèses à la formule : PR (e] Ne 70 K CGHt î CH \ Ci H AzH # AZ Un résumé complet des travaux sur l’indigo est publié par l'auteur de cet article dans le journal l'Industrie textile 1889-1891. 17 Colorants divers. — Murexide. Ce colorant, qui n’est plus employé, est le sel ammoniacal de l’acide purpurique, inconnu à l’état de liberté. Il donne des laques colorées avec les onydes d’étain, de plomb, de mercure, ete. La constitution de l’a- cide purpurique est probablement : H H \ \ PEN To Co CO CO CO | | A7 CAE C AzH NON KZ H CO CO Dans le sel c'est sans doute l'H du groupe Az ré- unissant les deux noyaux, qui est remplacé. Oxycétones aromatiques. Certaines polyoxycétones aromaliques, quoiqu'incolores elles-mêmes, ont la propriété de teindre les mordants. Elles ont toutes des hydroxyles en ortho. Les plus importantessont: CH la gallacétophénone CO , obtenue par conden- C6H? (0H) sation de l'acide acétique avec le pyrogallol, la C6 H° lriorybenzophénone CO . obtenue de la même | CS H2(0H} manière avec l'acide benzoïque, l’Lera-oxybenzophé- GSH?(0H)° none CO , dérivée de l’acide gallique et du le H° (0H) pyrogallol, ete. Rose fluorescent de ‘Gerber. M. Gerber, de Bâle, l’obtient en dinitrant le tétraméthyldiamidodiphé- nylméthane en présence de beaucoup d’acide sul- furique, remplacant les groupes AzO? par OH, et oxydant ensuite. Ce colorant est peut-être Az (CH) Il contiendrait . comme la fluorescéine, le groupement C°H 4 NCSH No 7 général des propriétés fluorescentes à ses dérivés. Primuline. Déhydrotoluidine. T'hioflavine. — La dé- hydrotoluidine est l'amidobenzénylparamétaami- dothiocrésylol ‘, qui parait donner en Az T7 C — CSH£AzH? (1.4) do C’est done un dérivé du thiazol. Ce n'est qu'un colorant faible ; mais par méthylation il donne un colorant jaune intense, la {hioflavine. Par l'action d’un excès de soufre sur la déhydrotoluidine il se forme la primuline, dont l'acide sulfonique teint directement le coton en jaune, en bain alcalin. CH KE V4 18° Colorants de constitution inconnue. — Les colo- rants artificiels sont presque tous élucidés au point de vue de leur constitulion; il n’en est pas de même des colorants naturels, dont on ne connaît la struc- ture complèle que dans très peu de cas (indigo, alizarine) ; pour quelques autres la constitution est connue parliellement, pour la plupart pas du tout. Comme colorants artificiels importants de cons- titution inconnue nous n'avons plus guère que le noir d'aniline et ses congénères, les fluorindines. les nigrosines, les couleurs sulfurées de Croissant et Bretonnière (cachou de Laval), et le vert à l'aldéhyde E. Noelting, Directeur de l'École de Chimie de Mulhouse. 1 Me de Le nombre de mémoires et de livres parus r les matières colorantes est extrêmement considérable ; nous mentionnerons parmi les publications les plus récentes : G. Sonucrz, Die Chemie des Stenikoblentheers; Brunswig, Vieweg éditeur, 1886-1890. — R. Nierzxr, Chemie der organis- chen F'arbstoffe : Berlin, Springer éditeur, 1889. — Hume, The dyeing of textile fabri ics; Londres, Cassel et Cie. 1885 — FRIEDLAENDER, Fortschritle der Theerfarbenfabrikation 1871- 1887, Berlin, Springer 1888. — NœLrIN6, « Conférences sur les matières color antes »; Monileur Sc ientifique 1886. — N'ŒLTING, « Etudes sur les matières colorantes et leur application » dans le journal PIndustrie lextile A888-91, — MoruLau, Organische Farbstoffe, 1890. — Vizron, Trailé des dérivés de la houille, 1890, — Diéprerre, Trailé de la teinture et de l'impression 1891, 308 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Picard (E.), de l'Académie des Sciences. — Mémoire sur la théorie des équations aux dérivées par- tielles et la méthode des approximations succes- sives (Journal de mathématiques, 1890). — Sur la détermination des intégrales de certaines équa- tions aux dérivées partielles du second ordre par leur valeur le long d’un contour fermé. (Journal de l'Ecole Polytechnique, 1890.) ; Ces travaux sont les premiers où soit abordée sous une forme générale la théorie des équations aux déri- vées partielles du second ordre. On ne s'était guère occupé que de certains types particuliers d'équations dont les plus importants sont les suivants : Du D2u (1) = + — —0 DT Dr Du Du D2u (2) —— — ou = — (1) dT* D DID Les travaux considérables dont ces équations (1) et (2) ont été l’objet ont mis en évidence les différences essentielles qui les distinguent : toutes les intégrales de l'équation (1) sont analytiques, et se laissent définir par leurs valeurs le long d’un contour fermé à l'intérieur duquel elles sont régulières ; à chaque intégrale de (1) correspond une intégrale analytique de (2); mais l’équa- tion (2) admet en outre une infinité d’'intégrales non ana- lytiques ; une intégrale de (2) n’est pas définie par ses valeurs le long d’un contour fermé, mais par les valeurs de ses dérivées qi de le long d’un arc de courbe et dx, dy sa valeur en un point de cet arc. Il était vraisemblable qu'une telle distinction dût se poursuivre entre les équations du second ordre plus compliquées ; mais en dehors du théorème de Cauchy sur l'existence d'intégrales analytiques, on ne connais- sait aucune propriété générale de ces équations. Les travaux de M. Picard embrassent toutes les équations de la forme : ne 2 2B (a PA (3) A(æ, y) SA + 2B (x Sy Du Du Du © 2 C(+, y) dy? = F C Dr? dy T, »). Cette équation peut se ramener, suivant que B? — AC est négatit ou positif, à l’un des types : du DaDy © D?u Du F = de Da? D (A) (B) Par une méthode, à la fois très rigoureuse et très simple d'approximations successives, l’auteur étend aux équations (A) et (B) ces deux propriétés fondamentales des équations (1) et (2) : 1° Dans la partie du plan où B°— AC est négatif, il existe une intégrale, continue ainsi que ses dérivées des deux pre- miers ordres à l’intérieur d'un contour fermé quelconque, et qui prend sur ce contour des valeurs données (pourvu toute- fois que ce contour soit suffisamment petit). 20 Dans la partie du plan ou B?—AC est positif, il existe une intégrale qui prend en un point a d'un arc de courbe c . Le DU DU une valeur donnée et dont les dérivées —, — DT dy long de © des valeurs données (pourvu toutefois que Pare © prennent le ET INDEX soit suffisamment petit) ; u et ses dérivées des deux premiers ordres restent d'ailleurs continues quand on traverse l'are c. Ceci n’est pas vrai pour les équations (A). Ces théorèmes ne supposent rien sur A, B, C,E. L'auteur les complète moyennant certaines hypothèses sur ces coefficients, L'étude des équations linéaires notamment conduit à des conclusions de la plus haute importance et qui se résument ainsi: Soit l’équa- tion : d2u Du D?u u (4) A SPRE ADR DT DLD/ dy< Z Du + 9E — - Fu — 0: ; De 7 0; on peut toujours supposer nul le terme indépendant de w. Envisageons seulement la région du plan où B2—AC est négatif : il existe, d’après le premier théo- rème, une intégrale de l'équation (4) qui prend des valeurs données le long d’un contour fermé quelcon- que, pourvu que ce contour soit suffisamment petit. On montre ici que cette intégrale est unique. De plus, toute intégrale de l’équation (4) est analytique, si les coefficients A,B,...F sont eux-mêmes des fonctions ana- lytiques de #, y. Enfin si le coefficient de u est identi- quement nul, ou simplement si le signe de ce coeffi- cient est contraire au signe commun de A et de C, il existe une intégrale et une seule qui prend des valeurs données le long d’un contour fermé quelconque, et les méthodes de M. Picard permettent de calculer cette intégrale, On voit que l'équation (4) dans ce dernier cas Jouit absolument des mêmes propriétés fondamen- tales que l’équation de Laplace, Il est inutile d’insister sur la portée de ce théorème que toutes les intégrales de l'équation (4) sont analytiques. Comme l'auteur l’indique dans une note récente, ce principe conduit naturellement à une large extension de la théorie des fonctions de variable imaginaires. Ajoutons que les équations de la forme (3) et (4) se rencontrent dans une foule de questions d’acoustique, d'électricité, ete. Par l'importance et la généralité des résultats, comme par l'élégance et la netteté des mé- thodes, les mémoires que nous venons d’analyser s’im- posent donc à l’étude non seulement des analystes, mais de tous ceux qui s'intéressent à la physique ma- thématique. P. PAINLEVÉ. Bulletin du Comité international permanent pour l'exécution photographique de la Carte du Ciel. Sirième fascicule, grand in-4° Gauthier. Villars et fils, 55, quai des Grands-Augustins, 1891. Le sixième fascicule du Bulletin rédigé par le Comité international permanent pour l’éxécution photogra- phique de la Carte du Ciel, vient de paraître: il ne contient pas moins de huit mémoires, bien qu'il m’ait que 90 pages. Ces mémoires, que nous ne pouvons son- ger à analyser ici, sont fort intéressants; nous donnons ci-dessous leurs titres : Plan et détails de l’appareil parallactique de mesures par M. Kapteyn. — Description d’un appareil parallac- tique de mesures, par M. P. Gautier, — Sur une mé- thode très simple permettant d'orienter un instrument à monture parallactique plus exactement qu'on ne peut Je faire en général par des lectures des cercles, par M.J. Scheiner, astronome à l'observatoire de Potsdam (traduction par Mille D. Klumpke). — Sur la loi des diamètres photographiques des disques stel- laires, par M, Max Wolf (traduction par Mile D. Klum- BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 309 pke). — Sur les clichés types des étoiles de la 11et de la {4° grandeur, par M. N.C Duner. — Théorie des erreurs de l'instrument parallactique de mesure el réduction des clichés, par M.L. C. Kapteyn. — Sur la détermination des grandeurs photographiques des étoiles, par M. N. C. Duner. — Mesure de la disper- sion atmosphérique, par M. Prosper Henry. XD} 2° Sciences physiques. Bergoet (A.), Docteur ès sciences. — Photographie des couleurs par la méthode interférentielle de M. Lippmann (1 fr. 50). Gauthier-Villars el fs, 5b, quai des Grands-Augustins, Paris, 1891. Les lecteurs de la Revue n’ont certes pas oublié la découverte capitale faite, il y a quelques mois, par M. Lippmann : un problème dont on avait depuis long- temps cherché la solution était désormais résolu : les couleurs du spectre fixées d'une facon inaltérable, à l’aide d’un procédé d’une admirable simplicité et d'une rare élégance scientifique. M. Berget a exposé ici même très nettement la méthode qui avait conduit à ce beau résultat; mais pour comprendre cette méthode, il est nécessaire de connaître au moins les principes de la théorie des ondulations.On pouvait peut-être supposer que cettethéorie n’est pas absolument familière à tous les photographes et à touslesamateurs de photographie ; le petit livre que vient de publier M. Berget dans la bibliothèque photographique de la librairie Gauthier- Villars a été écrit dans cette hypothèse. Il se divise en deux parties distinctes : dans la première, l’auteur ex- pose d’une facon très élémentaire les phénomènes d’interférence ; il est parvenu à donner une forme re- marquablement simple et très claire à son exposition; la lecture des quatre chapitres qu'il a consacrés à ce sujet pourrait être utile à toute personne qui désirerait se faire uneidée des vibrations lumineuses, même en de- hors de l'application particulière à la photographie des couleurs; dans la seconde partie M. Berget explique en détail la méthode de M. Lippmann : il insiste sur les procédés opératoires dont quelques-uns sont même inédits. Le succès de ce petit volume nous paraît as- suré d'avance. LUGIEN POINCaRÉ. Lodge (0.). — Les théories modernes de l'électri- cité. Essai d’une théorie nouvelle, fraduit de l’an- glais etannoté par E. Meylan (5 fr.). Gauthier- Villars, 09, quai des Grands-Augustins. Paris, 1891. Co livre répond à une préoccupation générale des physiciens qui pensent que le moment est proche où les relations entre les phénomènes électriques et op- tiques pourront être traduites sous une forme exclusi- vement mécanique. À tous ceux qui y réfléchissent, il fournira l’occasion de voir les choses sous un jour nou- veau; il est douteux qu'il paraisse satisfaisant. En France surtout nous sommes trop portés à exalter ou à déprécier outre mesure de pareils essais; ce serait pourtant se tromper également que de voir dans les grossiers mécanismes imaginés par l’auteur une image fidèle des phénomènes électriques, ou au contraire de n'y trouver qu'une analogie factice et sans intérêt. Ce qui distingue ces mécanismes de tant d’autres que l'électricité a fait éclore à profusion dans des cer- velles ignorantes, c’est que les équations qui relient les déplacements des diverses pièces mécaniques et les forces qui les produisent, sont ou rigoureuse- ment, ou presque exactement les mêmes que celles qui relient les variables électriques qu'on leur fait corres- pondre : intensités de courant, forces électromo- trices,etc. Cela n'implique point que les phénomènes électriques soient dus à un mécanisme — insaisissable à nos sens — identique à celui que représentent les fi- gures; mais cela facilite beaucoup l’étude des phéno- mènes. La connaissance des lois élémentaires suffit à la construction d’un mécanisme représentatif exact; et la mise en mouvement dece mécanisme équivaut à l’in- tégration des équations, Si en outre, comme dans le livre de M. Lodge, on a réussi à réunir dans un en- semble de mécanismes de même nature, qu'on peut imaginer reliés les uns aux autres et se commandant, les images de presque tous les phénomènes électriques, cela donne l’espoir qu'il sera possible de remplacer ceux-ci par d’autres, également exacts comme repré- senfation, mais moins grossiers, plus continus, plus acceptables. Ces représentations, fort utiles pour le lecteur qui à toujours présents à l'esprit les principes de dynamique, risque de séduire surtout la classe trop nombreuse de ceux qui croient comprendre la mécanique parce qu'ils ont une vue assez claire, pas même de la cinématique, mais seulement de la géométrie des déplacements. Pour ceux-là les représentations sont trop matérielles : ils risquent d'y croire; il aurait mieux valu leur donner cette forme humoristique à laquelle excelle Tyndall : la troupe d’écoliers appuyés les uns contre les autres pour la vitesse de propagation du son; l'échange de voyageurs entre deux trains allant en sens inverse pour le frottement des gaz. On est ainsi averti que si la com- paraison est juste, ce n’est qu'une comparaison, qu'il ne faut pas poursuivre indéfiniment sous peine d’ar- river aux dissemblances. La traduction m’a paru fidèle, d’une lecture facile ; je ferai le meilleur éloge des notes, sobres et courtes, en disant qu’elles étaient presque toutes nécessaires. MARCEL BRILLOUIN. Jagnaux (Raoul). Histoire de la Chimie. Librairie polytechnique. 2 volumes in-8° (32 fr.). Baudry et Cie, 15, rue des Saints-Pères. Paris, 1891. Le livre de M. Jagnaux est à la littérature chimique ce que sont à la littérature proprement dite les recueils de morceaux choisis en usage dans l’enseignement se- condaire, L'auteur a réuni, à propos de chaque ques- tion, les principaux passages des mémoires les plus importants, et en a fait un tout homogène en résumant les parties qu'il ne pouvait citer in extenso. L'idée est originale et ne manque pas d'intérêt. L'histoire de la chimie présente, sous une forme condensée, un grand nombre de faits disséminés dans des ouvrages rares et des publications anciennes, A ce titre, elle est intéres- sante et peut rendre des services, Le principal reproche qu'on puisse faire à cet ouvrage est de manquer de proportions. Ainsi, l’on trouve un chapitre de 75 pages sur la création de la chimie pneumatique, et 4 pages seulement sont consacrées à la dissociation. La chimie organique présente aussi quelques lacunes, surtout en ce qui concerne les travaux récents de l’école atomique. Peut-être M. Jagnaux a-t-il voulu indiquer par là, que, comme les peuples heureux, la chimie organique mo- derne n’a pas d'histoire. L'ouvrage est divisé en quatre parties à peu près égales : Grandes théories chimiques, métalloïides, métaux, chimie organique. Enfin le deuxième volume se termine par l'histoire de la théorie des fermentations, et l'exposé des discussions qui ont accompagné les travaux de Pasteur, Georges CHaARPy. Alexeveff, (P.) Professeur de Chimie à l'Université de Kieff. — Méthodes de transformation des combinaisons organiques, #raduit du russe par MM. J. Darzens et L. Lefèvre. — Un vol, in 8 de 215 pages (6 fr.). &. Masson, Libraire-éditeur, 120, bou- levard Saint-Germain. Paris, 1891. Avec les progrès rapides qu'a faits la chimie orga- nique dans ces dernières années, les découvertes de fonctions nouvelles et des transformations variées qu’elles subissent de la part des différents réactifs, les recherches bibliographiques deviennent aujourd’hui bien longues et souvent bien difficiles pour ceux qui entreprennent des travaux de laboratoire. Le besoin d'un ouvrage, dans lequel les chimistes trouveraient réunis tous les procédés théoriques de transformations des groupements fonctionnels, les 310 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX méthodes pratiques pour les effectuer ét l'indication des mémoires originaux qui s’y rapportent, se fait donc sentir depuis quelques temps : c’est à ce besoin que répond louvrage que vient de publier M. Alexeyeff et et dont MM. Darzens et Lefèvre nous offrent la traduc- tion francaise. Malheureusement cet ouvrage ne comble que partiel- lement la lacune qui existe actuellement dans notre littérature chimique : c’est plus un livre théorique qu'un manuel pratique, et d’ailleurs l’auteur nous le présente comme un résumé de son cours de chimie organique, s'adressant par conséquent à des étudiants préparant un examen tel que notre licence. Les traducteurs ont intercalé dans le texte quelques procédés opératoires; mais, à notre avis, ils ne les ont pas assez multipliés el ils auraient pu tout au moins donner des renvois bibliographiques qui se seraient utilement joints à ceux des mémoires russes de l’ou- vrage original. Néanmoins ce livre présente pour les chimistes francais, dont bien peu savent lire le russe, le grand avantage de leur faire connaître un certain nombre des recherches importantes effectuées dans les laboratoires des Universités russes et nous ne pourrions trop savoir gré à M. Darzens d’avoir largement contribué, par sa connaissance de la langue russe, à cette vulgarisation, H. Gautier. 3° Sciences naturelles. BDetmer (W.,). — Manuel technique de Physiologie végétale. Traduit de l'allemand par le D' H. Micheels. 130 gravures dans le texte (broché 10 fr., cartonné 1 fr.50). Reinwald et Cie, 15, rue des Saints-Pères. Paris, 1891. L'édition francaise du livre de M. Detmer rendra un véritable service aux botanistes, car il complète heu- reusement les traités généraux de M, Van Tieghem et de M. Duchartre, et correspond au Manuel d'anatomie de M. Strasburger, Aux étudiants il indique des dispositifs simples d'expériences leur permettant de se rendre facilement compte de la démonstration des faits expo- sés dans les traités généraux. Aux professeurs il donne des détails spéciaux sur la manière de réaliser cer- laines expériences de cours; l’auteur, qui en a répété un grand nombre, à toujours soin d'indiquer dans quelles conditions il les a le mieux réussies, faisant ainsi profiter le lecteur de sa pratique personnelle. Ce livre est bien, à proprement parler, un Manuel techni- que ; il est divisé en deux cents paragraphes bien choisis, souvent précédés de notions anatomiques, mais dont le nombre même est un empêchement au compte rendu analytique. Malheureusement ce livre ne peut suffire au lecteur francais, et il est regrettable que le traducteur n'ait pas jugé à propos de le compléter. L'auteur y fait preuve du part pris, trop fréquent chez ses compa- triotes, de taire autant que possible les travaux fran- cais ; ce silence est d'autant moins excusable qu'il renvoie souvent à des travaux allemands pour des ren- seignements complémentaires, ef que la bibliographie, si elle n’élait pas volontairement tronquée, serait assez complète. Les auteurs français cités par M. Detmer sont faciles à compter; ils sont bien choisis, mais peu nombreux ; ils sont quatre : Pasteur, au sujet de la formule de la solution nutritive qu'il a employée dans ses cultures de Levure de bière (p. 45, 67, 215); Bous- singault (p. 49), au sujet d’une note insérée dans les Comptes-rendus, sur la non absorption de l'azote libre de Pair ; Garreau (p. 165), pour ses expériences sur la transpiration, et de Saussure (p, 181), à propos de l’ab- sorplion par les racines des matières minérales des solutions nutrilives. >ar contre, l'auteur à fait sa propre bibliographie avec un soin tout particulier, et il renvoie le lecteur à ses travaux personnels avec une complaisance qui pourrait paraitre exagérée ; c’est ainsi que dans son livre, qui compile 400 pages, il cite ennote environ 80 fois ses mémoires, Nous ne lui aurions pas demandé autant d’insistance au sujet des travaux francais, mais seulement un peu plus d'impartialité. Quoi qu'il en soit, ce livre vient combler en France une lacune, et nous lui souhaitons bonne fortune, C. SAUVAGEAU. Stefanowska (Micheline), — La disposition his- tologique du pigment dans les yeux des Arthro- podes sous l'influence de la lumière directe et de l’obseurité complète. Recueil zoologique Suisse, T: V. n°2. 1890. Les expériences de Boll, de Th.-W Engelmann et de Van Genderen Stort ont montré que chezles Vertébrés la lumière a une influence marquée sur la répartition du pigment rétinien. Mlle Micheline Stefanowska s’est proposé d'étudier ce qui se passe dans les mêmes con- ditions chez les Arthropodes ou mieux chez les Insectes, car, à part quelques Arachnides, ses recherches n’ont porté que sur les Insectes. L'auteur faisait de chaque espèce en expérience deux séries, l’une qu’elle sou- mettait pendant un temps à une obscurité complète, l’autre qu’elle exposait à la grande lumière. Les yeux, fixés ensuite par l'acide osmique, étaient coupés et examinés. D'un grand nombre d'observations ainsi conduites il résulte que les divers pigments qui accom- pagnent les rétinules et les cônes se concentrent, à l'obscurité, en des points déterminés, laissant ainsi à découvert une partie des éléments rétiniens, tandis qu'à la grande lumière les pigments diffusent, s’éta- lent à la surface des cônes et des rétinules, les voilant pour ainsi dire et les rendant moins nettement appa- rents, Il y a des degrés variables avec les espèces, mais l'effet produit paraît constant. Somme toute, le travail très consciencieux de Mlle Micheline Stefanowska nous montre que, malgré les différences de structure qui distinguent les yeux des Arthropodes de ceux des Verlébrés, l’action de la lumière est comparable dans les deux groupes d'animaux, Il eût été intéressant que l’auteur, choisissant quelques types d’Insectes qui vivent ordinairement dans la terre, nous montràt l’action de cette obscurité prolongée sur la disposition normale du pigment chez ces espèces. Une conclusion pratique à tirer de ces recherches, en dehors de l’interèt physiologique qu’elles présen tent, c'est que pour l'étude des éléments rétiniens de l'œil des Arthropodes, il est bon d'employer des sujets préalablement soumis à l'obscurité. D' H. BEAUREGARD. Le Dantec, Préparaleur à l’Institut Pasteur. — Re- cherches sur la digeslion intra-cellulaire chez les Protozoaires. Thèse de la Faculté des Sciences de Paris, Imp. L. Danel, à Lille. Mars 1891. Il y a déjà longtemps que la digestion intra-cellu- laire chez les Protozoaires a intéressé les naturalistes et a été étudiée par des procédés expérimentaux. C’est, en effet, un des phénomènes vitaux les plus intimes qu'il nous soit donné d'observer à la base du règne animal. La première question étudiée par M. Le Dantec est celle des vacuoles qui entourent les ingesta. Il en a fait l'étude d’abord au moyen du tournesol. En opé- rant sur des Stentor, il a vu d’abord les grains de tour- nesol absorbés et entourés d'une vacuole; après un certain temps, on voit le grain bleu de tournesol rougir brusquement et on peut en conclure que, chez cel infusoire, les corps ingérés, nutrilifs ou non, se trouvent au bout de quelque temps dans un milieu acide ; que l'acidité est progressive comme si elle était due à une sécrétion; que l'acide produit est un acide fort; la sécrétion de l'acide est plus ou moins rapide, suivant les espèces; l'acide semble le même pour toutes les espèces observées. Pour étudier plus en détail le phénomène, l’auteur s’est servi de l’alizarine sulfo-conjuguée. Grâce à d’ha- BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX o11 biles procédés, pour lesquels on ne peut que renvoyer au mémoire original, il a pu établir les faits suivants : 4° Les amibes ingèrent indistinctement les matières solides nutritives ou non, ce qui n’est pas étonnant si l'on admet, comme de Bary pour les Myxomycètes, que l’'ingestion est le résultat normal du stimulus au point de contact. X 20 Ces matières ne sont jamais en contact direct avec le protoplasma, mais sont contenues dans des va- cuoles, 3 Le contenu des vacuoles est au début l’eau du mi- lieu extérieur; il s’y produit dans tous les cas, même sans que la vacuole contienne de matière nutritive, une sécrétion acide qui neutralise l’alcalinité de l’eau et finit même par lui donner une acidité constatable. 4° L'éjection est un phénomène dans lequel on ne peut voir aucun acte voulu de la part de l’amibe, mais une simple chose accidentelle ; il faut néanmoins dire que cette éjection paraît plus facile pour les corps non nutritifs que pour ceux qui le sont, D' H. Donigr. 4° Sciences médicales. Testut (L.). — Traité d'Anatomie humaine, à l'u- sage des médecins et étudiants en médecine, f. 1, Ostéologie, Artluologie, Myologie, gr. in-8° de T55 pages, avec 469 figures (16 fr.). Paris O.Doin,8, place de l'Odéon, 1891. On a coutume de penser et de dire que l’Anatomie descriptive est une science à peu près parfaite, arrivée au terme de son évolution et à laquelle il n’est plus possible d'ajouter que des détails sans importance et sans intérêt. À cette branche des connaissances hu- maines on à grande tendance à appliquer la formule de Labruyère : « Tout est dit et l’on vient trop tard, » — En publiant son Traité d’Anatomie humaine, M, Tes- tut est venu nous prouver qu'on se tromperait beau coup en pensant ainsi, Il a su profiter des acquisitions nouvelles disséminées dans des publications spéciales, et que nous retrouvons dans ce livre, résumées en quelques lignes. Il a su profiter également des notions importantes que l’'Anatomie comparée et l’Anthropo- logie ont accumulées dans ces dernières années; ces éléments nouveaux viennent éclairer les descriptions d'anatomie pure et prêter un vif intérêt à une science qu'on pouvait accuser d’être parfois peu attrayante. C’est ainsi que nous pouvons signaler les chapitres remarquables sur lathéorie vertébrale du crâne, sur le crâne considéré au point de vue anthropologique, sur les points et sur les angles craniométriques, sur l'appareil hyoïdien. En quelques pages claires et pré- cises se trouvent accumulées des notions de la plus haute importance pour l’anatomiste et pour l’anthro- logiste. Les indices crânien, nasal, orbitaire, thoracique, sont exposés également en quelques lignes, La question de l’homologie des membres, rapide- ment discutée, fournit aussi un chapitre plein d'intérêt, Les questions de développement sont traitées avec soin, C’est dans l’ostéologie qu'elles acquièrent la plus haute importance.Le développement général du crâne, de la face, du thorax, celui de la colonne vertébrale considérée dans son ensemble, celui des os intermaxil- laires, celui des organes dérivant du cartilage de Mec- kel, fournissent des chapitres importants à des points de vue divers. Quant au développement des os en particulier, si utile au point de vue de la pathologie ou de la médecine légale, signalons l’heureuse innova- tion de planches qui accompagnent chaque description, Parmi les choses nouvelles qui se trouvent dans ce livre, nous devons mentionner les paragraphes nom- breux consacrés aux anomalies et aux variétés de chaque organe. De longues études antérieures et des publications importantes donnaient à l’auteur une com- pétence toute spéciale pour aborder ce sujet. Ces no- tions, dont le principal intérêt touche évidemment à l'anthropologie et à l'anatomie comparée, sont aussi de la plus grande utilité pour l'étudiant qui souvent se trouve arrêté dans ses dissections par une disposition anormale ; il pourra immédiatement trouver la descrip- tion de l’anomalie qu'il a sous les yeux, savoir sa fré- quence ou sa rareté et souvent connaître sa signification. Enfin, nous avons l’avantage de trouver à chaque page des indications bibliographiques dont les ouvrages antérieurs se trouvent trop dépourvus, On pourrait croire en lisant les lignes qui précèdent que l’auteur s’est laissé entraîner par l'intérêt qui s'attache aux côtés purement scientifiques ou aux côtés philosophiques de l’Anatomie et qu'il a négligé le point de vue médical et pratique. Il n'en est rien: les points nouveaux nombreux et importants qne nous avons si- gnalés tiennent en somme peu de place, grâce à la dis- position typographique qui consacre à ces diverses questions un texte en petit caractère, grâce surtout à la grande concision de style qu'a su s'imposer M. Testué, La partie d'Anatomie descriptive proprement dite, celle qui intéresse le médecin et l’étudiant, a été traitée avec le plus grand soin soit au point de vue du texte, soit au point de vue des figures qui l’accompagnent. Les planches qui sont intercalées dans l'ouvrage se font remarquer par leur nombre, par leur clarté et en outre par quelques innovations. Dans l’ostéologie, par exemple, signalons l'emploi de flèches rouges pla- cées dans les divers trajets destinés aux vaisseaux et aux nerfs; ces flèches montrent avec une netteté par- faite les orifices et les directions des canaux intra-os- seux, Signalons aussi l'emploi de teintes plates uni- formes appliquées à un os et permettant de le distin- guer d’un coup d'œil, avec ses rapports complexes, dans une planche d'ensemble, Nous trouvons égale- ment d’utiles renseignements dans la série des figures qui nous montrent les insertions musculaires dessi- nées en rouge sur le squelette, Les planches relatives à l’arthrologie nous montrent aussi l'avantage des teintes polychromes.Les ligaments sont légèrement teintés en jaune; les synoviales et les bourses séreuses, en violet, Les couleurs, discrète- ment employées, n'impriment pas aux figures une allure trop schématique et leur donnent une parfaite netteté. On peut remarquer particulièrement les figures rela- tives aux articulations de l’atlas, celles des synoviales du pied et de la main ; les planches concernant les ar- ticulations de l'épaule et du genou méritent également d’être signalées. É : Dans les figures qui ont trait à la myologie, nous pouvons mentionner spécialement celles qui se rap- portent aux aponévroses du cou, ainsi que plusieurs coupes de la fosse iliaque. Les feuillets aponévrotiques représentés par des traits rouges sont mis en lumière d'une manière frappante. Les planches qui concernent les synoviales des tendons de la main sont aussi re- marquables par leur simplicité et leur clarté, Quant aux descriptions anatomiques proprement dites, il est impossible de montrer leur valeur dans une analyse. Les qualités dominantes sont incontesta - blement la concision et la clarté. Il suffit, pour appré- cier cette dernière, de lire les pages qui se rapportent au sphénoïde, à l’éthmoïde, au temporal, os compli- qués dans leur forme et difficiles à décrire. Nous n’in- diquons pas d’autres chapitres, il nous faudrait citer tout le livre. Quant à la concision, elle n’a pas seule- ment l'avantage de supprimer l'ennui, mais celui de permettre à ce Traité de rester un livre d’amphi- théâtre. Le succès de cet ouvrage s’imposera par lui-même, Les innovations heureuses et les qualités maïtresses, que nous n'avons pu que signaler, en feront certaine- ment un classique. Nous souhaitons seulement que les deux derniers volumes suivent rapidement le pre- mier !. A. POLosson, ! Le tome IT (Angéiologie et Névrologie, in-8° de 900 pages) vient de paraitre; nous en donnerons une analyse dans l’un de nos prochains numéros. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 20 avril 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. Raffy: Sur la dé- formation des surfaces spirales, — M. G. Bigourdan : Nébuleuses nouvelles découvertes à l'observatoire de Paris (suite). 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. C. Raveau à repris l'étude analytique des relations entre les différents vecteurs qui s'introduisent dans la théorie électro-ma- gnétique de la lumière et dans les diverses théories élastiques ; il considère les diverses expressions de l’é- nergie dans un milieu homogène possédant une per- méabilité magnélique sensiblement constante dans toutes les directions, — M. Berthelot a étudié au point de vue thermo-chimique : 1° l’acide aspartique et sa fonction mixte; la saturation de la seconde basicité dé- gage bien moins de chaleur que la première ; 2° la chaleur de formation de l'acide maloaique ; 3° la for- mation comparée des tartrates isomères solubles et insolubles. — M. Engel, en décomposant l’hyposultite de soude par l'acide chlorhydrique dans des conditions déterminées de température et de concentration, a ob- tenu une variété de soufre qui est soluble dans l’eau. Reprise par le chloroforme, elle cristallise de sa solu- tion dans un type particulier. Laissée en contact avec l’eau, elle passe peu à peu au soufre mou ordinaire des hyposulfites. M. Engel pense qu'il s'agit de molécules de soufre moins condensées que dans les variétés ha- bituelles. — M. Friedela fait l'étude cristallographique de ces cristaux de souîre abandonnés par le chloro- forme; ils ont une forme rhomboédrique, ce qui les. sépare de toutes les formes cristallines du soufre an térieurement connues, — M. G. Lemoine a constaté que la diminution de pression favorise la dissociation du bromhydrate d’amylèue. — M. G. André a étudié les composés qui prennent naissance lorsque, après avoir dissous l’oxyde jaune de mercure dans une solution bouillante de sel ammoniac, on traite la dissolulion par un excès d’ammoniaque, et qu'on reprend ensuite par des quantités d’eau variables le précipité qui s'est formé, — M. Güntz a préparé le sous-chlorure et di- vers sels de sous-oxyde d’argent par double décomposi- tion, en partant du sous-fluorure d'argent qu'il avait fait connaître. — M. P. Sabatier a préparé le sulfure de bore par l’action de l’hydrogène sulfuré sec sur le bore amorphe chauffé au rouge et mesuré la chaleur dégagée dans la décomposition de ce sulfure par l’eau. — M. P. Sabatier montre que le gaz dégagé par l’action de l'acide chlorhydrique sur le borure de magnésium (hydrogène boré de Jones) est en réalité de l'hydrogène renfermant seulement une petite quantité d’hydrure de bore. — M. J. Ville, en faisant réagir au-dessus de 100° l'acide sulfanilique sur l’urée, a obtenu l’acide sul- fanilocarbamique, formé par l'union des deux corps mo- lécule à molécule, avec élimination d’une molécule d’ammoniaque. — M. G. Denigès : Nouvelles combi- naisons obtenues avec les sulfites métalliques et les amines aromatiques. — M. L. Vignon a modifié, de fa- con à la rendre applicable aux alcools dénaturés, la méthode de dosage de l’acétone par transformation en iodoforme, qu'il avait formulée pour les méthylènes dénaturés. — MM. A. et P. Buisine signalent comme pouvant être appliquée avantageusement à l’épuration des eaux d’égout la préparalion du sulfate de fer à partir de la pyrite grillée. 3° SGiENCES NATURELLES. — M. H. Fol rappelle que dès 1873 il avait signalé dans les cellules animales en voie de division, l'existence de centres d'attraction indé- pendants du noyau; il communique de nouvelles re- cherches destinées à montrer l’origine de ces corps dans l’œuf fécondé ; sur des coupes minces de l'œuf d’oursin, il a reconnu un spermocentre et un ovocentre, qui se divisent et dont les moitiés, s’unissant deux à deux, constituent les deux premiers astrocentres. — M. L. Ranvier a étudié les modifications qui se pro- duisent dans l’endothélium péritonéal du cochon d’Inde après l’injection d’une substance irritante telle qu'une solution de nitrate d'argent; l’auteur admet d’abord que les cellules normales de cet épiploon, telles qu'il a pu les observer en suivant un technique spéciale, cons- tituent un réseau protoplasmatique ininterrompu : les cellules étoilées et anastomosées qui formentce réseau reprennent, dans linflammation expérimentale, l’as- pect de cellules conjonctives, et, grimpant le long des filaments de fibrine de l’exsudat, recouvrent les places où l’endothélium a été entièrement nécrosé; M. Ran- vier pense que la guérison des plaies par réunion im- médiate, se produit de même par l'allongement des ramificalions des cellules conjonctives voisines le long des filaments de fibrine. — M. de Lacaze-Duthiers : Une excursion au Laboratoire Arago et à Rosas (Es- pagne). (Voir le N° précédent de cette Revue, page 287), — M. F. Guitel a étudié anatomiquement les terminai- sons nerveuses que l’on trouve disposées par petits groupes au voisinage des dents chez la Baudroie. (Lophius piscatorius). Ces organes, que l’auteur considère comme des organes gustatifs, sont innervés par le pneumogastrique, le facial et le trijumeau. — M. Et. Jourdan décrit dans la trompe des Glycères (Annélide) un système nerveux complexe avec un an- neau ganglionnaire à la base. — M. G. Pouchet : Sur une mélanine artificielle (V. Soc. de Biologie, 11 avril.) — M, Ch. Henry précise ses recherches sur le mini- mum de substance odorante perceptible, en détermi- nant la quantité de substance vaporisée restée dans l'appareil. — M. H. Jumelle a étudié expérimentale- mentles rapports entre l'assimilation du carbone et la respiration chez les Lichens : l’assimilation l'emporte sur la combustion, même à la lumière diffuse chez les Lichens nettement colorés en vert; chez les Lichens crustacés, colorés en gris ou en blanc, l'assimilation ne l'emporte sur l'oxydation qu'à la lumière solaire directe, — M. P. Lesage a continué ses recherches sur l'influence que le sel exerce sur la quantité d’a- midon qui s'emmagasine dans les plantes ; il a étudié à ce point de vue le Lepidium sativum et constate que les arrosages avec des solutions salées à 15 ©/,, au moins, font disparaitre entièrement lamidon. — M. Prillieux, en examinant des échantillons de seigle qui avaient occasionné des empoisonnements dans la Dordogne, a reconnu l'existence constante dans l’albu- men mème du grain d’un champignon nouveau, dont la sporulation s'accomplit suivant un mode tout par- ticulier, MM. A. Delebugne et L. Legay démontrent, par la marche des températures, l'existence d’une source abondante au fond du lac d'Annecy. — M. J. Renaud rend compte des sondages sous-marins exécutés en 4890 dans le Pas-de-Calais ; il présente une carte résumant les résultats du travail et indique les méthodes employées. — M. P. Termier, en faisant l'étude géologique du massif de la Vanoise (Savoie) à observé un grand nombre de phénomènes métamor- phiques dans les couches diverses; il considère ce mé- tamorphisme comme dépendant des plissements el étirements violents subis par ces couches, — MM. E. Louise et E. Picard ont étudié la culture du ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 313 colza au double point de vue des changements qui surviennent pendant la végétation dans la plante et dans le sol. Mémoires présentés. — M. Folie adresse une « Note sur la nutation initiale de l'axe du monde et un résumé des déterminations obtenues jusqu'ici ». — M. J. P. Metzler adresse un mémoire ayant pour titre : « La lumière, le Soleil ». — M. F. François adresse une note intitulée : Boussole cadran solaire, » Nominations : M. de Serpa Pinto est élu correspon- dant pour la section de Géographie et Navigation. Séance du 27 avril 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. À. Resal: Sur les expressions des pressions dans un corps élastique ho- mogène. — M. H. Poincaré discute une objection, re- lative à la théorie de l’élasticité, que M. Brillouin lui avait adressée en rendant compte de son ouvrage sur la Théorie mathématique de la lumière, — M. E. Hutin el M. Leblanc : Sur un moteur à courants alternatifs. — M.A. Ledieu: Sur le rendement des machines ma- rines et celui des hélices; méthode géométrique pour calculer le premier de ces rendements sans dynamo- mètre, — 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M, G. Lemoine a entrepris une série de recherches quantitatives sur l’action chi- mique de la lumière ; le réactif qu'il emploie est le mé- lange de chlorure ferrique et d'acide oxalique; ce réac- tif étant fortement coloré, l’auteur, dans un premier travail, détermine Pabsorption physique qu'ilexerce sur la lumière. — M. Ch. Blarez : Action exercée par la présence des sels haloïdes de potassium sur fa solubi- lité du sulfate neutre de potassium, — A propos d’une réclamation de priorité de M. Hesse, MM. Jungfleisch et Léger montrent que le produit appelé par M. Hesse isocinchonine ne saurait être identifié avec la cinchoni- gine obtenue par eux dans l’action de l’acide sulfu- rique sur la cinchonine; l’isocinchonine n’est qu'un mélange où la cinchonigine entre pour une petite part, MM. Etard et P. Lambert ont étudié un carbure de la série terpénique qu’ils ont isolé des huiles du gaz com- primé; c’est un pyropentylène remarquable par la facon dont il se polimérise spontanément à froid. — M.Ma- quenne a appliqué à l'étude des produits de dédouble- ment de la tréhalose la méthode qu'il a fondée sur l'emploi de la phénylhydrazine ; il démontre ainsi que la tréhalose est bien une diglucose; de plus il en a formé l’acétine, qui renferme huit molécules d’acide acétique. — M.R. Vidal, enfaisantréagir le phosphure PAZH sur les alcools a obtenu l’amine primaire de l'alcool à l’état de métaphosphate avec un peu de Pa- mine secondaire ; la réaction est générale et a lieu avec divers azotures métalloïdiques. — M. Aignan, étudiant la constitution des dissolutions aqueuses d'acide tar- trique, montre que les expériences de Biot sur le pou- voir rotataire peuvent s'expliquer en admettant soit que l'acide tartrique dissous forme avec l’eau, en pro- portions définies, un hydrate partiellement dissocié, soit que l'acide tartrique, se combinant à lui-même, double sa molécule, cette molécule doublée étant par- tiellement dissociée par la dissolution; les pressions osmotiques calculées dans l’une et l’autre hypothèse ne sont pas égales entre elles; M. Aignan, comparant la pression d’une solution d'acide tartrique à la pression de diverses solutions de sucre, a obtenu un chiffre qui concorde avec la deuxième hypothèse. — M, St. Meunier a obtenu l'hyalite à la température ordinaire en immergeant dans du silicate de soude sirupeux un vase poreux de pile rempli d'acide sulfurique de Nordhausen. — MM. Berthelot et G.André, pour éclairer le rôle des matières humiques dans la végé- falion, ont repris l’étude des composés bruns (anhy- drides condensés) qui se forment par l’action de l'acide chlorhydrique sur le sucre de canne; ils ont étudié surtout les sels de ces acides, et montré que ces sels étant insolubles et se formant à froid, les composés en question fixent énergiquement les alcalis de la terre végétale; ils fixent l’'ammoniaque comme les bases métalliques, en formant des sels ammoniacaux d’acides amidés très stables, et jouent ainsi un rôle important dans la fixation de l’azote. 3° SciENCES NATURELLES. — M. F. Houssay résume les faits observés par lui sur des embryons d’Axolotl, faits qui le portent à admettre chez l'embryon du ver- tébré une métamérie complète pour l’endoderme et les raisseaux sanguins jusqu'au delà de l'anus. — M. L. Ranvier, continuant l'étude de la péritonite expéri- mentale qu'il avait commencée dans la séance précé- dente, examine les modifications subies par les clas- matocytes; ceux-ci, sous l'influence de l’irritation, sont transformés en cellules lymphatiques qui se multi- plient. Il y a donc là une source de cellules du pus qui s'ajoute à la diapédèse ; le rôle de ces cellules du pus dans les tissus enflammés consiste d’ailleurs, d’où qu’elles proviennent, à enlever les débris des éléments mortifiés ; on lestrouve, eneffet, chargées de ces débris. — M.Ch. Contejean, isolant chez la grenouille l’'œso- phage de l'estomac par une ligature et faisant faire des digestions séparément dans ces deux parties du tube digestif, a constaté que toutes deux sécrètent de la pepsine, la première en plus grande abondance. — M. A. Cannieu, ayant observé les truites des lacs et des gaves des Pyrénées au point de vue de leur évolution sexuelle, conclut que les changements de régime sont à peu près sans influence sur les transformations con- sidérables qui s’accomplissent d’une saison à l’autre, et que l’évolution sexuelle est au contraire la cause de ces changements, Par analogie, il admet que chez le saumon on à attribué à tort au passage dans l’eau douce et à une prétendue inanition les modifications de la chair. Les truites capturées sont toujours à jeun ; on ne peut donc affirmer, parce que l’on observe le même fait chez les saumons, que ceux-ci ne se nour- rissent pas dans les fleuves. — M. O. Van der Stricht a étudié dans les reins de divers animaux la structure intime des cellules sécrétantes des canalicules uri- naires et les modifications fonctionnelles de cette structure. M. Emile Mer a constaté qu'au début de la période hivernale, il y a chez les arbres de nos forêts. une consommation active de la réserve d’ami- don ; la répartition de cette réserve dans les tissus est modifiée par cette consommation automnale, souvent il n’en reste que fort peu quand le végétal passe à l’état de vie latente; sa reconstitution s'effectue très rapidement au printemps. — M. G. Poirault résume ses observations sur divers points de l'anatomie des Ophioglossées. — M. L. Cayeux signale l'existence de Diatomées abondantes dans le tuffeau à Cyprina planata (landénien inférieur) du nord de la France et de la Belgique. — M. Ballaud expose les résultats d'une série de recherches sur l’hydratation des blés et farines, entreprises par l’Intendance militaire ; les blés de la plaine du Chéliff transportés en France aug- mentent de poids dans une proportion qui peut atteindre 10 pour 100. — M. P. Cazeneuve indique que pour le traitement des vignes phylloxérées par le sulfure de carbone, il est avantageux, dans les terrains très caillouteux ou très argileux, de mélanger cet insecticide à de la vaseline, l’évaporation trop active est retardée dans le premier cas; dans le second, la diffusion est facilitée. Mémoires présentés. — M. Daubrée présente, au nom de M. Federigo de Botella une carte hypsométrique de l'Espagne et du Portugal à l'échelle de ie. — M. Tondini présente un projet d'adaptation du système américain des vingt-quatre fuseaux horaires au mé- ridien chronologique international de Jérusalem- Nyanza. — M. G. Denigès adresse une note: « Sur les combinaisons obtenues avec le sulfite neutre de zinc et les amines aromatiques. » — M. Delaurier adresse une note ayant pour titre: « Des causes probables de la discordance de la radiation solaire trouvée à Mont- pellier et à Moscou ». Nominations et nouvelles. — M. le prince Albert de 314 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Monaco est élu Correspondant de l’Académie pour la section de Géographie et Navigation. — M. le secré- taire perpéluel donne lecture d'un extrait du testa- ment de M. Cahours par lequel cent mille francs sont légués à l’Académie ; les intérêts de cette somme doi- vent être distribués chaque année à titre d’encourage- ment à des jeunes gens qui se seront déjà fait con- naître par quelques travaux intéressants et plus particulièrement par des recherches de chimie, — M. J.Janssen fait remarquer combien un legs sous cette forme peut être profitable à la science. L. Laricoue. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 21 avril 1891, M. Crimail a pratiqué l’opération césarienne pour la seconde fois sur une femme qui a guéri; l'enfant a survécu. — Suite de la discussion sur la dépopulation de la France, entre MM. Tarnier, Marjolin et Th. Roussel. Séance du 28 avril 1891. M. Polaillon lit un rapport sur un mémoire de M. Berlioz (Grenoble) sur la microcidine, nouvel anti- septique extrêmement soluble, dérivé du naphtol. Ce produit, très peu toxique, est dix fois plus antiseptique que l'acide phénique et vingt fois plus que lacide borique. M. Polaillon en a obtenu les meilleurs résul- tats dans les pansements, lavages, injections au titre de 3 à 5 °/,,. — Suite de la discussion sur la dépopu- lation de la France, à laquelle prennent part MM. Le Roy de Méricourt, Dujardin-Beaumetz, Guéniot, Le Fort, Rochard et Th. Roussel. Séance du 6 mai 1891. M. Le Dentu présente un rein extrait à une femme alteinte de lithiase biliaire, Ce rein est rempli de cal- culs, et il présente de plus cette particularité qu'il est rempli de gaz. C’est le second fait publié de rein ren- fermant des gaz. — Suite de la discussion sur la dépo- pulation, M. le Secrétaire perpétuel donne lecture des conclusions rédigées par le Président, et l’Acadé- mie adopte une série de vœux concernant la dépopula- tion, Le vote général est renvoyé à la séance suivante. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 25 avril MM. d’Arsonval el Gaïffe présentent un galvano- mètre dans lequel le circuit est mobile et l’aimant fixe; un dispositif spécial du champ magnétique per- met d’avoir des déviations proportionnelles, — M. Hé- don à vu sur les chiens que la destruction du pancréas avait rendus azoturiques que le sucre ajouté au régime carné passe dans les urines. — M. Gley a observé le même fait. — M. Onanoff examine la facon dont réa- gissent les nerfs aux courants continus lorsque, pour rendre négligeables les variations de résistance de l'organisme, on emploie un courant très intense à tra- vers une grande résistance, — M. R. Blanchard à cherché à faire l’helmintologie des singes anthropoïdes; il a trouvé pour les cestodes trois espèces, chez le chimpanzé et l’orang-outang; toutes trois sont analo- gues à celles des herbivores, leurs œufs sont pourvus de l’appareil piriforme, — M, Abelous a étudié les ferments digestifs contenus dans les œufs des crustacés décapodes ; les extraits par l’eau ou la glycérine jouis- sent de la propriété de saccharifier l’amidon, de pep- toniser la fibrine, d’émulsionner les huiles, enfin d’in- vertir la saccharose; on ne trouve les ferments en quantité notable que dans les œufs mûrs.— M, Œchs- ner de Coninck étudiant l’action physiologique de sa ptomaine en CSH!AZ à reconnu qu’elle est paralysante à petite dose, puis convulsivante. — M, Houssay : Sur la métamérie du Vertébré, (Voir GC. R., 27 avril.) Séance du 2 mai M. d'Arsonval a recherché ce que devient l’action physiologique des courants alternatifs quand la fré- quence des renversements varie, le travail absorbé sous forme d'énergie électrique par l'organisme ou le tissu en expérience restant constant; les phénomènes d’excitation neuro-musculaire vont en croissant à me- sure que la fréquence augmente, jusqu’à 2,500 ou 3,000 vibrations par seconde et décroissent ensuite, Le nerf et le muscle deviennent tout à fait insensibles aux excitations électriques extrêmement fréquentes, comme celles que donne un vibrateur de Hertz dont la période est de moins d’un billionième de seconde. — M. d’Arsonval montre que pour l’application médi- cale des courants continus, il faut tenir compte non seulement de l'intensité du courant, mais encore de sa force électro-motrice, un courant à fort voltage dont l'intensité est réduite à quelques milliampères par une grande résistance reste très douloureuse. L’expli- cation du fait doit être cherchée dans les phénomènes électrolytiques qui ont lieu sur l’eau, les sels et les diverses substances de l’organisme. — M. Laborde présente deux grenouilles chez lesquelles une excita- tion quelconque provoque une attaque complète d'é- pilepsie ; cet état a été produit chez l’une par la piqüre des corps restiformes, chez l’autre, par l’ablation d’une partie du cerveau. — M. Morau a inoculé en série avec succès constant à des souris blanches une tumeur épithéliale développée spontanément sur un animal de cette espèce, — M. Ed. Retterer a étudié la forma- tion du vagin chez la femme; le sinus urogénital se cloisonne de haut en bas à partir du point d’abouche- ment des canaux de Müller par deux replis latéraux se rejoignant vers la ligne médiane. — M. Ch. Cornevin a constaté que les Cephalotaæus sont toxiques à la ma- nière de l’if ordinaire, mais à doses plus élevées. — M. H. de Varigny a reconnu que le camphre, loin de favoriser la germination, l’entrave et peut même l’em- pêcher complètement. — MM. Cadéac et Meunier ont fait de nouvelles expériences pour démontrer les pro- priétés épileptisantes de l'essence de fenouil. — M. Combemale ayant reconnu que l'injection de bleu de méthylène provoque toujours la formation de mét- hémoglobine dans le sang, pense que c’est à cette mélt- hémoglobine qu'il faut rapporter l’anesthésie observée après ces injections. — MM. Gilbert et Girode ont re- produit chez le cochon d’Inde la fièvre typhoïde type, avec ulcération des plaques de Peyer, par injection intra-veineuse, intra-périltonéale où même sous-cuta- née de culture du bacile d’Eberth. — M. G. Grigo- reseu signale la glycérine comme analgésique à em- ployer contre les brûlures. L. Larrcoue. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 1° mai 1891. M. Cailletet présente un appareil destiné à produire dans une enceinte de dimensions notables une très basse température et permettant de la maintenir aussi longtemps qu'on le veut. L'appareil qui a recu le nom de cryogène, se compose d’un vase métallique à double paroi, d'environ trois litres de capacité, et dont l’espace annulaire forme une chambre fermée, munie seule- ment de deux orifices, L'un permet d'établir la com- munication avec l'extérieur, l’autre est relié à un long serpentin enroulé à l’intérieur du vase. Le serpentin communique avec un réservoir d'acide carbonique li- quide, Lorsqu'on ouvre le robinet, l'acide carbonique se détend successivement dans le serpentin, puis dans la boîte annulaire avant de s'échapper au dehors et produit un abaissement de température considérable, Un dispositif simple et ingénieux permet de faire dis- paraître rapidement les bouchons de neige carbonique qui obstruent fréquemment les tubes. Si l’on remplit d'alcool le vase métallique, on parvient au bout d’un ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 315 quart d'heure à amener ce liquide à une température de— 75°,— M.Pellat expose le résultat des délicates re- cherches qu'il poursuit depuis quatre années sur la dé- termination du rapport v de Maxwell entre lunité électromagnétique et l’unité électrostatique d’électri- cité, Ce rapport étant le même que celui des nombres qui expriment une même différence de potentiel dans les deux systèmes d'unités, c'est ce dernier que l’au- teur a mesuré. La différence de potentiel choisie est celle que présentent les deux extrémités d’une grande résistance, constituée par un ou deux mégohms et par- courue par le courant d’une pile de plusieurs centaines de petits éléments, La mesure en unités électrosta- tiques estfaite avec l'électromètre absolu de Sir W, Thom- son. Pendant les mesures, on assure la constance du courant de la pile en opposant cette différence de po- tentiel (ou plutôt, pour des raisons de sensibilité, une fraction comme le dixième ou le vingtième) à celle d'une pile de treize éléments Latimer Clark, eton com- pense à chaque instant en ajoutant ou retranchant une fraction d’élement de la pile principale. D'autre part la mesure en unités électromagnétiques de la force électromotrice de compensation fournit le second terme du rapport cherché. Pour cela on compare les différents Latimer Clark à l’un d’eux pris pour étalon, dont on détermine à nouveau, de temps en temps, la force électromotrice en valeur absolue. Cette mesure se fait en opposant l'élément à la différence de poten- tiel produite aux deux extrémités d’une résistance connue # (résistance en fil nu comparée aux étalons mercuriels de M. Benoît) par le passage d’un courant maintenu constant et dont l'intensité électromagné- tique test mesurée en valeur absolue au moyen de Pélectrodynamomètre absolu eréé il y a quelques années par M. Pellat, et étudié par lui en vue des expé- riences actuelles avec une remarquable précision, La force électromotrice e est alors égale à à, d'après la loi de Ohm. L'auteur décrit les difficultés considérables que présente l'emploi précis de l’électromètre ab- solu de Sir W. Thomson et fait connaître les moyens qu'il a dù imaginer pour y remédier, Deux séries de mesures très nombreuses ont fourni des résultats remarquablement concordants; le nombre trouvé 300,9 X 105 ne diffère que de 5 du nombre donné par M. Cornu pour la vitesse de la lumière. — M. Berget décrit l’appareil de M. Rhon pour le tracé graphique des courbes de Lissajous. Le principe géométrique est simple, la réalisation mécanique, ingénieuse, Deux couples de petites circonférences sont tangentes exté- rieurement à une même circonférence de plus grand rayon, aux extrémités de deux diamètres perpendicu- laires. Les deux circonférences de chaque couple ont le même ravon et sont sur le même diamètre de la grande. Dans ces conditions, si dans chaque paire de circonférences on mène deux rayons parallèles et si l’on en joint les extrémités par une ligne droite,-les deux droites ainsi obtenues sont perpendiculaires et le lieu de leur point d’intersection est une courbe de Lis- sajous. Le genre et la phase de la courbe varient avec la valeur et la position respectives des rayons des deux couples de circonférences. Edgard Haunié, SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 6 mai 1891, M. Pinguet donne quelques détails sur le procédé de fabrication de l'oxygène par la méthode de Boussin- gault ; telle qu’elle est appliquée à Pusine de M. Brin; il indique les principales applications de l’oxygène ainsi obtenu, — M. Maumené indique à ce propos l'emploi de l'oxygène sous pression, où même à la pression ordinaire pour la conservation des vins, — M. Garrigou a fait l'analyse de diverses eaux miné- rales, en opérant sur d'énormes quantités, et en pre- nant des précautions particulières, pour recueillir ses prises d'essai, dont le volume est de plusieurs mètres eubes. Le résidu laissé par l’évaporation, pèse alors plusieurs kilogrammes. L’examen de ce résidu a per- mis à l’auteur de reconnaitre la présence d'éléments métalliques qui n'y avaient pas encore été signalés; et, en particulier, il dit avoir trouvé du mercure dans les eaux d’Aulus et de Saint-Nectaire. — M, Gautier présente un travail de M. Hugounenceq sur l’action que diverses substances chimiques exercent sur la fonction de la pepsine et a remarqué que beaucoup de substances entravent la peptonisation;en particulier, la fuchsine, à la dose de quelques milligrammes, l’arrète complètement, Séance du 8 mai 1891. M. Tissier a obtenu l'aldéhyde triméthyléthylique (GH3) — C— CHO fondant à + 3°, bouillant de 74° à 75° dans la réduction par l’amalgame de sodium, d’un mé- lange d'acide tryméthylacétique et du chlorure corres- pondant, procédé qui lui a déjà fourni l'alcool trimé- thyléthylique (CH) = C — CH°OH. IL à mesuré la vi- tesse d’éthérification de cet alcool, et constaté que son oxydalion ramène à l'acide triméthylacétique. — M. Tissier a identifié l'alcool qui a été obtenu par l’action de l'acide nitreux sur la {riméthyléthylamine avec le diméthyléthylcarbinol : (CH3}? — COH C?H5 — M. Hanriot rappelle qu'il a obtenu par l’action de lhydroxylamine sur le nitrile popionyl-propionique un composé auquel il donne la formule d’un amido-iso- æazol; il a pu faire un certain nombre de réactions qui ‘confirment sa première manière de voir. Il décrit quel- ques composés nouveaux et en particulier le produit d’oxydation (C6HSAz20)?0 qui est un oxyazoïque que l'hydrogénation transforme en hydrazoïque. — M. De- nigès décrit un certain nombre de combinaisons qu'il a obtenues en faisant agir les sulfites métalliques sur les amines aromatiques primaires; il en a étudié la constitution et propose des formules développées qui permettent de les rapporter toutes au même type. La formation du sel double de sulfite de zinc et d’aniline est une réaction remarquablement sensible de cette base, — M. Linebarger a obtenu le benzylanthracène, le benzythydroæanthranol et son éther diacétique ; ce sont des corps solides bien cristallisés, — M. Friedel a cherché s'il était possible d'établir une relation entre la symétrie cristalline et celle de la formule chimique des composés du carbone. Dans un très grand nombre de cas, la symétrie cristalline est la même que celle de la formule ou d’un ordre supérieur,ce qui s'explique facilement. Mais il y a quelques cas où la symétrie de la formule est supérieure à celle des cristaux. M. Frie- del, d'accord en cela avec M. Le Bel,pense qu'on pour- rait expliquer ce fait en admettant que la molécule cristallogénique est différente de la molécule chimique et plus complexe; sa formation, au moyen de cette dernière, peut mettre en jeu les valences supplémen- taires, dont nous ignorons complètement la distribu- tion, mais qui ne permettraient plus de considérer les éléments différents du carbone comme de simples points. A. COoMBEs. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 6 mai 1891. M. Félix Lucas étend aux fonctions quelconques d’une variable imaginaire certaines propriétés qu'il a déjà obtenues pour les polynômes, et fait connaître leur interprétation physique au moyen de la théorie de l'électricité ou de celle du magnétisme. Accessoire- ment, il signale une formule développant la valeur du nombre x en une série très rapidement convergente. — M. Lucien Lévy montre que, seuls de toutes les sur- faces, le plan et la sphère sont susceptibles d’engen- 316 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES drer des systèmes triplement orthogonaux par un déplacement dépendant d’un paramètre arbitraire. — M. d’Ocagne présente, de la part de M. R. Guimaraes, une note sur une équerre cycloïdale propre à opérer la rectification des arcs de cercle et, par suite, la divi- sion des angles. — M. Raffy présente, de la part de M. Appell. une note sur les courbes brachistochrones. Ce savant géomètre montre comment la notion de ces courbes peut être la source de propriétés géométriques nouvelles, lorsqu'on substitue à la considération des arcs celle des temps employés à les parcourir. — M. Raffy indique de nouveaux cas d’intégrabilité de l'équation différentielle du premier ordre qui donne la dérivée en fonction linéaire et homogène du cube el du carré de la fonction. Maurice d'OcaGxe. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 27 avril 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Mallock présente une note sur l'instabilité des tubes et des ballons de caoutchouc, distendus par un fluide. Quand un tube de caoutchouc subit la pression interne d’un fluide, il conserve sa forme cylindrique jusqu'au moment où son diamètre atteint des dimensions qui sont en un rapport déterminé avec son diamètre primitif; mais si une nouvelle quantité de fluide pénètre dans le tube, la condition du. tube devient instable, et la pression interne diminue. Aussi arrive- t-il que lorsqu'on fait pénétrer dans un tube d’une lon- gueur donnée, une plus grande quande quantité de fluide que celle qui suffit à le dilater jusqu'à sa limite de stabilité, il ne conserve pas dans toute sa longueur sa forme régulièrement cylindrique, mais il prend celle d’un cylindre, présentant une ou plusieurs proémi- nences. Dansle cas d’une sphère creuse élastique, la forme sphérique persiste, quelle que soit la quantité de liquide qu'on y introduise. Mais il y a dans les deux cas une limite à la pression que l’élasticité des parois produit à l’intérieur. Si l'épaisseur des parois du tube ou de la sphère est petite,par rapport au rayon dutube ou de la sphère, et si, d'autre part, la substance dont ces parois sont faites, peut être considérée comme incompressible, comme les autres constantes d’élas- ticité restent invariables pour des dilatations comme celles qui se produisent, la valeur du rayon au moment où l'instabilité commence, peut étreaisément calculée ; ces conditions sont approximativement réalisées dans le cas du caoutchouc, et M, Mallock a trouvé que pour un cylindre la valeur du rayon au point critique est de 18,15 v,, v,,est la valeur du rayon du tube non dilaté. Le tube a alors à peu près 1,58 fois sa longueur primitive ; pour la sphère la valeur du rayon au point critique est d'environ 1,73 v, ; quelques expé- riences ont été faites avec des ballons et des tuyaux de caoutchouc, les résultats obtenus concordent approxi- mativement avec la théorie, 20 SCIENCES NATURELLES — Sir Henry Roscæ et M. Joseph Lunt font une communication sur la bacté- riologie chimique des eaux d’égout. Ils ont cherché à déterminer à quelles espèces appartiennent les micro- organismes qu'on y rencontre ef à mettre en lumière quelques-uns de leurs caractères chimiques. Le pou- voir d'absorption pour l'oxygène libre a été déterminé pour tous les organismes décrits ; on a indiqué quels sont ceux d’entre eux qui ont besoin d'oxygène libre pour vivre et se développer. Les auteurs ont examiné la capacité de développement de chacun de ces orga- nismes dans un milieu liquide, privé de toutes traces d'oxygène libre. Ils ont montré que les organismes rigoureusement anaérobies, bien que capables de se développer dans un milieu totalement privé d'oxygène, absorbent rapidement ce gaz quand ils sont mis en contact avec lui, et préparent ainsi leur développement anaérobie. Ils ont aussi montré que certains orga- nismes anaérobies qui liquéfient la gélatine avec une extrême rapidité, lorsqu'ils se développent dans l'air, ne peuvent la liquéfier dans un milieu privé d'oxygène. Les organismes aérobies et anaérobies subissent une notable diminution de leur pouvoir de liquéfaction, lorsqu'ils ont été soumis à plusieurs cultures succes- sives sur la gélatine. Les auteurs ont soigneusement photographié les aspects microscopiques et macros- copiques de ces organismes et de leurs cultures pures. Ils ont décrit d'une manière détaillée les procédés qu'ils ont employés pour cela. Séance du 30 avril 1891. 1° Sciences puysiques, — Le lieutenant général R. Strachey et M. G. M.Whipplé exposent les résul- tats des recherches qui ont été faites sur les nuages par la méthode photographique à l'Observatoire de Kew sous la direction du conseil météorologique, Ces recherches avaient pour but de déterminer la vitesse des nuages aux diverses hauteurs et les hauteurs maxima qu'ils peuvent atteindre, (On sait qu'ils affec- tent alors la forme de cirrus), Dans l’une des méthodes employées on se sert de deux appareils photographi- ques munis de théodolites et de cercles pour mesurer les azimuths et les hauteurs. Les deux appareils sont placés sur des piédestaux situés aux deux extrémités d’une base longue de 73150; les châssis qui portent les plaques sensibilisées sont munis de glaces sur lesquelles on a tracé des lignes se coupant en croix in- diquant la direction des axes optiques. Une communi- cation électrique était établie entre les observateurs placés aux deux extrémités de la base, Pour détermi- ner la hauteur d’un nuage et sa vitesse, un des obser- vateurs dirigeait son objectif sur le nuage et notait l'a- zimuth et la hauteur; il prévenait alors l’autre obser- valeur pour qu'il dirigeàt son objectif vers un point situé dans le même azimuth à la même hauteur; quand cela était fait, il exposait simultanément les deux pla- ques à la lumière au moyen d’un appareil électrique adapté aux obturateurs des deux objectifs, Les chässis étaient alors rapidement enlevés et remplacés par d’autres, de manière à pouvoir obtenir une seconde épreuve du même nuage 16 ou 17 secondes après la première, Les deux observateurs notaient soigneuse- ment les temps. La mesure des photographies ainsi obtenues, permettait de déterminer la hauteur d'un point du nuage par une formule trigonométrique ordi- naire, La direction et la vitesse du mouvement étaient déterminées par la comparaison des premières photo- graphies avec les secondes. Après de nombreux essais on s’apercut que les angles étaient souvent si petits, que les résultats obtenus méritaient peu de confiance ; aussi décida-t-on en 1890 d’avoir recours à une autre méthode, On place les appareils photographiques de manière à ce que les axes optiques soient dirigés vers le zénith et l’on photographie les nuages qui traver- sent le champ visuel, On peut montrer que si on su- perpose deux photographies faites en même temps aux deux extrémités de la base de telle sorte que les con- tours des nuages coïncident, la ligne qui joint les in- tersections des lignes (cross-lines) tracées sur la glace, qui ont été photographiées avec le nuage, reproduit en grandeur et en direction la ligne qui joint les zé- niths des deux extrémités de la base, c’est-à-dire, la base elle-même, Si donc on fait coincider les lignes qui se coupent en croix, la distance de deux points sur les photographies sera la mesure de la parallaxe ou angle sous-tendu par la base en ces points. De même si l’on superpose deux photographies prises du même point à un certain intervalle de temps de telle sorte que les contours des nuages concordent, la ligne qui joint les intersections des lignes en croix représentera en grandeur et en direction le mouvement du nuage, dont la vitesse peut être aisément calculée. Cinq ou six points ont été choisis dans chaque photographie et les mesures nécessaires ont été faites. Les résultats obtenus par cette méthode montrent que les points observés dans les nuages avaient des hauteurs variant de 1,29 à 8,39 milles et que les vitesses variaient de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 5,30 à 64,61 milles à l'heure, Ces valeurs ne sont pas données comme très exactes, car en raison de la na- ture de la surface des nuages il y a place pour une ér- reur probable considérable, Ces recherches ont néan- moins une fort grande importance et leurs résultats ultérieurs doivent être attendus avec grand intérêt, — M. J. Andreews présente une troisième note sur l’état passif du fer et de l'acier, Il a fait des expériences sur la passivité relative que contractent dans lacide nitri- que froid le fer forgé et les divers aciers (acier fondu doux, acier fondu trempé, acier Bessemer doux, acier Bessemer trempé, acier Siemens doux, acier Siemens trempé). D'une manière générale, ces expériences montrent que le fer forgé est électropositif par rapport aux aciers et qu'il peut se développer entre eux une force électro-motrice considérable qui peut se monter en certains cas jusqu’à 1/10 ou 1/7 de volt; le fer forgé est donc beaucoup moins passif que l'acier. Ces expériences ont également établi que les aciers qui contiennent une proportion plus élevée de carbone sont plus passifs que ceux qui en contiennent une moindre proportion. 2° SGIENCES NATURELLES, — M. A.-B. Maccallum fait une communication sur une méthode micro-chimique pour déceler la présence du fer dans la chromatine. Il emploie comme réactif du sulfure d'ammonium; il a retrouvé le fer dans la chromatine des noyaux d’un très grand nombre d'espèces de cellules durcies dans alcool. Il semble probable, d'après ses observations, que la chromatine de toutes les cellules comprend du fer parmi ses éléments constitutifs. Richard À. GREGORY. SOCIETE DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 17 avril 1891. M. $. P. Thompson fait une communication sur « une propriété des shunts magnétiques ». Il cite plu- sieurs exemples où le shunt magnétique est employé, et en particulier, le relai de d’Arlaincourt !. ne B Fig. 1. (Voy. fig. 1). La languette polarisée T peut osciller entre deux pièces a et b, implantées perpendiculaire- ment sur les deux branches d'un électro-aimant A Y B; et elle à ainsi une action plus rapide que dans la disposition ordinaire des relais. Cela tient à ce qu'au moment où l’on excite l’électro-aimant en y lançant le courant, la plus grande partie des lignes de force magnétiques passent par la culasse Y ; un petit nombre seulement sautent de « en b, et la languette vient s'appuyer sur le contact P. Quand on supprime le courant, le magnétisme disparait beaucoup plus vite en À et B que dans la culasse Y : et par suite la direction du champ entre a et b est renversée et la languette vient appuyer contre le ressort Q. Répondant à une question de M. Blakesley, M. Thompson explique qu’en réunissant par une autre culasse en fer les pôles A et B, on neutralise l’effet qu'on cherche à 1 Journal of the Sociely of Telegraph Engineers and Elec- lricians, t. rve. 317 obtenir, Le Président rappelle que dans l'Inde, on se sert de bobines d’induction pour shunter les relais ordinaires, afin d’avoir une action plus rapide, et éviter dans les signaux, la confusion qui résulterait de la capacité électrostatique des longues lignes. — « Sur une machine à influence à courants alternatifs » par M.James Wimshurst. Cette machine consiste en un disque de verre verni, avec ou sans secteurs métalli- ques, tournant autour d’un axe à l’intérieur d’un cadre de bois carré établi dans le plan du disque. Le cadre porte quatre plateaux de verre carrés, échancrés à l’un des coins de manière à laisser passer l’axe du disque. Ils sont placés aux quatre coins du cadre, alternativement de part et d'autre du disque de verre, qui tourne entre eux. Il y a ainsi deux plateaux d’un côté du disque aux extrémités opposées d’une diago- nale du cadre et deux de l’autre eûté, aux bouts de l’autre diagonale. Des secteurs en feuilles d’étain fixés sur le côté extérieur de ces plateaux agissent comme inducteurs, et des balais de fils métalliques reliés avec ces secteurs viennent toucher le disque à 90° environ en arrière du centre de l’inducteur correspondant, La machine donne des étincelles, mais ne charge pas une bouteille de Leyde, ce qui prouve qu’elle donne alter- nativement de l'électricité positive et négative, comme il est facile de s’en convaincre d’ailleurs au moyen de l’électroscope. En éloignant deux des inducteurs et placant une baguette isolante portant les balais collec- teurs à ses extrémités suivant un diamètre du disque, on a une machine donnant toujours de l'électricité de même nom.M. $. P. Thompson félicite l’auteur de la très intéressante machine qu'il présente à la Société, et qui est bien faite pour déconcerter au premier abord. Il demande si la machine marche quand on change le sens de la rotation, et si tous les quatre inducteurs sont électrisés de même nom au même moment. M. Wimshurst répond que la machine ne pourrait marcher en changeant le sens de la rotalion, à moins de changer aussi la direction des branches qui portent les balais; mais elle marcherait comme machine à courant continu en supprimant deux inducteurs, — M S.P. Thompson. Sur 1e prismes à reflexion totale pour lanternes de projection, et sur une nouvelle forme de prisme à reflexion totale, due à M. Ahrens. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 2 avril 1891. M. J. T. Hewitt. Citracon-fluorescéine. L'auteur a obtenu la fluorescéine correspondant à l’anhydride ci- traconique, en faisant agir sur ce corps la résorcine en présence de l’acide sulfurique. — M, C. T. Spragu. Thio-acétylacétate d'éthyle. Les expériences de M. Sprague tendent à confirmer la formule adoptée par Bucka S (CH.C2H#0.C02.C2H5)?, — M. Henry Armstrong. La fonction du chlore dans les acides chlorés et en particulier dans le chlorure de sulfuryle. — MM, Cross et Bevan. Action de l'acide nitrique sur les ligno-celluloses. 1891. M.H. Gordon. Etude sur la formation des dérivés substitués. Armstrong a montré que le parabromodi- orthonitrophénol chauffé avec du brôme se ‘changeait en orthobromo-orthoparadinitrophénol, L'auteur étu- die un certain nombre de cas analogues, — M. Al- fred Chapman. Combinaisons de la dextrose avec les oxydes de nickel, de chrome et de fer. L'auteur a ob- tenu les composés suivants. C6(H1206, 2Ni0 + 3H20, CSH1206, Cz°05 + 4H20, 2C6H 1205, 3Fe203 + 3 H20. — M. G. Harrow. Méthode rapide de dosage des nitrates dans Peau potable. Méthode colorimétrique. — M. Francis Japp. Le Gravivolumétre, Notre préliminaire sur un appareil au moyen duquel on déduit directe- ment le poids d’un gaz de l'observation de son volume, — MM. Caïn et Cohen. Action de l'acide ucétique sur la phénylthiocarbimide, — M. Hughes. Action du chlorure d'aluminium sur les chlorwres d'acides aromatiques, Séance du 16 avril , 318 ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 24 avril 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. D. Bierens de Haan présente sa « Bibliographie de l'histoire des sciences mathématiques aux Pays-Bas » (Bibliotheca mathema- tica de M. G. Enestrôm, Nouvelle série, t, V, p. 13-23). 90 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. D. Van der Waals s'occupe de nouveau de ia formule de la dissociation électrolytique des dissolutions des sels (voir la Revue du 30 avril 1891, page 281). Il remarque que la déter- mination expérimentale du paramètre mène à des résultats qui ne s'accordent pas avec ceux de la for- mule, si l’on joint à elle la relation P=C(x— y} — b) de M. Ostwald, A l’aide de la différentiation par rap- port à y de la forme Y pour le mélange de 1—x molé- cules d’eau, de x—y molécules de sels et dey molé- cules de chacun des deux ions composants, il trouve 1 d à EEE — = Ve = PC CRE CNE MRT 2 qui fait retomber sur la formule de M. Ostwald, si l'on da s : ; — — 0. Dans cette équation E,, E,, E,, repré- sentent les énergies à distance infinie des molécules de sel et des molécules des deux ions. Si a,, représente le coefficient d'attraction des matières m; et mx l’une sur l’autre, l'expression a prend la forme symbolique : suppose (a (A) + æ(—y)+(a + , où le produit &; ax est à remplacer par 4,., Ainsi une première approximation donne da 5 Fri (&s + Gay — Gi3) et beaucoup de considérations s'opposent à ce que la somme entre parenthèse soit nulle : d’abord les résul- tats de M. Arrhénius par rapport à la quantité de cha- leur qui se dégage ou qui est absorbée, ensuite la re- marque que l'annulation fait disparaitre tout à fait l’in- fluence spécifique dela matière dissolvante, enfin les phénomènes de la conductibilité, etc. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. B. J. Stokvis présente la thèse du Dr J. Sasse : « Sur des crànes de Zélande » (over Zeemdsche schedels). SCHOUTE, Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN (Depuis la dernière séance, dont la Revue « rendu compte 1, l'Académie n'a recu que des présentations de mémoires et de livres divers.) Séance du 12 mars 1891. SCIENCES PHYSIQUES. —— M. Landolt présente un travail de M. Hans Jahn sur la rotation électromagnétique du plan de polarisation dans des liquides et surtout dans des solutions salines. Après avoir prouvé. par des expériences préliminaires que la rotation spécifique des liquides ne change pas notablement quand on dis- sout ces derniers et qu’elle est la même indépendam- ment de la composition chimique du dissolvant, M. Jahn a déterminé la rotation moléculaire c’est-à- dire le produit de la rotation spécifique par le poids moléculaire des différents sels dissous. La rotation L 1 Voyez à ce sujet t. I, p. 794. ACADÉMIES ET SOCIËÈTÉS SAVANTES moléculaire de l’eau est prise pour unité. Les résultats sont : Acide chloTyArIque.... re 26e- cheb: k.67 Chiorureide that "CORTE EREE 4.61 — SRI. 20 done ce ce 5.36 — DORMSSIUME = -Pee CEE 5.66 — Calme FE CE 9.39 —2%< 4.695 — SÉDODRE Eee 9.71 —2X 4.855 = D'ANNÉE E eee ut 10.094=2%X 5.047 — CAMION EEE Se eee 11.78 —2X 5-89 = MADPATOSC besace e 9.04 —2X 4.52 Sullate sde dltMune.. eee -ense ae 2.27 — SOUUNT..- eee 3.5! — DOPASSTME EEE ec 3.01 — HAVUENS-- er mre-erere 1.85 — CARRUUML- -e-reeecmecete 5-47 — MAN BADÉSO. eee 2.28 Bromure de sodium.<.--...-.......... 9.19 — POASSIUMER cree 9.36 — CAÏBIHL se em ere 17.605 — SÉTONTUM-- ee 18.163 — HER HadDoaad ego ce con 18.54 = — CAÏMIUM.5 eeepc eee 1970 Toduretde Sodium... ee -m-cre-. 18.46 — DOTASS MERE 2e CRCELE 18.95 — CAdMIUN re rare 40.89 =2X20.445 NItPAte TE ISCIUMEN-ee ee errreeer 1.37 — POSSSIUR 5-6 Ee CE 1.35 Garbonate desodium.--.-2. 7.7". 3.93 — DOTASSMERS ETES 3.09 Ces nombres prouvent que les rotations rapportées à des quantités équivalentes ne diffèrent pas trop entre elles aussi longtemps que les sels contiennent le même élément ou le même groupe électre-négatif, Les bromures ont à peu près la rotation double, les iodures, la rotation quadruple de celle des chlorures. En outre ces résultats font ressortir que la rotation électromagnétique est une des qualités additives des sels, puisque la différence entre la rotation des sels contenant les mêmes métaux, mais des éléments ou des groupes électro-négatifs différents, reste la même quelle que soitlanature des métaux.Entre les composés organiques et inorganiques il y a la différence fonda- mentale que les dites différences des rotations sont pour les premiers beaucoup plus petites que pour les derniers.La différence par exemple entre les bromures et les iodures est pour les composés organiques à peu près la moitié de celle qu'on trouve pour les composés inorganiques., Pour la différence entre les nitrates et les chlorures on trouve même pour les sels le quadru- ple de celle que Perkin et Jahn ont trouvée pour les composés organiques. M. Ostwald a voulu expliquer cette différence par la dissociation électrolytique que subissent les sels dissous. Mais cette manière de voir n'expliquerait que la différence double tandis que la différence quadruple pour les chlorures et les nitrates resterait incompréhensible. Du reste l’état de dissocia- tion électrolytique ne parait pas trop influer sur la rotation électromagnétique, puisque M. Jahn a trouvé que le chlorure, le bromure, l'iodure de cadmium et le chlorure de strontium ont la même rotation électro- magnétique que ces sels soient dissous dans l’eau ou dans lalcool absolu. Puisque les solutions alcooli- ques ont une conductibilité moindre que les dissolu- tions aqueuses et que Rault a prouvé en outre pour une série de sels dissous dans l'alcool que la dé- pression de la tension des vapeurs est normale, ces sels ne peuvent être dissociés qu'en quantités res- treintes, L'identité des rotations électromagnétiques prouve donc que la dissociation électrolytique est sans influence et que la théorie d’Ostwald pour l’expli- cation des différences entre les sels et les composés organiques est insoutenable, Enfin M. Jahn s’est occupé de la formule d’Airy qui donne la rotation électroma- gnétique comme fonction de la longueur d'onde de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 319 la lumière employée et du pouvoir réfracteur des li- quides. D’après cette formule la rotation est 4rn? x dn v} d C Fe >) si n donne le coefficient de réfraction, v la vitesse de la lumière dans le vide, z la longueur d’onde de la lu- mière employée et »m un coefficient dépendant de la nature chimique du liquide et proportionnel à la composante de la force magnétique parallèle à la direction du rayon lumineux. D’après M. Jahn, ce fac- teur m» est approximativement égal au magnétisme spé- cilique des composés de la série aliphatique. Pour la beunzine et le sulfure de carbone la quantité m est ap- proximativement le double du magnétisme spécifique. Séance du 2 avril 1891, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Kronecker présente un travail sur la relation de Legendre. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. Schulze présente un manuscrit de M. Maas sur les Méduses Craspédotes de l'expédition du Planton. Séance du 9 avril 1891. M. Kronecker. Suite de la lecture « sur la relation de Legendre ». Dr Hans JAH. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE BERLIN Séance du 10 avril 1891. M. Dziobeck discute la possibilité de déterminer par l'expérience les quotients différentiels de second ordre du potentiel de la gravitation pris d’après les coordonnées d’un point se trouvant sur ou au-dessus de la surface terrestre. Si l’on ajoute au potentiel de la gravitation des membres qui sont du deuxième degré relativement aux coordonnées il faut ajouter six constantes dont une seulement est déterminée jusqu’à présent par les expériences de M. Thiessen. La déter- mination des autres se réduit au développement de quatre différences. M. Dziobeck croit qu'il serait pos- sible de déterminer ces constantes à l’aide de la balance de Cavendish. — M. Kœnig énonce des doutes sur la possibilité de l’exécution des expériences pro- posées, vu les perturbations difficiles à éliminer que causerait la présence des masses voisines, — M. H. W. Vogel présente une photographie du spectre so- laire exécutée par M. Lippmann et y ajoute la remarque que M. W. Zenker a déjà prouvé depuis longtemps la possibilité de la chromophotographie. Il croit que l'avantage essentiel du procédé de M. Lippmann est l'usage du bromure d'argent pur au lieu du chlorure d'argent bruni par la lumière que ses prédécesseurs ont employé. Le premier sel se dissout intégralement dans l’amoniac et l’hyposulfite de soude, tandis que le second laisse un résidu d’argenten poudre fine qui détruit les couches avec le temps. — M. H. W. Vogel discute ensuite les méthodes photométriques basées sur la photographie. Les plaques sensibilisées réagis- sent sur un plus grand nombre de rayons que le gaz fulminant au chlore et le papier photographique. Ce n’est que pour les rayons verts qu'on ne possède pas encore un moyen d'absorption. M. Vogel propose de faire passer les rayons lumineux par des couches de papier diaphane et de déterminer l’épaisseur des cou- ches au travers desquelles les rayons donnent exacte- ment encore un effet chimique. Ù = Séance du 24 avril 1891. M. Wien présente une recherche de M. Descoudre sur un changement apparent de la résistance du mer- cure dans un champ magnétique. Si un conducteur parcouru par un courant se trouve dans un champ magnétique, les rotations des molécules peuvent sur- venir dans tous les endroits ou la force magnétique ne coïncide pas avec les lignes de force des courants, Ces | rotations doivent causer des changements de résis- tance qu'on peut rendre visible en se servant, comme conducteur, de mercure, enfermé dans des tubes qu’on arrange comme les conducteurs d’un pont de Wheats- tone. M. Wien fait ressortir l’analogie de ce phénomène avec celui qu'ont observé MM. Drude et Nernst pour le phénomène de Hall dans du bismuth liquide. — M. Raoul Pictet donne une description de son laho- ratoire installé à Berlin pour des expériences à de très basses températures, On condense un mélange d'acide carbonique et d'acide sulfureux qui donne, par sa dilatation dans le vide, un froid de 80 à 83°. Le mélange se trouve dans un tube de dix centimètres de diamètre qui est enveloppé d'un autre tube long de 3 mètres et d'un diamètre de 18 centimètres. Le dernier tube contient les substances qu’on veut exposer au froid, Le tout est enveloppé de coton. Pour obtenir des températures plus basses encore, on se sert du protoxyde d'azote tout à fait sec qu'on refroidit d’abord à 60 degrés et qu'on liquéfie ensuite par une pression de 12 à 1% atmosphères. Ce liquide donne par son évaporation dans le vide une température de — 130», Pour préparer de l'air atmosphérique liquide en plus grandes quantités, on le comprime après une dessicca- tion complète par une pression de 200 atmosphères dans un tube refroidi à 1309. La température s'abaisse à — 200°, et en ouvrant le tube l’air sort sous forme dejet bleuâtre. A l’aide deses appareils M. Pictet a préparé sur la proposition de M. Liebreich du chloro- forme tout à fait pur par des cristallisations fractionnées à — 100°. Le mercure refroidi lentement est obtenu en beaux cristaux. Séance du 8 1891. M. Bôrnstein présente un appareil de MM. Elster et Geitel qui sert à démontrer linfluence de la lumière sur des charges électriques. L'appareil se compose d’une boule en verre évacuée et munie de deux élec- trodes en platine dont l’une est couverte de sodium métallique fondu. Si l’on joint l’électrode qui se trouve au-dessous du métal fondu au pôle négatif, l’autre au pôle positif d’une pile de Zamboni et à un électroscope à feuilles d'aluminium, les deux feuilles s’écartent l'une de l’autre mais retombent immédiate- ment dès qu'on fait tomber sur le métal fondu un rayon de lumière intense comme la lumière électrique ou la lumière de magnésium. mai D' Hans Jan. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 23 avril 1891 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Emil Waelsch, de Prague : Sur une représentation géométrique des formes linéaires. — M. J. Popp, de Deutsche-Giess- hübl (Bohême) : Solution complète du problème ima- ginaire, — M. W. Wirtinger :Sur les fonctions qui sa- tisfont à certaines équations fonctionnelles, — M. Friedrich Bidschof communique un travail de M. W. R. Brooks sur la détermination de la trajectoire de la comète 1890 II, par lui découverte à Genève le 19 rnars 1890, et observée depuis plus d’un an : lau- teur donne six éléments de son orbite. 90 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Gustav Jager: Sur la loi de la tension superficielle des dissolutions. —M.Puluj, de Prague : Sur les forces électromotrices périodique- ment variables, qui agissent dans un conducteur ayant une selfinduction, dans une seule direction. Il étudie par le calcul les lois du courant électrique dans un conduc- teur qui à une sulfinduction, quand la force élec- tromotrice extérieure est une fonction du temps de la forme du carré d’un sinus, et qu’elle n’envoie des im- pulsions que dans une direction unique. Le résultat est que la force électromotrice variant entre zéro et un certain maximum, l'intensité du courant momentané induit est toujours différente de zéro et oscille entre un minimum et un maximum. L'intensité moyenne est 320 indépendante de la selfinduction du conducteur, L’au- teur donne les expressions du carré moyen de l’inten- sité et du trävail dépensé dans le circuit, Des formules on peut déduire que ces quantités dépendent de la variation de la phase et satisfont à la loi de la superpo- sition des actions de deux forces électromotrices com- posantes. Pour conclure, il fait ressortir l’analogie entre ce problème et celui du mouvement d’une roue pesante sous l'action d’une série d’impulsions mécaniques successives. — M. Stéfan : Sur la détermination de la vitesse de l'électricité, de Wheatstone. Dans un mé- moire « sur le mouvement de l'électricité dans les fils » Kirchhoff a montré, en 1857, que l'électricité se pro- popage par ondes dans les fils minces, sous certaines conditions, et avec une vitesse qui est précisément égale à celle de la lumière. Les calculs de Kirchhoff ne s'appliquent qu'à des fils rectilignes. Si l’on applique les mêmes méthodes au cas d’un fil enroulé en spirale, en faisant des zigzags, on trouve que l'électricité se propage dans un pareil fil avec une vitesse bien supé- rieure. Or Wheatstone a, dans des expériences bien connues, montré que la vitesse de l'électricité dans un fil enroulé en vingt tours était une fois et demie celle NOUVELLES ” de la lumière. M. Stéfan pense avoir donné dans ce qui précède l'explication de ce résultat. L’auteur a toute- fois tenu à soumettre le résultat à l'expérience en employantla méthode de Hertz, qui consiste à produire des ondes électriques stationnaires dans les fils. M. Stefan a eu recours à un fil conducteur semblable à celui qu'employait Wheatstone, et comparé la longueur d’une onde dans ce circuit avec la longueur de la même onde dans un fil rectiligne. La longueur dans le con- ducteur enroulé est plus grande que dans le fil recti- ligne et jusqu'ici, d’après les expériences de l’auteur, le rapport est encore plus grand que dans les expé- riences de Wheatstone. —M. Franz V. Hemmelmayr de Prague : Sur l’oxydation de l’alcoolate de soude par l'oxygène de l'air. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Claus présente un mé- moire de M. Rudolf intitulé : Recherches comparatives sur les mandibules des thysanoures et des Collembola. — M. Wiesner présente un travail de M. Protits: Re- cherches d’anatonie comparée sur les organes de la végétation des kerriées, des spirées et des potentillées. Emile WEYr, Membre de l'Académie. NOUVELLES LA GUÉRISON DE LA TUBERCULOSE CHIRURGICALE PAR LE Pr LANNELONGUE Paris, 13 mai 1891. Bien avant que le D' Koch eût déclaré avoir trouvé un remède contre la tuberculose, médecins et physio- logistes, s'inspirant des travaux de Pasteur, s’appli- quaient à découvrir un procédé curatif, ou tout au moins préventif, de cette maladie. Le succès, bruyam- ment annoncé, du célèbre bactériologiste de Berlin a pendant quelque temps découragé les chercheurs. Ils se sont remis à l’œuvre depuis que les effets de la fa- meuse « lymphe » ont été jugés par l'expérience. L'un d’eux, le Professeur Lannelongue, qui poursuit, comme on sait, depuis longues années l'étude de la tuberculose chirurgicale chez les enfants, vient de mettre en pralique, pour essayer de la guérir, une méthode concue par lui depuis un an. Eprouvée dans son service à l'hôpital Trousseau, avec le concours du Dr Achard, cette méthode a conduit à des résultats tel- lement remarquables qu'elle attire déjà la curiosité du monde médical avant d’avoir été publiée, Animé de l'esprit scientifique le plus élevé, M. Lannelongue tient, en effet, à ne présenter sa découverte aux corps savants qu'après l'avoir assise sur des bases inébran- lables, Mais, bien qu'il se soit contenté de déposer un pli cacheté à ce sujet, ne voulant parler de son pro- cédé qu'après avoir accumulé les preuves ef constaté le maintien prolongé de la guérison, ses collègues de la Faculté de Médecine et des hôpitaux se rendent depuis quelques jours dans son service pour apprécier les résultats obtenus, Nous y sommes allé ce matin et nous y avons rencontré le Professeur Brouardel, le Professeur Bouchard, le Dr Spiess, de Genêve, les Drs Perrier, Jalaguier et quelques autres médecins et chirurgiens. Heureux de soumettre à l’examen compétent de ces savants les faits acquis, M. Lannelongue leur à montré tout une série de jeunes sujets atteints de diverses formes de tuberculose chirurgicale et récemmenttraités. Le traitement consiste dans l’inoculation de quelques gouttes d’un liquide dont M. Lannelongue fera con- naître la composition dès qu’il exposera sa découverte. La modification des tissus, consécutive à cette injec- tion, est très rapide : elle s'opère en quelques jours. Nous avons vu des lupus, des abcès costaux, des tu- meurs blanches du genou et du cou-de-p'ed, un spina ventosa, ete, Parmi toutes ces affections, la plus inté- ressante encore, au point de vue théorique, du moins pour ce qui concerne l’art de guérir, est indubitable- ment la tumeur blanche, On sait que l’arthrite fon- gueuse west pas une affection qui évolue nécessaire- ment vers un terme fatal; mais la guérison, lorsqu'elle se produit, ne manque pas de se faire longtemps attendre; des fistules osseuses s'ouvrent et se refer- ment tour à tour, des abcès multiples se forment, des séquestres demandent à être éliminés, et, si la termi- naison heureuse survient après, c'est au prix de la transformation fibreuse des tissus fongueux et d’une notable raideur ou même de l’ankylose complète de l'articulation, Si nous rappelons cette évolution natu- relle bien connue, c’est que les phénomènes que nous avons observés sous l'influence du traitement parais- sent surtout en différer quant à la rapidité de leur détermination. A la suite des injections à la seringue de Pravaz du liquide curatif loco dolente, il se forme en effet un départ rapide entre ce qui doit subir la bonne évolution, c’est-à-dire la transformation fibreuse, el ce qui est déjà trop profondément altéré pour pouvoir disparaître autrement que par élimination totale. En quelques jours, presque en quelques heures, les abcès se forment, les séquestres deviennent manifestes eb appellent l'intervention chirurgicale. Simultanément le vif des fongosités réorganise un tissu fibreux, et l’ar- thrite marche vers une guérison heureuse qui diffère encore de la guérison naturelle par son extrème rapidité. C'est là un résultat d’une telle portée qu'il serait superflu d'y insister, Si le traitement est absolument spécifique, on pourra sans doute l'appliquer à la tu- terculose pulmonaire. Mais même s’il restait limité à ces formes, en quelque sorte externes, de la tubercu- lose qui réclament l'intervention du chirurgien, il ne laisserait pas que de constituer l’une des plus belles découvertes de notre temps. L'intention formelle de M. Lannelongue étant de ne rien publier avant la terminaison complète de ses recherches, on ne pourra juger pleinement la nouvelle méthode que dans plusieurs semaines, et nous ne sau- rions entrer dans plus de détails sans courir risque de substituer notre impression personnelle et nos vues propres à celles de l’éminent inventeur; il se réserve de faire connaître en temps opportun la voie qu'il a suivie dans ses recherches, les effets physio-patholo- giques du remède et son mode d'action; l'apercu que nous en avons donné sous notre responsabilité deman- dera peut-être alors certaines modifications. Louis OLivier. Le Directeur- Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 2° ANNÉE N° 10 30 MAI 1891 REVUE GÉNÉRALE ES SCIENCES PURES. ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LES SYSTÈMES DE TÉLÉGRAPHIE HARMONIQUE Les origines de la télégraphie harmonique sont aussi reculées que l’origine de la télégraphie électrique elle-même. Dès 1837, Page et Henry. physiciens américains, constataient qu'en envoyant un courant interrompu et rétabli rapidement dans un fil en hélice entourant une Lige de fer, on par- venait à faire rendre un son à celte lige. Plus tard, de La Rive reconnut que ces sons pouvaient être obtenus en faisant passer le courant dans la lame elle-même. Ces appareils renfermaient le germe de la télé- graphie harmonique; mais le but de ces savants élait d'arriver à transmettre la parole à distance et Reis, en 1861, présenta à la Société de Physique de Franefort, sous le nom de téléphone, un appareil qui, quoiqu'incapable de reproduire nettement la parole, permettait de transmettre à distance des vibrations musicales au moyen de courants galva- niques. Avant lui, en 1860, M. l'abbé de Laborde avait pré- senté à l’Académie des Sciences une note où il décrivait un système destiné à reproduire des sons déterminés à distance. C'est le premier dispositif de télégraphie harmonique qui ait été mentionné. L'examen de la figure 1 suflit à en faire comprendre le fonctionnement. Une lame métallique AC encastrée à une de ses extremités et à laquelle est soudé un fil de cuivre AB, est mise en vibration de telle sorte que l’extré- mité de ce fil plonge dans le mercure du godet D et REVUE GÉNÉRALE, 1891. en sorte alternativement. Ce godet métallique peul être mis en communicalion avec une pile P au moyen de la clef M. Au poste recepteur, le fil de ligne est attaché à l’une des bornes d’un électro- aimant, dont l’autre borne communique avec la terre ; l’armature decetélectro-aimantest constituée par une tige élastique de fer doux. Cette tige, étant accordée avec la lame du poste de départ, vibrera en même temps qu'elle, dès que le courant tra- versera la ligne: Dans le cas où l’accord n’existe- rail pas, la tige resterait à peu près immobile. Dans ses expériences M. l'abbé de Laborde avait tout d’abord adopté les notes ut, ré, mi, fa, sol, la, pour les 6 lames interruptrices du transmetteur; mais poste telles diffi- cullés dans l'établissement de l’accord des diapa- sons entre eux, qu'il préfera employer les notes de l'accord parfait ut, mi, sol. Vers 1863, un télégraphiste français, M. Coincy, eut l'idée d'appliquer les propriétés harmoniques il rencontra de des lames vibrantes à un appel général des bureaux embrochés sur une même ligne sans déranger les autres. Il est fondé sur le même prin- cipe que le précédent : Le bureau principal À (fig. 2) est muni d’un commutateur qui permet d'envoyer sur la ligne le courant d’une pile à travers les interrupteurs V V'V"... etc., en nombre égal à celui des bureaux correspondants, interrupteurs dont l’armature est constituée par une lame de fer doux encastrée à un bout. Ces lames ont des dimensions différentes et donnent chacune en vibrant une note particulière. Les postes correspondants, 4, b... eltc., sont embro- chés sur la ligne, et sont munis d’interrupteurs analogues aux précédents. Dès qu’un courant {ra- 10 verse la ligne, & el V vibrent à l'unisson, b et V' également, mais en donnant une note différente, et ainsi de suite. En dirigeart le courant à travers un des trembleurs qui donne une note déterminée au poste principal, on actionnera celui des postes embrochés dont le trembleur donne la même note. On utilisait ce mouvement pour faire agir le mar- teau d’une sonnerie. En 1870, M. Varley proposa un appareil, destiné à la transmission simultanée de plusieurs dépêches par le même fil, dans lequel il utilisait le récepteur harmonique de Page. On y trouve quelques dispo- sitions qui furent employées dans la suite par ceux qui travaillèrent cette question. La ligne pouvait servir à la transmission des dépêches au moyen d'un Morse ordinaire M {fig. 3). En un point A se R cymapher Fire, 3. — Système Varley. trouvait en dérivation le poste phonotélégraphique. séparé de la ligne par un condensateur CG. Le trans- metteur était constitué par une bobine d'induction E à trois circuits dont deux primaires et un secon- daire. Les deux circuits primaires communiquaient d’une part avec un pôle d’une pile dont l’autre pôle était relié à un diapason, d'autre part, avec deux ressorts 7 el 7! à travers les bobines de deux électro-aimants B et B'qui, attirant chacun une des branches du diapason, servaient à entretenir ses A. BAZILLE. — LES SYSTÈMES DE TÉLÉGRAPHIE HARMONIQUE vibrations en même temps que des courants inter- rompus élaient envoyés alternativement dans les deux circuits primaires. Ces deux circuits ayant des enroulements inverses provoquent dans l'unique cireuit secondaire, quand on manœuvre le manipuleur M', une série d'ondulations électri- ques en nombre égal à celui des vibrations du diapason. Ces ondulations chargent et déchargent alternativement le condensateur C, envoient sur la ligne une série de courants alternés, et, trouvant au posle d'arrivée le manipulateur M' au repos, aclionnent le récepteur Page R appelé par Varley un cymaplren. Ce récepteur peut être une simple tige de fer entourée d’une hélice; cette tige pro- duit un son par suite de ses aimantalions et désai- mantalions successives. On concoit la possibilité d'obtenir des transmis- sions simullanées, car la tige ne parlera que lors- que les vibrations transmises seront en harmonie avec le son qu'elle peut donner. On trouve dans son système une idée neuve qui consisle à séparer le poste téléphonique de la ligne par un conden- sateur, idée qui fut reprise par Van Rysselberghe pour la télégraphie et la téléphonie simultanées. II utilisait aussi ce fait qu'un électro-aimant peut être considéré comme opaque par rapport aux courants inverses très rapides. Quelques années plus tard la question fut re- prise, et presque simultanément MM. Elisha Gray, G. Bell, Paul Lacour inventèrent un système de télé- graphie harmonique où les dépêches, transmises simultanément par des appareils électro-harmoni- ques, étaient triées par le synchronisme des appa- reils en correspondance. C'est même la recherche d’un pareil système qui a conduit Bell à la décou- verte du téléphone, découverte qui a fait le plus grand tort au développement de la télégraphie harmonique, car pendant quelques années l’atten- lion a été détournée du point de vue purement télégraphique. Système de M. Paul Lacour. — L'auteur emploie comme transmetteur un diapason D(fig.#)entretenu Rele. : Fig, 4 — Système P. Lacour. électriquement, qui est interposé entre la pile et le manipulateur. Le récepteur est un diapason D'en s A. BAZILLE. — LES SYSTÈMES DE TÉLÉGRAPHIE HARMONIQUE 323 fer doux dont les branches pénètrent à l’intérieur de deux bobines sur lesquelles est enroulé un fil de cuivre intercalé dans le circuit de ligne. Les extrémités des branches du diapason vibrent en regard des noyaux de deux électro-aimants verticaux traversés également par le courant de la ligne el disposés de facon que ces noyaux pren- nent une aimantation inverse de celle du diapason. La manœuvre de la clef M fait vibrer D' à l'unisson de D. Pendant son mouvement une des branches du diapason vient au contact d’un ressort el ferme ainsi le circuit d'une pile où se trouve em- broché un relais. On peut ainsi employer concurremment plu- sieurs diapasons transmetteurs sur une ligne uni- que, les vibrations superposées se trouvant triées à l’arrivée par les diapasons respectivement accor- dés avec les précédents. Une transmission Morse peut d’ailleurs être superposée à ce système sans aucun inconvénient. [ei comme dans le système Varley, on trouve cet avantage que les appareils laissent passer les courants ordinaires sans qu'il en résulte aucune perturbation ; aussi les courants accidentels qui troublent les transmissions télé- graphiques ont-ils ici un moindre effet. Un incon- vénient sérieux résulte du fait suivant: quand le diapason récepteur sera actionné par la transmis - sion d’un point, par exemple, il continuera à vibrer quelque temps après que la cause de son mouve- ment aura cessé, en raison de son inertie, et les signaux Morse pourront être altérés. M. Lacour a remédié à cet inconvénient par une modification simple. Système Elisha Gray. — Le principe en est simple. Aux deux stalions en correspondance se trouvent un nombre plus ou moins grand de vibrateurs électro-magnétiques accordés deux à deux sur une même note dela gamme. Au poste de départ, on met tous les vibrateurs en mouvement de façon que, réagissant sur le circuit deligne, ils transmet- tent aux vibrateurs du poste correspondant des séries de courants interrompus correspondant à leurs vibrations propres. De sorte que chacun des vibrateurs étant muni d’une pile au poste de dé- part, il sera possible, par la manœuvre d’une clef Morse, de provoquer dans le vibrateur de réception les sonslongs ou brefs qui constituent les signaux Morse. Rien de plus facile, par conséquent, que de lire au son les dépèches ainsi transmises, et cela avee un fil de ligne unique, car les vibrateurs de réception ne peuvent fournir toute l'amplitude dela vibration qu'ils sont capables de donner, qu'à la condition que les interruptions des courants qui les animent correspondent, en nombre, à celles de leur son fondamental. ILse produit donc, à l'arrivée, un véritable triage des signaux transmis, et les choses se passent comme si desfils séparés réunis- saient les appareils en correspondance. On peut amplifier les sons en plaçant les vibra- teurs sur des caisses sonores; mais il a paru préfé- rable à juste titre d'imprimer les télégrammes sur des bandes de récepteurs Morse, en transformant les résonnateurs en interrupteurs de courants lo- caux. On peut ainsi obtenir autant de transmissions multiples qu'il y a de notes différentes dans un oclave; mais on trouve d'autant plus de difficulté à accorder ensemble les vibrateurs de départ et d'arrivée que les sons choisis sont plus rapprochés. A l’origine, M. E. Gray avait limité son système à 4 ons seulement, ce qui fournissail par les pro- cédés du duplex huit transmissions simultanées. Dans la suite il a pu actionner huit récepteurs sur la même ligne, ce qui donne, en duplexant chaque poste, 16 dépêches dans les deux sens sur un même fil. Le vibrateur de transmission se compose d'un électro-aimant dont les bobines ont des tances différentes, 30° et 5° (fig. 5). résis- Chacune de 5. — Système Elisha Gray. ces bobines est reliée, d'une part, à une pile p, d'autre part à la tige vibrante constituée par un barreau d'acier AB disposé de manière à pouvoir rencontrer en vibrant 2 buloirs c et ce’. On peut régler la note musicale de celte tige au moyen d'un curseur. Le butoir c contre lequel s'appuie la tige au repos sert, comme l'indique la figure, à mettre hors du circuit de la pile la bobine de 30°. Le courant traversant le fil de la bobine de 5° ai- mante le noyau de cette bobine ; la tige AB est attirée à droite, le court circuit est rompu en cet le courant de la pile p traverse la bobine de 30°, AB est plus attirée à gauche qu'à droite, elle se porte de ce côté, et dans sa course ren- contre le butoir & de telle facon que le court cir- cuit est rétabli et que les choses reviennent en l'état primitif. Les mêmes mouvements se pro- duisent de nouveau, il en résulte des vibrations régulières de la tige AB qui vient à chaque vibra- tion toucher un butoir ç’ relié au fil de ligne et détermine sur ce fil une série d'émissions de cou- rant. Au bureau d'arrivée, on embroche sur le fil de ligne autant de relais qu'il y a de tiges vibrantes 324 A. BAZILLE. — LES SYSTÈMES DE TÉLÉGRAPHIE HARMONIQUE AB au poste de départ. L’armature de chacun de ces relais est formée d'une lame vibrante réglée à l'unisson avec une des tiges du poste de départ, par le déplacement d’un curseur. Seules, les vibra- tions de cette tige AB sont capables de faire vibrer la lame A'B! correspondante, bien que les courants de ligne traversent tous les relais. Dès qu'on appuie sur le bouton du manipulateur M, pendant toute la durée du contact l'intensité du courant émis par la pile p'est amoindrie, la tige A'B', dont les vibrations ont une amplitude moindre, viendra se mettre en contact avec le levier mobile, EF qui, par son poids s'appuiera suflisamment sur Farma- ture pour fermer le cireuit de la pile p” à travers le récepteur Morse. Dans la pratique le dispositif est plus complexe, nous ne donnons ici que le principe de l'appareil. Système de M. Mercadier.— Dans une étude sur la théorie du téléphone !, M. Mercadier à montré que le diaphragme de cet instrument est soumis à deux mouvements : 1° Mouvements de résonnance moléculaire. 2% Mouvements d'ensemble transversaux cor- respondant au son fondamental et aux harmo - niques du diaphragme. Les premiers sont indépendants de la forme extérieure et permettent au diaphragme de trans- mettre et de reproduire tous les sons. Les seconds dépendent de l'élasticité du diaphragme, de sa forme et de sa structure, Ils nuisent à la netteté de la transmission des sons articulés en altérant le timbre. Pour empêcher les mouvements de résonnance moléculaire, M. Mercadier, au lieu d'encastrer la plaque d’un téléphone par son bord circulaire, à simplement posé cette plaque aussi près que pos- sible du pôle de l'électro-aimant sur trois points qui sont les sommets d'un triangle équilatéral ins- crit dans la ligne nodale du premier harmonique. Le diaphragme est percé de trois ouvertures de om à uw de diamètre par lesquelles pénètrent trois pointes en liège disposées sur un plateau fixe. De cette facon le récepteur téléphonique ne vibre plus d’une façon appréciable que sous l’action de courants dont la période est égale à celle du son correspondant à la nodale sur laquelle s'appuie la plaque, d’où le nom de monotéléphone donné à ce récepteur qui est représenté en coupe dans la figure 6. GH est la membrane vibrante. La vis V sert à tendre ou à détendre une bande de caoutchouc KL à l'extrémité de laquelle se trouve un pelit cylindre métallique L dont le déplacement sur la plaque téléphonique sert au réglage. Les deux tubes de caoutchoueT et T' servent à écouter; les embouchures de ces deux tubes peu- vent aisément être maintenues à la hauteur des oreilles surun diadème de forme simple, de manière Fig. 6. — Système Mercadier. à laisser à l'employé manipulant l'usage entier de” ses deux mains pour écrire ou transmettre. Le transmetteur est constitué par un diapason: entretenu électriquement au moyen de la pile p (fig. 7). Ce diapason est adapté à une boîte sonore qui donne la même note et supporte une paire de microphones d'Arsonval. Une clef Morse M permet de fermer le circuit de la pile p' àlravers le circuit d’une bobine E. Le circuit induit communique, d’une part avec la terre, d'autre part avec la ligne. En appuyant sur la clef M on enverra sur la ligne une série de courants ondula- toires ! qui ne feront rendre à la plaque GH du récepteur monotéléphonique, le son qu’elle doit donner, qu'autant que celle-ci sera d’accord avec le diapason D. La figure 7 montre que les deux récep- teurs sont actionnés par la transmission de l’un ou l'autre poste si les 4 instruments D D’ R R’ sont accordés ensemble. Pour travailler en duplex il suffirait de donner à D et R des notes différentes et à R’et D'les notes correspondantes. R resterait muet sous l’action de Det pourrait être actionné en même temps par D'. De même pour R'. En résumé on pourra embrocher sur la ligne autant de récepteurs qu'on en pourra construire donnant des notes différentes et cela en des points quel- conques de la ligne. En adaptant à chacun d’eux un transmetteur à électro-diapason, on aura autant de inducteur | Journal de physique, 2e série, &. V, p. 1#1 et Comptes rendus, t. CI, p.744#0t 110 l Ces courants interrompus deviennent ondulatoires, grâce à la self-induction du récepteur qu'ils traversent. ne si mé és …— dl à A. BAZILLE. — LES SYSTÈMES DE TÉLÉGRAPHIE HARMONIQUE 325 postes harmoniques; chacun des transmetteurs n'actionnera que le monotéléphone dont le nombre de vibrations propres correspondra exactement au nombre de vibrations de son électro-diapason. On voit qu'avec ce système toutes les conditions exigées par la pratique télégraphique sont rem- plices; chaque manipulant peut contrôler sa trans- mission puisque son propre récepteur est actionné ; et, s'il est coupé par son correspondant, il en est immédiatement averti. En recouvrant la bobine de l’électro-diapason d’une deuxième bobine reliée au fil inducteur de E, M. Mercadier a simplifié beaucoup le transmetteur. A chaque vibration du diapason le courant de pile est interrompu, les branches du diapason se rap- prochent et il résulte de ce double fait qu’un cou- rant d'induction traverse le circuit inducteur de la bobine E et qu’un deuxième courant induit est envoyé sur la ligne. Grâce à cette disposition on peut supprimer la caisse sonore, la pile p'et les microphones. Ce système de télégraphe harmonique est simple et exempt des complications de réglage et d’instal- lation du système de M. Elisha Gray. En employant des monotéléphones accordés à un demi-lon de distance les uns des autres, on peut facilement . installer 12 postes à chaque extrémité d'une ligne. Seulement les dépêches sont lues au son, et l’on connait la répugnance qu’inspirent en France les appareils à signaux fugitifs, répugnance assez peu justifiée d’ailleurs. Ce système, non plus que le suivant, n'est pas encore, à notre connaissance. entré dans la pratique. Phonopore de M. Langdon Davies. — L'élément essentiel de ce système est une bobine d’induction de forme particulière qui possède un circuit induc- teur et deux circuits induits. Le circuit primaire est constitué par 14 fils réunis en quantité et enroulés sur une bobine. Le circuit secondaire est formé de deux fils enroulés isolément sur une deuxième bobine, sur une longueur de 100 mètres et enroulés ensemble sur la longueur restante 150 m. environ). Cette bobine à deux enroulements est la bobine t'honoporique proprement dite. L'installation d’un poste phonoporique simple comprend un #rans- melteur et un récepteur, puis un poste Morse fonc- tionnant comme à l'ordinaire AB est une lame vibrante en acier, fixée à une pièce de fer doux c (fig. 8). Le circuit inducteur L enroulé autour d’un barreau d'acier, renferme une pile P, la clef Morse M et un interrupteur constitué par la lame vibrante AB et le ressortr. L'un des fils secondaires l'est isolé à un bout et communique avec la terre par l’autre extrémité. L'autre fil secondaire / est relié à la ligne d’une part et isolé d'autre part. En appuyant sur le bouton M on envoie sur la ligne une série de cou- rants vibratoires extrèmement rap- prochés. Les diffé- rentes lames AB qu'on peut adap- ter au vibrateur sont assez massi- ves, épaisses de 4 à 5 millimètres et longues d'environ 10 centimètres. Elles sont numérotées 1,2,3... etc. et donnent en vibrant des notes diffé- rentes. Une pareille bobine transmet les impul- sions d'un courant vibratoire d’un fil à l’autre, mais ne se laisse point traverser par un courant Fig. 8.— Transmetteur phonoporique ordinaire. Le récepteur (fig. 9) amant dontles noyaux sont les deux branches d'un aimant permanent; les piè- ces polaires qui les termi- nent sont très rapprochées l’une de l’autre. Le fil de l'é- lectro-aimant communique avec la ligne et avec une bo- bine phonoporique à double enroulement ce. Au-dessus des est formé d'un électro- noyaux se trouve une lame vibrante ah en acier, appuyée par ses deux extrémités sur deux petits chevalets métalliques. Cette lame est Fig. 9. — Récepteur. fixée par une vis à l’une de ses extrémités tan- dis que l’autre est pincée dans un étau mobile dans des glissières et qu'on peut déplacer en ma- nœuvrant une vis pour le réglage; on peut ainsi règler la tension de cette lame 44. Au-dessus d'elle se trouve l'extrémité f d'un levier mobile autour du point 0, dont l'extrémité K est en contact avec la pointe d'une vis. Sur ce levier Kf s'appuie un res- sort gk fixé en 2. Les axes o et L sont suspendus à des étriers en laiton qui sont mobiles dans des glissières et auxquels on peut communiquer de faibles déplacements au moyen de vis convenable- ment disposées. La lame wb attirée en permanence par les noyaux aimantés se trouve ainsi dans un certain état de tension. Quand un courant vibra- toire traversera l'électro-aimant, il rompra l’état d'équilibre instable dans lequel se trouve la la- melle ab et les contacts K el f seront altérés. La figure 10 représente un poste phonoporique simple. Un relais sensible est mis en communica- tion avec K et Z par l'intermédiaire d'une pile dont le circuit est fermé au repos de façon que l’arma- ture À est attirée. Si la lame «b vibre, les ruptures du circuit en K et / sont suffisantes pour permettre J. THOULET, — LE SOL SOUS-MARIN ET LES EAUX ABYSSALES à À de venir s'appuyer contre le butoir supérieur et le récepteur Morse, qui n’est pas figuré ici, mais est relié à la borne M, sera actionné. L’armature garde cette position pendant toute la durée d’une Fig. 10. — Poste phonoporique, série de vibrations, c’est-à-dire pendant tout le temps que dure la fermeture de la clef de manipu- lation. Le relais doit être, à la fois, sensible, pour que son armature soit déplacée par le passage de la première émission, et paresseux, pour qu'elle ne revienne pas au repos dans l'intervalle de deux émissions successives. On voit que des vibrations de ab produites par des émissions lentes et irrégu- lières du genre de celles qui actionnent le télé- graphe Morse ordinaire, ou même des émissions rapides et régulières, qui ne seraient pas d'accord avec les vibrations de la lame, ne pourront acquérir une amplitude suffisante. La bobine B du poste Morse est une bobine Van Rysselberghe interposée entre le manipulateur et la pile pour faire fuser les signaux et les rendre sans action sur les lames vibrantes. On a pu voir fonctionner ce système à l'Exposi- tion universelle, sur une ligne factice formée de deux bobines de 5000 ohms chacune; trois dépê- ches parcouraient en même temps la ligne, deux en sens contraire par le système phonoporique et une troisième à la façon ordinaire. — Les résultats ob- tenus étaient excellents, mais, malheureusement, assez peu probants, car la ligne artificielle utilisée n'avait que des rapports lointains avec une ligne réelle, La capacité, la self-induction d'une ligne et son défaut d'isolement sont des éléments qu'il n'est pas permis de négliger, surtout dans les essais relalifs à des systèmes du genre de ceux que nous venons de décrire. Toutes ces tentatives n'en sont pas moins fort intéressantes au point de vue de la meilleure utilisation d’une ligne télégraphique et il est permis d'espérer que dans un avenir peu éloigné les systèmes de télégraphie harmonique entreront sérieusement dans le domaine de la pra- tique. A. Bazille, ligéuieur des Télégraphes. LE SOL SOUS-MARIN ET J'ai exposé dans un précédent article ! les mo- tifs et les expériences me paraissant élablir les faits suivants : 1° La masse des eaux océaniques esl partagée en deux zones superposées. La première, supé- rieure, est celle du mouvement; les courants marins, quelles que soient leurs causes multiples, y accomplissent et y forment leur cycle. La seconde zone, inférieure, est celle du repos ?. 2 L'épaisseur de la zone tranquille est beaucoup plus considérable que celle de la zone de mouve- ment. Cette dernière varie avec la localité et, en une même localité, avec la saison de l’année. 3° Les densités actuelles des eaux marines, c’est- à-dire prises à la température #2 situ et corrigées de la pression, fonction de la compressibilité et de la profondeur, croissent partout du fond à la sur- face, de sorte que les nappes isopyenes sont horizontales et régulièrement superposées, tout 1 Voyez la Revue du 30 août 1890, t. I, p. 500 et diverses Notes et Mémoires publiés aux Comptes rendus de l'Académie des Sciences. 2 J. Taourer. De quelques objections à la théorie de la circulation verticale profonde de l'Océan, Ctes Rend. Acad. Se. t. CX, p. 324, 1899 et Revue générale des sciences pures et appliquées, t. I, p. 500, 1890. LES EAUX ABYSSALES comme elles le seraient dans un flacon contenant du mercure, de l’eau et de l'huile !, 4 Le repos des eaux abyssales n'exclut pas la présence de l'air et par conséquent la présence de la vie dans la masse entière des eaux *. 5° La comparaison des surfaces isopyenes et des surfaces isothermes montre des anomalies tendant à faire supposer que les eaux du fond n'ont point partout la même composition chimique. Cette sup- position est appuyée par les analyses de MM. Ditt- mar et Buchanan * qui ont trouvé que certains échantillons d'eaux recueillis à de grandes profon- deurs par le Challenger présentaient une réaction acide au lieu de la réaction alcaline manifestée dans l'immense majorilé des cas. 6° Les particules solides *, quelle que soit d’ail- leurs leur ténuilé, lombent très rapidement à travers les eaux salées même lorsque celles-ci sont 1 J. Tuourer. Note sur le poids spécifique et la densité de l'eau de mer. Bulletin de géographie historique et descriptive du Ministère de l'Instruction Publique, t. IV, 1890. 2 J. Tuourer. Sur la circulation verticale océanique, Ces lRend. Acad. Sc., t. CX, p. 1350, 1890, 3J, TnouLer,Océanographie (Statique. Paris, Beaudoin 1890). 4J, Taourer. Expériences sur la sédimentation, C£es Rend. Acad. Se., t. CXI, p. 619, 1890 et Annales des Mines, 1891. tm often te si J. THOULET. — LE SOL SOUS-MARIN ET LES EAUX ABYSSALES 327 étendues de dix fois leur volume d’eau douce. 1° Un minéral ne se dissout pas sensiblement plus dans l'eau en mouvement que dans l’eau immobile !, Dans l’eau de mer, cette solubilité existe, mais elle est extrèmement faible ?. 8° La diffusion entre l’eau douce et l’eau de mer et entre des eaux de mer de densités différentes s'opère avec une lenteur considérable #, de telle sorte que, pour en donner un exemple, l'Océan étant supposé entièrement recouvert d'une couche infiniment épaisse d'eau distillée, il faudrait au minimum 3.000 ans pour que la densité de l’eau salée fût abaissée de 0°,04 sur une épaisseur de 1.000 mètres. On conclura de ce fait la possibilité d'une superposilion de faunes aquatiques distinctes pendant leur vie et, après leur mort, la possibilité de la chute et du mélange de ieurs restes en une même localilé du fond. Il Pour compléter ces notions il est utile de rap- peller les points suivants : 1° Selon Mohr, les plantes marines transforment le gypse contenu dans l’eau de mer en carbonate de chaux et emploient une partie du soufre ainsi libéré à créer de l'albumine, tandis que les ani- maux marins utilisent une parlie du carbonate de chaux pour leur test ou leur squelette. Le reste du carbonate de chaux se précipite. MM. Murray et Irvine® ont démontré expérimen- talement que les excrélions albuminoïdes des ani- maux marins produisent de l'acide sulfhydrique et de l’acide carbonique. L'acide sulfhydrique, s’oxydant, forme de l'acide sulfurique qui se com- bine avec la chaux et produit du sulfate de chaux ; l'acide carbonique donne naissance à du carbonate d’ammoniaque qui réagit sur le sulfate de chaux dissous, constitue du carbonate de chaux qui se précipite et du sulfate d'ammoniaque absorbé par les plantes et les animaux et en partie transformé ensuite en nitrates et en azote libre, M. Ch. Ochsenius © pense que les animaux ma- rins, dégageant de l'acide carbonique, décomposent l'eau de mer pour fabriquer ainsi du carbonate de soude et de l'acide chlorhydrique. Le carbonate de soude, se combinant au sulfate de chaux, donne 13. Tuourer. De l’action de l’eau en mouvement sur quel- ques minéraux. Cles Rend. Acad. Sci, t. CXIT, p. 502, 1891 et Annales des Mines, 1891. ? J. Trourer. Solubilité de divers minéraux dans l’eau de mer. Cles Rend. Acad. Sc., 1. CVIIT, p.153, 1889 et t. CX, p. 652, 1890. 3 J, Tuourer, Sur la diffusion de l’eau douce dans la mer, C. R. Acad. Sc., t. CXIL, page 1068, du 11 mai 1891, 4 Mour, Geschichle der Erde. 2° Ed. p. 286 fF. 5 Jonx Murray and Rogerr Ixvine. On coral Reefs and other Carbonate of lime formations in modern seas, Proc. Roy. Soc. of Edimburgh, Déc. 1889. 5 Ocnsexius. Biederman centr. in. Cosmos, 1890, p. 391, du carbonate de chaux et du sulfate de soude qui, à son (our, avec le chlorure de magnésium, pro- duit du chlorure de sodium et du sulfate de ma- gnésie, Enfin, l'acide chlorvdrique décompose les silicates alcalins du fond, et la silice, mise en liberté, est assimilée par les Diatomées et les Éponges siliceuses !. Quelle que soit la théorie préférée, les dépôts calcaires se forment done par voie chimique et comme les êtres vivants, l'un des éléments du cycle, vivent principalement au fond, les réactions doivent s'effectuer au contact même de ce fond. 2 La Pola,? pendant sa campagne de 1890 dans le sud de la mer Adriatique, a reconnu que : Il existe, en des localités diverses, de notables différences dans la richesse des eaux de surface en malière organique facilement oxydable. D’une facon générale, la quantité de matière organique diminue avec la profondeur; mais l’eau immédia- tement en contact avec le sol sous-marin en ren- ferme une proportion considérable, Les varialions en ammoniaque sont très faibles, méme aux plus grandes profondeurs ; néanmoins, tout contre le fond, la quantité en augmente et l’on peut en dire autant de l'azote organiquement com- biné, quoiqu’on ait cru observer une légère diminu- tion avec la profondeur et, dans certains cas, au contraire, une accumulation sur le fond encore plus considérable que celle de l’ammoniaque. 3° Il résulte des calculs de Züppritz, combinés à d’autres considérations, que le mouvement des courants marins ne s'exerce pas d’une facon sen- sible au delà d’une profondeur relativement faible au-dessous de la surface. De même l'agitation des de se faire sentir à une très faible variable d'ailleurs selon les vagues cesse distance verticale, localités. Quant aux variations de la densité suivant la profondeur, elles ont été soigneusement mesurées par M. Buchanan, pendant la durée de la célèbre expédition du Challenger *. Dans les tableaux qu'il a dressés sont indiqués le numéro d’ordre de la station, la latitude et la longitude du lieu, la profondeur, la température T in situ, la densité prise par rapport à l’eau distillée à 4C, ramenée à la température T et par conséquent figurée par le symbole S;", enfin la densité ramenée à la tem- pérature normale de 15°,56 GC, c'est-à-dire S,'#5. Cette dernière valeur est la densité absolue ou, en 1 J. Tuourer. Analyses de spicules d’éponges silicouses recueillies dans les dragages du Talisman. Cles Rend. Acad. Se. t. XC VIII, p. 100 et Bull. Soc. minéral. de France, 1. VIT. pe 147, 1884. 2 Muourer. La campagne océanographique de la Pola, ievue scientifique, t, XL, p. 658. 1890. * Reports of the scientific results of the erploving voyage of. IH. M.S, Challenger Physics and Chemistry, vol. L 328 J. THOULET. — LE SOL SOUS-MARIN ET LES EAUX ABYSSALES d’autres termes, la fonction unique et immédiate dela quantité desel ou de la composition chimique de l’eau de mer, par litre, indépendamment de la température et de la profondeur, puisqu'aucune correction de compressibilité n'a été faite. La densité absolue proportionnelle à la salinité de l'échantillon peut done servir de mesure à celle-ci. Parmi les observations de densités absolues con- tenues dans les tableaux du Challenger, j'ai choisi toutes celles relalives à une même vertiçale, c’est-à-dire comprenant les densités absolues en série d'une même colonne d’eau depuis le sol sous-marin jusqu'à la surface. Leur nombre, pour les divers océans, était : 102 observations. Atlantique nord........ 20 séries, Atlantique sud......... 19 — 122 — Océan Indien sud ...... T — 42 — Pacifique nord......... 23 — 173 — PacHiqQuesude ere. 31 — 207 — Mers de Célèbes, Soulou ; des Philippines,détroit de Magellan.......... T — 39 — soit un total de 685 observations groupées en 108 séries. Ces observationsont été disposées en 6 schémas, sur un papier quadrillé; chaque densité absolue, marquée à sa profondeur, était représentée par un cercle colorié d’une couleur correspondant à sa valeur et faisant partie d'une gamme deS8 couleurs dont chacune indiquait des densités différant entre elles de moins de 0®,0005. Un autre schéma, dressé dans des conditions analogues, montrait pour l'Atlantique Nord et Sud et le Pacifique Nord et Sud, les densités absolues d'extrême fond rangées à l'échelle suivant l’ordre des latitudes. Les densités du Challenger sont données jusqu'à la cinquième décimale; je les ai prises telles qu'elles étaient fournies, bien que je ne possède pas, je l'avoue, une grande confiance dans cette cinquième décimale qui est une décimale mathé- mathique, provenant d’un calcul et en decà des erreurs d'observation. Il en résulte que les remar- ques qui vont suivre ont leur sensibilité exagérée puisqu'elles considèrent que deux densités dif- férant entre elles d'une unité du cinquième ordre sont véritablement différentes, tandis qu’elles peu- vent être en réalité identiques. Ces divers schémas étant ainsi dressés, il suffit de les considérer attentivement pour les lire au moyen de ce qu'Ampère nommait le coup d'œil autoptique. Ce procédé scientifique est fort com- mode; le groupement des observations achevé, les analogies et les dissemblances viennent en quelque sorte frapper la vue et la tâche se borne désor- mais à les énonccr et à leur trouver, s'il est pos- sible, une explication. IT Voici d'abord les faits qui en ressortent : Les densités absolues, à partir du fond, dé- croissent jusqu'à une certaine hauteur et croissent ensuite. On constate ainsi l'existence de deux zones, l’une inférieure, épaisse, à stratification directe, l’autre supérieure, mince, à stratification variée. Dans celte dernière, se manifestent ordi- nairement plusieurs alternances à des intervalles - d'autant plus petits qu'on se rapproche davantage de la surface. Sur une même verticale, la plus forte densité de la série se trouve à la surface, de sorte que l’eau du fond est moins chargée de sels que celle de la surface. Malgré le peu de mesures prises au fond et à une très petite distance du fond (7 séries de 2 observations chacune), il semble exister, très près de ce fond, une couche mince, moindre de 100 brasses, où la variation de la densité absolue a lieu très rapidement et souvent même est inter- vertie. Sur les six schémas des Océans j'ai tracé la courbe des interversions de densités, c’est-à-dire j'ai marqué et joint entre eux les points où en re- montant du fond vers la surface, la densité absolue cesse de décroitre pour augmenter. En outre pour chaque sondage, j'ai encore marqué à l'échelle le point correspondant à la profondeur à laquelle la température commence à décroître lentement. Il suffit pour cela, sur la feuille qui dans les Reports indique, pour chaque station, la série des tempé- raltures profondes, reliées par une courbe grossiè- rement parabolique ou hyperbolique, de noter la profondeur à laquelle se trouve le sommet de la courbe. En joignant ces points, j'ai obtenu la courbe de variation thermométrique lente. En réalité ces deux courbes correspondent à des sur- faces au sein des eaux océaniques. La comparaison de ces deux courbes entre elles et avec celle du fond établit les faits suivants : 1° Le niveau de la surface d’interversion des densités absolues change avec la localité et proba- blement avec la saison de l'année. 29 Le niveau moyen de la surface d'interversion est voisin de 500 brasses à partir de la surface dans l'Atlantique Nord et Sud, de 300 brasses dans le Pacifique Sud. Les variations de profondeur sont très grandes dans l’Atlantique Nord, moindres dans l'Atlantique Sud, faibles dans l’Océan Indien Sud et le Pacifique Sud, extrêmement faibles dans le Pacifique Nord. Le niveau moyen d'interver- sion sert de limite supérieure à la zone des eaux tranquilles et de limite inférieure à la zone des eaux en mouvement, ’ J. THOULET. -- LE SOL SOUS-MARIN ET LES EAUX ABYSSALES 3° Le niveau de la surface de variation thermo- métrique lente diffère aussi avec la localité, et, pour une même localité avec la saison de l'année; il est situé à la distance moyenne de 400 brasses de la surface; mais il subit de plus grands écarts de profondeur, surtout dans l'Atlantique Nord. Il est généralement plus rapproché de la surface que le niveau d’inlerversion de densité dans l'Atlantique Sud, plus bas dans le Pacifique Nord et Sud. 329 océanique qui s'effectue tout entière dans une zone superficielle d’une épaisseur voisine de 500 brasses. Faisant abstraction des phénomènes de remplis- sage du bassin océanique par des matériaux inor- ganiques tels que les poussières volcaniques et au- tres par les dépouilles d'êtres vivant dans les couches liquides supérieures, par la marche pro- gressive et continuelle des sédiments depuis les rivages jusqu'aux portions centrales des océans !, sans parler enfin de la formation des dépôts par 4 La courbe d’interversion de densité absolue 1 l'intervention de la vie (théories de Mohr, de Mur- At antique” Word #4 Jo et la courbe de variation thermométrique lente ne paraissent point avoir une relation nette avec la profondeur du fond. »° Les deux courbes ne sont pas très éloignées l’une de l’autre, mais elles ne coincident pas. Les faits s'expliquent de la façon suivante : La surface océanique soumise aux variations cimatériques (marche du soleil, régime des pluies, vents, nébulosité, etc.) est le siège d’une évapora- tion et d’un échauffement plus ou moins intenses ; les variations qui en résultent dans la densité réelle et dans la composition chimique des eaux, ajoutées à l’action mécanique exercée par les vents, donnent lieu à des courants marins horizontaux, plus ou moins verticaux, se croisant entre eux ou se superposant avec des vitesses el des directions diverses. Leur ensemble constitue la circulation REVUE GÉNÉRALE, 1891. Pet ray et Irvine et d’Ochsenius), en conséquence de l’évaporation de surface, les substances peu solu- bles contenues en solution dans les eaux marines et apportées à l'Océan par les eaux douces beau- coup plus dissolvantes, atteignent à une certaine profondeur leur limite de solubilité et se précipi- tent. Devenues solides, elles descendent verticale- ment, pénètrent dans la zone calme, franchissent rapidement etsansse dissoudre lescouches intermé- diaires tranquilles et parviennent sur le sol sous- marin. Entourées d'eaux immobiles, devenues maitresses du temps, elles se redissolvent et aug- mentent la proportion de sels contenus dans la 1 J. Tnourer. Etude expérimentale et considérations géné- rales sur l’inclinaison des talus de matières meubles, : Ces. Rend. Acad. Se. t. CIV., p. 1537 ct Annales de chimie et de physique, 6e sèrie, T, XII, pp. 33-64. sept. 1887. 10* 330 J. THOULET. — LE SOL SOUS-MARIN ET LES EAUX ABYSSALES couche d’eau la plus profonde immédiatement en contact avec le sol. Alors intervient la diffusion qui, avecune lenteur extrème, augmente progres- sivement la salinité des eaux sus-jacentes et en même temps permet aux couches contiguës du sol de n'être point salurées et par conséquent de con- linuer à dissoudre les nouveaux matériaux qui leur arrivent sans cesse. Le sol sous-marin est donc une sorte de foyer d’activité chimique ali- menté par des phénomènes de surface etrayonnant avec une grande lenteur vers la surface. III La véritable zone d'activité chimique est immé- diatement contiguë au fond et son épaisseur ne dépasse pas une centaine de brasses. Ainsi s'ex- plique la formation des gros nodules mangané- siens et des cristaux de christianite si abondants dans les argiles rouges et grises ‘. L'activité chimique du fond, conséquence de la concentration des eaux sus-jacentes, dépend donc du climat de la surface. La limite de la zone tran- quille est évidemment en relation avec le niveau d’interversion de densité absolue; sa profondeur dépend, non pas de la profondeur du fond, mais du climat. Très variable dans l'Atlantique et surtout dans l'Atlantique Nord où les variations climaté- riques sont considérables, elle est régulière et assez haute dans le Pacifique. Les vastes dimen- sions de ce dernier Océan, les courants marins peu violents et mal limités qui le sillonnent, causent une distribution uniforme des eaux superficielles concentrées par le soleil ou étendues par les pluies, et il en résulte que le niveau des eaux tranquilles, celui d’interversion des densités absolues et celui de variation thermométrique lente y sont beaucoup plus uniformes et plus rapprochés de la surface. Des pôles à l'équateur, dans chaque hémisphère, en suivant le fond, les densités absolues sont va- riables, surtout dans l’Allantique. Le fait apporte une preuve de plus en faveur de la non-existence d’une circulation verticale océanique profonde, car, dans le cas où cette circulation existerait, la densité absolue, c'est-à-dire la teneur en sel de l’eau du fond, devrait être partoutlamême, puisque, cette eau n’apparaissant jamais à l’air, on ne sau- rait trouver une explication plausible à la varia- tion de sa salinilé. L'examen des schémas montre qu’au fond, en des points extrêmement voisins, la composition chimique de l'eau peut être très différente. Et, dans une même région, les eaux des creux les plus profonds n'ont pas toujours la plus forte densité absolue. Il en résulte que, dans l'Océan actuel, au TS RER He 5e A SRE à << 1 J. Touzer, Attraction s’exercant entre les corps en dis- solution et les corps solides immergés, Cles-rend. Acad. Sc., t. XCIX, p. 1072, 1885, et t. C, p. 1002, 1885. point de vue spécial considéré ici, les dépôts sont localisés; leur répartition, leurs dimensions, leur épaisseur considérable, faible ou nulle, dépendent moins du temps que des circonstances extérieures. Les lois générales de l’économie océanique sont donc dans leur ensemble connues ou soupconnées ; il importe maintenant de se livrer à des recherches précises et mullipliées sur des espaces resserrés. Le temps des grandes expéditions océanogra- phiques est passé; il faut désormais se résoudre à étudier des aires restreintes d’une façon com- plète et surtout à diverses époques de l’année. L'étude des variations de la densité, de l’évapo- ralion, du régime des pluies et des vents s'impose. La météorologie se lie étroitement à l'océanogra- phie qui est la géologie du présent comme la géo- logie est l'océanographie du passé. Il devient indispensable de serrer le réseau des observations aux environs du fond et à 500 brasses environ de la surface. Le Pacifique, et plus parti- culièrement le Pacifique Sud, étant l'océan le plus régulier, les complications de pareilles études y se- ront probablement moindres qu'ailleurs. La chimie analytique devra rechercher si les métaux difficilement solubles ne sont pas contenus en plus forte proportion dans les eaux voisines du fond que dans les eaux de surface. Mais il faut avant tout se préoccuper de perfectionner la cons- truction des bouteilles destinées à recueillir les échantillons d’eau, de manière à être garanti contre tout mélange des eaux profondes et superficielles; el aussi s'assurer qu'en remontant des profondeurs à la surface, l’eau abyssale, par une diminution brusque de la pression, ne laisse point les métaux difficilement solubles se reprécipiter de nouveau !. J. Thoulet, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy. l En corrigeant les épreuves de cet article, je trouve dans le numéro de mars 1891 des Proceedings of the Royal Geographical Society, de Londres, p. 171, quelques détails sur l’exploration océanographique de la mer Noire exécutée par le Prof. Voeikof, à bord du Tchernomorelz, de la marine russe, pendant les mois de juin et de juillet 1890. II serait difficile de rencontrer des faits confirmant mieux la théorie de la circulation chimique et physique de l’océan. La température de Veau, à °55 m. est de 70,22, puis elle augmente progressivement et atteint 9°,44 à 1.830 m. A 137 m., l’eau contient des traces d'hydrogène sulfuré dont la proportion augmente rapidement et, à 286 m. la vie animale absolument impossible. On ne ramène de cette profondeur que les coquilles semi-fossiles de certains mollusques caractéristiques des eaux saumäâtres des lagunes de la mer Noire et de la Cas- pienne et qui sont les restes de la faune qui habitait la mer Noire pendant le pliocène alors que le bassin de cette mer, séparée de la Méditerranée, ne contenait que des eaux fai- blement salées. La décomposition de ces restes organiques s’accomplit très lentement à cause de lPimmobilité des eaux au delà d’une certaine profondeur et donne naissance à de l'hydrogène sulfuré se diffusant lentement de bas en haut. au-dessous, rend CH. WEYHER. — SUR L'ORIGINE DES TOURBILLONS NATURELS 331 SUR L'ORIGINE DES TOURBILLONS NATURELS Dans ma brochure sur les tourbillons ‘ et mes précédentes études parues dans cette Revue, je pen- sais avoir donné les explications suffisantes pour permettre de comprendre comment une trombe pouvait prendre naissance au sein de l’atmosphère. Je me suis probablement mal expliqué; en effet, les quelques personnes qui ont bien voulu étudier mon travail, tout en reconnaissant que mes expé- riences rendaient compte des phénomènes naturels qu’elles reproduisaient, expriment cependant quel- ques doutes relativement à l’origine des tourbil- lons. M. Gariel, entre autres, et dans l’article qu'il a l'action du soleil par le nuage, l'air se refroïdit et diminue de volume. Par conséquent en A l'air dilaté et échauffé tend à monter et à se précipiter vers la région B, dans laquelle le volume a dimi- nué. Inversement l’air de B est appelé vers la région À suivant un mouvement descendant pour venir rem- placer par le bas l'air chaud qui s'élève en raison de son échauffement. Le conflit du courant chaud fff.., avec le courantfroid fff.. engendre le tour- billon. Au début celui-ci pourra avoir son axe plus ou moinsincliné ou même horizontal; mais on Fi 2 bien voulu consacrer à mes expériences, ? pense que celles-ei ne rendent pas bien compte de l'origine des phénomènes, car, dit-il, on ne voit pas nette- ment, pour ceux-ci, Ce qui remplace mon tourni- quel. J'ai donc repris et modifié les appareils, en com- mencçant par supprimer les fonds et les parois laté- rales de mes premiers tourniquets. Le résultat à été identique. Mais en consultant encore la Nature on est amené à voir que les lourbillons se mon- trent plus volontiers à l'approche d’un nuage ora- geux; et, en effet, considérons un épais nuage N (fig. 1) formant écran et empêchant les rayons du soleil de frapper la terre sur une grande étendue; à droite de la figure, dans la région À exposée au soleil, l'air s’échauffe et augmente de volume. Par contre, dans la région B, qui est soustraite à 1 Sur les tourbillons, trombes, lempètles el sphères tour- nantes. Etude et Expériences. Paris, Gauthier-Villars et fils. 2? Revue générale des Sciences pures el appliquées, n° 10, 30 mai 1890, sait que cet axe ne peut conserver cette position et qu'il prendra bien vite la direction verticale. On objectera peut-être que, si l’air se contracte dans la région B, le nuage descendra en proportion et s’opposera à la rupture de l'équilibre entre les masses aériennes des régions À et B, rupture sur laquelle nous avons étayé nos courants atmosphé- riques de sens inverses. Pour répondre à l’objec- ton, il suffit de remarquer que, d’une part, le nuage fait obstacle en raison de sa masse et que, d'autre part, la vapeur d’eau qui le constitue est exposée au soleil par le haut et que, par suite, cette vapeur est échauffée et tend à s’élever. Remarquons en passant que, puisque l'air se dilate dans la région A, le nuage se trouvera appelé dans la direction de la flèche F, c’est-à-dire que l’on verra le nuage orageux s'avancer en sens inverse du vent régnant dans la région encore exposée au soleil, ce qui a lieu en effet dans la Nature. Une disposition du genre de celle représentée par la figure 1 conduit en somme à ce résultat 332 D' H. BEAUREGARD. —— REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE capital : la créalion d’un fort courant supérieur souf- flant horizontalement sous le nuage. Nous retrou- xons alors l'inverse de ce qui se passe dans une rivière lorsque les courants rapides de fond déter- minent des entonnoirs plongeant au sein duliquide situé au-dessus ou sur les flancs de ces courants inférieurs. Voici une expérience qui met bien le fait en | |) Va vement prépondérant est ascendant; mais, comme dans les trombes produites par tourniquets, il peut étre descendant dans la région axiale; et, en effet, lorsqu'on présente dans le haut un fumeron fixé au bout d’un fil de fer D, on voit un cône de fumée descendre et diriger sa pointe aigüe vers la sur- face de l’eau, en donnant ainsi la reproduction exacte de la trombe marine naturelle. lumière : un ventilateur A (fig. 2) terminé par une buse plate B, produit une nappe horizontale d’air animée d’une vitesse assez grande. Au-dessous de cette nappe aérienne on place un bassin renfer- mant de l’eau chauffée et émetlant quelques va- peurs ; on voit alors, à chaque instant, se dessiner entre la surface de l'eau et la nappe d'air une trombe GC identique à celles que donnaient les tourniquels de mes précédentes expériences el pré- sentant exactement les mêmes caractères. Le mou- Si donc, nous revenons à ce qui se passe dans la Nature, et à la disposition de la figure 4, nous pourrons voir qu'un courant d'air supérieur pro- duira des tourbillons, lesquels, suivant les cir- constances ou suivant les proportions qu'aura prises le phénomène, enlèveront du sol en pa- naches tourbillionnaires des poussières, du sable ou autres matières, ou feront descendre du nuage un fuseau nébuleux ayant sa pointe tournée vers la terre. Ch. Weyher. REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE L'ensemble des ouvrages, mémoires ou notes publiés dans le cours d'une année peut assez bien être comparé à un taillis où parmi les jeunes pousses se distinguent quelques formations plus vigou- reuses ou d'essence plus rare. Dans ce laillis, on pourrait dire, parfois, dans cette broussaille, la Revue Générale des Sciences a déjà fait un choix pour ses lecteurs, et les principales publications des bio- logistes ontété plus ou moins longuement analysées au fur à mesure de leur apparition. 11 m'est donc permis de restreindre cet article à un petit nombre de questions et je les choisirai parmi celles qui paraissent plus spécialement préoccuper les zoolo- gistes ou qui semblent, par l'importance des sujets qu’elles touchent, devoir, dans l’avenir, susciter de nombreuses recherches. Nous suivrons dans le dé- veloppement de cet exposé les lois générales de l'évolution, c’est-à-dire que, nous arrêtant d’abord aux travaux relatifs à la cellule et à l'œuf, nous passerons ensuite aux faits qui intéressent les êtres adultes dans la série animale. I Les recherches sur la morphologie et la biologie de la cellule et de ses parties composantes se mulliplient et, grâce aux progrès réalisés dans la D' H. BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 333 technique, d’intéressants résultats peuvent être en- registrés chaque année. On sait que le noyau cellulaire renferme un filament chromatique pelotonné sur lui-même. Dans la phase qui précède la division indirecte (division karyokinétique), ce filament parait se di- viser en segments. Or les auteurs ne sont pas fixés sur le point de savoir si en réalité il existe un seul filament dans le noyau à l’état de repos ou si, au contraire, des filaments nombreux préexistent que leur enchevêtrement ne permet pas de discerner. Rabl et Waldeyer inclinent vers cette dernière in- terprétation et plus récemment Van Gehuchten s’est rangé à cette opinion après avoir observé des tronçons nucléaires distincts dans les cellules des glandes annexes du tube intestinal de la larve de Ptycoptera contaminater. M. Balbiani apporte à celte manière de voir un nouvel argument, Liré de l'étude morphologique du noyau du Zorophyllum meleayris. Chez cet infu- soire le noyau est #oniliforme. C'est une sorte de chapelet formé d'articles nombreux, pouvant s'élever à 20 et plus, unis par de courts prolonge- ments de la membrane d'enveloppe étirée entre chacun d'eux. Ces multiples articles représentent done bien un seul noyau et le doute ne saurait tenir devant cette observation que l'unité du noyau se réalise à chaque époque de division, tous les articles se fusionnant alors en un noyau sphé- rique simple. Or chacun de ces articles renferme un filament nucléaire que M. Balbiani a mis en évidence. Quand les articles s'unissent en un noyau simple, ce noyau renferme donc un nombre égal de filaments distincts. Le Lorophyllum fournit par suite un exemple très clair tendant à démon- trer la pluralité primitive des filaments nucléaires dans le noyau. Ces études de morphologie cellulaire sont fort | délicates; mais elles ont une importance extrême et doivent être poussées aussi loin que possible, si l’on veut arriver à porter quelque lumière au mi- lieu de l'obscurité qui entoure encore les phéno- mènes de la vie des cellules. IL suffit pour s'en con- vaincre de remarquer que malgré les nombreuses et patientes recherches auxquelles se sont livrés les observateurs les plus sagaces, dans le cours de ces dix dernières années, on n’est pas encore par- venu à élucider d’une façon complètement satisfai- sante l’un des principaux phénomènes de la biolo- gie cellulaire, la division nucléaire. Toutefois l’année 1890, à ce point de vue, n'est pas stérile et nous allons essayer de retracer rapidement l'état de la question pour montrer jusqu'où elle a été conduite. Les premiers observateurs qui se sont occupés de la division du noyau n'avaient pu se rendre qu'imparfailement compte des causes détermi- minantes de celte division; sauf toutefois que M. H. Kol, dès 1873, avait reconnu l'existence de deux centres d'attraction extranueléaires, dans la cellule. Mais, comme il arrive parfois, M. Folne fut pas compris !. Plus récemment M. Ed. Van Bene- den, chez l’Ascaris megalocephalæ, a attiré l'attention sur un élément particulier de la cellule, qu'il a appelé «Sphère attractive ». Cet élément fait partie intégrante de la cellule ; il accompagne le noyau au repos. Il est formé d’un « corpuscule central » enveloppé d'une sphère de protoplasma, C’est l'a- gent actif de la division cellulaire. En effet, avant la division du noyau on voit le « corpuseule central » se diviser en deux, puis aussi la sphère protoplas- mique qui l'enveloppe. Il se produit ainsi deux sphères attractives; celles-ci se portent aux pôles opposés du noyau et chacune d'elles devient le cenire d’atlraction d'une moitié de la substance nucléaire. M. Boveri confirma ces résultats; il ap- pela le corpuscule central «centrosome » et la sphère protoplasmique «archoplasma ». Ces termes ont été adoptés. Bientôt M. Vialleton dans l'étude du développement de la Seiche, M. Garnault chez l’Helix aspersa, et M. Vejdowski chez divers Inver- tébrés retrouvèrent la sphère attractive. Puis M. Rabl et M. Külliker la décrivirent chez les Am- phibiens ;enfin M. Henneguy, en 1890, l'observa dans les cellules embryonnaires de la Truite. Mais tan- dis que les précédents investigateurs ne déceri- vaient qu'une seule sphère attractive à côté du noyau, sphère dont la.division précédait la divi- sion nucléaire eten était comme la première phase, M. Henneguy insiste sur l'existence, chez la truite, pour chaque noyau, de deux sphères attractives ayant chacune son centrosome. « Dans toutes les cellules, dit M. Henneguy, j'ai toujours observé deux sphères attractives placées en général vis-à- vis de chaque extrémité du grand axe du noyau. Chaque sphère est formée par une petite masse de protoplasma très finement granuleux, renfermant en son centre un amas de granulalions plus grosses et ayant pour les matières colorantes plus d’afi- nité que le reste du protoplasma; cet amas central constitue le centrosome. Autour de la sphère at- tractive, le protoplasma cellulaire présente une disposition rayonnée très nette... ». Cette observa- tion de M. Henneguy a été depuis lors appuyée par les résultats auxquels est arrivé M. Flemming, en étudiant l'épithélium pulmonaire et l’endothélium périltonéal de la Salamandre, résultats qui concor- dent d’ailleursaveclesobservations de M. Fol. Elle a reçu enfin une dernière consécration des recherches de M. Guignard sur les cellules végétales. M. Gui- 1 Voir C. R. Ac. des Sc., 21 avril 1890, 334 D' H. BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE gnard est parvenu en effet à démontrer, chez les Phanérogames et les Cryptogames la présence pour chaque noyau de deux sphères attractives qu'il pro- pose de désigner du nom de « sphères directrices ». «Dans la cellule dont le noyau est à l’état derepos, dit cet auteur, on aperçoit au contact du noyau, et situées l'une à côté de l’autre, deux très petites sphères représentées par un corpuscule central ou centrosome entouré d’une auréole transparente au- tour de laquelle se trouve un cercle granuleux.….. Au moment dela division nucléaire les deux sphères s’écartent l’une de l’autre pour aller se placer en deux points opposés correspondant aux pôles du fuseau futur. Lorsque les deux moitiés de la plaque nucléaire se sont séparées à l'équateur du fuseau et qu’elles se transportent aux pôles, le cen- trosome se dédouble dans chaque sphère en deux nouveaux centrosomes qui sont l'origine, à chaque pôle, de deux nouvelles sphères attractives... Je suis done porté à croire, ajoute M. Guignard, que, même dans l’état de repos complet, chaque noyau est déjà accompagné de deux sphères attractives. » Quoi qu'il en soit, l'observation de M. Guignard a une importance considérable en ce sens qu'elle établit la généralisation d'un fait qui, s’il avait été particulier aux animaux, n'aurait pu légitimement avoir la portée fonctionnelle qu'on lui assignait. Comment admettre en effet le rôle directeur des sphères attractives dansla division karyokinétique du noyau des cellules animales, si ces sphères at- tractives avaient fait défaut aux cellules végétales chez lesquelles la division‘du noyau s'opère d'une façon toute semblable? Voilà donc un grand pas fait vers la solution d’un problème des plus difi- ciles. Il est incontestable aujourd’hui que c’est dans le protoplasma et dans des parties définies du protoplasma que siège le point de départ de la division nucléaire et consécutivement de la division de la cellule. Reste à savoir par quel mécanisme s'opère cette division.et quels sont les phénomènes intimes qui la déterminent. Les opinions à cet égard sont très peu précises et c’est évidemment sur ce point que vont dorénavant porter les efforts de tous les biologistes, IT Les caractères morphologiques que nous venons d’esquisser brièvement dans la cellule avant el pendant la division nucléaire se retrouvent aussi dans l'œuf. M. H. Fol vient d’en donner la preuve pour l'œuf des Échinodermes. Toutefois dans l'œuf le pronueléus femelle serait accompagné d'une seule sphère attractive, et c’est le pronucléus mâle qui apporterait avec lui la seconde sphère attractive. Ce n’est pas tout. Lorsque les deux pronucléus, mâle et femelle, se sont unis, on voit les deux sphères attractives se diviser chacune en deux. Il résulte de là 4 centres (2 spermocentres et 2 ovo- centres) qui,se rapprochant 2 à 2, forment ce que l’auteur appelle le quadrille. Bientôt, de part et d'autre, un spermocentre s’unit à l’ovocentre corres- pondant, de telle sorte qu'on a finalement deux sphères attractives qui deviennent les directrices de la segmentation. En somme, conclut M. H. Fol : «1° La fécondation consiste non seulement dans l'addition des deux demi-noyaux provenant d’in- dividus de sexes différents, mais encore dans la fusion deux à deux de 4 demi-centres provenant les uns du père, les autres de la mère. 2° Tous les astrocentres (sphères attractives) du descendant étant dérivés par divisions successives des astrocentres primilifs, se trouvent provenir à la fois et par parties égales du père et de la mère. » Cette manière de voir, relativement au processus de division, concorde donc, en dehors du nombre des sphères attractives primitives pour chaque pronucléus, avec ce qui a élé généralement établi pour la division indirecte des cellules ordinaires. Elle s’écarte, par contre, beaucoup des vues d’ail- leurs hypothétiques de M. Boveri. Suivant cet auteur, en effet, il n'y aurait pas de centrosome dans l'œuf, mais seulement un archoplasma; c’est le spermatozoïde qui, arrivant accompagné d’un centrosome sans archoplasma, fournirait à l'œuf le complément nécessaire à la constitution d’une sphère attractive entière destinée à diriger la seg- mentation. Pour M. Garnaut (chez Aélix et Arion), rien de tout cela n'existe. C’est seulement lorsque pronucléus mâle et pronucléus femelle sont en contact que l'on voit apparaître séparément les deux figures caractéristiques de la présence des sphères attractives. Il n’en existerait, au début, ni dans le voisinage du pronucléus mâle, ni dans le voisinage du pronueléus femelle. La question, pour avancée qu'elle paraïisse, né- cessile, on en conviendra, d’amples recherches avant d’être complètement élucidée. Il restera à étudier tout spécialement, en présence des données nouvelles, comment les choses se passent dans les cas de parthénogénèse. M. Boveri, dans sa théorie, s’en tire en admettant que l'œuf n’est privé de centrosome que par la régression de celui-ci après la séparation du second globule polaire. Cette ré- gression n'aurait pas lieu dans les œufs capables de développement sans fécondation. Si, d’autre part, l'opinion de-M. H. Fol est justifiée, puisque toutes les sphères attractives d'un descendant se trouvent « provenir à la fois, et par parties égales, du père et de la mère », il doit en être ainsi de la D' H. BEAUREGARD, — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 339 sphère attractive qui accompagne le pronucléus femelle. Elle pourrait dès lors, dans des cas parti- culiers, suffire à déterminer la division de ce pro- nucléus en même temps qu'à imprimer à l’en- semble des caractères héréditaires. Nous n'abandonnerons pas la question si com- plexe des premiers élats de l'œuf sans dire quel- ques mots d’une très intéressante note de M. Giard sur « les globules polaires et les homologues de ces éléments chez les Infusoires ciliés ». On sait que M. Giard dès 1877, au cours de ses études sur l'embryogénie des Echinodermes el des Mollusques nudibranches a été amené à considérer la forma- lion des globules polaires comme un phénomène de division cellulaire indirecte, distinet seule- ment des divisions ordinaires par l'inégalité très grande des produits de la division. Il proposa donc d’appelerles globules polaires, «cellules polaires », et l’on est à peu près généralement d'accord au- jourd’hui pour admettre cette manière de voir. M. Giard, cherchant à expliquer la signification de ces phénomènes, avait suggéré que cette division de la cellule aboutissant à la formation des glo- bules polaires pouvait être considérée comme une reproduction du stade protozoaire dans l’évo- lution du métazoaire. M. Maupas, dans ses belles recherches sur les Infusoires ciliés que nous avons signalées l’an der- nier, opposait à cette interprétation que les Ciliés, qui sont des Protozoaires, émettent eux aussi des globules polairesidentiques à ceux des Métazoaires et que dès lors le soi-disant stade protozoaire de la théorie de M. Giard ne pouvait se défendre. M. Giard répond à cela que les Ciliés sont des Protozoaires très élevés, que leur organisme pluri- nucléaire permet de rapprocher très sensiblement des êtres pluricellulaires, surtout en ce qui concerne la production des globules polaires puisque ce phénomène, ainsi que M. Maupas le reconnait lui- même, est purementnucléaire. Les Ciliés ne doivent donc pas être considérés comme des Protozoaires types, et cé n’est pas à ces formes supérieures que M. Giard faisaitallusion. Il faut lesregarder comme un rameau collatéral et non comme la souche des Métazoaires. L'auteur passe alors à un essai d'homologation des diverses phases de la karyogamie chez les Ciliés, telles que M. Maupas les a décrites, avec celles qui caractérisent la reproduction sexuée des Métazoaires. Il nous serait bien difficile, dans un article de revue, d'entrer dans les détails que com- porte cette intéressante discussion. Nous les résu- merons donc en deux mots. L'homologation est impossible si l’on admet les interprétations de M. Maupas qui homologue avec la vésicule germinative des Mélazoaires le ou les micronucléus qu'on voit, chez les Ciliés, près du macronucléus au cours de la vie végétative de ces animaux. Mais M. Giard fait observer, très logique- mentsemble-{-il, qu'une telle homologation revient à admettre que ce sont les ovules et les sperma- tozoïdes que l’on trouve dans les glandes génitales des Mélazoaires pendant la période de repos sexuel. C'est commettre une erreur certaine. M. Giard propose donc de rechercher une base solide d’ho- mologation et elle existe, dit-il, dans le second globule polaire qu'on peut toujours reconnaitre sans hésitation parce qu'il est le noyau frère du noyau de conjugaison. M. Giard montre alors qu’en adoptant ce point de départ, les phénomènes ob- servés chez les Ciliés par M. Maupas concordent très exactement avec ceux que l’on connait chez les Métazoaires. III Panmixia! Panmixia ! Panmixia ! Ce mot à allures énigmatiques se retrouve presque à chaque page dans les revues scientifi- ques anglaises, un peu comme on voit sur les murs ces affiches où des lettres assemblées bizarrement appellent l'attention des badauds. Un jour, le bar- num donne l'explication des hiéroglyphes et l'on est tout étonné de ne rien apprendre de bien neuf. Panmixia est synonyme de « cessation de sélec- tion ». C'est au moins l’avis de M. Romanes, et nous lui devons une certaine reconnaissance pour avoir bien voulu donner l’explication de ce rébus scientifique. Quant à la doctrine qu'on a affublée de ce beau nom, elle a été développée par Weismann dans sa théorie de l’hérédité, mais d’après M. Ray Lankester elle ne serait pas nouvelle et cela au grand désespoir de M. Romanes, qui croyait bien l'avoir découverte le premier. M. Romanes en avait eu l'idée, dit-il, peu de temps après l’apparition de la dernière édition de l’Origine des espèces de Darwin; et M. Ray Lankester prouve, textes en mains, qu’elle se trouve dans le susdit ouvrage de Darwin, mais avec des développements et des con- sidérations qui la réduisent à sa juste valeur. Mais je m'aperçois que j'ai l’air de vouloir intri- guer le lecteur et qu'il serait temps que j'indique, en quelques mots au moins, quelle est cette doc- trine qui fait tant de bruit pour si peu de besogne. Cette doctrine avait pour but, dans l'esprit de Weismann, de faire échec au principe d’'hérédité établi en ces termes par Lamarck : «Tout ce que la nature a fait acquérir ou perdre aux individus par l'influence des circonstances où leur race se trouve depuis longtemps exposée, et par consé- quent, par l'influence de l'emploi prédominant de tel organe ou par celle d’un défaut constant d'usage de telle partie, elle le conserve par la génération aux 330 D' H. BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE nouveaux individus qui en proviennent, et.qui, par suile, se trouvent immédiatement mieux adaptés que leurs ancêtres, si les conditions d'existence n'ont pas changé. » Or,d’aprèsladoctrine du Panmixia, leschosessont tout autrement. Quand en raison des changements des condilions d'existence un organe cesse d'être en usage pendant un certain temps, il cesse par cela même d’être l’objet de la sélection naturelle. Il y à « cessation de sélection. » Alors l'organe esl soumis à toutes les variations possibles en plus ou en moins. D'après M. Weismann cet état de varia- tion mène à la diminution, puis à la disparition définitive de l'organe. D’après M. Romanes la « cessation de sélection » amènerait seulement une diminution de taille de l'organe, diminution con- sidérable il est vrai, mais non complète, l'auteur faisant la part de la force d’hérédité qui transmet la variation. M. Ray Lankester fait remarquer que Darwin n'avait pas manqué de prendre en considération la cessation possible de la sélection. « La sélection naturelle, dit Darwin, n’a pas d'action sur les or- ganes rudimentaires, ces organes étant inutiles, et par conséquent ils sont variables. » Mais il avait eu le soin de tenir compte en même temps d’un facteur important, celui de « l'économie de croissance » développéantérieurementparGœæthe et par Geoffroy- Saint-Hilaire : « Si une conformation utile, écrit Darwin, devient moins utile dans de nouvellescondi- lions d'existence, la diminution de cette conforma- tion s’ensuivra certainement, carilsera avantageux à l'individu de ne pas gaspiller de la nourriture au profit d’une conformation utile. » Tout cela prouve que les théories en question n’ont pas le mérite de la nouveauté et que les z00- logistes actuels semblent les avoir examinées avec moins de soin et d'attention que ne l'avait fait Darwin. Pour ce qui est del’hérédité descaractères acquis, deux camps opposés existent actuellement. D'un côté avec MM. Weismann et Wallace, M, His el M. F. Galton nient la transmission des caractères somatogéniques, c'est-à-dire de ceux qui relèvent des causes accidentelles, du milieu, du climat, de l'alimentation, etc. Ils n'admettent d’autres caractères héréditaires que ceux que Weismann qualifie de blastogéniques, qui proviennent de modifications du plasma ger- minatif spontanées, assez sensibles pour déter- miner des variations dans l'organisme. D'un autre côté MM. H. Spencer, W. Turner, Giard et l'École américaine défendent la théorie de Lamarck, c'est-à-dire l'hérédité des caractères acquis. M. Ryder est d'avis que Lamarek et Darwin ont, à la vérité, donné bien peu d'exemples propres à soutenir la théorie de l’hérédité des caractères acquis; mais celle pauvreté de preuves résulte de ce que la science n'avait pas encore fait les progrès qu'elle à accomplis aujourd’hui. En tous cas les expériences de mulilations de Weismann qui coupe la queue à des générations successives de souris ne sauraient être prises en considération contre la théorie de Lamarck, car le fait de non hérédilé d’une telle mutilation n'a aucune valeur relativement au problème des effets de l'usage ou du non-usage des organes. C’est également ce qu'objecte M. Turner. Ce n’est pas, dit cet auteur, dans les faits de mutilation subie par un individu qu'il faut chercher des preuves de transmission héréditaire, mais bien dans les « phénomènes déli- cats qui affectent l’organisme vivant ». D'ailleurs les exemples d'hérédité de lésions accidentelles ne manquent pas, comme le veut faire croire M. Weissmann. Il y a longtemps que M. Brown Séquard a fait connaitre de nombreux cas tout à fait caractéristiques de la transmission de diverseslésions : exophthalmie chez Ces descen- dants de cobayes ayant eu cette protrusion de l'œil aprèsune lésion du bulbe rachidien ; absence de pha- langes ou d’orteilsentiers à l’une des pattes posté- rieures chez des descendants de cobayes ayant perdu ces orteils accidentellement à la suite de la section du nerf sciatique; lésion d’un œil ou même des deux yeux chez des cobayes provenant de parents ayant eu un œil altéré à la suite d’une sec- tion transverse du corps resliforme, ete. L’exis- tence de certaines de ces altérations aélé constatée jusqu’à la cinquième el même la sixième généra- lion. On conviendra après cela que les expériences de M. Weismann sur la mutilation des queues de souris ne peuvent rien prouver et, comme le fait remarquer M. Giard, qui rappelle ces faits et les oppose aux expériences de M. Weismann, il parait évident qu'on n'a pas assez porté l'attention sur le retentissement que certaines lésions somatogènes peuvent avoir sur l'organisme modifié et par suite sur sa descendance. F M. Ryder, dans une note sur les «effets de l’u- sage habituel dans les modifications de l'organisme animal », apporte de nouveaux arguments en faveur de cette partie de la question qui consiste à déter- miner l'action directe des influences extérieures sur les modifications que subit l'organisme. Il tire ces arguments de l'examen du mode de dévelop- pement de la colonne vertébrale dans la série des Verlébrés et des caractères morphologiques des Vertébrésen rapportavecles mouvements deflexion du corps déterminés par les muscles pendant la lo- comotion. Il insiste plus particulièrement sur la structure des nageoires des Poissons. Il montre que le fonctionnement des rayons mous de ces na- D' H. BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 337 geoires affecte des dispositions évidemment corré- latives des exigences de l'usage de ces organes. Ce seraient, suivant M. Ryder, en dehors de toute considération d'hérédité, des preuves directes et très probantes des effets de l'usage des parties. IV Parmi les études anatomiques relatives aux ani- maux adultes, nous signalerons les recherches de Pelseneer sur l’epipodium des Mollusques et la ré- ponse de M. Lacaze-Duthiers. Un débat s’est élevé au sujet de l’innervation du pied de certains mol- lusques et M. de Lacaze-Duthiers en pose ainsi les termes : « Il s’agit de décider s’il est vrai que dans l'Haliotide, la Fissurelle etles Troques, le gros cor- don nerveux, courant sur le dos de la lame pé- dieuse et qui fournit deux ordres de nerfs, les uns postérieurs, les autres antérieurs, est un seul et même organe, ou bien s'il répond à deux parties différentes du système nerveux central juxtaposées, soudées et innervant des organes qui par cela même seraient distincts. » M. de Lacaze-Duthiers et avec lui M. Boutan soutiennent la seconde opi- nion et voient dans, l’épipodium une dépendance du manteau et par suite un organe distinct dupied. M. Pelseneer et avec lui M. Bela Haller admettent la première opinion et considèrent l’épipodium comme partie intégrante du pied. M. Pelsencer fonde son opinion sur ce que la méthode des coupes qu'il a employée ne lui a permis de déce- ler l'existence d'aucune trace de lame conjonc- tive entre les deux bandeleltes dorsale et ven- trale du cordon pédieux. M. de Lacaze-Duthiers soutient de son côlé qu'il n’es{ pas nécessaire, pour que deux organes rapprochés soient distinets, qu’ils soient séparés par une membrane d’un tissu diffé- rent, et que le guide le plus sûr en pareille occur- rence n’est pas dans la technique des coupes, mais bien dans l’étude morphologique précise et le re- cours au principe des connexions. Le débat se ré- sume en somme dans une question de méthode d'investigation et pour notre part nous tenons pour bonne, avec M.de Lacaze-Duthiers, celle qui met en œuvre à la fois les dissections fines et les coupes en série, contre celle qui met toute sa confiance dans l’unique étude des coupes. Un événement d’une certaine importance mérite d’être signalé au point de vue purement zoologique. Je veux parler de l’échouement d'un Cachalot qui a eu lieu sur la côte Ouest de l’île de Ré à la fin de janvier 1890. Les apparitions de ce grand Cétacé sur nos plages sont assez rares pour qu'un pareil fait mérite une mention spéciale. J’ajouterai que celte circonstance a été pour M. le Professeur Pou- chet et pour moi-même l’occasion de fixer certains points encore mal connus de l'anatomie de cette espèce. Le bassin des Cétodontes avait été décrit Jusqu'à ce jour comme ne comprenant de chaque côté qu'un seul os, alors que chez la plupart des Mysticèles on compte deux ou même trois os à droite et à gauche de la colonne vertébrale. Le squelette de l’île de Ré nous a présenté trois os de chaque côté comme chez les vraies Baleines. Les ischions très asymétriques sont de forme triangu- laire. D'ailleurs il semble que cette conformation de l’ischion du Cachalot n’est pas constante et nous avons pu reconnaitre soit parmi les squelettes con- servés au Cabinet d'Anatomie comparée du Muséum, soit parmi les spécimens décrits par les auteurs, quatre formes assez sensiblement différentes. Pour terminer cet article déjà long, j'appellerai l'attention sur un fait qui a produit une vive émo- tion parmi les zoologistes des deux mondes; je veux parler de l'extinction du Bison d'Amérique. On doit à M. Hornaday une très intéressante his- toire de cette fatale disparition amenée tant par l'extension de la civilisation et la construction de chemins de fer dans les zones primitivement ré- servées aux bisons et aux Indiens, qu’à l’insou- ciance et à l'impéritie qui ont présidé à la destruc- tion de l'animal dans un but commercial. En 1869, il existait encore plusieurs millions de têtes de cette espèce sauvage qui occupait plus du tiers du continent Nord-Américain. Mais à cette époque l'achèvement du chemin de fer du Paci- fique porta un coup fatal àson existence en divisant en deux zones, une septentrionale et une méridio- nale, l’aire qu'occupait le bison. En 1886, le mal était déjà si manifeste que la Smilhsonian Institu- tion organisa une expédition afin de recueillir des spécimens de la race sauvage pour en doter les collections. On n'apprendra pas sans satisfaction que M. le Professeur Pouchet a pu obtenir pour le Cabinet d’Analomie comparée du Muséum un de ces intéressants représentants d'une race qui est appelée à disparaitre avant peu. Au l°" janvier 1889 il n'existait plus en effet aux États-Unis que 85 bi sons sauvages auxquels il convient toutefois d’a- jouter 200 individus protégés par le Gouvernement et réfugiés dans le pare national de Sellewstone. D' H. Beauregard, Professeur agrégé à l'École Supérieure de Pharmacie, Aide naturaliste au Muséum. 338 _ BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Bourlet (C.). — Sur les équations aux dérivées partielles simultanées qui contiennent plusieurs fonctions inconnues. Thèse de doctorat de la Facul- té des Sciences de Paris. Gauthier-Villars et fils, 59, quai des Grands-Augustins, avril 1891. Cauchy est le premier qui démontra d’une manière rigoureuse l’existence des intégrales dans les équations différentielles, en précisant la notion d’intégrale géné- rale. Un petit nombre d'auteurs se sont occupés depuis des systèmes d'équations auxdérivées partielles simultanées entre plusieurs fonctions inconnues. Les travaux de Bouquet et de M. Mayer sur les équations aux différentielles totales, ceux de M. Darboux et de Mme Kowalevski sur les systèmes d'équations aux déri- vées partielles sont bien connus de tous les géomètres et sont actuellement classiques. Après Mme Kowalevski, M. Künig a donné un type général d'équations simul- tanées qui comprend tous les types étudiés antérieure- ment et pour lequel il démontre l’existence des inté- grales, Enfin, MM. Méray et Riquier ont considéré des systèmes d'équations simultanées pris sousune certaine forme, pour lesquels ils établissent également l’exis- tence des intégrales en précisant leur degré de géné- ralité. Ajoutons que l'étude des cas exceptionnels dans lesquels les théorèmes de Cauchy cessent d’être appli- cables à fait le principal sujet de la thèse de M. Poin- caré. M. Bourlet commence son étude par les systèmes dont les intégrales générales dépendent dun nombre fini de constantes arbitraires ; 1 donne, d'après M. Lie, mais en suivant une autre voie que ce savant, les con- ditions nécessaires etsuffisantes pour que cette circons- tance soit réalisée. Il s'occupe ensuite des systèmes d'équations simulta- nées linéaires du premier ordre les plus généraux; et, tout d’abord, il montre que tout système de ce genre peut être mis sous une forme spéciale, qu'il nomme forme canonique, et qu'il prend comme point de départ de fous ses raisonnements, L'introduction de cette forme canonique est d’une réelle importance; elle per- met en effet à M. Bourlet d'éviter les cas exceptionnels qui se présentent dans les théories de Mme Kowalevski, de M. Kônig et dans les théories plus récentes de MM. Méray et Riquier, cas exceptionnels provenant de ce que ces auteurs supposent à leurs équations une certaine forme assurément fort générale et réalisable dans la plupart des cas, mais impossible dans des cas particuliers, C’est ce que montre M. Bourlet sur un exemple dans lequel les équations ne peuvent, par aucun changement de variables, se mettre sous la for- me que leur suppose Mme Kowalevski, La question de savoir si un changement de fonctions ne conduirait pas à cette forme n’est pas traitée : M. Bourlet pour- ra y revenir, Lorsque les équations mises sous forme canonique sont complètement intégrables, le système admet des intégrales générales dont le degré de généra- lité peut être parfaitement précisé, ; La troisième partie de la thèse est consacrée à l'étude des systèmes quelconques : l’auteur établit la conver- gence des séries qui donnent les intégrales, les coeffi- cients étantcalculés à l’aide des équations du système. Le degré de généralité des intégrales générales n’est précisé que si l’on peut ramener le système aux deux cas suivânts déjà étudiés dans les deux premières par- ties : {° les intégrales générales dépendant d’un nombre fini de constantes arbitraires ; 2° le système proposé ET INDEX peut être ramené à un système linéaire canonique complètement intégrable, Les différentes théories développées par M. Bourlet sont accompagnées d'exemples bien choisis mettant en évidence les diverses circonstances qui peuvent se présenter. La thèse de M. Bourlet fait faire un réel progrès à la théorie difficile des systèmes d'équations aux dérivées partielles, grâce surtout à l'introduction d’une forme canonique existant toujours et fournissant une base certaine à toute la théorie. Il serait du plus haut intérêt de trouver en outre une forme canonique qui fût complètement intégrable; mais il paraît impossible d'affirmer actuellement qu'une telle forme existe tou- jours. P. APPELL. Frenet, — Recueil d'exercices sur le calcul infini- tésimal, 5° édition augmentée d'un Appendice par M. H. Laurent, examinateur d'admission à l'Ecole Poly- technique (8 fr.). Gauthier-Villars et fils, 55, quai des Grands-Augustins, 1891. L'ouvrage de M. Frenet est bien connu; depuis près de quarante ans il a été Le recueil classique que tous les candidats à la licence ont apprécié ; la 5° édition qui vient de paraître ne pourra qu’en augmenter la vogue, car M. H, Laurent l’a complétée par un appendice fort important et d’une réelle valeur scientifique, Cet appendice relatif aux résidus, aux fonctions ellip- tiques, aux équations aux dérivées partielles, aux équations aux différentielles totales, contient de nom- breux exercices bien choisis pour éclairer ces difficiles questions et en faire comprendre la portée ; il rendra de grands services à tous ceux qui étudient cette branche si intéressante de l'Analyse, - L. O. Mouret (Georges). — Force et masse. Revue philoso- phique de la France et de l'Etranger. Janvier 1891, « Une science n’est complète, elle n’estscience, que si l’on est en mesure de rétablir, sous chaque résultat symbolique, le fait concret représenté, quelque com- pliqué qu'il soit ; il faut, par suite, que les notions qui servent de point de départ soient bien fixées, et ne restent point dans un vague recherché par le littéra- teur, accepté par l’homme pratique, mais que le logi- cien et le philosophe ne peuvent admettre, » Cette phrase de l’article de M. Mouret en définit très nettement le but, en même temps qu'elle en donne la raison d'être. L'auteur fait remarquer que l’on peut très bien raisonner d’une facon exacte, sans avoir une conception parfaitement nette des notions qui servent de données, et il se place au point de vue, non de la science pratique, mais de la philosophie scienti- fique. Les observations qu'il présente sont, en outre, très importantes au point de vue de l’enseignement, ILest probable, eneffet, qu'enintroduisant les sciences physiques dans l’enseignement secondaire, on s’est pro- posé plutôt de donner une série d'exemples de raison- nements par induction, que d'apprendre aux élèves la formule des miroirs sphériques, ou d’autres résultats analogues. Pour que ce but soit atteint, il faut que les notions ou concepts soient présentés dans une suite logique, en partant des plus simples pour arriver aux plus complexes, F4 M. Mouret fait tout d'abord remarquer la nécessité qu'il y a de séparerles concepts en deux classes : 1°]es concepts psychologiques, qui dérivent directement des sensations et ne sont pas susceptibles de mesure ; (chaleur, son, couleur, etc..….); 2° les concepts logiques slt Lt à BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 339 formés par une combinaison d'espace et de temps, ou de ces deux concepts réunis, La confusion entre ces deux classes de concepts est très fréquente : c’est ainsi qu'on trouve, dans certains ouvrages, que la tempéra- ture ne se définit pas ; si cependant elle dérivait di- rectement d’une sensation, elle ne serait pas suscep- tible de mesure. Il y à ici confusion entre le concept psychologique de chaleur et le concept logique de température. L'étude des concepts logiques rentre seule dans les sciences physiques ; c’est dans cette classe qu'il faut chercher l’enchainement logique des faits, dans l’ordre de l’abstrait au concret. M. Mouret applique ces idées aux concepts fonda- mentaux de la mécanique, l’inertie, la masse, la force, en se placant plus particulièrement dans le cas du mouvement de translation. Il déduit immédiatement le concept d’inertie et celui de masse, du fait expéri- mental de la transmission de mouvement par conti- guité, En ce qui concerne la force, il fait remarquer que l’on doit considérer séparément la cause de mou- vement (puissance), non mesurable, et la force propre- ment dite, concept logique déduit de l’existence de l'équilibre. Enfin l’auteur insiste sur la distinction que l’on doit établir entre l'équilibre et le repos, distinc- tion dont les lecteurs de la Revue ont pu voir une ap- plication dans l’article de MM. Le Chatelier et Mouret sur « Les équilibres chimiques ». Cette étude, du plus haut intérêt, semble n'être que le commencement d’une série d'articles sur la philosophie des sciences. Georges CHARPY. 2° Sciences physiques. Fabre (C.). — Traité encyclopédique de photogra- phie.4vol. in-8° (48 fr; le vol. 1#fr.), Gauthier-Villars, Paris, 1889-1891. Un ouvrage complet sur la photographie, c’est-à-dire un livre en indiquant, non seulement l’état actuel, mais encore les transformations successives, n'existait pas en France, L’excellent traité de Davanne était, assuré- ment fort complet, mais il se bornait à indiquer sur- tout les procédés définitifs consacrés par l’expérience, laissant de côté les fâtonnements par lesquels on avait dù forcément passer. En Autriche, pourtant, le D' Eder dans son superbe «Au sführliches Handbuch der photographie » en 4 vo- lumes, eten Allemagne, M. Vogel, dans un ouvrage de même coupe, avaient donné l'exemple, Notre littéra- ture était, à ce point de vue, en retard, M. Fabre a eu l’'heureuse pensée de la mettre à la hauteur de celle de nos voisins. Disons tout de suite qu'il y a pleinement réussi. Son Traité encyclopédique de photographie comprend 4 volumes très simplement classifiés: le premier s'occupe du matériel photographique; le second des né- gatifs; le troisième des positifs ; le quatrième des agran- dissements et applications. Dans le tome premier sont minutieusement décrits les divers modèles de chambres, de pieds, d’obturateurs et d'objectifs. Une étude très soignée de ces derniers, de leurs propriétés optiques, de leurs éléments prin- cipaux, rend ce volume tout à fait intéressant, Au- jourd’hui, la photographie doit absolument sortir de la voie empirique pour entrer dans la voie rationnelle, et disons, à ce propos, que le livre tout entier de M. Fabre est scientifiquement écrit dans cet esprit. Des plans d'installation d’ateliers terminent ce volume. Dans le tome second sont exposés avec les plus grands détails tous les procédés négatifs : plaque daguerrienne, collodion, albumine, gélatine, pellicules diverses, ainsi que tous les révélateurs employés ou même essayés. À ce dernier point de vue ce volume présente une véritable mine de documents précieux, et l'on ne peut s'empêcher de songer à la somme énorme de travail qu'il a fallu dépenser pour amonceler ces matériaux, tous accompagnés d'indications bibliogra- phiques précises. Le tome troisième est construit de facon analogue, mais au point de vue des épreuves positives : à signaler le soin avec lequel sont exposés les procédés divers de tirage aux encres grasses qui, aujourd'hui, le disputent en perfection aux positifs oblenus par application. Enfin dans le quatrième ef dernier volume sont réunis les procédés d’agrandissement, et les applications scien- tifiques : photomicrographie et photographie du Ciel, avec un codicille, peut-être un peu court, relatif à la photographie des couleurs. On ne peut s'empêcher de regretter que l'ouvrage n'ait pasété terminé deux mois plustard : ilcontiendrait l’exposé de la géniale découverte de M. Lippmann, et il serait le seul Traité complet de photographie existant, car les travaux de l’'éminent professeur comblent la seule lacune qui restâät à combler dans l’art de Da- guerre, de Niepce, de Talbot. Mais tel qu’il est, ce livre constitue une œuvre essen- tellement utile ; il sera forcément entre les mains de tous ceux qui s'intéressent à la photographie et désirent la connaître à fond. L’exécution matérielle en est excel- lente ; deux sortes de textes, un gros pour les articles formant le Traité, un fin pour les documents encyelo- pédiques, ainsi que des tables minutieusement dressées facilitent les recherches. Bien des tentatives inutiles seront ainsi évitées, puisqu'on aura sous la main la nomenclature de celles déjà hasardées sans succès, Alphonse BerGrr. Revision des poids atomiques Meinecke (C.). —$Surle poids atomique du chrome. Liebig's Annalen, 261, 339 (18941). Seubert (K.). et Kobbé (K.). — Poids atomique du rhodium. Liebig's Annalen, 260. 314(1890). Seubert (K.). — Poids atomique de l’osmium. Lie- big's Annalen, 261. 257 (1891). Seubert (K.). — Sur les poids atomiques des mé- taux du groupe du platine. Liebig’s Annalen, 261, 972 (1891). Patridge (E. A). — Poids atomique du cadmium. American jou'nal of Sciences. Novembre 1890, p. 377, Clarke (F, W.). — Sur le calcul des poids atomi- ques. American Chemical Journal (1891), 13. 36. M. Meinecke a déterminé à nouveau le poids atomi- que du chrome par l’analyse du chromate d'argent. La moyenne d’une série de déterminations le conduit à : Cr — 51,94 entre les limites 52,00 et 51,90; unité O = 15,96 M. Seubert qui se consacre depuis plusieurs années à la révision des poids atomiques des métaux du groupe du platine, vient de publier deux nouvelles séries de résultats relatifs au rhodium et à l’osmium. Les recher- ches concernant le premier de ces éléments ont été faites en collaboration avec M. Kobbé; elles consistaient à analyser le chlorure de chloropurpuréorhodium Rh? (Az H3)10 CI6, ce qui a donné Rh — 102,7. Les travaux relatifs au poids atomique de l’osmium, exécutés par M. Seubert seul, ont pour base l’analyse des chlorures doubles d’osmium : K20s CIS et (Az H#)? Os CIS, On trouve ainsi : Os — 190,3. Unité O — 15,96. Ces deux nouvelles valeurs s’écartent considérable- ment des nombres admis jusqu’à présent : Os =- 195 à 198 et Rh — 104. On peut cependant accorder une grande confiance aux résultats de ces recherches ré- centes, car si l’on classe les éléments du groupe du platine par ordre de poids atomiques croissants, ils se trouvent rentrer dans les familles naturelles auxquelles ils doivent logiquement appartenir d’après l’ensemble de toutes leurs propriétés chimiques. C’est un point sur lequel M. Seubert attire tout particulièrement l’atten- tion : Ru—101,4 Rh=— 102,7 Pd—106,35 Ag—107,66 Os 1903002 NP —H0% 3, Au—196 L'ancienne valeur Os = 195 à 198 assignait une tout autre place à cet élément, 340 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX A enregistrer, enfin, une révision du poids atomique du cadmium due à M. Patridge. Le métal employé a été soigneusement purilié par distillation dans le vide et l'on a opéré ensuite par les trois méthodes suivantes : 1° Transformation de cadmium en oxyde, d'où Cd — 111,803. 2 Transformation du sulfate de cadmium en sulfure, d'où Cd — 111,797: 3° Transformation de l’oxalate en sulfure, d’où Cd — 111,805. Moyenne Cd — 111,802, Unité O — 16. M. Clarke, dont la compétence en pareille matière est bien connue, fait au sujet de ce travail quelques re- marques fort judicieuses, Ces observations n’enlèvent rien à la précision des expériences, mais font simple- ment ressortir la manière souvent défectueuse dont se calculent les résultats de déterminations de poids ato- miques : c'est ainsi que, par exemple, l'incertitude sur le poids atomique du cadmium dépend non seulement de l'unité choisie O0 — 16, mais aussi des erreurs sur les poids atomiques du carbone et du soufre. C’est pour- quoi M. Clarke propose d'utiliser les résultats de M. Patridge pour la détermination simultanée de ces poids atomiques eux-mêmes. Il établit ainsi un système de trois équalions à trois inconnues qui, résolues, donnent : Cd —111,785 C=—11,996 S— 32,000 La même manière de faire pourrait être appliquée avec avantage à un grand nombre de recherches dont les résultats se contrôleraient mutuellement, Priztppe A. Guyr. 3° Sciences naturelles. Genay (Paul). — De l'influence des engrais sur les récoltes. —- Annales agronomiques, tome XIV page 193, 1890. G. Masson, 120, boulevard Saint-(rer- main, Paris. Ce mémoire est le résumé des expériences que M, P. Genay a exécutées à la ferme de Bellevue (Meurthe-et- Moselle) et dans lesquelles il s’est proposé de déterminer les matières qu'il faut ajouter à un sol donné pour élever économiquement le rendement des plantes que la situation permet d'y cultiver. L'auteur rappelle d’abord que son exploitation est au pied des Vosges, sur un terrain silico-argileux ; le sous-sol est imperméable, ce qui a nécessité le drai- nage du domaine. Les diverses analyses faites par des agronomes très compétents ont révélé un sol assez riche en azote, maiscontenantpeu d'acide phosphorique, de potasse et de chaux. Les résultats obtenus étaient assez discordants, ce qui fait dire avec raison à M. P. Genay que ces différences doivent tenir aux modes analytiques suivis et qu'il serait désirable que les chi- mistes se missent d'acord pour unifier les méthodes Expérimentation directe, — Elle à porté sur les cul- tures du blé, de la pomme de terre et de la betterave fourragère, La culture du blé a exigé un chaulage préa- lable. C'est un blé de la Haute-Alsace, rouge et vigou- reux qui a donné les meilleures récoltes, à l'exclusion des variétés ordinairement renommées qui résistent mal au rude climat des Vosges. Des engrais employés, c’est le nitrate de soude, appliqué en couverture au printemps, qui aété supérieur; l’engrais completmême (nitrate, chlorure de potassium, superphosphate) lui est inférieur au point de vue pécuniaire; le mélange minéral (superphosphate et chlorure de potassium) a peu marque. La variété de pommes de {erre cultivée à Bellevue est la « magnum bonum ». Des divers engrais l'élément potassique a été économiquement le plus utile ; puis l'azote et l’acide phosphorique, Le fumier a été désa- vantageux, Ces résultats sont concordants avec ceux déjà constatés par d’autres agronomes, L'engrais de potasse dans un sol contenant cet élément en faible quantité, non seulement élève les récoltes de pommes de terre, mais fournit des tubereules plus riches en fécule, Pour la betterave, dont la culture est assez difficile sous le climat de la Lorraine, le nitrate de soude seul a été avantageux; les suppléments de récoltes, dus au mélange minéral et à l’engrais complet, n’ont pas payé les dépenses d'engrais. La betterave se con- duit donc dans les conditions comme le blé, Efficacité des engrais sur une Série de récoltes. — Une première expérience a été conduite pendant deux an- nées (1887-1888) sur des parcelles identiques, mais fu- mées avec de l’engrais complet duquel on avait retiré un de ses éléments, différent pour chaque parcelle, La plante cultivée a été la pomme de terre « magnum bonum ». C’est l’engrais complet qui a produit le meil- leur effet sur les deux récoltes successives ; viennent ensuite le chlorure de potassium, le nitrate et la scorie phosphoreuse. Une seconde expérience a duré 4 ans (1886-1889); outre l'effet des divers engrais sur une série de récoltes M. P, Genay a cherché la solution de divers points su- jets à controverse. En expérimentant sur les diverses plantes de grande culture, il à constaté notamment que les engrais chimiques bien combinés n’épuisent pas le sol, que l’engrais complet n’est pas inférieur au fumier, que le phosphatage du fumier n’est pas suivi d'effet utile, même dans un sol ayant besoin d'acide phosphorique, enfin que le phosphate minéral est in- férieur aux autres engrais phosphatés. Les expériences de Bellevue prouvent une fois de plus que les cultivateurs ne doivent pas s’en tenir seu- lement aux indications de l'analyse pour en déduire les besoins de leur sol ; ils ne peuvent les connaître qu’en procédant à des essais méthodiques ; c’est ce qu'a fait M. P. Genay; la Société nationale d'Agriculture l'a fort justement récompensé de ses travaux en lui décer- nant une grande médaille d’or. A. HÉBERT. Addendum. Thèse de M. Le Dantec. Dans notre dernier numéro (1), M. Dubief a rendu compte d’un travail de M. Le Dantec, qui constituait seulement la première partie de sa thèse, partie insérée aux Annales de l'Institut Pasteur, Les conclusions géné- rales de l’ensemble de cette thèse sont les suivantes : 19 Les Amibes et les Infusoires à tourbillon ingèrent indistinctement tous les grains solides en suspension dans l’eau, pourvu que les dimensions de ces grains soient convenables; la facilité de l’ingestion chez les ètres de ces deux groupes dépend de la tension super- ficielle au contact de leur protoplasma et de l’eau exté- rieure ; le tourbillon des Infusoires détermine, sur le protoplasma nu du fond de l’æsophage, une pression antagoniste de cette tension superficielle et facilite l’in- sestion en creusant plus profondément le tube décrit par Dujardin, — Les Infusoires capteurs, au contraire, choisissent leur nourriture, et n’ingèrent jamais seule une substance non nutritive. 2 Chez tous les Protozoaires étudiés, vivant librement dans l’eau, les corps solides ingérés ne sont jamais en contact direct avec le protoplasma, mais sont situés dans des vacuoles dont le contenu est toujours, au dé- but, une goutte de l’eau extérieure. Ces vacuoles, dont les parois sont constituées par la tension superficielle au contact du protoplasma et du liquide ingéré, sont le siège de modifications d'ordre chimique et d'ordre physique, L'alcalinité de leur contenu diminue peu à peu, et au bout d'un temps variable avec les espèces, cette alca- linité fait place à une acidité constatable soit expéri- mentalement au moyen du tournesol ou de l’alizarine sulfoconjuguée, soit par l'observation de la coloration brune que prend la chlorophylle ingérée ; etceci a tou- (4) Voyez la Revue du 45 mai 1891 t. II. p. 310. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 341 jours lieu, que le grain ingéré soit nutritif ou non, or- ganique ou inorganique. S re PME En même temps que cette sécrétion très générale d'acide, a lieu dans la vacuole une apparition de dias- tases, s'ajoutant à celles que contenait déjà l'eau in- gérée, et dont la présence se manifeste par la digestion de diverses substances : albuminoïdes, fécule de pomme de terre, diverses celluloses, etc... Par suite même de ces modifications chimiques, la tension superficielle et la réfrangibilité du liquide de la vacuole se rapprochent de celles du protoplasma ambiant. Chez les Amibes, par exemple, cette modifi- cation de tension superficielle est d’une grande impor- tance pour le sort de la vacuole, et rend plus ou moins facile par sa plus ou moins grande rapidité l’éjection des corps solides ingérés. 30 Une observation faite sur la digestion des Oscil- laires, montre que les conditions de diffusibilité dans la vacuole sont très particulières, ce qui permet d’expli- quer facilement la sécrétion d’acide qui y a lieu par un simple phénomène de dialyse au contact de Peau de la vacuole et du protoplasma; ce protoplasma contenant un ou plusieurs sels dont les acides sont naturellement plus difusibles que les bases, { Voici donc deux parties importantes de la nutrition des Protozoaires, saisir l’ingestion et la sécrétion d’a- cide dans les vacuoles, ramenées à des phénomènes physiques simples, tension superficielle et dialyse. 4° Sciences médicales. Nicaise (E.) — La grande chirurgie de Guy de Chauliac, chirurgien, maistre en médecine de l’Uni- versité de Montpellier, composée en l'an 1363 (28 francs). FE. Alcan, 108, boulevard Saint-Germain, Paris, 1890. Le livre de Guy de Chauliac, le plus complet qui ait été écrit sur la chirurgie jusqu’au xivt siècle, après avoir joui d’un grand et légitime succès, avoir eu jusqu'à soixante-neuf éditions, n’était plus guère con- sulté que par quelques chercheurs. M. Nicaise à pensé qu'il y avait lieu de sortir de l'oubli le livre de ce maitre, qui mérite le nom de fondateur de la chirurgie didactique. Par une collation minutieuse des textes, il a pu nous donner une version aussi exacte que possible de l’œuvre de Guy de Chauliac. Des notes nombreuses indiquent les variantes principales et donnent le texte latin original dans tous les cas où le sens de la phrase prête à des interprétations diverses. Dans une introduction de près de 200 pages, M. Nicaise passe en revue tous les auteurs et tous les livres qui sont cités par Guy de Chauliac, insistant sur les doctrines de Galien, qui régnaient à la fin du moyen àge. C’est une véritable étude, des plus com- plètes et des plus intéressantes, de la chirurgie au Moyen-Age. L'ouvrage se termine par une liste de tous les pro- duits de matière médicale employés au xiv° siècle, avec leur nom scientifique actuel, une histoire desins- truments de chirurgie employés à cette époque avec des figures, et enfin un glossaire des termes d'anato- mie, de pathologie, de vieux francais, de fout ce qui peut, en un mot, servir à guider et à éclairer la lecture des auteurs anciens. C’est là une œuvre considérable dont la place est assurée dans toutes les bibliothèques médicales, Ajou- tons, en terminant, que le livreest luxueusement édité, que des reproductions de miniatures provenant des manuscrits de Guy de Chauliac l'illustrent et que rien, au point de vue matériel, n’a été négligé pour en assurer le succès, De HExrt HARTMANN. Lépine (R.) —Sur la pathogénie dudiabète consé: cutif à l'extirpation du pancréas. Archives de mé- decine expérimentale, Paris, mars 1891, t. II, p. 222 M. Lépine conclut que l'existence d’un ferment gly- colytique chez le sujet sain, ainsi que sa diminution chez l'animal privé de pancréas (et chez l’homme dia- bétique) sont des faits parfaitement établis et au-dessus de toute contestation. Quant à l’hypothèse d’une hyperproduction de sucre chez le chien privé de pan- créas, elle ne paraît pas en rapport avec les résultats de l’observation. D' Henri HARTMANN. Julien (Alexis) — Aide-mémoire d'anatomie à l'usage des étudiants en médecine. 2° édition (3 fr..50.) O. Doin, éditeur, 8, place de POdéon, Paris, 1894. Série de tableaux donnant les insertions musculaires et ligamenteuses, les distributions vasculaires et ner- veuses, les trous et canaux de la base du crâne avec les organes qui les traversent, mémento qui est aux études anatomiques ce que les chronologies d'autrefois sont aux études historiques actuelles, D' HENRt HARTMANN. Arloing (D'), Professeur à la Faculté de Médecine de Lyon. — Les Virus. Unvol. in-8 de la Bibliothèque scientifique internationale avec 47 fiqures dans le texte, (6 fr.). Félix Alcan, éditeur, 108, boulevard Saint-Ger- main, Paris, 1891. L'auteur étudie dans ce livre diverses questions de grande importance qui, bien que relatives aux conditions de la virulence, n’ont guère été amplement traitées jusqu'à présent dans les manuels de microbie. Il dis- tingue des parasites simples, vivant simplement de la substance de leur hôte, les virus animés, ferments à excrétions toxiques. Dans cette dernière catégorie nous ne connaissons actuellement que les bactéries pa- thogènes. M. Arloing les considère surtout dans leurs rapports avec l’organisme infecté ou intoxiqué. Il expose à grands traits l'ensemble des découvertes qui ont conduit aux doctrines actuelles, passant rapi- dement sur les plus connues, et il insiste tout parti- culièrement sur les travaux de M. Chauveau. Bien que les recherches déjà anciennes de ce savant sur la physiologie des virus aient, comme on sait, exercé une influence considérable sur cette partie de la science, elles n'avaient jamais été, à notre connais- sance, aussi heureusement rassemblées et mises en lu- mière que dans le livre de M. Arloing. Presque toutes les grandes questions qui y sont traitées ont été, de la partde M. Chauveau, l’objet d'expériences remarquables et quelquefois décisives. Il était juste de le rappeler, Ce n’est d’ailleurs pas un tableau complet de la mi- crobie et de son histoire que M. Arloing a voulu tracer. Son but principal a été d'examiner les problèmes d'hy- giène et de pathologie générale qui s’y rattachent. Il étudie successivement les conditions de la contagion, l'influence exercée sur cette contagion par la qualité, la quantité et le mode d'introduction des virus, la propagation de ces agents dans l’économie, les troubles consécutifs des tissus et des humeurs, l'extinction et le réveil des épidémies, les procédés préventifs ou même curaltifs que l’état de la science permet de leur opposer. Aux théories toutes récentes sur l’atténuation des virus, Vimmunité, naturelle ou acquise, les propriétés dites bactéricides des humeurs, d’une facon générale le mé- canisme de la résistance de l’organisme, l'auteur à consacré des développements particuliers. A vrai dire, parmi les faits consignés dans son livre la plupart sont déjà familiers aux physiologistes. Mais ce qui est nouveau dans l'ouvrage de M. Arloing, ce qui en constitue le vrai mérite et le caractère en quelque sorte original, c’est la critique supérieure qu'il y à mise, Cette critique est celle d’un maitre qui à puis- samment contribué par ses recherches au progrès de la science, Elle impose la lecture du livre mème aux physiologistes les plus versés dans la connaissance des virus. Cette appréciation de l'ouvrage de M, Arloing serait incomplète, si nous n'ajoutions que, chose assez rare en science, il est remarquablement bien écrit, L, O. 342 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 4 mai 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Cels : Sur une classe d'équations différentielles linéaires ordinaires. — M. H. Padé : Sur la convergence des fractions con- tinues simples. — M. Tarry pose et démontre un théorème de géométrie relatif au mouvement d'une fi- gure de similitude constante dont deux points par- courent deux droites fixes qui se coupent en point, — M. P. Gautier obtient des vis d’une très grande préci- sion en les rodant à travers une série d’écrous, avec interposition d’émeri fin; ces vis sont destinées aux machines à diviser employées dans le tracé des réseaux de la carte photographique du Ciel, — M. H. de la Gou- pillière étudie analytiquement la marche de l’évapo- ration dans les chaudières de forme quelconque, et in- versement, la forme théorique à laquelle répondrait une courbe d’évaporation donnée, 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Wild annonce qu'il a fait construire à l'Observatoire de Pawlowsk une boussole à induction donnant l’inclinaison avec une très grande précision. — M, G. Lemoine a étudié expé- rimentalement la marche de la réduction par la lu- mière d'un mélange d'acide oxalique et de chlorure ferrique dans des cuves d'épaisseur et de forme va- riables ; la marche du phénomène répond aux quantités calculées d'après l'absorption que le mélange fait subir à la lumière, absorption que l’auteur avait étudiée dans une précédente communication (27 avril). — M.G. Hin- richs : Enoncé d’une loi générale déterminant, en fonc- tion simple de la constitution chimique des corps, les températures de leurs changements d’état sous toutes les pressions, — Etudiant le pouvoir rotatoire des solu- tions d'acide tartrique dans l’eau, et dans l’eau addi- tionnée de potasse ou de soude, Biot trouvait que la représentation graphique de ses mesures donnait une hyperbole équilatère, et il admettait qu’il se formait des combinaisons en proportion entièrement variables. M. Aignan, supposant qu'il s’agit de phénomènes de dissociation, élablit que la ligne représentative des valeurs de la rotation doit être constituée par des ares de courbe se coupant en des points anguleux; les va- leurs observées sur les dissolutions d'acide tartrique dans des dissolutions de soude de concentration crois- sante donnent en effet des points anguleux; un de ces points correspond à trois équivalents de soude, ce qui vérifie l’existence d’une combinaison de la soude avec un groupe alcool de l'acide tartrique. — M.G. André a préparé des chlorures doubles ammoniacaux de zinc et de mercure; ila aussi obtenu des combinaisons nou- velles du chlorure mercurique avec l’aniline etla ben- zylamine. — M. P. Sabatier a préparé le séléniure de bore en faisant arriver des vapeurs de sélénium sur le bore amorphe chauffé au rouge ; ce corps a pour formule B? Se’. — M. A. Besson en faisant agir l'acide iodhy- drique sec sur le bromure du bore B Br? à température élevée a obtenu deux bromoiodures du bore, ainsi que l'iodure de bore par substitution complète. — M. G. Viard indique les procédés par lesquels on peut obtenir des chromites basiques de magnésium et de zinc; le cadmium ne fournit qu'un chromite neutre. — M. de Forcrand décrit l'érythrate disodique; on ne peut pas obtenir d’alcoolate à trois équivalents de base, mais deux molécules d’hydrate de soude peuvent s'a- jouter à la molécule d’érythrate disodique sans substi- tution de sodium à l'hydrogène. — M, E. Duvillier a reconnu que dans la préparation ordinaire des acides amidés de l'acide isovalérique, il se forme de l'acide diméthylacrylique, que l'on peut séparer par la distil- lation à une phase donnée de la préparation; la forma- tion de ce corps explique les mauvais rendements de cette opération, — M, L. Barthe a préparé le méthyl- cyano-succcinate de méthyle etl’éther méthyléthylène- tricarbonique. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. E. Hédon, résumant ses expériences sur l’exlirpation totale du pancréas chez les chiens, conclut que la glycosurie suit constamment cette opération ; mais elle peut être légère et intermit- tente, et alors l’azoturie, qui est également constante, prend la première place dans les troubles de la nutri- tion; pendant les périodes où la glycosurie fait défaut, du sucre ajouté à l'alimentation est utilisé en grande partie. —M. H. Viallanes a pu, sur des préparations d'œil de langouste, élucider les détails suivants : dans chaque œil élémentaire, les segments du cône cristalloïde se rattachent à la membrane basale par un filament fin, chacun des rhabdomères de la rétinule est en continuité avec le cylindre-axe d’un tube nerveux traversant la membrane basale pour aller (fibre post-rétinienne) gagner le ganglion optique ; le cône est indépendant de la ré- tinule. — Chez les Ptéropodes, dont la coquille est se- nestre, l'anatomie interne est dextre; on avait émis l'hypothèse que, chez ces mollusques, l’enroulement sinistrorsum n'est qu'apparent et résulte de l’aplatis- sement de la spire devenue rentrante. M. Pelseneer apporte comme preuve, àcette hypothèse, l'observation que l’opercule, qui est toujours enroulé en sens inverse de la coquille, est senestre etrepond par conséquent à une coquille dextre, — M. Géneau de Lamarlière, en étudiant plusieurs genres d’Ombellifères à racines renflées, à trouvé tous les termes de passage entre la structure de la racine renflée normale , telle que celle de la carotte, et la structure de la racine de l’œnanthe, considérée comme anormale, — M. Bleicher a examiné une nouvelle série d'échantillons des roches phospha- tées du Dekma (département de Constantine); quel que soit leur niveau, toutes ces roches sont riches en débris organiques, dents et ossements de vertébrés ou bien foraminifères et présentent constamment à côté du phosphate une matière minérale verte en écailles, — M. E. Rivière signale les débris d’animaux et les ins- truments de silex qu'il a trouvés dans les gisements qualernaires d’Eragny et de Cergy (Seine-et-Oise), — M. G. Capus a relevé un grand nombre de tempéra- tures dans le Pamir pendant un mois de printemps ; le climat de cette région est remarquable par les écarts énormes et brusques des températures aux divers mo- ments de la journée, l’auteur pense que l’amplitude extrème annuelle est au moins de 1200. Mémoires présentés : M. Nicolas de Tourquistanoff soumet au jugement de l’Académie un « Calendrier vé- rificateur ». — M. L. S. Lucas : Note sur les effets d’une trombe à Issy-sur-Seine. Séance du 11 mai 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. C. A. Laïisant : Sur les permutations limitées, — M. Markoff : Sur une classe des nombres complexes. — M. F. Lucas : Ex- pression du nombre x parune série très convergente. — M. Haton de la Goupillière, comme complément à sa communication de la séance précédente, étudie avec la méthode générale indiquée par lui l’abaissement du plan d’eau dans le cas d’une chaudière cylindrique horizontale assez longue pour permettre de faire abs- traction des fonds, cas particuliers qui avait été traité en négligeant certains effets complémentaires par M. Guchez, — M. H. Léauté, dans des études antérieu- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 343 res, avait indiqué les formules générales permettant d'exprimer d’une facon approchée le mouvement des moteurs hydrauliques dans la période de trouble com- prise entre une perturbation brusque et le régime re- constitué ; mais ces solutions ne s’appliquaient qu'à des cas moyens, faisant abstraction des particularités qui différencient les diverses machines motrices, Pour obtenir la solution de la question dans des conditions pratiques données, en prévoyant des écarts exception- nels, la méthode analytique pure était inapplicable, un grand nombre de ces conditions n'étant données que sous une forme empirique. M. Léauté a eu recours aux procédés graphiques, pour représenter en une seule épure tous les éléments du mode d'action du moteur ; le problème revient alors à l'intégration d’une équa- tion différentielle du premier ordre sous sa forme géné- rale et au tracé d’une courbe qui coupe une série de lignes données sous des angles donnés ; l’auteur fait remarquer qu'il s’agit d’une méthode nouvelle, la Dyna- mique graphique. — M, P. Vieille a obtenu l'enregis- trement des pressions développées dans lintérieur des canons au moment de l’explosion ; il a adapté au piston d’un crusher un petit tableau enfumé sur lequel trace une lame vibrante ; ces appareils vont être appli- qués à l’étude des anomalies de fonctionnement des poudres dans les bouches à feu, — M. M. Brillouin expose les résultats auxquels conduit l'étude des phé- nomènes de déformation temporaires des corps solides dans le cas où il reste une indétermination ; on en peut tirer une théorie de la plasticité et de la fragilité, les corps solides coulant lorsque le glissement est indé- terminé, et se rompant lorsque c’est la densité qui de- vient indéterminée, — M. Borelly: Observations de la planète (découverte le 31 mars 1891) faites à l’ob- servaloire de Marseille, — M. Fabry : Eléments de la nouvelle planète Borelly (0). 1. Esmiol. Eléments provisoires de la planète {308) Borelly, déduits des ob- servations faites à l'Observatoire de Marseille, les 31 mars, 8 avril et 26 avril 4891. — M. Tacchini : Ob- servations solaires faites à l'observatoire royal du Col- lège romain pendant le 1% trimestre de 1891, — M. 9. Perchot : Sur le mouvement du périgée de la Lune. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. C. Raveau examine quelles sont les conséquences de la théorie électro-ma- unétique de la lumière au point de vue de la surface d'onde dans les cristaux, — M, J. Thomson avait uti- lisé les oscillations électriques très rapides, telles que les produisent les appareils de M, Hertz pour la mesure de la constante diélectrique du verre ; ses conclusions avaient été attaquées à cause de l'incertitude de la formule donnant le nombre des oscillations. M. R. Blondilot arepris la question par une méthode repo- sant sur l'emploi d’oscillations très rapides, mais sans formule. Il à obtenu comme M, J. Thomson, une valeur voisine du carré de l'indice de réfraction du verre. — M. L. Péchard a reconnu que l’eau oxygénée exerce sur les tungstates alcalins une action analogue à celle qu'il avait déjà étudiée pour ies molybdates; elle donne des hypertungstates dérivant d’un acide sur- oxygéné du tungstène. — M. G. Massol, calculant les chaleurs de la neutralisation des acides de la série oxa- lique, en rapportant tous les corps à l’état solide, montre que la chaleur de neutralisation par la pre- mière molécule de base esttoujours plus considérable que la chalenr de neutralisation par la seconde, con- trairement à ce que l’on observe dans quelques cas en solutions étendues, — M. Berthelot fait remarquer que cetexcès de la chaleur dégagée par la première neutralisation sur celle dégagée par la seconde résul- tait nécessairement de ce fait qu'un acide bibasique s’unit au sel neutre de ce même acide pour former un sel acide, avec dégagement de chaleur, — M, L. Tis- sier a obtenu le quatrième alcool amylique primaire que prévoit la théorie, l'alcool triméthyléthylique, par lu réduction au moyen de l’amalgame de sodium, du chlo- rure d'acide triméthylacétique ; en faisant agir l’azotite d'argent sur le chlorhydate de triméthyléthylamine, on obtientau contraire un alcool amylique tertiaire connu le diméthyléthylcarbinol, — M. K. de Kroustchoff étudiant un plagioclase d’une roche granitique de l’Altaï au point de vue de la relation entre les propriétés optiques et la composition chimique, a vérifié dans des conditions particulièrement intéressantes la théorie des feldspaths de M. Tschermak. 30 SCIENCES NATURELLES, — M, G. Saint-Remy décrit les organes génitaux des Tristomiens d’après ses recher- ches surcinq genres de cette famille de Trématodes. — M. L. Guignard a montré, dans des recherches anté- rieures, que les noyaux de l'embryon des végétaux pos- sèdent un nombre de segments chromatiques exacte- ment double de celui de chacun des noyaux sexuels ; recherchant à quel moment ce nombre repasse du double au simple, ila constaté chez le Lis que pour l'organe femelle, cette réduction s'effectue tout d’un coup au moment de la première bipartition de la cel- lule-mère du pollen et du sac embryonnaire ; les noyaux sexuels sont donc, quant au nombre des seg- ments chromatiques des demi-noyaux, — M.J. Vesque : Les groupes nodaux et les épharmonies convergentes dans le genre clusia, — M. Le Moult annonce que les essais de propagation du parasite du ver blanc signalé par lui ont réussi ; la propagation naturelle, s’effec- tuant vraisemblablement au moyen de la dissémination des spores par le vent, s’est d’ailleurs amplement pro- duite. — MM. Prillieux et Delacroix ont déterminé ce parasite comme un Botrylis voisin de celui qui provo- que la muscadine du ver à soie ; il peut être aisément cultivé. — MM. M. Bertrand et Zurchersignalent près de Toulon un lambeau de phyllades (schistes précam- briens) superposés au Trias ; ils considèrent ce lambeau comme le témoin d’un grand pli couché enlevé par l’é- rosion, — M, Roussel étudiant les phénomènes de re- couvrement qui s’introduisent dans les couches pri- mures dela partie supérieure de la vallée de l'Ariège, encaissées dans le gneiss, voit dans ces recouvrements non l'effet d’une série de failles, mais le résultat- d’une poussée continue déformant un pli synclinal pen- dant le dépôt des couches, — M. J. Thoulet a observé au moyen d'une série de flotteurs de densités graduées la diffusion de l’eau douce dans l’eau de mer dans un vase au repos ; il a constaté que cette diffusion s’effec- tue avec une extrème lenteur, — M. L. Vaillant indi- que, par l'étude d’un point particulier de la côte nor- mande, comment on peut se servir de la distribution des espèces animales sur les rochers pour délimiter les diverses zônes littorales. Mémoires présentés, — M. Devaux adresse une note sur un nouveau système du moteur hydraulique, — M. Van Woddingen soumel au jugement de lAcadé- mie un mémoire sur la direction des aéroslats et un mémoire sur un nouveau mécanisme locomoteur. — M. Arnaud adresse, en réponse à une communication de MM. Lépine et Barral du 23 février 1891, une note sur le ferment’glycolytique du sang. — M. E. François adresse un complément à sa note du 20 avril dernier sur une boussole cadran solaire, — M. Burgal adresse un mémoire sur la gravitation universelle. L. LAPICQUE. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 12 mai 1891. La suite de la discussion sur la dépopulation a été ajournée à quelques semaines pour supplément dé- tudes. — M. Magitot, à l’occasion d’un mémoire de M. Hallopeau sur une observation de cocainisme chro- nique, expose l’histoire complète de la cocaïne, dont l'emploi comme anesthésique a pris une grande exten- sion dans la pratique chirurgicale. Toutefois, à la suite de certains accidents graves ou mortels attribués, à tort ou à raison, à la cocaïne, il s’était élevé contre son 344 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES emploi des craintes sérieuses et une certaine répro- bation, que M. Magilot, après enquête des faits, déclare ne pas partager, Il termine son rapport par certaines règles d'administration de la cocaine en chirurgie. Les voici: 1° La dose de cocaïne doit être proportion nelle à l'étendue de la surface à analgésier, elle ne dé- passera en aucun cas 8 à 10 centigrammes. 2° Elle ne devra jamais être employée chez les cardiaques, dans les affections chroniques des voies respiratoires et chez les névropathes. 3° On devra éviter son introduc- tion dans les veines, 4° L'injection devra toujours être pratiquée chez un sujet couché, sauf à le relever ensuite s'il s’agit d'une opération sur la tête ou dans]la bouche, 5° La cocaïne devra être d’une pureté absolue, certains mélanges avec d’autres alcaloiïides étant d’une nature particulièrement toxique. 6° L'introduction de la co- caine devra être fractionnée de manière qu'une pre- mière injection, servant d'épreuve, soit suivie d’un temps d'arrêt de quelques minutes, 7° Ainsi employée d'une facon graduée et méthodique, la cocaïne présente sur le chloroforme, l’éther, etc., de grands avantages, et la durée de l'effet anesthésique est toujours sufli- sante pour permettre d'entreprendre toutes les opéra- tions de la chirurgieordinaire.— M. Constantin Paul: Rapport sur un mémoire de M. le D' Magnant sur le traitement de la tuberculose par l’inhalation d’air sur- chauffé. Ont été élus correspondants nationaux MM. Farge (Angers) et Duché. Séance du 19 mai 1891. M. Robin : La balnéation chlorurée sodique, ses ef- fets sur la nutrition, les nouvelles indications. L'auteur étudie l’action physiologique de la balnéation chlorurée sodique et en déduit les lois générales suivantes au point de vue clinique : 1° La balnéation chlorurée so- dique reconnaît comme indication majeure tous les états morbides dans lesquels il y a hypoazoturie, c’est- à-dire diminution des échanges azotés. 2° L'’amoindris- sement des oxydations azotées constitue la deuxième indication. 3° La troisième indication générale relève de l’action d'épargne, exercée par la balnéation chlo- rurée sodique sur les tissus riches en phosphore et sur ceux qui sont à la fois riches en azote et en phos- phore.— M. Proust : Mesures de prophylaxie prescrites en 4890 contre le choléra en Espagne. — M. Gariel : De la transparence de certaines tumeurs, La translucidité absolue pouvant exister avec la présence, dans la tu- meur, d’un corps complètement opaque, l'auteur fail connaître un moyen simple de faire apparaître l'ombre de ce corps qui n’est pas visible par léclairage ordi- naire, et, par suite, de mettre en évidence sa présence dans la tumeur, SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 9 1891. M. Laulanié signale la néphrite et l'hépatite qu’il a vues constamment à la suite de la thyroïdectomie chez le chien ; ces altéralions ont le caractère d’inflamma- lions toxiques ; les urines contiennent des sels bi- liaires et leur toxicité est fortement augmentée, — M. Retterer a constaté chez le fœtus d’un grand nombre de mammifères que le cloisonnement du sinus urogénital pour former le vagin s'effectue suivant un mode analogue à celui qu'il a décrit pour la femme. — M. A. Pilliet décrit l'estomac d’un pangolin (Edentés); cet estomac comprend deux poches, dont la première correspond aux trois premières poches d’un ruminant, et dont la seconde constitue l’estomac vrai, — M, d’Ar- sonval, observant les contractions d’un muscle de grenouille au moyen d'unemembrane vibrante attachée à son tendon, a constaté que l’action d’une lumière intense privée de ses rayonsthermiques et agissant pé- riodiquement, produit un son dont la hauteur répond au nombre d’excitations lumineuses; la lumière excite donc le muscle, mais d’une facon trop faible pour que mai les mouvements soient directement pereus, — M, d'Ar- sonval à fait de nouveaux essais démontrant la décom- position de sels minéraux et des urates par l’acide carbonique à haute pression. — M. Ch. Feré rapporte un cas de sialorrhée paroxystique précédant des at- taques épileptiformes chez un paralytique général, — M. P. Mégnin a trouvé l'intestin d’une Mouette entiè- rement obstrué par lHolostomum platycephalum. — M. P.Megnin a rencontré dans desdéjections de Loutre des embryons de l'Echinorhynchus proteus en très grand nombre, — M, L. Mandereau a reconnu que l'humeur aqueuse contient toujours des bacilles chez les boyidés tuberculeux ; il propose l'examen de cette humeur comme moyen de diagnostic hâtif de l’infection. — M, R. Blanchard détermine comme Tænia gracilis une forme jeune de Cestode trouvée par M. Th. Scott chez un Ostracode, le Candona rosbrata ; c’est donc par l'in- termédiaire de ce crustacé que s’infecteraient les ça- nards, — M. A. Gilbert et J. Girode rapportent un cas de péritonite suppurée chez un cobaye, après in- jection sous-cutanée de culture du bacille d'Eberth ; ce bacille se retrouvait seul dans le pus. Séance du 16 mai 1891, M. J. Héricourt et Ch. Richet ont continué leurs recherches sur l'immunité contre la tuberculose aviaire que produit chez le lapin le sérum du sang de chien. Le sérum des chiens ayant recu des inoculations inef- ficaces donne une immumnité certaine contre les cul- tures médiocrement virulentes, s'il est injecté avant l'infection; il en est de même du liquide qui s'accu- mule dans le tissu sous-cutané des chiens au point où a été pratiquée une inoculation tuberculeuse ; ces li- quides iujectés au lapin après l’inoculation du virus, en favorisent au contraire l’action. — M. Ch. Féré rapporte un cas de suppression de la sécrétion lactée à la suite d’un accès d'épilepsie, — M. Marfan signale comme un symptôme constant et précoce de la phtisie pulmonaire, un abaissement notable de la tension artérielle, mesurée sur l'artère radiale par le sphyg- momanomètre de Potain. — Mme Eliachef a étudié les substances non dialysable des urines humaines, chez des individus sains et chez des fiévreux ; au point de vue de la composition chimique, le résidu non dia- lysable se distingue dans le second cas par la plus forte proportion d'oxygène et d'azote ; au point de vue physiologique, il est bien plus toxique ; 10 centi- grammes tuent rapidement un lapin, qui succombe tardivement à 25 centigrammes du résidu de l'urine normale ; l’auteur s’est injecté à elle-même sous la peau { cenligramme de chaque extrait ; le premier n'a eu aucune action, le second à produit un état fé- brile, — M. Ch. W. Stiles a étudié l’embryologie des Linguatules sur des échantillons de Pentastomum pro- boscideum recueillis par lui dans les voies respiratoires d'un boa, il à réussi à faire développer les œufs et se produire des kystes chez la souris. — M, A, Souques a examiné le champ visuel dans la maladie de Basedow etilne l’a trouvé rétréci en aucun cas. — M. A. Char- pentier qui avait déjà communiqué des expériences tendant à démontrer que l'impression lumineuse se propage à la surface de la rétine sous forme d’ondes signale la production de frangesd'interférence dans le cas de déplacement sur fond noir d’un point lumineux à éclat périodique, avec une vitesse convenable; ces expériences assignent à l’onde rétinienne une période d'environ 1/30 de seconde, — M. Nepveu a obtenu de bons résultats dans le traitement de l’angine diphté- ritique par les injections du sublimé dans les amyg- dales, le voile du palais et les ganglions du cou. — M. L. Guignard : Sur la constitution des noyaux sexuels chez les végétaux (Voir Comptes-rendus, 11 mai). — M. Remy Saint-Loup a obtenu les premières phases du développement de l’œuf de la poule, extrait de sa coquille et réintégré dans une coquille de verre. — M. G. Grigorescu indique une méthode de diagnostic des myélites reposant sur la détermination du temps ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 349 de réaction aux divers points du corps. — À pro- pos de la note de M Laulanié (séance précédente), M. Gley rapporte qu'il a constaté une augmentation de la toxicité urinaire chez les chiens thyroïdectomisés, mais moindre que l'augmentation relatée par M.Laulanié. Séance du 23 mai 1891. M. Albarran présente un travail sur la tuberculose rénale ascendante. — M. Laveran signale l'existence dans le sang de l’alouette d'hématozoaires très voisins de ceux du paludisme, — M. Depoux présente un ma- lade qui avait offertla plupart des symptômes de l'ataxie, et qui a été considérablement amélioré par des injec- tions de suc testiculaire, — M. Dejerine pense qu'il s'agissait d’un pseudo tabes hystérique. — M. Ba- binski rappelle qu'il a présenté des cas de tabes vrai guéris. — M. Laveran rapporte avoir examiné autrefois le malade en question, qui avait une démarche ataxique typique, et qui fut réformé pour ce fait du service mi- litaire. — M. Déjerine accorde que les symptômes de l’ataxie peuvent cesser d'évoluer, par fois même subi- tement, comme lorsque le tabétique devient aveugle, mais le diagnostic du tabes vrai est souvent difficile à établir pendant la vie, — M. Brown-Séquard fait oh- server que le malade qui fait l’objet de la discussion ne présente aucun stigmate hystérique. MM. Féré et De- mantké ont constaté que la marche abaisse peu à peu la voute plantaire, qui reprend sa cambrure par le repos. — M. d’Arsonval indique un dispositif, consis- tant dans l’emploi d'un condensateur en dérivation sur le fil enduit d’une bobine, pour obtenir une dé- charge lente de l’électricité, capable d'exciter la fibre musculaire à l'exclusion des éléments nerveux, — M. Morau a étudié les modifications qui se produisent chez les rongeurs dans l’épithélium tubo-ovarique à l’époque de la ponte ovulaire, — M. Vigouroux : In- fluence des variations de la force électro-motrice sur les effets physiologiques des courants continus. L. LaArtcQue. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 15 mai 1891. M. Moureaux signale une curieuse anomalie magné- tique dont il a constaté l'existence dans les éléments relatifs au bassin de Paris. Dans cette région, les courbes isogones sont loin d’avoir la régularité qu’on leur attribue dans les cartes ordinaires, Elles présen- tent un plissement très considérable comme si elles étaient brusquement repoussées dans une direction qui part de Rouen pour se diriger vers Sancerre, Cette constatation résulte de plusieurs centaines de détermi- nations fort précises effectuées par l’auteur dans toute cette région, en des stations toutes très voisines les unes des autres, Au point de vue des déviations de l’aiguille aimantée, les choses se passent comme s'il existait là un pôle sud. La nature de ce pôle est con- lirmée par les perturbations correspondantes dans la composante horizontale et l’inclinaison. La même ano- malie s’observe sur les côtes d’Angleterre,et ne s'éteint que dans le voisinage d'Oxford, Dans toute la région soumise à cette perturbation, la géologie n’a pas cons- taté jusqu'ici l’existence de roches magnétiques, même aux profondeurs des puits artésiens. Est-ce là une in- dication nouvelle relative aux couches plus profondes de l'écorce terrestre, ou ne serait-ce pas dù à l'influence exercée par une faille connue sur les courants tellu- riques ? L’explication définitive est encore prématurée, — M. Hospitalier présente un dispositif simple pour obtenir la réalisation des lignes de force électrostatiques par des fantômes analogues aux spectres magnétiques. Dans un cristallisoir, on verse une couche de quelques centimètres d'essence de térébenthine bien desséchée, tenant en suspension de petits cristaux de sulfate de quinine, qui joueront le rôle de la limaille. Ce choix a déjà été indiqué par M. Schapman, d’Adélaïde. Pour porter deux points du liquide à des potentiels diffé- rents, on y fait arriver des tiges conductrices reliées aux deux pôles d’une machine électrostatique. Les lignes de force se dessinent aussitôt avec la plus grande netteté. On peut varier les apparences de di- verses manières, par exemple en plaçant dans le li- quide un anneau métallique qui produit une ligne équipotentielle avec zone inactive à l'intérieur, Ce son- là des expériences de cours qui réussissent sans diffit culté, — M, Mascart signale à ce propos un autre procédé qu'il emploie depuis longtemps avec succès; il consiste à coller sur une plaque de verre deux lames métalliques constituant les deux pôles et à laisser tomber d’une certaine hauteur sur la plaque des poils de brosse coupés en très petits morceaux. — M. d’Ar- sonval indique un nouveau procédé de stérilisation des liquides organiques. Dans ce procédé, qui permet aussi le filtrage du liquide, et même la séparation frac- tionnée dans le eas de liquides complexes, la stérili- sation est obtenue à froid, à la température ordinaire, ce qui évite de recourir aux autoclaves et offre le pré- cieux avantage de ne pas coaguler les substances albu- minoides. Le liquide est placé dans un tube résistant et recoit au moyen d'une bouteille à acide carbonique liquide reliée au tube, une pression de 25 à 40 atmos- phères. Au bout d’une demi-heure, les germes les plus réfractaires sont tués sans retour. De plus, dans le cas des liquides provenant de tissus de l'organisme, pour lesquels l'appareil a été spécialement concu, l’acide carbonique outre ses propriétés bactéricides, présente l'avantage de ne pas altérer la composition de ces li- quides, car c’est le gaz normalement en contact avec les tissus, puisque les éléments anatomiques vivent dans la lymphe qui en est saturée. La filtration se pro- duit en disposant à la partie inférieure, au lieu d’un bouchon plein, un obturateur muni d'une bougie fil- trante du système Chamberland, La nature de la por- celaine importe, elle doit être très riche en alumine, mais presque exempte de matières vitrifiables. Dans la filtration les divers constituants d'un liquide complexe passent à des pressions différentes, de sorte qu’en gra- duant la pression, on arrive à une véritable séparation. On peut isoler ainsi la peptone de lalbumine et séparer les divers ferments du liquide pancréatique. Enfin M. d’Arsonval a été amené à une importante constata- tion au point de vue chimique. A ces fortes pressions, l'acide carbonique devient capable de déplacer les acides chlorhydrique, bromhydrique, dans les chlo rures et bromures de sodium et de potassium. Édgard Haunié, SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 22 mai 1891. M. Couturier a déterminé les constantes d’éthérifi- cation de Palcool pinacolique et a trouvé les nombres correspondants à un alcool secondaire. Vitesse ini- tiale 16,64; limite 50,51. Le bromure pinacolique pré- paré en saturant à 0° l'alcool pinacolique par Pacide bromhydrique est un solide fusible vers 24° à 25°; il donne par la potasse alcoolique ou la potasse sèche deux carbures isomériques CfHl2: le pseudobutyléthyiène (CH3)3 — C — CH — CH? et le tétraméthyléthylène (CH3) ? — C — (CH*)°. Le premier de ces carbures donne un bromure liquide CH'? Br? ; et son oxydation par le permanganale de polassium conduit au glycol (CH3)3 = C — CHOH — CHOH bouillant à 197°, Le tétra- méthyléthylène traité de la même manière régénère la pinacone; combiné à l'acide hypochloreux il donne une chlorhydrine qui traitée par la potasse sèche conduit à l'oxyde de tétraméthyléthylène, Le bromure pinaco- lique traité par l’'ammoniaque aqueuse à 100° ne donne pas d’amine, mais seulement le tétraméthyléthylène; la transposition moléculaire est complète, et la forme symétrique parait être la plus stable pour les hydro- carbures dérivés de la pinacone, — M Maquenne montre que la réaction de M. E. Fischer permet un dosage approximatif des sucres, un mème poids de di- 346 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES vers sucres chauffés avec de la phénylhydrazine donne des poids d’ozazones très différents. — M, Maquenne a préparé d'assez grandes quantités de tréhalose, il en a préparé l'octacétine; et en appliquant la réaction précédente, pu démontrer qu'il se dédouble en deux molécules de glucose, — M. Haller rappelle qu'en trai- tant les deux éthers acétylacétiques monochlorés par le cyanure de potasssium, il a obtenu deux éthers cya- nacélylacétiques différents, dont l’un deux la conduit à une nouvelle synthèse de l'acide citrique. Au contraire l’éther acétylacétique monobromé ne donne par le cya- nure de potassium que de l’éther succinylsuccinique. — M. Haller à étudié l’action des alcoolates de so- dium sur le camphre et le camphre cyané, à dehaules températures ; il se forme des composés dérivant de ces corps par addition d'une molécule de l'alcool em- ployé. M. Haller admet qu'il y a rupture du noyau aromatique et formation d’un carboxyle aux dépens du carbonyle du camphre. En traitant le produit ob- tenu avec le camphre cyané par l'acide chlorhydrique on obtient un acide bibasique comme l'acide campho- rique ; et comme cela arrive, ainsi que l’a montré M. Friedel pour cet acide, les deux éthers monoéthy- liques sont différents, M. Haller qui admet dans tous ces composés l'existence de deux carboxyles pense que cette différence est due à ce que ces deux car- boxyles sont liés à des résidus différents et croit que c’est là un fait général, que des déterminations ther- mochimiques, qu'il n'a pas encore pu faire, mettront sans doute en évidence, — M. Friedel fait remarquer que l'existence des deux carboxyles n’est pas démon- trée et que les observations de M, Haller sont facile- mentexpliquées par les formules proposées par M, Frie- del pour les acides camphoriques, formules quine con- tiennent qu'un carboxyle et un oxhydryle rendu acide par le voisinage de groupements électro-négatifs, — M. A. Combes dit que les données thermochimiques connues ne permettent pas d'admettre l'interprétation de M. Haller, les chaleurs de neutralisation de l'acide acéti- que et de l'acide benzoïque, par exemple, étant identi- ques. — M. Van’ T Hoff a cherché une explication des anomalies que présente la loi de M, Raoult, dans le cas où on obtient un abaissement du point de congélation inférieur à celui que prévoit la théorie; ce fait se pré- sente quand on opère sur :1°le tiophène, en employant le benzéne comme dissolvant:; 2° le métacrisol, avec le phénol comme dissolvant; 3° l’antimoine avec l'étain comme dissolvant; 4 le 8 naphtol avec le naphtalène comme dissolvant; el a trouvé que pour le premier, le troisième et le quatrième cas, cette anomalie est due à ce que les premiers cristaux du dissolvant qui se forment entraînent une quantité d’eau mère qui appau- vrit la dissolution du corps que l’on examine, Il à mis ce fait en évidence en employant une troisième subs- tance soluble dans le dissolvant : l’iode dans les cas 1, ? et 4, l'argent dans le troisième. Cette explication est vérifiée très exactement pour le premier, le troisième et le quatrième cas; elle ne paraît pas s'appliquer au second, — M. Bertrand a étudié les colorations que donne une solution chlorhydrique de résorcine sur cer- lains sucres et trouvé qu’elle est due à l’action qu’exerce ce réactif sur les furfurols qui prennent naissance dans cette action; il a expérimenté avec l’isolduleite et le méthylfurfurol, l'arabinose et le furfurol. A. COMBEs. SOCIETE MATHEMATIQUE DE FRANCE Séance du 20 mai 1891 M. Félix Lucas montre le parti qu'on peut tirer du théorème de Green sur le flux de force dans l'étude des fonctions d’une variable imaginaire, grâce à une interprétalion mécanique convenable de certains élé- ments analytiques liés à ces fonctions, Il démontre, en particulier, par cette voie, le (héorème de Cauchy sur les zéros des fonctions algébriques et entières, en n'y faisant intervenir que la notion du module. — M. Bioche : Sur les systèmes de courbes transformées homographiques les unes des autres dans l’espace. Con- dilion pour qu’il y ait sur une surface une famille de courbes homographiques, Cas des lignes asymptoti- ques des surfaces réglées, — M. Fouret présente de la part de M. Godefroy une note sur la relation entre les rayons de courbure des développées de deux courbes transformées l’une de l’autre par rayons vecteurs réci- proques. — M. Fouret fail connaître une formule nouvelle qui permet de calculer par voie récurrente les réserves successives des Assurances sur la vie, — M. d'O- cagne indique une construction par points et tan- gentes des cubiques cuspidales (unicursales de la troi= sième classe), lorsqu'on connaît les points de rebrous- sement el d’inflexion avec les tangentes en ces points. — M, Appell adresse une Note où il signale, en coor- données elliptiques, une forme générale de fonction de force satisfaisant à l'équation de Jacobi et condui- sant à de nouveaux problèmes de mouvement d’un point attiré suivant la loi de Newton, dont la solution peut se ramener aux quadralures. M, D’OGAGxE, SOCIÉTÉS MARITIMES SCIENTIFIQUES INSTITUTION OF NAVAL ARCHITECTS. Session 1891. M. A. F. Yarrow. Sur la construction des chaudières à tirage forcé, — On sait que l'étanchéité du faisceau tubulaire constitue l’une des plus grandes difficultés que l’on ait à surmonter dans les chaudières à haute pression. La recherche des véritables causes des fuites de vapeur, et des moyens d'y remédier forme l’objet de cette communication de M. Yarrow, l’'éminent construc- teur de torpilleurs. Après quelques remarques sur la qualité des tubes, qui doivent être d’un métal aussi ductile que possible, et soigneusement recuits aux ex- trémités de facon à supporter l'aplatissement ou le pliage sans se fendiller, il étudie la disposition géné- rale des tubes et leur ajustage dans les plaques. Les tubes doivent être parfaitement droits, ou, s'ils sont infléchis, leur courbure devra être la même pour tous, en vue d'assurer une élasticité uniforme. L’épaisseur du bout du tube sera régulière, afin qu'il soit également comprimé sur fout son pourtour par l’espander, outil spécial servant à renfler le tube et à le serrer dans son logement. Enfin le métal doit être décapé et sa surface parfaitement nette pour mieux adhérer au métal de la plaque. Un point important trop souvent négligé, c'est que la forme de l’expander corresponde exactement à celle des trous : que ceux-ci soient co- niques ou cylindriques, il doit en être de même de l'outil. Ilest indispensable que la pression soit régu- lière sur toute la surface. M. Yarrow décrit en passant un expander de forme spéciale dont il se sert avec sue- cès : les rouleaux, terminés par deux renflements, com- priment le tube dans l'épaisseur de la plaque et for- ment en même temps un épaulement de chaque côté, Au point de vue de la main-d'œuvre, l'habitude de dud- geonner les tubes de proche en proche est nuisible à la plaque qui est ainsisoumise à des efforts locaux con- sidérables. Il est bon de ne travailler que 3 ou # tubes voisins, et de passer à une autre région, Certains constructeurs vissent les tubes dans les plaques : c’est un procédé défectueux qui ne supprime pasles fuites et qui complique les réparations. Les bagues sont aussi peu efficaces : leur seule utilité est d’opposer une résistance aux courants de flamme trop impé- tueux qu'elles régularisent. M. Yarrow a depuis plu- sieurs années supprimé les tubes-lirants qui, plus rigides que les autres, ne travaillent pas d'ensemble; d’ailleurs la tenue des tubes ordinaires est ample- ment suffisante, — Les tirants du foyer font fuir les tubes en empêchant la plaque de tête de se dila- ter librement, L'auteur à même réussi à faire ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 347 cesser des fuites, en faisant passer les tirants au travers de presse-éloupes qui leur laissaient du jeu lorsque les feux étaient poussés. Il recommande donc de ne pas placer de tirants trop près du bord de la plaque de tête, et d'amincir le bord tombé de cette dernière. On peut même infléchir les tirants dont les effets de di- latation ne portent plus dès lors sur les plaques. En un mot, on doit chercher par tous les moyens possibles à assurer l’élasticité de toutes les parties, L'écartement des tubes sera réglé de manière à faciliter le renouvellement de l’eau au contact de la surface de chauffe, et à em- pêcher la vapeur de rester emprisonnée, sursout au voisinage de la plaque de tête, Avec des tubes de 50 mm. et pour une combustion de 400 à 500 k, par mètre carré de grille et par heure, il faut au moins 25 mm, d'intervalle, Quant à la longueur des tubes, elle doit être eu rapport avec leur diamètre pour qu'ils aient l’élasticité nécessaire. Les tubes trop gros ou trop courts doivent donc être rejetés comme étant trop rigides. — En étudiant expérimentalement les déforma- tions des tubes pendant toutes les périodes de la chauffe, M, Yarrow a constaté que ceux de la rangée supé vieure se courbent les premiers, puis graduellement, de haut en bas, ceux des autres rangées, Leur courbure est alors très accentuée, car les plaques sont encore fixes. Mais quand la pression en s’élevant commence à agir sur celles-ci, les tubes, soumis à une traction se redressent, et à 41 k. environ la courbure à totale- ment disparu. De là, la nécessité de pourvoir largement à la dilatation. Les effortsauxquels est soumis le corps de la chaudière pendant la mise en pression sont éga- lement bien plus considérables que ceux qui s’exer- cent en pleine marche. En vue de réduire cette fatigue l’auteur a essayé avec succès de faire le plein de la chaudière au début, et de laisser l’eau s’écouler par le bas jusqu’à ce qu'elle reprenne son niveau normal, au fur et à mesure de l'élévation de température, La par- tie supérieure de l’enveloppe s’échauffe ainsi dès le commencement, et en même temps l’eau froide des fonds est expulsée, Dans la période de refroidissement, les efforts sont moindres et d’une nature toute diffé- rente, Mais, d'une facon générale, il faut éviter les brusques changements de température, et en particu- lier, il est mauvais de mettre bas les feux trop préci- pitamment, — Les plaques sont d'ordinaire recuites après que les bords ont été rabattus; il serait dési- rable d'attendre que les trous y aient été percés, en laissant une légère épaisseur à aléser après coup. La limitation du tirage, généralement imposée au construc- teur, est funeste aux chaudières ; car la plus grande résistance offerte à l'air étant celle de son passage à travers le faisceau tubulaire, on se voit souvent forcé d'augmenter le diamètre ou de ré- duire la longueur des tubes, ce qui diminue leur élas- ticité, Il serait préférable de limiter la température du foyer en limitant la combustion, et de fixer le tirage convenant à cette combustion et à chaque chaudière en particulier, — La tenue d'un tube ou la pression qui s'exerce entre lui et la plaque, résulte de leur élasticité collective mise en jeu d’un coté par l’expan- sion du tube, de l’autre par la compression des bords du trou. On augmentera cette tenue en ne se contentant pas de dudgeonner le tube, mais en le chassant de force dans la plaque avant de le distendre, On voit en outre que lorsqu'arrive un courant d'air froid, le tube, plus mince, se contracte plus vite que la plaque et peut donner lieu à une fuite; par suite il y a intérêt à réduire l’épaisseur des plaques autant que le per- mettent les conditions de leur résistante, afin de rap- procher leur élasticité de celle des tubes dont elles ont à suivre les déformations, — Les plaques à tubes ont leurs deux faces soumises à des températures ex- trêmement différentes ; il en résulte pour elle une ten- dance à se courber sous l'influence de dilatations iné- gales, et les efforts alternatifs provoqués par des variations de température incessantes, chaque fois que l’on ouvre ou que l’on ferme la porte du foyer, leur font subir des déformations permanentes, En même temps, les trous s’ovalisent, favorisant les fuites. Ici encore une plaque mince, étant sujette à de moindres efforts moléculaires, aura l'avantage sur une plaque épaisse. M. Yarrow pense que c’est une erreur de don- ner aux plaques plus de 12 mm, On pourrait, selon lui, descendre jusqu'à 9 mm., épaisseur encore suffisante pour la tenue des tubes et pour la solidité de la plaque que leur faisceau entretoise déjà efficacement, — Pour la distribution des trous, M. Yarrow recommande la disposition en quinconces, comme affaiblissant moins les plaques et répartissant mieux les efforts. — Pour le choix du métal des plaques, on se guidera sur la moindre propension à fléchir sous l’action de tempé- ratures inégales aux deux faces, A cet égard le cuivre est bien supérieur à l'acier, car bien que se dilatant davantage, dans la proportion de 3 à 2, le cuivre pos- sède en revanche une conductibilité 6 fois plus grande que l'acier, et sa déformation est moindre. D'ailleurs l'action galvanique que l’on pourrait redouter entre les deux métaux ne s’est jamais manifestée. M. Yarrow, se basant sur l’expérience de plusieurs années, se pro- nonce done en faveur du cuivre pour les boîtes à feu, La conclusion de cette étude, c’est que les fuites pro- venant de déformations permanentes dues aux efforts exagérés que subissent certaines parties des chau- dières du type locomotive, il y a lieu de rechercher par dessus tout l’élastivité dans l’ensemblede leur cons- truction, L, Viver. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 1% mai 1891, ! 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J, Lannor fait une communication sur la théorie des machines électro- dynamiques. 20 ScrENCEs NATURELLES, — M. W. de Wabney fait une communication sur l'examen du sens de la cou- leur dans un cas de scotome (Tobacco Scotoma) et deux cas d'achromatopsie anormale, Les trois sujets ont été examinés à divers points de vue : apütude à distinguer les couleurs, aptitude à apprécier la lumi- nosité des diverses parties du spectre, sensibilité à la lumière. On a recherché sur le premier sujet quelle était l'étendue des sensations de couleur sur la ré- tine. Ce sujet que nous désignerons du nom de X., était atteint d'une amblyopie assez grave due à l’usage du tabac. Le scotome était très marqué et la perte du sens des couleurs était très complète. De nombreuses expériences ont établi que X. avait complètement perdu la perception du rouge et du vert dans la partie cen- trale de la rétine. Une lumière rouge et une lumière verte placées l’une à côté de l’autre lui sem- blaient toutes deux blanches, Grâce à des appareils spécialement construits à cet effet, (V. Phil. Tran- sact. 1886-1889) on à pu juxtaposer à une bande de lu- mière blanche des bandes colorées d’égale luminosité prises dans les diverses régions du spectre. On a pu dé- terminer ainsi l'aptitude de X. à apprécier la lumino- sité des diverses teintes, La courbe ci-jointe indique les résultats qu’on a obtenus. Les deux autres sujets qui ont été examinés étaient frères, nous pouvons les désigner sous les noms de P et de Q. Ils ont de la cou- leur une perception monochromatique. Ils appelient bleu le rouge, et rouge le bleu ou le vert, ils ne dis- tinguent pas en réalité les couleurs. Les courbes de lu- minosité sont presque identiques dans les deux cas; aussi n’en a-t-on donné qu'une seule dans la figure ci- jointe, Cette courbe est semblable à l’une des courbes des sensations fondamentalés de couleur de Helmholtz et Young, Elle est très remarquable et montre que chez les deux frères une excitation très intense est produite 1 JL n’y à pas eu de séance le 7 mai. 348 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES par les rayons bleus du spectre qui leur apparaît comme étant d’une seule couleur, Le maximum de ju- minosité est environ en E, mais c’est au voisinage de F que l’intensité des sensations lumineuses s’écarte le plus de l'intensité normale, cette région est en effet huit fois plus lumineuse que pour un œil normal. Aussi les sujets P et Q ont-ils un grand avantage sur les observateurs normaux pour l'observation des raies peu marquées (faint lines) qui sont situées dans la Gi 00 al | partie bleue du spectre. En résumé l’un des malades ne perçoit dans la partie centrale de la rétine que le blanc et le bleu ; les deux autres ne percoivent qu'une seule couleur, leurs sensations visuelles sont mono- chromatiques. — M. W. de Wabney fait une autre communication sur la limite de visibilité des différents rayons du spectre. Il a institué des expériences pour déterminer cette limite et pour déterminer aussi en quel rapport elle se trouve avec la luminosité d'une lampe à l’acétate d’amyle située à un pied d’un écran. Il a constaté que les rayons de longueur d'onde à 4770 environ sont les plus persistants. Ilest donc aisé decom- prendre que dans l’étude spectroscopique d’une lu- mière de faible intensité, on doit découvrir tout d'abord les rayons bleus et verts; et qu'il peut exister dans le jaune et le rouge des rayons de plus grande intensité sans qu'ils affectent le sens de la vue. Ce fait peut rendre compte de quelques résultats singuliers donnés par l’examen spectroscopique de sources lumi- neuses de faible intensité; les raies jaunes et rouges font défaut dans ce cas; c’est ainsi que par exemple on n’a jamais vu dans le spectre d’une nébuleuse la raie C de l'hydrogène, bien que la raie F (dans le bleu) soit d'ordinaire très visible. — M. H. G. Seeley présente à la société les nouveaux résultats de ses recherches sur la structure, l’organisation et la classification des reptiles fossiles, Il communique des observations nou- velles sur le Pareiasaurus. I distingue au point de vue de la faune cinq zones dans les roches de Karoo; il les désigne en partant de la plus profonde sous les noms de Mesosaurienne, Pareiasaurienne, Dicynodontienne, Theriodontienne, et Zanesodontienne, La zone pareio- saurienne s'étend de la station de Prince Albert Road aux montagnes de Nieuwveld. M. S: à recu un-squelette presque entier de Bad (à l’est de Tamboer), et des portions de squelette d’autres localités. Les seuls points qui restent obscurs, ce sont certains détails du tarse et du carpe et le nombre des doists.L’examen des pièces montre qu'aucun caractère des dents ni des machoires ne permet de distinguer l’Anthodon du Pareiasaurus, et que le genre Propappus est probablement un genre imaginaire, qu'on a constitué en se basant uniquement sur les caractères d’un fémur. Richard À, GRéÉGonY, SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 17 avril 1891, VISITE DE LA SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES A CAMBRIDGE Le 9 courant la Société a rendu visite à l’antique Uni- versité située sur les bords de la Cam. Réunis à la gare de Liverpool Street, les membres et les visiteurs au nombre d’une centaine (un grand nombre de dames étaient de la partie) ont pris place dans des wagons- salons, et sont partis à 11 heures précises. Recus à Cambridge par les membres de la Société, ils ont pris part à un lunch servi au collège Emmanuel à 4 heure ; puis à 2 heures la séance de la Société s’esttenue dans la salle de lecture du laboratoire Cavendish. Après la séance visite au laboraloire où sont exposés entre autres appareils, un tube vide étincelant de 50 pieds de long, du professeur J. J. Thomson, le pont pneumatique de M, Shaw, et les nouveaux condensateurs à lame d'air que M. Glazebrook emploie comme étalons. On voit encore les bobines et les appareils dont lord Ray- leigh s’est servi pour la détermination de l’ohm, une collection d'instruments ayant appartenu à Maxwell et les résistances étalons de l'Association britannique avec le cadre tournant et l'électrodynamomètre historiques qui ont servi à déterminer l'unité B.A... On a pris le thé dans la salle de réunion du collège de la Trinité, et à 8 heures, la plupart des visiteurs ont repris lex- press, enchantés de leur promenade, tandis que quel- ques autres restaient jusqu'au lundi pour pouvoir se livrer à d’intéressantes conversations scientifiques avec les savants de Cambridge. À la séance, ont été faites les communications suivantes : «Quelques expériences sur les décharges électriques dans lestubes vides », par M J.J. Thomson : Les phénomènes que présentent les tubes vides sont compliqués par la présence des élec- trodes ; aussi l’auteur a-t-il provoqué la décharge dans des tubes fermés sans électrodes par induction électro- magnétique. Une bouteille de Leyde donne des dé- charges oscillantes, qui passent dans des tubes de verre remplis de mercure et ces tubes constituent le circuit primaire, le tube vide jouant le rôle de circuit secondaire. Entre autres résultats à signaler, l’auteur observé que la conductibilité du tube vide croît quand la pression diminue jusqu'à une certaine limite, pour diminuer ensuite, ce qui prouve que la grande résis- tance du vide presque parfait ne tient pas à la pré- sence des électrodes. La décharge paraît se produire plus aisément quand il n’y a, pour ainsi dire, qu'une chaîne de molécules de même espèce. En ajoutant quelques traces de mercure on supprime la décharge, bien que la conductibilité du mercure soit très supé- rieure à celle du vide. — Quelques expériences sur la vitesse des ions par M. Whetham. Quand le courant passe dans un vase contenant deux électrolytes diver- sement colorés, on peut suivre avec le temps le dépla- cement de la surface de séparation, On peut prendre une solution aqueuse de chlorure de cobalt, qui est rose et une solution alcoolique du même sel qui est bleue. Deux solutions aqueuses de chlorure cuivrique et de sel ordinaire mises dans un tube en U, on voit la ligne de séparation se déplacer de 7 pouces en 3 heures, Les résultats qu’on déduit de ces recherches concordent sensiblement avec ceux de Kohlrausch. — « Sur la ré- sistance de quelques étalons de mercure » par M.Glazebrook. Trois étalons de résistance en mercure fournis en 1885 par M. Benoît et représentant l’ohm du congrès de Paris, ont été étudiés de nouveau, et com- parés aux étalons de l'Association britannique. Dans les limites des erreurs d'expériences les étalons sont res- tés invariables pendant ces six années, — « Sur un ap- pareil pour mesurer la compressibilité des liquides » par M. Skinner. C'est une large bouteille sphérique terminée par un col étroit, permettant d'apprécier les varialions de volume avec une sensibilité telle qu'une ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 349 variation d’un demi-millionième se traduit par un dé- placement du niveau liquide de 1 centimètre dans le col. Le coefficient de compressibilité, mesuré à diverses températures, diffère peu de celui de Tait et des autres auteurs. L'influence des sels en solution a été étudiée, et l’on a trouvé une grande différence entre les élec- trolytes et ceux qui ne le sont pas. — « Quelques me- sures avec un pont pneumatique », par M. Shaw. L'ap- pareil est comparable à un pont de Wheatstone, il doit permettre de comparer la résistance à l'écoulement de divers orifices. Deux branches sont représentées par deux trous circulaires percés dans une mince lame de mica, la troisième par un orifice qu'on peut ouvrir à volonté au moyen d’un volet mobile et d’un écran et la quatrième correspond à l’orifice à étudier. La pile est remplacée par une sorte de brûleur Bunsen à longue cheminée, et le galvanomètre par un tube de verre fai- sant communiquer deux chambres opposées et conte- nant une vanne qui se place d'elle-même à angle droit dans le tuyau quand il n’y a aucun courant d'air, Le courant d'air arrivant dans une première chambre par le brûleur se bifurque et s'échappe par les deux trous de la lame de mica; il se rend de là dans les deux chambres où la pression est à comparer et s’en échappe par les deux orifices dont l’un est celui qui est donné, et l’autre celui qui est variable à volonté, L'égalité de pression dans les deux chambres exige la proportion- nalité des quatre résistances à l'écoulement. Cet appa- reil si ingénieux fait ressortir d’une manière frap- pante les analogies hydrodynamiques du courant élec- trique. SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 4 mai M. John Aitken communique une méthode pour observer et compter le nombre de particules d’eau qui se trouvent dans un brouillard, On pouvait songer à faire déposer l'humidité sur une glace polie, mais l’au- teur a prouvé qu’on peut avoir ainsi des surfaces par- faitement sèches, tout en ayant une grande quantité de souttelettes d’eau dans l'air : le brouillard est formé par la condensation de la vapeur d’eau autour des poussières de l'air, c’est seulement quand cette con- densation atteint une certaine limite qu’elle donne lieu à la bruine. L’instrument dont il se sert est ana- logue au compte-poussières de poche : il consiste en un micromètre de verre divisé en carrés de côté connu, un miroir envoie de la lumière sur ce carrelage et une lentille puissante ou un microscope permet de l’exa- miner, Dans un brouillard qui a été étudié, les objets étaient invisibles à 100 yards (91 mètres environ) et les surfaces polies exposées restaient sèches, Le nombre de goultes tombées par minute a varié de 300 à 3000 par centimètre carré, Un autre jour, les condi- tions extérieures restant les mêmes en apparence, on a trouvé 1300 gouttes par centimètre carré et par mi- nute, Pour éviter la cause d’erreur qui provient de l’'échauffement et de la vaporisation des gouttes dans la couche d'air qui est au contact du micromètre, avant l’arrivée sur ce micromètre l’auteur entoure le microscope concentriquement d’un tube de 5 cm. de long et de 4 cm. de diamètre dont le fond et le haut peuvent être simultanément fermés par des couvercles mobiles autour d’un axe parallèle à l'axe du tube. Un micromètre éclairé et fixé au centre de la base infé- rieure, et au centre de la base supérieure est une petite ouverture correspondant à la lentille du microscope. L'instrument peut servir à observer les moindres pous- sières de l’atmosphère. DUT M. J. M. Macfarlane fait une communication sur la comparaison de la structure des plantes hybrides et de celles de leurs parents. W. PEDDIE, Docteur de l'Université. ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE » Séance du 5 mai 1891. La séance du 5 mai précédait d’un jour la séance plénière des trois classes, dans laquelle, outre les in- térêts généraux qu'il y avait à traiter, devait avoir lieu l'élection du secrétaire perpétuel, successeur de feu le général Liagre. — C’est en raison de ces circons- lances probablement qu'aucun membre n’a fait de communications à la séance de Ja Classe des Sciences. — M. le marquis de Coligny, associé étranger (Ver- sailles) qui y assistait, a fait une lecture très intéres- sante dont voici le résumé. Dans la séance de l’Acadé- mie Royale de Belgique du # avril 1891 le marquis de Caligny avait présenté, entre autres observations, des considérations sur la manière d'utiliser sans inconvé- nient le mouvement acquis des grandes colonnes li- quides. Dans la séance du 5 mai, il a fait une com- munication qui en est le complément, dont il lui paraît intéressant de signaler l'utilité, pour le cas spécial où l’on a des écluses de navigation doubles déjà construites et dont les chutes ont d’assez grandes hauteurs, Dans les circonstances dont il s'agit, au lieu de n’em- ployer,commeill’aurait désiré, qu’une seule écluse simple aussi élevée que la totalité des deux chutes, il propose de vider, quand on trouve l’écluse pleine, la plus haute en relevant une partie de l’eau au bief supérieur, et de remplir la moins élevée, supposée d’abord vide, en ti- rant une partie de l’eau du bief inférieur, Les avan- tages de cette manœuvre sont discutés et, à cause des constructions déjà faites, il se contenterait de proposer deuæ appareils Séparés, tandis qu'il n'y en aurait qu’un seul s'il n’y avait qu'une seule chute d’une grandeur suffisante, FF Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 8 mai 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Ph. Knoll, de Prague : « Sur la théorie des fractions d’approximation, » 2° SGIENCES PHYSIQUES, — M. J. Puluj, de Prague : « Sur les actions de forces électromotrices sinusoïdales de direction constante, dans un conducteur doué de selfinduction, » Les résultats prévus par le calcul, no- tamment ce résultat qui semble paradoxal, à savoir que l'intensité moyenne du courant est indépendante de la selfinduction, tandis que le carré moyen de l’in- tensité et la chaleur moyenne mise en jeu varient avec Ja selfinduction, ont été vérifiés au moyen d’ex- périences que l’auteur a effectuées à l’aide d’un induc- teur terrestre qu'il a construit, —M, Herzig, de Vienne, communique une série de mémoires, à savoir : 1, « Sur l’histoire de l’euxanthone. » L'auteur montre qu’il y a un certain parallélisme entre les propriétés des dérivés de la quercétine et celles des corps du groupe de l’euxan- thone. Les dérivés de la quercétine fournissent des produits alcooliques jaunes, insolubles dans la potasse, etqui se transforment par l’anhydride acétique et l’acétate de soude en combinaisons acétylalcooliques blanches. C'est aussi le cas pour l’euxanthone. On ob- tient une monoéthyleuxanthone jaune, insoluble dans la potasse et qui fournit pourtant une acétyImonoéthyl- euxanthone blanche en insistant sur la réaction, on a la diéthyleuxanthone de Graebe et Ebrart, qui avec la potasse alcoolique en tube scellé redonne le monoéthyl- euxanthone jaune. L'action de l'acide sulfurique con- centré transforme également la diéthyleuxanthone en monoéthyleuxnthone. II. « Etudes sur la quercétine et ses dérivés. VI° mémoire : le poids moléculaire de la quercétine. » En se reportant aux travaux antérieurs de l’auteur, il montre que l’hypothèse de deux oxy- gènes caractéristiques d’une fonction quinone n’est plus nécessaire, Le poids moléculaire déterminé expé- rimentalement est 294, et il concorde très bien avec Pancienne formule de Læwe : C!6H!06, Les analyses de tous les dérivés de la quercétine qui ont été jusqu'ici NOTICE NÉCROLOGIQUE l’objet d'une étude sérieuse concordent aussi avec les valeurs déduites de la formule. II. « Etudes sur la quercétine et ses dérivés : VIF mémoire : fisétine, » Les analyses de Schmid et celles de l’auteur assi- gnent à la fisétine la formule GSHW06: ÿl y à quatre groupes oxhydriles; la quercétine est ainsi une oxylisétine; ce qui s'acccorde bien avec la propriété qu'a la fisétine de donner par oxydation sous l'influ- ence de l’oxygène de l'air, de l'acide protocatéchique et de la résorcine, tandis que dans la même réaction la quercétine donne de l'acide protocatéchique et de la phloroglucine. Sous l’actionde la potasse alcoolique, les dérivés alcooliques de la fisétine sont dédoublés, suivant la formule Ci5H1006- 2 H20 — CT HS Où + CS HS O4 Acide protocatéchique Fisétine Fisétol L'auteur se réserve de poursuivre l’étude du fisétol quand il en aura des quantités suffisantes. Pour le mo- ment, il se contente de constater que le fisétol doit être un dérivé de la résorcine, et d’ailleurs qu'il con- tient un groupe cétonique ou aldéhydique, puisqu'il donne un composéavec la phénylhydrazine. 30 SGrENGES NATURELLES. — M. Ph. Knoll, de Prague « sur les muscles striés clairs et sombres, blancs et rouges. » — M. Graber, de Czernowitz, « contribution à l’'embryologie comparée des insectes. » — Le com- mandant du vaisseau Kerka envoie une étude sur la côte nord du colfe de Patras, concernant les variations dans le sous-sol de la mer, quis’y sont produites. Il est peu probable qu'il s'y soit produit des entrainements de banes, car les conditions ne sont pas les mêmes que dans le golfe de Corinthe, sur la côte ouest de la Grèce ou aux îles loniennes. M. Forster, directeur de la com- pagnie des télégraphes orientaux à Zante, a depuis longtemps étudié ces phénomènes : à la suite de trem- blements de terre, des câbles télégraphiques se sont souvent rompus et dans quelques cas, celte rupture à pu être attribuée à un affaissement du fond de la mer le câble se brisant alors sous l'effort de son propre poids. Le sondage d'un certain nombre de lignes dans le canal de Zante, aux points où M. Forster supposait les plus grandes variations dans le niveau du sous-sol de la mer n’a pas apporté de preuves suffisantes à l’ap- pui de l'hypothèse d'un affaissementdu sous-sol. Quant au phénomène d'émanations sulfureuses dans le golfe de Patras, les renseignements fournis par le consul français à Patras, M. de Gaspary,en confirment la réa- lité, Emil Weyr. Membre de l'Académie, ACADÉMIE DES SCIENCES DE SAINT-PÉTERSBOURG Séance du 22 avril 1891, 1° SGIENGES MATHÉMATIQUES. — M. Bredikhin : Sw les Perséides d'après les observations russes de 1890, Plus de dix astronomes ont observé à Poulkova les aérolithes au mois d'août 4890, Les matériaux recueillis par ces observateurs ont été comparés et étudiés par M. Bre- dikhin qui arrive à cette conclusion : le courant des aérolithes n’est pas délimité par un point ou un petit rond mais présente une surface considérable parsemée de radiants. L'auteur explique ce phénomène par sa théorie, d’après laquelle les aérolithes tombent sur la terre en suivant un trajet présentant des faisceaux co- niques avec un élargissement assez considérable, Les propriétés des orbites de chacun des aérolithes, ainsi que les résultats des observations sur la position des surfaces de ces orbites, font croire que la durée de la chute, et en partie la multiplicité de ses divers radiants peuvent être expliquées par l’action perturbatrice des planètes, et plus particulièrement par celle de la terre, L'auteur se borne à des considérations générales et se propose d'étudier prochainement plus en détail cette question compliquée, — M. Tchebycheff : Rapport sur le travail du capitaine Schiff intitulé : Essai d’une application de la théorie de l’élasticité à l'étude de l'action du tir d'un canon sur son affüt. La question traitée par M. Schiff très importante au point de vue pratique est en même temps une des plus difficiles au point de vue mathématique. Un des plus grands mathématiciens du siècle, Poisson, membre de l’Institut de France, s’en est déjà occupé dans son mémoire publié en 1825 et inti- tulé : Formules relatives aux effets du tir d'un canon sur les différentes parties de son affüt. Malgré tout le génie du savant francais, malgré les perfections apportées depuis dans sa théorie, plusieurs points de cette question dé- licate restent encore obscurs. L'ouvrage de M. Schiff présente un pas en avant vers la solution définitive du problème. Au contraire de ce qu'ont fait Poisson et ses successeurs, l’auteur considère l’action du tir sans supposer que l'affût reste invariable, De là des équa- tions différentielles qui ne peuvent être intégrées sans avoir recours à des simplifications basées sur des sup- positions s’écartant plus ou moins de la vérité ; les for- mules obtenues ainsi ne présentent que des expres- sions approchées de ce qui a lieu en réalité et ce que démontre l'expérience. Le travail de M, Schiff sera pu- blié dans les suppléments aux Mémoires de l’Académie. 20 SGIENCES PHYSIQUES, — M. N. Beketoff : Nolice sur la chaleur de combinaison du Brome et de l'Iode avec le Magnésium. Ces recherches ont pour but de fournir des faits nouveaux confirmant les idées de l’auteur concer- nant l'influence du poids relatif des éléments qui entrent en combinaison sur l'énergie, et partant, sur la chaleur de la combinaison. En outre ces recherches démontrent, -comme conséquence de ce qui vient d’être énoncé, qu'il n'existe point de différence constante dans les cha- leurs de réaction par suite de la substitution d’un élément à l’autre. L'expérience confirme pleinement les prévisions de l’auteur : la chaleur de combinaison du Brome et de l’Iode avec le Magnésium est moindre que la chaleur de combinaison de ce dernier métal avec l'oxygène, tandis que pour plusieurs autres métaux, cette chaleur est supérieure à la chaleur de leur oxydation. 3 SCIENCES NATURELLES. — M. Famintzin : Note de M. Kouznetsoff swr deux nouvelles variétés du genre Rhamnus trouvées dans le Caucase : Rhamnus cathartico L. var. nova de Caucasica Kusnez et Rhamnus alpina L, var, nova Colchiæ Kusnez. O. BACKLUND, Membre de l'Académie. NOTICE NÉCROLOGIQUE EDMOND BECQUEREL Alexandre-Edmond Becquerel, qui vient d'être sou- dainement enlevé à la Science, le 14 mai dernier, na- quit à Paris, le 24 mars 1820. Recu à l'Ecole Normale en 1837, et à l'Ecole Polytechnique en 1838, il préféra à l’enseignement de ces écoles celui quil pouvait puiser dans un commerce journalier ayec son père, et devint en 4838 aide-naturaliste au Muséum. Docteur en 1840, chargé d’une suppléance à la Sorbonne en 1844, professeur à l’Institut agronomique en 1850 à Versailles, et dans ces dernières années au nouvel Ins- litut agronomique créé à Paris, c’est au Conservatoire des Arts et Métiers et au Muséum qu'il à exercé pen- dant de longues années toute son action comme pro- fesseur, Il était membre de l’Institut depuis 1863, et en a été président en 1880. La Société Royale de Londres se l'était associé en 1889. Il était membre de la Société Centrale d'Agriculture de France, et Président hono- raire de la Société d’Encouragement pour lPindustrie NOTICE NÉCROLOGIQUE 301 Nationale. Depuis 1884 il était Commandeur de la Légion d'honneur. En collaboration avec son père, Edmond Becquerel a publié régulièrement des recherches sur la tem- pérature du sol et de l'air dans les circonstances les plus variées, des notes sur le dépôt galvanique de di- vers métaux, et trois ouvrages : un Traité de Physique terrestre et de Météorologie (1847), un Traité d'Electri- cite et de Magnétisme (1855-56) et un Précis de l'histoire de l'Electricité et du Magnétisme (1858). En collaboration avec M. Frémy, un mémoire sur l'Ozone (1852). Les Comptes Rendus de lPAcadémie des Sciences. les Mémoires qu'elle publie, les Annales de Physique et de Chimie, les Annales du Conservatoire des Arts et Métiers contiennent les très nombreux et très variés travaux d’'Edmond Becquerel. Dans l’apereu que je vais tenter d’en donner, je ne viserai pas à être com- plet, j'essaierai seulement de faire deviner l'étendue du champ qu'il a parcouru en tous sens, et de caracté- riser le genre de curiosité qui lanimait. En électricité, ses recherches ont porté surtout sur la conductibilité et la théorie de la pile, En 1843, il vérifie la loi de Joule pour la chaleur dégagée dans les conducteurs ; en 1846, il emploie la méthode correcte du galvanomètre différentiel à la comparaison des résistances des métaux à diverses températures. L'étude de la résistance des dissolutions salines, à di- vers degrés de concentration, plus difficile à cause de l'influence des électrodes qu'il est nécessaire d’élimi- ner, lui fait reconnaitre que, pour certains sels, tels que le sel marin, le sulfate de cuivre, la résistance décroit constamment depuis la plus grande dilution jusqu'à la saturation; pour d’autres au contraire, déliquescents, tels que le sulfate de zinc, la résistance présente un minimum pour une certaine concentra- tion. Même les gaz purs laissent passer un courant continu, sous la pression atmosphérique à la tempéra- ture du rouge (1853); mais la résistance mesurée n’est pas indépendante de l’intensité du courant; elle dépend aussi des métaux et la nature du phénomène reste encore obscure. Plusieurs mémoires, dans lesquels les inventeurs de piles nouvelles ne se sont pas fait faute de puiser, sont consacrés à l’étude des piles, à l'influence des dépola- risants liquides ou même solides, comme dans la pile au sulfate de plomb gâché avec du sel marin (1860); aux forces électromotrices qui prennent naissance entre deux électrodes identiques plongées dans le même liquide, lorsqu'on agite l’une d’elles ; aux piles à gaz (1852), que l’on peut construire avec un seul gaz, l’'hy- drogène, un seul liquide, une solution de chlorure d’or, et deux électrodes d'un seul métal, le platine, dont l’une est entièrement immergée dans le liquide, et l'autre traverse l’atmosphère d'hydrogène et plonge de quelques millimètres seulement dans le liquide. Partisan décidé de la théorie chimique de la pile. Becquerel à pourtant contribué à montrer qu’une diffé- rence de potentiel peut naître entre deux corps, — par quelle mystérieuse action, nous l’ignorons encore, mais le fait est certain — sans action chimique appré- ciable, en établissant (1856) qu’ une machine à frotte- ment débite autant d'électricité, qu'on garnisse ses coussins de tale, de plombagine, ou de bisulfure d’étain et des divers amalgames d'usage courant, — D'ailleurs, l'existence de forces électromotrices thermoélectriques montre bien l'existence de ces forces électromotrices de contact; Becquerel les à étudiées à diverses reprises. eten particulier dans un mémoire paru dans les Annales du Conservatoire des Arts et Métiers (1866), où il a passé en revue un très grand nombre de couples thermoélec- triques formés de métaux purs, d’alliages variés et de sulfure de cuivre, indiquant avec soin la manière de les fabriquer. Un grand nombre de ces couples ont des forces électromotrices supérieures à celle du couple de bismuth et cuivre, 8 fois plus grandes pour le plus puis- sant (tellure-maillechort), 6 fois à 6 fois et demie pour le couple sulfure de cuivre-maillechort, tant de fois essayé depuis par les inventeurs de piles thermoélec- tiques industrielles, — Enfin le couple platine-palla- dium à été comparé au thermomètre à air jusqu'à 13009 et employé ensuite à la graduation des deux ou trois couples les plus énergiques jusqu’à la tempéra- ture de fusion de l’un de leurs constituants. Les tem- pératures de fusion et d’ébullition de quelques corps déterminés au moyen du thermomètre à air avec réser- voir de platine, contestées d’abord par MM. Sainte- Claire-Deville et Troost, ont été ensuite presqu'exac- tement confirmées par les travaux de M. Violle. — Parmi beaucoup de travaux sur les décompositions électriques, et la galvanoplastie, un surtout mérite une mention spéciale, celui de 1844 sur la loi de Faraday, qui est devenu classique, et par lequel nous savons que dans les composés binaires en proportions variées, c'est au métalloide et non au métal que s'applique la la loi des poids atomiques. Les résultats acquis dans l'étude du magnétisme in- duit sont plus nouveaux, plus personnels et forment un ensemble important, Dans un premier mémoire (1845) les indications de Pouillet sur les variations tempo- raires où permanentes que la température produit dans les propriétés magnétiques du fer, de la fonte, de l’a- cier,etc., sont confirmées; le cobalt, le nickel, en masse, en grains, ou en poudre fine sont éludiés, ainsi que les corps les plus variés, et la conclusion suivante s’im- pose : ce n’est pas à un mélange avec des traces de substances magnétiques que sont dues les propriétés magnétiques faibles d’un grand nombre de substances; ces propriétés subsistent même dans les substances pures. À ce résultat déjà important devait s'en ajouter un autre plus curieux en 1849, L'action que subitun corps dans un champ magnétique dépend du milieu qui l'entoure. Certains verres qui se dirigent suivant la ligne des pôles dans l’air s’orientent perpendiculaire- ment à cette ligne et paraissent diamagnétiques, quand ils sont entourés de solutions de certains sels de fer ou de cobalt, plus magnétiques. Inversement une tige de cire blanche, qui est diamagnétique dans l'air, paraît magnétique et s'oriente suivant la ligne des pôles dans les solutions concentrées de chlorure de calcium ou de magnésium, plus diamagnétiques. Les forces appa- rentes résultent d’une compensation entre les actions exercées sur le milieu et celles exercées sur le corps mobile lui-même, comparée très justement par Bec- querel à la compensation analogue dont le principe d’Archimède fournit la mesure pour les corps pesants. L'orientation d’une tige de verre entourée de divers gaz, ou mise dans le vide, a permis alors de vérifier le ré- sultat déjà obtenu par Faraday, que la plupart des gaz n'ont qu'une action très faible, mais que l'oxygène est nettement magnétique. Un autre artifice des plus ingé- nieux à permis d'augmenter beaucoup ces actions : un morceau de charbon poreux, qui dans le vide parait très faiblement diamagnétique, sert à meltre en évidence l'action des gaz dont il s’imprègne en très grande quan- tité; il est très fortement attiré quand c’est de l'oxy- gène qu'il a condensé; repoussé à des degrés divers quand c’est l’un des gaz suivants : protoxyde d’azote, gaz oléfianf, acide carbonique, cyanogène, ammo- niaque, et l’action est assez grande pour permettre des mesures, et montrer que l’action de l’oxygène est pro- portionnelle à sa densité, On concoit quel intérêt s’at- tache à cette découverte, vu la masse énorme d'oxygène qui entoure notre globe ; les variations de pression de cette masse ne peuvent manquer d’influencer l'aiguille aimantée, dans une certaine mesure, et expliquent une partie au moins des variations périodiques et régu- lières que l’on observe dans les éléments du magné- tisme terrestre. | En optique, à part un mémoire en commun avec Cahours (1840) sur les indices de réfraction d’un grand nombre de liquides organiques, mémoire qui contient une première indication de l'influence de la compo- sition chimique, et deux mémoires sur la polarisa- 352 NOTICE NÉCROLOGIQUE ” tion rotatoire magnélique (1846-1849), ce sont les modifications temporaires ou permanentes, chimiques ou physiques, produites par la lumière, que Becque- rel a surtout étudiées. Ces recherches sont d'ailleurs les plus connues; elles sont réunies dans les deux volumes de son traité sur la Lumière (1868), L'étude des actions photographiques la occupé dès le début de son existence scientifique; en 1840, il présentait un mémoire, inséré dans le volume des Mémoires des sa- vants étrangers pour 1841, sur l’action subie par les pla- ques daguerriennes, ou les chlorures, bromures, etc., d’ar gent avec ou sans excès de nitrate, et avait ainsi l'occasion de constater l’action directe des radiations ultraviolettes, et l’action continuatrice des radiations moins réfrangibles. Il est impossible d’entrer dans le détail des résultats obtenus, et ici comme dans ses travaux sur les piles, Becquerel à fourni aux photo- graphes de profession une ample moisson de faits nou- veaux, dontils ont su tirer parti. Mais je veux faire remarquer que ces trayaux ont contribué, comme ceux de Melloni, à donner à la phy sique moderne la notion que représente le mot radia- tion, d’un emploi maintenant si universel. Dans ce mémoire de 1840, Becquerel s’assurait que les radia- tions ultraviolettes de l’arc électrique et celles du soleil produisent les mêmes effets sur toutes les substances photographiques. En 1842, il photographiait les raies du spectre solaire lumineux et ultra violet, et s’assu- rait que la position de ces raies est indépendante dela substance photographique employée, et même, à la demande d’Arago (1843), du milieu qui la baigne ; il vérifiait aussi qu'il en est de même desraies que rév vèle la phosphorescence. En 1843, étudiant l’action des écrans colorés ou non, il reconnaissait que si un écran atténue ou fait disparaitre une des manifestations de la radiation, il agit de mème sur toutes les autres ma- nifestations, lumière, action chimique sur une subs- tance quelconque, phosphorescence, fluorescence. Ces notions sont devenues vulgaires, un mot les résume. « la radiation est absorbée »; mais ce n’est point une raison pour oublier à qui nous devons le droit d’em- ployer ce mot, ni combien d'expériences il suppose, qu'on ne mentionne même plus. Dès 1839, Becquerel avait reconnu qu'on fait naître un courant électrique entre deux liquides (bichlo- rures, bromures, etc, — et solutions salines dans l’al- cool), quand on éclaire la surface de séparation et cette observation étendue aboutissait en 1841 à la construction de l’actinomètre électrique, qui permet de mesurer par une force électromotrice l’action pro- duite par la lumière sur les matières impressionnables telles que le chrorure d'argent, instrument dont, à mon sens, on n’a pas encore ré tout ce qu'il peut fournir de notions sur la nature des actions photographiques. Enfin en 1848, des observations antérieures répé- tées et discutées amenaient Becquerel à produire sur une lame couverte de chlorure d’argent une image colorée du spectre solaire, par la seule action de la lumière; ces images qui datent de plus de quarante ans, et qu'on n’a pu fixer, se sont conservées intactes dans l’obscurité et rivalisent d'éclat avec celles que M. Lipp- mann à récemment obtenues et fixées par un procédé physique entièrement différent, Rappelons à quel mode fe préparation Becquerel s'était enfin arrêté en 1854 : la plaque d'argent est suspendne dans une solution éten- due d'acide chrorhydrique, qu’on décompose au moyen d’un courant, Un voltamètre à eau acidulée placé dans le circuit fait connaître, par le volume d'hydrogène dégagé, le volume du chlore déposé sur la plaque, et on arrête lorsque cette quantité est de 6,5 à 6,9 cen- timètres cubes par décimètre carré d'argent, ce qui donne une couche d'environ un millième et demi de millimètre de chlorure d'argent. La petitesse de ce nombre indique que la théorie invoquée par M. Lipp- mann pour ses propres images n’est plus tout à fait suffisante ici et doit étre au moins complétée. Parlerai-je des recherches sur la phosphoreseence (1860 et suiv.), l'œuvre capitale d'Edmond Becquerel? Deux mots ne seraient pas assez, et celte notice a des bornes; d'ailleurs l'importance même de ces tra- vaux les a rendus classiques, il n’y à pas un traité de physique générale, en France ou à l'Étranger, qui ne les mentionne, ne résume les résultals, et ne décrive le phosphoroscope. Il ne faut pas se contenter de ces ré- sumés, il faut lire le traité sur la Lumicre : influence de l'intensité et de la couleur des radiations inci- dentes ; loi d'émission de la lumière par le corps phos- phorescent, en fonction du temps; inégalités des wvi- tesses d'émission des diverses couleurs ; quantité totale de lumière accumulée, et influence d’une élévation de température pour en précipiter l'émission ; influence du mode de préparation des corps phosphorescents sur la lumière qu'ils émettent, ete., tout a été étudié avec précision, Le nombre el l'étendue des mémoires publiés par Becquerel, au cours de sa longue carrière, la variété et plus encore la nature des sujets abordés rendent difficile de donner en peu de mots une idée claire de son œuvre. Il a presque fono me dédaigné les phéno- mènes déjà coordonnés, groupés autour d’une théorie précise, et dont il semble qu'il ne reste plus qu'à faire de bonnes et nombreuses mesures; et quand il en a abordé l’étude, ce qui l’a toujoursattiré ce sont sur- tout les aspects encore indécis et mal connus de ces phénomènes. Souvent il a réussi, à force de peine, d'expériences multipliées et modifiées de toutes les manières imaginables, à apporter de la clarté là où il n'y avait avant lui que confusion et ignorance ; jamais il n'a cru inutile de contrôler les résultats obtenus par d’autres physiciens ou admis sans preuve directe, par ce penchant trop naturel à étendre les énoncés bien en dehors des limites des observations, Il toujours eu soin de faire porter ses observations surles substances les plus diverses, et pour une même subs- lance chimique, sur toutes ses variétés obtenues par tous les modes de préparation, C’est un genre de re- cherches qui a compté peu de représentants pendant le dernier quart de siècle ; la plupart des esprits subis- saient la séduction des admirables travaux de Coulomb, de Volta, de Fresnel, d'Ampère, qui par une seule ex- périence dans laquelle la nature de la matière em- ployée intervient à peine, nous ont donné une con- naissance si complète déjà des propriétés du milieu impondérable qu'étudie presqu'exelusivement la phy- sique générale. Mais pour que dans ces recherches un corps puisse servir de type et faire connaître du pre- mier coup les propriétés d’un groupe important, il faut que le classement soit déjà fait ; travail des deux ‘siècles qui nous ont précédé pour les phénomènes électriques. C'est un travail de ce genre, poussé du premier coup très loin, qu'a accompli Becquerel, dans ses re- cherches sur les propriétés magnétiques de tous les corps, et dans celles sur la phosphorescence. Une jeune et vaillante pléiade de chimistes, munis d’une solide instruction physique, a repris le goût de ces recherches variées, et espère découvrir entre les propriétés phy- siqques des corps et leur constitution chimique des re- lations générales : les deux volumes sur /a Lumière, ses causes et ses effets, contiennent nombre de faits bien dignes d’exciter leur curi iosité ; à ceux qu'intéresse sur- tout la physique générale, les mêmes faits rappellent combien les meilleures théories sont encore peu com- préhensives et incapables de saisir les relations entre la matière pesante et le milieu impondérable, ce qui est aujourd’hui le grand mystère, Marcel BRiLLOUIX. Louis Orvier Le Directeur- Gérant : Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 2° ANNÉE NON 15 JUIN 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENC PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER L’INSENSIBILISATION CHIRURGICALE Si l'on songe à toutes les souffrances épargnées depuis un demi-siècle aux hommes et aux ani- maux par la découverte des anesthésiques, on de- meure convaincu qu'aucune des inventions dont la science a doté l'humanité n’est plus merveilleuse et plus bienfaisante. Nous allons essayer d'exposer les faits et de discuter les méthodes qui permettent d'appliquer ces agents à l'insensibilisation chirur- gicale. I L'origine de cette application est véritablement scientifique : elle appartient à la physiologie expé- rimentale. Les propriétés du premier agent anesthé- sique connu ont été, en effet, révélées parles expé- riences faites en 1799 par Humphy Davy, alors pré- parateur du médecin Beddoës, qui avait fondé à Clifton, près de Bristol, un /nstitut pneumatique pour y étudier l’action physiologique et thérapeutique des corps gazeux. On ne saurait conserver aucun doute à cet égard, car, dans l'un de ses mémoires sur le protoxyde d'azote, Davy a indiqué très net- tement les propriétés anesthésiques de ce gaz et la possibilité de les utiliser en chirurgie. « Le pro- toxyde d'azote, dit-il, parait jouir entre autres pro- priétés de celle d’abolir la douleur. On pourrait l'appliquer avec avantage dans les opérations de chirurgie qui ne s'accompagnent pas d'une très grande effusion de sang.» Mais ce n'est qu'en 1844 que le dentiste américain Horace Wells, à la suite d'une séance de vulgarisation scientifique, où l’on avait répété sous ses yeux les expériences de Davy, résolut de tenter le premier essai pra- tique d’anesthésie chirurgicale. L'expérience réus- sit et Wells démontra que l’on pouvait pratiquer l’exlraction d’une dent sans que le patient res- REVUE GÉNÉRALE, 1891. sentil aucune douleur ; mais il reconnut bien vite aussi que ce procédé d’anesthésie ne pouvait pas être appliqué dans les opérations de longue durée. Il entreprit aussitôt de perfectionner son inven- tion, mais ilne réussit qu'à se voir ravir le fruit de son iniliative et de ses efforts par son élève, son collègue et son ami, Morton. Abreuvé de dé- goût, Wells, après avoir appris aux hommes à vaincre la douleur, s’ouvrit les veines dans un bain, le 14 janvier 1848, tandis qu'il respirait de l'éther pour se procurer une mort plus douce, seul bénéfice qu'il dût retirer de sa découverte. Mortonavaitabandonnéson maitre pours’associer à un chimiste du nom de Jackson, avec lequel it en- treprit d'utiliser dansla grande chirurgie l’éther sul- furique, dont les propriétés anesthésiques avaient élé déjà entrevues par Thorntlon, par Faraday, et si- gnalées par Orfila et Christison. Il parait même cerlain que, dès 1842, l’éther avait été utilisé dans les opérations par divers praticiens et, entre autres, par Crawfort Long, médecin à Jefferson en Géorgie. Si l’on voulait d'ailleurs rechercher le véritable inventeur, non du premier agent anesthésique pratique, mais de l’anesthésie elle-même, il fau- drait remonter jusqu'à l’homme qui eut le pre- mier l’idée de s'enivrer pour échapper à la dou- leur. Toutefois on ne saurait méconnaitre dans Horace Wells l'initiateur, l'apôtre, pourrait-on dire, de l'anesthésie chirurgicale. Les expériences cliniques faites par Morton à l'hôpital de Boston ne tardètrent pas à être répétées avec le plus grand succès en Angleterre d'abord, puis enFrance et en Allemagne, et bientôt dan toute l'Europe. L 394 D' R. DUBOIS. — L'INSENSIBILISATION CHIRURGICALE Bien que les effets obtenus fussent déjà fort sa- tisfaisants, puisque dans nos grands hôpitaux lyonnais et dans d’autres services on accorde sou- vent encoreaujourd’hui la préférence à l’anesthésie par l'éther, les recherches se multiplièrent et les savants envahirent en foule ce nouveau domaine. C'est qu’en effet, comme l’avait dit Velpeau en 1847 à l’Académie des Sciences, l’insensibilisation est un fait de nature à impressionner profondément, non seule- ment la chirurgie, maïs encore la physiologie, voire même la psychologie. De ces recherches, entreprises pour la plupart dans des laboratoires de physiologie, sont sorties des découvertes nouvelles, d'un intérèt moins ap- parent peut-être que les observations cliniques, mais qui n’en constituent pas moins au point de vue scientifique et pratique de précieuses acquisi- tions. La plus importante pour la chirurgie est due au physiologiste français Flourens, qui, le 8 mars 1847, annonçait à l'Académie des Sciences les cu- rieux effets produits sur les animaux par les in- halations d’un composé chimique, le chloroforme, découvert en 1831 par Soubeiran : «Si l’éther est un agentmerveilleux etterrible, disait Flourens, le chlo- roforme estplus merveilleux etplusterribleencore.» En raison de ses qualités toutes spéciales, le chloroforme remplaca bientôt presque partout l’éther, mais en même temps les accidents mortels se multiplièrent. Comment régler l’action du chlo- roforme? Comment domestiquer cette force bru- tale qui faisait ici des merveilles et là supprimait la vie avec la douleur sans que l’on sût pourquoi ? Mille moyens empiriques furent imaginés pour être presqu'aussitôt après abandonnés, parcequ'on avait négligé une condition fondamentale du suc- cès, l'étude physiologique du chloroforme. On cherchait vainement à conjurer des accidents dont on ignorail le mécanisme, par des moyens dont on ne pouvait calculer l’effet. Il C’est à Paul Bert que revient l'honneur d’avoir ramené le problème sur son véritable terrain, ce- lui de l’expérimentation méthodique, par les mé- langes titrés d'air et de chloroforme : il y fut con- duit par ses belles recherches sur l'action de la pression barométrique sur les êtres vivants. Le savant physiologiste français avait repris l'étude de l'a- nesthésie par le proioxyde d’azote à peu près au point où l'avait laissée l’infortuné Horace Wells. Mais, plus heureux que lui, il parvint, en substi- tuant à l’empirisme grossier du dentiste américain, la méthode expérimentale, dont son illustre maitre Claude Bernard venait de doter définitive- ment la physiologie, à démontrer que la possibi- lité d’obtenir une anesthésie prolongée par le protoxyde d'azote n'était pas une conceplion chi-- mérique, Cependant toute tentative dans cette voie semblait vouée d'avance à l’insuccès : aussi cette découverte de Paul Bert produisit-elle d’abord une surprise d'autant plus profonde qu’elle n’était pas due au hasard, mais à une analyse rigoureuse- ment scientifique établissant une fois de plus l'in faillibilité du déterminisme en physiologie. Respiré pur, le protoxyde d'azote anesthésie, mais ne permet pas l’entretien de la fonction res- piratoire, en dehors de laquelle la vie n’est pas possible. D'autre part, si l’on mélange à ce gaz assez d'oxygène pour que la respiration puisse s'exercer, il perd aussitôt son action anesthésique. Or, l'explication de ce fait, en apparence para- doxal, serail encore à trouver, si l’ingénieux ex- périmentateur n'avait su démontrer qu'elle ressort clairement de la loi qu'il avait établie antérieure- ment, à savoir que : l'action des gaz sur les êtres vi- vants est réglée par leur tension partielle. En d'autres termes, quand le protoxyde d'azote est respiré pur, il pénètre dans le poumon sous la pression d’une atmosphère et, dans cet état physi- que, il est anesthésique. L'effet sera le même si l’on offre au poumon, c’est-à-dire au plasma san- guin qui le traverse, un mélange gazeux où la pres- sion particulière sera encore d’une atmosphère, la pression totale du mélange étant naturellement supérieure. Mais on conçoit facilement qu'il soit impossible d'introduire dans le poumon un gaz à une pression supérieure à celle d'une atmos- phère à moins que le patient ne soit lui-même plongé toutentier dans un milieu gazeux dont la pression sera égale à celle d’un mélange respirable dans lequel le protoxyde d'azote sera soumis à une pression partielle d’une atmosphère. L'expérience vint démontrer l'exactitude rigoureuse des indi- cations que pouvait fournir la théorie à la pratique en physiologie et en thérapeutique. L’anesthésie prolongée, sans asphyxie, par le protoxyde d'azote, fut en effet obtenue immédiatement en faisant respirer un mélange de cinq volumes de pro- toxyde d'azote et d'un volume d'oxygène, amené en même temps que le sujet en expérience à une pression supérieure de 15 centimètres de mercure seulement à la pression atmosphérique. Là où toutes les tentatives empiriques d’Horace Wells avaient échoué, la méthode scientifique triomphait. On put croire un instant que l'idéal de l’anesthésie générale était enfin trouvé: au bout d’une ou deux minutes l’insensibilité complète et la résolution musculaire élaient obtenues sans révolte de l'organisme; la respiration et la circu- lation se maintenaient régulières; le sang conser- vait sa couleur ; la température animale, son de- gré, et, après 3 ou 4 respirations à l'air libre, le sims ÉÉNÉÉIDe tR S D' R. DUBOIS. — L'INSENSIBILISATION CHIRURGICALE 359 sujet se réveillait, avec toute sa vivacité, sans aucun malaise, sans aucune fatigue. On comprend que dans de telles conditions l'anes- thésie ait pu étre prolongée sans danger pendant plusieurs heures consécutives; d’ailleurs, le proto- xyde d'azote ne s’accumule pas dans l'organisme, son élimination et son absorptionétant rigoureuse- ment réglées, comme la dissolution d’un gaz dans un liquide, par le rapport des tensions du gaz dis- sous dans le plasma sanguin et de celui du mélange. Malheureusement le procédé de Paul Bert n'était applicable que dans de grands appareils assez vastes pour contenir le patient et l'opérateur avec ses aides, et dans lesquels il fallait comprimer l'air et le mélange anesthésique soit au moyen de pompes mues par de puissantes machines à gaz ou | à vapeur, soit à grand renfort de bras (fig. 1). Les dif- ficultés pratiques, le prix considérable de ces appareils, dont quelques-uns seulement fonelion- nèrent dans les grands hôpitaux et chez de rares pralti- ciens, empêchèrent l'adoption dans la pratique courante de la meilleure mé- . thode d’anesthésie connue jusqu'à ce jour. celle de Paul Bert. C'est alors que l’infaligable chercheur, auquel on a si violemment et si injustement reproché ses expériences sur les animaux, songea à engager dans une autre direction la lutte contre la douleur. Il entreprit de rechercher si la loi physiologique serait la même pour un mélange de chloroforme et d'air que pour un mélange de protoxyde d'azote et d'oxygène. Dans cette hypothèse, la proportion de vapeur de chloroforme suffisante pour endor- mir étant moins considérable que celle du pro- toxyde d'azote, il n'aurait plus été nécessaire de faire intervenir la pression extérieure pour obte- nir un état d'équilibre dans lequel l'organisme aurait été maintenu au même degré de saturation aussi longtemps qu'il l’eût fallu. Après quelques essais préliminaires, que l'imperfection des pre- miers appareils gazométriques employés avait en- tachés d’inexactitude, Paul Bert pencha d'abord vers l'hypothèse dont il recherchait la vérification expérimentale et qu'il devait bientôt abandonner. IT Fig. 4. — Chambre à anesthésie par le mélange de protoxyde d'azote et d'oxygène sous pression. ÆE, lit d'opération. D, sac renfermant le mélange anesthésique. A, B, C, pompe destinée à comprimer l'air dans la chambre à anesthésie. C'est-à ce moment que je commençai, en qua- lité de préparateur de l’éminent physiologiste et sous sa direction, une longue série de recherches, qui n'étaient pas sans danger à cause du contaet prolongé et répété de l’expérimentateur avec les vapeurs du terrible agent anesthésique. Cette fois lesexpériences étaient plus rigoureusement conçues et, si l'espoir de rauger les vapeurs anesthésiques sous la même loi physiologique que les gaz devait être abandonné, il n'en devait pas moins sortir des efforts communs du maitre et de l'élève une mé- thode pratique dont la supériorité ne saurait être contestée : l’anesthésie par les mélanges litrés mécani- quement dont on trouvera plus loin la description. D’autres expérimentateurs, et l’auteur lui-même de cet article, avaient aussi cherché à perfectionner l'anesthésie chloroformique, mais en s'appuyant sur une donnée dif- férente : on £e pro- posait de diminuer la quantité de chlo- roforme introduite dans l'organisme pour provoquer le sommeil, en prédis- posant, en prépa- rant les centres ner- veux par l’adminis- tralion d’un agent narcotique : c’est la méthode des anesthé- sies mixtes. En 1869 Claude Bernard avait préconisé, pour la pratique chirurgicale, après l'avoir expérimentée sur des ani- maux, l'association de la morphine au chloroforme. Mais ce n’est qu'en 1873 que le procédé de Claude Bernard fut appliqué dans la clinique par le chirur- gien allemand Nussbaum pour l’extirpalion d'une tumeur chez une femme. Dans cet intervalle de temps, la méthode des anesthésies mixtes avait été pratiquée publiquement à l'Hôtel-Dieu de Paris, en 1872, et sur un assez grand nombre de malades dans le service de Cusco; seulement on se servait du chloral et non de la morphine. J'étais alors élève stagiaire dans ce service, quand un matin on transporta à la salle Saint-Paul une femme hysté- rique qui s'était luxée la cuisse en se précipitant par une fenêtre. L'état de surexcitation de la malade était tel que l’on jugea à propos de lui administrer, en une seule fois, une potion conte- nant un gramme de chloral. Une heure après Cusco arrivait au lit de la malade et déclarait que l’anes- thésie et la résolution musculaire seraient extrè- mement difficiles à obtenir chez cette femme hys- térique, dont l'agitation était encore considérable. Mais, au grand étonnement des assistants, qui connaissaient la sûrelé des jugements du maitre 396 D' R. DUBOIS. — L'INSENSIBILISATION CHIRURGICALE en matière d'anesthésie, la malade tomba, sans période d'excitation, dans la résolution muscn- laire la plus complète après avoir respiré une très petite quantité de chloroforme. L'idée me vint alors que le chloral ne devait pas être étranger à ce résultat imprévu, et j'oblins de Cusco l’autorisa- tion d’administrer à tous les patients qui devaient être anesthésiés un gramme de chloral une heure avant l'opération. Dans tous les cas tes bons effets de cette méthode mixte se montrèrent constants et fréquemment Cusco faisait remarquer aux per- sonnes qui assistaient à sa clinique combien la période d'excitation était atlénuée et abrégée, même chez les alcooliques, et combien aussi le sommeil était calme et régulier comparativement à celui que l’on obtenait par le chloroforme seui. Cette pratique était suivie depuis quelques mois déjà à l'Hôtel-Dieu et la statistique contenait un assez grand nombre de cas, lorsque M. Forné, chi- rurgien de la marine, publia quatre nouvelles observations favorables à l'adoption de ce proédé mixte, Je crois que si l'habitude de donner succes- sivement le chloral et le chloroforme ne s’est pas propagée, cela tient uniquement à ce que l'on ne s'est pas loujours conformé aux indications que j'ai le premier formulées el que l’on a donné des doses beaucoup trop fortes de chloral (2 à 3 gr.) trop peu de temps avant d’administrer le chloro- forme. Quoi qu'il en soit, la seule méthode d'anesthesie mixte qui jouisse actuellement d’une certaine con- fiance, est celle qui a été imaginée par MM. Dastre et Morat. Elle consiste à introduire dans l'écono- mie, par injection hypodermique, quelques ins- lants avant l'administration du chloroforme, une petite quantité de morphine associée à l’atropine. principe actif de la belladone. L’atropine, qui a passé pendant longtemps pour l’antidote de la morphine, a seulement pour effet de supprimer certains symptômes de l’empoisonnement par cet alcaloïde, tels que les vomissements qui rendaient son application difficile, à l’état isolé, dans la méthode de Claude Bernard. Elle a en outre, vis- à-vis du chloroforme, l'avantage de paralyser la sensibilité réflexe des nerfs et des centres cardia- ques et respiratoires, qui dans les conditions nor- males peuvent, sous l'influence de l'excitation produite parles vapeurs anesthésiques, déterminer des accidents graves et parfois mortels. Dans la pratique des laboraloires aucun procédé d’anesthésie ne peut être comparé, sous le rapport de linnocuité et la commodité, à celui de MM. Dastre et Morat, quand il n'y a aueun incon- vénient à faire pénétrer en même temps dans l'or- ganisme trois agents toxiques capables de modifier profondément l’état physiologique du sujet. Les de résultats cliniques obtenus particulièrement à Lyon dans les services de MM. Aubert, Tripier et Gayet sont également favorables à la généralisation de cette méthode. Toutefois il résulte des faits rapportés dans une récente discussion à l’Académie de Médecine qu’elle ne présente pas chez l’homme la même innocuité que chez le chien; d'ailleurs l’activité de l’atropine seule est loin d'être identique dans ces deux orga- nismes et ce n'est qu'avec une extrême prudence qu’elle doit être administrée dans la clinique en injection hypodermique, même associée à la morphine. IV Beaucoup d'autres procédés mixtes ontélé essa- yés. On a conseillé de faire ingérer, avant de donner le chloroforme, de l'alcool ou des vins généreux. L'alcool et le chloroforme agissent dans le même sens, mais comme je l'ai démontré !, si l’on abrège ainsi la période de début, ce qui est toujours un avantage, on diminue en revanche considérable ment la résistance du sujet à une anesthésie pro- longée. On ne doit pas ranger parmiles procédés mixtes ceux qui consistent à commencer une anesthésie avec le protoxyde d'azote et à la continuer avee le chloroforme ou l’éther, méthode peu pratique con- seillée autrefois par Clover. J’en dirai.autant des mélanges de chloroforme et d'alcool ,méthyliques, éthylique ou autres, ces liquides n'ayant d'autre effet que de modérer la rapidité de la vaporisation du véritable anesthésique; on obtiendrait d’ailleurs le même résultat en leur substituant un liquide inactif miscible au chloroforme, tel que les huiles, les pétroles lourds ou la glycérine. Il s'agira au contraire d’une véritable anesthésie mixte si l'on fait respirer les vapeurs d'un méiange de chloro- forme et d'éther, mais il ne semble pas que l’on ait pu obtenir des effets particulièrement avanta- geux de celte préparation pharmaceutique. C'est à Lort également que l’on a vanté l’asso- ciation des effets physiologiques de la cocaïne et du chloroforme. J'ai démontré par l'emploi des mélanges titrés, seul procédé permettant d’avoir toujours des résultats comparables, que la cocaïne, loin de favoriser l’anesthésie chloroformique, en- trave son développement régulier. La cocaïne est le principe actif de la coca, pelit arbrisseau cultivé dans certaines localités des Andes, en Bolivie, au Pérou, dans la Nouvelle-Gre- nade et dans la République argentine, où les indi- gènes l'emploient depuis longtemps, comme nous le thé et le café, pour combattre la fatigue. La cocaïne estcependant un anesthésique géné- 1 V. Bull. de la Soc. de Biologie, nov., 1883. D' R. DUBOIS. — L'INSENSIBILISATION CHIRURGICALE 357 ral pour les animaux vertébrés; mais ce n'est que lorsqu'elle est administrée à des doses dangereuses ou mortelles qu’elle détermine une insensibilité généralisée. À dose moins élevée elle provoque une violente excitation des centres nerveux, qui ne peut que nuire à la production du sommeil chlo- roformique. Ce seul fait aurait dû empêcher cer- tains auteurs dé considérer la cocaïne comme un curare de la sensibilité. Le véritable curare ou poison des Indiens frappe les terminaisons motrices des nerfs, lorsqu'il est introduit dans la circulation, en vertu d’une é/ection que ne possède nullement la cocaïne pour les terminaisons sensitives, puisque son aclion, dans les mêmes condilions,retentit avec violence sur tout le système nerveux sensitif. L’ori- gine de cette erreur est dans ce fait extrêmement important au point de vue pratique que, lorsque les terminaisons sensitives sont mises en contact avec une quantité suflisante de cocaïne, celles-ci sont paralysées pendant un temps assez long pour qu'il soit possible de pratiquer sur les parties péri- phériques de l’organisme les opérations les plus ordinairement douloureuses, sans provoquer la moindre souffrance. Pour d’autres raisons d'ordre expérimental,qu'il serait trop long de rappeler ici, on ne doit pas non plus considérer la cocaïne comme un véritable anesthésique général, car elle n'agit pas, quoiqu'on en ait pu dire, sur les ani- maux inférieurs et sur les plantes à la manière de l’éther et du chloroforme. Mais la cocaïne forme en quelque sorte le pas- sage naturel des anesthésiques généraux aux anes- thésiques locaux. Grâce aux propriétés analgé- siques et lopiques de la cocaïne, on peut aujour- d’hui supprimer la sensibilité de la plupart des | points du corps silués à la surface où à une faible distance de celle-ci, sans que l’élal normal du su- jet soit notablement modifié. L'opération de la cataracte et toutes celles qui portent sur la surface de l’œil sont pratiquées maintenant sans douleur sur le malade complètement éveillé. Il en est de même pour les muqueuses du nez, de la bouche, du larynx, de l’urêthre, etc., etc. On peut de même at- ténuer considérablement la douleur physiologique de l'accouchement, surtout chez les primipares, ainsi que je l’ai démontré par les expériences faites avec la collaboration de M. Doléris à la clinique obstétricale de la Faculté de Paris. Malgré les grands avantages que présente la co- caïne pourréaliserl’anesthésie localisée, son emploi n'est pas (oujours exempt d'inconvénients et les chirurgiens accordent encore souvent la préférence à des procédés qui permettent d'obtenir une action plus profonde sans introduire aucune substance toxique dans l’économie. La compression d'un nerf ou du vaisseau principal d’un membre, où mieux encore de ce membre tout entier par une bande de caoutchouc peut donner d'excellents résultats. Dans ce dernier cas, les terminaisons nerveuses privées d'éléments putrilifs par le refoulement du sang de la périphérie vers le centre du corps perdent rapidement toute sensibilité. Les mélanges réfrigérants de glace et de sel, les pulvérisations de liquides très volatils tels que l’éther et le chlo- rure de méthyle produiront des effets analogues en faisant, d’une part, contracter les vaisseaux san- guins qui deviennent exsangues et d'autre part en suspendant pour un temps par l’aclion du froid, toute sensibilité dans l'élément nerveux sensitif!. Malheureusement les procédés d’anesthésie locale ne sont pas applicables dans tous les cas et cette revue rapide des principales méthodes d’anesthé- sie générale entraine la conviction que l’anes- thésique idéal, c’est-à-dire le vrai curare de la sen- sibilité, est encore à découvrir. Toutefois il ne nous est pas défendu d’espérer, puisque nous voyons des malades hystériques chez lesquels toute sensibilité a disparu sans que pour cela les autres fonctions physiologiques soient no- tablement entravées, et peut-être arrivera-t-on à la solution de cetintéressant problème par quelque procédé tout à fait différent de ceux dont nous avons parlé : il n’y a aucune raison, en effet, pour que la science ne réalise pas dans lavenir ce que la nature fait chaque jour sous nos yeux. Déjà le sommeil hypnotique a pu être utilisé dans quelques cas particuliers, mais il est facile de comprendre qu'il n'est pas nécessaire de provoquer le sommeil ou de paralyser l’activité des centres nerveux el des nerfs moteurs pour obtenir une insensibililé répondant à tous les besoins de la chirurgie courante. Il y a même dans cette manière de pro- céder de nombreux facteurs d'accidents mortels qu'il importerait d'éliminer. La douleur n’a pas en général son origine dans les centres nerveux; dans l'immense majorité des opérations chirurgicales elle provient uniquement de traumatismes ou d’excitations exagérées et anormales des terminaisons nerveusesou des nerfs 1 Le refroidissement localisé peut, dans certains cas, per- mettre d'obtenir une sorte d’anesthésie générale. Chez les reptiles ct les batraciens (lézards, couleuvres, grenouilles), j'ai pu congeler l’encéphale et la tête tout entière sans pro- voquer la mort. Cette méthode d’anesthésie est particulière- ment avantageuse pour pratiquer des opérations sur les vipéres, que l’on ne peut endormir par le chloroforme sans les tuer. Elle m'a permis de mettre à nu les nerfs de la glande à venin et d'introduire dans le canal de celle-ci une petite canule de verre, sans avoir à redouter le moindre acci- dent, tant que le cerveau de l’animal était suffisamment re- froidi. Mais J'ai échoué dans toutes les tentatives analogues que j'ai faites sur les animaux à sang chaud, chez lesquels la rapidité de la circulation est telle que le corps se refroïdit tout entier et que l'animal meurt avant d’étre à proprement parler anesthésié. 398 D' R, DUBOIS. — L’INSENSIBILISATION CHIRURGICALE sensitifs. Mais ces excitations ne seront à propre- | ment parler douloureuses qu'autant qu'elles auront été perçues par nos centres psychiques, c'est-à-dire qu’elles seront conscientes. Il est bien évident que l'on supprimera la souffrance en paralysant l’or- gane révélateur; mais on arrivera au même résultat en interceptant toute communication entre la par- tie blessée et ces mêmes centres, sans être forcé d'amoindrir ou d'anéantir leur activité. Pour cela il suffit de diminuer ou de supprimer temporaire- ment le fonctionnement physiologique des élé- ments anatomiques qui relient les parties sensibles de notre organisme aux centres psychiques, c'est-à- dire les fibres nerveuses sensitives, les cellules sensitives des racines ou des cordons médullaires, ou bien encore les ganglions bulbaires ou céré- braux servant poùr ainsi dire de relais aux excita- tions marchant de la périphérie vers les couches supérieures de notre encéphale, qui sont le siège de la conscience. Tant que la physiologie expérimentale n’aura pas trouvé le moyen pratique d'obtenir ce résultat si désirable à tous les points de vue, les grandes opérations chirurgicales ne pourront pas êlre pratiquées sans le secours des anesthésiques gé- néraux, qui auront toujours pour effet de plonger le malade dans un sommeil profond, d’où il ne peut sortir comme du sommeil normal, parce qu'il est privé de toute sensibilité et dans un état d'inertie intermédiaire entre la vie et la mort. v Les anesthésiques généraux connus aujourd'hui sont nombreux; mais de l'avis unanime des chi- rurgiens, aucun d'eux ne peut rivaliser avec le | chloroforme; et, si, dans quelques hôpitaux, comme ceux de Lyon, on emploie encore souvent l’éther, malgré ses nombreux inconvénients, c’est uniquement parce que si est moins merveilleux, il est aussi moins dangereux que le chloroforme ; l’acli- vité toxique de l’éther étant moins redoutable, il n'est pas aussi indispensable d'observer rigoureu- sement la loi physiologique à laquelle elle obéit. | Le chloroforme est une arme de précision; il en | possède tous les avantages et tous les inconvé- nients, et la négligence en apparence la plus in- signifiante dans une anesthésie chloroformique peut aussi bien faire pencher la balance du côté du réveil que du côté de la mort, ainsi qu'il ré- sulte de l'examen attentif des trop nombreux cas de décès qui se produisent chaque année dans la clinique et de l'étude expérimentale de son action physiologique. On n’a pas reculé devant les dangers du chloro- forme parce que jusqu'à présent aucun anesthé- sique ne s’est montré aussi merveilleux dans ses | effets; mais, le chirurgien de nos jours est encore plutôt un artiste qu'un scientifique, dans lersens propre du mot. Aussi, en matière d’anesthésie, chacun a-t-il son genre personnel qu'il n'hésite pas à déclarer supérieur à celui de son confrère, dont la manière, parfois tout à fait opposée, n'en est pas moins aussi absolument empirique. Les uns se montrent partisans de sidérer, de fou- droyer, de terrasser brusquement le malade par une forte dose de chloroforme, tandis que les autres prétendent que c'est là un procédé détestable, qu'il fait beaucoup de victimes et que l’on doit verser le chloroforme goutte à goutte, endormir lentement, tout en surveillant attentivement sur une échelle graduée la quantité de chloroforme échappée du flacon. Celui-ci enfin commence par foudroyer, puis il suspend linhalation, pour foudroyer de nouveau si le patient fait un mouvement ou laisse échapper une plainte. Celui-là foudroie encore et entretient le sommeil par de petites doses répétées. Il y a cent manières empiriques, point de règle scienti- fique, el c'est toujours le malade, par un cri de douleur, par un mouvement désordonné, parfois brusque et dangereux, ou-bien par quelque mani- festation inquiétante de la pupille, de la respira- tion ou du cœur qui avertit le chirurgien de la souffrance qu'il éprouve ou du danger qu'il court. Que de fois hélas! la plainte suprême de cet orga- nisme sans défense a-t-elle été vaine ou trop tard entendue pour empêcher celui qui dormait au bord de l’abime de rouler jusqu’au fond et d’y trouver la mort! Il résulte de ce fâcheux élat de choses que des milliers d'élèves sortant chaque année des Facultés avec un diplôme de docteur, sans avoir jamais fait une anesthésie, abordent la pratique avec la con- viction que chacun donne le chloroforme comme il l'entend et que si les hommes les plus éminents ne sont pas d’accordsur la règle à suivre,c’est qu'au fond elle n’a qu'une importance secondaire. D'ailleurs, si d'aventure un accident se produit, on répète ce que l’on a entendu dire: « C'était de mauvais chloroforme », et c’est le pharmacien qui a tous les torts. Il n'est pas douteux que la pureté du chloro- forme, ou plutôt sa qualité, ait une importance très grande. On rencontre dans le commerce des chloroformes fabriqués avec des alcools mal rectifiés, véritables résidus de distillation, renfermant outre l'alcool élhylique des alcools amyliques, méthylique et au- tres, des huiles essentielles, des éthers, etc, ele. Ces mélanges sont traités par l’hypochlorite de chaux brut: on chauffe et la réaction, tantôt tranquille, tantôt tumultueuse. donne naissance à un autre D' R. DUBOIS. — L'INSENSIBILISATION CHIRURGICALE 399 mélange de composés chlorés dont quelques-uns peuvent être très toxiques ou trèsirritants à faible dose et que la plus savante distillation fractionnée ne permet pas d'isoler. Sice mélange possède à peu près le même point d’ébullition que le chloroforme pur, s'il ne réagit pas sous l'influence de quelques réactifs grossiers propres à déceler la présence de l'acide chlorhydrique, de l'alcool, de l'eau, on dé- clare qu'il s’agit d'un bon produit pharmaceu- tique. Or, la pratique de l’anesthésie apprend qu'il est aussi impossible de déterminer par l’analyse chi- mique la qualité d'un chloroforme que celle d’un vin ou d’une liqueur de choix. Dans les deux cas, pour un expert compétent, les seuls caractères vé- ritablement infaillibles sont, d’une part, les pro- priétés organoleptiques et, d’autre part, l'action physiologique. D'ailleurs, la pureté absolue du chloroforme constitue elle-même un danger, car, en cel état, il ne tarde pas à se décomposer à la lumière et à en- gendrer des produits extrêmement toxiques. Le seul chloroforme auquel j'accorderai toute con- fiance sera seulement celui qui aura été obtenu par le dédoublement du chloral cristallisé et chimi- quement pur au moyen d'un alcali, et auquel on aura ajouté une petite quantité d'alcool et d’éther pour empêcher son allération ultérieure, comme l’ont conseillé, après de nombreuses expériences, MM. Regnault et Villejean. Quand ce n’est pas à l'impureté du chloroforme que le chirurgien attribue les accidents mortels ou autres de l’anesthésie, il admet l'existence d’une idiosyncrasie, ce qui signifie que, sans que l'on sache pourquoi, il y a des malades qui meurent du chloroforme et d'autres qui n’en meurent pas. Il ya enfin la catégorie des malades qui profitent d’une anesthésie pour succomber à une affection qui de- vait les emporter un jour ou l’autre : maladie du cœur, du poumon, etc. VI Mais ce qui peut paraitre véritablement étrange, c’est qu'avant les expériences de Paul Bert on n'ait pas méthodiquement recherché comment on meurt du chloroforme, alors même qu'il ést pur. Faute d’avoir suivi les principes de l’expérimen- tation physiologique, si magistralement formulés par Claude Bernard, on a fait dans les labora- toires une foule d'expériences qui ne sont malheu- reusement pas comparables entre elles et souvent contradictoires, parce que la marche de l'anesthésie varie considérablement avec la manière dont on admi- nistre le chloroforme. De leur côté, les cliniciens ont cherché à régler l’aclion du chloroforme sans vou- loir la connaître. Les praticiens se sont particulièrement ingéniés à construire une foule d'appareils, plus ou moins bizarres, plus ou moins compliqués, permeltant de doser la quantité de chloroforme dépensée par l'opérateur dans un temps donné, sans se préoc- cuper autrement de son état de dilution dans l’air respiré par le patient, d’où dépend précisément le degré d’activilé du mélange anesthésique. Ces appareils basés sur un principe faux four- nirent de mauvais résultats et les chirurgiens dé- clarèrent,avec raison, qu'ils élaienttous dangereux parce qu'ils donnaient à l’opérateur une fausse sé- curité : l’un reprit la compresse, l’autre le bonnet de flanelle et l’autre le cornet, sidérant ou ne si- dérant pas, selon la mode du moment, selon aussi le tempérament du malade e& surtout du chirur- gien. Un seulmédecin, Glower, eut un instant l’idée qu’il fallait mesurer la quantité d’air mélangée au chloroforme; mais, soit à cause de la singularité de son appareil (le chirurgien opérait avec un énorme sac de caoutchouc sur le dos), soit à cause de ses imperfections, son procédé ne se généralisa pas. J'ai dit précédemment comment Paul Bert avait élé amené à étudier le rôle que devait'jouer, selon lui, d’après ses recherches sur la pression baromé- trique el sur le protoxyde d'azote, la tension par- tielle des vapeurs chloroformiques dans le mé- lange anesthésique. Dans le courant des années 1882 et 1883, on fit respirer à un grand nombre d'animaux des mélanges d’air et de chloroforme, exactement litrés cette fois au moyen de deux ga- zomètlres de Dulong conjugués, disposition ingé- nieuse et très avantageuse que M. le D' de Saint- Marlin venait d'imaginer pour des recherches sur la respiration. Ces expériences démontrèrent que le itre du mélange, c’est-à-dire la quantité en poids de chloroforme mélangée à 100 litres d'air, avait une 2#mportance capitale. Pour ne pas compli- quer inulilement la question, on appela mélange à 10°/, dix grammes de chloroforme volatilisé dans 100 litres d'air, mélange à 12 °/, douze grammes de chloroforme dans 100 litres d’air, ete., etc. Les résultats les plus saillants de l’expérience furent les suivants : L'action de ces mélanges entrainait toujours la mort de l’animal si on la prolongeait suffisamment. Le mélange 4°/, ne produisait pas d’insensibilité : l'animal mourait au bout de neuf à dix heures avec température abaissée. — Le mélange à 6 ?/, dimi- nuait seulement la sensibilité, et amenait la mort au bout de six à sept heures. — Le mélange à 8 °/, produisait lentement l’insensibilisation et luait après deux ou trois heures. — Les mélanges supérieurs déterminaient une insensibilisation très rapide : avec 120/,, l'animal résistait près de deux 360 D' R. DUBOIS. —- L'INSENSIBILISATION CHIRURGICALE heures; avec 15 !/,, il résistait quarante minutes ; avec 20 ‘/;, une demi-heure; avec 30 ‘/,, anes- thésie instantanée, mort en trois minutes. Quoi que l’on fit, il fut impossible d'établir un équilibre stable entre la tension du chloroforme introduit dans l'organisme et celle des vapeurs contenues dans le mélange circulant dans le pou- mon et l'intoxicalion suivit toujours une marche progressive, mais plus ou moins rapide, selon la richesse du roma en chloroforme. Dès lors, on pouvait savoir pendant combien de temps un malade supporterait sans danger un mé- lange déterminé respiré d’une manière continue et il n’y avait aucun inconvénient à essayer le mé- lange à 10 ‘/;, par exemple, sur l’homme qui ré- siste mieux que le chien à l’action toxique du chloroforme. D'autre part, Paul Bert avait élé frappé de la régularité de l’anesthésie obtenue dans le labora- toire avec des mélanges à 8 et à 10 0/, et surtout de l'absence complète de ces accidents brusques qui tuent en général deux chiens sur rois, quand on leur donne le chloroforme sans titrage préalable. VII Bien que l’éminent physiologiste eût reconnu que le chloroforme et les autres anesthésiques gé- néraux n'obéissaient pas à la même loi que le protoxyde d'azote, il résolut de faire adopter dans la clinique chirurgicale, en raison des avantages qu'ils présentaient, l'usage des mélanges titrés de chloroforme et d’air. Je fus chargé de faire dans le service de M. le D' Péan, à l'hôpital Saint-Louis, les premières appli- cations sur l’homme de la méthode d'anesthésie de Paul Bert par les mélanges Les résultats furent très satisfaisants. Environ deux-cents anes- thésies furent pratiquées avec succès dans le cou- ‘ant des années 188% et 1885, pendant les opéra- tions les plus graves et les plus variées, dans des limites d'âge comprises entre six mois et soixante- seize ans. Les observations étaient relevées par M. le D' Aubeau, anesthésiste du service et profes- seur d’anesthésie à l'Ecole dentaire de Paris : elles ont été consignées dans un remarquable mémoire ! auquel nous empruntons les conclusions suivan- titrés. Les : «Des circonstances particulières nous ont entrainé à praliquer l’anesthésie chloroformique presque quotidiennement depuis dix années et à étudier de près les phénomènes cliniques de l'a- nesthésie. Nous avons pu expérimenter et appré- cier les divers procédés; disons de suite que notre impression générale est tout en faveur de la mé- thode de Paul Bert, qui donne à la conduite de 1 Mém. de la Soc. de Biol. 1884 l’anesthésie une précision, sécurilé une LÉBRAENS e une inconnues jusqu'alors. » m Depuis les premières expériences cliniques, la méthode d’anesthésie à recu encore d'importants perfectionnements. On se servail alors de grands gazomètres de la- boratoire (fig. 2, A) dont j'ai parlé plus haut, ap- pareils lourds, encombrants, coûteux, difficiles à transporter, à manier et exigeant le concours d’un aide expérimenté constamment occupé à les char- ger du mélange anesthésique. Pour remédier à ces inconvénients et à d'autres encore, qui constituaient un empêchement absolu à la généralisation de l'emploi de la méthode, je fis construire une petite machine portative dont le vo-. lume ne dépassait pas celui d'un tambour d’infan- terie et qui, mélangeant mécaniquement le chloro- forme à l'air, dans des proportions déterminées, pouvait être d'une main mise en mouvement, Lan- dis que de l’autre on faisait respirer le mélange titré qui en était chassé avec une certaine force par le jeu d'un piston. Ma première machine à anesthésier avait en outre sur les gazomètres l’avantage de permettre au cours d'une anesthésie de changer rapidement le litre du mélange, ce qui est important. Avecles gazomètres on donnait d’une manière continue un mélange à 8 °/, pendant toute la durée de l'opération ; or j'avais remarqué que les malades élaient endormis plus vite el sans danger avec le mélange à 10 0/, et que l’on pouvait ensuile entretenir l’anesthésie avec un mélange à 60}, incapable de provoquer d'emblée l'insensibilisa- tion, mais susceptible d’être toléré beaucoup plus longtemps par l'organisme. C'était là un progrès très réel, puisque le litre du mélange se trouvait abaissé à la limite la plus inférieure compatible avec l’anesthésie. Toutefois celte première machine présentait encore quelques inconvénients. Le jeu de la mani- velle qui faisait mouvoir le piston était alternatif etle changement de titre du mélange ne pouvait être obtenu qu'en changeant à la main les petits godets qui mesuraientle chloroforme, en outre son poids et son volume étaient encore trop considé- rables. Les perfectionnements que j'ai apportés depuis dans la manière dont le chloroforme est mesuré ont permis ànotre habile constructeur, M. Mathieu, de mettre à la disposition des chirurgiens une élé- gante petile machine très pratique, légère, trans- portable, facile à manier et dont les eos ne sont plus à comparer avec celles des gazomètres (fig. 2, B et fig. 3 et 4). Ceux-ci peuvent encore rendre quelques services dans les laboratoires et permettent de vérifier, à défaut d'un compteur à blé gaz, l'exactitude du litrage de la machine à anes- thésier. La nouvelle machine à anesthésier (fig. 3) se compose 1° d'un corps de pompe; 2° d’un verseur automatique; 3° d’un vase évaporaloire. Le corps de pompe renferme un piston d'un mo- R. DUBOIS. — L'INSENSIBILISATION CHIRURGICALE | 361 mulera dans l'appareil. Le débit du mélange titré sera donc continu. Le masque à soupapes dont on se servait avec les gazomètres et dont les clapets en se déran- geant pouvaient constituer une cause d'accidents a été remplacé par un masque sans soupapes Fig. 2: machine au moyen des montrant les dimensions relatives des gazomètres et de la machine à anesthésier : l'opérateur vérifie le titrage de la gazomètres. — À, grands gazomètres conjugués ayant servi aux premières applications cliniques des mélanges titrés. — & cyhndre renfermant le mélange. — b, cuve renfermant un manchon intérieur et une mince couche d’eau dans laquelle s’enfonce le cylindre «. — B, machine à anesthésier de R. Dubois. — C, boite destinée à renfermer la machine et pouvant servir de support. — /, tube nasal. — f!, tube buccal écarteur des mâchoiïres et abaisseur de la langue. — nm, masque inhalateur sans soupapes. dèle spécial qui est mis en mouvement par la ma- nivelle ». A la fin de chaque course de ce piston, un volume d'air déterminé a pénétré dans le corps de pompe, entrainant avec lui une quantité exac- tement mesurée de chloroforme déversée dans le vase évaporatoire 2, par la descente du piston plongeur y dans le récipient » contenant le chlo- roforme. Ce mélange sera chassé du corps de pompe dans la course inverse du piston pendant qu'une nouvelle quantité de mélange litré s'accu— REVUE GÉNÉRALE, 1891, ; m, fig. 2etE, fig. 3) qui permet au patient de res- pirer dans un courant d’air anesthésique titré, sans aucune gène possible (fig. 4). De cette facon, la vi- tesse avec laquelle on débite le mélange titré n'offre aucun danger, et le seul inconvénient qui puisse résulter d’une marche (rop lente est de permettre la respiration de l'air libre qui amène le réveil. Pour les opérations de la face ou des premières voies respiratoires on peut remplacer lé masque inhalateur par un tuyau nasal (#. fig. 2 et G, fig. 3 14e 506 19 ou par un tube plus gros (f', fig. 2, et F, fig. 3), qui rend en même temps de grands services comme abaisse-langue et comme écarteur de mächoires. VIII Nous ne pouvons dans cet article, déjà fort long, que résumer brièvement les avantages de la mé- thode d’anesthésie par les mélanges titrés mécani- quement 4° Avec la ma- chine, le chirurgien sait ce qu'il fait: il R. DUBOIS. — L'INSENSIBILISATION CHIRURGICALE cation) font défaut el la syncope convulsive réflexe du début, toujours grave et parfois mor- telle, n’est plus à craindre ; 5° le mélange à 6 ?/, étant le plus faible de tous, le patient est toujours sur la limite du réveil qui s'effectue très vite, quand on cesse l’inhalation. | Toutefois ce que l’on sait de la marche normale de l'intoxication chloroformique, de l'influence de l’état de dépression du sujet, du choc chirur- gical, elc., sur son évolution dans la clinique, n’autorise n'en est pas de mê- me avec les autres procédés dans les- quels le chlorofor- me sera versé à la main, füt-ce goutle à goutte même avec uncompte-gouttes'; 2 L'anesthésieest en aucune façon le chirurgien à se dis- penser d’une sur- veillance altentive même avec les mé- langes titrés; il ne devra jamais oublier que le malade qui res- pire du chlorcforme, s'il n’est pas comple- régulière et conli- nue. Ce dernier point est important si l’on veut éviter les vomissements qui ne sont qu'un symptôme de veil ; ré- 3° La période d'a- tement insensibilisé, ne se trouvera pas plus qu'un autre opéré à l'abri d'une syncope cardiaque mortelle que peut loujours provo- quer une douleur ai- quë el souduine ou une gitation du début frayeur. Cette der- de l’anesthésie est, nière cause de syn- en général, suppri- cope est surtout à redouter dans la pé- riode de l'ivresse mée ou tout au moins très atté- nuée, même chez chloroformique où les alcooliques ; le sujet commence %° Le chloroforme étant dilué dans la quantité d'air maxi- ma compatible avec l’anesthésie, les phénomènes d'irri- Fig. 3. — Machine à anesthésier du Dr R. Dubois. — P, corps de la pompe; m,manivelle mettant en mouvement le piston du corps de pompe; p, pis- ton plongeur; r, récipient pour le chloroforme; B, ouverture du récipient; e, vase évaporatoirc; C, lampe à alcool pour échauffer le vase évapora- toire; D, disque à excentrique pour fixer le titre du mélange; E, masque sans soupapes; G, tube nasal; F, tube buccal. à ne plus interpré- ter sainement ce qu'il sent, ce qu'il entend où ce qu'il voit. Ce qu'il im- porte avant tout de lation locale des muqueuses nasale, buccale, pha- | surveiller, c’est l’état de la pupille et celui de la ryngienne el laryngienne (toux, spasmes, suffo- ! Cette méthode, que l’on vient de préconiser comme nou- velle, est déjà très ancienne, C’est peut être le moins nouveau de tous les procédés empiriques; mais il ne permet en aucune facon d'obtenir quelque chose de comparable à un mélange titré, car la mesure du volume d’air est indispensable : il se rapproche, au contraire, du principe des anciens appareils qui avaient pour but de doser la quantilé de chloroforme in- halé. Avec le compte-gouttes, le principal danger du chloro- forme subsiste : c’est la brusquerie de sa volatilisation et son énorme tension de vapeur.Sile malade respire quelques gouttes de chloroforme, celles-ci pourront étre diluées dans une petite quantité d’air, s’il ne fait qu’une faible inspiration, ou dans un volume d’air dix ou vingt fois plus grand, si l'inspi- respiration : le chloroforme {ue toujours par syn- cope respiratoire, Jamais par syncope cardiaque pri- mitive avec un mélange titré moyen d'air et de chloro- forme de bonne qualité. Depuis plusieurs années, celte méthode a été appliquée avec succès, surtout à V Étranger, et aussi dans les services les plus importants de Paris, sans qu'aucun accident se soit produit, à notre connais- ration est profonde. Enfin, le titre du mélange variera avec l’âge, la taille, le sexe, le mode de respiration, la tempéra- ture de lair, la nature du tissu de la compresse, la distance de celle-ci à l'entrée des voies respiratoires, elc., etc. css D' R. DUBOIS. — L'INSENSIBILISATION CHIRURGICALE Œ © Ce sance, lorsque les principes que nous avons for- mulés ont été exactement observés !. Les récentes applications faites à l'Hôtel-Dieu de Lyon, dans le service de M. le D° Tripier, ont con- firmé l’exactilude des appréciations publiées anté- rieurement sur l’anesthésie par les mélanges titrés les hôpitaux et dans la clientèle, sont trop nombreux pour qu'il soit permis de négligerles perfection- nements que la science apporte chaque jour aux méthodes d’insensibilisation. Bien que les statis- tiques de la mortalité produite par le chloroforme seul ne soient guère plus exactes que celles qui mécaniquement, et peut-être la majorilé des chi- rurgiens français se décidera-t-elle à donner un jour la préférence à l'emploi de la seule méthode reposant sur des données véritablement scientifi- ques, en attendant la découverte du curare de la sensibilité. Les cas de mort produits par l’anesthésie, dans 1 Nous considérons comme détestable la méthode mixte employée par certains chirurgiens qui, pour gagner du temps, sidèrent le malade avec une compresse chargée de chloro- forme et continuent l'anesthésie avee la machine. ont trait à la mort par la rage, il parait certain que cette maladie fait moins de victimes que la chloro- formisation. On ne saurait donc trop engager les savants el les praticiens à apporter dans la re- cherche du meilleur procédé d'anesthésie la même ardeur que celle qui a été déployée dans ces temps derniers pour l'essai d’un nouveau spéci- fique de la rage. Raphael Dubois, Professeur de physiologie générale et comparée à l'Université de Lyon 364 V. DWELSHAUVERS-DERY. — LES LABORATOIRES DE MÉCANIQUE LES LABORATOIRES DE MÉCANIQUE Dans les vingt ans qui viennent de s'écouler, l'en- seignement de la mécanique appliquée, en pro- gressant rapidement, a pris une tournure nouvelle. Dans la pratique, à l'empirisme avait succédé la méthode expérimentale introduite par les Hirn, les Clarck, les Isherwood. L'enseignement devait suivre et, aux formules toujours basées sur des hypothèses admissibles dans les cas moyens, ajou- ter les faits d'expériences mis au jour dans le la- boratoire sous les yeux des étudiants comme des professeurs. Il est généralement reconnu que l’en- seignement de la chimie et de la physique requiert quelque chose de plus vivant que la craie blanche et le tableau noir, un laboratoire où soient étudiés les corps # anima vuli et les forces dans la manifes- lation même de leurs effets par le mouvement. Il est évident qu'il ne peut en être autrement de la mécanique appliquée. Sur ce point toutes les auto- rités de la Science, tous les hommes compétents sont d'accord ; une enquête universelle faite récem- ment le prouve d'une facon surabondante. Le desi- deratum actuel a été formulé en deux mots par le Professeur Schroeter, de Munich, le seul qui, en Allemagne, dispose d'un laboratoire de mécanique appliquée pourvu de machine à vapeur expéri- mentale : « Il faut, m'écrit-il, moins de leçons orales et plus de travaux de laboratoire »; c’est la réforme qui s'impose. Pourtant le progrès ne s’est fail rapidement que dans les pays de langue anglaise (Angleterre et Colonies, Amérique du Nord);le mouvement ne s’est pas propagé dans ceux de langue allemande, bien qu'il y fût né de père bavarois, le Profes- seur Linde, de Munich. L'historique en a été tracé en 1886, dans un Mémoire à l’Znstitution of Civil Engineers de Londres, par le promoteur anglais lui-même, le Professeur Kennedy, d’University College. Nous lui ferons ici de larges emprunts sans encombrer notre texte de renvois particuliers à chaque cas. Il a su mettre en évidence toute l'importance de la question et intéresser à son développement. L'année 1870 marque une ère nouvelle, celle où se créent principalement leslaboratoires de résistance des matériaux, surtout en Allemagne où le profes- seurexpérimente sans le concours des élèves, pour eur donner ensuile et livrer à lapratique mème, ses résultats d'expérience. Vers 1880 on voit un cou- rant marqué vers les essais de machines à vapeur, surtout hors de l'Allemagne, les élèves étant les principaux acteurs dans le laboratoire. Nous allons essayer de faire connaître succinctement ce qui se Il | passait avant 1870, puis les créations qui ont suivi cette année else sont multipliées surtout après 1880. I La première grande Collection de mécanique qui ait servi à l'éducation des masses est le Conservatoire des Arts et Métiers de Paris,legs du célèbre mécanicien Vaucanson, fait à la fin du siècle dernier. Cette col- lection devint bientôt une Ecole publique de méca- nique pratique appliquée à Lous les arts et métiers, pourvue d'un laboratoire pour essayer toute es- pèce d'inventions et en juger le mérite, et aussi pour donner la vie à l'enseignement des profeseurs. Celui-ci s'adresse à toute personne qui veut en pro- liter, quels que soient son rang, ses capacités, son but, ses moyens personnels d'apprendre. Sans doute on refusera généralement la qualification de supérieur à un enseignement qui s'adresse à un public bigarré, où l'ouvrier et même l’homme sans instruction coudoient l'ingénieur et le savant. Mais pour être à la fois simple, clair, précis, et rigoureux devant un tel public, le profes- seur doit posséder au plus haut degré la con- naissance profonde des principes et des faits fon- damentaux en même temps que des vues larges sur les sommets et la philosophie de la science. Un autre genre de supériorité est encore néces- saire, celui de donner de l'attrait aux lecons. Car le public est libre et l'École n’assure nullement un auditoire par la compulsion d’un diplôme et d’exa- mens. Mais tout inventeur qui veut connaitre le mérite de son œuvre peut la présenter; elle sera accueillie, soumise à l'essai et jugée en général d’une manière sûre et définitive. C’est avec raison que Laboulaye a dit : « L'enseignement du Conser- vatoire des Arts et Métiers est le plus populaire qui soit en France. Constitué avec toutes les res- sources de la science, initié à tous les développe- ments de l’industrie, dont il a pour mission de faire connaître les progrès, il est pour elle une source féconde de connaissances uliles, un guide sûr dans les applications... ». Le service rendu à l’industrie et à la science au moyen du laboratoire de cette École par les savants qui l'ont illustrée, et notamment par Morin et Tresca, est sans nul doute incalculable. Aussi éprouve-t-on une impression pénible et amère en pensant que ce laboratoire, fermé en 1885 pour cause de dégradation, c’est-à- dire pour avoir trop servi, n'a pas encore en 1890 été remis en état et livré aux savants qui ont hâte de continuer l'œuvre de leurs prédécesseurs. À part le Conservatoire, les Écoles techniques Y. DWELSHAUVERS-DERY. — LES LABORATOIRES DE MÉCANIQUE 365 de la France se sont formées sans l’adjonction de laboratoires de mécanique, bien qu'on en trouve pour la chimie et la physique. Seulement, depuis 1843, l'École des Ponts et Chaussées était pourvue des appareils nécessaires pour soumettre à des expériences raisonnées, les pierres, briques et ci- ments que l’on emploie dans les services actifs. ayant en vue l'application des ciments aux cons- tructions à la mer. Il y a peu de temps qu'on y a ajouté une machine à essayer les métaux pour vé- rifier les conditions imposées aux entrepreneurs de constructions métalliques. En 1825, l'École des Mines de Stockholm possé- dait une machine à essayer les matériaux, de la force de sept tonnes et du type Fuller, qui a servi aux remarquables expériences du Professeur La- gerjhielm. L'Érole de Prague, sous la direction de l'illustre Gerstner, avait déjà des instruments de mesure; et le professeur Wersin faisait avec ses élèves des essais à l'indicateur et au frein sur quelques machines modèles, dans une espèce de laboratoire, dont il ne reste plus qu'une chaudière rouillée, abandonnée depuis plus de vingt ans. Les élèves recevaient en outre quelqu'instruetion ma- nuelle dans un petit atelier affilié. À Liège, lÆrole des Mines possédait en 1836 et possède encore une machine verticale de dix tonnes pour l'essai des matériaux, et en outre des freins, des indicateurs de Mac Nought, etc. Dans les batiments mêmes de l'Université, se trouvait un atelier de construction de machines, travaillant pour le public, mais obligé par contrat et contre indemnité, à fournir les élé- ments de l’instruclion manuelle des élèves mécani- ciens. La machine motrice à balancier, du {vpe Watt, était chaque année essayée au frein. Depuis huit ans cet atelier n'existe plus, maisilyaunatelier aftilié où les élèves suivent les opérations relatives à l’exéculion des machines. Le Xing's College de Londres possède un atelier admirablement organisé et uniquement réservé à l’enseignement. À Edim- bourg, dès 1870, on en ouvrit un également, mais le Professeur Fleming Jenkin disait qu'il n’attachait que peu d'importance à ce moyen d'éducation. Citons encore l’nstitut des Ponts et Chaussées de Saint-Pétersbourg, où le professeur Sobko, en 1853, avait fait monter une machine de dix tonnes qui a servi longtemps à faire des essais de pierres et de bois. Le laboratoire recut, en 1867, un agrandisse- ment déjà important, mais il ne fut réellement or- ganisé qu'en 1877, par le professeur Belelubski. Un travail de M. Gaetano Lanza, directeur acluel de l’Znstitut technologique de Boston, nous apprend que, pendant l’année 1873-74, le laboratoire de cet Institut fut pourvu d’une machine à vapeur par le professeur Channing Whitaker, et qu'il y fut fait des essais calorimétriques sur les condensa- tions dans les cylindres par George B. Dixwell. La machine de l'École polytechnique de Zurich a été établie en 1870, au temps où M. G. Zeuner y occupait la chaire de mécanique appliquée. Mais elle rentre plutôt dans la catégorie des machines des laboratoires modernes dont nous allons parler, que dans les embryons ci-dessus mentionnés pour mémoire. Les laboratoires de résistance des matériaux s'ouvrent en Allemagne, ou du moins dans les pays de langue allemande, dès 1871, et sont tous à peu près sur le même modèle et dans les mêmes proportions. Celui de l'illustre professeur Baus- chinger, de Munich, a pour pièce principale un bane d'épreuve horizontal, système Werder, de 100 ton- nes, muni des appareils de mesure bien connus du système Bauschinger, et qui se prête à des essais d’allongement, de compression, de cisaillement, de flexion, de lorsion. Une machine Vôhler sert à l'étude des efforts répétés; une autre à l'étude spéciale des ciments. Enfin d’autres servent à des essais divers. Le laboratoire du professeur Tet- mayer à Zürich y est comparable, et il en est de même de celui de Berlin, qui toutefois est beaucoup plus considérable et a recu du professeur Martens un cachet spécial; il en est de même aussi de ceux de Vienne, de Stuttgart, de Prague, Chemnitz, etc. Ajoutons-y enfin celui de Saint-Pétersbourg. L'organisation du travail dans ces laboratoires est aussi à peu près la même partout sur le Con- tinent, mais toute différente de ce qu'elle est en Anglelerre et en Amérique. Kennedy en parle ainsi : « L'idée qui a présidé à la fondation des excellents ‘laboratoires du Continent est toute différente. Ils sont en général annexés aux Écoles techniques supérieures, el placés sous la direction d'un des professeurs. Mais ils sont surtout destinés à des expériences et des recherches originales à faire par le professeur lui-même. Les étudiants sont témoins des démonstrations expérimentales qu'il fait, mais sans y prendre une part active, si ce n’est exceptionnellement, Au point de vue scienti- fique, celte organisalion a le grand avantage de permettre au professeur de se livrer entièrement à des recherches scientifiques utiles. Les publications d'une si grande valeur, qui en sont sorties, en sont une preuve décisive. Mais le vrai but, la raison d'être du laboratoire est de donner aux étudiants l’occasion d'expérimenter par eux-mêmes; il est évident que le côté scientifique doit être sacrifié. Chaque application spéciale a ses avantages et ses inconvénients, el suivant celle que l’on choisit, il faut accepter et les uns et les autres...» C’est à Munich encore que s'ouvre le premier laboratoire moderne d'essais des machines à vapeur. Celui de Zurich date bien de 1870 ; mais il 366 V. DWELSHAUVERS-DERY. — LES LABORATOIRES DE MÉCANIQUE ne parait pas avoir élé fondé en vue d'apprendre aux élèves à expérimenter el à faire des mesures calorimétriques. Sa machine de 030 >< 075 est pourvue d'un condenseur, d’une enveloppe de vapeur ou d'autre fluide, de deux régulateurs de systèmes différents, et de deux distributicns, l’une à coulisse Stephenson, l’autre à tiroir double Meyer. La chaudière est pourvue d'un surchauffeur qui na guère été employé jusqu'ici. Comme dans presque toutes les écoles du Continent, le pro- gramme des cours oraux est trop surchargé pour que les élèves aient le temps de faire des essais calorimétriques complets. Aussi on ne leur en- seigne guère au laboratoire que l'usage de quelques instruments de mesure. M. le Professeur Schroeter, de Munich, dont nous allons parler, se plaint éga- lement de cet état de choses qui nuit au progrès des études. Le laboratoire qu'il dirige aujourd'hui a été fondé par M. Linde. La demande, que ce pro- fesseur en fit au ministre en 1871, donne la vraie raison d’être des laboratoires modernes et indique déjà la voie de la réforme à faire dans l’enseigne- ment de la science des machines. Celle-ci com- prend trois parties essentielles : 1° /x physiologie des machines, comme Hirn l’a appelée, c’est-à-dire l'étude dela machine en marche, vivante, agissante ; 2° ensuite les principes de la construction et de la rédaction des projets; 3° enfin ceux de l'exécution des pièces et du montage dans l'atelier, Sous peine d’être incomplète, l’École ne peut pas plus né- gliger l’un de ces objets que l’autre dans l’édu- cation des ingénieurs mécaniciens; et le premier, la physiologie de la machine, son étude expéri- mentale, est indispensable à tous les ‘ingénieurs, quel que soit leur but spécial. C'est bien là l'opi- nion exprimée par M. Linde dans sa demande, lorsqu'il dit : «€... L'intérêt qu'il y a à faire des expériences de ce genre ressort de ce fait que l'étude théorique des machines au point de vue de la physique mathématique et de la mécanique pure, est très avancée en beaucoup de points, tandis que la partie expérimentale qui s'occupe du mouvement des machines et de leur mode réel de fonctionner (Wirkungsweise), est bien loin de cette perfection; de là la difficulté d'appliquer en pratique les résultats de la théorie IL y a plus : il est du plus haut intérêt pour notre école de faire de ce laboratoire un champ d'exercices pour les élèves. Le fait est constaté que la plupart des in- génieurs mécaniciens formés dans nos écoles n'ar- rivent jamais à faire un usage étendu de leur savoir théorique et en perdent ainsi la connais- sance. C’est que, dans ses formules mathéma- tiques, la théorie ne tient pas compte de la variété infinie des conditions qui se présentent dans les cas spéciaux. .… Sans doute l’abime qui semble creusé entre la théorie et la pratique n’est qu'ap- parent pour quiconque a pénétré la science à fond el sail manier avec indépendance les principes: mais ceux-là seuls qui sont doués de talents émi- nents arrivent à ce résultat. C’est pourquoi l’école doit fournir aux élèves l’occasion de faire eux- mêmes des expériences, d’en discuter les résultats, el d'apprendre ainsi, en les comparant aux don- nées de la théorie, à faire une juste application de celle-ci. En physique, en chimie, en géodésie et dans les études de construction, on est depuis longtemps persuadé que les exercices dirigés par le professeur sont d’une nécessité absolue pour pénétrer au fond de la science; cette nécessité n'estpas moindre pour la mécanique appliquée. » M. Linde eut le rare bonheur d’ouvrir son labora- loire cinq ans seulement après sa demande, en 1876. Il quitta l’enseignement peu de temps après et fut remplacé par M. Schroeter qui marcha résolument dans la même voie et dont les travaux de mécanique expérimentale ont illustré le labo- raloire de Munich. L'organisation des exercices des élèves, qui est de sa création, peut servir de modéle, autant pour l’enseignement que pour les recherches de résultats pratiques. Mais il n'existe qu'un seul laboratoire de ce genre en Allemagne. Dans les autres écoles on se contente d'apprendre aux élèves le maniement des indicateurs, des freins et autres instruments utiles dans les essais. Le jour approche sans aucun doute où les écoles techniques, portées depuis 1880 au rang des uni- versilés, alteindront en mécanique comme dans les autres sciences le but le plus élevé de l’ensei- gnement supérieur : former des convielions soli- dement assises sur la base expérimentale et pas seulement sur la Pie du maitre. On peut assigner la date de 1875 au commence- ment du mouvement en faveur des laboratoires de mécanique en Angleterre, sous l'impulsion pre- mière du Professeur Kennedy; et la même date à celui qui s’est produit indépendamment aux États- Unis de l'Amérique du Nord. A peine installé dans la chaire de mécanique appliquée du Collège de l'Université à Londres, M. Kennedy làächait d'inté- resser le public à l’érection des laboratoires dans les écoles, en faisant remarquer que l'instruction pratique à y puiser remplissait un autre but que le stage dans les ateliers, sans être moins néces- saire, mais sans qu'il y eût une substitution pos- sible. Presque au même moment le Professeur Thurston, aujourd’hui directeur du Sibley College à Ithaque (New-York), exposait les mêmes idées, mais en tenant compte du caractère des études et des coutumes industrielles de l'Amérique. A la même époque et tout à fait indépendamment (1875), je proposais la création d’un laboratoire de méca- Ÿ. DWELSHAUVERS-DERY. — LES LABORATOIRES DE MÉCANIQUE 367 nique à l'Æcole des Mines de Liège, et, confiant dans la clairvoyance des autorités, j'allais apprendre à expérimenter sous la direction de Hirn et avec le concours d'Hallauer et de M. Grosseteste. Mes pro- jets ont été rendus publies par Hirn en 1876, à la Société industrielle de Mulhouse. Malheureusement j'avais compté sans les questions personnelles ; aujourd'hui encore, je suis obligé de dire qu'elles ont primé les intérêts évidents de notre École, et c'est pourquoi le laboratoire de mécanique de Liège demandé avant 1875, arraché pièce à pièce et à force de persévérance, reste sans abri ofliciel, loin de l’école même, à la merci d’un ami qui lui donne l'hospitalité, el manquant par conséquent de l’organisation forte qu'il devrait avoir depuis longtemps. Je dois ajouter que, en ce moment même, les autorités universitaires nouvelles ont compris qu'un intérêt supérieur me guidait dans mes réclamations et font le possible pour que j'ob- tienne satisfaction. Plus heureux, les Professeurs Kennedy et Thurston virent leurs idées prendre rapidement un corps, se propager, et les labora- toires s’ériger rapidement avec de nouvelles écoles ou dans les anciennes.Ces laboratoires comprennent partout les deux parties relatives l’une à l'essai des matériaux, l’aulre à celui des machines à vapeur. Successivement se sont élevés ceux de Londres aux collèges de l'Université (P' Kennedy), à celui de Finsbury, au Central Institute (P' Unwin), à Bir- mingham, Cooper’s Hill, Sheffield, Leeds, Manches- ter, Liverpool, à Melbourne et à Sydney ; en Amé- rique, à Ithaque, à Boston, Hoboken, Worcester, Minneapolis, Cambridge, Nashville, Ohio, Terre- haute, Illinois, etc. Il est à remarquer que, pour toutes ces écoles, ce sont des particuliers, de géné- reux donateurs, des industriels, qui ont en mains la haute direction comme l'honneur de la fonda- tion; ils choisissent les professeurs parmi les plus capables, et leur donnent pleine autorité et respon- sabilité pour diriger leur enseignement dans la voie répondant au but de l'institution. Les fonda- teurs ont, comme les professeurs, un intérêt direct à la prospérité de l'École; c'est pourquoi une réforme reconnue utile s'introduit avec tant de rapidité, et les sommes qui y sont nécessaires se trouvent toujours fournies par des hommes de bonne volonté. Un seul exemple le prouvera : Sibley, fils de ses œuvres, ayant ainsi senti tout le prix de l'instruction, arrivé à force d'énergie à la fortune et à une très haute position, a fourui plus d'un million de francs pour l'érection de l’école de mécaniciens d’Ithaque à laquelle on à donné le nom de Sibley College. Un homme d’une compé- tence reconnue, M. Thurston, a été chargé de toute l’organisation, du choix des professeurs, les ad- joints de son œuvre, du programme des cours et exercices, de l'érection et de l’aménagement des laboratoires et ateliers. Cette école est un véritable modèle, peut-être la seule école de mécaniciens complètement organisée ; aussi ses succès sont-ils rapides, le nombre de ses élèves énorme, el ses ingénieurs très recherchés dans un pays où à celui qui sollicite du travail on ne demande pas de produire un diplôme constatant qu'il à appris ce que des professeurs lui ont dit, mais bien de montrer ce qu'il a fait, afin qu'on puisse juger de ce qu'il est capable de faire, et de quelle utilité il peut être. | je Si l'érection presque simultanée des laboratoires dans tous les pays de langue anglaise a prouvé qu'ils répondaient à un besoin général, lasimilitude de leur aménagement démontre aussi que l'accord règnesur lesnécessilés de l'éducation desingénieurs au point de vue dela mécanique. Ce sont les essais calorimétriques, ceux faits en vue de déterminer la production et le rendement des chaudières, des machines à vapeur, les conditions d'économie des enveloppes, de la multiplication des cylindres, qui occupent la première place ; on veut arriver à con- naître la théorie vraie de Ja machine à vapeur et à débarrasser la science des formules décevantes basées sur des hypothèses hasardées. Chaudière et machine expérimentales constituent done Île fond de l'aménagement ; il y a des chaudières de tous les systèmes aujourd’hui en vogue ; et pour les machines elles sont généralement multi-cylin- driques avec la possibilité de les faire marcher mono-cylindriques, pourvues d’enveloppes com- plètes qu’on peut arrêter à volonté dans leurs fonc- lions, de condenseurs à surface el par injection, enfin de lous les accessoires nécessaires aux me- sures calorimétriques, freins, indicateurs, réser- voirs-jaugeurs, thermomètres, manomètres, elc. Pour les essais de résistance, en général aux ap- pareils de mesure créés par Bauschinger on ajoute des instruments écrivant le diagramme, l’histoire de l'essai, par le moyen de coordonnées donnant à la fois l'effort exercé et l'allongement total de l’é- prouvette ou tout autre déformation. L’énuméra- tion des laboratoires modèles serait trop longue et je craindrais d'être injuste par omission invo- lontaire. Mais, en ce qui concerne l’organisation du travail des élèves, je ne puis. guère citer que ce que j'ai pu voir de mes propres yeux ou apprécier complètement ; et le premier entre tous est le labo- raloire du professeur Unwin à Londres (City and Guildes Institute). Par leur nature même les essais calorimétriques de machines exigent un certain nombre d'observateurs capables chacun de traiter toutes les parties du sujet, mais n'en pouvant faire qu’une seule à la fois. Pour former un tel person- 308 V. DWELSHAUVERS-DERY. — LES LABORATOIRES DE MÉCANIQUE nel parmi les étudiants, M. Unwin les divise en | groupes qui font chacun un essai par semaine et où les rôles sont à chaque fois intervertis. Les essais sont ensuite étudiés de manière à arriver au tracé du diagramme des échanges de chaleur entre la vapeur etles parois métalliques du cylindre. Nous saisissons l'occasion qui nous est ici offerte pour remercier M. Unwin d'avoir introduit notre méthode graphique de représentation des échanges dans son enseignement. Dans les exercices de notre laboratoire nous suivons une marche sem- blable, mais des difficultés matérielles restreignent les exercices à un fort petit nombre, en sorte qu'il nous est impossible de faire passer chaque élève à tous les postes. À la fin d’un essai chaque observa- teur dicte ses observations à tous les autres. Alors commence le travail de supputation qui ne s'arrête pas au calcul des échanges de chaleur, mais va jusqu’à la recherche des variations de la vitesse de rotation du volant et de celle du piston, Ainsi une seule expérience fournit les données nécessaires à peu près à tous les problèmes qui intéressent la mécanique appliquée et la physique industrielle. Et les jeunes gens savent au moins qu'ils ont affaire à des données réelles, expérimentales, etnon à des fictions, ce qui est propre à leur inspirer confiance dans les résultats qu’ils trouveront. Leur travail est, du reste, suivi pas à pas et surveillé par mes assistants et par moi. Les essais de chau- dière se font de la même manière et conduisent non seulement à déterminer le rendement, mais encore à analyser les diverses pertes quantitative ment et qualitativement. A Munich, M. Schroeter a instilué un cours ex- périmental complet, s'étendant à deux années d’études. Les exercices commencent par la vérifi- cation des échelles, des indicateurs, des mano- mètres, thermomètres, etc., sous la direction du Professeur. Viennent ensuite le placement et le ma- niement des indicateurs et le surfaçage au plani- mètre; puis les essais de consommation, au frein, au dynamomètre enregistreur ; des essais de tur- bine au frein, avec Jaugeage, enfin les essais calo- rimétriques comprenant des études complètes de moteurs thermiques. [ei M. Schroeter en compose la série de manière à mettre en évidence les effets du changement d'un élément seul. De la sorte il obtient des résultats qu'il est fort utile de compul- ser. Malheureusementla surchage des programmes ne laisse pas aux étudiants le temps de se livrer à ce travail, et c’est M. Schroeter lui-même qui fait les calculs et discute dans ses lecons les conclu- sions. C'est quelque chose sans doute, mais ce n'est pas assez, et l’on conçoit aisément que l'honorable professeur ait émis le vœu d'une réforme se résu- mant à plus d'erercices et moins de leçons orales. J'osé dire que c’est là un vœu général, non celui des professeurs de mécanique seulement, maïs ce- lui des praticiens éclairés et jaloux de leurs propres intérêts aussi bien que de l'intérêt public. Depuis longtemps une correspondance étendue m'en avail donné la conviction; de nombreux témoignages imprimés la confirmaient; j'ai voulu y ajouter en- core des renseignements plus positifs, et, avant d'écrire ces pages, je me suis livré à une enquête qui m'a fourni de précieux documents. Leur ré- sumé terminera cet article. Parmi les documents publiés s’en trouve un d’une importance capitale autant par l'élévation des idées qui s’y trouvent émises que par le carac- tère de l’assemblée nombreuse qui les a approu- vées el appuyées. C'était au Congrès de mécanique appliquée tenu à Paris en 1889, sous la présidence de l’illustre savant que la France vient de perdre, le Professeur Phillips. M. E. Cornut, de Lille, un praticien éclairé doublé d'un savant ingénieur, admirablement placé pour connaître tout le prix de l'expérience, réclama avec une énergie et un talent peu communs, la fondalion de laboratoires de mécanique au sein des écoles techniques su- périeures, autant dans l'intérêt général de l’indus- trie que dans celui de l'éducation des ingénieurs et dans celui de la science appliquée qui, sur une foule de points, manque encore aujourd’hui de bien des données certaines et sûres; il regarde la nécessité de cette fondation comme partout re- connue et déplore les lenteurs administratives qui entravent le progrès. Le Congrès comptait dans son sein des autorités scientifiques de tous les pays; il n'y eut de discussion que sur des ques- tions de forme et le vœu suivant fut adopté à l’u- nanimité : «Il y a lieu d'encourager par tous les moyens possibles la création et l’extension des la- boratoires d’essais des matériaux et de machines, aussi bien dans les grandes Écoles du Gouverne- ment, dans les grandes administrations gouverne- mentales ou privées, que dans les établissements d'utilité publique tels, par exemple, que le Conser- vatoire des Arts et méliers. » Dans un article quelque peu humoristique, mais au fond très sérieux, sur l’engineering ignorance, un ingénieur américain, M. Stevens, signale nombre de données expérimentales qui font défaut et dont cependant l'ingénieur a besoin de faire usage tous les jours; par là, l’art de l'ingénieur tombe dans l’'empirisme et peut s’égarer faute de renseigne- ments certains. Comme exemple nous ne citerons qu'une seule de ces données, c’est la quantité de chaleur qui passe par seconde et par mètre carré de surface à travers les parois des tubes d’un con- denseur par surface. Les formulaires conseillent simplement, avec des tubes de certaines dimen- V. DWELSHAUVERS-DERY. — LES LABORATOIRES DE MÉCANIQUE 369 sions, de donner 0,18 à 0,20 m. carré par che- val. Or qui ne sait que tel cheval mange par heure six kilos de vapeur et tel autre vingt kilos ? Qui ne sait que la vapeur à condenser en poids égal peut différer considérablement non seulement par sa température mais encore et surtout par son litre? Le renseignement qui manque, c'est le nombre de calories transmises par mètre carré et par heure, et ce nombre donné avec les circonstances dans lesquelles il a été déterminé, l’état des surfaces, leur position, l'état de division, la température et la vitesse du courant d'eau, la longueur du par- cours dans les tubes, etc., etc. Qui fera les expériences exigeant Lant de temps, de patience, de savoir, tant d'appareils, un maté- riel si coûteux, un personnel exercé, et conduisant à des données capables seulement d'enrichir ja science et l’industrie, mais non les savants, et pré- sentant souvent pour un seul industriel déterminé une importance restreinte ? La réponse a été donnée par bien des personnes qui n'étaient pas des pro- fesseurs et, parmi lesquellesjen’en citerai que deux: Hirn et M. Michael Longridge, ingénieur en chef de la Société d'assurance des propriélaires d’appa- reils à vapeur de Manchester. Ils expriment nette- ment l'opinion que les professeurs seuls, pourvus de laboratoires, sont en mesure de rendre le ser- vice voulu à l’industrie. Et M. Longridge ajoute encore qu'eux seuls ont le temps d'étudier à fond les résultats d'expérience, travail indispensable, car les rapports sur essais de machines, dans les- quels on se contente de donner la consommation et le diagramme moyen, sont dépourvus de toute utilité, et de toute valeur autre que celle du papier sur lequel ils sont écrits. En dehors des publications, j'ai en mains les té- moignages de bien des professeurs éminents et de maints industriels, autorités indiscutées, dont il est utile à notre thèse de citer quelques noms: parmi les professeurs, Haton de la Goupillère, Zeuner, Hirsch, Schroeter, Peabody, Thurston, Smith, Colombo, Hele Shaw, G. Schmidt, Doerfel, Barr; parmi les ingénieurs non professeurs, ceux que nous avons nommés déjà, et Hirn, Donkin, Willans, Davey, Mair, Albert F. Hall, etc. ete. De quelque manière que l'opinion de tant d'hommes éminents soit présentée, elle peut être résumée en quelques mots: les laboratoires de mé- canique appliquée annexés aux écoles techniques sont utiles et même nécessaires à l'éducation des ingénieurs et ils peuvent rendre les plus grands services à la science et en hâter les progrès. Un REVUE GÉNÉRALE, 1891. praticien consommé, M. Henry Davey, l’a exprimée comme suit : «Quant à l'éducation des ingénieurs, je tiens que c’est là (le laboratoire) le point capital de toute école technique, et pour trois raisons : Tout en donnant à l'étudiant une certaine habileté manuelle, la machine en marche d’un laboratoire donne aussi un caractère concret à l’enseignement oral et à celui des livres, et lui prête un intérêt que peu de professeurs, sans ce secours, seraient ca- pables d’inspirer à des étudiants qui ne sont pas tous nés avec le génie mécanique. Ayant une ma- chine à manipuler et à expérimenter, l'étudiant est mis face à face avec les faits réels auxquels les théories sont appliquées, ce qui le rend apte à juger de l'importance relative des diverses parties du sujet qu'il étudie. Il est ainsi sauvé du danger de devenir un théoricien pur, pour qui toutes les re- cherches conduisant à un résultat ont une égale importance. L'éducation expérimentale donne aux jeunes gens l'esprit d'exactitude, de précision, d'organisation, les met dans la possibilité de di- riger eux-mêmes les opéralions mécaniques. Elle donne à leur esprit la tournure pratique sans la- quelle un ingénieur n’est que d’une mince utilité. En ce qui concerne les progrès à faire faire à la science de la machine à vapeur, le laboratoire est encore une précieuse acquisition. Il n’y a aucune raison pour qu'une machine de laboratoire ne soit pas construite de manière à résoudre bon nombre des problèmes qui se rencontrent dans la pratique, à faciliter leurs solutions aux investigateurs, ou à donner plus de précision aux données admises, en- fin à distinguer ce qui est fondé de ce qui ne l’est pas en pratique réelle. Je sens si fortement l’uti- lité des laboratoires de mécanique que je regarde comme défectueuse el incomplète toute école qui n'en à pas...» Encore un mot du professeur Gaelano Lanza de Boston. Il émet un vœu important. Dans chaque laboratoire, le professeur varie les essais qu'il fait faire aux élèves, de manière à faire de chacun un élément d'une recherche générale. Le nombre et la variété de ces recherches générales sont si grands qu'on n'en peut faire qu'un pelit groupe dans chaque laboratoire et avec une machine donnée. Il y aurait donc tout avantage à établir entre les di- vers laboratoires de mécanique une correspon- dance semblable à celle qui existe entre les Obser- valoires astronomiques. V. Dwelshauvers-Dery. Professeur de Mécanique appliquée à l'Université de Lièges Lit 310 L. LINDET. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE L’INDUSTRIE SUCRIÈRE LES RÉCENTS PROGRÈS DE L'INDUSTRIE SUCRIÈRE Le 29 juillet 1884, le Parlement vota une loi qui produisit une véritable révolution dans l'industrie du sucre, et eut sur le développement de cette industrie la plus heureuse influence. De cette révo- lution nous avions bien besoin; car nous ne nous étions pas tenus au courant des progrès accomplis par les fabricants aliemands et autrichiens, notre outillage ne pouvait être comparé au leur, et nous produisions notre sucre à un prix trop élevé; aussi les sucres français se trouvaient-ils à chaque ins- tant repoussés des marchés étrangers, et mème des marchés français par les sucres de nos voisins. Le Gouvernement s’émut de cette situation et pro- posa cette loi à laquelle je viens de faire allusion. Elleétait bien simple, cette loi de 1884; elle por- tait que dorénavant l'impôt serait perçu, non plus sur le sucre produit sortant de l'usine, mais sur les betteraves au moment où elles entreraient à la sucrerie. La loi supposait que le fabricant saurait retirer de la betterave 6 % de sucre, soit 60 kilogs par tonne, et la tonne de betterave se trouvait im posée du prix qu'auraient payé sous l’ancienne légis- lation 60 kilogs de sucre. Ce rendement légal, cette prise en charge, a été, par des lois successives, relevé à 7, — 1,25, — 7,5 # et elle est aujourd'hui de 1,15 % (loi du 4 juillet 1887), c'est-à-dire que 1.000 kilogs de betteraves doivent acquitter le droit de 77* 500 de sucre, au prix de 60 francs par 100 kilogs, acquitter par conséquent un droit de A6 fr. 50. Ce n’est pas là le seul impôt que le fabricant doive payer au Trésor. Il obtient en effet, en gé- néral, un rendement en sucre supérieur au rende- ment légal, et cette augmentation de rendement constitue ce que la loi nomme l'ercédent. Les excé- dents, de par la loi de 1884, étaient exempts d'im- pôt, et le fabricant était en droit de les vendre comme s'ils avaient acquitté cet impôt; depuis, les excédents ont été frappés d’un droit qui s'élève aujourd'hui à 30 francs par 100 kilogs (loi du 3 août 1890), c'est-à-dire à la moitié du droit ordi- naire. L'État partage dès lors avec le fabricant le bénéfice que celui-ci relire de l'augmentation de ses rendements. Les conséquences sont faciles à prévoir. Le fabri- cant qui paye l'impôt sur la betterave s'attache à obtenir de cette betteravele plus de sucre possible ; il exige du cultivateur que celui-ci ne lui four- nisse que de la betterave riche, et installe dans son usine les procédés et les appareils les plus per- fectionnés. De là les nombreux progrès accomplis DO ES RARE 1 EE (1) Conférence faite au laboratoire de M. le Professeur Friedel, le 23 mai 1891. depuis 1884, Lant sous le rapport de la culture que sous le rapport de la fabrication. Sous l'influence de cette loi on a vu les rende- ments moyens s'élever pour la France de 5, 25 #ÿ qu'ils étaient avant 1884, à 10,3 %, qui a été le ren- dement officiellement constaté en 1889-90. Le ren- dement de la campagne 1890-91, par suite de la basse température de l’été de 1890, a été un peu plus faible, mais s'est maintenu cependant au chiffre de 9, 4 %. Exercée dans 377 usines, la fabrication a abouti en France à la production de 625.000 tonnes de sucre (dernière estimation), pendant la campagne 1890-91, et de 700.000 tonnes pendant celles de 1889-90. — Or, si l’on consulte les statistiques an- térieures à 1884,on voit la production resterstation- naire entre 3 et 400.000 tonnes, et l'on arrive à cette conséquence que la quantilé de sucre produit en France a doublé en quelques années. J'ai dit que, pour obtenir ce résultat, il avait fallu la collaboration des cultivateurs et des fabri- cants. Les cultivateurs ont appliqué à la betterave des procédés plus rationnels de culture, ils ont fait des labours plus profonds, des binages plus fréquents, mis sur leurs terres des engrais mieux appropriés; mais le principal progrès qu'ils ont eu à accomplir a consisté à substituer la graine de betteraves riches à 14 et16 % de sucre, à la graine qui ne produisait que des racines pauvres à 10 et 12 %. Ces graines de races riches étaient bien connues; on les cultivait d’une façon courante en Allemagne, mais on se refusait à les employer en France; elles fournissaient à l’hectare un poids de racines moindre que les graines de race pauvre, et souvent encore le fabricant achetait la betterave au poids sans s'inquiéter de sa teneur saccharine ; il a suffi d'établir dans les marchés entre fabricants et cul- tivateurs une série de prix proportionnels aux ri- chesses en sucre, pour que le cultivateur, obtenant un poids de betteraves riches en sucre, moindre que celui qu'il avait l'habitude d'obtenir, pût réaliser à l'hectare un rendement supérieur en argent; il avait intérêt dès lors à ne cultiver que de la bette- rave riche. Il Tel à été le rôle du cultivateur; examinons maintenant quel a été le rôle du fabricant. Pour analyser les progrès accomplis dans la fa- brication du sucre, nous devons suivre cette fabri- cation depuis l'entrée de la betterave à l’usine jusqu'à la sortie du sucre que cette betterave aban- donne entre les mains du fabricant. — Che L. LINDET. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE L'INDUSTRIE SUCRIÈRE Les laveurs et les épierreurs sont ceux dont on faisait autrefois usage; mais on leur a donné plus d'importance ; on les a multipliés, de façon à éli- miner d'une facon complète la terre et les pierres qui adhèrent à la surface chevelue de la betterave, et à éviter de faire peser par la bascule de la Régie un poids inutile. C’est encore dans le même but, el pour ne pas payerl'impôtsurune matière inerte, que certains fabricants égouttent, au moyen de tables à secousses, l’eau dont les racines sont recouvertes au sortir des laveurs. Le seul procédé en usage aujourd'hui pour extraire le jus de la bettrave est le procédé de Julius Robert, le procédé de la diffusion. On ne rencontre les ràpes et les presses que dans trois ou quatre usines, qui, ayant adjoint à la sucrerie une distillerie de betteraves, sont soumises à un régime fiscal différent de celui dont nous avons parlé. Introduit en 1876 par M. Quarez à Verberie, le procédé de la diffusion s’est répandu lentement jusqu'en 1884. La nouvelle loi a nécessité partout son adoplion. Les coupe-racines, chargés de débiter la bette- rave en cossettes, ont élé perfectionnés de telle facon que la cossette présente à la diffusion la plus grande surface possible. Les diffuseurs sont, comme au début, de grandes capacités de fonte, de 15 à 20 hectolitres, munis de calorisateurs, rangés les uns à côté des autres en batterie de douze ou de quatorze. Chacun d’eux contient des cosseltes à différents degrés d’épui- sement. L'eau pure, arrivant en queue de la batterie sur les cossettes épuisées, s'enrichit de plus en plus au contact de cossettes de plus en plus riches, et sort par la tête de la batterie à l’état de jus con- centré. Depuis deux ou trois ans on s'attache dans quel- ques usines à faire travailler la batterie en deux batteries séparées de six ou sept diffuseurs. La - supériorité de cette manière de faire sur la méthode ordinaire ne parait pas être encore bien établie. Un progrès que l’on peut rattacher à la diffusion, est l’acceptation par les cultivateurs de la cossette épuisée; habitués qu'ils étaient à la pulpe de presses, qui était relativement sèche, ils n’ont accepté au début qu'avec une grande défiance la pulpe de diffusion qui était beaucoup plus hydratée. Des tentatives intéressantes ont été faites, ces temps derniers, notamment par M. Magnin, pour dessécher ces cossettes, permettre par conséquent leur conservation pendant une longue durée, per- mettre également leur transport à des frais relati- vement peu élevés. Le jus de betteraves est, au sortir des diffuseurs, purifié par la chaux el l’acide carbonique, et l’on suit encore dans nos sucreries l’ancien procédé de 371 Possoz et Périer, c’est-à-dire le procédé par défé- cation et double carbonatation. À la chaux on a cherché à substituer le baryte, la magnésie, etc. ; mais il a fallu toujours revenir au procédé primitif, qui donne encore les meilleurs résultats. Les cuves de carbonatation sont toujours aussi basses qu'elles étaient autrefois; c’est là une mau- vaise disposition. Le gaz du four à chaux ne con- tient que 25 à 30 °/, d'acide carbonique, qui, dilué dans un excès d’air et d’azote, s'absorbe diflici- lement. On augmentera nécessairement les chances d'absorption du gaz, en surélevant les cuves, et en forçant le gaz à parcourir une plus grande hauteur de liquide. Les filtres-presses qui servent à séparer les boues calcaires, ce que l’on nomme improprement les écumes, sont plus puissants qu'ils ne l’étaient autre- fois. Cela tient à ce que l’on évite aujourd’hui de laisser les jus de première carbonatation se décanter, pour ne passer au filtre-presse que la partie trouble, et que, dans le but d'empêcher les jus, abandonnés au repos, de s’altérer dans leur composition, on sépare les impuretés inso- lubles au sortir même de la cuve de carbonatation. Un changement plus radical encore qui s’est introduit en sucrerie a élé la suppression partielle du noir animal, qui servait pour décolorer les jus et les sirops. Dans un grand nombre d'usines, au lieu de filtrer ces jus et ces sirops sur une colonne de noir, on se contente de les faire traverser un tissu spécial de coton, dit tissu Puvrez. Il est probable que, par suite d’aflinités capillaires, les fibres du coton retiennent une partie des matières colloïdes, colorantes, que les jus et les sirops contiennent. La purification est évidemment moins profonde que celle que l’on obtenait avec le noir animal; mais l'emploi de ces tissus est tellement économique que l’on s’en contente dans la plupart des cas. Pour obtenir cette filtration des jus et des sirops à travers ces tissus, on les dispose de différentes façons. Tantôt le tissu est cousu sous forme de grands sacs, dont la tête est ficelée solidement sur le tuyau qui amène sous pression le liquide à déco- lorer. Celui-ci gonfle le sac, et filtre à l'extérieur. Tantôt le tissu est placé entre les plateaux de véri- tables filtres-presses. Tantôt enfin il est disposé à l'intérieur d'appareils spéciaux qui portent le nom de filtres Daneck, de filtres Kazalowski. Le jus, après avoir été déféqué et clarifié, est sou- mis à l'évaporation au moyen de l'appareil à éva- porer dans le vide et par triple effet, et est amené à l’état de sirop; au moyen de la chaudière à cuire dans le vide il est transformé en masse cuite. IL L'appareil à évaporer dans le vide et par triple 312 L. LINDET.— LES RÉCENTS PROGRÈS DE L'INDUSTRIE SUCRIÈRE effet, a reçu plusieurs modifications de détail, qui ont permis d'obtenir un travail plus régulier et plus rapide. On a tout d'abord rétabli les tubes que Ril- lieux avait eu soin, au moment où il créa le triple effet, de placer sur chacune des caisses, et qui sont destinés à enlever, au fur el à mesure qu'elles se produisent, les vapeurs ammoniacales. Ces vapeurs qui proviennent de l’action de la chaux sur les amides (asparagine, glutamine), contenues dans le jus de betteraves, sont peu diffusibles; elles s'ac- cumulent à la surface des liquides qui s'évaporent pour y former matelas, et l’on a reconnu que l’on augmente la rapidité de l'évaporation quand au moyen de ces tubes spéciaux, sur lesquels agit une pompe, on parvient à les faire disparaitre. Les vases de sûreté ou brise-mousses, qui ont pour but de retenir les particules liquides entrainées par la vapeur, sont en général placés contre cha- eune des caisses du triple effet. La Société des an- ciens établissements Cail les dispose au-dessus même de la caisse, ce qui représente une réelle économie de construction. Enfin entre chacune des caisses d’évaporation on voit figurer souvent des cylindres de Lôle, à l'in- térieur desquels on a disposé un certain nombre de plaques de tôle perforées. Ces cylindres, dési- gnés sous le nom de ralentisseurs Hodeck, ont pour effet de retenir d'une facon complète les goutte- lettes de liquides sucrés que la vapeur pourrait entrainer hors de l'appareil d’évaporalion. Cette vapeur en effet est obligée, avant de s'échapper, de venir frapper contre les tôles perforées. Les gout- Lelettes liquides perdent leur force vive, viennent se rassembler au fond du cylindre, et le liquide sucré peut, à l’aide d'un petit tube, être ramené constamment à la chaudière. Si intéressantes que soient ces modifications, elles ne sont rien en comparaison de celles que j'ai maintenant à vous faire connaître. Depuis deux ou trois ans on voit dans quelques sucreries ajouter à l'appareil d’évaporation une quatrième caisse, c’est-à-dire que l'on transforme l'appareil à triple effet en appareil à quadruple effet. Cet appareil est d'autant plus intéressant qu'il comporte un mode de chauffage essentiellement différent de celui au- quel on était habitué, et qu'il devient, par suite d’une distribution spéciale de la vapeur, l'âme de l'usine tout entière. La vapeur nécessaire à toute la sucrerie, à l'exception de celle que l’on envoie dans l'appareil à cuire et dans les calorisateurs de la batterie de diffusion, passe par la première caisse du quadruple effet, et c’est alors la vapeur issue du liquide qui s’évapore dans cette chaudière qui va alimenter l’usine. Dans la première caisse on envoie en effet de la vapeur à 110° provenant du générateur, et, sous l'influence de ce chauf- fage, le liquide contenu dans cette caisse bout à 1059, c’est-à-dire sous pression {ce qui, dans les appa- reils ordinaires n’a jamais lieu). La vapeur de ce liquide à 105° va échauffer le liquide de la seconde caisse ; mais les choses ont été disposées de telle façon qu'il y ait un excès de vapeurs, et c’est cet excès de vapeurs que l’on vient puiser au sommet de la première caisse pour alimenter trois batteries de réchauffeurs tubulaires. Dans une des batteries circule le jus déféqué et clarifié qui se rend dans la première caisse d'évaporation; dans l’autre, les jus qui vont en seconde carbonatation et qui doivent être échauffés à 100°; dans l’autre enfin, les sirops qui se dirigent vers la chaudière à cuire. — La seconde caisse contient un liquide, qui, sous l'influence du vide que l’on produit à la facon or- dinaire, bout à 95°. Ses vapeurs vont échauffer la troisième caisse. Mais là encore il y a excès de va- peur, et cet excès est employé pour alimenter une batterie de réchauffeurs, où passe continuellement le jus qui va subir la première carbonatation et qui doit être maintenu à la température de 60°. — Le liquide de la troisième caisse bout à 80°, celui de la quatrième à 50-55°, Le vide est, comme d'or- dinaire, produit sur cette dernière par la conden- sation de ses vapeurs au moyen d'une pluie d’eau froide ; le vide de la troisième par la condensation de ses vapeurs au contact du liquide de la qua- trième; le vide de la seconde, par celle de ses va- peurs au contact du liquide de la troisième. — Gel appareil donne au fabricant qui l'emploie une éco- nomie de vapeur, et par conséquent de charbon, qui représente près de 30 °/, de la dépense qu'oc- casionne l'emploi de l'appareil ordinaire à triple effel, etle réchauffage des jus et des sirops dont nous avons parlé. Le sirop qui s'écoule de l'appareil d'évaporation après avoir passé sur le noir ou à travers les tissus Puvrez, est chauffé dans la chaudière à cuire, et transformé en masse cuite. La turbine sépare de cette masse cuite le sucre cristallisé et le sirop d'égout. Celui-ci est recuit, donne les sucres de 2°, puis de 3° jet, et l’on arrive ainsi au dernier résidu de la sucrerie, c’est-à-dire à la mélasse. II On ne lraile guère, en France, la mélasse pour en extraire le sucre, et mon premier soin sera de faire connaître les causes de cette situation, qui parait incompatible avec la tendance générale, que nous constatons chez nos fabricants, d'extraire le plus de sucre possible de leurs betteraves. Au moment de l'apparition de la loi de 1884, tous son- gèrent à traiter ces mélasses, ou à les vendre aux raflineurs, qui se proposaient de les acheter à un L. LINDET. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE L'INDUSTRIE SUCRIÈRE 313 prix rémunérateur. La distillerie de mélasse voyait de ce fait la matière première de sa fabrication lui échapper; elle protesta auprès des pouvoirs publies qui firent voter une loi (4 juillet 1887) par laquelle les mélasses qui étaient dirigées vers la distillerie, étaient déchargées d'une somme repré; sentant l'impôt de 14 kil. de sucre par 100 kil. de mélasse, soit de 8.fr. 40, imputable au compte du fabricant : et il est arrivé alors que les fabricants ont eu plus d'avantages à toucher cetle somme de 8 fr. 40 et à vendre leurs mélasses à la distille- rie, qu'à bénéficier, après une exlraclion onéreuse, du sucre que leurs mélasses contenaient. Aussi l'extraction du sucre des mélasses est-elle, en France, limitée à trois raffineries et à deux fabri- ques. Le procédé de l’osmose, le procédé de Du- brunfaut, n’est plus appliqué : les résultats qu'il fournit ont cessé d'être avantageux, et dans les usines dont je viens de parler, on préfère extraire le Sucre en le transformant en sucrates insolubles ; on fait de la sucraterie. L'une des raflfineries travaille au moyen de la baryte {raffinerie Lebaudy), les deux autres au moyen de la strontiane, procédé Scheibler (rafline- ries Parisienne et Say); les deux fabriques (sucre- ries de Souppes et d'Ardres) emploient le procédé Steffen à la Chaux. Pour extraire le sucre au moyen de la baryte, on fait bouillir la mélasse avec un excès d’eau de ba- ryle saturée. Le sucrate de baryte insoluble se pré- cipite, est recueilli, lavé et décomposé par l'acide carbonique. Le sucre est mis en liberté, et le car- bonate de baryle est ensuite régénéré pour ren- trer en fabrication. Le procédé à la strontiane donne également el. dans des conditions analogues un sucrate inso- luble, le sucrate bistrontique. Au lieu de décom- poser ce sucrale par l'acide carbonique, on l’aban- donne au froid, et l’on voit ce sucrate se dédoubler: d'une parten sucrate mono-strontique qui se dissout dans la petite quantité d'eau adhérente au préci- pité, d’une autre, en strontiane hydratée, qui cris- lallise et qui rentre immédiatement en travail. Le sucrate monostrontique est repris par l'acide car- bonique, et l’on économise de cette façon la moitié du gaz qui serait nécessaire à ia décomposition du sucrale. Le procédé Steffen à la chaux offre l'avantage de pouvoir être suivi par les sucreries, et cela pen- dant la campagne même; il aboutit, en effet, à la production de suerate de chaux insoluble, et c'est au moyen de ce sucrate de chaux que l’on produit la défécation des jus de diffusion. Le sucre des mélasses retourne donc en travail, sans qu’il soit besoin d'user plus d'acide carbonique que dans le cas ordinaire de la carbonatation. Le fabricant, qui veut appliquer ce procédé Steffen, a eu soin de conserver les mélasses de la campagne précédente ; au moyen de l’eau, il les dilue, jusqu'à ce qu’elles contiennent environ 8 °/, de sucre, et il y ajoute, en ayant soin que la température ne s'élève pas au- dessus de 15°C, de la chaux vive finement pulvé- risée. S'il employait de la chaux éteinte, il se for- merait du sucrate soluble, tandis qu'en présence de la chaux vive, il se forme du sucrate tribasique insoluble dans l’eau, celui même que l’on oblient par la coagulation à la chaleur d’une solution de sucrate de chaux. Le sucrale insoluble est recueilli entre les plateaux d'un filtre-presse; on le délaie dans l’eau, et on l’ajoute aux jus de diffusion. Le sucre produit en fabrique se présente à l’état de cristaux isolés. La consommation le refuse sous cette forme, et demande qu'il soit moulé en pains ou en morceaux. C’est là le travail que le raffineur doit exécuter. A cet industriel incombe également le soin de purifier les sucres roux indigènes et les sucres exotiques, La raflinerie est toujours localisée dans de grandes usines. Vainement on a cherché jusqu'ici à supprimer entre le consommateur et le produc- teur cet intermédiaire, qui est le raffineur; vaine- ment on a cherché des procédés qui permissent au fabricant de raffiner lui-même son sucre. On s'est heurté à des impossibilités commerciales, indus- trielles et même administratives, et nous ne possé- dons en France que trois fabriques-raffineries ; elles travaillent très habilement, obtiennent de bons résultals, mais leur existence se trouve con- tinuellement menacée par la grande raffinerie. On rafline encore le sucre en le mettant sous forme de pains, mais on préfère souvent le mouler en plaquettes qui, au sciage et au cassage, four- nissent moins de déchets. Bien des procédés ont été proposés pour oblenir ce résultat; je ne vous citerai que celui de Tiez, Selwig et Lange, dont la Société des anciens établissements Cail est la con- cessionnaire, Les sucres sont, comme dans le pro- cédé ordinaire, refondus, traités au noir fin et au sang de bœuf, au filtre-Taylor, etc., puis cuits à l’état de masse cuite et coulés dans une caisse en tôle galvanisée. Cette caisse est cloisonnée au moyen de lames de zine, et entre cés cloisons on voit se former, par la solidification de la masse cuite, un certain nombre de plaquettes de sucre, toutes gorgées encore de sirop d’égout. On reprend ces plaquettes et l’on en chasse le sirop d’égout en les soumettant à la force centrifuge d’une turbine. Pour enlever les dernières traces de sirop impur qui baigne encore les cristaux, on place les pla- quettes dans une caisse autoclave où l’on fait le vide, et où l’on fait entrer ensuite une clairce de 374 J. DENIKER. — LES DAHOMÉENS sucre pur, qui est immédiatement absorbée comme elle le serait par une éponge. On place une seconde fois les plaquettes dans la turbine, on en produit un nouveau clairçage, pour les soumettre une der- nière fois au turbinage. Les plaquettes sont ensuite séchées dans une étuve, sciées el cassées, pour obtenir ces morceaux rectangulaires auxquels la consommation s'est habituée depuis quelques années. Enfin, je dirai un mot d’un procédé bien nou- veau encore, car il n’est qu'à l’essai dans une de nos plus grandes raffineries parisiennes. Au lieu de produire, par la refonte des sucres roux, des pains ou des plaquettes qu'il faut turbiner et claircer, on peut laver au préalable les sucres roux, et cela au moyen de sirops saturés de sucre, pour les fondre ensuite et obtenir une masse cuite abso- lument blanche. C’est là un procédé imaginé par M. Steffen, et qui donne, parait-il, d'excellents ré- sultats en Allemagne. IV J'ai consacré la plus grande partie de cette con- férence au sucre de betteraves. L'intérêt qu'offre sa fabrication jnstifie l’importance que nous y avons attachée ; mais nous ne saurions nous désintéresser du sucre de cannes. Parmi les gros producteurs, nous devons compter nos colonies, dont les sucres arrivent en France, protégés par une législation fiscale avantageuse et viennent ainsi maintenir les cours relativement bas de nos sucres indigènes. De tous côtés, aussi bien dans nos colonies de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion, qu'à Cuba, à Java, à la Jamaïque, on voit l’indus- trie de la canne se perfectionner. Plusieurs établissements ont adopté le procédé de la diffusion et obtiennent des rendements plus considérables que ceux obtenus jusqu'ici au moyen des moulins ordinaires. Certains fabricants sou- mettent àla diffusion, non pas la canne elle-même, mais la bagasse, c’est-à-dire le résidu du pressurage de la canne au moulin. Ils réalisent de cette façon les mêmes rendements, et ils ont l'avantage de brûler moins de charbon que dans le premier cas pour évaporer le vesou ; car le jus que l’on obtient en pressant la canne est loujours beaucoup plus concentré que celui que l’on produitau moyen de la diffusion. Ce n’est pas seulement par l'adoption du pro- cédé de la diffusion, que la sucrerie de cannes a réalisé de grands progrès dans sa fabrication; c’est aussi par l'adoption du triple effet, des chaudières à cuire dans le vide, des turbines, de tous les appa- reils en un mot, dont on fait usage dans la sucre= rie de betteraves. Enfin il est un dernier fait, et c’est en vous le signalant que je terminerai cette conférence. Il y a trois ans, MM. Bowell et Harrisson, chimistes à la Barbade, furent assez heureux pour découvrir la graine de la canne à sucre, et purent reproduire par semis ce roseau que l’on ne savait repro- duire que par boutures. Ce fait, s’il se vérifie, a une importance plus grande qu'on ne pourrait croire au premier abord. Le jour où l’on sera maitre du procédé des chimistes Anglais, on pourra opérer des croisements, faire des sélections qui permettront d'obtenir des races de cannes riches en sucre produisant beaucoup à l’hectare. C'est du fait de tous ces progrès, dont l’indus- trie exotique poursuit l’accomplissement, que l'industrie de la betterave se trouve menacée, et il y a des esprits, peut-être pessimistes, qui pré- voient dès aujourd'hui la déchéance et peut-être même l’anéantissement de la sucrerie de bette- raves en Europe. Aussi nos fabricants devront-ils redoubler d'efforts pour maintenir cette industrie si intimement liée au développement de notre agri- culture. L. Lindet, Professeur suppléant à l'Institut agronomique. LES DAHOMÉENS ÉTUDE ANTHROPOLOGIQUE La troupe des Africains récemment exposée au Jardin d’Acclimalation sous le nom de « Daho- méens » el qui attirait une foule de visiteurs par ses danses, ses simulacres de guerre, ses costumes bizarres, présentait aussi un grand intérêt au point de vue scientifique, en mettant sous nos yeux des échantillons authentiques des peuplades nègres en- core peu connues. Elle se composait de quarante in- dividus,hommes, femmes, et enfants appartenant à deux groupes ethniques distincts :les Yorouba (fig. 1 et2) et les Ævé ou Æoué (fig. 3). Ces deux popula- tions habitent la côte des Esclaves, baignée par le golfe de Guinée depuis le cap Saint-Paul jusqu'au delta du Niger, de même que le pays situé à deux ou trois cents kilomètres dans l’intérieur et appar- tenant aujourd'hui aux Anglais (colonie de Lagos), J. DENIKER. — LES DAHOMÉENS 375 aux, Français (colonie de Whydah et de Porto- Novo) et aux Allemands (le Togo). La rivière de Vhémé ou Oagbo qui se jette dans la baie de Bénin à une dizaine de kilomètres à l’ouest de Porto-Novo, sert de limite approximative entre les deux populations : Evé à l’ouest et Yorouba à l’est. Les Evé se divisent en plusieurs tribus qui ne diffèrent entre elles que par leur dialecte. Les principales de ces tribus sont les Anto, les Xrepis, du pays de Togo, les Gèges, Gegi où Djedii du littoral de Why- dah et de Porto-Novo et les Dahoméens ou Féons(Faouins)qui for- ment plus au nord un royaume tristement célèbre par la cruauté de sessouverains. Les Yorouba se divisent aussi en diverses tri- bus:les Yebou, immé- diatement àl’ouestdu delta du Niger, les Jktou plus à l’ouest encore, les Z#%ba ou Jjba du pays d’Ab- beokouta, voisin de nos possessions, el enfin les Vagos du Porto-Novo. Le gros de la troupe exhibée au Jardin d’Acclima- tion se composait de Dahoméens et d’Ek- ba. Les Yoroubaétaient les habitants primi- tifs de tout le pays qui s'étend &u nord la côte claves jusqu'à peu près le latitude N.; mais ils ont été et dans l’est par les hordes des peuplades Evés qui ont envahi, au du siècle passé, le pays acluel de Dahomé et plus tard (en 1772), le Togo et les royaumes de Porto-Novo et de Juida (le Whidah ou Ouida actuel). Dans le royaume de Porto-Novo, aujourd’hui sous notre protectorat, les Gèges (de souche Evé) ont imposé leur autorité aux Nagos (de souche Yorouba) et c’est de celte race que sortent les rois et les prin- cipaux chefs de ce royaume. La plupart des Nagos ont été au contraire réduits à l’état d'esclaves, et ce sont eux avec les Mina, émigrés du royaume d’Achanti, qui formaient, à l’époque de la traite, le de des Es- neuvième degré de refoulés vers la côte commencement Fig. 1. — Boïna, jeune garcon Yorouba. plus gros des cargaisons des négriers à destination du Brésil. Le nom de Mina était d’ailleurs appliqué, au Brésil, indislinctement à tous les Nègres importés de la côte des Esclaves, tandis qu’on appelait Apoiloniens, ceux de la côte de l’Or. En somme, la majorité de ces Minas étaient des Achantis et des Yorouba. A en juger d’après les échantillons que nous avons#pu examiner à Paris et d’après les photo- graphies, les Yorou- ba et les Evé se res- semblent beaucoup entre eux au point de vue physique; d'autre part, ils pré- sentent plusieurs traits communs avec les Achantis. La taille movenne des Yorou- ba-Ekba, mesurés par nous,estde1",65 pour les hommes, de 1,57 pour les femmes; celle des Evé-Daho- méens est de 1,64 pour les hommes, de 1%,57 pour les fem- mes. Celle laille est inférieure à celle que nous avons trouvée chez les populations les plus proches com- me habitat : les A- chantis et les nègres Krous de Libéria 1",69), exposés à Paris en 1887 et les Sénégalais (1",70) qui sont venus à l’Expo- sition de 1889 *. La couleur de la peau est relativement plus claire que chez les autres Nègres du nord de la côte occidentale de l'Afrique. Elle varie du chocolat clair au canelle ou vieux cuir, tandis que celle des Achantis est d’un brun très foncé et celle des Sénégalais presque noire. Les Krous se rapprochent au con- traire des Evé et des Yorouba par leur colora- ton peu foncée. La tête est assez allongée. L'in- dice céphalique, c’est-à-dire le rapport centésimal du diamètre antéro-postérieur du crâne au dia- mètre transverse est de 75 pour les Yorouba (hommes et femmes), de 77 pour les hommes Evé ! Voy. Dexixer et LaLoy, Les Races exotiques à l'Exposilion universelle ; « Anthropologie », 1890, p. 257 et 513. 376 J. DENIKER. — LES DAHOMÉENS et de 75 pour les femmes de cette peuplade. Ces chiffres sont voisins de ceux que nous avons obtenus en mesurant les Achantis (77, hommes et femmes), les Krous (75, hommes et femmes) et les Sénégalais (75, hommes seulement). Ils dénolent une uniformilé remarquable dans la configura- tion de la tête chez tous les Nègres en général; les indices varient dans les ii- mites très serrées, de Nous n'allons pas insis- ter sur d’autres ca- ractères somatolo- giques des Yorouba et des Evé, mais nous ne pouvons pas nous abstenir de faire deux vations. La forme du nez diffère sin- gulièrement les deux sexes; chez les hommes on ren- contre fré- quemment des nez 15 à 11. obser- dans assez proéminents, droits et même recourbés, presque aquilins et assez étroils (fig. 1); tandis que chez les femmes le nez est presque toujours a- plati, souvent com- me écrasé, très lar- ge, à pointe gros- sière et parfois con- cave (fig. 2 et 3). Si l’on peut se ser- vir de comparai- nez hommes rappelle celui des Abyssins ou des So- malis, tandis que chez les femmes le nez res- semble à celui des Boschimanes ou des Hotten- totes. Une autre particularité, commune celle-là aux indigènes dont nous parlons et aux Achantis et Krous, c'est le développement des muscles ju- meaux de la jambe qui donne au mollet une saillie aussi prononcée que chez les individus de la race blanche (fig. 2), tandis que l'on sait que chez la plupart des nègres du Sénégal et du Soudan le mollet est {rès peu saillant. En général les Dahoméens et les Ekbas sont bien faits et le torse des hommes pourrait servir sons, le des de modèle au point de vue plastique; on ne peut en dire autant des femmes, car la plupart ont des formes lourdes, les seins pendants, la face apla- lie, ete. (fig. 2 et 3). Si l’on compare le des Dahoméens avec type physique des Ekbas et celui des autres Nègres de l'Afrique occiden- tale, on voit que ces peuplades for- ment comme un passage du groupe sénégambien ou ni- grilique au groupe bantou !. Mais ce qu'il y a de plus remarquable et de tout-à-fail frappant, d'ailleurs, c’est l’abaissement de la taille qui s'observe chez les popula- lions nègres dans cerlaines régions de l'Afrique occiden- tale. D'après nos pro- pres mensuralions et d’après celles de plusieurs autres observateurs —Cor- re, Verneau, Zint- graff, Wolff. Mense— on peut dresser le tableau suivant de la taille des po- pulalions nègres de l'Afrique occiden- tale en les dispo- sant dans l'ordre géographique, du nord au sud : TAILLE MOYENNE PEUPLADES EN MILLIMETRES Iommes Femmes: OHOINIS AS ERA. AR 1720 — Moucouleurs 7.000" 1707 — 5 Mandingues............ 1672 — 10 ROSE Es cr ee net 1690 1619 10 VAE TN OCR 1693 155% 20 Evé-Dahoméens........ 1637 157% f Yorouba-Ekba ......... 1630 1561 8 OLA AIRE ITR, 1695 — 8 AOUMaEEre ce Muret 159% — 36 RATORERAER EAN MEUR, 1641 = 3 TON PO EEE RTE Ë 1670 _ 1% KRAakKODPOE ER EC CCE 1652 — 12 Mouchikongo .......... 1664 _ 3 BanbalL Pet ARRET 1658 — #1 Baloubanrr re sie, 1698 — 13 AnpOlais PEL ETES 1667 1486 _! La limite entre les deux groupes se trouve à la baïe du Kameroun. ‘ J. DENIKER. — LES DAHOMÉENS 377 Un simple coup d’œil sur la carte suffira pour se convaincre du fait que la laille, très élevée au Nord (Sénégambie, Libéria) et assez élevée dans le Sud (Angola), s'abaisse d'autant plus qu'on se rap- proche de la région intermédiaire et notamment en deux points entre le Congo et l'Ogooué d’une part, et vers le Dahomé de l’au- tre.L'explication du premier de ces phé- nomèênes pourrait setrouverdans l’ad- mission des mélan- ges avec les popu- lations négrilles, di- tes pygmées. En effet, depuis Îles exploralions de Schweinfurth, de Stanley, de Wolff, de Marche, de Jun- ker, de Crampel, et depuis les travaux de De Quatrefages, Hamy, Emin Pacha et autres, il n’y a plus de doules sur l'existence des po- pulations noires pygmées dispersées sur une large bande de territoire qui s'étend à 3 degrés au nord el au sud de l'équateur, à tra- vers tout le conti- nent noir, depuis l'Ouganda jusqu'à l'embouchure d’0- gooué. Les AXkas ou Tiki-Tiki du Haut Nil, les Ouamboutti de l’Arouwimi, les Batouas du Congo, les Obongos. les Achongos et les Bayagas de l'Ogooué sont les prin- cipaux anneaux de cette chaine de peuplades qui s'étend des montagnes du lac Victoria-Nyanza jus- qu'à l'Océan Atlantique. La taille excessivement petite des Adoumas de l'Ogooué (voy. le tableau), jointe à plusieurs autres caractères que nous avons pu constater chezeux (la brachycéphalie, la forme de la face, etc.), ne laisse pas de doutes sur une forte proportion de sang négrille dans les veines de ces nègres, les plus proches voisins des pygmées. Quant à la petite taille des Dahoméens, de cer- tains Yorouba et Achantis el à la forme brachy- céphale de la tête, observée par nous chez ces der- Fig. 3. — Satia, femme Dahomé, niers, il est plus difficile de les expliquer. La race pygmée s’éterdrait-elle dans l’intérieur de l'Afrique beaucoup plus au nord qu’on ne le suppose? Les renseignements posilifs manquent à cet égard. Cependantil va quelques indications de l'existence des peuplades de petile laille dans ces parages. Déjà en 1818 Île voyageur Molliensi- gnalait une popula- tion pygmée dans le pays de Tende- Maié vers les sour- ces du Niger; mais ce fait n’a pas en- confirmé par les voyageurs modernes qui ont passé dans le voisi- core élé nage de ceile con- trée. Par contre, un autre fait singulier vient d'être signalé toul récemment par un voyageur alle- mand, le colonel Kound!:e’estl'exis- tence d'une popu- lation de très pe- lite laille, appelée Boyaeli ou Baüec dans le pays silué à quelque deux cents kilomètres de la côte, entre les rivières Sananga el Campo (Colonie al- lemande de Kame- roun). Si criplions plus com- pletes nous contir- ment que par leurs autres caractères ces Boyaeli se rapprochent des pygmées, ou du moins des populalions métissées qui en sont issues, comme les Adoumas, l'explication de la petite taille des Yorouba et des Dahoméens serait presque lrou- vée, car l'habitat des Boyaeli n’est séparé de celui des peuples Yorouba que par la baie de Cameroun et le Delta du Niger. Il est fort probable que ces Boyaeli sont des frères de race des Bayagas, vrais pygmées, que notre vaillant voyageur Crampel avait signalés tout récemment au nord de l’'Ogooué, à peu près par 2° latitude Nord et 13° longitude Est, par conséquent à quelque deux cents kilomètres au sud les des- 1 Mittheilungen.… aus den Deutschen Schutzgebielen, t. Il, p. 109; Berlin, 4889. (Publication semi-oflicielle.) 378 J. DENIKER. — LES DAHOMÉENS D _ _ __— des Boyaeli !. Toujours est-il qu'il faut aujourd'hui tenir sérieusement compte d’un élérnent ethnique de petite taille et brachycéphale, répandu en Afrique sur une étendue beaucoup plus considé- rable qu'on ne l'avait supposé tout d’abord. Nous nous sommes un peu appesanti sur ces questions, car elles nous paraissent avoir un grand intérêt et sont peut-être sur le point d’être réso- lues à la suite de nombreuses explorations qui sur- gissent de tous côtés en Afrique. Il nous reste peu de place pour parler de la vie sociale, des mœurs et des coutumes des Yorouba et des Dahoméens. Il ya un siècle le nom de Dahoméens était à peine connu des Européens. C'était une petite peu- plade, appelée indistinetement Feon, Ffon, Faouïn qui habitait autour de la ville de Dahif, près d’A- bomey actuelle. Dès le commencement du xvie siè- cle le chef de cette tribu, Tacoundou, déclara la guerre au roi d'Abomey, s'empara de la capitale de son royaume et fit prendre à son clan le nom de Dahomé. On peut donc considérer Tacoundou comme le fondateur du royaume de Dahomé, un des rares états nègres qui furent constitués sans l'intervention de blanes ou de métis. La conquête des pays situés sur la côte et surtout celle du royaume de Juida(Whydah) par un des successeurs de ce chef, Agadja Toroudou firent connaître les Dahoméens en Europe. Le commerce d'esclaves avec les Européens (aboli nominalement en 1843), les guerres fréquentes des Dahoméens contre leurs voisins, les habitudes sanguinaires qui font pour ainsi dire partie de la constitution politique de ce peuple, enfin les efforts de l'Angleterre à mettre un terme à ces atrocités, toutes ces causes ont donné au Dahomé une notoriété bien supérieure à sonimportance réelle. D'ailleurs nos connaissances sur ce peuple sont tout à fait superficielles. En ce qui concerne son élal social, ses mœurs el ses coutumes, nous sommes réduits à des récits des voyageurs, fort peunombreux, qui ontpu pénétrer dansle Dahomé?, La plupart de ces voyageurs ont suivi le même itinéraire : de la côte vers la capitale, la ville d’Abomey; seul Duncan avait dépassé ce point. Les descriptions de la cour du roi, de ses amazones, de ses fêtes sanguinaires appelées «les coutumes », des sacrifices humains,de l’esclavage,etc., sont trop con- nues pour que nous allions répéter ici ce qui a été dit déjà plusieurs fois. Il n’est cependant pas inu- 1 Voy. Comples-rendus de lu Soc. de géogr., 4890, p. 548: ? Voici les principales relations de voyages dans ce pays: Dazzez, The History of Dahomey; Londres, 1793, in-4#. — J. Duxcax, Travels in Western Africa ; Londres 1847, 2 vol., in-12. — GUILLEVIN, Voyage dans l’intérieur du royaume de Dahomey : (Annales des voyages, 1862).— KR. Burrox, 4 Mission to the King of Dahome, Londres, 1864, 2 vol, in-8. — Sxer- renzy, Dahomey as ilis, Londres 1874.— FLeuRIOT DE LANGLE, Croisières à la côte d'Afrique, Tour du Monde, 1876, etc. tile de signaler quelques erreurs qui circulent encore dans le public au sujet des amazones et des sacrifices humains. Ainsi l’on entend encore souvent répéter, même par des personnes très instruites, que les amazones dahoméennes pratiquent l’abla- tion d’un sein ; c’est une assertion erronée qui ne repose uniquement que sur la confusion faite entre ces femmes guerrières de l’Afriqueet les amazones de la mythologie grecque ; une autre erreur est de dire que ces amazones ont vouées au célibat. Plusieurs voyageurs et encore tout récemment M. Foa ‘ont réfuté cette assertion. Quant auxsacri- fices humains, si jadis c’élaient réellement des hécatombes telles que veulent bien nous les repré- senter les voyageurs du commencement du siècle, elles se réduisent aujourd'hui à l’exécution de quelques dizaines de criminels condamnés et des esclaves, prisonniers de guerre. La coutume aurait done perdu beaucoup de sa sauvagerie primitive; mais ce qui est certain, c’est que l’idée première qui a motivé ces carnages n’a pas changé ; c’est tou- jours la croyance à la continuité entre la vie réelle et la vie de l’autre monde, à la communication entre les vivants et les morts, car encore aujour- d'hui les hommes expédiés ainsi malgré eux «d patres sont chargés de messages pour les parents el les amis défunts du roi. L'état social et lesmæurs des Yorouba sont moins connus que ceux des Dahoméens; plus pacifiques, ils n’ont pas fait tant de bruit autour de leur nom. Mais il existe chez eux nombre d’usages intéressants. Il suffirait de rappeler l'institution des sociétés secrètes des Ogboni ou Aboni, sorte de franc-maconnerie, qui se ramifie sur tout le pays et y exerce un pouvoir supérieur à celui des chefs. Les grands dignitaires des Ogbonis for- ment un conseil autour des rois indigènes et gou- vernent en somme à leur guise. Ce sont eux qui fournissent les félicheurs patentés et les guéris- seurs; ce sont eux aussi qui forment le tribunal de justice et font connaître et exécuter leurs décisions par des individus qui, revêtus d’un costume étrange et se déguisant sous des masques hideux et ef- frayants, parcourent les villages et font entendre la voix de l’Oro, esprit vengeur par excellence. Cette « voix » est produite parune mince planchette de bois attachée à une longue perche, et que l’on fait tourner avec une grande vitesse. Gare à celui qui rencontre sur son passage le messager de l'Oro; tôt ou tard il va périr d’une mort violente. Cette coutume, de même que l'institution même des Ogbonis, rappelle celle du « Douk-Douk » des Mé- lanésiens de la Nouvelle-Bretagne. J. Deniker, Bibliothécaire du Muséum d'Histoire naturelle. lVoy. Comples-rendus de la Soc. de Géogr. 1888 er 1890. ssh. usée dé ne Si BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 319 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. 1] Tisserand (F.), Membre de l'Institut. Traité de Mé- canique céleste, {. 11. Théorie dela figure des corps célestes et de leur mouvement de rotation, in-4° X1V,552 pages!, (28fr.)Gauthier- Villars et fils Paris, 1891. Au premier abord, l'étude de la figure des corps célestes et de leur mouvement de rotation semble con- damnée à un état d'infériorité, si on la compare à celle des mouvements de révolution des planètes et des satel- lites, gouvernés par la loi unique de l'attraction univer- selle et susceptibles d’être contrôlés à chaque instant par des observations précises : les corps célestes sont ou trop éloignés de nous pour que nos renseignements sur leur figure et leur mouvement sur eux-mêmes mé- ritent toute confiance, ou trop rapprochés, s’il s’agit de la Terre, pour qu'il soit facile de distinguer entre la forme générale du globe et les accidents de sa surface ; on peut done croire, dans un premier apercu, que tou- tes les recherches théoriques entreprises sur cet objet sont de vaines spéculations, Mais si l’on remarque ensuite, avec Clairaut, que les mers du globe communiquent ensemble de toutes parts, que les côtes ne sont que très peu élevées au-dessus de la mer, que la hauteur des plus grandes montagnes est presque nulle en comparaison du diamètre de la Terre. on vient bientôt à reconnaître que la figure de la Terre doit dépendre des lois de l'hydrostatique, et que les opérations faites pour la mesurer doivent donner à peu près les mêmes résultats que si on les faisait sur une masse d’eau qui se serait durcie après avoir pris la figure que demande l’équilibre. L'idée de la fluidité primitive des corps célestes se trouve ainsi placée, avec l’attraction universelle, en tête de la théorie mathématique de leur figure; ces deux idées se tenaient dans l'esprit de Newton, qui a su en faire jaillir, comme d’une source féconde, l'explication de Paplatissement terrestre et de la précession des équi- noxes, Les trois premiers chapitres du second volume du Traité de Mécanique Céleste de M. Tisserand sont con- sacrés à la démonstration des théorèmes généraux de l'attraction. Les propositions d’hydrostatique dont il est besoin par la suite sont si simples qu'il n’a pas été nécessaire d'en former un chapitre spécial. Quelles sont, avant d’aller plus loin, les données sus- ceptibles d’être empruntées aux observations et dont la théorie aura à rechercher les dépendances mutuelles? 11 y a généralement pour une planète : 1° Sa masse ; 2° ses dimensions et sa figure (qu’on peut pratiquement confondre avec celle d’un ellipsoïde de révolution); 3° sa vitesse de rotation ; 4° le poten- tiel de la planète relatif à un point extérieur (po- tentiel que les observations des mouvements des satel- listes font connaître) ; 5° une quantité dépendant des moments d'inertie et qui règle la vitesse de précession dans le mouvement de Ja planète autour du centre de gravité. A ces données d'autres peuvent s'ajouter dans des cas particuliers ; pour le globe terrestre, on à une va- leur approchée de la densité superficielle ; il y a aussi le phénomène des marées. Les observations dela Lune font connaître les rapports des trois moments principaux d'inertie, Les taches du Soleil et de Jupiter décèlent ne accélération curieuse du mouvement de rotation super- 1 Voir la Revue, 1. I, p. 214 pour l'analyse du premier vo- lume. Perlurbations des Planètes. ET INDEX ficiel à mesure qu'on se rapproche de l'équateur; cela doit tenir à la constitution même du Soleil et de Jupiter, En dehors des planètes et de, la Lune, il y a aussi l'anneau de Saturne ; mais il semble qu'il n’y ait pas encore assez de données précises pour servir de guide à une théorie. L'objet des chapitres IV à VIILest l'analyse des figu- res ellipsoïdales qui peuvent être considérées comme des solutions particulières du problème général sui- van : On donne la masse M d’un fluide homogène et incom- pressible, de densité p, animé d’un mouvement de ro- tation uniforme, de vitesse angulaire w autour de l’axe de rotation, et dont toutes les parties s’attirent mutuel- lement suivant la loi de Newton. On demande de trou- ver les figures d'équilibre relatif de la masse fluide; on suppose qu'on exerce en tous les points de la surface une pression constante, Le chapitre VII traite du problème, un peu plus gé- néral et considéré par M. Roche, de léquilibre d’une masse fluide soumise aux mêmes conditions et en outre à l'attraction d’un centre éloigné tournantautour de l’axe de rotation avec la même vitesse angulaire que la masse ou, si l’on veut, en repos relatif ; ce problème intéresse les satellites qui, comme la Lune, mogtrent constamment la même face à la planète centre du sys- tème. La théorie des ellipsoïdes de révolution de Maclau- rin, des ellipsoïdes à 3 axes inégaux de Jacobi, des ellipsoïdes de Roche est ainsi exposée complètement, Un théorème général deM. Poincaré domine la discus- sion : il consiste en ce que l'équilibre relatif est impos- sible avec une figure quelconque si, la masse M étant donnée, la vitesse angulaire w dépasse une certaine limite. Les discussions précédentes montrent en parti- culier que les ellipsoïdes de révolution de Maclaurin w? ne peuvent exister à moins que = Î < 0,22467(f est 2xfe la constante de l'attraction) ; les ellipsoïdes de Jacobi exigent une vitesse angulaire un peu plus petite : on w 2? 109 ape < 0:18709. Un tableau, à Ja page 94, donne le résultat de la comparaison avec les observations quand on suppose les planètes homogènes ; on peut regarder les résultats comme une premièreapproximation assez satisfaisante ; les écarts disparaissent, comme on le voit plus tard, lorsqu'on évite d'introduire la condition d'homogénéité, qui est arbitraire et peu vraisemblable. Les quatre chapitres suivants sont consacrés à l’an- neau de Saturne, Après les recherches de Laplace, M. Tisserand expose les travaux récents de Mme Kowa- lewski et de M. Poincaré sur la figure de l'anneau sup- posé fluide, ainsi que le célèbre mémoire de Maxwell, dans lequel l'anneau est considéré surtout comme une agglomération d’un grand nombre de petits satellites. Le mémoire de Maxwell est souvent cité, mais peu lu. M. Tisserand en expose quelques-unes des parties essentielles, et introduit des perfectionnements notables dans l'analyse suivie par l'illustre physicien anglais, dont la pensée a souvent besoin d’un commentaire approfondi. L'exposé de l’état présent de la théorie de la figure des corps célestes aurait été incomplet si une place n'avait pasété faite à un mémoire capital de M. Poin- caré publié dans les Acta Mathematica, dans lequel l’auteur, prenant pour point de départ les solutions particulières du problème général mentionné plus haut, doit avoir 380 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX s'élève par voie de continuité à la connaissance d’une infinité de séries de figures d'équilibre parmi les- quelles une seule est stable, M. Tisserand ne pouvail reproduire l'analyse de M. Poincaré sans dépasser le cadre qu'il s'était tracé ; du moins un résumé substan- tiel fait connaître les principaux résultats : « Considé- rons une masse fluide homogène animée originaire- ment d’un mouvement de rotation ; imaginons que cette masse se contracte en se refroidissant lentement, mais de facon à rester toujours homogène. Supposons que le refroidissement soit assez lent et le frottement inté- rieur du fluide assez fort pour que le mouvement de rota- tion reste le même dans les diverses portions de la masse. Dans ces conditions, le fluide tendra toujours à prendre une figure d'équilibre séculairement stable ; le moment de la quantité de mouvement restera d’ail- leurs constant. » « Au début, la densité étant très faible, la figure de la masse est un ellipsoïde de révolution très peu difré- rent d’une sphère, Le refroidissement aura d'abord pour effet d'augmenter l’aplatissement de l’ellipsoïde, qui restera cependant de révolution. Quand l’aplatissement sera devenu à peu près égal à ?, l’ellipsoïde cessera d'être de révolution et deviendra un ellipsoïde de Ja- cobi (parce que les figures d'équilibre stables sont les ellipsoïdes de révolution d’un aplatissement inférieur à + etensuite les ellipsoides de Jacobi peu allongés). Le refroidissement continuant, la masse cessera d'être ellipsoïdale. L’ellipsoide semble se creuser légèrement dans sa partie moyenne, mais plus près de l’un des sommets du grand axe. La plus grande partie de la matière tend à se rapprocher de la forme sphérique, pendant que la plus petite partie sort de l’ellipsoïde par un sommet du grandaxe, comme si elle cherchait à se séparer de la masse principale, Il est difficile d’an- noncer avec certitude ce qui arrivera ensuite si le re- froidissement continue: mais il est permis de suppo- ser que la masse ira en se creusant de plus en plus, en s'étranglant dans la partie moyenne, etfinira par se partager en deux corps isolés, » D'après des indications récentes, on pourrait voir là la première étape de l’évolution d'une nébuleuse qui, à la suite de son partage en deux noyaux, donnerait nais- sance à une étoile double, Des problèmes cosmogoni- ques du plus haut intérêt se trouvent ainsi posés pour l'avenir. En attendant, l'élude des corps du système solaire demande surtout que la supposition arbitraire de l’ho- mogénéité soit remplacée par une autre plus vraisem- blable. On est naturellement amené à supposer qu’au lieu d’une seule matière il y en a plusieurs formant des couches de niveau de densité variable et croissante de la surface au centre. Pour simplifier autant que possible, on se borne aux figures d'équilibre ellipsoï- dales en admeltant que la vitesse angulaire de rotation soit très petite. La solution de ce problème est exposée par M. Tisse- rand de deux manières (ch. XIII-ch. XIX) : d’après la théorie de Clairaut et d’après celle de Laplace, Plu- sieurs travaux récents, qui ont leur origine dans une série de leçons sur la théorie de Clairaut professées par M. Tisserand à la Sorbonne, complètent les résultats dus aux illustres inventeurs, On sait l'immense impor- tance, au point de vue mathématique, des recherches de Laplace, auxquelles le nom de Legendre doit être associé ; mais, pour l’Astronomie, ilest permis de pré- férer la solution de Clairaut. Ce qu'il y a de remarquable dans la théorie des figu- res d'équilibre hétérogènes, c’est qu’il existe entre les différents éléments du problème plusieurs relations, égalités ou inégalités, assez simples et rigoureusement ou presque indépendantes de toute hypothèse sur la loi des densités à l’intérieur des planètes ; en d’autres termes, la théorie conduit à plusieurs relations ne con- tenant que des données susceptibles d'être empruntées aux observations. La plus importante porte le nom de Clairaut : elle fait connaître l'intensité de la pesanteur terrestre en fonction linéaire du sinus carré de la lati- tude ; sous sa forme générale la relation signalée par Clairaut s’énonce ainsi : Le potentiel relatif à l’attrac- tion d’une planète sur un point extérieur ne dépend pas de laconstitution interne, mais seulement de la forme de la surface de la planète, Avec le temps et le progrès des méthodes d'observa- tion, le contrôle de la théorie présentera un intérêt croissant; mais il faut savoir attendre, et M. Tisserand n'a pas cru devoir considérer de corps autre que la Terre. Les chapitres XX et XXI (Aperçu des théories géodési- ques. Figure dela Terre déterminée par le pendule) ser- vent d'illustrations à la théorie, de même que l’histoire de la découverte de Neptune,dans le tomel, avait pour but de mettre le lecteur en contact avec les procédés de recherches propres à l'Astronomie. En quelques pages, M. Tisserand réussit à exposer les idées fondamentales de la Géodésie avec les méthodes dues surtout à l'illus- tre Legendre pour le calcul desares de méridien et des lignes géodésiques ; puis il discute les résultats obte- nus pour dégager ce qui peut être considéré comme bien établi. Il paraît que l’ellipsoïde de Clarke (18801 ayant pour aplatissement 1/293,46 Æ 1,07 pourrait rece- voir quelques modifications plus grandes que ne l’in- dique l'erreur probable du dénominateur, Toutefois, les géodésiens ne se presseront pas pour modifier l’el- lipsoïde de Clarke, parce qu'un autre ellipsoïde, repré- sentâtil mieux l’ensemble des mesures géodésiques, ne jouera dans l'avenir que le rôle de surface de com- paraison, Les irrégularités de densité dans la croûte terrestre qui produisent les déviations de la verticale et gènent beaucoup les mesures géodésiques sont aussi une cause d'anomalies pour la détermination du pendule, Lors- qu'on a déterminé les coefficients de la formule de Clairaut à l’aide de l’ensemble des observations préa- lablementréduites au niveau de la mer par la formule de Bouguer(c'est-à-dire en assimilant les continents el les montagnes à des bosses qui sont venues se placer sur la surface des mers prolongée et tenant compte de l’at- traction de toutes les masses qui dépassent le niveau des mers), si l'on calcule, pour chaque lieu d'observation, la valeur théorique de la pesanteur et qu'on la compare à la valeur observée, on reconnaît immédiatement que les résidus présentent une allure systématique et peu- vent être classés en trois groupes distincts, correspon- dant : le premier aux stations des iles de l'Océan, le deuxième aux stations côtières, le troisième aux sta- tions de montagne ; tandis que les résidus sont de l’or- dre des erreurs d'observation pour les continents et les stations côtières, la pesanteur observée est plus grande dans les îles que la pesanteur théorique et le résultat inverse se produit aux stations très élevées, On a expli- qué ce fait curieux en admettant, avec l’archidiacre Pratt, de Calcutta, que, à travers toutes les transfor- mations géologiques, la quantité de malière contenue dans une colonne verticale allant de la surface exté- rieure de la Terre jusqu'à une surface de niveau inté- rieure est restée la même; les montagnes auraient tiré leur substance de la matière située au-dessous ; l'excès de pesanteur dans les îles serait dù à un excès de den- sité du fond des mers, où, suivant M. Faye, le refroi- dissement, plus rapide que sous les continents, accélère la formation de la croûte terrestre et la rend plus épaisse Î, L'avantage des méthodes empruntées à la Mécanique Céleste, qui utilisent quelques inégalités lunaires dé- pendant de l’aplatissement terrestre, est de donner la valeur moyenne de l’aplatissement du globe assimilé à un ellipsoïde de révolution, tandis que les équations de condition relatives aux déterminations du pendule et surtout aux mesures géodésiques ne sont établies que pour une portion restreinte du globe. La discussion des 1 Voir sur ce point dans la Revue, t. I, p. 267 et suivantes, un article intéressant de M. de Lapparent. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 381 déviations de la verticale et des anomalies de la pesan- teur, en vue d'arriver à la vraie figure de la Terre, constituera pour l'avenir un travail immense que l'As- sociation géodésique internationale a la mission de poursuivre, Le D° Helmert, directeur du Bureau central de VAs- sociation, à perfectionné la méthode de réduction des observations du pendule: ilévite les difficultés auxquel- les peut donner lieu le développement du potentiel pour la surface physique de la Terre en concevant une surface S’ parallèle àla surface des mersS, à l'inté- rieur et à une distance de 21 kilomètres, valeur appro- chée de la différence entre le HUbe grand et le plus petit rayon de $’.1l condense sur S par une projection nor- male toutes les parties qui lui sout extérieures, Le dé- veloppement du potentiel du corps fictif limité par S Gt alors possible, M. Helmert tient compte ensuite de la différence d'effet des masses avant et après la con- densation, etil donne le moyen de passer, aumoyen de réductions convenables, de la pesanteur observée à la pesanteur théorique relative au potentiel du sphéroïde limité par S’. Cette méthode, appliquée aux stations par- lagées en trois groupes, comme plus haut, diminue l'effet des irrégularités de lasurface terrestre et conduit à des nombres plus concordants dans chaque groupe de stations ; cela montre lutilité de la méthode, Mais le fait signalé plus haut de légers excédents et de légers déficits de matière dans les îles et sur les montagnes se manifeste encore. En somme, malgré les perfectionnements des mé- Ihodes de calcul, malgré les progrès importants appor- tés dans les procé dés d'observation par le Comman- dant Defforges, on peut répéter, avec M. Bertrand (Jowr- nal des savants, 1874) ce que Delambre écrivait en 1806: « Les deux questions de la grandeur et de la figure de la Terre, qui occupent depuis longtemps les astrono- mes et les géomètres, paraissent de nature à n'être ja- mais épuisées, » La théorie du mouvement de rotation des corps ec- lestes forme la seconde partie de l’ouvrage. Là encore, la notion admise de la fluidité originelle est utile ; car, lorsqu'on étudie le mouvement d’une planète supposée fluide autour de son centre de gravité, ce point coïncide, d’ après un théorème aisé à démontrer, avec le centre de lPellipsoiïde planétaire indépendamment de toute hypothèse sur la constitution interne. Nous ne pouvons mieux faire pour caractériser cette partie de l'ouvrage que de reproduire les paroles suivantes de la Pré- face : « Dans l'étude des mouvements de rotation, dit M, Tis- serand, j'ai employé, d’après Poisson, la méthode de la variation des constantes arbitraires, qui permet de traiter dela même facon les deux problé mes principaux de la Mécanique Céleste et d'élablir entre eux des ana- logies intéressantes. J'ai suivi toutefois, pour l'intégra- tion des équations du mouvement non troublé, la mé- thode de Hamilton-Jacobi, parce qu'elle conduit immé- diatementaux formules différentielles qui font connaître les variations des constantes arbitraires dans le mouve- ment troublé ». Les résultats principaux auraient pu sans doute être obtenus plus rapidement par une autre voie. Je pense néanmoins que, en raison de sa simplicité théorique, la méthode de la variation des constantes arbitraires présente ici des avantages réels ; l'instrument qu'elle met à la disposition du calculateur est d’un maniement facile et uniforme, et se prètle sans effort à la solution de tous les problèmes qui peuvent être soulevés ». La théorie générale est appliquée à la Terre et à la Lune, chap. XXV-XX VIII. On trouve dans les deux pre- miers le calcul des très faibles déplacements des pôles à la surface de la Terre et des variations presque insen- sibles de la vitesse de rotation, ainsi que les formules de précession et de nutation. Arrêétons-nous un peu auchapitre XXVIIT, consacré à la libration de la Lune, sur laquelle, à cause de son voisinage de la Terre, nous pouvons acquérir de pré- cieuses données d'observation, Dominique Cassini a découvert les lois suivantes du mouvement de rotation de la Lune : : ° La Lune tourne sur elle-même, dans le sens di- rect, d’un mouvement uniforme autour d’un axe dont les pôles sont fixes à sa surface; la durée de la rotation estidentique à la durée de révolution sidérale de la Lune autour de la Terre, 2 L'axe de rotation fait un angle constant (88° 25) avec l’écliptique. 3° L’axe de l’écliptique, l'axe de l'orbite de la Lune et son axe de rotation sont constamment dans un même plan (coïncidence des nœuds). La théorie a pour objet de chercher les causes des lois mentionnées et les rapports mutuels qui peuvent les unir, M. Tisserand montre d’abord que l’un des axes prin- cipaux de la Lune, celui auquel répond le plus petit moment d'inertie, forme constamment un angle très petit avec le rayon vecteur mené du centre dé la Lune à la position moyenne de la Terre ; les observations de plusieurs cratères de la Lune ont mis ce fait en évi- dence, et conduit de plus à la connaissance des petites inégalités du mouvement, d’où l’on peut déduire, en particulier, la valeur d’une certaine constante y dé- pendant des moments d'inertie de la Lune, On à vu antérieurement que la surface de la Lune, supposée fluide et homogène, seraitcelle d’un ellipsoide à : axes inégaux, dont É grand axe serait tourné vers la Terre. Il reste ensuite à intégrer deux équations différen- tielles du deuxième ordre pour déterminer la position de l’axe de rotation de la Lune ; cela exige une analyse assez délicate. Le résultat est que les deux lois de Cas- sini concernant la constance presque absolue de l’axe de rotation avec l’écliptique et la coïncidence des nœuds, sontliées l’une et l’autre par la théorie de la gravitation : l’une est la conséquence de l’autre, Il faut noter que les pôles de l’axe de rotation ne sont pas fixes sur la Lune, comme cela a lieu presque rigoureusement pour la Terre ; l’axe de rotation oscille légèrement dans le plan perpendiculaire à l’axe du moment d'inertie dirigé vers la Terre, La discussion des observations de la Lune donnant plus de renseignements que dans le cas des planètes, on concoit tout l'intérét qui s'attache à la comparaison des données d'observation avec la théorie, Or la con- clusion des calculs est celle-ci : la Lune n’a pas conservé en se solidifiant la figure d'équilibre qu'elle à dù prendre quand elle était fluide sous l'influence de l’at- traction mutuelle de ses molécules, de son mouvement de rotation etenfin de l'attraction de la Terre, Laplace suppose qu'en se solidifiant la Lune a subi quelques modifications ; les hautes montagnes et les autres iné- galités que l'on observe à sa surface doivent avoir sur les différences des moments d'inertie une influence très sensible et d'autant plus grande que l’aplatissement du sphéroïde lunaire est fort petit et sa masse peu consi- dérable, Ces remarques diminuent l'importance du désaccord plutôt qu'elles ne l’expliquent, On raisonne aujourd'hui sur ja Lune comme si elle était fluide, fandis qu'il faudrait remonter dans le passé et envisa- .ger les choses à l AH de la solidification de sa sur- face. Ici, comme en Cosmogonie, Les deux derniers chapitres ont été rédigés par M. Ra- dau, auquel M.Tisserand a confié la mission difficile de présenter une analyse d'ensemble des Mémoires nom- breux relatifs à l'influence des actions géologiques ou météorologiques et des marées sur le mouvement de rotation de la Terre, considérée non plus comme un corpssolide, mais comme un système de forme variable. Plusieurs géomètres, W, Hopkins, Sir William Thom- son etM. G Darwin, M: Gyldén, M. Helmert, ont abordé ces études ; un des fragments ajoutés à la Mécanique analytique de Lagrange est précisément consacré, comme l'a mis en lumière M, Radau, au mouve ement de rotation d’un système de forme variable, La question Géodésie, on touche de près à la 382 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX de la variabilité des latitudes soulevée dans les derniers congrès de l'Association géodésique internationale, donne un intérêt tout actuel aux deux derniers chapi- tres de l’ouvrage. Tels sont, à ne prendre que les grandes lignes, les principaux problèmes envisagés dans ce deuxième vo- lume, digne plus encore peut-être que le premier de faire époque dans la littérature astronomique. O. CALLANDREAU, 2° Sciences physiques. Clerk Maxvwvell (J.). La chaleur, leçons élémen- taires sur la thermométrie, la calomirétrie, la thermodynamique, et la dissipation de l'éner- gie. Traduit par G. Mouwret sur la huitième édition an- qlaise. Préface de A. Potier, (6 fr.) B. Tignol, 53 bis, quai des Grands-Augustins. Paris, 1891. Remercions M. Mouret d’avoir donné au public fran- cais une traduction de l'ouvrage de Maxwell, dont la première édition remonte à plus de 20 ans (la qua- trième est de 1875), L'ouvrage est bon à lire pour les physiciens; il n’est guère plus gros qu'un manuel de baccalauréat, ou qu'un de nos traités de physique élé- mentaire; mais quelle différence! Pas de longues descriptions d'instruments, ni de minuties d'expériences qui ne s'appliquent qu'aux travaux d’un seul auteur; mais les principes des méthodes de mesure, une des- cription détaillée des phénomènes fondamentaux, les idées générales soigneusement développées, avec le moins d'appareil mathématique possible, voilà ce qu’on trouvera dans ce livre. Le désir de dissimuler l'intro- duction de la notion de dérivée et d’intégrale conduit quelquefois, il est vrai, à employer des détours qui ne brillent pas par la clarté, comme dans le chapitre ac- cessoire sur la détermination des hauteurs par le baro- mètre; mais il ne faut pas oublier que si une exposi- tion détournée est ennuyeuse pour celui qui peut aller droit au but, elle peut être néanmoins intelligible et, avec quelque labeur, faire pénétrer une idée juste dans un esprit que rebuterait une marche trop directe. C’est un de ces livres dont nous ne saurions trop dési- rer la diffusion, parce qu'il contient l'exposé de l’en- semble des théories qui se rattachent à la thermodyna- mique et en particulier à la dissipation de l'énergie; il rompt avec la navrante uniformité des traités francais d’étendue analogue, tous « conformes aux programmes» de tel ou tel examen. Faut-il ajouter un regret? C’est que la couverture seule soit imprimée chez MM. Gauthier-Villars, et tout le texte ailleurs, à Laval. Aussi y retrouvons-nous, malgré le soin du traducteur, encore un trop grand nombre de ces fautes d'impression grossières dont la responsa- bilité remonte à l’imprimeur et à l’éditeur, et que l’on trouve à profusion dans les autres livres publiés dans lamême «bibliothèque »,notammentceluide M.Thurston sur le graissage des machines, Que M. B. Tignol, qui déjà choisit bien les auteurs qu'il édite, apporte désor- mais un peu de soin dans le choix de son imprimeur, ou le surveille de plus près. MARCEL BRILLOUIN. Wallon (E.). — Traité élémentaire de l'objectif photographique. In-8° (7 fr. 50). Gauthier- Villars, 09, quai des Grands-Augustins. Paris, 1891. Le livre de M. Wallon résume pour la première fois sous une forme complète la théorie des systèmes op- tiques employés dans les instruments photographiques. Aujourd'hui, la photographie a quitté la voie alchi- mique pour entrer carrément dans la voie scientifique : la découverte merveilleuse de M. Lippmann en est l’écla- tante démonstration. Aussi le photographe, même et surtout s’il est l'amateur, ne doit-il plus être simple- ment un empirique, mais un éclairé : il doit savoir ce qu'il fait. Et la première chose à savoir n'est-elle pas la con- naissance approfondie de l'organe par excellence, de l'objectif? L'ouvrage de M. Wallon est bien fait pour donner cette connaissance. Divisé en deux parties, il contient dans la première l’exposé rapide des lois de la réfrac- tion, des aberrations, des exemples nombreux de cal- culs numériques, la description et l’étude des divers objectifs ; tandis que la seconde est consacrée au côté mathématique, à la démonstration des formules jus- tificatives. Ces dernières effraieront peut-être les amateurs? qu'ils se rassurent ; ils peuvent lire la première partie sans faire le siège de la seconde. Et d’ailleurs, qu'ils n’oublient pas que c’est grâce à ces formules-là qu’ils sont en possession d'objectifs parfaits leur permettant de faire les magnifiques épreuves qu'ils obtiennent couramment. Quant à l'exposition, qu'il nous suffise de dire que l’auteur, professeur au lycée Janson de Sailly, y ss porte les qualités qu'il à acquises dans sa pratique de l’enseignement, Aussi la lecture du livre est-elle aisée; la forme est à la hauteur du fonds et nombreux sont ceux qui, bien certainement, voudront en profiter. Alphonse BERGEr. Berthelot (Daniel). — Recherches sur les conduc- tibilités électriques des acides organiques et de leurs sels. Thèse présentée à la Faculté des sciences de Paris, Gauthier-Villars et fils, 55, quai des Grands-Au- gustins. Paris 1891. Pour étudier la constitution des composés dissous et déterminer les équilibres qui s’établissent dans une dissolution, il est nécessaire d’avoir recours à l’étude d’une propriété physique du système; ainsi les mé- thodes de la thermochimie appliquent ce procédé d’in- vestigation; mais les mesures qu’elles demandent de- viennent impraticables dans le cas des dissolutions étendues; la détermination delaconductibilité électrique reste au contraire aisée et précise, même dans ce cas, Aussi l’idée d'utiliser cette détermination pour arriver à la connaissance des réactions chimiques produites dans la dissolution, émise pour la première fois par M. Bouty, a-t-elle rapidement fait fortune : de nombreux expérimentateurs l'ont appliquée tant en France qu'à l'Etranger, La thèse, que M. D. Berthelot vient de pré- senter à la Faculté des Sciences de Paris,restera comme l’un des plus remarquables exemples de la fécondité de la méthode, Cetravail considérable renferme un grand nombre de déterminations soigneusement effectuées: mais le but poursuivi par l’auteur n’a pas été seule- ment, comme celui auquel tendaient ses devanciers, d'étudier un grand nombre de corps pour comparer leur conductibilité; il a voulu bien plutôt traiter quelques cas typiques des problèmes généraux de mé- canique chimique, par exemple l'étude du phénomène de la neutralisation des acides organiques; et, dans cette vue, il a examiné plus de trente acides ainsi que leurs sels de potasse. Dans l'introduction de son important mémoire, M. Berthelot trace un historique très complet des re- cherches antérieures aux siennes; il donne particuliè- rement un aperçu très net des idées si ingénieuses de M. Arrhénius sur la dissociation des ions; il explique ensuite les procédés de calcul qu'il a employés pour déterminer les réactions produites dans la dissolution dont il aura mesuré la conductibilité ; il décrit la mé- thode expérimentale qu'il a employée; c’est la méthode électrométrique indiquée par M. Lippmann avec le dis- positif imaginé par M. Bouty. La seconde partie de la thèse renferme la monographie des acides étudiés; on a systématiquement mesuré pour chaque acide : 1° les conductibilités de l'acide libre à divers états de dilu- tion; 2 les conductibilités du sel neutre de potasse; 3° les conductibilités des mélanges d'acide et de po- tasse en toutes proportions. Les résultats sont classés avec ordre et méthode ; l’auteur a d’ailleurs rencontré A6 dé dns 2“ BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 383 en chemin plus d’une remarque intéressante; malheu- reusement il serait trop long de les signaler toutes ; nous devons nous borner à résumer trop succinetement les conclusions principales auxquelles il est conduit. Si, tout d’abord, on examine la fonction acide en géné- ral etque l’on considère les acides libres, on n’apercoit aucune relation entre la conductibilité et la constitu- tion chimique ; mais au contraire les sels neutres com- parés sous des poids équivalents ont des conductibi- lités très voisines. La variation de la conductibilité avec la dilution n’est pas du tout semblable pour les sels acides ou pour les sels neutres; ce sera là un eri- terium qui permettra de les distinguer ; de même l’ap- plication des remarques déduites de l'étude des acides monobasiques ou polybasiques, amène l’auteur à établir une règle qui pourra servir à déterminer la basicité in- connue d’un acide donné, Quand on étudie les corps à fonctions complexes, on est amené à ce résultat des plus remarquables que la complexité de la fonction influe sur la nature de la manifestation de la fonction acide du composé; ainsi par exemple dans le cas de l’acide aspartique, qui est deux fois acide et une fois alcool, l’une des fonctions acides est neutralisée, dans l’intérieur de la molécule, par la fonction alcaline; en sorte que, contrairement à ce qui a lieu pour les acides bibasiques vrais, il suffit d'ajouter à une molé- cule d’acide une seule molécule de potasse pour avoir un sel neutre qui subsiste à l’état stable en dissolution; si l’on ajoute une seconde molécule de potasse, elle donne un second sel neutre. Enfin l’auteur à étudié les conductibilités des divers acides isomères : elles sont en général différentes, ce qui fournit un moyen de les distinguer; mais cette diversité cesse par le fait de la neutralisation. Comme on le voit par ce résumé, où nous avons dû passer sous silence bien des questions importantes, le travail de M. Berthelot l’a conduit à des résultats des plus remarquables; ces résultats fournissent aux chi- mistes des méthodes nouvelles pour étudier la basicité des acides, leurs fonctions et leurs isoméries. LUCIEN PoINCARÉ. 3° Sciences naturelles. Gay (Fr.), Professeur à l'école de pharmacie de Montpel- lier. — Recherches sur le développement et la classification de quelques algues vertes. Thèse de la Faculté des sciences de Paris.Klincksieck, Paris 1891. Les recherches de M. Gay portent spécialement, d’une part, sur la vérification et la discussion des faits de polymorphisme avancés par certains auteurs et, d'autre part, sur la signification qu’il faut attribuer au groupe controversé des Palmellacées. Ses observations, poursuivies pendant plusieurs années, ont été faites sur quelques espèces étudiées dans leur station natu- relle, puis cultivées dans le laboratoire, en faisant va- rier les conditions de culture, et sur les modifications subies pendant le développement; on reconnaît à la lecture qu’elles ont été faites avec toute la méthode et la scrupuleuse exactitude que ses maîtres, MM. Bornet et Flahault, apportent dans l’étude des Algues. Certains auteurs ont admis que plusieurs Algues vertes présentent un polymorphisme dont ils ont in- diqué les stades ; elles revêtiraient successivement et normalement,pendant leur existence, des formes appar- tenant non seulement à des espèces différentes, mais à des genres différents, Par exemple, d’après M. Hans- girg, quinze espèces différentes de Palmellacées cons- titueraient le cycle évolutif de l'Ulothrix flaccida.… ete. D’après M. Gay, de semblables opinions ne peuvent s’expliquer que par des observations incomplètes et des déterminations défectueuses, qui ont entrainé les auteurs à des déductions erronées. Pour lui, il existe des Palmellacées réellement autonomes, formant une famille à part ; mais il existe aussi des états palmelloïdes que certaines Algues vertes peuvent revêtir. Ces états palmelloïdes, au lieu de faire normalement et régu- lièrement partie du cycle évolutif de ces Algues, ont un caractère essentiellement contingent ; ils apparais- sent sous l'influence de changements dans les con- ditions de la végétation, ou comme des états de repos provoqués par le séjour dans un milieu défavorable, Les espèces de Cladophora, Ulothrir, Conferva sont presque inextricables, parce qu'on n’a jamais déter- miné, d’une manière précise, les variations de formes qu'elles sont capables de revêtir à leurs différents âges et dans les diverses conditions où on peut les rencon- trer, L'auteur aura contribué à élucider leur histoire, en montrant que leurs cellules peuvent passer à l’état d'hypnocystes, c'est-a-dire de cellules plus ou moins déformées, à membrane épaisse, renfermant une abon- dante réserve d'amidon; ces hypnocystes peuvent at- tendre, au fond de l’eau, sans changements, pendant plusieurs années,des conditions favorables à leur ger- mination, et reproduire alors une plante semblable à celle sur laquelle ils ont pris naissance. Après avoir suivi avec attention le développement des Conferva, Rhizoclonium et Cladophora dans différentes conditions de végétation, M. Gay repousse l’idée d’un polymor- phisme quelconque entre ces genres, qui sont assez rapprochés dans la classification. Les observations de M. Gay, bien que faites sur un nombre restreint d'espèces, comportent donc des con- clusions d'un intérêt général. — Le travail de M. Gay est,à notre connaissance,le premier qui sorte du nouvel Institut botanique de Montpellier, dirigé par M.Flahault, et il lui fait honneur. Il serait heureux que les thèses de botanique fussent toujours marquées du cachet scientifique qui caractérise les recherches de M. Gay; il nous sera permis d'émettre ce désir pour certains travaux qui sortent d'un laboratoire où l’on a peut être le tort de chercher à faire beaucoup en faisant très vite. C. SAUVAGEAU. Roule (L.). — Remarques sur l'origine des centres nerveux chez les Cœlomates. Arch. Zool. Exp. II: série, tome VIII, fasc. I. Plusieurs naturalistes essaient, en ce moment, de rattacher d’une facon directe les Cælomates aux Cælen- térés, en se basant, les uns sur la structure et le mode de développement du feuillet moyen, les autres sur la disposition des centres nerveux. Pour ce qui concerne le premier argument, il est permis de douter de son importance, car si le feuillet moyen de quelques Cælo- mates, tels que certains Plathelminthes, rappelle celui des Cœlentérés déjà bien élevés, le procédé de forma- tion de ce mésoderme diffère dans les deux groupes. Le mésoderme des Cæœlentérés est produit d’une maniére diffuse par un grand nombre de cellules engendrées par l'ectoderme et l’endoderme, tandis que celui des Cœælo- mates dérive, suivant un procédé régulier, de masses cellulaires métriques produites par l’endoderme. Ainsi que le fait remarquer M. Roule, même en met- tant à part le fait de la présence ou de l'absence d’une cavité générale du corps, les Cœlomates se distinguent des Cœlentérés en ce que leur feuillet interne est double, puisqu'il contient en puissance l’endoderme définitif et le mésoderme, Reste l’argument relatif au système nerveux, Dans l'esprit des naturalistes qui rattachent directement les Cælentérés aux Cœlomates, la transition entre ces deux groupes s’est effectuée par des types dont l'anneau nerveux buccal, semblable à celui des Cœlentérés vrais, se serait allongé de manière à prendre l'aspect de deux bandes parallèles placées côte à côte, Ces deux bandes se seraient ensuite soudées par places, ou seraient restées séparées, suivant le cas; mais, en somme, on devrait les considérer comme le point de départ des centres nerveux des Cœlomates. Si le fait est vrai, on doit retrouver dans l’embryogénie des Gœlomates, une série de phases rappelant cette origine ancienne, et les centres nerveux de ces animaux se montreront, au début 384 de leur apparition, comme formés par deux bandes par- rallèles indépendantes. Or, de pareilles phases embryonnaires n'existent pas. M. Roule a montré que les centres nerveux des Anné- lides, ceux des Mollusques, el, par extension, ceux des Tuniciers et des Vertébrés, ont tout d'abord une ébauche unique et simple; cette ébauche ne se divise en deux bandes — et encore pas toujours — qu'assez tard dans son évolution; et cette bipartition doit être considérée comme un effet de la symétrie bilatérale acquise par le corps. Si l'ébauche des centres nerveux est simple dès l’abord, il s'ensuit que l’on ne peut les considérer comme résultant de l'union de deux bandes parallèles, et ainsi tombent les essais d'explication tentés jusqu'ici pour faire dériver les Cœlomates de Cælentérés déjà bien complexes tels que les Cténophores, les Actinies ou les Méduses. Il est plus rationnel de croire, et c’est la conclusion à laquelle M. Roule arrive, que les Cælentérés et les Cæ- lomates descendent tous deux d’un ancètre commun à structure fort simple, comparable sans doute à la phase larvaire connue sous le nom de Gastrula, et qu'ils ont suivi leur évolution propre sans avoir Jamais aucun point commun. R, KœnLer. 4° Sciences médicales. Grancher (J.), Professeur à la Faculté de Médecine, et Ledoux-Lebard, Chef de laboratoire. — Etudes sur la tuberculose expérimentale du lapin. 4r- chives de médecine expérimentale, Paris, mars 1891, €. TI, p. 15. Une série d’injections, faites dans la veine de l’oreille de lapins, avec des cultures de tuberculose d’origine aviaire, conduisent les auteurs aux résultats sui- vants : = 1° La dose de culture inoculée à une influence sur la marche de la tuberculose expérimentale, Pour donner la mort, suivant le type Yersin, il faut de 4 milli- gramme à 0% { en poids sec de culture sèche. Les doses successivement décroissantes de O0E 01, Oms 001 et 0®8 0001 tuent beaucoup plus lentement et avec d’autres lésions, Les poumons, et même d’autres orga- nes encore plus éloignés des premiers foyers de tuber- culose (rate, foie), peuvent ètre pris à leur tour el isolément, de facon à réaliser des tuberculoses locales, C’est même un fait curieux de voir, à la suite d’une infection du sang, et après la guérison spontanée des lésions du foie et de la rate, survenir, à longue échéance et par la dissémination des bacilles et leur pullulation sur un point périphérique du corps de l'a- nimal, une arthropathie suppurée et tuberculeuse. 2 Les injections à doses successivement croissantes ne confèrent pas l'immunité contre des doses mor- telles; mais on constate des changements du type morbide et des lésions périphériques plus ou moins circonscrites, alors que la rate et le foie out repris leur aspect physiologique, 3° L’atténuation du virus tuberculeux par la chaleur la dessiccation, la lumière, a pour premier résultat la survie de lPanimal pendant un temps plus ou moins considérable, A l’hypertrophie bacillaire de la rate et du foie succèdent Île retrait progressif de ces organes, la formation de tubercules visibles dans le foie ou les poumons et l’apparition de néphrites et de paralysies coincidant avec la disparition ou la raréfaction des ba- cilles ; ce dernier point doit mettre en garde contre les résultats éloignés de toute méthode thérapeutique fon- dée sur l’emploi des cultures tuberculeuses ou de leurs produits. Dr HENRI HARTMANN. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Wynter Blyth (A.). — Manual of public Health (Manuel d'Hygiène) (21 fr. 25). Un vol. in-8°, Macmillan et C°,Bedford Street, Strand. Londres, 189. L'importance considérable attribuée à l'hygiène chez nos voisins d’outre-Manche, l’heureuse intervention de la loi en tout ce qui concerne la défense contre les maladies contagieuses, expliquent suffisamment l'in- térèt que présente en France la lecture des traités clas- siques d'hygiène publiés en Angleterre, L'ouvrage que vient de faire paraitre M. Wynter Blyth est à ce point de vue rempli de précieuses indications ; et au moment où l’on se préoccupe tant et à si juste raison en France d’une organisation sanitaire réellement efficace, il est bon de pouvoir se rendre compte de l’enseignement donné aux futurs « Medical officers of health », chargés d'appliquer les règlements du « local government board » et du fameux « public health act ». Le traité d'hygiène de M. Blyth débute par un cha- pitre que l’on ne rencontre dans aucun ouvrage simi- laire francais : il est consacré a l'étude de la statistique. L'importance de la statistique est considérable en hygiène; c’est par elle que l’on peut s'assurer de l’effi- cacité des mesures prises; elle nous donne la sanction des idées théoriques. Mais la statistique, pour être exacte etimpartiale, au lieude constituer,ce qu'onlui a souvent reproché, un instrument trop malléable, doit obéir à des lois rigoureuses, précises, s'exercer dans deslimites et suivant des règles déterminées. Ce sont ces lois et.ces instructions que l’on trouve exposées très clairement dans le traité qui nous occupe. L'hygiène urbaine est largement traitée; nous signa- lerons spécialement la description détaillée du système général des égouts de Londres, système où le principe de l’interception est appliqué en grand. Mais, et c’est là une critique qui s'adresse à l’ensemble de l'ouvrage, on cherche vainement quelques renseignements sur les systèmes employés en dehors de la Grande-Bretagne. Quelle que soit la supériorité de l'Angleterre dans les questions d'hygiène, les traités didactiques devraient, ce nous semble, tenir compte de ce qui se fait à l'Etranger. Les maladies contagieuses et les moyens de désin- fection employés contre elles sont également exposés avec détail, mais (oujours au point de vue exclusive- ment anglais. Les hygiénistes anglais auraient tout avantage à connaître un peu les travaux de nos compa- triotes. Le nom de Pasteur n’est prononcé qu'une seule fois, à propos de la rage, où franchement il était diffi- cile de le passer sous silence. Les travaux français sur la fièvre typhoïde ne sont mème pas signalés. A côté de ces lacunes regrettables, signalons des chapitres fort intéressants : sur la scarlatine, cette affection si répandue et siterrible en Angleterre, qui en vingt-cinq ans, de 1859 à 1885, a déterminé plus d’un demi-million de décès dans ce pays, l'Ecosse et l'Irlande non com- prises ; sur la tuberculose, qui sévit également avec une grande intensité dans les grandes villes manufactu- rières du Royaume-Uni et contre laquelle l’auteur vou- drait voir appliquer les mesures d'isolement employées pour la variole et la diphtérie, Un grand nombre de planches en couleurs indiquent soit les lésions constatées dans les maladies conta- gieuses, soit les microbes et leurs colonies ; d’autres, plus utiles peut-être, sont consacrées aux maladies des animaux comestibles, maladies qui rendent dangereuse la consommation de leur viande : trichine, pneumo- entérite, tuberculose, etc. Ce traité sera fort utile à tous ceux qui en France s'occupent d'hygiène et, moins exclusifs que l’auteur anglais, s'intéressent à tout ce qui se fait à l'Etranger. L, 0. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 383 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 19 mai 1891. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. E.Goursat : Sur les intégrales intermédiaires des équations aux dérivées partielles du second ordre, — M. F. Caspary : Sur une méthode élémentaire pour établir les équations différentielles dont les fonctions théta forment les in- tégrales. — M. A. Markoff : Sur une classe des nom- bres complexes. — A propos de la note communiquée par M. Brillouin à la séance précédente, M. J. Bous- sinesq expose ses idéesrelatives aux déformations des molécules des fluides et le rôle de ces déformations dans la fluidité ; ces considérations ont été dévelop- péespar M. Boussinesq dans son cours de la Sorbonne. — Dans des communications précédentes, MM. Læœwy et Puiseux avaient exposé le principe d’une méthode pour l'étude de l’aberration annuelle et les conclu- sions générales qui se dégagent du travail d’ob- servation commencé au printemps de l’année der- nière et terminé en janvier 1891; ils font connaître aujourd’hui le mode d’opération suivi, les procédés de calcul employés pour la réduction et les valeurs numériques fournies par l'observation de deux groupes de quatre étoiles. — M. J. Janssen annonce que le passage de Mercure sur le Soleil, le 10 mai dernier, n'a pu donner lieu à aucune observation dans nos régions en raison de l’état de l'atmosphère ; il indique un certain nombre d'observations qu'il importerait de faire à l’occasion des passages, 29 SCIENCES" PHYSIQUES. — M. A. Cornu a observé le 15 mai dernier un double halo avec parhélies, présen- tant divers caractères sur l'importance desquels l’au- teur attire l'attention au point de vue de la prévision du temps ; ces phénomènes précèdent généralement de grandes perturbations atmosphériques, et dans ce cas particulier, il esten effet survenu des bourrasques, — A propos d'un Mémoire que M. W, von Bezold, di- recteur du Bureau central météorologique de Prusse, vient de faire paraître sur Ja théorie des Cyclones, M. Faye constate que les météorologistes se rallient à ses conceptions sur la genèse de ces tourbillons atmos- phériques. — Dans la troisième partie de ses études quantitatives sur l’action chimique de la lumière, M. G. Lemoine recherche quelle est l'influence de la dilution du mélange d'acide oxalique et de chlorure ferrique ; l’action produite croit avec l'excès d’eau, — Pour démontrer expérimentalement l'exactitude de la loi générale formulée par lui, d’après des considéra- tions mécaniques, loi qui a pour but de déterminer en fonction simple de la constitution chimique des corps les températures de leurs changements d'état sous toutes les pressions, M. G. Hinrichs s’est adressé à la série des paraffines normale C'H?* + ? qui est la sé- rie homologue la plus étendue de la chimie ; en com- parant les valeurs calculées par lui pour le point d’é- bullition sous 760 »/,, et 15 "/, de pression etle point de fusion avec les valeurs observées par Kraft, il trouve des écarts faibles, généralement inférieurs à 1° et dis- tribués de part et d'autre de la courbe théorique, — MM. Berthelot et Matignon ont cherché un procédé de combustion des corps chlorés dans la bombe calori- métrique, donnant tout le chlore sous un état final dé- fini ; cette condition est réalisée si l’on met d’avance dans la bombe une solution d'acide arsénieux; tout le chlore passe à l’état d'acide chlorhydrique dissous; les auteurs ont appliqué cette méthode à la détermination des chaleurs de combustion etde formation des benzines chlorées, des dérivés chlorés du formène etdes chlorures de carbone, —M, Engel a examiné l’action qu'exercent les bases alcalines sur la solubilité des sels alcalins:une molécule de potasse ou de soude anhydre précipite sen- siblement une molécule du sel alcalin, de telle sorte que le nombre des molécules en solution dans un vo- lume donné reste constant; il n‘enest pas de même avec l’ammoniaque et les sels ammoniacaux parce qu’il se produit des combinaisons entre la base et le sel, — M. Leclère indique que l’on peut doser la silice par évaporation à sec en présence d’une grande quantité de fer, si l’on a soin d'ajouter du chlorure de potassium, qui s’unissant au perchlorure de fer, en empêche la décomposition. — M. de Forcrand adéterminé la cha- leur de formation de sérythrates bibasiques et delacom- binaison de l’hydrate de soude avec l’érythrate disodi- que qu'il avait signalée antérieurement, — M. G. Mas- sol a mesuré la chaleur dégagée parla combinaison de lacide propionique avec la potasse etavecla soude; cette chaleur est la même que pour les homologues supérieur et inférieur, l'acide acétique et l'acide butyrique. — M. Timofeiew a étudié la dissolution de quelques acides organiques dans les alcools méthylique, éthylique et propylique ; ila constaté que la variation de la solubilité moléculaire entraîne ane variation de sens contraire de la chaleur de dissolution. — M. P. Th. Müller a fait réagir les chlorures des acides bibasiques sur les éthers cyanacétiques, en suivant la méthode employée par M. Haller pour les acides monobasiques; il aobtenu les éthers succinocyanacétique et phtalocyanacétique ; par l’action de l’eau, ces éthers sont simplement sapo- nifiés. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Müntz ayant cons- taté que les ferments nitriques de la terre végétale, cultivés dans les laboratoires, produisent aux dépens de l’azote de leur alimentation des nitrites, et pointou peu de nitrates, s'est demandé si les nitrates que l’on observe exclusivement dans la terre végétale ne pro- viennent point, par une deuxième transformation, des nitrites ainsi produits par ces ferments; il a reconnu que cette transformation, qui ne s’effectue pas par le simple contact de l'oxygène atmosphérique, s'effectue en présence de l'acide carbonique; dans le sol, l'acide carbonique nécessaire est fourni par les micro-orga- nismes qui vivent à côté du ferment nitrique; la pro- duction des nitrates de la terre végétale s'effectue ainsi en deux temps et par deux actions biologiques dis- tinctes. — MM. A. Arnaud et A. Charrin établissent la proportion dans laquelle le bacille pyocyanique assimile et brûle le carbone de l’asparagine qui lui est donnée comme aliment, Fournissant à leurs cultures de la gélatine au lieu d’asparagine, ils ont vu la transfor- mation de l'azote s'effectuer plus régulièrement et don- ner lieu à la formation d’une moins grande quantité d'ammoniaque; dans ce cas, il se produit très peu de pyocyanine, mais on trouve dans les matières solubles fractionnées par divers procédés, des substances vac- cinantes et des substances diversement toxiques. — M. P. Parmentier présente une classification des espèces du genre Royena (Ebénacées) suivant les prin- cipes proposés par M. Vesque., — M. P. Viala et G. Boyer signalent un nouveau Basidiomycète parasite des grains de raisin. — À propos de la note présentée par M. Cazeneuve à la séance du 27 avril, relativement à l'emploi contre le phylloxera des mélanges de sulfure de carbone et de vaseline, MM. A. F. Marion et G. Gastine rappellent qu’ils ont, en 1887, essayé ces mé- langes et qu'ils les ont abandonnés comme inutiles ou nuisibles. — M. St, Meunier revient sur un fossile du 386 ACADÉMIES ET SOCIÈTES SAVANTES Corallien de Verdun qu'il avait décrit (9 février 4891) comme une feuille séminifère de Cycadée et qu'il a re- connu ensuite, d’après une observation de M. L. Vail- lant, pour être l'œuf d’un poisson cartilagineux., — MM. P. Giraud et P. Gautier signalent la découverte d’un squelette humain en place dans une couche d’ar- gile intercalée entre deux couches de lave successives du volcan du quaternaire de Gravenoire (Puy-de-Dôme). — M. J. Thoulet s'appuyant sur les résultats des son- dages sous-marins aux grandes profondeurs et sur ses expériences, nie | existence d’une circulation verticale profonde dans l'Océan et admet, dans la zone profonde immobile, la possibilité des régions contiguës se diffé- renciant les unes des autres par la composition chimi- que et le processus de la sédimentation. — M E. Fi- cheur décrit un facies particulier du Crétacé dans le massif du Bou-Thaleb (Algérie). — M: Martin, dans une lettre à M. Daubrée, expose qu'il à découvert dans les montagnes de Nan Chan (Chine) un filon important de néphrite, exploité par les indigènes. Mémoires présentés : M. J. Téguor adresse une note sur divers sujets de mathématiques. Séance du 25 mai 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. M. Painlevé : Sur l'intégration are des équations différentielles du premier ordre. Sur la détermi- nation des intégrales dés équations aux dérivées par- tielles du premier ordre. — M. A. Pellet : Sur les équations abéliennes. — M. D. Eginitis : Observation du passage de Mercure sur la disque du Soleil le 9 mai 1891, faite avec l’équatorial de Plæssl à l'Obser- vatoire national d'Athènes. — M. Tondini, relevantles documents officiels de l'Observatoire de Greenwich pour ces dernières années, montre que cet observatoire est dans de mauvaises conditions atmosphériques, qui le rendent peu propre à servir de point de départ à un méridien universel. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — MM, Abraham et Chassa- gny ont étendu leurs recherches sur la mesure précise de la force électro-motrice à différents couples thermo- électriques, Les courbes représentatives des forces électromotrices entre 0° et 100° de tous les couples étudiés sont des courbes irrégulières si on les rapporte à l'échelle du thermomètre à “hydrogène ; ; elles devien- draient des paraboles exactes pour une échelle très peu différente, — M. A. Crova propose, pour l'analyse de la lumière diffusée par le ciel,de modifier la formule de lord Rayleigh en partant de l'hypothèse suivante ; au lieu de supposer les corpusecules contenus dans l'air disséminés également suivant toutes les directions, 1l examine la facon dont tombent dans l'atmosphère des corpuscules de dimensions différentes qui diffractent inégalement les divers rayons du spectre ; la loi de distri- bution des corpuseules se traduit dans la formule par un exposant; M.Crova montre que l’on peut, en donnant pour chaque série d'observations une valeur particulière à cetexposant, obtenir la concordance des valeurs calcu- léeset de l'observation ; la grandeur de cet exposant in- dique le degré de saturation de la couleur bleue du ciel; dans unesérie d'observations au sommet du mont Ven- toux, M. Crova l’a trouvé très élevé. — M. R. Savélieff, calculant la constante solaire à partir d'une courbe actinométrique complètement symétrique obtenue dans une belle journée de décembre à Kief, a obtenu la va- leur élevée de 3 cal. 47 MM. Caïlletet et Collar- deau communiquent le résultat de leurs recherches sur la température et la pression critique de l’eau, recher- ches faites suivant la méthode qu'ils ont fait connaître ; ils ont obtenu pour la température critique 365°, cor- respondant à une pression de 200 atm. 5;ils donnent la courbe des tensions de vapeur de l’eau depuis 224; cette courbe coutinue celle de Regnault, avec laquelle elle a une partie commune concordante. Le ma- nomètre à hydrogène qui servait aux mesures de pres- siona été élalonné au moyen du manomètre à air libre de la tour Eiffel; en attendant cette vérifi- cation, les auteurs avaient consigné leurs résultats dans un pli cacheté déposé le 23 juin 1890. — M. P.‘du Boys à cherché le moyen d'exprimer algébriquement ces balancements rythmés de l’eau des lacs, connus sous le nom de seiches ; les équations différentielles ne pouvant servir à cause des variations de niveau du fond, il a identifié le mouvement de balancement avec le mouvement de propagation d’une onde solitaire d’une longueur double de la longueur du bassin ; cette mé- thode appliquée au profil que l'on obtient en rectifiant la ligne de thalweg du lac Léman donne des résultats qui s’écartent très peu de ceux de Flobservation. — M. E. Belloc décrit un nouvel appareil de sondage portatif à fil d'acier, — M. G. Guilbert a relevé les exceptions qui se présentent assez fréquemment aux lois qui lient la force du ventaux mouvements du ba- romètre et en particulier au gradient ; il a remarqué que tout excès dans la force du vent annonce une élé- vation de la pression. — M. Al. Moulin donne une règle qui permettrait de calculer la densité qu'aura à l'état liquide une substance dont on n'aurait que la formule. — M. Guntz décrit les propriétés du sous- chlorure d'argent, qu’il obtient comme il l’a précédem- ment indiqué, par l’action du trichlorure de phosphore sur le sous-fluorure d'argent. — M. Ch. Blarez a dé- terminé l’action exercée par la présence des sels mi- néraux de potassium sur la solubilité du chlorate de potasse. — M. A. Minet a étudié l’électrolyse parfusion ignée d’un mélange de chlorure de sodium et de fluo- rure double d'aluminium et de sodium, dans lesquels on dissout ou met en suspension de l’alumine et de la silice ; on obtient dans les phases successives de la réaction de l'aluminium pur et des alliages d’alumi- niumet de silicium qui présententune grande ténacité, — M. L. Pigeon décrit deux nouvelles combinaisons cristallisées de chlorure platinique avec l’acide chlo- rhydrique. — M. H. Caune indique un procédé de préparation du salicylate de bismuth, qui consiste essentiellement dans l’empioi du chlorhydrate d’am- moniaque pour éviter la dissociation par l’eau. — MM. Berthelot et Matignon ont étudié les phéno- mènes thermiques auxquels donne lieu la transforma- tion du térébenthène dans un des deux types de la série camphénique, monovalent, comme le camphène, ou bivalent, comme le terpilène, En comparant l'ac- lion de l'acide chlorhydrique sur cet hydrocarbure, action qui détermine le passage à l’un ou à l’autre de ces types, avec la formation du chlorhydrate de cam- phène et du dichlorhydrate de terpilène, on voit qu'il se produit un dégagement de chaleur indépendant de la combinaison même avec l'acide chlorhydrique et qui répond précisément au changement du carbure à constitution mobile en types désormais invariables, c'est-à-dire à des modifications dans les relations des atomes au sein de la molécule. — M, W. Timofeiew a continué ses recherches sur la dissolution des corps dans des dissolvants homologues. Dissolvant des com- posés divers, iodure de cadmium, bichlorure de mer= cure, naphtaline, urée, dans les “alcools méthylique, éthylique et propylique, il a trouvé, comme précé- demment, que la solubilité moléculaire et la chaleur de dissolution varient en sens inverse; de plus, que le rapport des chaleurs de dissolution d’un même corps dans deux dissolvants homologues voisins est sensible- ment constant. 39 SCIENCES NATURELLES, — MM. R. Lépine et Barral ont reconnu que le pouvoir glycolytique du sang di- minue un peu si le sang est défibriné et séparé de sa fibrine au sortir du vaisseau. — M. L. de Saint-Martin. laissant à l’étuve, pendant plusieurs heures, du sang oxycarboné dans des proportions diverses, a vu une certaine quantité d'oxyde de carbone disparaitre, pro- bablement en se transformänt en acide carbonique ; le sang contenantune proportion même faible d’ oxyde de carbone ne consomme que lentement son oxygène. — M. E. Perrier étudie les Stellérides recueillis dans le golfe de Gascogne, aux Acores et à Terre-Neuve pen- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 387 dant les campagnes scientifiques du yacht l'Hirondelle. —;M. P.-A. Dangeard examine, dans l’ensemble des plantes vasculaires et dans tous les organes, les rapports qu’affectent entre eux le liber etle bois et la facon dont on doit établir l’équivalence des faisceaux libéro-li- gneux. — M. Marès présente un ouvrage sur les cépages de la région méridionale de la France, — M. Sirodot a cherché a déterminer l’âge relatif du gisement quaternaire du mont Dol (Hle-et-Vilaine); Les objets recueillis sont inclus dans un sédiment marin dans lequel ils ontété roulés; une série de puits forés exprès ont montré que cette couche s'étend au-dessous des terrains récents constituant les marais qui avoi- sinentle mont; elle est recouverte partout d’une couche glaciaire, — M. K. de Kroustchoff a fait l'étude pétro- graphique de la formation trappéenne de la Tongouska pierreuse (Sibérie septentrionale), MÉMOIRES PRÉSENTÉS. — M. E. Ferron adresse un mé- moire intitulé : Essai d’une (héorie mathématique sur les fractures terrestres et les diaclases artiticielles, — MS, Altaras adresse un mémoire ayant pour titre : « Mo- teur fluidostatique à force facultalivement progressive. — M. E. Delaurier adresse une note sur la navigation aérienne. — M, Pigeon adresse une note sur les inhala- tions d’air ozonisé. — M. Colençon adresse une note ayant pour titre : « Le calendrier de l’année 1892, » L. LAPpicQuE. Nora. — Dans notre numéro du 15 mai 1891, séance du 20 avril, au lieu de MM. A. Delebugneet L. Legay dé- montrent, ete., lire : MM, A. Delebecque et L. Lequay démontrent, ete. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 26 mai 1891. M. Rochard : Rapport sur un travail de M. Hache (Beyrouth) sur le traitement des abcès du foie par l'in- cision directe, — M. Le Fort demande le renvoi à la commission de la dépopulation de la France les pro- positions suivantes : 1° que le Gouvernement présente aux pouvoirs publics une loi sur la santé publique: 2° qu'il soit créé des agents spéciaux chargés de veiller à l'exécution de ladite loi. — M. Poncet (Lyon) lit un travail sur la translucidité des tumeurs. Ce caractère des tumeurs ne permet pas de préjuger de la nature du contenu des tumeurs solides ou de celle des liquides que renferment les tumeurs liquides. — M. Lagneau : Rapports sur divers travaux traitant de la démographie du Mexique. , M. Crié (Rennes) est élu membre correspondant na- tional, É Séance du 2 juin 1891, MM. G. Sée et Pignol : De la distension ou dilata- tion du cœur, Comment le cœur se modifie sous l’in- fluence des médicaments cardiaques. Les auteurs, ayant reconnu l'instabilité de forme et de volume du cœur sous des influences d’ordre physiologique, etparfoisdans des conditions pathologiques, en ont étudié les varia- tions de dimension par le procédé de percussion, Par l'examen des tracés obtenus dans les états patholo- giques, ils ont reconnu trois types principaux repré- sentant schématiquement des triangles, mais qui se- raient constitués par des lignes courbes, Après avoir étudié les causes des distensions du cœur, les auteurs tirent de leur étude les trois conséquences suivantes : 1° La matité absolue ou petite matité du cœur n'existe pas au point de vue clinique, c'est-à-dire qu’elle ne se distingue pas de la matité générale appelée « subma- tité » ;2° Le cœur étant sujet à denombreuses variations de volume qui se traduisent par Paugmentalion mobile de la malité, et par la persistance de celle-ei pendant quelque temps, il y a donc là de nombreuses causes d'erreurs de diagnostic. 3° Au point de vue du pronostic des cardiopathies, on a, dans ces derniers temps, atta- ché la plus grande importance à l’état du myocarde, c'est-à-dire à l’état de distension et de dilatation ou d'hypertrophie du cœur, La plupart des lésions du cœur peuvent exister sans entrainer la moindre modification morbide ; au point de vue clinique, on peut dire, dans ces cas, qu'il n’y à point de maladie du cœur, celle-ci ne se manifeste que s'il y a distension. D'un autre côté, des manifestations chroniques se produiront avec tous les symptômes habituels de la cardiopathie, sans qu'il y ait la moindre lésion anatomique du musele. Ces ano- malies paradoxales trouvent leur explication dans la distension des cavités du cœur, surtout du ventricule gauche, Sielle est permanente, c’est-à-dire constatable dans toute circonstance, ce sera là la véritable maladie du cœur, Les auteurs étudient enfin la partie thérapeu- tique, c’est-à-dire l’action des principaux médicaments cardiaques sur le volume et la forme du cœur, Is ont reconnu que : 4° La spartéine est le médicament qui diminue le plus et le plus promptement les dimensions du cœur, 2 La digitaline diminue également le volume du cœur; mais elle agit surtout sur les cavités droites; 3° L'ioduwre de potassium diminue également le volume du cœur, mais cet effet est moins prononcé que par la spartéine, Autre série absolument distincte : 19 L’anti- pyrine augmente le volume total sans influencer en quoi que ce soit la pression artérielle ; 2° Le bromure de potassium est dans le même cas que l’antipyrine, et, par conséquent, opposé à l'iodure de potassium ; il dilate le cœur dans sa totalité, Comme médicament sans por- tée efficace sur le cœur, on peut citer la caféine qui laisse le musele cardiaque dans l'indifférence absolue. Une discussion s'engage au sujet de cette communication entre MM. Constantin Paul, G.Sée, Dujardin-Beau- metz el Laborde, dont la suite a été remise à la séance suivante, — M. J.-V. Laborde : Les accidents de la chloroformisation; leur mécanisme pathogé- nique; leur traitement préventif et curatif, L'auteur, après avoir résumé la discussion qui a eu lieu l’année dernière sur les dangers de la chloroformisation, for- mule les moyens préventifs et curatifs suivants : 1° Les moyens préventifs résident essentiellement, d'une part, dans l’adjonction préalable et systématisée des analgé- siques généraux et locaux à l’anesthésique en vapeur, et d'autre part, dans le dosage et le filtrage le plus exact possible de la substance anesthésique; cette exac- titude ne peut, à l'heure actuelle, être obtenue que par l'emploi de la méthode des mélanges titrés, basée sur la recherche et Panalyse expérimentales ; 2° Les moyens curalifs se résument en tous ceux qui sont capables de ranimer les phénomènes mécaniques de la fonction respiratoire, éteinte ou près de s’éteindre, cette extinc- tion constituant le mécanisme essentiel de Paction toxique propre du chloroforme. Or, de tous ces moyens le plus efficace c’est la respiration artificielle, à condi- tion d’être réalise par le procédé de l’insufflation, transporté et adapté à la pratique chirurgicale. SOCIETE DE BIOLOGIE Séance du 30 mi 1891. M. Ch. Richet a repris la question du rapport entre le poids du cerveau et le poids du corps, ainsi que celui de différents organes, dans une même espèce. Chez le chien, en partant de 157 observations faites par lui ou relevées dans divers auteurs, il observe que le poids de l’encéphale n’est pas proportionnel à la surface, mais qu'on peut exprimer avec une assez grande approximalion la loi de variation en considé- rant le poids de l’encéphale comme la somme d’une quantité proportionnelle à la surface et d'une cons- tante; celte constante représenterait la quantité de substance nerveuse disponible pour les fonctions intel- lectuelles, Le foie varie proportionnellement à la sur- face, ce qui est conforme à la variation de l'intensité des échanges nutritifs en raison de la surface ; on peut donc rapporter le poids de l’encéphale au poids du foie, au lieu de le rapporter à la surface. La rate varie proportionnellement au poids du corps, —MM.Gréhant et Quinquaud ont fait des recherches au moyen du myographe dynamométrique de Gréhant sur les mo- 388 ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES difications de la puissance musculaire dans diverses intoxications; l'alcoolisme aigu et l’intoxication par l'oxygène comprimé diminuent cette puissance, — M. Ch. Euzet à observé les modifications qui se pro- duisent dans la moëlle osseuse chez le pigeon jeune sous l'influence de saignées répétées; jusqu'à une cer- taine limite, la régénération du sang s'effectue au moyen d'hématoblastes; quand on a atteint une ané- mie profonde, il apparaît des éléments particuliers dif- férenciés des hématoblastes et de tous les éléments normaux du sang, principalement par la disposition de la substance chromatique du noyau. — M. L. Malassez indique un procédé pour obtenir, à partir des verres colo- rés du commerce, des étalons colorimétriques donnant exactement l’intensitéet la nuance nécessaires pour l’hé- mochromométrie. — M. L. Vaillant : Nouvelles études sur les zones litforales (Voir Académie des sciences, 11 mai). — M. L. Vialleton a suivi le développement des aortes postérieures chez l'embryon du poulet et re- connu que ces vaisseaux, conformément aux idées de His, sont dans des rapports très étroits avec les vais- seaux de l'aire vasculaire. — M. A, Borel décrit des formes diverses de noyaux se divisant et bourgeonnant dans l’intérieur d’une cellule qui ne suit pas les pro- cessus de la division, formes qu'il a observées dans des tumeurs épithéliales, — M. Gaube étudie sous le nom d’albuminaturie le symptôme qui consiste dans la pré- sence dans l'urine d’une petite quantité d’albumine associée à des phosphates calcaires. — M. A.Charpen- tier a fait de nouvelles expériences pour déterminer la vitesse de l’onde rétinienne donnant lieu aux phéno- mènes d'interférence signalés par lui; il a constaté que la période de cette onde est la même pour toutes les couleurs. — M. Alezais communique une observation de monstre péracéphale dont il a étudié complétement l'anatomie, Séance du 6 juin M. Feré rapporte quelques cas d’hallucinations dans lesquelles le sujet voyait devant lui sa propre image comme dans une glace, — M. Zachariades indique les avantages que présente pour l'étude des cartilages le traitement des préparations par une solution de potasse caustique. — MM. Cadéac et Meunier résument leurs recherches sur les propriétés toxiques de la vulnéraire en déterminant la part qui revient dans l’intoxication à chacune des essences épileptisantes qui entrent dans la composition de cette liqueur. — M. Brown-Séquard rapporte une observation faite sur un malade qui était mis en état d’asphyxie intense par suite de rhumatisme des muscles inspirateurs ; de temps en temps, il se produisait un arrèt des échanges, caractérisé par la coloration rouge du sang veineux visible à travers la peau et s’'accompagnant d’une chute de la température; à chacun de ces arrêts, durant de une à {rois minutes, correspondait un sentiment de bien-être relatif, — M. Charpentier : Recherches complémentaires sur l'appréciation du temps par la rétine, — M. Dupuy a fait des expériences sur des embryons de cochon d'Inde pour déterminer la cause de la première inspiration; sur les embryons extraits de l'utérus et restés en rela- tions avec la circulation maternelle, l'inspiration ne se produit jamais par les excilations cutanées ; l’interrup- tion de la circulation dans le cordon détermine aussi- tôt des mouvements de respiration. L. LaricQuE, SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 5 juin 1891. On sait que la théorie cinétique des gaz, interprétant la loi de Gay-Lussac par une augmentation de la force vive du mouvement de translation des molécules avec la température, fournit une explication de la rotation des ailettes dans un radiomètre, M. l'abbé Leray se fonde sur les mêmes considérations pour expliquer les mouvements que présentent divers types de radiomètres lorsqu'on échauffe inégalement les différentes régions de l'enveloppe. Ces appareils fonctionnent sous les yeux de la société, Un radiomètre muni seulement de deux ailettes verticales et identiques sur leurs deux faces, offre, lorsqu'on approche la main, une orientation du plan des palettes parallèle à la direction de la main, Dans les mêmes conditions, avec un système de quatre ailettes inclinées à 45°, l'équipage prend un mouvement de rotation continue, Les mêmes expériences réus- sissent avec la chaleur solaire, à condition de laisser à nu un seul des hémisphères, Enfin M. Leray complète une observation de Stokes, Celui-ci avait observé que. dans un radiomètre, dont la boule au lieu d'enfermer un espace très rarélié, estouverte à l'air libre, l’échauf- fement d'un des côtés produit au commencement un déplacement des palettes. M. Leray a constaté que le déplarement est encore identiquement le même si, au lieu d’un échauffement on produit un refroidissement, Il signale ce fait curieux, mais n’en peut donner une explication certaine, — M. G. Weiss expose les mé- thodes usitées en médecine pour la mesure du degré de myopie et d'hypermétropie. Elles reposent sur l’obser- vation du sens du déplacement de l’ombre püpillaire sur le champ éclairé de la rétine, lorsqu'on déplace l’ophtalmoscope. L’explication de ces diverses appa- rences faisait défaut jusqu'ici; M. Weiss en propose une, très simple et très rationnelle: il montre en même temps que la tache centrale observée sur le fond éclairé de la rétine et dont la production n'avait pu ètre ex- pliquée d’une facon satisfaisante, est due simplement à l’ouverture centrale de l’ophtalmoscope. — M. Co- lardeau expose les recherches que M. Cailletet et lui ont effectuées sur la tension de la vapeur d’eau saturée jusqu’au point critique et sur la détermination de ce point critique. A haute température, le verre est at- taqué par l’eau : il devient opaque, perd de sa solidité, et les tubes font souvent explosion. Aussi doit-on recourir à des tubes d'acier et mettre en œuvre une mé- thode qui permette d'opérer sans voir le liquide, Elle est fondée sur la remarque connue de Sajotschewski à savoir que la tension de vapeur qui, jusqu'à la tempé- rature critique, estindépendante du volume occupé par le liquide et la vapeur, en dépend à partir de cette température. On introduit dans un volume vide d'air et d'une capacité maintenue invariable une quantité donnée d’eau. On élève progressivement la température au moyen d'un bain convenablement choisi et on trace la courbe des pressions obtenues. D'une expérience à l’autre, on fait varier le poids de l’eau : ce poids doit toujours être suffisant pour fournir de la vapeur sa- turée jusqu'au point critique, mais insuffisant pour remplir complètement le tube de liquide par simple dilatation. Dans ces conditions, les courbes figuratives des pressions représentent toutes, jusqu'à la tempé- rature critique, la courbe des tensions de la vapeur saturée et par suite coïncident dans toute cette région, Elles se raccordent parfaitement avec celles de Regnault qui ne s'étendent d’ailleurs pas au-delà de 230°, Au- dessus de la température critique, les courbes relatives aux diverses expériences diffèrent, car chacune repré- sente la compressibilité d’une masse différente d'un fluide homogène. La température et la pression eri- tiques s'obtiennent en relevant sur le tracé graphique les coordonnées du point de séparation des différentes branches de courbes, Les expérimentateurs ont trouvé 3650 et 2002tm 5, Ils ont comparé leurs résultats avec ceux que donnent les lois des tensions déduites des formules de Clausius et de M. Bertrand, et ont obtenu un accord très satisfaisant, Dans ces expériences, les pressions étaient mesurées par une série de mano- mètres à gaz comprimés, et ces derniers ont ensuite été étalonnés au moyen du manomètre de la tour Eiffel, — M. Pellin présente un dispositif réalisant l'appareil de Mac Intosh et permettant de recourir à la lumière Drummond, même dans des stations dé- pourvues de gaz d'éclairage. Ce gaz est remplacé par des vapeurs d’éther, Pour entrainer ces vapeurs et les amener au chalumeau on fait passer un courant d'oxygène, Edgard Haunté. ACADÉVIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 389 SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS 6,63,5:,6x, étant Jes fonctions bien connues de M. Weierstrass, En partant de cette représentation Séance du 3 juin 1891. M. Friedel présente un modèle de balance construit par M. Collot permettant des pesées rapides et la lec- ture directe des derniers poids. Le centre de gravité du fléau est situé assez bas, de sorte que les oscillations sont rapides; pour compenser la perte de sensibilité due à ce déplacement, l'aiguille du fléau porte un réti- cule dont l’image est projetée sur un micromètre gra- dué, au moyen d’un microscope; la lecture sur le micromètre est facile et précise, elle donne les milli- grammes et fractions de milligranunes. — M. Friedel décrit un modèle de siphon imaginé par M. Essner, destiné à transvaser les liquides chauds ou à vapeurs irritantes ; le remplissage du siphon s'effectue, sans as- piration au moyen d’un réservoir d'assez grande capa- cité placé sur la branche descendante, — M. A. Gau- tier décrit un dialyseur auquel il a donné le nom de dialyseur continu : Cet appareil se compose de quatre ou six entonnoirs de verre placés sur une planche per- cée de trous; communiquant entre eux par des àju- tages qui unissent la pointe inférieure de chaque en- tonnoir avec une tubulure latérale percée dans le haut de la paroi de l’entonnoir précédent. Des filtres à larges plis, en papier parchemin, placés dans chaque entonnoir recoivent la liqueur à dialyser. L'eau de lavage circule avec une vitesse que l’on peut régler à volonté, La sur- face dialysante est très considérable par rapport au volume des liquides à dialyser. — M, Lindet entretient la Société des procédés aujourd'hui en usage pour Ja stérilisation et le chauffage du lait à 60. Ce mode de chauffage ne détruit pas les microbes pathogènes, mais est suffisant pour engourdir le ferment lactique et per- mettre le transport du lait. — M. Béchamp fuit à ce propos remarquer que le ferment lactique n'existe pas dans le lait spontanément caillé, et pense que le meil- leur moyen de favoriser l’altération du lait est précisé- ment le chauffage à 60°. A. Coupes. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 3 juin 1891 M. Laisant résout deux problèmes sur les permu- tations limitées (nombre des dispositions de n ménages autour d’une table de facon que mari et femme ne soient jamais l’un à côté de l’autre; nombre des dis- positions de » tours sur un échiquier de n? cases pour qu'elles ne soient pas en prise réciproque, les diago- nales restant inoccupées). — M. Raffy reprenant le problème de l’applicabilité des surfaces spirales sur une surface spirale donnée, déjà résolu par M. Maurice Lévy, fait voir que sa solution peut seramener à l’inté- v À ; ; ; MN CENS gration d'une équation de la forme y? + a =) (172 équation qui se rencontre encore lorsqu'on cherche les éodésiques d’une surface spirale, Il indique divers cas didtegrabilité de cette équation en se fondant sur cette dernière remarque, — M. d'Ocagne fait observer, à propos de la communication précédente, que si on change, dans l'équation différentielle y en £ et x en w, on à précisément l'équation à laquelle on est conduit lorsqu'on cherche, en coordonnées polaires, les isomé- triques d’une courbe donnée par rapport à un système de droites concourantes, Les deux problèmes sont done identiques au point de vue analytique. Il rappelle qu'il a complètement résolu le second dans le cas où la courbe dont on cherche les isométriques est une droite. (Bull. de la Soc. Math., t. XI, p. 75 et t. XVII, p. 471.) — M. Humbert indique un certain nombre de résultats qu'il a obtenus dans l'étude de la surface du 4° ordre ré- ciproque du lieu des centres de courbure d'un ellipsoïde, après avoir remarqué que les coordonnées homogènes de cette surface peuvent être exprimées de la manière suivante : La [22 Go U sau = y CHU M. D'OCAGNE. SOCIÈTÉS MARITIMES SCIENTIFIQUES INSTITUTION OF NAVAL ARCHITECTS. Session 1891, (Suite.) M. J. A. Yates : Efforts développés duns une paroiplane en acier sous l'influence de la pression hydrostatique. Bien que la résistance des cloisons ait fait l’objet d'un certain nombre de recherches, dont les plus impor- ‘tantes sont celles de M. T. C. Read, les efforts exercés par Ja pression de l'eau sur une paroi plane en tôle, renforcée par des cornières, sont encore mal connus. L'intérêt qu'en offre l'étude s'étend pourtant non seu- lement aux cloisons étanches, mais encore au bordé extérieur du navire dont les échantillons et le rivelage, ainsi que ceux des membrures et lenr écarlement, doivent être déterminés de manière àlimiter la fatigue à un certain nombre de kilogrammes, 6 ou 7 par exemple, par millimètre carré. — Si l’on considère une bande de tôle fixée à ses deux extrémités et d’abord plane, elle prendra sous la pression de l’eau une courbure dont la flèche est liée à la valeur de la tension. L’au- teur l’assimile successivement à une poutre encastrée aux deux extrémités et uniformément chargée, et à une chaîne parabolique soumise aussi à une charge réparlie uniformément, mais normale en chaque point de la courbe. Le calcul des efforts conduit au résultat suivant : si la flèche est inférieure au quart de l’épais- seur de la tôle, celle-ci peut être regardée comme étan dans les conditions de la poutre encastrée aux deux bouts; si la flèche est supérieure au quart de l’épais- seur, la bande de tôle est comparable à la chaîne para- bolique. Dans le premier cas, elle dessine une courbe légère avec deux points d’inflexion; dans le second, elle forme un coude brusque aux points d'attache. Des tableaux donnent pour toutes les épaisseurs usuelles de tôles les flèches et les tensions produites par des pressions de 3 à 7 atmosphères; dans la pratique, on peut fixer à 12), environ l’épaisseur au-dessus de la- quelle la tôle travaille comme une poutre encastrée: on admet par là même que la flèche de la courbe prise par les virures du bordé des fonds ne doit pas dépas- ser 3 “/m. Les cloisons, il est vrai, présentent de plus fortes flexions, mais comme leur épaisseur est infé- rieure à 12%/,,, elles seront calculées comme une chaîne parabolique. — Cette distinction établie par l’auteur dans le mode de travail des tôles selon la valeur du rapport de leur épaisseur aux flèches qu’elles prennent est naturellement hypothétique; elle revient à ad- mettre dans un cas une rigidité, dans l’autre une flexi- bilité, qui en réalité coexistent dans la nature. Obser- vons en outre que dans le calcul de la poutre la force est supposée perpendiculaire à la ligne des points d’en- castrement, au lieu que la pression du liquide est normale à la tôle déformée, Toutefois si les résultats donnés par M. Yates doivent être considérés comme des nombres extrêmes, on peut reconnaitre que, dans la limite de ses hypothèses, l'approximation est assez grande pour les besoins de la pratique, Il tient compte d'ailleurs pour les fortes pressions du rôle que joue l'élasticité transversale : il suppose que lorsque la flèche est assez petite pour qu'on puisse assimiler la tôle à une poutre, la pression de l’eau est supportée entière- ment par la tension longitudinale, mais que dans le cas de la chaîne, la moitié de cette pression est suppor- tée par la tension transversale. Seulement, cette nou- velle hypothèse a l'inconvénient de laisser incertain le sens de l'erreur commise; il est douteux, à notre avis. que l’élasticité transversale absorbe la moitié de l’ef- 390 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES fort, et l’on ne possède plus une limite supérieure de la tension longitudinale. Quoi qu'il en soit, les conclu- sions sont les suivantes: pour le bordé extérieur et celui du double fond, il est bon de limiter la flèche à 1), 1/% pour 30 centimètres d’écartement des sup- orts, afin d'éviter le décollement du malage, le fen- dillement du ciment, et l'augmentation de résistance à la marche du navire, Pour les cloisons étanches, on pourra admettre une flèche de 2 "/m 1/2. L’effort sera limité à 4 kilos pour le bordé, car il ne faut pas ou- blier que l'effort local dû à la pression s'ajoute aux efforts de flexion longitudinale ou transversale de l’en- semble de la coque; on ira jusqu’à 11 kilos pour les cloisons étanches, où cet effort n’est qu'accidentel. L'auteur calcule, d’après ces chiffres, Fécartement ma- ximum à donner aux membrures ou aux cornières de renfort des cloisons, En pratique, l’écartement de ces dernières est bien inférieur à la limite ainsi trouvée. Mais cette limite suppose aux cornières une rigidité parfaite. Il y aurait donc lieu de les espacer davantage, à la condition d’en faire des poutres puissantes atta- chées par de forts goussets à leurs extrémités, afin de résister efficacement à toute flexion. Des cornières lé- gères dans les intervalles empêcheraient le gondole- ment de la tôle. Dans la pratique actuelle les supports des cloisons sont inefficaces. car bien qu'ils soient plus rapprochés qu'il n’est nécessaire, ils ne donnent pas à la cloison les points d'appui convenables, et fléchssent avec elle. sans autre utilité que d’équivaloir à un sur- croît d'épaisseur, — M. Thomas Phillips : Déforma- tion des coques de navires en acier Suivant les conditions du chargement. Les bâtiments en bois sont sujets à des déformalions parfois considérables qui commencent à se manifester dès qu'ils ont quitté la cale de construc- tion. On cite des flèches de 30 et 35 centimètres. Mais il est généralement admis que dans les navires en fer ou en acier, ces déformations sont insensibles. Cepen- dant on a plusieurs fois constaté que des navires en acier avaient, une fois chargés, pris tellement de confre- arc, qu'ils ne réalisaient plus le port en lourd prévu à un tirant d’eau déterminé, par suite de laffaissement du livet du pont vers la partie centrale. C’est en vue d'évaluer l'importance de ces faits que l’auteur a entre- pris plusieurs séries d'observations sur quatre navires, avantet après leur lancement, puis aux différentes phases de leur chargement. — Si la quille est primiti- vement bien droite, dès la mise à l’eau, la coque prend un peu d'arc, car des deux forces auxquelles elle est soumise, la pesanteur et la poussée de l’eau, la pre- mière prédomine aux extrémités, la seconde au milieu, et tanf que le bâtiment reste lège, ilest comparable à une poutre supportée en son milieu et fléchie par des poids appliqués à ses extrémités. Dès que l'opération du chargement commence, le moment fléchissant au milieu diminue, et par suite aussi l'arc, qui finit par s'annuler, et devient négatif. Mais il faut se garder d'une cause d'erreur qui intervient dans la mesure de Ja flèche : il arrive souvent que la quille n’est pas par- faitement rectiligne dès avant le lancement, soit que les tains aient été mal dressés, soit qu'ils aient légère- ment cédé pendant la construction. De là vient aussi que le creux sur quille, relevé avant et après la mise à l'eau, présente une certaine variation. Il estdonc indis- pensable de tenir compte de l’affaissement de la quille pour apprécier et réduire à sa juste valeur la déformation subséquente due au chargement, — Sur l’un des na- vires observés, un welldeck, l’auteur a remarqué en éta- blissant plusieurs lignes de repère, que la flexion n’est pas la mème dans les différentes tranches longitudi- nales situées à diverses distances du plan diamétral. Elle est plus faible au milieu qu’à la muraille, et atteint son minimum entre les deux, comme on pouvait Sy attendre, étant donnés dans la ligne centrale le sys- tème rigide formé par le quille, la carlingue et les épontiiles, et d’autre part, en abord, la résistance du bordé des flanes. — Un navire à double fond cellu- laire a été trouvé sensiblement moins flexible que le pré- cédent. Les observations ont porté en outre sur un na- vire àvarangues ordinaires, et sur un navire à double- fond du système Mac Intyre régnant seulement däns les cales avant et arrière, On a constaté dans ce dernier que le remplissage des compartiments du waterballast diminuait le contre-arc. Les affaissements en abord ont été très sensibles pendant l'embarquement du charbon dans les soutes latérales. — Il faut remarquer que pour tous ces navires, le chargement a été très ration- nellement distribué; mais en somme, les flexions me- surées sont peu considérables ; elles ne depassent pas 4 centimètres. M. Phillips en a conclu que les navires tels qu'il sont aujourd'hui construits ont une rigidité longitudinale suffisante, et il estime que des signes souvent attribués à la fatigue à la mer sont dus sim- plement à ce que le navire n'ayant pas été construit avec sa quille parfaitement rectiligne, a passé au bas- sin sec où il reposait sur des lains bien dressés. — Dans la discussion qui a suivi cette communication, le Pr Jenkins fait remarquer que malgré l'intérêt qu’elle offre au point de vue des efforts statiques, onne saurait conclure à la solidité suffisante des constructions mo- dernes en acier; car elles sont soumises à la mer à des efforts dynamiques qui doivent provoquer des flexions bien plus considérables, qu'il serait instructif de con- naître. Il indique comme cause de grande fatigue le synchronisme des flexions de la coque et de la période de la houle, et aussi la différence de température de l’eau et de l'air, — P' Vivian B. Lewes : Sur les dé- pôts quise forment dans les chaudières. — L'auteur rap- porte des expériences qu'il a entreprises pour constater l'effet des huiles de graissage de la machine sur l’eau d'alimentation des chaudières marines. IL cite des cas d’écrasement de foyers, un, entre autres. survenu à bord d'un grand vapeur, où l’on n'employait que l’eau douce pour faire le plein. On trouva au fond des chau- dières une matière brune, huileuse, qui n’était autre que la valvoline employée au graissage, enveloppant des particules de sulfate de chaux et autres sels. 11Y en avait également autour des tubes et sur l'enveloppe, mais comme le ciel du foyer lui-même en élait exempt, il était difficile de trouver au premier abord la véritable cause de accident, La pression aux chaudières étant de 5 kil, 4 correspond à une température de 1559, très inférieure au point d’ébullition- de la valvoline, M. Lewes rechercha, d’abord comment la valvoline avait pu pénétrer, et constata que dès 120° elle com- mencait à être entrainée par la vapeur, sans doute parce qu’elle était mal purifiée. Il en résulte qu’on ne doit pas se contenter, comme essai des huiles de grais- sage, de déterminer leur point d’ébullition. L'huile in- toduite dans la chaudière, d’abord plus légère que l'eau, reste à la surface ; mais peu à peu elle rencontre des particules calcaires qui s’y attachent; son poids spécifique augmente, et entrainée par les courants as- cendants ou descendants, elle se fixe sur toutes les surfaces qu’elle rencontre, à la différence des dépôts purement calcaires qui se déposent simplement en raison de leur poids, Le dépôt formé sur le ciel du foyer est très mauvais conducteur; sa nature huileuse empêche mème tout contact avec l’eau. La température s'élève, décompose la valvoline, et quand l’effondre- ment se produit, il ne reste qu’une pellicule de sulfate de chaux d'apparence inoffensive. Il est à remarquer que l’eau distillée favorise ces dépôts huileux bien plus qu'une eau chargée de sels, à cause de sa moindre densité, D'autre part, on doit avoir soin de faire tou- jours des extractions de surface avant de laisser baisser le niveau de l’eau, pour empêcher les écumes de se dé- poser sur de foyer, où elles forment des cloches. On trouve dans ces écumes une assez forte proportion de cuivre provenant des garnitures du cylindre et du con- denseur qui sont attaquées par les huiles minérales, Ce cuivre pourrait être dangereux, s’il venait au con- tact de l'acier, par l’action galvanique qui en résulte- rait; bien que la couche d'huile qui l'enveloppe pré- vienne ce contact, c’est là un fait qu'il ne faut pas perdre ACADÉMIES ET SOCIETÉS SAVANTES GI de vue. — L'auteur a reconnu ensuite par des expé- viences directes l’influence de la couche d'huile sur la surchauffe des tôles : il a pu percer des trous dans un récipient en fer forgé, prouvant ainsi que le métal, séparé de l’eau par une épaisseur de 1/4, 5 du résidu d’une chaudière, avait dépassé 1500°, — En résumé, il recommande 41° L'emploi d'huiles minérales aussi pures que possible, et ayant une température d'ébulli- tion d'autant plus élevée que la pression et par suite la température des cylindres sont plus élevées, Les huiles animales et végétales, donnant naissances à des acides gras qui attaquent le fer et le cuivre, sont abso- lument proscrites. 2° L’épuration de l'eau d’alimenta- tion qu'il suffit de faire passer dans une colonne rem- plie de coke pour la débarrasser de huile qu'elle con- tient. 3° De fréquentes extractions de surface. # L’em- ploi d’une eau de grande densité pour empêcher les dépôts de se former. L'auteur propose même de faire usage d’eau de mer, après en avoir précipité les sels de calcium et de magnésium ; il a lui-même expéri- rimenté cette méthode avec succès ; il cite l'emploi du fluorure de sodium recommandé par le Pr Doremus comme précipitant rapidement ces sels nuisibles sans donner un dépôt adhérant aux parois du récipient, L'eau de mer ainsi préparée est ensuite concentrée par la vaporisation de manière à acquérir la densité re- quise. L. Viver. SOCIÉTÉ DES INGÉNIEURS CIVILS Avant d'entreprendre de rendre compte, avec quelque détail, de chacune des séances de la Société, nous croyons utile d'indiquer sommairement les communications faites depuis le commencement de Pannée 1891. 1° Macnines. — M. Thareau s'est occupé de l’emballe- ment des machines à vapeur et des moyens de le prévenir fournis par divers systèmes de régulateurs, puis des moyens d'obtenir l’arrèt rapide des transmissions soit par des organes de débrayage, soit par des appareils pro- duisant à distance la fermeture du tuyau de vapeur. — M. Casalonga : Maximum théorique du rendement direct et absolu des machines à vapewr. Nous reviendrons sur cette communication lors de sa discussion, 29 RÉSISTANCE DES MATÉRIAUX, — M. Candlot, délégué par la Société à la Conférence tenue dernièrement à Berlin pour l'unification des méthodes d'essais des maté- riaux de construction, à indiqué les conventions adop- tées relativement aux produits hydrauliques, Pour les métaux l’uniformité n’est pas encore établie ; l’état de la question a été exposé par M. Durant. — M. Petit a présenté un nouvel appareil pour soumettre les mé- taux aux essais de traction, de compression et de flexion ; c’est l’antheximetre. 3 Travaux puBics. — M. G. Hersent a exposé le résultat des études et sondages faits en 1890 pour le pont sur la Manche : deux trajets sont possibles; l’un de 37 k. 300, l’autre de 33 k. 450. — M. de Coëne qui a étudié dans différents pays l'outillage des ports de mer et des voies de communication, conclut qu'il y a de grands progrès à réaliser en France. — Un travail de M. Ronna sur les irrigations a été résumé par M. Tresca. 4° EconoME socraze. —- La question ouvrière dans les pays étrangers a été traitée par M. Gruner, d’après les documents récents. — M. Cacheux a décrit les habita- lions ouvrières à l’exposition de 1889 et de récentes constructions faites à Clichy et à Saint-Denis, : 5° MINES ET MÉTALLURGIE, — M. Garnier à commu- niqué ses notes de voyages dans l'Amérique du Nord et au nouveau districts de Sudburry où l’on a trouvé un nouveau minerai de platine : un arséniure (la Speryllite), accom- pagné d’or et de cuivre natif. — M. Chaussegros à décrit la nouvelleméthode de fabrication des tubes de fer due à M. M. Mannesmann qui, entre deux cylindres in- clinés en sens inverse, laminent un lingot de fer plein; celui-ci animé d’un mouvement hélicoïdal se creuse jusqu'à produire un tube. — M. Pourcel à fait l'étude du procédé au minerai (Ore process) pour obtenir l'acier sur sole au four Siemens Martin avec des fonles pures et des fontes phosphoreuses. Le métal, préparé sur sole neutre, à une limite élastique qui dépasse les 60 2/, de la limite de la rupture, grâce au chrome qui s’y incor- pore. — L'aluminium a donné lieu à plusieurs commu- nications. Sa métallurgie et principalement les procé- dés électrolytiques Héroult et Minet ont été étudiés par M. Haubtmann.M. Jordan a indiqué l’état de la ques- tion en Amérique d'après M. Hunt qui estime comme prix de revient théorique minimum 2 fr. 30 par kilog. M. Spiral s’est particulièrement attaché aux pro- priélés mécaniques de l’aluminium et de ses alliages. L'influence qu'a l'incorporation de laluminium dans l'acier sur son point de fusion et sa résistance à la rup- ture à donné lieu à plusieurs observations contradic- toires. 6° Came. — M. Guyon à étudié le gaz dynamogène formé par le mélange des produits de distillation de la houille et des gaz obtenus en faisant passer de l’eau et de la vapeur d’eau sur le coke incandescent, dans le but d’u- tiliser la chaleur de celui-ci. 1° ELecrRiGiTÉ, — M. Heïlmann à proposé un nouveau système de chemin de fer électrique, dans lequel la trac- tion est supprimée ; tous les essieux sont moteurs, por- tant chacun l’induit d’une dynamo réceptrice; toutes celles-ci sont alimentées parle courant d’une génératrice mue par une machine à vapeur; le moteur et la dynamo sont placés dans un véhicule spécial remplacant la locomotive actuelle. Cette communication à donné lieu à une intéressante discussion. — M, Vlasto a traité de l’industrie des câbles sous-marins qui a déjà fourni un milliard de francs de produits; monopolisée jusqu'ici en Angleterre elle a été introduite en France par la Société des téléphones. — M. Jousselin à décritle sec- teur électrique de la place Clichy, installé peur pouvoir éclairer 45,000 lampes de 10 bougies, alimentées par une force de 3,000 chevaux ; il a fait la comparaison de l'éclairage à l'électricité et au gaz, — La transmission de force par Pélectricité a donné lieu à trois communica- tions différentes : M. Buron à donné les détails d’ap- plications faites à l’éclairage des gares de Calais, et à la transmission de puissance motrice à deux ateliers du chemin de fer d'Orléans. M. Hillairet a montré une série d'installations et indiqué les modes généraux de distribution ; il n°y à pas de limite à la puissance ni à la distance ; mais le rendement d’une dynamo ne peut dépasser 90 ©/,, el par conséquent celui d'une trans- mission 80 °/,. M. de Bovet a décrit les appareils moteurs et le matériel d'extraction employés aux mines d’or de Faria (Brésil); ils ont été éludiés pour être simples el résistants à cause de l’inexpérience du per- sonnel auquel ils sont confiés, P. JANNETrAZ, SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 28 mai! 1° SCIENCES FHYSIQUES. — M. G. S. Johnson fait une communication sur les bases organiques du jus de viande. Il à essayé de déterminer par des expériences précises si toutes les substances que l’on extrait de la viande y préexistaient ou sielles sont des produits dus à l’action des agents physiques et chimiques qu’on emploie pour cette extraction, ou aux actions micro- biennes qui ont pu modifier la composition de la viande avant qu’elle arrive entre les mains du chimiste. Sa conclusion, c’est que la créatine n'existe pas dans le muscle frais, mais est produite par l’action des bac- téries; la créatinine, au contraire, existe probablement dans la viande fraîche. 2° SCIENCES NATURELLES. — M, W.-J. Thizelton-Dyer présente une note relative au mémoire du D' Fenton Il n'y à pas cu de séance le 21 mai. 392 "A ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Evans sur le champignon pathogène de la Malaria, M. Evans avait décrit dans son mémoire (Proc. R. Soc. n° 298, p. 100), un champignon très élevé en organisa- tion qui semblait différer par certains caractères im- portants de tous les champignons connus. M. Thizelton- Dyer a examiné ce champignon; il a constaté que c’est un #ucor typique, probablement identique au mucor racemosus. — M. W. N. Parker présente une note sur l'anatomie et la physiologie du protepterus annectens. Il avait fait paraître une courte note sur ce sujet dans les Berichte d. Naturforsch. Gesellschaft zu Freiburg, vol, 4, 188%. Dans le présent mémoire il a traité la ques- tion dans son ensemble en grand détail ; il rapporteun grand nombre de faits nouveaux et modifie quelques- unes de ses conclusions antérieures. Le mémoire renferme 12 planches magnifiques qui contiennent 91 figures. M. Parker ne décrit pas la structure du squelette et des systèmes nerveux et musculaires, il se contente de donner à cet égard certains détails spé- ciaux ; il s’est principalement attaché à l'étude d’autres organes qui n'avaient point autant attiré l'attention des observateurs précédents et à la comparaison du protopterus avec les autres genres de dipnoi dans la mesure où leur structure est connue et avec les autres icthyopsidés. Les faits nouveaux contenus dans ce mé- moire sont si nombreux, les recherches sont si com- plètes, qu'on ne saurait en faire tenir les résultats dans un bref compte rendu. La place des dipnoï dans la clas- sification est discutée à la lumière de ces faits nou- veaux. M. Parker fait remarquer que, bien que les dipnoï présentent de nombreux points de ressem- blance avec les poissons d’une part, et d'autre part avec les batraciens inférieurs, ils n’ont qu'une parenté très éloignée avec les formes actuellement vivantes de ces deux classes; il est, d’après lui, inacceptable de les classer avec les poissons, En l'absence de tout rensei- gnement embryologique, et ne connaissant que d’une manière fort incomplète l’histoire paléontologique des dipnoï, il nous est impossible de construire un arbre généalogique qui montre avec quelque chance d’exactitude leur connexion probable avec les autres icthyopsidés. — M. Francis Galton présente une note sur une méthode pour cataloguer les em- preintes des doigts. Dans un mémoire lu devant la Société royale le 27 novembre 1890, il avait mis en lumière l'extraordinaire persistance pendant la vie tout entière des crêtes papillaires de la face palmaire des mains. Il avait montré que la marque laissée sur du papier par le bout des doigts légèrement noircis avec de l’encre contenait pour chaque doigt de 25 à 30 points de repaire distincts; ces points de repaire, à de très rares exceptions près, semblent être absolument persistants; aussi est-il possible de dire avec une cer- titude pratique si oui ou-non deux empreintes digitales ont été faites par la même personne, Dans le présent mémoire, M. Galton explique comment on peut cata- loguer ces empreintes et se reporter à ce catalogue comme à un dictionnaire. Il s’appuie sur les mêmes principes généraux qui ont servi à M. A. Bertillon pour créer son ingénieuse méthode de mensurations anthropométriques, méthode dont on se sert mainte- nant d’une manière régulière pour d'identification des criminels en France et dans d’autres pays. Mais il ne faut point supposer que les empreintes digitales né peuvent être utilisées que pour ces identifications; elles peuvent rendre de grands services dans lès enquêtes sur les races et sur l’hérédité. La facilité avec laquelle M. Galton peutidentifier ces empreintes est une preuve suffisante de l'exactitude de la méthode qu'il a adopté. Séance du # juin 1891. 1° SCIENCES PHYSIQUES, — M. Olivier J. Lodge com- munique le résultat de ses expériences sur la décharge des bouteilles de Leyde. Il avait donné un court résu- mé de la plupart des expériences rapportées dans ce mémoire et il avait indiqué quelques-unes des déduc- tions qu'il en tire dans deux conférences qu'il a faites à la Société des Aris en mars 1888, sur les paraton- nerres, — et dans des articles qui ont paru dans l’Elec- tricien (vol. 21, 22, 23) sous le même titre. Le présent mémoire renferme avec les détails complets de ces expériences déjà mentionnées, quelques expériences encore inédites, En retraçant l’histoire des recherches sur la radiation électro-magnétique, M. Lodge fait re- marquer qu'une question autour de laquelle on a sou- levé quelques controverses, semble être résolue par ses expériences ; il a montré en effet que la vitesse d’une onde électrique le long d’un fil mince de cuivre bien isolé est pratiquement identique à la vitesse de la lumière, ce qui concorde avec la théorie de Max- well. — M. J. H. Poynting fait une communication sur la détermination de la densité moyennede la terre etde la constante de la gravitation au moyen de la balance ordinaire. L'objet immédiat de cette expé- rience; c’est de déterminer l'attraction exercée par une masse connue sur une autre, On suspend aux deux bras d’une balance deux masses sphériques de plomb et d’antimoine, pesant environ 21 kilogs chacune, de telle manière que leurs centres se trouvent à 30 centi- mètres environ au-dessus du centre d’une masse afti- rante considérable, consistant en une sphère de plomb et d’antimoine, pesant environ 153 kilogs et placée sur un plateau tournant, de manière à pouvoir être mise en mouvement au-dessous de l’une des deux masses suspendues à la balance. Les variations des poids des masces attirées, qui proviennent du déplacement de la masse attirante d’un côté à l’autre sont les quantités à mesurer, En répétant les observations, lorsque la dis- tance entre la masse attirante et les masses attirées, est doublée, on peut éliminer l’attraction exercée sur le fléau, les fils qui soutiennent les sphères métal- liques, ete. La position du fléau est déterminée par la réflexion d’une échelle dans un miroir, disposé de telle sorte qu'il fait en tournant un angle 150 fois plus grand environ que celui dont a tourné le fléau; une division de l'échelle correspond à un angle de déplacement du fléau d’environ 0°.013. M. Poynting a obtenu les va- leurs suivantes : 6,6984 Constante de la pesanteur: ——— 105 Densité moyenne de la terre : 5,4934. M. W. H. Dines présente une note sur la pression exercée par le vent sur les surfaces courbes des gi- rouettes, En juin 1890, il avait lu devant la Société un mémoire qui renfermait les résultats de quelques expé- riences sur la pression exercée par le vent surles sur faces obliques à sa direction(Roy.Soc.Proc. Vol.48,p 233) Il rapporte dans la présente communication quelques résultats nouveaux qu'il a obtenus au cours de ses re- cherches de l'hiver dernier. — MM. Ayrton, Perry el Sumpner font une communication sur les électro- mètres à quadrants. En 1886, on avait signalé que si on augmente constamment la charge ‘de l'aiguille de l'électromètre n° 5 à quadrants et à suspension bifi- laire de Sir W. Thomson, la déviation de cette aiguille lorsque la même différence de potentiel est maintenue entre les quadrants, au lieu de s’accroitre constam- ment s'accroit d’abord, puis diminue, de telle sorte, que si la charge de l'aiguille esttrès grande ou très pe- tite, la sensibilité de l'instrument est faible. Une série d'expériences poursuivies pendant plusieurs années ont permis de déterminer les causes de cette particularité, Voici brièvement les résultats de ces recherches : 1° L’électromètre à quadrants, tel qu'il est construit par MM. White, bien qu'il soit très soigneusement construit au point de vue de la symétrie, n’obéit pas d'ordinaire, même approximativement, à la loi reconnue des élec- tromètres à quadrants, lorsque le potentiel de l'aiguille varie. 2 Les particularités de l’électromètre White sont dues principalement aux actions électriques qui se pro- duisent entre le tube de garde (tube quard) et l'aiguille, et au léger abaissement de l'aiguille qui a lieu lorsque le potentiel est élevé. 3° Par certaines dispositions spé- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 393 ciales des quadrants, on peut rendre la sensibilité de Finstrument presque indépendante du potentiel de lai- guüille, ou directement proportionnel à ce potentiel, ou bien enfin on peut la faire s’accroitre plus rapidement que le potentiel de l'aiguille. #° En modifiant, comme indiquent les auteurs, la construction de l'instrument, on peut sans aucune disposition spéciale des quadrants obtenir un électromètre soumis à la loi convention- nelle, Au cours de leurs expériences, les auteurs ont fait une nouvelle détermination de v, c’est-à-dire, du rapport des unités de quantité électro-statique et électro-ma- gnétique. La valeur obtenue est de 298 millions de mètres par seconde.— M. William Marcet fait une communication sur l'absorption d'oxygène et la forma tion d'acide carbonique dans la respiration ordinaire et dans la respiration d'air contenant un excès d'acide carbonique. Les résultats obtenus montrent que la proportion d'acide carbonique, d'oxygène et d'azote, dans l'air expiré varie d’après les individus, mais que les proportions de chaque gaz restent à peu près cons- tantes pendant une période d'environ quatre heures et demie après le repas de midi, La moyenne de vingt et une expériences faites sur deux personnes donne, pour le rapport entre l’oxygène consommé et l'acide carbo- nique produit, une valeur de 0,870. Le volume moyen d'oxygène absorbé par minule est de 34,3 cent. cubes, ce qui représente 2 gr. 9% d'oxygène par heure. Le rapport du volume moyen d'oxygène absorbé à l'air inspiré est de 0,75 pour 100. Le poids moyen d'oxygène consommé par heure varie de 20,81 à 26,09 suivant les individus. Le poids moyen d'acide carbonique formé est sujet aux mêmes variations. Les expériences, qui se rapportent à la respiration de l'air contenant un excès d'acide carbonique, montrent que lorsque l’air respiré contient de 3 à # pour 100 de CO2, la quan- lité d'oxygène consommé est beaucoup plus grande que dans la respiration ordinaire, tandis que la quan- tité d'acide carbonique expiré est beaucoup plus faible. Il doit en conséquence rester dans le corps une quan- lité considérable d'oxygène qui très probablement se transforme en CO?, et ne peut s'échapper dans Pair ex- térieur lors de l'expiration. , Richard À. GRécory. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 22 mai 1891. M. Woodward montre une forme de lanterne stéréos- copique du D' Schobben. L'instrument consiste en une double lanterne, par laquelle les deux vues stéréosco- piques d’un objet sont projetées sur un écran, Les deux images sont colorées de teintes complémentaires au moyen de lames de verre rouge et vert dont on recouvre les lentilles des lanternes, En observant les images qui se superposent avec une lunette de spec- tacle dont les oculaires sont aussi colorés en vert et en rouge, on a un effet stéréoscopique saisissant, — M. Boys a essayé d'obtenir un résultat analogue avec de la lumière polarisée en observant deux images po- larisées avec un nicol et n'obtient aucun effet à cause de la polarisation elliptique produite par l'écran ; mais si on prenait un écran d’or mat, au lieu d’un écran ordi- naire, on obtiendrait l'effet désiré. — Le P' Perry présente une nouvelle forme d'indicateur de machine à vapeur : Un miroir de galvanomètre est fixé excentri- quement à un disque d'acier formant un des côtés de la chambre qui communique avec le cylindre. La pres- sion de la vapeur fait bomber le disque et le miroir dévie un rayon lumineux qui s’y réfléchit de sa direc- lion normale. Une rotation dans une direction rectan- gulaire à la précédente est communiquée au miroir par le mouvement de la tige du piston. Le rayon lumineux trace ainsi un diagramme sur un écran convenable- ment placé, et la figure complète est vue d’une manière continue à cause de la persistance des impressions sur la rétine. Cet indicateur a cet avantage sur les autres qu'il est affranchi des erreurs dues au frotte- ment, ou aux oscillations des ressorts, et à l’altération de leur élasticité par les variations de la température. Les erreurs des indicateurs ordinaires sont considé- rables pour de grandes vitesses à cause des rides que présente alors le diagramme indicateur. Ces rides sont sensibles dès que la période propre de vibration du ressort n’est pas inférieure à £ de la période d’une révolution, Dans le nouvel indicateur la période propre d’oscillation peut être rendue très courte. La déviation du rayon réfléchi est proportionnelle à la pression tant qu'on ne dépasse pas certaines limites, M. Addenbroke estime que l'instrument réalise un progrès important et rendra de grands services aux ingénieurs électriciens. M. Ayrton ajoute que l'instrument pourrait être mo- difié de manière à permettre l'étude de la forme des courbes qui figurent les courants alternatifs. — M. Per- ry: « Sur la méthode de Blakesley pour la mesure du pouvoir d'un transformateur. » La note présente à rapport à une erreur dans la manière d'établir la for- mule de M. Blakesley, due au fait qu'il y a des pertes magnétiques dans les transformateurs. On est arrivé à établir la formule donnée jusqu'ici en traitant les équations par la méthode que Hopkinson a le premier indiquée. Sur le système les réactions des courants primaire et secondaire sont représentées par les équa- tions V=RCi+P— où Pet S sont respectivement les nombres de tours des bobines primaire et secondaire et N le flux magnétique entre les bobines. L'on suppose alors qu'il n’y à pas de perte magnétique, et l’auteur estime qu’en ce point la méthode est moins bonne que la méthode originale de Maxwell, dans laquelle les forces électro-motrices sont exprimées en fonction des coefficients de selfin- duction et d’induction mutuelle, En supposant qu'il n'y a pas de courants tourbillonnaires, les équations de Maxwell sont : M—= R;C, + LC, MC; 0 = Ro Co + MC, + Li Co où, quoique L,,M et L, ne puissent être constants, on peut supposer qu'ils sont respectivement proportionnels à P,PS et S, s'il n'y à pas de perte magnétique; si la proportion de flux magnétique perdu reste une frac- lion constante du flux total, les trois quantités peuvent ètre supposées proportionnelles entre elles, quoique M? soit plus petit que L,L,. Ces équations nous don- nent : M L,Lo — M? — NOIR CHERS = CC + LE GG Hopkinson annule le dernier terme, tandis qu'à cause de la rapidité avec laquelle varie C,, le dernier terme est très important, lors même que M est une fai- ble fraction de W DAT En intégrant l'équation, les deux premiers termes donnent la formule de Blakesley, et le dernier s’annule dans l'intégration, parce que, quelque grande qu’elle soit, la perte magnétique est | CC, dt —0 C l'intégration étant étendue à une période entière et les fonctions étant périodiques, La formule de Blakesley subsiste ainsi, quelles que soient les pertes magné- tiques. Une discussion s'engage sur la question. MM.Blakesley Sumpner, Swinburne, Ayrton, y prennent part, M. Ayrton dit que personne n’est plus heureux que lui de trouver que la méthode de M. Blakesley est exacte, mais il n’est pas d'accord avec M. Perry sur ce point que le D° Hopkinson a eu tort d'abandonner la méthode académique de Maxwell, — MM. Ayrton et Sumpner : Mémoire sur « les analogies du courant et de la différence de potentiel dans les méthodes de mesure des pouvoirs, » 394 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du T mai 1891. MM. Dunstan et Dymond. Action des alcalis sur les composés nitrés de la série des paraffines. L'action des alcalis, à chaud, sur le nitroéthane, donne naissance à un nitrite alcalin, de l’acétonitrite et un nouveau com- posé, tondant à 3° 5, bouillant à 170°, MM. Dunstan et Dymond montrent que ce composé est du triméthyli- soxazol. CH — CAz0 | CH —C Il CH3 — C Ce nitropopane, traité par les alcalis, donne le trié- thylisoxazol, M. Emerson Reynolds. Nouveaux composés d'ul- dition de la thiocarbamide. L'auteur conelut en propo- sant pour la thiocarbamide la formule dissymélrique. H AzC (SH) Az H? CS (AzH2)? M. Emil Werner. Action de l'anhydride acétique sur les thiocarbamides substituées. Nouvelle méthode pour préparer l'huile essentielle de moutarde. — M. Arthur Richardson. La décomposition du chlorure d'argent par la hunière, L'auteur conclut que le composé qui se forme, quand le chlorure d'argent noircit à la lumière est un sous-chlorure plutôt qu'un oxychlorure, — MM. Purdie et Marshall. L'addition des éléments de l'alcool aux éthers sels des acides non saturés. — MM.Ra- phael Meldola et F. Hughes. Note sur les azo-dé- rivés de la G-naphtylanine. — M. G. Mac Gowan. Le dosage des nitrates. L'auteur décrit une méthode de dosage basée sur la réaction suivante : AzOSH + 3HC1 = AzO0C1+ CI + 2H20. Le nitrate est chauffé avec un excès d'acide chlorhy- drique concentré dans un appareil rempli d'acide ear- bonique ; les produits gazeux sont dirigés dans une solution d’iodure de potassium, Une quantité d'iode équivalente à la totalité du chlore dégagé est mise en liberté. — M. Augustus Dixon. — Nouveaux dérivés benzyliques de la thiocarbamide. — M. Emil Werner. Réaction de l'acide acétique et de la phénilthiocarbamide. SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 18 mai 1891, 4° Screxces pxysiQues. — Le D' Bucher : Sur le baro- mètre à l'Observatoire de Ben Nevis : relation entre ses indications et la direction et la force du vent, Les lectures du baromètre à deux stations de niveaux dif- férents, réduites au niveau de la mer, présentent des différences marquées tenant à la direction du vent. Les recherches s'étendent à une période de neuf mois: pendant cette période tous les vents très violents onl été dans des directions comprises entre l’E.-S.-E.et le S.-Æ., ce sont les directions dans lesquelles le vent souffle librement au sommet de la montagne où se trouve l'Observatoire. Dans douze cas, la vitesse dans ces directions a atteint 420 milles par heure ou plus, et la hauteur (réduite) du baromètre à la station supé- rieure est de environ 1 de pouce inférieure à la hau- teur mesurée à la station inférieure, Dans aucune autre direction le vent n’a dépassé une vitesse de 70 milles à l’heure, et dans les directions de l'Ouest, O.-N.-0., E. et E.-N.-E. la vitesse n’a pas dépassé 30 [milles : mais cela tient à ce que le vent se brise contre des rochers au nord de l'Observatoire, la vi- tesse au sommet même de la montagne est moindre que la vitesse des courants aériens indiquée par la marche des nuages, et il se produit une dépression du baromètre qui est environ triple de la dépression produite pour un vent d’égale violence soufflant d’une autre direction. Un résultat singulier observé pour au lieu de toutes les autres directions de vents est que la hauteur barométrique (réduite) au sommet ne dépasse la hau- teur à la station inférieure que pour une vitesse du vent d'environ 5 milles à l'heure, On a des résultats inverses pour des vitesses ou supérieures ou infé- rieures. — D' Hugh Robert : Sur la géographie physique de la mer de Clyde et sur la salinité et la composition chimique de ses eaux. Résumons briève- ment quelques-uns des résultats qui comprennent trois années d'observations, Le mois où la chute de pluie est maximum est le mois de janvier, celui où elle est minimum, le mois de mai, aussi la quantité de sel que contient l’eau varie avec la saison; l’eau est moins salée au mois de février, et elle l’est le plus au mois de juillet ou d'août. L'eau de rivière qui tombe dans la mer est constamment mélangée avec l’eau de mer par l’action combinée des marées et du vent, qui créent des courants verticaux. Le mémoire se termine par une indication de la composition chimique de l’eau. 20 SCIENCES NATURELLES. — Le Dr Berry Haycraft com- munique quelques expériences prouvant que le déplace- ment du cœur qu'on supposait, à l’époque d'Harvey, se produire à chaque contraction, n’a en réalité pas lieu dans la poitrine tant qu’elle n’est pas ouverte, etque les diagrammes donnés par le cardiographe ont été mal in- terprétés par les physiologistes. Le cœur se dilate et se contracte; mais il y a dilatation et contraction simul- tanée de tous ses diamètres, contrairement à une opi- nion admise par plusieurs. Si on ouvre la poitrine d’un animal supposé étendu sur le dos, au moment de l’ex- pansion, le cœur, étant séparé de ses attaches, tombe, en vertu de son poids, vers le dos,et au moment de la contraction musculaire il est au contraire ramené vers la partie antérieure de la poitrine. Si on couche l’ani- mal sur le côté le même phénomène se produit et l’on sent le battement du cœur sur le côté opposé, Mais le diagramme du cardiographe tel qu'il est interprété d'ordinaire montrerait que la paroi de la cage thora- cique est pressée vers l'extérieur par le contact du du cœur pendant la contraction. Le D' Hayceraft assure que cela tient à la déformation du cœur par la pres- sion de la paroi de la cage quand le bouton du cardio- graphe est appuyé contre l’intérieur de la poitrine, Le premier effet de la contraction musculaire est d’ac- croitre la pression en ce point, ce qui donne au cardio- graphe l'indication d’un accroissement de pression. Cette indication est diminuée notablement quand le cardiodraphe est aussi léger que possible. Quant aux sinuosités que présentent les diagrammes, elles ne tiennent qu'à l'instrument, et sont dues à l'inertie du cardiographe. Séance du 1° juin 1891. 1° SCIENCES PHYSIQUES, — M. Tait communique un mé- moire du professeur Piazzi Smyth et sur deux séries de photographies du spectre solaire, l’une dans le spectre visible, l’autre dans l’ultraviolet. Les observa- lions s'étendent à une distance considérable dans la par- fie invisible : la première série comprend 60 planches ; la série actuelle en a 12 de plus, ajoutées dans la région du violet. Les photographies s'accordent avec celles du professeur Rowland pour prouver que la ligne « pe- tit d »-est absolument absente du spectre du soleil, ou du moins n'y a qu'une importance insignifiante. M. Tait communique un mémoire du professeur C. G. Knott sur les relations entre le magnétisme et la torsion dans le fer, le nickel et le cobalt, La deuxième partie du mémoire est la continuation des expériences précédentes de l’auteur sur la torsion produite dans les métaux magnétiques sous l'influence combinée d’une magnétisation longitudinale et transversale !, Une tige rectangulaire de nickel ou de cobalt se tord en vis sinistorsum quand le courant qui produit l’ai- mantation transversale traverse la tige dans le sens de l L'auteur emploie le mot cieular magnelisation. Nous adoptons en français l'expression d’aimantation fransversale, due à M, Janet. * | ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 395 la magnélisation longitudinale. Le fer se tord en vis à droite à moins que des champs intenses ne soient em- plôyés. Dans le cas du nickel il n'y a pas de renverse- ment du sens de la torsion quand on à recours à des champs intenses, mais on peut atteindre au maximum. La grandeur de la torsion produite par le renversement d’un des champs magnétiques dépend de celui des deux champs dont on change le signe. En général le renver- sement du champ longitudinal produit l'effet le plus considérable ; mais le fer et le nickel, dans des champs faibles, prennent une torsion plus grande, quand c’est le courant producteur de l’aimantation transversale que l’on renverse. L'hyslérésis joue un rôle considérable dans tous ces phénomènes. Dans la seconde partie, on montre l'exactitude de l'expression donnée dans la pre- mière partie pour la torsion en fonction de l'allongement dans un tube à minces parois de rayon donné. La troi- sième partie contient une discussion des effets magné- tiques de la torsion d’un fil aimanté, plus spécialement d’un fil aimanté transversalement. Les cas particuliers dans lesquels le changement magnétique persiste après la torsion, ou disparaît avant elle, sont complètement discutés. L'effet dépend de l'intensité du courant, de la grandeur de la torsion, et de la grandeur de la vi- bration à laquelle est soumis le fil. La polarisation ma- gnétique longitudinale acquise quand on tord un fil parcouru par un courant se montre élevée en compa- raison de l'intensité magnétique induite sur la circon- férence du fil. Cela semble indiquer lexistence de groupements moléculaires dont la configuration s’al- tère quand ils sont soumis à des changements de ten- sion ou de force magnétique. L'effet qu'on observe quand on soumet à la torsion un fil qui paraît déma- gnétisé, consiste dans ce fait qu'il reste une polarité rémanente et alternée. Une tension qui agit différem- ment sur ce magnétisme rémanent produira des effets magnétiques intenses, De ses propres expériences el de celles des autres observateurs, le D Knott conclut que le premier effet d’un effort de cisaillement sur les groupements moléculaires n’est pas seulement d’aug- menter l'intensité magnétique dans la direction de la force magnétique déjà existante, mais en outre d’ame- ner une prédominence d'intensité, relativement consi- dérable, dans une direction rectangulaire à la précé- dente. — Le D'- Buchan communique une note de MM. R. T. Osmond et A. Ranhin, de l'observatoire de Ben Nevis, sur le venten ce point. La détermination exacte des vents du Nord n’est pas très exacte à cause des montagnes. Un des résultats nombreux que nous signalerons est le suivant : La distribution des pres- sions au niveau de la mer et au niveau de Ben Nevis (à 4.400 pieds) ont des directions entièrement diffé- rentes, La distribution de la pression barométrique vraie qui s'étend sur le nord de l'Atlantique et le nord- ouest de l'Europe et qui régit les vents de la surface sur toute celte aire, ne doivent pas dans cette contrée étendre leur action à une hauteur verticale dépassant un mille, 2° SCIENCES NATORELLES. — D: Griffitus : sur le sang des invertébrés. — M. Kidston lit un mémoire sur les plantes fossiles des houillières de Kilmarnock, de Galston et de Kilwinning, à Ayrelaire. W. P£oDiE, Docteur de l'Université. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 30 mai 1891. … 1° ScIENGES MATHÉMATIQUES. — M. J. F. van den Berg: Sur la méthode d'approximation des racines des équa- tions dites de Newton. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. W. Bakhnis Rooze- boom : La dissolubilité des mélanges isomorphes, On obtient en général une dissolution de constitution dé- terminée, si deux sels se trouvent en excès dans la même matière dissolvante, p et { étant constantes. Ce- pendant, si les deux sels sont capables de former un sel double ou s'ils sont isomorphes, on peut obtenir des dissolutions de constitution différente. L'auteur a montré autrefois qu’on explique les phénomènes dans le premier cas en envisageant le sel double comme une phase simple, A présent il s'occupe du second cas, celui des sels isomorphes, où la constitution de la dis- solution dépend de plus du montant de l’excès des deux sels dans l’état solide. Il réfute l'opinion de M. Duhem (voir Le potentiel isodynamique de ce savant) basée sur la supposition que pour les sels isomorphes, il y a égalité de potentiel à l’état solide et à l’état dissous. Avec M.J, N. Retgers (voir la Revue du 30 mars 1891, p-. 206), il considère les cristaux qui se précipitent dans les dissolutions de sels isomorphes comme des mélanges entièrement homogènes ou des « dissolutions solides ». La possibilité de l’ionisation des sels dans la dissolu- tion s'étant opposée à l'application de la formule de M. Planche, l’analogie avec la marche générale de la formule de M. Konowalow peut guider le raisonnement, Enfin le cas particulier des deux sels isomorphes TICIOSet KCIOŸ est examiné en détail. — Sont nommés rapporteurs pour un mémoire de M. J. Meyers avec le titre : « Sur la constitution du chlorure de chaux », MM. J. M. van Bemmelen et Ed. Mulder. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. W. EF. R. Suringar pré- sente la thèse de M. J. van Breda de Han : L’anatomie du genre Melocactus. — M. K. Martin présente un mémoire de M. H. van Capelle avec le titre : Résultats géologiques de quelques forages du sol à Havelte. — M.J. M. van Bemmelen offre un exemplaire d’un mé- moire qu'il à publié dans le journal : « Die land- wirthschaftlichen Versuchsftationen (t. 37, 1890), — M.Stokvis offre la traduction de son discours à Ber- lin en 1890 «La thérapie comparée. » SCHOUTE, Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 1% mai 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Weyr : « Sur les involutions de degré supérieur. » 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. À. Hampa : «Sur l’absorp- tion de la lumière par les milieux troubles. » Les mi- lieux troubles laissant passer de la lumière de diverses longueurs d'onde en diverses proportions, Clausius, appliquant les lois de la réfraction et de la réflexion de la lumière aux milieux troubles, donne la formule : s—2 TER tandis que la théorie de lord Rayleigh, qui suppose que les lois ordinaires de la réfraction et de la réflexion ne sont plus applicables au cas où les particules diffusantes sont petites par rapports aux longueurs d'onde et qui regarde les particules diffusantes comme des centres d’ébranlement, arrive à la formule st He CCD J est l'intensité de la lumière transmise, J, de la lu- mière incidente, À Ja longueur d'onde, # et x, descons- tantes et / l'épaisseur traversée, Pour distinguer entre les deux théories, on étudiait l’absorption de la lu- mière par une émulsion de mastic dont les particules étaient invisibles au microscope (à un microscope qui aurait permis de voir une grandeur de 0y,2) au moyen d’un spectrophotomètre de Glau. Les nombres déduits de l’observation, (un extrait du tableau de l’auteur est donné dans les comptes-rendus) donnent raison à la théorie de Rayleigh. — M. G. Exner : « Recherches électrochimiques, premièrecommunication, » L'auteur indique une nouvelle méthode de détermination de la différence de potentiel entre deuxliquides sans emploi d’électrodes pour amener le courant, puis il donne les résultats d’une nombreuse série de mesures sur la différence de potentiel des métaux avec Peau, les solutions aqueuses de chlore, de brôme et d’iode, 396 =— ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES et les solutions à diverses concentrations, des acides haloïdes dans l’eau. — M. Alfred Kraus : « Sur la formation des dérivés méthylés de l’orcine, » En trai- tant l’orcine par la potasse et l’iodure de méthyle, on a une foule de produits difficiles à séparer, De la partie du produit brut qui est soluble dans la potasse, on peul isoler un corps cristallisé, fondant à 204, qui est la diméthylorcine, où deux groupes méthyles sont direc- tement liés au carbone. De la partie du produit inso- luble dansla potasse on peut extraire une tétraméthyl- orcine,qui renferme deux méthoxyles etdeux méthyles directement liés au carbone. On est arrivé aussi à avoir de l’orcine l'étherdiméthylique, qui n'avait pas encore été isolé, mais dont on connaissait un produit de subs- titution dibromé, et qui avec l'acide iodydrique redonne de l’orcine. — M. Kostanecki, de Berne « Sur la gen- tisine. » S'appuyant sur une observation de Hlasiwetz et Habermann, l’auteur a cherché l’action de l'acide iodhydrique sur la gentisine,.et obtenu avec l’iodure de méthyle, un produit phénolique qu'il appelle la gen- tiséine, et qui contient trois hydroxyles : on pourrait en faire aussi le triacétate, — M. Alfred Krauber. « Sur les propriétés de la métaxylylhydrazine- et son action sur l’éther acétique. » — M. Fritz Kerner : « La variation de la température du sol avec l'exposition ». La compa- raison des observations mensuelles faites pendant trois ans, aux huit expositions principales à deux pics du Tyrol, a donné les résultats suivants : L'exposition la plus chaude en hiver est celle du sud ouest, celle du sud-est en été. La plus froide est l’est en hiver, dans les autres saisons, le nord. La différence desexpositions en- tre le point le plus chaud et le plus froid atteint des valeurs angulaires extrêmes en janvier, mars, mai et oc- tobre. L’élévation delatempérature du sol se faitavec la plus grande rapidité aux points exposés au nord-est, avec la plus grande lenteur au sud-ouest ; la chute de tem- pérature se fait avec laplus grande rapidité au sud-est, avec la plus grande lenteur au nord-ouest. 39 SCIENCES NATURELLES, M. Oscar Loth « Sur le sérum du sang quise coagule en masse transparente etle blanc d'œuf de poule », — M. Franz Müller : « Contribution à l'étude de la substance nucléaire et cellulaire dans la mitose, » Il s'agissait de trancher la question entre les | théories de Flemming et de Pfitzner, savoir s’il y a une séparation nette entre la substance du noyau et celle de Ja cellule pendant certaines phases de la milose; les recherches faites sur des cellules du sang prouvent que c’est la première hypothèse qu'il faut adopter. — M. Weiss, à Prague : « Histoire du développement'de la trichème dans l'ouverture de la corolle de la Pingui- cula vulgaris, » — M. C. Claus : « Détail de la structure de l'œil médian des Crustacés. » — M. Adamkiewicz : « Sur l'attaque d’apoplexie ». Il arrive à cette conclu- sion que l'attaque d’apoplexie n’a rien de commun avec la « congestion cérébrale » et qu’elle a pour cause des lésions du cervelet, dont l'influence dépend de leur profondeur et du point où elles sont localisées. Emile WEYR, Membre &e l'Académie. SOCIETES DIVERSES DE SAINT-PETERSBOURG SOCIÈTÉ DES NATURALISTES DE SAINT-PÉTERSBOURG Séance de mars 1891. M. Rohon : Sur la faune ichthyologique de l'ile d’Oesel : 1° à peu d’exceptions près les étages silu- riens supérieurs d'Oesel possèdent déjà des représen- tants de lichthyofaune caractéristique du dévonien (placodermata, diptéridæ, etc.); cette circonstance permet de conclure que l’on devrait chercher l’ichthyo- faune primordiale dans les assises cambriennes du gouvernement de Saint-Pétersbourg ; 2° examen sous le double point de vue de l'anatomie comparative et de l’histologie des espèces Céphalaspis, Trémataspis, Thyestes etc.; comparaison de ces restes fossiles avec ceux du Ludlow anglais ; 3° l’étude approfondie de l'anatomie et de la structure histologique du céphalo- thorax, des écailles thoraciques et caudales de Thyestes verrucosus Eichwald a permis à l’auteur d'établir avec certitude certaines relations évidentes de parenté entre celui-ci et les trilobites ; 4° Ayant constaté chez le limulus des éléments histologiques analogues à la dentine et à l'émail, il a pu découvrir le chaînon reliant les céphalaspides aux crustacés ; 5° M. Rohon,résumant ses recherches, expose d’une facon claire et précise ses vues sur l’évolution probable et la phvlogénèse des vertébrés (ex crustaceis). — M. Amalitzky commu- nique l’état de ses recherches sur l’évolution phylogé- nétique du genre Anthracosia. Séance d'avril 1891. M. Inostranzeff : Expériences sur la torsion de roches compactes. Un cylindre de basalte de Béresto- wiéz en Volhynie (basalte finement grenu typique àpla- sioclase et base vitreuse) a été soumis à une torsion lente et prolongée au moyen d’un appareil servant d'ordinaire à la détermination du coefficient de torsion des métaux. Lecylindre résista pendant un temps assez long à l'effet de torsion lentement augmenté et donna lieu, dans l'appareil enregistreur, à une courbe d’un degré 145 minutes, mais céda bientôt en se cassant à la manière de la fonte grise. Des plaques minces taillées parallèlement à la cassure ne présentèrent rien de par- ticulier, — M. Prosorcwsky-Golitzyne fait une com- munication sur une excursion géologique en Crimée, entreprise par lui l’année dernière. C’est le massif éruptf du mont Karadagh qui avait attiré spéciale- ment son attention. Tandis que plusieurs autres mas- sifs de roches éruptives en Crimée se présentent, habi- tuellement sous forme de laccolites bien caractérisés, celui du mont Karadagh fait exception à cette règle ; c’est évidemment le noyau érodé d’un ancien volcan composé de roches éruptives accompagnées de brèches volcaniques et de déjections détritiques. Toutes ces roches se rapprochent plus ou moins des types andési- tique et trachytique. — M. Kroustchoff expose les résultats de l’étude optique et chimique d’un feldspath provenant d’une roche granitique globulaire de PAltai. Ce plagioclase offre une structure polysynthétique mà- clée suivant la loi de l’albite, Dans une plaque mince suivant P (001) l'extinction ne s’écarte que d’un angle tout à fait insignifiant de la trace du plan des mâcles ; dans une préparation suivant M (010) l'extinction est de même presque parallèle à la trace du clivage P (001). L'analyse chimique permet d'en conclure la composi- tion moléculaire, c'est-à-dire 29 parties d’anorthite + 71 parties d’albite, Or, ce mélange isomorphe corres- pond au point d’intersection des deux courbes (l’une contenant les extinctions sur P(001)et l’autre celles sur M (010) de la série feldspathique) d’après l’épure de M. Schuster. SOCIÉTÉ IMPÉRIALE MINÉRALOGIQUE DE SAINT-PÉTERSBOURG Séance d'avril 1891. M. Mouchkétoff lit une communication envoyée par C & à a \ 4 \ M. Kondratieff sur les gites P plombifères dans le Couban « Æ | o” | au Caucase. — M. Fédoroff lit une note très intéressante sur la théorie des tremble- ments de terre : Oétant le centredelaterre, C le centre du tremblement, A un point quelconque sur la surface de la terre, nous 4 (Tee à À aurons : Sin « — - Sin p, où «a et » sont des valeurs = constantes ; Si p — = alors Sin ç acquerra un maximum en même temps que Sin &; par conséquent, la valeur maxima de la composante horizontale du choc se trouvera en B. Dr K. de KrousrTcHorr. CHRONQUE 397 CHRONIQUE LES RÉCENTS PERFECTIONNEMENTS DE LA FILTRATION PASTORIENNE DE L'EAU Les recherches de MM. Frankel et Piefke, ainsi que | léra et de la fièvre typhoïde. On peut dire qu'un celles d'autres expérimentateurs, ont établi d’une | filtre de ce genre éprouve particulièrement deux pé- Il manière absolue que la filtration par le sable laisse | riodes critiques, ‘une au commencement de la filtra- passer toutes les bactéries, notamment celles du cho- | tion, alors que ses pores sont encore trop larges pour 398 CHRONIQUE retenir les germes pathogènes, et celle de la fin, où le corps du filtre lui-même est arrivé à constituer un véritable milieu de culture, où l’eau, loin de se purifier au point de vue bactériologique, tend à se conltaminer de plus en plus. à Ces conditions se présentent dans tous les filtres à parois mobiles, c’est-à-dire dans tous ceux où la couche travaillante est constituée par des corps plus ou moins pulvérulents, et les expériences classiques de Frankland ont en particuher démontré que l’eau traitée par les filtres au charbon ne tarde pas à contenir un nombre de germes supérieurs à celui qu’elle renferme avant son passage dans les appareils de filtration. Ces faits nettement établis donnent la vraie cause du succès rencontré, près des hygiénistes, par les filtres à parois fives, dont la bougie Chamberland est le type le plus parfait, Mais en raison même de la per- fection du filtrage, elle s’encrasse rapidement ; surtout le débit éprouve une réduction considérable lorsqu'elle est appelée à fonctionner sous pression; les net- toyages doivent donc être fréquents : mais, comme chaque bougie doit être démontée pour subir cette opération, elle estexposée au bris ou à la fêlure, malgré tous les soins qu’on peut y apporter, et les filtres ainsi constitués exigent une surveillance toute spéciale du personnel supérieur des services d'hygiène dans les grandes agglomérations (casernes, lycées, etc.), sous peine de n’obtenir qu'une sécurité trompeuse. Ces inconvénients ne pouvaient être évités que par un nettoyage mécanique exécuté d’une manière assez souple pour supprimer les dangers de bris ou de fêlure et sans nécessiter le démontage des corps filtrants. Ces desiderata sont complètement réalisés à l’aide du net- toyeur mécanique inventé par M. 0. André, ingénieur- constructeur. De plus, un dispositif très simple permet de s’assurer à tout moment de l’état de chaque bougie et d'isoler, au besoin, toute bougie suspecte, sans inter- rompre le travail des autres. Les figures 1, 2 et 3 représentent un de ces appareils appliqué sur un filtre à vingt-cinq bougies Chamber- land pour les grands débits et fonctionnant sous pres- sion. Les bougies B sont disposées en cercles concen- triques et fixées, par le bas, sur un plateau de fond, à laide de tétons en bronze b : la jonction entre les tétons et les bougies s’effectue au moyen de tubes en caoutchouc serrés par deux petits colliers. On fixe la partie supérieure des bougies par une calotte en caout- chouc, surmontée d’une pointe en ébonite, qui s’en- gage dans le trou correspondant d'un anneau métal- lique N. Le montage ainsi réalisé est assez élastique pour permettre d'exercer sur les bougies un brossage énergique sans les exposer à la casse ou à la fèlure. L'eau filtrant de l'extérieur à l’intérieur des bougies, celles-ci déversent leurs jets dans un collecteur E, qui pendant le fonctionnement est appliqué contre le pla- teau de fond par des boulons à oreilles. En faisant ce collecteur en verre, on peut se rendre compte, à l’ins- pection des jets, de l’état de chacune des bougies. Si un jet trop abondant rend l’une d’elles suspecte, il suffit pour l'isoler de démonter le plateau et d’obturer le téton correspondant à l’aide d’un petit bouchon à vis. L'isolement des bougies suspectes peut ainsi se faire à tout moment, sans démonter l'appareil et par suite sans interrompre son fonctionnement. ; Le nettoyeur est constitué par une sorte de peigne T£,- dont les dents sont représentées par des tubes verti- caux f, fermés à leur bout inférieur, percés latérale- ment de petits trous, et interposés entre les cercles de bougies, Chacun de ces tubes porte en outre une série de petits frotteurs élastiques h en forme d’Y. La branche verticale du nettoyeur s'engage dans le presse-étoupes central du plateau de fond, Elle se prolonge à la partie supérieure par une tige filetée K passant par l’écrou Q du couverele et recevant la manivelle M. La paroi infé- rieure du tube central est percée d’une couronne de trous Z, qui se démasquent pendant que le filtre fonc- tionne (la vis est alors en haut de course), et qui dispa-" raissent dans le presse-étoupes dès que le nettoyage commence. Pour cette opération, on donne, après avoir vidé appareil, plusieurs tours de manivelle dans les deux sens : les frotteurs, grâce au mouvement hélicoïdal dont ils sont animés, touchant successivement tous les points des bougies, qui sont ensuite rincées par les jets cinglants sortant des tubes f. ie Toutefois le brossage par les frotteurs souples ne CHRONIQUE 399 suffirait pas pour obtenir un nettoyage complet : il tendrait plutôt à étaler à la surface des bougies les matières glaiseuses déposées par l’eau. Pour éviter cet inconvénient, on jette dans le liquide même à filtrer des grenailles de liège, qui viennent, sous l'impulsion communiquée à l’eau par la rotation du nettoyeur, rouler entre les branches des Y et la surface des bou- gies. Un tamis P', placé au-dessus du presse-étoupes P, sisseur, Les impuretés de l’eau se déposent sur cette gaine, et le tout s’enlève beaucoup plus facilement sous l’action du nettoyage, que si les impuretés et en particulier les matières glaiseuses contenues dans le liquide, étaient appliquées directement sur les bougies par la pression qui règne dans l’appareil. La figure #, reproduite d’après une photographie, repré. sente les bougies dans les divers états qu’elles présen. Fig.£.Coupe d'un filtre faisant voir le montage et les différents états des bougies Bougie après Bougies enrobées par la poudre d'entretien après cinq minutes nettoyage. de marche. Bougie en cours Bougie de nettoyage Bougies encrassées après rIncée . — 15 heures de filtration. | ee | | al | | Do F3 |] || [hi E | [ {! | | Lil | || | 1 || £ || -|.K | | dis ‘1h £e | . : # (ma || ni = | |: EE | | | LEE ll | à | | { (ll! f IL || HET. ï Il [| PAL EH Lun ET ml y | je TI| - N— | -Æ = [d | \ TT | | /7\|\\ mu - = & Ÿ SX SENS RES ERSSS RK = À SK À à N S Obluration dune tubulure Montage de la tubulure dans par une Vis. Le plateau inférieur . Fig. 4. et un autre », à l'entrée du tuyau de vidange V, arrêtent les grenailles lors du nettoyage. On arrive ainsi à brosser et rincer très convenable- ment les bougies; mais ces opérations sont insuffi- santes pour retrouver le débit initial que fournissent les bougies vierges. M. André à rempli cette dernière condition, qui est le critérium du parfait nettoyage, en constituant auto- matiquement, sous l'influence de la pression qui existe dans l’appareil, une gaine perméable sur la surface des bougies. Il introduit, à cet effet, après chaque net- toyage, une quantité très faible (15 à 20 grammes) d'une poudre inerte (silice pure), qui vient enrober les sur- faces filtrantes et constitue ainsi une sorte de dégros- tent pendant la filtration, au cours du nettoyage el après l'opération. Le diagramme ci-joint, fig. », permet de se rendre compte des résultats obtenus par les perfectionne- ments successifs apportés au système de nettoyage des bougies. Il est établi de la manière suivante : les or- données représentent le nombre de secondes au bout duquel on peut obtenir 4 litre d’eau dans un filtre de 25 bougies avec une pression uniforme de 20 mètres, et les abscisses, les temps, comptés en quarts d'heure, aux- quels ont été faits les essais. Ainsi, par exemple, la courbe E montre qu’au début de l’expérience, il suffisait de 39 secondes, mais qu’il | en fallait 120 après une heure et demie de travail pour 400 NOUVELLES recuellir 1 litre d’eau filtrée, L'eau sur laquelle on à opéré est de l’eau de Seine prise dans la canalisation de la ville de Paris. Les courbes À, B, C,montrent combien le débit était relativement faible en 1886, 1888 et 1889, alors qu'on n'employait, pour le nettoyage, que les jets cinglants. Il augmente sensible- ment en 1890, au dé- ML et l'on peut affirmer que, grèce aux divers procédés décrits ci-dessus, le nettoyage est aussi parfait que possible, ag D'autre part la rapidité avec laquelle il peut être ef: fectué, et le retour immédiat des bougies au débit ini- lial donnent à l'appareil une souplesse de. débit des plus précieuses, Car il suffira d'augmenter le nombre des nettoya- but de l'opération, avec les frotteurs en caout- ges pour accroître la chouc (courbe D), et quantité d’eau fournie les frotteurs munis de par vingt-quatre heu- brosses (courbe E), mais le ralentissement res, et si l’on a besoin à un moment détermi- s'accentue très rapide- né d’un débit impor- ment; il en est encore de même avec l’adjonc- lant, sans employer de réservoir, On n'aura tion de cendres aux qu'à faire un nettoyage brosses (courbe K). En fait, le débit des quelques minutes au- paravant. Des expériences di- bougies nettoyées par ces moyens, est tou- jours inférieur, aussi rectes ont démontré d’ailleurs que l'usure bien comme quantité des bougies et des caoutchoucs est à peu que comme constance à celui des bougies neuves sans aucune près nulle après un tra- vail prolongé pendant addition (courbe K). Au contraire, la courbe G (nettoyage avec grenailles de liège et poudre) se rappro- che très sensiblement de la courbe K des bougies neuves. Enfin la courbe H des bougies neuves avec poudre el la courbe I des bougies nettoyées avec poudre el cendres se confondent sensiblement pendant trois heures et demie, et, à partir de ce moment, la seconde semble devoir correspondre à une plus grande cons- tance dans le débit que la première. L'influence de l'introduction des grenailles de liège et de la poudre inerte dans l’eau à filtrer, sur la cons- tance du débit, est donc établie d’une manière décisive, | plusieurs années. L'appareil nettoyeur de M. O0, André a fait l'objet d’un Rapport of- ficiel de M. le D' Netter au Comité consultatif d'Hygiène publique de France.Ce rapportcons- late Les avantages énumérés ci-dessus et que nous résu- mons brièvement: simplicité de fonctionnement qui per- met de le confier à des mains quelconques ; suppression des chances de bris et de fêlure des bougies; contrôle el isolement faciles de chacune d'elles sans interrompre le fonctionnement des autres; accroissement et sou- plesse du débit; usure insignifiante de l'appareil. G, A, RENEL, Ingénieur civil. NOUVELLES Nous avons le plaisir d'annoncer à nos lecteurs que notre éminent collaborateur, M. H. Moissan, à été élu lundi dernier membre de l'Académie des Sciences, en remplacement de Cahours. Aux termes du legs fait au Collège royal des physiciens d'Edimbourg par feu le D' John Parkin, membre du collège, un prix est offert dans les conditions sui- vantes, au meilleur essai : Sur les effets curatifs du qaz acide carbonique el les autres formes du carbone sur Le choléra, les diverses es- péces de fièvres, et les autres maladies. Le prix est de la valeur de cent livres sterling, el le concours est ouvert aux concurrents de toute nation. Les essais envoyés pour le concours doivent être ré- digés en anglais, et recus par le secrétaire au plus tard le 31 décembre 1892. Chaque essai doit porter une devise, et être accompagné d'un pli cacheté portant à l'extérieur la même devise et à l’intérieur lenom de l'au- teur. — L'auteur du mémoire couronné devra le publier à ses frais, et en présenter un exemplaire imprimé au collège dans l’espace de trois mois après que le prix lui aura été décerné. La Société française d'Hygiène avait mis au concours pour 1891 la question : Des soins à donner, avant Lar- rivée dut médecin, aux personnes victimes accidents sur les voies publiques où dans les travaux industriels. Vingt-sept mémoires, tous très bien exposés, ont été envoyés au Concours, La Commission du jury d'examen, présidée par M. le professeur Peter, vient de décerner les récompenses suivantes : MÉDAILLES DE VERMEIL Dr A.-F, Puicour, médecin-adjoint de la Compagnie du Nord, ancien interne des hôpitaux, (n° 7). M. Henri C. Boupaizze, externe des hôpitaux, ancien interne des Ambulances urbaines, (n° 19), MÉDAILLES D'ARGENT Dr A. Courrape, ancien interne des hôpitaux de Paris, à Thiers [Puy-de-Dôme], (n° 17). M. À. Quinarp, pharmacien de 1° classe, membre du Conseil d'hygiène de Beaune [Côte-d'Or], (n°3). MÉDAILLES DE BRONZE Dr Marco Vexanri, à Florence [llalie!, (n°2#). D' SéJourxer, lauréat de l'Académie de médecine, à Revin [Ardennes], (n° 12). DT ©. Sanru, à Paris, (n° 6). M. H.-B. LArENAUDIE, élève en pharmacie, à Tulle [Cor- rèze], (n° 23). Dr Luigi GAsPArINI, à Gannaziga, province de Bergame [Italie], (n° 9). Le Directeur-Gérant : Louis Ocrvier Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 2e ANNÉE N° 12 30 JUIN 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LES ORIGINES DU TRAIT DE PERSPECTIVE PIETRO DELLA FRANCESCA ET SON ÉCOLE: ALBERT DURER ET COMMANDIN Les anciens se sont beaucoup occupés de Ha science générale des aspects (oplicus, ars benè videndi, .….…), mais ils ne nous ont rien laissé sur le problème qui consiste à construire graphiquement la perspective linéaire d’un objet, élant données les positions relatives de cet objet, du tableau et du point de vue. Il faut arriver jusqu'au milieu du xv° siècle pour rencontrer la première solution exacte de ce problème. On attribue cette solution à Pietro della Francesca qui, né en 1399 au bourg du Saint- Sépulcre, en Toscane, décora le palais d'Urbin et peignit au Vatican des fresques que remplacèrent un peu plus tard celles de Raphaël. Ses tableaux. parmi lesquels on cite particulièrement une Æésur- rection et un Songe dé Constantin, étaient fort appré- ciés de ses contemporains; on y admirait surtout de savants effets de raccourci et une habile distri- bution des clairs et des ombres. Vasari nous apprend que Pietro avait, dans sa vieillesse, composé, sans les publier, plusieurs livres intéressants sur la géométrie el sur la pers- pective, et qu'après sa mort, en 1484, ces écrits tombèrent entre les mains d'un disciple indélicat, Fra Lucas di Borgo, qui se les appropria el osa les faire imprimer sous son propre nom. Cet ouvrage. où l’on remarquait, dit-on, plusieurs figures gra- vées d'après des dessins de Léonard de Vinci, esl devenu très rare, et, en réalité, nous ne connais- sons les tracés de Piétro et de son école que par les productions du chanoine Vialor et de l’archi- tecte Serlio. REVUE GÉNÉRALE, 1891. Avant de faire connaitre ces tracés, il convient, pour les rendre intelligibles et pour éviter des redites fastidieuses, de donner quelques définitions, d’ailleurs fort simples. [ Nous désignerons par OX le bord horizontal in- férieur du tableau (fig. 1), par OZ le bord vertical 2 H E P- | ST 2 4] | A nil Hi} PU) m | M | TL | LE LES | = RE Z LA / { DS LTÉE ECTS (CAE j Ô Fig. 1. de gauche el par OY la perpendiculaire au tableau élevée par le point O et située en arrière de ce plan. M, étant un point quelconque de l’espace, nous appelerons respectivement largeur, éloignement et hauteur les coordonnées Ou, pm,, m, M, de ce point par rapport aux trois axes rectangulaires OX, OY, O7 ; il est clair que, pour mettre un objet en pers- pective, il faut connaitre les coordonnées d'e chacun 12 102 E. ROUCHÉ. — LES ORIGINES DU TRAIT DE PERSPECTIVE de ses points. De plus, comme la perspective d’un point M, est la trace M sur le tableau du rayon visuel VM, qui joint l'œil V du spectateur au point | considéré M,, il faut aussi connaître les coordon- nées de l'œil par rapport aux mêmes axes, ou, ce qui revient au même, la projection orthogonale P du point de vue V sur le tableau, ainsi que l'éloi- gnement PV de ce point de vue, On donne au point P le nom de point principal, à l'éloignement PV le nom de distance. el à l'horizontale HH' du tableau. menée par P, le nom de ligne d'horizon. Enfin on ap- pelle point de distance le point À que l'on obtient en portant sur la ligne d'horizon à partir du point P, du côté de ce point où on a le plus de place, une longueur PA égale à la distance VP. Il Ces préliminaires élablis, voici le trait de Piétro, tel qu'il est décrit, fort clairement d’ailleurs, mais sans explication théorique, dans l'ouvrage publié par Viator en 1509. Après avoir placé sur le lableau le point princi- pal P, la ligne d'horizon HH' el le point de dis- tance À (fig. 2), on porte, à partir du point O, H' Des km 9 Fig. sur Ja base OX du tableau, la largeur Op, puis à la suite l'éloignement y», da point M, que l’on veut mettre en perspective. On joint l'extrémité p de la largeur au point principal P, et l'extrémité », de l'éloignement au point de distance A. L'intersection m des droites pP et »,A est la perspective, non pas du point considéré M,, mais (fig. 1) de sa projec- tion », sur le plan horizontal YOX qui prend le nom de géométral. Pour passer de la perspective » du point », (fig. 2), à la perspective M du point M,, on porte la hauteur en pn', à partir du point y, sur la verticale de ce point, et l’on prend l'intersection M de la verticale du point # et de la droite #'P. L’explication de ce trait est fort aisée de nos jours; elle résulte immédiatement de la notion du point de fuite d'une droit; on entend par là la perspective du point situé à l'infini sur la droite ; c’est par conséquent le point où la parallèle menée par l'œil à cette droile perce le tableau. Comme VP (fig. 1) est perpendiculaire au tableau et que VA est une horizontale formant avec ce plan un angle de 45°, on voil que le point principal P est le point de fuite de toutes les droites normales au a- bleau, et que le point de distance A est le point de fuite des horizontales inclinées à 45° sur le tableau et dirigées de gauche à droite ou de droite à gau- che suivant que le point A est à gauche ou à droite de P. Ces remarques faites, imaginons, par la pro- Jection horizontale m, du point considéré M,, deux droites situées dans le géométral, l’une x, per- pendiculaire à la base du tableau, l’autre », m, di- rigée de droite à gauche et faisant un angle de 45° avec cette base OX. La première, rencontrant le tableau au point , a pour perspective Py (fig 2); et la seconde, rencontrant le tableau en »,, a pour perspective À m,; l’interseclion » de Py el de À », est donc la perspective de #,. Quant à la perspective du point M,, elle doir appartenir à la verticale du point”, puisque les verticales restent verticales en perspective ; elle doit appartenir aussi à la perspective de la perpendiculaire abaissée de M, sur le lableau; or la perspective de cette droite est Pr’, puisque le point où le tableau ren- contre celte perpendiculaire a même largeur et mème éloignement que le point M,, et, par suite, n'est autre que le point »' défini dans l'alinéa pré- cédent. Certes, ces considérations sont fort simples! Mais si facile qu’elle nous paraisse, cette théorie n’est point celle qui a conduit au tracé de Piétro. Trop savante pour l’époque, elle suppose, sur les points de fuite, des notions qui ne devaient se faire jour qu'un siècle plus tard. Aussi bien, le trait de Piétro est trop parfait pour avoir été créé tout d’une pièce. Mais par quelle série de considérativns y est- on parvenu? Et surtout, comment le point de dis- lance s'est-il introduit indépendamment de la propriété dont il jouit d’être le point de fuite des horizontales à 45°? Telles sont les questions aux- quelles nous avons l'intention de répondre. Qu'on nous permette loutefois d’'ajourner un moment cette réponse; exposée prématurément, notre opinion risquerait de ne paraitre que plausible, tandis que l'étude préalable de l'ouvrage de Serlio fournira à notre thèse des arguments irrésistibles. LIT Serlio, né à Bologne en 1475, est mort en 1551 à Fontainebleau où il avait été appelé par Fran- cois I et où il a construit la grande cour du palais qui avoisine la pièce d'eau. Cet éminent architecte n'avait que fort peu de géométrie, ce qui, comme disait Pascal parlant du chevalier de Méré, est assurément Qun grand défaut ». Dans la partie de son livre qui concerne la perspective, Serlio ne fait que rapporter, el parfois d’une E. ROUCHÉ. — LES ORIGINES DU TRAIT DE PERSPECTIVE 103 manière incorrecte ou incomplète, les tracés en usage dans l’école de Pietro. Nous voulons seulement ici appeler l'attention sur le problème qui consiste à faire la perspective d’un carré horizontal vu de front. Le carré ainsi disposéestsanscontredit l'une des premières figures dont on ait cherché la perspective, d’abord parce qu'il se présente fréquemment dans la pratique, puis, parce qu'on l’emploie souvent comme figure auxiliaire à laquelle on rattache d’autres figures dont on simplifie de la sorte la mise en perspective. La solution est immédiate quand on sait que Les points de distance sont les points de fuile des hori- zonlales à 45° et par conséquent des diagonales du carré ABCD placé comme nous le supposons. ab étant (fig. 3, la perspective donnée du côté de front antérieur, il suffil, après avoir tiré Pa el Pb, de mener & À qui, par sa rencontre avec Pb, donne la perspective « du sommet C opposé à A; la paral- lèle à «b menée par c fournit ensuite la perspec- tive d du quatrième sommet. Serlio procède autrement. Après avoir (tracé P« et Pb, il joint le point &, non pas au point À, mais à un point À obtenu en prolongeant «b d’une longueur bi égale à la distance et projetant le point : sur la Z | Lee TT2RDS ligne d'horizon HH'. Ce tracé est fautif; la figure abc,d, ainsi trouvée est bien la perspective d’un carré horizontal vu de front, mais pour un obser- vateur placé à la distance PX et non pas à la dis- tance bi ou PA. Il est vrai que dans un autre passage de son livre Serlio donne un tracé exact fondé sur l'emploi du même point À. Ce trait consiste (fig. 4) à prendre l'intersection & de A avec la perpendiculaire by abaissée par le point à sur la ligne d'horizon, puis à mener par ce point 6 la parallèle Ged à ab. Mais il se trompe ensuite lorsqu'il veut placer sur cd un nouveau carré situé en arrière du premier; il joint dh el, par l'intersection ' de dx avec by, il mêne B'ef parallèle à ab. Pour montrer que la construction du premier carré ABCD est juste et que celle du second CDEF est fausse, proposons-nous le problème suivant: Élant donnés (fig. 3) le point P, le point de dis- lance À,une horizontale de front 4b et une perpen- diculaire yo à la ligne d'horizon HH', trouver sur HH' un point À Lel que, si l’on tire Pa, Pb, «à, et si, par l'intersection 6 de wy el de &k, on mène fred parallèle à 4b, la figure «bed soit la perspective d’un carré horizontal. On obtient le point cherché À en construisant d'abord la perspective abed du earré ABCD à l’aide z | | ! 1 P Y A HN | 11 Î | ai Nue | | EU | | ñ | a PAM FACE = === |, Fig, 5 de la perspective 4A de la diagonale AC, puis en prenant l'intersection & de de et de ÿw et menant ab. jusqu’à sa rencontre avec HH”. Or la figure donne les proportions : HN fes On EN HTC) CT d'où résulte la formule : qe Fès PTE Donc, si aw = ab, on a À — PA, ce qui justifie le tracé de Serlio pour le premier carré «bed. Mais si aw est plus grand que ab, yÀ sera plus grand que PA, ce qui prouve la fausseté du trait relatif au second carré cdef, car alors df étant supérieur à de (fig. 4), ÿh devrait être supérieur à PA, tandis qu'il lui est égal dans le tracé de Serlio. IV D'après ce que nous venons de voir dans l’ou- vrage de Serlio, il existait dans l'École de Pietro, à côté du trait indiqué par Viator pour la pers- pective du carré, un autre trait classique d'une exactitude incontestable, Dans l’un on fait inter- venir le point de distance A; dans l’autre on emploie un autre point À de la ligne d'horizon, De ces deux traits que nous désignerons respeclive- ment par (A) et (X), quel est le plus ancien? C'est E. ROUCHÉ. — LES ORIGINES DU TRAIT DE PERSPECTIVE assurément le trait (à). On ne saurait avoir le moindre doute à ce sujet: quel savant ou quel artiste, une fois en possession du trait (A), l’eût abandonné pour un trait moins simple et fondé sur l'emploi d'un point ÿ moins accessible que A? Une seule conjecture est logique : on a rencontré le trait (A) en cherchant à simplifier la figure qui constitue le trait (à). La simplification saute d’ail- leurs aux yeux du géomètre le moins expert: c étant (fig. 6) la perspective du sommet C sup- posée construite au moyen du trait (À), si l'on B | / Na | ! | a ——, | Fig. 6. nomme A (fig.6)le point où 4 coupe HH', on à évi- demment, comme au $ II, les proportions : Toni GY CE IEP A He Te TT D'où l’on conclut que PA — yX, en sorte qu'il suffit, pour obtenir ce, de prendre l'intersection de P& et de la droite «A qui joint le point « au point de distance. La recherche de l’origine du trait de perspec- live se trouve dès lors réduite à celle de l’origine du trait (À). Or, imaginons qu'on prenne pour plans de pro- jJection orthogonale le tableau et un plan perpen- diculaire mené par la droite by qui se trouve ainsi la ligne de terre. Le point de vue V a pour projec- lions P et x, le point C a pour projections b et 4; le rayon visuel VC se projette donc sur le tableau suivant Pbetsur le plan perpendiculaire suivante? ; sa trace c sur le tableau est par suite, d'après une règle élémentaire, à l'intersection de la première projection P à du rayon visuelet dela ligne de rap- pel 84 du point $ où la seconde projection a4X du même rayon visuel rencontre la ligne de terre by. On tombe donc immédiatement et naturellement sur le trait (À) en cherchant à résoudre le pro- blème de la mise en perspective d’un point par l'application du #rait de stéréotomie. Comme ce dernier trait remonte sans contredit à l’antiquité la plus reculée, l'idée de l'appliquer au problème de la perspective devait s'offrir la première, el de cette conception à l'exécution il n’y avait qu'un pas, bien aisé à franchir, pour un artiste un peu érudit. Telle est, sans nul doute, l’origine du (rait de Pietro. Si, malgré tout, cette opinion trouvait encore quelques esprits rebelles, l'histoire de l'École qui a suivi celle de Pietro serait éminemment propre à dissiper toute hésitation. Les deux principaux représentants de cette seconde École sont le cé- lébre peintre et graveur Albert Durer de Nurem- berg (1471-1528, et le chevalier Commandin d'Urbin (1509-1575), le savant commentateur d'Eu- clide, d'Archimède et d’Apollonius. Nous allons, pour compléter notre démonstra- lion et terminer cette étude, montrer avec quelle dextérité ces deux savants maniaient le trait de stéréotomie, avec quel succès ils l’ont appliqué au problème de la perspective, et enfin de quelle manière Commandin est parvenu à en déduire directement le trait (A) sans passer par le trait (À. V Un objet étant donné par un plan el une éléva- tion, que sépare la ligne de terre LT (fig. 7), imaginons qu'on ait marqué sur l’épure la trace horizontale 0, x, du tableau ainsi que les projec- tionsv et v' du point de vue.La perspective d’un point LL Fig. Tet8. quelconque {m,m') est l'intersection {n,,n") du rayon visuel (em, v'm') el du plan vertical 0,x, ; mais on n'a de la sorte que les projections de la perspec- tive, Llandis qu'on veut la perspective elle-même. Or, on la construit à partsans difliculté, puisqu'on a les deux coordonnées 0, , etvn' du point (2,7!) par rapport au bord vertical de gauche OZ et à la base OX du tableau. On tracera sur une figure séparée fig. 8), les bords OX, OZ du cadre en prenant OX — 0,,; puis on portera sur OX, la largeur On — on, et, sur la verticale du point n, la hauteur nN =vyn'. Le point N sera la perspective de (m,m'). Telle est, dans loute sa généralité, l'application du trait de stéréotomie à la perspective. Voici maintenant les dispositions particulières adoptées par Albert Durer et par Commandin. Albert Durer, au lieu d'employer une élévation quelconque, prend pour plan vertical de projec- tion le plan vertical mené par l'œil perpendiculai- rement au tableau, le plan horizontal de projection E. ROUCHÉ. —- LES ORIGINES DU TRAIT DE PERSPECTIVE 405 étant toujours le géométral. Les figures 9 et 10 sontrelatives aux perspectives AA, et AB, d’un bâton vertical et de son ombre sur le sol; etes s'expli- quent d’elles-mêmes après ce que nous avons dil ei dessus :(s,s') est le point lumineux, (@,a'a',) le bâton, ox le tableau, qui est ici de profil; enfin. (v, v') est le point de vue, situé dans le plan verlical de projection. Après avoir déterminé, sur Fis. 9 et 10. la figure 9, l'ombre « b ainsi que les intersections du lableau et desrayons visuels aboutissant aux points (a, a')(«, a’,) (b, b'), on passe à la figure 10; on prend ox, 04, 08 respectivement égales aux longueurs qui portent les mémes noms dans la figure 9; puis on mène des parallèles à LT par les points f',2. detc. La disposition de Commandin est la même; seu lement, au lieu de transporter le tableau ailleurs. il le fait tourner autour de la verticale T, jusqu’à ce qu'il coïncide avec le plan vertical de projection. La figure 1 renferme les tracés relatifs à la perspec- tive du point quelconque (4, a'). (v, v') est le point de vue, (va, v' a') le rayon visuel du point («, a), v ul S ' SL [ 0 ESS | ! = le A i i PROS ï \ « “ i ‘ 0 l i ne 5 ï DEEE EE See ! En JS | hi SEC L [14 i oi Fis. 11. enfin (x, à') l'intersection de cerayon el du tableau ox. Par l'effet de la rolalion du tableau autour de la verticale du point T,le point (4, x') vient au point À, qui est la perspective demandée. Il ne nous reste plus qu'à montrer comment de ce tracé peul résulter le trait (A) de Pietro, c'est-à-dire comment s'introduisent le point prin- cipal et le point de distance. Bornons-nous, pour abréger, comme nous l'avons fait aux $$ ur el 1v, à considérer un point a du géométral, ce qui d’ailleurs est le cas essentiel pour notre objet. (x, a!) est la trace du rayon visuel (va, v'a' sur le tableau ox qui est ici de profil (fig. 12). Dans la rotation du tableau autour de la verticale du point T, o vient en 0, x en æ,, el (a, a') vient en un point À qu'on obtient en décrivant le quart de cercle x 4, et prenant l'inter- section de la verticale du point 4, avec la parallèle à LT menée par &!, Traçons actuellement sur le géométral l'éloigne- ment 4e du point 4 et par suite sa largeur o. Le D i ' Î in i : ere. AA I v Tr a; ‘5 a LU: Y DA rreene ï ; cé — JR DE Rig 12; plan passant par le rayon visuel du point æet par la droite &e a pour trace verticale #'P. Done les points P,A,cesont dans l’espace sur une même ligne droite, intersection du plan considéré et du tableau. Par suite, ces points sont encore en ligne droite après la rotation ; en d’autres (termes, c, étant l'in- lersection de PA et de LT, on a Te, — Te. Mais si désigne le point commun à LT et à v'A, on voit que a'-est égal à Te, puisque le rapport de chacune ces deux lignes à Aa' est égal au rapport des dis- lances de LT et de z'A à leur parallèle commune v'P. Dela relation a'+ —Te,, on déduit d’ailleurs CIV-D C> Cela posé, on voit que À est déterminé par la rencontre des deux droites Pe,,v'7 que l’on obtient de la façon suivante : la première Pc, joint le point principal P à l'extrémité e, de la largeur 0, e, —=0c; la seconde ?'- unit le point de distance v' à l’extré- mité + de l’élo‘gnement c,=— ac, après qu'on a porté cet éloignement à la suite de la largeur. On reconnait le tracé (A); et ainsi se trouvent confirmées nos assertions sur l’origine du trait de perspective et sur l'heureux parti que des artistés distingués savaient, trois siècles avant Monge, tirer de la doctrine des projections orthogonales. n Eugène Rouche. Professeur au Conservatoire des Arts et Métiers, Examinateur de sortie à l'Ecole Polytechnique. 406 A. DE LAPPARENT. — LA FORMATION DE LA CRAIE PHOSPHATÉE EN PICARDIE LA FORMATION DE LA CRAIE PHOSPHATÉE EN PICARDIE L'une des trouvailles les plus intéressantes, el en mème temps les plus fertiles en conséquences pra- tiques, dont se soit enrichie récemment la géolo- gie du Nord de la France, est la découverte des gisements phosphatés dela Picardie. Sans doule, Buteux, auteur de l'Æsquisse géologique du départe- ment de la Somme, avait, dès 1849, signalé la pré- sence, à Beauval, d’une craie grise avec petits grains de phosphate. Plus tard, en 1853 comme en 4867, cette indication avait été précisée par M. N. de Mercey, à qui la portée industrielle du gite n'échappait en aucune facon. Mais on ne soup- connait pas alors la vraie valeur du sable superposé à la craie de Beauval, sable depuis longtemps ex- ploité pour la briqueterie, et confondu par les géo- logues avec les sédiments sableux du terrain ter- tiaire inférieur. C’est seulement en 1886 que les recherches de MM. Merle et Poncin établirent que ce sable était formé principalement par du phos- phate de chaux, dont il pouvait renfermer jusqu’à 80 °/,. Alors naquit en Picardie ce qu'il est permis d'appeler la fièvre des phosphates. Tandis que les terrains de Beauval acquéraient, du premier coup, un prix presque fabuleux, on se mettait, de tous côtés. à la recherche de gisements analogues, et l'on finissait par en découvrir un certain nombre, tant dans la Somme que dans l'Oise et même dans le Pas-de-Calais. En même temps que ces trouvailles devenaient la source de fortunes inespérées, elles faisaient faire un grand progrès à la géologie du Nord de la France, en apprenant à y reconnaitre, au milieu du terrain de craie blanche, la présence de termes supérieurs, qu'on ne s'était pas attendu à y trouver aussi développés, du moins sur les rives de la Somme et de l’Authie. Notre intention n'est pas de décrire ici ces gise- ments. Nous dirons seulement qu'il est unanime- ment reconnu, conformément aux idées que M. N. de Mercey à professées le premier, que tous les dépôts de phosphate appartenaient originairement à la base dela craie Belemnitella mucronata, cet étage supérieur de la craie blanche parisienne, dont la localisation commencait à se prononcer dans un bassin bientôt destiné à une émersion presque complète. Formés à l'état de craie grise, c'est-à-dire contenant de petits grains disséminés de phosphate de chaux, les gisements ont subi plus tard des ac- tions chimiques qui ont partiellement dissous la craie, ne laissant subsister qu'un sable phosphaté, le sable riche, ainsi concentré dans certaines poches privilégiées du terrain sous-jacent. Laissant de côté | le détail des phénomènes qui ont pu déterminer cette dissolution et cetle concentration, occupons- nous seulement de l’origine première des gisements. c'est-à-dire du mode de formalion des craies phos- phatées de Picardie. M. N. de Mercey admet ! que des sources mi- nérales, amenant des eaux phosphalées, sont ve- nues, à travers les fissures de la craie blanche, jus- que dans la mer où se formaient les dépôts à bé- lemnitelles, et que le phosphate de chaux ainsi produit s’est isolé en petits grains dans la masse du dépôt. Il voit une confirmation de son hypo- thèse dans l'alignement de la plupart des gise- ments sur des lignes droites qui, pour lui, sont des directions de fissures ayant livré passage aux émissions internes. Contrairement à celte théorie éruptive ou toul au moins thermale, M. Cornel ?, qui a beaucoup étudié les craies phosphatées de la Belgique, sup- pose que ces formations résullent de la décompo- sition d'amas de petits poissons, comme ceux qui se forment de nos jours sur les côtes méridionales d'Arabie. Tout près de cette manière de voir doit être rangée celle de M. Ortlieb *, attribuant à la craie phosphatée une origine analogue à celle du guano, lequel résulte, comme on sait, d’une accumulalion de déjections d'animaux et prinei- palement d'oiseaux. Enfin, un ingénieur qui a pris une part active à l'exploitation des phosphates des environs de Doullens, M. Lasne ‘, a proposé récemment une théorie purement chimique, qui repousse aussi bien l'intervention des phénomènes éruptifs que celle de la vie organique. Les analyses de M. Lasne lui ont permis de constater que le fluor, qu'on avait jusqu'alors négligé de rechercher, existe dans tous les phosphates de la Somme, et que, de plus, la proportion du fluorure de calcium à l'acide phosphorique y est constante, les équivalents des deux corps s'y trouvant dans la proportion de 1 à 3. Or cette proportion est précisément celle qui est réalisée dans le fluophosphate de chaux. minéral, si répandu, sous le nom d'apatite, dans la plupart des roches d’origine interne. Partant de cette observation, M. Lasne imagine que, lors du dépôt de la craie grise de la Somme, des fleuves d’une grande puissance débouchaient Re | Bull. de la Soc. géol. de France, 5° série, XV, p. et Comptes rendus, CV, p. 1135. 2 Bull. Acad, royale de Belgique, 3° série, XI, n° 6. 3 Annales de la Soc. géol. du Nord, XVI, p. 270. 4 Bull. de la Soc. géol. de France, 3° série, XVIIL p. 441, 119. A. DE LAPPARENT. — LA FORMATION DE LA CRAIE PHOSPHATÉE EN PICARDIE 407 dans la mer après avoir dissous, à l’état d’eau chargée d'acide carbonique, dans la traversée des terrains anciens, une notable quantité de fluophos- phate de chaux. Arrivées dans la mer, ces eaux auraient perdu leur acide carbonique, le fluo- phosphate se serait précipité, surtout au contact des carapaces calcaires de globigérines et autres foraminifères, qui tombaient alors en pluie con- tinue de la surface sur le fond. Il faut maintenant choisir entre les Lrois théories qui viennent d'être brièvement exposées. Celle de M. de Mercey semble devoir être de prime abord écartée. Non seulement il n'existe, dans la nature actuelle, aucun exemple d'émission thermale phos- phatée; mais on ne comprendrait pas comrent des sources de ce genre, venant d’une grande profondeur, n'auraient exercé aucune action sur la craie blanche et les autres terrains qu’elles étaient obligées de traverser, avant de déboucher sur le fond de la mer à bélemnitelles. D'ailleurs la localisation des dépôts en files rectilignes, locali- sation que l'auteur de l'hypothèse invoque comme la preuve d’une ligne de fracture, s'explique sans peine, si l'on réfléchit, d'une part, que la mer de cette époque a pu occuper des dépressions plus ou moins parallèles, qu'un phénomène orogénique venait alors de faire naitre dans son substratum crayeux, jusque là si uniforme; d'autre part, que ces dépressions linéaires ont dû être accentuées par la suite, lors des plissements qui ont affecté la région parisienne, et qui sont si bien mis en évi- dence sur la carte publiée par M. G. Dollfus dans un des derniers Bullelins du service de la carte géolo- gique de France. Par suite de ces dislocations, les dépôts de craie à bélemnites, par lesquels se ter- minait la série crayeuse, ont dû être portés, dans les plis convexes ou anticlinaux, à des hauteurs telles que les érosions subséquentes les ont fail disparaître. Ce n’est que dans l’axe des plis convexes ou synclinaux que ces dépôts ont pu être conservés, et parce que ces plis ont une allure sensiblement rectiligne, il n’est pas surprenant que lesgisements de phosphaltes riches forment aujourd’hui des files assez régulières. Quant à l'hypothèse de M. Lasne, qui imagine. lors du dépôt de la craie à bélemnitelles, des fleuves « roulant un volume d’eau d’une puis- sance incomparablement plus grande que nos cours d’eau actuels, mais à faible pente et sans doute assez limpides », elle suppose, de la part des agents habituels d’érosion, ce que nous ap- pellerons une complaisance difficile à concéder. L'auteur ne répugne pas à concevoir des eaux capables, grâce à leur quantité, de dissoudre. dans la traversée des massifs anciens dela France. plus de fluophosphate qu'à aucune autre époque, et consentant, néanmoins, à garder un régime assez tranquille pour n’emporter jamais avec elles de sédiments détritiques; car telle est la condition essentielle de la formation des dépôts crayeux. Les débris transportés n’y jouent qu’un rôle négligea- ble, formant à peine deux ou trois centièmes de la masse. Sans doute, comme on l’a bien montré récemment, la craie n’est pas un dépôt de mer profonde; mais c'était assurément un dépôt de mer tranquille, et les circonstances devaient être telles, que la puissance de transport des eaux continen- tales fût réduite à son minimum. Or, partout cette puissance se montre en rapport avec le volume des eaux, et c’est une supposition inadmissible que de vouloir isoler les deux éléments pour le besoin de la cause. Le régime des mers à bélemnitelles n’a différé de celui des mers précédentes de la craie blanche que par une moindre extension des surfaces re- couvertes par les eaux marines. Mais ces eaux sont demeurées limpides, exemptes d’apports des terres voisines. Il n’y a aucune raison de leur attribuer une richesse en phosphate dissous su- périeure à celle qui les caractérisait aux époques antérieures, comme il nv à non plus aucune preuve géologique de l'existence des fleuves ad- mis par M. Lasne. Bien au contraire, les premiers temps tertiaires nous laisseront voir, sur le bord des mers, de grands espaces, tantôt envahis par l’eau marine, tantôt reconquis par des lagunes d'eau douce ou saamäâtre, et qui attestent com- bien. sur toute cette bordure, le relief devail encore être indécis. En ce qui concerne la constance des rapports de quantité, entre le fluorure de caleium et l'acide phosphorique, même dans les granules de phos- phate de la craie grise, elle ne prouve qu'une chose, c’est la régularité avec laquelle se mani- feste l’affinité chimique de ces deux corps, lors- qu'ils sont mis en présence dans un milieu propre à leur combinaison. Il n’en résulte nullement que la mer ait contenu des provisions toutes faites de fluophosphates, ni surtout que ces provisions dérivent de l’apatite, l'un des corps les moins so- lubles qu'on puisse rencontrer. En définitive, le tort commun des deux hypo- thèses de MM. de Mercey et Lasne nous parait être d'envisager les choses de trop haut, si l'on peut parler ainsi, et de ne pas tenir assez de compte des menus détails de la composition du dépôt de craie phosphatée. C'est à ces détails qu'il faut s'attacher, si l’on veut voir clair dans cette question, et c'est pourquoi nous saluons avec un intérêt particulier les études que viennent de pu- \ blier, dans le Bulletin de l'Académie royale de Bel- 408 A. DE LAPPARENT, — LA FORMATION DE LA CRAIE PHOSPHATÉE EN PICARDIE EE gique ‘, M. À. Renard, le savant professeur de l'Université de Gand, et M. J. Cornet, le même que nous avons déjà cité à propos des phosphates de la craie grise du Hainaut. Il ne s’agit plus ici de vues de l'esprit, plus ou moins vraisemblables, mais bien d’un examen microscopique délicat, poursuivi par des hommes d'une compétence re- connue, et à l'appui duquel les auteurs publient une série de dessins, bien faits, ce nous semble, pour entrainer la conviction. Si l’on soumet au microscope les grains de phos- phate de Beauval et d’Orville, on y reconnait très nettement un grand nombre de formes se rappor- tant à des foraminifères, des genres Globigerina, Textularia, Cristellaria, ete. La partie interne des grains montre d’une façon marquée tous les dé: tails de la structure et de l’arrangement des loges, respectés dans leur intégrité par la phosphatisa- tion. Ces moules, qui ont de 5 à 10 centiènres de millimètre, possèdent une surface brillante, due à un enduit de phosphate concrétionné, qui rem- place le test des foraminifères. Il est évident que le phosphate de chaux s’est déposé à l’intérieur de coquilles de rhizopodes calcaires, coquilles tombées sur le fond crayeux après la mort des petits animaux correspondants, qui occupaient es eaux de surface. A côté de ces grains s’observent des éléments, moins nombreux il est vrai, mais très constants et surtout très caractéristiques. Ce sont des fibres, des esquilles, des plaques déchiquetées, n'ayant qu'une fraction de millimètre, et où il est facile de reconnaitre, à de forts grossissements, la struc- ture du tissu osseux des poissons et des repliles. Enfin avec ces débris se montrent des dents mi- croscopiques de poissons, dont la forme et la structure ne peuvent laisser aucun doute. Ainsi voilà une série d'éléments organiques par- faitement constatés. Mais avec eux se rencontrent, en grand nombre, des grains de même dimension, de même couleur, qui, au premier abord, semblent dépourvus de toute structure ; cependant un exa- men plus attentif y découvre des traces de loges, ou des portions de contours de foraminifères ; si bien qu’en groupant les dessins de ces grains, on les voit passer, par une suite de transilions insen- sibles, aux grains de la première catégorie. Ils ont donc la même origine que ceux-ci: seulement des actions postérieures ont effacé en grande partie leurs caractères primitifs. Si l’on ajoute à cela des concrétions phospha- tiques, en couches transparentes déposées autour d’un noyau quelconque, el une grande quantité de particules extrèmement petites, qui se révèlent 1 Tome XXI, n° 2 (1891). comme des fragments très finement divisés des corps précédents, on aura tous les éléments qui composent la parlie phosphatée de la craie de Beauval. Empressons-nous d'ajouter qu'il n’est pas tou- jours indispensable de recourir au microscope pour faire ces constalations, el que certains gise- ments de la craie phosphatée de Picardie laissent parfaitement discerner à l’œil nu, avec les petites dents de poissons, la masse énorme des débris d’origine organique qui les constituent. Ges faits étant admis, on comprend sans peine qu'au lieu d'imaginer, soit un apport interne, soit un dépôt direct de l’eau de mer sans l'intervention préalable des êtres vivants, MM. Renard et Cornel aient été conduits à envisager la décomposition des organismes comme la source rmédiate du dépôt des concrélions. « Les débris d'êtres organisés el les produits phosphatés qui, sous la forme d’ex- créments, de tissus décomposés, viennent se mêler aux matières sédimentaires, subissent, longtemps même après le dépôt, les réactions chimiques qui s’accomplissent sous l’action de l’eau de mer ou des eaux infiltrées. Les matières phosphatées d'origine organique doivent, tout au moins au même litre, subir l’altération à laquelle n'échap- pent pas les substances auxquelles elles sont as- sociées. En admettant que le phosphate dissous soit doué de la propriété des corps colloïdes, on comprend qu'il soit faiblement retenu en solution et qu'il suffise qu'un centre de concrétionnement exerce son action pour le précipiter. » Ce concrétionnement autour de centres d’attrac- lion est d'ailleurs, on le sail, une des caractéris- tiques de la formation de la craie. C’est ainsi, par exemple, que se sont formés les rognons de silex, si fréquents dans cette roche. Là aussi, on a dû renoncer à l'hypothèse d'émissions siliceuses, contemporaines du dépôt de la craie, comme à l'idée d'une précipitation directe de la silice con- tenue en dissolution dans les eaux de la mer. Le microscope à montré que celle siliee avait passé, au préalable, par la forme de dialomées où algues élémentaires, ainsi que par celle de spicules d'épon- ges. Ces organismes délicats, après être Llombés sur le fond avec une pluie de rhizopodes aux cara- paces calcaires, se sont peu à peu séparés de ces derniers, par l’etfet d'une concentration molécu- laire, comme celle qui s'oppose à ce qu'une pâte hétérogène, qu'on cesse de malaxer, conserve longtemps une composition uniforme. Un frag- ment de coquille a généralement servi de centre de groupement. En s’accumulant autour de ce noyau, les spicules d'éponges et les frustules de diatomées se sont fondus les uns dans les autres, la silice qui les formail recouvrant une mobilité RÉ Éd Sc A. DE LAPPARENT. — LA FORMATION suflisante et c’est ainsi que le microscope a grand peine à en discerner la trace au milieu de la pâte, en apparence très homogène, des silex. Dans le cas de la craie phosphatée, les centres d'attraction ont été fournis par les foraminifères où autres organismes du milieu. Mais la prodi- gieuse quantité de pehts éclats d'ossements que contient la craie de Beauval donne à penser qu'a- vant d'arriver à leur disposilion actuelle, les grains de phosphate on dû subir un certain trans- port. Probablement, une riche faune se dévelop- pait près des rivages de la mer crélacée. Les pois- sons et les reptiles, par la décomposition de leurs tissus et de leur squelette, comme aussi par leurs excréments, formaient une source de matières phosphatées, qui, imprégnant la bouillie sédimen- taire, étaient destinées à s'agglomérer dans l'in- lérieur des organismes microscopiques. Ce mou- lage une fois fait non loin de la côte, les courants, les marées et les vagues, après avoir trituré les débris d'ossements, les entrainaient sans doute au large avec les concrétions, déposant le tout au milieu d’une vase crayeuse, en partie formée de globigérines, et au sein de laquelle la concentra- lion de la matière phosphatée pouvait encore se poursuivre en augmentant la dimension des no- dules. Telle est l'hypothèse, à la fois très simple, très rationnelle et très conforme aux faits observés, que proposent MM. Renard et Cornet. Cette con- ception offre le grand avantage d’être en parfait accord avec une observalion importante, que MM. Renard et John Murray ont élé amenés à faire, en étudiant les échantillons rapportés par la drague lors de la mémorable campagne sous- marine du Challenger. Us ont en effet reconnu que, le-long des côtes de l’Afrique australe, dans les parties où il n'existe pas de cours d’eau impor- tant, et où, par conséquent, la sédimentalion pu- rement marine n’est pas alimentée par des apports de débris venant du continent, il se dépose une vase calcaire avec menues concrétions, dont les unes sont de glauconie (silicate de fer et de potasse) et les autres de phosphate de chaux. En outre ces concrétions affectent la forme de moules internes de foraminifères. L'analogie est done complète avec ce qui se passe à Beauval et il n’est pas douteux que la source du phosphate ne doive être cherchée dans les substances, d’origine organique, qui imprègnent la vase en question. Un autre avantage de celte conception, c’est qu'elle s'applique aussi, au moins dans ses (raits généraux, à la formation de la craie phosphatée de Ciply, près de Mons. Elle convient également très bien aux grains de phosphate, mélangés à la glauconie, de la craie inférieure du Cambrésis, REVUE GÉNÉRALE, 1891. DE LA CRAIE PHOSPHATÉE EN PICARDIE 409 dont le cas paraït identique avec celui des boues littorales de l'Afrique australe. Quant aux gros nodules phosphatés des Ardennes, de la Meuse et du Boulonnais, s'ils se sont formés dans de tout autres circonstances, du moins l'intervention de la matière organique n'y est pas moins visible. Ces nodules sont disposés en cordons, attestant un ancien rivage où la mer rejetait toutes sortes de débris, coquilles, ossements et dents de reptiles ou de poissons, fragments de bois flottés. Tous ces corps, Sans exception, sont formés d’un mé- lange de carbonate el de phosphate de chaux avec une certaine proportion de fer. Des brachiopodes, des ammonites, des gastropodes ou des acéphalés, ilne reste plus que les moules, entièrement phos- phatisés. De gros nodules se révèlent au micros- cope comme d'anciens spongiaires imprégnés de phosphate. Et quand on voit, en assez grande abondance, au milieu de ces corps, des copro- lithes, c'est-à-dire excréments fossiles de Vertébrés, l'idée s'impose que l'accumulation, sur ces plages, d’une grande quantité de matières or- ganiques, empruntées à des animaux relativement supérieurs, a élé la cause délerminante de la for-- mation des nodules phosphatés, comme aussi la présence de nombreuses coquilles a déterminé le phosphate à prendre le moule interne des mollus- ques disparus. À la vérité, l’origine première du phosphate reste la même que dans la conception de M. Lasne. C'est bien l’apalite ou fluophosphate minéral qui, par sa décomposition, a dû fournir aux eaux marines et contineulales la substance que les ani- maux devaient plus tard en extraire pour constituer leurs squelettes et leurs coquilles. Répandu, à l'état microscopique, parmi toutes les roches éruptives, ce minéral y a subi le sort commun de tous ceux dont se compose l'écorce terrestre, et dont aucun n'est rigoureusement insoluble ni indécomposable. Mais, une fois la matière phosphatée dissoute, une simple précipitation n’a pas suffi pour lui faire reprendre la forme solide, et ila fallu l’interven- tion de la vie pour la lui rendre, tout comme il faut l’activité des végétaux pour reprendre à l'at- mosphère le carbone de l'acide carbonique et le fixer de nouveau, à l’état de combustible minéral. dans l'écorce solide. En vain dira-l-on que l'hypothèse d’une précipi- lation directe est plus simple. La simplicité est assurément une qualité, mais une qualité dont il ne faut pas abuser. Nous nous souvenons d’un géo- logue, distingué d’ailleurs, et qui, s'étant donné pour mission de réagir contre certaines théoriestrop compliquées, où l’on faisait trop volontiers interve- nir à Lout propos les influences éruptives, s’achar- nait à chercher, pour tous les faits, les explications des 197 410 D° G-H. ROGER — LE ROLE DU SÉRUM DANS L’'ATTÉNUATION DES VIRUS les plus simples. C’est ainsi qu'ayant reconnu, par de délicates analyses, qu'il y avait un peu de cuivre dans les eaux de la mer, el que ce cuivre tendait à se concentrer dans le sang des poissons, il admetlait volontiers que les gites cuivreux de l'écorce terrestre, au lieu de dériver d’émanations solfatariennes, devaient leur origine à la concen- tration d’une quantité suffisante de sang de poissons ! À nos yeux, ce serait tomber dans un excès du même genre que d'altribuer au phosphate dissous dans les eaux marines un pouvoir intrinsèque de précipitation. Si ce pouvoir existait réellement, les gisements de phosphate seraient bien autrement nombreux dans la nature qu'ils ne sont en réalité. En somme, les faits doivent seuls nous servir de guide dans l'interprétation des phéno- mènes. Or non seulement le monde qui nous LE ROLE DU SÉRUM DANS La virulence représente, pour les agents infec- tieux, une propriété contingente qui peut augmen- ter ou décroitre dans maintes circonstances, et par- ticulièrement par des passages à travers l’orga- nisme des animaux. On a l’habilude de dire que les inoculations successives ont pour effet d’exalter le pouvoir pathogène des microbes; d’une façon générale, cette proposition est vraie, mais, dans quelques cas, l'organisme est capable de dépouiller les microbes de leur action nocive. Les faits de ce genre, pour êlre peu connus, ne méritent pas moins de fixer l'attention; ils ont servi de point de départ à des travaux d’un certain intérèt. Mais il ne suflit pas de constater qu'un virus peut s’atténuer quand on l’inocule à un animal; on doit chercher à pénétrer le mécanisme de cette atlé- nuation. Sans doute, le problème est complexe el encore bien obscur; mais au milieu des causes multiples qui semblent intervenir, on est parvenu à en dégager une : c’est l’action qu’exerce le sérum sanguin sur le développement et les propriétés des microbes. Iles! démontré aujourd'hui que le sérum est doué d’un certain pouvoir antiseptique; il fait périr un grand nombre des bactéries qu’on y sème: celles qui se développent sont souvent modifiées dans leurs formes et leurs fonctions. Nous allons donc avoir à rechercher s’il existe un parallélisme entre l’action de l'organisme et celle du sérum sur la virulence des microbes. Pour mettre un peu d'ordre dans notre exposé, nous étudierons succes- sivement ce qui se passe chez les animaux qui n’ont entoure ne nous à pas encore offert un seul exemple de précipitation directe du phosphate, pas plus qu’il ne nous l’a fait voir sous la forme d'émissions thermales. Mais partout où le phos- phate minéral existe (en dehors des filons d’apa- tite cristallisée, bien entendu), c’est en association avec tout un indéniable cortège de manifestations organiques. À Beauval, en particulier, ces manifes- lations sont aussi caractérisées qu'elles sont pré- cises, et leur langage est absolument d'accord avec celui que tient la craie phosphatée de Ciply en Belgique. Tenons-nous en done à la traduction que viennent d'en donner MM. Renard et Cornet, et remercions-les d’avoir traité, par des méthodes aussi rigoureuses, une question où, avant eux, l'imagination se donnait un peu trop libre car- rière. A. de Lapparent. L'ATTÉNUATION DES VIRUS pas l’immunité, chez ceux qui sont naturellement réfractaires, chez ceux qui ont été vaccinés. I Presque toujours un virus s’exalle quand on l'inocule à un animal qui ne possède pas l’immu- nité. Cette exaltation peut ne se manifester que pour les animaux d'une seule espèce. C'est ainsi que M. Pasteur a établi que le bacille du rouget, inoculé en série à des lapins, devient de plus en plus pathogène pour les individus de cette espèce; mais en même temps il s’atténue pour le pore. On ne peut donc parler d'augmentation ou de dimi- nution de la virulence dans un sens absolu : il faut toujours spécifier dans quelles conditions on se place et sur quel animal on agit : un. virus, exalté pour une espèce, peut être atténué pour une autre. L'étude des modifications que peut subir la viru- lence de la bactéridie charbonneuse dans le corps et dans les humeurs des animaux, a conduit à quelques résultats fort curieux : ce microbe dont les propriétés nocives augmentent quand on l’ino- cule à des individus non réfractaires, peut s’atté- nuer quand on le sème dans leur sang. C'est Grohmann ‘ qui reconnut ce fait en apparence pa- radoxal : dans une thèse écrite sous l'inspiration de Schmidt, il montra que la bactéridie s’atténue 1 Gronmaxx. Ucber den Einfluss der zellenfreien Blut- plasma auf einige pflanzliche Mikroorganismen. Dorpat, 1884. D' G.-H. ROGER. — LE ROLE DU SÉRUM DANS L'ATTÉNUATION DES VIRUS A dans le plasma sanguin, et devient incapable de tuer le lapin.La question a été reprise par Fodor !, qui établit que le sang du lapin exerce sur l'agent du charbon une influence bactéricide très marquée, résultat qui a été confirmé par tous ceux qui ont continué celle étude (Nutttal, Nissen, Buchner, Charrin et Roger 2.) On arrive donc à cette conclu- sion tout à fait inattendue : la bactéridie charbon- neuse, semée dans le sang ou le sérum du lapin, végèle difficilement; inoculée au même animal, elle se développe avec rapidité et entraine la mort. Dès lors, nous dit-on, les propriétés bactéricides du sérum doivent être considérées comme des pro- priétés artificielles; elles ne se manifestent qu'en dehors de l'organisme vivant el sont peut-être dues à l’éclatement des leucocytes qui laissent diffuser la matière active contenue dans leur in- térieur. L'argumentation n’élait pas sans valeur; on pou- vait bien répondre queles propriétés bactéricides du sérum ne sont pas artificielles puisqu'elles s'observent quand on étudie les sérosités trans- sudées naturellement (Stern); mais il fallait, pour lever les doutes, une expérience décisive et cette expérience a été fournie par M. Pekelharing * : cet auteur enferme de petites quantités de cultures virulentes ou des fragments de rate charbonneuse dans des sacs de parchemin qu'il introduit sous la peau d’un certain nombre de lapins; il constate que, dans ces condilions, la bactéridie s’atténue el finit mème par périr. Le résultat est fort curieux, mais son interprétation peut paraitre difficile; étant donné que la bactéridie se détruit si aisé- ment dans l’organisme du lapin, on est conduit à se demander pourquoi son inoculation détermine des accidents et entraine la mort. vons une réponse à celle question dans l'im- portant mémoire que vient de publier M. Phisa- lix #. Si l’on introduit sous la peau d'un lapin un virus charbonneux atténué, qui ne tue plus cet animal, mais fait encore périr le cobaye en 48 heures, on constate que Les bactéridies s'accu- mulent dans les ganglions lymphatiques où elles peuvent végéter pendant 72 jours et plus. Seule- ment leur forme se modifie et leur virulence di- minue : reportées chez le cobaye elles ne détermi- nent plus qu'une maladie à marche lente, le char- Nous trou- l Fopor. Deutsche med. Wochenschr. 1881. — Neuere Unter- suchungen über die bakterientodtende Wirkung des Blutes. Centralblatt f. Balteriologie, 1890. ? CHarriN et Ro&er. Les propriétés microbicides du sérum. Gazette hebdomadaire, 1889. $ PEKELHARING. Ueber Zerstürung von Milzbrandvirus im Unterhauthbindegewebe des Kaninchen. Ziegler’s Beitrage zur path. Anal. Bd. NII. 4 Pwisaux. Nouvelles recherches sur la maladie charbon- neuse. Archives de médecine exp., 1891. } bon chronique, qui évolue en deux mois et même plus longuement.En se basant sur ce résultat el sur une série d'intéressantes expériences qu’il serait . trop long de rapporter ici, M. Phisalix arrive à con- clure que les cellules ne sont pas capables de dé- lruire les microbes; elles semblent au contraire les protéger contre l'influence nocive exercée sur leur vitalité par le sang et ses produits d’exsu- dation. Il Pour avoir une idée plus complète de l’atté- nuation des virus dans l'organisme des animaux, il faut s'adresser à des êtres doués d’une immunité ualurelle. Nous trouvons sur ce sujet une série de travaux poursuivis avec la bactéridie charbon- neuse et dont les résultats semblent, au premier abord, absolument contradictoires. Pour les uns, la bactéridie s'atténuerait dans le corps des ani- maux réfractaires, tels que la poule (OEmler), le pigeon (Kilt), le chien (Sadowsky), le ral Franck), la grenouille (Lubarsch, Petruschky), la limace (Karlinski); pour d'autres, au contraire. et nous citerons surtout les noms de M. Metchnikoft et de M. Malm !, il y aurait exaltation. Nous ne croyons pas, pour notre part, qu'on puisse en- glober tous les faits dans une formule unique ; il ne faut pas étendre à {ous les animaux naturel- lement réfractaires ce qui est vrai pour quelques- uns d’entre eux; ce serait admettre une simplicité qui n'existe pas dans la réalité; les résultats ob- tenus ne représentent que des cas particuliers qui attendent encore leur loi générale. C’est ainsi que les intéressantes recherches de M. Malm paraissent élablir que le charbon ne s’atténue pas chez le chien; mais il semble démontré aussi qu'il s’at- ténue réellement en passant par le rat blanc, et surtout par la grenouille. L’atténuation du charbon dans le corps de la grenouille a été élablie par Lubarsch ?. Cet auteur introduit des parcelles d'organes charbonneux dans le sac lymphatique dorsal de cet animal: le troi- sième jour, le charbon est moins actif : le sixième il ne tue plus la souris. Si l'injection est pratiquée dans une veine, les bacilles vont se réfugier dans les organes, particulièrement dans le foie et la rate et conservent plus longtemps leurs propriélés nocives. Petruschky % à vérifié ces faits et démontré que l'atténuation était due au sérum; car elle se pro- 1 Mazmw. Sur la virulence de la bactéridie charbonneuse après passage chez le chien et le lapin vacciné. Annales de l'Institut Pasteur, 1890. ? Lugarsen. Ueber Abschwächung des Milzbrandbacillen im Froschkürper. Fortschritle der Medicin, 1888 $ Perruscaky. Untersuchüngen über die Immunität des Frosches gegen Milzbrand. Ziegler's Beilräge zur Path. Anal. Bd. III. 412 D' G.-H. ROGER. — LE ROLE DU SÉRUM DANS L'ATTÉNUATION DES VIRUS duil également quand le microbe. est prolégé contre les phagocytes au moyen d’une membrane diffusible, qui ne laisse agir que les matières so- lubles. Dans ces conditions, au bout de deux jours, le charbon ne tue plus le lapin ; au bout de trois jours, il reste sans action sur la souris; enfin le quatrième jour l’ensemencement sur agar ne donne que quelques rares colonies. Pour compléter la démonstration, il fallait re- chercher comment la bactéridie se comporte quand elle se développe dans les humeurs de la grenouille en dehors de l'organisme. C'est ce qui a été exé- cuté, presque simultanément, par Ogata et Jasu- hara ! pour le sang et le sérum et par Sanarelli ? pour la lymphe.Ogata et Jasuhara ont reconnu que la bactéridie,semée dans le sang ou dans le sérum de la grenouille, reste sans action quand, au bout de deux ou trois jours, on l’inocule à la souris: le pouvoir antiseptique du sang de grenouille est tellement marqué, qu'il suffit d’en injecter une goutte à une souris pour mettre cet animal à l'abri de l'infection charbonneuse (Ogata et Jasuhara). D’après Karlinski?, le charbon s’attenue égale- ment quand on l'introduit sous les téguments de la limace, et cette atténuation se fait avec une rapidité vraiment extraordinaire : en reprenant, au bout de 20 minutes, le liquide injecté, on constate qu'il est devenu incapable de tuer le cobaye ou la souris, et que, semé sur des plaques, il ne donne qu'un petit nombre de colonies. Ces faits bien curieux mériteraient d’être étudiés à nouveau, et s'ils se vérifiaient, ils devraient conduire à re- chercher par quel mécanisme se produisent des changements aussi rapides dans la vitalité et les propriétés des microbes. Nous sommes mieux renseignés sur les modi- fications que subit la bactéridie quand on l’inocule à des rats blancs. Behring* a étudié avec soin les causes de la résistance de ces animaux à l'infection charbonneuse; il a reconnu que leur sérum ren- ferme une substance à réaction fortement alcaline qui entrave la végétation de la bactéridie et, d'après gala et Jasuhara, abolit sa virulence. Cette subs- lance a été isolée par Hankin * : c’est une matière albuminoïde, insoluble dans l’eau distillée et dans l’alcool. soluble dans l’eau salée et qui semble 1 Les recherches de Ogata et Jasuhara se trouvent exposées dans un article de LæœrrLer. Neuere Arbeiten über Immu- nisirungs bezw. Heïilungsversuchen bei Thieren gegenüber der Infection mit Milzbrand, Tetanus und Diphterie Bacillen. Centralblatt für Bakteriologie, 1894. 2 SanarEeLLI. La causa della immunita contro il carbonchio. La Riforma medica 1891. 3 Karcinski. Zur Kenntniss der Verbreitungswege des Milzbrandes. Centralblalt für Bakteriologie, 1889. 1 Benrixc. Ueber die Immunität von Ratten gegen Milz- brand. Centralblalt für klinische Medicin, 1888. 5 Haxkix. Ueber der schützénden Eiweisskôrper der Rate. Centralblalt für Bakteriologie, 1891. rentrer dans le groupe des globulines. Si l’on neutralise cette substance, par exemple si l’on injecte des solutions acides sous la peau, on voit que les animaux succombent quand on leur inocule le charbon; cette expérience, due à M. Behring, permet de comprendre comment le surmenage diminue la résistance des rats blancs au charbon; il est probable que les acides formés dans les muscles fatigués modifient la réaction du sérum et abolissent son pouvoir bactéricide. III Arrivons maintenant à l’atténuation des virus dans l'organisme et les humeurs des animaux rendus réfractaires par la vaccination ?. La première expérience, publiée sur ce sujet, est due à M. Metchnikoff *; ce savant sème la bac- téridie charbonneuse dans le sang de moutons ré- fractaires; le développement se produit; le sang est alors inoculé à dix lapins, à dosede 0,5 à1 c.c. ;neuf animaux résistent, un seul succombe. Voilà done une expérience où l’on voit l’atténuation survenir dans le sang, mais dans le sang lotal,-contenant encore ses éléments figurés : aussi M. Metchnikoff invoque-t-il, pour expliquer le résultat obtenu, une action des leucocytes ou de leurs produits de sécrélion. Quelque tempsaprès, M. Gamaleia # montrait que pendant la fièvre charbonneuse et dans les quatorze jours qui lui font suite, l'humeur aqueuse est modi- fiée : si l’on y sème du charbon, le microbe se déve- loppe sous des aspects nouveaux et perd une partie de sa virulence. Mais cet état bactéricide n’est que passager; il ne dure pas malgré la persistance de l’immunité. Bientôt d’autres expérimentateurs allaient sou- Lenir que, chez les animaux vaccinés, les microbes se détruisent rapidement, bien avant l’arrivée des leucocytes. Ainsi Emmerich et di Matter * injec- tent sous la peau de lapins vaccinés contre le bacille du rougel une culture de ce microbe; ils 1 Carr et Rocer. Contribution à l'étude expérimentale du surmenage; son influence sur l'infection. Archives de ply- siologie, 1890. 2 Comme l’a montré M. Bouchard (Revue générale des Sciences, 1890, p. 466) c’est dans le mécanisme de l’immunilé artificielle que les propriétés chimiques des humeurs jouent le rôle le plus important. « La guérison est la première ma- nifestation de limmunité. Les matières vaccinantes ontrendu possible la guérison en produisant l'état bactéricide, l'effet utile qui dure longtemps. C’est en effet cet état bactéricide qui constitue la vaccination ou l'immunité acquise. » Ibid. p. #15.) 3 MercuxiKorr. Sur l’atténuation des bactéridies charbon- neuses. Annales de FInstilul Pasteur, 1887. 1 GamaLela. Étude sur la vaccination Ibid., 1888. » Emmerten und p1 Marre. Untersuchungen über die Ursache der erworbenen Immunität, For{schrille der Medicin, 1888. charbonneuse, D’ G.-H. ROGER. — LE ROLE DU SÉRUM DANS L'ATTÉNUATION DES VIRUS A3 constatent que les bacilles succombent en 25 mi- nutes. Ce chiffre peut sembler prodigieux et l'on | serait tenté de croire à une erreur, si d’autres expérimentateurs n'avaient obtenu quelques résul- tats analogues; nous avons déjà cité les recherches de Karlinski sur l’atténuation des bactéridies dans le corps de certains gastéropodes; nous ajouterons que M. Charrin ‘, en opérant sur des lapins vaccinés contre la maladie pyocyanique, a constaté qu'au bout de 40 minutes les bacilles introduits dans le tissu cellulaire sous-cutané, ont notablement dimi- nué de nombre et que la fonction chromogène des | survivants est considérablement affaiblie. Toutes ces expériences portent à penser que, chez les animaux vaccinés, les propriétés bactéri- cides du sérum acquièrent leur maximum d’inten- sité : c'est ce qui a lieu en effet, et la démonstra- tion de ce fait a été donnée d'abord par M. Charrin et par nous?, pour le bacille pyocyanique et le bacille du charbon symptomatique, Behring et Nissen# pour le vibrion de Metchnikoff, par Zasslein * pour le vibrioncholérique ete. Quand on sème comparativement un des microbes que nous venons de citer dans du sérum normal et dans du sérum provenant d’un animal vaceiné, on trouve entre les deux séries de cultures des diffé- rences Lrès considérables; souvent, au bout de vingt-quatre heures, le sérum des vaccinés esl complètement clair, alors que le sérum normal fourmille déjà de microbes. Les jours suivants, les différences sont moins marquées, mais encore appréciables; ce n'est que vers le quatrième jour que le nombre des microbes devient équiva- lent dans les deux séries. En même temps, la forme peut être modifiée; certaines fonctions el particu- lièrement les fonctions chromogènes diminuent el disparaissent. Mais que devient, dans cesconditions, la virulence du microbe? Le sérum d’un animal vacciné agit-il seulement sur la végétation des bactéries? est-il également capable d’atténuer les éléments qui se développent? Telle est la question que nous avons maintenant à résoudre. Dans desrecherchesencore inédites quenouspour- suivons avec le pneumocoque, nous avons reconnu que le développement de ce microbe se fait moins abondamment dans le sérum d’un animal vacciné que dans le sérum d’un animal neuf: c'est la con- | CHARRIN, À propos de l’immunité. Sociélé de Biologie, 1890. ? Crarrix et Rocer. Note sur le développement des mi- crobes pathogènes dans le sérum des animaux vaccinés. Ibid., 1889. — Nouvelles recherches sur les propriétés micro- bicides du sérum. /bid. 4890. 3 Bemrine und Nissex. Ucber bacterienfeindliche Kigen- schaften verschiedener Blutserumarten. Ein Beitrag zur Immu- nitätsfrage. Zeistchrifl für Hygiene, 1890. À ZASSLEIN. Sulla vaccinazione del cholera. Rivisla clinica. Archivio ilaliano di clinica medica, 1890, puis par | | l firmalion de ce qu’on a observé avec d'autres agents pathogènes. Maisen même temps que la végétation est entravée, la virulence du microbe s’affaiblit notablement; souvent son inoculation reste sans effet, alors que des cultures, faites d’une façon iden- tique, mais dans du sérum d'un animal neuf, en- trainent la mort en moins de vingt-quatre heures. Rien n’est instructif, au point de vue qui nous occupe, comme l'histoire du streptocoque de l'érysipèle !. Pour étudier l’action bactéricide du sérum sur ce microbe, nous l’avions semé compa- rativement dans du sérum de lapins neufs et de lapins rendus réfractaires par une inoculation anté- rieure. Quelle ne fut pas notre surprise, et nous pourrions dire notre déception, en constalant que le streptocoque fait exception à la règle lIl se déve- loppe aussi facilement et parfois plus abondam- ment dans le sérum des vaccinés que dans celui des témoins. C'est alors que nous pensämes à rechercher si les mierobes conservaient leur action nocive dans les humeurs des animaux artificiel- lement réfractaires, De nombreuses expériences comparatives nous démontrèrent qu'il n'en est rien : le virus s’atténue d'une facon manifeste : inoculé à un animal neuf, il détermine une lésion légère et rapidement eurable, absolument semblable à celle que produit le microbe virulent introduit chez un animal vacciné; autrement dit, l’atténuation du streplocoque se fait au même degré et dans l’orga- nisme vivant et dans le sérum en dehors de l’orga- nisme. L’anomalie rencontrée au début de nos recherches n’était done qu'apparente; le sérum protège réellement l’animal vacciné contre le streptocoque ; seulement il agit,non en empêchant le développement du microbe, mais en le dépouil- lant de ses propriétés nocives. Comme à bien voulu le faire remarquer M. Behring ?, c’élait la première fois que se trouvait établie l’atténuation d'un virus dans les humeurs naturelles, privées de tout élément figuré. Mais ce ne sont pas seulement les humeurs qui se modifient sous l'influence de la vaccination; quelques expériences permettent d'étendre aux tissus ce qui est établi pour les liquides. Nous avons montré # que le bacille du charbon symptomatique se développe mal dans les muscles des animaux vaccinés, alors même que, par un lavage prolongé, on a chassé tout le sang qu'ils renferment. Une expérience fort ingénieuse de Voswinkel * plaide 1 Rocer. Modification du sérum à la suite de l'érysipèle. Sociélé de Biologie, 1890. > Beurinc. Ucber Desinféction, Desinfectionsmittel und Desinfectionsmethoden. Zeilschrift für Hygiene, 1590. 3 Rocer. Contribution à l’étude de l'immunité acquise. Gazette hebdomadaire, 1590. 5 VoswixkeL.Ucber Bacterienvernichtung im Froschkôrper. Fortschrille der Medicin, 1890. #4 D' G.-H. ROGER. — LE ROLE DU SÉRUM DANS L'ATTÉNUATION DES VIRUS dans le même sens; cet auteur opère sur des gre- nouilles vivantes, dont il remplace le sang par de l'eau salée stérilisée ; puis il leur injecte de Là 2 c. c. d'une culture charbonneuse; les bacilles vont se localiser dans les organes; on en trouve qui sont contenus dans les quelques leucocytes qui restent encore; mais la plupart d’entre eux dégénèrent en dehors des cellules; en quelques jours ils devien- nent incapables de tuer la souris, puis ils finissent par disparaitre; la grenouille salée se comporte done comme une grenouille ordinaire. L'auteurs’est naturellement assuré que du charbon semé dans de l’eau salée, maintenue à la même température que la grenouille, ne subit pas de semblables modifi- cations. IV Les diverses expériences que nous avons rap- portées nous semblent constituer un faisceau de preuves suflisantes pour entrainer la conviction. Mais ceux qui dénient au chimisme de l'organisme toute importance dans le mécanisme de l'immunité, ont soulevé une nouvelle objection, dont nous devons maintenant examiner la valeur. On à dit que l'action bactéricide des humeurs tenait simplement au changement de condition qu'on imposait au microbe en le faisant passer d’un bouillon dans du sérum. Si l’on pratique des ensemencements successifs dans du sérum d’un animal normal, on constate que le microbe se dé- veloppe de plus en plus facilement et qu'il résiste de mieux en mieux à l'action nocive du milieu où on l'introduit. Ce résultat est parfaitement exact. et nous avons pu le vérifier avec le streptocoque ; mais il ne nous semble pas paradoxal. Quand on sème le streptocoque dans du bouillon et qu'on fait des cultures en série, on constate que sa végéla- bilité et sa virulence diminuent progressivement ; en partant d'une culture ainsi modifiée, on voit la puissance végélalive s'accroitre par des passages dans le sérum; mais en même temps le microbe recouvre son action pathogène. Il se modifie donc dans le sérum, en dehors de l'organisme, comme dans l'organisme lui-même ; dans les deux cas il ré- cupèresa virulence,c'est-à-direqu'ils’habitue à vivre dans les humeurs naturelles de l'animal. Il serait même possible que cette accoutumance résultat d'une sorte de sélection; on sait, en effet, que les cultures, et particulièrement les cultures atténuées. ne sont pas homogènes; comme l'a fait remarquer M. Arloing, l’atténualion se fait individuellement et non en masse; on comprend done que, semés dans un milieu peu favorable, les microbes les plus faibles, c'est-à-dire les plus atténués, périssent ; les plus forts survivent seuls et donnent naissance à des êtres de plus en plus résistants. L'action du sérum nous explique un autre fait que nous signalions au début de cet article. Un microbe, exalté pour une espèce, peut être atténué pour une autre ; les propriétés bactéricides des hu- meurs, chez les diverses espèces, pouvant tenir à des états chimiques différents, un microbe qui s’est habitué à vivre dans le sérum de tel animal n'aura pas nécessairement acquis l'habitude de végéter dans le sérum de tel autre. On est conduit ainsi à considérer l’exaltation de la virulence comme une accoutumance à l'action antiseptique des milieux de l’organisme. Quant à l’atténualion que peuvent subirles virus dans les humeurs de certains animaux, et particulièrement des vaccinés, on peut, en s'appuyant sur lesrecher- ches de M. Bouchard, la rapprocher de l’atténuation qui se produit quand on pratique des cultures dans des milieux artificiels chargés de substances anli- septiques. Remarquons qu'il n’y a pas contradiclion entre ces deux résultats différents : de nombreuses expériences nous ont montré que de pelites doses de substances antiseptiques peuvent exalter cer- laines fonclions microbiennes, et particulièrement les fonclions chromogènes; des doses plus élevées entravent el suppriment ces fonclions. Il est légi- time de supposer qu'il en est de même pour la virulence : les sérums où le pouvoir pathogène s’exalte sont légèrement antiseptiques; ceux où il s’alténue le sont beaucoup plus; sous ce rapport ce sont les humeurs des animaux vaccinés qui pos- sèdent le pouvoir le plus énergique, qu'il s'agisse de l'augmentation d'une substance bactéricide normale, ou de l’adjonction d’une substance bac- téricide nouvelle; celle-ci différerait suivant le mi- crobe contre lequel on a prémuni l'animal, ce qui nous explique pourquoi la vaccination contre un agent pathogène ne donne pas l’immunité contre tous les microbes. On voit combien les travaux qu'a suscités l'étude du sérum sont fertiles en hypothèses nouvelles ; si nous avons insisté sur les principales déductions auxquelles on est conduit, c'est pour bien établir que les résultats déjà obtenus ont ouvert une nou- velle voie à des recherches ultérieures, qui nous montreront jusqu'à quel point sont légitimes les quelques considérations théoriques que nous avons présentées. Nous tenons à faire remarquer,en terminant,que nous ne prétendons nullement expliquer par les seules propriétés du sérum ,toutesles modifications que peut subir dans l'organisme la virulence des microbes ; le problème est sans doute fort complexe et plusieurs facteurs doiventintervenir. Néanmoins, au milieu des causes multiples qu'on peut invoquer, il en est une dont l'influence semble établie sur des preuves expérimentales; c’est ce qui nous a C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE AE) engagé à résumer les principaux travaux qui ont été publiés sur ce sujet. Les résultats obtenus nous permettent de con- clure, dès maintenant, qu'il existe un parallélisme presque parfait entre les modifications que peul subir la virulence des agents pathogènes dans l’or- ganisme d'un animal vivant et dans le sérum pro- venant de cet animal, Ainsi se trouve établi le rôle que joue l’état chimique des humeurs et des tissus dans le mécanisme de la receptivité morbide et de l’immunité. D' G.-H. Roger. Préparateur du Laboratoire de Pathologie générale à la Faculté de Médecine de Paris. REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE Les recherches relatives à l’étude des phéno- mênes physiques se mulliplient dans deux sens différents : d’une part, on s'efforce de pénétrer plus intimement dans la connaissance complète des faits, de déterminer avec la plus grande pré- cision possible {outes les constantes numériques relatives à ces phénomènes, et d'utiliser ces don- nées pour discuter les hypothèses admises, les compléter ou les modifier; d'autre part, on fait bénélicier les applications pratiques de toutes les connaissances acquises. Sans avoir la prétention d’être complet dans cette révision des progrès de la Physique, nous signalerons dans ces deux sens les travaux qui nous ont paru susceptibles d’être exposés sans avoir à entrer dans de trop longues explications : nous avons dû négliger quelques recherches dont nous ne méconnaissons pas cepen- dant l'intérêt, espérant qu'il nous sera donné plus lard d’avoir l'occasion d’y revenir. I On peut dire absolument que toute expérience mettant un fait nouveau en évidence est intéres- sante, car il est impossible de prévoir si elle ne contient pas en germe une nouvelle branche de la science. Mais il est nalurel que l’attention soit plus vivement appelée sur les expériences qui appor- tent la solution d’un problème depuis longtemps cherché, ou qui viennent confirmer ou infirmer les hypothèses par lesquelles on cherche à expliquer les faits. Dans cet ordre d’idées,plusieurs recherches en optique méritent de nous arrêter quoiqu’elles aient été déjà signalées dans la Revue. Nous parlerons d’abord des expériences de M. Otto Wiener ! relalives aux interférences de la lumière polarisée dans des conditions particulières. Si l’on considère un faisceau de lumière parallèle tombant sur une surface réfléchissante plane, le faisceau réfléchi pourra dans des conditions conve- nables interférer avecle faisceau incident: comme 1 Voir page 64, Revue Générale des Sciences, 30 janvier 1891. pour la réflexion du son, il y aura des ondes sta- tionnaires, résultant de la composition des mou- vements. Il est facile de se rendre compte que, par exemple, les lieux des points où il y aura interfé- rence sont des plans parallèles à la surface réflé- chissante, La distance de ces plans dépend de la longueur d'onde et de l'inclinaison de la lumière par rapport à la surface réfléchissante : elle est de l'ordre de grandeur de la longueur d'onde. Aussi peut-on mettre aisément en évidence l'existence des plans nodaux pour les phénomènes acous- tiques; pour les phénomènes lumineux, les plans nodaux sont nécessairement {très rapprochés. I ya 25 ans environ, M. Zenker, étudiant les phénomènes d’interférence qui peuvent se produire dans le cas de deux faisceaux se rencontrant à angle droit, montra que, s'il s'agit de lumière pola- risée, le plan de polarisation étant pour ces deux faisceaux parallèle à ces faisceaux, il devra y avoir interférence si la vibration lumineuse est perpendiculaire au plan de polarisation (comme Fresnel a été conduit à l’admettre); mais qu'il ne saurait y avoir interférence si la vibration lumi- neuse est dans le plan de polarisation. Malheureu- sement, la distance qui sépare les plans nodaux est tellement petite qu'on ne pouvait mettre leur existence en évidence, les franges correspondantes n'étaient pas directement observables. M. Wiener est parvenu d’une manière extrêmement ingé- nieuse à réaliser des conditions permettant d'observer ces franges. Il s'agissait d’abord d’avoir polarisés, perpendiculaires l’un à l’autre et capa- bles d’interférer; pour y arriver, M. Wiener fait tomber un large faisceau polarisé sur une surface réfléchissante plane sous l'incidence de 45°; le faisceau réfléchi est bien perpendiculaire au fais- ceau incident, et, dans la partie commune aux deux faisceaux deux faisceaux, existent des plans nodaux si l’in- terférence à pu se produire. Pour mettre en évidence l’existence de ces plans nodaux, M. Wiener a eu recours à la photographie; il a employé une surface sensible, pellicule de 116 C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE collodion ioduré excessivement mince (£ de lon- gueur d'onde d'épaisseur); pour séparer les fran- ges qui, comme nous l'avons dit, sont extrêmement rapprochées, pour les étaler, il a placé -cette surface très obliquement par rapport à la surface réfléchissante et, par suite, très obliquement aussi par rapport aux surfaces nodales : la distance des intersections de deux surfaces nodales consécu- tives par la surface sensible dépend naturelle- ment de cette inclinaison qui a pu être choisie assez grande pour que l'intervalle de ces inter- sections devint appréciable. Dans ces conditions, M. Wiener a obtenu des franges si le plan de polarisation est parallèle aux faisceaux ; il n’en a pas obtenu s’il leur est perpendiculaire. En réalité, il a obtenu les deux résultats simultanément, en faisant usage d'un faisceau incident qui tombe d’abord sur un large spath orienté de façon que la section principale soil parallèle au plan d'inci- dence sur la surface réfléchissante ; ce spath donne deux faisceaux polarisés rectangulairement qui se réfléchissent l’un et l’autre de la même manière et agissent également sur la surface sensible; mais tandis que pour l’un on a des franges sur cette surface, on à une partie uniformément impres- sionnée pour l’autre. Ces résultals, nous le répétons, semblent justi- fier immédiatement l'hypothèse faite par Fresnel sur la direction des vibrations. Toutefois, il faut bien le reconnaitre, la question n'est pas aussi simple qu'elle le parait au premier abord, et tandis que M. Cornu avait présenté cette expérience comme absolument démonstrative, M. Poincaré a pré- senté des objections dont il importe de tenir compte !. Pour bien faire comprendre la difficulté qui se présente, nous reprendrons une comparaison déjà indiquée par M. Potier ?. On sait que, en acoustique, on peut étudier les ondes stationnaires dans la ré- flexion, dans les tuyaux parexemple,soit à l’aide du tambour à membrane de Seebeck, soit à l’aide des capsules manométriques de Kænig : les tambours sont sensibles aux déplacements, les capsules sont sensibles aux varialions de pression. Ces deux ap- pareils ne fonclionneront done pas de la même facon : les tambours vibreront aux ventres où le déplacement atteint la valeur maxima, mais les flammes des capsules ne varieront pas en ces points, car la pression n'y change pas. Ce serail naturellement l'inverse aux nœuds. Les conséquences qui ont été tirées des expé- riences de M. Wiener supposent que la pellicule 1 Voir C. R. de l’Acad. des Sc. du 9 février 4891, p. 325 et 329, ? Voir ©. R. de l'Acad. des Se. du 16 février 4891, p. 365 et 383. sensible est impressionnée comme le tambour de Seebeck ; que, par conséquent, elle subit des chan- gements aux ventres et n’en subit pas aux nœuds; or c’est la une hypothèse qui n’est point démontrée, etil pourrait se faire que ce fût le contraire qui fût la réalité, Dans ce cas on reconnait par le cal- cul que les conclusions devraient être absolument interverties et les expériences de M. Wiener con- duiraient à admettre que, contrairement aux idées de Fresnel, la vibration lumineuse est dans le plan de polarisation. Ce n’est point ici le lieu de traiter la question à fond, ni de discuter ou seulement d’exposer les arguments quiont été présentés. Nous voulions seulement montrer que la question n’est pas aussi simple qu'elle pourait le paraître au premier abord el nous nous bornerons à dire en terminant que si M. Poincaré a fait des réserves sur la valeur ab- solument coneluante desexpériences de M. Wiener, il pense cependant que, pour diverses raisons, l'hypothèse de Fresnel est la plus probable. Une autre question d'optique dont le retentis- sement dans le public a été plus considérable par- ce qu'elle correspond à un effet plus généralement compréhensible, c’est la reproduction photogra- phique des couleurs obtenues par M. Lippmann. ! Il y a intérêt à rapprocher cette question de la précédente, non au point de vue des résultats, mais au point de vue de l'explication. Nous venons de dire qu'il se produit des inter- férences entre la lumière incidente et la lumière réfléchie, interférences qui se traduisent par la production de plans nodaux. Si la lumière est nor- male à la surface réfléchissante, on reconnait aisé- ment que la distance qui sépare ces plans nodaux est égale à la demi-longueur d’onde (en admettant qu'il s'agisse de lumière simple) : cette distance variera avec la nature de la lumière. Si l’on produit cesinterférences dans une couche sensible continue, le sel d'argent sera donc impressionné, et du mé- tal se déposera principalement dans les points où l'action est maxima; ces dépôts maxima conslitue- ront, pour une lumière donnée, des plans paral- lèles dont la distance sera égale à une demi-lon- eueur d'onde. Considérons, maintenant, la plaque sensible après qu'elle aura été frée : elle comportera dans sonépaisseur une série de couches d’argentsuscep- tibles de réfléchir la lumière, la réflexion étant maxima aux points où la quantité d'argent sera la plus grande, c'est-à-dire sur des plans équidis- tants d’une demi-longueur d'onde. Si sur cette plaque nous faisons tomber de la lumière blanche, 1Voir Revue Générale des Sciences, 15 février 4891,t.11,p.96. C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE 417 il se produira le phénomène connu des lames minces, et par réflexion la composition du fais- ceau sera changée : la lumière dont la longueur d’onde est le double de l'épaisseur de la lame mince, c’est-à-dire le double de la distance de deux lames d'argent, a par réflexion une intensité maxi- ma, intensité qui décroitra rapidement pour les autres lumières, si bien que la coloration observée sera à peu près celle qui correspond à la lumière d'intensité maxima. Mais celle-ci est précisément celle dont l’action a provoqué le dépôt d'argent, puisque la distance qui sépare deux couches d'ar- gent est la moitié de la longueur d'onde de l'une et de l'autre lumières. Done une plaque impres- sionnée par une lumière simple reproduira à peu près la même coloration lorsqu'elle sera éclairée par de la lumière blanche. Concevons maintenant que sur une plaque sen- sible on produise un spectre : en chaque point du spectre, il se manifestera des effets analogues à ceux que nous venons d'indiquer; mais d’un poinl à l’autre variera la distance qui sépare les couches | d'argent. Lorsqu'on aura fixé l'épreuve, la plaque éclairée par de la lumière blanche paraitra donc leinte de couleurs différentes aux différents points; la coloration en chaque point étant sensiblement celle correspondant à la lumière qui a agi en ce point, on aura une image qui reproduira sensible- | ment le spectre avec ses couleurs. L'idée est très ingénieuse : sa réalisation présen- Lait d’ailleurs de réelles difficultés que M. Lippmann a vaincues habilement. L'une d'elles, et non la moindre, consistait dans l’hétérogénéité de la | couche sensible : dans les plaques photographiques ordinaires, le sel d'argent n'est pas unifor- mément réparti; il se présente sous forme de grains disséminés irrégulièrement, grains très pelits, il est vrai, mais dont les dimensions ne sont pas négligeables par rapport aux longueurs d'onde, et par suite, par rapport à la distance qui doit séparer les couches d'argent déposé. M. Lipp- mann à dû préparer des plaques d’une manière spéciale. Quant à la surface réfléchissante, il a em. ployé le mercure : la plaque sensible, sèche, cons- tituait une paroi d'un vase dans lequel on versait du mercure qui se lrouvait ainsi directement en contact avec la couche impressionnable. Nous avons dit que, dans le cas d'une couche mince comprise entre deux lames d'argent, les couleurs ne sont pas pures. En réalité, elles se rapprochent de la pureté, parce qu'il y a plusieurs couches sucessives qui agissent simultanément, 200 environ pour une couche de % de millimètre d'épaisseur; on sait que, dans des cas de ce genre, la pureté des couleurs croit avec le nombre des surfaces réfléchissantes, Nous ne voulons pas faire ici l'historique des recherches qui ont été faites antérieurement pour la reproduction photographique des couleurs; nous rappellerons seulement que Ed. Becquerel avait obtenu des résultats satisfaisants par l'emploi du sous-chlorure d'argent’. Malheureusement les images obtenues ne peuvent être fixées absolu- ment et disparaitraient si elles étaient soumises à une aclion un peu prolongée de la lumière du jour. Il va sans dire que rien de semblable ne doit être à craindre pour les images colorées oblenues par M. Lippmann; elles peuvent être fixées abso- lument comme toute autre image photographique et deviennent absolument indélébiles. Les résultats obtenus sont fort curieux; mais, il faut le reconnailre, ils ne résolvent pas absolu- ment le problème de la reproduction photogra- phique des objets colorés. Nous ne voulons pas seulement parler du temps nécessaire à la production de ces épreuves, temps qui est considérable et qui limiterait beaucoup les applications que l’on pourrait faire. Nous admet- tons sans peine qu'on pourra trouver d’autres substances qui seraient impressionnées convena- blement dans un temps beaucoup plus court. La véritable difficulté nous parait être dans les effets qui se produiront lorsque la plaque sensible sera impressionnée, non par une couleur simple, mais par une couleur composée. Considérons seulement le cas de deux lumières différentes : chacune d'elles donnera lieu, à ce qu'il nous semble, à la produc- tion de couches d'argent comme si elle était seule : il y aura donc dans la couche sensible deux sys- tèmes différents, indépendants, de surfaces réflé- chissantes : les distances entre deux couches con- sécutives seront absolument variables aux diverses profondeurs et nulle part, à peu près, ne seront les distances correspondant aux couleurs qui ont agi. Comment se comportera dans la lumière blanche un semblable système de lames minces? Nous avouons que cela nous semble au moins diffi- cile à prévoir; lors même que l'on supposerait que, seules, les lames minces les plus superfi- cielles agiraient la réflexion, nous ne savons quelle coloration on pourra observer, mais nous doutons qu’elle ait quelque ressemblance avec celle de la lumière composée dont on aura fait usage pour produire l'impression photogra- phique. Il n’en est pas moins vrai, quelles que doivent ètre les applications qu'il sera possible de faire, que les résultats obtenus par M. Lippmann ont un réel intérêt, d'autant qu'ils ne sont certainement pas dus au hasard, à des fàtonnements heureux, lors de 1 Voir la Revue du 30 mai 1891, €. IT, p. 352. 18 C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE mais à l'application raisonnée de considérations théoriques. Les questions d'optique théorique ont été l’objet de diverses études intéressantes que nous ne pou- vons même indiquer toutes &’une manière com- plète : c'est ainsi que nous sisnalerons seulement les recherches de M. Carvallo sur l'influence du terme de dispersion de Briotsurles lois de la double réfraction. De ses expériences M. Carvallo arrive à conclure que la vibration lumineuse est perpendi- culaire (ou au moins à peu près perpendiculaire) au plan de polarisation; — de M. Meslin sur la pola- risation elliptique; — de M. Macé de Lépinay sur les franges d'interférence ‘; — de M. Gouy sur une pro- pagation anomale des ondes qui rend compte d’une difficulté que présentait le principe d'Huyghens relativement à une avance de 1/4 de vibration qu'il fallait admettre dans des conditions déterminées. Il La découverte des relations intimes qui existent entre la chaleur et le travail mécanique donne un intérêt réel aux recherches quantitatives relatives aux actions calorifiques, alors même qu'on n’en voit pas l’application immédiate, car on peut pen- ser qu'on pourra utiliser, tôt au tard, toutes les déterminations failes avec précision pour faire avancer telle partie de la science avec laquelle ces déterminations ne paraissent pas toujours avoir de rapport. C'est pourquoi il nous paraît particulière- ment intéressant de signaler les principaux tra- vaux qui ont été faits sur la chaleur. Nous indiquerons d’abord les nouvelles mesures effectuées par M. d’Arsonval sur l'équivalent méca- nique de la chaleur : il a employé, d'une manière générale la méthode de Foucault et de Violle, c’est- à-dire la production de chaleur par l'intermédiaire d'une masse de cuivre tournant dans un champ magnétique ; les particularités de ces recherches consistent d'une part dans l'application d'un régu- lateur de vitesse nouveau appliqué à la dynamo qui produit et entretient la rotation de l’aimant (car, dans ces expériences, c’est le champ magnéli- que qui se déplace, la masse de cuivre restant fixe) ; d'autre part dans la mesure de la quantité de cha- leur produite, mesure qui a élé faite par la mé- thode calorimétrique à température constante, précédemment inventée par M. d'Arsonval. Les ré- sultats numériques sont assez satisfaisants car ils donneraient pour l'équivalent mécanique de la chaleur des valeurs comprises entre les nombres 49 et 427. L'appareil employé permettait d'absor- ber seulement 5 kilogrammètres par seconde : M. d'Arsonval se propose d'en faire fonctionner un 1 Voyez la Revue du 30 décembre 1890, t. 1, page 770. autre beaucoup plus puissant, ce qui permettra de considérer comme négligeables quelques petites causes d'erreur qui n’ont pu être éliminées. Dans un autre ordre d'idées, ayant cependant quelque analogie avec les précédents, nous signa- lerons les recherches effectuées par M. Merritt et par M. Tumlirz, sur l'équivalent mécanique de la lumière. M. Tumlirz s’est proposé de déterminer la quantilé totale de chaleur rayonnée par une lampe ayant une intensité connue; puis, la quantité de chaleur qu'elle transmet lorsque les radiations qu'elle émet ont traversé une dissolution diode dans le sulfure de carbone qui ne laisse passer que la chaleur obscure. La différence représente la quantité de chaleur qui accompagne les radiations lumineuses. Pour une lampe à acétate d’amyle va- lant 0,05 étalon Violle, M. Tumlirz a trouvé 0,00361 calorie-gramme par seconde. M. Merritt a comparé à la lumière et à la chaleur l'énergie électrique d'une lampe à incandescence : il évalue la chaleur obseure par l’échauffement d’un calorimètre à eau dans lequel est placée la lampe (nous passons sous silence les correctionsnécessaires); connaissant lé - nergie électrique fournie à la lampe, on en déduit ce qui répond à la production de radiations lumi- neuses el l’on compare le nombre obtenu à l’inten- silé lumineuse ; sans donner de chiffres, nous di- rons seulement que M. Merritt a reconnu que le rendement lumineux de l'énergie augmente rapide- ment quand augmente la dépense d'énergie. L'étude des chaleurs de vaporisation dans des circonstances variées à été l’objet de diverses re- cherches parmi lesquelles nous signalerons celles de M. Dieterici et celles de M. Mathias. M. Dieterici s’est occupé spécialement de la vapo- risalion de l’eau à 0°, question intéressante, car elle permet de vérifier la formule donnée par Regnault à la suite d'expériences qui ne s’étendaient pas jus- qu'à cette température. Le nombre trouvé, 597%, concorde assez bien avec la formule classique. M. Mathias aétudié spécialement la vaporisation des gaz liquéfiés, l'acide carbonique, le protoxyde d'azote ; sans donner les résultats divers auxquels M. Mathias a été conduit, nous insisterons spécia- lement sur la méthode calorimétrique qu'il a em- ployée ! ; il s’est proposé d'opérer à température constante, condition nécessaire pour la détermina- lion de la chaleur de vaporisation, car cette quan- tité varie rapidement avecla température. Il fallait done compenser à chaque instant, la perte de cha- leur due à la vaporisalion mème ; il arrivait à pro- duire la compensation en versant dans l’eau du calorimètre de l'acide sulfurique. Le poids de Pa cide sulfurique employé pendant l'expérience 1 Voyez la Revue du 30 avril 1890, 1. I, page 245, C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE 419 permeltait d'évaluer la quantité de chaleur; des expériences préalables avaient, en effet, fait con- naître la quantité de chaleur dégagée par la dilu- tion de cet acide. Il y a là une méthode qui esl susceptible de rendre des services dans les recher- ches calorimétriques. Nous n’abandonnerons pas les questions rela- tives à la chaleur sans dire quelques mots du changement d'unité de quantité de chaleur qui a été proposé par quelques savants et qui est acluel- lement en discussion. On sait que l'unité de cha- leur, la calorie, est la quantité de chaleur néces- saire pour élever de O0 à 1° la température d’une masse d’eau égale à l’unité. On conçoit qu’il est difficile d'obtenir aisément la condition de varia- tion de température que cette définition comporte; comme, d'autre part, il n’y a pas proportionnalité entre les variations de température el les quan- tités de chaleur, on ne peut aisément déduire la quantité de chaleur fournie à l’eau d’une variation quelconque de température, même dans des limites restreintes. Pour éviter ces difficultés, on propose de prendre, pour unité de quantité de cha leur, la centième partie de la quantité de chaleur qu'il faut fournir à l’unité de masse d’eau pour la faire passer de la température de la glace fondante à celle de l’eau bouillante sous la pression normale, quantité que l’on peut obtenir assez facilement, On ne saurait faire, à notre avis, d'objection absolue à cette proposilion : la relation entre la température de l’eau el la quantilé de chaleur ne serait plus celle qui a été déterminée, mais elle serait de même forme, ni plus simple, ni plus compliquée. M. Berthelot, dont l'opinion, dans ces questions, a une valeur incontestable, estime que l’on n’arriverait pas à une plus grande précision dans la détermination de la calorie moyenne; il voit en outre à cette substitution l'inconvénient d’avoir à réviser et remanier toutes les détermina- tions faites depuis Lavoisier jusqu’à ce jour : au point de vue pratique, il pense qu'il serait préfé- rable de prendre la calorie moyenne entre 0 et 15° plus facile à obtenir dans les expériences du labo- ratoire. L'adoption de cette unité entrainerait également des changements dans les données numériques actuellement employées. Dans notre opinion, il serait fâcheux d'introduire une donnée arbitraire de plus (la lempérature de 15°) dans les unités se rapportant aux phénomènes calori- fiques; il nous semble que si l’on devait se résigner à modifier tous les résultats numériques acquis jusqu'à ce jour, il conviendrait de le faire seulement lorsqu'il sera possible de rattacher avec précision les unités de chaleur au système général d'unités tel qu'il est défini pour d’autres parties de la physique. L'avantage qu’il y aurait à sup- primer le degré centigrade et par suite la calorie et à rattacher les mesures calorimétriques aux mesures mécaniques et électriques nous parait tel que lorsqu'il sera possible de le faire avec une approximation suffisante, ileonviendra de le faire, même au prix d'une révision complète de tous les résultats numériques obtenus jusqu’à ce jour. [II Les phénomènes électriques ont donné lieu à de nombreuses recherches; mais il ne s'y est pas ma- nifesté de faits présentant une importance capi- tale ; obligé de nous limiter, nous passerons sous silence, en le regrettant, divers travaux que nous aurons sans doute ultérieurement l'occasion de rencontrer el d'analyser, et nous indiquerons ra- pidement quelques-uns des progrès réalisés par l'application des propriélés des courants à diverses industries. Ces applications deviennent de plus en plus nombreuses, en même temps que se généra- lisent celles qui sont déjà entrées dans la pratique ; nous nous bornerons à l'indication de progrès nou- veaux. Les communications téléphoniques prennent une importance constamment croissante : d'abord limi- tées à de petites distances, à l'enceinte d’une ville, elles se sont assez promptement étendues, deve- nant inter-urbaines, avec cette condition que les conducteurs utilisés pour le téléphone servent en même temps à la transmission des dépêches télé- graphiques. Un pas de plus est fait depuis le 1" avril dans l'extension de ce moyen de commu- nicalion, et le téléphone fonctionne de Paris à Londres, en traversant la Manche à l’aide d'un cäble sous-marin. Le succès de cette opération pouvait être prévu, car la transmission par càble sous-marin avait déjà été obtenue sur une ligne qui fonctionne depuis plus d’un an entre Buenos- Ayres el Montevideo. On sait que les diflicultés qui se présentent dans ce cas proviennent de la résistance de la ligne et de sa capacité : il résulte de recherches diverses, . et notamment de celles effectuées par M. Preece, que la transmission est bonne dans une ligne tant que le produit de sa résistance évaluée en ohms par sa capacité évaluée en microfarads ne dépasse pas 10.000; mais que les communications sont mauvaises où impossibles lorsque ce produit at- teint 15.000. En fixant pour la ligne Paris-Lon- dres les données de la ligne terrestre et du càble sous-marin, telles que le produit fût égal à 6.000, on était donc assuré d’être dans de bonnes condi- tions; c’est, en effet, ce que l'expérience a prouvé, meltant ainsi en évidence la valeur de la règle adoptée. Il est inutile d'entrer dans le détail des disposi- 420 C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE lions adoptées, dispositions qui ne diffèrent pas de celles que l’on rencontre dans les lignes télépho- niques et dans les câbles sous-marins. Nous nous bornerons à dire que des essais de transmission faits avec des appareils nouveaux ont parfaile- ment réussi; ces appareils sont des téléphones Roulez qui présentent quelques dispositions parti- culières. Nous signalions l’année dernière la lenteur avec laquelle pénétrait en France l'usage des transfor- mateurs dans les distributions d'électricité; il semble que ces appareils commencent à entrer dans la pratique industrielle. Les transformateurs sont destinés à fonclionner sous l'influence de cou- rants alternatifs à haute tension circulant dans un réseau principal et à fournir dans un circuit secon- daire des courants alternatifs de moindre ten- sion. Des transformateurs viennent d'être établis à Paris, dans les magasins de la Belle Jardinière pour l'éclairage électrique ; nous ne pouvons en- trer dans le détail des dispositions adoptées : nous nous bornerons à dire que le courant produit à l'usine municipale des Halles est de 45 ampères, avec une différence de potentiel de 2.400 volts et que, à l’aide de onze transformateurs, on obtient des courants dans trois circuits distincts, ces cou- rants correspondant respectivement à 100 volts el 220 ampères, 100 volts et 480 ampères, 60 volts et 800 ampères. Nous croyons intéressant de signaler cette application importante d’un procédé qui, certainement, se généralisera. Le domaine industriel des actions électrolytiques parait en voie d'extension continue. La production de l’oxygène et de l'hydrogène à bas prix a été éludiée par M. le Commandant Renard, qui esl arrivé à employer des dispositions qui avaient été déjà signalées par M. d'Arsonval, puis par M. Lat- chinoff : mais l’étude du Commandant Renard a été faite en vue d'une application à une grande usine et montre que la production de ces gaz doil èlre peu coûteuse; il serait à désirer que celte application fût réalisée et que l’on pût employer en grandes quantités l'hydrogène et l'oxygène qui peuvent rendre de réels services dans des circons- tances variées, sans entrainer à des dépenses no- tables, comme cela est actuellement. Signalons une curieuse application de l’électro- lyse au retaillage des limes. L'idée est ancienne : elle a été signalée il y a plus de trente-cinq ans par M. Landrin, puis reprise et brevetée en 1868 par MM. de la Tour du Breuil, Baynes et Dienheim Brochock; enfin M. Personne a appliqué, en le sim- plifiant, un procédé analogue : les limes à retailler sont plongées dans de l’eau acidulée et forment le pôle négalif d'une pile dont le pôle positif est un charbon ; sous l'influence d'un courant qui prend naissance, le métal est attaqué, mais non pas uni- formément, et les parties saillantes sont avivées progressivement : au bout d'une demi-heure en- viron, l'opération est terminée. Ce procédé qui, presque sans main-d'œuvre, permet de rajeunir, pour ainsi dire, des limes usées, est ingénieux et mérite d’être signalé. L’électricité commence à intervenir dans la mé- tallurgie et il est possible que son emploi amène, dans certains £as, de profondes modifications dans les conditions de celte industrie. Actuellement, c'est principalement à la produelion de l’alumi- nium que l'électricité a été employée: plusieurs procédés sont mis en œuvre. Le procédé Cowles ne produit pas de l'alumi- nium pur, mais seulement des alliages de ce métal avec du fer ou avec du cuivre; il consiste à faire passer un courant très intense dans un creuset brasqué qui contient de l’alumine mélangée de fer ou de cuivre. L'alumine est fondue par suile de la haute température qui se produit; elle est alors décomposée par le charbon; aluminium mis en liberté se combine au fer ou au cuivre. Il semble certain que le courant électrique n'intervient, dans cette réaction, que comme produisant un grand dégagement de chaleur, car on obtient des résultats semblables par l'emploi de courants con- tinus ou par l'emploi des courants alternatifs. Le procédé de M. Hérault, qui est employé en France pour oblenir des alliages d'aluminium, présente quelque analogie avec le précédent. M. Minel, mettant à profit les recherches qui avaient été faites antérieurement pour la prépara- tion de l'aluminium par une véritable électrolyse, est parvenu à un procédé qui parait susceptible d'être utilisé tout à fait industriellement. Il y arrive en produisant par le passage d’un courant intense d’abord la fusion de la cryolithe (fluorure double d'aluminium et de sodium), puis la décom- position partielle de ce sel. Il obtient un bain de composition constante, ce qui est nécessaire, en ajoutant en proportions convenables de l’alumine, suivant la marche de l'opération. Les résultats paraissent réellement salisfaisants au point de vue du rendement et de la pureté du métal obtenu; s’il ne survient pas de mécompte, le prix de l’aluminium baissera et les applications de ce métal deviendront plus nombreuses. L'électricité agit cerlainement aussi par une action chimique dans une opération qui, indiquée il y a plus de trente ans, puis abandonnée, est soumise actuellement à l'épreuve de la pratique suscite de nous voulons parler du tannage par l'électricité. Les peaux dont on a enlevé les poils et qu'on a dégraissées sont introduites avee un liquide spécial, contenant du el vives discussions : C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE 121 Lannin, dans un tambour en bois animé d'un mou- vement de rolation autour d'un axe horizontal : des plaques métalliques placées sur les fonds du tambour servent d’électrodes pour le passage d’un courant. Pour un lot de peaux de 500 à 4.000 kilo- grammes, on emploie un courant de 10 ampères et de 70 volts : l'opération dure de 4 à 4 jours, sui- vant la nature des peaux. Après ce temps les peaux sont tannées. Si l'on songe que, par les pro- cédés ordinaires, le tannage dure plusieurs mois, une année même, on comprend quelle sera l’im- portance de l'emploi de l'électricité s'il est prouvé que les résultats obtenus sont comparables à ceux obtenus par le tannage en fosse. À cet égard, et bien que le procédé que nous venons d'indiquer et qui est dû à MM. Worms et Bale soit essayé et même employé dans plusieurs pays, l'accord ne s’est pas fail el, malgré des avis aulorisés, certaines personnes pensent que les peaux ainsi préparées ne sont pas réellement lannées. Quoiqu'il en soit, et mème en admellant que, au point de vue de l'industrie pratique, les résultats ne soient pas absolument satisfaisants actuellement, il n’en est pas moins certain que le courant électrique pro- duit une action spéciale qui n'a pas encore été complètement analysée, et l’on peut espérer qu'une élude détaillée des conditions de l'opé- ration conduira à améliorer assez les produits que celle-ci fournit pour qu'ils puissent être substitués à ceux du tannage en fosse. Dès que l’action électrolytique ne s'exerce plus sur des composés métalliques ou au moins sur des composés chimiquement définis et relativement simples, il est difficile de prévoir les effets qui se produiront, il estmème souvent difficile d'expliquer les effets observés. Ces effets n’en sont pas souvent moins intéressants et même susceptibles d'appli- calions: nous venons d’en signaler un, nous pou- vons en faire connaitre d’autres. C’est ainsi que la purification et le vieillissement des alcools par l'électricité parait devoir donner des résultats pratiques satisfaisants; déjà indiquée et appliquée par MM. Naudin et Schneider, il y a quelques années, cette méthode a été perfectionnée par M. de Méritens qui pense employer un nouveau procédé non seulement pour épurer les alcools, mais aussi pour relarder la transformation des jus fermentescibles. Les aldéhydes et acétones dont la présence est une des causes d'infériorité de l’al- cool sont détruits par suite des actions chimiques qui prennent naissance par l'effet du passage du courant. Nous devons signaler aussi le procédé de puri- fication des alcools par l’action de l'ozone qui est appliqué à l'usine Teilliard : l'action chimique qui amène la destruction des matières de mauvais goût, n’est pas due directement à l'action de l'élec- tricité ; mais la production de l’ozone es la consé- quence des décharges obscures qui se produisent dans des tubes en verre où cireule un courant d'oxygène; de lelle sorte que ce procédé de puri- licalion des alcools repose également sur l'emploi de l'électricité. L'action de l'électricité sur les alcools est une action purement chimique : mais cet agent agil également sur les vins et, dans ce cas, d’après les recherches de M. de Méritens, il semble que les phénomènes observés sont plus complexes : non seulement les vins soumis à des courants alterna- tifs ont présenté une amélioration, un commence- ment de vieillissement; mais, de plus, ils sont moins sujets à s’allérer el, même, ceux qui pré- sentaient un commencement d’altéralion sont restés stalionnaires, la maladie n’a pas pro- gressé. Le vieillissement parait être un effet analogue à celui qui avait été obtenu déjà pour l'alcool, nous ne nous y arrèlerons pas. La conservation des vins, la résistance aux maladies répond à un autre ordre d’idées : on sait que ces maladies sont dues à la présence d'êtres organisés, d'êtres vivants el qu'elles ne peuvent se manifester ou se développer si les êtres vivants sont tués par un procédé quel- conque. M. de Méritens, ayant observé que ces organismes sont détruits par les courants alterna- tifs, proposa de soumettre les vins à l’action de courants présentant de très rapides alternances : les expériences ont confirmé ces prévisions. Il ne s'agit pas ici seulement d'essais de laboratoire de peu de durée : le procédé de M. de Méritens est appliqué sur une assez grande échelle à l’entrepôt de Bercy; d'autre part, des vins traités par l’élee- tricité ont été conservés pendant deux ans, sans avoir présenté de traces d’altération, quoiqu'ils n'aient élé soumis à aucun traitement, à aucun soulirage : l'épreuve semble donc coneluante et il y à là, à ce qu'il nous semble, une nouvelle appli- cation de l'électricité sur laquelle il était bon d'ap- peler l'attention. En dehors des êtres microscopiques, des mi- crobes, les autres êlres vivants, végétaux et ani- maux, subissent-ils l'influence de l'état électrique de l'atmosphère? Il ne parait pas douteux, pour l'homme au moins, qu'il n’y ait une action, car, quoique la preuve n’en ail pas été donnée absolu- men, il semble que cet état électrique est la cause du malaise mal défini que l’on éprouve à certains jours, notamment par les temps orageux. Il était intéressant de voir si les végétaux subissent cette influence et de rechercher, dans le cas de l’afir- maltive, si cette influence est favorable ou non aux progrès de la végétation. Pour cela, il fallait étu- C.-M. GARIEL. — REVUE rs € LS ANNUELLE DE PHYSIQUE dier comparativement les croissances de plantes poussant dans les conditions ordinaires, soumises dès lors à l’action de l'électricité atmosphérique et celle de plantes soustraites à cette action : orilest | facile de réaliser cette dernière condition, en s’ap- puyant sur l'expérience connue de Faraday : il suffit en effet d'entourer une plante d’une cage métallique en communication avec le sol pour être assuré que cette plante ne subit pas l'influence de l'électricité ambiante. Bien entendu, celte cage doit être choisie à larges mailles, de manière à ce que sa présence ne modifie pas d’une façon sen- sible l’action de l'air ni celle du soleil. Les pre- mières recherches qui furent faites à ce sujet ont donné des résultats discordants : certaines plantes croissaient plus rapidement quand elles étaient soustraites à l'influence de l'électricité atmosphé- rique; c'était l'inverse pour d’autres plantes. M. Spechnew a repris ces recherches, les à élendues en les modifiant et les résultats qu'il a obtenus ont été favorables. Dans une grande ferme du gouvernement de Pskoff, il a disposé en diverses parties d’un champ des supports isolants terminés par des couronnes métalliques munies de pointes en cuivre doré; ces couronnes étaient réunies entre elles par des fils métalliques, de telle sorte que cet ensemble en- tretenait au-dessus du champ un milieu électrisé. Or, le rendement de ce champ fut constamment supérieur à celui des champs voisins qui n'étaient pas placés dans les mêmes conditions électriques, et M. Spechnew a conclu de cette expérience que la décharge lente de l'électricité statique facilite aux plantes l'assimilation de l'azote de l'air. Dans une autre expérience faite au jardin bota- nique de Kiew, les plantes étaient soumises direc- tement à l'action de courants électriques traver- sant le sol où elles poussaient; à cet effet, aux extrémilés des plates-bandes on enfouissait ver- licalement de grandes lames de zine et de cuivre constituant avec la terre un véritable élément de pile; ces plaques élaient réunies extérieurement par un fil qui fermait le circuit. On observa pour les plantes soumises à cette action une accélération considérable du développement et une augmenta- lion de dimensions, sans modification dans le goût. Enfin, M. Spechnew reconnut d'autre part que, en soumettant, pendant deux minutes des graines à l’action de courants induits, on facilitait la ger- mination : le développement de la plante se faisait dans un temps beaucoup plus court pour les graines électrisées que pour celles qui n'avaient pas subi cette action ; de plusles premières étaient, en général, plus développées. Ce serait sortir de notre sujet que de montrer l'importance capitale de ces résultats s'il était prouvé qu'ils sont constants et qu'ils n'ont pas été la conséquence de la coïncidence de conditions favorables dans lesquelles l'électricité n'intervient que peu ou point. Les recherches de ce genre doivent donc être suivies avec soin, et il est à désirer qu'elles soient renouvelées pour diverses plantes et dans divers pays. Un fail qui a été remarqué par M. Spechnew mérite d'être signalé tout spécialement : il a noté qu'une maladie communiquée artificiellement à des betteraves ne s’est pas développée dans des par- celles de terre qui étaient soumises à l’action électrique. Ce fail est à rapprocher de ceux qui ont été signalés par MM. Apostoli et Laquerrière qui ont reconnu que des bouillons de culture ensemencés de bactéridies charbonneuses deviennent stériles lorsqu'ils sont traversés pendant quelques minutes par des courants ayant une intensité minima de 300 milliampères pour une section de 6%; pour des intensités moindres, on obtiendrait seulement une alténuation du virus. Nous n'insistons pas, car les questions de ce genre sont plutôt du domaine de la physiologie que de celui de la physique pure. Il en est de même des faits qui ont été observés pour l’aclion des courants alternatifs sur les êtres vivants, sur l’homme. M. Elihu Thomson à reconnu, par exemple, qu'on obtient des effets égaux pour des courants dont les intensités sont dans le rap- port de { à 20 si les interruptions sont respective- ment de 120 el de 4.508 par seconde. Ces faits nous paraissent mériler d'être signalés dans une Revue de Physique. C.-M. Gariel, Professeur de Physique à la Faculté de Médecine de Paris, Membre de l'Académie de Médecine, BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 423 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Brisse (Ch.), Professeur à l'Ecole Centrale el au Lycée Condorcet, Répétiteur à l'Ecole polytechnique. — Cours de Géométrie descriptive. 2 vol. gr. in-8°, avec 433 fig. dans le texte (12 fr.). Gauthier- Villars et fils, Paris, 1891. En dépit de son but modeste, qui est le dévelop- pement du programme de Géométrie descriptive des classes de Mathématiques élémentaires et de Mathéma- tiques spéciales, l'ouvrage de M. Brisse mérite d’être signalé au public savant pour les remarquables qualités de méthode et d'exposition qui le distinguent. Une claire intuition des vrais besoins de la pratique, par- tant, des réelles exigences de l’enseignement, car, en de telles matières, celles-ci résultent directement de ceux-là; un esprit véritablement géométrique; un souci constant de la rigueur et de la simplicité; un tour neuf et original; voilà, si nous ne nous trompons, un ensemble de caractères constituant, pour un livre de cet ordre, un mérite qui n’est point banal. Le premier volume est consacré à la droite et au plan, le second aux cônes, aux cylindres et aux sur- faces de révolution. La solution de tout problème de Géométrie descrip- tive, c’est-à-dire l'exécution du trait, est toujours pré- cédée de celle d’un problème de Géométrie pure ayant pour but de définir les opérations à effectuer par la méthode graphique. Ce principe, très nettement posé par Hachette et dont l'oubli, trop fréquent, entraine une confusion regrettable dans l'esprit des élèves, est scrupuleusement observé par M. Brisse. Ce n’est pas un des côtés les moins dignes de remarque du livre. On doit également signaler la très heureuse préoccu- pation de l’auteur de s’en tenir aux méthodes géné- rales, susceptibles de s'appliquer à tout un ensemble de questions du même ordre. La diversité des procédés particuliers, faite pour charmer l'esprit lorsqu'il s’agit de spéculation pure, est bien loin de consüutuer un avantage dans le domaine de l'application, où la plus grande généralité doit être recherchée en même temps que le maximum de simplicité. M. Brisse étail mis en garde contre la tendance fâcheuse qu'accusent à cet égard certains cours de Géométrie descriptive, par la Juste appréciation du but pratique que vise cette branche particulière de la science appliquée, simple exposition méthodique, comme il le remarque très jus- tement, des procédés géométriques employés dans le trait de stéréotomie. Cette saine facon d'envisager le sujet perce dès les premières lignes du livre, à propos de la représentation du point que l’auteur expose telle que les gens techniques, les seuls qui aient en somme à utiliser les procédés de la Géométrie descriptive, ont coutume de l'envisager dans les applications à Part des constructions, c’est-à-dire abstraction faite du rabat- tement du plan vertical qui constitue pour les commen- cants une complication inutile. Il est à peine besoin de dire que M. Brisse a su, sur de nombreux points, introduire de notables perfection- nements de détails. Nous citerons les suivants : déve- loppement d’une section plane d’un cône ; branches infinies de l'intersection des cônes et des cylindres; résolution des trièdres; tangentes aux points doubles de l'intersection de deux cônes; courbes d’ombre sur les surfaces de révolution; tangentes aux points doubles de l'intersection d’une surface de révolution par son plan tangent, Chemin faisant, l’auteur donne des démonstrations ET INDEX nouvelles et élégantes des diverses propriétés des sur- faces du second ordre dont il a besoin, Afin d'éviter toute confusion, ces petites digressions géométriques sont distinguées du corps principal du sujet par une im- pression en pelits caractères et un numérotage spécial, Nous ne doutons pas qu'avec cet ensemble de belles qualités, le traité de M. Brisse ne soit destiné à devenir promptement classique, et nous eslimons que les maitres n'auront certainement pas moins de profit que les élèves à en tirer. M. p'OcaAGNe, 2° Sciences physiques. Hbummont (Georges), Leblanc (M.), e{ de la Bé- doyère (E.). — Dictionnaire théorique et pra- tique d'Electricité et de Magnétisme. Un vol. in-4° de 1000 pages. (30 fr.) Vre Larousse, 15, rue Montpar- nasse, Paris, 1891, Nous sommes heureux de signaler à nos lecteurs ce bel in-quarto, où les auteurs, «tous les trois jeunes pleins d’ardeur et très initiés dans la science qu'ils voulaient vulgariser » comme le dit M, Hippolyte Fon- taine dans l’intéressante préface de l'ouvrage, ont con- densé en 2.000 colonnes la science, ou plutôt la tech- nique électrique moderne, Imprimé en petits carac- tères, qui cependant ne fatiguent pas les yeux,grâce à une typographie très soignée, ce dictionnaire contient une quantité prodigieuse de matériaux très bien clas- sés, en général parfaitement équilibrés ; l'illustration est suffisante et pas encombrante, La partie pratique ou technique de l’ouvrage l'emporte naturellement de beaucoup sur la partie théorique, trop peut-être, et, bien que les théoriciens puissent en général se passer de dictionnaire dans leur domaine, nous eussions voulu voir donner plus de développement à certains articles, tels, par exemple, que celui qui est consacré à la théorie électro-magnétique de la lumière, Si nous voulions si- gnaler de beaux et bons articles, nous n’aurions que l'embarras du choix; relevons plutôt quelques imper- fections : la convection est définie comme « transport de l'électricité par l'intermédiaire d’un fluide dont les molécules sont dans un état constant d’oscillation » : mouvement oui, oscillation non, Pour la variation de la résistance électrique avec la température, les auteurs ne citent que les nombres bien vieillis de Matthiessen : nous possédons mieux aujourd’hui, et, depuis que le mercure est devenu le métal étalon, il conviendrait de ne plus lui appliquer (avec quatre décimales)un nombre erroné de 20 pour 100, Et cet affreux mot « Attractionmètre » ! Il n'est pas permis, Dieu merci, de maltraiter à ce point la langue française; les auteurs n’en sont pas seuls coupables puisqu'ils n’ont pas la paternité de ce petit monstre : mais c’est déjà trop que d'adopter un pareil enfant. Les quelques imperfections de ce bel ouvrage sont de cet ordre, et bien faciles à corriger dans une se- conde édition. Nous n’en aurions certainement rien dit à propos d'un ouvrage de moindre valeur : mais il ne faut pas oublier que l’on peut se montrer très exigeant à l'égard d’un livre qui est destiné à faire autorité. Notre dernière critique pourrait paraître mesquine, appliquée à ce cas particulier; mais nous avons voulu signaler à celte occasion la fâcheuse tendance qu’ont aujourd'hui beaucoup d'électriciens, d'en prendre trop à leur aise avec le vocabulaire francais. Les auteurs ont eu la très heureuse idée de donner en leur ordre alphabétique la biographie des grands électriciens; c'est une innovation que beaucoup de 724 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX ecteurs apprécieront. Terminons par une phrase ba- nale, absolument sincère du reste, en disant que ce nouveau Dictionnaire d'Electricité a sa place marquée au bon coin de toutes les bibliothèques, Ch. Ed. Fernbach (A.) — Recherches sur la Sucrase, dias- tase inversive du sucre de canne. Thése présentée à la Faculté des Sciences de Paris, le 26 décembre 4890. Imprimerie Charaire et fils, Sceaux, 1891. Les diastases sont certainement les plus singulières de toutes les substances que la cellule vivante secrète à l’état normal : comparables à nos réactifs de labora- toire, en ce sens que leur action hydratante peut tou- jours être reproduite par les acides étendus, les dias- fases conservent dans leur allure générale cette sensibilité exquise qui est le propre des organismes figurés et en fait des matières presque vivantes encore. La température, la réaction du milieu, le contact de l'oxygène, la lumière, sont autant de circonstances qui moditient leur activité et peuvent même les détruire; il résulte de là, ainsi que M. Fernbach le fait remar- quer dès le début de son travail, une impossibilité absolue d'obtenir actuellement ces corps à l’état de pureté complète et par conséquent de connaitre leur véritablecomposition chimique. ‘ Leur étude est cependant l’une des plus intéressantes que puisse aborder la chimie biologique, car le rôle des diastases, en physiologie, est immense : la plus humble cellule en produit, elle les utilise à sa nutri- tion; c'est même, à elles, qu'elle doit sa naissance, et, si obscurs que soient encore pour nous les phéno- mènes de la vie, il est permis d'affirmer qu'ils reposent tous, et peut-être uniquement, sur le jeu des diastases ; nous ne pouvons donc que nous féliciter de voir appa- raître un travail d'ensemble à leur sujet. M. Fernbach étudie la plus simple de toutes les dias- tases connues, la suvrase ou invertine, dont l'effet estde transformer le sucre en sucre interverti, c’est-à-dire en un mélange de glucose et de lévulose; dans la première partie de son travail il examine la sucrase de PAs- pergillus niger, qu'il est facile d'obtenir en grande quan- tité. à On sait depuis longtemps que la présence des acides favorise l’action des sucrases; M: Fernbach nous apprend que cette influence s'exerce à dose infiniment petite, insaisissable même aux réactifs colorés les plus délicats; la dose la plus efficace est fixe pour chacun des acides essayés : elle correspond à + pour l'acide oxalique, à 55 environ pour 1 acide acétique; au voisinage de ces nombres, de petites va- rialions dans l'acidité desliqueurs n’ont pas d'influence bien sensible sur les résultats observés; le maximum d’effet est enfin le même pour tous les acides, employés à la dose la plus favorable. Les alcalis entravent l’action de la sucrase, sans doute à cause de leur action destructive; le contact prolongé de l'air les oxyde, et cette oxydation devient surtout sensible lorsqu'on expose à la lumière une dis- solution de sucrase additionnée d’un léger excès d’a- cide, M. Fernbach propose alors, en se fondant sur toutes ses observations antérieures, un moyen de doser la su- crase en unités, qu'il définit de la manière suivante : « L'unité de sucrase est la quantité capable d'intervertir 20 centigrammes de sucre en une heure, à la température de 569 et en présence de = acide acétique. » En possession de cette méthode, que nous ne pou- vons décrire ici en détail, l'auteur étudie le développe- ment de l’Aspergillus, au point de vue particulier de la secrétion des diastases, etil reconnait que la plante est d'autant plus riche en sucrase qu’elle est plus jeune; les liquides de culture n’en renferment, au contraire, que vers la fin de la végétation, comme si la sucrase ne pouvait se répandre au dehors qu'au moment où cette végétation perd peu à peu sa vigueur ou devient plus pénible. GUILLAUME, On sait, au reste, que la sucrase ne se diffuse qu'avec une extrème lenteur et qu'elle est arrêtée presque tota- lement par la paroi des filtres en porcelaine. Dans une seconde partie, M. Fernbach expose le ré- sultat de ses recherches sur les sucrases des levures de Tantonville, de pale ale, de Champagne ou du Sacchu- romyces Pastorianus. Loin d’être identiques à celle de l’Aspergillus, ces diastases passent aisément au travers des filtres en porcelaine; éminemment sensibles à l’action des acides, elles présentent encore un optimum d'activité qui correspond à = d'acide acétlique pour les levûres de Tantonville ou de Champagne, à x du même acide pour le Saccharomyces Pastorianus ou la levûre de pale ale. La nature du milieu où ces organismes se déve- loppent parait avoir une influence considérable sur la proportion de sucrase qu’ils élaborent; la levure de Tantonville, par exemple, donne des quantités consi- dérables de sucrase lorsqu'on la cultive dans du moût de bière où dans de l’eau de levure et seulement des traces quand on la transporte dans de l’eau de tourail- lons sucrée, Cette différence, que l’auteur attribue à un défaut d'alimentation azotée, ainsi qu’à la nature de l'azote que le végétal assimile, permet de s'expliquer dans une certaine mesure, si l’on se rappelle que plusieurs dias- tases jouissent de propriétés violemment nocives, le mécanisme de l’atténualion ou de l’exaltation de la virulence chez certains microbes pathogènes. Une pareille conclusion donne une idée de l'intérêt qui s'attache à l'étude approfondie des diastases; c’est par elle que nous terminerons ce résumé nécessaire- ment incomplet. Les recherches de M. Fernbach nous enseignent, en un mot, que l’action des diastases est infiniment plus complexe qu’on ne le supposait jusqu'à présent; ilreste donc une ample moisson de résultats nouveaux à recueillir au cours de leur étude, Espérons que le {ra- vail de M. Fernbach trouvera des continuateurs et que ce chapitre encore presque inexploré de la chimie bio- logique prendra bientôt l'importance qui lui appartient. L. MAQUENNE. 3° Sciences naturelles. Schimper (A.-F.-W.), Zur Frage der Assimilation der Mineralsalze durch die grüne Pflanze. (Sur l'assimilation des sels minéraux par la plante verte), Flora, Heft LIT, Des recherches qui ont été entreprises jusqu'aujour- d'hui sur l’absorption et l'élaboration des sels miné- raux par la plante sont les unes d'ordre purement chimique, les autres d'ordre anatomique. Il restait à suivre les principes salins, par des méthodes micro- chimiques, depuis le moment de leur entrée dans la plante jusqu’au lieu de leur emploi, à déterminer les conditions générales de leur assimilation, et à préciser la signification de leurs bases dans les phénomènes nutritifs. C’est là l’objet du travail de M. Schimper. Un premier chapitre est consacré à l'exposé des moyens d'analyse susceptibles d’être utilisés dans le cours de recherches de ce genre. Une application suivie n’en a guère été faite dans les diagnoses biologiques, tandis que, depuis nombre d’années déjà, les miné- ralogistes sont en possession de méthodes qui leur permettent de reconnaitre avec certitude la plupart des éléments constitutifs des roches. L'auteur détermine les réactions tantôt sur des objets frais, tantôt sur les cendres de la plante. Quand les précipités obtenus ne se laissent pas facilement carac- tériser, on peut mettre à profit la méthode de Borodin, qui consiste à traiter la substance présumée par une solution saturée de la même substance, auquel cas il ne doit pas y avoir dissolution. Donnons, comme exemple, là manière de procéder dans la recherche des sels de calcium. Dans les cendres BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 425 ou tàchera de préférence de former le sulfate de calcium, par addition d'acide sulfurique; pour la plupart des plantes, les aiguilles de gypse se forment presque immé- diatement, tant il y a de calcium dans les cendres. Dans les sucs végétaux, on mettra facilement la chaux en évidence au moyen de l’oxalate d’ammoniaque, qui donne un précipité d’oxalate de calcium. A la tempé- rature ordinaire, ce précipité se présente en petites pyramides; il est formé au contraire de prismes mono- cliniques si l’on emploie le réactif bouillant. Lorsque le suc est riche en sels de chaux, on peut provoquer la formation du carbonate de calcium au moyen du car- bonate d'ammoniaque ; le carbonate calcique se dépose sous forme de petits rhomboëdres très réfringents. L'auteur donne ensuite les réactifs microchimiques du chlore, du potassium, du magnésium, de l'acide oxalique, phosphorique et nitrique; etc. Le réactif des nitrates est, comme l’on sait, la diphénylamine, qui en présence de ce genre de sels prend une teinte bleue, même lorsqu'il n’y a que des traces de nitrates. L'acide sulfurique offre de grandes difficultés pour la diagnose microscopique. Pour déterminer les tartrates, par exemple dans la Vigne, on traite les matériaux par le chlorure de cal- cium, ce qui détermine la précipitation du bitartrate de calcium, en cristaux du système rhomboïdal, solubles dans l'acide acétique étendu. Un second chapitre traite de la répartition et du transport des principes minéraux dans la plante. Dans la graine il est fort difficile de mettre en évi- dence la présence des sels minéraux, et la recherche microscopique donne le plus souvent un résultat négatif. Cela tient à ce que ces sels, du moins les phosphates, se trouvent en majeure partie à l’état de combinaison lâche avec des principes albuminoïdes., Par contre, des phosphates, des chlorures, des nitrates ont pu être reconnus dans divers rhizomes, par exemple dans les tubercules de la Pomme de terre. Dans les points végé- tatifs de pousses diverses, ainsi que dans le mésophylle des feuilles adultes, on ne rencontre pas de phosphates minéraux, mais seulement des combinaisons phospha- tées organiques. Les plantes, on le sait, n’absorbent pas avec la même intensité les sels qu’elles rencontrent dans le sol, ou dans un milieu artificiel. À cet égara, l’auteur a cons- taté des variations curieuses. Ainsi, certaines plantes n'absorbent que juste la quantité de sels nécessaire à leur consommation immédiate (Amentacées,Coniféres…); d'autres accumulent les sels dans leur parenchyme, même lorsque le sol n’en contient qu’une fort petite quantité (Cruciferes..….); d’autres enfin absorbent de préférence certains sels, les autres n’étant admis qu’en très minime proportion : l'Allium Cepa prend, surtout les phosphates; divers arbres, les chlorures ; ete. Les sels minéraux ne se répandent pas librement dans toute la plante; les méristèmes, les laticifères, les faisceaux libériens, etc. en sont dépourvus, ou mieux ne les contiennent qu'en combinaison avec des prin- cipes organiques. Dans divers méristèmes l’auteur a trouvé les réac- tions de la potasse et de la magnésie, tandis qu'il n’a pu y distinguer la chaux; les deux premières bases se rencontrent aussi très nettement dans le mésophylle. L’oxalate de chaux est longuement étudié. Dans les organes autres que les feuilles, l'écorce, par exemple, M. Schimper en rattache la formation, non aux tubes criblés, comme l'indique du reste la répartition des cellules oxalifères, mais au cambium, dans lequel s’ac- complissent des actions chimiques intenses, dont ré- sulte la production de l’acide oxalique, puis la précipi- tation de l’oxalate. Certaines plantes sont dépourvues d'acide oxalique; elles renferment alors des sels à acidesorganiques variables (acides tartrique, malique….) L'auteur traite ensuite du rôle de la potasse et de la chaux dans les phénomènes nutritifs. Ces deux bases sortent des organes de réserve sous la forme de phosphates, Dans les méristèmes, le phosphate de calcium est décomposé : l'acide phosphorique sert à la synthèse de la nucléine, qui s’y poursuit activement, tandis que la chaux s’unit à l'acide oxalique, qui est, comme l’onsait, un produit accessoire de cette synthèse; de la sorte se constituent des raphides. De même aussi se forme de l’oxalate de potassium. L'importance fondamentale de la chaux dans la plante s’explique, selon l’auteur, par ce fait que sa présence élimine peu à peu l’oxalate acide de potassium, sel nuisible, en le transformant en oxalate de calcium; et en effet, lorsque la chaux vient à manquer, la plante ne tarde pas à périr sous l'effet de l’oxalate de potassium qui est pour elle, à partir d’une certaine dose, un véri- table poison, Aussi faut-il envisager l’oxalate de potas- sium, produit secondaire de l’assimilation des sels minéraux, comme un sel de formation antérieure à l’oxalate de calcium. De la sorte la chaux n'apparait pas comme un principe constitutif fondamental de la cellule vivante. Dans la dernière partie de son travail, l'auteur est amené à penser que les conditions de l'assimilation de l'acide nitrique sont les mêmes que celles de l'acide carbonique, savoir : présence de la chlorophylle et de la lumière. L’acide nitrique serait donc réduit par le pigment vert comme l'acide carbonique, avant que son azote puisse être assimilé; il en serait de même pour l'acide sulfurique. Au contraire, l'acide phospho- rique des phosphates serait employé comme tel à l'édi- fication des matières organiques, et non au préalable réduit comme les acides précédents. Il va sans dire que de nouveaux faits sont nécessaires pour donner un plus grand fonds de vérité à l’idée générale de l’au- teur, savoir : que tous les principes minéraux subi- raient leur première élaboration organique dans le parenchyme vert de la plante, particulièrement dans le mésophylle. Er. BELZUNG. Chauveau, Membre de l'Académie des Sciences, Professeur au Muséum. — Le travail musculaire et l'énergie qu'il représente. — Un vol. in-8°. (8 fr.) | — Asselin et Houzeau, éditeurs, place de l'Ecole de Mé- decine, Paris, 1891, «Le muscle contracté est un organe qui a subitement acquis une très grande élasticité, » Cette définition résume l'idée essentielle du livre de M. Chauveau, Comme le fait remarquer l’auteur, la conception qu’elle exprime n’est pas nouvelle, car elle se rattache à la théorie jadis émise par E, Weber. Il s’en faut ce- pendant que tous les physiologistes l’aient adoptée. M. Chauveau a fait mieux que de la rajeunir : l'étude serrée à laquelle il l’a soumise, les vues personnelles qu'il y a introduites, lui donnent un véritable cachet d'originalité. La notion du #ravail en physiologie ne saurait en effet être considérée comme identique à ce que l’on désigne sous ce nom en mécanique. Le méca- nicien ne peut concevoir un travail sans déplacement ; aux yeux du physiologiste, au contraire, l'effort dé- ployé pour maintenir un poids en équilibre constitue une réelle dépense d'énergie, M. Chauveau donne à cette dépense le nom de travail, prenant d’ailleurs soin de définir, dès le début de son livre, les termes du vocabulaire qu'il adopte. Dans les conditions statiques, alors, par exemple, que le bras maïntient un poids dans une position dé- terminée, l'énergie dépensée ou, — ce que M. Chau- veau regarde comme synonyme, — l’élasticité de con- traction créée »,doit répondre à deux objets : l’un, tout intérieur, ayant pour obstacle la résistance du muscle au raccourcissement ; l’autre, extérieur, destiné à faire équilibre au poids tenseur, Au moyen d'une série de graphiques, l’auteur montre les relations qui existent entre ces deux facteurs au point de vue de la « création de l’élasticité ». Si le muscle reste dans un état de rac- courcissement constant, c’est-à-dire, dans le cas étudié, si le bras forme un angle constant avec l’avant-bras, l'énergie totale, autrement dit, « la création d'élasticité * nécessaire pour maintenir des poids différents au même 426 niveau » sera fonction uniquement de ces poids. En d’autres termes, à l’état d'équilibre, l’élasticité de con- traction ne dépend que du poidstenseur, croît et décroit avec lui, Mais, si l’on étudie diverses positions d’équi- libre, il faut naturellement faire intervenir le second facteur, la résistance musculaire, variable avec le rac- courcissement : on reconnaît alors que l’élasticité, telle que l’entend M. Chauveau, est en définitive fonction du produit du raccourcissement par la charge. Pour vérifier ses conceptions, M. Chauveau s’est atta- ché à déterminer l’échauffement du musele travaillant en différentes conditions. Ses expériences, qui rappel- lent celles de Béclard, bien qu'avec des conclusions dif- férentes, ont porté sur le biceps de l’homme; les va- riations thermiques, malgré les causes d’erreur inévi- tables en pareille recherche, constituent encore les meilleures indications du travail fourni par le muscle, car ce travail n’est lui-même que «la substitution de la force élastique de contraction à l’énergie chimique _originelle. » La question du raccourcissement muscu- laire ou de la dépense d'’élasticité cachée, — par oppo- sition à l’élasticité effective, fonction du poids, — trouve son critérium dans les lectures du thermomè- tre : pour un même travail externe l’échauffement varie suivant le raccourcissement du muscle. Ces données s'appliquent aussi, d’après M. Chauveau, à l’état dynamique : l’'éminent physiologiste considère le muscle qui soulève une charge comme passant par une infinité d'états statisques, Sa théorie et l’expé- rience montrent que l'énergie dynamique déployée par un muscle soulevant une charge et la ramenant à son point de départ, est égale à la moyenne des quantités d'énergie déployées à l’état statique pour maintenir, pendant le même temps, la même charge aux deux points extrêmes de la course. Il existe toutefois un certain écart entre le chiffre théorique et le chiffre ex- périmental, ce dernier étant légèrement inférieur à la moyenne, M. Chauveau cherche l'explication de cette différence dans l'intervention d’un facteur nouveau : le travail des plaques motrices terminales. L'auteur a annexé à son livre une partie documen- taire très importante, où l’on trouvera ses recherches antérieures sur la dynamique animale, travaux qui l'ont amené à la conception dominante du présent ouvrage, PAU? 4° Sciences médicales. Boulloche (Pierre). — Sur la polyarthrite suppu- rée et les myosites déterminées par le pneu- mocoque. Archives de médecine expérimentale, Paris, mars 1891, t. III, p. 252. Dans un cas de polyarthrite aiguë chez un enfant de 5 ans, mort d’une pneumonie développée 7 jours après le début des accidents, M. Boulloche a constaté dans le pus articulaire l’existence du pneumocoque de Talamon- Fraenkel. Plusieurs masses musculaires, enflammées et suppurées, contenaient de même despneumocoques. C’est là une localisation encore inconnue au cours de l'infection pneumococcique. Henri HARTMANN. Monin (Dr E.), Secrétaire de la Société française d'Hygiène. — Formulaire de Médecine pratique 1 vol, in-8° de 566 pages (Prix : 5 fr.). Société d'éditions scientifiques, 4, rue Antoine-Dubois, Paris, 18941, Ce livre renferme une multitude de formules. L’au- teur les a classées suivant l’ordre des maladies aux- quelles elles se rapportent. Il y a fait une grande place aux nouveaux remèdes, dont il importe de faire usage «pendant qu'ils guérissent », fournissant ainsi au lec- teur philosophe l’occasion de méditer sur les fluctua- tions de la pratique médicale. Dans un « Avis » spirituellement écrit, comme tout ce qui sort de sa plume, le D Monia passe en revue cette succession de médicaments que les découvertes de la science ou les caprices de la mode ont rendus célèbres en ces dernières années : BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX « D'abord, c'est l'accroissement énorme des antiseptiques et désinfectants, dont la consommation suit parallélement les progrès de la révolution microbienne : l’acide phénique, par exemple, dont la Pharmacie Centrale fournissait 369 kilo- grammes en 1876, atteint, en 1885, 11.217 kilogrammes. Les proportions sont analogues pour l'acide borique, le sublimé, etc. « Les salicylates se sont ancrés aussi dans la faveur de l'opinion; et leur vogue méritée, pour le traitement du rhuma- tisme et de la goutte, n’est probablement pas près de dispa- raitre. Le fer et l’arsenic fournissent toujours un chiffre invariable et important de médicaments, souverains contre les anémies, l’herpétisme, etc... La médication alcoolique (très à la mode vers 1877, à l'époque où nous soutenions notre thèse) a sensiblement perdu du terrain : on commence à lui reconnaître des inconvénients trop réels et spécialement une action souvent offensive sur le tube digestif. « La caféine, dont les hôpitaux consommaient 10 grammes seulement en 1876, arrive aujourd’hui à 6 kilogrammes : c’est un tonique du cœur, qui a certainement nui (est-ce à tort, est-ce à raison ?) à l'antique digitale, reconstituante et régu- latrice par excellence du système vasculaire, « Le chloroforme et l’éther, ces merveilleux agents anesthé- siques, voient leur consommation augmenter de jour en jour, à mesure que l'audace de la chirurgie s’accentue et que se multiplient les grandes opérations. La morphine, si puissante dans le combat contre la douleur, monte au chiffre annuel de 17 kilog. : chiffre énorme, si l’on songe que la dose moyenne de ce médicament est un centigramme. «En 1832, les marais de la Hongrie étaient dépeuplés de leurs sangsues; mais, depuis cette époque, l'étoile de ces hirudinées n'a fait que décroître progressivement; à partir de 1876, leur consommation a encore dininué de moitié; et, en 1885, elle ne dépasse guère, annuellement, 26.000. Aujourd’hui, en effet, la déplétion sanguine n’est plus en honneur : la mode est aux ioniques et aux défervescents; et le praticien contem- porain semble avoir pris pour devise : Avec la dernière lancette, Saignons la dernière sangsue! « Parmi les autres médicaments dont il faut signaler la marche ascensionnelle, citons le chloral, si précieux contre l'insomnie ; l’aconitine, qui calme-les douleurs névralgiques ; l’atropine, qui tarit les sueurs profuses de la phtisie; l’anti- pyrine, dont la vogue immense et certainement exagérée a fait, en peu de temps, la fortune des Allemands. L’augmen- tation incessante des maladies du système nerveux explique fort bien le grand succès des bromures, qui ont pris, de nos jours, une extension colossale, puisque les hôpitaux de Paris en consomment actuellement près de 1.000 kilogrammes par an. « Pendant que les bromures gagnent du terrain, nos vieux antispasmodiques, jadis si vantés (tels que le camphre, le muse, les valérianées, l’assa-fœtida, le laurier-cerise, etc...) tendent à disparaitre de la pharmacopée hospitalière. Il en est de mème de la vératrine et d’autres alcaloïdes dont le dis- crédit s’explique moins. L’ergotine, ce puissant excitant des muscles de la vie animale, suit, au contraire, une marche ascendante. Le jaborandi décline, malgré ses brillantes pro- messes d'il y a dix ans : ses défauts sont d’être un agent trop infidèle et d’un secours thérapeutique encore mal défini. « Gui Patin serait heureux s’il pouvait constater la déca- dence actuelle des antimoniaux et de l’émétique, qu’il appe- lait si méchamment {artre stygié. Il applaudirait aussi aux progrès incessants que font les balsamiques, et notamment la créosote et la térébenthine, contre les affections catarrhales de tout genre. « L'usage de la viande crue en médecine et en alimentation, celui de la viande mal cuite, tendent à diminuer, puisque le ténia ou ver solitaire est actuellement rare à Paris. (La poudre de viande et les vins de peptone remplacent avantageusement la pulpe de viande.) Comme conséquence, le kousso, la fou- gère mâle, la mousse de Corse, la racine de grenadier et les autres vermifuges sont notablement en baisse. La pepsine, dont les services sont si souvent douteux, est également sur son déclin. « L'iodure de potassium a doublé, en dix ans, sa consom- mation (1.079 kgr. en 1885). Cetimportant accroissement tient aux applications multipliées de ce médicament, fondant et résolutif par excellence, dont les bénéfices curatifs s'étendent aux affections les plus diverses. Les mercuriaux augmentent aussi, quoique bien moins: ils suivent la diffusion progressive de la syphilis à Paris. » Pourquoi le D' Monin a:t-il demandé au Professeur Peter une préface à son livre? Il faut avoir le courage de le dire, cette préface où l’écrivain blague Vintro- duction des méthodes précises de la science dans les choses de la médecine, est au-dessous de tout. EXO: D dt À d'in dolce 2 andir ÉSA ARSSSS L ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER La Revue analysera prochainement les travaux de diverses Académies et Sociétés dont, par exception, le compte- rendu n'a pu trouver place dans le présent numéro, ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 1° juin 1891. 41° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. À. Pellet : Sur les équations abéliennes. — M. A. Duboin propose, pour apprécier le mouvement vertical des aérostats, un ap- pareil très sensible; c’est un manomètre différentiel de Kretz, rempli d’un côté par de l'essence de téré- benthine, de l’autre par un mélange d’eau et d’alcool de densité très peu supérieure; la branche de ce côté peut être fermée par un robinet; un mouvement ver- tical de l’aérostat de 10 mètres, à partir du moment où l’on ferme le robinet, s’accuse par un déplacement de 10 centimètres de la surface de séparation des liquides. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. F. de Lalande à per- fectionné la pile inventée par M. Chaperon et lui, où la réaction consiste à attaquer le zinc par la potasse caustique et à dépolariser par la réduction de l’oxyde de cuivre; par l’emploi d’agglomérés d'oxyde de cuivre métallisés superficiellement, il donne à ces couples une résistance très faible avec une grande constance. — Une note de M. A. Crova sur l'analyse de la lumière diffusée par le ciel, contient les conclusions du travail communiqué par lui à la séance précédente, —M, Mas- cart présente le second volume du Traité d'Optique dont il a entrepris la publication, — La densité d’un corps au point critique est donnée en fonction des éléments du point critique, pression, température ab- solue et volumes critiques, par une formule où inter- vient un facteur F que M. Van der Waals posait égal à 2,67; l'expérience démontre que l’approximation de ce chiffre est insuffisante; d'autre part, M. Sarrau a donné comme expression de F une fonction du coefficient « et $ de son équation ; mais les valeurs de ces coefficients ne sont connus que pour deux gaz. M. Ph.-A. Guye propose de regarder ce facteur, pour une première approximation, comme une fonction linéaire de la tem- pérature critique absolue du corps considéré, soit F—A(1—+ B0); les valeurs numériques de A et B étant déterminées au moyen de données relatives à l’azote et à l'iodobenzine, on a les éléments pour calculer la densité critique ; on sait que celle-ci doit être égale au poids mo- léculaire divisé par 28,87; la formule proposée par M. Guye donne pour huit corps très différents des valeurs de d, qui ne s’écartent que très peu de la valeur LT. æ 20,0 1 MM. Berthelot et André ont étudié, au point de vue calorimétrique, l'acide humique dérivé du sucre et ses sels, qu’ils avaient étudiés au point de vue chimique dans une communication précédente; les conclusions de leurs recherches sont les suivantes : l'acide humique est. un acide polybasique; il se déshydrate partiel- lement par dissociation; il peut se combiner à trois équivalents de base ; la combinaison avec le premier équivalent est très énergique etcomparable à la combi- naison des acides minéraux forts avec les oxydes alea- lins ; les deux équivalents suivants dégagent par leur combinaison beaucoup moins de chaleur, Ces matières humiques, comparables à celles du sol, éprouvent ainsi, sous l'influence d’une base, des phénomènes d'hydratation, puis, par l’action inverse des acides, des effets de déshydratation spontanée par dissociation; séries d’effets susceptibles de constituer un mécanisme en vertu duquel les énergies extérieures seraient conti- nuellement introduites dans les réactions chimiques accomplies pendant le cours de la végétation natu- relle, Enfin, acide humique est formé depuis les sucres avec dégagement de chaleur, mais ce dégagement ne dépense qu'une portion de l’excès thermique de ces hydrates de carbone sur le carbone et l’eau, suscep- tibles d’être formés par destruction totale; il en résulte que l'acide humique serait formé également depuis le carbone et l’eau avec absorption de chaleur, c’est-à- dire qu'il renferme un excès d'énergie susceptible d’être dépensé dans le cours des transformations con- sécutives qui s'opèrent par des actions purement chimiques ou avec le concours des agents microbiens, soit dans le sol, soit au contact du sol et des végétaux. — M. C. Matignon a fait l'étude thermique des pro- duits d’oxydation de l'acide urique; il a déterminé les chaleurs de combustion de l’allantoïine, de l’alloxane et de l’alloxantine, et la chaleur dégagée par la trans- formation de l’alloxane en alloxantine sous l’action du protochlorure d'étain; la comparaison des chaleurs de dissolution de lalloxane sous ses différents états d'hy- dratation montre que le composé C#02A7?H? doit être, conformément à l’hypothèse de Baeyer, considéré comme l’anhydride de l’alloxane, la chaleur dégagée par la première molécule d’eau étant hors de propor- tion avec l’adjonction d’une molécule d’eau de cristal- lisation, — M. W. Timofeiew continue ses recherches sur les chaleurs spécifiques des solutions, — MM, A. Joly et E. Leidié indiquent une méthode pour rechercher et séparer les métaux du platine, en parti- culier le palladium et le rhodium, en présence des mé- taux communs : cette méthode est fondée sur l’étude antérieurement faite par ces auteurs des combinaisons de ces métaux avec l'acide azoteux. — M. Ferreira da Silva à examiné l’action sur une nombreuse série d’al- caloïdes du réactif proposé par M. Lafon pour la mor- phine et la codéine, le sulfosélénite d’ammoniaque; avec divers alcaloïdes, ce réactif développe des colo- rations caractéristiques. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. H. Fischer a étudié l’évolution des organes hépatiques des Mollusques nudibranches pendant la période larvaire libre, en particulier sur lÆolis erigua; ses recherches lui ont montré que le foie de l'adulte est formé en grande partie par le lobe hépatique gauche de l'embryon; par suite, le foie des Nudibranches est homologue de celui des Lamellibranches. — A propos de la note de MM. Prillieux et Delacroix, donnant le nom de Botrytis au Cryptogame parasite du hanneton (11 mai), M. A. Giard, qui avait déterminé ce parasite comme un Isaria (Soc. de Biologie, 11 avril), rappelle que les formes Isaria et Botrytis ne sont pas des êtres distincts, mais des stades évolutifs différents de Champignons asco- mycètes mal connus; pour le parasite du hanneton en particulier, la forme Botrytis s’observe dans des condi- tions de végétation défavorables; les milieux de culture fortement azotés donnent un meilleur rendement en spores que les pommes de terre employées par MM. Prillieux et Delacroix, — M. J. Vesque examine divers genres de la tribu des Clusiées, en particulier le genre Tovomita au point de vue des caractères éphar- moniques et propose une classification de ces genres, fondée sur la phylogénie, — M, E. Pée-Laby a étudié les éléments de soutien de la feuille de diverses Dico- tylédones ; il décrit diverses formes de fibres et de cel- lules seléreuses, — M. G. Hallauer à constaté que, si l’on arrose les feuilles de mrier dont se nourris- 128 sent des vers à soie exempts de pébrine avec une infu- sion à froid des lichens du tronc des müriers, ces vers se remplissent de corpuscules de pébrine; M. Hal- lauer propose en conséquence de cultiver le mûrier en taillis, pour éviter la production des lichens sur les troncs. — M. H. Quantin indique que l’on peut facile- ment émulsionner le sulfure de carbone dans l’eau au moyen de l'huile et du carbonate de soude; l’émulsion ainsi obtenue est très toxique pour les parasites aériens des végétaux. — M. L. Cayeux a trouvé dans la craie du Nord de la France l’oxyde de titane sous trois formes cristallines distinctes, inégalement disséminées dans les diverses assises crétacées, Mémoires présentés. — M. Louis Ducos du Hauron soumet au jugement de l’Académie un travail sur la photographie des couleurs, — M. E. Granges adresse une note ayant pour titre : Récipients permettant de déverser au dehors les gaz plus lourds que l'air qui s’y dégagent ou s’y accumulent, — MM, Villoch et Molina adressent un mémoire sur la reproduction des an- guilles. — M, J. Géraud adresse une note sur un sys- tème d’aérostats dirigeables, — M. Lembert-Roguin adresse une note sur la direction des aérostats. Séance du 8 juin 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F,. Caspary : Sur deux systèmes d’équations différentielles dont les fonctions hyperelliptiques de première espèce forment les intégrales, — M. Perrotin : Eclipse partielle du 6 juin, observée à Nice, — M. Charlois : Observations de la nouvelle planète, découverte à l'Observatoire de Nice le 19 mai 1891. — MM. G. Rayet et L. Picart : Observations de la comète Brooks, 1890, II, faites au grand équatorial de l'Observatoire de Bordeaux. — M. O. Callandreau applique la théorie de la capture des comètes périodiques de M. Tisserand à l’étude des étoiles filantes. — M. V. Serrin présente un nouveau système de balance de précision à pesée rapide; l’in- novation consiste essentiellement dans l'emploi d’une etite chaîne dont une extrémité est fixée à l’un des ras du fléau, tandis que l’autre glisse le long d’une colonne verticale par l'intermédiaire d’un curseur muni d’un vernier; la manœuvre de ce curseur rem- place l'emploi des poids divisionnaires et du cavalier. 2° SciENCES PHYSIQ0Es. — M. C. Miculesco a repris la question de la détermination de l'équivalent mécani- nique de la chaleur; comme Joule, il a échauffé de l’eau par un travail mécanique, mais il a produit cet échauffement beaucoup plus rapidement de facon à éviter les corrections; le travail était fourni par un moteur électrique Gramme monté sur deux couteaux horizontaux passant par son axe. Ce travail était me- suré par la force nécessaire pour empêcher le système de s’incliner ; la mesure de la quantité de chaleur était faite à température constante, avec un courant d’eau froide enlevant la chaleur à mesure qu’elle est pro- duite. M. Miculesco a trouvé ainsi pour l’équivalent mécanique de la chaleur la valeur 426, 7 ; le nombre de Joule, corrections faites pour ramener les tempéra- tures au thermomètre à air à Paris, est 426, 5. — M. E. Bouty a étudié les propriétés diélectriques du mica jusqu'à la température de 400°; jusqu'à 3009, la constante diélectrique ne varie qu’extrèment peu; de 300° à 4009, les mesures sont très difficiles à effectuer avec précision; il est possible que la conductibilité du mica augmente un peu, mais ce ne peut être que dans des limites très étroites. — M. P. Germain propose, pour employer aux grandes distances le transmetteur téléphonique sans pile de Bell, de diviser l’'embou- chure en plusieurs parties, munies chacune du même système, et de grouper en tension les divers circuits ainsi obtenus. — M. H. Faye, à propos d’une discus- sion survenue entre deux météorologistes étrangers sur la théorie des cyclones, insiste sur la nécessité de dis- tinguer des vrais cyclones dont l’angle de déviation est de 90°, les aires de basses pressions, dans lesquelles les brises soufflent irrégulièrement et coupent les ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES isobares sous un angle plus ou moins aigu. Il expose la marche des courants aériens qui transportent sans cesse vers les pôles l'air chaud de l’équateur ; il montre comment ces courants, déviés d’abord vers l’ouest, puisque l’air en montant part d’un point où la vitesse de rotation est moins grande que dans les couches supérieures, puis deviés vers l’est par l'effet de cette rotation, présentent une double courbure; de la dif- férence de vitesse d’un bord à l’autre résultent des tourbillons dont les spires, d’abord larges, vont vers le bas en se rétrécissant et en augmentant de vitesse; ce sont là les cyclones dont il a exposé récemment le diagramme complet, avec toute la série d’épiphéno- mènes qu'ils présentent latéralement. — M. R. Varet à étudié l’action de l’ammoniaque sur quelques com- binaisons des sels halogènes de mercure; il à obtenu des produits d’addition avec le cyanure de mercure et le chlorocyanure de mercure et de baryum. — M. A. Besson décrit un nouveau procédé de prépa- ration des chloroiodures de silicium, qui consiste à distiller du chlorure d'iode sur du silicium cristallisé chauffé à une température voisine du rouge. 3° SCIENCES NATURELLES. — M, L. Guignard : Sur la na- ture morphologique des phénomènes dela fécondation. (V. Soc. de Biologie, 43 juin.) — MM. J. P. Morat et Doyon ont trouvé que le sympathique cervical con- tient des fibres inhibitoires du musele ciliaire; si l’on observe les images de Purkinje de l'œil d’un chien pen- dant que l’on excite le sympathique au cou, on voit s’'agrandir l’image cristallinienne ; ce nerf aurait donc un rôle actif dans l’accomodation pour la vision au loin. — M. H. Prouho avait signalé antérieurement un Bryozoaire marin qui pond ses œufs au dehors et dont l’évolution larvaire se fait par conséquent en vie libre; il à retrouvé deux autres espèces qui offrent la même particularité; les embryons de ces trois espèces, dis- tinctes l'une de l’autre, passent par un stade caracté- ristique, que l’on peut considérer comme le type lar- vaire des Bryozoaires à développement libre, et qui est la forme décrite sous le nom de cyphonautes. — M, de Lacaze-Duthiers rapporte que l’on a pêché à Ba- nyuls un exemplaire du genre très-rare Kophobelemnon (Alcyonaire) ; cet exemplaire est conservé vivant dans l'aquarium du laboratoire. — M. Ch. Brongniart communique diverses remarques qu'il a faites sur les criquets en Algérie, relativement à l'attitude pendant le vol, au phénomène de la ponte, etc. Par dépêche, il annonce qu'il à trouvé quantité de pèlerins morts, tués par le cryptogame Botrytis. — MM. Gallippe et L. Moreau ont cherché s’il existait des parasites bae- tériens dans les cristallins malades enlevés chirurgica- lement ; ils en ont trouvé dans la plupart des cas. — M. A. Rommier rappelle qu'il a été le premier à proposer le solution aqueuse de sulfure de carbone contre le phylloxéra : aujourd’hui ce mode de défense des vignes tend à se répandre. — M. A. Gaudry si- gnale la découverte du premier grand mammifère fos- sile en Tunisie, le Mastodonte du Chérichira ; il a vi- sité le gisement. — M. J. Seunes résume dans un ta- bleau la série des assises du crétacé supérieur des Pyrénées occidentales et expose diverses considérations sur la nomenclature des étages qu'elles représentent, — M. A. Lacroix a étudié les enclaves de syénites né- phéliniques trouvées au milieu des phonolithes du Hohgau et de quelques autres gisements ; de cette étude il tire la conclusion qu'un même magma peut donner soit de la syénite néphélinique, soit de la phonolithe, suivant les conditions qui ont présidé à son refroidis- sement, Nominations. — M. Moissan est élu membre de l'Aca- démie pour la section de chimie. Mémoires présentés. —M. Devaux adresse un mémoire sar un « Siphon à réservoir pneumatique ». — M. A. Pernot adresse la description et les plans d’un « Nou- veau moteur à gaz». — M. Baudran adresse un mé- moire sur la photographie de couleurs. — M. C. H. Steinbrueggen adresse une note sur un procédé de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 129 son invention ayant pour but de faire disparaitre les pucerons de la vigne, — M. H. Moulin adresse une note ayant pour titre : « La force élastique des gaz vient de la tension de la molécule et est indépendante du poids atomique ». L. LariQque. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 13 juin 1891. M. L. Guignard a observé chez le Lys le rôle que jouent les sphères attractives dans le phénomène de la fécondation ; les deux centrosomes de la cellule polli- nique fécondante sont situés en avant du noyau, dans le sens de la progression dans le tube; ceux de l'oosphère sont situés au-dessus de son noyau; par suite, quand la cellule mâle pénètre dans la cellule fe- melle, le contact s'établit d’abord entre leurs sphères respectives, et c’est après leur fusion que s’accomplit celle des noyaux. M. Guignard fait remarquer que ces observations rendent au protoplasma un rôle impor- tant dans la fécondation, et que le phénomène peut être généralisé, puisque M. H. Fol vient d'observer des faits analogues chez un oursin., — MM. H. Héricourt et Ch. Richet ont constaté que les cultures tuberculeuses contiennent une substance soluble dialysable, résistant à une température de 1259, qui est plus toxique pour les lapins tuberculeux que pour les lapins normaux. — M. Roque da Silveira présente un cobaye dans le péri- toine duquel il a été inoculé, suivant les indications de M. Straus, du jetage d’un cheval morveux; trois jours après, l’orchite caractéristique à apparu; le péritoine est sain. — M. L. F. Henneguy, dans des observations portant sur la division indirecte des noyaux du para- blaste de la truite, a reconnu qu'il peut exister plus de deux sphères attractives agissant sur un même noyau, que dans ce cas les figures achromatiques se comportent vis-à-vis de ces sphères attractives exacte- ment comme la limaille de fer des spectres magné- tiques vis-à-vis des pôles des aimants; il s’agit donc bien de véritables centres d'attraction, — A la suite de la communication de M. Grigoreseu (16 mai) sur les variations du temps de réaction chez les malades at- teints de myélite, et l'importance de ces variations au point de vue du diagnostic, M. Bloch et M. Grigorescu discutent la valeur des indications fournies par les diverses méthodes connues et la possibilité de déter- miner la vitesse de transmission nerveuse sensitive, M. Railliet est élu membre de la Société. L. Lapicoue. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 19 juin 1891. M. Serrin présente une nouvelle balance de préci- sion à pesées rapides. Lorsque l'équilibre est atteint à un décigramme près, l’auteur a recours, pour rem- placer les derniers poids, au poids d’une petite chaîne qu'on déroule à volonté, jusqu’à ce que le poids de la partie déroulée représente exactement les derniers poids qu'il faudrait ajouter. L’extrémité de la chaine porte un curseur qui se meut sur une règle verticale divisée. Connaissant le poids de la chaîne entière et la longueur de la course extrême du curseur, on obtient, par proportionnalité, les poids correspondant aux di- verses positions du curseur et on les inscrit une fois pour toutes sur la règle. Un autre avantage qui résulte de la présence de cette chaîne, c’est d’amortir les oscil- lations. — M. Schwedoff fait fonctionner sous les yeux de la Société l'appareil qu’il a imaginé pour rendre compte de la formation des cyclones. Un cristallisoir de dimensions assez considérables contient une hau- teur d’eau de 15 à 20 centimètres, et est animé d’un mouvement de rotation continu autour de son axe vertical. Un système de conduits permet, pendant la rotation, d’injecter ou au contraire d’aspirer de l’eau par un ajutage excentrique disposé dans le fond du vase, De la sciure de bois disséminée dans le liquide servira à manifester les mouvements du liquide. Lors- _ que l’orifice de l’ajutage est vertical, les tourbillons qui prennent naissance sont faibles; ils deviennent beaucoup plus intenses si l’orifice est orienté horizon- talement. Par analogie, on doit admettre que, dans l'atmosphère, ce sont les déplacements horizontaux qui donnent naissance aux cyclones. D'ailleurs, les ob- servations directes sur la vitesse de déplacement des nuages montrent que ces vitesses atteignent des va- leurs suflisantes pour permettre cette formation des cyclones, — M. G. Weiss expose ses recherches sur l'excitation électrique des muscles. On admet généra- lement que l'élément qui fait varier la grandeur de la contraction est surtout la force électromotrice, tandis que l'intensité n'aurait qu’une importance secondaire. M. Weiss est amené, au contraire, à conclure de ses recherches que c’est l'intensité qui influe et non Ja force électromotrice. Il expose à la Société les diverses méthodes qu'il a mises en œuvre. Il s’est servi d’abord des décharges d’un condensateur, En se plaçant dans les conditions où la loi d'Ohm peut être considérée comme applicable au condensateur, l'intensité est donnée par une formule simple en fonction de la diffé- rence de potentiel, de la capacité, et de la résistance du conducteur. Il est facile de faire varier ces divers élé- ments à volonté, de manière que la loi de variation d’in- tensité pendant la décharge soit connue; mais on a un passage brusque d'intensité de O à 1 au commencement de la décharge : cette période fausse la plupart des expé- riences, sauf en un cas très particulier. Pour connaître la loi de la variation d'intensité du courant traversant un muscle, M. Weiss interpose ce muscle sur le trajet d’un conducteur qui relie à la terre un point A pour lequel la loi de la variation des potentiels est connue en fonction du temps. La loi de la variation du courant traversant le muscle est évidemment la même que la loi de variation du potentiel du point A. Au procédé employé par M. d'Arsonval pour faire varier le poten- tiel du point À, el qui consiste à faire occuper à ce point diverses positions dans une colonne de mercure dont les extrémités sont maintenues à des potentiels lixes, M. Weiss préfère substituer un appareil formé par la superposition d’un grand nombre de lames de cuivre alternant avec des feuilles de papier paraffiné : les deux extrémités sont reliées au sol, tandis que le centre est relié à une source d'électricité. Sur la tranche des lames de cuivre se déplace un frotteur. C’est ce frot- teur, porté ainsi à chaque instant à des potentiels diffé- rents, qui constitue icile point A. Cette méthode, quicon- siste à intercaler directement le muscle sur le conduc- teur même qui relie le point A au sol, et qui fait que le muscle se frouve traversé par des courants connus, semble à Pauteur préférable à la méthode de M. d’Ar- sonval, dans laquelle un condensateur se trouve inter- calé entre le muscle et la terre. Ce condensateur, des- tiné à fournir la mesure de la quantité d'électricité, serait loin d'atteindre le but. En terminant, M. Weiss formule nettement ses conclusions : ce qui importe, c’est l'intensité du courant, c’est le mode d’établis- sement de ce courant depuis la valeur zéro jusqu’à i, puis les variations dei; en un mot, pour que l’excita- lion soit complètement déterminée, il suffit de déter- miner la fonction i=f{t). Les valeurs de à importent seules, peu importe comment elles sont atteintes, qu'on ait été obligé ou non de recourir à un rhéostat, — M. d'Arsonval répond à lacommunication précédente. Avant de réfuterles critiques adressées à ses recherches personnelles, il reprend rapidement l'exposé des tra- vaux antérieurs, el montre comment on a été nécessai- rement amené à attribuer à la force électromotrice, et non à l’intensité, la cause des variations de l’excita- bilité musculaire, Il rappelle l’ingénieuse méthode de M. Chauveau, qui permet de faire varier à volonté la force électromotrice, tout en laissant la résistance rigoureusement constante, Il signale l’importance de la profonde dissemblance entre les deux pôles, au point de vue de Pexcitation des nerfs : le pôle positif coupe 430 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES l'excitation ; au contraire, le pôle négatif développe une hyperexcitabilité. IL montre comment cette influence polaire intervient bien plutôt que l'intensité absolue du courant, pour rendre compte des observations di- verses faites sur l’excitabilité des nerfs et des muscles de Ja grenouille préparée à la manière de Galvani. De plus, on sait que, lorsqu'un nerf a été traversé pendant quelque temps par un courant continu, les conditions d'excitabilité sont absolument modifiées; aussi doit-on rejeter ces courants pour recourir uniquement aux flux instantanés. C’est alors que M. Chauveau a indiqué un dispositif dont celui de M. d’Arsonval n’est qu’une mo- dification. Les deux pôles d’une pile sont reliés à la terre, l’un d’eux, au travers d’une longue résistance. On produit les variations dans la valeur du potentiel en opérant la prise de potentiel en différents points au moyen d’un fil muni d'un interrupteur à levier, Au- delà de l'interrupteur, le fil se rend au nerf, puis celui-ci est relié à une sphère conductrice isolée, de dimensions variables. De la sorte, on connaît les deux éléments du flux d'électricité qui traverse le nerf : le potentiel et la quantité d'électricité, A la sphère M. d’Arsonval substitue avec avantage un condensateur de capacité variable. Puis, comme la décharge instan- tanée du flux primaire pourrait encore produire une polarisation et modifier l’excitabilité du muscle, l’au- teur s’est servi, dans ses expériences récentes, de l’ex- citation du circuit secondaire d’une bobine d’induc- tion. Ce courant secondaire fournissant, pour un seul flux primaire, deux flux consécutifs de sens contraire, ne saurait produire aucune polarisation. Enfin, relati- vement aux effets variables que produisent des cou- rants d'intensité égale, mais dans lesquels cette valeur de l'intensité est atteinte par des procédés différents, M. d’Arsonval reconnaît que, sans doute, ces variations sont assez inattendues, mais malgré l'impossibilité où l'on est actuellement de les expliquer, on doit néan- moins admettre les faits constatés avec certitude. Edgard Haupié. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE MINÉRALOGIE Séance du 11 juin 1891. M. Gonnard envoie trois notes dans lesquelles il étu- die la barytine et la mésotype des divers gisements du Puy-de-Dôme et l’aragonite de Neussargues (Cantal). — M. Couttolenc adresse un petit appareil destiné à faci- liter les séparations de minéraux à l’aide de liquides denses. — M. Dufet, revenant sur une communication antérieure, étend à la calcite et à l’alun l'observation qu'il avait faite précédemment au sujet des variations que la taille introduit dans la valeur des indices de réfraction . des minéraux tendres. — M. Lacroix annonce la décou verte de la christobalite (forme pseudoquadratique de silice) comme produit de nouvelle formation dans des enclaves de grès emballés par le basalte de Mayen (Eifel). Ce minéral se trouve avec tridymite et quartz. C’est la première fois que l’on rencontre ces trois for- mes de silice réunies, M. Lacroix présente en outre une note préliminaire sur un nouveau minéral (Morinite), provenant de Montebras (Creuse) : c’est un fluophos- phate hydraté d’alumine et de soude, monoclinique, qui semble formé aux dépens de l’amblygonite, — MM.Ba- ret et Lacroix signalent l’existence de la Bertrandite | à la Chapelle sur Erdre (Loire-Inférieure). A. Lacroix, SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 11 juin 1891, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — Sir William Thomson fait une communication sur quelques cas types qui peuvent servir à juger la théorie de Maxwell et Boltz- mann sur la distribution de l'énergie, 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. William Crookes pré- sente une note sur l’évaporation électrique. On sait qu'il se forme des dépôts de platine métallique dans les tubes vides où sont placées des électrodes de pla- tine et plus spécialement au voisinage du pôle négatif, Cette propriété, qui consiste en ce que les molécules de platine de la surface sont poussées hors de la sphère d’attraction de la masse métallique, ressemble d’une manière frappante à la volatilisation et à l’évaporatien ordinaires; aussi peut-on l'appeler évaporation élec- trique. Les vitesses des molécules liquides ou solides augmentent avec la chaleur, c’est-à-dire qu'à mesure que la température s'élève, la tendance des couches superficielles de molécules à sortir de la sphère d'at- traction des molécules voisines s'accroît; en d’autres termes, l’évaporation est facilitée. Le but principal des expériences de M. Crookes a été de déterminer l’action exercée par l'électricité sur l’évaporation de différentes substances. Les expériences sur l’évaporation de l'eau ont montré que l’eau, électrisée négativement, perd en 1h12 : 1000 On s’est servi de tubes « vides d’eau », spécialement construits à cet effet pour étudier l’évaporation élec- trique des métaux. On a constaté dans tous les cas que la couche déposée avait son maximum au voisinage du pôle négatif. La différence entre les quantités de métal déposées aux deux pôles est très considérable. On sus- pend des masses de cadmium à des électrodes de pla- tine dans un tube en U, vide d’air, placé dans un vase de fer, contenant de la paraffine à la température de 230° C. On fait alors passer un courant par le tube pen- dant 30 minutes, Voici les résultats obtenus : de son poids de plus que l’eau « isolée ». Pôle positif Pôle négatif Poids de cadmium avant l'expérience. 9.34 9.38 Poids après l’expérience.........2... 9,25 1.86 Cadmium volatilisé en 30 minutes.... 0.09 1:52 On a cherché aussi à déterminer les volatilités com- parées d’une sérié de métaux soumis aux mêmes con- ditions de température, de pression et d'influence électrique ; on a employé dans tous les cas des sur- faces métalliquss égales. Les tables suivantes indiquent les volatilités comparées et les valeurs obtenues en di- visant la volatilité par le poids spécifique du métal.Les chiffres sont rapportés à l’or : £ Quotient de la volatilité relative par Métaux Volatilité relative Métaux le poids spécifique Palladium..... 108.00 Palladium..... 9.00 DénDoe 0 0680 cet LUDLUD ATPeND- Eee 1.88 Arpent:-..-...e 82.88 BANC 7.76 Plomb." Mb AE Plomb #74 6.61 Etain rire 56.96 OL: Eee ee 5.18 Bronze-....... 51.58 Cadmium...... 3.12 Platine. 44.00 Cuire. 2.52 Cyr: 40.2% Platines. 2,02 Cadmium...... 31.99 Nickel ace 1.29 Nickele#- "tree 10.99 l'AS JR ES 0.71 Inidium.----0. 10.49 Iridium ..…. 0.47 Her: ete 5.50 Il semble n’exister aucune relation simple entre les volatilités électriques et les autres constantes connues, physiques ou chimiques. En plaçant au pôle néga- tif une brosse de fils d’or et en faisant passer le courant pendant 14 h. 1/2, on a obtenu une feuille d’or brillante pesant environ 3 grammes, qu'on a pu enlever des parois du tube. Si l’on se sert d’une brosse au platine, on ob- tient un dépôtfriable et poreux. — M. G. H. Robertson présente une note sur l’étude chimique de la pile de Planté, au plomb, à l’acide sulfurique et au peroxyde de plomb, Ilest arrivé aux conclusions suivantes : 1° I] n’y a aucune raison d'ordre chimique ou d'ordre électrique pour supposer qu'il se produise dans les réactions qui ont lieu dans la pile, d'autre sulfate que la sulfate blanc ordinaire Pb SO“. 2 Si l'abais- sement soudain de la force électromotrice était causé par un changement dans la nature des composés chimiques qui se forment sur les lames, il serait très difficile de s’expliquer la rapidité avec laquelle cette ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES force électro-motrice reparaît dans une pile qui semble déchargée, 3 Les peroxydes se retrouvent en quantités appréciables dans l’éléctrolyte pendant la charge et la décharge. 4° Leur influence ne doit pas être néglisée, si l’on veut se rendre compte du fonctionnement de la pile Planté. — MM. H. E. Armstrong et G. H. Robert- son font une seconde communication sur la même question, Ils s’attachent spécialement à la discussion des changements chimiques qui se produisent dans la pile. Voici leurs conclusions : 1° Le refroidissement qu'on observe dans la pile Planté ne peut s'expliquer que comme un résultat de la dissociation de l'acide sulfurique dilué. 2° La diminution d'action que l'on observe ne peut être due aux changements de tempéra- ture, puisqu'ils résultent de réactions qui se produisent hors du circuit. 3° Ilest difficile, en comparant les valeurs calculées de avec les valeurs observées, d'arriver à une conclusion définitive sur la nature exacte des changements qui se produisent dansla pile. 4% Une force électromotrice de 0,5 volt introduil dans le circuit rendrait compte de l'écart observé avec Ja plus haute valeur calculée, Comme il y a tou- jours des peroxydes dans l’électrolyte, on peut con- cevoir l'existence dans le circuit d’une pareille force ; mais il est possible aussi qu'il faille tenir compte de l'influence du support de plomb. 5° La diminu- tion d'action observée doit être attribuée à la formation de peroxydes dans l’électrolyte, et à la production excessive de sulfate, production qui a lieu surtout à la la lame de peroxyde, dans le circuit local qui existe entre les supports et la pâte.—M.Henry Nilde présente unenote sur l'influence de latempérature sur Pai- mantation du fer et d’autres substances magnétiques. Desexpériences, faites sur une barre cylindrique de fer malléable entre la température où la couleur de la barre était égal à DX 6895 et — 76° C, ont montré que le pouvoir magnétique diminue entre ces deux limites à mesure que la température s'élève. Des expériences comparatives sur l'attraction exercée par un électro-ai- mant, actionné par un courant de 20 ampères, sur des cubes de fer, de nickelet de cobalt font voir que, pour le cobalt comme pour les deux autres métaux, la force magnétique diminue entre — 76°C etune température où il prend une couleur qui correspond à la longueur d’onde 6141 ; mais la force magnétique du cobalt croit cependant de — 76° à + 442 C et ce n’est qu'au-des- sus de 42° que commence sa décroissance régulière jusqu'aux plus hautes températures. La décroissance du pouvoir magnétique du fer et du nickel chauffés semble dépendre de la masse qui est en relation avec la force d’aimantation qu'on emploie. Le cobalt pré- sente une diminution analogue du pouvoir magnétique si une force relativement considérable est employée pour aimanter une petite quantité de métal. La table suivante renferme les résultats des expériences faites sur de petits cylindres de fer, de nickel et de cobalt, de 0,06 pouce de long, de 0,05 pouce de diamètre et qui pesaient 1/4 de grain : FORCE D'ATIRACTION — —* TEMPÉRATURES Courant courant par pouce carré 5 ampères 20 ampères 20 ampères Fer livres livres livres 4420C... 0.390 0.547 130 CC... 0.457 0.601 305 Nickel 4420C... 0.001 0.003 139C... 0.06% 0.137 64 Cobalt Couleur:}6496 0.109 0.172 4490 C... 0.156 0.296 ASC 0.140 0.304 154 Rapport de la force d’attraction au poids des métaux RAS CO re ee ete nie 17000 NT E root Tee OP 3300 CH nette PE ODA OON 0 8000 431 | SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 15 juin 1891. SCIENCES NATURELLES, — MM, Johnson Symington et | D' H. A. Thomson communiquent une note sur un cas d’ossification endochondrale défectueuse dans un fœtus humain. — D' Berry Hayeraft : « Sur les sels alcalins et acides du sang et de l’urine, et spéciale- | ment sur les sels de l'acide phosphorique. » — D' Mac- | farlane présente la seconde partie de son mémoire sur la structure, la division et l’histoire de la cellule végétale el animale; il montre que la cellule type com- prend le protoplasma, le nucléus, le nucléolus et l'endo- nucléolus, le tout entouré par la cloison cellulaire; le nucléolus à un rôle important dans la division et l'union sexuelle des cellules; l’état multiendonucléolaire est suivi d’un état mullinucléolaire et celui-ci d’un état multinucléaire. Le D' Macfarlane lit aussi un mémoire comparant la structure des plantes hybrides et celle de leurs parents : cette communication à un rapport étroit avec les précédentes. Il conclut en attribuant à la couleur, la période de floraison et la vigueur cons- titutionnelle des plantes hybrides, et à la lumière qu'elles recoivent les particularités signalées sur les effets de l’entourage, de l'influence du sexe et de l’hé- rédité, W. PEDDIE, Docteur de l'Université | SOCIETE ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES | (SECTION DE MANCHESTER) | Séance du 1% mai 1891. M. Levinstein fait remarquer, à propos de la dis- cussion qui à eu lieu dans les journaux sur les impu- | retés de latmosphère à Manchester, que ces impuretés sont dues plutôt aux cheminées des maisons bour- geoises qu'à celles des fabriques. Cette conclusion est contredite par M. Thomson; elle est appuyée par MM. Bailey et Irvine. — La section discute ensuite le rapport officiel sur les divers systèmes de purification des eaux d’égout, qu’on vient d’essayer à Salford. Ces essais ont été faits sur une très grande échelle, P. S. HARTOG. ACADEMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 8 mai 1891. SCIENCES PHYSIQUES, — M. de Bezold présente un tra- vail de M. Jesse sur les nuages luisants. Les observa- tions de l'été passé ont confirmé les résultats déjà obtenus à savoir que ces nuages n'apparaissent qu'un mois avant el après le solstice d’été. La moyenne de la hauteur de ces nuages a été trouvée égale à 82 kilo- mètres, tandis qu’en 1889 on avait trouvé 83 kilomètres. La hauteur n'a donc pas changé. La composante prin- cipale de leur mouvement est dirigée de l’ouest à l’est: elle est de 100 mètres par seconde; en outre il y a une composante plus faible dirigée du nord au sud, Séance du 1% mai 1891. M. Kronecker : Sur la relation de Legendre (suite). SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE BERLIN Séance du 29 mai 1891. M. Weinstein : Sur le rapport du kilogramme de Borda au kilogramme théorique. Les quatre séries d'expériences exécutées jusqu'à présent pour la déter- mination de ce rapport ont donné des résultats peu concordants, savoir : — 480 milligrammes (Angleterre). — 296 « (Suède). + 347 » (Autriche), + A1 « (Russie). M. Weinstein a trouvé + 200 milligrammes de diffé- 432 rence, par des expériences nombreuses. Il paraitrait done que le kilogramme pratique est un peu trop grand, — M. Arons a observé que si, dans une solu- tion de sulfate de cuivre contenant deux électrodes en cuivre, on plonge un cylindre en cuivre, ce dernier se dissout en se noircissant du côté de l’anode, tandis que du côté de la cathode, il y a un dépôt de cuivre métal- lique. Ces deux parties du cylindre sont séparées l'une de l'autre par une zone neutre. Si l’on fixe le cylindre à un axe qui lui permette de tourner avec peu de frottement, on observe pendant le passage du courant une rotation lente qui s'explique par ce fait que le cy- lindre devient plus léger du côté de l’anode et plus lourd du côté de la cathode. — M. Künig présente, pour le mélange des couleurs, un appareil de Maxwell modifié par M. Oehmke, lequel a l'avantage de per- mettre le mélange des couleurs différentes en propor- tions différentes pendant la rotation rapide de l'ap- pareil. Séance du 12 juin 1891. M. H.-E.-J..G. du Bois expose les résultats de ses expériences sur la réflexion de la lumière polarisée sur des surfaces cristallines, La lumière d’une lampe à zircon fut polarisée par un prisme de Lippich, tandis qu'un nicol ordinaire servait d’analyseur. M. du Bois trouva que la lumière, réfléchie sous une incidence presque orthogonale sur les surfaces naturelles des cristaux de pyrite, montrait une rotation du plan de polarisation. Cette rotation dépend de l'azimuth ; elle est égale à G sin 24, & étant Vazimuth et C une cons- tante. La grandeur de la rotation dépend de la longueur d'onde de la lumière employée. Pour la lumière bleue, le phénomène est l'inverse de celui qu’on observe pour la lumière rouge. La constante C a des valeurs diffé- rentes pour les surfaces différentes du mème cristal. M. du Bois croit que le phénomène est dù à la ré- flexion différente dans deux directions perpendiculaires Pune à l’autre. La tension ne donne pas lieu à la rota- tion du plan de polarisation : ear un petit miroir en acier tendu fortement ne donna pas la moindre rota- tion. — M. Scheel a déterminé le coefficient de dila- tation de l’eau par la méthode dilatométrique. Les tem- pératures furent mesurées à l’aide d’un thermomètre à hydrogène. IL a obtenu les mêmes résultats que M.Thiesen, qui s’estservi de la méthode hydrostatique : Témpérature - Thiesen Scheel 10 266 269 15 861 20 1767 25 2935 M. Feussner à déterminé la résistance spécifique des alliages de nickel et de cuivre. La résistance croit pro- gressivement avec la quantité du nickel jusqu'à un maximum pour une quantité de 40 °/, de nickel. Elle reste alors à peu près invariable jusqu’à 60 !/, de nickel et décroit ensuite rapidement. Le coefficient de tempé- rature décroit rapidement si la quantité de nickel aug- mente. Pour 10 à 130/, de nickel, la courbe à un point d'inflexion, Pour 37 1, et 49 0/, de nickel, le le coefficient de température est égal à zéro. D' Hans Jan, ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du X juin 1891. {° SCIENCES MATHÉMATIQUES. M. Gegenbauer, à Innsprück, envoie un mémoire : « Sur les fonctions cir- culaires ». — M. Binder, à Wiener-Neustadt : « Sur la théorie des courbes planes circulaires de troisième ordre d'espèce p — 0 ». 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Puluj, de Prague, an- nonce qu'il a réuni en un seul mémoire l’ensemble de- deux communications qu'il a précédemment faites; son ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES mémoire a pour titre : « Sur les actions de forces élec- tromotrices de direction constante et sinusoïdales dans un conducteur doué de selfinduction ». — M. Georgie- viss, de Bielilz : « Expériences d’oxydation dans la série de la quinoline ». L’auteur a soumis à l’oxydation par le permanganate de potasse un certain nombre de dérivés de la quinoline, obtenus par une substitution dans le noyau benzénique, et il tire des résultats ob- tenus jusqu'ici les conclusions suivantes : 1° Les dérivés de Ja quinoline, provenant d’une substitution dans le noyau benzénique, comme la quinoline elle-même, ne donnent pas en toutes circonstances de lacide quino- lique, quand on les oxyde par du permanganate de potasse ; 2° la marche de l'oxydation dépend de la posi- tion et de la nature des groupes substitués, et par suite aussi, des conditions dans lesquelles elle est conduite. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Von Ettingshausen envoie un travail qu'il a fait en commun avec M. Franz Krasan, à Graz, intitulé : « Recherches sur les défor- mations dans le règne végétal ». — M. Johann Robits- chek envoie la communication suivante : « Une étude soigneuse sur le Phylloxera vastatriz apporté d’Amé- rique en France avec des plants américains, étude faite sur des préparations microscopiques me permettant un grossissement énorme, et aussi par la microphoto- graphie, m'a conduit à la conclusion que le Phylloxera vastatriæ n'est pas une Rhynchota,comme on l’a cru jus- qu'ici, mais appartient aux Pseudonevroptères, sous- ordre : Corrodentia. famille : Termitidæ. (espèce : Calo- termes) : phylloxera vastatrix. Les calotermes ont les nids les plus imparfaits et ils pratiquent d’étroits che- mins dans le bois, Le broiement des brins de racines et la perforation des racines principales par linsecte fécond explique la destruction des vignobles, » — M. Robitschek dépose ensuite un pli cacheté pour éta- blir sa priorité, et qui porte pour titre : « Contribu- tion à la connaissance du PhAylloxera vastatriæ. » — Le secrétaire de la classe. M. Suess, dépose un mémoire ayant pour titre : « Contribution à la classification morphologique des bivalves », extrait des écrits pos- thumes du Professeur Neumayr, avec une préface de M. Suess. Emile Weyr, Membre de l'Académie. ACADEMIE DES SCIENCES DE SAINT-PETERSBOURG Séance du 20 mai 1891. SCIENCES NATURELLES. — M. Karpinski présente la note du Dr Khrouchtehev sur quelques roches holo- cristallines de structure sphéroïde, offrant un phéno- mène assez rare et encore peu étudié d’après les mé- thodes modernes de pétrographie. Parmi les roches décrites par l’auteur, la plus intéressante est le granite sphéroïdal provenant d’un gisement des monts Altaï. Une étude détaillée, microscopique et chimique, de ce granite a fourni à M. Khrouchtchev, outre des données intéressantes sur la structure sphéroïdale en général, encore quelques faits nouveaux relatifs à la structure du quartz et du plagioclase. Les résultats des observa- tions faites sur ce dernier sont surtout importants comme confirmation de la théorie bien connue de Tchermak. La note in extenso sera publiée dans les Bul- letins de l'Académie. —M. Pleske présente le cinquième fascicule de son Ornithographia rossica, contenant la description des représentants des genres Locustella et Cettia de la faune russe. Ce fascicule termine la des- cription des Sylviniiaes de l'Empire russe en même temps que le tome Il de l'ouvrage ; il contient une planche et plusieurs figures dans le texte représentant des espèces nouvelles. O. BACGKLUND, Membre de l'Académie Le Directeur- Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 2e ANNÉE N° 43 15 JUILLET 1891 S SUIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LE TRAITEMENT DES TUBERCULOSES EXTERNES PAR LA MÉTHODE SCLÉROGÈNE DU PROFESSEUR LANNELONGUE Tout récemmentnous annoncions icimême qu'une grande découverte, relative au traitement des tuber- culoses externes, élait sur le point d’être réalisée par le Professeur Lannelongue. Cette nouvelle, publiée dans la Revue du 15 mai dernier avec la description des principaux résultats oblenus par l’éminent chirurgien !, fut immédiatement reproduite par les journaux scientifiques et la presse quotidienne de tous les pays. L'émotion qu’elle a causée dans le monde médical et dans le public a redoublé de- puis huit jours; M. Lannelongue vient, en effet, de donner à l’Académie des Sciences ?et à l’Académie de Médecine * la première communication ofli- cielle de ses recherches sur la matière. Son Mé- moire confirme et complète les faits dont nous avions indiqué l’acquisition comme certaine. En même temps il expose la méthode, aussi simple qu'originale, mise en œuvre pour opérer la gué- rison. Pour cette raison il nous parait indispen- sable de revenir aujourd’hui sur le sujet déjà abordé ici même, afin de préciser l’état actuel de la question. Il On sait que les tubercules, qui se constituent autour des Bacilles de Koch, résultent de la pro- lifération pathologique d'éléments cellulaires, d’abord normaux, de l’organisme. D'après cer- 1T. Jp 320. 2 Séance du 6 juillet 1891. 5 Séance du 7 juillet 1891. REVUE GÉNERALE, 1891. laines théories bien connues de nos lecteurs !, il semble que le tubercule représente un appareil de défense contre le bacille et puisse triompher de lui, s’il réussit à l’isoler complètement des tissus sains. Mais celte dernière condition est-elle fré- quemment réalisée? Dans la plupart des cas de tuberculose externe, notamment de tumeur blan- che, il y a migration en même temps que prolifé- ralion du bacille, aux moins aux environs du foyer primitif, de sorte que le mal, même s'il était d’abord très circonserit, finit souvent par s'étendre au point de nécessiter l’amputation du membre. L'observation d’un tissu atteint de Iymphan- giôme, puis réduit et modifié dans sa nature his- tologique par des injections de chlorure de zine, a conduit M. Lannelongue à l'hypothèse quele même agent, introduit à la périphérie des lissus altérés, — tuberculeux ou autres, — arriverait aussi à les transformer après les avoir séparés, en quelque sorte à la facon d'un cordon sanitaire, des élé- ments normaux. Scléroserles tissus tubercuieux et créer ainsi la condition reconnue la plus contraire au développement du bacille, tel est le principe de la méthode. C’est donc exclusivement autour des fongosités et des foyers tuberculeux que le chlo- rure de zinc doit être porté. Avec la collaboration de M. Achard et de M. Vignal, M. Lannelongue a 1 Voyez notamment : Merscunorr, La Phagocytose, dans la Revue du 30 juillet 1890, t. I, p. 425; et Vincer. Les Tu- bercules et le Bacille de la Tuberculose, dans la Revue du 15 novembre 1890, t, I, p. 659. 434 L. OLIVIER. — LE TRAITEMENT DES TUBERCULOSES EXTERNES déterminé les effets de ce sel. La solution au dixième « fixe, en les tuant, les éléments anato- miques au point où elle est déposée et même à une assez grande distance; elle oblitère un certain nombre de capillaires et de petits vaisseaux : elle provoque enfin une inflammation des parois vas- culaires, qui rétrécit le calibre des vaisseaux dans dement, si l’on a eu recours aux solutions au dixième; à la sclérose des fongosités articulaires s’ajoute un ostéome sous-périosté diffus, avec con- densation osseuse, si l’on a pris soin d'intéresser le périoste au travail de réparation, ce que je fais» dit l’'éminent chirurgien « dans la plupart des cas d’ostéo-arthrites tuberculeuses. » ve < > zzz € -OEERLIW. Fig. 1. Fig. 2 Fig. 3 Fig. 1, 2 et 3, d'après des photographies faites le 6 juillet 1891. MÉMEnurE Gr, 6 ans. Entré le 26 février 1891 à l’hôpital Trousseau (lit 46) pour une tumeur blanche du genou gauche. — Première piquüre le 28 février; dernière piqüre le 20 mai; au total 10 piqüres. — L'enfant a été pesé tous les Jours. Son poids a augmenté à partir de la huitième piqüre; depuis le 7 juin, il marche sans aucune fatigue. Fig. 2. — Eucénie C...., 14 ans. Entrée le 18 mars 1891 à l'hôpital Trousseau (lit #9 bis) pour une tumeur blanche du coude. — Première piqûre le 24 mars, dernière piqüre le 27 mai. — L’enfant a été pesée tous les jours. Son poids a augmenté à partir de la sixième piqüre. Depuis le 4 juin elle se sert de son bras, normales. I1 ne subsiste que la cicatrice visible sur cette figure. La douleur a complètement disparu qui a complètement recouvré sa forme et sa mobilité Fig. 3. — Berrne C...…, 8 ans. Entrée le 24|février 1891 à l'hôpital Trousseau pour une tumeur blanche du genou gauche. — Première injection le 4 mars : dernière, le 20 mai ; augmenté à partir de la troisième une étendue nolable et parfois éloignée du point inilial ». Le phénomène qui suit immédiatement offre une importance considérable : «Très rapidement, presque en quelques heures », remarque M. Lannelongue, « il se fait au sein des tissus allérés », par passage au travers de la paroi des vaisseaux, «et probablement aussi par prolifération cellulaire, un afflux énorme de nou- veaux éléments anatomiques. On peut apprécier dès le lendemain de l'intervention la formation du nouveau tissu, dont les qualités s'affirment rapi- au total 9 piqüres. — L'enfant a été piqûre. Depuis le 8 juin, elle marche sans fatigue. (La la tumeur, est encore flasque, ce qui fait paraître le genou plus gros qu’il ne l’est en réalité.) pesée tous les jours. Son poids a peau, qui avait été distendue par IT Examinée en divers cas pathologiques, la réac- tion provoquée par le médicament a donné lieu aux observations suivantes : 1° Pour ce qui est des tuberculoses non ouvertes et non suppurées, «le gonflement des parties malades et de celles qui les environnent est le fait le plus sail- lant.. La réaction apparaît d’abord dans la région de la piqüre. Dès le lendemain de cette opération et, vers le deuxième ou troisième jour, le palper révèle un changement de consistance » ; aux tissus L. OLIVIER. — LE TRAITEMENT DES TUBERCULOSES EXTERNES 435 fongueux commence à se substituer un tissu plus ferme, de nature fibreuse. Enfin, après cette évolu- tion, se montre avec le temps «une tendance marquée vers le retour des tissus sclérosés à un tissu conjonctif plus lâche... Le fait n'est pas sans importance; à] en résulle que les parties retrou- veront leur souplesse, leur forme; les fongosités en avaient altéré la cohésion, détruit la résistance au point d'amener la dislocation d’une jointure; la sclérose reconstitue la résistance; elle renforce lappareil de conjonction d’abord; plus tard, la malade sain malade Fig. 4, Fig. 5. et après le traitement. Ces pièces sont extrème- ment démonstratives : il suffit de les comparer aux gravures 1, 2 et 3 pour être frappé de l'énorme ré- duetion des tumeurs à la suite des injections. « Durant cette évolution locale, la santé générale des sujets est fort peu altérée. La température n’a Jamais dépassé 39° chez les malades, et l'élévation du mercure n’atteint pas en général un degré après chaque injection; elle reste exceptionnellement deux ou trois jours à 38° et quelques dixièmes, après de fortes injections (fig. 7 à 10). On comprend dès sain malade sain Fig. 6. Fig. 4, 5 et 6. — Moulages des jambes ct bras des enfants ci-dessus représentés, Le} Le] Ces moulages ont été faits avant les injections. : Fig. #4. — Jambes d'Emile G Fig.5.,— Bras d'Eugénie C er. , Fig. 6. — Jambes de Berthe C synoviale tend à reprendre ses caractères. Chez deux de mes sujets, chez l’un surtout on ne pou- vait plus dire qu’elle eût été malade, alors qu'il y a à peine trois mois la synoviale très fongueuse avait presque l'épaisseur d’un pouce. « On comprend dès lors que les fonctions de l'appareil locomoteur soient conservées en entier ou tout au moins dans les limites où elles existaient au début du traitement ». Nos figures 41, 2 et 3 représentent quelques exemples de ces heureux résultats. Elles se rap- portent à trois enfants, de 14 ans, 8 ans et 6 ans, atteints de tumeurs blanches, l'un au coude, les deux autres au genou, et qui ont recouvré, à la suite de l'injection, l'usage de leurs membres et l'entière liberté de leurs mouvements. : Nous avons tenu aussi à figurer (fig. 4, 5, 6) quelques spécimens des moulages pris, suivant les ordres de M. Lannelongue, sur les membres avant la droite saine, la gauche malade. le droit malade, le gauche sain. , la droite saine, la gauche malade, lors que la donnée des poids ne soit guère différente de celle de l’état normal chez des malades apyré- tiques; et comme ils sont tous dans la période d'accroissement, leur poids augmente avec régu- larité, ne subissant un temps d’arrêt que très ex- ceptionnellement à la période de laréaction la plus vive (fig. 7 à 10). La courbe des pesées, peut-on dire, n’est pas modifiée chez les sujets en traitement. Il faut signaler encore que la courbe des poids pré- sente une ascension plus grande que durant le traitement chez les sujets qu’on n’injecte plus. » 20 Dans le cas des éuberculoses non ouvertes et sup - purées (abcès divers, pus, etc...), M. Lannelongue déterge la cavité de son contenu purulent, lave à l'eau stérilisée, puis injecte la périphérie des fon- gosités en divers points. La réparation parait s'o- pérer comme ci-dessus. 3° Ilen est de même des éubereuloses ouverles, à moins qu’elles ne se compliquent de séquestres os- 436 L. OLIVIER. — LE TRAITEMENT DES TUBERCULOSES EXTERNES seux, de raréfactions osseuses, de cavernes, etc... Dans ces cas parliculiers l'injection précipite la mortification des tissus déjà condamnés à la mort, et constitue par la rapidité de cette réaction une indication opératoire pour le chirurgien. modifiés : ceux, par exemple, qui étaient atteints de lésions graves du genou, ont recouvré la forme et les fonctions de leur membre: «ils ne ressen- tent aucun phénomène anormal, marchent toute la journée; leur développement se fait bien et avec MARS . AVRIL MAI JUIN JOURS [ Œ 1 ü j Œ an si es 5 ë Î 4 4 + EEE mi : 2 K|[20E m T [58 Œ BEuE D EE K |2e [ CT Ï T |37 . il VW FE nu - pense: De IE 736: Et en Ï I jet E - | Î Fig. 7. [MARS AVRIL MAT JUIN JOURS fa Ci s| 5) 11 LS | L ll 3] T- f ME Ï IT E K|# ! Æ + T See DE — ? t | TE EL . I! | ù E L l Ï } j - K| 40 + al Piiiii LE T T m ASE Ï [ Ë - (ES 1 mi ÉRLEERET FREE A ÉEE Œ HE JE F T VE TÉLÉC 36 ++ + ++ RER t MAI JUIN IE Fig. 9. Fig. 7, 8 et 9. — Courbes des poids et des températures pendant et après le traitement, Courbe de température. — — — — Courbe de poids, *< II Vingt-deux malades atteints d’ostéo-arthrites tuberculeuses du genou, arthrites du cou-de-pied, du coude, plaques fongueuses du thorax, spina ventosa, adénites tuberculeuses cervicales, ont été soumis au traitement. Tous ont été notablement Jours d'injection, régularité; leur poids augmente progressivement; ils vivent enfin, depuisun mois, de la vie commune des autres enfants. Une opinion presque unanime les ferait considérer comme guéris. Et pourtant, — fait observer M. Lannelongue, malgré ces faits et ces apparences, On ne saurait apporter trop de réserve a P. STROOBANT. — LA QUESTION DES ANNEAUX DE SATURNE Len 437 dans la conclusion. La guérison dans l'espèce, c’est la disparition du bacille; or cette disparition, dit-il, _je ne puis pas l’affirmer d'une manière absolue. Il est vrai que chez un de nos malades, nous avons constaté, M. Achard el moi, dans une plaque tuberculeuse qui a été extirpée, après avoir été traitée, une transformation fibro-graisseuse du ganglionnaire, incomplètement traité, il est vrai, nous avons vu les tubercules conservés. Cependant tout porte à croire qu'une transformation totale d’un tissu tuberculeux en tissu fibreux est difficilement compatible avec la vie du bacille, et chez quel- ques-uns de nos malades celui-ci garde depuis bien- tôt deux et presque trois mois un silence de mort. » MARS [Jours] A ë m 18 K Ï . Ï 17 K| 37 n Pam AR ni 2] Il K|16 Tl36 m TOSERLIN Fig. 10. — Courbes des poids et des températures pendant et après le traitement. Courbe de température. — — — — Courbe de poids. < Jours d'injection, Lissu, sans yrencontrer un seul bacille; et l'inocu- lation à un cobaye, faite il y a juste deux mois, n'a pas abouti; l'animal est encore sain et sauf. Mais ne me suis-je pas trompé dans le diagnostic de tuberculose costale avec tumeur fongueuse symp- tomalique? Je préfère rester dans le doute et accepter la responsabilité d’un diagnostie inexact pour ne pas trop m'avancer. Mais, d'autre part, et je l'ai dit plus haut, dans un cas de tuberculose Telle est, en ses grands traits, la découverte du Pr Lannelongue. Bien que la science n’ait point de frontières, nous ne pouvons nous défendre d’un sentiment de patriotique orgueil en songeant que, si cette découverte se fût produite de l’autre côté du Rhin, elle y eût été considérée comme secret d'État et exploitée comme un monopole. Louis Olivier. LA QUESTION DES ANNEAUX DE SATURNE Lorsque Galilée, en 1610, eut, le premier, dirigé une lunette vers Saturne, il reconnut que cette planète n'avait pas la forme circulaire des autres corps du système solaire, mais qu'elle était accom- pagnée de deux astres de moindre importance et qui semblaient la toucher. Il annonça donc que Saturne lui paraissait fricorps; deux années plus tard, cette apparence bizarre avait disparu. Héve- lius et Gassendi, qui observèrent ensuite Saturne, cherchèrent en vain à expliquer l’apparilion et la disparition périodiques de ces appendices. Ce n'est qu'en 1655 que le célèbre Huyghens trouva le mot de l'énigme : il rendit compte d'une manière parfaite de l’aspect de Saturne, en montrant que cette planète était entourée d’un anneau opaque, circulaire et très mince. Cet anneau n'ayant aucun point de contact avec Saturne, l’accompagnant dans son mouvement de révolution autour du Soleil, restant toujours parallèle à lui-même en ; faisant un certain angle avec le plan de léclip- tique, produit les changements d'aspect que l'on observe suivant les positions respectives de Saturne, du Soleil et de la Terre. Il Les observalions qui ont été effectuées depuis deux siècles par un grand nombre d'astronomes ont permis de reconnaitre que les anneaux de Saturne sont au nombre de trois (fig. 4) : l'anneau extérieur que l’on désigne par À, l'anneau moyen B, complétement séparé du précédent par la division de Cassini, et l'anneau sombre C. Anneau À. La ligne obscure qui existe sur cet anneau et qui est connue sous le nom de division de Encke ou de Kater, est sujette à des variations considérables. Lors de sa découverte, il y a un demi-siècle environ, elle paraissait beaucoup plus apparente qu'elle ne l'est aujourd'hui; Encke la 438 P. STROOBANT. — LA QUESTION DES ANNEAUX DE SATURNE représente comme une ligne fort sombre et d’une largeur très appréciable, tandis que les astrono- mes qui ont observé Saturne dans ces dernières années la dépeignent comme un trait gris très Fig. 1. étroit, visible seulement dans les anses de l'anneau. Il y a des époques oùelle disparaît complétement ; c'est ainsi qu’en 1884, de très habiles observateurs, MM. Henry ne sont pas parvenus à l’apercevoir ; d’après ces astronomes, ia division d’Encke n’exis- terait même pas el ne serait qu'une illusion. La division d'Encke est non seulement soumise à des variations considérables de visibilité, mais aussi à des changements de position. Cette divi- sion n'est pas le seul trait sombre que l’on ait ob- servé sur l'anneau A; un certain nombre d'astro- nomes ont constaté également la présence d'autres traits gris de part et d’autre de la division de Encke. L'anneau À n’a pas un éclat uniforme; le tiers intérieur parait notablement plus brillant que la partie extérieure. Enfin il est probable que cet anneau est doué d'une certaine transparence, car, d'après M. Trou- velot, l'ombre qu’il projette sur le disque de Salurne ne parait pas absolument plutôt grisàtre. noire, mais La division de Cassini parait généralement régu- lière et semble HR très obscure ; sa largeur apparente est de 0",4 à 0",5 Anneau B. Cet Art se divise en plusieurs zones concentriques dont l'intensité lumineuse va en augmentant de l’intérieur vers l'extérieur. Il arrive assez fréquemment que les deux anses de l’anneau diffèrent sensiblement d’aspect. On a constaté quelquefois la présence de plu- sieurs divisions sombres et parallèles, situées en général vers la partie intérieure de l'anneau B ; la partie extérieure de cet anneau est la région la plus brillante de tout le système. Anneau G. L'anneau C a été découvert le 15 no- vembre 1850 par Bond à Cambridge (Amérique) et quelques jours après, mais indépendamment, par Dawes et Lassell en Angleterre. Cet anneau est beaucoup moins brillant que les deux autres; il a reçu le nom d’anneau sombre ou crépusculaire. Il est soumis à des variations encore plus considé- rables que les anneaux A et B: tantôt il est par- faitement distinct, tantôt il est à peine visible. On observe quelquefois vers la partie extérieure de l’anneau sombre une division noire et assez large qui a été découverte par Struve ; cette division, qui est un objet très difficile à observer, est soumise à des changements considérables de position, d'in- tensité et de forme. La figure 2 représente l'aspect 3 avril 1887. Fig. 2. —- de Saturne le 9 avril 1887 à huit heures du soir, d'après un dessin exécuté au grand équatorial de l'Observatoire de Bruxelles. On peut y reconnaitre, outre les particularités signalées plus haut, la division de Struve à la limite extérieure de l’an- neau sombre sur l’anse occidentale (côté gauche de la figure). Le bord intérieur de l’anneau sombre parail alras déchiqueté et certains observa- teurs ont constaté l'existence de taches plus som- bres au sein même de l'anneau. C’est ainsi que le 30 avril 1890 nous observions deux échancrures profondes dans cet anneau; celle qui occupait le milieu de l’anse paraissait s’élargir vers l'extérieur (fig. 3). En nous basant exécutées par 15 astronomes, nous sommes arrivé aux nombres suivants pour les dimensions des anneaux, en prenant pour unité le rayon équato- sur 21 séries d'observations, rial de Saturne : Rayon équatorial de la planète. 1 . 1.000 Distance du centre de la planète au bord inté rieur de ( C.. 4200 _ — - — in‘‘rieur de B. 4.494 Te _ — — € rieurdeB. 1.958 = = == — ‘eur de A. 2.019 surde A. 2,297 P. STROOBANT. — LA QUESTION DES ANNEAUX DE SATURNE 439 Le demi-diamètre équatorial moyen apparent (d’après 12 séries d'observations exécutées par 10 astronomes) est de 8",696. Fig. 3. — 30 avril 1890. C'est, d'après ces nombres, que la figure 1 a été construite. Il est très vraisemblable que les dimensions des anneaux sont soumises à des inégalités à courte et à longue période. Voici ce que nous avons constalé à ce sujet l'année dernière : le 14 mars, l'anneau sombre paraissait étroit, n’occupant guère que le tiers de l'intervalle compris entre l’anneau B et le globe, tandis que le 3 avril, sa largeur était sensi- blement la moitié du même intervalle; le 30 avril, il paraissait de nouveau plus étroit. À cette der- nière date, des mesures micrométriques nous ont donné pour la distance du bord extérieur de l’an- neau sombre à la planète, 3,72, tandis que cette distance a une valeur moyenne de 4,29. Les lignes de séparation des divers anneaux ne sont pas ordinairement situées à la même distance du centre de Salurne, des deux côtés de la pla- nète. Cette excentricité n'a, au même moment, généralement ni le même sens, ni la même gran- deur pour les différents anneaux. Les mesures micrométriques montrent que tantôt le bord d’un anneau est plus rapproché du côté est de Salurne que du côté ouest, tantôt, c’est le contraire, la dif- férence, qui peut s'élever à quelques dixièmes de seconde d’are, élant d’ailleurs variable aussi. Lorsque le Soleil et la Terre traversent le plan des anneaux, nous les observons par la tranche ; ils se présentent alors comme un trait fin et lumi- neux, qui montre combien leur épaisseur est faible. Il semble cependant que cette épaisseur est beaucoup plus grande que celle supposée par la plupart des astronomes qui ont observé les phéno- mèênes de la disparition de l’anneau. M. Trouvelot a publié à ce sujet une étude très intéressante! ; il montre que le maximum d'épaisseur se rencontre sur l’anneau B, à quelque distance de la division de Cassini. Les évaluations erronées de J. Hers- ! Bulletin astronomique, tome VII (1890). chel, Bond, etc., proviennent de ce que ces astro- nomes ignoraient que le système des anneaux n’est pas plan et que c’est à une grande distance de son bord extérieur qu'il atteint son épaisseur maxima. On peut déterminer l'épaisseur et la coupe de l'anneau par la forme de l'ombre que le globe pro- jette, en admettant (ce qui s'éloigne certainement peu de la vérité) que les anneaux soient des surfaces de révolution autour du petit axe de Saturne. On vérifie ainsi le résultat de M. Trouvelot. Ajoutons que l’éclat des différentes zones de l'anneau peut nous donner des indications précieuses sur l’im- portance relative des divers anneaux. C’est en nous basant sur ces considérations que nous avons construit la coupe représentée figure 4. Il convient Fig. 4. — Coupe probable des anneaux. de faire remarquer que sur ce dessin, l’épaisseur est considérablement exagérée. Il Laplace ! est le premier qui étudia la question de la constitution des anneaux au point de vue méca- nique. Il montra qu’en supposant l'anneau solide et semblable dans toutes ses parties, l'équilibre serait troublé par la force la plus faible, telle que l’attrac- tion d’un satellite ou d’une comète; le centre de l'anneau serait repoussé par celui de Saturne, jus- qu'à ce que l’anneau vint loucher la surface de la planète. Laplace démontra que la stabilité ne peut être assurée que si les anneaux sont des solides irréguliers, en sorte que leurs centres de gravité ne coïncident pas avec leurs centres de figure, la largeur d'un anneau ne pouvant, d’ail- leurs, dépasser une certaine limite. J. Clerk Maxwell ?, en 1859, montra que dans cette hypothèse l’irrégularité de chaque anneau devrait être telle que son centre de gravité füt distant de son centre de figure de 0,82 de son rayon; ce qui produirait une excentricité beaucoup plus consi- dérable que celle que l’on observe. Si l'anneau était formé par un liquide incompressible, il devrait se résoudre en une multitude de petits satellites. Maxwell, reprenant une hypothèse imaginée au siècle dernier par Cassini Il, fit voir que l'équilibre peut être expliqué en supposant les anneaux de Saturne formés d’un grand nombre de particules l Mécanique céleste, Liv. IT, ch. vr. 2 On the Stlability of the Motion of Salurns rings. Cam- bridge, 1859, 440 P. STROOBANT. — LA QUESTION DES ANNEAUX DE SATURNE se suivant à la file dans des orbites circulaires !. Dans un mémoire publié en 1872, Hirn ? est ar- rivé à des résultats plus concluants encore. Il re- prend la question où elle a été laissée par Laplace, et fait remarquer que dans l'hypothèse d'anneaux solides et lestés, les variations d’excentricité résul- tant de leur rotation ne correspondraient pas aux variations constatées. Il fait observer aussi que les anneaux À et B tourneraient autour de Saturne dans des temps bien différents ; leur distance, re- présentée par la largeur de la division de Cassini, serait très variable, ce qui est contraire à l’obser- vation. Mais supposons même qu'en raison du lest le mouvement excentrique existe. Hirn montre que le corps solide formant l'anneau devrait avoir une cohésion et une rigidité en quelque sorte infinies, dont celles d’aucun corps connu de notre terre ne nous donnerait la plus légère idée. En résumé, l'impossibilité de l'existence d'un anneau solide réside dans ce fait que, la vitesse angulaire étant commune à {tous ses points, la vitesse linéaire est proportionnelle au rayon; quant à l'attraction de Saturne, elle varie en raison inverse du carré de ce rayon : il n'existe donc qu’une seule nappe cylindrique où les deux forces se font équilibre. Hirn considère ensuite l'hypothèse d'un anneau fluide (liquide ou gazeux); dans ce cas, l'anneau ne doit plus tourner d'une seule pièce; mais il en ré- sulte des frottements considérables qui produisent un échauffement el un ralentissement de la masse entière; dans cetle hypothèse, les anneaux ne tomberaient plus d'un côté de la planète, mais se rapprocheraient d'elle de tous les côtés à la fois. Hirn arrive à la même conclusion que Maxwell, dont il ignorait cependant le travail; il pense que l’anneau est formé de particules très petites sépa- rées par des intervalles relativement très grands. Les plans des orbites de lous ces petits satellites se confondant à peu près avec le plan de l'équateur de Saturne, il en résulte pour l'anneau une très faible épaisseur. Quand on étudie la question au point de vue mécanique, on arrive donc à cette conclusion que l'anneau, pour subsister, ne peut être ni solide, ni fluide, mais composé de particules indépendantes les unes des autres et tournant librement autour de la planète. C'est également la conclusion à la- quelle on arrive en constatant les variations con- tinuelles auxquelles sont soumis les anneaux de 1 On trouvera une savante analyse de ces travaux, ainsi que de deux mémoires, l’un de Mme Kowalewski, l'autre de M. Poincaré, sur le même sujet, dans la Mécanique céleste de M. Tisserand, tome Il, chap. 1x, x, xr et xt. ? Mémoire sur les conditions d'équilibre et sur la nature probable des anneaux de Saturne, Gauthier-Villars, 1872. Saturne. Le globe de la planète est visible à tra- vers l’anneau sombre et son limbe n'est pas ré- fracté, ce qui aurait évidemment lieu si cet anneau était liquide ou gazeux. L'aspect de l’anneau sombre s'explique aisément en admettant que les particules qui le composent sont plus espacées que dans les autres anneaux. Enfin la photométric est venue apporter un ar- gument bien inattendu en faveur de l’hypothèse d’un anneau formé de matériaux disjoints. M. Seeliger, directeur de l'Observatoire de Mu- nich, a montré que si la surface de l'anneau était continue, les variations d'éclat, résultant de la hauteur du Soleil et de la Terre au-dessus du plan des anneaux, seraient beaucoup plus considérables que les changements observés par M. Müller à Potsdam. 1 On conçoit aisément que le problème du mou- vement des anneaux est une question fort com- plexe. Chacune des particules est, en effet, soumise à dés attractions nombreuses et variables. Si au- cune de ces actions n'existait, chacun des pelits satellites constituant l’anneau décrirait une ellipse autour de Saturne suivant les lois de Képler !. On peut, dans l'étude des changements d'aspect des anneaux, considérer ceux-ci comme formés par la réunion et l’enchevétrement d’un grand nombre d’ellipses lumineuses, dont on recherchera les chan- gements de forme et les déplacements dans l’es- pace. Les causes perturbatrices que nous avons à con- sidérer sont au nombre de trois : 1° L'action du renflement équatorial de Saturne; 2° L'action des anneaux sur la particule consi- dérée ; 3° L'action des satellites de la planète. L'aplatissement de Saturne étant très grand 1 1 à 2 Le à so)! l’action du renflement équatorial aug- mentant à peu près suivant l'inverse de la puis- fl : : sance = de la distance au centre de la planète, on comprendra qu'il doit en résulter des inéga- lités considérables pour les particules des an- neaux, surtout pour celles qui sont situées à la limite intérieure de l’anneau sombre C. On sait que l’on distingue en mécanique céleste deux genres d’inégalités : les inégalités séculaires et les inégalités périodiques. Les premières ont pour caractère essentiel de croître d'une manière ! Les temps de révolution sont très courts : une particule située à la limite intérieure de l'anneau sombre décrit son orbite en moins de 6 heures; à la limite extérieure de l’an- neau À ce temps est 14 h, 1/? environ, P. STROOBANT. — LA QUESTION DES ANNEAUX DE SATURNE 4 continue, toujours dans le même sens et propor- tionnellement au temps. Les inégalités périodi- ques au contraire, dont la valeur dépend des posi- tions respectives des corps célestes en présence, ne constituent que des oscillations des éléments autour de leur valeur moyenne. Dans le cas qui nous occupe, ces dernières inégalités sont géné- ralement insensibles à l'observation. Trois élé- ments seulement des orbites ont des inégalités séculaires : la longitude du périsaturne, la longi- tude du nœud et la longitude de l'époque. La variation séculaire du périsaturne, qui correspond à un mouvement de rolation de l’ellipse dans son plan, produit nécessairement des changements dans l’excentricité apparente des anneaux. Pour calculer les inégalités résultant de l’apla- tissement de Saturne, nous nous sommes servi de l'expression du potentiel d’une planète trouvée par M. Callandreau ‘. Voici les nombres auxquels nous sommes arrivé pour la durée des révolutions des périsaturnes en jours solaires movens : A la limite intérieure de l'anneau C. . 12 jours. — intérieure — BAM 0 A0 — extérieure — Enr TT EE — intérieure _- AE here le BD — extérieure _— AE: 180 Le nœud tourne dans un temps sensiblement égal au précédent, mais en sens contraire du péri- saturne. Les variations séculaires de la longitude de l’époque, quoique très considérables, ne peu- vent produire des changements dans l’aspect des anneaux. Deux éléments essentiels devront être déter- minés pour permettre l'étude de l'action des anneaux sur une de leurs particules : leur forme et leur masse. Une étude atlentive de la forme de l'ombre que le globe projette sur les anneaux nous permettra d’en déterminer la figure. Nous con- naissons la forme du corps qui projette l'ombre (ellipsoïde de révolution aplati, dont le plan équa- torial est bien déterminé) et à chaque instant, la position du Soleil; il s'ensuit donc que nous pour- rons trouver la forme du corps sur lequel l’ombre est observée. Chacun des anneaux peut être considéré comme engendré par la révolulion, autour d’un axe, d’une courbe symétrique par rapport à une droite per- pendiculaire à cet axe et située dans son plan; dans ce cas, il est facile de déterminer le potentiel en un point peu éloigné du plan de symétrie. De la valeur du potentiel, que nous aurons trouvée en 1 Annales de l'Observatoire de Paris. Mémoires, t. XIX. laissant la densité de l'anneau comme inconnue, nous pourrons déterminer les déplacements des périsaturnes des satellites, qui résultent de l’at- traction de l'anneau. D'autre part, nous connaissons par l'observation et avec une assez grande exactitude le mouvement du périsaturne du satellite Titan ; il nous suffira de déduire de cette quantité les déplacements dus à l’action du Soleil, au renflement équatorial de Saturne et à l'attraction des satellites, pour avoir le déplacement qui provient de l'attraction de l’an- neau, dont nous pourrons, par conséquent, déter- miner la masse. Si nous connaissions avec précision le mouve- ment du périsaturne d’un autre satellite plus voisin de l’anneau, Mimas, par exemple, nous pourrions éliminer l’action de l’aplatissement de Saturne, sur la valeur duquel il règne un peu d'in- certilude ; malheureusement aucun de ces mou- vements ne nous est bien connu. La disparition actuelle des anneaux offre aux astronomes une excellente occasion de déterminer ces déplace- ments. En troisième lieu nous devons calculer l'action perturbatice des satellites de la planète. Les masses des satellites ne sont guère connues avec précision, sauf pour Titan; il faudra en grande partie se baser sur les déterminations photomé- triques de M. Pickering. Le calcul des perturba- tions présentera d'assez grandes difficultés, pour les points où les moyens mouvements des parti- cules de l'anneau sont commensurables avec ceux de certains satellites; c'est sur cette question que nous portons actuellement nos recherches. Il sera surtout difficile d'arriver à l'expression des varia- tions des éléments pour les particules dont les moyens mouvements sont à peu près commensu-. rables avec ceux de plusieurs satellites à la fois, ainsi que cela alieu près du bord extérieur de l'anneau moyen B. En résumé, nous croyons qu'il est possible d’éta- blir une théorie des anneaux, permettant d’expli- quer les phénomènes complexes que nous avons signalés, en se basant sur les données actuelles, qui seraient complétées heureusement par de nou- velles observations des satellites intérieurs (Mimas principalement) et par quelques séries d’observa- üons continues des anneaux ? exéculées par divers astronomes. Paul Stroobant (de Bruxelles), Docteur ès sciences, ——.—_——_—_—aEaEa a SU ! Actuellement, Saturne se prête aussi fort bien à des mesures de son aplatissement. ? Mesures micrométriques et observations physiques. REVUE GÉNÉRALE, 1891. 13° 142 A. ET L. LUMIÈRE. — LES DÉVELOPPATEURS DE LA SÉRIE AROMATIQUE LES DÉVELOPPATEURS DE LA SÉRIE AROMATIQUE Quand on considère les remarquables progrès qu'a pu réaliser la chimie des matières colorantes pendant ces dernières années, on peul constater que les causes de cette évolution rapide résident surtout dans la découverte de principes théoriques faisant ressortir les relations qui existent entre la constitution de ces matières colorantes et leurs propriétés. On a pu établir ainsi que la couleur des corps organiques est en rapport intime. avec la nature et la position de certains groupements com- posant la molécule. La connaissance de ces rap ports, la détermination des groupes dits chromo- gènes et auxochromes a permis d'introduire une méthode rationnelle dans l'étude des malières co- lorantes, méthode qui a amené des perfectionne- ments importants dans cette branche de la chimie *. Ne doit-on pas supposer alors, par analogie, que ‘la recherche des développateurs, jusqu'ici soumise au hasard, entrerait dans une voie nou- velle et féconde si l’on pouvait découvrir les par- ticularités de constitution qui caractérisent les révélateurs de l’image latente photographique? L'étude complète de cette question est néces- sairement fort longue; elle peut même diflicile- ment être entreprise par un seul expérimentateur. C'est pour ce motif que nous nous décidons à publier les résultats de nos expériences sur ce sujet, bien que ces résultats ne soient point complets. De l'essai de généralisation que nous avons tenté se dégagent cependant quelques lois qui nous paraissent dès maintenant bien établies; il est possible qu'après avoir étudié un plus grand nombre de substances, il y ait lieu de compléter la théorie que nous émettons et de la modifier dans ses détails. Les substances révélatrices sont toutes avides d'oxygène; en solution aqueuse, elles absorbent l'oxygène de l'air; mais, parmi les réducteurs qui absorbent l’oxygène de l’air, tous ne sont pas des développateurs, c'est-à-dire qu'il n’ont pas tous la proprielé de réduire les sels haloïdes d'argent qui ont subi l’action de la lumière. Dans la série aromatique, on peut remarquer que les réducteurs énergiques, parmi lesquels on doit chercher les développateurs, sont des phénols ou des amines, substances dans la constitution desquelles des hydrogènes du noyau sont rempla- 1 Voyez à ce sujet : NozcrixG : Théorie de la constitution des matières colorantes dans la Revue du 30 avril 1891 et du 15 mai 1891, t. II, p. 245 et suiv. p. 299 et suiv. cés par l’hydroxyle OH ou par l'amidogène AzH?. En comparant la constitution de ces corps à leurs propriétés révélatrices, nous avons pu éta- blir les remarques suivantes ! : 1° Pour qu'une substance de la série aromatique soit un développateur de l'image latente, il faut qu'il y ait, dans le noyau benzique, au moins deux groupes hydroxylès, ou bien deux groupes amidoyèenes, ou bien encore un hydroæyle et un amidogène. Ainsi, par exemple, pour ne citer que quelques types, les corps suivants pourront être des déve- loppateurs : : 70H a. Les HiPhéNoIS PERS. Cr rere C5H4/ 5 NoH OH leSamiAlo phÈN OISE EE EEEREE EF EEEEEE ER CSHiT a \AzH° d FA AzH? les phénylènes diamines............. CHA : Az H? b. — Les homologues supérieurs de ces corps, tels que : CH3 l’hydrotoluquinone et ses isoméres..... CSH3— OH ; NOH _——C'H7 leStamidoynTOIS ere CCE TT OH AH / CH les crésylènes diamines............... C5 Hè—AzH?; NAzH2 e. — Les autres homologues à plusieurs noyaux benziques, tels que : 0H les dinaphtolS PEER EP ES EURE C'0HS ; OH les“amidôonaphtols tee copi ; Az H? AzH? les naphtylénes diamines............ CIUH6/ ; AzH? etc:.1etc: 2 La condition précédente est nécessaire ; mais ellen'est sûrement suffisante que dans la parasérie : ainsi la dioxy- oH Poe OM see quinoléine à ne réduit pas le bromure Az d'argent, tandis que son isomère OH N OHMNAYZ 1 Toutes les expériences ont été faites en ajoutant aux réducteurs des bases et aussi des carbonates alcalins qui sont indispensables à la composition d’un développateur, A. ET L. LUMIÈRE. -— LES DÉVELOPPATEURS DE LA SÉRIE AROMATIQUE 443 dans lequel les hydroxyles sont en situation para léveloppe parfaitement. développe p . Il en est de même pour la résoreine OH qui ne réduit pas les haloïdes d’argent, tandis que OH Phydroquinone..."............. OH fournit un révélateur énergique. Dans la plupart des traités de photographie on indique la résorcine comme développateur; il y a là, selon nous, une erreur qui provient, sans doute, de ce que les expérimentateurs qui ont trouvé à la résorcine ces propriétés, ont em- ployé un produit impur contenant probable- ment les isomères, hydroquinone et pyrocaté- chine. 3° Les propriélés développatrices peuvent persister quand il y a dans la molécule un plus grand nombre de groupes OH ow Az H?. L'acide pyrogallique était le seul exemple connu; parmi les corps nombreux qui ont permis d'établir cette règle nous pouvons citer : OH Ci H3— Az H? ; NAzH2 le diamidophénol..... le diamidocrésol..... le triamidocrésol..... € ul Le) —— AL? Az H? 4° Quand la molécule résulle de la soudure de deux ou plusieurs noyaux benziques, ou encore de noyaux benziques et d'autres noyaur, les remarques précédentes ne sont applicables que si les groupes hy- droxylés et amidogènes existent dans un même noyau aromatique : bien CSH* — Az H? Ainsi la benzidine | CS Hi — Az H° il n'y a qu'un AzH? dans chaque noyau benzé- nique ne peut développer. Il en est de même des oxycarbostyriles dans lesquels les substitutions hydroxylées sont dans le noyau pyridique, alors que l’isomère, la paradioxyquinoléine, réduit les sels haloïdes d'argent. dans laquelle 5 Les subshitutions que l'on effectue dans le groupe OH ou dans le groupe AzH? détruisent les propriétés révélatrices toutes les fois qu'il ne reste pas au moins deux de ces groupes intacts dans la molécule. Par exemple les corps suivants ne développent pas l’image latente : le paradimeéthylamidophénol..... 74 Az 4); NCH5 / OCHS la diméthylhydroquinone ...….. CS HA (1) OCH3 ; (4) etc Nous avons cependant constaté une exception à cette règle; mais cette exception n’est pas très nette : le gaïacol (méthylpyrocatéchine), récem- ment indiqué comme révélateur par Waterhouse !, présente une substitution dans un hydroxyle OCH° CSH et nos expériences sur cette substance OH sont parfailement d'accord avec celle du major Waterhouse. Cette contradiction avec notre cinquième re- marque n'est peut être qu'apparente, puisque le gaïacol du commerce n’est pas uniquement la méthylpyrocatéchine ; il contient un certain nom- bre d’autres corps, parmi lesquels on trouve des phénols. Les propriétés du gaïacol qui nous inté- ressent sont peut être dues à ces produits. De nouvelles expiences sont nécessaires pour élucider la question. G° Les autres substitulions que l'on peut faire dans les CH du noyau ne paraissent pas supprimer le pou- voir développateur. Ce fait a été vérifié d'abord sur plusieurs homo- logues supérieurs des diphénols, des triphénols, des amidophénols, des diamidophénols et plus spécialement dans les crésols amidés. Quelques unes de ces substances pourraient pra- tiquement être utilisées, telles que : CH3 /N0E le diamiaocrésol..... on Az H? AzH° CHS -CoH puis un triamidocrésol..... CGH— A; H° = AZ2H? Az H? l Photographic News, juin 1891. 444 dont la position des groupes OH et AzH* n'a pas été déterminée; CH l'hydrophlorone..... oH ) OH CH3 .CHS l'hydrotoluquinone..... OH 5 OH CH le paramidocrésol..... OH È A7 H? La fonction acide ne parait pas toujours incom- patible avec les propriétés développatrices, pas plus que la sulfonation; dans le premier cas, cependant, c’est-à-dire dans le cas où la molécule contient un groupe CO?H, les corps essayés n'ont donné de résultat qu'en les employant avec une base énergique, les carbonates alcalins ne suffisant plus. L'acide protocatéchique C°H%—OH se NOH dans ces conditions, de même que l’acide caféique trouve (dioxycinnamique) : OH NOH CH = CH:CO2H 7° Il est encore quelques autres conditions que doit remplir toute substance développatrice pour être utilisable. : (a) ZI faut qu'elle soit soluble dans l'eau; (b) Que sa solution soit peu colorée; (c) Que les produits d'oxydulion qui prennent nais- sance pendant le développement soient également peu colorés et ne communiquent pas une teinte persistante au substratum du sel haloide d'argent. Ainsi l’hématoxyline G6H106, le quercitron C5H'50° développent parfaitement, mais ne sau- raient être employés parce qu'ils colorent infailli- blement la gélatine, le premier en violet intense et le second en jaune foncé. A ce propos, il est à remarquer qu'au fur el à mesure que la molécule se complique, on obtient des substances qui tendent à devenir de plus en plus insolubles et de plus en plus colorées. C'est done parmi les corps dont la molécule ne contient qu’un petit nombre d'atomes de carbone que l'on A. ET L. LUMIÈRE. — LES DÉVELOPPATEURS DE LA SÉRIE AROMATIQUE aura le plus de chances de découvrir de nouveaux développateurs utilisables. 8° Les remarques précédentes ne s'appliquent qu'à la série aromalique. L'ensemble des groupes OH et AzH° ne cons- titue la fonction révélalrice que dans cette série ; dans la série grasse ils impriment d’autres pro- priétés aux corps qui les possèdent : ainsi l’urée Az H? AzH° c( co ; la guanidine 7 \AH? ; l'éthylène AzH? Ne diamine C? H‘ (Az H?}, qui possèdent deux groupes AzH?, ne développent pas l’image latente. 9% Cas de la phénylhydrazine. -— Ce corps fait exception aux règles précédentes. D'après la cons- titution qu’on lui suppose, il n’y aurait qu’une seule substitution du diamidogène Az H? — AzH° dans un CH du noyau benzique : C5 H5 — H Az — AzH° Cette constitution différente se traduit par des propriétés différentes aussi; la phénylhydrazine , en effet, dans la série aromatique, le seul corps connu qui puisse développer sans le se- cours d’une base ou d’un carbonate alcalin. La solution aqueuse ou mieux la solution hydroalcoo- lique suffit. Cette exception dans les propriétés de la phé- nylhydrazine se rapportant à un corps dont la constitution fait elle-même exceplion aux règles précédentes, quoique s'en rapprochant, semble confirmer lesdites règles et permet de supposer que les autres hydrazines primaires aromatiques peuvent aussi constituer des développateurs. est Conclusions. — Les considérations qui précèdent nous avaient déjà fourni depuis longtemps des résullats au point de vue pratique; elles nous avaient amenés à expérimenter le paramidophénol que ses propriétés placent au premier rang des développateurs ; elles nous ont conduits à recon- naître aussi qu'un grand nombre de corps pos- sèdent des propriétés dont la photographie pourra tirer profit, et font prévoir l'existence d’un bien plus grand nombre encore de substances dévelop- patrices. Enfin elles indiquent la voie dans la- quelle il convient d’entrer pour la recherche el l'étude de ces substances. Auguste et Louis Lumière. F. PRIEM. — LE NÉO-LAMARCKISME EN AMÉRIQUE 445 LE NÉO-LAMARCKISME EN AMÉRIQUE SES BASES POSITIVES, ZOOLOGIQUES ET PALÉONTOLOGIQUES, D'APRÈS M. COPE On sait que Lamarck attribuait un grand rôle dans l’évolution des formes animales à l'usage el au défaut d'usage des organes. Darwin s’est surtout préoccupé de la manière dont se conservent et se perfectionnent les variations déjà acquises; il à exposé d'une manière lumineuse le procédé de la sélection naturelle; muis celle-ci n’explique en au- cune façon l’origine des variations. Aujourd'hui beaucoup de naturalistes suivent une autre voie que Darwin; ils recherchent l’ori- gine des modifications des animaux, et étudient l'effet des causes mécaniques sur l'organisme. Ils en reviennent ainsi à Lamarck, dont ils complètent et fortifient l'œuvre, si longtemps méconnue. C’esl aux États-Unis surtout que se manifeste ce retour aux idées de Lamarck. Dans les revues américaines se publient un grand nombre d’écrits qui tendent à édifier un néo-lamarchkisme. Le savant paléontologiste Cope est à la têle de ce mouve- ment; nous nous proposons d'exposer ici les ré- sultats quil a obtenus. Ses essais sont disséminés dans un grand nombre de mémoires: mais il est revenu récemment sur cette question dans un important travail publié dans le Journal of Mor- phology sous ce titre : The mechanical causes of the development of the hard parls of the Mammalia (Sur les causes mécaniques du développement des.par- lies dures chez les Mammifères). Il Cope étudie d’abord les membres. Pour lui, l'usage les modifie en faisant intervenir deux causes mécaniques : le choc et la tension longitu- dinale. La première cause agit comme une com- pression dans le sens de la longueur et la seconde comme une traclion dans le même sens. Toutes deux cependant peuvent stimuler le développe- ment dans la direction de la longueur du membre. Cope remarque que les éléments qui recoivent le principal choc sont précisement ceux qui s’allon- gent. Chez les Digitigrades ce sont les doigls qui reçoivent le choc des coups répétés sur le sol en supportant le poids du corps à chaque pas; chez les Plantigrades, c’est la plante du pied. Celui-ci reste court, mais les cuisses et surtout les Libias s'allongent (Éléphant, Ours). Les pattes de der- rière des Kangouroos et des Gerboises, employées au saut, prennent une longueur considérable. Il en est de même chez le Tarsier, où l'habitude de sauter se joint aux conditions de progression ar- boricole (fig. 11. Ce qui s’allonge alors, ce n’est ni Fig. 1. — Tarsier spectre (Tarsius spectrum). Membre posté- rieur, — As, astragale; Ca, calcanéum; Cw, cuboïde (de Blainville). le métatarse ni les doigts, toujours employés à la préhension; c’estle tarse proprement dit : l’astra- gale el le calcanéum. Des exemples d’allongement par extension nous sont fournis par les animaux qui se suspendent aux arbres, comme les Pares- seux et les Quadrumanes, dont les membres de devant sont allongés et très développés. L'usage conslant explique le développement énorme des insertions musculaires de l’humérus des animaux fouisseurs, comme les Talous et encore mieux les Taupes. On explique encore de la même manière la force de certains doigts plus spécialement adaptés à fouir le sol chez l'Orycté- rope et le Tatou géant. Les membres ont subi de grandes modifications en s’adaptant graduellement à la vie aquatique. Les stades de cette évolution s’observent dans l’'Enhydre ou Loutre marine, les Phoques, les Siréniens et les Cétacés. Il faut remarquer que ces différents types ne sont pas unis par des liens phylogéniques; ils ont évolué séparément. Pour qu'un membre devienne une rame parfaite, il faut qu'il soit inflexible, ce qui implique l'immo- bilité des articulations. On peut expliquer celte immobilité par le défaut d'usage d’abord volon- taire de ces articulations, l'animal maintenant le membre à l'état rigide pendant qu'il s'en sert comme de rame. On sait très bien, en effet, que le pouvoir d'extension et de flexion se perd par le manque d'usage; ainsi les fléchisseurs et les ex- 146 F. PRIEM. — LE NÉO-LAMARCKISME EN AMÉRIQUE tenseurs de la main sont atrophiés chez les Cé- tacés, tandis que ceux de l’humérus, qui devien- nent ceux du membre entier, persistent dans les Baleines; le premier segment du membre antérieur est enfermé dans le tégument du corps, de sorte que, les mouvements étant plus restreints, les crêtes d'insertion diminuent de grandeur. Chez les Otaries, les pattes de derrière étant plus libres hors du tégument du corps, peuvent servir à terre, tandis que chez les vrais Phoques, où les pattes sont plus enfermées dans le tégument, elles ne peuvent servir que pour la natation. Les relations des muscles et des pattes de derrière qu'on observe chez les Phoques se manifestent déjà chez les Mus- télidés aquatiques, comme le Vison. Le muscle grand fessier étend son insertion tout le long de l'extrémité distale du tibia, fléchissant ainsi ce segment et pouvant agir dans le choc du membre contre l’eau. Il y a en même temps raccourcisse- ment du fémur, qui devient un point d'appui pour les pattes de derrière. Cet os se raccourecit et s'é- largit jusqu’à prendre la forme caractéristique de celui des Phoques. Dans les pattes natatoires, les phalanges per- — Monachus albiventer. Phoque. Patte de deyant et Fig. 2. Lo on , à x : patte de derrière, d’après Cuvier. dent leurs trochlées et deviennent immobiles (Cé- | tacés, Siréniens); de plus, chez les Phoques, le doigt interne et les orteils interne et externe s’al- longent (fig. 2). Cela tient aux efforts provenant d'un usage constant et à une nutrition consécutive plus abondante des parties. En effet, le doigt in- terne est le support du corps pour ramper hors de l’eau, aussi bien aux pattes de devant qu'aux pattes de derrière. Toutefois le développement de l’orteil externe reste jusqu'à présent inexpliqué. Chez les Ongulés, la longueur des phalanges a diminué peu à peu, comme on le voit du Panto- lambda au Coryphodon et à l'Uintatherium et du Lo- phiodon aux Ménodontidés et aux Rhinocéros, En effet, le poids du corps pendant la marche porte surtout sur le métacarpe et IC métatarse, tandis que les phalanges ont peu d'usage. Le nombre des doigts est aussi en rapport avec les tensions el les chocs pendant la progression. Les animaux où le nombre des doigts est le plus réduit sont aussi ceux dont la course est la plus rapide. Lorsque les chocs subis par les doigts sont peu considérables, leur réduction est faible et ne porte que sur un doigt; c'est ce qu’on voit chez les Car- nivores, où la plante de l’extrémité des pieds est bien matelassée. Là où les efforts sont égaux pour tous les doigts, il n’y a pas de modifications; ainsi chez les Gerboises et les Kangouroos, les pattes de devant gardent leur caractère primitif. Les recherches paléontologiques montrent que les ancêtres des Ongulés étaient penltadactyles et plantigrades. Ils constituent le groupe des Périp- tychidés, groupe qui d’une parta fourni les Phénaco- dontidés d’où sont sortisles Hyracothéridés, formes primitives des Périssodactyles (nombre de doigts impair), et, d'autre part, les Pantelestidés, formes primitives des Artiodactyles (nombre de doigts pair) (fig. 3). Cope explique la réduction des doigts de la manière suivante. Il remarque que beaucoup d'Artiodactyles (ainsi les Hippopotames) vivent sur un sol marécageux ou relativement mou. La pro- gression sur la vase a eu pour effet, chez leurs an- cêtres, d'écarter les doigts de chaque côté de la ligne médiane. Ces doigts, au nombre de quatre (Pantolestes) sont d’abord égaux; puis l'animal a replié les doigts latéraux derrière les médians pour les protéger contre les chocs en marchant sur | un sol plus dur. C’est ce manque d’usage des doigts | latéraux qui a entrainé leur réduction chez les Porcs et leur atrophie presque complète chez les Ruminants. Les Hyracothéridés ont vécu sur un sol plus dur, si l’on en juge par leurs descendants, Tapir des Andes et Rhinocéros d'Afrique; le choc portait surtout sur le troisième doigt, devenu ainsi de plus en plus prédominant, jusqu’à ce qu'enfin | il ait seul persisté chez le Cheval. Ainsi l'effort continu sur le doigt le plus long est la cause de son allongement progressif, tandis que le défaut d'usage est la cause de la perte des doigts externes. F. PRIEM. — LE NÉO-LAMARCKISME EN AMÉRIQUE 447 De la même manière que chez les Périssodactyles, le nombre des doigts se réduit chez les Kangou- roos et les Gerboïises. Les chocsont aussi agi sur les articulations. Chez les animaux inférieurs les tissus sont mous et les flexions se produisent dans tous les sens. Au con- traire le dépôt de matières solides limite les mouvements à certaines directions. Par suite on comprend que lesmouvements, persistant pendant (DL tique qui a pour effet de permettre aux os du carpe et du tarse de céder plus facilement à la torsion sans se déplacer. Il n’y a plus alternance des os du tarse ; il y en a une pour les os du carpe, la tor- sion étant plus grande aux pattes de devant. Le Chameau, qui est aussi pourvu de coussins élasti- tiques, présente ici une difficulté ; mais son diplar- thrisme n’est pas acquis; il provient de l’hérédité, car les ancêtres des Chameaux, le Poebrotherium Fig. 3. — Pattes antérieures d'Ongulés primitifs. — A, Phenacodus primævus; B, Coryphodon elephantopus : C, Hyracothe rium venticolum (Cope). — Cu, cuboïde; L, semi-lunaire ; Se, scaphoïde ; Un, unciforme; Mo, grand os; To, trapézoïde Tz, trapèze. le durcissement destissus, les parties dures soient adaptées aux mouvements. Aux points où il y a de grands mouvements se produisent des articulations, tandis qu'entre celles-ci le dépôt estcontinu. Lors- qu'il n’y a pas du tout de mouvement, il se pro- duit des soudures, surtout si le développement des os est favorisé par des chocs; telles sontla soudure du cuboïdeet du naviculaire chez les Bovidés et les Equidés, la fusion des cunéiformes chez certains des premiers, celle du grand os et du trapézoïde chez le Pradyjus. Les Ongulés primitifs (Condylarlhra) ontlesos du carpe et du tarse disposés en deux séries linéaires, tandis que chez les Ongulés actuels (Diplarthra — Périssodactyles et Artiodactyles) les deux rangées sont alternantes. Il y a eu rotation vers le dehors de la première rangée du carpe ou du tarse sur la seconde, ou rotation vers le dedans de la seconde sur la première. Pour l'expliquer il suffit de remar- quer que dans la locomotion chaque pied occupe successivement deux positions :il repose sur le sol, puis il quitte le sol. Les coudes et les jarrets éprouvent une rolation et il y a torsion pour le pied; les os du carpe et du tarse, par suite de tor- sions répétées, se sont mis en alternance chez les Ongulés (fig. 4). Sous les doigts des Onguiculés il y a du tissu élas- (fossile rappelant le Chameau et le Lama) et ses alliés en sont affectés. Fig. 4. — Rhinoceros unicornis (Métacarpe). — P, ligne d'effort quand le pied appuie sur le sol; R, quand il quitte le sol (Cape). Dans les articulations immobilesou ginglymoïdes la mobilité provient de la combinaison de sur- 448 F. PRIEM. — LE NÉO-LAMARCKISME EN AMÉRIQUE faces concaves et de surfaces convexes permettant la flexion d’un os sur l’autre. Au contraire, dans les les articulations fixes les surfaces s'adaptent de manière à ne pas permettre de mouvements. Il y a cependant transition d’un genre à l'autre dans l'articulation distale de l’astragale des Périssodac- tyles où la convexité distale se change en une sur- face à facettes articulaires. Il y a une modification analogue chez les Artiodactyles. On doit faire in- tervenir ici des chocs continus appliqués à angle manquent. Ils existent, au contraire, chez les Di- nocérateset les Artiodactyles, el portent des cornes. Les Cervidés ont des bois caducs. M. Gaudry a démontré que les formes éteintes du Miocène pré- sentent des transitions entre les bois caducs et les cornes permanentes. Dans ces formes il n’y a pas d’abord de cerele de pierrures à la base des bois (Procervulus), puis quand le bois est devenu cadue, comme chez le Dicrocerus de Sansan, le pédicule os- seux qui le supporte est encore très long. Les bois Fig. 5. — Smilodon neogæus de la formation pampéenne de Buenos-Ayres (d’après Burmeister). droit sur les surfaces en question. Pour expliquer les autres articulations du même genre, Cope fait appel aux chocs, aux torsions tenant au mode de progression de l'animal ou à l'usage qu'il fait de ses pattes de devant. Il Les cornes se trouvent aux points sujets à une ir- ritation spéciale par contact avec des corpsétrangers animés ou inanimés. Elles sont toujours placées aux angles postéro-latéraux du crâne ou sur le nez. Ce sont les parties les plus exposées, soit quand l’ani- mal se fraie un passage, soit quand il attaque ou se défend. Ainsi le Rhinocéros a une ou deux cor- nes nasales ; l’Zlasmotherium (sorte de Rhinocéros quaternaire) avait sur le crâne une corne médiane osseuse, tandis que les angles postéro-latéraux des premiers Cervidés restaient probablement cou- verts de peau et étaient ainsi constamment nourris par des vaisseaux sanguins. Mais les lésions du té- gument produisent la morlification et par suite la chule des bois. Or ces lésions ont lieu surtout au moment des combats des mâles pour la reproduc- tion: elles sont done périodiques, ce qui permet de comprendre que la chute soit aussi devenue pé- riodique. Il faut attribuer de même à des causes mécaniques la différenciation des dents. Cope arrive aux con- clusions suivantes : 1° L'accroissement d’une dent est dû à ce que l'animal s'en sert davantage. 2 L'usage et le changement de direction d'une dent se font dans le sens de la moindre résistance. 3° A cause de leur plus grande flexibilité les crêtes de la couronne obéissent plus facilement aux ten- nt “ F. PRIEM. — LE NÉO-LAMARCKISME EN AMÉRIQUE 449 sions que les cuspides. 4° L'accroissement des crêtes et des cuspides dans toutes les directions, et par suite les plissements de la dent, sont le “résultat de la stimulation provenant de l'usage, ct limitée par l'usure due aux services mêmes que rend la dent. 5° La direction du développement des branches d’un V ou des cornes d’un croissant sera celle du mouvement des parties correspon- dantes de la mâchoire opposée. L'origine des canines est due aux efforts subis par les dents par suite de leur position en des points qui son( utilisés pour saisir la proie ou pour résister aux ennemis. Chez certains reptiles (Dime- trodon) les canines sont à l'extrémité du museau; chez les Crocodiliens elles sont sur les côtés des mächoires; chez les Mammifères elles occupent une position intermédiaire. Les canines supé- rieures sont plus fortes que les inférieures parce qu’elles sont soumises à plus d'efforts comme élant attachées à une partie plus fixe du corps. Le Mam- mifère ancien où elles sont le plus développées estle HMachaïrodus ou Smilodon. W a paru au Miocène supérieur, mais certaines espèces, commele Smilo- donneogœus se lrouvent dans les cavernes du Brésil et les couches quaternaires des Pampas (fig. 5). L'hy- pertrophie des canines est bien due à l’usage con- tinu; c'est ce que montrent les Morses, qui s’en servent pour casser la glace et se hisser à terre. Ici ce ne sont pas les incisives qui s’accroissent, parce que les Morses descendent d'animaux {les Carnassiers) ayant de petites incisives et déjà de grandes canines. L'hypertrophie remarquable des incisives des Rongeurs s'explique par la filiation de ces ani- maux. Ils sont alliés aux Tillodontes qui ont éga- lement, par l’absence d'émail, des rapports avec les Édentés. Chez l'Æsthonyx toutes les incisives sont présentes à la mâchoire inférieure ; mais la seconde paire a les caractères des incisives des \ Rongeurs (fig. 6). L'usage continu a développé 72) 7 WU / L VD). Fig. 6. — Zsthonyx Burmeisteri. — Dentition, vue de profil. (réduit), d’après Cope. cette paire chez le Psitlacotherium (fig 7), tandis que la paire externe, moins utilisée, a disparu. Il en est de même pour le Calamodon et le Tullothe- rium. Enfin les secondes incisives servant constam- ment comme des ciseaux, sont devenues énormes chez le Casteroïides de l'Ohio. La grandeur des incisives des Éléphants s’'ex- Fig. 1. — Psiltacotherium mullifraqum. — Mächoire infé- rieure, vue de profil, 1/2 grandeur, d'après Cope. plique par l'usage qu'en font ces animaux pour se frayer un passage parmi les arbres, el pour sou- lever des fardeaux. Leurs ancêtres, encore in- connus, devaient déjà posséder de grandes inci- sives, comme le montrent les Toxodontes et autres représentants des Ongulés primitifs. L’atrophie des incisives chez les Artiodactyles et les Edentés n'est pas expliquée; il y a toutefois une compensalion évidente dans la formation de pro- ductions cornées, comme la carapace des Tatous et les cornes des Ruminants. Les molaires des Mammifères semblent provenir par modifications progressives de simples dents coniques de Reptiles. Suivant Cope, la molaire a été d’abord un simple cône en alternance avec la dent correspondante de la mâchoire opposée (type haplodonte), puisle cône a développé des denticules latéraux (type triconodonte); ensuite se sont pro- duits des denticules au côté interne et au côté ex- terne, faisant alors de la dent un prisme à trois pans, avec sommet tritubereulé. En quatrième lieu un talon s’est projeté à la base de la molaire infé- rieure qui a rencontré la couronne de la supérieure (molaire tubereulo-coupante). C'est de là qu'est dé- rivée la molaire coupante des Carnassiers. Enfin s’est développé en arrière de la molaire supérieure une cuspide interne, tandis que le talon de la mo- laire s'est élevé el que sa cuspide antéro-interne a disparu. De cette manière les molaires sont deve- nues quadrituberculées et opposées (Quadrumanes, Insectivores, Diplarthra inférieurs). Chezles Hyra- coïdes et les Diplarthra il y a eu ensuile des com- plications variées; les tubercules sont devenus plats et concaves de facon à donner par usure un V, ou bien ils sont réunis par des plis trans- versaux. Ceux-ci se sont beaucoup mullipliés chez 450 F. PRIEM. — LE NÉO-LAMARCKISME EN AMÉRIQUE les Proboscidiens et y sont devenus des crêtes transversales. Cope explique la formation des différentes sortes de molaires (fig. 8), par les mouvements des dents inférieures sur les supérieures. À ce point de vue il y a plusieurs types : 1° Les molaires inférieures agissent sur la partie interne des supérieures. C'est ce que montrent les Triconodontidés du Jurassique, qui présentent des ne serait pas le cas si la dent était trop en avant ou trop en arrière. 3° Les molaires supérieures et inférieures s’op- posent, les mouvements de la mächoire inférieure pouvant alors être verticaux (Suidés, Tapiridés) ou se produire de dehors en dedans (Rhinocéros. Chevaux), de dedans en dehors (la plupart des Ar- tiodactyles), d'avant en arrière (Rongeurs), enfin d’arrière en avant (Proboscidiens). Fig. 8. — Diagrammes, montrant, d’après Osborn, les modifications successives de la dentition. — 1, Haplodonte (Dauphin); 2, Protodonte (Dromatherium) ; 3, Triconodonte (Triconodon) ; 4, Trituberculée (Peralestes): 5, Trituberculée carnivore (Didymictis) ; 6 et T, Plus ou moins quadrituberculée (6, Mioclænus ; 7, Hyopsodus) ; — pa, cuspide antérieure ou paracone; me, cuspide postérieure ou métacone; pr, cuspide interne ou protocone. molaires du type le plus simple avec des cuspides à la base des couronnes (fig. 9). Dans tous ces groupes apparait la molaire qua- drituberculée. Le quatrième tubereule, qui se trouve sur le bord postérieur du lubercule interne se montre chez le Periphtychus, souche des Condy- larthra où Ongulés primitifs, Ce tubercule s’aceroit chez le Phenacodus appartenant au même groupe. Les tubercules peuvent être simples (Aunodontes), ou en forme de crêtes (Lophodontes). Les Lopho- dontes sont dérivés des Bunodontes; les Hyracothé- ridés bunodontes sont la souche des Rhinocéridés, | Tapiridés et Équidés qui sont lophodontes. Les Ruminants présentent sur leurs molaires des Fig. 9. — Triconodon ferox. — Face interne de la mandibule; €, apophyse coronoïde; g, sillon mylohyoïdien ; s, symphyse, d’après Marsh. croissants (Sélénodontes). La formation de ces croissants tient à ce que les cuspides des molaires 20 [1 y a tout ou partie des molaires inférieures entre les supérieures. Ce genre de mastication a produit les molaires trituberculées de certains Insectivores (Centétidés et Chrysochlores!), puis les molaires tuberculo-coupantes des Créodontes* et de certains Carnassiers (Ursidés, Canidés) où le talon postérieur est développé. C’est de là qu'est dérivée la carnassière inférieure des Félidés par élargis- sement des deux tubercules externes et oblité- ration des tubercules interne et postérieur. L’ori- gine de la carnassière supérieure s'explique par sa posilion; elle est immédiatement en avant du masséter; c’est là qu’il y a le plus de force, ce qui 1 Les Centétidés sont les Tanrecs, Insectivores de Mada- gascar, voisins des Ibérissons. Les Chrysochlores ou Taupes dorées habitent le Cap. 2? Les Créodontes sont des Mammifères fossiles ayant des rapports avec les Insectivores et les Carnassiers. inférieures, passant entre celles des molaires supé- rieures, tendent à aplatir les côtés sur lesquels elles exercent leur frottement et à étendre ces côtés vers le dehors, donnant ainsi peu à peu à la cuspide une forme en croissant. Nous n'entrerons pas dans plus de détails. L'analyse précédente suffit pour montrer de quelle manière on peut déduire les modifications de structure de causes mécaniques, c'est-à-dire des mouvements de l’animal, des chocs ou des tensions que subissent les parties dures. Il nous reste à souhaiter que de nombreux naturalistes suivent la voie si brillamment ouverte par Cope et cherchent avec lui à préciser les procédés de l’évolution. F. Priem. Agrégé des sciences naturelles Professeur au ave Lycée Henri BIBLIOGRAPHIE. -- ANALYSES ET INDEX 451 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques. Oltramare (G.), Doyen de la Faculté des Sciences de Genève. — Calcul de généralisation. — Mém. Ins- tilut national génevois, t. XVI. Dans le court exposé que je vais faire de ce nouveau mode de calcul, je n’ai pas la prétention d’exposer la suite des idées qui ont conduit l’auteur à sa découverte : je chercherai seulement à faire comprendre ce calcul dans son esprit et à en indiquer brièvement les princi- pales applications. La manière la plus simple de saisir l’idée fondamen- tale du calcul de généralisation est peut-être de le re- garder comme une extension du calcul des dérivées à indices quelconques, eréé par l’illustre Liouville. De même que ce géomètre, M. Oltramare regarde (toute fonction comme développable en une série d’exponen- tielles ; « désignant une variable indépendante, il pose: 4 L1 fa (1) g(a)= A, er PAS FRE LL ad les lettres &, B6,y, Ac, AB, Ay.. désignant des cons- tantes quelconques réelles ou imaginaires, en nombre limité ou illimité. Cela fait, on exprime la série du second membre à l’aide d’une notation abrégée en éeri- vant : (2) 9 (a) = Ge Cette notation, qui peut paraitre étrange au premier abord, n’a d'autre sens que celui exprimé par la for- mule (1) et l’on pourrait tout aussi bien poser suivan l'usage courant en mathématiques 4 (a) = E A4 et, u devant recevoir successivement les valeurs &, 6, y... ; on dit que + (a) dérive de e par généralisation. Cela posé, Liouville nommait dérivée à indice y et représen- : À be ; fait par la notation d’#la quantité : da A, etat + Ageltgh + A 61° dE re M. Oltramare à eu l’idée de constituer un calcul plus général dans lequel on considère des expresssions de la forme ad A, et y(a)+ ageñty(p) + A el gi, la fonction y étant quelconque et pouvant contenir la variable «. Conformément à la notation précédemment adoptée, on désignera cette expression par le symbole (3) Ge" y (u) de telle sorte que Get* représentant © (a), Get (uw) sera le résultat d’une certaine opération effectuée sur cette même fonction + (a); il ne faut pas perdre de vue que Ÿ (u) pouvant contenir a, l’expression et 4 (u) est susceptible de représenter une fonction quelconque de a et u, de sorte que la formule (2) est entièrement équivalente à : (4) GF (w) cette dernière représente par conséquent, elle aussi, une certaine opération exécutée sur ® (a); c’est cette opération que le nouveau calcul a pour objet de pré- ciser. On peut d’ailleurs constater facilement que les différentes opérations usitées dans l'analyse ne sont que des cas spéciaux de la généralisation, tant du moins | qu’elles sont caractérisées par des symboles linéaires ou distributifs, Faisons comprendre ceci par un exemple fort simple et choisissons une opération ëe (a) définie comme suit : ëp (a) = p (4) — g (a) On peut immédiatement vérifier que (5) ôo (a) = G ere A) x = (6) et mème cs o(a) — Ge” QE 1)" Ces deux opérations à et à! 9 ne sont que des cas spé- ciaux de la généralisation; de plus en développant le second {membre de (6) selon la formule du binôme, on trouve immédiatement : Cet exemple, si élémentaire qu’il soit, peut déjà faire comprendre le parti à tirer du calcul de généralisation, quand les opérations qu’on a en vue ne sont que des opérations linéaires; s’il s’agit au contraire d’opéra- tions non linéaires, ce calcul ne s'applique plus. Il peut donc être considéré comme une synthèse ou théorie générale des opérations linéaires. Rien n’oblige d’ailleurs de le restreindre aux fonctions d’une seule variable : on peut poser, en effet, une équation caracté- ristique telle que : ic )C eu bu+cwt.…. et déduire de là la signification du symbole GE (u,v,w...) Dans le mémoire de l’auteur, on trouve un grand nombre de déterminations de valeurs de GF (u) de formes très différentes; en outre, un procédé permet- tant de déduire de G Ÿ (u) et G 4 (u) supposées connues la valeur de GŸ(u) x (u); enfin une formule générale, conte- nant deux intégrales doubles, qui fournit la valeur de GE (u) quelle que soit la fonction F (u). La généralisa- tion peut donc être regardée comme parfaitement définie, quelle que soit la fonction sur laquelle on l’exécute. Quant aux applications, elles sont particulièrement intéressantes et elles embrassent un champ considé- rable ; pour s’en faire une idée, il suffit, par exemple, de remarquer que toute identité contenant une lettre arbi- traire peut par généralisation être transformée en identité contenant une fonction arbitraire. Il est à peine besoin d'observer que ce procédé (dont la différentia- tion et l'intégration sous le signe ne sont que des cas spéciaux) ne fournira des résultats vraiment nouveaux que lorsqu'il sera appliqué avec discernement, Quoi qu'il en soit, M. Oltramare a montré par de nombreux exemples qu'il est possible d'en déduire les valeurs d'intégrales définies non connues jusqu'ici, ou des relations entre plusieurs intégrales définies, séparément inconnues. Un autre groupe d'applications est relatif à l’intégra- tion des équations différentielles, au calcul inverse des intégrales définies et à d’autres problèmes de calcul intégral. Ces problèmes, qui sont regardés comme diffé- rents entre eux dans le calcul ordinaire, apparaissent au contraire dans le calcul de généralisation comme étroitement liés les uns aux autres, ou plutôt, ils ne sont tous que des cas particuliers d’un seul problème général. Ce problème est le suivant : Etant donnée la valeur de GF (a, u) = (a), 452 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX F(a,u) représentant ainsi que %(a) une fonction connue), remonter à la valeur de + (a) qui figure dans l'équation caractéristique Gett—% (4); ce pro- blème se nomme résolution de l’équation symbolique GE (a, u) — % (a). 11 résulte de là en particulier que l'intégration de tonte équation linéaire à coefficients constants ou variables peut être regardée comme équi- valente à la résolution d’une équation symbolique. Une troisième catégorie d'applications est relative aux équalions linéaires aux dérivées partielles. Il suf- fira d'étendre ce que nous venons de dire au cas de deux ou de plusieurs variables indépendantes, Un autre procédé souvent plus commode consiste à chercher une intégrale particulière de l’équation donnée con- tenant une ou plusieurs constantes arbitraires. En opérant par des procédés analogues, il est aisé de ra- mener à des problèmes du calcul de généralisation le calcul des différences finies, celui des différences mêlées, le retour des suites, etc. On aurait tort, à notre avis, de voir dans le calcul de généralisation un calcul achevé et parfait dans toutes ses parties; les géomètres pour lesquels la rigueur est la première qualité de toute production mathématique pourront sans doute faire des objections fondées à telle ou telle démonstration, et n’accepter certaines formules qu’en soumettant les fonclions ar- bitraires qui y entrent à de nombreuses conditions restrictives, La théorie moderne des fonctions nous à appris à être circonspects dans l'emploi des séries infinies et, à ce point de vue encore, le principe et les développements du calcul de généralisation prêtent le flanc à des critiques dont on ne peut se dissimuler la gravité. Tel qu'il est néanmoins, et comme nous avons essayé de le faire comprendre par le très court apercu qu'on vient de lire, ce calcul n’en constitue pas moins un précieux instrument de recherches, et un essai remarquable de synthèse entre des domaines mathé- matiques, entre lesquels on n’aurait pas soupconné au premier abord de parenté, C, Garzer (de la Faculté de Genève), 2° Sciences physiques. Joubert (J.). — Traité élémentaire d'Électricité. 1 vol. de 371 pages, 2° édition (8 fr.), G. Masson, 420, boulevard Saint-Germain, Paris, 1891. IL à été précédemment donné dans cette Rene une analyse de l’excellent ouvrage de M. Joubert, Une deuxième édition, revue et augmentée, vient d’être pu- bliée. M. Joubert y à apporté des remaniements assez nombreux en vue de tenir compte des progrès réalisés par la science électrique pendant ces trois dernières années. Les chapitres relatifs au magnétisme et à Pélec- tromagnétisme ont reçu d'importants développements. Un nouveau chapitre a été introduit traitant des cou- rants alternatifs, des oscillations électriques et des in- téressantes expériences de MM, Hertz et Lodge. F, DE NERVILLE. Feustner (K..— La Construction des étalons de résistance électrique, ete. Zeitschrift für Instrumen- tenhande, t. X, p. 6 et 425. Ces étalons sont construits avec un alliage nommé « Patent-nickel », et qui contient 75 0/, Cu et 25 0/, Ni. Le « Patent » (brevet) se rapporte au procédé de dé- soxydation de l'alliage, que l’on obtient en ajoutant 0,3 °/, de manganèse à la coulée. Le métal peut alors être triplé. Son coeflicient de variation avec la tempé- rature est égale à 0,0002; il est peu oxydable et très permanent. Les variations constatées dans les maille- chorts sont attribuées par l’auteur à la présence du zinc. Dans un précédent travail, l’auteur, en commun avec M. Lindeck, donnait les résultats d'expériences sur des alliages contenant des proportions notables de nickel (jusqu'à 30 °/;). Le coefficient de variation est encore notablement abaissé; ce métal précédemment étudié par M. Westin, est aussi très stable, Ch, Ed. GUILLAUME. Gérard (Eric), — Leçons sur l'Electricité, profes- sées à l'Institut électrotechnique Monteflore ; 2e édition, 2 vol, in-8° (20 francs), Gauthier- Villars, Paris, 1891. Il y a, au sujet de cet excellent ouvrage, peu de chose à ajouter à l'analyse que M. Pellat a donnée ici de la pre mière édition, épuisée en quelques mois. La seconde édition contient pourtant des modifica- tions assez importantes pour être signalées. Sans s'é- carter du plan primitif, consistant à concentrer dans un premier volume la partie didactique (théorie, cal- cul des dynamos) et à réunir dans le second les appli- cations industrielles, l’auteur a remanié très heureu- sement certains chapitres; aussi, dans le tome premier, la propagation des courants alternatifs a recu un déve- loppement plus grand et est traitée suivant un plan mieux conçu: elle conduit directement à l’exposé des expériences de M. Hertz etdeM. Lodge. Des vues très inté- ressantes sur ce sujet, en particulier des apereus très clairs sur les théories de Maxwell, terminent très heureu- sement la partie théorique. Quant au calcul des dyna- mos et à l'étude de leur fonctionnement, c’est la partie traitée de main de maitre : elle était et reste un modèle en ce genre. Pour les mesures électriques, j'aurais aimé que l’on fitau moins mention de l’électromètre capillaire de M. Lippmann, quiremplace sibien le galvanomètre, avec une sensibilité supérieure, une apériodicité absolue, et une indifférence complète au champ magnétique exté- rieur, Cette propriété est précieuse, surtout dans les la- boratoires voisins des usines où fonctionnent de puis- santes dynamos, où circulent des courants intenses qui font varier à chaque instant la valeur du champ magné- tique, L'électromètre capillaire est déjà employé dans des essais industriels ; M. Minet s’en est servi très heu- reusement sous sa forme portative ; il serait donc inté- ressant de le signaler. Ceci, d’ailleurs, est une simple critique de détail, et je m’empresse d'ajouter que les mesures industrielles sont très complètement et très clairement exposées, les mesures magnétiques en par- ticulier, siimportantes dans la construction des dynamos. Dans le tome second sont traitées la canalisation, la distribution, la transmission de force, les installations d'éclairage, Dans toutes ces pages, on sent à la fois l'ingénieur distingué et le professeur; tout cela est lu- mineux comme exposition, Il y a un côté pratique qui frappe à première vue. Des devis d'installation, des ta- bleaux de prix de revient sont même intercalés à leur bonne place, et ce n’est pas un mince service rendu aux ingénieurs électriciens chargés des installations, que de réunir en un faisceau tous les documents qui leur sont nécessaires. Le livre de M. Eric Gérard est un livre qu'il faut lire, car c’est un de ces ouvrages qui seuls peuvent donner à un lecteur sérieux la notion de l’état actuel de la science électrique. Le succès extraordinaire de la pre- mière édition est d’ailleurs le pronostic de celui que la seconde ne peut manquer d’avoir. Alphonse BERGET. Fremy (E.) Membre de l'Académie des Sciences, Direc- teur du Muséum d'Histoire naturelle. — Synthèse du Rubis. Un vol. grand in-4° avec planches. (Priæ 25 fr.), Voe Ch. Dunod, éditeur, 40, quai des Grands-Augustins. Paris, 1891. Les belles recherches de M. Fremy sur la synthèse des rubis sont trop connues ! pour qu'il soit utile d'analyser ici l'ouvrage magnifiquement édité où l’au- teur vient d'en exposer l’ensemble, On sait avec quel. succès l’'éminent chimiste s’est appliqué depuis lon- 1 Voyez à ce sujet : VERNEUIL, La reproduction artificielle des rubis, dans la Revue du 15 janvier 1894, t. II, page 5. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 453 gues années à reproduire diverses espèces minéralogi- ques. Ces synthèses ont exercé sur la marche de la science une influence qu'il serait injuste d’oublier, au- jourd’hui qu'on les pratique d’une facon courante dans les laboratoires, Après avoir été l’un des plus brillants promoteurs des méthodes actuellement employées, M. Eremy à voulu les rendre en quelque sorte indus- trielles en les appliquant à la fabrication des pierres précieuses. Les admirables planches jointes à son texte témoignent du succès qu'il a obtenu avec son distingué collaborateur, M. Verneuil, dans la reproduction artifi- cielle du rubis. Les cristaux sont représentés à diffé- rents stades de formation : plusieurs sont assez volu- mineux pour pouvoir être employés à la parure. La substitution du four des verriers au petit four dont on dispose dans les laboratoires, permettra sans doute d'augmenter d’une facon considérable les dimensions des rubis artificiels, et de fabriquer ces belles gemmes à bon marché. LA: 8° Sciences naturelles. Girard (Aimé). — Recherches sur la culture de la pomme de terre industrielle et fourragère, gr. in-8° de 216 pages avec figures et atlas (texte 3 fr. 75; atlas 5 francs), 2 édition, Gauthier- Villars, 1891. Pour qu'un mémoire soit réimprimé, il faut qu'il dépasse les étroites limites du monde savant et at- teigne le grand publie. C’est ce qui est arrivé à l’ou- vrage de M. Aimé Girard, dont nous sommes heureux de constater le très grand et très légitime succès. Il a fallu donner une seconde édition des Recherches sur la pomme de terre, parce que l’auteur a non seule- ment traité les questions physiologiques que compor- tait son sujet, mais qu’en outre il a résolument abordé le problème agricole et montré qu’on pouvait tirer d’une culture rationnelle de la pomme de terre des ‘profits beaucoup plus élevés que ceux qu’on réalise habituellement. Le cultivateur influe sur l’abondance des récoltes, non seulement en distribuant au sol des fumures suf- fisantes pour satisfaire aux besoins de tous les indi- vidus de la même espèce qui, croissant simultanément à côté les uns des autres dans le même champ, évo- luant ensemble, réclament tous en même temps les mêmes aliments; si la terre, le magasin où puisent les racines, est insuffisamment garnie, les faibles n’ob- tiennent que des distributions insuffisantes, dépérissent et la récolte s’amoindrit. Depuis vingt ans, de grands progrès ont été accom- plis dans cetle voie; nous savons aujourd'hui dans la plupart des cas employer des engrais que la création des syndicats agricoles livre actuellement à bon compte. Les engrais toutefois ne présentent toute leur effica- - cacité que lorsqu'ils sont distribués à des variétés ca- pables de les utiliser, et le choix de ces variétés exerce sur l'abondance des rendements une influence déci- sive. M. Aimé Girard vient d’en donner une preuve nou- velle; il a, pendant plusieurs années, cultivé compara- tivement quelques-unes des variétés de pommes de terre connues comme prolifiques et riches en fécule; de cette comparaison il a conclu que la variété, cul- tivée en Allemagne sous le nom de Richter’s Imperator, méritait la préférence; il a étudié et fixé les conditions dans lesquelles elle doit être cultivée, puis a écrit la première édition des Recherches; les cultivateurs aux- quels il a distribué des semenceaux ont en général docilement suivi ses instructions, s’en sont bien trouvés, et aujourd'hui la Richter's hnperator est ap- préciée à sa juste valeur. On peut en obtenir de 35 à 40.000 kilogrammes de tubercules à l’hectare, tandis qu'habituellement on ne tire des autres variétés dans les bonnes terres que 20.000 kilogrammes environ; la production moyenne de la France est seulement 7.000 kilos; la Richter’s Imperator est très riche en fécule : les dosages de 20 pour 100 ne sont pas rares ; de telle sorte qu’on peut espérer produire de 5 à 6.000 kiogrammes de fécule à l’hectare, au lieu de 1.000 à 1.500 que donnent nos cul- tures actuelles, M. Aimé Girard a donc rendu à la culture francaise un service signalé en préconisant la Richter’s Imperator ; la nouvelle édition de son ouvrage indique clairement les méthodes à suivre pour réussir, méthodes éprou- vées par nombre de cultivateurs dont les renseigne- ments donnent de la justesse des règles fixées par M. Girard une éclatante démonstration, P, P, Denérain, de l’Institut. Prenant (lD' A). — Eléments d'Embryologie de l’homme et des Vertébrés. 1° vol. in-8° de 470 pa- ges (Prix 16 fr.). G. Steinheil, éditeur, 2, rue Casimir- Delavigne, Paris 1891. Il n’est guère possible de rendre compte en quel- ques lignes d’un travail aussi étendu que l’est le livre d’embryogénie que vient de publier M. Prenant. Cet ouvrage, dit l'auteur dans son avant-propos, n’est que la première partie d’une étude plus considérable. Il ne renferme, en effet, que le développement de l’ébauche embryonnaire avec ses organes primitifs. Il y a là toutefois un sujet assez vaste et assez difficile à traiter pour que nous ne ménagions pas nos félicita- tions à celui qui a eu la science et le courage néces- saires pour entreprendre une telle publication. L'ouvrage comprend huit chapitres, dont les deux derniers sont consacrés aux annexes fœtales, les six premiers traitant successivement des produits sexuels, de la maturation et de la fécondation, enfin de la cons- litution de l'embryon (formation des feuillets, rapports des organes embryonnaires entre eux et avec les ves- tiges de la gastrula, ete.). Ce qui rend plus particulièrement intéressant le traité d'embryogénie de M. Prenant, c’est que, pour chacune des questions étudiées, l’auteur suit le déve- loppement des connaissances acquises, en indiquant succinctement les principaux fravaux qui ont marqué les étape: de la science jusqu’à l’époque actuelle, Cette méthode d'exposition est très précieuse pour ceux qui veulent se faire une idée à peu près exacte des progrès de l’embryologie. Elle permet, en outre, d’utiles com- paraisons entre les diverses théories émises sur cer- tains sujets encore controversés, et 1ls sont nombreux, de telle sorte que chacun des chapitres est une sorte de revue critique d'autant plus intéressante que le lec- teur y reconnait toute la compétence de l’auteur en ces matières. En ne se bornant pas à l’'embryogénie humaine et en étendant son étude aux Vertébr M. Prenant a pu écrire un ouvrage qui joint à la clarté qu'apportent les documents fournis par les Vertébrés inférieurs, l'intérêt que suscite la revue des nombreux travaux qui portent sur ces derniers. Les chapitres sur la segmen- tation, sur la Gastrula, sur la formation et la destinée des feuillets y puisent un grand intérêt, qui s’accroit encore par l'étendue des détails relatifs à certaines espèces devenues classiques dans ces études. De là des sortes de petites monographies, comme celle de l'œuf de l'Ascaris megalocephala, où comme celle de l’'Amphioxus dont l’histoire se poursuit à travers tous les chapitres qui montrent toute l'importance du choix des sujets d'observation dans les recherches de cette nature, en mème temps que les éclaireissements qu'ils fournissent aux études sur les Vertébrés supérieurs. Un index bibliographique termine chacun des chapitres, et de nombreuses figures facilitent la lecture des des- criptions, d'ailleurs très claires. Nous n'avons qu'à former le vœu de voir bientôt paraître le second vo- lume qui nous est promis et qui devra trailer de l’orga- nogénie, c'est-à-dire du développement des organes de l'adulte aux dépens des organes primitifs de l'embryon. D* H, BEAUREGARD, 454 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Soulier (A.). — Etude sur quelques points de l'anatomie des Annélides tubicoles de la région de Cette (Sécrétion du tube et appareil digestif). Thèse de la Faculté des Sciences de Paris. Montpellier ; Imprimerie Serre et Ricome,rue de la Vieille-Intendance. juin 1891. La thèse de M. Soulier a pour objet létude de la for- mation du tube de quelques Annélides tubicoles (Bran- chiomma, Myxicola, Spirographis, Protula). On savait déjà que ce tube était sécrété par les nombreuses glandes à mucus que renferme l’épiderme tout entier, et particulièrement celui des boucliers ventraux, con- trairement à l’ancienne opinion de Claparède qui attri- buait cette sécrétion aux glandes périæsophagiennes. M. Soulier confirme l’idée que le sillon copraguogue et les glandes périæsophagiennes n’ont rien à voir avec cette sécrétion, et, reprenant l’étude histologique des téguments, il montre que les cellules épithéliales ordi- naires limitent des alvéoles occupées par des cellules muqueuses, et que l’ensemble des premières constitue un réseau alvéolaire qu'on rencontre constamment chez les Tubicoles. Cette structure se retrouve chez les Annélides errantes, mais les alvéoles y sont beaucoup plus petites, souvent vides, ce qui s'explique par l’im- portance beaucoup moindre que prennent dans ce groupe les sécrélions épidermiques. La conclusion générale qui se dégage du travail de M. Soulier est que l’épiderme présente la même structure dans tout le groupe des Annélides et qu’il est constitué par un ré- seau alvéolaire, R. KŒHLER. 4° Sciences médicales. Babinski(D'J.)—Paraplégie flasque par compres- sion de la moelle. Archives de médecine expérimen- tale, Paris mars, t. IIL, p. 229. Deux observations personnelles, rapprochées de quel- ques autres, conduisent M. Babinski aux conclusions suivantes : 1° Une compression de la moelle peut, sans produire de lésions appréciables de l'organe, donner lieu à une paraplégie très intense et même complète, susceptible de se prolonger plusieurs mois, 2° Lorsque dans une paraplégie flasque d’une durée qui dépasse quelques semaines, consécutive à une compression de la moelle, la flaccidité ne peut être attribuée à une lésion occupant une partie quelconque de l'arc des réflexes tendineux, qu’elle n’est pas due non plus à la destruction d’une portion de la moelle dans toute sa largeur !, il est permis de croire que la moelle n’est pas altérée, ou ne l'est que très légè- rement. 3° Il y a lieu d'admettre que cette variété de para- plégie,abstraction faite des circonstances extrinsèques, comporte un pronostic relativement bénin. 4° Quand l’état général du malade ne s’y oppose pas, la trépanation du rachis, suivie de l’ablation des tissus qui compriment la moelle, semble particulièrement in- diquée. D: Henri HARTMANN. Delthil (D). — Traité de la diphtérie. Sa nature microbienne, son origine ornithologique pro- bable, ses différentes médications et opérations, et plus spécialement, son traitement général et local et sa prophylaxie par les hydrocarbures non toxiques, avec 19 planches en noir dans le texte et 5 hors texte en couleur, et préface de M. le D' Ver- neuil (8 fr.). O. Doin, éditeur, 8, place de l’Odéon, Paris, 1891, Quelque considérable que soit le nombre des traités déjà publiés sur la diphtérie, l'ouvrage que vient de faire récemment paraître M. Delthil sur ce sujet est l Celle-ci s'accompagne d'une anesthésie profonde qui manque dans les compressions simples de la moelle. une œuvre d’une utilité incontestable. On sait que M. Delthil a imaginé une méthode de traitement de la diphtérie, méthode qui compte un certain nombre de succès à son actif, et qui repose sur l'emploi des hydro- carbures non toxiques, L'auteur préconise, surtout dans les cas graves, et pour désagréger les fausses membranes, ainsi que pour faciliter leur expulsion, l’inhalation des produits de combustion de goudron de gaz et d'essence de térébenthine, ou de térébenthine seule. La technique de ces fumigations, le traitement local qui leur sert d’adjuvant sont décrits dans le plus grand détail et suivis de nombreuses observations, Les chapitres qui précèdent l’exposé de la méthode de M. Delthil comprennent l'anatomie pathologique et la bactériologie. Cette partie n’est pas la moins complète ni la moins étudiée ; les récents travaux qui ont jeté une clarté si vive sur l’étiologie de cette redoutable affection, y sont fort bien exposés et résumés. Les symptômes, le diagnostic et le traitement chirurgical du croup sont également l’objet d’une description très détaillée, Notons en terminant que M. Delthil croit à l'identité de la diphtérie animale et de la diphtérie humaine. Cette opinion est basée sur un certain nombre d'observations qui ne nous paraissent pas toutes très concluantes, et d’ailleurs elle n’est pas admise par la plupart des bactériologistes, Les micro-organismes pathogènes de la diphtérie aviaire et de la diphtérie humaine ont des dissemblances trop marquées pour qu'on puisse conclure à leur identité, et l’origine orni- thologique de la diphtérie humaine, soutenue par M. Delthil, ne nous semble pas devoir être admise, D: R. Wur1z. Babes (V.). —Annales de l’Institut de Pathologie et de Bactériologie de Bucharest. 1 vol. ix-4° avec planches. Imprimerie royale, Bucharest, 1891. Bien que de création récente, le laboratoire de Bacté- riologie de Bucharest est appelé à devenir bientôt, grâce à la direction de M.Babes, un centre d’études fort impor-* tant, La situation géographique du pays, les conditions sociales et ethnographiques en font un champ d’inves- tigation très riche pour tout ce qui concerne les ma- ladies infectieuses de l'homme et des animaux. Aussi les Annales fondées par le Professeur Babes nous pro- mettent-elles la relation d’une variété de travaux qu'on ne pourrait effectuer ailleurs. C’est à ce titre surtout que cette publication nous paraît intéressante. 9 Le premier volume, qui vient de paraitre, contient vingt mémoires écrits en double texte, roumain et fran- cais. On les doit à M. Babes et à quelques élèves, qui ont collaboré avec lui, On y trouve notamment une étude très soignée des filtres à sable, dont s'occupent en ce moment tous les hygiénistes. Les résullats con- tradictoires obtenus à l’Institut sanitaire de Berlin mon- trent la nécessité de nouvelles recherches sur ce sujet. M. Babes conclut de ses expériences à l'impossibilité d'obtenir une eau biologiquement pure ; mais il pro- pose une série de mesures destinées à atteindre le degré de pureté qui suffit dans la pratique, — Signa- lons aussi un travail fort intéressant sur une épizootie spéciale à la Roumanie et désignée sous le nom de gastro-entéro-néphrite du Bœuf, Cette maladie est ca- ractérisée par une hémoglobinurie particulière, M. Babes lui a reconnu une cause bactérienne ; il en a isolé et cultivé les hématocoques et il a réussi à en reproduire expérimentalement les symptômes et les lésions ana- tomiques, — Un mémoire sur la lèpre en Roumanie, accompagné de nombreuses reproductions photogra- | phiques, mérite aussi d'attirer l'attention; M. Babes | conclut que cette maladie se transmet par contagion beaucoup plus que par hérédité. — Citons enfin d'inté- ressantes études sur les associations bactériennes de la tuberculose, la concurrence vitale et le bacille tubereu- leux de Koch, l’étiologie de la fièvre typhoïde du Cheval, que M. Babes rattache à la pneumonie contagieuse, tout en admettant l'intervention de plusieurs variétés : de bactéries, L. O. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 15 juin 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES : — M. F, Caspary : Sur les deux formes sous lesquelles s'expriment, au moyen des fonctions thêta de deux arguments, les coordonnées de la surface du quatrième degré, décrite par les som- mets des cônes du second ordre qui passent par six points donnés. — M. J. Boussinesq : Sur les déforma- tions et l'extinction des ondes aériennes, isolées ou périodiques, propagées à l’intérieur de tuyaux de con- duite sans eau, de longueur indéfinie. — MM. G. et L. Richard décrivent un appareil de leur invention destiné à constater dans un courant gazeux de très faibles va riations de pression, Cet appareil consiste essentielle- ment dans une valve métallique légère qui oscille devant . un ajutage communiquant avec le tuyau à surveiller et qui ferme ou ouvre un circuit électrique, suivant sa position. En faisant varier la situation de l’appareil par rapport à la verticale, on lui fait signaler les augmen: tations ou les diminutions de pression, et on règle sa sensibilité, qui est extrême; il peut répondre à des variations de pressions exprimables par quelques cen- tièmes de millimètre d’eau, — M. G. Bigourdan : Gb- servations de la comète périodique Wolf faites à l’Ob- servatoire de Paris, — Mile D. Klumpke : Observation de la nouvelle planète Charlois (Nice, juin 11, 1891) faite à l'Observatoire de Paris. — MM. Gonnessiat et Le Cadet : Eclipse de soleil du 6 juin 1891, observa- tions faites à l'Observatoire de Lyon. — MM. Rambaud et Sy : Observations de la comète Wolf (1884, LIL), faites à l'Observatoire d'Alger. — M. J. Léotard : Eclipse de soleil du 6 juin 4891, observée à l'Observatoire de la Société scientifique Flammarion, de Marseille, — M. J. Reiset : Résumé des observations météorologiques faites à Ecorchebœuf, près Dieppe (Seine-Inférieure) de 1873 à 1882. 29 SGIENCES PHYSIQUES. — M, B. Gernez a repris avec la mannite l'étude qu'il avait faite avec les acides tartrique et malique actifs; ia mannite, qui ne possède qu'un pouvoir rotatoire extrèmement faible, en prend un considérable lorsqu'on ajoute à sa solution un molybdate acide; M. Gernez examine comment varie ce pouvoir rotatoire quand on ajoute des quantités crois- santes de molybdate. — M. M. Berthelot a reconnu que si l’on fait passer de l’oxyde de carbone, à la tempéra- ture de 45° sur du fer réduit par l'hydrogène à basse température, le gaz qui a traversé l'appareil contient du fer; il s’agit d’un fer-carbonyle, analogue au nickel- carbonyle de MM. Mond, Lang et Quincke. M. Berthelot a étudié diverses propriétés de ce dernier composé, notamment ses conditions de stabilité et ses réactions vis-à-vis de l'oxygène; il signale une réaction remar- quable, qui consiste dans l'apparition de fumées bleues au contact du bioxyde d’azote avec le nickel-carbonyle vaporisé dans l'azote, — MM. L. Grimaux et A. Ar- naud ont formé la quinéthyline, homologue supérieur de la quinine ordinaire ou quinométhyline, par l’action de l’azotate d'éthyle sur la cupréine sodée en tube scellé. Ils décrivent le procédé de purification qu'ils ont employé pour séparer de la cupréine toute trace de quinine; ils étudient quelques-unes des propriétés de la quinéthyline et de ses sulfates. — M. C. Matignon a déterminé les chaleurs de combustion de la formylurée et de l’acétylurée ; il en déduit leurs chaleurs de for- mation, et trouve que la formylurée est formée avec dégagement de chaleur, ce qui tend à faire croire qu'on Denon ten par l’action à froid de l'acide formique sur l’urée ; M. Matignon a pu, en effel, réaliser cette réaction; au contraire l’acétylurée est formée avec ab- sorption de chaleur. — M. J. Minguin a obtenu des éthers substitués de l'acide campho-carbonique, le mé- thylcamphocarbonate de méthyle et le méthyl-campho- carbonate d’éthyle; ces éthers saponifiés par la potasse en tube scellé à 1309 — 140° donnent du camphre mé- thylé.— M. P. Th. Müller a préparé les éthers nitroso- cyanacétiques en faisant agir l'azotite d’amyle sur les éthers cyanacétiques sodés. — M, Prud'homme a étudié les phénomènes chimiques auxquels donne lieu le blanchiment du coton par l’eau oxygénée, On sait que l'addition de magnésie donne des résultats plus avantageux; M. Prud’homme démontre que cela tient à la formation d’un peroxyde de magnésie plus stable que l’eau oxygénée à la température de 100. L'eau oxygénée, très faiblement acide, attaque les corps gras neutres, à l'ébullition, avec dégagement d'acide carbonique et formation d'acides gras. Par l’ac- tion de l’eau oxygénée, sur la cellulose, 11 se forme un peu d’oxycellulose, comme le démontrent, d’une part, l'aptitude ainsi acquise à fixer sans mordant les matières colorantes basiques, d'autre part, la désagrégation que subit la fibre, par suite d’une action plus intense, si elle a été avant le blanchiment traitée par la ‘soude caustique ou des oxydes métalliques. Le réactif de Schweitzer attaque aussi la cellulose en l’oxydant, 3° SCIENCES NATURELLES. — Les recherches de M. E, Bataillon sur la structure de la fibre musculaire chez la larve de Phrygane l’amènent aux conclusions sui- vantes : la striation transversale se développe en rap- port avec les noyaux; c'est du noyau que partent les stries des réseaux transversaux sur lesquels les grains réfringents de la fibre développée représentent les massules chromatiques de la période de formation; les segments myosiques et les fibrilles longitudinales n'apparaissent qu'après le réticulum transversal. — M. V. Willem a reconnu qu'au-devant des yeux des mollusques pulmonés basommatophores on trouve dans l'épaisseur du tégument une petite lacune en commu- nication avec le système circulatoire. L'expérience à montré à M. Willem que la vision est peu nette chez ces animaux, — M. H. de Varigny a repris sur la Lymnée les expériences de K. Semper, qui avait dé- montré que l’on peut influencer considérablement la croissance de l’animal par la quantité d’eau que l’on met à sa disposition, el avait émis l'hypothèse que l’eau contiendrait en très petite quantité une subs- tance nécessaire au développement de la Lymnée, En variant l’expérience de diverses manières, M. de Varigny démontre que la condition qui exerce le plus d'influenée sur la taille de la Lymnée, c’est la place dont elle dispose pour se promener; les autres conditions physiques ou chimiques sont secondaires. — M. L. Trabut a trouvé sur les Hauts Plateaux du département d'Oran de grandes quantités de criquets pèlerins envahis par un cryptogame qu'il détermine comme un Botrytis. — M. Ch. Déperret a délerminé des débris de mammifères trouvés aux environs de Gray (Haute-Saône) dans des fentes du calcaire portlan- dien; il a reconnu la faune des fentes de carrières du bassin du Rhône, notamment de la Grive-Saint-Alban: il a retrouvé une faune analogue, dans les mêmes con- ditions, au mont Cindre (mont d'Or lyonnais). Ces faits, rapprochés de ceux de cette espèce déjà connus, à Sansan, à Tournus, indiquent pour la France au début du miocène une période franchement continentale, in- tercalée entre la phase lacustre ou lagunaire de l’Aqui- tanien et la phase d’invasion marine, au moins pour la ACADÉMIES ET SOCTÉTÉS SAVANTES vallée du Rhône et le Jura, qui caractérise l'étage hel- vétien, — Dom Jehl a trouvé dans une fente de roches oolithiques, à Pouillenay (Côte-d'Or) une série d’osse- ments, appartenant à une faune quaternaire, accompa- gnés de deux petits silex taillés. — M. Bachelard en étudiant au microscope sur des coupes minces des pla- quettes calcaires recueillies aux environs de Digne dans la zone à avicula contorta, à reconnu que ces pla- queltes sont constituées par une agglomération de coquilles microscopiques d’ostracées et de gastéro- podes, véritable naissain fossile. Mémoires présentés. — M. Surry Montaut adresse un mémoire ayant pour titre : Thermo-pyromanomètre à base de mica, système Louis Damaze, — M. Delaurier adresse, à propos d’une communication récente de M. Dubouin, une note relative à un moyen d'apprécier le mouvement vertical des aérostats. — M. J. Joffroy adresse une note sur une valeur approchée du côté du polygone régulier.de sept côtés. Séance du 22 juin 1891. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Picard. Sur une généralisation des équations de la théorie des fonctions d’une variable complexe, — M. L, Rafy. Sur la dé- termination des surfaces spirales d’après leur élément linéaire. — M. C. Guichard : Sur une classe particu- lière de congruences des droites. — M. A. Petot : Sur certains systèmes de coordonnées sphériques et sur les systèmes triples orthogonaux correspondants, — M. Lœwy s’est occupé de rechercher une méthode pour la détermination des coordonnées équatoriales des centres des clichésconstituant la carte du ciel; on sait qu'il doit être pris deux séries de clichés se che- vauchant d’une série à l’autre; M. Læwy démontre qu'il est possible de rattacher, à l’aide de mesures micro- métriques très précises, une plaque d’une série aux quatre plaques de l’autre série qui la recouvrent par- tellement; au moyen de deux ou de trois raccorde- ments successifs on pourra disposer pour la détermi- nation des constantes de chaque cliché, des repères situés dans une vaste portion du ciel, et par suite, n'utiliser que des étoiles de grandeur notable et bien connues quaut à leur mouvement propre; les calculs sont peu compliqués. — M. Charlois : Observation de la nouvelle planète découverte à Nice, le 11 juin 1891. — MM. Rambaud et Sy : Observation de la nouvelle planète Charlois (1891, juin 11) faites à l'Observatoire d'Alger, — M. E. L. Trouvelot a observé sur le soleil, le 17 juin, un phénomène lumineux extraordinaire, consistant en une tache lumineuse plus éclatante que les facules et légèrement jaunâtre : ils’agirait d’un centre éruptif; un fait analogue a été signalé une fois seule-. ment, en 1559. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — À propos de la note de M. Miculesco sur la détermination de l'équivalent mé- canique de la chaleur, M. M. Deprez rappelle que l'appareil employé pour ces expériences n’est autre que celui qu'il a imaginé dans le même but et qu'il a com- mencé àappliquer avec M. d'Arsonval, — M. A. Hurion propose une formule pour représenter la quantité de lumière de longueur d'onde » transmise à travers un milieu trouble assujetti à remplir certaines conditions théoriques, Etudiant au moyen du spectrophotomètre de M. Crova la lumière transmise à travers certains précipités (essence de citron par l’eau, azotate d'argent par le chlorure &e potassium) qui présentent une teinte bleue, l’auteur à trouvé pour les diverses raies du spectre des valeurs qui vérifient sensiblement sa loi, lorsqu'il observe aussitôt après la formation du pré- cipité. Avec le temps, le liquide trouble devient blane, la loi ne s'applique plus ; on pourrait alors représenter le phénomène par une formule indiquant qu’au phéno- méne primitif se superpose une diffusion générale in- dépendante de la longueur d'onde, — M. V. Bjerknes a cherché à déterminer expérimentalement l’amortis- ement des oscillations électriques de l’excitate ur de M. Hertz, il l'a trouvé extrémement rapide, Ce phéno- mène explique la résonnance multiple observée par MM. Sarrazin et de la Rive, conformément à l’'hypo- thèse émise par M. Poincaré qui était arrivé par des considéralions théoriques à des valeurs semblables. — M. E. Mercadier, appliquant les principes théoriques auxquels il était arrivé dans ses recherches antérieures, a construit un récepteur téléphonique donnant des résultats très satisfaisants avec un volume et un poids extrèmemement restreints; celte exiguité du récepteur permet d'en fixer une paire à demeure dans lesoreilles, au moyen d’un ressort allant de l’un à l’autre par des- sous le menton. L'auteur donne le nom de bitéléphone à ce disposilif, dont l'avantage est de laisser les mains libres. — M.C. Limb a cherché à préparer du baryum métallique par l’électrolyse ; en électrolysant du chlorure de baryum soit pur, soit mélangé de chlorure de sodium il n’a jamais obtenu de métal, mais un sous- chlorure, — M. G. Hinrichs indique la façon dont la loi qu'il a formulée s'applique au calcul de la tempé- rature d’ébullition d’un liquide quelconque soustoutes les pressions. — M. A. Recoura a soumis à l'étude thermo-chimique la modification que les sels violets de chrome dissous éprouvent par la chaleur en devenant verts; il à reconnu que le phénomène est double et consiste 1° dans une dissociation en acide libre et en sel basique; 2 dans la formation d’un sesquioxyde par- ticulier. — M, A. Joly a repris l'étude de l’osmiamate de potasse; ses recherches le conduisent à écrire la formule de ce corps OsO$AZK. — M. L. Ouvrard a ob- tenu le zirconate de lithine en chauffant la zircone avec le chlorure de lithium; il a obtenu aussi un silicozir- conate de potasse en chauffant au rouge vif du zircon avec du carbonate de potasse. — M. A. Besson a pré- paré -les trois bromoiodures de silicium, par une mé- thode analogue à celle qui lui avait servi pour les chloroiodures, en distillant sur du silicium cristallisé, chauffé à une température voisine du rouge, du bro- mure d'iode.— M. R. Varet a obtenu l'iodocyanure et le bromocyanure de magnésium et de mercure en ajoutant à une solution concentrée et tiède de cyanure de mer- cure, soit de l’iodure soit du bromure de magnésium ; en particulier pour le premier de ces sels, il est facile de se rendre compte que l’on a affaire à une combinai- son de cyanure de magnésium avec l’iodocyanure de mercure ; on sait que le cyanure de magnésium ne peut exister isolément, — MM. H. Gautier et G. Charpy ont repris la question de la passivité du fer en présence de l'acide azotique concentré; ils ont reconnu que l'acide azotique, quelle quesoit saconcentralion, attaque le fer parfaitement décapé, mais au lieu de l'attaque vive accompagnée de dégagement gazeux que produit l'acide étendu, l'acide concentré donne lieu à une attaque lente, sans dégagement gazeux, mais facile à mettre en évidence par la diminution de poids du métal, la présence d'oxyde de fer en solution et la création d'une force électromotrice d’environ Or45 par le couple fer-plaline-acide azotique concentré. — M. J. Minguin en traitant en tube scellé à 150e l’éther camphocarbonique par le benzylate de soude a obtenu l'hydroxycamphocarbonate de benzyle neutre, l'alcool éthylique de l’éther ayantété déplacé par l'alcool ben- zylique. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. P. Pichard a étudié la transformation des malières organiques azotées dans des sols artificiels variés, au point de vue de l'influence qu'exercent sur la formation des nitrates et de l’am- moniaque le sulfate de fer et le sulfate de chaux. D’une facon générale, le sulfate de fer etles sels de fer entra- vent la décomposition des matières azotées, mais favo- risent la nitrification de l’azote ammoniacal; le sulfate de chaux favorise à la fois les deux actions micro- biennes. Ces deux sels ont donc des indications pratiques différentes, suivant que l’azote des fumures se trouve à l'état d’ammoniaques ou bien à l’état de combinaisons organiques non décomposées. — MM, A, Müntz et A.Ch. Girard ont vérifié dans les ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES conditions pratiques de la culture lesrésultats de leurs recherches surla rapidité de nitrification des divers engrais formés de débris animaux; ils ont vu ce que sont les engrais dontla nitrification avait été reconnue le plus rapide, sang desséché, débris de cornes, guano, etc. qui donnent les résultats les plus avanta- geux. —MM. R. Lépine et Barral ont reconnu que dans le sang des chiens après un repas riche en féculents, il existe des quantités notables de glycogène qui est rapidement saccharifié, de sorte que si l’on recherche le pouvoir glycolytique d’un sang recueilli dans ces con- ditions, on l'estime au-dessous de sa valeur, le sucre fourni par le glycogène remplacant celui qui existait dans le sang à mesure que celui-ci est détruit; si on supprime le ferment glycolytique par le chauffage à 089, le premier phénomène se présente seul, et on a alors une augmentation notable du sucre du sang pen- dant la première demi-heure. — M. Ch. Henry à re- levé les séries de M. J. Delbœuf relatives aux efforts exercés successivementsur un dynamomètre ; il cherche unerelation numérique entre lesnombres obtenus. Dans le même but, il a fait des expériences avec des haltères munies de poids additionnels. Il trouve des augmenta- tions ou des diminutions de force, suivant que les nombres sont ou ne sont pas rythmiques, d’après sa théorie. — M. L. Roule a suivi le développement des feuillets blastodermiques chez les Crustacés Isopodes (Porcellio scaber). — M. A. Trécul a étudié la formation des feuilles des Æseulus et des Pavia et l’ordre d’appari- tion de leurs premiers vaisseaux. Dans les écailles pro- tectrices des bourgeons, qui sont constituées par des pé- tioles surmontés de folioles avortées, les vaisseaux nais- sent à la base du pétiole ets'accroissent de bas en haut pour arriver auxfolioles. Pourles feuilles, ilexiste deux types ; dans le premier (Æsculus hippocastanum), les premiers vaisseaux apparaissent dans la moitié infé- deure de chaque foliole, et se développent vers le haut dans la nervure médiane et vers le bas dans le péliole; irans le second type (Pavia) les vaisseaux apparaissent à la fois dans la foliole et dans le pétiole, et marchent à la rencontre les uns des autres. L'atrophie de la fo- ilole fait passer de ce dernier type à celui des écailles. M. Trécul étudie également le développement des ner vures enrapportavec les dents des folioles, — M. H.Ju- melle a étudiéla respiration et l’assimilation aux tem- pératures de — 30° à — 40° chez les plantes qui résistent sans être desséchées à ces froids. La respiration est supprimée, ou du moins tout à fait insensible, La dé- composition de l’acide carbonique a pu être observée pour l’Epicéa, le Genévrier, et un Lichen, l'Evernia pru- nash'i, —M, J. Kunkel d'Herculais et Ch. Langlois: Les champignons parasites des acridiens. (Voir Soc, de Biologie, 20 juin). — M. A. Lacroix a étudié dans l'Ariège des granites qui avaient été donnés comme traversant les couches jurassiques. Il a reconnu que ces granites ont traversé les couches primaires sous-ja- centes dans lesquelles ils ont produit de véritables ac- tions métlamorphiques. Dans les couches jurassiques, on n’observe rien de pareil, les nodules granitiques qui y sont inclus sont des blocs arrachés; le contact des cal- caires jurassiques s'effectue avec le granite par des couches riches en cristaux, mais qui sont des assises détritiques, des arkoses, et non le résultat d’une action métamorphique. Les granites sont donc là, comme par- tout, antérieurs à époque secondaire. — M. J. Rous- sel présente diverses observations qu'il a pu faire sur le granite porphyroïde de Saint-Martin (Pyrénées-Orien tales), granite considéré par Dufrénoy comme très ré- cent etitraversant lecalcaire fossilifère de l’infracrétacé. L'examen d’une tranchée récemment ouverte dans les marnes albiennes montre en effet des filons grani- tiques au travers de ces marnes avec mélamorphisme au contact. — M.E. Rollet a étudié sur les squelettes des grands singes conservés dans les musées de Paris et de Lyon les traces de phénomènes pathologiques; il a relevé un assez grand nombre d’affections osseuses analogues à celles de l’homme, — M. Ch, Brongniart annonce par télégramme avoir obtenu de bonnes cul- tures du Botrytis dés Acridiens. Mémoires présentés. — M, C. Ribard adresse une note relative à un moyen d'enlever la neige sur les rails de chemins de fer. L. LAPICQUE, ACADEMIE DE MEDECINE Séance du 9 juin 1891 M. Charpentier, répondant à une assertion de M. Constantin Paul, insiste sur ce point que le cœur s'hypertrophie certainement pendant la grossesse, — M. Laborde complète sa communication de la dernière séance en montrant un appareil destiné à pratiquer la respiration artificielle dans le cas d’accidents dus aux chloroforme ; on doit la réaliser par le procédé de Pin- sufflation. L'appareil de M. Laborde permet de la faire et en outre de se rendre compte, à tous les moments de la chloroformisation, de l’éfat des mouvements respi- ratoires: — M. Labbé n’admet pas que les physiologis- tes puissent fixer les règles de la chloroformisation, les phénomènes que l’on constate chez les animaux n'étant pas absolument identiques à ceux observés chez l'homme. Les sujets qui vont mourir d’intoxica- tion chloroformique ont une manière spéciale de respi- rer que tout médecin peut reconnaître sans appareil spé- cial. Il faut alors faire immédiatement la respiration arti- ficielle en élevant et abaissant les bras, M. Labbé reven- dique la paternité de la méthode d'administration du chloroforme par doses fractionnées; il ajoute qu'il ne faut pas pincerlesnarines de ses malades, — M. Guérin ait remarquer que c’est Simpson qui le premier a em- ployé le mode d'administration que préconise M. Labbé. — M. Chauveau, qui a administré le chloroforme un grand nombre de fois aux animaux et à l’homme, dit que danses deux casles accidents sont les mêmesetla mort a lieu avec les mêmes symptômes. — M. Périer présente une petite fille qu’il a opérée avec succès par la laryngotomie, pour un corps étranger (fragment d'os) tombé dans le larynx depuis 35 jours. — M. Klata traité, avec bénéfice évident, un anévrisme artério- veineux de la carotide dans le sinus caverneux par la la ligature de la carotide primitive. — M. Tuffer lit une observation d’extirpation par dissection d’un gros kyste du rein (néphrectomie partielle); la guérison à eu lieu par première intention après suture du parenchyme rénal. Séance du 16 juin 1891. M. Marotte préconise dans la grippe surtout l'emploi du chlorhydrate d’ammoniaque qui agit plusrapidement que le sulfate de quinine et amène une guérison plus nette. On peut atteindre les doses de 3 à 5 grammes en 2% heures, par cachets de 0 gr. 50, en calculant les moments d'administration d’après les effets produits. M. Marotte a vu aussi le jaborandi, pris à la dose de 1 gr. 50, couper rapidement une attaque de grippe. — M. Péan : Epilepsie partielle par angiome intra- cranien. Il existe, une variété d’angiomes intra-cra- niens qui sont développés dans l’épaisseur des ménin- “es etsitués entièrement à l’intérieur du cràne. Ce sont des angiomes simples ; leur caractère principal est de communiquer, par une grosse veine dilatée, avec le sinus longitudinal supérieur. Au point de vue clinique, ces angiomes méningés se manifestent uniquement par des troubles fonctionnels cérébraux en rapport avec le siège de la tumeur. Ces symptômes sont toujours: la douleur localisée au point lésé; l’épilepsie jackson- nienne, si la tumeur correspond à un centre moteur, Le pronostic en est très grave, à cause des phénomènes cérébraux qu'ils occasionnent, et aussi parce que la rupture d’un des vaisseaux qui les constituent peut amener une hémorrhagie mortelle, Ces tumeurs sont justiciables de la trépanation, —- M. Terrier communi- nique les observations relatives, dans un premier cas, à une choléeystite avec péricholécystite. A cause des adhérences, l’extirpation de la vésieule fut impossible, 458 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES On fit le drainage et le malade mourut de péritonite septique. Dans un second cas, il fit la cholécystectomie chez une femme qui avait une grosse tumeur biliaire, La vésicule renfermait des calculs, M. Terrier eut recours au cathétérisme des voies biliaires, qui lui permit de constater la présence de calculs dans le canal cystique ; la malade guérit rapidement. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 20 juin 1S91, M. Féré présente un grand nombre d'empreintes des plis cutanés du pouce, relevées chez des épileptiques, et constate que chez la moitié des sujets ces empreintes ne sont pas symétriques à droite et à gauche, — MM. Combemale et Marestang ont constaté chez des sujets atteints de lèpre anesthésique typique, une dé- générescence nerveuse particulière (dégénérescence crétacée) caractérisée par la présence de granulations calcaires, tenant la place des tubes nerveux, — MM. Ca- déac et Meunier envoient une note intitulée : Antago- nisme des formes épileptisantes et stupéfiantes du vulnéraire. — MM. Kunkel d'Herculais et Langlois, à propos de la note récente de M. Brongniart à l’Aca- démie des Sciences, rappellent qu'ils ont signalé depuis longtemps un cryptogame parasite des acridiens, d’après leurs observations etleurs expériences, ils pen- sent que ce parasite ne peut s'opposer efficacement aux invasions des sauterelles, parce que les conditions d’in- fection sont rarement réalisées dans la nature, et que d’ailleurs la maladie produite est superficielle et n’en- traîne la mortde l'adulte qu'après la ponte. — M.Giard, qui présente cette note, montre des acridiens infectés par fui au moyen de l’Isarix du hanneton et fait voir que l’aspect est très semblable à celui des individus in- fectés, envoyés d'Algérie par les auteurs précédents. — M. Binet a étudié l'anatomie microscopique de la chaîne nerveuse abdominale du hanneton; la segmen- tation n’est plus indiquée que par des bandes minces de tissu conjonctif; il décrit les rapports des nerfs alaires et cruraux avec les centres moteurs. — M. Féré rapporte un cas de création par un aliéné de mots dé- pourvus de signification. — M. Sanchez-Toledo a repris les expériences de MM. Vaillard et Vincent sur les cultures de bacilles du tétanos débarrassées de leurs toxines par la chaleur ou le lavage; contrairement à ces auteurs, il a vu que le bacille dans ces conditions tue les souris auxquelles on l’inocule, SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 3 juillet 1891. M. Schwedoff expose les bases d'une théorie relative à la distribution dans l’espace de l’énergie d’une masse en mouvement. On sait que la lumière, le son, la cha- leur, le courant électrique et l’électromagnétisme exi- gent un certain temps pour déterminer un effet à dis- tance, Quant à l’action électrostatique à distance, on ignore jusqu'ici si elle est instantanée ou progressive, M. Schwedoff aborde cette importante question, Ad- mettant l'hypothèse d’une vitesse finie de l’action élec- trostatique, 1l détermine, par lanalyse géométrique, la distribution des lignes de force et des surfaces de ni- veau dans le cas d'une décharge électrique. On sait qu'une décharge, pareille à celle que l’on obtient avec un excitateur de M, Hertz, consiste en oscillations très rapides de deux masses de signes contraires et dont les vitesses sont toujours directement opposées. M. Schwedoff projelte les graphiques qu'il a déduits de la théorie et les compare avec ceux que M. Hertz avait déterminés par lexpérience.L’examen de ces deux genres de graphiques qui représentent la distribution des lignes de force, permet de constater un accord très satisfaisant, lequel peut être invoqué comme une pre- mière preuve en faveur de l’hypothèse de M, Schwe- doff. La figure ci-jointe représente les graphiques de M. Schwedoff. Le côté droit est réservé exclusivement aux surfaces de niveau et le côté gauche aux lignes de force, au bout d’une oscillation simple, En examinant le côté droit, on y apercoit d’abord une droite hori- zontale et un cercle qui se coupent aux points O et O. Ce sont les surfaces de potentiel zéro. Ces deux surfaces partagent tout l’espace en quatrerégions, dont w'etusont à un potentiel positif, w et v'à un potentiel négatif, Les nombres 1, 2, 3, etc., placés à côté des courbes repré- sentent les valeurs respectives du potentiel. -L A’ef — A sont les positions des deux masses au bout de la pre- mière oscillation, Conformément à cette distribution des surfaces de niveau, les lignes de force (côté gauche) forment quatre groupes de lignes parfaitement dis- tincts. A mesure que les oscillations se suivent, les lignes de force 4, b, « s’en vont dans l’espace, en con- servant leur configuration et en cédant leur place à d'autres, de formation plus récente, D'autre part, M. Schwedoff a appliqué sa théorie à l’analyse de l’ac- S'iylares dre. has | Cig 7es doforce. tion d’un noyau qui traverse un essaim de corpuseules disséminés dans l’espace. Il est manifeste qu'un noyau pareil doit engendrer dans l’espace un système d’ondes, dont la configuration est identique à celle que nous présentent les queues des comètes. L'auteur montre par de remarquables projections que pour les comètes de formes les plus variées, les plus capri- cieuses en apparence, il y à toujours une concordance parfaite entre l’observation et la théorie. Il rappelle, en terminant, que la théorie actuellement adoptée par certains astronomes conduit le plus souvent à des ré- sultats en contradiction avec les observations !, — MM. Hutin et Leblanc ont traité par le calcul le rôle des condensateurs dans les machines à courants alter- natifs pour combattre la self-induction du circuit, On sait que la self-induction augmente la résistance appa- rente et modifie la phase : or l’emploi des condensa- teurs permet précisément de faire varier la phase et de combattre l’inertie apparente dans le régime va- riable. Incidemment les auteurs ont fait des essais de divers diélectriques et ont précisé les cas dans lesquels chacun d'eux peut donner de bons résultats, Ils ont déterminé ensuite les conditions d'emploi des conden- sateurs dans les machines à champ tournant, et ont réalisé ainsi un nouveau moteur à courants alternatifs. De cette étude résulte qu’en réalisant des conditions particulières indiquées par la théorie, on arrive à. ! La partie de la théorie de M. Schwedoff qui se rapporte aux comètes a été publiée il y a onze ans (Theorie mathéma- tique des Formes cométaires, Odessa, 1880). ha 2 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 159 donner à ces machines toutes les propriétés des ma- chines à courants continus, par exemple à rendre le couple moteur indépendant de la vitesse de rotation; il n'y a de différence que dans la nécessité d’un syn- chronisme approximatif, — L'étude des phénomènes actino-électriques à fourni à M. Branly un certain nombre de résultats nouveaux. Jusqu'ici il n’y à ac- cord que pour ce qui concerne l'électricité négative. Pour la positive, les résultats, assez discordants, con- duisaient cependant à admettre que celte électricité ne donne pas lieu aux mêmes phénomènes de déper- dition que la négative. M. Branly montre que cette dissemblance provient seulement de l’imperfection des expériences : avec l'électricité positive, la déperdition se produit encore très nettement, mais avec une rapi- dité un peu moindre. Au lieu de l'arc électrique, il vaut mieux prendre comme source la série des dé- charges produites par une bobine de Ruhmkorff entre deux crayons d'aluminium. Pour des expériences qua litatives, on place au-dessous de la source et à une très petite distance un électroscope à feuilles d’or de M. Boudréaux; on entoure la boule d’une boîte cylin- drique portant à sa partie supérieure une seule ouver- ture circulaire sur laquelle on place la substance dont on veut étudier la transparence : mica, quartz, spath fluor, etc. Pour les recherches quantitatives, l’auteur a recours à la méthode de M. Hallwachs, qui consiste à étudier la déperdition sur un plateau métallique relié à un électromètre, M. Branly se sert de l'élec- tromètre de Hankel, 11 a constaté que le degré de poli du métal du plateau ne joue pas un rôle aussi consi- dérable qu'on l'avait cru Jusqu'ici. Edyard HiAupié. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 12 juin 1891, M.Engel s’est proposé d’étudierles changements de co- loration que présente le chlorure de cobalfsous diverses influences. On admettait généralement que ce change- ment est dù à ladissociation de l’hydrate de chlorure de cobalt CoCP, 2H20, et la couleur bleue résulteraitalors de la présence de chlorure de cobalt anhydre ou d’un hydrate inférieur ; M. Engel montre que cette explica- tion doit être rejetée ; en effet si à une solution très diluée de chlorure on ajoute un peu d’une solution également diluée d’acide chlorhydrique, on voit immédiate- ment apparaître la coloration bleue. On ne peut ad- mettre la formation de chlorure anhydre dans de pa- reilles conditions. Du reste si à cette solution très diluée on ajoute du chlorure de zine, on voit réappa- raître la couleur rose, il ne peut cependant y avoir hydratation dans ces conditions; l'explication natu- relle c’est qu'il se forme, en présence d’acide chlorhy- drique, un chlorhydrate de chlorure, bleu; quand on introduit un chlorure capable de donner un chlorhy- drate de chlorure plus stable que celui de cobalt, la co- loration bleue disparait par suite de la disparition de l'acide chlorhyrique. La formation de chlorure de co- balt bleu, quand on chauffe son hydrate jusqu’à son point de fusion, est due aumême phénomène, M. Engel a, en effet, montré qu'on ne peut chauffer ce chlorure jusqu’à son point de fusion sans qu'il perde de l'acide chlorhydrique. — M.Chassevent, à l’appui des obser- vations de M. Engel, dit qu'ila obtenu une combinaison des chlorures de cobalt et de lithium CoCP, LiCIl, 3420 qui est d’un beau bleu et tout à fait analogue à celle qu'il apréparée au moyen deschlorures de cuivre et de lithium, CuCl, LiCl; 3H?20; cette dernière est rouge. Ces composés ne différent des chlorhydrates de M. Engel que par la substitution d’une molécule de chlo- rure alcalin à une molécule d'acide chlorhydrique. — M. Wyrouboff croit que les faits observés par M. En- gel ne résolvent pas complètement la question : sans mettre en doute l’existence du chlorhydrate de chlorure de cobalt, M. Wyrouboff pense que dans la majorité des cas c’est à l’existence d’unhydrate inférieur qu'est due la coloration bleue. Il ‘explique l'apparence que présentent lessolutions de.clilorure de cobalt chauffées et le chlorure de cobalt fondu, par un phénomène optique ; la différence des colorations serait due à ce que dans un cas on regarde la lumière transmise et dans l’autre la lumière réfléchie. — M. Le Chatelier ne conteste pas non plus l'existence des chlorhydrates de chlorure de cobalt ; mais pense que les faits obser- vés par M. Engel s'expliquent aussi facilement par la déshydratation simple du chlorure de cobalt, La forma- tion d’un chlorhydrate de chlorure en solution neutre exigerait la formation simultanée d'un oxychlorure qui, étant insoluble dans l'eau pure, le serait à fortiori dans la solution du mélange des sels. La décomposition du carbo- nate de chaux par le chlorure de cobalt ne prouve pas, d’après M. Le Chatelier, la présence d’un chlorhydrate de chlorure, le sulfate et l’azotate de cuivre donnant lieu au même phénomène. Enfin la déshydratation du sel dans la liqueur ne doit pas être attribuée à la présence d’un corps qui absorbe l'eau, mais simplement à la dilution de la dissolution par un corps inerte dont l'effet est d'augmenter la dissociation de l’hydrate. L’eau n’est pas inerte ici, puisque c’est un des élé- ments de la dissociation de l’hydrate de chlorure de cobalt; elle doit donc augmenter la stabilité de l'hy- drate. — Nous ferons remarquer ici que, si les proposi- tions de M. Le Chatelier sont vraies d’une manière gé- nérale, l'application qu’il en fait aux expériences de M. Engel ne nous semble pas justifiée; en effet quand on ajoute à une solution très diluée de chlorure de cobalt une solution elle-même diluée d'acide chlorhydrique, on ne devrait pas avoir de coloration bleue, puisqu'on augmente laquantité d’eau ; ensuite, ilne devrait pas y avoir de différence entre les substances inertes qui di- luent la solution de chlorure de cobalt; et cependant ce sont celles-là seules qui sont capables de donner des chlorhydates de chlorure stables qui font disparaitre la coloration bleue pour la ramener au rose; en diluant par une substance inerte quelconque la so- lution de chlorure de cobalt, on devrait amener sa dis- sociation et par suite la coloration bleue, ce qui n’a pas lieu, Enfin, il est absolument inexact de dire que les ozychlorures sont insolubles ; le fer, le chrome, métaux voisins du cobalt, en donnent de solubles. — M. Bé- champ rappelle une méthode récente d'analyse du lait, décrite par M. Duclaux dans son livre sur le lait; il en fait une critique basée sur de nombreuses expé- riences et prétend que les résultats qu’elle donne sont forcément erronés. M. Béchamp estime que, quand il s’agit des laits de vache et de chèvre, un dosage de la caséine, une détermination du volume des globules laiteux dans la crème éthérée fournissent des rensei- gnements à la fois plus exacts et plus expéditifs sur la qualité de ces laits. Il indique ensuite la marche à suivre pour le dosage de la caséine. — M. L. Bour- geois a remarqué que les alcaloïdes mono-oxygénés des quinquinas peuvent être sublimés dans le vide; ce fait était déjà connu pour la cinchonine.M. Bourgeois a trouvé que la cinchonidine se sublime très aisément dans le vide à 2000 ; la cinchonamine elle-même jouit de cette propriété, mais il faut avoir soin de ne pas dépasser la température de 1800, La cinchotine eristallise aussi par sublimation à des températures un peu plus élevées que la cinchonine. M. Bourgeois a comparé les cristaux obtenus par voie de sublimation à ceux que donnent les autres procédés de cristallisation et a re- connu la parfaite identité cristallographique des cris- taux obtenus par les divers procédés. — M. Demont décrit une combinaison de sulfure de potassium et d’al- cool absolu, précipitable de sa solution alcoolique par l’éther, ou par évaporation. Les cristaux fondent à 60° et ont pour formule C=H60, K?$?; la chaleur leur en- lève de l'alcool. — M. Lespieau, par l’action de l’anhy- dride phosphorique sur Ja dibromhydrine symé- trique de la glycérine a obtenu l’épidibromhydrine CHBr— CH—CH°Br, qui par ses propriétés diffère des corps CH'Br? signalés jusqu'ici; c’est un liquide bouil- 460 lant à 1559 avec décomposition. Traité par l’éthylate de sodium, il donne l'éthyline CHBr — CH — CH?0C?H° bouillant à 145°, Séance du 26 juin 1891. M. V. Serrin présente une nouvelle balance donnant directement les fractions du décigramme; cet appareil a déjà été décrit dans ce recueil (voir page 429). — M. G. Griner expose une partie de ses recherches sur l’isomérie descarbures normaux à 6 atomesde carbone; et fait en particulier une étude détaillée du diméthylbia- cétylène d'où résulte d’une manière évidente la formule de constitution suivante : CH—C=C—C—=C— CH M. Griner montre que la formation d’un seul tétrabro- mure par addition de brome à ce carbure, est d'accord avec cette formule et pouvait être prévue par des con- sidérations stéréochimiques. L’hydratation du diméthyl- biacétylène par l'acide sulfurique ou par le chlorure mercurique donne naissance à une monocétone non saturée CSH$O?, et à une dicétone C6H100? identique avec l’acétylpropionylméthane ; l’action de la potasse al- coolique sur le même carbure conduit à la fixation directe d’une molécule d'alcool; ces deux derniers faits sont les premiers de ce genre qui aient jamais été ob- servés, et sont d’un grand intérêt, M. Griner donne aussi par des considérations stéréochimiques lexplica- tion de l’isomérie des carbures appelés bipropényles, et de leurs tétrabromures qui conduisent tous par l’ac- tion de la potasse alcoolique au diméthylbiacétylène. — M. Lauth a étudié l’action de divers oxydants sur les combinaisons azoïques, et a constaté qu'il y a rup- ture de la molécule qui donne d’un côté une combinai- son disazoiïque, et d'autre part une quinone. La réac- tion paraît ètre très générale et caractéristique des combinaisons azoïques ; elle donne en outre un moyen rapide et facile de préparer les quinones à l’état de pureté; l’oxydant employé de préférence est le bioxyde de plomb en présence d'un acide, — M. Béchamp ajoute quelques mots à la communication qu'il a faite dans la dernière séance; il a reconnu dans le lait la pRscnce de matières qui réduisent la liqueur cupropo- tassique, à la manière du lactose, mais qu’on peut sé- parer du sucre de lait par précipitation au moyen de l’acétate basique de plomb. La présence de ces subs- tances est une cause d'erreur pour le dosage du lac- tose dans le lait, — M. Grimaux expose la suite des recherches qu'il a faites avec M. Arnaud et indique les précautions à prendre pour obtenir de la cupréine parfaitement exempte de quinine, ceci pour répondre aux observations de M. Hesse, MM. Grimaux et Ar- paud ont remplacé dans leur réaction le chlorure d’éthyle par l’azotate d’éthyle et ont ainsi obtenu la quinéthyline, ou étho-cupréine, les rendements s’élè- vent à 60 °/. Cette base fond à 160°, Les auteurs ont également obtenu la quinopropyline avec l’azotate de propyle. — M. Engel revient sur sa dernière commu- nication sur la coloration des sels de cobalt, et explique l’action du papier, qui, imprégné de chlorure de cobalt, devient rapidement bleu; il y a décomposi- tion du chlorure et formation d’ oxyde. L'auteur répond ensuite aux critiques nee. dans la dernière séance par M. Le Chatelier, montre, comme nous l'avons déjà fait dans le ie rendu précédent, qu’elles ne sont pas fondées. — M. Le Chatelier ne maintient d’ailleurs pas ses affirmations précédentes; il considère seulement la couleur rose des sels de cobalt comme la teinte exceptionnelle; or l'addition d'un excès d’eau produit toujours la coloration rose; il pense que la coloration est ici en relation avec une variation dans la condensation moléculaire, — M. Meyerhoffer cherche à expliquer les changementsde couleur par l'hypothèse d’Arrhénius; suivant lui, la coloration bleue serait due aux ions du cobalt. — M. Wyrouboff fait observer que les hypothèses émises par M, Meyerhoffer sont con- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES traires à l'expérience et qu'il ne peut admettre l’hypo- thèse de la dissociation électrolytique dans un cristal, A. COMBES, MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 17 juin 1891. M. de Mendizabal Tamborel, de Mexico, pré- sente à la Société les premières bonnes feuilles des tables logarithmiques et trigonométriques qu'il est en train de publier. Appelant gone l’angle que mesure la circonférence, il désigne par les ,expressions de décigone, centigone,.…… microgone le #,le 4. le 100%000 dU gone. Les tables de logarithmes compren- nent tous les nombres de 0 à 125000 avec 8 décimales; elles s'arrêtent là parce que 125000 microgones font 4 î de gone et qu'il suffit de calculer les fonctions cireu- laires pour cette partie de la circonférence. Les loga- rithmes de tous les nombres premiers de 4 à 50000 sont donnés avec 8 décimales; les logarithmes de sin de tang # œ (24 microgone, depuis 0 jusqu'à 125000; ceux de sin «, tang «, cosæ et cotang «, avec 8 décimales de centi- milligone en centimilligone, et, en outre, de microgonà en microgone, avec 8 ‘décimales pour les 25000 pre- miers, avec 7 décimales seulement pour les autres. La disposition des tables permet d’avoir immédiatement les fonctions circulaires dans fous les quadrants. — M. Lucien Lévy signale les surfaces moulures à noyau cylindrique de révolution comme pouvant, par un mouvement hélicoïdal, engendrer une famille de Lamé (systèmes triplementorthogonaux). —M. Béghin: Sur certaines singularités que peuvent présenter les fonctions monodromes qui admettent des espaces lacunaires, — M. d'Ocagne : Sur un mode de repré- sentation graphique applicable à une classe éten- due d'équations à quatre variables. Séance du 1° juillet 1891. M. D. André expose une démonstration nouvelle du théorème suivant, autrefois donné par lui : Parmi les permutations de » nombres distincts, n étant égal ou supérieur à #, le nombre de celles qui présentent un nombre pair de séquences est égalau nombre de celles qui en présentent un nombre impair, — M. Laisant signale plusieurs propriétés d’une transformation qui sénéralise celle figurant dans le problème de géomé- trie du concours d'admission à l’École Polytechnique de cette année. — M. d'Ocagne : Observations sur le même sujet. — M. Béghin : Sur une question d’arithmé- tique à laquelle donne lieu l'étude des points isolés d’une fonction à espace lacunaire. SOCIÉTÉ , avec 8 décimales, de microgone en M. D'OCAGNE, SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 18 juin 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, Oliver Heaviside présente une note sur les forces, les tensions et les écoulements d'énergie dans le champ électro-magné- tique. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Hopkinson présente une note sur la densité des alliages de nickel et de fer; il a décrit antérieurement certaines curieuses proprié- tés des alliages de nickel et de fer qui contiennent res- pectivement 220), et 25 0/;, de nickel. Ces alliages peuvent exister sous fe états aux températures qui vont de 10 à 30° C. Après refroidissement, les alliages sont aimantables, ont une résistance élec trique inté- rieure, une résistance au brisement plus élevée, une ductilité moindre; après échauffement, les alliages ne sont pas aimantables, ont une résistance électrique plus considérable, une moindre résistance au brisement et une plus grande ductilité, Ces nouvelles recherches ont montré à l'auteur que la densité de ces alliages est d’en- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES AG viron = moins considérable dans l’état aimantable que dans l'état non aimantable, Les expériences faites sur deux anneaux contenant respectivement 25 ?/, ef de 22 0/, de nickel, ont donné les résultats suivants : (Les densités sont données sans correction par rapport à la densité de l’eau, à la température où l'expérience a été faite) : NICKEL 22 % NICKEL 23 % Densité temp. Densité temp. Après échauffement, non aimantable S.15.15.1 8.13.16.5 Après refroidissement, aimantable. 71.99.14.5 7.96.13.6 Chauffé à nouveau, non aimantable. 8.15.18.0 S.12.18.2 Refroidi à nouveau, aimantable.... 7.97.22.0 7.95.21.8 Les anneaux étaient chaque fois refroidis à une tem- pérature variantde —100°C. à — 110° C. par l'acide car- bonique et l’éther dans le vide, — M. Frank Clowes présente un appareil destiné à éprouver la sensibilité des lampes de sûreté, Il consiste en une boîte de bois de forme cubique d’une capacité de 100 litres environ ren- due imperméable au gaz par un enduit de paraffine; cette chambre d’essai est munie en haut d’un petit tube pour l'entrée des gaz et en bas d’un tube analogue pour leur sortie, Il y a à cette boîte une fenêtre garnie d’une glace par où l’on peut observer la lampe placée à l’intérieur ; la paroi inférieure est percée d’une ou- verture, munie d’un rebord, par laquelle on introduit la lampe. Cette ouverture peut être close par une fer- meture à eau consistant en une petite auge de zinc, portée sur des supports et contenant environ 5 cenli- mètres cubes d’eau où viennent plonger les rebords de l’ouverture. Les gaz contenus dans la chambre peuvent être mélangés au moyen d’une planche mince suspen- due à l’intérieur et qu’on peut faire mouvoir avec une poignée placée sur le devant de la boîte, Pour faire une expérience on introduit du méthane dans le gazomètre. On verse dans la partie supérieure du gazomètre un volume d’eau égal au volume du méthane à déplacer, puis on le fait passer dans la partie inférieure pour qu'il chasse le gaz dans la chambre; la lampe est alors introduite dans la chambre et placée derrière la glace de telle sorte qu’on puisse observer l’aspect et les dimensions du chapeau qui se forme au-dessus de la flamme, M. Clowes n’a point encore publié les résullats complets de ses expériences ; il faut no- ter cependant que parmi les nombreuses formes de lampes de sûreté essayées, la seule qui ait répondu à la double condition d'éclairer suffisamment et d’être sensible à la présence d’une petite quantité de gaz, est la lampe perfectionnée de Ashworth (système Hepple- white-Gray). — M. W.Grylls Adams fait une communi- cation sur la comparaison des perturbations magné- tiques simultanées à plusieurs Observatoires et la détermination des fonctions de Gauss pour ces obser- valoires, La tempête magnétique spécialement discutée est celle qui a eu lieu les 24 et 25 juin 1885: elle a été enregistrée photographiquement dans 17 observatoires, onze en Europe, un au Canada, un aux Indes, un en Chine, un à Java, un à l'ile Maurice etun à Melbourne. On à discuté et comparé ces documents et on a formé des tables des perturbations simultanées; on a pu faire voir ainsi que c’est environ au même moment que la perturbation s’est produite pour les différents observa- toires, L’intensité de la perturbation et spécialement de la perturbation de la force magnétique horizontale est à peu près la même pour des stations très éloignées. — M. E. Schunck fait une quatrième communication sur la chimie de la chlorophylle. Cette note fait suite à celles que l’auteur à déjà présentées sur le même sujet. Après avoir décrit l’action des alcalis caustiques à l’état de fusion sur la phyllocyanine et les produits qui se forment au cours de cette action, M. Schunck passe à l'étude de la phylloxanthine, substance qui se forme en même temps que la phyllocyanine lorsqu'on fait réagir les acides sur la chlorophylle. Il décrit alors les changements que subit la chlorophylle sous l’ac- tion des alealis et le produit principal qui se forme alors, et auquel il donne le nom d’alkachlorophylle 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Frédéric W. Mott fait une communicalion sur les résultats de l’hémisection de la moelle épinière chez les singes. 1° Les mouvements associés réapparaissent après complète destruction de la pyramide entrecroisée au-dessous de la lésion ; 2° Touteslesimpressionssensitives nes’entrecroisentpas dans la moelle, les impressions factiles, musculaires et de localisation dans l’espace, ne subissent pas de décussation; les impressions douloureuses passent des deux côtés à la fois. Un état particulier connu sous le nom « d'allochirie » se produit après l’hémisection; 3° Les troubles vaso-moteurs se produisent du côtéde la lésion et ils consistent en une vaso-dilatation et une enflure du pied; la peau du pied rougit et s’échauffe, mais la température s’abaisse dans le creux poplité, ce qui est dù, sans doute, à la paralysie des muscles ; 4° Les dégénérescences au-dessus et au-dessous de la lésion sont limitées au côté lésé quand l’autre côté de la moelle a été complètement respecté. Certains faits liés aux dégénérescences servent à montrer l’origine et le tra- Jet de certains faisceaux de fibres longs et courts; 5° L’excitation de l'écorce cérébrale des deux côtés, quelques semaines ou quelques mois après l'hémisec- tion de la moelle, donne des résultats qui montrent que l’obstacle au passage du courant nerveux créé dans la moelle par la lésion persiste toujours, malgré la réap- parition des mouvements associés; 6° Dans un cas, on a opéré l’ablation de la zone motrice de la jambe du côté où on avait pratiqué la lésion médullaire, plusieurs mois après la première opération. —M. W.G-. Spencer fait une communication sur les changements provoqués dans la respiration et la circulation par l’excitation électrique du plancher du 4° ventricule, L'objet de ses recherches était de relier plus étroitement les signes cliniques aux troubles médullaires en localisant dans le plancher du 4° ventricule les centres qui agissent sur la circulation et la respiration, L'auteur à institué des expériences sur des chats, des chiens et des singes ; il a pu déduire des résultats qu'elles lui ont donnés et de ceux des expériences antérieuresles conclusions sui- vantes : 1° Inspiration. La partie du plancher du 4° ven- tricule dont l'excitation cause un accroissement dans la profondeur de l’inspiration est située le long de la ligne médiane sur une étendue de 2? millimètres de chaque côté. 2° Expiration. La zone expiratrice s'étend dans les parties latérales du plancher du 4° ventricule Jusqu'à 2 ou trois millimètres de la ligne médiane, 39 . Ralentissement du rythme respuratotre. Cette ré- gion est située au-dessus de la continuation de la co- lonne postéro-médiane, à l'endroit où elle se sépare de la colonne du côté opposé, et dans la partie du plan- cher du ventricule qui touche au bord interne de la colonne. Le centre de cette petite zone est un point, situé entre 4 et 2 millimètres à partir du calamus et entre 2 et 3 millimètres à partir de la ligne médiane, La Société Royale s’ajourne jusqu'à la rentrée des vacances, . Richard À, GréGory. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 12 juin 1891. M. Ayrton lit un mémoire fait en collaboration avec M. Sumpner sur « les analogies du courant alternatif et de la différence de potentiel dans les méthodes de mesure des puissances. Dans la dernière note lue à la Société en mars dernier,les auteurs observaient que dans toute méthode de mesure de puissance comprenant des lectures de volts et d’ampères, on pourrait imaginer d’autres méthodes dans lesquelles on lirait des ampères au lieu de volts, ou bien des volts au lieu d’ampères. Plus récemment, le D' Heming a, par une transfor- mation des formules données par les auteurs dans une communication à la Société Royale sur la mesure de la puissance par trois voltmètres, indiqué la méthode correspondante dans laquelle on emploie trois ampè- 462 ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES remètres. Les deux dispositions sont représentées dans | Lodge expose et décrit une horloge pour indiquer la les figures { et 2, tandis que la figure 3 représente une modification de la méthode du D' Heming, dans la- quelle le courant dans la résistance sans induction 7 est mesuré à l’aide d’un voltmètre V placé entre ses deux bouts. Ceci évite d’avoir recours à un instrument électromagnétique contenant un circuit sans induction. Les formules pour les watts moyens dépensés dans le circuit ab avec les dispositions des figures 1 et 2, sont respectivement : re Le Ê 2 A‘: SANS Sa me el W (l Î I] = LT; D œ to | > = © | > 1 D A La méthode de M. Blakesley pour mesurer la puis- sance par un dynamomètre à fente est analogue à la 4 Fig. 1. méthode primitive de l’électromètre, dans laquelle la différence de deux lectures est proportionnelle au pouvoir, et la méthode de l’électromètre double de Blondlot et Curie, analogue au wattmètre ordinaire. Le wattmètre est défectueux, en ce qu’une bobine solé- noïdale est introduite dans un circuit qui est censé dépourvu d’induction. L'erreur ainsi commise est, ainsi que l’un des auteurs l’a montré il y a quelques années, exprimée par la formule : Watts apparents 1 + tang tango Watts vrais 1 + tang?9 où 6 est l’angle qui mesure la différence de phase entre le courant et la force électromotrice dans le cir- cuit où l’on mesure la puissance, et # l’angle mesurant la phase du circuit qui estapproximativement dépourvu d'induction. Il n’est pas prouvé que la même formule exprime l'erreur dans une des méthodes où l’on em- ploie des résistances qui ne sont pas complètement dépourvues d’induction, M. Blakesley a, comme on sait, appliqué son dynamomètre à fente à la mesure de la différence de phase entre deux courants; et une né- thode analogue pour trouver la différence de phase entre deux différences de potentiel est décrite dans le mémoire. Dans cette méthode, on emploie un dyna- momètre à fente à grande résistance, comme M.Reming- ton l’a indiqué pour la mesure des puissances. L’électro- mètre de Blondlot et Curie pourrait également être employé au même but. De nombreux diagrammes, destinés à faire ressortir ces diverses analogies, accom- pagnent la note, — Le Professeur S.-P. Thompson demande si des voltmètres à échauffement des fils ne pourraient pas être employés à la mesure des diffé- rences de potentiel, M, Ayrton répond que, bien que la self-induction de ces instruments n’'introduise pas d’erreur sensible, néanmoins le fait qu'ils exigent un courant considérable est un inconvénient, et comme ces courants ne sont pas toujours dans la même phase que dans les autres circuits, des corrections embar- rassantes deviennent quelquefois nécessaires. Les ins- truments électrostatiques sont préférables, — M. O. direction du mouvement de la terre sur son orbite dans l’éther. Après avoir rappelé les différents mouvements auxquels est soumis un point de la surface de la terre, il montre que le mouvement sur l'orbite est le plus considérable, et sa direction, à chaque instant, n’est pas aisée à concevoir. Un appareil pour montrer cette direction est donc nécessaire pour résoudre les pro- blèmes qui exigent la connaissance du mouvement d'un point à travers l’éther. Dans une des deux hor- loges, une tige représente l’axe des pôles de la terre, et une autre, l’axe de l’écliptique, est inclinée de 23° 1/, et accouplée par un joint de Hooke, Le dernier axe peut tourner autour du premier. A l'extrémité su- périeure, l’axe de l’écliptique porte un tube et un index, tous deux perpendiculaires à l’axe et rectangulaires entre eux, L'horloge est réglée sur le temps solaire, et le tube étant dirigé vers le soleil, l’index marque alors la direction du mouvement de la terre sur son orbite, — 2. Fig. 3. M. Lodge montre ensuite quelques expériences avec les bouteilles de Leyde. La première porte sur des bou- teilles résonatrices; la décharge de l’une d'elles fait, pour ainsi dire, déborder une autre quand les lon- gueurs des circuits des deux bouteilles sont convena- blement réglées. La seconde bouteille était complè- tement séparée de la première et était influencée par les ondes électromagnétiques émanées du circuit où se fait la décharge. En allongeant ou raccourcissant l’un des circuits, on empêche ce débordement d'électricité. A ce sujet, M. Blakesley a rapproché de cette expé- rience une observation déjà ancienne de Priestley, qui a remarqué que quand des bouteilles différentes ont été chargées avec le même conducteur primitif, si l'une est déchargée, les autres se déchargent aussi quelquefois, quoiqu’elles ne soient pas complètement chargées. Le Dr Lodge attribue ce fait à une influence de la même nature que celle dont il a montré l’exis- tence, Le mot « résonance », dit-il, a souvent été mal compris, en ce sens qu'on y attache toujours l’idée d’un son, et il croit préférable d'appliquer au phéno- mène actuel l’épithète de « symphonique » (sympho- ning or symphonie). — Une autre expérience prouve que les fils peuvent être amenés à vibrer pour répondre à une décharge de bouteilles, tout comme une corde vibre à lunisson d’un diapason. Un fil fin tendu est mis en communication avec le bouton d’une bouteille, et un autre parallèle avec l’armature extérieure, et en changeant la longueur d’un circuit indépendant où l’on provoque une décharge, on voit paraitre, à chaque décharge, une lueur le long des moitiés les plus éloi- gnées des fils tendus; chacun des fils agit ainsi comme un tuyau d'orgue fermé, les extrémités éloignées for- mant les nœuds où la variation de pression est maxi- mum, En employant des fils longs, on a observé une lueur sur des portions du fil situées entre des parties intermédiaires obscures, qui correspond au premier harmonique eten mesurant la distance de deux nœuds, l’auteur à déterminé la longueur d'onde des oscilla- tions. La longueur ainsi mesurée ne coïncide pas très exactement avec la longueur calculée, et la différence parait due à ce que le pouvoir inducteur spécifique du ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 463 verre n’est pas le mème pour des pressions alterna- tives dont la fréquence n’est rapide qu'à l’état sta- tique. Il montre ensuite que les impulsions électriques qui passent le long d’un fil peuvent être amenées, par . une vibration, à réagir sur la bouteille à laquelle il est fixé et à produire ce débordement d'électricité, quand la distance de l’intérieur à l'extérieur est d'environ huit pouces. Durant cette expérience, il observe que le bruit de l’étincelle est considérablement réduit quand on augmente la longueur du circuit où se fait la décharge. Il décrit enfin quelques expérience sur les écrans qui arrêtent la radiation électromagnétlique, expériences dans lesquelles le résonateur de Hertz était entouré de diverses matières, Il n’a pas trouvé trace d’opacité dans les isolants, mais l'enveloppe métallique la plus mince suffit pour constituer un écran absolu. IL montre une sorte de résonateur qu'il a appelé œil électrique gradué ou harpe. élec- trique, qui a été construit par son assistant, M. Robinson, et dans lequel des interrupteurs à étincelles, à feuilles d’étain de différentes longueurs, sont fixés sur une plaque de verre; l’un ou l’autre de ces interrupteurs répond suivant la hauteur de la radiation électroma- gnétique qui tombe sur l'appareil. Ces expériences donnent lieu à une discussion à laquelle prennent part MM. Blakesley, Sumpner et Thompson. M. Ayrton demande à M. Lodge comment il explique l’opacité de l’ébonite pour les rayons lumineux. Est-elle due à une absorption sélective portant uniquement sur les rayons qui sont sensibles à l'œil, ou faut-il admettre l'explication ordinaire qui attribue à des impuretés conductrices contenues dans l’ébonite le pouvoir d’exer- cer l’action d'écran, suivant la propriété normale des conducteurs ? Une autre explication possible serait que le mouvement des particules d’éther serait un mouve- ment à trois dimensions, et la lunrière serait due à la projection de ce mouvement sur un plan perpendi- culaire au rayon, tandis que l'induction électroma- gnétique pourrait être due à l’autre composante, Le D' Lodge dit qu'il ne pense pas que l’ébonite soit opaque à cause de la présence de particules conduc- trices, et qu'il incline plutôt à penser qu’elle agit comme le verre dépoli, dans lequel l’opacité est due à des réflexions internes, Une telle substance ne serait opaque que pour des vibrations dont les longueurs d'onde seraient comparables aux dimensions des par- ticules, — Une note « sur la construction de résistances dépourvues de self-induction », par MM. Ayrton et Mather, est déposée pour la prochaine séance. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 21 mai 1891, MM.Henri Armstrong el E. Rossiter : 1° Dérivés bro- més du $-naphtol. — 2° Action de l’acide nitrique sur les dérivés du naphtol, considérés comme indiquant le mode suivant lequel s'effectue la nitration des com- posés aromatiques en général. Formation des composés nitro-cétoniques. — 3° Nouvelle méthode de prépa- ration des composés nitrés; emploi du peroxyde d'azote comme agent de nitration., — M. R.Warrington: Nitri- fication. Dans la première partie de ce travail, l'auteur décrit un organisme qu'il est parvenu à isoler par des cultures en solutions ammoniacales et qui oxyde l’am- moniaque en ne produisant que des nitrites sans traces de nitrates. L'organisme nitreux qui se présente sous forme de corpuscules circulaires ayant environ 1 4,0 de diamètre, peut vivre en l'absence de toute matière or- ganique. Il jouit vraisemblablement de la propriété de s’assimiler le carbone des carbonates acides. La seconde partie a trait au ferment nitrique. L'auteur prouve que cet organisme ne produit ni nitrites, ni nitrates dans les solutions ammoniacales. En l'absence de l’ammo- niaque, il transforme énergiquement les nitrites en nitrates, La nitrification observée dans le sol doit donc être attribuée à deux organismes différents. Le premier transforme l’ammoniaque en nitrite, le second les ni- trites en nitrates, Le premier, ou ferment nitreux, a pu être isolé par des cultures dans des solutions de carbonate d’ammoniaque; le second pourrait proba- blement être isolé par des cultures dans une solution de nitrite de potassium contenant du carbonate de sodium. Séance du 4 juin 1891, M. H. Gladstone : Réfraction et dispersion de diverses substances en dissolution. L'auteur continue la publi- cation des résultats numériques de ses recherches. — M. S.-V. Pickering : La natwre de la dissolution élu- cidée par l'étude des densités, chaleur de dissolution et point de congélation des solutions de chlorure de calcium. M.Pickering conclut à l’existence des hydrates à 6, 7 et 8 H?0 et d’autres plus complexes, — M. S.-V. Picke- ring : Note sur une récente critique de M. Sydney Lupton sur les conclusions tirées d’une étude sur les solutions d'acide sulfurique. —MM. Stanley Kipping et E. Mac- kenzie : L’ax'diméthyl-xx diacétyl-pimélate d'éthyle et ses produits de décomposition. — M. W. Pullinger : Com- posés volatils du platine. L'auteur reprend l'étude des composés du platine avec le chlore et l’oxyde de car- bone obtenus par Schutzenberger. Il à préparé égale- ment les corps Pt CISC20? et Pt Br? CO. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 27 juin 1891. 1° SciENCES PuysiQues. — M. J.-M. Van Bemmelen rend compte des recherches de M. Schreinemakers (exécutées au laboratoire de chimie inorganique de l’Université de Leyde) sur la manière de se comporter du sel double de KI et Pb? en présence de l’eau. Déjà, en 14881, M. Ditte a déterminé la composition des d lutions pour lesquelles ce sel double peut exister sans décomposition ultérieure à des températures entre 45° et 80° C. M. Schreinemakers a étendu ses recherches jusqu'à une température de 250°, En examinant les divers équilibres obtenus quand le nombre des molécules de (KI)? surpassait celui des molécules de Pbl? et inversement, il trouvait que la règle des « phases » de M. Gibbs, — appliquée pour la première fois par M. Bakhuis Roozeboom à la détermi- nation de l’action e l’eau sur des corps tels que le chlore, le brome, l’acide sulfureux, le chlorure de cal- cium, l’astrakanite, etc., — subsiste encore dans le cas d’un système hétérogène composé des trois substances KI, PbE? et l’eau. Dès que quatre phases se présentent (KI solide, le sel double solide, la solution et la vapeur d’eau, ou bien PDP solide, le sel double solide, la solu- tion et la vapeur d’eau), l'équilibre est déterminé et la solution a une composition constante à chaque tempé- rature, indépendante de l'excès de (KI)? ou de PhP. Quand, au contraire, une des deux phases solides fait défaut, la composition de la solution dépend de l’excès de (KI)? ou de PbP. Les expériences démontrent que la variation de la solubilité des deux composants du sel double avec la température suit un cours différent, selon que (KI)? ou Pb se présentent à l'état solide. Il en résulte un intervalle de température dans lequel le sel double doit se dissoudre dans l’eau. C’est ce qui arrive, en effet, entre 145° et 205%. A des températures plus basses, le sel double se dissout en déposant une certaine quantité de PbP; à des températures plus élevées, 1l se dissout en déposant une certaine quantité de KI. Ces quantités varient avec la température, Les résultats de M. Schreinemakers peuvent être repré- sentés graphiquement à l’aide d’une surface composée de trois feuilles, dont les points indiquent à chaque température la composition de la solution pour tous les cas possibles d'équilibre entre trois phases, lorsque soit KT, soit Pb, soit le sel double forment la phase solide. La troisième feuille est coupée par les deux autres suivant des courbes qui représentent les équi- libres entre quatre phases. Et dans cette troisième feuille se trouve la courbe de solubilité du sel double 46% ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sans décomposition entre les températures de 145° et de 205°. — M. H. W. Bakhuis Roozeboom s'occupe de la composition des eaux de la mer du Nord dans le voisinage de la côte néerlandaise, près de Schéve- ningue, d'après des observations faites pendant l'été de 1890. L'auteur a constaté de nouveau les variations importantes et rapides qu'éprouve la densité sous l’in- fluence des eaux douces introduites par le « Rotter- damschewaterweg (chemin maritime de Rotterdam). Le minimum de densité observé était 1,0103, le maximum 1,02#1 (45° C). La variation la plus rapide était de 1,0220 à 1,0103 en 80 minules, On nota aussi la présence de l’'ammoniaque; dans la plupart des cas, aucune trace n’en fut trouvée. La plus petite partie en contenait de 0,1 à 0,4 milligrammes par litre, Les matières orga- niques en dissolution furent déterminées au moyen d’une solution de caméléon. Les.quantiltés nécessaires variaient de 0,2 à 0,7 milligrammes de KMnOï par litre, Une accumulation d’impuretés fut constatée plu- sieurs fois sur la ligne de démarcalion des eaux de petite densité avec les eaux plus lourdes. Dans un cas, on trouva 8 milligrammes de Az H et il fallut 146 mil- ligrammes de KMnO“ par litre. La quantité des ma- tières solides en suspension fut trouvée aussi fort va- riable. Elle à varié entre 4 et 245 milligrammes par litre. La composition est celle des argiles de mer, des côtes du Zuiderzee, aux endroits favorables au dépôt des parties argileuses. Des quantités au-dessus de 30 milligrammes par litre ne furent obtenues que par les vents très forts, surtout les forts brisants. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. W.F. R. Suringar fait une troisième communication sur les Mélocacti des Indes occidentales, Il décrit une espèce nouvelle de l'ile de Porto-Rico et développe, à l’aide d’une carte, la géographie botanique générale du genre entier et la statistique des différentes espèces. — M. C. A. Pekel- haring rend compte du rôle des sels de chaux dans la coagulation du sang. Sans doute, les sels de chaux jouent un rôle dans la formation de fibrine. Cela est prouvé par la présence de chaux dans les cendres de fibrine (MM. Brücke, Freund, Latschenberger), par la provocation de la coagulation à l’aide de Ca CP ou de Ca SO‘ (MM. Green, Hammarsten, Ringer et Sainsbury), et surtout par le fait que la coagulation tarde à se faire si les sels de chaux sont ajoutés sous forme insoluble (MM. Arthur et Pagès). Cherchons à préciser un peu le rôle joué par les sels de chaux. En saturant le plasma du sang (maintenu à l’état liquide à laide de sulfate de magnésium ou d’oxalate de potassium) avec Na CI ou plutôt avec MgSO#, on précipite avec le sérum-globu- line une autre substance, qui, mise en contact avec Ca CP ou Ca SO, va présenter toutes les propriétés du ferment de fibrine tiré du « washed blood elot », Comme ce ferment, elle diffère du ferment tiré du sérum par sa précipitation partielle par dialyse et sa précipitation totale par Mg SO, Le ferment de fibrine est un com- posé de chaux. Il reste efficace après avoir ajouté un excès d’oxalate d’ammonium. Il transporte de la chaux sur fibrinogène, Si l'on divise une solution pure de fibrinogène en deux parties égales et que, suivant Hammarsten, on fait coaguler l’une d’elles en la chauf- fant à 60°C et l’autre au moyen de ferment tiré du sérum ou préparé par la digestion de la plasma-globu- line avec des sels de chaux, les cendres de la première moitié sont exemptes de chaux, tandis que celles de la seconde en contiennent. Ainsi probablement le fer- ment de fibrine se forme par l'union de l’albumine, dégagé pendant la destruction des cellules, avec les sels de chaux dissous dans le sang. La peptone, qui est riche en chaux, ne supprime pas la faculté de coa- gulation du sang de chien et ne diminue pas la pres- sion. Si le sang a été privé de la faculté de coaguler à l’aide de peptone pauvre en chaux, l'injection d’une solution de Ca C1? de 1 0/0 fait renaître cette faculté. Une solution pure de fibrinogène en contact avec la peptone ne se coagule pas après addition de plasma- globuline et de Ca CI? ou de Ca S0#, mais bien après addition de plasma-globuline digérée d'avance avec un sel de chaux. Le « fibrinogène textile » de M. Wool- dridge, tiré de thymus de veau, ne fait coaguler le fibrinogène qu'après l'addition d’un sel de chaux. SCHOUTE, Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 11 juin 189, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Emil Waelsch : « Sur la construction des groupes polaires » (2° commu- nication), et « Sur les formes du cinquième ordre sur les cubiques gauches ». 29 ScreNces PuYsiQuEs. — MM. St. von Kostanecki et E. Schmidt : « Sur la gentisine » (2° communication), 3° SCIENCES NATURELLES. — M, Moriz Fasching : «Sur un nouveau bacille capsule (Bac. capsulatus mucosus). — M. Steindachner : « Sur quelques reptiles et amphi- bies nouveaux et rares, » L'auteur décrit, entre autres, une série d'amphibies et de reptiles recueillis par le lieutenant de vaisseau von Hühnel lors de l'expédition africaine du comte Samuel Tleki, et signale comme nouvelles les espèces suivantes : 41° Chamaeleon Hôhneli, trouvé à Leikipia. 2° Chamaeleon leikipienses (même origine). 3° Chamaeleon tavetanus, trouvé à Taveta. 4° Megalivalus pantherinus, trouvé à Leikipia. 5° Simetes Meyerinki, à l’Archipel Lulu. 6° Ctenoblepha- ris Stolzmanni, dans le Haut-Pérou. 7° Zonosaurus Boett- geri, à Nossi-Bé, 8° Chalcides Simonyi, aux îles Cana- ries. 9° Chalcides viridanus. 10° Tarentola mauritanica. 11° Molge Luschani. — M, Claus. « Travaux de l'institut zoologique de l’Université de Vienne et de la station zoologique de Trieste » 2 cahiers. Dans ces cahiers se trouve la description d’une nouvelle poltidie,. Goniopelte gracilis, pêchée en 1890 dans lexpédition du vaisseau « lola». — M. Maximilien Sternberg. 1° «La suspen- sion, la fatigue et le relâchement des réflexes nerveux dans la moelle épinière », D'un grand nombre d'obser- vations provenant de divers auteurs il résulte que chez l'homme sain et malade les réflexes nerveux présentent les phénomènes de suspension, de fatigue et de relà- chement, L'auteur à institué des recherches expérimen- tales sur les animaux pour se rendre compte des causes et des conditions de ces phénomènes. Il résulte de ces recherches que la manière dont se comporte le réflexe nerveux de la moelle dépend d’un mécanisme compliqué dont le fonctionnement est analogue à celui des autres centres nerveux, 2° « Sur les relations du réflexe nerveux et de la tension musculaire. » Comme dans beaucoup de maladies nerveuses l’état de contraction et l’exagération du réflexe nerveux sont étroitement liés, on a souvent admis qu'entre la tension du muscle et le réflexe nerveux existait un rapport de causalité, Lombard trouva d'autre part, dans ses recherches sur des hommes sains, que le degré de tension du musele quadriceps de la jambe n'allait pas parallèment à lPin- tensité du réflexe patellaire. A l’occasion des recher- ches communiquées dans le premier travail, Pauteur a fait des observations sur ce sujet. Il a reconnu que les phénomènes de relächement (exagération du réflexe) et de fatique (diminution du réflexe) sont complètement indépendants de la tension du muscle et que l’un et l’autre phénomènes peuvent se produire, que la ten- sion du muscle quadriceps se trouve augmentée ou non. Emile Weyr, Membre de l'Académie. Le Directeur- Gérant : Louis Ozivier Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 2 ANNÉE N° 14 30 JUILLET 1891 REVUE GÉNÉRALE S DUIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LE LABORATOIRE DE MÉCANIQUE DU CONSERVATOIRE DES ARTS ET MÉTIERS En publiant la lettre suivante, la Revue entend s'associer sans réserve aux vœux quiy sont exprimés el qu'a déj émis ici même l'un des représentants les plus éminents de la Mécanique appliquée, le Professeur V. Durelshauvers- Dery *. La création d'un Laboratoire national de mécanique, affecté à l'étude expérimentale des machines et aux essais industriels, s'impose actuellement aux pouvoirs publics. La Revue croit servir les intérêls de la Science et ceux de la grande Industrie française en appelant sur la haute utilité de cette création toute l'attention de ses lecteurs. MoN CHER DIRECTEUR, Vous avez publié récemment dans la Revue un article d'un grand intérèt sur les Laboratoires de Mécanique, article dù à la plume exercée d’un savant autorisé, M. Dwelshauvers-Dery, l'élève, l'ami et le continuateur de l'illustre et regretté G. À. Hirn. Certains passages de cet article ont soulevé une vive émotion dans le monde de la mécanique; on a été surpris d'apprendre qu'en matière de méca- nique expérimentale, notre pays se soit laissé distancer; on s’est surtout étonné et presque in- digné de constater que le laboratoire de mécanique du Conservatoire des Arts et Métiers ait disparu, ce laboratoire célèbre, qui conservait la tradition des Vaucanson et des Poncelet, qui avait été il- lustré par les travaux des Morin et des Tresca, qui était visité avec tant d’assiduité par la population laborieuse et intelligente de Paris, qui avait acquis auprès des savants de tous les pays une si légitime et si éclatante renommée. On m'a interrogé sur cette étrange disparition; j'ai réuni quelques do- cuments, et je vous demande la permission de les analyser brièvement. 1 Voir la Revue du 15 juin 1891, t. Il, page 364, REVUE GÉNERALE, 1891. [ La salle des machines en mouvement du Conser- valoire des Arts et Métiers a été installée, de 1852 à 1854, par les soins du général Morin et de H. Tresca. Cette salle a été le premier laboratoire de mécanique qui ait élé organisé sur des bases un peu larges, en vue des intérêls généraux et du progrès des sciences. Les auteurs de cette fonda- lion se proposaient un double but : 1° Comme travaux de laboratoire, expérimenter les machines de l’industrie, les étudier au point de vue de la théorie et de la pratique; déterminer les chiffres et coefficients dont les mécaniciens ont à faire usage; constater ofliciellement les résultats des combinaisons nouvelles imaginées par les in- venteurs ; 2° Comme enseignement, mettre sous les yeux du public des machines fonctionnant et travaillant; c'élait alors un spectacle tout nouveau, aussi ins- tructif qu'attrayant, el qui n'a pas cessé d'attirer des visiteurs empressés el attentifs, aussi long- temps que le laboratoire a subsisté. La salle des machines élait constituée par une grande nef de 43 mètres de longueur sur 16 mètres de largeur. Elle était divisée en deux parties prinei- pales, affectées, l'une aux appareils hydrauliques. (h 466 LE LABORATOIRE DE MÉCANIQUE DU CONSERVATOIRE DES ARTS ET MÉTIERS EE l'autre aux appareils à vapeur; elle contenait, en outre, des transmissions fort développées, el un grand nombre de machines-outils et d'instruments de mesure et d'expérience. La partie hydraulique comportait une longue série de canaux, auxquels on avait donné une sec- lion rectangulaire pour faciliter les jaugeages; ces canaux étaient répartis en deux élages, constituant deux biefs; sur la chute ainsi produite, d’une hauteur moyenne d'environ 3 m. 50, étaient dis- posées les machines hydrauliques, motrices el élévatoires des types les plus variés; en outre, quatre vastes réservoirs en tôle, superposés les uns aux autres, étaient établis dans la tour de l’église; ils permettaient d'utiliser des chutes allant jusqu'à 12 mètres; les dispositions étaient prises pour que l’on pût facilement élever quatre nouveaux réservoirs, étagés au-dessus des pre- miers, et portant la chute à 24 mètres. [es canaux el réservoirs communiquaient entre eux à l’aide de robinets et de vannages, permettant des jau- geages faciles el exacts. Les jours de visite publique, toutes ces machi- nes étaient en action : les machines éiévatoires servaient à remonter l’eau du bief inférieur au bief supérieur. Les machines motrices recevaient la puissance motrice de la même eau, tombant en sens inverse d'un bief à l’autre, et transmettaient cette puissance aux machines élévatoires; la même eau pouvait servir indéfiniment; mais ce cireulus entrainait nécessairement un déchet de puissance, lequel était comblé par les machines à vapeur. En outre de quelques locomobiles, le laboratoire disposait de deux chaudières et de deux machines fixes, avec bacs de jaugeage el accessoires pour la mesure des rendements; ces machines aclion- naient une transmission principale, courant dans toute la longueur de la salle, et une série de trans- missions secondaires, servant à mettre en mouve- ment une collection fort complète de machines ou- tils el de machines diverses. Lorsque cette salle était ouverte au public, la foule y accourait, curieuse et avide de s’instruire ; des légendes fort habilement rédigées étaient affi- chées auprès des appareils el en expliquaient le jeu et la construction. Cet enseignement par la vue, alors tout nouveau, a eu le plus grand et le plus légitime succès. Des recherches scientifiques d’une extrême im- portance ont été exécutées dans ce beau labora- toire; j'en citerai seulement quelques-unes : Détermination d’un grand nombre de coefi- cients qui sont d'un usage courant dans l’industrie ; étude des frottements; vérification d'instruments d'expérience, tels que dynamomètres (ceux du gé- néral Morin, notamment, qui ont rendu de sigrands services), indicateurs, enregistreurs divers, anémo- mètres, moulinet de jaugeage, elc.; essais extré- mement nombreux de matériaux à la traction, à la flexion, à la torsion, àla compression; expériences sur un grand nombre de machines hydrauliques, notamment sur les pompes centrifuges à leur pre- mière apparition ; essais des machines à gaz, en particulier de la première machine de Lenoir, des machines à air chaud d’Ericeson, de Laube- reau, elc.; recherches sur l’équivalent mécanique de la chaleur, sur l’eau à l’état de surchauffe, sur les appareils de chauffage et de ventilation; on pourrait encore étendre considérablement cette nomenclature, mais il n’est pas permis de la clôre sans mentionner les magnifiques expériences de Tresca sur l'écoulement des corps solides et le ra- bottage des métaux. Tous ces travaux sont aujourd’hui classiques; les résultats qu'ils ont fournis sont d’un usage journalier, et les aide-mémoire de mécanique sont remplis des coeflicients qui en proviennent. Pendant plus de trente années, le laboratoire de mécanique du Conservatoire ne cessa de pour- suivre ses laborieuses et utiles expériences, de fournir aux industriels les chiffres précis dont ils ont constamment besoin, de contrôler expérimen- talementles conceptions des inventeurs, d'enrichir la science de données indispensables, de diriger la mécanique dans les voies de l’exactitudeet de la précision, qui sont les facteurs solides de sa puis- sance à l’époque actuelle. Les nations étrangères ont cherché à leur tour à imiter cet exemple. Des laboratoires puissants el admirablement outillés se sont peu à peu orga- nisés dans tous les pays industriels. M. Dwelshau- vers-Dery donne sur ce point des détails circons- lanciés : mais il constate avec amertume que la France, qui avait donné l'exemple, s’est arrêtée dans la voie qu'elle avait ouverte; iln’existe plus en France de grand laboratoire public de mécanique : le laboratoire de Morin et Tresca a cessé d'exister. Comment est survenue cette étrange et doulou- reuse aventure ? Le bâtiment dans lequel étailinstallé la salle des machines en mouvement élait l’ancienne église de l'abbaye de Saint-Martin-des-Champs. Ce monu- ment, classé comme historique, est remarquable par ses belles proportions et l'élégance de son ordonnance gothique : c’est un bijou d'architecture. A la longue, l'humidité entretenue dans l’atmos- phère du vaisseau par les canaux et appareils hy- drauliques et par les vapeurs échappées des chau- dières avait fini par salpêtrer les murs; les vibra- tions dues aux transmissions el machines en mouvement avaient ébranlé les maçonneries; on LE LABORATOIRE DE MÉCANIQUE DU CONSERVATOIRE DES ARTS ET MÉTIERS 467 s'aperçut que le bâtiment menaçait ruine; il fallut d'urgence prendre un parti pour le sauver. On se décida à retirer de la nef l’eau et les appareils hydrauliques ; on enlevales moteurs etles transmis- sions; l'exposition périodique des machines en mouvement fut supprimée; les travaux de re- cherches furent suspendus ; et l’on se mit en mesure d’ässainir et de consolider les murs compromis. Cette décision fut prise en 1885; elle élait grave, mais on l'avait acceplée, d’abord comme néces- saire, et surtout comme provisoire, En effet, il était absolument entendu que l’on élèverait rapidement, dans le jardin du Conservatoire, une halle, plus vaste que l’ancienne, mieux appropriée à son ob- jet; qu'on y emménagerait le matériel retiré de l’église, en remplaçant les machines démodées par des machines neuves, en y ajoutant les outils eborganes nécessaires; on devait, en un mot, élever de toutes pièces un nouveau laboratoire, qui fût à la hauteur de Lous les progrès modernes. En attendant, el toujours à titre provisoire, on continua à faire, dans d’étroits locaux dispersés dans tous les coins du Conservaloire, quelques- uns des essais réclamés chaque jour par l’indus- trie, autant que le permettaient le matériel et les emplacements restreints dont on disposait. Les services ainsi rendus étaient sans doute fort sérieux etjustement estimés. Mais on attendait avec impa- tience le moment où le nouveau laboratoire per- mettrait de reprendre la série interrompue des études de mécanique. Il Aujourd’hui plus que jamais la mécanique a be- soin de recherches expérimentales, de données exactes et certaines. Dans le domaine de cette science, l'analyse mathémalique a été poussée fort loin, trop loin peut-être, car la vérification expé- rimentale fait défaut sur plus d’un point, de sorte que les théories restent souvent en l'air, sans point d'appui solide. Une équation ne contient que ce qu'on y a mis : si elle part d’une hypothèse, le résultat reste douteux, quel que puisse être le ta- lent du calculateur ; il faut que l'expérience suive el qu'elle vérifie ou démente. Il n’en est pas tou- jours ainsi, et la littérature de la mécanique esl encombrée de développements analytiques stériles, presque suspects, qui attendent el attendront longtemps la vérification expérimentale. Citons un exemple bien connu:il s’agit de la ma- chine à vapeur. Les traités un peu anciens, el même beaucoup de manuels modernes, donnent pour le calcul des machines à vapeur un procédé simple el facile, qui a longtemps été accepté, et qui re- vient à traiter la vapeur d’eau agissant sur un piston comme un gaz permanent à température constante; l'hypothèse est fausse et les résultats sont grossièrement inexacts. La théorie mécanique de la chaleur prend naissance; sans hésiter on se lance sur la nouvelle piste; les calculs s'ajoutent aux calculs; les équations s’amoncellent ; en fin de compte une théorie complète et compliquée s’éta- blit, fondée sur cette hypothèse que les parois du cylindre n’ont aucune action sur la vapeur qu’elles renferment. À son tour, Hirn prend la question en main; savant el pralicien à la fois, il sait où peuvent mener les hypothèses ; décidé à ne procé- der qu'à coup sûr, il prend le parti de soumettre les théories en vogue au contrôle expérimental. Les expériences qu'il fil sur les machines à vapeur sont demeurées célèbres; on les a reprises, répé- tées el variées dans Lous les pays d'Europe et d’A- mérique, excepté, il est triste de le constater, sur ce territoire de la France où elles avaient été faites, et où il n'existe plus de laboratoire permettant de les reproduire. Le résultat de ces expériences fut absolument décisif: toutes les théories qui avaient été proposées sont fausses ; tout les calculs à priori manquent de base ; ces longs développements ana- lytiques sont frappés de stérililé; il n’y a pas de théorie générique des machines à vapeur, car, dans l'état de nos connaissances, nous n'avons pas les données suffisantes pour calculer l'influence des parois du cylindre. En somme, Hirn a mis à nu notre ignorance, Le résultat est humiliant, mais il est fécond : ces expériences ont abattu les théories orgueil- leuses et décevantes. IL s'agirait actuellement de continuer l’œuvre de Hirn et d’édifier sur le terrain qu'ila déblayé. Mais, pour reprendre avec fruit ces études, il faudrait disposer de l'outillage indispen- sable, et cet outillage fait défaut. Lors du Congrès international de Mécanique ap- pliquée, ienu à Paris, à l’occasion de l'Exposition de 1889, en présence des mécaniciens venus de tous les pays du monde, un ingénieur du plus haut mérite, M. Cornut, définissait comme il suit l’uti- lité des laboratoires de mécanique : « Il se passe, pour l’enseignement de la méca-. nique appliquée, un fait excessivement curieux : c’est le seul enseignement où il semble que l’on n'ail jamais besoin d'apprendre la pratique de ce que l’on doit faire. En physique, en chimie, en histoire naturelle, en médecine — et en médecine, heureusement pour nous — il ÿ a des écoles d'ap- plication ; il y a des recherches faites par les per- sonnes qui veulent travailler ces différentes sciences ; il y a la manipulation des appareils. En mécanique appliquée, c’est très simple : il n'y a rien du tout, ou à peu près. Faut-il croire qu'il n’y a pas de recherches à faire au point de vue de la mécanique appliquée? Cela ne serait pas soutenable, Je pré- 168 LE LABORATOIRE DE MÉCANIQUE DU CONSERVATOIRE DES ARTS ET MÉTIERS tends même que les différentes éludes qu'un labo- ratoire d'essais de mécanique aurait à sa disposi- tion seraient tellement considérables, qu'il faudrait de nombreuses années pour arriver à en épuiser le champ. «La question des laboratoires est de premier ordre : si nous voulons que la mécanique appliquée continue la marche ascendante, dans laquelle elle s’est engagée, grâce au génie de tous les mécani- ciens, qui ont fait plus, pour faire progresser cette science, que toutes les théories qu'on a émises, il faut créer des laboratoires. » Et, à la suite d’une discussion au cours de la- quelle le regret fut plus d'une fois exprimé que le laboratoire de Morin et Tresca eûl disparu, le Congrès émit le vœu suivant : «Il y a lieu d'encourager, par tous les moyens possibles, la création et l'extension des labora- toires d'essais de matériaux et de machines, aussi bien dans les grandes écoles du Gouvernement, dans les grandes administrations départementales ou privées que dans les établissements d'utilité publique, tels, par exemple, que le Conservatoire des Arts et Méliers. » Ceci se passait en 1889. Or c’est en 1885 que s’est opéré le déménagement de l’église, et que le ma- tériel a été remisé, en attendant que le nouveau laboratoire, ce laboratoire escompté, promis, fût enfin ouvert aux recherches et permit de conti- nuer les travaux qui avaient mis la France à la tête des sciences mécaniques. Aujourd'hui, en 1891, ce laboratoire existe... sur le papier; il a reçu la sanction complète et absolue de toutes les autorités administratives, techniques, consultatives el autres qui peuvent avoir voix au chapitre; il existe (toujours sur le papier) dans son ensemble, dans ses organes, dans ses détails. Mais, depuis six longues années, il reste toujours à l’état de projet. Que manque-t-il donc pour qu'il de- vienne enfin une réalité? Il manque l'argent! Il n'en faut pas beaucoup, mais enfin, si peu que ce soit, les crédits nécessaires ne sont pas encore votés! Est-ce à dire qu'il y ail eu des oppositions, des négligences, des mauvais vouloirs? En aucune facon! Tout le monde est d'accord; tout le monde reconnait que la disparition, mêmemomentanée, du laboratoire est pernicieuse pour les mécaniciens, déplorable pour le pays, que l'argent consacré à son rétablissement ne saurait être mieux employé. L’éminent directeur du Conservatoire, le colonel Laussedat, cet homme de devoir et de dévouement, que tout le monde connaitel apprécie, a pris à cœur la question et a mis toute son ardeur à la ré- soudre ; il a mulliplié les rapports, les démarches, les rappels; les administrations l'ont secondé avec zèle el activité; les ministres qui se sont succédé (ils sont, hélas! nombreux) sont venus les uns après les autres au Conservatoire et se sontrendu compte par eux-mêmes de l'urgence de la solution; les Commissions du budget, avec un empressement des plus méritoires, ont voulu également examiner la chose sur place; les députés, les sénateurs les plus influents se sont déclarés chauds partisans de l’œuvre projetée et lont soutenue de tout leur pou- voir; enfin le Président de la République lui-même, malgré la réserve qui lui estimposée parses hautes fonctions, a tenu à apporter dans une visite per- sonnelle la preuve de sa sympathie. Un sort malin a déjoué tous ces puissants efforts, toutes ces bonnes volontés, si cordiales et si una= nimes; le vote des crédits a étéajourné d’annéeen année parles mésaventures législatives les plus bi- zarres et les plus inattendues. Une fois les fonds élaient demandés sous forme de crédits extraordi- naires; el il se trouva justement que, cette même année, les Chambres se décidèrent à supprimer toutes les dépenses extraordinaires. Une autrefois, les propositions présentées sont reconnues irrépro- chables dans la forme (du fond il ne saurait être question, tout le monde étant unanime); elles sont votées parla Chambre des députés, et portées sans désemparer au Sénat; mais le dépôt sur le bureau du Sénat a lieu quelques minutes après que le dé- cret de dissolution a été lu à la Chambre ; refus de voler, très légitime d'ailleurs ; nouvel ajournement ! [Il y aurait matière à bien des réflexions sur ces mésaventures, qui prêteraient à rire si elles n'é- aient si douloureuses pour l'amour-propre de notre pays! Quoi qu’il en soit, le laboratoire attend encore. Et pendant ce temps les nations rivales s’outillent el s'organisent. Sans revenir surles détails donnés par M. Dwelshauvers-Dery, je citerai seulement le laboratoire de Sibley College, lequel dépend de la Cornell University, à Ithaca, état de New-York : ce sont des pays peu connus de beaucoup de Pari- siens. Là l’étude expérimentale de la mécanique à pris des développements dont on n'a aucune idée chez nous; on y trouve : un laboratoire de méca- nique générale, un laboratoire d’hydraulique, d’autres laboratoires pour l’étude des chaux et ci- ments, pour celle des constructions métalliques, de l'électricité, elc.; la mécanique appliquée a son laboratoire spécial, installé dans une vaste salle et muni d’un grand nombre de turbines hydrau- liques, de machines à vapeur, de machines à es- sayer les métaux et les lubrifiants, de machines à gaz et à air chaud, et des appareils de mesure les plus nouveaux et les plus précis; des centaines de D' E. GLEY. — LES DÉCOUVERTES RÉCENTES SUR LA PHYSIOLOGIE DU PANCRÉAS jeunes gens instruits, même des ingénieurs déjà formés y travaillent constamment sous la direction des professeurs ; ils disposent, pour leurs recher- ches, d'une puissance motrice qui s'élève à 600 chevaux-vapeur. : Et, pendant ce temps, nos mécaniciens français ne voient toujours rien venir! Espérons que leur attente ne sera plus de longue durée, et que nous 469 ne tarderons pas à voir le bel outil créé par Morin et Tresca et qui, entre leurs mains a donné desi magnifiques résultats, renaître enfin de ses cendres, plus beau, plus neuf, et qu’il rendra à la mécanique moderne les mêmes services que son illustre devancier. Un mécanicien. LES DÉCOUVERTES RÉCENTES SUR LA PHYSIOLOGIE DU PANCRÉAS Le pancréas est une grosse glande située dans la cavité abdominale; la tête est enclavée dans le duodénum, à droite, et la queue s'étend jusqu'à la rate, à gauche. Le liquide sécrété par cette g'ande, ou suc pancréalique, se déverse dans le duodénum par deux canaux : un principal, le canal de Wir- sung, el un accessoire. L'action de ce liquide s'exerce sur les substances alimentaires qui arrivent dans le duodénum après avoir été déjà modifiées pour partie par la salive et par le sucgastrique; c'est une action énergique, due à trois ferments solubles, élaborés par les cel- lules pancréaliques et qui constituent les principes essentiels du suc glandulaire. L'un de ces ferments agit sur les matières amylacées pour les trans- former en glycose (ferment analogue à la diaslase salivaire), l’autre sur les matières albuminoïdes pour les peptloniser (c’est la trypsine;, et le troi- sième sur les graisses pour Îles saponifier. L'im- portance de cette digestion pancréatique est très grande. On peut priver un animal de son estomac sans qu'il cesse de digérer à merveille; si on lie les canaux paneréaliques sur un autre animal, il faut donner à celui-ci des quantités considérables d'aliments pour qu'il ne maigrisse pas; encore ne digère-t-il surtout que les matières albuminoïdes. Tous ces faits avaient été solidement établis par les recherches de Valentin, de Corvisart el par les nombreux travaux de Claude Bernard, confirmés, développés aussi el complétés sur certains points par différents expérimentateurs. El ainsi le pan- créas était considéré comme une glande des plus importantes pour les fonctions digestives, la plus importante même, son rôle étant de beaucoup supérieur à celui de l'estomac, plus étendu et vraiment essentiel. Des recherches récentessont venues montrer que le pancréas possède encore une autre fonction. Le fait fondamental, dont on doit la première notion à von Mering et Minkowski !, est celui-ci : quand ! Soc. de méd. de Slrasbourg, A889. — Archiv. f. Pathol. und Pharmak.,11 janvier 1890, p.371. exper. le pancréas « été complètement enlevé à un chien, cet aimal devient diabétique. La question se pose dès lors de savoir quel est le rôle joué par cet organe dans les transforma- tions que subissent dans l'organisme les matières sucrées. Ï L'existence d'une relation causale entre le dia- bète et des lésions destructives du pancréas avait déjà été soupçconnée ou hypothétiquement ad- mise par plusieurs médecins. Dès le siècle dernier, en 1788, un médecin anglais, Cawley, fit connaitre dans le Zondon medical JournalV histoire d'un diabé- tique, à l’autopsie duquel on trouva les canaux du pancréas remplis de calculs. Richard Bright, en 1833, publia une observation analogue de diabète à marche rapide; on vit à l’autopsie que la tête du paneréas était adhérente aux organes voisins; toute la glande était dure et cartilagineuse. On peut citer d’autres observations isolées : celles de Claude Bernard, au nombre de trois, d’ail- leurs très sommairement rapportées !; le cas de Griesinger, en 1859; ceux de Frerichs (1862); les deux. cas (1864) von kRecklinghausen ; celui de Klebs et Munk (1870); quelques autres de encore ?. Mais ces faits restaient à l’état de particularités sans valeur. Ce n’est pas, à dire vrai, que quelques esprits n'aient été frappés de la possibilité d’un rapport nécessaire entre le diabète et ces lésions signalées du pancréas. Ainsi, Bouchardat, en 1846 déjà, alors qu'il venait d'étudier avec Sandras l’ac- tion du suc pancréatique sur les matières amyla- | Lecons de physiol. expér. 1. 1. 1855, p. 425; t. Il, 1856, p. 296. 2 On trouve la relation suflisamment détaillée de tous ces faits dans l’excellente thèse d'un élève de Lancereaux, La- pierre : Sur le diabète riaigre dans un rapport avec les alle- rations du pancréas (Thèse, Paris, 1879). On peut consulter aussi : Etude critique sur quelques travaux récents concer- nant Panalomie pathologique du diabète (Gaz. hebd. de méd. el chir., 1881); E. Demange : Wiabèle (in Dicfionn. ency- clop. des sc. méd.) ; E. Boutard : Des différents lupes de diabète sucré (Thèse, Paris, 1890). 410 D' E. GLEY. — LES DÉCOUVERTES RÉCENTES SUR LA PHYSIOLOGIE DU PANCRÉAS cées, et que son attention était attirée sur l'impor- tance de la fonction digestive de cette glande, vivement intéressé, d'autre part, par les quelques cas connus à cette époque de diabète avec lésion du pancréas, écrivait : « Je conjure les praticiens qui verront des malades atteints de diabète de ne point perdre de vue le pancréas, qui joue le rôle principal dans la digestion des féculents !. » En 1875, dans la première édition de son traité : De la Glycosurie ou du diabète sueré?, il renouvelait cet appel, persistant à penser que les troubles de la fonction pancréatique pourraient expliquer la pathogénie du diabète. Telle paraissait être aussi l’opinion de Seegen * et surtout celle de Lécorché#, Par contre, Griesinger estimait les faits insuffisants pour que l’on pût établir une relation de cause à effet entre les lésions constatées et le diabète. Frerichs 6mettait la même opinion. En France, Jaceoud® déclarait que l'atrophie du pancréas pouvait constituer simplement une lésion contin- gente du diabète, de même que les altérations du foie et des reins. En définitive, il est manifeste que dans cette longue période qui s'étend de 1788 à 1877 il n’ap- paraît aucune donnée certaine sur cette question des rapports entre le pancréas et le diabète, On peut désigner cette période sous le nom de phase hypothétique. La deuxième période, beaucoup plus courte, va de 1877 à 1889; c’est la phase de l'observation clinique ou période de discussion. C’est à Lancereaux que re- vient le grand mérite d'avoir nettement distingué la forme pancréatique du diabète. Son premier travail sur ce sujet date du 43 novembre 1877; en 1879, son élève Lapierre soutient sur le même sujet une thèse importante citée ci-dessus; il reprend lui-même la question dans une série de leçons cliniques publiées en 1880 par l’Union médicale ; il communique de nouveaux faits à l’Aca- démie de médecine en 1888 ct traite encore la question dans des leçons cliniques en 1889-1890 7. Tout l'effort de Lancereaux a consisté à établir solidement l'existence d’un diabète «à allures cli- niques spéciales », que caractérisent la brusque- rie du début, la gravité des symptômes (amaigris- sement rapide et excessif, intensité de la faim et de la soif, énorme quantité de sucre s’élevant à 300, 400, 500 et 800 grammes par 24 heures, etc.) 1 Nouveau mémoire sur la glycosurie ou diabète sucré, in Supplément à l'Annuaire de thérapeutique, 1846, p. 209. 2 Paris, 1875, p. 108. 3 Der Diabetes mellitus, Berlin, 1875. 4 Trailé du Diabète, Paris, 1871. 5 Article Diabète du Dict. de méd. et chir, prat. 1869, 6 Bull. Acad. de méd. 7 Union médicale et Bulletin médical, 1890. et la rapidité de l’évolution ‘. Dans tous les cas où cette forme clinique s’observe, on trouve des lé- sions du pancréas à l’autopsie, le plus générale ment l’atrophie, quel que soit le processus spécial qui ait amené cette atrophie. De là, le nom de diu- bète maigre donné par Lancereaux à cette affection, pour rappeler l'état cachectiqne si particulier que présentent les malades, ou diabète pancréatique; de là aussi sa conception générale des trois formes du diabète : le gras ou constitutionnel (c’est la forme la plus fréquente, celle qui est depuissi long- temps connue), le maigre ou pancréalique, et le nerveux (par lésions du bulbe, de la protubé- rance, etc.). Malgré la valeur des faits groupés par Lancereaux et des considérations que ces faits lui inspirèrent et malgré le talent avec lequel ce clinicien sagace défendit ses idées, son opinion ne laissa pas d'être vivement discutée ?. A direle vrai, quelques difficultés se présentaient d'elles-mêmes. Les plus graves élaient celles-ci : 1° il existedes cas d’altérations graves du pancréas sans diabète ; 2° on voit chez certains malades des symptômes de diabète dit pancréatique sans lésions du pancréas. Cyr, dans l'étude que j'ai citée plus haut, se place sur ce terrain pour combattre les idées de .Lancereaux ; il rappelle qu'Ancelet * déjà était parvenu à réunir 385 cas d’affections du pancréas avec autopsie et qu'il avait mentionné la coïncidence du diabète avec des lésions de cet organe, mais qu'il avait eu soin d'ajouter qu'il n'était pas possible pour le moment de démontrer une action réelle du pancréas sur la production du diabète. Dans cette critique de Lancereaux Cyr, fut suivi par Salles {, Madre *, Caron ° qui tous rap- portèrent de nombreux cas de cancer du pancréas dans lesquels on n’avait jamais trouvé de sucre 1 « C’est une maladie grave, dit Lancereaux (Bullelin médi- cal, 1890), survenant tout à coup au milieu d'une santé par- faite en apparence, et qui a une évolution rapide et fatale. Elle est caractérisée par une glycosurie et une polyurie très intenses, un amaigrissement subit, un abattement remar- quable des forces intellectuelles, morales et génitales, enfin par des désordres graves dela nutrition, tels que chute des dents et des cheveux, etune terminaison presque constamment mortelle. Cette maladie, qui peut évoluer en six mois, ne dure jamais plus de deux ou trois ans; les patients suc- combent ordinairement emportés par la tuberculose pulmo- naire, par le coma diabétique. À cette évolution spéciale cor- respond une lésion anatomique particulière : le diabète maigre reconnait en effet pour cause la destruction du pan- créas. » 2 ]l est juste de dire qu’elle trouva aussi quelques chauds partisans, parmi lesquels on peut citer particulièrement Bau- mel (de Montpellier) qui admit même qu'il n’y a pas de dia- bète sans altération du pancréas (Montpellier médical, 1881, 1883, 1886). 3 Etudes sur les maladies du pancréas, Paris, Savy, 1886. 4 Thèse, Paris, 1880. 6 Ibid., 1883. 6 Ibid., 1889, * PR D' E. GLEY. — LES DÉCOUVERTES RÉCENTES SUR LA PHYSIOLOGIE DU PANCRÉAS 471 dans les urines ni constaté un seul symptôme du diabète. Sans doute Lancereaux discutait les objections, se demandant si l'altération du pancréas, dans les observations qu'on lui opposait, avait été com- plète; faisant remarquer, d'autre part, que l’atro- phie du pancréas peut fort bien ne pas être la seule lésion susceptible de déterminer les symptômes du diabète maigre. La cause néanmoins était loin d’être définitive- ment entendue pour tous les médecins; et c’est un fait que la question restait controversée. Je n’en donnerai qu'une preuve, tirée de la grande Encyclo- pédie médicale qui se publiait à cette époque sous la direction de Dechambre : dans son excellent ar- ticle Diabéte! si consciencieusement informé, E. De- mange dit au sujet des différentes formes du dia- bête : « Ces formes ne correspondent point à des types bien distincts. Il est vrai que chez tel diabé- tique ce sont les accidents nerveux qui dominent et paraissent jouer un rôle important dans la pro- duction du diabète, que chez tel autre on note sur- tout des antécédents héréditaires personnels qui le rattachent à la grande diathèse arthritique si bien étudiée par Bazin; que chez celui-ci ce sont les troubles digestifs qui semblent tenir la première place, tandis que chez celui-là ce sont des troubles hépatiques; que tel diabétique a été gras avant ou pendant son diabète, que tel autre a élé maigre. Mais sont-ce là des différences suffisantes pour éta- blir des variétés de diabète ? nous ne le pensons pas. C'est toujours la même entité morbide, le diabète sucré, avec quelque modalité symptomatique spé- ciale, motivant des formes, si l’on veut, caractérisées par le prédominance de tel ou tel symptôme; sou- vent ce ne sont que des coïncidences morbides, plus souvent encore des phases successives de la même maladie (p. 583). » Il est donc bien permis d'appe- ler cette deuxième période la phase de discussion. En 1889, la question entre dans une troisième période : c'est la phase physiologique ou de démonstra- tion. Quels qu'aient été l'intérêt et la valeur des données nouvelles apportées sur la question par Lancereaux, il n’est pas contestable qu'il subsistail de vives oppositions à ses idées. Maintenant toutes les difficultés vont être levées par les recherches physiologiques; il suffira pour cela de quelques expériences clairement conçues et bien conduites, Il Quelle est l'expérience cruciale de von Mering et Minkowski? Pour qu'il y ait diabète chez un chien auquel on enlève le pancréas, il faut que cette I PE vi l Dict. encyclop. des sc. méd., 1883, extirpation soit fofale; s’il reste un petit morceau de glande, le sucre ne passe pas dans les urines, et, à part les troubles digestifs, qui tiennent à ce que lesucpancréatique n'arrive plus dans l’intes- tin, l'animal n’est pas malade. Dès lors tout devient clair. On à trouvé, disait- on, des altérations du pancréas sans qu'il y ait eu diabète; rien d'étonnant, si la glande n'avait pas été complètement détruite par le processus morbide. De même s'expliquent aisément les insuccès des physiologistes qui avant von Mering et Minkowski, avaient essayé d'enlever le pancréas. Ces essais sont assez nombreux. En 1682-1685, Conrad Brun- ner pratiqua sur des chiens l’ablation du pancréas; il ne put réussir qu'à en extirper une partie. En 1846, Bouchardat el Sandras recommencèrent cette opération; tous leurs animaux périrent, Claude Bernard, considérant, après des essais infructueux, l'opération comme impossible ‘, tenta des injec- tions de matières grasses (huile, suif, etc.) dans la glande par le canal de Wirsung, dans l’espoir de détruire ainsi le pancréas : il n'obtint par ce moyen que des troubles digestifs; l'examen des urines ne fut d’ailleurs pas pratiqué. Schiff (1872) répéta celte opération, en se servant de parafline; ses animaux n’ont présenté aucun trouble. Quant aux tentatives de Bérard et Colin (1858), de Klebs et Munk (1869), de Finkler (1886), de Senn (1888), de Martinotti (1888), elles n'ont pas donné de ré- sultats, soit que leurs auteurs n'aient pas enlevé toute la glande, soit que l'examen des urines n'ait pas été fait. Les premiers done, von Mering et Minkowski sont parvenus à enlever sur le chien fout le pancréas. Le résultat de l'opération est constant. La glyco- surie commence d'ordinaire 4 à 6 heures après l'opération et atteint son maximum au bout de 36heures.La quantité de glycoseéliminée varie entre 5 à 11 pour 100?, Tous les symptômes du diabète se montrent en même temps : les animaux deviennent d'une voracité extraordinaire: ils ont une soif intense ; la polyurie est très marquée; un chien de 7 kilog. urinait de 4000 à 1200 c. c. par jour. L'amai- grissement, malgré la suralimentation, est très rapide; et bientôt l’affaiblissement devient tel que les animaux ne peuvent plus marcher; les poils tombent, les plaies ne peuvent se cicatriser: la mort arrive dans le marasme en un mois ou deux *. 1 Lec, de physiol. expér., t. I, 1856. ? Von Mering et Minkowski se sont assurés que le sucre contenu dans les urines est bien de la glycose. 3 C’est ce qui se produit du moins quand il ne survient pas de complications opératoires. Mais la plupart des chiens de von Mering et Minkowski sont morts dans le courant de la première semaine de quelque complication (nécrose intesti- nale et péritonite, affection pulmonaire, etc.) 472 D' E. GLEY. — LES DÉCOUVERTES RÉCENTES SUR LA PHYSIOLOGIE DU PANCRÉAS Comme phénomènes secondaires, ilfaul signaler l'absence à peu près complète de glycogène dans le foie el les muscles, la présence d’acétone, d'acide acétylacétique et d'acide oxybulyrique dans les urines. On sait qu'on a trouvé ces divers corps dans l’urine des diabétiques. L'autopsie montre, à côté des complications, telles que‘certaines lésions pulmonaires, une dégé- nérescence graisseuse du foie. Mais il fallait démontrer que tout cet ensemble de symptômes est bien dû à la suppression de la glande. Il est certain d’abord que ce diabète ne tient pas à ce que le sucpancréatique n'arrive plus dans l'in- testin. La ligature des canaux excréteurs n’amène qu'une atrophie progressive de la glande, sans glycosurie, comme l'avaient déjà vu Claude Ber- nard, Pawlow, Arnozan et Vaillard. La grosse objection à écarter provenait de la production inévitable, dans une telle opération, de lésions nerveuses susceplibles de déterminer la glycosurie: il est impossible, en effet, quand on enlève le pancréas, de ne pas sectionner et irriter un grand nombre de filets sympathiques dont l’ex- citation peut agir sur le plexus solaire. Or, les physiologistes savent bien que certaines de ces lésions amènent la glycosurie : pour le plexus solaire, le fait est acquis (Klebs et Munk, Lus- tig, etc.) Assurément, dans ce fait il n’y a rien d’absolu- ment comparable au complexus de phénomènes si caractéristiques, résultant de l’ablation du pan- créas. Néanmoins von Mering et Minkowski s’atla- chèrent à démontrer par des expériences directes que les lésions nerveuses, nécessairement produites au cours de l’opération, ne sont pour rien dans le diabète. En effet, celui-ci ne s’observe pas, même si l’on sépare complètement le pancréas du duodé- mum, en ne le laissant qu'en rapport avec le mé- sentère, opération qui ne peut être réalisée sans décairer ou lier, bref, sans irriter des filets sympa- thiques. Du reste, l’ablation presque totale du pancréas, respectant seulement une petite porlior de l'organe, au voisinage de la rate, par exemple, opération qui implique les mêmes traumatismes nerveux que l’ablation complète, n'est pas suivie de diabète. Si l’on vient alors, au bout d’un temps plus ou moins long, à enlever cette portion res- tante du pancréas, le diabète se produit. Hédon (de Montpellier) a donné une remarquable confir- alion de ces expériences !. J'ajoute que l’extirpa- tion tolale du pancréas se pratique sans que l’on touche directement au plexus solaire. Les résultats oblenus par von Mering et Min- ‘ Arch. de méd. expér., 1°r janvier 1891. kowski ont été confirmés ! par Lépine ? et surtout par Hédon (de Montpellier), dans deux mémoires fort intéressants *, où il fit connaître un procédé d'ablation du pancréas relativement facile, et enfin par moi-même { qui décrivis un procédé simple, non plus d’ablation, mais de destruction du pancréas, au moyen d’une injection, dans le canal de Wirsung, de gélaline ou de suif colorés. Cet arlifice permet de voir si toute la glande s’in- jecte. J'ai pu par suite reconnaitre que très sou- vent il reste des parties de l'organe qui ne s’injec- tent pas du premiercoup. Ainsi s'explique l’insuccès des anciennes expériences de Claude Bernard rela- tives à l'injection de matières étrangères dans le canal pancréalique (voy. ci-dessus) : une partie de la glande échappait évidemment à la destruction, sans qu'il fût possible à l’expérimentateur de s’en apercevoir, de telle sorte qu'au bout d'un temps variable les animaux se rétablissaient. L'expérience que j'ai réalisée ne laisse pas d'offrir un réel in- térêt historique, puisqu'elle montre combien près, en définitive, Claude Bernard a été de découvrir l’importante fonction du pancréas qu'il était réservé à von Mering et Minkowsky de trouver. III Depuis le premier travail de ces deux auteurs, quelques faits nouveaux ont été mis en lumière. Minkowski * a réussi à produire un diabète cor- respondant, d’après lui, à la forme légère de cette maladie chez l’homme, en enlevant à un chien les neuf dixièmes du pancréas; l'animal n'avait pas de glycosurie aussi longtemps qu’il ne recevait comme nourriture que de la viande. Au contraire, un régime composé d’hydrates de carbone déter- minait une glycosurie abondante. Hédon a distingué une autre forme de diabète, Sur quelques chiens il a observé, non plus le diabéle à marche rapide, dans lequel l'élimination du sucre et de l'azote est excessive et qui amène la mort au bout de 15 à 30 jours, mais un diabète à marche lente, dans lequel la glycosurie est inter- mittente 5, où elle manque même souvent pendant 1 Les expériences contradictoires de Dominicis (Gior. in- lern. della se. med., 1889) et de Reali et de Renzi (Congrès med. intern. de Berlin, 1890), sont passibles de critiques sérieuses: 2 Lyon médical, décembre 1889. 3 Loc. cil., 12° janvier et 42° mai 1591. 4 Comptes rendus. Acad. des Se., 6 avril 1891 et Soc. de Biol., 11 avril. 5 Berliner Klin. Wochenschrift, 1890. 5 Les quelques faits de glycosurie intermittente que Hédon a observés, l'ont conduit à supposer qu'il existe peut- ètre d’autres organes susceptibles de suppléer le pancréas, dans certaines conditions du moins. Telle quelle, cette notion est contraire à l’expérience si intéressante, réalisée pour la première fois par von Mering et Minkowski, et que Hédon lui-même a répétée avec un semblable résultat, par laquelle on voit que tout le sucre, ajouté à la nourriture d’un animal privé de son pancréas, passe dans les urines. D' E. GLEY. — LES DÉCOUVERTES RÉCENTES SUR LA PHYSIOLOGIE DU PANCRÉAS 473 un long temps, mais où il y a toujours une élimi- nation considérable d'azote; les autres symptômes du diabète existent aussi, mais l’azoturie est dans ce cas le symptôme prédominant; l'animal ne suc- combe à la cachexie qu’au bout de plusieurs mois. Hédon rapproche ces faits du diabète azoturique ou insipide observé chez l'homme. J'ai signalé de mon côté, en même temps que Hédon, cette dénu- trition profonde, indépendante de la glycosurie, que l’on peut observer chez quelques animaux. Il se produit donc, à la suite de la suppression du pancréas, un trouble remarquable de la nutri- tion essentiellement caractérisé par un défaut dans l'utilisation des matériaux azotés. Déjà von Mering et Minkowski avaient indiqué ce fait important. Hédon, qui a jusqu’à présent le plus complètement étudié cette question, trouve que presque tout l'azote des aliments passe dans les excreta, une très faible partie étant utilisée. Il faut remarquer que ces résultats s’observent parliculièrement chez les chiens dont une partie seulement du pancréas a été extirpée et l’autre détruite par une injection de substance étrangère (expériences de Hédon) et chez iesquels la glyco- surie est faible et intermittente. Au contraire chez ces animaux les matériaux sucrés paraissent être encore en partie ulilisés. Si en eflet on mélange à leurs aliments une certaine quantité de sucre, on constate que le sucre éliminé par les urines représente seulement une partie du sucre ingéré (pas même la moitié). En ce qui concerne les matières amylacées, j'ai déjà dit que l'ingestion de ces substances augmente la glycosurie ou la produit chez les animaux qui n'en présentaient pas. Les choses ne se passent pas tout à fait de la même façon chez les chiens dont la glycosurie est intense, immédiatement après l’extirpation du pancréas. Ces animaux n’ulilisent guère mieux les matériaux azolés, et pas davantage les féculents: mais lorsqu'on leur fait ingérer du sucre, ce sucre passe complètement dans les urines. Ainsi un chien de 6 kil. et demi, observé par Hédon, qui éliminait par jour en moyenne 19 grammes de sucre, sion lui donnait dans sa nourriture 15 gram- mes de sucre de raisin chimiquement pur, éliminait le lendemain 34 gr. à de sucre. Von Mering et Minkowski, Hédon ont cilé un certain nombre de fails analogues. À la vérité, quelques-uns de ces résultats peu- vent être criliqués pour la raison suivante. Les expériences de Claude Bernard, de Pawlow, ont bien montré que la ligature des canaux pancréa- tiques suflit pour amener des troubles nutritifs et l’'amaigrissement. Ces phénomènes tiennent au rôle digestif important du pancréas, que l’on rap- REVUE GÉNÉRALE, 1891, pelait au début de cet article. Dès que la glande ne peut plus remplir ses fonctions digestives, la nutri- tion générale est atteinte. Par suite, chez les animaux qui, comme on vient de le dire, paraissent encore utiliser une partie du sucre qu'on leur fait ingérer, il importerait, pour être bien assuré de la réalité de ce phénomène, de rechercher si la partie du sucre qui ne passe pas dans les urines (et que l'on considère comme re- tenu dans l'organisme) n’a pas simplement tra- versé Le tube intestinal et ne se retrouve pas dans les fèces. De même, on pourra admettre définitivement que le défaut d'utilisation des matériaux azotés ne dépend pas du tout de la suppression du pancréas en tant que glande servant à la digestion, quand on aura soumis les expériences faites jusqu'à pré- sent sur ce point à la contre épreuve, c'est-à-dire quand on les aura répélées sur des animaux chez lesquels l’arrivée du suc pancréatique dans l’intes- tinauraété complètement empéchée, et d’une façon durable, Je poursuis depuis quelque temps des expériences de ce genre. Ces recherches semblent d'autant plus nécessaires que déjà Abelmann, dans des expériences ! faites sous la direction de Min- kowski, a montré que les animaux sur lesquels on pratique seulement l’exlirpation #ncomplète du pan- créas, ne résorbent les albuminoïdes en moyenne que dans la proportion de 54 pour 100, Néanmoins, dès maintenant plusieurs résultats peuvent être considérés comme acquis. Quelques expériences de Hédon paraissent bien prouver la réalité d’une certaine dénutrilion azotée, celles par exemple qui montrent qu'un chien soumis au jeûne, après la destruction du pancréas par une injection de parafline, subit une diminution de poids et une perle d’urée par jour beaucoup plus considérables qu'un chien témoin. — D'autre part, la glycosurie d’origine alimentaire doit être tenue pour démon- trée, et par suite l’utilisation très défectueuse, sinon absolument nulle, des matériaux sucrés. IV On à vu que cette question des rapports entre les fonctions du pancréas et le diabète a traversé trois grandes phases. Dans la première on suppose qu'il existe une relation entre cette maladie et des alté- rations du pancréas. Dans la deuxième on apporte un assez grand nombre de faits à l'appui de celte opinion; mais ce sont des faits cliniques, suscep- tibles d'interprétations contradictoires. Dans la troisième l’expérimentation physiologique montre qu'il ya une relation certaine et constante entre la suppression du pancréas et le diabète. C’est la 1 Ueber die Ausnutzung der Nahrungsstoffe nach Pancreas exlirpalion, Dorpat, 1890. 474 D'E. GLEY. — LES DÉCOUVERTES RÉCENTES SUR LA PHYSIOLOGIE DU PANCRÉAS phase vraiment scientifique de la question. À par- tir de ce momentcommence la période des explications. Car, s’il est démontré que l’extirpation totale du pancréas amène le diabèle, quelle est la cause de ce fait? quelle est la fonction du pancréas dont la suppression donne lieu à un trouble aussi grave ?? Depuis les travaux de Claude Bernard, les trans- formations des subslances sucrées dans l’orga- nisme semblaient bien connues: les malières amy- lacées ingérées sont transformées dans l'intestin en glycose, sous l’action surtout de la diastase con- tenue dans le suc pancréatique; cette glycose est absorbée etapportéeau foie parla veine porte; làelle est déshydratée (par une action restée inconnue) et se transforme en un isomère de l’amidon, le glyco- gène (amidon animal) ; ce glycogène constitue une réserve importante aux dépens de laquelle la cel- lule hépatique fabrique constamment, suivant les besoins de l'organisme, de la glycose (sousl'influence d'un ferment [C?. Bernard] qui n’a jamais pu être isolé et dont l'existence par suile reste douteuse [Dastre]); ce sucre, déversé dans le sang par les veines sus-hépatiques, est brûlé dans les tissus (Chauveau). Quelques modifications de détail ont été apportées à cette théorie, additions ou restric- lions, mais les faits généraux sont restés debout. Par suite on pouvait sans peine s'expliquer le diabète. Pour ne pas parler de la forme légère, tenant à ce que le foie ne peut fixer le sucre des aliments (absorbé en trop grand excès, par exemple) etle laisse passer dans le sang, il étail possible de comprendre la maladie soit comme dépendant d'une suractivité fonctionnelle du foie (amenée elle-même par une cause quelconque, cause nerveuse par exemple), de laquelle résulte une production exagérée de glycogène et de sucre, soit comme tenant à un défaut d'utilisation du sucre par les tissus (théorie développée surloul dans ces dernières années par Ch. Bouchard). La découverte de von Mering et Minkôwski, rap- prochée des faits cliniques si bien étudiés par Lancereaux, est venue montrer d’une façon irré- fragable qu'il existe un diabète d’origine pancréa- tique. Assurément rien ne prouve, aujourd'hui comme hier, qu'il ne puisse y avoir diabète à la suite d’une production exagérée de sucre aux dé- pens du glycogène du foie (sous l'influence, par exemple, de troubles vaso-moteurs hépatiques, dépendant eux-mêmes de lésions nerveuses di- verses). Mais comment s'explique le diabète pan- créatique? 1 Jlest inutile de présenter ici les explications des méde- cinsetphysiologistes, comme 3ouchardat (1846), Popper(1868), Pink et G. Heidenhain (1874), qui ont admis autrefois un dia- bète pancréatique ; ces explications ont perdu leur valeur de- puis les expériences de von Mering ct Minkowski, Von Mering et Minkowski ont, sur ce point, fait preuve d'une grande prudence, fort louable en somme. [ls ont en effet conclu simplement de leurs expériences que le pancréas possède une fonction spécifique inconnue qui consiste à régler les échanges nutrilifs et la combustion du sucre. Hédon n’a pas du tout abordé la question de ce mécanisme fonc- tionnel. Mais une série déjà longue d'expériences intéressantes a élé faite sur ce sujet par Lépine (de Lyon) qui les poursuit encore avec persévérance !. Le fail pris par Lépine pour point de départ de ses recherches a été déjà très nettement signalé par Claude Bernard et constalé aussi après celui-ci par plusieurs autres physiologisles; c'était même une notion classique; mais Lépine en a entrepris une étude systématique qui l’a conduit aux résul- tats qu'il s’agit maintenant d'exposer. Ce fait est le suivant: le sang normal, abon- donné à lui-même à sa sorlie d’un vaisseau, perd en un laps de temps donné une certaine quantité du sucre qu'il contient. C’est ce phénomène que Lépine a étudié de très près, avec la collaboration de Barral, sur le chien normal et sur le chien dia- bélique. Il a d’abord constaté que cette perte de sucre, en une heure, pour le sang artériel de chien, à la température de 39°, varie entre 20 et 40 °/, de la teneur initiale. Or, chez le chien rendu diabé- tique par l’ablalion du pancréas, la quantité de sucre détruit n’est plus que de 6 °/,. Il en est de même chez l'homme. Chez l’homme sain, le pouvoir glycolytique (cetie destruction du sucre dans le sang étant appelée glycolyse) est de 25 °/, environ où un peu plus; chez l’homme dia- bétique il peut tomber à 1,6 °/, et oscille entre ce chiffre et celui de 7°/,, c’est-à-dire qu’en une heure il ne se détruit dans du sang de diabétique que 1, 6 °/ du sucre que contient ce sang. Ce sont ces observations très neuves et fort in- téressantes qui ont dirigé toules les recherches de Lépine et Barral. D’après eux en effet, le sang liendrait du pancréas ce pouvoir glycolytique. Chez le chien en digestion, la lymphe du canal thoracique et surtout le sang de la veine porte (qui reçoit le sang des veines pancréaliques) pos- sèdent un pouvoir glycolylique bien supérieur à ce- lui du sang artériel ou veineux en général. Lépine suppose dès lors que les cellules pancréatiques produisent un ferment soluble qui passe dans le sang veineux et auquel il a donné le nom de ferment glycolytique. Voici comment il prouve l'existence de ce fer- ment : sil’on transfuse du sang frais, le dépôt for- mé par les globules possède un pouvoir glycoly- 1! Comptes rendus Acad. des se., 1890, 1891; Revue scienli- lique, 28 février 1891; Arch. de méd. expér. 1° mars 4891. D' E. GLEY. — LES DÉCOUVERTES RÉCENTES SUR LA PHYSIOLOGIE DU PANCRÉAS 475 tique considérable, tandis que le sérum n'est pour ainsi dire pas doué de cette propriété. Si l'on remplace le sérum par de l’eau salée, celle-ci prend ce pouvoir aux globules : « On peut ainsi laver plusieurs fois de suite les globules avec de l'eau salée et leur enlever chaque fois une bonne partie du ferment qu'ils renferment. !» C'est particu- lièrement dans les globules blancs que se trouve fixé le ferment, car il existe dans le chyle et dans les parties du sang transfusé qui sont les plus riches en globules blancs. — Le ferment atteint son maximum d'activité à 39°; une température de 55° le détruit ; à cette température on ne cons- tate pas de perte de sucre dans le sang parrapport à la quantité initiale. L'application de toutes ces données au diabète d’origine pancréalique suivait immédiatement el nécessairement, très simple d’ailleurs. Le pancréas produit normalement un ferment grâce auquel le suere se détruit dans le sang d’une façon régulière et constante ; si cet organe est enlevé expérimen- talement ou détruit par un processus pathologique quelconque, le ferment glycolytique disparait par cela même ou diminue, et la destruction du sucre se fait d’une manière incomplète, d’où la glycosurie et tous les symptômes du diabète. Cependant Lépine, ayant reconnu que le sang, après l’ablation du pancréas, possède encore un certain pouvoir glycolylique, admet que le pan- créas peut n'être pas la source exclusive duferment. Hédon,à cause des faits de glycosurie intermittente qu'il a observés, est porté aussi à croire que, dans certaines conditions expérimentales (suppression graduelle de la fonction), le pancréas peut être suppléé par d’autres organes. — D'autre part, Lé- pine, tout en considérant le diabète comme lié à la diminution du ferment glycolytique, c’est-à-dire au défaut de destruction du sucre, reconnait que dans certains cas, il peut y avoir et il y a en outre production exagérée de sucre. Quelque séduisante que soit la théorie de Lé- pine en raison de la simplicité même et de la clarté des faits expérimentaux sur lesquels elle a été fondée, il semble qu'on puisse émettre quelques réserves. D'abord le ferment glycolytique n’a pas été isolé du pancréas lui-même. Les objections qu'on à fait valoir à maintes reprises contre l’exis- tence de la diastase hépatique, un peu trop facile- ment admise par Claude Bernard, doivent valoir aussi dans le cas présent. D'autre part, on admet que sur l'animal vivant le sucre se détruit, non pas dans le sang, mais dans les tissus (Chauveau), pour servir par sa combustion au travail physiologique. Ce sont là des raisons d'ordre général sur les- ! Lépine, Revue scientifique, 28 février 1891, p. 273, quelles, malgré leur valeur, l'expérience l’empor- terait, si l'expérience parlait contre elies. Il est certain que l'importance des deux faits principaux découverts par Lépine et Barral est grande : la di- minution du pouvoir glycolytique chez les ani- maux diabétiques et la grandeur de ce pouvoir dans le sang de la veine-porte. Mais le sang de la veine- porte reçoit beaucoup d'autres produits que ceux qui peuvent provenir du pancréas; l'expérience n'acquerrait, ce semble, toute sa signification que si d’abord un ferment produisant la destruction du sucre avait été isolé du tissu pancréatique lui- même. D'autre part, la diminution de la glycolyse chez les diabétiques n’apparaissant pas comme nécessairement liée à un trouble fonctionnel du pancréas, la glycolyse elle-même pouvait varier sous un grand nombre d’influences. Tout récemment d’ailleurs cette question même de la glycolyse s'est compliquée à la suite des expériences d’Arthus, faites dans le laboratoire du professeur Dastre. Arthus! s’est attaché à montrer que la glycolyse est un phénomène ca- davérique, de même nature que la coagulation du sang; que le ferment glycolytique ne préexiste pas dans le sang circulant; qu'il se forme en de- hors des vaisseaux, aux dépens des globules blancs; que, du reste, la destruction du sucre n’est diminuée qu'en apparence chez les diabétiques, la quantité absolue du suere ayant augmenté. — Lé- pine et Barral ont, il est vrai, répondu à Arthus. V Nous nous retrouvons maintenant presque au point où nous étions après l’exposé des faits. La fonction nouvelle du pancréas ne nous est pas encore, ce semble, complètement révélée, Assurément — et ceci a été déjà dit à plusieurs re- prises au cours de cette étude — ce n’est pas en tant que glande digestive que le pancréas agit sur les matières sucrées. Il faut bien admettre alors qu'il se comporte comme une de ces glandes, dites vascu- laires sanguines, et qu'il vaudrait mieux appeler avec Brown-Séquard «glandes à sécrétion interne», qui, hier encore, apparaissaient comme la {era incognita de la physiologie. Et il faut considérer ces glandes comme versant dans le sang, leurs veines servant de canaux excréleurs, des pro- duits, ferments solubles où autres principes, dont Vimportance est grande pour la nutrition gé- nérale. De fait, j'ai pu démontrer que la ligature de toutes les veines pancréatiques, opération ex- trèmement laborieuse, mais que je suis parvenu à réussir un petit nombre de fois, détermine chez le chien la glvcosurie. 11 est donc nécessaire que la circulation veineuse du pancréas ne soit pas com- ! Comptes-rendus Soc. de Biol., A891, ct Arch. de physiol., 1er juillet 1891. A. ÉTARD. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PURE 476 plètement supprimée pour que l'organe puisse agir sur les matières sucrées de l’économie. Ainsi, à titre de glande vasculaire sanguine, le pancréas prend place à côté du foie, du corps thyroïde, des capsules surrénales, etc. Jusqu'à Claude Bernard on a considéré le foie comme la glande biliaire; la découverte de la fonction gly- cogénique, de la formation, aux dépens de la ma- tière glycogène, de la glycose que les veines sus- hépatiques déversent ensuite dans le sang, a donné au foieune importance nouvelle. Presque à la même époque Brown-Séquard (1851) montrait que l’ex- tirpation des capsules surrénales détermine de graves accidents et la mort. Plus tard (1884) on reconnut que le corps thyroïde, organe glandu- laire dont on ignorait entièrement la fonclion, en possède une des plus importantes,puisque son abla- tion totale amène la mort, au milieu des troubles nerveux les plus graves. Voici maintenant que le pancréas nousapparaitcomme douésurleséchanges nutritifs d’un pouvoir spécial et considérable. A la vérité,exceplion faite pour la fonction glyco- génique du foie, toutes ces questions viennent seulement de traverser la phase de démonstration. Les faits qui prouvent la réalité de fonctions nou- velles appartenant à cesdivers organes sont acquis. Mais quelle est la nature de ces fonctions? Notre ignorance est encore très grande à ce sujet, du moins pour les capsules surrénales, le corps thyroïde, en partie aussi pour la rate. En ce qui concerne la fonction nouvelle du pancréas, on est aujourd'hui, comme on vient de le voir, entré ré- solüment dans la phase des explications. Tr D' E. Gley, Professeur agrégé de Physiologie à la Faculté de Médecine de Paris. REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PURE La médecine exceplée, il n’y a pas d’exagéralion professionnelle à dire que la chimie est la science qui met au jour le plus de travaux, celle qui s’im- prime le plus. Cependant il n’est pas aisé de trouver chaque année un choix de questions finies ou même d’'é- bauches intéressantes à présenter aux lecteurs étrangers à la spécialité etne suivant, avec raison, que les idées générales. Malgré un labeur expérimental et théorique vraiment imposant, le petit nombre des résultats obtenus paraît tenir à l'absolue liberté du choix des sujets scientifiques. La liberté d’ailleurs est pour les bons esprits la source des découvertes et une condition de progrès. La restriction de cette liberté estheureusement une utopie. Mais la science accepte volontiers l'autorité de l'idée, et il serait désirable de voir de temps à autre proposer des sujets de recherches par des congrès autorisés. Les travailleurs, n'ayant pu se faire encore une pensée originale, trouveraient là un guide meilleur que le hasard et arriveraient, par un effort rendu conver- gent, à des résultats d'une utitilé immédiate. Tel qu'il va cependant, le monde chimique transforme peu à peu ses théories et découvre des faits dans les diverses parties de son domaine. Nous allons continuer de le passer en revue el nous insisterons plus spécialement sur les travaux étrangers, précisément parce que nous sommes 4 La Revue de Chimie appliquée, faite pour la Grande Indus- trie par M. Lunge et pour les Matières colorantes par M. Ph. A. Guye,a paru dans la Revue du 30 janvier 1891, page #0, moins à même de les connaitre par les textes ori- ginaux. I. — CHIMIE GÉNÉRALE. Le mouvement en grande partie théorique qui s'était fait dans ces derniers temps surles ques- Lions de stéréochimie et de dissociation des ions semble s'être quelque peu ralenti et il convient d'attendre encore avant d’en parler dans des géné- ralités. C’est le sort de toutes les théories où une part est faite à l'imagination : elles provoquent un enthousiasme bienfaisant,d’où sortent denombreux travaux qui ont pour mission de les affermir et pour effet véritable de les saper plus ou moins vite. En Physique on met une sorte de coquetterie à écarter toute hypothèse, on ne progresse que par le fait et la mesure rigoureuse. En Chimie, théories et hypothèses ont jusqu'à présent joué un rôle qui a souvent pesé sur l'étude des lois exactes. Cette science commence à prendre contact avec la physique ei deux courants entrainent les savants. Les uns, plus particulièrement versés dans la chimie organique, en suivent les méthodes à tra- vers les conceptions stéréochimiques; les autres font entrer peu à peu la Chimie générale dans la Physique et surtout la Thermodynamique. La stéréochimie peut être considérée comme un compiément dela théorie atomique. Elle a été ima- ginée à son heure dès que pourdes matières demême composition on a trouvé plus d'espèces bien définies que les formules de constitution n’en pouvaient expliquer. Il n'est pas encore possible de prévoirun système destiné à prendre la place des notations actuelles, auxquelles on doit en grande partie les A. ÉTARD. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PURE 477 merveilleux progrès de la chimie organique ; mais on constate depuis assez longtemps leur insuffisance. Il est certain que le système des formules dans l’es- pace qui tend à se substituer aux formules planes est un progrès. Mais c'est surtout un progrès de lo- gique : au degré de complexilé où les représenta- lions schémaliques de molécules en sont arrivées, il est douteux qu'il ait une influence pratique. Toutes nos connaissances acquises affirment un état de mouvement des molécules chimiques et le travail consacré à édifier une théorie statique de formules dans l’espace a des chances d’être perdu. Il est certain que, pour une formule de conslitu- tion organique bien établie, les groupes CH*, OC?H5, AZzOH, CO?H etc. écrits sur le papier, existent, ou, mieux, que ces associations peuvent être extraites à l’état de dérivés de l’ensemble fort obscur qu’on nomme une molécule. Il y a en chimie organique des lois bien démontrées de rapports fixes par groupes; mais celte fixité des rapports n'implique en aucune manière l’immobilité. La stabilité des formules, la constance des propriétés chimiques et optiques, la symétrie et la dissymétrie semblent compalibles avec une théorie dynamique, d’ail- leurs à trouver, Tant que les séries de la chimie n'ont pas été complètes, on a attaché une assez grande impor- lance aux propriétés individuelles des corps. La tendance du moment est de ne voir dans les ma- lières les plus diverses que la résultante d’un cer- tain nombre de propriétés additives attribuées aux atomes. 11 semble bien que ce soit là une idée Juste, dont le germe se trouve dans la loi de Pulong et Pelit sur les chaleurs spécifiques et dans celle de Weæstyn, qui lacomplète. Les grandes lois natu- relles sont d’une rare uniformité et il n’y a pas de raison pour que les agents physiques, qui ne sont que des manières d'être de l'énergie, influencent d'une façon bien différente des molécules qui, pour êlre indéfiniment variées, n’en sont pas moins faites de corps simples, loujours les mêmes. Sous. l'influence de ces idées on cherche à atomiser en quelque sorte les actions physiques en Chimie. Les travaux les plus fréquents dans cette voie vi- sent les indices de réfraction moléculaires. En com- parant un grand nombre d'indices de réfraction moléculaires, R, donnés par la formule de L. Lorenz et À. Lorentz: n_—1 M nt + 2° d on est arrivé à remarquer cerlaines régularités intéressantes, et Landolt a pu formuler celte loi que l'indice R d’un corps est égal à la somme des R= 1 Dans cette formule : j n = indice de réfraction ; M, poids moléculaire; d, densité, indices atomiques des composants. La formule élant prise comme base, on est arrivé, par l'examen de composés organiques saturés très simples, à fixer la valeur des indices de réfraction atomiques, qui sont 2,365 pour le carbone, 1,103 pour l'hy- drogène. Quand, à l’aide de ces nombres et de la formule chimique, on établit l'indice moléculaire FU il faut obtenir le même chiffre que par la voie optique en mesurant n°. Mais souvent cet accord ne se réalise pas, etilres- sort des travaux de M. Brühl notamment qu'il faut tenir comple non seulement du nombre des atomes consliluants, mais encore de la manière dont ils sont liés. C’est ainsi qu'ayant fait le calcul comme si la molécule était saturée, on devra ajouter au résultat autant de fois 1,836 qu'il y aura de doubles liaisons où lacunes dans la formule. De même une triple liaison vaut 2, 220 de réfraction moléculaire. Pour l'oxygène on a établi des règles analogues, IL est concevable que les particularités de consli- tution interne ayant une influence aussi grande, et élantsans doute plus nombreuses etecomplexes que nous ne pouvons croire, l'exactitude des détermi- nalions soit relativement faible, M. Brühl ne consi- dère pour cette raison ses résullats que comme approximatifs. Mais telle qu'elle est, cette méthode est entrée dans la pratique des laboratoires el peut rendre des services. Elle permet en quelque sorte de voir les doubles liaisons des corps aromatiques et d'au- tres particularités des formules, telles que les modes de combinaison de l'oxygène selon les types: GENE ICO, | CD EC. L'indice de réfraction n'a pas seulement l'utilité chimique que nous venons de résumer. C’est une constante d'origine purement physique; il est lié à la théorie de l'optique et par ce fait à peu près raccordé aux formules thermiques et électri- ques, dans lesquelles la chimie se trouve ainsi prendre un pied. Ce point de contact est fort im- portant, car dans les branches précitées de la science on possède des formules rationnelles qui rendent les phénomènes caleulables et pourront un jour être étendues à la Chimie. La source des idées qui tendent à incorporer la Chimie générale dans la Mécanique et la Physique est toujours l'hypothèse moléculaire de Bernoulli, celle des points matériels en mouvement dans l’es- pace. Cette conception a été considérablement dé- veloppée par M. Van der Waals et par M. Sarrau. Les formules qu'ils ont données sont aujourd'hui le point de départ de nombreux travaux. L'hypo- ! Bruuz Zeilschr. Physikal. Chem. t. NII, pa 1 À. ÉTARD, — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PURE thèse de Bernouilli n’a élé d’abord qu'une idée sans corps; les savants que nous venons de nommer ont malérialisé celte idée. Les gaz, pour l'instant, ne sont plus considérés comme de simples points; on leur a donné des dimensions. On les regarde comme de petites sphères de matière fondamentale bourdonnant, en quelque sorte, dans le vase qui les renferme. En diminuant par l’action d’un piston, par exemple, l’espace qu'il leur est permis de parcourir, ces sortes de bourdons frappent plus souvent contre les parois, et la pression augmente ainsi en raison inverse du volume, selon la loi de Mariotte. D'après cela, le volume d’un litre de gaz à la pression nor- male n'est qu'une apparence: c'est l’espace où bourdonnent les molécules sphériques. On peut diminuer cet espace par la compression et le refroidissement, mais non indéfiniment. La loi de la contraction des gaz — + de leur volume par degré — n’est pas exacte jusqu'au bout: il arrive un moment où les molécules supposées sphériques se touchent et l’on ne peut aller au delà : le gaz devient un liquide à peu près incompressible. L'espace qu'occupent les molécules au contact se désigne dans l'équation de M. Van der Waals par b et se nomme le covolume*, parce qu'il est le com- plément vraiment matériel et irréductible du vo- lume apparent. Encore cet espace n'est-il pas en entier occupé par la matière: tout comme dans une caisse de billes, il y a entre les sphères des interstices. C'est autour de cette importante notion du covo- lume que viennent se réunir des questions très diverses de Chimie et de Physique. M. Ph. A Guye, dans une thèse récente et remarquablement inté- ressante, a non seulement rappelé les idées que nous résumons très sommairement, mais élabli des enchainements physico-chimiques nouveaux. On sait que Clausius considère les diélectriques comme formés de sphères conductrices placées dans un milieu isolant, et le pouvoir qu'a ce dié- lectrique de transmettre les actions électrosta- tiques (la constante diélectrique K) est liée à la fraction g de l'espace total qu'occupent réellement les sphères conductrices, par la formule : TRE TRE 1+29 Tr, (1) Ka onu Or, d'après la théorie électromagnétique de la lu- mière de Maxwell !, la constante diélectrique doit être égale au carré de l'indice de réfraction 7 : LME La formule de Clausius devient ainsi la for- mule de L. Lorenz et H. À. Lorentz : n?—1 = En divisant par la densité et mullipliant par le poids moléculaire, on a la formule de la réfraction molécuiaire R, intimement liée à lachimie organique et que nous avons donnée plus haut. Dans ces formules de Clausius et de Lorenz se trouve la même idée de relation entre l’action élec- trique ou optique et le volume réellement occupé par la matière. M. Guye a reconnu en cela le rôle du covolume et montré que celui-ci est proportionnel à la réfraction moléculaire, laquelle peut être caleu- lée au moyen des formules chimiques de constitu- tion. Depuis, M.J. W. Brühla montré qu’en appliquant (n —1)M (n +92) 4 son origine dansla notion du covolume, — les nom- bres restaient invariables, quand on passait de l’état liquide à l’état gazeux. Ce sont toujours les molécules elles-mêmes qui agissent, quel que soit le volume apparent. la formule des indices, —qui a en réalité Une autre valeur qu'on tente d’atomiser est la chaleur de combustion. Selon M. Thomsen, le car- bone, l'hydrogène et aussi ce qu’on nomme les doubles liaisons auraient dans les composés une cha- leur de combustion constante, atomique, qui per- mettrait de calculer à priori la constante thermi- que d'une molécule dont on a la formule chimique. M. Brühl critique celte théorie qui conduit à des résultats contradictoires relativement au carac- tère saturé ou non saturé des molécules et à la valeur des Ziaisons. Les chaleurs de combustion de divers isomères simples présentent des différences notables : CH? CH? OH CH COH | >0 | | CH CH co CH? [ Il | CH CH? CH CH 468 cal. 5 46% cal. 8 431 cal. 2 440 cal. 7 Oxyde de propylène Alcool allylique Acétone Propylaldéhyde Un même nombre d’atomes de même espèce libère ainsi des quantités d'énergie dépendant pour une part de l’arrangement interne, de la fonction chimique; mais c’est là une question que nous connaissons assez mal. Un point se trouve mis en suspicion par les études d'optique et de thermie chimique : c’est la 1 Voyez à ce sujet Ph. A. Guye, l’Equation des Fluides dans la Revue du 30 juin 1890, t. I, page 365. 1 Voyez à ce sujet R.BLoxpLor, La théorie électromagnétique | de la Lumière, dans la Revue du 15 mai 1891, t. 11, page 289. | A. ÉTARD. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PURE 479 valeur des liaisons. On peut dire que la chaleur de combustion ou l'indice augmente quand le car- bone se lie deux fois, trois fois, parce qu'il est plus engagé, qu'il y a un rapprochement plusintime de ce métalloïde à indice élevé dans la molécule. On peut admettre aussi bien qu'il n’y à pas de liaison double et que le carbone, moins engagé dans la combinaison, est plus réfracteur, plus lui-même. Par des recherches de ce genre les procédés d’a- grégation moléculaire finiront par être remis en question. IT. — CHIMIE ORGANIQUE. Longtemps on a cultivé la chimie organique pourelle-même et soudé CH° à C5 Hdans le but uni- que de savoir selon quelles loiscela se passe. On ai- mait aussi à avoir des substances à formules sin- gulières et des dérivés fort bien cristallisés. Ce genre d'études à été poussé aussi loin que pos- sible; il ne semble pas qu'on puisse sans une base de raisonnement nouvelle améliorer encore loutil théorique si parfait que la génération qui nous précède a construit. Pour cette raison la chi- mie organique pure, celle des constructions gra- phiques subit un certain temps d'arrêt, La plupart des chimistes renoncent à faire des édifices de molécules sans but; ils cherchent des méthodes de transformations nouvelles ou appliquent celles déjà établies à la détermination de la formule développée des principes naturels. La chimie organique, arrivée relativement vite à un grand état de perfection, remportera mainte- nant moins de succès dans son domaine propre que surile terrain de la biologie. Dans cet ordre d'idées, de nombreux travaux sont consacrés à établir la topographie des molé- cules vénéneuses qu'on nomme les alcaloïdes na- turels. L’un de ces alcaloïdes — le célèbre poison de la ciguë — a été fait de toutes pièces, avec toutes ses propriétés, même le pouvoir rotatoire droit, par M. Ladenburg. Ce n'est autre chose qu'un dérivé de la pyridine, l'-normalpropyl- pipéridine : A7 A7—H A7—H ENT ANS 1 HC CH H°C CH? H?C CH— CSH7 Il | l | | HC CH H°C CH? H°C CH? N ; 7 à 74 SA 1 x ( H H2 H° Pyridine du Pipéridine goudron d'os du poivre Conicine de la ciguë Sans doule nous verrons maintenant se succéder les synthèses d’alcaloïdes, car plusieurs d’entre eux qui n'ont pas encore élé fails de main d'homme en cimentant des atomes épars, sont parfaitement connus, même dans les détails de leur architec- ture intérieure, parfois très compliquée. Ainsi, il est, on peut dire, certain que l’atropine C!7 H23 70° extraite de la belladone, de la jusquiame ou du Datura, à pour formule, du moins très approchée : A7z—CH3 CH20H ENS H2C CCR CRE ECO | || | H2C CH ( N / C HC "CH H2 | HC. CH (ê H L'atropine avait été depuis longtemps dédou- blée par l'action de l’eau de baryte en acide tro- pique : CGH5 — CH(CO?H) — CH20H et une base, la 7ropine CH'*Az0. L'atropine élait une sorte de tropate de tropine deshydraté et il a été assez facile de réaliser une synthèse apparente de l’alcaloïde en unissant de l'acide lropique de pleine synthèse avec de la tro- pine d’origine végétale. C'est de cette dernière base que dépend unique- ment en ce moment la synthèse définitive du poi- son des solanées vireuses. M. Ladenburg est arrivé récemment ! à serrer la question de très près en construisant une base dérivée par hydrogénation de l'a-picolylalkine ? qu'il nomme méthylpipéco- lylalkine ou Æydrotopine. CH3 4 Az Az H AE ÈS HC 3—CH?2—CH20It H2C C— CH? — CH20H | Il | | HC CH HC CH2 INTEE z C C H 2 Picolylalkine Hydrotropine En retranchant H° à l'hydrotropine, il se fait une nouvelle base ayant la formule de la tropine, mais ne lui élant pas encore identique; l’auteur la nomme paratropine. Par combinaison avec l'acide tropique il a préparé un isomère de la tropine, la para-atropine qui à comme l'alcaloïde naturel la propriélé de dilater la pupille. Dans un cas analogue à l’atropine se trouve la cocaïne CH?'AZO*, qu'on est en droit d'appeler méthylbenzoïlecgonine : Az—CH° \ CH — CH (OC1H50)CH2 — CO2 — CHE, Le De c H? / HC Berichle, t. XXIV, p. 1621 (1891). M. Ladenburg à donné le nom d’alhines aux bases oxéthy- léniques de Würtz. 1 9 AS0 et la pipérine, le principe piquant du poivre : PR A ent C5 H10 Az — CO — CiHi — M ce Pour d'autres alcalis organiques le travail est moins avancé, mais en voie bonne el sûre ; léurs formules incomplètes donnent à nos yeux l'im- pression de ces navires sur chantier auxquels ils ne manque que la mâture légère et les cordages. Dans ce cas se trouve la papavérine de Goldschmidt, CH? — C--(0CH5)2...... CH 0 Az CH30 la morphine, dont la constitution connue se réduit au groupement à trois noyaux du phénanthrène combiné à l'acide opianique. V ) (OCH:}2 | Je cmoon . É À © COH 74 La cotarnine C'2H#°Az0!, une des pièces fonda- mentales de la narcotine, est selon W. Roser ‘ : COH C8 H6 Où | | Ncæ—CH2 Az H CH? La combinaison de cette cotarnine avec l'acide opianique ci-dessus, fournira la narcotine de syn- thèse, quand la constitution du groupe [C$HfO*] sera connue. Au moment où la synthèse des poisons qui sont nos meilleurs agents médicamenteux va être réa- lisée, on commence à entrevoir que leur obtention ne constituera qu'un premier degré d’approxima- tion pour nos connaissances chimiques sur les substances toxiques et leur mode d'action. D’après la remarque que l'on a faite que les poisons agis- sent en raison du poids de l’animal, il semblerait que toute la substance vivante en soit imprégnée et que lorsqu'un homme de 100 kilos suecombe à l'action de 0 gr., 01 d’alcaloïde, chaque gramme de sa substance contienne de celui-ci un dix- millionième de gramme. Même à admettre qu'il n’y ait que certains centres touchés, le poison dis- sous dans la masse des liquides de l'organisme ne peut les atteindre qu'en proportions minimes; il parait done peu probable qu'il agisse par la voie de la combinaison chimique avec les éléments anato- miques. Une idée, plus ou moins nettement formu- lée aujourd'hui au point de vue chimique, est 1 Annalen, 249. p. 168. A. ÉTARD. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PURE celle de l’intoxication par le procédé diastasique. Nous ne sommes amenés à prononcer le mot de diastases à la suite des alcaloïdes que pour retra- cer brièvement l’état de notre ignorance sur le su- jet qui a été remis à l’ordre du jour par les progrès de la bactériologie. Il est d'ailleurs presque aussi utile de confesser que nous ne savons rien sur un point de première importance que de vanter nos conquêtes dans d'autres domaines ; cela peut être une excitation au travail. : Une diastase passe pour être une matière azotée, incristallisable et plus ou moins comparable aux albumines. Il faut ajouter que les diastases n'ont pas de caractères permettant d'affirmer leur pu- reté. Cela, joint à des méthodes de préparation encore fort défectueuses, explique qu’on n’ait pu isoler aucune de ces matières, même relativement pure. Ce sera là, selon toute vraisemblance, l'étude là plus difficile réservée à la chimie organique de l'avenir, parce qne les diastases, si elles ont bien des formules telles que nousles concevons aujour- d'hui, sont les produits chimiques les plus intime- ment mélés aux actes de la vie, partant les plus aptes aux actions et réactions incessantes, les plus altérables par les réactifs de nos laboratoires. La nature chimique des diastases est inconnue, mais un certain nombre des actions qu'elles provoquent ont été étudiées surtout par voie micrographique. Ce sont des agents chimiques de détente, de mise en train. Partout où la Nature met une réserve dormante, elle met une trace de diastase qui ré- veillera la matière et lui transmettra le secret des transformations chimiques de son espèce. Dans un ordre d'idées plus simple on pourrait dire qu’un grain de fulminate de mercure est la diastase d’une masse de poudre. Tout porte à croire que les redoutables diastases qu'on isole très impures des cultures microbiennes, ne sont pas des poisons à combinaisons, mais des substances d’une élévation moléculaire compa- rable à celle des albumines vivantes et qui trans- mettent à celles-ci de mauvaises consignes d'évo- lulion chimique. Un certain nombre des formules de constitution qui nous paraissent certaines en tant que disposi- tion relative des groupes, n’ont qu'une réalité de convention. Il y a quelques années on ne savait si le cymène, — qui n’est pourtant qu'un dérivé para- bisubstitué de la benzine — contenait un groupe propyle (fig.1) ou isopropyle (fig. 2). CH CHE CH2— CH? —CHS Fig. 1 A. ÉTARD. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PURE AS81 Après les travaux de Fitlig, Fittica, Jacobsenetc., qui ont donné lieu à de longues discussions, l’opi- nion s'est fixée en faveur de la formule à propyle normal; toutes les fois qu'une difficulté se pré- sente dans l'étude des dérivés ou que la présence del’isopropyle est démontrée, on admet que le pro- pyle est devenu de l’iso-propyle par suite d’une transposition interne. Récemment M. Widman ! a montré par des ex- périences directes que la formule du cymène or- dinaire est isopropylique. Par l’action du bromure de propyle normal sur le parabromotoluène ‘en présence du sodium, il se fait un carbone CH qui bout à 182° — 18%, alors que le cymène C!H!#, dérivé du camphre, bout à 175°. On a tout lieu de croire que c’est là un iso- mère à propyle normal du vrai cymène, carses sels sulfoconjugués de baryum n'ont pas le même degré d'hydratalion que les sulfocyménates bien connus. D'autre part M.-Widman a préparé par la méthode de MM. Friedel et Crafts, au moyen de la benzine et du bromure d'isopropyle, un cumène qui était de l’isopropyl-benzine par son origine et, par son identité avec le cumène ou isopropyl-benzine, de l'acide cuminique. Le dérivé parabrômé de ce cumène, traité par l'iodure de méthyle et le sodium, a donné un carbure identique au cymène du camphre par son point d'ébullition (175°), son odeur et les propriétés de ses sels sul- fonés de baryum. Il est donc établi maintenant que le cymène ordinaire est de la méthyl-para-isopropyl- benzine. La: démonstration qui précéde n'aurait qu'un intérêt assez resteint si elle ne faisait qu'une recti- fication d'erreur dans la disposition des éléments d'un carbure quelconque; mais le cymène a en chimie une importance spéciale, par ce fait qu'il se trouve mêlé à bien des questions de synthèse vé- gétale, qu'il est par ses dérivés un des constituants les plus fréquents des essences végélales et que presque tousles terpènes l'ont comme terme de convergence dans leurs réactions. Ce qui précède nous conduit à parler de la ques- tion la plus controversée et sans doute la plus inté- ressante de la chimie organique, celle des terpènes, qui fixe en ce moment l'attention de nombreux savan(s. On sait qu'il existe dans upe foule de végé- taux des carbures doués d’odeurs spécifiques et constituant les essences de térébenthine, d'orange, de bergamote, de citron, de lavande, de phellandre, etc., etc... Ces carbures ont tous la même composition représentée par la for- mule CH! ; ils sont allérables, surtout par résini- l Beriche, t. XXIV, p. 439. fication ou polymérisation, et doués d’odeurs aro- maliques variées. L'ensemble de leurs propriétés s'impose aux chimistes un tant soit peu exercés; un favies plus aisé à percevoir qu’à bien définir les caractérise comme « {erpènes ». À ce groupe sont intimement liés, par des relalions de dérivation, des oxydes, probablement acétoniques, tels que les camphres et des alcools et phénols tels que le bornéol et le thymol. Ce sont les travaux de M. Berthelot qui ont dès le début fixé nos connais- sances sur ce sujet exceptionnellement étendu et compliqué. Les recherches de M. Bouchardal en France, de MM. Tilden, Armstrong, Flavitzky et Wallach à l'Étranger, v ont ajouté une quan- tité considérable de faits avec lesquels on cher- che en ce moment à édifier une théorie géné- rale de la'série terpénique. On a pensé pendant longtemps que le nombre des terpènes était in- défini ; chaque espèce végétale pouvait donner son lerpène, isomère des autres. Cette théorie assez exagérée comportait une réaction, qui s’est produite : les terpènes passent en ce moment pour être peu nombreux: leurs odeurs, pourtant si spé- ciales, et leurs points d’ébullition variés seraient des allérations dues à des mélanges d'impuretés. La théorie qui tend à prévaloir sur la constitution des terpènes n’est pas appuyée par des formules incontestables. On n’a d'ailleurs pas contrôlé ces formules par la synthèse, el ce qu'on en peut dire de meilleur, c'est qu'étant des schémas construits par tâtonnement, elles ne se trouvent pas en con- tradiction manifeste avec les faits d'observation. L'idée principale dans la théorie terpénique est tirée des travaux de M. Baeyer sur les acides hy- drophtaliques qui contiendraient dans l'hexagone benzénique une liaison diamélrale. Cette liaison diamétrale ou para est devenue en quelque sorte le symbole des terpènes aux yeux de M. Brühl et de M. Wallach. Dans un mémoire récent !, M. Wallach annexe à un travail personnel intéressant quelques-unes des formules nouvellement admises. Le térében- thène (Pinène) et le camphène sont représentés par des figures à liaison diagonale : CH5 — CH — CH CH° — CH — CH C—H C AN N hHC CH? H?C CH | | | Il HC CH HC CH NPA A { ( | | CH CH: Térébenthène Camphène Le camphre et le bornéol ont respectivement des formules d’acétone et d'alcool de même figure 1 Berichte, t, XXIV, p. 1525. 482 A. ÉTARD. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PURE Malgré la faveur, peut-être un peu hâtive, avec laquelle ces formules sont accueillies, bien des doutes subsistent, qui portent sur des questions fondamentales. On peut se demander s’il est cer- tain que dans les terpènes ou dans la plupart d’entre eux il préexisle un noyau cyclique, fermé. Ainsi qu'on le verra plus loin par l'exemple du géraniol, des corps qui, en raison de leurs pro- priélés, ont pu être considérés sans invraisem- blance comme des hydrates de terpène, C{H{H20, sont tenus maintenant pour des alcools à formule ouverte, bien qu'ils aboutissent aisément au cy- mène comme le font les terpènes. M. Berthelot a récemment émis une idée qui supprime la difi- culté un peu subtile des terpènes ouverts ou fer- més, gras ou aromatiques. Sortant du domaine des formules statiques que nous venons d'exposer, des formules qui admettent des liens fixes et inva- riables entre les divers points de la molécule, il montre qu'il y a dans les actes de combinaison des divers terpènes des variations thermiques considé- rables. Tant que des espèces telles que le térében- thène ne sont pas engagées dans une action chi- mique, elles ont une surchage d'énergie qui les rend instables comme un ressort Lendu et aptes à verser dans l’une ou l’autre série. Le térébenthène converti par l’action d'agents convenables en ses isomères, le terpylène ou le camphène, a acquis une stabilité relalive. Avant sa transformation, il il n’a pas de formule fixe qu’on puisse dessiner : il a toutes les formules développées qu'on veut. En ce point réside peut-être l'explication de la diver- sité — non indéfinie, mais assurément très grande, — des individus du groupe terpène. Les essences odorantes extraites des végétaux sont presque toujours formées d’un mélange d'un ou plusieurs terpènes C'H'!6 avec des huiles de formule C!°H!$0 ou encore avec les analogues du menthol C!H?0 ou du thymol C#H40. Le parfum d’une fleur ou d'une plante n'est donc pas celui d'une malière chimique simple. C'est, pour me servir d’une comparaison établie par le parfumeur Piece entre les odeurs et les sons, une sorte de symphonie odorante. Nos meilleurs fabricants ont inconsciemment imité la nalure en composant des parfums réputés par le mélange de drogues dont plusieurs sentent plutôt mauvais, comme le muse, l’oppoponax et la civette. Parmi les principes le plus souvent rencontrés dans les diverses familles végétales fournissant des essences, on remarque les hydrates de terpènes C'0H!$0 ou C!H16,H?20. Ce sont eux qui forment la base des essences de coriandre, de mélisse, de linaloë, de rose, de géranium, ete., etc. Mais jus- qu’à présent on ne savait pas la formule de consli- tution de ces corps, ni même leur fonction chi- mique. Parmi les travaux qui ont permis d’éclair- cir celte question intéressante, il convient de re- marquer surtou{ ceux de M. F. W. Semmler !, de M. Brühl ? et de M. Eckart 5. D'après M. Semmiler, les prétendus hydrates de terpènes sont des alcools primaires de la série grasse. C’est ainsi que le géraniol, répandu dans divers végétaux, a pour formule : CHS CH | | CH5 — CH — CH?2— CH = CH — C = CH — CH? (0H) Cette formule est fort intéressante en ce qu’elle montre combien est artificielle la distinction des séries en chimie organique. Le géraniol est un dé- rivé de la série grasse dans lequel les groupes (CH®)CH — et CH? — sontplacés en prévision d’une transformation aromatique. Cest un corps gras prédestiné : il est virtuellement aromatique. Par une oxydation légère le géraniol se convertit en une aldéhyde bien caractérisée : le géranial CH160, qui a la formule d’un camphre et se rap- proche plus que le précédent des carbures aroma- tiques, ainsi que le montrent les formules de cons- titution disposées en cycles non encore fermés : C?H7 C3 H7 He { O HAC à Hllerte Le (OH) H2C CH H—C CH | (l | || HC CH HC CH NA 7 NN J C C CH? CH3 Géraniol Géranial CS | C AS HC CH | || HC CH N 27 C | CH3 Cymène Le géranial deshydraté par du bisulfate de po- tassium se convertit en effet en cymène vulgaire. De nombreuses essences agilées avec du bisulfite de soude donnent au bout de quelque temps un dé- rivé bisulfitique du géranial. Celui-ci préexiste done dans ces essences et devient un des facteurs de leur parfum. Selon MM. Poleck et Eckart *, l'essence de roses dont ils paraissent avoir fait un traitement com- plet ne contiendrait — sauf falsification — que peu 1 Berichte, t. XXIV, p. 201. t. XXI, p.457: 3 — +: XXII, Sp 2554. “ Berichle, t. XXII, p. 3554. * FE A. ÉTARD. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PURE 483 de principes distincts. L’essence d’origine turque est principalement formée d’une huile bouillant à 215° qui a la composition CH!$O et les propriétés à peu près exactes du géraniol. Comme ce dernier, l'essence de roses a été transformée successivement en une aldéhyde, puis en un acide par oxydation. Les recherches des auteurs ont établi qu'il s’agit encore ici d'un alcool primaire avec deux liaisons éthyléniques. IIT. — CHIMIE MINÉRALE, L'année est exceplionnellement bonne au point de vue de la chimie inorganique. C’est une pous- sée de découvertes, une sorte de renaissance pour des études mortes comme celle du bore, des hydrures métalliques etc. Nous osons à peine rap- peler l'acide azothydrique et le nickel-carbonyle dont la découverte a élé dans cette Revue l'objet d'articles d'actualité. ! L’acide azothydriqne n’est pas une substance intéressante par sa formule, On est habitué à voir en chimie organique des grou- pements azolés de toute sorte ; les azimides, entre autres, sont connues depuis longtemps et la ben- zoïlazimide COHS — CO — LA AZ n'a pas d'intérêt particulier. Mais dès qu’on arrive, en chassant (C$H° — CO), au corps générateur Az Il ? H — AC KA Acide azothydrique les propriétés presque banales dela série subissent un changement brusque. L'acide azothydrique est doué de propriétés imprévues que ne laissent pas soupconner ses dérivés. C’estcomme si l’on passait de l’inoffensif sel marin à l’acide chlorhydrique. M. Curtius ? a complété récemment l'étude du corps singulier qu'il a découvert. L’acide azothydrique fort difficile à préparer est une matière à classer évidemment dans ce qu’on appelle la Chimie mi- nérale ; mais il se prépare exclusivement par voie organique : on lire la substance génératrice de ses dérivés *. La méthode recommandée en dernier lieu par M. Curtius comme la plus simple est celle par l'hip- purylhydrazine. On traite l’éther hippurique par de l’amidogène ou hydrazine : C6H5 — CO — Az H — CH? 1 Voyez : Ph. À. Guxe : l'acide azothydrique, dans la Revue du 30 octobre 1890, t. 1, p. 656 et G. Crarpy : Le nickel-tétra- carbonyle dans la Revue du 30 novembre 1890, t. I, p. 657. ? Berichte, t. XXII, p. 3031. 3 Voir cette Revue, loc. cit, Il se fait ainsi de l’alcool et de l’hippurylhydrazine CO — H Az — Az H°? | CGH5 — CO — AzH — CH? qui, traitée par l’azotite de sodium, conduit au dé- rivé nitrosé : CH — CO — AzH — Li En saponifiant par la potasse, on a de l’hippurate de cette base; de l’eau s’élimine, et l’on obtient l’azoture de potassium KAz?, qu'il n’y a plus qu'à décomposer par l'acide sulfurique pour que HAz? distille avec la vapeur d’eau. L'acide azothydrique peut être amené par distillation fractionnée à une teneur de 27 °/, ; au delà il fait explosion. Il fume en présence de l’ammoniaque, comme l'acide chlor- hydrique; il sature les bases et précipite divers métaux en donnant des azotures, tels que : (A2)? Ba ASAzHi (A#)He? AzAe. Ces deux derniers présentent la plus grande analogie avec les chlorures correspondants ; mais ils sont fort explosifs. Ce sont là des faits intéressants, qui réveillent notre curiosilé sur la nature inconnue des corps simples. Divers éléments s’unissant à l'oxygène donnent, selon les proportions, des bases ou des acides; l'azote, qui en combinaison hydro- génée, élait considéré exelusivement comme géné- rateur de bases, agit de même : il conduit, selon les quantités, à des acides ou à des dérivés ba- siques. Des combinaisons, qui ont excité d'autant plus de surprise qu’on était moins préparé à les conce- voir, sont le nickel-{étracarbonyle de MM. Mond, Lang et Quineke ! et le fer-carbonyle de M. Ber- thelot ?. On ne s'imagine pas volontiers qu'un gaz neutre, se combinant diflicilement au chlore et aux divers réactifs, puisse attaquer un métal lui-même assez résistant aux actions chimiques. Cela est cepen- dant. Le nickel-carbonyle se prépare même facile- ment par combustion directe du nickel; c'est un liquide clair et mobile comme l'éther, dont il a à peu près le point d'ébullition, IL est dangereux à respirer et explosif. Le fer-carbonyle de M. Berthelot résulte de l'action de l'oxyde de carbone sur le fer réduit, sans qu'il soit nécessaire de chauffer. C'est une matière gazeuse qui ne s'obtient qu'en mélange 1 Journ. Chem. Soc, t. LIT, p. 749, 1890. 2 BerrneLor, Comptes rendus du 15 juin 1891, p. 1343. 484 A. ÉTARD. -— REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PURE avec l’oxyde de carbone. Ce fait qu'un fluide tou- jours présent dans les opérations de la sidérurgie peut gazéifier le fer permet d'expliquer, selon cet éminent chimiste, bien des réactions uliles ou curieuses observées depuis longlemps, et notam- ment le phénomène de la cémentalion du fer, jus- au’à présent si mal connu. L’affinité peu commune du bore pour le fluor, le chlore et l'oxygène, fait de ses combinaisons avec les éléments en question des termes de stabilité, des têtes mortes — caput mortuum — dont l'énergie réciproque s’est épuisée. M. Moissan qui a de nou- veau attiré l'attention sur ces difficiles questions a laissé de côté les composés bien connus qui ont pour ainsi dire stérilisé la chimie du bore, Il a préparé comme point de départ l'iodure de bore jusqu'à présent inconnu et dans lequel l'élément triatomique saturé parles faibles affinités de l'iode présente toute la plasticité nécessaire aux transfor- mations. ! Le bore, dans ces conditions, prime par son énergie chimique la plupart des réactions; c’est ainsi que le tétraiodure de carbone, dont la préparation était des plus difficiles, s'obtient par une simple précipitation à froid dans le tétrachlo- rure de carbone dont le chlore est enlevé : 4BE + 3CCli —=4B CI + 3CI4 Le nouveau composé est particulièrement inté- ressant, car c'est un oulil qui permettra d'obtenir un nombre considérable de combinaisons et d’en- trer vraiment dans la chimie du bore, réduite jus- qu'à ce jour aux borates. Bien peu d’hydrures métalliques sont connus en dehors du palladium-hydrogène de Graham, de l'hydrure de cuivre Cu?H? de Wäürtz et des hy- drures K'H?, Na‘H? que MM. Troost et Haute- feuille ont obtenus en traitant par l'hydrogène les métaux alealins. M.C. Winkler ?, en appli- quant sa méthode de réduction des oxydes par le magnésium en poudre, est arrivé à des résultats dont l'intérêt dépasse les limites de la chimie mi- nérale. Lorsqu'on chauffe un mélange équimolécu- laire de chaux et de magnésium, il se fait une vio- lente réaction et une partie au moins de la matière se transforme selon l'équation : CaO + Mg = MgO + Ca Cette opération se fait dans un courant d’hydro- gène sec. Dès que l'incandescence qui accompagne la transformation a pris fin, on constate que l’hy- 1 Morssan, Comptes rendus du 6 juillet 1891, p. 19. 2 Berichte, t. XXIV, p. 1966. drogène cesse de passer :ilest retenu par le cal- cium, car la magnésie et la chaux qui pourraient rester sont indécomposables; et d’ailleurs il ne se dégage pas d’eau. La saturation du métal effectuée, l'hydrogène passe librement; on laisse refroidir dans un courant de ce gaz. On a de la sorte une masse grise, terreuse, qui, chauffée en un point, s'allume et brûle dans l’air avec une flamme pàle d'hydrogène; dans l’oxygène la combustion est éblouissante. L'eau seule et surtout l’eau aci- dulée provoque un abondant dégagement d’hy- drogène. L'analyse de la masse montre qu'elle contient 33 +/, d'hydrure de calcium solide, ter- reux, infusible. Le reste est de la chaux inattaquée (28 °/,) et de la magnésie (38 °/,.) L'hydrure de calcium a pour formule CaH ou une expression polymérique telle que Ca*H*. Dans les mêmes conditions la stronliane est à peu près quanlitativement (95 °/,) convertie en hy- drure SrH. La barvte est dans le même cas. Le magnésium mélangé de magnésie donne dans ces mêmes conditions quelques centièmes d'hy- drure MgH. M. Winkler, à la suite de ces expériences, fait re- marquer que dans le Soleil et les étoiles fixes on a démontré la présence simultanée de H,Ca,Mg. D'autre part, M. Janssen, dans sa belle expédition du Mont-Blanc, a mis en évidence l’absence d’oxy- gène libre dans l'atmosphère du Soleil. Dans cel astre, selon M. Winkler, les réactions chimiques principales de la photosphère se passeraient entre les hydrures métalliques plus ou moins disso- ciés et la vapeur d’eau. Les hydrures notamment serviraient de régulateurs des protubérances ; l’'hy- drogène étant bientôt absorbé par les vapeurs mé- talliques, il se produirait par ce mécanisme d’é- normes diminutions de volume; les hydrures, en présence d'eau, pourraient dans des circonstances différentes donner lieu à de véritables explosions d'hydrogène. Dans d’autres conditions de la chi- mie stellaire, lorsque les astres sont à une tempé- ralure plus élevée que notre Soleil et supérieure au point de dissociation de la vapeur d'eau, l'hydrure de calcium existerait en présence d'oxygène libre sans qu'aucune affinité pût troubler l'équilibre. Mais dès que la température, par la suite des temps, s’abaisserait au-dessous du point de dissociation précité, l'oxygène, réagissant sur CaH,MgH, etc, donnerait lieu à l'éblouissante combustion oxyhydrique. L’astre refroidi subirait une sorte de recalescence passagère, donnant lieu au phénomène des étoiles temporaires à éclat va- riable non soumises à la périodicité. A. Etard, Répétiteur de Chimie à l'Ecole Polytechnique. F BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 485 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques. Niewenglowski. — Docteur ès sciences, ancien élève de l'Ecole normale supérieure, professeur de mathéma- tiques spéciales au lycée Louis-le-Grand. — Cours d’al- gèbre, à l'usage des élèves de la classe de mathématiques spéciales. (12 fr.). — Armand Colin et Cie, éditeurs, 1, 3et5,rue de Mézières. Paris, 1891. La première édition de l’excellent traité d’'algèbre, publié en 1889 par M. Niewenglowski, a été rapidement épuisée, et la maison Colin à dû en faire une seconde, qui vient de paraître. Ce succès était prévu: le livre du savant professeur du lycée Louis-le-Grand porte, en effet, la marque d’une extrême rigueur dans les raison- nements et d’une très réelle clarté; à ce double titre, on ne saurait trop le recommander aux élèves. Drzewiecki (S.). — Le vol plané. Essai d’une solution mécanique du problème. (Prix 2 fr.) E, Bernard et Cie, 53 ter, quai des Grands-Augustins. Paris, 1891. M. Drzewiecki s’est déjà fait connaitre par d’intéres- santes études sur le vol des oiseaux; en 1889, il a publié un travail intitulé : « Les Oiseaux considérés comme des aéroplanes animés », avec ce sous-titre : « Essai d’une nouvelle théorie du vol ». Le nouveau Mémoire qu'il publie aujourd’hui est la suite et le complément du précédent; il y aborde l’une des questions les plus obscures que soulève le vol des oiseaux, l’une de celles qui ont le plus divisé les obser- vateurs, la question du vol plané. Nous n’oserions pas dire que toutes les conclusions de M. Drzewiecki sont démontrées en toute rigueur; mais, si l’on admet l'hypothèse fondamentale qui con- siste à considérer l’oiseau comme une surface plane se mouvant dans l’air, le travail dont nous rendons compte parait bien établi et solidement déduit, L'auteur, après avoir étudié le planement proprement dit, c’est-à-dire le glissement descendant ou ascendant de l'oiseau porté sur ses ailes déployées, montre comment peut être obtenu ce vol en place que les chasseurs désignent sous la locution « faire le Saint-Esprit » ; il expose en- suite une explication fort ingénieuse de ce fait, qui a donné lieu à bien des discussions, la possibilité, pour l'oiseau, de se déplacer dans l'air, en s’élevant, sans dépenser de travail musculaire el par Putilisation unique du travail du vent; il termine enfin par l’exa- men très complet du planement par orbes, si fréquent chez les Rapaces. L'opuscule de M. Drzewiecki est vraiment scienti- fique; une fois l'hypothèse admise, l’auteur raisonne juste, fait de la bonne mécanique et ne donne que des déductions rigoureuses; ces déductions théoriques viennent de recevoir une éclatante confirmation des expériences toutes récentes de M. Langley. Elles cons- lituent une contribution importante à l'étude de cette question difficile du vol plané, déjà abordée par M. Marey dans des recherches justement célèbres. AO! 2° Sciences physiques. Chappuis (J.) et Berget (A). — Leçons de Physique générale, Cours professé à l'Ecole centrale des Arts et Manufactures, el complété suivant le pro- gramme de la licence ès sciences physiques. Tome Tet II (Prix 13 fr. le vol.). Gauthier- Villars, Paris, 1891, Entre les précis élémentaires écrits pour l’ensei- gnement secondaire et les traités où diverses parties | de la physique sont exposées dans tous leurs dévelop- pements, il y avait place pour un livre plus spéciale- ment destiné aux élèves des Facultés et des Ecoles supérieures, et répondant à peu près au programme de la licence ès sciences physiques, MM. Chappuis et Berget ont écrit ce livre que MM. Gauthier-Villars et fils viennent d'imprimer avec leur perfection accou- tumée. Comme l'indique son litre, cet ouvrage constitue une série de lecons, et non un traité; on ne saurait donc reprocher aux auteurs d’avoir volontairement laissé de côté un certain nombre de questions, pour la plupart encore assez obscures d’ailleurs, ou ne figurant pas dans la liste des matières généralement demandées aux examens classiques. Les lecons sont écrites dans un style très sobre et très clair; partout les auteurs ont cherché les démonstrations les plus élémentaires ; ils n’ont pas sacrifié au désir de paraitre originaux en donnant de ces démonstrations soi-disant nouvelles, que l’on ne trouve d'ordinaire qu'au prix d’une plus grande complication; on à suivi toujours la voie la plus droite et la plus naturelle; chaque question est présentée d’une facon unique et sous son aspect le plus simple; sans doute, ce n’est pas là, en théorie pure, le meilleur moyen de faire connaître à fond les points délicats de la science : celui-là seul connaît bien un paysage qui l’a examiné de divers points de vue; mais l'expérience n'apprend-elle pas tous les jours au professeur qu'en voulant trop éclairer les détails, il fait disparaitre l’ensemble aux yeux encore inexpé- rimentés de la plupart ‘de ses élèves? les auteurs ont donc eu tout à fait raison, étant donné le but qu'ils désiraient atteindre, de s’en tenir surtout au côté le plus frappant; eux-mêmes signalent qu'ils ont souvent suivi la marche et les méthodes indiquées par M. Lipp- mann, leur éminent maitre, dans son enseignement à la Sorbonne ; ils ne pouvaient choisir meilleur modèle. Peut-être pourrait-on trouver que la lecture du livre de MM. Chappuis et Berget donne un peu trop cette impression que la physique est une science achevée, au moins dans les parties étudiées au cours de l’ou- vrage; mais les auteurs répondraient sans doute qu'ils tiennent cette légère critique pour un compliment, qu’ils ont sciemment agi, et que, volontairement, ils ont cherché à faire pénétrer cette idée dans Pesprit du lecteur; à quoi bon tourmenter outre mesure ceux qui commencent l'étude de la physique supérieure, leur dévoiler immédiatement les précipices qu'ils côtoient ? Ne serait-il pas bien décourageant d’avoir le vertige au début d’un voyage ? A mon sens, le plus grand mérite de l'ouvrage est que, partout on sent le souci de présenter la physique comme une science expérimentale; dans l’ensemble comme dans les plus petits détails, on découvre aisé- ment que MM. Chappuis et Berget sont gens de métier : eux-mêmes ont fait les expériences dont ils parlent: et ils ne se sont pas contentés de les apprendre dans les livres où l’auteur manifeste assez souvent une connaissance par trop théorique des appareils qu'il décrit; la plupart des instruments qui sont cités dans le cours du livre appartiennent au laboratoire de Re- cherches physiques de M. Lippmann; aussi voit-on dans le choix des modèles la variété que l’on ren- contre dans un laboratoire; les constructeurs les plus divers sont successivement mis à contribution. Cette couleur locale n’est pas faite pour déplaire au physi- cien; je ne pense pas que personne puisse voir là un défaut, Il serait trop long d’entrer ici dans le détail des cha- 486 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX pitres du traité; disons seulement que le premier volume débute par un chapitre, peut-être un peu concis, mais très clair, sur les unités; vient ensuite une des- cription soignée des instruments de mesure; puis une étude très complète de la chaleur et de la thermody- namique. Signalons en particulier le chapitre sur la conductibilité thermique où la compétence particulière de l’un des auteurs se laisse aisément deviner. Le second volume est consacré à l'électricité et au magné- tisme: tout ce qui a trait à l’électrolyse et à la pola- risation est traité d’une facon très intéressante; on rencontre là plusieurs idées originales, développe- ments des théories de M. Lippmann, dont les travaux ont jeté sur ces questions un Jour tout nouveau, Quand le troisième volume où se trouveront réunis l'acoustique et l'optique aura paru, une véritable la- cune sera comblée. Grâce à MM. Chappuis et Berget, on possédera désormais un excellent ouvrage, tout à fait digne d’être considéré comme une « introduction générale à l'étude de la physique ». Lucien Poincaré. WWaterhouse (Colonel). — Sur le renversement de l’image photographique par les sulfocarba- mides. — Photographic News, 1890, M. E. Waterhouse signale ce fait singulier que, si l’on ajoute une petite quantité de sulfocarbamide à un bain de développement alcalin, le cliché vient en positif, après une pose normale. Les meilleurs résultats sont obtenus avec les for- mules suivantes : Hydroquinone.............. Suite delsouderterrecerrc-ree Carbonate de soude On ajoute à 100 parties de ce révélateur une partie de solution aqueuse saturée d’allylsulfocarbamide, et lon procède à la facon ordinaire. La phénylsulfocarbamide donne aussi des renversements très nets. Avec ce der- nier corps, il est préférable d'employer un révélateur à à l’iconogène. L'auteur n'indique aucune théorie de ses expériences. On n’est d’ailleurs pas plus avancé sur l'explication des faits analogues obtenus par la présence de lhyposulfite de soude dans le bain d’oxalate de fer. Il faut encore rappeler, à ce propos, le renversement de l’image par excès de pose, signalé par M. Janssen, également sans explication. Georges CHARPY. Jüptner de Jonstorff (Hans). — Traité pra- tique de chimie métallurgique. Traduit de lPalle- mand par E, Vlasto.A vol. 350 pages. (10 fr.). Gauthier Viliars, 55, quai des Grands-Augustins. Paris, 1891. Ce livre est essentiellement pratique ; il s'adresse non aux savants, mais aux ingénieurs, et leur offre, sous une forme très condensée, l'ensemble des données né- cessaires à la conduite d'un haut-fourneau. La pre- mière partie est consacrée à la description des appa- reils de laboratoire et des méthodes opératoires. Citons une discussion très approfondie des erreurs à craindre dans les analyses en poids ou en volume, et des moyens de les réduire autant que possible. Vient en- suite un chapitre sur les réactifs et les liqueurs titrées, puis on arrive à la partie la plus importante du livre, les méthodes spéciales d'analyse. Cette étude est di- visée en 10 paragraphes : I. Essais sur le fer et l'acier. On trouve dans ce para- graphe les méthodes les plus récentes et les plus pré- cises de dosage de C, Si, S, Ph, Mn, W, Ti, Ca. Il n'y a à signaler comme omission que la méthode de dosage du silicium de Boussingault (attaque du métal par HCI, gazeux) qui donne de bons résultats. Le dosage du chrome et du vanadium ne sont pas indiqués ; certains minerais contiennent cependant des proportions no- tables de ces corps. IT. Minerais et fondants. HIT, Calcul deslits de fusion. M. Juptner donne, d’après Balling, des tableaux de coefficients pour la silice et les différentes bases d’après lesquels on peut calculer immédiatement la composition d’un lit de fusion pour obtenir, en partant d’un minerai donné, un laitier de composition déterminée, IV, Examen des laitiers. V. Produits réfractaires. VI. Eaux d'alimentation. VII. Combustibles et graphite. La méthode calorimé- trique de Schwackhæfer, la plus précise qu'on con- naisse, est longuement exposée, d’après des documents de l'inventeur. VIIT, Analyse des gaz. IX. Effet utile des installations de chauffage. X. Détermination du bilan du haut-fourneau, Comme on le voit par cette rapide énumération, toutes les opérations de la pratique courante sont examinées dans ce livre. On peut signaler cependant l’omission des méthodes permettant de déterminer la facilité avec laquelle un minerai est réduit, celles de Lowthian Bell en particulier. L’exposé des différentes questions est très net et très précis, et il semble diffi- cile de réunir sous un plus petit volume autant de données intéressantes: M. Vlasto, directeur de la Société centrale des pro- duits chimiques, a traduit ce remarquable ouvrage en suivant de très près le texte allemand; de trop près mème en certains passages, car il en résulte des tour- nures de phrases un peu allemandes, telles que celle-ci : « Un autre chimiste, qu'il fit aussi pipetter avec de l’eau, obtint etc. » Le traducteur a aussi ajouté un certain nombre de notes, dont la plupart se réduisent à ceci : « Cet appareil se trouve à la Société centrale des pro- duits chimiques. » Georges CHArPY. 8° Sciences naturelles. De Lapparent (A.).— Abrégé de Géologie. 2° édi- tion, entièrement refondue, avec 134 gravures dans le texte et une carte géologique de la France, chr'omolitho- graphiée. (3 fr. 25). Savy, Paris, 1891. L’éloge de ce petit livre n’est plus à faire, Destiné à l’enseignement secondaire, il a eu le rare mérite de bien mettre en lumière les faits dominants de la géo- logie, — ceux qui sont strictement nécessaires à l’éta- blissement des lois générales, — sans encombrer la mémoire du lecteur d'inutiles détails. La seconde édition, très remaniée, qui vient de pa- raître, témoigne du souci constant de l’auteur de per- fectionner son œuvre à cet égard. Elle donne aux com- mencçcants une vue très nette de l’ensemble de la géolo- sie, service qu'apprécieront aussi pour eux-mêmes les spécialistes souvent trop engagés dans le détail d’une question pour apercevoir les grandes lignes de la science, Bien que ce livre traite de choses très générales et devenues à peu près immuables, la seconde édition diffère notablement de la première. C’est ainsi que la méthode micrographique ayant, depuis quelques an- nées, conduit les pétrographes à des idées nouvelles sur la composition et la formation des roches érup- tives, M. de Lapparent à enrichi sa deuxième édition d'un chapitre particulièrement consacré à leurs dé- couvertes, Malgré les additions de cette sorte, le choix d’un for- mat plus compact a permis à l'éditeur de diminuer le volume et le prix primitifs de ce petit ouvrage. L. 0. Goodale (George Lincoln) A. M., M. D., Professeur of Botany in Harward university. — Gray’s Botanical Teat Book, 6° édition, volume II. Physiological Botany (13 fr.). Macmillun and C° Bedford Street, 29, Covent Garden, London 1890. Cette nouvelle édition, publiée sous les auspices de M, Asa Gray, n’est pas seulement un ouvrage de Physio- BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 4817 logie; on y trouve en effet la plupart des dévelop- pements anatomiques dont la connaissance a longtemps été considérée comme inutile à l'étude des principaux problèmes de la Physiologie, | j Après une introduction indiquant l’emploi du mi- croscope et des réactifs nécessaires à l'étude des tissus, M. Goodale adopte, pour la partie anatomique de son ouvrage, l’ordre classique, Il étudie d’abord la consti- tution de la cellule et les dérivés du protoplasme, les différents tissus, puis l'anatomie des organes végéta- tifs et des organes floraux, pour terminer par une classification des tissus où sont résumées les vues de M. Haberlandt. Cette première partie est exposée avec beaucoup de elarté et l’auteur montre une connaissance parfaite des trayaux classiques en anatomie végétale, Signalons notamment les emprunts faits aux belles recherches de M. Van Tieghem sur la racine, de M. Sanio sur le liège, de Mohl sur les Palmiers, ete. De nombreuses notes accompagnent le texte, fournissent des détails, souvent omis dans les ouvrages de Bota- nique, sur la composition chimique des tissus. La seconde partie, de beaucoup la plus développée, est d’abord consacrée à l'étude générale du proto- plasme, dont la composition et les propriétés sont exposées très longuement. L'auteur étudie ensuite la diffusion, losmose et l'absorption des liquides, d'après les recherches de Ch. Graham, et les observations de MM. Traube et Pfeffer sur les cellules artificielles. La constitution des différents sols, les résultats produits par la culture dans l’eau, sont ensuite exposés très clairement; puis M. Goodale aborde l'étude des mou- xements de l’eau provoqués dans les tissus végétaux par l’absorption et la transpiration. Le chapitre relatif à l'assimilation du carbone, traité d’après les recherches de Saussure, Garreau, Timiria- zeff, Engelmann, est très complet; mais l'auteur ne parait pas avoir abordé la question si importante des erreurs que le phénomène respiratoire introduit dans l’étude de la fixation du carbone. La fixation de Pazote, l'examen des sources auxquelles les plantes empruntent cet élément important, sont exposés d’après les belles recherches pratiques de MM. Lawes et Gilbert et de M. Schlæsing: mais la ques- tion si importante de la nutrition des Légumineuses est passée sous silence, L'auteur examine ensuite les plantes humicoles et saprophytes et consacre aux plantes carnivores des développements que notre ignorance actuelle sur le mode de nutrition de ces plantes ne justifie pas. Le chapitre relatif aux transformations des matériaux organiques dans la plante, se termine par une étude trop écourlée des phénomènes respiratoires ; c’est la partie la moins développée de cet important ouvrage, L'auteur aborde ensuite l'étude des phénomènes internes, division de la cellule, mouvement, et termine par l'examen des phénomènes de reproduction et de germination. Un dernier chapitre, très original, termine le livre ; il est consacré à l’étude de la résistance des végétaux à lPaction des influences toxiques : poisons organiques et gazeux, elc.; malheureusement, en l’état actuel de nos connaissances, l’auteur à dù restreindre beaucoup ce chapitre. En somme le traité de Physiologie de M. Goodale pré- sente, sous un petit format, l'exposé très net et assez complet des grandes questions de physiologie végétale, dont la connaissance est indispensable, non seulement aux naturalistes, mais à {ous ceux qui s'intéressent aux questions agricoles, Les étudiants trouveront en outre dans cel ouvrage, intermédiaire entre les traités classiques et les livres élémentaires, une liste des plantes sur lesquelles ils pourront vérifier les détails anatomiques et les faits physiologiques exposés dans le cours de l'ouvrage. Il est regrettable que nous n’ayons pas en France de livre comparable à celui de M. Goodale, L, Maxeix. Wallace (A, Russel). — Le Darwinisme, traduction par M. H. pe Varieny. Un vol. 8° de la Bibliothèque évo- lutionniste publiée sous la direction de Henry pe Varie 37 figures dans le texte. (1 francs). Lecrosnier et Babe, éditeurs, 23, place de l'École de Médecine, Paris, 1894. M. de Varigny a eu l'excellente idée de réunir sous le titre de « Bibliothèque évolutionniste » une série de volumes se rapportant tous à la théorie de l’évolution, à sa démonstration et à ses conséquences, envisagées tant au point de vue scientifique pur qu'au point de vue mélaphysique. Comme le dit M. de Varigny dans son « Avis », cette bibliothèque s'adresse à tous les esprits qui comprennent la nécessité de posséder une base solide de croyances philosophiques, à tous ceux qui sentent la portée de la véritable doctrine évolutionniste qu'Hæckel n'a pas craint de comparer à la loi de la gravitation universelle de Newton. Les questions qui y sont soulevées sont de celles qui intéressent puissam- ment tout le monde, et il n’est pas douteux que la « Bibliothéque évolutionniste » soit appelée à un vif succès. Le premier volume de la série est la traduction fran- saise de l'ouvrage capital de Wallace: on ne pouvait mieux débuter. Si la loi de l’évolution est aujourd’hui presque universellement adoptée, grâce au grand cou- rant d'opinion créé surtout par Darwin, l'accord est loin de régner quant aux théories explicatives de cette évolution, et, il faut le dire, dans ces derniers temps ila paru que le darwinisme était un peu en défaveur. M. Wallace reprend les idées de Darwin, en les com plétant par les faits nouveaux, acquis depuis trente ans de controverses, en les envisageant surtout chez les organismes à l’état de nature, et non plus, comme l'avait fait Darwin, chez les animaux domestiques et les plan- tes cultivées, ce qui prêtait un peu le flanc à la criti- que. Les premiers chapitres sont consacrés à une nouvelle démonstration précise des deux bases du darwi- nisme : 1° la lutte pour l'existence: 2° la réalité de la variation continuelle de l'espèce chez la grande majorité des individus, tant pour les organes internes et l'extérieur que pour les instincts aussi bien dans un sens favorable que défavorable à l'individu, . J'en résulle qu’en fin de compte les survivants son évidemment ceux que leurs variations ont rendus plus aptes à échapper aux dangers : c'est là la sélection naturelle, M. Wallace donne ensuite des exemples nouveaux el vraiment démonstratifs de sélection natu- rélle, et examine quelles sont les circonstances qui favorisent le plus la formation des nouvelles es: eces. Il est impossible de résumer les quatre admirables chapitres consacrés à l’étude des couleurs : l'auteur les divise en couleurs protectrices, qui dissimulent l'animal à ses ennemis: couleurs de reconnaissance développées surtout chez les animaux sociables. se réunissant en troupeaux; couleurs prémonitrices contrastant avec les couleurs protectrices, qui indi- quent que leurs possesseurs sont dangereux ou non comestibles; couleurs et ornements sexue s, pour les- quels l’auteur adopte des vues un peu différentes de la sélection sexuelle de Darwin, Enfin il étudie les phé- nomènes ex{raordinaires du mimétisme, par lequel des espèces inoffensives arrivent à mimer des espèces dan- gereuses, ou se confondent absolument avec leur milieu habituel. Je ne puis que citer deux chapitres intéressants : un relatif à la distribution géographique des orga- nismes; l’autre aux preuves géologiques de l’évolution : l’auteur fait ressortir combien sont lacunaires les ren seignements paléontologiques, dans lesquels on à trouvé cependant nombre de preuves directes de la filiation des êtres. M. Wallace analyse avec soin les théories qui cher- 488 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX chent à supplanter celles de Darwin et réfute leurs ar- guments:; notamment les théories d'H, Spencer (in- fluence de l'usage et de la désuétude), celles des néo- lamarckistes américains !, de Semper (action directe du milieu), de Geddes (antagonisme de la croissance et de la reproduction), de Romanes (sélection phy- siologique). Il adopte les vues de Weissmann sur la continuité du plasma germinatif, et la non-hérédité des caractères acquis. Le volume se termine par un chapitre sur le darwi- nisme appliqué à l’homme; M. Wallace accepte que l’homme dérive d’une forme animale inférieure par sélection naturelle; mais il revendique pour nos facul- tés intellectuelles et morales une essence spirituelle sans aucun lien avec la lutte pour l'existence maté- rielle. Certainement le beau livre de M. Wallace va ramener beaucoup de biologistes hésitants aux pures idées de Darwin et donner un regain de vie à la théorie de la sélection naturelle; dans toutes les bibliothèques, sa place est marquée à côté des ouvrages du Maitre, qu'il complète si heureusement, L. Cuévor. Belzung (Er.), Professeur au Lycée Charlemagne. — Anatomie et Physiologie animales, suivies de La Classification. 2° édition avec 622 figures dans le texte. (Prix 6 fr.). F. Alcan, éditeur, 108, boulevard Saint-Germain, Paris, 1891. Cet ouvrage, destiné à l’enseignement des lycées, renferme, en un petit volume, nombre de faits bien classés et clairement décrits. L'auteur a très heureuse- ment choisi, dans l’ensemble des questions relatives à l’anatomie età la physiologie animales, les plus impor- tantes, les mieux connues, celles qu'il ne devrait être permis à personne d'ignorer, et ila réussi à les exposer avec simplicité ef précision, sans rien sacrifier de la rigueur scientifique. Le lecteur trouvera dans son livre une introduction bien comprise à l'étude spéciale et plus approfondie de la zoologie. Trois chapitres relatifs à la classification ont été ajoutés dans la deuxième édition, qui se trouve ainsi constituer un tout complet. Le premier, délicat à pré- senter, traite de l’espèce et des questions qui s’y rat- tachent; le second renferme la nomenclature des prin- cipaux groupes zoologiques, avec de fort belles figures anatomiques d'ensemble ; enfin le troisième développe l’idée générale de l'unité à laquelle conduit la compa- raison des caractères des règnes animés de la Nature. L, O. Milne-Edvwvards (A.), Membre de l'Académie des Sciences, Professeur au Muséum. — La Ménagerie (rapport au Ministre de lInstruction publiqué) broch. un-8° de #1 pages, G. Masson, 120, boulevard Saint-Ger- main, Paris, 1891. L'auteur signale surtout dans cet opuscule l’organi- sation défectueuse de la Ménagerie et réclame des pou- voirs publics les crédits nécessaires au fonctionnement de l’une des parties les plus populaires du Jardin des Plantes. Il énumère les principaux services que la Ménagerie rend à la science, constituant un véritable laboratoire où Mammifères et Oiseaux sont en expérience perma- nenle. La sélection y crée des races susceptibles d’être propagées dans nos forêts ou utilisés par notre agricul- ture, Enfin « les artistes trouvent, parmi les animaux tenus en captivité, des modèles précieux pourleurs études de peinture ou de sculpture. Chaque printemps, plus de trois cents cartes donnant accès dans la Ménagerie, avant l'heure où elle s'ouvre au public, leur sont ainsi (1) Voyez à ce sujet : Priem, le Néo-Lamarkisme en Amé- rique d’après. M. Cope, dans la Revue du 15juillet 1891, 1. II, page # distribuées. Barye, Cain, Fremiet et beaucoup d’autres ont trouvé là des renseignements qu'ils ont su mettre à profit, » Ajoutons que nombre d'artistes travaillant pour l’ameublement fréquentent dans le même but le Jardin des Plantes et puisent dans l’observation des animaux vivants des inspirations souvent profitables au bon renom de l’art décoratif français, Ce triple intérêt, — scientifique, artistique et indus- triel —, paraitrait gravement menacé si, contre notre attente, l’éloquent plaidoyer de M. Milne-Edwards n'obtenait gain de cause. L. O. 4° Sciences médicales. Chor (D' S.) (d'Odessa). — Traitement du charbon par le bicarbonate de soude, d’après la méthode de M. Fodor. Ann. de Institut Pasteur, mai 1891. Deux théories se disputent à l’envi l'explication de limmunité contre les infections microbiennes; l’une, défendue avec grand talent par M. Metchnikoff et ses élèves, celle de la phagocytose, l’autre, celle de la pro- priété bactéricide des humeurs, A l’heure actuelle, dans les deux camps, les arguments pour et contre sont loin de faire défaut, et le résultat obtenu jusqu'iei est un grand luxe d'expériences, toutes fort instruc- tives. Bebring avait pensé que l’état réfractaire des rats blancs vis-à-vis de la bactéridie charbonneuse était dû à l’alcalinité du sang, alcalinité causée par des bases organiques de nature inconnue. Fodor a publié un travail, dans lequel il conclut que l’action bactéricide du sang augmente avec l’alcalinité du liquide, surtout si cette alcalinité est due au bicar- bonate de soude. Ceci lavait conduit à traiter le charbon par le bicarbonate de soude. M. Chor a en- trepris de refaire ces expériences, et il est arrivé à un résultat diamétralement opposé : il conclut de ses ex- périences que l’augmentation non douteuse de l’alca- linité du sang par l'introduction du bicarbonate de soude dans l'organisme n’a, contrairement à l’assertion de Fodor, aucune influence thérapeutique sur la ma- ladie charbonneuse. Dr H. Durrer. Fonsart (D') et Ehrmann, pharmacien. — Re- cherches nouvelles sur la fièvre scarlatine.H. Le- febure, 31, rue Solferino, à Compiègne, 1891. Le milieu militaire est en général excellent pour l'étude précise de la marche d’une maladie épidé- mique. Le regretté D' Fonsart ayant assisté à trois épi- démies successives de scarlatine dans son régiment, a pu étudier le mode de propagation de cette affection. Ses observations le conduisent aux conclusions sui- vantes, ou, pour parler plus exactement, à la confirma- tion du fait suivant, déjà admis avant lui : Les conditions particulières du local ne jouent pas, dans la scarlatine, un rôle aussi important que dans la fièvre typhoïde; Le germe infectieux accompagne les hommes au campement; la dissémination des hommes est le moyen héroïque d'arrêter une épidémie, Le mémoire renferme quelques examens du sang et des urines, dus à M. Ehrmann; des planches représen- tent les débris de squames ; on y voit figurés et décrits de véritables insectes avec des pattes articulées, termi- nées par des crochets; le rôle spécifique de ces insectes nous paraît bien problématique. Comme traitement, le D° Fonsart préconise la sai- gnée, La scarlatine est une maladie à forme congestive, et les émissions sanguines, d’après lui, donneraient des résultats remarquables; aussi les emploie-t-il sous toutes les formes : saignées, sangsues auxfapophyses mastoides et ventouses scarifiées. 1. 0, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 489 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 29 juin 1891. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. S. Mangeot : Des surfaces qui possèdent la symétrie courbe des sys- tèmes de plans. — M. M. Brillouin : Déformations ho- mogènes finies. Energie d’un corps isotrope. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M.F. Beaulard a étudié la biaxie du quartz comprimé, dans le cas où l’on fait varier l’angle d'incidence du faisceau de lumière pola- risée. L’ellipse du faisceau émergent était analysée au moyen des relations précédemment indiquées par Pau- teur, Des valeurs obtenues, il conclut : 1° que le pou- voir rotatoire reste constant; 2° que lorsque l’angle d'incidence, compté à partir de l’ancien axe optique, aug- mente, l'excentricité de l’ellipse diminue d’abord pour augmenter ensuite; on à un cercle lorsque l'incidence correspond à l’axe optique dans l’air. Il établit ensuite les relations qui lient les différences de marche, l'angle des axes optiques et les indices principaux à l'angle d'incidence et à la pression. — M. A. Witz montre qu’on ne peut calculerlerendementphotogénique absolu d’un foyer de lumière faute d’une unité absolue de quantité de lumière; on ne connaît pas en effet de foyer transformant intégralement les calories disponibles en radiations lumineuses. Maison peut mesurer les rende- ments relatifs des diverses sources, L’arc voltaique a de beaucoup le rendement le meilleur; si on veut le supposer égal à 0,5, celui d'une bougie de stéarine serait 0,01 et celui des meilleures lampes à gaz à ré- cupération 0,02. Ayant remplacé dansun établissement l'éclairage au gaz par l'éclairage électrique, la force motrice étant fournie par un moteur à gaz, l’auteur a constaté que malgré tous les intermédiaires (moteur, dynamo, canalisation et lampes) le rendement du gaz est notablement meilleur sous la seconde forme que sous la première. Le calcul des divers rendements du système conduit pour lerapportdes rendements photo- géniques du gaz et de l'électricité à une valeur du même ordre que celle donnée plus haut. — MM. Guerre el Martin décrivent un timbre électro-magnétique, ou avertisseur chantant, dont les vibrations sont entrete- nues par un électro-aimant, — M. Ch. André compa- rant les courbes de lPélectricité atmosphérique four- nies à Lyon par l’électromètre enregistreur de M. Mas- cart, avec les courbes de l'humidité relative relevée à la même station, signale une remarquable ressemblance entre ces courbes, qu'il s'agisse des variations diurnes ou des variations annuelles. — M. Berthelot, à propos d’un travail récent de M. M. Traube, communique di- verses observations qu'il a faites sur les persulfates, observations qui confirment l'existence de ces sels en tant que composés distincts; rien ne justifie la suppo- sition faite par M. Traube de l'existence d’un sulfu- rylholozydneutre.—M.A. Haller atraité le camphrepar l’éthylate de sodium en tube scellé à 200%; tout le cam- phre a été transformé en bornéol; le résultat a été le même avec les propylate, isobutylate et amylate de sodium, sauf que le rendement a été moins élevé en bornéol etplus élevéen produit secondaires complexes, Par contre, le benzylate de sodium dans ces mêmes conditions a donné du benzylcamphre, — M.Ch. Lauth a étudié l'oxydation des corps azoïques ; d’une facon gé- nérale, il a constaté que lorsqu'on soumet ces subs- tances à froid à l’action de divers agents oxydants, le groupement azoïque se scinde en donnant d’une part un corps diazoïque et d’autre part des corps de la série quinonique. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Dareste à suivi la for- mation du mésentère et de la gouttière intestinale dans l'embryon de la poule par sa “méthode de coloration à la teinture d’iode, IL à pu observer ainsi des faits nou- veaux, notamment sur l'union des deux moitiés de l'aire vasculaire, — M. Chibret affirme que l'exercice musculaire produit chez l’homme entrainé une aug- mentation de l'urée et une diminution chez l’homme non entrainé ou lorsque l'exercice est poussé assez loin pour amener la courbature; les variations de quantité des urates sont en raison inverse de celles de l’'urée. — M, J. Chatin a reconnu que le Nématode de la betterave (Heterodera Schachtii) est pourvu d’un ai- guillon buceal, Cet aiguillon diffère pour le mâle et pour la femelle; de plus, ce stylet, qui est une dépen- dance de la euticule, tombe à chaque mue et présente pendant l’évolution du parasite une série de formes différentes en rapport avec les conditions de la vie de l'animal pendant chacune de ces phases. — M. P. Le- sage a examiné la facon dont marche la différenciation de l’endoderme lorsque, par une série de coupes, on re- monte à partir du sommet de la racine ; la marche de la différenciation varie beaucoup suivant les conditions du développement; elle peut différer d’un côté à l’autre de la mème coupe, — M. A. Giard propose de grou- per sous le nom de Cladosporiées entomophytes divers champignons RES des Insectes, vivant aussi en saprophytes, et ne tuant les insectes que par l’obs- truction des voies respiratoires, Dans ce groupe, dis- tinct des Hypocréacées et de leurs formes imparfaites, (Isaria, Botrytis, etc.) rentre le parasite récemment si- unalé par divers observateurs sur les criquetsalgériens. M. Giard lui donne le nom de Lachnidium Acridiorum (n. gen. n. sp.) — M.Ch. Brongniart communique diverses observations qu'il a faites en Algérie sur les criquets envahis par le Cryptogame. Il a remarqué que la plupart des femelles mouraient sans avoir pu pondre. Il a obtenu des cultures du parasite. — M, À Girard a fait essayer en 1890 la bouillie bordelaise sur des cultures de betterave du département de l'Oise en- vahies par un champignon, le Peronospora Schachtiü; les résultats ont été satisfaisants, — M. Dubois adresse le résumé des essais qu'il a faits sur l’action insecticide de solutions de monosulfures de potassium ou de so- dium; l’éclosion des œufs des acridiens est empêchée par une légère pulvérisation d'une dissolution de mo- nosulfure “de potassium marquant 10° Baumé ; les in- sectes parfaits sont foudroyés par le même procédé. — M. Trécul lit une note sur des matières alimentaires intoxiquées, — M. Daubrée, dansdes communications antérieures, à démontré, par une série de recherches expérimentales comme par des observations sur la na- ture, que ce sont des fluides élastiques emprisonnés sous fortes pressions dans les réservoirs souterrains qui ont determiné la perforation à travers l'écorce ter- restre des cheminées verticales (diatrèmes). Il attribue à la pression de ces mêmes fluides Pélévation jusqu'à la surface de la terre et presqu’à des allitudes considé- rables des laves et des matières volcaniques qui cons- tituent les cônes si caractéristiques; pour donner à ceux-ci leur forme aiguë, les matériaux ont dû sortir du sol dans un état voisin de l’état solide. L'hypothèse que c’est à des pressions gazeuses internes que sont duës ces élévations de matières trouve une confirma- tion dans ce fait que la plupart des groupes de volcans que l’on observe en diverses régions de la terre pré- sentent chacun une altitude caractéri tique, autour de laquelle oscillent plusou moins les altitudes de chaque 490 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES cône. Cette altitude moyenne serait la mesure de la pression des gaz danslesréservoirs souterrains de cette région. Mémoires présentés : MM. Ch. Brongniart ef Mar- chand : Observations sur les cultures du Botrytis acri- diorum en milieux artificiels, — M. A. Cros : Le télé- plaste. Exemple de transformation de la forme en rythme et réciproquement. Transmission d'une forme au loin sans transport de matières, — M. J.-L.P. Du- roy : « Sur un nouvel iodure organique, l’iodure d’an- tipyrine, » — M. À. Basin : Mémoire sur la navigation aérienne. — M. D. Billy : Note sur le mouvement vi- bratoire obtienu en posant un bloc de plomb réctan- gulaire sur la partie cintrée d’une plaque de cuivre en forme de tuile, chauffée entre 80° et 280, (Ce phé- nomène a déjà été observé en 1831 par M. Trevelyan el étudié par Faraday.) Séance du 6 juillet 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Boussinesaq : Sur la manière dont les vitesses, dans un tube cylin- drique de section circulaire, évasé à son entrée, se distribuent depuis cette entrée jusqu'aux endroits où se trouve établi un régime uniforme, — M. K, Tisse- rand : Sur l'inégalité lunaire à longue période due à l’action de Vénus et dépendant de l'argument / + 16 l' — 8 l'; l'auteur montre que les termes qui contien- nent en facteur la quatrième puissance de l’inclinai- son, {ermes négligés par Delaunay, peuvent avoir une influence sensible et diminuer le coefficient de J'iné- galité en question du dixième de sa valeur, soit 1'6 en- viron. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. Mercadier a appliqué à des aciers contenant à et 25 °/, de mickel sa mé- thode de détermination du coefficient d’élasticité dy- namique; ce coefficient se déduit au moyen des for- mules de Kirchhoff lorsqu'on a déterminé le son fonda- mental et la première harmonique d’un disque du métal ayant des dimensions déterminées; dans le cas de ces aciers-nickel, le coefficient d’élasticité dynamique dif- fère notablement du coefficient d’élasticité statique déduit des mesures ordinaires d’allongement ; de plus, M. Mercadier note qu'une très forle proportion de nickel rend l'acier isotrope. — M. G. Hinrichs indique deux méthodes différentes pour calculer le volume moléculaire d’un composé donné ; il applique la pre- mière, dite statique, aux paraffines normales qu'il assi- mile à un prisme rectiligne d’un nombre x de joints ou nœuds identiques se terminant à chaque extrémité par un seul atome d’ydrogène, l’autre, dite dynamique, aux éthers des acides gras, qu'il assimile à des cylindres de révolution engendrés par « les molécules révolvant autour de deux axes naturels dont le moment d'inertie est minimum », — M. E. Péchard, faisant réagir l’eau de baryte sur l’acide chromique addilionné d’eau oxy- génée a observé la formation d’un précipité de couleur chamois qui, après dessiccalion, détonne violemment par la percussion ou la chaleur ; ce composé, analysé par déflagration dans le vide, semble répondre à la formule BaCr0Ÿ. — M. F. Parmentier a constaté la présence de l’acide borique dans la plupart des eaux minérales de la région du Centre; il indique un procédé de do- sage de pelites quantités de ce corps reposant sur la propriété suivante : l'acide borique vire le tournesol dans des conditions déterminées, et n’exerce aucune action sur l’hélianthine virée au jaune par les al- calis; on obtient la quantité de ce corps par la diffé: rence entre deux dosages acidimétriques effectués suc- cessivement avec ces deux indicateurs, — M, H. Mois- san a constaté les propriétés iodurantes énergiques du triiodure de bore; ce corps réagit à froid sur le chloro- forme pour donner de l’iodoforme et du chlorure de bore; avec le tétrachlorure de carbone, il donne à froid le tétraiodure de carbone, M. Moïissan étudie en détail cette réaction et le composé auquel elle donne nais- sance. — M, A. Haller, faisant réagir l’aldéhyde ben- zoique sur le camphreiodé, aobtenu le benzolcamphre ; par des réactions analogues, il a obtenu la combinai- son des diverses autres aldéhydes aromatiques avec le camphre; tous ces composés fournissent par réduction au moyen de l’amalgame de sodium les alcoylcamphres correspondants, L'atome de carbone auquel sont liésles radicaux alcooliques étant rendus asymétriques par cette liaison même, il peut exister deux isomères sté- réochimiques de chaque dérivé alcoylé, Au point de vue du pouvoir rolatoire et de l’énergie réfringente moléculaire, ces corps présentent des propriétés re- marquables dont M. Haller se propose de poursuivre l’étude. 39 SCIENCES NATURELLES, — M. A. Malaquin a étudié chez les Syllidiens (annélides) l’ordre d'apparition des diverses parties du parapode pendant le développement; il a constaté que chez les types nombreux où cet or- gane est dégénéré, la régression suit exactement l'or- dre inverse de l’apparition. — M, V.Villem a étudié la structure des ocelles de la Lithobie : ses observations concordent pour les points principaux avec la descrip- tion de Grenacher. — M. Marey décrit le dispositif au moyen duquel il a réussi à photographier des insectes pendant le vol; le temps de pose à pu être réduit à un vingt-cinq millième de seconde, grâce à l’emploi d’un éclairage puissant projetant directement lesrayons sur l’objectif; l’insecte est vu en silhouette, soit fixé par une partie de son corps, soit voletant contre une vitre placée entre lui et la lumière; pour le reste, le disposttif est l'appareil chronophotographique employé antérieurement, mais dont les fenêtres ont été consi- dérablement diminuées de largeur. —M.Lannelongue : Méthode de transformation prompte des produits tu- berculeux des articulations et de certaines autres par- ties du corps humain (voir le numéro précédent de cette revue). — MM. Pomel et Ficheur ont étudié les for- mations éocènes de la région située au nord et au nord-ouest de Constantine, et leurs observations sur ce point confirment leurs assertions antérieures sur la succession des couches de ce terrain en Algérie. Mémoires présentés. — M.J. Balmy : Etude sur la ma- ladie des pommes de terre. L. LAPicoue. ACADEMIE DE MÉDECINE Séance du 23 juin 1891. M. Gariel, présente un appareil destiné à prévenir les accidents provenant des poêles mobiles. C’est un appareil électrique mettant en marche une sonnerie quand il y a refoulement de produits de combustion dans l’intérieur du poêle, — M. Cornil publie deux expé- riences qui lui ont été communiquées il y a quatre ans par un chirurgien étranger. Dans un premier cas, un fragment d’une tumeur du sein (sarcome fasciculé) fut inséré, au moment de l'opération, sous la peau du sein de l’autre côté. Au bout de deux mois, il existait un noyau cancéreux très net au point inoculé, La malade fut alors opérée, On constata qu'il s'agissait bien là d'une masse cancéreuse ayant sa vitalité propre, ses vaisseaux et la même structure que la tumeur primi- tive du sein d’où provenait le fragment inoculé, La malade succomba, quelque temps après, à une maladie intercurrente. On ne trouva dans aucun organe le moindre noyau cancéreux, Dans une seconde opération, le mème chirurgien inséra sous la peau du sein de l’autre côté, un petit fragment de la tumeur épithéliale qu'il venait d'enlever à l’autre sein. Au bout de trois semaines on constata l’existense d’un noyau cancéreux dans l’autre sein au point inoculé. La malade refusa de se soumettre à une nouvelle opération et quitta l'hôpital avec son nouveau noyau cancéreux ainsi greffé. Elle a été perdue de vue, — M. G. Sée : Sur l’élasticité de contraction du cœur et sur les médicaments régu- lateurs du cœur, Séance du 30 juin M. G. Sée : Sur l’élasticité de la contraction du cœur “et sur les médicaments régulateurs du cœur, L'auteur ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 491 termine cette communication qu'il a commencée dans la précédente séance, — M. Houzel : Fracture de la base du crâne ; enfoncement du pariétal droit; trépa- nation, guérison. — M. Dury : Mémoire sur l’iodure d'antipyrine. L'auteur compare l’iodure, le biiodure et le triiodure d’antipyrine aux sels potassiques ef so- diques de l’iode. Il fait remarquer que la différence des bases modifie profondément le mode d'action des iodures et leur absorption, l’iodure d’antipyrine étant bien plus facilement toléré et s’absorbant sans aucun des inconvénients que présentent les iodures alcalins, L'Académie procède à l'élection d’un membre titu- laire dans la section d'anatomie et physiologie. M, Chau- veau est élu, Séance du 7 juillet M. Rochard : Rapport sur un travail de M. Jeannel traitant de la dépopulation de la France. — M. Lavaux: Traitement des tumeurs de la vessie, Dans différents cas d’hémorragies vésicales ou urétrales, l’auteur a obtenu de bons résultats par l'emploi d'injection d’eau boriquée à 4 pour 1000, très chaude, — M, Lanne- longue : Méthode de transformation prompte des pro- duits tuberculeux des articulations et de certaines autres parties du corps humain!. —MM,. Pilat (Lille) et Spillmann (Nancy) ont été élus. correspondants na- tionaux. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 27 juin 1891. M. A. Giard a réussi à innoculer au ver à soie l’Isaria du ver blanc, mais seulement par piqûre sous- cutanée; les procédés de contamination indirecte n’ont pas abouti, — M. J. Dejerine signale une déformation particulière de la cage thoracique, saillie des épaules en avant avec enfoncement du sternum, qui accom- pagne certaines atrophies musculaires.—A propos d’une note de M. R. Dubois, du 6 avril 1889, où cet auteur rapportait n'avoir pas trouvé d'action soporifique par les urines des marmottes en hibernation, M. L. Errera rappelle que suivant sa théorie les produits narcotiques formés par l’organisme pendant la veille s'accumulent dans les tissus; il n’est donc pas étonnant qu'on ne les retrouve pas dans l'urine, et cette constatation négative ne prouve rien contre la théorie, — M, Camara Pes- tana a tué des cobayes par injection des toxines du tétanos séparées des microbes, et recherche ensuite, en iujectant à des souris les extraits des différents or- ganes, comment s'effectue la diffusion du poison, Ses conclusions sont les suivantes : l'absorption se fait par le sang; les poumons, la rate, les reins et principale- ment le foie retiennent le poison; la toxine ne s'éli- mine pas parles urines, — MM. Leclainche et Greffier ont recherché le bacille de Koch dans les milieux de l'œil des bovidés tuberculeux : ils ont aussi inoculé ces humeurs à des cobayes; le résultat a toujours été négatif, L'examen de l’œil n'aurait done pas pour le diagnostic de la tuberculose bovine l’utilité que lui at- -tribuait M. Mandereau.— A propos de la note de M, Ri- chet sur le rapport du poids du cerveau au poids du corps (30 mai), M. L. Manouvrier rappelle que depuis bien longtemps il a proposé de diviser le poids de l’en- céphale en deux parties, l’une proportionnelle à la masse du corps, l’autre proportionnelle au degré d’in- telligence du sujet. M. Manouvrier ajoute qu'il ne faut pas considérer cette seconde partie comme absolument indépendante de la masse du corps, mais seulement comme moins influencée par les variations de celle-ci que la première, — M, E.Regnault a suivi l’évolution de la prostate chez le chien; c’est une glande en tube ra- mifiée; le tissu conjonctif domine chez l'animal jeune et chez l'animal vieux, l’épithélium chez l'animal adulte. 4 Voir à ce sujet la Revue du 15 juillet 4891, page 433. Chez celui-ci, l’éjaculation produit une modification des cellules glandulaires. — M. L. Chabry électrolyse une solution de potasse pour obtenir des pressions très élevées (1200 atmosphères) en vue de l'étude de l’action biologique de ces pressions, — M, Pilliet à étudié un estomac de Lamantin et un estomac de Balénoptère. La conclusion de ses recherches est que par sa structure et ses dispositions anatomiques l’esto- mae des Cétacés forme un type à part dans la série des mammifères; il peut être rapproché de celui des rumi- nants. — M, A. Charpentier démontre l'existence d’un temps perdu dans l'excitation des centres visuels au moyen de l'expérience suivante : deux secteurs blanes placés à quelque distance l’un de l’autre sur un disque en rotation semblent se rapprocher l’un de l’autre, et d'autant plus que la rotation est plus rapide. — M. d’Arsonval, qui dans diverses communications à insisté sur l'importance physiologique de la forme de la courbe de variation du potentiel électrique, pré- sente un appareil dérivé de son galvanomètre àcircuit mobile, qui est destiné à inscrire cette forme, Séance du 4 juillet 1891, M. Hernandez a fait des recherches sur l'action physiologique des cultures stérilisées du vibrion de Metschnikoff; on trouve dans ces cultures une subs- tance vaccinante qui est volatile; le résidu de la dis- tillation retient les substances toxiques, — M Gley à constaté que le foie arrête environ la moitié de la co- caïne injectée dans la veine porte: si l’on injecte le poi- son dans le bout périphérique de l’arlère fémorale, le réseau capillaire de la jambe en retient aussi une par- tie, mais les caractères de l’intoxication ne sont pas modifiés comme ils le sont après injection dans la veine porte. -- M, Laborde a continué ses recherches sur l’action physiologique de la strontiane ; il a donné à un chien pendant plusieurs mois 7 grammes par jour de phosphate de strontiane sans observer d’autre phé- nomène qu'un appétit excessif, A l’autopsie, il n’y avait pas de lésion; les os contenaient un peu de stron- tiane, — M. Binet a étudié la structure des connectifs de la chaîne ganglionnaire sous-intestinale du hanneton; il y a deux espèces de fibres distinctes par leurs carac- tères comme par leurs rapports ; les nerfs latéraux naïis- sent par deux racines, formées chacune par une de ces espèces de fibres, — M. d’Arsonval a fait des recher- ches sur l’excitabilité mécanique du nerf pour le com- parer à l’excitabilité électrique; il a reconnu la même loi, c'est-à-dire que l'intensité de la réponse dépend bien plus de la vitesse avec laquelle varie la pression exercée sur le nerf que de cette pression elle-même. — M. Grigoreseu a étudié la force dynamométrique des enfants. — M, Nicati envoie une note sur la chirurgie des annexes de la glande des procès ciliaires, — M.Roger a étudié les substances solubles des cultures du streptocoque de l’érysipèle; il y a une substance toxique, précipitable par l'alcool et se détruisant par la chaleur, qui favorise l'infection et une substance vaccinante, qui résiste à un chauffage à 104°. — MM. Ar- thaud et Magon, comparant les lésions qu'ils obser- vent chez les chiens morts de la thyroïdectomie avec celles observées par l’un d’eux à la suite de la névrite du vague, pensent que c’est à l’irritation de ce nerf qu'il faut rapporter les accidents de la thyroïdectomie — M. Quinquaud, en présentant cette note, dit que, pour lui, il pense que la survie doit être fréquente après l’ablation du corps thyroïde, ce qui indiquerait que le rôle physiologique de cette glande n’est pas essentiel. — M. Gley estime que les expérimentateurs ci-dessus n'ont pas un assez grand nombre d'expériences à op- poser à toutes celles, très nombreuses, qui sont en contradiction avec leur opinion, — MM. Albarran et Lluria ont, sur une femme atteinte de cystite, pra- tiqué le cathétérisme permanent des uretères après lavoir essayé sur un chien. Cette opération donne de bons résultats, L. LAPICQUE, 192 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 17 juillet 1891. L'étude des lignes télégraphiques comprend quatre parties : l'isolement, la capacité, la self-induction el l'induction mutuelle, Les lignes francaises n’ont encore été jusqu'ici l'objet d'aucune mesure de ce genre. M. Massin aborde le premier cette question. La pre- mière difficulté consiste à trouver une ligne qui ne puisse être influencée par aucun fil voisin ou par la proximité des rails de chemin de fer L'auteur a pu en trouver une de quelque étendue entre Bordeaux et Pauillac, et a eu l’occasion d’étudier en tout trois cir- cuits différents. L’isolement très médiocre (4, 5 à 8 mégohms seulement) a nécessité, dans l'emploi des mé- thodes de mesure connues,des précautions spéciales pour éviter les erreurs dues à la déperdition. En ce qui con- cerne la capacité, M. Massin acomparéles qualités d'une ligne simple, c’est-à-dire avec prises de terre aux deux bouts, avec celles d’une ligne bouclée, ou ligne avec fil de retour, Les résultatsont été en faveur de la première. On sait en effetque la qualité d’uneligne estdonnée par la valeur du produit CR. Or pour une ligne simple, des mesures {très concordantes ont donné pour C la valeur moyenne 0,0097 microfarad. Tandis que pour une ligne bouclée, dont par suite la résistance R se trouvait dou- blée, la capacité est loin d’avoir diminué de moitié : elle s’est trouvée égale à 0,007. Pour les ligues souterraines il n’y a plus aucune différence entreles deux sortes de circuits : le produit CR reste rigoureusement constant. Les mesures de self-induction et d’induction mutuelle des lignes télégraphiques n’ont encore donné lieu à aucune conclusion nouvelle. — M. Hospitalier fail ensuite une très intéressante conférence sur les moteurs à courants alternatifs. Il classe les différents moteurs et discute les qualités de chacun d’eux au point de vue de la production de l'énergie par les courants alterna- tifs; cette importante question sera prochainement exposée aux lecteurs de la Revue, dans un article spé- cial, par M. Hospitalier lui-même, Edgard HAupié, SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 1°* juillet 1891. M. Ferdinand Jean montre l’intérèt qu’il y a pour la tannerie à obtenir des jus riches en tannin et décrit un extracteur automatique de son invention qui permet d'obtenir les jus forts à l'abri de l’air et à une tempé- rature peu élevée afin d'éviter laltération du tanuin et la coloration de la solution. M. Ferdinand Jean donne quelques indications sur le dosage des matières astringentes et fait connaître un nouveau tannomètre qui permet de déterminer le tannin et les matières fixables par la peau. — M. Meyerhoffer a étudié les hydrates du chlorure d’étain SnCl'; il existe des sels à 8, 5, 4 et 3 molécules d’eau. Chaque hydrate à en général deux températures de transformation, une à laquelle il se forme un hydrate supérieur, et une autre où il se décompose en un hydrate inférieur et une solution saturée, Les limites d'existence des hydrates sont 19°, 56°, 639, 83°; en présence d’une solution satu- rée, chaque hydrate est stable entre deux de ces tempé- ratures, le sel à 5H20, par exemple entre 19 et 560, etc. En outre, le trihydrate en contact avec le chlo- rure stannique saturé d’eau est stable-entre — 35° et + 839. À cette température, le trihydrate soit seul, soit en présence d’une de ses deux solutions saturées, forme deux couches non miscibles dont une est de l’eau saturée de chlorure stannique, et l’autre du chlo- rure saturé d’eau. À une température plus élevée, il y a miscibilité complète. L'étude des solubilités des di- vers hydrates confirme les prévisions fondées sur la connaissance des températures de transformation qui doivent être régardées comme des constantes impor- tantes dans l’étude des hydrates, — M, Le Chatelier confirme les résultats de M. Shaw sur les limites d’in- flammabilité des mélanges gazeux; ses expériences lui ont montré que, comme l'avait dit cet auteur, ces li- mites peuvent être déterminées à un millième près. M. Le Chatelier propose d'utiliser ce fait pour le dosage de petites quantités de gaz combustible mélangées à l'air. Séance du 10 juillet 1891, M. Béhal a cherché à établir la constitution de l'al- déhyde caprylique CSH!60, il a préparé ce corps par quatre procédés différents. Distillation du savon de ricin, oxydation de l'alcool caprylique, Action du chlo- rure d’heptoyle sur le zinc-méthyle, et enfin hydra- tation du caprylidène. L'oxydation donne de l'acide caproique normal et de l'acide acétique, dans tous les cas, et les composés obtenus par les quatre méthodes sont identiques à tous les points de vue. Le corps connu sous le nom d’aldéhyde caprylique n’est donc pas une aldéhyde, mais une cétone : la méthyl hexyl- cétone, — MM. Béhal et Auger ont étudié l’action du chlorure d’éthylmalonyle sur les hydrocarbures, en présence du chlorure d'aluminium ; il se forme des dicétones, dont ils ont étudié complètement un grand nombre, — M. Güntz a étudié la formation de sous- chlorure d’argent par l’action de la lumière sur le chlorure d'argent; cette formation est accompagnée d’une absorption de chaleur de 28°, Le sous-chlorure d'argent se décompose ensuite en argent et chlore ga- zeux.— M,J.-A. Le Bel a réussi à obtenir à volonté une forme anomale du chloroplatinate de diméthylamine, qui avait été signalée par M. Vincent, mais qu’on n'avait pu reproduire, Ces cristaux dégagent un gaz quand on les dissout dans l’eau, l’auteur se réserve d’étudier ce phénomène, — M. Guerbet, en traitant le camphre en solution chloroformique par l’acide hypochloreux étendu, a obtenu un composé qui, traité par lacétate de potasse en solution alcoolique, puis saponifié par la potasse, lui a fourni un composé CI0H!803 qui pré- sente des réactions nettement acides et donne des sels bien cristallisés, distillé, il perd de l’eau et donne l’oxycamphre C$H!60?, — M. de Gramont a réussi à reproduire la Datholite 2 CaO, 2Si02?,Bo?20%,H°0 en fai- sant agir le borate de soude sur du silicate de chaux précipité; dans le tube d'acier platiné de M. Friedel, à la température de 400°, C’est le premier exemple d’un silico-borate produit par synthèse. — M. Hanriot pré- sente une réclamation de priorité de M. Tollens au sujet des réactions colorées de l’orcine et de la phlo- roglucine avec les sucres en Cÿ, colorations décrites récemment par M. Bertrand. — M. Gautier présente une note de M. Crépieux sur les oxycétones aroma- tiques. A. COMBES, A la dernière séance de la Société (24 juillet), M. H. Le Chatelier a présenté la Note suivante, qu'il nous prie d'insérer : «M, Le Chatelier revientsur la discussion relative aux dissolutions de chlorure du cobalt pour répondre à des critiques et affirmations erronées que M. Combes a produites pour la première fois en rendant compte de cette discussion dans la Revue générale des Sciences. En premier lieu, il est inexact,qu'après avoir attribué les variations de coloration à des changements d'hydra- lation, M. Le Chatelier ait renoncé à maintenir ses af firmations premières. I les a seulement complétées en montrant que l’hydratation doit être accompagnée d’un dédoublement moléculaire, comme cela se produit en chimie organique dans la saponification des éthers, des anhydrides d’acide etc, En second lieu M. Combes conteste l’insolubilité de l’oxychlorure de cobalt par raison d’analogie avec les oxychlorures solubles de chrome et composés semblables. Les analogies contraires avec l'oxychlorure de zinc qui avaient été invoquées au cours de la dis- cussion pourront sembler mieux justifiées. Quoiqu’ilen ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 193 soit des analogies, l'expérience directe, qui seule fait loi, montre que la solubilité de l’oxychlorure de cobalt est inférieure à +, autrement dit est pratiquement nulle. Enfin pour achever d'établir le peu fondé de la théo- rie de l’hydratation M. Combes ajoute que pour obtenir le passage du rose au bleu, il suffit d'ajouler dune solu- tion très diluée de chlorure de cobalt un peu d’une solution également diluée d'acide chlorhydrique. La solution d’a- cide chlorhydrique à laquelle est accolée ici l’épithète de très diluée renferme en réalité au moins 300 grammes d'acide par litre et doit être employée en très grand excès, » SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 15 juillet 1891, M. E. Lemoine: Sur les transformations par continuité des formules relatives au triangle, des propriétés du triangle, des coordonnées d’un point lorsque celles-ci s'expriment au moyen des éléments du triangle, des courbes dont la définition est liée au triangle. — M. Bioche : Sur une classe de surfaces gauches. Les surfaces dont les lignes asymptotiques se transforment les unes dans les autres par homographie (les points correspondants étant sur une même génératrice), et dont les génératrices appartiennent à un complexe li- néaire sont : 1° les surfaces dont les génératrices ap- partiennent à une congruence linéaire; 2° les trans- formées homographiques de certaines surfaces ana- logues aux surfaces spirales. — M, Raffy :1. Sur cer- taines surfaces de révolulion dont on peut trouver une infinité de déformations. Il. Sur l'intégration des frac- tions rationnelles, M. Raffy montre que certaine re- cherche relative à cette question conduit au problème suivant, tenant à la fois à la théorie des formes et à l'analyse indéterminée, et dont la solution semble dif- ficile : Etant donnée une équation algébrique irréduc- tible à racines toutes distinctes existe-t-il des formes linéaires dont les coefficients soient des racines de l'équation proposée ef qui s’'annulent pour des sys- tèmes de valeurs entières des variables ? La Société suspend ses séances jusqu'au mercredi ; novembre. M. »'OcAGxe. SOCIÉTÉS MARITIMES SCIENTIFIQUES INSTITUTION OF NAVAL ARCHITECTS. Session 1891. (Suite.) M. Thomas Mudd. — Sur la construction des ma- chines et chaudières marines. — Parmi les inconvé- nients que présente le système ordinaire de con- struction des chaudières, se trouve la difficulté de faire l'étanche à la rencontre de l'enveloppe cylindrique avec les tôles plates de la facade et du fond. Le couvre- joint intérieur de l'enveloppe est aminci, et serré entre celle-ci et la pince également amincie, formée par le bord rabattu de la tôle plate. Mais ce joint est mauvais et il se produit souvent des fuites par l’extrémité de la couture longitudinale des tôles d’enveloppe. En outre les rivets du bas, dans les coutures circulaires, sont sujets à la corrosion et difficiles à remplacer, Enfin, l'enveloppe cylindrique et le bord tombé doivent être ajustés très exactement : si le dernier a un diamètre trop faible, l’autre se gondolera, sans qu'on puisse mater la boursouflure qui fuira toujours devant le ma- toir; s’il est trop fort, au contraire, l'enveloppe aura des joints ouverts. On a proposé de souder les extré- mités des joints des tôles plates de facon à ce que le bord tombé forme une surface cylindrique continue; mais la difficulté provenant du couvre-joint longitu- dinal et celle de l’ajustage subsistent, — M. Mudd re- mèdie à tous ces inconvénients en rabattant non plus le bord des fonds, mais celui de l'enveloppe cylin- drique. Rien n'empêche alors de souder les extrémités des joints longitudinaux, et le bord tombé forme ainsi une surface continue, La facade et le fond ne sont plus que des disques plats. On peut souder auss! les extrémités de leurs joints. On n’a plus de difficulté avec les couvre-joints qu'on peut arrêter plus tôt, pas d’ajustage tubulaire ; les rivets n'étant plus dis- posés radialement, mais longitudinalement, sont moins sujets à s’oxyder, et en tous cas, faciles à remplacer, car les foyers ne gênent plus. Ce système avait été employé par certains constructeurs dans des chau- dières en fer; mais pour lacier, on redoutait les effets de la soudure. L'auteur l’a appliqué sur plus de 200 chaudières en acier, sans difficulté ni accident d'aucune sorte. La soudure n’a d’ailleurs pas d'efforts de traction à subir, car les couvre-joints qui vont jus- qu'au fond du congé supportent toute la tension; et d'autre part, la tôle plate forme couvre-joint des parties réunies par la soudure, Quant aux bords tombés de l'enveloppe, acier supporte aisément le pliage néces- saire, dont le congé a un assez grand rayon. Les chauffes locales n’y produisent jamais de fatigue appa- rente; pourtant il est prudent de recuire le pourtour, après la soudure et le rabatfage des bords, dans un foyer annulaire où l’on place la chaudière verticale- ment. On à reproché aux joints circulaires des extré- mités de faire travailler les rivets à la traction, au lieu du cisaillement, Pour le corps du rivet, il n’y a pas d’inconvénient, l'acier travaillant très bien à la trac- lion; et quant à la tenue elle est assurée de la manière suivante : le fond est rivé à la riveuse hydraulique qui forme une tête de chaque côté de la tôle; la facade, par laquelle on termine, est rivée à la main; à l’inté- rieur est la tête du rivet ; à l'extérieur une fraisure sur presque toute l'épaisseur. Les joints sont, du reste, à deux rangs de rivets. Il faut observer de plus que ces rivets travaillent peu, car les (irants prennent la plus grande partie de l'effort. Dans les chaudières de grandes dimensions, on met d’abord en place les tôles plates du haut et du bas; on les réunit par une bande annulaire de même épaisseur, qui rend le pourtour continu; et l’on applique par dessus la tôle du milieu qui sert de plaque de queue aux tubes. — Forage des tubes d'élambot. — M. Mudd indique une méthode op- tique pour forer les tubes d’éftambot avec la précision nécessairé, qui est d'autant plus difficile à réaliser que leur longueur est plus faible, et que leur axe doit coincider très exactement avec celni de la ligne d’ar- bres. Il fait usage d’un alésoir à axe creux, dans lequel on adapte une lunette permettant de repérer le centre de la ligne d'arbres indiqué sur un tableau que porte la plaque de fondation de la machine, La position de lalésoir est ainsi facile à rectifier. — Montage des arbres coudés. — Il est d'usage dans les spécifications de machines d'imposer aux constructeurs de finir les portées de l’arbre après l’assemblage des différentes pièces. Ce serait suffisant si l’on n'avait en vue que le centrage de l'arbre entier; mais il y a d’autres condi- tions à remplir : les soies des manivelles doivent être parallèles à l'axe de rotation; souvent aussi les divers bouts d'arbres sont interchangeables et réversibles; il faut done que les manchons d’accouplement aient leurs surfaces de contact rigoureusement perpendi- culaires à l’axe, et bien centrées sur celui-ci. Il ne suffit donc pas que l’ensemble soit tourné ; mais il est indispensable que chaque troncon soit exactement travaillé, A cet effet, M. Mudd achève d’abord les soies ; puis il passe au tour un bout d'arbre, et le règle d’après la soie en le faisant tourner pendant qu'un niveau d'eau posé sur celle-ci indique les déplacements à donner à l’axe pour le rendre parallèle à la soie, Le bout d'arbre est alors achevé; les portées en sont tour- nées; les manchons planés, On rapproche les diffé- rents bouts, on perce les trous, on met en place les boulons d'assemblage, et l'arbre ainsi monté est porté sur le tour, afin de contrôler l’ajustage. S'il y une inexaclitude, elle ne peut provenir que du boulonnage, qui est seul à retoucher. — Garnitur'es de pistons. — Les cylindres à haute pression s’usent souvent assez vite en raison du frottement exagéré des garnitures. En 49% ACADÉMIES ET SOCIËTÉS SAVANTES réalité il n’est pas aussi nécessaire qu'on le pense d'employer de puissants ressorts derrière les bagues pour les appliquer contre la paroi du cylindre. Ce n’est as en effet la pression atmosphérique qui règne dans e logement des ressorts ; il s’y établit, avec de légères fluctuations, une pression moyenne qui contrebalance dans une large mesure celle de la vapeur pendant la période d'introduction et la première partie de la dé- tente. Même, sans la nécessité de résister à la brusque compression qui se produit vers la fin de la course, il vaudrait mieux supprimer tous les ressorts; car, indé- pendantes du piston, et simplement entrainées parallè- lement à l’axe, les bagues ne seraient pas soumises aux alternatives de pression qui, agissant en sens inverse sur les deux faces du piston, produisent une sorte de coincement et une rapide usure, On doit donc chercher autant que possible à diminuer leffort des garnitures sur la paroi cylindrique. M. Mudd y est parvenu en donnant aux bagues supérieure et inférieure, une forte épaisseur et par suite une large surface de portage sur la couronne, et en outre en produisant un contact énergique sur ces surfaces au moyen de ressorts verti- caux. Il donne aux anneaux 5 centimètres d'épaisseur pour des pistons variant de 0 m, 45 à 2 mètres de diamètre, et une hauteur de 5 centimètres à chacun d'eux, La section rectangulaire a l'avantage de donner aux bagues une tendance à se développer dans un même plan, tandis que les inégalités d'épaisseur des garnitures ordinaires mettent en jeu une élasticité qui engendre des surfaces gauches au grand détriment du cylindre qui est raboté inégalement, Remarquons d’ail- leurs que cette section de 5 X 5 c/m convient égale- ment bien aux diamètres et aux pressions les plus variables; car plus forte est la pression, plus les an- neaux ont besoin d’être rigides; or, cette rigidité est précisément d'autant plus grande à égalité de section, que le diamètre est plus petit, On peut adopter pour les ressorts la même uniformité que pour les bagues : une longueur de 55 millimètres sur un diamètre de 25 millimètres répond à tous les cas; ils sont logés dans des évidements pratiqués dans les deux bagues: leur nombre et le degré de tension peuvent être réglés selon les circonstances, La pression des garnitures sur la couronne et le rebord du piston est considérable: elle doit s'opposer à ce qu'elles soient appliquées contre le cylindre. Un ressort horizontal, très peu tendu, est placé tangentiellement au joint de chaque bague. Au cas où les ressorts verticaux viendraient à ne plus agir assez énergiquement, on peut les disposer dans des logements horizontaux, ménagés à cet effet : les bagues agissent alors à la manière ordinaire, en attendant qu'on puisse faire la réparation. L'uniformité des gar- nilures à un autre avantage : elle simplifie beaucoup les rechanges. Enfin le système de M. Mudd remédie à l'inconvénient du rabotage du cylindre, qui se produit fréquemment avec les chemises de vapeur lorsque la pression y est admise. L. Viver. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 26 juin 1891. MM. Ayrton et Mather: La construction de résis- tances Sans induction. En faisant quelques transforma- teurs types il y a trois ans, les auteurs ont eu l’occasion d'étudier la construction de conducteurs électriques dont l « impédance » fût pratiquement égale à la résistance, La condition est remplie en rendant l’ « in- L \ RT à la résistance; et la première quantité ne dépendant pas de la matière employée (sauf si c’est du fer) il est important d'employer des substances de haute con- ductilité. On prenait du « platinoïde » à cause de son faible cœfficient de variation avec la température, Une des formes de résistance employée consiste en une série de bandes minces de platinoïde: chaque bande est ductance » [27 ) pratiquement nulle par rapport courbée au milieu et repliée sur elle-même, on a ainsi une série de résistances de 2 ohms 95 qui est traver- sée par un courant de 45 ampères sans que sa résis- tance varie de plus d’ £ pour 100, Cette résistance a été faite par MM. Lamb et Smith. Une autre forme de résistance dite portative consiste en desspirales de fils; chaque tour, étant composé d’une spire gauche pla- cée dans l’intérieur d’une spire droite de diamètre lé- gèrement supérieur, arrive ainsi à réduire l’inductance à + ou + de celle de chaque spire, quand les diamètres approchent de Pégalité, Quand les fils sont en plati- noïde, le rapport de l’inductance à la résistance -ar- ‘ve à À , 1 ES ï . rive à être de l’ordre de Sn M. Carus Wilson : Sur influence du changement des surfaces sur laflexion des poutres, Si on se rapporte à la méthode pratique pour traiter les problèmes de flexion de poutres en se fondant sur l'hypothèse de Bernoulli, d’un moment de flexion proportionnel à la courbure, l’auteur re- marque qu'on suppose ainsi que les sections transver- sales restent planes après la flexion et qu’on néglige l'effet de charge de la surface. Le mémoire actuel dé- crit des expériences faites pour déterminer l’état ac- tuel de la pression sur une poutre supportée en deux points et chargée en son centre. Nous passons rapide- ment sur la discussion théorique pour dire un mot de la méthode expérimentale. Les expériences portent sur une tige de verre montée sur un châssis d'acier per- mettant d'exercer une tension et placée entre les rails croisés, Des anneaux d'acier de 2" de diamètre ser- vent de supports et un autre anneau de même diamètre porte un crochet pour supporter la charge centrale. On emploie souvent de la lumière polarisée circulaire, un oculaire micrométrique sert à mesurer les distances entre les franges d’interférence produites par la charge. Les auteurs ont montré que si une tige de verre est posée sur une surface plane, et pressée normalement à sa surface supérieure, l’effortde cisaillement en un point de la normale au point d'application de la charge est inversement proportionnel à la distance de ce point au contact. Dans la première expérience, les nicols croisés étaient orientés à 45° de l’axe de la barre chargée ; une lame quart d'onde placée entre la barre et l’analy- seur el la position dela frange noire réglée de telle sorte que l'effet produit par l’effort exercé sur la lame fût égal et opposé à celui du quart d'onde, L’auteur pré- sente une série d'expériences variées et curieuses. — M.C.V.Boys : Sur les électromètres de poche. C’est une modification de l’électromètre ordinaire rendu portatif : le principal perfectionement est la substitution de fils de quartz aux fils de soie. L'auteur a montré, il y a quelque temps, qu'il y a grand avantage à faire les gal- vanomètres petits, En appliquant le même raisonnement aux électromètres, il remarque qu’en faisant un instru- ment qui soit l'instrument ordinaire réduit au £ on réduit le moment d'inertie de l'aiguille au -&, tandis que le couple directeur pour un potentiel donné n’est réduit qu’au £ de sa valeur primitive. Le petit instru- ment serait, pour la mème durée de période, 10.000 fois plus sensible que le grand, pourvu que les causes per- turbatrices fussent réduites dans le même rapport. Cette condition n’est pas réalisable avec la disposition ordinaire ; mais on peut, par une modification conve- nable, gagner beaucoup en sensibilité. Il faut employer une aiguille suspendue librement sans contact avec un liquide. Le premier instrument décrit était un instru- ment à aiguille cylindrique, les quadrants contigus étant isolés et réunis aux pôles opposés d’une petite pile sèche à l’intérieur de l'aiguille : les quadrants op- posés sont ainsi au même potentiel, et àun potentiel différent de l’autre paire de quadrants, Le système est suspendu à l’intérieur d’un tube de verre argenté inté- rieurement et divisé en quatre parties par de fines lignes longitudinales, Dans un tel instrument l’aiguille et les quadrants sont réciproques, et la déflection dé- pend du produit de la différence de potentiel entre les quadrants par la différence de potentiel entre les deux ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 195 parties de l'aiguille, La pile sèche n'étant pas cons- tante, on ne peut pas compter sur les indicalions de l'instrument; mais aussi, mettant les choses au mieux, une pile de Grove donnerait une déflection de 20 ou 40 millimètres. Le nouveau dispositif est formé d'une aiguille en forme de croix, constituée par une bande de zinc et une bande de platine, par le contact les poten- tiels sont maintenus sur les deux parties de la lame. On emploie aussi une aiguille en forme de quadrants al- ternativement zinc-platine, et l’on peut mesurer alors une petite fraction de volt. Le poids du disque n'est que d 4 de gramme, et l'instrument peut sans inconve- nient être tourné sens dessus dessous, on peut le trans- porter et le mettre dans sa poche. L'auteur montre un autre petit intrument à quadrants de zinc et de cuivre, en le tournant de 90° de manière à le disposerdans une position différente relativement aux deux parties de l’aiguille, on a une déflection de plusieurs degrés. Au cours de sa communication, M. Boys expose queiques remarques relatives à l’électromètre balistique et au dynamomètre électrostatique Siemens, et montre la possibilité de construire des instruments semblables à ceux qu'il a employés pour servir à élucider quelques oints obscurs sur ce qui se rapporte à « l'électricité e contact», Au cours de la discussion qui suitla com- munication, M. Boys suggère l'idée de faire des électro- mètres de très petite capacité en réduisantles quadrants qui entourent l’aiguille-disque à de simples branches de diapason. M. Enright : Note sur l’électrisation due au contact de gaz et des liquides. — M. Arthur Richard- son : Note sur la dilatation du chlore par la chaleur. Erratum : Dans le dernier numéro de la Revue (45 Juillet 1891) à la page 462. nous avons dit que M. Lodge préfèreattribuer au phénomène de résonance l’épithète de symphonique (symphoning or symphonie). Le véritable mot est syntonique (syntoning or syntonic). SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 6 juillet 1891, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Chrystal : Sur une démonstration de la méthode de Lagrange pour la solution des équations linéaires aux différentielles par- tielles, avec quelques remarques historiques sur les démonstrations défectueuses admises jusqu'ici. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. John Aitken : Sur les particules solides et liquides dans les nuages. Les observations ont porté sur des cumulus au Righi. Le nombre des particules dans ces nuages est extrême- ment variable. Il trouve toujours que le nombre de particules par unité de volume est très grand par rap- port à celui des particules qui se trouvent dans Pair clair au voisinage immédiat. La formation de ces nuages est due à des courants ascendants s’élevant dans l’air impur et humide des vallées. Les particules d’eau sont toujours en train de tomber dans les nuages, et une grande partie s'évapore dans l'air chaud qui entoure toujours un corps de dimensions notables, et qui estéchauffé par la radiation, La densité d’un nuage paraît dépendre du nombre de gouttelettes d’eau, non des particules de poussière qu'il contient, — Le Pro- fesseur Tait lit la cinquième partie de son mémoire sur les fondements de la théorie cinétique des gaz, Il a appliqué l'expression trouvée pour les isothermiques d’un liquide et de sa vapeur au cas de l’oxyde d’éthyle; le résultat s’accorde remarquablement avec l’observa- tion directe. Il montre que, par la méthode de forma- tion de l'équation virielle approchée, aucun terme dé- pendant des actions internes dans les molécules elles- mêmes ne peut s'introduire quand le nombre des molécules est suffisamment grand. Il discute alors le mécanisme de l’équilibre entre le liquide et la va- peur saturée. — M. Knott : Sur la résistance élec- trique du cobalt à haute température. Comme la {ré- sistance du nickel, celle du cobalt augmente dans un rapport qui croit avec la température. On trouve un maximum de résistance avec le fer et le nickel, ou n’en à pas {rouvé avec le cobalt, — Du même auteur : Sur la position thermo-électrique du cobalt et du bis- muth : la ligne du cobalt, sur le diagramme ther- mo-électrique, coupe celle du nickel à 100°; de la com- paraison avec celle du nickel et de la comparaison des propriétés magnétiques de ces métaux, l’auteur déduit que le pouvoir thermo-électrique du bismuth ne sera pas altéré dans les champs magnétiques, quoique la présence de ces champs modifie sa résistance. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Ewart : Sur les organes des sens latéraux du Læmargus et de l’Acanthias. — M. Gregory, du British Museum : Sur les Echinoïdes fossiles maltais et leur corrélation évidente avec les roches de Malte. Diverses espèces nouvelles ont été dé- couvertes à Malte, et quelques espèces connues jus- qu'ici en Iialie y ont été trouvées. W. Pepnie, Docteur de l'Université. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES (SECTION DE MANCHESTER) Séance du 18 juin 1891. M. R. le Neve Foster lit un mémoire sur « les fa- bricants de produits chimiques et la question de la fumée », Son mémoire vient à la suite de certains évè- nements qui ont vivement ému les fabricants de pro- duits chimiques dans la ville de Manchester. Il y a, comme l’on sait, une loi (Public Health Act, qui dé- fend sous peine d'amende la production d’une fumée épaisse, Or celte loi n’a guère été appliquée jusqu'ici dans la commune de Clayton, où se trouvent un grand nombre de fabriques de produits chimiques de toute espèce. Mais depuis que celte commune à été incor- porée à Ja ville de Manchester, il y a quelques mois, la municipalité, au moyer de ses agents, a déclaré la guerre contre les fabricants, et prétend ne permettre aucune production de fumée épaisse durant plus d’une minute par demi-heure. Plusieurs procès ont été in- tentés contre les fabricants qui ont été condamnés par les magistrats. On a interjeté appel, mais Les juges civils ont décidé que c'était une affaire de simple police et hors de leur juridiction, Les fabricants de leur côté ont formé une association pour se protéger et pour obtenir les changements nécessaires dans la loi. Ils ont adopté comme condition nécessaire pour de- venir membre de l'association que le candidat puisse prouver qu'il ait adopté les meilleurs moyens possibles d'empêcher la production de la fumée, étant données les exigences spéciales de sa fabrication, D'après l’au- teur, la municipalité ne tient aucun compte de ces exigences; il y a cependant bien des procédés indus- triels où il faut alimenter les feux d’une façon inter- miltente et où il y a, par conséquent, production inévitable de fumée, De plus le critérium que l’on adopte pour démontrer que la production de fumée est excessive est fautif; il faudrait établir le rapport entre la quantité totale de charbon consommé et celle de la fumée produite, et non pas se laisser guider seu- lement par la teinte plus ou moins sombre de la fumée. C’est d’ailleurs un fait bien connu aujourd’hui que les cheminées, en général mal construites, des maisons particulières en nombre énorme, contribuent bien plus aux impuretés de l’atmosphère de Man- chester que les fabriques. Clayton est le quartier le plus sain de Manchester; et cela malgré le fait qu'il recoit pendant deux tiers de l’année un surplus de fumée venant du reste de Manchester, et qui lui est apportée par les vents dominants, l’auteur termine en recommandant d’une part aux fabricants de faire de leur mieux pour éviter tout reproche, d’autre part à la municipalité de traiter les fabricants d’une facon mieux en harmonie avec l'esprit du Public Health Act de 1875 qu'avec l'interprétation qu’on lui a don- née; il déclare que si l’on n'arrive pas à s'entendre, les fabriques seront forcées de quitter Manchester, qui deviendra une ville morte, — M, Grimshaw dit 496 ACADÉMIES ET SOCIÈTES SAVANTES qu'avec la consommation énorme de charbon qui se | fait à Manchester, il est impossible d'éviter la produc- tion de la fumée. — M. Bailey croit que cet élat de choses serait amélioré si les inspecteurs étaient des hommes capables de juger si l'émission de la fumée épaisse est inévitable ou non. A l’heure qu'il est, le premier gardien de la paix venu peut porter plainte. — M. Dreyfus fait remarquer que la couleur de la fumée n’est pas un critérium de sa nocuité, et d’après lui, la fumée des maisons particulières est plus nuisible que celle des fabriques. — M. G. E. Davis dit que si l'on taquine ainsi les fabricants, ceux-ci, au lieu de chasser leur fumée par des cheminées très élevées, la dissémi- neront près du sol; les inspecteurs ne pourront pas alors s’en apercevoir, — Le D' Simpson croit que l’on devra plutôt s'appliquer à diminuer le mal qu'à en faire l'apologie, et pour cela il suffira d’une entente cordiale entre la municipalité, l’association pour la suppression des vapeurs nuisibles, et les chimistes : il faut de la science et de la bonne volonté pour arriver à un résultat, 12 HarroG. CADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 4 juin 1891 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H.-C. Vogel commu nique quelques expériences qu'il a exécutées pour| mesurer la vitesse de Sirius par des observations spec- troscopiques en se servant, comme spectre de compa- raison, de celui du fer. L’arrangement était fait de telle sorte que le spectre du métal ne traversät pas celui de l'étoile, mais en touchât seulement les bords. On trouva, le 22 mars, que Sirius s'éloigne avec une vitesse de 1,05 m. g. par seconde de la terre, d'où il résulte pour la masse de l'étoile vers le soleil a une valeur de 1,96 m. g. Des observations analogues, avec le spectre | de l'hydrogène comme spectre de comparaison, don- nèrent 1,73 m, g. pour la vitesse vers le soleil, L'avan- tage du ES du fer consiste dans le grand nombre des lignes de comparaison. Dr Hans Janx. Séance du 11 juin. SCIENCES NATURELLES., — M, Engler : Mémoire sur la flore alpine de l'Afrique tropicale. Il existe des rela- tions entre cette flore et celle de l'Arabie, des Indes, des côtes de la Méditerranée et de l'Himalaya, | SOCIETE DE PHYSIQUE DE BERLIN Séance du 26 juin 1891. MM. Rubens et Arons ont continué leurs études sur la constante diélectrique de quelques isolateurs, et ont comparé cette dernière avec le coefficient de réfraction pour les ondes de Hertz. Ces observationscon:- | firment entièrement la loi de Maxwell, Ils ont trouvé : | Paraffine.......... BR EE 1080 — 1,550 0) Verre: einem ae u—=5 91 Ve = Don — 2,34 Verre EMEA se Uy= 5,90 ; V u— 2,44; n — 2,49 Les constantes diélectriques ont été mesurées d’après la méthode de Schiller. La prochaine séance de la Société de Physique se tiendra le 23 octobre prochain. D' Hans JAuN. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 18 juin 1891. 1° SCIENCES PHYSIQUES. M. Stefan Markovits « Expériences sur le frottement entre l'huile et l'air ». Le principal intérê t de ce mémoire est dans la preuve expérimentale qu’on y trouve de ce fait qu'entre l'air et l'huile en mouvement existe un frottement de même ordre de grandeur que celui qui existe entre l'air et l’eau. Les” expériences ont été faites à l’aide de l’ap- pareil qui a été construit par le professeur Lang pour la démonstration de l’existence et la mesure du frotte- ment entre l’eau et l'air. — Le Professeur Lippmann, de Vienne, présente un travail qu’il a fait en commun avec M. Heïssner : «Sur l’action de l’acide iodhydrique sur la quinine et l’isoquinine, » 20 SCIENCES NATURELLES, — M, J. Jahn : «Sur les pétrifications survenues dans les sables du nord de la Bohème, dans les couches Téplitzienne et Prié- sienne ». L'auteur à étudié la constitution géologique de ces couches et y a trouvé un grand nombre de fos- siles pétrifiés : 11 débris de poissons, 15 céphalo- podes, 57 gastéropodes, 27 bivalves, 11 brachiopodes, 10 bryozoäires, 10 arthropodes, 12 échinodermes, 16 cœælentérés, 12 porifères et 38 foraminifères. — Le secrétaire donne lecture d’une lettre de M. Gejza Von Bukowski, datée de Diner el racontant son voyage, dans la région des lacs du sud-ouest de PAsie Mineure. Séance du 2 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Max Mandl : Sur la théorie des restes biquadratiques, Jan de Vries : Sur les configurations de l’espace qui peuvent se déduire des polyèdres réguliers. — M, Gustav Kohn : Sur la théorie des formes associées. 2° ScIENCES PHYSIQUES. — M. Puschl : Sur la manière dont se comportent les vapeurs saturées. —M. Hæfer: Etudes sur le pétrole. I. L'hypothèse de Mendelejeff et l’origine animale du pétrole. Ce mémoire est une dis- cussion critique de lhypothèse de Mendelejeff sur l’origine inorganique du pétrole, des arguments en sa faveur et aussi des objections soulevées contre la théo- rie de l’origine animale. — M. Theodor Gross, de Ber- lin, envoie de note suivante à ajouter à ses communi- cations antérieures sur le soufre, Le sulfate de fer est fondu mélangé avec de l’hydrate et du carbonate de potassium dans une capsule d'argent, et on chauffe le mélange quelque temps, après y avoir ajouté du chlorate et du nitrate de potassium. Le corps fondu est traité par l’eau, la solution décantée et le résidu versé dans de l'acide c chlorhydrique. De cette solution, on précipite le fer par de l’'ammoniaque en excès; on filtre, on juillet, essaie encore l'action de l’ammoniaque sur le fer; on la neutralise par de l'acide chlorydrique et on la traite par un grand excès d’hydrate de potas- sium et de sulfure d’ammonium. Il se forme un pré- cipité noir, qui se sépare beaucoup mieux quand le li: quide c ontient beaucoup d'hydrate de potassium libre. Le précipité estséché sur un filtre où il forme des mor- ceaux compacts. On les broie dans une capsule de por- celaine enune poudre noire dure, qui dans l'appareil à réduction à hydrogène brillait fortement; mais elle restait sans se fondre et ne changeait pas de couleur. Le poids spécifique était de 64 grammes par 50 grammes de sulfate de fer, c'est-à-dire 11 °/, en gros du soufre contenu dans le sulfate, quand celui- ci renferme 7 H20. Les réactions de ce corps sont les suivantes : L’acide nitrique fort et l’eau régale n’agissent pas sur ce corps même à la température de fusion, ce en quoiil se distingue de toutes les autres substances qui peu- vent être précipitées comme ce corps par H?S. Chauffé et fondu avec du chlorate de potassium, il reste inal- téré. Fondu à haute température avec de l’hydrate de potassium au creuset d'argent, il donne dans l'acide nitrique étendu de faibles traces de solution. La subs- tance décrite précédemment et désignée par y esl semblable à la substance 8 mais ne lui est pas iden- tique, — M. Lieben : Sur la distillation sèche des sels d'argent des acides organiques. - 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Sehmarda : genres el espèces de la famille Phytoptida. — M. Adamkiewiez: Sur les réductions des carcinomes et leur importance, — M. Lichtnecker : Vues et arguments sur la thèse de la théorie de la descendance, surtout sur la théorie de la sélection de Darwin. Emile WEyr Membre de l'Académie. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F, Levé, rue Cassette, 17. 2° ANNÉE < N° 15 15 AOÛT 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER. L'ÉVAPORATION ÉLECTRIQUE Il est bien connu que lorsqu'un tube vide est muni d'électrodes de platine, le verre adjacent se noircil rapidement au voisinage du pôle néga- tif. Cela est dû au dépôt du platine. Le passage du courant d'induction stimule grandement le mou- vement du résidu des molécules gazeuses; celles qui sont condensées sur le pôle négatif ou dans son voisinage immédiat, sont projetées avec une grande vitesse en lignes presque droites, la rapidité variant en raison du degré d'épuisement du tube et aussi de l'intensité du courant d’induction. Le pla- tine étant employé pour le pôle négatif, non seu- lement les molécules gazeuses sont projetées de l’électrode, mais de plus le passage du courant af- fecte le mouvement moléculaire normal du métal au point d'éloigner quelques molécules de la sphère d'attraction de la masse, ce qui les entraine en dehors du courant des molécules gazeuses prove- nant du pôle négatif, et les fixe aux objets voisins. Cette propriété fut, je crois, démontrée pour la première fois par le D° Wright, de Yale College; il décrivit quelques-unes de ses intéressantes expé- riences dans 7e American Journal of Science and Arts ?. Ce procédé a été souvent employé pour la production des petits miroirs destinés aux appa- reils de physique. Cette volatilisation ou évaporation électrique est presque semblable à l’évaporation ordinaire, cau- 1 Cet important travail a été présenté le 11 juin 1891 à la Société royale de Londres. Voyez à ce sujet la Revue du 30 juin 1891, page 430. 2) 3c/série,; vol. 12. p. 49: septembre, 1871. REVUE GÉNÉRALE, 1891, Janvier, 1877, et vol. 14, p. 169, sée par la chaleur. La cohésion des solides varie selon leur constitution physique et chimique; aussi chaque espèce de matière solide demande à être élevée à une certaine température avant que ses molécules perdent la fixité de leur position et soient rendues liquides, résultat obtenu pour les divers corps à des températures très différentes, Si nous considérons un liquide à la pression atmosphérique — par exemple, une cuvette d’eau dans une chambre ouverte, — aux distances molé- culaires la surface limitrophe entre le liquide et le gaz superposé ne sera pas plane, mais agitée comme une mer orageuse. À la surface du liquide les molécules bondissent, çà et là, rejaillissent de leurs voisines et s’élancent dans toutes les direc- tions. Leur vitesse initiale peut être accélérée ou retardée suivant la direction de la force qui les pousse. Si une molécule du liquide a été dirigée vers un angle avec une vitesse insuffisante pour la conduire au delà du rang de l’attraction moléculaire du liquide, elle peut s'échapper, parce que, dans son excursion montante, une molécule gazeuse peut la frapper dans la bonne direction, etsa visite temporaire peut la conduire à un état permanent. La vitesse propre des molécules est augmentée par la chaleur et diminuée par le froid. Si, pour cette raison, nous élevons la température de l’eau sans augmenter sensiblement celle de l’air envi- ronnant, les excursions des molécules du liquide sont rendues plus longues etla force impulsive plus grande, et ainsi l’échappement des molécules dans la région supérieure du gaz s’accroit; nous disons alors que l’évaporation est augmentée. 15 498 W. CROOKES. — L'ÉVAPORATION ÉLECTRIQUE Quel que soit, indépendamment de l'élévation de température, le moyen employé pour accroilre la vitesse iniliale des molécules liquides, et préci- piter leur sortie sous forme de gaz, le résultat peut être nommé (évaporalion » comme si, pour la pro- duire, on avait eu recours à la chaleur. Jusqu'ici j'ai seulement considéré le cas d’un li- quide s'évaporant en gaz; mais le même raisonne- ment peut également s'appliquer à un corps solide. Mais, tandis qu'un corps solide comme le platine demande une chaleur intense pour permettre à sa couche supérieure de molécules de passer au delà de la sphère d'attraction des molécules voisines, l'expérience montre qu’un très petit apport d’élec- tricité négalive ajoute assez d'énergie pour que la couche des molécules métalliques s'élance au delà du pouvoir attractif du reste du métal. Si un milieu gazeux existe entre le liquide ou le solide, il empêche à un certain degré les molécules de s'échapper. Ainsi, — ordinaire ou électrique — lévaporation est plus rapide dans le vide que sous la pression atmosphérique normale. J'ai fait récemment les expériences suivantes sur l'évaporation äe différentes substances sous l’in- fluence de la pression électrique. Il Evaporation de l'eau. — Deux légers plats de por- celaines furent remplis d’eau acidulée et équilibrés sur ies plateaux d’une balance très sensible, Dans chaque plat plongeait un fil de platine touchant le liquide, mais non le plat; l’un de ces fils était en rapport avec une bobine d’induction; l’autre était isolé. La balance fut abandonnée à son mou- vement ; mais elle ne bougea pas, l'aiguille restant au centre. L'eau en rapport avec la bobine fut d’a- bord rendue positive. Après 1 h.3/4il n'y avait presque aucune différence entre le poids de l'eau isolée et celle qui était chargée par le courant po- sitif. L'équilibre étant rétabli, le courant fut renversé, le courant négatif restant sur le plat pendant deux heures. Au bout de ce temps l’eau électrisée était décidément la plus légère. Après avoir encore ré- tabli l'équilibre, l'électrisation des plats fut renver- sée, c’est-à-dire que celui qui avait été isolé le pre- mier fut rendu négatif, el l’autre fut isolé. En une heure l’eau électrisée était plus légère que l’eau isolée. L'expérience a été faite dans une chambre à température uniforme, maintenue à l'abri des cou- rants d'air par le globe de verre de la balance. Dans une autre expérience, les quantités furent pesées, et il fut trouvé que l’eau négativement électrisée avait perdu, en 1 h. 1/2, 1/1000 de son poids de plus que l'eau isolée. Celle expérience montre que linfluence troublante qui aide l'évaporalion est parliculière au pôle négatif, même sous Lx pression normale de l'atmosphère. Le cadmium fut expérimenté ensuile. Évaporalion du cadmium. — Si la sortie du méta] du pôle négatif est semblable à l’évaporation ou à la volatilisation, l'opération doit être accélé- rée par la chaleur. Un tube fut fait comme le montre la figure 1. A et B sont les pôles de platine soudés dans le Fig. 1. verre. G et D sont deux blocs de cadmium métal- lique de même volume et de même poids. Le bloc CG est en contact avec le pôle B, qui fut tou- jours conservé négatif dans l'expérience, le pôle A étant posilif. Lorsque l'épuisement du gaz fut tel que le cou- rant donnàät sur le verre des phosphorescences vertes, la chaleur fut appliquée simultanément aux deux extrémités du tube en U, au moyen d’un bec de gaz et d’un bain d'air, de sorte que chaque morceau de cadmium était à la même température que l’autre. Le courant fut alors appliqué et con- servé pendant environ une heure, et je remarquai qu'aucun métal ne se déposa dans le voisinage du pôle positif. La partie supérieure de cette branche du tube élait parfaitement propre, tandis que la partie symétrique de l’autre branche du tube, n'ayant pas d'’électrodes, était recouverte d’une épaisse couche métallique, comme le montre le dessin, Comme la température était haute, le métal avait distillé des deux blocs ; il n’y avait donc au- cune différence visible dans la somme du dépôt dû à chacun d'eux. Il est évident que, pour rendre l'action électrique plus visible, la température de- vrait être maintenue au-dessous du point normal de volalilisalion. Dans l'expérience suivante un tube exactement semblable fut employé ; le vide était tel que la phos- phorescence verte du verre fût très apparente; la température fut maintenue juste au-dessous du point de fusion du cadmium, et le courant passa pendant une heure. En examinant le tube au bout de ce temps-là, il apparut tel que le représente la figure 2. Un dépôt considérable s'était fait à l'extré- mité du tube près du pôle négatif; l’espace autour du pôle positif était clair, tandis que dans la branche du tube où l'électricité n'avait pas passé, on ne voyait qu'un très léger dépôt de métal, comme le montre la figure. W. CROOKES. — L'ÉVAPORATION ÉLECTRIQUE 499 Dans cette expérience la température avait été maintenue au-dessous du point de fusion. Si nous n'avions pas appliqué l'électricité, il y aurait eu très peu d’évaporalion, sinon aucune. L’étendue Fig. 2. des oscillations moléculaires était augmentée par l’élévation de la température, mais insuffisamment pour permettre à de nombreuses molécules de passer au-delà de la sphère d'attraction de la masse. Lorsqu'au contraire, le courant passait, les oscillations étaient suffisamment augmentées pour conduire quelques molécules au delà de leurs sphères d'attraction et de là dans les espaces su- périeurs vides. Comme dans l'expérience de l’eau, cela arriva seulement au pôle négatif. Il semblerait que, même après avoir été reliré du reste de la masse, le courant qui précipite les molécules gazeu- ses est nécessaire pour conduire ailleurs les molé- cules métalliques, et, comme je le montrerai tout à l'heure, même alors elles disparaissent rapide- ment de la file et se déposent sur les parois du tube. Un autre tube fut construit comme le montre la figure 3. À, B, C, D étaient des fils de platine A soudés dans le verre; en A et D des pôles d'aluminium recouvraient les fils de platine. Aux extrémités du tube, et touchant les pôles B et C, étaient placés deux morceaux de cadmium de même grandeur et de même forme, Le tube fut amené jusqu’au point phosphorescent, et le courant fut dirigé dessus, G étant rendu négatif et D po- sitif. La chaleur ne fut pas appliquée. Le courant fut conservé ainsi pendant à peu près une demi- D + “ Fig. 4. heure, jusqu'au moment où un bon dépôt de métal 1 P restait sur le verre, comme l'indique la figure 4. Le verre, près du pôle C, était couvert de métal, lan- dis que le verre entourant le pôle D était clair. La limite extérieure de l’espace sombre pendant l’ex- périence est représentée par la ligne pointée ef. Le pôle B fut ensuite rendu positif et le pôle A négalif, et le courant fut de nouveau conservé pen- dant une demi-heure. Au bout de ce temps, le seul effet produit, fut un léger obscurcissement autour du morceau de cadmium, mais beaucoup plus faible, comme le montre la figure 5. Cet effet est dû sans doute à un léger coulage de la décharge négalive, provenant du pôle posilif. L'expérience montre que l’électrisation positive n’aide pas sen- siblement le métal à se volatiliser. Dans ces expériences, on ne fit aucune estima- tion du poids du métal déplacé, ni du cadmium déposé sur les fils de platine qui étaient soudés dans le verre. Dans le but d'arriver à apprécier la quantité déposée, et aussi pour éliminer tout effet de déran- sement causé par la chaleur, au point de contact indifférent, j'instiluai les expériences suivantes : Le tube en U, que représente la figure 6, portait . un pôle de platine soudé à chacune de ses extré- milés. Six grains de cadmium pur furent placés dans chaque branche et fondus autour du fil de platine, Les extrémités du tube furent alors placées dans un bain d'air, et maintenues à une température de 200° C. pendant la durée de l'expérience #, L'absorption resta à 000076. Le courant d'in- ee MR TAN ! Le cadmium fond à 3200 et bout à 8600. 500 W. CROOKES. — L'ÉVAPORATION ÉLECTRIQUE duclion fut maintenu pendant trente-cinq mi- nutes, le pôle A étant négatif et le pôle B positif. Au bout de ce temps, la plus grande partie du cad- mium avait disparu du pôle négatif, laissant clair le fil de platine, aucun dépôt de métal n'étant auprès, et les molécules paraissant avoir été pro- jetées à une distance d'environ ? de pouce. L'apparence du pôle positif était bien diffé- rente; le cadmium n'avait presque pas été volalti- lisé et le métal condensé était venu tout près du pôie. Le tube fut ouvert el les restes des fils et du métal furent pesés. Le cadmium;, qui était alors loin des pôles, fut dissous dans une solution acide; le résidu fut alors lavé, séché, et pesé : Pôle positif Pôle neégatit Poids primitif du cadmium... Gers Gers Cadmium restant sur le pôle. 3, 65 0, 25 Cadmium volatilisé en 35 min. 2, 39 5, 7ù La différence entre les quantités de cadmium chassées des deux pôles se trouvant ainsi affirmée, une autre expérience fut faite dans un tube ar- rangé de façon à peser facilement le métal avant et après l'expérience. La figure 7 représente l’appa- reil. Un tube en U fut soufflé, ayant une boule dans chaque branche. Les pôles de platine étaient, comme auparavant, à chaque extrémité des bran- ches, et dans chaque boule se trouvait suspendu à un crochet de platine un petit morceau de cad- mium, le métal ayant été fondu sur le fil. Chacun des fils fut pesé avec et sans le cadmium. La partie inférieure du tube fut enfermée dans un vase de métal contenant de la parafline : la tempéra- ture fut maintenue à 230° C, pendant la durée de l'expérience. Un dépôt se fit presque immédiate ment autour du pôle négatif, et en cinq minutes la boule le surmontant devint opaque par suite du dépôt métallique. Le pôle positif avec son en- tourage lumineux put être facilement observé tout le temps. Après trente-cinq minutes l'expérience fut ter- minée, et, lorsque tout fut refroidi, le tube fut ou- vert et les fils pesés de nouveaux. Voici les résul- tals : Pôle positif Pôle négatif Poids du cadmium à l’origine. 98rs3% 9grs38 Poids après l’expérience..... : 9, 25 1, 86 Cadmium volatilisé en 30 min. 0grs09 78rs52 Trouvant que le cadmium se volatilisait si faci- lement sous l’action du courant d’induction, une grande quantité, — environ 350 grammes du métal pur, — fut soudée dans un tube, comme le montrela figure 8: l'extrémité du tube contenant le métal fut chauffée juste un peu au-dessus du point de fusion ; le métal fondu étant le pôle négatif, en quelques heures la quantité entière était volati- lisée et condensée en une couche épaisse sur 2e Fig. 8. l'extrémité la plus éloignée du tube près du pôle positif, mais ne le touchant pas. Volatilisation de l'argent. — L'expérience sui- vante fut faite sur l'argent. L'appareil était sem- blable à celui employé pour le cadmium (fig. 7). De petites balles d'argent pur furent fondues à l'extrémité de fils de platine et suspendues dans les boules de verre. Les fils de platine étaient pro- tégés par des tubes de verre, de sorte que les balles d'argent étaient seules exposées. L'appareil entier fut enfermé dans une boîte de métal, garnie intérieurement de mica, et la tem- pérature fut maintenue aussi haute que le per- mettait le verre sans se fondre. Le vide fut amené à un espace sombre de 3 millimètres et le courant W. CROOKES. — L'ÉVAPORATION ÉLECTRIQUE 501 conservé pendant 1 h. 1/2. Le poids de l'argent avant et après l'expérience fut : Pôle positif Pôle négatif Poids de l’argent au début. A88rs1% 248rs63 Poids après l’expérience...…. 18, 13 24, 44 Argent volatilisé en 1 h. 1/2. Ogrso1 O8rs19 Ayant trouvé que l’argentse volatilisail facilement au pôle négatif dans un bon vide, j'instituai des expériences pour examiner si les molécules de métal projetées du pôle contribuaient à produire la phosphorescence. Un appareil de verre fut cons- truit comme le montre la figure 9. Une boule en poire de verre allemand a, près de sa petite extré- mité à l'intérieur, un pôle négatif concave, A, d’ar- gent pur, monté de telle sorte que son image ren- versée soit projetée sur l'extrémité opposée du tube. A l'intérieur du tube se place un écran de mica C, ayant un petit trou au centre, de sorte qu'un mince rayon émané du pôle d'argent puisse passer à tra- vers, formant ainsi un point phosphorescent D, à l'extrémité de la boule. L’épuisement fut porté à un degré très élevé, 0%® 00068. Le courant d’une bobine d’induction passa pendant quelques heures, le pôle d'argent étant négatif, de façon à enlever une cerlaine portion de l’électrode d'argent. En examinant de nouveau, je trouvai aue tout l’ar- gent était déposé dans le voisinage immédiat du pôle, tandis qu'à l'extrémité du tube le point D, qui avait constamment brillé d’une lumière phospho- rescente, était sensiblement exempt d'argent. Un autre tube fut ensuite préparé (fig. 40) portant deux pôles négatifs liés ensemble, A, A, placés de facon à projeter deux points lumineux sur le verre phosphorescent du tube. L'une des électrodes, A’, était d'argent, métal volatil; tandis que l’autre À, était d'aluminium, en pratique non volatil. En attachant les deux pôles négatifs, À, A, à l’un des bouts de la bobine, et le pôle positif, B, à l’autre extrémité, il fut observé, dans le cours d'une demie-heure, qu'une quantité considérable de métal avait été projetée du pôle négatif d’ar- gent, tandis qu'il n’y avait eu aucune projection de la surface métallique du pôle positif d'aluminium. Cependant, tout le temps de l'expérience les deux points phosphorescents, GC, C, avaient brillé avec J Fig. 10, la même intensité, montrant par là que l'agent actif de la phosphorescence était constitué non par les molé- cules du solide projetées des pôles, mais bien par le ré- sidu des parcelles gazeuses, ou « matière radiante ». Dans les tubes construits jusqu’à présent pour contenir l'argent, il n’a pas été facile d'observer le spectre du pôle négatif, provenant de la rapidité avec laquelle le dépôt obscurcit le verre. Un tube spécial du modèle suivant (fig. 11) fut p / alors imaginé. Le pôle d'argent, À, fut attaché au pôle de platine à l’une des extrémités du tube; B, le pôle positif d'aluminium, était sur le côté. L’extré- mité du tube opposée au pôle d'argent était arron- die ; le spectroscope fut placé de manière à observer la lumière de l'argent se volatilisant « tout droit », comme le montre la figure. De cette facon, le dépôt d'argent n'offrait aucun obstacle à la lumière, aucun dépôt n'étant formé, sauf sur les côtés du tube entourant l’argent. Au vide donnant un espace sombre correspondant à environ 3 milligrammes de l'argent, on pouvait voir un éclat blanc verdâtre autour du métal. Ce feu donnait un sceptre très brillant. L’étincelle des pôles d'argent fut amenée dans le même rayon visuel, que l'éclat du vide au moyen d’un prisme à angle 502 W. CROOKES. — L'ÉVAPORATION ÉLECTRIQUE droit atlaché au spectroscope; les deux spectres furent comparés. Les deux grosses lignes vertes de l’argent étaient visibles dans chaque spectre ; la mesure prise de leurs positions était de 3344 et 3675, nombres qui se rapprochent tellement des nombres de Thalen qu'ils ne laissent aucun doute que ce sont des lignes de l'argent. À une pression donnant un espace obscur de 2 milligrammes, le spectre était très brillant et consistait principale- ment dans les deux lignes vertes et les lignes vertes et rouges de l'hydrogène. L'introduction d’une bou- teille de Leyde dans le circuit n’augmente pas sen- siblement l'éclat des lignes; mais il fait ressortir l'éclat bien connu des lignes de l'air. A cette pres- sion peu d’argent s'échappe du pôle. À un plus grand vide, le cercle lumineux autour du pôle d’ar- gent s’amoindrit et les lignes vertes s’évanouissent. A un vide poussé à environ un millionième d’at- mosphère, l'éclat lumineux est faible, le pôle d'ar- gent a l'apparence d’un fer rouge, et la volatilisa- tion du métal se fait rapidement !. Si, pour l’électrode négative, on employait un al- liage au lieu d’un métal pur comme l'argent et le cadmium, les différents agents qui le composeraient pourraient êlre lancés dans des directions diffé- rentes et déterminer ainsi une séparation électrique —une espèce dedistillation fractionnée. Une extré- mité négative fut faite en laiton, et soumise à la décharge électrique à vacuo; le dépôt obtenu pré- senta seulement la couleur du laiton; en examinan! le dépôt chimiquement, je n’ai pu découvrir au- cune séparation dans ses composés, le cuivre et le zinc. Il Revenons aux analogies avec l’évaporation des li- quides. Prenez des liquides ayant des points d'ébul- lition différents; mettez-les sous la même pression et appliquez la même somme de chaleur à cha- cun; la quantité passant de l’état liquide à l’état 1 Comme dans l’action produisant la volatilisation, la « chaleur » est concentrée seulement sur les couches super- ficielles des molécules. Le métal prend ou perd instantané- ment cette apparence de fer rouge suivant la direction du courant, montrant que, si l’apparence de chaleur est vraiment due à une élévation de température, elle re pénètre pas beau- coup au-dessous de la surface. L’excès d’activité des molé- expériences, limité à la surface seule, ou bien la quantité en- tière s'évaporerait à la fois, comme lorsqu'un fil métallique est enflammé par la décharge d’une puissante bouteille de Leyde. Quand cet excès d'activité est produit par la chaleur artificielle, lun de ses effets est l'émission d’une lumitre rouge; de sorte qu'il n’est pas invraisemblable de penser que lorsque l'excès d'activité est produit par l'électricité, l’émis- sion de lumière rouge devrait accompagner aussi la sépara- tion des molécules de la masse. En la comparant à l’électri- cité, la chaleur est un agent ruineux pour produire la vola- tilisation, puisque la masse entière doit être élevée à la température requise pour produire une action à la surface seulement; or l’électrisation ne semble pas pénétrer beau- coup au-dessous de la surface, gazeux diffèrera grandement dans chaque cas. Il était intéressant d'essayer une expérience pa- rallèle avec des métaux, pour trouver dans les mêmes conditions de température leur volatilité comparative et l'influence de l'électricité sur ce phénomène. Il fallait} prendre un métal comme terme de comparaison; je choisis l'or, sa volatilité électrique étant grande, et sa préparation à l’état pur facile. Un appareil fut construit comme le montre la figure 12. Cest en principe un lube vide avec quatre ——= MOTEUR Fig. 12. pôles négatifs à une seule extrémité et un seul pôle positif à l’autre. Au moyen d’uncommutateur tour- nant je pus établir le contact électrique avec cha- cun des quatre pôles pendant la même durée (en- viron 6 secondes); dans ces conditions les varia- tions de l'énergie affectent chaque métal de la même manière, pendant la durée de l'expérience, qui est de quelques heures. Les différents métaux employés comme pôles né- galifs offraient même surface active, parce qu'on avait eu soin de les faire passer à force par un même orifice circulaire pratiqué au travers d’une feuille de platine, et qu'on les avait mesurés pour leur donner une longueurégale. La dimension em- ployée fut de 8 millimètres en diamètre, et 20 mil- limètres en longueur. Fo" W. CROOKES. — L'ÉVAPORATION ÉLECTRIQUE 203 De l’or métallique, fut employé comme témoin dans chaque expérience. Le même appareil me permit done de comparer chaque fois trois métaux, La durée du temps pendant lequel le courant traver- sa le commutateur tournant fut de huitheures dans chaque expérience, ce qui donne ainsi deux heures d’électrisation pour chacune des quatre électrodes négatives. La pression fut telle qu'elle donna un espace obscur de 6 millimètres. Les métaux fusibles comme l’étain, le cadmium et le plomb mis dans l'appareil sous forme de fils sont promptement dissous. Pour échapper à cette difficulté un pôle spécial fut inventé. Au fond de plusieurs tubes de porcelaine de 9 millimètres de diamètre, fut fixé un fil de fer de 8 millimètres de diamètre, dépassant d'environ ÿ millimètres des- sous. Les tubes étaient alors remplis jusqu’au bord du métal à essayer, et fixés dans l'appareil exac- tement de la même manière que les fils l'avaient été. Le diamètre intérieur des tubes pris au bord était de 7 millimètres; le métal négatif rempli à ras fut ainsi formé d'un disque de 7 millimètres de diamètre. Le pôle d’or, terme de comparaison, fut traité de la même manière; les nombres obte- nus pour les métaux fusibles peuvent done être comparés à l'or. Le tableau suivant résume ces résultats, la vola- tilité de l’or étant égale à 100 : PAT RE ER 108.00 OR Re RL ER CREER 100.00 An EN ee EDR lo RO ee Qi Re 75.04 RATER TUE ner 22 Se La tel à 200: JP Laiton... rt dn ee ARS Se 4 51.58 AFRO Re ANS 44.00 CHIVRE. E4 10, 0 PEAR SEM PART Er ADO Catdmiunt.:... 0... DE EN 7000191599 Nickel ne... D ME Met l0E 00 JEUNE NOR PIRE ARE 10.49 ID dE NE PE EE ENT O a ).b0 Dans cetie expérience des surfaces égales de chaque métal furent exposées au courant. En divi- sant les nombres ainsi oblenus par la gravité spécifique du métal, on obtient l’ordre suivant : Blois RSR EE TO OMR 9.00 Arpent..... 1.88 BÉTAD et ie 7.16 Plomb... 6.61 ONE. 5.18 Cadmiuim S 12 Cities EE MERE CERN Hi 2 2252) Élatineste. 2.02 Nickel.. 1.29 THB RO MONS RE 0.71 LG NRA 0.47 Dans ces circonstances l'aluminium et le magné- sium semblent non valalils en pratique. L'ordre des métaux dans le tableau montre tout de suite que la volatilité électrique à l’état solide ne correspond pas à l’ordre des points de fusion, des poids atomiques, ou de n'importe quel autre point constant. L'expérience fut répétée avec quelques- uns des métaux typiques, el les nombres obtenus n'ont pas différé sensiblement de ceux donnés ci-dessus, démontrant ainsi que l’ordre n’est pro- bablement pas faux. On voit dans le tableau ci-dessus que la volati- lité électrique de l'argent est élevée, tandis que celle du cadmium est basse. Dans les deux pre- mières expériences, où l'argent et le cadmium furent employés, l’électrode négative de cadmium avait en 30 minutes perdu 7 grs. 152, landis que l’électrode négative d'argent n'avait perdu en 4 h. 1/2 que 0 gr. 19. Cette contradiction appa- rente est facilement expliquée par le fait (noté déjà dans le cas du cadmium) que le maximum d'éva- poration, dû à un trouble électrique, a lieu lorsque le métal est au point de liquéfaction ou au voisi- nage. S'il était possible de former un pôle négatif ün vaeuo d'argent fondu, alors la quantité volatilisée dans un certain temps serait probablement très supérieure à celle du cadmium. L'or s'étant montré facilement volatil sous l'in- fluence du courant électrique, une expérience fut faite en vue de produire une plus grande quantité du métal voialilisé. Un tube, ayant à une extrémité un pôle négatif composé d'un poids de fils d’or pur, et un pôle d'aluminium à l’autre extrémité, fut épuisé et le courant de la bobine d'induction dirigé dessus, rendant la brosse d’or négative; je trouvai que la résistance augmentait considérable- ment à mesure que les parois se couvraient de métal, de telle sorte que pour permettre au cou- rant de passer, il fallait introduire de l'air au bout d’un instant, en abaissant la jauge de 1/2 milli- mètre. Le poids de la brosse avant l'expérience était de 35 4940. Le courant d'induetion fut maintenu sur le tube pendant 414 h. 1/2; au bout de ce temps le tube fut ouvert et la brosse retirée. Elle pesait alors 5013, indiquant une perte de 2 grs. 9327. On chauñfa légèrement et alors le dépôt nuageux de l’or peut être facilement reliré des parois du tube sous la forme d'une feuiile très brillante. Après la volatilisation électrique le résidu du morceau d’or fut examiné au microscope : il occupait 1/4 de la lamelle de verre, son aspect ‘appelait un dépôt électrolytique, il était pointillé d’un grand nombre de petites cavités. Cette expérience sur la volatilisation de l’or ayant produit de bonnes membranes cohérentes de ce métal, une autre expérience fut essayée en em- ployant une brosse de platine comme électrode négative, En se reportant au tableau, on voit que grs. 32 grs. la volatilité électrique du platine est beaucoup plus basse que celle de l’or; je pensai néanmoins qu’en prenant plus de temps, une quantité de mélal suffisante pour être recueillie hors du tube pourrait être volatilisée. Le vide fut poussé dans le tube au point de donner unespace obscur de6 millimèlres.Je trouvai,comme pour l’or, que lorsque le métal se déposait sur le verre, la résistance augmentait rapidement, mais à un degré plus marqué. Le gaz restant dans le tube semblait absorbé à mesure que le dépôt augmen- tait. Pour réduire le vide, il fut nécessaire d’intro- duire un peu d’air, environ toutes les 30 minutes. Cela semble montrer que le platine était déposé sous forme poreuse avec grand pouvoir de con- denser le résidu gazeux. Si l’on chauffait le tube lorsque de cette manière il était impuissant à conduire, il laissait cependant un passage de gaz suffisant pour diminuer la jauge de la pompe de 4 millimètre, et pour réduire le vide de facon à donner un espace obscur d'environ 3millimètres.Ce gaz ne fut pasréabsorbé pendant le refroidissement ; mais le courant passant encore pendant 410 minutes, le tube refusa encore de con- duire, par suite de l'absorption. Le tube fut denou- veau chauffé : mais il y eut dégagement de gaz J. MASSART. — L'IRRITABILITÉ DES SPERMATOZOAIRES beaucoup moindre qu'avant, et cette fois le tout fut réabsorbé pendant le refroidissement. Le courant fut maintenu dans ce tube pendant 25 heures; il fut ensuite ouvert, mais je n'ai pu recueillir le dépôt que par petits morceaux : il était fragile et poreux. En pesant la brosse qui avait servi de pôle né- galif, j’obtins les résultats suivants : Grains Poïds'enplatine ayant l'expérience..." 10,1940 — après l’expérience..... 8.1570 Perte par la volatilisation en 25 heures . 2,9379 Une autre expérience, semblable à celle de l'or et du platine, fut faite, mais en employant argent comme pôle négalif, le métal pur étant formé d'une brosse de fils fins. Moins de gaz fut intro- duit au cours de cette expérience que précédem- ment dans le cas du platine. L'argent se comporta comme l'or; le dépôt du métal fut léger, et le vide fut maintenu à un espace obscur de 6 millimètres par l'admission occasionnelle d’un courant d'air. En 20 heures presque 3 grains d'argent furent vola- lilisés. Le dépôt d'argent fut détaché du verre sans difficulté sous forme de feuilles brillantes. W. Crookes, De la Société royale de Londres. L'IRRITABILITÉ DES SPERMATOZOAIRES ET LES CAUSES DE LEUR PÉNÉTRATION DANS L’'ŒUF Les manifestations vitales que présente un or- ganisme quelconque peuvent être rangées en trois catégories. À la première catégorie se rattachent tous les actes qui déterminent ou influencent di- rectement l'échange de malière pondérable entre l'être vivant et le milieu qui l'entoure; ces actes assurent la autrition de l'organisme ; ils consistent essentiellement en réactions chimiques. À la deuxième catégorie appartiennent toutes les opé- ralions qui mettent l'être vivant en relation soit avec le monde extérieur, soit avec son propre mi- lieu intérieur, tout ce qui concourt à lui révéler ce qui se passe en lui et hors de lui; l’ensemble de ces manifestations est basé sur une propriété fon- damentale, l’éritubilité, dont la mise en jeu dépend surtout de phénomènes physiques. Enfin, une {roi- sième catégorie comprend les manifestations vi- tales qui ont pour objet la reproduction. De ces trois fonctions, les deux premières sont absolument nécessaires pour la conservation de l'individu. Que l’une d'elles vienne à disparaitre, par ce fait même l’autre sera suspendue. Si les réactions chimiques qui sont la base de la nutri- tion ne se produisent plus, le dégagement de force cessera aussitôt et en supposant même que l’orga- nisme puisse encore sentir, il ne sera cerlainement plus capable de réagir. Inversement, si l’irritabilité est anéantie, si l'organisme n’a plus conscience ni de lui-même, ni du monde extérieur, tous les échanges nutritifs seront égalemeni enravés. Lorsqu'une excitation appropriée, qu'elle soit externe ou interne, agit sur une cellule vivante placée dans des conditions normales d'existence, elle donne lieu à une manifestation toujours iden- tique. Par exemple, la Pholade dactyle rétracte son siphon chaque fois qu'on modifie brusquement l'intensité de la lumière incidente..! Aussi long- temps que les autres conditions de milieu restent les mêmes, on constate qu'une modification donnée amène toujours la même rétraetion. Ce mouvement est tout aussi fatal que le dégagement d’anhydride 1 R. Dugoys. Nouvelle théorie du mécanisme des sensations lumineuses. N° du 15 avril 1890 de cette Revue. J. MASSART. — L'IRRITABILITÉ DES SPERMATOZOAIRES 505 carbonique qui s'opère lorsqu'on verse un acide sur un carbonate. Mais s'il est vrai qu'à une exci- tation répond toujours une réaction, on peut aflir- mer avec la même certitude la proposition inverse : pour qu'une manifestation vitale se produise il faut qu’elle ait élé provoquée par une excitation préa- lable ; la spontanéité n'existe pas. Les causes qui provoquent des réactions de la part des êtres vivants sont nombreuses et variées : telles sont la lumière, l'électricité, la chaleur, la pesanteur ou bien encore les vibralions sonores, la pression,les propriétés chimiques des corps, le degré de concentration des solutions, ele. Un de ces exci- tants, pris isolément, n’agil pas nécessairement sur tous les organismes. Ainsi, les vibrations sonores qui sont perçues par la plupart des animaux, n’ont aucun effet appréciable sur les plantes ou sur les organismes inférieurs. I Les fonctions qui ont pour objet la conservation Fix, 1. — Conjugaison chez le Mesocarpus parvulus. 1. Les deux corps proloplasmiques cheminant l’un vers l’autre et se fusionnant dans le conduit de conjugaison des deux cellules en présence. — 2. L’œuf entièrement formé et entouré d'une membrane solide. Il reste entre les deux filaments (d’après de Bary). de l'espèce ne peuvent s’accomplir qu'avec la coo- pération de la nu- triion et de l'irri- der EN tabilité. Parmi les actes fonctionnels qui assurent la re - production, il en est un qui a été très peu étudié jus- qu'à présent el qui est pourtant d'un intérêt capital au point de vue du but à atteindre nous voulons par- ler de l'irritabilité des éléments mâles et en particulier des spermaltozoai- res. Ceux-ci ont d'ordinaire à fran - chir une distance considérable avant Fig. 2. — Conjugaison de deux filaments de Spérogyra longala. — 1. Les cellules présentent encore leur aspect ordinaire. On y voit la bande chlo- rophyllienne et le noyau; &, début de la formation des saillies ; b, les deux touchent. — 2, Les corps protoplasmiques se sont rétractés et for- ment des masses allongées; e, l’une des cellules traverse le conduit de conjugaison dont la paroi intermédiaire est résorbée; d, la conjugaison est accomplie. — 3. Deux œufs entiérement développés et entourés membrane. Les canaux de conjugaison qui rattachaïent ce filament à son voisin se sont rompus (d’après Sachs). saillies se , . C G PCA , : . d'arriver au contact de l'œuf. Leur irritabilité peut |; sent et l’œuf ainsi seule les guider dans ce trajet. REVUE GÉNÉRALE, 1891. (= Chez les organismes les plus inférieurs la repro- duction proprement dite manque souvent. Ils ne présentent jamais la fusion de deux cellules. La conservation de l’espèce repose uniquement sur la multiplication agame. Chez d'autres, on voit appa- raitre, à ‘un moment donné de leur existence, des cellules destinées à se conjuguer deux à deux. Mais ces éléments reproducteurs ou gamètes sont égaux. On ne peut pas distinguer parmi eux des gamètes mâles et des gamètes femelles. Ainsi, chez certaines algues, telles que les Wésocarpes (fig. 1), deux cel- lules appartenant à des filaments voisins poussent chacune une protubérance ; les deux saillies qui en résultent se dirigent Pune vers l’autre. Lorsqu'elles se touchent, la cloison intermédiaire qui les sépare se délruit el les deux corps protoplasmiques se fu- sionnent; l'œuf est formé. Les deux cellules qui son! venues se confondre pour conslituer un œuf fécondé ont fait chacune la moilié du chemin. Dans un genre voisin la Spirogyre (fig. 2, e.), l’un des corps protoplasmiques reste en place et l’autre vient le rejoindre après avoir parcouru à lui seul la distance qui sépare les deux cellules. Dès ce mo- ment un premier pas est accompli vers la différen- ciation sexuelle. Par analogie avec ce que l’on cons- late chez les organismes plus élevés de la série, on peut appeler femelle la cellule immobile; l’autre, qui s’estengagée seule dans le canal de conjugaison, représente l'élément mâle. Morphologiquement les deux cellules se valent: mais physiologiquement une légère différenciation sexuelle s'est établie entre elles. A côté exemples de ces où les cellules reproduc- trices restent atta- chées à la plante adulte, on pourrait en citer beaucoup d’autres où les ga- mèêtes sont égaux, Chez Votvoci- nées (fig. 3, 1), les gamètes sont pour- mais libres, certaines vues de deux cils à l’aide desquels el- nagent libre- ment dans le li- quide. Lorsqu'el- les se rencontrent, les elles se conjuguent deux à deux, puis leurs cils disparais- formé s'entoure d’une mem- d, 2, 31et 4). d'une brane résistante (fig. Lo 506 J. MASSART. — L'IRRITABILITÉ DES SPERMATOZOAIRES La distinction entre les gamèles femelles et les gamètes mâles s’accentue de plusen plus à mesure qu'on s'adresse à des organismes plus perfection- nés. Chez la plupart des plantes et des animaux, Fig. 3. — Conjugaison des gamétes du Pandorina Morwm.— 1. Deux gamètes pourvues de deux cils et d’une tache pigmentaire. — 2, Les deux gamètes fusionnées. — 3. Les cils ont disparu. — 4. L’œuf ayant atteint ses dimensions défini- tives et pourvu d’une membrane dure (d’après Pringshenn). l'œuf est volumineux et contient une grande quan- tité de substances nutritives destinées au futur embryon; de plus, il est immobile. L'élément mäle est beaucoup plus petit, et à va à la recherche de l'œuf. C'est ici que doit intervenir son irritabilité. Comment celle-ci pourra-t-elle avertir l'élément mäle de la présence et de la situation de l'œuf? Quel est l’excitant vis-à-vis duquel le spermato- zoïde réagit pour se diriger vers l’œuf et pour pé- nétrer ensuite dans son intérieur? Ce problème ne peut être résolu qu’en étudiant la sensibilité de ces cellules. Les recherches faites jusqu'à présent n’ont porté que sur les spermatozoïdes des fougères, des séla- ginelles, des mousses, des varechs, de la blatte et de la grenouille. Il L'œuf des fougères (fig. 4, 2) et des sélaginelles est logé au fond d’une cavité qui communique avec Fi. 4, — Organes reproducteurs de fougères. — 1. Sperma- tozoïde d’Adiantum Capillus Veneris (d'après Sachs). — >, Organe sexuel femelle très-jeune. L’œuf (a) est encore peu développé; les cellules du col ne sont pas encore gélifiées. Le col lui-même est encore fermé à son extré- mité (d’après Strasburger). l'extérieur par un col rempli d'une substance mu- cilagineuse. Les spermatozoïdes (fig. 4, 2), ont la forme d’un cône très effilé et enroulé en spirale. Le sommet du cône correspond à l'extrémité de la spirale; il est dirigé en avant pendant la progres: sion et porte de nombreux cils dônt les battements font mouvoir la cellule spermatique. Lorsque dans l’eau, où nagent les spermalo- zoïdes, on introduit un mince tube capillaire de verre contenant une solution diluée d’acide ma- lique ou d’un malate, ces corps diffusent lentement et il se forme tout autour de l’orifice une série de sphères virtuelles concentriques, correspondant à des zônes où la dilution est de plus en plus grande. Au moment où un spermatozoïde pénètre dans les sphères de diffusion, il modifie brusquement sa course; il se place de telle sorte que l'axe de son corps soit disposé normalement à la surface des sphères, l'extrémité antérieure étant dirigée vers l'orifice du tube. Il se remet aussitôt à nager. et sa direction restant la même, il est amené néces- sairement vers le tube capillaire dans lequel il finit par s’introduire. M. Pfeffer !, à qui sont dues ces expériences, a pu établir que le mucilage qui emplit la cavité où est enfoui l'œuf est imprégné d'acide malique. L'expérience dont nous venons de rendre compte est done conforme à la réalité même et l’on com- prend maintenant pourquoi les spermatozoïdes des fougères se fraient un passage à travers la masse mucilagineuse pour arriver à l'œuf. L'auteur ne s’en est pas tenu là. Il a déterminé quelle est la solution minime qui suflit à exercer sur les spermatozoïdes une attraction bien évi- dente, il l’a trouvée voisine de 1/100.000. M. Pfeffer a étudié aussi le rapport entre l’exei- lation et la réaction. Lorsque les organismes na- gent dans une solution d'acide malique telle que sa concentration soit égale à celle que contient le tube capillaire, ils ne manifestent aucune ten- dance à pénétrer dans ce dernier. Pour que l’at- traction ait lieu. il faut que la solulion placée à l'intérieur du tube soit 30 fois plus concentrée que celle qui se trouve à son pourtour. Ce rapport se maintient, quelle que soit la concentration absolue des liquides mis en présence. Ainsi pour qu'il y ait attraction, la sol. extér. étant à 0.0005 %, celle du tube doit étre à 0,015 % _ 0.001 _- _ 0,03 — noi - = 0,3 û 0.05 = a 155 12e Ces résultats sont absolument conformes à ceux que fait prévoir la loi psycho-physique de Weber, La valeur de cette loi n'avait encore été vérifiée 1 \V, Prgrrer. Locomolorische Richlungsbewegungen durch chemische Reise. Unters. a. d. bot. Institut zu Tübin- ven, — Bd 1. S. 363. J. MASSART. -- L'IRRITABILITÉ DES SPERMATOZOAIRES : 507 jusqu'alors que pour la sensibilité de l’homme; les expériences de M. Pfeffer ont affirmé de la facon la plus décisive l’analogie existant entre l'irrilabilité de l'homme et celle de ces êtres si éloignés de lui. Chez les mousses, l'œuf (fig. 5, 2), se trouve dans une cavité pourvue d’un col beaucoup plus long que celui des cryptogames vasculaires et renfermant également une bourre mucilagineuse. Les sperma- tozoïdes (fig. 5, 1), ne portent à leur extrémité anté- rieure que deux cils vi- bratils. Le mucilage qui entoure l’œuf dégage de la saccharose et c'est ce dernier corps qui agil comme excitant vis-à- vis des spermatozoïdes. M. Pfeffer a répété sur ceux-ci toutes les re- cherches qu'il avait fai- tes sur les cellules mâles des fougères; il a cons- laté qu'ils ne pénètrent dans les tubes capillai- res que lorsque la solu- tion de saccharose y est 90 fois plus concentrée qu'en dehors. C’est donc la présence dans le liquide ambiant de certaines substances chimiquement définies qui guide vers l'œuf à féconder les spermato- Fig. 5. — Organes reprodue- 7 3 SE PR teurs du Funaria hygrome- Z0ïdes des fougères, des trica. — 1. Spermatozoïde. sélaginelles et des mous- — 2. Organe sexuel femelle très jeune; l’œuf (4) est en communication avec l’exté- rieur par un col très long (b) et rempli de mucilage. Les cellules terminales de la pa- roi du col ne se sont pas encore séparées pour per- mettre l'accès des sperma- tozoïdes (d'après Sachs). ses. Lorsque les élé- ments mâles s'engagent dans un milieu fenant en dissolution l’une de ces matières, l’axe de leur corps s'oriente de telle façon que le pôle antérieur soil dirigé vers les régions les moins diluées du liquide. Il s'agit évidemment ici d’une réaction de l'organisme contre la sensation pro- duite par la présence de cette solution et non pas d’une action directe de la solution sur les mouve- ments du spermalozoïde. Or, chez les plantes que nous avons passées en revue, la dissolution de sub- stance excitante, acide malique ou saccharose, est à son maximum de concentration au niveau de l’œuf : les spermatozoïdes nagent donc nécessaire- ment vers l'œuf. Cette mème sensibilité vis-à-vis des propriétés chimiques des corps se retrouve, en dehors des cellules reproductrices, chez un grand nombre d'organismes inférieurs, flagellates, bactéries, ete., ainsi que chez les globules blancs du sang de beau- coup de Vertébrés. Elle présente, du reste, la plus grande analogie avec la sensibilité gustative et la sensibilité olfactive. III Chez les organismes qui nous restent à exa- miner, la conjugaison de l'élément mäle avec l’élé- ment femelle repose sur un genre d’irritabilité tout différent. Les premières recherches ont été faites sur la blatte par M. Dewitz!. Il dilue le sperme de cet insecte dans du chlorure de sodium à 0,8 ou 0,9 0/0, en dépose une goutte sur un porte-objet et la recouvre d’une lamelle de verre. L'examen mi- croscopique montre que les spermatozoïdes sont d'abord également, répartis et qu'ils nagent en tous sens. Mais chaque fois que l’un deux vient buter contre la surface du porte-objet ou du verre- couvreur, il ne s’en éloigne plus : il se mel à exé- cuter des mouvements de manège; il tourne en sens inverse des aiguilles d’une montre, tout en restant appliqué contre la surface du verre. Au bout d’un temps variable, toutes les cellules sont dans le voisinage immédiat de l’un des verres et la portion moyenne de la goutte n’en renferme plus. Lorsqu'on ne recouvre pas la goutte, on constate que les spermatozoïdes viennent évoluer contre la surface libre du liquide aussi bien qu'au contact du porte-objet. Ces expériences, et d’autres encore, prouvent que les gamètes mâles de la blatte sont sensibles à la pression ? : ils sentent non seulement la résis- tance du verre, mais encore la résistance beaucoup plus faible que leur oppose la surface libre des liquides. Les forces moléculaires créent à la sur- face libre des liquides une fension en vertu de laquelle un corps plongé dans le liquide éprouve une certaine résistance pour passer au travers de la couche superficielle. Cette couche peut étre com- parée à une membrane tendue. Les expériences de M. Dewitz montrent que les spermatozoïdes de la blatte sentent cette résistance et qu'ils réa- gissent comme s'ils se trouvaient au contact d’un corps solide. La réaction tactile consiste chez eux à se déplacer dans un sens déterminé tout en se maintenant en contact intime avec l’excitant. L'œuf de la blatte est entouré d’une membrane dure perforée de part en part en un grand nombre d'endroits. Ces micropyles ont la forme d’un cône creux dont la base correspond à la surface externe de la coque et le sommet à la surface interne. L'axe du cône est oblique et disposé de telle sorte 1 J. Dewrrz, Ueber Geselzmässigkeit in den Orlsverände- rungen der Spermalozoen und in der Vereiniqung derselben mi. dem Ei. Pflüger’s Archiv. Bd 38, S. 358. ? L'expérience a été variée pour éliminer l'influence de l'air extérieur (N, de la Réd.), »08 J. MASSART — L'IRRITABILITÉ DES SPERMATOZOAIRES que l'ouverture regarde vers le pôle postérieur de l’œuf. Les spermatozoïdes qui nagent sur la mem- brane s'engagent dans l’un ou l’autre des nom- breux micropyles qu'ils rencontrent, les traversent et arrivent ainsi à l'œuf. Pour les spermatozoïdes de la grenouille, les choses sont un peu plus compliquées. D'après mes observations l'ils s’accolent comme ceux de la blatte aux corps solides ainsi qu'à la surface libre de l’eau. Mais l'expérience suivante montre qu'ils présentent une particularilé de plus : lors- qu’on les fait nager dans une goutte mince et non recouverte, ils s'accumulent à la périphérie et tournent leur extrémité antérieure vers le bord extrème de la goutte. Il existe là un angle formé d'une part par la lame de verre et d'autre part par la surface du liquide. Les éléments reproducteurs y sont donc en rapport avec deux excitants à la fois. On peut en conclure que les spermalozoïdes de la grenouille se mettent en contact avec les objets résistants par le plus grand nombre pos- sible de points de leur surface. Au moment de la ponte, l'œuf est entouré d’une mince membrane de substance visqueuse qui ne tarde pas à s’imprégner d'eau et à atteindre un volume considérable. Le gonflement de cette gelée commence nécessairement par la surface ; il en ré- sulte qu'aussi longtemps que l’augmentation de volume se poursuit, les molécules solides sont plus rapprochées dans les couches profondes, où l'eau n’est encore arrivée qu'en minime quantité, que dans les couches superficielles où l'hydratation est complète. Les spermalozoïdes qui s'engagent dans les couches molles de l'extérieur cherchent à mettre un nombre de plus en plus considérable de points de leur corps en rapport avec les molécules solides et résistantes, et comme la densilé des cou- ches augmente à mesure qu’elles sont plus pro- ches de l'œuf, les spermatozoïdes pénètrent de plus en plus profondément. Aussi un grand nombre de ces éléments s’introduire dans voit-on la gelée pour se diriger ensuite en ligne droile vers l'œuf à féconder. Les plus forts et les plus actifs atteignent seuls le but, tandis que les autres s'ar- rêlent épuisés ; ainsi s'établit une véritable sélec- lion. Les spermatozoïdes de la grenouille s'introdui- sent aussi dans depelits fragments isolés de la gelée qui revêt l'œuf ainsi que dans la malière mucilagi- neuse des graines de lin et de coing. Mais, on le constate aisément, la pénétration ne s'effectue qu'aussi longtemps que ces substances sont dans la période de gonflement. Une fois que l’hydrata- lion est achevée, plus aucun spermatozoïde ne s'y engage : ils ne rencontrent plus de zones où l’exci- tation devient de plus en plus forte, et la réaction tactile n'a plus l'occasion de se manifester. Ceci explique aussi pourquoi les œufs de la grenouille ne sont aptes à la fécondation que pendant la demi-heure qui suit la ponte; en effet, au bout de ce temps, la gelée a atteint son volume définitif et les molécules solides sont partout également distantes. IV De même que chez la grenouille, l'œuf et le sper- malozoïde des varechs sont plongés dans l’eau et cessent d’avoir aucun rapport avec l'organisme adulle. Le Æucus serratus, que j'ai eu l’occasion Fig. 6. — Cellules sexuelles de varech. — 1. Spermatuzoïdes. 2, Œuf entouré de spermatozoïdes (d’après Thuret). d'étudier !, a des spermatozoïdes pointus en avant el renflés en arrière (fig. 6, 1). Ils présentent deux cils : l'un antérieur, dont les battements détermi- nent la translation de la cellule, l’autre posté- rieur qui parait servir de gouvernail pendant la natation. Lorsque ces spermatozoïdes rencontrent une surface résistante quelconque, leur sensibilité tactile est mise en jeu, eLils s'attachent par le cil postérieur, tandis que l’antérieur continue à exé- cuter de rapides mouvements oscillatoires. L'œuf des varechs (fig. 6, 2) est très volumineux, mais on voil parfois s'y altacher un {el nombre de spermatozoïdes, qu'il est entrainé en son entier. I nous parait hors de doute que la réaction tactile des éléments sexuels mâles du varech intervient d'une façon active dans le rapprochement sexuel. La sensibilité tactile des cellules isolées est loin d’être propre aux spermatozoïdes. On la rencontre chez la plupart des protistes ainsi que chez les globules blancs de tous les animaux que nous avons examinés à ce point de vue. Pour résumer les conclusions auxquelles nous conduisent les observations qui précèdent, nous dirons que l'irritabilité des spermotozoaires se manifeste de deux manières : certains d'entre eux (fougères, sélaginelles, mousses) sont sensibles aux propriétés chimiques de substances déterminées } Sur l’irritabilité des spermatozoïdes de la grenouille Bull. Acad. Sc. Belg. 1888) et sur la pénétration des sper- matozoïdes dans l’œuf de la gronouille (Jbidem. 1889). 1 La Sensibilité tactile chez les organismes inférieurs (Note présentée à la Société royale des Sciences médicales et na- iurelles de Bruxelles, le {tr décembre 1890.) NP IT ER CR VD A. LE CHATELIER. — LES PROPRIÉTÉS MÉCANIQUES DES MÉTAUX 509 qui sont sécrélées dans le voisinage immédiat de l'œuf; d’autres (blatte, grenouille, varech) sont sensibles à la pression exercée par un corps résis- tant. Les réactions qui résultent du premier mode d’excitalion interviennent pour amener vers l’œuf les spermatozoïdes épars dans l'eau ambiante ; eomme ces substances agissent en vertu de leur diffusion dans le liquide, leur influence se fait sen- tir au loin Il n’en est pas de même pour les réac- tions tactiles : celles-ci ne peuvent que maintenir les spermatozoïdes au contact de l’œuf et les y faire pénétrer; mais elles sont incapables de les attirer de loin dans la direction voulue pour assu- rer la fécondation. Jean Massart, Docteur ès sciences de l'Institut Solvay (Université de Bruxelles). LES PROPRIÉTÉS MÉCANIQUES DES MÉTAUX Les services si variés que les métaux et leurs alliages rendent dans les arts et dans l’industrie tiennent à certaines propriétés remarquables leur fénacité les rend propres à résister sous un faible volume à des efforts mécaniques considé- rables ; leur #alléabililé permet de les travailler el de les amener, soit par laminage ou étirage, à des formes géométriques telles que tôles, tubes, fils, etc., soit par forgeage à des formes plus com- pliquées, telles que les pièces des machines. Ces propriétés mécaniques sont non seulement très différentes d’un métal à l’autre, mais peuvent aussi pour un même mélal éprouver des variations étendues sous l'influence de divers facteurs dont les trois principaux sont : 1° L'état physique, qui dépend des opérations an- térieures subies par le métal : fusion, forgeage. trempe, recuit, dont les unes modifient surtoul son état cristallin etse manifestent par des aspects particuliers de sa cassure, ce que l’on appelle 4% grain. Les autres modifient surtout sa densité, en produisant ou délruisant l’écrouissage ; 29 La température ; 3° La présence de petites quantilés de matières élran- gères. Malgré leur complexité apparente, les variations des propriétés mécaniques des métaux sont sou- mises à certaines lois générales qui permettent de les rattacher à quelques idées simples et dont la connaissance facilite l’interprélation des faits que l’on observe sur tel ou tel métal en particu- lier. C’est à ce point de vue que nous nous place- rons, nous proposant d'exposer les principales de ces lois telles qu'elles résultent directement de l'expérience. I. — NATURE DES ESSAIS Le mode d'expérimentalion à la fois le plus sim- pleet le plus précis pour étudier les métaux est l'essai de traction sur fils; il donne des résultats comparables à ceux des essais usuels qui se font sur des barreaux de 10 millimètres à 20 millime- tres de diamètre ; seulement le métal à l’état de fil possède, en raison du travail Lrès complet qu'il a subi, les valeurs maxima de ténacité et de duc- tililé dont il est susceptible, valeurs qui sont légè- rement supérieures à celles du métal forgé ou la- miné en pièces plus épaisses. Eléments fournis par l'essai de traction. — Quand on soumet une tige mélallique à des efforts de traction, on observe d’abord une période dite d’é- lasticité parfaite pendant laquelle les allongements sont proportionnels aux efforts (allongement élasti- que) el disparaissent quand on supprime ceux-ci. Cette période dure jusqu'à une certaine valeur de la charge appelée limite élastique. Quand on a dé- passé la limite élastique, une partie de l’allonge- ment subsiste si l’on vient à supprimer l'effort (allongement permanent); l'allongement permanent croit plus rapidement que la charge, et celle-ci finit par alteindre une valeur qu'elle ne peut dé- passer; c’est l'effort maximum que peut supporter le barreau d'essai ou charge de rupture. Jusqu’alors le barreau a pris sur toute sa longueur un allonge- ment uniforme (allongement proportionnel). Mais si l’on poursuit l'essai, l'allongement se localise en un point où prend naissance un étranglement (s#ric- tion) qui s’accentue jusqu'à la rupture : c’est la pé- riode de striction pendant laquelle la charge va sans cesse en décroissant. La valeur de cet allon- gement local dépend de la section du barreau ; aussi l'allongement total à la rupture, somme des allonge- ments proportionnel et local, ne conserve la même valeur que pour des barreaux géométriquement semblables. Quand on opère sur des fils, l'allonge- ment local est négligeable et l'allongement total à la rupture est égal à l'allongement proportionnel ci-dessus défini. L'essai de traction fournit un autre élément des plus importants, l'allongement de striction ; c'est l’al- longement que prendrait la barre si elle avait en tous ses points la même section que dans la stric- SEASI tion. Sa valeur est définie par le rapport For S S représentant la section primitive, et S' la sec- 310 A. LE CHATELIER. — LES PROPRIÉTÉS MÉCANIQUES DES MÉTAUX lion de rupture. Cet allongement de striction peut prendre des valeurs énormes, supérieures à 1.000 ?/, alors que l'allongement proportionnel ne 0 5 dépasse pas en général 50 0/0 pour les métaux simples et 70 °/, pour les alliages. En voici quel- ques exemples : 22000 % mesurés sur des fils 3000 % — 2000 % —— 6300 % barreau de 16mm Aluminium à 400°......... Acier doux à 8000. L'importance de l'allongement de striction ré- sulle de ce qu'il définit la déformation maxima que le métal peut éprouver, celle qui dans la flexion ou sous l’action d’un choc local se produira au point le plus fatigué. En un mot, il donne la mesure de la ductilité du métal. En dehors des propriétés mécaniques que nous venons de définir, il en est encore une d'une im- portance capitale au point de vue pratique, mais qui n'est malheureusement pas susceptible de mesures précises dans les essais, et pour ce motif n'est généralement pas l’objet d’une attention assez sérieuse : c'est la fragilité. Un métal, donnant un certain allongement à l'essai de traction, est susceptible de se briser sans déformalion sensible dans diverses circons- Lances ; ainsi s’il existe une amorce de fente, celle- ci se propagera sous l'influence de chocs ou de vi- brations. même très faibles. Mais, même s’il n'existe pas d’amorce de fente, la rupture sans déforma- tion pourra se produire sous l’action répélée de vibrations de chocs, ou même simplement d'efforts alternatifs agissant avec une certaine vitesse. C'est ainsi que périssent beaucoup de pièces de machines, les essieux de chemins de fer, les rails, etc. Il. — INFLUENCE DU GRAIN. Les métaux et la plupart de leurs alliages sont cristallisés; mais les dimensions et les formes des cristaux qui les constituent sont très variables. Dans les mélaux simplement fondus le grain est en général assez grossier; les cristaux sont, comme dans toutes les cristallisations, d'autant plus gros que le refroidissement, et, par suite, leur formalion ont élé plus lents. Le forgeage, le laminage ou l'éti- rage fragmentent Jes cristaux, modifient leurs for- mes et rendent le grain de plus en plus fin. Pour certains métaux, l'acier en particulier, la trempe suivie de recuit ! est un des procédés les plus éner- 1 La trempe modifie non seulement le grain de l'acier, mais aussi sa nature chimique et son état d’écrouissage ; de la superposition de ces trois causes résultent des modifica- tions considérables des propriétés de l'acier, qui ne peuvent étre attribuées à l'influence exclusive du grain, et qui sub- sistent plus ou moins complétement suivant la nature du recuit dont la trempe est en général suivie. giques pour réduire le grain. Nous verrons enfin qu'un chauffage à température lrop élevée peut au contraire altérer le grain en tendant à ramener le métal à l’état où il se trouvait après simple fu- sion. On conçoit, el c’est un fait établi par l’expé- rience, que, de la grosseur du grain dépendent toutes choses égales d’ailleurs, l'effort que le mé- Lal supportera et la déformation qu’il éprouvera avant de se rompre ; plus le grain est fin, plus la. ténacité est considérable, et plus aussi est grand l'allongement de striction. Par exemple le bronze d'étain moulé en sable donne une charge de rup- Lure de 15° à 20" avec allongement de 5 à 40 ©}, sans striction; la coulée en coquille, qui donne un grain plus fin, lui permet d'atteindre 25 à 30% avec 40 ‘/, environ; enfin tréfilé en fil fin, ül donne 33 avec un allongement proportionnel de 65 ‘/, et un allongement de striction de 150 !}/,. Au contraire les propriétés mécaniques des métaux qui, même coulés en sable, 6nt un grain très fin, sont relativement peu modifiées par le moulage en coquille, le laminage ou l’étirage; tel est le cas des bronzes et laitons d'aluminium. Le grain a une influence encore plus grande sur la fragilité, Celle-ci croit très rapidement avec la grosseur du grain. C'est pour ce motif que les pièces en acier moulé sont inutilisables tant qu'on ne leur a pas fait subir des opérations de trempe et de recuit pour améliorer leur grain. L'allongement de siriction, dépendant dans une large mesure, comme nousl'avons dit, de la nature du grain, donne des indications précieuses sur la fragilité. £ HI. — ÉcrouissAGE. Un métal de limite élastique L, c'est-à-dire sus- ceplible de déformation permanente sous l'action d'une force infiniment peu supérieure à L, ne peut plus, après avoir été déformé d’une quantité finie, prendre une nouvelle déformation permanente que sous l’action de forces supérieures à L d’une quan- tilé finie. En un mot, il possède une nouvelle limite élastique L' supérieure à L; on dit qu'il s’est écroui. L’écrouissage est nul quand la limite élastique est égale à zéro!. L'expérience montre que la valeur de l’écrouis- sage es déterminée par celle de la déformation permanente subie à partir de l’état initial d’écrouis- sage nul et semble indépendante des conditions, 1 Il ne semble pas possible de ramener tous les métaux à l'état d’écrouissage nul. On n’y parvient en pratique que pour les métaux simples et purs : cuivre, argent, nickel, etc. ; le fer et l’acier, ainsi qu’un certain nombre d’alliages, conservent toujours une limite élastique assez élevée, quelque traitement qu'on leur ait fait subir. A. LE CHATELIER. — LES PROPRIÉTÉS MÉCANIQUES DES MÉTAUX dans lesquelles a été produite cette déformation (effort lent, rapide, ou choc), ainsi que des pro- cédés employés pour la réaliser (traction, compres- sion ou tréfilage). Parmi ces procédés, le tréfilage est celui qui permet le mieux d'obtenir des défor- mations bien définies et, par suite, se prête le mieux à l'étude de l’écrouissage. L'écrouissage, élevant la limite élastique, fait en même temps croître l'effort de rupture. qui, plus facile à mesurer que la limite élastique, peut avan- lageusement être employé pour définir l’écrouis- sage. Limite de l'écrouissage. — La valeur de l’écrouis- sage croit avec la grandeur de la déformation; mais elle croit moins vite et reste limitée quand celle- ei croit indéfiniment. Voici comme exemple des résultats obtenus en tréfilant un fil de cuivre d’écrouissage initial nul et mesurant sa charge de rupture, après chaque passe à la filière; les allongements ont été cal- culés par la diminution éprouvée par le diamètre : Charge Allongement ‘, de rupture R Diamétre au tréfilage À An in état inital 0 25 ke. 0.67 122 43 0.35 720 50 0.29 1080 ol 0.20 2400 Ryfl La limite de l'écrouissage n’est, en réalité, atleinte que pour une déformation indéfinie; mais elle l’est en pratique pour une déformation plus ou moins grande suivant la nature du métal; elle cor- respond : Pour le Nickel à A — 2000 % R — 405 ko: Cuivre rosette = 1100 = 5h" Aluminium — 300 =) Cadmium = Plomb =" ji L'écrouissage, en élevant la limite élastique, ré- duit jusqu'à zéro l'allongement proportionnel; il diminue en même temps quoique moins rapide- ment l'allongement de striction. Le phénomène le plus saillant de l’écrouissage est done ce fait, que sa valeur reste limitée quand la déformation qui lui donne naissance croit indé- finiment. Nous allons en trouver l'explication dans l'étude du recuit. IV. — Recurr Si un métal, possédant une limite élastique Let une charge de rupture R, est porté pendant ur certain temps à une température T' supérieure à T, il n’a plus. une fois ramené à la température T, qu'une limite élastique inférieure à L et une charge de rupture inférieure à R. On dit qu'il est recuit. o11 Le recuit est la destruction de l’écrouissage par la chaleur. Le recuit est complet si l'écrouissage est entiè- rement détruit, c'est-à-dire si la valeur de la li- mile élastique est ramenée à zéro. Lois générales du recuit. — Nous avons étudié le recuit en mesurant à la température ordinaire la charge de rupture de différents métaux écrouis par tréfilage, puis recuits pendant des temps va- riables à des températures de plus en plus élevées. Les courbes ci-dessous (fig. 1) représentent les 45 S 340 FO 33 < | Ÿ 30 — Ÿ 225] L | 30° lheurolPa0" 2h 220 3h 430 44 Durée di rreuil Fig. 1. résistances obtenues avec du cuivre rosette après recuit pendant des temps variables, aux tempé- ratures de 200°, 300° et 450. Il résulte de ces expériences que : 1° Le recuit est un phénomène lent, dont on peut aux températures les plus basses suivre la marche pendant plusieurs heures; 2 Le recuit à une température donnée ne peut dépasser une certaine limite, qui fhéoriquement n'est atteinte qu’au bout d’un temps infini. 3° Cette limite est d’autant plus faible et est er pratique atteinte d'autant plus rapidement que la température est plus élevée. Nous avons enfin vérifié que : 3° À une température donnée, cette limite croit moins vite que l'écrouissage initial, c’est-à-dire que la perte d’écrouissage par le recuit est d’au- tant plus forte que l’écrouissage a lui-même une plus grande valeur. Cristallisation par recuit. — Le recuit n’agit pas seulement en détruisant l’écrouissage; lorsqu'il est trop prolongé, il peut, si la température est assez élevée, modifier la texture du métal en augmentant la grosseur de son grain. Cette cristallisation par recuit s’accentue d’au- tant plus que le recuit est pias prolongé et que la température est plus élevée. Il en résulte que, si un recuit modéré augmente l'allongement de rupture d'un métal en détruisant l’écrouissage, un recuit exagéré pourra produire 512 A. LE CHATELIER. — LES PROPRIÉTÉS MÉCANIQUES DES MÉTAUX partiellement ou même totalement l'effet contraire. Ainsi, tandis qu'on donnera une grande ductilité à l'acier écroui, par laminage par exemple, en le recuisant vers 800°, on le fera cristalliser en le re- froidissant lentement après l'avoir chauffé vers 1000°, et on lui enlèvera toute malléabilité en le rendant très fragile. Le même cas se présente pour la plupart des métaux, surtout les métaux impurs ; par exemple le zinc impur devient très cassant après recuit au-dessus de 200. Recuit spontané. — L'expérience montre que, non seulement un métal se recuit sous l'influence d’une élévation de température, mais encore que, s’il est maintenu, après avoir été déformé, à la tempéra- ture qu'il avait pendant cette opération, sa limite élastique et sa charge de rupture diminuent lente- ment pour tendre vers des valeurs déterminées ; en un mot il se recuit à la température même où il a été écroui. On le reconnait aisément en mesu- rant la charge de rupture d'un fil à des moments de plus en plus éloignés de son passage à la fi- lière. Ce fait important, que nous appelons reeuit spon- tané, est la cause de l’existence d’une limite de l'écrouissage. La vilesse avec laquelle se produit ce recuit croit avec le degré d’écrouissage, tandis que ce dernier ne dépend que de la grandeur de la déformation. Pour une vitesse donnée de déforma- tion, il y aura donc, à partir d’un certain mo- ment, équilibre entre l'effet d’écrouissage qu'elle tend à produire et l'action inverse du recuit spon- tané. L'écrouissage sera limité. V. — INFLUENCE DU TEMPS. L'influence du temps sur les propriétés méca- niques des métaux est la conséquence immédiate du recuil spontané. Déformation par recuit. — Considérons un métal de limite élastique L soumis à un effort de traction P qui, au bout d’un temps donné l’a allongé d'une certaine quantité À ; si nous supprimons l’effort P, sa limite élastique, qui est à cet instant même égale à P, va diminuer sous l’action du recuit spontané el tendre vers une valeur P’ intermédiaire entre L et P;si nous maintenons la charge P, le recuit spontané agira en détruisant à chaque instant l'équilibre qui existe entre cette charge et les ré- actions élastiques du métal; celui-ci continuera done à s’allonger jusqu'à ce qu'il ait atteint la déformation pour laquelle la limite élastique défi- nitive est égale à P. Cet allongement progressif est dû à l’action directe du recuit spontané, d’où le nom de déformation par recuit que nous lui donnons. Nous voyons donc que la grandeur de la déforma- tion, produite par un effort donné, dépend du temps pendant lequel il reste appliqué. En voici deux exemples : Fiz Z’ARGENT (charge de rupture 18 kg. l) soumis à une charge de 16 kg par millim. carré. Temps écoulé depuis la mise en charge 20" 1 10 24h: 6 h. Allongement % 16 16,33 17,13 18,1 18,6 Allongement *, moyen par minute » 0,40 0,088 0,008 0,0023 Fi pe ze (charge de rupture 5 kg.!) soumis à une charge de 6 kg. par millim. carré. Temps écoulé depuis la mise en charge il 30! 2h "6 h- 9 h. 10 h. 11 b. {0° Allongement % 1,33 6 20,6 61 102 126 173 Allongement *, moyen par minute 0,26 0,186 0,162 0,173 0,228 0,400 0,670 Dans le premier cas (charge inférieure à la charge de rupture), la déformation lend vers une limite déterminée; dans le deuxième (charge supérieure à la charge de rupture), la déformation croît jus- qu'à la rupture avec une vitesse qui, dans la der- nière période de l'essai, devient de plus en plus grande. Variations des charges de rupture avec la durée des essais de traction. — Wertheim a le premier montré que la charge de rupture d’un métal est d'autant plus grande que la durée de l’essai est plus faible. Ce fait est la conséquence directe des considéra- tions précédentes; en augmentant la vitesse de l’essai de traction, on diminue le temps pendant lequel le recuit peut agir, on augmente la valeur des degrés d'écrouissages croissants que prend le métal sous l'influence des allongemenis croissants qu'il éprouve, et, par suite, on augmente sa charge de rupture. Voici quelques résultats que nous avons obtenus sur des fils dans des essais de traction de durées variables : DURÉE DE L'ESSAI 30! ai 415! 60° indéfinie (par — — — — extrapolation) Fer fondu à 15°. 39k.7 38k.8 37k. 36k. » Jinc'aMEEerter » 24 16-0044" 5 k Cuivre 2450 NOTE SET 1 25.872514 23.8 D CLEAN LE 20.2 19400474 14.5 — 300." 1707 » 15 13 6.7 Ce qu’il importe le plus souvent de connaitre dans la pratique, c'est la charge que le métal peut supporter indéfiniment sans se rompre, celle qui correspondrait à un essai de durée indéfini; on 1 Ces charges sont celles qui ne produisent les ruptures qu’au bout d’un temps infini. mena A. LE CHATELIER. — LES PROPRIÉTÉS MÉCANIQUES DES MÉTAUX doit déduire sa valeur par extrapolation d'une série d'essais de durées de plus en plus longues. Pour les métaux usuels que l’on ne fait travailler qu'à une fraction assez faible de leur charge de rupture, un essai d’une durée de 2° ou 3° fera con- naître, à la température ordinaire, cette charge de rupture avec une approximation suffisante; mais, en se contentant d’un tel essai, on s’exposerail à de graves mécomptes, ainsi que le montrent les chiffres donnés ci-dessus, soit à la température ordinaire pour des métaux tels que le zinc, soit aux températures plus élevées pour les autres métaux, pour le cuivre par exemple à partir de 200°; l'im- portance du recuit allant en effet en grandissant avec la température, il en est de même de lin- fluence du temps qui, pour tous les mélaux,devient très grande à une température suffisamment élevée. En voici un exemple pour l'acier : des barreaux d'acier extra doux d'une résistance de 35° à 5° nous ont donné à 800° les résultats suivants : Duree dell'essar...."22"#"""""... 25! 350" Charge dérupture "rc Sk. 5k. 100 D'après ces deux chiffres on peut admettre que la résistance indéfinie de ce métal est à 800° voi- sine de 4* et par conséquent 5 fois plus faible que celle qui est donnée par l'essai de 3'50" !. Résistance au choc. — Les chocs donnent lieu à des efforts de courte durée et produisent par suite des déformations plus faibles que des efforts de même valeur appliqués pendant un temps plus long. La résistance vive à la rupture, toute ques- tion de fragilité mise à part, ne peut donc êlre déduite, comme on le fait souvent, des essais de traction. Elle est toujours supérieure à celle que l’on calculerait de cette façon. L'écart est d'autant plus grand que la durée du choc, durée variable avec la masse et la vitesse relative des corps qui se choquent, est plus faible. Si l'on considère en particulier des chocs de même intensité, par exemple des poids P {om- bant de hauteurs H telles que P>< H soit constant, la durée du choc et par suite la déformation se- ront d'autant plus faibles que H sera plus grand. Voici par exemple les chiffres d’écrasements ob- tenus dans ces conditions sur des cylindres en plomb de 50 "/, de hauteur et 20 "/, de diamètre?. 1 Dans certaines opérations métallurgiques telles que la manœuvre des canons ou plaques de blindages dans l’opéra- tion de la trempe, on fait travailler à des températures de 8000 à 9000 les chaines ou autres engins qui supportent ces pièces. 2 Cet exemple est emprunté à l’étude de MM. Sarrau et Vieille sur l'emploi des manomètres à écrasement pour la mesure des pressions développées par les substances explo- sives. 13 Poids Hauteur de chute Écrasement 5 kg. 3m {3um,s 10 4.50 13,9 45 1 14,4 VI. — TEMPÉRATURE. La variation des charges de rupture avec la température présente au point de vue pratique une grande importance. Pour étudier cette variation il est nécessaire, sous peine de s’exposer à de graves erreurs, de n'opérer que sur des métaux préala- blement recuits à la plus élevée des températures que l’on se propose d'atteindre; si l’on mesure en effet la charge de rupture d’un métal écroui à une température à laquelle il se recuit avec une cer- laine vitesse, il se recuira plus ou moins complè- tement suivant la durée de cet essai et le résullat obtenu sera bien plus variable avec cette durée que s'il n'avait été influencé que par le recuit spon- tané. En voici un exemple, obtenu avec le cuivre à 250° : Durée de l'essai 20" 10! 30 Cuivre écroui (R—50 k. à 159) R—34k. 24k.7 18k. — recuit (R — 25 k. 4 15°) R—18,8 17,8 16,4 On voit que pour le métal écroui la charge de rupture à varié du simple au double quand la du- rée de l'essai a passé de 30" à 20”, Les métaux pour lesquels la charge de rupture varie d'une manière lente et continue avec la tem- pérature sont peu nombreux ; ce sont en particu- lier les métaux simples tels que le cuivre, l'argent, l'aluminium, le cadmium etc., etc. ; d'autres mé- taux simples, le fer, le nickel, le zinc, tous les dérivés du fer et un grand nombre d’alliages pré- sentent à certaines températures soit une aug- | Lditon | TA Tr DE OOT Dre) \ — LC} | | | | Dx © Q A Carmes de replure ei | I | 40° 0° +40° 80 120 160 200 240 269 320 360 400 460 480 Températures de -4o* à. +4#80° Fi. 2. mentalion, soit une chute brusque de résislance. Enfin les alliageséprouvent en outre aux tempéra- 14 A. LE CHATELIER. — LES PROPRIÉTÉS MÉCANIQUES DES MÉTAUX tures voisines du point de fusion du plus fusible des métaux qui les constituent une véritable dé- composition qui entraine une décroissance rapide de l'allongement et de la charge de rupture; ce fait se remarque en particulier sur les laitons à partir de 250° à 300°. A ces tempéralures ces mé- taux donnent des charges de rupture et des allon- gements d'autant plus faibles que la durée de l'es- sai est plus grande, et finissent au bout d’un temps suffisamment long par se rompre sous des efforts très faibles sans presque se déformer. Nous don- nons (fig. 2\ les courbes représentant les résultats que nous avons obtenus dans des essais d’une du- rée moyenne de 5! à 10’ pour le cuivre, l'argent, l'acier extra doux, le zinc et un laiton à 30°/, de zinc. Ces métaux avaient élé recuits aussi complè- tement que possible !. VIE — IMPURETÉS ?. On sait quelle influence peuvent avoir de très pelites quantités de matières étrangères sur la propriétés mécaniques des métaux. Ainsi le fer, qui à l’état chimiquement pur aurait une ténacité voisine de celle du cuivre (R — 98* pour les fers de Suède les plus purs), peut atteindre, même après recuit, des résistances voisines de 100% s'il contient de petites quantités de carbone, manganèse, chrôme, ete. Les autres métaux sont sensibles, bien que dans une moindre proportion, à la même influence,et l'addition d’impuretés convenablement choisies est un des procédés les plus précieux que nous possédions pour modifier leurs propriétés. Les impuretés ont deux modes d'action dis- tincts : 1° Elles modifient la condition dans laquelle se produit le recuit et par suite influent sur l’écrouis- sage; à ce point de vue elles agissent toutes dans le même sens retardant le recuit et favorisant l’é- crouissage. 2° Elles peuvent modifier le grain du métal et alors ont, suivant leur nature, une influence bien- faisante où nuisible. Influence sur l’écrouissage et le recuit. — Des essais que nous avons faits sur différents métaux, en particulier le cuivre et l'argent, il résulte que toutes les impuretés, quelle que soit leur nature, ont pour effet général de retarder le recuit *, de sorte que le métal le plus pur est celui qui se recuit le plus ra- 1 Les résultats relatifs à l’acier extra doux proviennent d’essais que nous avons faits récemment dans les ateliers de la Compagnie des chemins de fer de l'Est sur des barreaux de 16 m/m de diamètre. Les autres métaux ont été essayés en fils de 0 m/n, 6. 2 Nous employons le terme mpurelés dans le sens absolu de matières étrangères alliées en petites quantités à un métal. 3 Nous rappellerons que ce fait est depuis longtemps connu pour le cuivre. pidement et le plus complètement à une tempéra- ture donnée et pour lequel la température où le recuit devient complet est la plus basse, Ainsi du cuivre électrolytique se recuit déjà rapidement à 200°; à 300° le recuil atteint son terme en quelques minutes, alors qu'à la même température on peut pour le cuivre du commerce suivre la marche du recuit pendant plusieurs heures. En même temps que les impuretés ralentissent l’action du recuit, elles éièvent la limite finale d’écrouissage à la- quelle le métal est ramené par un recuit très pro- prolongé. Le même relard est apporté au recuit spontané ; il a pour effet d'augmenter l'intensité de l’écrouis- sage produit par une déformation donnée. Voici un exemple de cette double influence des impuretés. ARGENT pur alliéà1% alïéàl% de cuivre d’étain Charge de rupture après écrouissage complet. . 33 kg 55 ke 45 kg Après recuit complet... 18 22,1 22 L'addilion d'impuretés est donc un procédé gé- néral pour augmenter la ténacité d’un métal; mais, par contre, elle diminue toujours son allongement après recuil complet. Tnfluence sur le grain. — Nous avons indiqué plus haut qu'un recuit à lempérature suffisamment élevée pouvait modifier le grain d’un métal. Cette cristallisation par recuit dépend essentiellement de la nature des impuretés contenues dans le mé- tal. Ainsi, c'est un fait bien connu que le carbone et le phosphore facilitent l’altération du grain de l'acier quand on le chauffe au-dessus de 1000. MM. Osmond et Werth, dans leur Théorie cellu- laire de l'acier, l'ont expliqué ce fait de la manière suivante : « Si on réchauffe de l’acier à ces tem- pératures, le carbure de fer (ciment) qui enveloppe les globules de fer entre en fusion et permet à ceux-ci de se grouper pour donner lieu à des ar- rangements (cellules composées) d'autant plus vo- lumineux que la durée du chauffage aura été plus prolongée !. Les choses se passent de même pen- dant la solidification du métal. Cette influence des impuretés sur le grain et par contre-coup sur les propriélés mécaniques n’est pas particulière à l'acier; c’est un phénomène gé- néral; nous l'avons en particulier très nettement observée sur des échantillons d'argent recuits pen- dant >’ au rouge : Charge de rupture Allongement % ATBENTIDUT eee — _à 1% d’étain. 1 Il est vraisemblable que cette agglomération doit être at- tribuée à des phénomènes de capillarité. A. LOIR. — LE SURMENAGE ET LE CHARBON CHEZ LES MOUTONS AUSTRALIENS 15 L'échantillon d'argent contenant de l’étain qui par sa fusibilité a joué le même rôle que les car- bures de fer dans l'acier, avait fortement cristal- lisé et s’est rompu presque sans allongement. Inversement, des impuretés, dont le point de fusion est plus élevé que celui du métal, ou qui forment avec lui des composés remplissant les mèmes conditions, pourront contrarier la cristalli- salion soit par fusion, soit par recuil, et tendre à améliorer le grain, C’est un fait que l’on observe souvent dans les cristallisations des substances chimiques; ainsi la cristallisation des silicates de chaux, de la wollastonite par exemple, est consi- dérablement gênée par des traces de silice ou de chaux en excès sur les proportions théoriques. Telle est l’action du chrome sur l'acier; les fontes chromées sont peu fusibles et le chrome entrave la cristallisation de l'acier en lui donnant une finesse de grain remarquable. Le silicium agit dans le même sens. Nous en citerons un autre exemple : on sait que les bronzes et lailons d'aluminium donnent, par simple moulage en sable, des chiffres de résistance et d'allongement qui ne sont égalés par aucun autre mélal; ils doivent ces propriétés remarquables aux composés peu fusibles formés par l’aluminium avec le cuivre qui les empêchent de cristalliser; il suffit d'ajouter un centième d'aluminium à du laiton ordinaire pour lui donner | un grain très fin. Ainsi les impuretés tendent à augmenter la grosseur du grain si leur point de fusion ou celui des composés qu'elles forment avec le mélal est inférieur au point de fusion de celui-ci: elles Len- dent à la diminuer dans le cas contraire; leur nalure a donc à ce point de vue une influence énorme sur les propriétés mécaniques des métaux, en parliculier sur leur fragilité. En résumé les propriétés mécaniques des mé- Laux, envisagées dans leur ensemble, dépendent, une fois que l’on a défini la composition, l’étal chimique ! et la température, de deux éléments principaux : le grain el l'écrouissage, lequel parait être, dans une large mesure, fonction de la den- sité; les variations de cette densité déterminent pour un métal donné les variations de l'intensité des forces moléculaires, par suite la manière dont ce mélal se comportera sous l’action des forces extérieures. Ces deux éléments — grain el écrouissage — dé- pendent en même temps de conditions très com plexes et en particulier de tous les états antérieurs par lesquels le métal est passé. L'influence rési- duelle de ces divers états varie d’ailleurs beaucoup avec la proportion et la nature des impuretés con- tenues dans le métal. André Le Chatelier, Sous-Ingénieur de la Marine, LE SURMENAGE ET LE CHARBON CHEZ LES MOUTONS AUSTRALIENS Il est très difficile de savoir exactement le total des pertes par le charbon en Australie. Les squat- ters ne veulent pas avouer la mortalité, de peur de déprécier la valeur de leur propriété, de sorte que l’on ne connait pas exactement sur quelle étendue de pays sévit la maladie. Les pertes doivent être très considérables; il existe des stations tellement maudites, qu’elles amènent la ruine de tous ceux qui cherchent à les exploiter. Depuis que la vaccinalion Pastorienne à été in- troduite dans la Nouvelle Galles du Sud, on com- mence à avoir quelques indications. Un grand nombre de squatters demandent en grande quan- tité les vaccins préparés ; ils reconnaissent, de ce fait, l'existence de la maladie de Cumberland dans leurs propriétés. D'autres, plus confiants dans la valeur de l'inoculation préventive, consentent à donner les chiffres de la mortalité avant la vacci- nation. Les pertes avouées de 20, 25 % par année, sont communes. | Une expression très employée par les squatters des régions infectées est ne compensent pas la mortalité. » Un propriétaire de 30.000 moutons me répondait, à ce sujet : « Je sais que sur ma propriélé je puis nourrir 30,000 bêtes ; nous nous arrangeons, en général, de facon à avoir pour la boucherie un peu moins du tiers du troupeau; pour cela nous conservons le nombre de brebis nécessaires, en admettant qu'environ 80 % des brebis donnent un agneau. Lorsque nous di- sons que les naissances ne compensent pas la mor- talité, nous voulons dire que nos pertes sont d’un peu plus de 30 %. » « Les naissances 1 1] ne faut pas oublier que certains métaux comme le nickel, le fer, l'acier, un grand nombres d’alliages peuvent xister sous des états chimiques (moléculaires, allotropiques) différents. Ils ont sous ces divers états des propriétés aussi différentes que deux corps de composition chimique dis- tincie, et ces changements d’états peuvent être produits par les mêmes influences qui modifient le grain et la densité. Tel est le cas de l’écrouissage pour le nickel et le ferro-nickel, de la trempe pour lacier, 516 A. LOIR. — LE SURMENAGE ET LE CHARBON CHEZ LES MOUTONS AUSTRALIENS À quoi lient celte mortalité si élevée? Le charbon australien ne semble cependant pas plus virulent que le charbon de France ; c’est-à-dire que la même quantité de sang ou de culture, ino- culée à des cobayes, entraine la mortsensiblement dans le même temps qu'en France. En octobre 1888, dans une expérience publique faite par le D' Germont et moi, pour démontrer l’ef- ficacité des vaccins Pasteur contre la maladie de Cumberland,20moutonsfurentvaccinésavecles vac., cins venus de Paris, et 15 jours après on leur ino- cula le sang d'un mouton mort du charbon une heure avant. Ces moutons résistèrent parfaitement; ils sont encore vivants actuellement, trois ans après, élant dans une propriété où les pertes sont de 12 à 15 °/, chaque année. Dix-neuf moutons té- moins, inoculés, en octobre 1888, en même temps, avec le même sang, moururent après des périodes d’incubation données par le tableau sui- vant : Inoculation du 2? octobre 1888 Ne Mort le 3 octobre 30 h. 15 aprésl’inoculation To HonERe — 30 h. 26' HO. — 32 h. 40' HSE — 33 h. 25 LH ISERE Mort le 4 octobre 34 h. 5! 1H SE - SON (DÉS EE — SRE De 26/h.25! OR Se 36 h. 35! AO AVES = 31 h. 40° SRE — 39 h. 45! SEPT — 40 h. 15 LÉO Sn Hh 5h bio re oee — 49 h DRE Le 49 h LCR — 49 h. NI TARETES — 51 h. 30’ CÉPECETEE — 52 h.45' 5........ Mort le 5 octobre 63 h. 30! Ces durées d’incubation sont sensiblement les mêmes que celles signalées dans le rapport de M. Rossignol sur l'expérience de Pouilly-le-fort, en 1881, sur des moutons dans des conditions sem- blables. Mais, en Australie, il est des cas où la mort ar- rive très rapidement ; par exemple, il n’est pas rare de voir des moulons conduits dans une contrée infestée, ÿ mourir 18 à 20 heures après leur arri- vée. Ils ont été fatigués par le voyage; peut-être la fatigue est-elle la cause de cette courte incuba- tion. L'expérience suivante a été faite pour étudier l'action du surmenage, comme cause de diminu- tion de la longueur de la période d’incubation. Quatre moutons sont inoculés avec le sang d'un animal mort du charbon ; ils sont ensuite forcés, pendant 7 heures de suite, à marcher et à cou- rir dans l’enclos, poussés qu'ils sont par un berger à cheval; ils ne paraissent pas, après cela, aussi fatigués que les moutons qui ont été exposés au surmenage et à la soif pendant un voyage de plu- sieurs jours, sur des routes où ils ne trouvent que peu ou pas de nourriture. Nos quatre moutons ont élé certainement un peu surmenés, et en exami- nant leur température, on note une élévation no- table due à la fatigue provoquée. La mort de ces quatre moutons inoculésle5 octobre 1890, à2 heures de l'après-midi, est arrivée: Lo re eeTelbioct- 2h 24 h. après l'inoculation CSS — 4 h. 26 h. 30... Le 8 oct. à 6 h. 30 dumatin 40 h. 30! 40h — 7h. 30 41 h. 30° En comparant ces résullats avec ceux du tableau donné ci-dessus pour les 19 moutons inoculés le 2 octobre 1888, puis conservés au repos dans une élable, on constate que pour 2 des 4 moutons sur- menés, la période d'incubation a été de beaucoup plus courte que pour aucun des 19; et que la moyenne de cette incubation chez les 4 surmenés (33 heures environ) est considérablement moins longue que la moyenne de l’incubation chez les autres. Il me semble qu’en généralisant ces résultats, on peut admettre que le surmenage joue un rôle, comme cause de la grande mortalité, en rendant les animaux plus suceptlibles. Le surmenage existe à un très fort degré chez les moutons, dans les conditions où ils se trouvent dans les immenses déserts de l'Australie; on ren- contre des troupeaux de plusieurs milliers de têtes dans des propriétés où ils sont à raison de 2 mou- tons à l’hectare. Il y a desslations composées d'un seul enclos de 40.000 hectares, à raison d'un mou- ton à l’heclare, et quelquefois, dans les régions pauvres, il faut jusqu'à 5 hectares pour nourrir un mouton. Dans ces enclos ils sont absolument li- vrés à eux-mêmes, el souvent poursuivis par les Dingos, (chiens sauvages), ou effrayés par les kangouros, qui viennentaussi manger le peu d'herbe que l’on trouve. Je compte, pour répondre à mon hypothèse, dès que J'en aurai l’occasion, inoculer un certain nombre de moutons avec un virus atlénué, c’est-à-dire un virus ne tuant pas, à l’état ordinaire, tous les mou- tons, mais seulement une certaine proportion, le deuxième vaccin Pasteur, par exemple, el voir son action sur les animaux surmenés, A. Loir, Directeur de l'Institut Pasteur australien. BIBLIOGRAPHIE. -—- ANALYSES ET INDEX 17 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Enneper Alfred, — Elliptische functionen. Theo- rie und Geschichte (Fonctions elliptiques. Théorie et histoire). — Akademische Vorträge, Zweite Auflage Neu bearbeitet und herausgegeben von D Félix MULLER, (Prix :28 fr. 15). Verlag von Louis Nebert, Halle a.S. 1890. L'ouvrage d'Enneper sur les fonctions elliptiques est bien connu de tous les mathématiciens et la première édition, parue en 1875, a marqué un progrès au point de vue didactique, dans cette importante théorie. De- puis lors, la science à marché, de nombreux travaux se sont accumulés et il était devenu indispensable, dans une nouvelle édition, de modifier profondément la pre- cédente; c’est ce que vient de faire M. le D' Félix Muller, professeur au Konigl. Luisengymnasium de Berlin. M. le Dr Muller a pris pour base fondamentable des mo- difications qu'il a faites les travaux de M. Weierstrass ; les notations adoptées par cet illustre géomètre ten- dent de plus en plus à remplacer les notations primi- tivement choisies, et les découvertes qui lui sont dues ont constitué de décisifs progrès; le regrelté Halphen, qui devait lui-même tracer un sillon lumineux dans la- théorie des fonctions elliptiques, le constatait il y a cinq ans lorsqu'il publiait le premier volume de son bel ouvrage ; il faisait alors en France ce que M. Muller fait aujourd'hui en Allemagne. Dans le traité actuel d'Enneper les méthodes de M. Weierstrass sont complètement exposées; l’'Auteur suit à peu près pas à pas les feuilles publiées jadis, d’après les lecons du Maître, par M. H. A. Schwartz ; mais il y ajoute un grand nombre de compléments re- cueillis par lui directement. C’est surtout à ce point de vue que le volume présente un réel intérêt, FAO: Picard (Alfred), Inspecteur général des Ponts et Chaus- sées, Président de section au Conseil d'Etat, — Rap- port général sur l'Exposition universelle de 1889. — Imprimerie Nationale, Paris, 1891. Le beau volume que vient de publier lImprimerie nationale sur l'Exposition universelle de 1889, est le premier du rapport général confié à M. Alf. Picard ; tous ceux qui connaissent le savant président de section du Conseil d'Etat savent que toute œuvre signée de lui serait de premier ordre; le volume dont nous rendons compte est à la hauteur de cette opinion. Il est entièrement consacré à l'historique des Exposi- tions universelles et aux préliminaires de PExposition de 1889 ; l’auteur s'arrête au moment de l’organisation des divers services; l'Exposition elle-même n'y figure encore en rien. Les matières sont réparties en trois chapitres; dans le premier qui contient l'historique des Expositions universelles francaises, M. Picard rappelle d’abord cette première exhibition de l’an VE, imaginée par François de Neufchâteau pour consacrer la gloire du nouveau gouvernement, exhibition qui eut lieu au Champ de Mars et qui, malgré le pelit nombre des exposants (110 seulement), fut un grand succès. Il examine ensuite successivement l'Exposition de lan IX dans la cour du Louvre (220 exposants), celle de l'an X au même endroit (540 exposants), celle de 4806 à l’Esplanade des Invalides (1422 exposants), celle de 1819 dans les salles du palais du Louvre (1662 exposants), celle de 1823 au rez-de-chaussée de la colonnade du Louvre et au {°° étage du palais (1642 exposants), celle de 1827 au Louvre encore (1695 expo- sants), celle de 1834 à la place de la Concorde (2447 exposants), celle de 1839 aux Champs-Elysées (3381) ET INDEX exposants), celle de 184% au même endroit (3660 expo- sants), entin celle de 1849 aux Champs-Elysées encore (4532 exposants). L’Exposition universelle de 1849 est la dernière des expositions nationales; à partir de ce moment, les expositions vont devenir internationales. La seconde partie du volume, qui est de beaucoup la plus impor- tante. est constituée par l’étude des expositions umiver- selles internationales qui se sont succédées à Londres en 1851; à Paris en 1855; à Londres en 1862: à Paris en 1867 ; à Londresen 1871,1872, 1873 et 1874: à Vienne en 1873; à Philadelphie en 1876; à Paris en 1878; à Sydney en 1879; à Melbourne en 1880; à Amsterdam en 1883; à Barcelone et à Bruxelles en 1888. Le volume se fermine par une troisième partie consacrée aux préliminaires de l'Exposition de 4889 et dans laquelle, après avoir rappelé les lois relatives à l'institution de l'Exposition ou à son exécution, M. Pi- card énumère les actes divers qui en ont fixé les élé- ments constitutifs, Grâce à lui, l'Exposition du Cente- nure aura un monument digne d'elle et du succès qu'elle a obtenu. L. O. Wolf (C.), Membre de l'Institut, Astronome à l'Observa- toire de Paris. — Astronomie et Géodésie. — Cours professé à lu Sirbonne, et rédigé par H. Le Burbier et P. Bourguignon, 1 vol. in-4 de 444 pages (10 fr). — reorges Carré, éditeur, 58, rue Suint-André-des-Arts, (re Paris, 1891. Il serait superflu de faire l’éloge de cet ouvrage que recommande assez le nom de l’auteur. M, Wolf n’a pas cherché à faire un traité volumineux, mais il visait surtout la clarté, et il a parfaitement réussi. Il s’est at- taché principalement à faire comprendre le caractère des méthodes employées en astronomie, méthodes qui avec leur allure presque continuelle d’approximations plus ou moins grandes, étonnent un peu, à l’origine ceux qui sont habitués aux rigueurs du calcul mathé matique. Comme on ne viendrait pas chercher dans cet ou- vrage, consacré spécialement à l’enseignement. des recherches sur des sujets nouveaux ou obscurs, signa- lons le chapitre sur l’excentricité : dans ce champ bien battu cependant, M. Wolf à émis une idée nouvelle, en démontrant la possibilité d'éliminer complétement l'er- reur d’excentricité dans la lecture des cercles gradués par une disposition convenable de la graduation et des microscopes. Les premiers chapitres de l'ouvrage sont consacrés à la trigonométrie sphérique et à la description des ins- truments employés pour la mesure des angles et du temps, L'étude du mouvement diurne conduit ensuite à la détermination de l'heure, à l’emploi des instru- ments méridiens et au calcul de la réfraction. Puis l'étude du mouvement du Soleil parmi les étoiles et des variations des ascensions droites des étoiles mène à la précession des équinoxes et à la nutation. Cette partie est complétée par la théorie du mouvement du Soleil, qui conduit à la définition des diverses espèces de temps, et par celle de l’aberration, Deux chapitres sont consacrés à la théorie des mouvements de la Lune et des planètes, et enfin le dernier est relatif à la géo- désie. C’est, comme on voit, le programme de la licence ès sciences mathématiques logiquement développé. Aussi cet ouvrage constitue un précieux accroissement pour la collection des publications de ce genre entre- prise par la maison Carré; en le rédigeant, MM. Le Barbier et Bourguignon ont bien mérité des candidats à la licence. G. BiGouRDAN. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques. Gay (Jules), Doctewr és sciences, Professeur de Physique au lycée Louis-le-Grand. — Lectures scientifiques. Extraits de mémotres originaux et d'études concernant la science et les savants : Puysique ET cime, 1 vol in 8° de 800 pages. (Prir : 5 fr.) Hachette et Cie, 79, boulevard Saint-Germain, Paris, 1891. L'ouvrage de M. Gay constitue une innovation, et une innovation des plus heureuses. Trop souvent dans l’enseignement des sciences physiques, le professeur passe très légèrement sur les expériences fondamen- tales qui ont servi à établir d’une facon définitive les principes et les lois, alors que la discussion de ces ex- périences simples serait le meilleur exercice de lo- gique appliquée que l’on püt donner à de jeunes es- prits ; on à, au contraire, la préoccupation d'en dire beaucoup, et d’en dire long, et l’on donne une impor- tance parfois scandaleuse à des descriptions d'appareils et d'expériences dus à des savants de quatrième ordre. Pour réagir contre ces tendances, le meilleur moyen est d’habituer les élèves et de forcer surtout les profes- seurs à remonter d'eux-mêmes aux sources, à consul- ter les mémoires originaux qui, dans le cas où l’expé- rience ne peut être répétée commodément, constituent le véritable fondement de la certitude dans les science expérimentales; ils y apprendront à bien voir, par les discussions des auteurs eux-mêmes, quel est le fait précis que démontre telle expérience, indépendam- ment des hypothèses qu’on a pu après coup bâtir des- sus, hypothèses que parfois on commence par expo- ser en grands détails aux élèves, quitte à leur citer ensuite l’expérience capitale comme un accessoire. Le livre de M. Gay s'adresse à tousles professeurs el à tousles élèves qui ne se trouvent pas dans cette situa- tion privilégiée d’avoir sous la main une bibliothèque scientifique admirablement pourvue. Ils auront dans un sen] volume les citations les plus caractéristiques de Galilée, — auquel M. Gay fait très justement remonter l’origine de la physique moderne, parce qu’ «en s’atta- quant le premier, avec éclat et à ses dépens, à l’auto- rité absolue d’Aristote, il a véritablement fondé la mé- thode expérimentale, » — une page fort intéressante d’Archimède sur la démonstration de son principe d’hydrostatique, des citations très étendues des mé- moires ou des lettres de Pascal, de Mariotte, de New- ton et d’Huyghens ; ils connaitront Coulomb, Volta, OErsted, Ampère, Faraday, non seulement parce que leursnoms sontrépandus partout, mais encore pour avoir lu eux-mêmes l'exposé, fait par leurs auteurs, des dé- couvertes qui ont fondé l'électricité. Ceux qui voudront apprécier la portée de la révolution faite au siècle dernier dans la chimie de la matière, et de nos jours dans la chimie biologique, dans l'étude des êtres vi- vants infiniment petits, trouveront là les éléments né- cessaires pour se faire une idée de l’œuvre de Lavoi- sier etde l’œuvre de Pasteur. Les extraits de mémoires originaux sont accompa- gnés de notices relatives à la biographie des savants et à l’état de la science à leur époque. Ces notices sont généralement empruntées à d’autres savants : les noms de Biot, d’Arago, de Dumas, sont ceux qui reviennent le plus souvent dans l'ouvrage de M. Gay. En mettant entre les mains de tous ces pages, dont quelques-unes sont parmi les plus belles qu’on ait écrites dans notre langue, on habitue les esprits à cette idée, contre la- quelle existent encore tant de préjugés, que leshommes de science, les hommes qui savent penser fortement et nettement, sont souvent aussi ceux qui savent le mieux exprimer l’ordre géométrique avec les vérités que Pascal rangeait dans les sentiments les plus déli- cats et les idées les plus élevées, L'auteur a pensé qu'il ne saurait mieux terminer le recueil qu'en empruntant à Claude Bernard et à Pasteur quelques pages d’une grande portée philosophique sur la science et sur la méthode expérimentale, Nous sommes convaincu que d'ici à quelques an- nées l'exemple donné paa M. Gay sera suivi de tous côtés; on ne tardera pas à saisir l’importance de cette conception nouvelle de l’enseignement qui consiste à attribuer à la lecture des mémoires originaux un rôle prépondérant même dans des lecons élémentaires, M. Gay aura le mérite, en recommandant et en facil- itant la lecture des savants anciens, d’avoir été un novateur. Bernard BRUNHES. Buguet (Abel), — La Photographie de l'amateur débutant. 3° édition, avec 44 figures. (Prix 1 fr. 25). Soc. d'Editions scientifiques, Place de l'Ecole de Médecine, 4, rue Antoine-Dubois à Paris, 1891. Ce petit volume contient avec les indications pra- tiques qui s’y rapportent la description et l’image de tous les appareils nécessaires ou utiles à la photogra- phie de paysage et de portrait, Gaudin (G.). — Notions de chimie générale, { wol. in-8° de 38% pages (Prix : 5 fr.). A. Colin et Cie, édi- : teurs, 5, rue de Mézières. Paris, 189. Ce livre est destiné à l’enseignement dans les lycées, et bien que naturellement la forme abrégée lui con- vienne, on ne peut s'empêcher de (rouver qu'il ne: contient qu'une portion bien minime de la chimie gé- nérale : 177 pages y sont consacrées aux nombres pro- portionnels (équivalents et poids atomiques), 97 à la théorie atomique, valence, formules de constitution, le reste du volume à la dissociation. Les questions de chaleur, électricité, cristallisation, dissolution, lumière, y sont ou complètement passées sous silence ou à peine effleurées à l’occasion de la détermination du poids atomique. Ce sont des notions fort incomplètes. Il est à regretter qu'elles manquent aussi d’exactitude, M. Gaudin nous apprend dans sa préface qu'il a cher- ché la clarté. Il faut l'en louer, mais cela n'autorise pas à remplacer les faits par un roman qui donne aux choses une simplicité absolument étrangère à la réa- lité, Ainsi, pour prendre un exemple entre beaucoup, M. Gaudin annonce qu'on vérifie que la chaux contient uniquement du calcium et de l’oxygène en chauffant du calcium dans de l'oxygène. Pourquoi dire une chose aussi parfaitement fausse ? M. Gaudin doit bien savoir que ce fait ne se vérifie pas par voie directe et que par voie directe il est invérifiable, le calcium n'ayant été obtenu jusqu'ici (s'il l'a été) que fort impur : sa couleur même est contestée, On doit apprendre aux élèves la chimie telle qu’elle est et non telle que M. Gaudin pense qu'elle devrait être. La partie relative à la disso- ciation est encore moins bonne, La dissociation y est définie, « une décomposition incomplète des corps composés sous l’action de la chaleur, quand ils sont maintenus en présence de leurs produits de décompo- sition ». Si l’on chauffe de l’oxyde de platine de facon à n'en décomposer qu'une partie tout en le maintenant en vase clos, ce sera donc une dissociation ? Les sys- tèmes hétérogènes sont dits ceux où le composé consi- déré ‘est solide et les produits de décomposition un solide et un gaz. Les liquides ne se dissocient donc pas? Il n'existe donc pas de solide donnant uniquement des gaz? Il est difficile d'écrire avec plus de légèreté sur des questions qui demandent pourtant de l’atten- tion, Parfois, on pourrait croire que M. Gaudin n’a pas relu son livre et l’a écrit sans y faire attention, Ainsi, page 247, il donne aux carbonates des métaux diva- lents (0—16) la formule 0 ,0 DO 07 0 et fait ressortir l’analogie avec l’azotate de calcium ! Comment peut-on laisser passer de pareilles énormités et quelle étrange chimie enseignera-ft-on aux élèves de cette facon ! ‘ E. DEMARGAY. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 19 83° Sciences naturelles. Priem (Fernand). — L'évolution des formes ani- males avant l'apparition de l'homme. (3 fr. 50). Libraürie J.-B. Baillière et fils, 19, rue Hautefeuille. Paris, 1891. Aujourd'hui que la théorie de l’évolution est acceptée en principe par la grande majorité des naturalistes, il est intéressant de savoir comment la paléontologie nous permet de concevoir l'apparition et la variation des formes vivantes. Tout le monde ne peut pas con- sulter les importants ouvrages de Zittel, de Neumayr, de Cope, de Gaudry. M. Priem a réuni dans un volume de dimensions modestes les notions auxquelles ces auteurs, et bien d’autres encore, sont arrivés au sujet de l’évolution des animaux. Bien des discussions subsis- tent encore au sujet de ces questions difficiles : sur ces points obscurs M. Priem se montre d'une grande pru- dence. Les opinions auxquelles il s'arrête sont dans leur ensemble les plus vraisemblables, et celles qui réunissent les suffrages des savants les plus éminents. Ce qui doit assurer le succès de ce petit livre, c’est qu'il présente, avec clarté et concision, une synthèse rapide de ce qu'il y a de plus attrayant dans une science à laquelle on reproche fréquemment son ari- dité. Les zoologistes liront en particulier avec le plus grand intérèt le chapitre relatif aux mammifères el pourront constater combien les dernières recherches ont contribué heureusement à combler les lacunes de nos connaissances sur l’enchainement de ces êtres L'histoire des ammonites, dont la classification et lévo- volution sont si difficiles à étudier dans les traités clas- siques, est aussi présentée d’une manière heureuse, Ce livre s'adresse donc d’une facon toute spéciale aux débutants qui réclament depuis longtemps un ouvrage de paléontologie à la fois élémentaire et essentiellement moderne, Félix BERNARD. Lamounette, — Recherches sur l’origine mor- phologique du liber interne. These de doctorat présentée à la Faculté des Sciences de Paris le 2% fé- vrier 1891. Masson, Paris, 1891, On sait aujourd’hui qu’un grand nombre de familles du groupe des Dicotylédones possèdent un double liber dans leurs faiscéaux conducteurs. De Bary avait donné aux faisceaux ainsi constitués le nom de faisceaux bi- collatéraux, et les recherches de Petersen semblaient devoir consacrer définitivement cette dénomination de bicollatéralité. J'ai montré, le premier, que d’une facon générale, le liber interne n’était pas d'origine procambiale et qu'il provenait de l’évolution de cer- taines cellules du parenchyme médullaire ; aussi ai-je proposé, pour éviter toute fausse interprétation d’ori- gine, de donner au liber interne la dénomination de liber médullaire. Mais, comme dans une étude générale sur les anomalies de la tige, je n'avais pu Gonner à cette question particulière tout le développement qu’elle comportait, peut-être n’était-il pas inutile de rechercher à nouveau l’origine première du liber in- terne; il y avait, en outre, intérêt à connaître l’origine de ce liber, non seulement dans la tige, mais encore dans la feuille; à savoir aussi comment et aux dépens de quels éléments le liberinterne s’organisait entre les - racines et la tige et comment il apparaissait dans les cotylédons épigés. Ce sont ces divers points que M. Lamounette a si minutieusement étudiés dans le travail qui fait l’objet de cette analyse. Dans la première partie de son travail, M. Lamou- nette donne le résultat de ses recherches sur l’origine du liber interne dans l’axe hypocotylé et dans les coty- lédons épigés; dans la deuxième partie, il étudie l’ori- gine du liber interne dans le bourgeon terminal et dans les feuilles. L'étude du passage de la racine à la tige nous éclaire sur l’origine du liber interne dans l’axe hypocotylé et nous montre qu'il est indépendant à la fois du liber de la racine et du liber externe des faisceaux de l’axe hypocotylé; en outre, sa formation, dans ce même axe, est toujours postérieure à la formation des élé- ments libériens externes et ligneux des faisceaux aux- quels il se surajoute, et il prend naissance dans les cel- lules du parenchyme conjonctif central. L'examen des cotylédons a mis en lumière ce fait intéressant, c’est que le liber interne ou supérieur fait toujours défaut dans les cotylédons, lorsqu'il manqre dans l'axe hypocotylé; on peut donc en conclure que l’évolution des cotylédons est corrélative de l’axe hypocotylé, et qu'il n’y a des formations anormales dans les cotylédons que tout autant qu'il y en a dans l'axe hypocotylé. Ajoutons qu'au point de vue de l’ori- gine, elle est la même que dans l’axe hypocotylé, et l'indépendance de cette formation, déjà attestée par l'étude du passage de la racine à la tige, se manifeste aussi nettement dans les cotylédons. M. Lamounette étudie ensuite en détail l’origine du liber interne dans le bourgeon terminal, et les résul- tats exposés dans cette partie importante de son travail confirment pleinement l'exactitude de mes conclusions, en les généralisant même, puisqu'elles permettent d'étendre ces conclusions à la famille des Cucurbitacées qui avait trouvé une place à part dans mes recherches. La dénomination de liber médullaire, proposée par moi, se trouve donc ainsi pleinement justifiée, Enfin, dans les feuilles, le liber interne ou supérieur se forme toujours postérieurement aux autres éléments des faisceaux. En outre, cette formation peut manquer dans la feuille, bien qu'existant dans la tige (Daphne Lawreola). Au total, des excellentes et consciencieuses re- cherches de M. Lamounette, on peut conclure qu'il faut, dans tous les cas, considérer le tissu libérien in- terne comme une formation anormale due à l’évolution de quelques cellules parenchymateuses et indépen- dantes du faisceau auquel il est adjacent, Elles semble- raient aussi démontrer que le liber interne rentrerait dans la catégorie des caractères acquis pendant l’évo- lution des plantes et transmis ensuite par hérédité. Et partant de ce fait, l’auteur n'hésite pas à émettre cette hypothèse bien hardie, à savoir si le liber interne ne résultérait pas d'une action particulière produite sur les cellules parenchymateuses par des conditions phy- siologiques jusqu'ici indéterminées. « Ne pourrait-on pas », dit-il en terminant, « retrouver les causes qui lui ont « donné naissance ». Le problème paraît assu- rément bien difficile, sinon impossible à résoudre: mais, par ce temps de physiologie végétale à doseinten- sive, nous devons nous attendre aux surprises les plus grandes. J. HÉrai. Protopopoff (D').— Sur la question de la struc- ture des Bactéries. Ann. de l’Institut Pasteur, mai 1891, La question de la structure des Bactéries est encore bien loin d’être définitivement résolue, et l’on peut accueillir avec empressement toutes les contributions à ce problème si intéressant de morphologie cellulaire, Depuis les travaux de Butschli, la recherche du noyau des Bactéries qui avait été faite sans résultat, a été re- prise par nombre d’observateurs : Butschli a démontré pour un certain nombre d'espèces bactériennes, que la masse cellulaire comprend une couche corticale et un corps central, l’un et l’autre de structure alvéolaire, et très distincts sur des préparations colorées à l’hé- matoxyline. D'après Zacharias, le corps central ne serait qu'un noyau; d’après Ernst, il y aurait dans les Bactéries de petits corps variables de nombre et de grandeur qu'il considère comme autant de noyaux. D'après Klebs, au contraire, le protoplasma tout entier de la bactérie se- rait de nature nucléaire, M. Protopopoff a fait porter son investigation sur deux 220 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX bactéries différentes. Il a observé par coloration à la fuchsine une sorte de stratification du protoplasma, rappelant tout à fait la description de Ernst; mais à l'inverse de ce dernier, il repousse l’idée d’une assimi- lation entre les masses colorées et les noyaux cellu- laires. : La question du noyau des Bactéries semble donc ne pas être résolue, et il se pourrait qu’elle ne le fût pas de sitôt. Dr H, Dumrer. 4° Sciences médicales. Javal (E.), Membre de l'Académie de Médecine, — Mémoires d'Opthalmométrie annotés et précédés d’une introduction. 1 vol. in-8° avec 135 fig. (20 fr.). G. Masson, 20, boulevard Saint-Germain, Paris, 1891. Il est inutile d’insister sur les progrès qui sont dus, en oculistique, à l'emploi de l’ophtalmomètre de Javal et Schiôtz : grâce à la facilité de son maniement, il permet la détermination rapide des rayons de courbure de la cornée, M. Javal, sollicité de faire un manuel d'ophtalmométrie qu'il ne peut rédiger maintenant, faute de temps, a eu l’heureuse idée de réunir les tra- vaux les plus importants faits à l'occasion ou à l’aide de lophtalmomètre, de manière à mettre les cher- cheurs et les cliniciens à même d’utiliser fructueu- sement cet appareil. Nous ne pouvons passer en revue, même rapidement, les mémoires ainsi rassemblés, et nous nous bornerons à quelques rapides indica- tions. à Les mémoires comprennent, outre une intéressante introduction de M. Javal, des notes plus ou moins étendues, sur le principe de l'appareil, sa description, son mode d'emploi, sur la théorie mathématique de l’ophtalmométrie de la cornée, sur l'historique de la question. Dans uu autre ordre d'idées, on trouve des mémoires sur l'astigmatisme, sur ses variétés, des statistiques comprenant de nombreuses observations, des mesures faites dans des conditions variées, des notes sur la position du cristallin, sur le centrage de l'œil; c’est pour ainsi dire la partie physiologique après la partie physique. Enfin viennent les observations cliniques, dont l'importance est grande; on sait maintenant que l’astigmatisme joue souvent un rôle, pendant longtemps ignoré, dans la production des états pathologiques de l'œil: c’est ce que mettent en évidence les observations reproduites et dont nous regrettons de ne pouvoir citer les auteurs. M. Javal a pensé qu'il convenait de publier les tra- vaux qu'il réunissait dans la langue dans laquelle ils ont été écrits : on y trouve ainsi, outre le francais, l'allemand, l'anglais et l'italien; nous ne discuterons pas cette disposition, qui gênera sans doute quelques lecteurs, car il peut être intéressant d’avoir le mémoire original. Les travaux sont insérés par ordre chrono- logique et, ici, nous regrettons le parti pris par lPau- teur: l'ouvrage manque ainsi d'homogénéité, et il nous eût paru plus satisfaisant si les mémoires de même nature avaient été rapprochés, de manière à établir trois ou quatre grandes divisions. Il est vrai qu'il s’agit ici, non d’un livre à lire, mais d’un recueil à consulter, aussi notre critique ne présente-t-elle pas une grande importance. Il ne faudrait pas croire que ce recueil représente la collection complète des travaux qui reposent sur l’em- ploi de l’ophtalmomètre ; M. Javal a dù faire un choix parmi les plus intéressants; si nous ajoutons qu'il a écrit une introduction qui fait connaitre l’état actuel de l’ophtalmométrie, et qu'il a joint des annotations à quelques mémoires, on reconnaitra que, non seule- ment il est l’inspirateur des travaux ainsi mis au jour, mais de plus qu'il a donné à ce volume un caractère personnel qui ajoute à sa valeur comme collection de mémoires. C.-M. GARIEL. Lucet (Adrien), — De la congestion des mamelles et des mammites aiguës (d’origine externe) chez la vache. Un vol, de 1#3 pages avec 4 planches en chromo- lithographie, (prix : 7 fr.) Georges Carré, 58, rue Saint- André-des-Arts, Paris, 1891. Dans cette étude, fondée sur l'observation de la sé- rie intégrale des mastites qui se sont présentées à lui de mars 4889 à fin mai 1890, M. Luet distingue la con- gestion des mammitles proprement dites, La congestion est un état pathologique, caractérisé par un engorgement päteux, à évolution lente et pro- gressive, d'un volume variable, envahissant générale- ment tout l'organe, souventambulatoire, régulièrement indolore ou à peine sensible, existant, dans la majorité des cas, sans réaction fébrile, toujours sans gravité et de courte durée ; elle ne rend jamais le lait cailleboté ; quelquefois cependant celui-ci est teinté en rouge, tout en restant bien lié. Elle peut se produire ante partum : c’est alors une exagération de la congestion physiologique ou post partum : elle résulte alors soit d’un retard dans léta- blissement de la sécrétion, soit de la mauvaise confor- mation d’un ou plusieurs trayons, obstrués ou imper- forés. Elle survient encore au cours de la lactation à la suite de la suppression de la succion, d'un arrêt dans la mulsion, d'un traumatisme, etc. Dans un cas de mort subite (vache foudroyée pen- dant un orage), M. Lucet a pu faire l'examen histolo- gique de la glande qui offrait tous les caractères de la congestion du tissu conjonclif. Dans quatre cas, il a cherché à déterminer l’état bactériologique du lait; toujours les cullures sont restées stériles, toujours aussi ce lait, injecté à des cobayes, à des lapins, ete. a paru dépourvu de propriétés pathogènes. La mummile aigüe est une affection fort variée dans sa gravité, parfois mortelle, s’accompagnant toujours, dès le début, d’une fièvre intense. Elle cause constam- ment, dès les premières heures, dans la sécrétion de la partie envahie, une perturbation caractérisée par laltération du lait, qui devient grumeleux, cailleboté, Elle a souvent pour conséquence la perte irrémédiable du quartier atteint; elle se développe avec rapidité et provoqueen quelques heures des engorgements souvent énormes. Ceux-ci ne siègent le plus souvent que sur un seul quartier; ils atteignent cependant quelquefois l'autre quartier du même côté, mais n’envahissent jamais Ja glande entière et ne sont jamais ambulatoires. Le grand développement des mamelles et la longueur exagérée des mamelons semblent des causes prédis- posantes, mais, pour que la mammite se développe, il faut que les canaux galactophores ou que les lympha- tiques superficiels soient envahis par des agents infec- lieux divers, provenant généralement des fumiers, quelquefois des mains des marcaires, ou même de la bouche du petit. Suivant la porte d'entrée de l'infection, on peut dis- tinguer les mammites lymphogènes et les mammites galactogènes. L'examen bactériologique des lésions permet tou- jours d’y rencontrer des microbes variéssuivant les cas. Ceux-ci sont tantôt plus nombreux dans le tissu con- jonctif et dans les vaisseaux lymphatiques que dans le lissu glanduleux, tantôt au contraire accumulés sur- tout dans ce dernier, tantôt enfin répartis à peu près également dans toutes ces lésions, mais occupant cons- tamment une situation en rapport avec la forme de la maladie. Les cultures du lait ont toujours démontré la présence de microbes dont le pouvoir pathogène sur le lapin et le cobaye a varié suivant les cas. D' Henri HARTMANX. ñ\ Pr sr « ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 521 è ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER (La plupart des Académies et Sociétés savantes, dont la Revue analyse ordinairement les travaux, sont actuellement en vacances.) ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 13 juillet 1891, 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Boussinesq : Calcul de la moindre longueur que doit avoir un tube circulaire évasé à son entrée pour qu'un régime sensiblement uniforme s'y établisse; la dépense de charge qu’entraine l'établissement de ce régime, — M.S.-P. Langley a fait des recherches expérimentales sur le planement des plans lourds lancés dans Pair horizontalement avec des vitesses variables et inclinés d’angles variables sur l'horizon. Il a reconnu qu'avec de grandes vitesses el des angles très petits, il n'ya qu'un travail relativement faible nécessaire pour prolonger indéfiniment la chute ; des chiffres déduits des expériences, il résulte que l’on possède aujourd’hui des moteurs assez légers pour se soutenir en l'air en utilisant ce principe. — M. Féraud propose une mo- dification du mode de suspension des véhicules de chemin de fer et de tramways devant produire une meil- leure utilisation de l’élasticité des ressorts. — M. Em. Marchand : Observations des taches et facules solaires faites à l’équatorial Brunner de l’Observatiore de Lyon pendant le premier semestre de l’année 1891. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Massin a mesuré la capa- cité, la self-induction et l'induction mutuelle de trois lignes télégraphiques aériennes; il donne des détails sur les méthodes employées par lui pour ces mesures, qui n'avaient jamais été effectuées dans des conditions pratiques, — M. A. Leduc, préparant de l’azote en faisant passer de l'air atmosphérique sur une colonne de cuivre réduit par l'hydrogène et porté au rouge, avait observé dans ces conditions la réduction d’une petite quantité d'oxyde de cuivre ménagé à l'extrémité terminale de Ja colonne ; il démontre qu'il se forme par l’action de l'hydrogène sur le cuivre au rouge sombre un hydrure de cuivre qui possède, au rouge, dans un courant d’un gaz inerte, une tension de disso- ciation appréciable ; c’est cet hydrogène, fixé par le cuivre, puis dissocié dans le courant d'azote, qui a faussé les déterminations de Regnault sur la densité de l'azote. — M, Guntz a repris la question de l’action de la lumière sur le chlorure d'argent; il a constaté directement un dégagement de chlore sous l’action des rayons solaires concentrés par une lentille; le ré- sidu est constitué par du sous-chlorure d'argent Ag?Cl identique au sous-chlorure obtenu du sous-fluorure; cette décomposition absorbe 28 cal. 7; par une action moins intense, la lumière donne une transformation 1is0- mérique ou un état de condensation différent du chlo- rure d'argent, qui alors abandonne facilement son chlore aux corps qui en sontavides (révélateurs); l’action pro- longée de la lumière sur le sous-chlorure donne fina- lement de l’argent métallique. — M. Moissan avait observé que si l’on fait arriver du trifluorure de phos- phore dans du chlore, la couleur verte disparait, et qu'il en résulle un nouveau composé gazeux. M. C. Poulene à repris l'étude détaillée de ce gaz, qu'il a préparé en notable quantité et qui répond à la for- mule PFS CL : il décrit ses principales propriétés. — M. À. Besson a combiné directement le bromure de bore à l'hydrogène phosphoré ; la composition du pro- duit, obtenue en déterminant le volume d'hydrogène phosphoré qu'absorbe un poids donné de bromure de bore, est BoBr°, PH; ce corps est très altérable à l'air; chauffé à 300 dans un gaz inerte, il dégage de la- cide bromhydrique et laisse comme résidu du phos- phure de bore; M. Besson indique les principales pro- priétés de ce dernier corps. —M. L. Ouvrard en chauf- fant de la zircone dans du chlorure de calcium fondu à la température du bec Bunsen à obtenu le zirconate de chaux, CaO,Zr0?; les cristaux présentent de grandes analogies avec le stannate de chaux préparé par le procédé de M. Ditte et avec le titanate de chaux naturel ; au moyen des chlorures de strontium et de baryum, M. Ouvrard à préparé de même, quoiqu'avec plus de difficulté, les zirconates correspondants. — M. A. de Grammont a obtenu par l’action d’une solution de borate de soude sur du silicate de chaux, à haute température et sous pression, un silico-borate de chaux hydraté que sa composition et ses propriétés physiques paraissentidentifier aveela datholite. — M.G. Patein a étudié l'action du fluorure de bore sur les uitriles de la série grasse et de la série aromatique ; il a trouvé que le fluorure de bore se combine à ces corps molécule à molécule, comme Landolph Pavait vu pour les aldéhydes, acétones et carbonyles. — M. A. Haller, en traitant le dérivé potassé du camphre cyané par des iodures alcooliques et des chlorures acides, a obtenu, par double décomposition, une série de cam phres’ Cyanoalcoylés, cyanobenzoylés et le camphre cyanoorthotoluylé. 3° SCIENCES NATURELLES, — À propos de la communi- cation de M. Müntz, M. S. Winogradsky rappelle qu'il avait signalé le fait que le produit principal de la nitrification en cultures pures dans des solutions mi- nérales est l'acide nitreux. Il ajoute les observations nouvelles qui suivent : des échantillons de terre pro- venant de points divers du globe, ensemencés sans pu- rification dans des solutions minérales, ont donné des nitrites, qui se sont rapidement transformés en ni- trates; dans des séries de culture successives, la transformation en nitrates a été constamment en dimi- nuant, disparaissant plus ou moins vite suivant la provenance de l’échantillon initial ; deux séries où la fonction d’oxydation des nitrites s'était conservée ont été utilisées pour la recherche de l'agent de cette oxy- dation; les cultures sur gélatine n’ont rien donné; la série provenant d’une terre de l'Amérique du Sud a donné dans des solutions de nitrite un petit bâtonnet, distinct de l’agent nitrificateur de la même terre, oxy- dant les nitrites et sans action sur l’ammoniaque. Les microbes vulgaires n’ont pas montré d'aptitude à oxy- der les nitrites. — M. L. Boutan a observé à Suez les formes jeunes du Parmophore; l'étude de ces formes confirme les assertions qne l’auteur avait émises à propos du développement de la Fissurelle, à savoir que dans ce groupe de Gastéropodes, l’ontogénie est cal- quée sur la phylogénie, — M. A. Schneider commu- nique diverses observations sur l'appareil circulatoire des amphipodes et des arachnides et sur l'appareil respiratoire des aranéides dans ses rapports avec la circulation, — M, P.Parmentier expose l’histoire du genre Eucléa (Ebénacées) d’après les principes de M. Vesque. — M. M. Hovelacque décrit la structure du système libéro-ligneux primaire et la disposition des traces foliaires dans les rameaux du Lepidodendron selaginoïdes. — M. St. Meunier à examiné une pluie de pierrailles qui s'était produite à Pel-en-Der (Aube), le 6 juin dernier, au cours d'un orage: il résulte de ses remarques que les fragments de pierre de 25 à 35 millimètres ont dû être transportés par le vent à une 322 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES distance de 150 kilomètres à vol d'oiseau. — M. Ed. Willm a fait l’analyse des eaux salines ther- males de Rennes-les-Bains (Aude); ces eaux offrent une réaction acide énergique et sont minéralisées par les sulfates ferreux et d'aluminium; elles renferment de l'acide sulfurique libre. MÉMOIRES PRÉSENTÉS, — M. E. Wolfbauer adresse une note sur un nouveau procédé d'extraction de l'aluminium. — M. G. Hinrichs adresse une note relative à la tension de la vapeur d’eau saturée; l’objet de cette note est de montrer que les résultats numé- riques récemment publiés par M. Cailletet s’écartent de ceux qui avaient été précédemment obtenus par Dewar, précisément dans le sens indiqué par les tracés qu'avait donnés M. Hinrichs, comme une conséquence des déterminations de Regnault supposées prolon- gées. — M. J. Laurent adresse une note portant pour titre : De la chaleur spécifique du chlorure d'ammo- nium et de ses conséquences au point de vue de la loi de Dulong et Petit et de la loi de Wæstyn. — M. F. Planat adresse une note relative à un appareil auquel il donne le nom de Boussole solénoi- dale bimétallique, sans trace de fer. Séance du 20 juillet 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. Mouchez : Observa- tions des petites planètes faites au grand instrument méridien de l'Observatoire de Paris, pendant le deuxième semestre de l’année 1890 et le premier tri- mestre de l’année 1891. — M. C. Flammarion : Dispa- rition apparente presque totale des satellites de Jupiter. — M. Mouchez présente les procès-verbaux de la troi- sième réunion du Comité international de la carte du Ciel. Toutes les questions relatives à l'exécution de la carte sont aujourd'hui entièrement résolues ; ilnereste plus quelque doute que sur les procédés de mesure, d'utilisation et de reproduction des documents, La réu- nion à adressé à l’Académie des remerciements pour tout ce qu’elle a fait en faveur de l’œuvre de la carte du Ciel, — M.J. R. Hind : Eléments des comètes ellip- tiques de Swift (1889 VI) et Spitaler (1890 VII). —M. H. Bazin a étudié expérimentalement les pressions de l’eau dans un cas particulier des déversoirs (nappes noyées en dessous) dans le but de déterminer pour ce casle coeflicientm de la formule classiqueQ—mlh|/29 h. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. D. Hurmuzescu a cons- {até qu'un fil métallique fin tendu, traversé par un courant continu, se met à vibrer; pour une tension dé- terminée, l'amplitude de la vibration paraît dépendre de la différence des températures du fil et du milieu ambiant, — M. Labatut a examiné ce qui se passe lorsqu'on applique le procédé de photographie des couleurs de M. Lippmann à des pellicules colorées ; les radiations absorbées par la couleur employée im- pressionnent la plaque avec une rapidité relative- ment grande; la lumière blanche dans ces conditions colore la plaque; les radiations non absorbées interfe- rent; celles absorbées produisent un système de lames minces donnant, sur la face de la pellicule en contact avec le mercure, la couleur complémentaire de celle employée, sur l’autre face, cette couleur même, — M. Leduc a repris la question de la composition de l'air, en se mettant à l’abri de la cause d'erreur qui vicie les expériences antérieures etqu'il a signalée dans la séance précédente à l’Académie (introduction d'hy- drogène dans l’azote par le cuivre employé pour rete- nir l'oxygène) ; il s’est servi de la méthode de Brunner, eu remplacant la mesure du volume de l’azote par une pesée. —- M. P. Sabatier a préparé du séléniure de silicium en chauffant au rouge du sélénium cristallisé dans un courant d'hydrogène sélénié; il décrit les principales propriétés de ce corps. — On sait qu'un mélange de deux corps fusibles, ne réagissant pas chi- miquement au sens ordinaire du mot, fond à une tem- péralture qui n’est pas la moyenne des points de fusion des corps composants. M. L. Vignon a repris expé- rimentalement la question pour divers hydrocarbures ; il étudie la variation du point de fusion suivant la na- ture du mélange. —- M, À. Livache a reconnu que le produit solide résultant de l'oxydation des huiles sic- catives, traité d’une manière convenable par divers disselvants, se laisse séparer en deux parties, l’une complètement soluble, l’autre se gonflant seulement par le dissolvant; cette propriété rapproche ce pro- duit du caoutchouc. M. Livache propose de le préparer d'avance et de l’employer en pâtes ou mélanges fluides avec des dissolvants appropriés.— M, L. Carré propose pour doser le phénol de le transformer en acide pi- crique dans des conditions déterminées et d'évaluer ca- lorimétriquement l'acide picrique formé. 3° SCIENCES NATURELLES, — MM, D. Labbé et Oudin ont étudié l’action sur le sang de l'air ozonisé; au moyen de l’hématospectroscope de M. Hénocque, ils ont constaté une augmentation du taux de l’hémoglobine chez les sujets ayant subi ces inhalations, — M. A, Vil- liers a constaté, dans la transformation de la fécule en dextrine par le B. amylobacter, l'existence d’une di- astase qui opère faiblement cette transformation, mais l’action principale est vraisemblablement due à la vie du bacille même. — MM. Hugounenq et Eraud ont isolé des cultures du gonocoque une toxalbumine qui jouit de la propriété spéciale d'irriter le testicule, à l'exclusion des autres tissus. — M. A. Charpentier résume les expériences qu'il a communiquées antérieu- rement à la Société de Biologie, expériences par les- quelles il démontre l'existence d'oscillations dans la sensibilité rétinienne, une courte phase d’inexcita- bilité suivant à brève distance toute excitation. — M. Ch. Contejean a repris chezles batraciens l'étude de Pinnervation de l’estomac. Il a constaté que le pneumo-gastrique est le nerf coordinateur des mouve- ments de l'estomac. La sécrétion est surtout com- mandée par le plexus intra-stomacal; le vague et le sympathique, en antagonisme l’un de l’autre, exercent une action régulatrice sur cette sécrétion. —M. L. Roule : Sur le développement du mésoderme des Crustacés et sur celui de ses organes dérivés. — M. A. Malaquin a cherché à établir la morphologie des appendices céphaliques des annélides; il conclut que ces appendices doivent être homologues aux parapodes d'un segment unique. — MM. Lépine et Barral ont étudié la glycolyse dans le sang soumis à une circula- tion artificielle dans un membre séparé du corps; ils ont constaté comme précédemment in vitro une dimi- nulion de la glycolyse dans le sang des chiens diabéti- ques à la suite de l’extirpation du pancréas. — MM. Prillieux et Delacroix démontrent par des expé- riences que le parasite du ver blanc peut se communi- quer au ver à soie; la maladie ainsi produite est très voisine de la Muscardine. — M. E. Blanchard compare les faunes et les flores de l’Amérique du Nord et de l'Europe pour y découvrir les preuves de communi- cations terrestres entre ces deux continents pendant l’âge moderne. M. Mascart lit une notice sur W. Weber. MÉMOIRES PRÉSENTÉS. — M. Ferron adresse un com- plément à son mémoire intitulé : Essai d’une théorie mathématique sur les fractures terrestres et les dia- clases artificielles. — M. Kondriawtzeff adresse un volume contenant les résultats de nombreuses re- cherches géologiques dans la région des usines Maltzeff (Russie Centrale). L. LAPICQUE. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 21 juillet 1891, Discussion à propos de la communication faite par M. Lannelongue à la dernière séance, à laquelle pren- nent part MM. Le Fort. Guérin, Lannelongue, et Guéniot. — M. Panas : Héléroplastie dermique des paupières, La blépharoplastie classique à pédicule vi- vant mérite la préférence sur les autres méthodes, quand elle est possible. L'ancienne méthode, dite ita- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 223 lienne, présente un grand inconvénient consistant dans l'obligation pour le malade de maintenir le bras, au- quel on emprunte le lambeau de peau, pendant plu- sieurs jours dans une attitude forcée fort pénible à supporter, M. Panas emploie un procédé qui consiste à prendre des lambeaux de peau sur une partie quel- conque du corps (tête, bras) ; les lambeaux sont assez volumineux, Dans un cas le lambeau pris sur la tête mesurait 5 centimètres sur 2, dans un autre jusqu'à 8 centimètres sur 2, M. Panas communique six obser- valions se rapportant à diverses lésions: ectropion, cicatrices vicieuses après brûlures, Dans ces six cas le succès fut complet, — M. Laborde, par une étude pro- longée des sels de strontiane purs, démontre que la stronltiane et ses composés sont dépourvus de toute toxicité et qu'ils possèdent une innocuité propre et re- lative complète. À cet égard la différence entre les sels de potasse el ceux de strontiane est constante ; tandis que les premiers finissent toujours, à la longue, par exercer une action nocive sur la nutrition générale, les seconds, au contraire, paraissent bienfaisants et favorables à cette nutrition. M. Millard (de New-York) el M. Costomiris (d'A- thènes) ont été élus membres correspondants étrangers, SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 11 juillet 1891, M. À, H. Pilliet a éludié histologiquement divers cas d’angiome du foie chez des sujets d’âges très diffé- rents; ses recherches lui ont montré que l’hématopoièse continue à s'effectuer dans ces tumeurs jusqu’à un âge avancé. — M. Malassez rapporte avoir observé des faits analogues sur des tumeurs de la moelle des os, (tumeurs à myéloplaxes) que l’on peut considérer comme des angiomes à leurs premiers stades de formation. — À propos de la note de MM. Albarran et Liuria sur le cathélérisme permanent des uretères, M. P. Poirier rappelle que cette opération a déjà été effectuée avec succès par de nombreux chirurgiens et par lui-même, M. J. Moitessier a constaté que le travail musculaire (marche modérée) augmente l'éli- mination de la créatinine par l'urine, Séance du 18 juillet 1891. M. Domingos Freirelit un travail sur la vaccination de la fièvre jaune, —M, Poirier signale la facilité avec laquelle, sur le cadavre, une injection poussée dans l'uretère passe dans la veine rénale, — M.Nocard, après avoir vacciné une chèvre contre le charbon, lui a in- jecté une culture charbonneuse dans les conduits galac- tophores; depuis plusieurs semaines, la chèvre, très bien portante, donne un lait très abondant en bactéries charbonneuses, — M. R. Blanchard présente quel- ques observations sur trois helminthesrares de l’homme. — M. Mégnin signale chez le pigeon une forme de diphtérie œsophagienne paraissant particulière à cette espèce ; elle peut rester latente chez les adultes, mais ceux-ci, en gavant leurs petits, leur communiquent la maladie, quiles tue rapidement, Ainsi s'explique le fait observé fréquemment par les éleveurs de pigeons, de couples en apparence bien portants perdant invariable- ment tous leurs petits en bas âge, L. LAPICQUE. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 24 juilleé 1891, M. Tanret présente un nouveau modèle de dialyseur formé d’une feuille de papier pliée en forme de caisse, que l’on pose sur une terrine pleine d’eau. On peut empiler ces caisses les unes dans les autres et ren- forcer autant que l’on veut l'action dialysatrice. — M. Hanriot confirme la constitution des isoxazols, Il a obtenu par l'action du brome, en présence de l’eau, sur l’amidométhyléthylisoxazol, la bromoxazolone cor- respondante. On peut enlever le brôme par l’action des réducteurs et obtenir la méthyléthylisoxazolone, corps très stable que n’attaquentni le perchlorure de phosphore ni la potasse à l’ébullition. La bromoxazolone réagit à froid sur la potasse et donne le sel d’un acide monoba- sique CLH°A7-03 avec séparation de bromure de potas- sium, — MM.Behal et Auger établissent la constitution des corps désignés par eux sous le nom d'acides à sels rouges et obtenus en faisant agir les chlorures de ma- lonyle substitués sur les carbures aromatiques en pré- sence du chlorure d'aluminium. Ils les considèrent comme des tétrahydro-métanaphtoquinones. Ils ont montré dans la précédente séance que l'attaque dunoyau se faisait foujours en position para, si cela était pos- sible, en ortho ou méta dans les autres cas, La naphto- quinone dérivée du métoxylène a pour constitution : (ere) CH — C2H° CH° Co CH? Ce composé s’altère à l'air humide et donne de l'acide propionique el un acide bibasique. L’acide chromique provoque la même oxydation : C’est une méthode gé- nérale de préparation des acides bibasiques, des dé- rivés polysubstitués de la benzine, Ces acides donnent très facilement des anhydrides, La formation d’une dioxime montre la présence de deux fonctions ceto- niques. L’hydrogénation donne des glycols et des pi- nacones ; l’oxydation, au moyen du ferricyanure en liqueur alcaline, donne des bitétrahydrométanaphto- quinones possédant quatre fonctions cétoniques, — MM. Behal et Auger ont réussi à préparer les acides B cétoniques en faisant réagir le chlorure de malonyle, les chlorures de malonyle substituée sur les carbures aromatiques, en présence du chlorure d'aluminium et du sulfure de carbone, — M. Le Chatelier présente la réclamation qui a été insérée dans le numéro précé- dent de la Revue. — M. Béchamp annonce que les substances extractives du lait, considérées comme ren- fermant des peptones, n’en contiennent point, Elles possèdent, en effet, un pouvoir rotatoire droit; or, toutes les peptones des albuminoïdes sont à pouvoir rotatoire gauche. M. Béchamp étend ces faits au lait de chèvre et d’ânesse et fait des restrictions pour le lait de femme.— M. Ossipoff lit une note de M. Potilitzine sur la formation des hydrates de chlorures de cobalt, Cette note n’est que la reproduction d’un mémoire publié en 1884, — M. Ængel demande à ce propos si M. Potilitzine a fait quelques additions à son travail et, sur la réponse négative de M. Ossipoff, il ajoute qu'il a développé longuement dans son mémoire le travail de M. Potilitzine, — M. Ossipoff est en train de détermi- ner, avec un de ses élèves, par la méthode cryosco- pique, la grandeur moléculaire des aluns. — MM. Le- pierre et Lachaud ont étudié l’action de la potasse à divers états de concentrations, sur le chromate de thallium, T2Cr0*, Le chromate de thallium est légère- ment soluble à Pébullition dans la potasse en solution binormale ; par refroidissement, il se dépose en prismes à six pans, orthorhombiques ; il est donc isomorphe avec le sulfate et le chlorure de potassium, La potasse fondante agit sur le chromate de thal- lium en donnant le sesquioxyde TI20* formé de pail- lettes hexagonales, En chauffant un mélange de chro- mate de thallium et de chromate de potasse dans du nitrate de potassium fondu, on obtient un chromate double T2CrOK?CrOf, Enfin le chlorure thalleux frai- chement précipité réagit sur l’acide chromique dissous dans un peu d’eau en donnant le chlorochromate de -OTI (hallium CrO?{ . — M. Bertrand dit que la récla- NGI mation de M. Tollens n'est pas fondée, puisqu'il s’est occupé d’un sujet différent du sien el ajoute qu'il n’y à pas lieu de chercher s’il y a ou non antériorité, — 524 ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES —, M. Lebel dépose sur le bureau trois notes de M. Sabatier relalives aux sulfures de bore, au séléniure de bore et au séléniure de silicium. ê À. Coupes. SOCIÉTÉ DES INGÉNIEURS CIVILS Séance du 5 juin 1891 M. Pettit donne quelques explications surle procédé Anderson pour l’épuration des eaux, à propos de la visite faite par la Société à l’usine de Boulogne-sur-Seine, où la Compagnie générale des eaux expérimente ce procédé. Il consiste à brasser pendant quelques mi- nutes avec du fer, dans un cylindre tournant autour d’un axe horizontal, l’eau à épurer ;il se produit des sels ferreux que par aération on transforme en sels fer riques, Ceux-ci se déposent par décantation sur un filtre de sable en une couche gélatineuse qui constitue le véritable filtre ; l’eau de Seine perd ainsi de 60 à T5 0/0 de matières organiques et ne contient plus que 50 microbes par centimètre cube. — M. Duroy de Bruignac expose sur le zéro absolu et le coefficient de di- latation une théorie que discute M. Bertrand de Font- violant. — M. Haubtmann, dans une communication sur l'éclairage électrique de Londres et les hautes tensions, s'occupe d’abord du prix de l'énergie électrique. Le cheval-heure coûte à Paris 0 fr. 90et ne s’abaisse pas en France au-dessous de 0 fr. 52, prix auquel il est fixé depuis le 1°* juin 1891 dans la ville de Saint-Brieuc ; il vaut 0 fr, 375 à Londres, c’est-à-dire trois fois plus cher que le gaz; c’est Fribourg la ville d'Europe où il est vendu le meilleur marché : 0 fr. 15 et, pour une con- sommation supérieure à 20 chevaux, 0 fr. 10. De tels écarts ne dépendent pas seulement du prix de la force motrice. Car, en déduisant celui-ci, le cheval-heure reste encore à Paris à 0 fr, 75 au lieu qu'il revient à Fribourg à 0 fr, 125; ces écarts viennentdes différeuces entre les sommes de capitaux engagées, différences qui résultent des systèmes adoptés. Ceux-ci sont de deux sortes : 1° Secteurs à petites stations centrales ur- baines ; 2° Secteurs à usines excentriques établies dans des endroits propres à la production économique. M. Haubtmann examine ensuite les moyens employés pour répondre à la sécurité du service et à l’économie de production, Relativement à ce dernier point, on peut diviser les installations en trois classes: 1° Ins- tallations à matériel mécanique réduit : tel est à Londres le système de la compagnie de Chelsea, dont la station génératrice alimente quatre stations secon- daires d’accumulateurs. 2° Installations à. distribution écomique. Celle-ci est réalisée soit au moyen de fils multiples, soit par le retour à la terre, soit par la dis- position en série. À Londres les compagnies de West- minster et de Pall Mall and Saint-James’s emploient le système à 3 fils d'Edison ; la Metropolitan Ce se sert des courants alternatifs Westinghouse et des transfor- mateurs Gaulard, dont un des pôles est à la terre. 3° Installations à pertes réduites sur la ligne, recou- rant aux hautes tensions. Des courants alternatifs de 10.000 volts sont employés par la London Electric Supply Corporation. Ce sont ces hautes tensions que M. Haubtmann croit appelées à prévaloir dans un pro- chain avenir. Séance du 19 juin M. le Président annonce que le prix annuel de la Société est décerné à M. Normand pour son mémoire sur la machine à vapeur dans les torpilleurs, et le prix Nozo à MM. Lencauchez et Durant pour leur mémoire sur la production et l'emploi de la vapeur, — M. Henri Chevallier décrit le Sondeur Belloc, qui permet d’exé- cuter avec rapidité el précision les sondages sous- marins; cet appareil est remarquable par sa légèreté et par la disposition d'un frein qui produit l'arrêt au- tomatique quand le poids de sonde touche le fond, — M. Regnard présente une note de M. Yankowsky sur l'accident arrivé aux appareils employés dans le port de Novorossisk (mer Noire), à la construction d’une jetée en blocs artificiels. La grue amenant les blocs était supportée par un pont à six piles tubulaires qu’on avançait au fur et à mesure en faisant flotter jusqu'à lPavant les deux piles d’arrière; d’ailleurs, les piles s’appuyaient simplement sur des enrochements et n’élaient réunies ensemble que par des poutres à treillis sans contreventement; ces conditions d’établis- sement, jointes à la hauteur de l’appareil (14 mètres), ne lui donnaient pas une stabilité suffisante pour résister à une violente tempête. — Une théorie exposée dans une précédente séance par M. Casalonga, sur le Maximum théorique du rendement direct des machines à vapeur, donne lieu à une intéressante discussion à la- quelle prennent part l’auteur de cette théorie et MM. Richard, Arnoux et Bertrand de Fontviolant qui la contestent. P. JAnNETTaz, SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 18 juin 1891. M. Normann Collie. Note sur quelques réactions de l'acide dihydracétique. La lactone de l'acide triacétique. — M. W. H. Perkin. Pouvoir réfringent de certaines subs- tances organiques à différèntes températures. L'auteur étudie le pouvoir réfringent de certaines substances, pour voir si l’on retrouve les particularités observées dans l'étude du pouvoir rotatoire magnétique. Il trouve n—1 que l’énergie réfractive spécifique ( d ) n'est pas constante aux différentes températures; elle diminue quand la température s'élève. La formule de Lorentz ne donne pas non plus de valeurs constantes, mais conduit à des nombres d'autant plus forts que la tem- pérature est plus élevée. M. Gladstone fait remarquer que cela constitue un argument en faveur de l’ancienne formule que M. Dale et lui avaient trouvée sensible- ment indépendante de la température. Plus la tempé- rature s'élève en effet, plus un corps se rapproche de l’état gazeux, et il est bien connu que la réfraction d’un corps est plus faible à l’état gazeux qu'à l’état liquide. MM. Ludwig Mond et F. Quincke. Note sur un com- posé volatil de fer et d'oxyde de carbone. Du fer très divisé obtenu par réduction de l’oxalate à 400°, refroidi dans l'hydrogène à 80° et soumis à l’action d’un courant d'oxyde de carbone, donne un composé volatil qui se décompose entre 200 et 300° en formant des miroirs de fer métallique. L'analyse du composé conduit à Ia formule Fe (C0), — M. Henri Armstrong. La formation des sels, Contribution à la théorie de l'électrolyse et à l'é- tude de la nature des réactions chimiques dans le cas des corps non électrolytes. —M. Sydney Young. Dibenzyl-cé- tone, Tensions de vapeur de la dibenzil-cétone. Tensions de vapeur du mereure. SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 20 juillet 1891, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — — Le professeur Cope- land lit un mémoire sur les traînées lumineuses qu'on apercoit sur la lune. On sait depuis longtemps que la lumière refléchie par la lune au moment du premier et du dernier quartier est de beaucoup inférieure à la moitié de ce qu’elle envoie pendant la pleine lune ; on attribuait ce fait à l'ombre projetée par les hautes montagnes lunaires, Le professeur Copeland a remarqué qu'autour des cratères rayonnaient des traînées lumi- neuses, rectilignes où en zigzag, qui prennent un vif éclat quand elles sont éclairées normalement et dispa raissent quand la lumière tombe sous un angle d’inci- dence un peu considérable ; le nombre de ces stries et leur variation d'éclat sont suffisants pour expliquer le changement dans la quantité de lumière envoyée. On peut reproduire les mêmes apparences à l'aide d’un modèle en plâtre sur lequel les stries sont représentées ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES par des chapelets de petites perles de verre, On sait d’ailleurs que l’éclair qui jaillit de l'œil des animaux placés dans l'obscurité ne se produit que quand ils recoivent la lumière bien en face. 29 ScIENGES PHYSIQUES. — Le professeur Knott a cons- taté que la capacité intérieure de tubes de fer et de nickel varie quand on les aimante longitudinalement. Les tubes sont soigneusement bouchés à leurs deux extrémités et l’un des bouchons est traversé par un tube capillaire ; les tubes sont remplis d'alcool coloré par de la cochenille ; le mouvement de la colonne liquide dans le tube capillaire indique les variations de volume ; on l’observe à l’aide du microscope. Pour le fer il y a diminulion du volume intérieur, celte di- minution passant d'ailleurs pour un maximum pour la valeur du champ qui produit le maximum d'extension longitudinale. Pour le nickel on observe le même phé- nomène, mais la diminution de volume continue à s'approcher de zéro et finit par changer de signe. On n'observe rien avec un tube de verre. — Le professeur Tait lit un mémoire sur la définition ef la mesure de la température dans un système de particules exercant des actions moléculaires réciproques. 3° SCIENCES NATURELLES. — Le professeur Mackintosh présente des considérations sur le développement de l'histoire naturelle de poissons marins, Il a démontré qu'un grand œuf de mer jusqu'ici inconnu élait celui du platessa limanda; il a étudié également la repro- duction des anguilles de sable, Les séances de la Société sont suspendues jusqu’au mois de décembre. W. PEDDiE, Docteur de l'Université. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 25 juin 1891. 1° ScreNces PHyYsiqués. — M. Kundt présente un travail de MM. Krigar-Menzel et Raps sur les vibrations des cordes. Les cordes étaient de minces fils d’acier tendus devant la fente d’une lampe électrique. L'image de la corde fut projetée par un système de lentilles sur un tambour qui tournait avec une vitesse constante el qui élait couvert de papier photographique. Le type géné- ral des images obtenues de cette manière représente des zigzags, que M. Helmhol{z avait déjà reconnus dans son microscope de vibration comme la figure caractéristique des cordes mises en vibration à l’aide d’un archet, La mesure exacte et un examen analytique des figures obtenues fait reconnaitre que toutes les vibrations par- tielles, ayant un nœud près du point touché par l’archet, sont développées avec une netteté supérieure. Dès que l'archet est appliqué au point même qui correspond au nœud de ces vibrations, la figure change subitement parce que ces vibrations ne peuvent plus se produire. Le point touché se meut avec une vitesse constante vers le haut pour descendre subitement avec une vitesse constante aussi, mais plus grande que la première : de là ces zigzags réguliers qu’on obtient. 29 SCIENCES NATURELLES. — M. T.du Bois-Reymond pré- sente un travail de M. Rosenthal (Erlangen) qui s'occupe de mesures calorimétriques. l’auteur expose quelles erreurs on commet en identifiant l'émission de chaleur d’un animal avec sa production de chaleur, car des altérations de la peau peuvent changer lémission de chaleur, quoique la production de chaleur soit restée la même. M. Rosenthal s'occupe dans le présent travail surtout d'animaux en fièvre. De ce que la consomption est suivie d’une augmentation d'oxygène et d’une émis- sion de plus grandes quantités d'acide carbonique, on a conclu que, pendant Ja fièvre, il y a augmentation de production de chaleur. M. Rosenthal a observé pendant plusieurs jours au sein de son calorimètre des animaux tout à fait sains auxquels on communiquait ensuite la fièvre par l'injection de liqueurs pyrogènes. La tempé- rature du calorimètre baisse d’abord pendant la fièvre tandis que la température de l'animal monte; il y a donc une rétention de chaleur, comme M. Franke l’a © ne O7 déjà observé, ef non une plus grande production de chaleur, au moins pendant la période initiale de la fièvre. En provoquant un abaissement rapide de la tem- pérature de Panimal par une injection d’antipyrine, on observe au calorimètre une émission plus énergique de chaleur. Après tout, M. Rosenthal croit que les moyens pyrogènes, loin d'augmenter la production de chaleur, diminuent seulement le coeflicient d'émission, — M. Fritsche annonce dans une note présentée également par M. du Bois-Raymond qu'il a réussi à poursuivre les nerfs électriques des Mormyrides jusqu’à leur origine à l’épine dorsale. Séance du 26 juillet M. Rammelsberg : Sur quelques sels de l'acide hypo- phosphorique, Il a préparé et analysé les sels suivants : 2Li2POS + TH20; LiHPO3 + H20; Tl2PO3: 2TIHPOS + T2 POS; BaPO5; MgPOë + 6H20: 2BePO5 L 3H20. Sous l'influence de la chaleur les hypophosphates se changent en pyrophosphates et en phosphites des mé- taux respectifs, d'après la formule : 1RPO—= 3R2P207 + RP. D' Hans Jan. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 9 juillet 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M, Gegenbauer : Note sur le symbole de Legendre et Jacobi. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Adler : Surune méthode de détermination du coefficient d’aimantation des corps solides au moyen de la balance, Le mémoire recherche dans quelles dispositions il faut se placer pour pou- voir déduire de l'attraction mécanique d’une substance dans un champ magnétique le coefficient d’aimantation de la substance. Le calcul montre qu’on réalise ces conditions en donnant à la substance la forme d’un fil très long et très fin, dont un morceau très long en proportion de son épaisseur est situé dans un champ magnétique homogène de telle sorte que les lignes de force soient parallèles à l'axe du fil, tandis que l’autre section transversale du bout se trouve à un point où la force magnétique à une valeur infiniment faible, Le nombre de lignes de forces qui arrivent à l'extrémité antérieure, par unité de surface, est : H, étant l'intensité dans le champ homogène, Je moment magnétique développé dans la substance même CNE 5 le coefficient d’aimantation. Les valeurs cal- culées par cette formule et en appliquant la méthode de calcul de l'intégrale indiquée par Stofan ! concordent avec celles que donne l'expérience. De plus, Quincke a montré que si, dans une seconde série d'expériences on place l'axe du barreau normal aux lignes de force du champ homogène, le sombre p-L des lignes de force magnétiques dans ce second cas est au nombre précé- dent p# dans le rapport Ce rapport se trouve bien, en fait, dépendre de la force magnétisante, etil est plus grand pour les champs faibles que pour les champs puissants, — M, Gottfried Grün : Contribution à la connaissance des permanga- nates, — M. Glücksmann : Sur la connaissance de ! Comptes-rendus de PAcadëémie de Vienne: 69, p. 202. 526 ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES l'acide triméthyléthylidénolactique, — M, Natterer, | pouvant même avoir la température de l’ébullition, En chimiste de l’expédition du vaisseau Pola dans lété 4890 : Recherches chimiques sur la Méditerranée orientale. Le mémoire donne le résumé de 80 analyses d’eau de mer. On a déterminé, à bord du vaisseau, le contenu de cette eau en acide sulfurique, en acide carbonique, en ammoniaque, enammoniaque provenant de l’oxydation des substances organiques azotées de l’eau de mer; en oxygène employé à l'oxydation des substances organiques et en salpêtre (plusieurs de ces déterminations se font par une méthode calorimé- trique). A Vienne on a ensuite titré les eaux apportées en chlore, acide sulfurique, brome, calcium, magné- sium, potassium, sodium, sels contenus simplement à l'état de trace dans l’eau de mer, etc. 39 SCIENCES NATURELLES, — M. Ludwig : Sur l’action du bacille de l’æœdème malin sur les hydrates de car- bone. — Sur quelque poissons nouveaux et rares de l'archipel des Canaries, des rivières de l'Amérique du Sud et de Madagascar sous le titre : Mémoires ich- thyologiques XV. Les nouvelles espèces découvertes sont : Serranus Simonyi(Canaries); Alphanopus Simonyi (Sainte-Croix de Ténérilfe ; — Bergia allipinnis (Monte- video); — Tetragonopterus lineatus (Neuve des Amazones, près d’Iquitos)., — Tetragonopterus anomalus (Rio Pa- rana); Pomacentrus Grandidieri (Madagascar). Emile Weyÿr, Membre de l'Académie, ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de mai 1891 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Tacchini présente le résumé des observations faites sur le Soleil pendant le premier trimestre de 1891, à l'Observatoire du Col- lège Romain. On voit que le phénomène des taches et celui des facules montre un sensible accroissement sur le trimestre précédent, Le phénomène des protubé- rances est aussi plus marqué, et l’on peut dire qu'en février, il y a eu un réveil particulier de tous les phé- nomènes à la surface du Soleil, où l’on a observé encore des éruptions métalliques. — M. Pittarelli : Sur les lignes asymptotiques d’une classe de surfaces gauches de genre zéro. Sur les lignes asymptotiques des sur- faces gauches rationnelles de Cayley.—M. Favero : Sur une récente formule de M. Heymann, relative à l’expres- sion des racines de l'équation générale algébrique. — M. Tacchini rend compte à l’Académie des indications données par les appareils enregistreurs du Collège Romain, lors de l’explosion d’un dépôt de poudres près de Rome, L’énorme quantité de gaz développés par la combustion de presque 265 tonnes de poudre, en aug- mentant la pression atmosphérique, a causé dans le bärographe un saut de 11,4 millimètres sur la courbe normale, et un abaissement consécutif de 8,8 milli- mètres au-dessous de cette courbe. La grande vague atmosphérique a fait ressentir son action sur le baro- mètre jusqu'à 22 kilomètres de distance; le bruit de l'explosion a été entendu jusque dans la campagne de Forli, à 250 kilomètres de Rome, L'ébranlement du sol a été très fort et il s’est propagé avec une vitesse plus grande que celle du son. Des indications fournies par les séismographes, qui ont commencé à marcher avant que le bruit de lexplosion et la vague atmosphérique arrivassent à l'Observatoire, M. Tacchini déduit que cette vitesse de propagation de la secousse dans le sol, a été double de celle du son dans l'air, — M. Grablovitz a eu occasion d'étudier l’occlusion accidentelle d’une source de l'établissement balnéaire d’Ischia, causée parun dépôt de matériaux divers qui étaient tombés dans la source pendant l'exécution de travaux. Cette occlusion a pro- duit dans l’eau de la source des variations thermiques remarquables, et des changements dans le régime des sources voisines. M. Grablovitz donne de nombreux détails sur ces phénomènes, et il fait observer que l’occlusion d’une source peut avoir de graves consé- quences, parce que l’eau, obligée de changer son par- cours, peut parvenir jusqu'à des couches plus chaudes, effet, lors de l’occlusion de la source, on a entendu des bruits souterrains qui, ainsi que des trépidations du sol, ont persisté après que la source avaitété déblayée, Il est donc probable que tous ces phénomènes soit la conséquence des changements apportés par l’ocelusion de la source dans le régime des eaux du sous-sol; et Jon doit considérer les variations thermiques des sources comme la cause ou l'effet d’autres phéno- mènes, 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M, Righi entretient l’'Aca- démie des expériences qu'il a exécutées en produisant des décharges électriques, au moyen d'une forte batte- rie, dans l’air plus ou moins raréfié, En changeant les conditions de l'expérience, la décharge qui présente d'ordinaire l’aspect d’une flamme, d’une masse lumi- neuse passant d'une électrode à l’autre avec la vitesse moyenne d’un mètre par seconde, peut se subdiviser en une série de masses lumineuses, qui se suivent et présentent l'aspect de gouttes d’eau. M. Righi a réussi à obtenir des images photographiques de ces masses lumineuses en mouvement et de leurs différentes modifications; il se propose de s'occuper de ces images dans un Mémoire où il traitera en détail tous les phé- nomènes qu'il a étudiés, — M. Ascoli s'occupe de la relation qui existe entre la force électromotrice et la chaleur chimique de la pile, Si l’on a deux éléments identiques reliés en opposition, et qu’on élève la tem- pérature d'un de ces éléments, on obtient un courant. Il est facile de voir que si la force électromotrice dé- croit lorsqu'on élève la température, la chaleur voltaïque doit être moindre que la chaleur chimique; et, que si la force électromotrice devient plus grande, c’est le contraire qui se vérifie. En effet, s’il n’en élait ainsi, on aurait un transport continu de chaleur de l'élément froid à l'élément réchauffé, et le courant pourrait sub- sister avec une dépense minime d'énergie, L'équation dE de Helmholtz E—Q + = T, qui conduit au résultat pré- at 4 P cédent, reste démontrée en appliquant au système con- sidéré un raisonnement tout à fait semblable à celui employé par Thomson pour les piles thermo-électri- dE ques. Ce raisonnement démontre que le terme a T re- € présente la somme des phénomènes Peltier apparents qui se produisent dans la pile, c'est-à-dire de ces phé- nomènes qui donnent origine aux courants thermo- électriques entre métaux et électrolytes, La somme des phénomènes Peltier vrais serait mesurée par E même, et elle resterait marquée par le développement de la chaleur chimique. De cette manière serait résolu le débat entre Duhnen et Gockel relatif au phénomène Peltier des piles et à la vérification expérimentale de l'équation de Helmholtz. — M. Battelli a repris les expériences exécutées par M. Bruchietti!, pour déter- miner l'influence de la force électromotrice des élec- trodes dans l'étude des courants telluriques. Il arrive à la conclusion que les résultats, dont il avait déjà donné communication, sur les variations de la force électro- motrice et de la direction des courants telluriques, restent toujours les mêmes? Il existe vraisemblable- ment encore certains rapports entre les courants tellu- riques et quelques éléments météorologiques, mais ils ont pu échapper à M. Battelli à cause des changements des forces électromotrices engendrées par le contact des électrodes avec le sol. — MM. Mond et Nasini expo- sent le résultat de leurs recherches sur le composé obtenu par M. Mond en faisant agir l’oxyde de carbone sur le nickel métallique réduit par l'hydrogène. Ils ont étudié le composé Ni (CO)‘ en relation avec la loi de Raoult, et ils ont reconnu qu’en solution benzolique, on obtient pour l'abaissement moléculaire du point de 1 Revue générale des Sciences, L. 1°, 1890, page 750. 2? Ibid., page 350. bent tnt cine nri mt tte tt doEE... ds : de. CORRESPONDANCE 527 congélation, des valeurs qui correspondent, avec une suffisante exactitude, à la formule donnée ci-dessus. En étudiant le coefficient de dilatation du liquide, les auteurs trouvent l'expression suivante, qui représente les variations du volume en fonction de la température, Vi = 1 + 0,0016288 £ + 0,000006008 £ + 0,00000000505 &*. Le nickel tétraoxycarbonique est donc un composé doué d’un coefficient de dilatation très élevé ; il a la densité de 1,35613 à 0°, Ce composé jouit encore d’un fort pou- voir de réfraction et de dispersion, et ce dernier est très peu différent de celui du sulfure de carbone, Les auteurs arrivent à la conclusion que ce composé du nickel a une réfraction atomique beaucoup plus élevée que la réfraction qu'il possède à l’état métallique ou dans les sels. Ils croient que cette réfraction plus srande du nickel doit dépendre de la forme de la com- inaison, parce que le nickel dans le composé parai- trait octové alent, tandis que dans loxyde et dans les sels il est bivalent, Ce fait se trouverait en harmonie avec la place que M. Mendelejeff a assignée au nickel dans son système périodique. — MM. Leone et Magnanimi ont fait des recherches sur la nitrification de T'azote orga- nique, étudiant la marche du phénomène dans l’eau, où la détermination des acides nitreux et nitrique est plus simple; de plus,latransformation de l'azote s’y acccomplit d'une facon régulière, ne dépendant pas des conditions de porosité ou “d'humidité du terrain, Les auteurs ont reconnu que dans l’acide nitrique, dernier produit de l'oxydation, l'azote se trouve en quantité moindre que dans la substance originaire ; ils se proposent de faire de nouvelles expériences pour établir si cet azote dispa- raît par les fermentations, ou s'il reste à l'état d'azote organique non transformable, — M, Giorgis : Action du peroxyde d'hydrogène et de l’eau saturée d'anydride carbonique, sur le magnésium métallique, — M. Za- netti : Sur une nouvelle méthode pour déterminer la constitution des homologues du pyrrol, — MM, Zatti et Ferratini : Sur le poids moléculaire du nitrosoindol, — M. Pellizzari : Recherches sur la guanidine, —M. Ne- gri: Sur la forme cristalline de quelques dérivés de la cantharidine. 3° SCIENCES NATURELLES. — M, Mingazzini décrit de nouvelles espèces de Grégarines qu'il a trouvées dans l'intestin de quelques vers, crustacés, tuniciés, vivant dans le golfe de Naples. L'auteur a fait l’importante remarque que les états évolutifs des espèces supérieures sont parfaitement semblables à l’état adulte des es- pèces inférieures ; cette remarque n'avait pas encore été faite jusqu’à présent pour les protozoaires, mais pour lesmétazoaires MA —M. Giesbrechtdonne, dans une nouvelle note, la liste des Copépodes recueillis par M. Chierchia dans son voyage de circumnawvigation, et par M. Orsini dans la mer Rouge. Les nouveaux genres sont très nombreux ; pour chaque espèce est indiqué le lieu où l'on a trouvé les individus, et la profondeur à laquelle ils ont été pêchés. —M. Fol : Surla quadrille des centres ; un épisode nouveau de la fécondation, — M. de Stefani donne la conclusion de ses études sur la géologie de la Sardaigne. Cette île ne montre pas de différences dans ses terrains azoïques et paléozoïques, avec les régions circonvoisines de la Méditerranée. Des soulèvements se sont produits dans la période tertiaire, accompagnés par de puissantes éruptions volcaniques, La Sardaigne est, géologiquement, indépendante de l'Italie, et cette indépendance géologique se retrouve dans les affinités biologiques; sous ces rapports, au contraire, la Sardaigne et la Corse sont étroitement liées tM°, Cattani ont pour- suivi leurs recherches sur la substance, quelle qu’elle soit, qu'ils ont appelée antitoxine du tétanos, capable de rendre les animaux réfractaires au tétanos lorsque ces derniers ont été inoculés avec du sérum d'animaux réfractaires à linoculation tétanique, M. Tizzoni et M:°. Cattani ont observé que ce sérum conserve son ac- tion sur le poison du tétanos jusqu’à la température de 60° C, ; cette action est détruite à la température à la- quelle se produit la coagulation de l’albumine, ce qui fait penser que l’antitoxine du tétanos doit appartenir aux substances albuminoïdes. Les auteurs ont encore reconnn que l’antitoxine n’est pas une substance dia- lysable, et ils ont étudié les modifications qu’elle subit sous l’action des acides, des alealis, des sels, Ces expé- riences conduisent à admettre que l’antitoxine du télanos, contenue dans le sérum du sang d’un chien réfractaire, est une substance albuminoïde dont les propriétés principales correspondent à celles des en- zimes. L'extrait de saugsue ne modifie pas les pro- priétés de l’antitoxine, D'autres recherches furent exé- cutées par les mêmes expérimentateurs pour déter- miner le mode d'action de cette substance. On a trouvé que l’antitoxine n'existe ni dans les tissus ni dans les organes, mais qu’elle se trouve dans le sang et surtout dans le sérum. Préparée à l’état sec, l'anti- toxine donne l’immunité aux souris, mais elle ne ma- nifeste aucune action lorsqu'on l’injecte aux animaux, même en forte quantité, après une inoculation téta- nique, Ernesto Manant. CORRESPONDANCE SUR LA CRAÏE Monsieur LE DIRECTEUR, Dans lartiele que j'ai consacré à la question de la craie phosphatée de Picardie !, j'ai eu soin de constater que les conclusions de MM. Renard el Cornet, relati- vement à l’origine organique du phosphate des nodules, s’accordaient avec les faits observés dans d’autres gise- ments de phosphates, tels que ceux de Ciply et des Ardennes, Mais j'ignorais alors que des observations du même genre eussent élé récemment faites, tant sur les calcaires triasiques de la Lorraine que sur les gites phosphatés éocènes de l'Afrique, par M. Bleicher, le savant professeur à la Faculté des sciences de Nancy? M. Bleicher a d’abord reconnu que le calcaire ‘du muschelkalk supérieur des environs de Lunéville, en dehors des os, des dents et des écailles qu'on y à depuis longtemps signalés, renferme des débris osseux 1 Revue générale des Sciences, 30 juin 1891. ® Bullelin des séances de la sociélé des sciences de Nancy, 15 juillet 1890, 2 février 1891. — Comples-Rendus, 9 juin 4890, 4 mai 1891. PHOSPHATÉE microscopiques, complètement minéralisés el ayant {antôt conservé, tantôt perdu leur structure caractéris- tique, Quant aux échantillons de phosphates d'Algérie et se Tunisie, sn il a pu examiner toute une série, Bleicher y à trouvé de telles quantités de menus débris osseux, de dents et d’écailles de poissons, qu'il déelare n'avoir « pas été tenté de chercher ailleurs l'origine de ce minéral », Aussi concluait-il en disant que « quand, dans un gisement sédimentaire, on trouve une forte leneur en phosphate, et surtout quand la roche examinée est farcie de débris osseux, on peut attribuer cette abondance du phosphate à la dissocia- lion des os et de la matière organique qui les accom- pagnait, » Nous sommes heureux de rendre à M, Bleicher la justice qui lui est due, en montrant qu'il y a plus d'un an de patie ntes observations microscopiques avaient suggéré à ce sayant des vues tout à fait conformes à celles que MM. Renard et Cornet ont si habilement développées. A. DE LAPPARENT. , 528 NOTICE NÉCROLOGIQUE NOTICE NÉCROLOGIQUE WILHELM WEBER ! Trois savants distingués : Ernest-Henri Weber, l’é- minent physiologiste et naturaliste, Wilhelm-Edouard, l'illustre physicien, et Edouard-Frédéric, le physiolo- giste, sont les fils du théologien bien connu Michel Weber ; ils sont nésà Wittembourg. | Ps Le penseur le plus original des trois était Wilhelm Weber. né le 24 octobre 180% : c’est dans un travail fait en commun avec son frère aîné, Ernest-Henri, qu'il publia sa Théorie des ondes. En commun avec son plus jeune frère, il fit la Mécanique des rouages de la machine humaine. Ces deux livres sont devenus d'une importance fondamentale en biologie; c’est dans ces ouvrages que fut pour la première fois développée complètement et d’une facon tranchée l'opposition entre ‘« la méthode expérimentale dans les sciences de la Nature » et la « méthode fantaisiste de la philoso- phie naturelle », alors dominante. ae >| Dans tous ses travaux, Wilhelm Weber à mis en pra- tique la méthode d'investigation devenue aujourdhui le bien commun de tous les savants qui étudient la Nature : on en appelle d’abord à l'observation; on ras- semble avec pondération toutes les expériences déci- sives ; on rapproche un phénomène d’un autre, jus- qu'à ce qu'enfin l'énigme compliquée se déchiffre d'elle-même, Ce n’est qu'avec une pareille méthode de recherche, sévèrement scientifique, qu'il sera possible de ramener un phénomène biologique aussi complexe que la marche de l'homme aux lois rigoureuses de la physique. ï ; La « théorie des ondes » apportait une base à la Physique non seulement médicale, mais même géné- rale, L'Acoustique et l’Optique tirèrent un grand profit de cette théorie des ondes ; la question de l'existence des ondes longitudinales et transversales y recut une réponse fondée sur l’expérience. 5 Ce sont les recherches électriques et magnétiques qui ont eu dans l'esprit de Weber la part du lion. Dans ce domaine le nom de Weber est lié pour tou- jours à plusieurs découvertes absolument fondamen- fales: c’est là aussi que Weber a rempli sa tâche capitale, qui a porté son nom, associé à celui de son collaborateur Gauss, bien au delà des limites de sa patrie et jusque dans les cercles profanes : je veux parler de sa découverte du système lélégraphique qui repose sur l'induction magnétique. Tout le monde ap- précie aujourd’hui les bienfaits de la télégraphie élec- trique, le rôle de cette invention dans les relations et la vie intellectuelle des peuples ; l'histoire a déjà en- registré les services que le télégraphe a rendus à lhu- manilé; on peut avec raison appeler le réseau des fils télégraphiques « le système nerveux des peuples de la Terre ». Si l'on fait abstraction des expériences de Süm- mering, on trouve que ce fut le désir de Weber et de Gauss de communiquer entre eux promptement et facilement au cours de leurs travaux scientifiques, qui donna naissance au premier télégraphe. Weber tra- vaillait à l’Institut de Physique et Gauss à l'Obser- vatoire astronomique, assez éloigné. Weber avait, dès 1833, fait avec succès les premiers essais sur la télégra- phie électromagnétique ; Gauss les présenta le 9 août 1844 à la Société des Sciences de Gottingue : « Nous ne pouvons, disait-il, passer sous silence une disposition remarquable et jusqu’à ce jour unique dans son genre, que nous devons à notre collègue, M. le Professeur Weber. Il a installé l'année passée déjà un double fil 1 Voyez aussi l’importante notice que M.Mascart vient de consacrer à Wilhelm Weber dans les Comples-rendus de la séance de l'Académie des Sciences, du 20 juillet 1891, page 105. qui part de son cabinet de physique, passe dans la ville au-dessus des maisons, et va ainsi jusqu'à l'Ob- servatoire astronomique ; il a été prolongé maintenant de l'Observatoire astronomique jusqu'à l'Observatoire magnétique. Il comprend une grande pile galvanique ; = le courant produit traverse un fil qui s’enroule aux deux extrémités sur des multiplicateurs sensibles; il est calculé de manière à traverser une longueur de fil de près de neuf mille pieds... On ne remarque pas sans admiration comment il se peut qu’un simple couple de plateaux à une extrémité met instantanément en mou- vement le barreau aimanté à l’autre bout, et lui im- prime une déviation de plus de mille divisions de lé- chelle.. La facilité et la sûreté avec laquelle on com- mande par le commutateur la direction du courant et le mouvement de l'aiguille, qui en résulte, avait sug- géré l’année passée déjà des expériences sur l’appli- cation à la transmission de signaux télégraphiques, expériences qui ont réussi aussi complètement avec des mots entiers et de petites phrases. Sans aucun doute, il sera possible, d’une manière analogue, d’éta- blir une liaison télégraphique immédiate entre deux points éloignés l’un de l’autre d’un grand nombre de milles ; seulement ce n’est pas ici naturellement le. lieu de développer plus longuement. ces idées sur la question.» Les inventeurs se contentèrent de ces indi- cations sommaires publiées dans les Travaux des sa- vants de Güttingue, laissant à d’autres l'exploitation de leur invention. * Les recherches conduites en commun par Weber et Gauss sur le magnétisme terrestre restent encore au- jourd’hui les plus précieuses dans cette branche de la Science. À ces recherches se rattachent les travaux de Weber sur l'induction par le magnétisme terrestre, sur les courants d’induction et l'induction unipolaire, tra- vaux qui le conduisirent en définitive à une théorie de l'induction. De la même facon, Weber fut conduit par plusieurs travaux isolés à sa loi fondamentale des actions élec- triques, à laquelle une relation étroite avec le prin- cipe de la conservation de l'énergie donne un intérêt universel, Dans ses mémoires classiques sur l’électro- dynamique, Weber ne développaitpas seulement la loi fondamentale des actions électriques et celles du ma- gnétisme et du diamagnétisme ; il apprenait encore à mesurer en unités absolues l'intensité d’un courant et les autres constantes du courant électrique. Ces ouvrages de Weber sont aujourd’hui entre les mains de tous les physiciens. L’ardeur à la découverte d’un homme qui a tant fait pour la constitution de la science électrique, devait aussi le conduire à bien quand il poursuivait un but étranger à la physique. Weber n’était pas seulement un savant excellent, c'était un homme excellent, La délicatesse de son cœur n'avait d’égale que la force de son caractère. C’est avec admiration que nous trouvons Wilhelm Weber au nombre des Sept de Gôttingue, qui, au risque de perdre la position qui leur permettait de vivre, osèrent protester contre le coup d'Etat de leur roi. Wilhelm Weber était de cette race d'hommes rares, qui joignent à un noble cœur la faculté de frayer par leurs découvertes des voies nouvelles et originales ; de ces hommes qui lèguent plus à l'humanité qu'ils n’ont recu d'elle. C’est le 23 juin de cette année qu'a disparu ce qui en Wilhelm Weber était mortel. Quant aux créations de son esprit, elles vivront aussi longtemps que la science elle-même. F, S. ARCHENHOLD, Astronome à l'Observatoire de Charlottenbourg ee ————————_———_——————— — —"—"—"—"—”—”"”—"—"—"…—"—"—…"—"—"—"—"—…—— ea Le Directeur- Gérant : Louis OLIVIER Paris.—Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 2° ANNÉE 30 AOÛT 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCE PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LA CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL Î. — LES ORIGINES IL exisle dans le musée de l'Observatoire de Paris une série de plaques daguerriennes d'une éclipse de Soleil‘; elles ne portent aucune date el sont presque effacées par le temps, mais elles sont assurément contemporaines de l'invention de Niepce et de Daguerre, et forment sans doute l'un des premiers spécimens d’une application astro- nomique de la photographie. Ces plaques se rap- portent peut-être à l’éclipse totale du 8 juillet 1842; il est, du moins, certain que l’éclipse en question a été photographiée à Milan par Majoechi ?. L'idée d'appliquer la photographie à l'étude des corps cé- lestes en mettant une plaque sensible à la place occupée par l'image réelle dans le plan focal d’un objectif ou d’un miroir, devailse présenter naturel- lement à l'esprit des astronomes et des physiciens. bès le premier jour, Arago, en annonçant à l’Aca- démie des Sciences la découverte de Niepce et de Daguerre, le 49 août 1839, prévoyait le grand rôle qu'elle était appelée à jouer dans PAstronomie. Mais, naturellement aussi, la première tentalive pour faire entrer la photographie dans le domaine de cette science devait avoir pour objet les astres les plus remarquables par leur grandeur appa- rente ou par leur éclat. En fait, pendant les dix premières années, de 1840 à 1850, l'histoire de la photographie céleste est tout entière celle d'essais 1 Moucnez. La photographie astronomique à l'Observatoire de Paris (Annuaire du bureau des longiludes pour 1887). 2? Annalen der K. K. Slernwarte in Wien, Neuer folge, vol. II, p. 38; Ravyer. Notes sur l’histoire de la photographie astronomique (Bulletin astronomique de l'Observatoire de Paris, juin 1887). ÿ REVUE GÉNÉRALE, 1891. plus ou moins heureux pour obtenir des images du Soleil, de la Lune et du spectre solaire. On ren- contre dans cette période les noms français de Da- guerre (1839), Fizeau et Foucault (1845), Faye (1849), américains de J. W. Draper (1840), Bond et Whipple (1850). Rappelons ici que M. Faye est le premier astronome ayant exprimé l’idée que l’on pouvait employer la méthode photographique non pas seulement à l'étude physique de la surface d’un astre ou à la constatation d’un phénomène comme celui d’une éclipse, mais aussi à des me- sures précises de posilion. Son mémoire de 1849 contient un programme très complet des opéra- tions qu'il y aurait à faire pour déterminer par les procédés photographiques : 1° le diamètre du So- leil avec une précision supérieure à celle des mé- thodes usuelles, qui consistent dans l'observation de la durée du passage méridien du disque, ou dans la mesure de la différence des distances zé- nithales du bord supérieur et du bord inférieur; 2° les positions des (aches solaires sur le disque ; 3° les ascensions droites du centre du Soleil à son passage au méridien. Mais ce n’est que bien des années plus lard que ce programme a élé réalisé, et encore ne la-t-il été que dans quelques-unes de ses parties. C'est en 1850 qu'a lieu le premier essai de pho- tographie d'étoiles par W. C. Bond et Whipple, avec l’équalorial de l'Observatoire de Cambridge (États-Unis) et par le procédé daguerrien. Bond et Whipple parviennent à oblenir une image de ! H. Faye. Sur les observations du Soleil (Comptes rendus de l’Académie des Sciences de Paris, 19 février 1849). 16 530 l'étoile x Lyre et de l'étoile double z des Gémeaux ; mais ils sont arrêtés presque immédiatement dans leurs recherches par le défaut de sensibilité de leurs plaques qui les oblige à des durées de pose d’une longueur excessive, par l'insuffisance de leur mouvement d'horlogerie, par l'impossibilité d'ob- lenir des images de plus faibles étoiles. A partir de 1850, les recherches de photographie stellaire se poursuivent parallèlement à celles de photographie solaire ou lunaire, toutefois avec un avantage marqué pour ces dernières. Il faut dire que déjà les procédés se sont bien perfectionnés; à la méthode daguerrienne primitive, on à vu Suc- cessivement se substituer le procédé de Talbot, où la substance sensible est toujours le chlorure d’ar- gent, mais a pour support une feuille de papier, le procédé de Niepce de Saint-Victor où le support est une couche d'albumine étendue sur une lame de verre, les procédés de Legay, Fry, Archer (1851 qui remplacent l'albumine par le collodion. Ce dernier perfectionnement est d'une importance capitale pour toules les applications de la photo- graphie. Les plaques ont dès lors une sensibilité qui ne sera dépassée que vingl-cinq ans plus lard par l'introduction du procédé au gélatino-bromure d'argent; cette sensibilité est déjà suffisante pour permettre de substituer la seconde à la minute comme unité dans l'évaluation des temps de pose, el il en résulte d'un seul coup un progrès considé- rable. L'étude des travaux de photographie solaire et lunaire est en dehors de notre sujet. Nous devons seulement rappeler ici les noms de J. Philipps, Hartnupp, Crookes et Edwards, Read, Grubb, Warren de la Rue, Rutherfurd, Faye et Porro, H. Drapers Ellery, H. Vogel. Avec ces astronomes et ces physiciens, la photographie solaire et lu- naire est devenue véritablement une branche de l'astronomie d'observation. De 1850 à 1871, six éclipses de soleil sont photographiées avec des succès divers; pourtant les images qui en sont ob- Lenues montrent, pour la plupart, les énigmatiques protubérances et la mystérieuse couronne ’. En 1874, la photographie est appliquée à l’observa- tion du passage de Vénus sur le Soleil, après des études poursuivies sous la direction de MM. Fizeau et Cornu. Enfin, en 1877, M. Janssen, ayant re- cherché comment varie l’action du spectre solaire sur une plaque sensible, lorsqu'on diminue de plus en plus la durée de la pose, ayant constalé que pour un temps de pose extrèémement court, l'ac- tion du spectre se réduit à celle d’une bande très étroite, voisine de la raie G, fait construire par 1 On se rappelle que c'est à l’occasion de l’éclipse du 18 août 1868 que la nature hydrogénée des protubérances fut découverte par M. Janssen et par M. Norman Lockyer. CH. TRÉPIED. — LA CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL Prazmowski un objectif fondé sur ce principe, c'est-à-dire dans lequel l'achromatisme est réalisé pour deux radiations voisines de (x. Les admirables épreuves du Soleil qu’il obtient au moyen de cel objectif lui montrent, avec une netteté inespérée, les granulations de la surface solaire, lui font dé- couvrir leur disposition en réseau polygonal (ré- seau photosphérique)el atteignent du premier coup une perfection de détails qui n'a pas encore été dépassée. f Nous avons déjà rappelé la première tentative de Bond et Whipple avec l’équatorial de Cambridge sur 3 Lyre et l'étoile double & de la constellation des Gémeaux. Pour les raisons que nous avons dites, et qui se résument dans le défaut de sen- sibilité des plaques, ces recherches sont abandon- nées. Bond les reprend en 1857, six ans après l'apparition des plaques au collodion, et obtient en quelques secondes, cette fois, au lieu de plusieurs minutes qu'auraient exigé les plaques daguer- riennes, une image photographique de l'étoile double £ de la Grande Ourse. A l'aide d’un mi- croscope, il mesure sur l'épreuve la distance des deux composantes et l'angle de position; malgré les craintes et les doutes que lui inspire tout d'abord au sujet de la précision de ses mesures l’accroissement du diamètre des images avec le temps de pose !, il obtient des résultats qui, comparés aux déterminations de Struve faites di- rectement par l'emploi des procédés micrométri- ques ordinaires, n'en diffèrent que de quantités extrèmement faibles, 0”,09 en distance et 0°,1 en angle de position. C'est le premier exemple d’une mesure de précision exécutée sur un cliché stel- laire. Le succès obtenu par Bond doit être regardé comme le point de départ des recherches de pho- tographie stellaire que l’on voit poursuivies avec activité en Angleterre et en Amérique de 1860 à 1885. Warren de la Rue (1861), Rutherfurd (1864- 1866) obtiennent de bonnes photographies du groupe des Pléïades et de l’amas de Præsepe; Gould à Cordoba (République Argentine) entre- prend en 1865, par les méthodes photographiques de Rutherfurd, une série d’études sur les amas ou groupes stellaires les plus importants de l’hémis- phère austral; il photographie un certain nombre d'étoiles doubles el s'attache principalement à reproduire les régions du ciel austral qui con- tiennent des étoiles: à grand mouvement propre. Vers la même époque la découverte du procédé au gélatino-bromure d'argent par Wratten et Wain- wrightpermet de préparer des plaques d'une sen- 1 G. P. Bon», Stellar Photography (Astronomisch Nachri- chten, n° 1158, vol. XLIX, juillet 1858). CH. TRÉPIED. — LA CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL sibilité bien supérieure à celle des plaques au collo- dion, et vient donner une impulsion nouvelle à la photographie céleste. Alors les progrès se succè dent avec rapidité. Tandis que, dans son observa- tion d’Upper Tulse-Hill, W. Huggins poursuit ses recherches sur le spectre photographique des étoiles. Common en 1879, dans son Observaloire d'Ealing, produit en 20 minutes avec un objectif de 0",20 d'ouverture une image de la constellation d'Orion qui montre la plupart des étoiles jusqu'à la neuvième grandeur ainsi que les parties les plus briliantes de la nébuleuse ; H. Draper à New- York, en 1880-1831, Isaac Roberts, dans son Observatoire de Maghull en 1883, obtiennent des épreuves de plus en plus complètes de cette même nébuleuse. En 1882, Pickering, après plu- sieurs essais heureux, se prépare à doter l’Obser- valoire d'Harvard-College (État-Unis) d'un équa- torial photographique spécial destiné à la cons- truction rapide de cartes célestes, et imagine une méthode de photométrie photographique.La mème année, à l'Observatoire du Cap de Bonne-Espé- rance, Gill parvient à photographier une comète en 1150" de pose, et forme le projet d'entreprendre une carte photographique du Ciel austral. Nous arrivons à l’année 1885, qui devait être une époque décisive dans l’histoire de la photographie stellaire. L'idée, exprimée par Warren de la Rue, dès 1861 ,qu'il était possible d'appliquer les procédés photographiques à la construction d’une carte céleste, avait déjà pris corps, ainsi qu'on vient de le voir et fait l’objet d'entreprises particulières el parlielles à l'Observaloire d'Harvard-College, et à celui du Cap de Bonne-Espérance. Nous allons voir maintenant la France entrer en lice et pren- dre l’iniliative d'une entreprise internationale qui sera certainement dans le domaine de l'astronomie l'œuvre la plus considérable du siècle. MM. Paul et Prosper Henry, astronomes à l'Observatoire de Paris,avaient commencé en 1871 un travail de cartographie céleste d'une tre grande utilité. IL s'agissait de continuer la série des cartes écliptiques de Chacomac, c’est-à-dire fixer, par des déterminations rapides, les positions des étoiles jusqu'à la treizième grandeur contenues dans une zone de 5 degrés de largeur de part et d'autre de l’écliptique. L'un des buts principaux d'un tel iravail était de faciliter la recherche des petites planètes qui, en général, s’écartent peu de cette zone. Ces cartes sont à l'échelle de 0,06 pour un degré; chaque feuille contient 25 degrés carrés de la sphère céleste dans un cadre de 0,30 de côté. Bien que chaque étoile doive être l’objet d’une observation individuelle,on conçoit la possi- bilité d'accomplir le travail par les méthodes ordi naires dans un temps qui, tout en élant assez long, )31 n'a cependant rien d’absolument excessif, lorsque le nombre des étoiles par feuille ne dépasse pas deux ou (rois mille. Mais dans l’année 1884, lors- que MM. Henry en arrivèrent à la région de la voie lactée, les étoiles devinrent si nombreuses, et les groupes d’éloiles tellement serrés que les difficul- tés leur parurent bientôt insurmontables. C’est alors que l’idée leur vint de recourir à l'emploi de la photographie. Il faut dire ici qu'ils étaient admi- rablement préparés à résoudre toutes les difficul- tés qui pouvaient retarder encore l'application de la photographie comme méthode courante de construction des cartes célestes. Observateurs très habiles, ils s'étaient, depuis quelques années déjà placés au premier rang des opticiens du monde entier. Ils commencèrent par construire à leurs frais un objectif de 0",16 d'ouverture achromatisé pour deux radiations voisines de G; ils le montè- rent sur l’un des équatoriaux en service pour le travail des cartes écliptiques, et dès leurs premiers essais, obtinrent dans une région de la voie lactée de siadmirables épreuves que M. l'amiral Mouchez, directeur de l'Observatoire de Paris, n’hésita point, en présence d'un pareil succès à faire commencer immédiatement par M. Gautier la construction d’un grand équatorial photographique de 0,33 d’ouver- ture dont MM. Henry se chargeaient d'exécuter la partie optique. Comme cet instrument (fig. 1) est devenu le type des appareils employés par les Ob- servatoires français et par un certain nombre des observaloires étrangers dans l’entreprise interna- tionale de la carte du Ciel, il n’est pas inutile d'en donner une description rapide. Un tube en tôle d'acier, à section rectangulaire de 0,07 sur 0,68, contient deux lunettes parallèles : 1° la lunette photographique, de 0",33 d'ouverture et 3,43 de distance focale, de telle sorte qu'un are de grand cercle d'une minute est représenté dans le plan focal par une longueur d’un millimètre; 2° une lu- nette, jouant le rôle de pointeur, de 0%,24 d’ouver- ture et 3",60 de distance focale. Une mince cloison métallique sépare ces deux lunettes ; la monture équatoriale est du système anglais, c'est-à dire que les deux extrémités de l'axe horaire reposent chacune sur un pilier indépendant, et que la lu- nelle, montée sur cel axe, peut suivre un astre, sans aucune interruption, depuis son lever jus- qu'au coucher. La mise au foyer peut se faire avec une extrême précision; on l’oblient d'abord ap- proximative au moyen d’une éloile brillante qu'on examine avec un oculaire muni d'un verre bleu. On met la plaque sensible dans le châssis au point ainsi délerminé; puis, arrêlant le mouvement d'horlogerie de l’équatorial, on laisse l'image de l'étoile courir sur la plaque où elle marque alors une frainée qui est le lieu des positions succes- CH. TRÉPIED. — LA CARTE D22 sivement occupées par l’image. On recommence cette opération plusieurs fois en faisant varier, à chaque fois, le tirage de la lunette. En examinant à la loupe, après le développement, la série des traces ainsi ohlennes, on voit très bien quelle est celle qui est la plus étroite et mieux définie, el qui, dès lors, indique la position exacte du foyer. On arrive à une détermination peut-être plus pré- cise encore en choisissant, pour en laisser courir l'image sur la plaque, une étoile double dont les composantes soient à peu près d'égal éclat. On cherche alors quelle est dans la série des images linéaires des deux étoiles, celle qui présente le maximum de séparalion. Par ces moyens on dé- termine facilement la position du foyer à moins de 0"",2 sur une longueur focale de 3,43, c’est-à- dire que l'erreur commise est certainement moin- dre que la 17010° partie de celte longueur. De 1885 à 1887, MM. Paul et Prosper Henry, avec l'appareil qui vient d'ètre décrit, ont exécuté un très grand nombre de recherches dans les condi- tions les plus diverses, afin de mettre en évi- dence toutes applications sibles de la photographie à l'Astronomie phy- sique et aussi à l’Astronomie de précision; ils ont obtenu des clichés de 6 à 7 degrés carrés de les devenues pos- PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL surface, sur lesquels se trouvent reproduites avec une netteté extrème elle moins de déforma- lion possible des milliers d'étoiles. Ils ont décou- vert dans le groupe des Pléïades, sur l’un de leurs clichés, la nébuleuse de Maïa, restée jusque-là invi- sible même dans les plus puissantes lunettes; leurs épreuves de Saturne ont montré facilement la division de l'anneau dont la largeur est seule- ment de 0",4, ce qui est un véritable {est au point de vue du pouvoir optique de leur objectif photo- graphique ; ils sont parvenus à photographier le satellite de Neptune dans toutes les parties de son orbite, même dans sa position la plus rapprochée, à 8" de la planète. Dans la séance de l’Académie des Sciences du 18 janvier 1887, M. l'amiral Mou- chez présentait quelques-unes de ces admirables photographies stellaires d’une perfection inconnue jusque-là. Après avoir conslaté le vif succès qu'elles avaient obtenu auprès de tous les astro- nomes du monde entier, « succès tel », dit M. la- miral Mouchez Çqu'il fitnaitreun momentquelques doutes sur l'authenticité des résultats, » (c'est peut-être le plus grand éloge qu'on ait fait des tra- vaux photographiques de MM. Henry), le directeur de l'Observatoire de Paris demandait à l’Académie de prendre sous son haut patronage l'exécution d'une carte du Ciel tout entier, faite par les procé- dés photographiques avec le concours des princi- paux astronomes du globe. Frappée de la gran- deur d'un tel projet, des avantages qui ne pouvaient manquer d'en résulter pour l'Astronomie en géné- ral, et de l’honneur qui en rejaillirailsur la science française, l'Académie s'empressa d'accorder le patronage qui lui était demandé, et de convoquer, pour une Conférence internationale qui se réunirait à l'Observatoire de Paris le 16 avril 1887, les di- recteurs des Observatoires ainsi qu'un certain nombre de savants particulièrement intéressés par leurs études à la photographie astronomique et dont le concours était avec raison jugé indispen- sable pour résoudre les questions nouvelles et dé- licates soulevées par un aussi vaste projet. M. l’amiral Mouchez avait d’ailleurs préparé les voies avec l’activité qu'il sait mettre en toutes choses. Pressentis depuis quelques mois au sujel de celte réunion, la plupart des astronomes de France et de l'Étranger, avaient promis leur con- cours le plus empressé. En fait le congrès du mois d'avril 4887 se trouva composé de 56 membres, représentant 16 nations différentes. La liste de ces membres elassés par nationalilé donne les résul- Lats suivants : France 20 membres; Angleterre 8; Allemagne 6; Russie 3; Hollande 3; États-Unis 3 ; Autriche 2; Suède 2; Danemark 2; Belgique 1; Italie 4; Espagne 1; Suisse 1; Portugal 1; Brésil 1 ; République Argentine 1. 44 CH. TRÉPIED. — LA CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL 533 On voit la part considérable que la France pre- nait à la préparation de l'entreprise. Elle a gardé sa place au premier rang dans l’exécution, puisque sur les 48 observaloires entre lesquels est réparti le travail,il y a 4 observatoires francais, et que sur les 18 équatoriaux photographiques de ces obser- vatoires la moitié est de construction francaise. 1L.-—— LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE DE 1887. Deux questions principales élaient à résoudre par la Conférence. Il s'agissait d’abord de savoir si l’on adopterait comme instrument le télescope (réflecteur), ou la lunette proprement dite (réfrac- teur. Ensuite le travail à entreprendre devait être défini avec précision, et il fallait en fixer nette- ment les limites. La première de ces questions pouvait donner lieu à de longs débats. Si l’on suppose un réflecteur et un réfracteur de même ouverture et de même dis- tance focale, également exempts l’un et Fautre d'aberration sphérique, ilsne transformeront pas de la même manière le faisceau cylindrique de lumière émané d'une étoile. Le réflecteur transformera ce faisceau en un cône ayant pour directrice l’ouver- ture du miroir, et le sommet de ce cône marquera le lieu occupé par l’image réelle de l’astre. Si lon fait abstraction des phénomènes de diffraction qui dépendent de la grandeur et de la forme de l'ou- verture, l'image de l'étoile se réduit à un point qui coïncide avec ce sommel; el si l’on dispose un prisme de telle facon que le sommet du cône tombe sur une de ses faces, l'image de l'étoile vue à travers le prisme est un spectre linéaire dans toutes ses parties, c'est-à-dire un spectre d’une largeur très pelite, mais la même dans toute sa longueur; il n'y à pas, dans ce cas, aberration chromatique; l’achromatisme esl parfait pour toutes les radiations. On sait au coatraire que les réfracteurs ordinaires à deux verres ne peuvent réaliser l’achromatisme que pour deux radiations déterminées; ce sera par exemple pour deux ra- diations voisines de G, s'il s’agit d’une lunette photographique ; le faisceau cytindrique de lu- mière issu de l'étoile est transformé par l'objectif en uneinfinité de cônes s'appuvant sur l'ouverture ; il n’y a defoyer commun que pour deux radiations déterminées; pour toutes les autres, les distances focales sont différentes ; un prisme dont lune des faces contient le point où se trouvent les deux foyers confondus en un seul, détermine une section de grandeur variable dans tous les autres cônes; l'image spectrale de l'étoile vue à travers ce prisme n'est linéaire qu’en deux points de sa longueur; partout ailleurs elle s'élargil en pinceau. À ce point de vue de l’achromalisme, l'avantage des réflecteurs sur les réfracteurs n’est donc pas contestable; mais les instruments fondés sur la réflexion sont d'un maniement plus difficile; ils exigent un réglage délicat et souvent renouvelé; les surfaces réfléchissantes s’altèrent sous l'in- fluence de l'humidité, avec le temps. Pour ces motifs, les préférences des astronomes français élaient en faveur des lunettes. On pouvait erain- dre,sur ce point.des divergences et une opposition sérieuse de la part des astronomes anglais, en rai- son des beaux résultats qu'avaient produits les réfleeteurs en Angleterre dans les mains de War- ren de la Rue, Common, Isaac Roberts. Mais les astronomes anglais eurent la loyauté de venir spontanément déclarer que si les télescopes à ré- flexion doivent être préférés lorsqu'il s’agit de photographier certains objets célestes peu lumi- neux comme les nébuleuses et les comèêtes, cepen- dant, en raison des soins particuliers et délicats qu'exige leur emploi, et du temps nécessaire pour en obtenir le réglage parfait, il était préférable d'adopter les réfracteurs pour un travail d’une aussi grande étendue et devant exiger d'aussi longs efforts que celui d'un levé photographique du Ciel tout entier. En conséquence, ils proposèrent à la Conférence d'adopter le type français, l'instrument construit par MM. Henry el Gautier pour l’'Obser- vatoire de Paris, en plein fonctionnement depuis deux années déjà (ouverture 0 ", 33 et 3 ", 43 de distance focale). La Conférence vota celte résolution à l’unani- mité. Sur la question de la définition du travail et sur les limites à fixer pour son étendue, la résolu- tion de l'assemblée fut double. Elle décida : 1° Qu'il serait fait une première série de clichés à courte pose, devant contenir toutes les étoiles jusqu'à la onzième grandeur, dont le nombre à pré- voir est de 1500000, et qui, fournissant les élé- ments d'un calalogue de haute précision, serait ap- pelée à devenir le fondement de l'astronomie future ; 2° Qu’une seconde série de clichés à longue pose donnerait les étoiles jusqu'à la quatorzième gran- deur inclusivement, c'est-à-dire permettrait d’at- teindre un ordre de grandeur un peu supérieur à celui des plus faibles étoiles des cartes écliptiques. Le nombre des étoiles à prévoir par cette série est de 23 millions. Ces deux points fondamentaux réglés, la Confé- rence aborda l'étude des questions de détails. Il ne serait guère possible de la suivre ici dans une telle étude ; il suffira de présenter un tableau des résolutions adoptées : Résolutions de la Conférence internationale de 188% 1. Les progrès réalisés dans là photographie astronomique exigent inpérieusement que les astronomes de notre époque entreprennent en commun la description du Ciel par le moyen des procédés photographiques. 334 CH. TRÉPIED. — LA CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL 2. Ce travail sera fait dans des stations à choisir ul'érieu- rement, et avec des instruments qui devront être identiques dans leurs parties essentielles. 3. Les buts principaux seront : a). De dresser une carte photographique générale du Ciel pour l’époque actuelle, et d'obtenir des données qui permettent de fixer les positions et les grandeurs de toutes les étoiles jusqu’à un ordre déterminé, avec la plus grande précision possible (les grandeurs étant entendues dans un sens photo- craphique à définir). b. De pourvoir aux meilleurs moyens d'utiliser, tant à l’époque actuelle que dans l'avenir, les données fournies par les procédés photographiques. 4. Les instruments employés seront exclusivement des réfracteurs. 5. Les étoiles seront photographiées jusqu’à la quatorzième grandeur inclusivement, cette grandeur étant indiquée provi- soirement par l’échelle actuellement en France, et sous la réserve que sa valeur photométrique sera fixée ultérieurement. 6. L'ouverture de l'obiectif sera de 0m33 et la distance focale d'environ 3243, de sorte que 1’ d’arc soit approxima— tivement représentée par 0® 004. 7. Les directeurs d’Observatoires auront la liberté de faire construire les objectifs par les artistes qu’ils désireront em- ployer en leur fixant les conditions générales déterminées par la Conférence. 8. L’aplanétisme et l’achromatisme des objectifs seront calculés d’après les radiations voisines de la raie G de Fraun- hofer. 9. Toutes les plaques seront préparées suivant une formule unique à déterminer ultérieurement. 10. T1 sera institué un controle permanent de ces plaques au point de vue de leur sensibilité relative pour les différentes radiations. 11. Les questions relatives à la conservation et à la repro- duction des clichés ne peuvent être résolues dès maintenant, et il convient de les renvoyer à l'examen d’une Commission spéciale. 12. Les mêmes conclusions sont adoptées pour ce qui regarde la détermination des grandeurs photographiques des étoiles. 13. La résolution 8 ci-dessus, relative à l’aplanétisme et à l'achromatisme des objectifs sera entendue dans ce sens, que la distance focale minimum sera celle d’une radiation voisine de G, en vue d’atteindre le maximum de sensibilité des plaques photographiques. 14. Les objectifs seront construits de manière que le champ utilisable soit de 1 degré au moins à partir du centre. 15. Dans le but d'éliminer les fausses étoiles et de parer à l'inconvénient des points insensibles qui pourraient exister sur les plaques, il sera fait deux séries de clichés pour tout l’en- semble du ciel. 16. Les deux séries de clichés seront faites de facon que l'image d’une étoile située au coin d’une plaque de la première série, se trouve aussi près que possible du centre d’une plaque de la seconde série. 17. Outre les deux épreuves qui doivent donner toules les étoiles jusqu’à la quatorzième grandeur, il sera fait une série d'épreuves à plus courtes durées d’exposition, pour assurer une plus grande précision dans la mesure micrométrique des étoiles de repère et rendre possible la construction d’un cata- logue. 18. Les clichés supplémentaires, destinés à la construction du catalogue, contiendront toutes les étoiles jusqu’à la onzième grandeur approximativement. Le comité d'exécution réglera le procédé à suivre pour s'assurer que cette condition est remplie. 19. Chaque plaque photographique destinée à la formation du catalogue sera accompagnée de toutes les données néces= sairés pour obtenir son orientation et la valeur de son échelle; autant que possible, ces données se trouveront inscrites sur la plaque elle-même. Chaque plaque de cette espèce, portera la copie, bien centrée, d’un système de repères dérivés d'un réseau et destinés à éli- miner les erreurs qui pourront être produites par une défor- mation ultérieure de la plaque sensible. 20. Dans la conswuction des clichés destinés à la forma- tion de la carte proprement dite, on réduira au minimum le nombre des repères auxiliaires destinés au contrôle et à la réduction des clichés, 21. Les tubes des instruments photographiques seront construits avec le métal le plus favorable pour obtenir un plan focal invariable, et porteront une graduation pour Ja détermination et le réglage de la position des plaques. S 22. Le choix des étoiles de repère est renvoyé an Comité d'exécution. 23. La question des méthodes de mesure et la conversion des nombres obtenus en ascensions droites et en déclinaisons pour l’équinoxe de 1900 sont renvoyées au Comité d'exécution. Le Comité s’occupera en premier lieu de l'étude et de l’em- ploi dés instruments de mesure pouvant donner à volonté des coordonnées rectangulaires où polaires, et basés sur l'emploi simultané des échelles pour les grandes longueurstet de vis micrométriques pour les subdivisions de l'échelle. 2%. Le raccordement des plaques sera obtenu conformément à la résolution n° 16. Tel est l’ensemble des résolutions prises, pour la plupart, à l'unanimité, qui formèrent la base de l’entreprise de la nouvelle carte céleste. Quelques- unes seront ullérieurement développées; d’autres, modifiées en quelques points de détail; mais aucun changement fondamental n'y sera fait. Avant de se séparer la Conférence avait formé un Comité permanent d'exéculion composé des directeurs des Observatoires assurés déjà de pouvoir donner leur coopération à l’œuvre de la Carte !, et de plusieurs autres astronomes français ou élrangers que leur compétence spéciale en ces malières désignait à son choix. Tout en posant les principes et déterminant les lignes générales du travail qu'il s'agissait d'entreprendre, la Confé- rence de 1887 avait, comme on vient de le voir, poussé assez loin l'examen des détails pour per- mettre aux divers Observaloires de préparer avec sûreté les moyens d'exécution. Il restait cepen- dant à résoudre bien des questions pratiques dont l'étude était à peu près impossible dans une as- semblée générale. Le bureau du Comité perma- nent avait donc une mission ainsi définie : assurer l'exécution de toutes les décisions de la Confé- rence internationale, susceptibles d’une applica- lion immédiate; centraliser pour les communiquer aux astronomes intéressés tous les renseignements qu'il serait possible de recueillir dans les divers pays sur les questions de détailnon réglées encore ; provoquer, publier des études spéciales sur les questions, réunir en un mot les éléments d’une enquêle dont les résultats seraient plus tard dis- cutés dans une séance générale du Comité ou mème dans une nouvelle Conférence internatio- 1 Pour la France,les directeurs dés Observatoires d'Alger Bordeaux, Paris, Toulouse avaient déjà, sur la proposition de M. Liard, directeur de l'Enseignement supérieur, recu de M. le ministre de l'Instruction publique les crédits nécessaires pour la construction de leurs instruments. Pour l'Etranger, les directeurs des Observatoires de la Plata et de Rio-Janeiro s'étaient déclarés prêts à l'aire la commande de leurs équato- riaux photographiques. CH. TRÉPIED. — LA CARTE 2939 PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL nale. M. l'amiral Mouchez, président du bureau du Comité permanent, a rempli cette tâche difficile avec une ardeur infatigable el avec un plein succès. Grâce à la libéralité de l’Académie des Sciences il a pu fonder un Bulletin créant un lien nécessaire entre les membres du Comité, et de 1887 à 1889 il a publié dans ce Bullelin un nombre considérable de mémoires importants sur les meil- leures méthodes tant photographiques qu'astro- nomiques à employer dans l'exécution de la Carte, sur les procédés de mesure à recommander à ceux des astronomes qui assumeraient la lourde tâche de construire un catalogue devant fournir les positions précises des 1500 000 étoiles des clichés faites avec de courtes durées de pose; sur les causes d'erreur à craindre dans les mesures et sur les moyens d'éliminer ces erreurs ou d’en réduire l'influence à un minimum. On trouve aussi dans ce Bulletin d’intéressantes correspondances rela- lives à l'état d'avancement de la construction des équatoriaux photographiques dans les divers pays du monde. En 1889, deux années après la réunion de la première Conférence, on pouvait constater que l'enthousiasme des premiers jours ne s'était point affaibli, que les gouvernements de quatorze nalions avaient accordé les fonds nécessaires, que partout les préparalifs étaient poussés avec la plus grande activité, et que le succès final de l'œuvre élait devenu certain. Le moment semblait done venu de faire un nouveau pas en avant, et de provoquer une réunion de tous les astronomes intéressés dans la question, afin d'arrèler d'une manière définitive, s'il était possible, lous les détails de lopération. Le bureau du Comité per- manent pensa que l'Exposition universelle de 1889 offrait une occasion toute nalurelle de lenir une réunion générale à Paris. III. — LA CONFÉRENCE DE 1889 La réunion eut lieu du 16 au 22 septembre, à l'Observatoire de Paris. Nous allons revue les plus importantes des questions trailées | passer en | dans cette deuxième Conférence. On se rappelle que le type d’instrument choisi | pour le levé photographique du Ciel consste en deux lunettes parallèles montées équalorialement surun même axe, dont l’une est achromalisée pour deux radiations voisines de G, l’autre servant de pointeur pour maintenir la lunelte fixée sur un même point du Ciel pendant toute la durée de la | pose. L’astronome choisit pour point central du cliché qu'il veut obtenir un certain point du Ciel défini par son ascension droite à, et par sa dé- clinaison 3,. 1l n’existera en général aucune étoile ayant ces coordonnées; mais il suffit que dans le champ de la lunette-pointeur il y ait une étoile dont les coordonnées x et à diffèrent peu de 4, et à,; celle- là sera prise comme ‘étoile-quide, c'est sur celle-là que sera dirigée la ligne de visée formée par le centre optique du pointeur et la croisée de fils d'un réticule mobile. Il reste à savoir : 1° Avec quelle précision les coordonnées 4 el à devront être connues. 2° À quelle distance l’étoile-guide pourra être prise du centre de la plaque, c'est-à-dire quelle sera la limite supérieure admise pour la valeur des différences 4—4x, el à—à,. IL élait indispensable de fixer à cet égard des règles positives, car la facilité des réductions ullé- reures et l'exactitude des résultats conclus en dé- pendaient. Sur la première question la Conférence décida que les coordonnées des étoiles-guides devraient être près. La seconde question en soulevait deux autres : à quelle limite de grandeur s’arrêlera-t-on dans le choix des éloiles-guides? quelle est la probabilité de trouver au moins une éloile salisfaisant à des conditions de grandeur et de distance données, dans une étendue du Ciel correspondant à la grandeur du champ de la lunette-pointeur? Ces connues à à” angulaire questions ne pouvant être résolues dans une séance générale furent renvoyées à une commission qui proposa el fit accepler les règles suivantes : 1° En général, on choisira pour éloile-guide l'étoile la plus brillante à l'intérieur d'un cercle de 22’ de rayon, dont le centre coïncide avec celui de la plaque, c’est-à-dire que l’éloile-guide sera choisie de manière que la valeur de l'expression NV (8 — Gu)" H(x — 45)" COS’ 05 ne dépasse pas 22 minutes d’are. 2% Dans le cas où l'étoile remplissant ces condi- tions se trouverait d’un éclatinférieur à celui d’une étoile de neuvième grandeur, il faudra prendre comme étoile-guide supplémentaire l’éloile de neu- vième grandeur ou d'un éclat supérieur qui sera la plus voisine du centre de la plaque. {La fin prochainement) Ch. Trépied Directeur de l'Observatoire d'Alger. E. HOSPITALIER. — LES MOTEURS À COURANTS ALTERNATIFS LES MOTEURS À COURANTS ALTERNATIFS Depuis quelques années, les courants alternatifs ont pris un développement industriel considérable, et les stations centrales organisées pour la disiri- bution de l’énergie électrique par courants aller- natifs sont presque aussi nombreuses et aussi puissantes que les usines distribuant l'énergie électrique sous forme de courant continu. Les courants alternalifs présentent cependant de graves inconvénients : les trois principaux sont l'impossibilité de les emmagasiner; l’impossibililé de les appliquer directement aux industries élec- trochimiques dans lesquelles intervient l'électro- lyse; et enfin leur inaptitude à produire du travail mécanique aussi commodément el aussi économi- quemenl que les courants continus. © Mais ces inconvénients sont rachetés par un grand nombre d'avantages plus importants encore qui justifient l'emploi des courants alternatifs. Les dynamos à courants alternatifs, ou alternateurs, sont des machines d'une très grande simplicilé, se prêtant plus facilement que les dynamos à courant continu à la construction d'unités de grande puis- sance et à la génération de forces électromotrices efficaces beaucoup plus élevées. En fait, les forces électromotrices alternalives employées industriel- lement varient entre 50 el 10 000 volts, tandis que les dynamos à courant continu actuelles atteignent diflicilement 3 000 volts. L'isolement des courants alternatifs est beaucoup pius facile que celui des courants continus de même tension, et il semble établi que, à force électromotlrice égale, les subs- tances isolantes couvrant des càbles à courants allernalifs se conservent mieux que les isolants couvrant des càbles à courant continu. Enfin, dernier avantage, el non des moindres, le courant alternatif se prèle merveilleusement à toutes les transformations exigées pour son appli- calion, les transformateurs à courants alternatifs élant des appareils inertes agissant sous l'influence de phénomènes purement physiques, sans qu'au- cune partie mobile intervienne dans leur fonetion- nement. Gräce à celte précieuse propriélé des transformateurs, il est possible de produire une puissance électrique donnée à bas potentiel et à grande intensité, de la transformer à haut poten- liel el faible intensité, de la (ransporter à une dis- lance considérable, sur une ligne aérienne de sec- lion relativement faible, de la retransformer à l'arrivée et de lui donner les propriétés exigées par les applications, c’est à-dire un faible potentiel et une grande intensité. Toules ces transformations s'effectuent avec des rendements auxquels les ap- pareils mécaniques ne nous avaient pas habitués; malgré la double transformation et une certaine perle en ligne, perte que les tensions élevées ont pour but de rendre minima, on peut retrouver à l’arrivée entre 70 et 80 pour 100 de l'énergie élec- trique produite au départ par l’alternateur à basse tension. Les facilités de produclion des tensions élevées, de transmission à grande distance sans pertes im- portantes, et de transformation à l’arrivée sont donc, en résumé, des propriétés remarquables qui justifient le développement inaltendu pris par les distributions d'énergie électrique à courants alter- nalifs pendant ces dernières années. Ce dévelop- pement eût élé encore plus grand si l’on était parvenu à faire disparaitre les inconvénients que nous signalions au début de cette étude. Bien que les tentatives faites pour emmagasiner l’é- nergie électrique fournie par les courants alterna- üifs en les redressant et pour les rendre propres aux opéralions électrochimiques n'aient amené jusqu'à présent aucun résullat industriel appré- ciable, il n’en est pas de même en ce qui concerne la transformation de l'énergie électrique des cou- rants alternatifs en travail mécanique : le moteur électrique à courants alternatifs est aujourd’hui un organe industriel d’un rendement satisfaisant, d'un maniement facile, et dont les applications commencent à se répandre, aussi bien pour la pro- duelion des petites forces motrices que pour celle des grandes forces motrices et leur transmission à grande distance. Les expériences actuellement en préparation entre Lauffen et Francfort-sur-le-Mein, où l’on projelte de transmettre une puissance de 300 chevaux à 175 kilomètres de distance, à l’aide de courants alternatifs à phases mulliples (variété spéciale des courants alternalifs), avec des tensions qui varieront entre 20 000 et 30 000 volts eflicaces, nous diront bientôt dans quelle mesure sont fon- dées les espérances de transport à grande distance de puissantes forces motrices basées sur l'emploi de ces courants; mais, quel que soit le résultat de ces expériences, il n'en restera pas moins acquis, par ce que nous savons déjà, que les moteurs à cou= ran(s alternatifs peuvent déjà rivaliser, dans bon nombre de circonstances, avec les moteurs à cou- rant continu. [Il n'est done pas sans intérêt de passer en revue les solutions acquises el les résul- talts déjà obtenus. Rappelons d'abord quelques définitions et quel- E. HOSPITALIER. — LES MOTEURS A COURANTS ALTERNATIFS 531 ques propriétés générales essentielles. Le type du courant alternatif parfait est celui produit par un circuit régulier et indéformable, un cercle tour- nant autour d'un de ses diamètres, par exemple, dans un champ magnétique uniforme, avec une vitesse angulaire uniforme, l’axe de rotation étant perpendiculaire à la direction des lignes de force du champ. Ce circuit est le siège d’une force élec- tromotrice sinusoïdale changeant deux fois de signe par tour. L'intervalle de temps qui sépare deux passages successifs de la force électromotrice par zéro est le temps périodique où la période de la ma- chine; on la désigne par la lettre T. Son inverse T est la fréquence et s'exprime comme l'inverse d’un temps ou le nombre de périodes par seconde. Les fréquences des courants alternatifs actuellement employés dans l’industrie varient entre 42 pé- riodes par seconde et 133 périodes par seconde. Des recherches récentes semblent indiquer que l'on aurait grand interêt à augmenter beaucoup les fréquences actuelles; mais l'étude de cette question sortirait du cadre que nous nous ‘ommes tracé. Les propriétés des courants alternatifs sont, au point de vue de la propagation, très différentes de celles des courants continus. Supposons, par exemple, qu'un générateur à courants alternatifs ou un alternateur, pour em- ployer une expression abrégée qui commence à se répandre, soit établi en un circuit avec un fil de cuivre replié en double. L’intensité du courant prendra une cerlaine valeur. Mais il sufit de rouler ce fil sous forme d’une bobine, et de placer à l’intérieur de celte bobine un faisceau formé de fils de fer pour que l'intensité se réduise dans des proportions considérables. C’est que, dans le second cas, on a considérablement augmenté le coefficient de self-induction du cireuit, coeflicient qui était nul ou négligeable dans le premier cas, et, par suite, sa résistance apparente. Non seulement l'intensité s’est affaiblie, mais il s’est produit un retard de phase ou décalage entre l'intensité et la force électromo- trice, et le produit de l'intensité efficace ! par la force électromotrice efficace ne représente plus la puissance moyenne produite par l'alternateur. Cette puissance moyenne n’est qu'une fraction de ce produit, fraction que l’on peut rendre aussi pe- tite que l’on veut en augmentant suflisamment le 1 L'intensité eflicace est la racine carrée de la moyenne des carrés de l’intensité. C’est celle qu'indiquerait un élec- trodynamomètre intercalé dans le circuit. Une force électro- motrice ou une différence de potentiel efficace est la racine carrée de la moyenne des carrés de la différence de potentiel. C’est celle qu'indiquerait un électromètre idiostatique ou un voltmètre Cardew établi entre les deux points considérés du circuit. REVUE GÉNÉRALE, 1891. décalage, c'est-à-dire en augmentant suffisamment le coeflicient de self-induction !. Des actions plus complexes se manifestent si l’on intercale un condensateur dans le circuit, ou si les phénomènes de self-induction sont accompagnés de phénomènes d’induction mutuelle. Il se produit alors des phénomènes d'apparence paradoxale que la théorie permet d’ailleurs de prévoir et d’expli- quer. C’est ainsi, par exemple, qu’un condensateur monté en tension ayec une bobine de self-indue- tion, la différence de potentiel aux bornes de l'alternateur fournissant le courant qui les tra- verse, est plus petite que celle existant aux bornes de chacun des appareils pris individuellement. Si un condensateur monté en dérivalion avec une bo bine présentant de la self-induction, l'intensité totale traversant les deux dérivations est plus grande que celle fournie par l'alternateur, ele, Nous avons cilé ces quelques exemples pour montrer combien les questions de propagation du courant se compliquent dès que l’on a affaire à des courants alternatifs. Aussi n'est-il pas éton- nant que les études de ces courants ct les progrès de leurs applications soient à peu près réservés à des ingénieurs doublés de savants capables d'ana- lyser les résullats et de les soumettre à un calcul souvent complexe et difficile, même dans l’hypo- thèse d’une force électromotrice parfaitement si- nusoïdale, de lemps périodiques et de coefficients d'induction constants, et de résistances invaria- bles. Malgré les complications apportées à la pro- pagation des courants alternatifs par leurs pro- priélés spéciales, un moteur à courants alternatifs 1 En appelant Emax, la force électromotrice maxima, T le temps périodique, à l'intensité à l'instant #, et en posant une fois pour toutes : 27 QE on a pour valeur de Pintensité à l'instant £, dans le cas d’une résistance KR sans self-induction : = Us 11 Enix). = sin © 4 19 et pour l'intensité cfficace : I Er, = —* R istance R présente un coeflicient de self-induction L, l'intensité à chaque instant est . Emnx. ————— VR2+ w°?L? L R sin(w lé — +) avec la condition: {ang 9 = w et l'intensité eflicace Een. let, — VR2 + w°L? En augmentant L, on peut rendre Je, trés petit. Les Anglais 9 D . . S appellent le facteur wL linduclance du circuit, et le radical VR2 + w2L? son impedance. En France, ce radical porte le nom de 7ésislance apparente. 16 538 E. HOSPITALIER. — LES MOTEURS A COURANTS ALTERNATIFS ne diffère pas essentiellement, en principe général, d'un moteur à courant continu : on y trouve toujours les deux mêmes parties principales : un champ magnétique ou énducleur, et un système induit, tournant l’un par rapport à l'autre; mais tandis que le champ magnétique des moteurs à courant continu est toujours constant, celui des moteurs à courants alternatifs est, suivant les cas, constant, alternatif où tournant. Ces différences dans la nature du champ induc- teur peuvent servir de base à une classification des moteurs à courants alternatifs, déjà très nombreux et très variés, classification que résume le tableau ci-dessous; elle indique ainsi, pour chacun des Lrois groupes principaux, les variétés importantes, et les principaux types de chaque variété : CLASSIFICATION DES MOTEURS A COURANTS ALTERNATIFS A. — Moteurs à champ constant ou moteurs synchrones À __. … (Aimants. — Magnèéto-alternateurs EXCITATION SÉPARER) Zec{ro-aimants. — Dynamo-alternateurs AUTO-EXCITATION. . - Courant redressé., — Zipernowsky B. — Moteurs à champ alternatif Dynamo-série. — Moteurs à courant continu à inducteurs feuilletés. Dynamo-shunt. — Moteurs à courant continu à inducteurs feuilletés. Moteurs électrodynamiques. -- Compteur E. Thomson. Champ partiellement redressé. — Mordey. Induit fermé. — E. Thomson. C. — Moteurs a champ tournant Ferraris Tesla Schallenberger Hutin et Leblanc ALTERNATEURS ORDINAIRES OU A UN SEUL CIRCUIT “re Ferraris | Trois fils et deux \ Tesla À x $s courant Borel ALTERNATEURS | À PHASES MULTIPLES , N Dolivo-Dobrowolsky OU A COURANTS re : et Brown "os ls ‘ois S | Lro se = trois | Haselwander 4 PATTES POLYPHASÉS CAURENR Bradley Wenstrüm À. MOTEURS A CHAMP CONSTANT. — Ce genre de mo- teur, le plus anciennement expérimenté, est fondé sur le principe de la réversibilité des alternateurs. Le courant alternatif est envoyé dans une série de bobines induites se mouvant dans un champ ma- gnétique constant produit par un aimant ou un électro-aimant. Le plus simple est constitué par une bobine de Siemens double T tournant entre les branches d’un aimant, ou d’un électro-aimant excité par une source étrangère : si lon a préala- blement lancé l'induit à une vitesse angulaire correspondant à la fréquence du courant alternatif fourni par l'alternateur (50 tours par seconde, par exemple, si la fréquence du courant alternatif est de 50), le mouvement de la bobine induite se con- tinuera synchroniquement et suivra toutes les va- riations de vitesse de l'alternateur, à moins que l'on ne vienne appliquer brusquement sur l’axe un couple résistant dépassant une cerlaine valeur : le synchronisme cesse et le moteur s'arrête en un temps généralement très court. La théorie de ces moteurs a été développée en 1884 par M. le D' Hopkinson !, La nécessité d'amener initiale- ment le synchronisme en s’aidant d’une puissance mécanique étrangère, d’exciter les inducteurs par, une source étrangère dans le cas des grandes puis- sances, et l'obligation de marcher à vitesse angu- laire rigoureusement constante, ont empêché ces moteurs de recevoir de nombreuses applications industrielles. Pour obvier à l'inconvénient de la mise en marche, M. Mordey ? a proposé d’adjoindre à l’ins- tallation de force motrice quelques accumulateurs qu: seraient chargés par l’excitatrice des induc- teurs, et de se servir de ces accumulateurs comme réserve d'énergie,et de l’excitatrice comme moteur pour produire la mise en train à vide du moteur synchrone. Les accumulateurs devront done avoir un grand débit et seulement une faible capacité, car ils ne doivent travailler que quelques minutes au moment de chaque mise en marche. M. Zipernowsky a fait disparaitre deux des plus graves inconvénients propres aux moteurs Syn- chrones en les rendant auto-excilateurs, l’excita- tion élant empruntée à une dérivation dans la- quelle est intercalé un redresseur de courants; le moteur se met automatiquement en marche pourvu qu'on supprime la charge et que le démar- rage se fasse à vide;-le moteur atteint rapidement sa vitesse angulaire de régime, qu'il maintient en- suite parfaitement constante, malgré de brusques variations dans le couple résistant. Le rendement de ces moteurs est des plus satis- faisants, car il atteint 80 pour 100 pour un moteur de 4 kilowatts. Cependant l'obligation de munir les moteurs syn- chrones d'un dispositif spécial de mise en marche deles faire démarrer à vide et de les faire tourner à vitesse angulaire constante, restreint considéra- blement le nombre et la nature de leurs applica- tions. Ils conviennent surtout aux transports de force motrice à distance, pour des usines à vilesse constante fonctionnant de longues heures sans interruption. 1 J. Hopxixson. On the Theory of allernating Currents. Society of Telegraph-engincers and Electricians. 13 no- vembre 188%. 2 W, M. Morvey. Allernale current working. Journal of the Institution of Electrical-engineers, 23 mai 1889, A6 E. HOSPITALIER. — LES MOTEURS A COURANTS ALTERNATIFS- 539: Les moteurs à champ alternatif, et surtout les moteurs à champ tournant sont exempts des in- convénients que nous venons de signaler, et rem- plissent bien mieux toutes les conditions voulues de démarrage sous charge et de vitesse angulaire variable. B. Moteurs A CHAMP ALTERNATIF. — Toute dy- namo à courants continus alimentée par des cou- rants alternatifs peut se mettre en marche et tour- ner en produisant une puissance mécanique appré- ciable, car elle est comparable à un électrodyna- momètre dont le couple de torsion reste toujours de même signe, malgré les inversions de sens du courant. Mais un moteur ainsi constitué présente de nombreux et graves inconvénients : les inver- sions rapides du courant développent dans les noyaux des inducteurs des courants de Foucault qui réduisent considérablement le rendement du moteur, si l’on n’a pas pris la précaution de feuille- terses inducleurs; d'autre part, le grand coeflicient de self-induction des circuits du moteur réduit l'in- lensité efficace, et, par suite, la puissance spéci- fique ! d’un moteur de dimensions données. Pour ces raisons, les moteurs de ce genre sont peu employés, si ce n'est pour la production de faibles puissances ; nous signalerons, par exemple, les moteurs qui actionnent des petits ventilateurs domestiques dépensant 1 à 2 ampères sous une différence de potentiel efficace de 50 volts, appa- reils très employés actuellement en Amérique. L’excitalion de ces moteurs est tantôt disposée en shunt, tantôt en série. En supprimant le fer dans les inducteurs et les induits, on peut également réaliser un moteur électrodynamique de faible puissance spécifique, mais dont le couple moteur est, à chaque instant, proportionnel au produit des intensités des courants qui traversent respec- tivement les inducteurs et l'induit. Le moteur du compteur d'énergie électrique du professeur Elihu Thomson est le type des moteurs électrodynami- ques à courants alternatifs. Les moteurs électro- dynamiques sont nécessairement des appareils à faible puissance spécifique, car les actions électro- dynamiques sont faibles dans un milieu dont la perméabilité magnétique est égale à 1. Si on veut augmenter les actions, il faut alors mettre beau- coup de fil sur les enroulements, et augmenter les dimensions de l'appareil, ce qui n’a aucune in- fluence sur la puissance spécifique. ! On appelle puissance spécifique d'un moteur ou d’un géné- rateur, le quotient de sa puissance utile par sa masse. En électricité, les puissances spécifiques se mesurent générale ment en walts par kilogramme. Plus ce facteur est grand, plus appareil est léger, peu encombrant et économique de prix d’achat, Pour éviter les pertes par courants de Foucault et par hystérésis provenant des inversions rapides d'aimantalion dans les inducteurs des moteurs à champ alternatif, M. Yordey a proposé de faire passer le courant alternatif par un redresseur monté sur l'axe même du moteur. Au moment de la mise en marche, l’action de ce redresseur est nulle, mais, au furet à mesure de l’accroissement de vitesse angulaire, le courant traversant le mo- teur se trouve de plus en plus redressé, c’est-à- dire que la fréquence des inversions diminue, ce qui réduit d'autant les pertes causées par ces inversions el améliore le rendement ainsi que la puissance spécifique. Ces inversions devien- draient même nulles dans les inducteurs si la vitesse angulaire du moteur devenait synchrone avec la fréquence du courant alternatif qui l’ali- mente. C'est aussi dans la classe des moteurs à champ alternatif qu'il convient de placer des moteurs à induit fermé. Les expériences de répulsions élec- trodynamiques du professeur ÆZlihu Thomson ont montré qu'un circuit fermé placé dans un champ alternatif tend à se déplacer de façon à rendre son coefficient d'induction mutuelle minimum, c’est-à- dire de façon à rendre minimum le flux de force qui le traverse. Si l’on place dans ce champ alter- natif une série de bobines élémentaires mobiles autour d’un axe commun, et qu'un système de balais convenablement disposé ferme chacune des bobines en court-circuit au moment où le flux qui la traverse est maximum, el l’ouvre au moment où le flux devient nul, pour la laisser en circuit ouvert jusqu'au moment où le flux redevient maxi- mum, chacune de ces bobines est soumise à une force, et par suite produit un couple moteur que la multiplicité des bobines rend sensiblement cons- tant. Dans ce moteur, il n'y a aucune connexion entre le circuit inducteur et le système induit. Le circuit inducteur est mélalliquement fermé sur les fils venant du générateur, le circuit induit est fermé sur lui-même. L'expérience est facilement réalisable avec une petile machine Gramme ou Rechniewski à eux pôles, en ayant soin de décaler les balais de 45° environ dans le sens de la rota- tion. Les moteurs à champ alternatif sont peu emplo- yés, et il n’a pas été publié jusqu'ici d'expériences indiquant leur rendement. Il est peu probable, d'ail- leurs, qu'ils reçoivent un grand développement industriel, car les moteurs à champ tournant, dont il nous reste à parler, présentent les mêmes avan- tages que les moteurs à champ alternatif au point de vue du démarrage et du synchronisme, mais ils offrent de plus le grand avantage de fonctionner sur circuits métalliques entièrement 540 E. HOSPITALIER. — LES MOTEURS A COURANTS ALTERNATIFS fermés, sans aucune commutation ni inter- | teur, le second par le circuit secondaire d’un trans- ruption. formateur dont le circuit primaire est monté en C. MOTEURS A CHAMP TOURNANT. — M. Ferraris a in- diqué pour la première fois, en mars 1888, le prin- cipe des moteurs à courants alternatifs, moteurs dont le développement actuel fait prévoir à bref délai une véritable révolution aussi bien dans le transport des grandes forces motrices à de grandes distances que dans la distruction de l'énergie élec- trique pour moteurs de faible puissance. Voici d’a- bord le principe établi par M. Ferraris : Lorsque deux courants alternalifs de même période traver- sent deux circuits disposés rectangulairement, la résultante de chacun des deux champs magnétiques que produirait chaque circuit s’il était seul est un champ magnélique tournant, d'intensité constante et de vitesse angulaire uniforme, faisant un tour complet pendant la durée d’une période. Si l'on place dans ce champ tournant un circuit fermé sur lui-même, ce circuit sera le siège de courants in- duits, et ces courants induits tendront à faire tourner le circuit induit dans le sens même de la rotation du champ. Sauf le mode de produclion du champ tournant, la rotation ainsi obtenue est identique à celle de l'expérience classique connue sous le nom de magnétisme de rotation d'Arago. On peut aussi dire, avec plus d’exactitude, que le moteur à champ tournant fonctionne en vertu des courants de Foucault dont il est le siège. Ces courants de Foucault seraient nuls si le circuit était immobile dans le champ, c’est-à-dire si le circuit tournait à la même vitesse angulaire que le champ, et c'est pour satisfaire à cette condition d'immobilité relative que le circuit tourne dans le champ, et dans le même sens que lui: le circuit suit le champ. Bien que d'invention relalivement récente, les moteurs à champ tournant sont déjà très variés comme principes et comme dispositions. Ils se dis- tinguent principalement par le mode de production du champ tournant, et par le générateur qui ali- mente le moteur. Nous examinerons successive- ment les moteurs à courants alternatifs ordinaires, et les moteurs alimentés par des alternateurs à induits multiples produisant des courants po/ypha- ses. a. Alternateurs ordinaires. — Plusieurs procédés permettent d'obtenir, avec un courant alternalif ordinaire, deux courants alternatifs décalés d'un quart de période et capables, par suite, de produire un champ tournant. M. Ferraris a proposé d'employer deux circuits dérivation sur l'alternateur. Pour obtenir un champ tournant, M. Tesla excite les inducteurs par deux circuits distincts montés en dérivalion sur la canalisation. Chacun de ces circuits est constitué par un certain nombre de bobines en tension, mais l’un des circuits a des bobines présentant une faible résistance et un grand coefficient de self-induction, c’est-à-dire une grande constante de temps, tandis que le second circuit a, au contraire, une grande résistance et un faible coefficient de self-induction. Le décalage de l'intensité sur la force électromotrice étant propor- tionnel à la constante de temps, il est possible de combiner les constantes de temps des deux circuits de telle façon que le décalage soit sensiblement égal à un quart de période. On réalise ainsi les condi- tions nécessaires à la rotation continue d’un circuit fermé placé dans le champ tournant produit par les inducteurs. M. Schallenberger dispose un circuit induit fermé sur lui-même et placé obliquement par rapport au circuit primaire alimenté par l'alternateur. Les réactions du circuit inducteur principal et du cir- cuit induit produisent un champ tournant. Dans le moteur de MM. Æutin et Leblanc le champ tournant est produit par deux séries de bobines montées en dérivation sur l'alternateur, mais en intercalant un condensateur dans l’un des circuits. On obtient ainsi très facilement entre les courants traversant les deux dérivations le décalage d'un quart de période nécessaire à la production du champ tournant. On sait, en effet, qu’en intercalant un condensa- teur dans un circuit présentant de la self-induetion, on diminue le coefficient de self-induction appa- rent de l’ensemble, ainsi que le décalage du cou- rant traversant la bobine et le condensateur par rapport à la force électromotrice produisant ce courant. C’est cette propriélé qui est appliquée dans le moteur de M. Leblanc !. Le système induc- 1 Théorie élémentaire des moteurs à courants alternatifs à champ magnétique tournant et à induit fermé. Voici, très succinctement résumée, la théorie des moteurs à champ tour- nant ramenée au cas le plus simple, celui de deux cireuits induc- teurs décalés de un quart de période agissant sur deux cir- cuits induits décalés de un quart de tour. Cette théorie est établie d’après une étude de MM. Hutin et Leblanc résumée par M. Frank-Géraldy dans la Lumière électrique du 4 juil- let 1891 Courant inducleur. — Le courant inducteur fourni par la génératrice se bifutque en deux parties dont l’une renferme 8 bobines induites montées en deux dérivations de 4 bobines en tension, l’autre renferme les 8 autres bobines induites mon- tées en tension, ce second circuit se trouvant coupé par un condensateur. En proportionnant convenablement la capacité du condensateur et la fréquence du courant alternatif, on alimentés, le premier directement par l’alterna- | peut obtenir que les intensités traversant respectivement les E. HOSPITALIER. — LES MOTEURS À COURANTS ALTERNATIFS teur de ce moteur est formé d’un anneau portant 16 épanouissements de fer feuilleté rayonnant à deux circuits soient décalées de un quart de période, et satis- fassent aux équations 1, = A sinwt I, = A cost en posant, une fois pour toutes, 2m T; Dans ces conditions, le champ magnétique résultant est un champ magnétique tournant. Nous supposerons pour simpli- fier le raisonnement et l'explication, qu’il y a un seul champ tournant et que le champ tournant fait un tour complet par période (dans le moteur multipolaire construit par M. Leblanc, il y à, en réalité, quatre champs tournants, une révolution entière du champ correspond donc à quatre périodes). Le champ tournant inducteur fait ainsi N, tours par se- &1 = 1 SA conde, en posant N; — T” N, étant la fréquence du courant alternatif, ou le nombre de périodes complètes par seconde traversant le circuit primaire ou inducteur. Induits. — Les bobines induites, au nombre de 16, peuvent être également considérées, au point de vue du raisonnement, comme une seule bobine soumise à l’action du champ tour- nant. Cet induit étant tout d’abord immobile, il sera le siège c 1 Re de courants alternatifs de fréquence T° de N, péricdes par 1 seconde. Si nous supposons, au contraire, le champ magnétique fixe dans l’espace et que nous fassions tourner la bobine induite avec une vitesse angulaire de N, tours par seconde, elle sera Je : ; 1 & le siège de courants alternatifs d’une fréquence T = No. 2 Comme l’induit se meut sous l’action du champ inducteur, il s’y développe des courants induits qui s’opposent à la création des courants qui naïîtraient dans cet induit s'il était maintenu immobile par rapport au champ tournant. Ces courants in- duits ne se manifestent donc qu’en vertu de la vitesse angu- laire relative N = N, — N, des inducteurs et de l’induit. Ces courants sont maxima lorsque N, = 0, c’est-à-dire lorsque l’induit est immobile ; ils tendent à diminuer par l'accroisse- ment de N, et.deviendraient nuls, à la limite, dans un moteur théoriquement parfait pour N°, = N, et N —0. En négligeant les réactions d’induit, réactions faibles dans une machine bien proportionnée, nous pouvons établir les équations du moteur à courants alternatifs ainsi cons{itué en considérant que la fréquence du courant alternatif engendré dans l’induit a pour valeur N, — N, = N — F et en posant 27 se Appelons ® le flux d'induction magnétique total produit par l’inducteur sur l’induit pendant le temps d'une période rela- tive T. (Cette valeur d est le quadruple du flux réel, comme il est facile de l’établir en considérant les variations pendant la période entière). La force électromotrice moyenne induite E, aura donc pour valeur = 0. et si le circuit induit a une résistance R, et un coefficient de self induction L,, on aura pour valeur de l’intensité elicace Is. cat p LE Np T VRi+ w?L: Ve, + o?L, avec un décalage 4 tel que Lo tang 9 = w R L’intensité à chaque instant à sera, en appelant Lo l'inten- sité maxima dans le circuit induit : % — Jo.2 cos (w/{ — +). l'intérieur d’un tambour formant un vide cylin- drique dans lequel est placé l'induit. Entre les Appelons H;, l'intensité du champ magnétique tournant produit par les inducteurs, intensité constante par principe et par définition. Le couple moteur W4 exercé à chaque ins- tant par le champ sur le cireuit induit aura évidemment pour valeur à l'instant 6 : Wi= H,l, coswr — H,lo2cosw é cos (wr — +). Dans le moteur de M. Leblanc les deux systèmes de bobines induites peuvent être assimilés à deux bobines induites déca- lées June par rapport à l’autre de zde période, de sorte que l’on peut écrire directement, pour ce second circuit, la valeur du couple moteur W=— H, BL sin w {= H, Jo.2 sin w / sin (w { — +) et pour le couple total sur les deux bobines W W = W: + W, = H, lo2 [cos w £cos (w { — &) + + sin wf sin (ol —9| d'où W = H; lo cos». Le couple moteur est donc constant, quelle que soit la posi- tion relative des deux bobines et du champ magnétique induc- teur à chaque instant. La puissance d’un moteur étant le produit du couple moteur pour sa vitesse angulaire, on a finalement, pour valeur de la puissance P : P= No W= N: H; los cosy avec les conditions : ow Lo ca [= — PN ER … : z : 3 : TVR +uwl4 VW R?+ u!L? Pour avoir un décalage extrèmement petit, il faut faire tang © très petit, et par suite R; très grand ce qui réduit le couple moteur W ainsi que l'intensité du courant induit L. En faisant 9 très voisin de ci il faudrait avoir R, très petit 2 pour satisfaire à la condition w Le R, mais le facteur cos® devient nul ainsi que le couple moteur. Ce couple moteur est maximum pour tango = 1 correspon- dant à un décalage de £ de période, ce qui a lieu lorsque R5— ol. La résistance du circuit induit rendant le couple moteur maximum est done une fonction linéaire de la vitesse angu- laire relative w. Lorsque le moteur est arrêté, il faut faire Ro trés grand et le diminuer à mesure que la vitesse angulaire augmente pour satisfaire à chaque instant à la condition Ro = w Lo on à alors, si cette condition est satisfaite : 1 cos P———>: v2 On aurait donc au démarrage un couple moteur plus faible qu'à marche normale si l'on ne faisait pas varier Ro. C’est pour pouvoir faire varier R, dans chacun des circuits induits que ces circuits aboutissent à des collecteurs et à des balais entre lesquels sont intercalés des rhéostats, qui permettent d'ailleurs de régler la vitesse angulaire. Rendement électrique. — En négligeant la puissance perdne dans les inducteurs, perte que l’on peut rendre aussi faible qu’on le veut en employant un fil assez gros, il est facile d’éta- blir, en s'appuyant sur les formules précédentes, que le ren- dement électrique n a pour valeur Zn ET Il ne dépend donc que du rapport des vitesses angulaires et il devient égal à 4 lorsque N, = N,, mais alors la puis- sance produite est nulle parce qu’il ne passe aucun courant dans le circuit induit. En pratique on obtient des rendements élevés parce que les tang o = ñ 542 E. HOSPITALIER. — LES MOTEURS A COURANTS ALTERNATIFS épanouissements polaires sont placées 16 bobines. Ces 16 bobines forment deux groupes distincts : si on les numérote successivement : 1, 2, 3,... 14,15, 16, les bobines de rangimpair forment le circuit À, les bobines de rang pair le circuit B. Les 8 bobines du cireuit A sont couplées entreelles par quatre en tension et forment deux circuits montés directe- ment en dérivation sur les fils venant de la généra- trice. Les 8 bobines formant le cireuit B sont cou- plées en tension etdisposéeségalement en dérivation sur la génératrice, en y intercalant un condensa- teur de capacité convenable. Dans ces conditions, les dérivations formées par les deux circuits À et B sont traversées par des courants périodiques pré- sentant entre eux un décalage de un quart de période, et satisfaisant ainsi aux conditions néces- saires à la production d’un champ magnétique tournant, bien que la génératrice ne fournisse qu'un courant unique. Il va sans dire que dans la machine à champ tournant produit par 16 bobines, la rotation com- plète du champ ne se fait, en réalité, qu'à raison de un quart de tour par période, et qu'il faut quatre périodes pour correspondre à un tour com- plet. La machine de M. Leblanc est donc une ma- chine à seize pôles. Le circuit mobile est constitué par deux enrou- lements polygonaux entrecroisés, renfermant huit bobines chacun. Les spires de ces bobines sont logées dans seize entailles ménagées dans un tambour eylindrique composé de feuilles de tôle découpées et superposées. Les seize bobines in- duites forment deux circuits distincts renfermant chacun huit bobines montées en tension. Leurs extrémités aboutissent à trois bagues collectrices, l'une des bagues étant commune aux deux cir- cuits. Sur ces bagues frottent trois balais; ces balais sont reliés à deux rhérostats manœu- vrés à la main, qui permettent d'introduire dans chaque circuit induit une résistance variable. Pour le démarrage, il y a intérêt à rendre cette résis- tance grande afin d'augmenter le couple moteur. Lorsque la vitesse augmente, on diminue graduel- lement les résistances introduites dans chacun des cireuits induits, jusqu'au moment où la résistance dans le rhéostat devient nulle, les induits se trouvant ainsi en court-circuit. Le moteur tourne alors à sa vitesse normale maxima, La machine avait été calculée pour produire vitesses angulaires N, et N, du champ tournant etdes induits ne diffèrent que de quelques centièmes. Il en résulte comme conséquence que la résistance Ro = wl doit être très petite. La formule relative à la puissance produite démontre, d'autre part que la vitesse angulaire No doit ètre très grande pour que le moteur ait une grande puissance spécifique. Les mo- teurs à courants alternatifs à champ tournant et à induit fermé doivent donc fonctionner avec des fréquences très élevées. 15 000 watts avec une fréquence de 120 périodes par seconde, mais la machine génératrice dont on disposait n’a pas permis de dépasser une fréquence de 83 périodes par seconde, et une puissance utile de 8000 watts, le rendement électrique correspon- dant étant de 89 pour 100. Le rendement industriel correspondant n'a pu être déterminé à défaut de wattmètre, ou de tout autre instrument permet- tant de déterminer avec quelque précision la puis- sance fournie. Les travaux de M. Maurice Leblanc ont mis en lumière le fait que l’on peut utiliser pratiquement et industriellement les condensateurs à la suppres- sion des effets nuisibles de la self-induction, et montré comment il fallait construire ces conden- sateurs pour qu'ils puissent résister efficacement aux tensions élevées auxquelles ils sont soumis. Cet emploi des condensateurs sera d’ailleurs d’au- tant plus avantageux et économique que l'on fera usage de courants de plus grande fréquence, et il justifie une fois de plus les tendances actuelles des inventeurs et des constructeurs vers les courants de grande fréquence. Sans chercher à atteindre, comme M. le professeur Elihu Thomson et M. Tesla, des fréquences de 5000 et même de 10 000 périodes par seconde, il semble que l’on pourrait aller plus loin qu'on ne le fait, et dépasser le chiffre de 133 actuellement le plus élevé employé seulement par Weslinghouse en Amérique. Un système à courants alternatifs dans lequel on fait un emploi combiné de condensateurs et de bo- bines présentant de la self-induction, possède une énergie potentielle beaucoup moins grande qu'un circuit ordinaire : il en résulte que les ruptures accidentelles du cireuit sont beaucoup moins dan- gereuses au point de vue de la conservation des appareils et à celui des actions physiologiques, et que l’on peut ainsi atteindre sans danger des tensions beaucoup plus élevées. b. Alternateurs à phases multiples ou à courants po- lyphasés *. — Les solutions indiquées précédem- ment conviennent à la distribution de la force mo- trice et à l'alimentation des moteurs de puissance moyenne ou de faible puissance. Pour les trans- ports de grandes puissances, on préfère avoir re- cours à des générateurs spéciaux, produisant non plus un courant alternatif ordinaire, mais plusieurs courants alternatifs décalés d’une fraction de pé- riode convenable, c’est-à-dire des courants alter- natifs polyphasés. \ Ces courants sont généralement désignés sous le nom de courants towrnants où de courants à phases multiples. La pre- mière expression est impropre, car les courants ne sont pas tournants; la seconde est hybride et longue. Celle que nous proposons, cowrants polyphasés, nous semble correcte et suffi- samment abrégée pour les besoins de la pratique. D' H. HARTMANN. — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE 543 On peut employer, comme solution la plus sim- ple, deux courants amenés par quatre fils, ou trois fils seulement, en se servant d’un fil de retour com- mun. Des dispositions de ce genre ont élé préco- nisées par MM. Ferraris et Tesla. Etant donnée l'obligation d’avoir recours à trois fils, on préfère les utiliser à la production de trois courants d’é- gale période, mais décalés l’un par rapport à l’au- tre d'un tiers de période, en profilant de cette ob- servation que, pour trois courants ainsi décalés, la somme algébrique des intensités à chaque ins- tant est toujours nulle, chacun des fils servant de retour aux courants traversant les deux autres circuits au même instant. Tel est le principe des moteurs à courants polyphasés réalisés depuis moins de deux ans par MM. Dolivo-Dobrowolsky, Haselwander, Bradley et Wenstrom. Un transport d'une force motrice de 300 chevaux fondé sur des courants de ce genre et actuellement en cours d'installation entre Lauffen et Francfort-sur-le- Mein, sur une distance de 175 kilomètres, sera ef- fectué à l’aide de courants à trois phases engen- drés à basse tension, transformés à haute tension (20 000 à 30 000 volts) par des transformateurs isolés au pétrole spécialement combinés et cons- truits dans ce but par M. Brown. A l’arrivée, ces courants seront transformés de nouveau en cou- rants de basse tension par un transformateur ana- logue au premier, et finalement envoyés dans un moteur à champ tournant et à courants tripha- sés. L'intérêt tout particulier de ces expériences, dont on attend les résultats avec impatience et cu- riosité, réside dans le point, à fixer définitivement, que les courants alternatifs se prêtent mieux que les courants continus à la production, à la trans- formation et au transport à grande distance des puissances électriques représentées par de hauts potentiels et de faibles intensités. Les moteurs à champ tournant étant, d'autre part, des appareils à circuits métalliquement fermés, ne peuvent par suite donner naissance à aucune étincelle d’extra- courant ni à aucune rupture dangereuse, la seule interruption nécessaire étant celle du commuta- teur de mise en marche ou d'arrêt, en un point spécial où toutes les précautions peuvent être prises pour faire disparaître tout danger. Les courants alternatifs polyphasés semblent donc ouvrir une voie nouvelle à la distribution de l'énergie électrique et à ses applications indus- trielles. Un certain nombre de ces applications sont actuellement montrées pour la première fois à l'Exposition d'électricité de Franefort-sur-le- Mein. Nous leur consacrerons une étude spéciale au retour de la visite que nous nous proposons de faire à cette exposition en septembre prochain. Cette revue rapide des procédés actuellement employés ou étudiés pour la transformation com- mode et économique de l'énergie électrique des courants alternatifs en travail mécanique nous montre que l’on peut considérer dès à présent le problème comme résolu. Il en sera sans doute de même à bref délai de l’utilisation des courants al- ternatifs aux opérations électrochimiques dans lesquelles intervient l’éleetrolvse, et à l’'emmagasi- nement de l'énergie électrique : les courants alter- natifs prendront alors une importance industrielle plus considérable que les courants continus, et nous assisterons bientôt à une nouvelle évolution des procédés électriques, en attendant celle que nous réservent, pour plus tard, les courants alter- natifs de très grande fréquence. E. HOSPITALIER, Professeur à l'Ecole de Physique et de Chimie industrielles de Paris. REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE L'an dernier, écrivant dans ce journal notre première Revue, nous avons cherché à donner une idée de la transformation complète de la chirurgie à la suite de trois grandes découvertes de la se- conde moitié de ce siècle, l'anesthésie qui sup- prime la douleur, la forcipressure qui rend maitre des hémorrhagies et l’antisepsie qui met à l'abri des agents infectieux. Nous pouvons aujourd’hui faire un pas en avant, L'année qui vient de s’écouler n’a nullement dé- menti les promesses de la chirurgie nouvelle. Bien au contraire. Aussi le nombre des réactionnaires diminue-{-il chaque jour. Il suffit pour s’en con- vaincre de lire les comptes-rendus de notre Société de chirurgie, dont les délibérations donnent l’idée exacte de l’état de la science dans notre pays. L’allure des discussions y a complètement changé depuis quelques années ; on n’y voit plus guère ces joutes oraloires où chacun cherchait dans des sou- venirs lointains l'évocation de faits antérieurs de sa pratique. Des observations précises, des statis- tiques complètes semblent actuellement le point principal. L'esprit scientifique s’est modifié; l’ex- posé brutal d’un procédé opératoire, suivi du relevé complet d'une série de cas, a beaucoup plus d'im- portance à nos yeux que de longs raisonnements. Chacun sent que le nombre des faits est insuffi- sant pour fournir une base sérieuse aux appré- D44 D° H. HARTMANN, — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE ciations et l’on demande, avant de raisonner sur la facon de construire l'édifice, à savoir de quels matériaux on pourra disposer. La nécessité de faits précis est tellement im- portante que, sans eux, il est impossible de tran- cher une question; nous n’en voulons pour preuve que l'interminable discussion du #raitementdes plaies pénétrantes de l'abdomen, qui reparait chaque année sur le {tapis et qui n’est pas encore résolue. Certes, les perfectionnements successifs apportés à la technique de la laparotomie ont amené à l'inter- vention immédiate un nombre de chirurgiens de plus en plus grand. M. Terrier, en particulier, a lutté avec conviction pour soutenir l'opinion qui veut : 1° qu'on explore les plaies de l'abdomen : 2° qu'on ouvre immédiatement le ventre dès qu’on a cons- taté que la plaie est pénétrante. Mais en face de lui, en face de Pozzi, de Quénu, de Routier, de Ja- laguier, de A. Broca, se maintient un camp irré- ductible personnifié dans M. Reclus, l’ardent et ha- bile défenseur de la thèse adverse. Bien qu'en principe nous soyons porté à préco- niser la laparotomie immédiate, nous comprenons très bien que quelques-uns hésitent, et si la statis- tique démontre un jour que l'abstention donne de meilleurs résultats, nous n’hésiterons pas à nous \ rallier. C'est là un des exemples les plus remar- quables de la nécessité de relevés statistiques précis; par là nous entendons de statistiques éma- nant d'une source unique et non pas de ces relevés faits en rassemblant des faits recueillis çà et là, venant de sources variables, d'opérateurs ayant une valeur inégale et suivant des errements diffé- rents. En tous cas, en pareille question, l’éclec- tisme ne nous paraît pas de miset, Cette année,comme l'an dernier, nous avons sur- tout à rendre compte d'opéralions nouvelles, le nombre des interventions s’accroissant de jour en jour avecleur bénignité. C’est toujours la thérapeu- tique chirurgicale qui fournit le principal aliment aux discussions des diverses Sociétés et, comme de Juste, la chirurgie des viscères. laissée dans l’ombre jusqu'à l'introduction des méthodes antiseptiques, offrant par suite un champ nouveau aux opéra- teurs de notre époque, est celle qui occupe la place la plus grande. Nous aurons donc surtout à parler, ! Nous n'en voulons pour preuve qu’un des faits relatés par M. Terrier à la Société de Chirurgie: Un malade entre à l'hôpital Bichat, porteur d’une plaie pénétrante de l’abdo- men; l'interne l’explore avec le doigt, ne ramène pas de ma- tières intestinales et ne conclut dès lors pas à la laparo- tomie. — Le malade meurt. On aurait dû ouvrir le ventre, dit M. Terrier, ici comme dans tous les cas. — Non, répond M. Reclus, le malade est mort parce qu’on a décollé, par l'exploration, des adhérences en voie de formation. — Con- clusion : Ilne faut pas explorer les plaies de l'abdomen; ou, si on les explore, il faut, en cas de pénétration, faire la la- parotomie immédiate. Il n’y a pas de milieu. dans cette Revue, d'opérations et de résultats im- médials. Sur quelques points cependant il nous sera déjà possible de parler de résultats éloignés. C'est ainsi qu'à propos des opérations sur les or- ganes génitaux internes de la femme, une impor- tante discussion du dernier Congrès français de Chirurgie nous permettra d'établir leurs consé- quences lointaines. J. — CENTRES NERVEUX. La question de l'intervention chirurgicale dans les affections non traumatiques des centres encé- phaliques, a fait l’objet de nombreux travaux, tant dans les divers recueils périodiques, qu'aux con- grès de Berlin et de Paris où elle a été discutée. Laissant de côté la crâniectomie, magistralement exposée dans cette Revue par le P' O0. Lanne- longue , nous ne nous occuperons que des trépa- nations destinées à permettre l'ablation de tu- meurs, ou la cure d'accidents épileptiques. Conçue par P. Broca, la trépanation pour les troubles cérébraux à été pratiquée et préconisée par J. Lucas-Championnière, en France ; par Mac Even et Horsley, en Angleterre; par Keen en Amé- rique. Elle est aujourd'hui admise par tous. Horsley, Péan, E. Doyen, etc., enlèvent avec succès des tumeurs du cerveau. Ces interventions sont d'autant plus justifiées que, même dans les cas où l’ablation du néoplasme est impralicable, on ob- serve Souvent, après la trépanation, la disparition de certains accidents, tels que la céphalalgie ou des phénomènes de névrite optique. Jeannel, Rey- nier, Verchère, Terrier, Championnière, ete., com- muniquent, soit au Congrès francais de Chirur- gie, soit à la Société de Chirurgie, des faits de trépanation pour épilepsie jacksonnienne. Girard pratique cette opération dans un cas d'épilepsie essentielle et guérit un malade : Keen, Thiriar, À. Broca drainent des hydrocéphalies et, faisant ainsi cesser par l'évacuation du liquide la compres- sion excentrique du cerveau, voient disparaitre la contracture qu'elle déterminait. Aussi, en présence de ces succès multiples, voit-on Lucas-Champion- nière et Michaux faire avec avantage la (répana- tion pour des hémorrhagies méningées. Dans tous ces cas, la décompression cérébrale parail jouer un grand rôle et contribuer. pour une bonne part, à l'amélioration dans l'état des ma- lades. De là l'indication de faire des trépanalions larges, de véritables cräniectomies et la nécessité de ne pas pratiquer de réimplantations osseuses, une reproduction de l’os remettant les choses en l'état et par conséquent pouvant amener le réta- 1 Voir Revue générale des Sciences du 13 juillet 1890, t. I, p. 393. D° H. HARTMANN. — REVU 545 E ANNUELLE DE CHIRURGIE blissement de la compression pathologique anté- rieure. La même raison fait qu'on ne doit pas tirer de conclusions trop prématurées des suites immé- diates de l'intervention. Les phénomènes convul- sifs reviennent quelquefois, même après d'assez longues périodes d’accalmie. La réimplantalion osseuse est d'autant moins nécessaire que, lorsque la réparation est faite sans suppuration après la trépanation, la paroi protectrice, constituée par le péricräne fusionné avec la dure-mère, est, comme le fait remarquer M. Championnière, absolument suffisante, et que jamais on n'a besoin d'appareils protecteurs, alors même que l'on a ouvertde larges baies cräniennes. Un fait cependant doit être noté au passif du trépan, c’est que chez les malades porteurs d’une grosse lésion cérébrale, la trépana- tion peut devenir une opéralion grave, d'autant plus que l’hémorrhagie, toujours considérable, peut amener la mort, surtout s’il existait anté- rieurement un certain degré d’affaiblissement (J. L.-Championnière). En même temps qu’elle s’est attaquée aux lé- sions encéphaliques, la chirurgie, dans ces der- nières années, à entrepris de guérir certains acci- dents médullaires, liés à la compression de laxe nerveux par des lésions circonvoisines. La #répana- tion rachidienne, à peu près délaissée en France, depuis Chédevergne, parait avoir acquis, grâce à l’antisepsie, un regain d'actualité, au moins à l'E- tranger. Une série de travaux, que M. A. Chipault à publiés pendant l’année qui vient de s’écouler, con- tribucra certainement à la vulgariser. Dans les fractures, les faits semblent établir que la trépanalion est formellement indiquée lors de symptômes médullaires dus à la compression de la moelle par des fragments postérieurs, lors de com- pression de la queue de cheval. Elle semble utile lorsque la moelle estcomprimée entre le corps et un arc postérieur, lorsqu'il y a compression mé- dullaire par un hématorachis. Elle est inutile lors- que, la moelle ayant été contuse, les fragments déplacés au moment du traumatisme ont repris leur place normale. Dans les compressions médullaires par tumeur ou par mal de Pott la trépanation rachidienne est de même indiquée. Elle permet, non seulement d'agir sur des lésions de l'arc postérieur, mais encore d'agir sur des lésions ostéo-méningées anté- médullaires après réclinaison de l'axe nerveux. Les vices de conformation de l’encéphaleet dela moelle ont élé cette année l’objet de travaux inté- ressan{(s. M. P. Berger a étudié une variété partieu- lière d’exencéphale crânien, l'encéphalome, comme il dit, véritable néoplasie, car la masse herniée ne présente ni la structure du cerveau ni celle du cervelet, mais participe à la structure de l'un et de l’autre de ces organes. Ces particularités de structure, jointes à la sécurité opératoire que don- nent les traitements antiseptiques,conduit à rejeter l'opinion classique qui voulait que les opérations sanglantes fussent proscrites sans discussion. Les succès obtenus par Périer, P. Berger, Picqué en excisant des encéphalocèles, montrent du reste la nécessilé de réagir contre les anciens errements. Ilen est de même des spina bifida, que l’on ne craint plus d'opérer. Après incision du sac on ré- duit les éléments nerveux, on suture le pédicule et l’on excise au-delà de la suture. II. — CHIRURGIE DU THORAX. La résection du sommet du poumon a été cette année pratiquée pour un noyau tuberculeux par M. Tuf- fier, qui a indiqué pour la faire un procédé simple et pratique. Malheureusement c’est là une opéra- tion de peu d'avenir, l'indication ne paraissant guère devoir s’en présenter. MM. Roux (de Lau- sanne), Poirier et Jonesco ont depuis lors indiqué de nouveaux procédés, ayant pour but de per- mettre l’incision de cavernes pulmonaires. Nous- même, avec M. Quénu, avons publié un mémoire sur les voies d'accès dans le médiastin postérieur. La constatation d’un diverticule rétro-æsophagien de la plèvre droite nous a conduits à fixer le côté gauche comme siège de J'incision malgré la pré- sence de l'aorte, qui ne gêne du reste nullement les manœuvres. IT. — CHIRURGIE DE L'ABDOMEN. Nous avons déjà vu au début de cette Revue l’état actuel de la question du traitement des plaies pénétrantes et nous n'avons rien à y ajouter. Deux communications du dernier Congrès fran- çais de Chirurgie, une de P. Reynier, une autre de Jullien montrent les avantages de la réouverture du ventre, dans les péritonites post-opéraloires. Cette réouverture, suivie du lavage et du drainage de l'abdomen, a permis à chacun de ces chirurgiens de sauver une de leurs opérées et de montrer, une fois de plus, que, dans les cas graves, la hardiesse est de mise. Une question, qui, depuis un an, a fait des progrès très grands parmi nous, est celle des appendicites el des abcès de la fosse iliaque. Née en Amérique, importée en Allemagne et en Angleterre tout d’abord, l'appendicite n’est que tardivement parvenue aux chirurgiens français. Mais, dans ces quinze derniers mois, elle a suscité tant de travaux, elle a fait l’objet de tant de communications dans les diverses Sociétés savantes, que, née d'hier, elle a déjà détrôné la typhlite et la pérityphlite. 546 D' H. HARTMANN. — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE Il était classique d'admettre que l'engouement stercoral amenait la typhlite, que celle-ci pouvait à sou tour aboutir soit à la résolution, soit à la perfo- ration de l'intestin; et, suivant que celle-cise faisait dans le péritoine ou dans le tissu cellulaire de la fosse iliaque, on avait une péritonite ou un abcès iliaque. Les recherches anatomiques de ces der- nières années, montrant un Cæcum entouré partout de séreuse, firent contester la possibilité d’une perforation dans le tissu cellulaire, en l'absence d’adhérences préalables. Presqu'en même temps les chirurgiens américains, Fitz, Weir, Bull, Smith, etc., intervenant d’une manière précoce, constatèrent d’une part l'intégrité du cœcum, de l’autre la lésion de l'appendice. A dater de cette époque fut créée l’appendicite. Une thèse conscien- cieuse, publiée l’an dernier par M. Maurin et ras- semblant tous les faits publiés, fut, avec un travail de Roux, le point de départ des recherches fran- çaises. Presque aussitôt M. Reclus, par une série de communications et de mémoires intéressants, forca ses confrères à porter teur attention sur | cette question, et établit les points principaux de l'histoire des appendicites. Sans aller, comme certains chirurgiens américains, jusqu'à proposer l’ablation préventive de tous les appendices (!), nous croyons qu'actuellement en France l'inter- vention précoce est généralement acseptée. Il faut toutefois distinguer entre les cas et ne pas inciser à la première apparition d’une douleur dans la fosse iliaque. Mais dès que la persistance de la fièvre, jointe à la douleur et à une diminution locale de la sonorité, avec quelques sympiômes péritonéaux, permet de soupçonner la perforation de l’appendice, on peut prendre le bistouri. Avec Roux et Reclus nous dirons qu'on n'intervient jamais trop {ôt; dans un cas nous avons trouvé dun pus quarante-huit heures après le début des acci- dents. L'incision courbe doit avoir son sommel à un doigt en dedans de l’épine iliaque antéro-supé- rieure et se porter immédiatement vers la fosse iliaque, le pus se trouvant presque toujours en bas eten dehors äu cœcum, ce qui s'explique par ce fait que cœcum et appendice sont situés au-dessous et à droite d'une part de l'insertion du mésocolon ascendant, d'autre part de celle du mésentère. La simple incision du foyer permet souvent de guérir le malade et l’on ne doit pas s’acharner à chercher l'appendice. Ce serait s’exposer à détruire les adhérences protectrices qui limitent la cavité de l’abcès. L'important est d'assurer un libre écoule- ment au pus et d'ouvrir largement le foyer, pro- longeant l'incision en haut et en dehors ou en bas et en dedans, suivant que l’abcès fuse vers la fosse lombaire ou vers la région pubienne. A la phase de péritonite généralisée seulement convient la laparotomie médiane, avec ou sans contre-ouverture latérale, excision de l’appendice et lavage péritonéal (Ricard). Lorsque l’appendicite est à rechute, lorsqu'elle laisse un placard douloureux de périlonite chro- nique à sa suile, subissant de temps à autre des poussées, on est autorisé à intervenir dans l’inter- valle des crises et à réséquer l'appendice. Cette intervention, tout en ne présentant pasla bénignité extrême que lui accordent les chirurgiens amé- ricains,Senn en particulier, est cependant indiquée, car elle a pour but d'éviter la perforation intes- tinale et ses suites. Avant d'en terminer avec les maladies de la région cœcale, nous dirons qu'avec M. Pilliet nous avons récemment établi l'existence d’une {yphlite tuberculeuse à forme lymphoïde simulant absolument les cancers de la région. Les maladies du foie continuent, comme l'an dernier, à être le sujet d'interventions multiples. MM. Périer, Le Dentu, Chaput, Berger, Picqué, Terrier publient de nouvelles observations de cho- lécystotomie. MM. Périer, Terrier, etc. font avec succès la cholécystectomie. Aussi tout ce qui touche à la lithiase biliaire devient-il sujet d'actualité. A ce titre nous mentionnerons la thèse de M. Ernest Dupré sur les infections biliaires, les diverses com- munications de Gilbert et Girode à la Société de Biologie sur les microbes de la bile, enfin nos travaux sur les déformations des vésicules calcu- leuses, l'anatomie normale et le cathétérisme des voies bilaires. Marchant sur un terrain mieux connu, celui des kystes du foie, M. Michaux, en insistant sur les particularités des kystes centraux et des kystes totaux, nous a montré que tout n’était pas encore dit sur la question. Un foie mobile a fourni à M. Gérard Marchand l'occasion de faire une hépatopexie. Signalons enfin, pour en terminer avec les ma- ladies du foie, une série de mémoires de Bertrand, de Defontaine, ete. sur les abcès du foie, qui tous aboutissent à l'indication de l'incision large en un temps. La non infection du péritoine à la suite de l'ouverture de ces abcès, en l’absence de toute adhérence, pourrait peut-être s'expliquer, comme le fait remarquer M. Peyrot, par la stérilité du pus qu'ils contiennent. Les recherches de Kartulis, de Laveran, de Netter, de Veillon ont aujourd’hui bien établi que le pus des abcès du foie consécutifs à la dysenterie ne contenait pas de miero-organisme, décelables par des méthodes bactériologiques usuelles et qu'en particulier les microbes habituels de la suppuration v font com- complètement défaut. L'étude d'un kyste du pancréas, que nous avons D' H. HARTMANN. — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE 547 abordé par la laparatomie, nous a permis d'établir que l’on avait tort de regarder ces kystes comme des kystes par rétention. Reprenant les diverses observations publiées, nous n'avons pas eu de peine à démontrer qu'il s'agissait d’épithéliomas _kystiques, d’une malignité variable, susceptibles de se génénaliser au foie dans certains cas. Nous fondant sur ce que toute sonde laissée à demeure dilate l’orifice où elle se trouve, nous avons dans la gastrostomie rejeté l'emploi des obtu- raleurs, de quelque nature qu'ils fussent et avons ainsi évité les écoulements de suc gastrique si pénibles pour les malades opérés; aussi notre pra- tique a-t-elle été adoptée par notre maître M. F. Terrier, dans le service duquel nous avions fait ces essais. M. Chaput, continuant ses travaux sur la Chi- rurgie de l'intestin, à décrit cette année un nouveau procédé d'enléro-anastomose. Il amène dans la plaie abdominale les deux anses à anastomoser el commence par les suturer latéralement l’une à l’autre sur une hauteur de à à6 centimètres. Après les avoir fixées dans la plaie, il fait sur chaque anse uneincision de 1 centimètre. Dans un second {temps il place une pince pour faire une brèche sur l'éperon. Enfin dans un troisième il ferme les orifices intes- tinaux s’ouvrant à l'extérieur. Ce procédé, qui a l'inconvénient d'être long, d'exiger plusieurs séances successives et qui, pas plus que les autres procédés, ne met à l'abri de l’oblitération, aurait l'immense avantage d'être d'une innocuité et d’une sécurité à peu près absolue, IV. — CHIRURGIE DU RECTUM. Les indications de l’extirpation du cancer du rectum semblent s'être actuellement dégagées des nombreuses observations publiées. Après avoir ap- pliqué largement, trop largement dirons-nous, /4 méthode de Kraske, les chirurgiens ont limité leurs interventions par la voie sacrée aux cancers à siège élevé, épargnant la région sphinetérienne, bien circonscrits et franchement opérables, les opérations de cancers volumineux et adhérents étant suivis de mort, de récidives rapides ou de fistules stercorales. Encore faut-il, même pour ces cancers circonscrits, n'opérer, comme l’a précisé F. Terrier, que s'il n’y a pas complication de phénomènes aigus d’obstruction intestinale. L’ablalion du rectum non cancéreux commence à être préconisée pour diverses affections. MM. Ri- chelot et Quénu se louent d'y avoir eu recours dans des cas de rétrécissements syphilitiques ; M. F. Terrier, s’en est très bien trouvé chez un malade, que des opérations multiples n'étaient pas arrivées à débarrasser des accidents déterminés par un ré- trécissement congénital. La dilatation, d'ordinaire douloureuse, pas toujours innocente, est le plus souvent inefficace. La rectotomie, malgré l’amélio- ration que Péan lui a fait subir !, est le plus sou- vent suivie d’une récidive. Aussi comprend-on que l’on ait été amené à traiter ces divers rétrécisse- ments récidivants par l'ablation pure et simple, qui n'est malheureusement pas toujours possible, les lésions de la muqueuse, dans les rétrécisse- ments syphilitiques en particulier, étant souvent très étendues, pouvant même remonter jusqu'à 23 centimètres au-dessus de l’anus, comme le fait existait chez une malade de M. P. Berger. NV. — GYNÉCOLOGIE. Comme les années précédentes, la gynécologie a tenu une large place dans les travaux publiés et dans les communications des Sociétés savantes. Si certaines opérations très vantées, il n'y a encore que peu de temps, telles que l'opération d’ Alexander, sont tombées dans un discrédit à peu près général, d’autres ont vu le jour. On a en particulier mené grand bruit autour du #raitement des suppurations pelviennes. Tandis que Laroyenne à Lyon et Bouilly à Paris cherchaient à limiter la gravité de leurs interventions et, lors de collections amenables au contact du doigt vaginal, se contentaient, le col étant fixé et abaissé, de faire l’incision de la poche, d’autres étendaient de plus en plus leur champ opératoire. C'est ainsi que Péan et Segond sont arrivés insensiblement pour de pelits ovaires kys- tiques à faire l’ablation totale de l’utérus et des annexes. Celte pratique, rapidement vulgarisée en France, ne semble pas avoir eu le même succès auprès des gynécologistes étrangers. Elle est même sévèrement jugée par les chirurgiens américains, par H. Coe en particulier qui voit, dans ces inter- ventions brutales, un reculde la chirurgie française, Chez nous du reste, même pendant l’entrainement des premiers jours, la méthode a, dès l’abord, ren- contré des adversaires sérieux, dont un surtout, M. Pozzi, s’est résolument jeté en travers. Trois arguments ont été invoqués en faveur du traitement des affections inflammatoires péri-uté- rines par l’hystérectomie vaginale : 4° L'absence de cicatrice; 2° la gravilé moindre: 3° l'efficacité supérieure. Dans la réalité, si l’on compare les statistiques des deux adversaires en présence, on voit M. Se- gond venir avec 4 morts pour 23 cas, alors que M. Pozzi n’a que 4 morts sur 76 opérations consé- cutives par la laparotomie. Si, dans la suite, les 1 Après section du rétrécissement en arrière, il abaisse l'angle supérieur (rectal) de la plaie losangique ainsi obtenue et le fixe à l’angle inférieur (cutané), 548 D' H. HARTMANN. — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE . mêmes proportions se maintiennent, la question sera tranchée d’une manière définitive et l’opéra- lion de l’hystéreetomie dans les affections péri- utérines, ira rejoindre dans l'oubli les nombreuses méthodes que nous avons vu s'éleindre, dans ces dernières années, après avoir brillé d’un vif éelat pendant un court espace de temps. L'absence de cicatrice n’est pas, en effet, un argument sérieux, et l'efficacité supérieure n’est pas encore démontrée. Le traitement des fibromes utérins a de même été l’objet de nombreux travaux. L'hystérectomie ab- dominale est toujours restée une opéralion grave. Si M. Richelot a publié une série relativement heureuse, où la mortalité ne s'élève qu'à 18 °/,, M. Terrier a eu 39 °/, de morts et M. Segond 45 °/. Aussi s’explique-t-on que l'on ait cherché à éten- dre au plus grand nombre des cas les traitements indirects, en particulier l'électricité, qu'un Français, M. Apostoli, a si largement fait accepter dans tous lespays de langue anglaise, sans arriver à la vulga- riser dans son pays. MM. Championnière et Danion ont largement expérimenté l’action des courants électriques, évitant l'introduction d’aiguilles dans les tumeurs et utilisant les renversements de cou- rants. Leurs résultats auraient été surtout excel- lents chez les malades ayant dépassé 35 ans. Tou- tefois on devrait, au dire de M. Richelot, s'abstenir de toute application électrique dès qu'il y a le moindre élat inflammatoire des annexes. Le traitement des fistules recto-vaginales, soulevé à la Société de Chirurgie par M. le Dentu, a fait l’ob- jet d’une longue série de communications devant cette Société. La section directe du périnée jusqu’à la fistule, suivie de l’excision de celle-ci et de la pé- rinéorrhaphie immédiate, constitue, comme l’a au- trefois bien établi M. Ch. Monod, un mode de trai- tement excellent pour les fistules basses, mais né- cessite des délabrements bien considérables lors- que la fistule est élevée. Aussi M. Le Dentu, pro- pose-t-il pour celle-ci un procédé anaplaslique à lambeaux qui lui a donné un beau succès. Une discussion du dernier Congrès français de Chirurgie a permis de préciser les résultats éloignés de l’ablation des annexes dans les affections non néo- plasiques de ces organes. Il semble actuellement établi par les travaux de L. Tait, de Jacobs, de Bouilly, de Terrillon, de L.-G.Richelot, de Routier, de Bazy. de Doyen, etc. que les résulats sont ex- cellents dans les salpingo-ovarites douloureuses. On signale toutefois quelques cas où ily a des pertes utérines, de la sensibilité abdominale, ex- ceptionnellement une pelvipéritonite récidivante. Avec notre maître M. F. Terrier nous avons cherché à poserles indications d’une opération, que l'on n'avait jusqu'ici pas pratiquée en France, de l'Aystérectomie par la voie sacrée, qui semble surtout convenir aux cancers volumineux avec sclérose du vagin et qui se pratique d'autant plus facilement qu'on a créé une brèche osseuse plus large. VI. — VOIES URINAIRES. La majeure partie des travaux publiés sur les maladies des voies urinaires, sort de la clinique de l'hôpital Necker. Grâce à la libéralité du professeur Guyon, se_trouve actuellement installé dans cet hôpital un service modèle avec musée, labora- toires, bibliothèque, etc. Aussi comprend-on que de nombreux travailleurs y soient attirés, sûrs qu'ils sont d'y trouver non seulement les conseils éclairés du maitre, mais encore l'installation maté- rielle qui manque malheureusement dans la plu- part des autres services, pour ne pas dire dans tous. Parmi les nombreux mémoires sorlis de cette clinique, nous mentionnerons l'excellente thèse de M. Legueu sur les calculs du rein, son mémoire sur l'anatomie chirurgicale du bassinet et sur l'exploration intérieure du rein, la thèse de M. Arnould sur l'hydronéphrose, le mémoire de MM. Melville, Wassermann et Noël Hallé sur l'anatomie pathologique des rétrécissements de l’urèthre, ceux de MM. E. Petit et M. Wassermann sur les micro-organismes de l’ürèthre de l’homme et sur l’antisepsie de l'urèthre, la communication de M. Albarran sur un cas de gangrène de la verge, les observations de M. Noguès sur l'arrêt des hémaluries graves par l'évacuation totale des caillots, celles de M. Chabrié sur lurobilinurio paroxystique « « frigore », sur la composition de l'urine chez les urinaires, enfin le travail de M. Janet sur le rôle de l’endoscopie à lumière externe dans les maladies de l’urèthre et de la vessie. De grands progrès ont élé réalisés dans ce service au point de vue de l’asepsie, si difficile à obtenir dans la chirurgie des voies urinaires. L'usage des divers antiseptiques donnés à l’inté- rieur ne l’ayant conduit à aucun résultat, M. Guyon a cherché à réaliser l’antisepsie directe. Il y est parvenu d’une facon presque absolue, pourrait-on dire, en utilisant dans une large mesure les solu- tions de nitrate d'argent au millième. Des lavages de la vessie, en injectant et retirant aussitôt la seringue afin que le liquide ressorte à peine entré, assurent un flux et un reflux qui nettoient parfai- tement la vessie, surtout sile chirurgien exerce en même temps sur l’hypogastre des pressions rapides et successives. Les seringues sont argentées et ont une monture soudée directement au verre sans mastie intermédiaire, suivant un procédé dù à M. Cailletet, ce qui leur permet d’être désinfectées parle nitrate d'argent. Celui-ci est du reste employé aa D' H. HARTMANN. — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE 949 pour tous les instruments que l’on ne peut porter à l’étuve sèche. Gräce à ces moyens, M. Guyon est arrivé à faire ses lithotrities sans la moindre élévation de température. Les résultats éloignés de la néphrorrhaphie ont été étudiés par M. Tuflier, qui sur 10 malades a eu un échec; 8 des 9 autres ont vu cesser leurs douleurs; 1 n’a été qu’amélioré; il présente tous les signes de l'entéroptose. VII. — CHIRURGIE DES MEMBRES. La chirurgie des membres, moins en faveur que la chirurgie abdominale, a cependant fait l’objet cette année d'une série de travaux inté- ressants. La tendance générale à intervenir parle bistouri s'accuse ici comme ailleurs. C’est ainsi qu'à propos d’une observation de M. P. Michaux, M. Lucas- Championnière a insisté sur les avantages que présenterait la suture osseuse dans le traitement des fractures de l'olécrâne, suture qui, au dire de M. Berger, n’est utile que dans les fractures voisines du bec, avec déchirure des tendons laté- raux du triceps et écartement des fragments, les fractures obliques de la base guérissant fort bien par 20 jours d'extension. La même question du traitement des fractures par la suture osseuse s’est représentée cette année à propos de la fracture de la rotule, qui offre tant d’analogies avec celle de l’olécräne. M. Lucas- Championnière, toujours carré dans ses opinions, a vanté d’une manière calégorique la suture qu'il pratique dans tous les cas. Sur 28 opérés, il a eu 28 résultats parfails. Celte constance dans les résultats, caractéristique de la chirurgie moderne, permet de rejeter tous les autres modes de traite- ment qui ne donnent de succès complets que dans un nombre limité de cas, et n'aboutissent que trop souventà ces genoux raides, à ces membres sans force que nous avons tous vbservés. Chez les malades dont l’âge ou l’état de santé contre-indi- quent l'intervention, on doit s'en tenir aux appa- reils ou au massage, seuls moyens applicables du reste dans bon nombre de circonstances. La réunion opératoire de fragments osseux de- vient du reste de jour en jour plus courante et, après la suture, nous devons parler de l’encheville- ment des os. Dans un cas de pseudarthrose du pé- roné, entrainant un élargissement de la mortaise tibio-tarsienne, M. Routier a cloué avec une che- ville d'os de veau la malléole externe au tibia, après avivement préalable de la pseudarthrose. Ces enchevillements osseux sont si simples que Poncet (de Lyon), pour amener au contact les deux bouts du tendon d'Achille écartés de 3 centimètres, n'a pas hésité à délacher, sous forme de tranche postérieure épaisse d’un centimètre, l'insertion cal- canéenne de ce tendon, de manière à la faire glis- ser verticalement. Il termina par la suture des deux bouts rapprochés du lendon et par la fixa- lion de la partie inférieure du fragment remonté à l’aide d’une cheville d'ivoire. Le résultat fut excel- lent. Les résections entrent aussi de plus en plus dans la pratique courante ; celle du genou en particulier se vulgarise grâce aux travaux des Bæœckel (de Strasbourg) et de Lucas-Championnière. Celui-ci fait encore la suture des os avec le fil d'argent, des parties fibreuses avec le catgut et laisse sur les parties latérales deux orifices pour des drains sous-cutanés. Ceux-là suppriment la suture osseuse qu'ils remplacent par la suspension verticale du membre pendant 24 ou 48 heures et la suture ser- rée de la peau; ils abandonnent le drainage et cherchent à obtenir la guérison sous un seul pan- sement. Tous ont supprimé la recherche longue et minutieuse des artères ; ils ne font pas de ligatures etse contentent pour arrêler le sang d'élever le membre. La réseclion ainsi pratiquée, suivant l’an- tisepsie la plus stricte, donne une colonne de soutien rigide et solide. Aussi cette résection compte-t-elle des partisans de plus en plus nombreux. Quelques chirurgiens ont toutefois tenté de lui substituer dans un certain nombre de cas l’arthrec- tomie, déjà proposée en 1888 par M. Delorme. Cette arthrectomie préconisée par M. L.-G. Richelot, est très différente du curage rapide de Volkmann. C'est une opération longue, minutieuse, qui con- siste à extirper loute l’articulation moins les os, sacrifiant les ménisques, les ligaments croisés, elc. Elle aurait pour avantage de nécessiter un traite. ment conséculif moins long et plus facile que la résection, de conserver au membre sa longueur et de donner un résultat fonctionnel plus parfait. Elle n'est malheureusement applicable qu'à un petil nombre de cas, la fréquence des lésions osseuses étant très grande dans les tumeurs blanches. La tendance générale à étendre le domaine des résections s’est encore accusée à propos des tuber- culoses larsiennes, et Gross (de Nancy) a fait plu- sieurs fois la résection totale du tarse chez les sujets jeunes, lorsque l’état des parties molles élait bon, réservant l’amputation aux vieillards et aux ma- lades affaiblis. Les luxations anciennes ont fait l’objet d'un très intéressant travail de M. Ch. Nélaton, à d’une observalion due à M. Ricard propos de luxation an- cienne de la hanche. les deux principales causes d’ir- réductibilité dans cette luxation sont : 1° L'inter- position de la capsule; 2° le raccourcissement des muscles péricotyloïdiens. M, Ricard, après avoir 590 mis à nu par une incision postérieure la tèle luxée, la résèque au ras du col, puis, utilisant la voie ouverte par cette résection de la tête, il dé- couvre la cavité cotyloïde et la voit oblitérée par la capsule qu'avait entrainée la tête dans son dépla- cement en arrière. 1l détache cette capsule à la ru- gine, la mobilise, creuse le cotyle et y replace le col qui constitue un centre de mouvement el s’op- pose à l'ascension de la tête dans la fosse iliaque. Cette résection limitée de la sphère cartilagineuse fémorale avec réintroduction du moignon cervical dans la cavité cotyloïde constituera évidemment, toutes les fois qu'elle sera possible, le procédé de choix. Elle conserve la portion antérieure, forte, de la capsule et n’expose pas à l’ascension de la tte vers la crête iliaque si fréquente après la ré- section. NIJI. — AUTOPLASTIE ET ORTHOPÉDIE. Les méthodes autoplastiques n’ont élé l'objet que d'un petit nombre de travaux. Nous devons tou- tefois citer les beaux résultats autoplastiques qu'a obtenus M. P. Berger par la méthode italienne et les nombreux travaux du professeur Tripier (de Lyon) sur le double plan de lambeaux, comme moyen de réparer certaines pertes de substance intéressant à la fois les parties molles et le sque- lette de la région sousorbitaire, sur les lambeaux museulo-cutanés en forme de pont, etc. Le danger de blesser une veine et le retour fréquent de la difformité font qu'un certain nombre de chirurgiens, parmi lesquels nous citerons Kir- misson,Quénu, Phocas, Piéchaud ont abandonnéla ténotomie sous-cutanée dans le traitement du torticolis et préfèrent la section à ciel ouvert que rejette cependant M. Jalaguier. Le redressement immédiat après la ténotomie semble aujourd’hui généralement accepté, qu'il s'agisse du torticolis ou du pied bot. IX. — PATHOLOGIE GÉNÉRALE. Les questions de pathologie chirurgicale géné- rale ont cette année fait l’objet de travaux nom- breux et importants. Nous ne parlerons pas ici de la /ymphe de Koch, que l’on a pendant quelques semaines préconisée contre les tuberculoses externes, une fois ses dan- gers dans la phlisie pulmonaire établis. Son in- fluence curatrice, bientôt contestée, fut définitive- ment niée. Nous ne nous arrélerons pas non plus sur la méthode sclérogène du professeur Lannelongue, ce maitre ayant exposé ici même, mieux que nous ne pourrions le faire, la technique et les résultats de sa méthode !. Mais nous insisterons un peu sur D' H. HARTMANN. — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE les travaux qu'il a poursuivis, avec son élève Achard, à propos des diverses formes de l’ostéo- myélite. Après avoir, il y a quelque temps, établi l'existence de l'ostéomyélite à streptocoques, M. Lannelongue montre aujourd'hui l’ostéomyélite à pneumocoques, troisième forme à ajouter à l'ostéomyélite vulgaire, déterminée, comme on le sait depuisles travaux de Pasteur, par le staphylo- coque. La gravilé de ces diverses variétés d’ostéo- myélile n’est pas égale. La clinique, d'accord avec les enseignements de la physiologie expérimentale, établit que les ostéomyélites à staphylocoques sont les plus graves, celles à streptocoques viennent ensuite ; enfin les ostéomyélites à pneumocoques sont les plus bénignes. La nature des coccidies, que l’on regardait, depuis les travaux de Malassez, comme parasitaire, est aujourd'hui contestée. MM. Le Dentu et Fabre- Domergue pensent que ces corps arrondis, colo- rables par l'aniline, pourvus d’une membrane d’enveloppe, d’un noyau arrondi, etc., ne sont que des cellules épithéliales modifiées et fixées à telle ou telle de leurs phases évolutives. Peut-être y a-t-il, comme le suggère M. Albarran, tantôt des transformations cellulaires simulant les coccidies, tantôt des psorospermies vraies? D'après MM. Gangolphe et Courmont, il faudrait, à côté des fièvres ordinaires, de nature infectieuse, faire une place à des fièvres asepliques, tout au moins amicrobiennes, comme dit le Professeur Verneuil, fièvres indépendantes de toute infection extérieure et dues à la résorption des produits solubles engendrés par les éléments cellulaires en voie de nécrobiose; ce fait estétabli par une expé- rience des plus intéressantes : A la suite du bis- tournage chez les béliers, la température s'élève ; cette élévation manque, lorsqu'on place à la racine du serotum un lien de caoutchouc qui empêche les produits solubles de pénétrer dans le système circulatoire. Lorsqu'au bout de trois jours on enlève le lien, brusquement, en quelques heures, la température monte de deux degrés. Nous signalerons, en terminant, les nombreuses observations communiquées au dernier Congrès français de Chirurgie sur les diverses espèces bac- tériologiques de suppuration par MM. Reclus, Doyen, G. Marchand, etc., et enfin les communi- cations intéressantes du Professeur Verneuil sur les métastases de l’anthrax, sur la pyogénèse el sur son traitement. D'. Henri Hartmann Prosecteur à la Faculté de Paris. 1 Voir Revue générale des Sciences du 15 juillet 1891, t. LE, p. 433. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX x © Ds BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. KRésal (H.,, Membre de l'Institut, professeur à l'Ecole polytechnique. — Exposition de la théorie des Sur- faces, { vol, in-18 (4 fr. 50), Gauthier- Villars, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1891. Résumer en un seul volume de dimensions très res- treintes les points fondamentaux de la théorie des sur- faces semblait une tâche impossible à remplir. M. Ré- sal y est cependant parvenu, puisque son livre a moins de 200 pages. À Il a fallu pour cela suivre partout la voie la plus di- recte, au risque de sacrifier le plus souvent l’élégance. Les coordonnées curvilignes elles-mêmes ne figurent pas dans toute la première partie du livre, c’est-à-dire dans tout ce qui est relatif aux lignes de courbure et aux lignes asymptoliques. Ces deux théories sont d’ailleurs très complètement traitées. L'auteur part tout à fait des premiers prin- cipes, puisqu'il ne suppose même pas connu le théo- rème de Meusnier. Le chapitre consacré aux lignes de courbure renferme cependant, non seulement le théo- rème de Dupin, mais la détermination complète des surfaces à lignes de courbure planes. La théorie des lignes géodésiques est étudiée avec un soin tout particulier, comme il est naturel dans un ouvrage spécialement destiné aux personnes qui veu- lent appliquer la théorie des surfaces aux problèmes de la Mécanique ; une Note placée à la fin de l'ouvrage présente même, avec tous les développements qu’elles comportent, les recherches de M, Bonnet sur la dis- tance géodésique de deux points. Un sujet traité également avec un certain détail est la torsion (que M. Résal appelle cambrure) des lignes tracées sur les surfaces. Par contre, on peut s'étonner de voir l’auteur passer si rapidement sur la théorie des surfaces applicables, surtout quand il ajoute cette affirmation, un peu ab- solue, que l’on ne sait point résoudre le problème en dehors de l'application des surfaces de révolution les unes sur Jes autres ou des hélicoïdes sur les surfaces de révolution. Le dernier chapitre est une étude très approfondie du système de variables proposé par M. Bonnet et de son application aux systèmes minima. 1 J. Hipamanp. Hbuhem. (P.). Chargé de cours à la Faculté des Sciences de Lille, — Cours de Physique Mathématique et de Cristallographie. Lecons professées en 1890-91 sur l’'Hydrodynamique, lElasticité, l'Acoustique. 17° partie. Théorêmes généraux, corps fluides. Un vol. in-4° lithog. (pré 14 fr.) Hermann, éditewr, 8, rue de la Sorbonne, Paris, 1891. M. P. Duhem, chargé du cours complémentaire de physique mathématique à la Faculté des Sciences de Lille, vient de publier la première partie de son ensei- gnement; la seconde et dernière paraitra vers la fin de l’année. Dans ce volume, intéressant à plus d'un titre, M. Duhem rappelle d’abord les principes généraux de mécanique et de thermodynamique qui doivent forcé- ment servir de base à toute recherche d’hydrodyna- mique ou d’élasticité ; il reprend le théorème des travaux virtuels de Jacques Bernouilli: et l’énonce sous la forme complète indiquée par Gauss; il donne le principe de d’Alembert, fait diverses remarques sur les liaisons, expose la théorie du potentiel, démontre le beau théorème de Lejeune-Dirichlet sur la stabi- ET INDEX lité de l'équilibre et, après avoir défini le potentiel thermodynamique interne, il arrive à l'étude des dé- formations infiniment petites d’un corps et de la pres- sion qui se produit dans son intérieur, Sur ce dernier point, la méthode d'exposition n’est pas encore indiscutablement fixée dans la science et les travaux des plus grands géomètres, Cauchy, Pois- son, Lamé, peuvent prêter à la critique; M. Duhem qui est un disciple enthousiaste de Lagrange, adopte . toujours la méthode indiquée par lillustre mathé- malicien et ne s’écarte jamais de la Mécanique analy- tique; cette règle uniforme qui pourrait être critiquée dans un ouvrage de recherches n’a que des avantages dans un livre d'enseignement. Les principes généraux une fois rappelés, M. Duhem aborde l’étude des corps fluides, de leur équilibre, de leurs mouvements, de la propagation des vibrations et de la théorie de l’acoustique qui s’en déduit; c’est là vraiment la partie capitale de l’œuvre, on nous per- mettra d'y insister. L’exposé de l'hydrostatique et de ses théorèmes gé- néraux est fait par l’auteur d’une facon complète et ap- profondie suivant la méthode adoptée par Lagrange: puis, après avoir étudié l'équilibre des fluides, il aborde la question difficile de la stabilité de cet équilibre en partant de la considération du potentiel thermodyna- mique interne et de sa variation seconde pour une modification virtuelle quelconque; toute cette partie du volume appartient presque complètement en propre à M. Duhem, Il établit alors les équations de l’hydrodynamique, examine les divers cas où, connaissant la relation sup- plémentaire, on peut traiter le problème, démontre successivement le lemme de sir W. Thomson, le théo- rème de Green, et, enfin, les théorèmes si intéressants d’Helmholtz sur les mouvements tourbillonnaires. Les petits mouvements dans les fluides sont traités d’une facon complète en prenant pour base le théorème de Kirchoff, démontré suivant la méthode un peu longue, mais rigoureuse, qu'a donnée M. Beltrami, On en déduit le théorème de Poisson et la propagation des petits mouvements, Toute la théorie de l’acoustique peut alors être faite : M. Duhem a cru devoir consacrer un chapitre à re- prendre ce qui concerne la propagation d’un mouve- ment dans un autre par la méthode du regretté Hugo- niof ; nous ne pouvons que l’approuver, car cette mé- thode, bien que soumise à cette restriction d’exiger une relation entre la pression et le volume spécifique du fluide quand on étudie la déformation de la surface de l’onde, n’en est pas moins d’une clarté parfaite et d'une haute portée, Les diverses questions si importantes de la propaga- tion des ondes planes dans un tuyau, des ondes sphé- riques, des interférences et des battements: celles re- latives à la réflexion et à la réfraction du son, aux vibrations périodiques d’une masse d'air, aux sons propres d’un espace donné et plus spécialement d’un tuyau cylindrique, d’une couche sphérique ou d'un parallèlipipède rectangle, sont examinées et discutées avec le plus grand soin. Le volume se termine par une théorie de la réson- nance et des résonnateurs, d’après M. Poincaré et par la théorie d’Helmoltz sur les tuyaux ouverts Nous n'avons pu dans ce compte-rendu qu'indiquer d’une facon rapide et forcément très sèche les divers sujets traités dans l’ouvrage de M. Duhem; mais celte énumération suffit à montrer quel est l'intérêt de ce volume et quels services il peut rendre ; le savant pro- 552 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX fesseur de Lille a su exposer ces difficiles questions dans tous leurs détails, tout en conservant une mé- thode unique et une grande clarté; son livre sera dela plus réelle utilité à tous ceux qui travaillent la phy- sique mathématique :il s’y est montré à la fois un pro- fesseur et un érudit. L: 0. 2° Sciences physiques. Offret (Albert). — De la variation sous l'influence de la chaleur des indices de réfraction de quel- ques espèces minérales dans l'étendue du spectre visible. Thèse présentée à laFaculté des sciences de Paris. Imprimerie Chaix, 5, rue de la Sainte-Chapelle. 1891. La connaissance exacte des constantes optiques des cristaux est devenue de plus en plus utile au minéralo- giste ; de nombreuses recherches ont déjà étéentreprises en vue de déterminer avec précision la valeur de ces constantes, M. Offret a pensé qu'il y avait néanmoins encore beaucoup à glaner dans un champ si exploité et le succès a répondu à son attente. Il s’est principa- lement occupé des variations des indices, de la disper- sion, et aussi de l’angle des axes optiques sous l’in- fluence de la chaleur. Comme très justement il le fait observer, si les recherches des pétrographess'effectuent d'ordinaire à la température ambiante, il est bon de ne point oublier que les minéraux se sont presque lou- jours formés dans la nature par des cristallisations à des températures élevées, aussi ne saurait-on consi- dérer comme indifférente la connaissance de leurs ropriétés à des températures rapprochées de celles qu'ils ont possédées au moment de leur genèse. Le travail de M. Offret a dû coûter à son auteur un temps considérable, il a effectué un très grand nombre de mesures qu'il a consignées dans son mémoire; ces mesures ont été faites avec de minutieuses précaulions que l’auteur expose d’abord en détail. Toutes les dé- terminations expliquées ont été faites en employant la méthode du prisme, qui a l'avantage sur les autres méthodes, employées dans le même but, de n’exiger aucune expérience concomilante pour la détermination des coefficients de dilatalion; on sait à quelle grande précision l’on peut arriver par ce procédé, si l’on tient compte de toutes les causes d'erreur aujourd’hui bien connues, et si on les élimine par les procédés indiqués par divers auteurs ; M. Cornu, par exemple, à publié sur ce sujet un mémoire classique; récemment encore M. Carvallo a montré quels beaux résultats l’on peut ainsi tirer des goniomètres construits par des artistes tels que MM. Brünner, M. Offret rappelle les condi- tions nécessaires pour obtenir cettehaute précision et le moyen qui permet de l'évaluer; toutes ces conditions ont été scrupuleusement remplies. Dans l’espèce une cause nouvelle d'erreur peut cependant intervenir; l'orientation des prismes a été établie à froid, elle ne subsiste pas toujours à chaud; pour les substances tricliniques, où les trois axes de l’ellipsoïde sont indé- pendants de toute symétrie, les trois axes varient évi- demment de position, mais les travaux antérieurs sur cette question prouvent que ces déplacements, dans le cas où ils se produisent, sont très faibles ; et il ne parait pas très important d’en tenir compte. M, Offret Pa donc négligé. La difficulté particulière des expériences provenait de la nécessité de porter les prismes à des températures variables et bien connues. A cet effet l’auteur est parvenu à faire construire une étuve cons- tituant une sorte de four Forquignon et Leclerc ren- versé, avec cette différence que la combustion se fait seu- lement à l’entrée, et que l'appareil est chauffé par les produits de la combustion ; cette étuve peut se placer sous la plate-forme du goniomètre, et on peut l’isoler suffisamment pour que le goniomètre ne s’échaufle pas. D'ailleurs lé réglage du prisme reste possible grâce à un ingénieux dispositif. L'influence de l'air chaud et des glaces qui ferment l'appareil a été examinée avec soin ; elle ne change pas sensiblement la limite de pré- cision des expériencesordinaires, Les températures ont été mesurées avec un thermomètre à mercure. M. Offret rappelle quelles sont les corrections de tige et de cali- brage nécessaires à effectuer pour obtenir des valeurs correctes. Parmi les résultats généraux les plus intéressants mis en relief par ce travail, on peut signaler l’aug- mentation générale de la dispersion avec la tempéra- ture, la variation des propriélés optiques d’un minéral dans des échantillons provenant d’un même gisement, le fait que le béryl et l'oligoclase ont une biréfringence croissante avec la température, la comparaison de la calcite et del’aragonite qui montre une tendance deces deux minéraux à se rapprocher l’un de l’autre au fur et à mesure que s'élève la température, sans toutefois qu'il puisse, semble-t-il y avoir identification à aucune température, Le mémoire de M. Offret se termine par une discussion très approfondie de toutes les formules proposées pour représenter la relation qui existe entre les indices de réfraction et la température, Un fait très remarquable observé par l’auteur : l'augmentation des indices d’un certain nombre de substances quand la température s’accroit, démontre à priori que toute les formules proposées jusqu'à ce Jour sont insuf- fisantes ; seule, une remarque due à M. Dufet concorde avec l'expérience, mais cette remarque ne permet pas à elle seule d'établir une formule. Aussi M. Offret a-t-il adopté une formule empirique qui résume les résultats de son travail et pourra par suite servir de base à l'épreuve de toute théorie que l’on pourrait édifier par la suite. Lucien Poincaré. Duparc (L.) et Le Royer (A.). — Recherches sur les formes cristallines de quelques substances organiques. — Bulletin de lu Société francaise de miné- raloyie, 1891. Les auteurs ont réuni dans cette publication les résul- tats de mesures cristallographiques qu'ils ont faites sur vingt-sept composés organiques différents, préparés pour la plupart, au Laboratoire de chimie de l’Univer- sité de Genève, Indépendamment de l’intérèt plus spé- cial que de semblables recherches présentent pour le minéralogistes et surtout pour le cristallographe, nous croyons devoir attirer l'attention sur ce travail très consciencieusement exécuté. On y trouve en effet des données intéressantes sur les formes cristallines de corps appartenant à des séries naturelles de composés et les auteurs insistent en particulier sur un cas fort curieux de morphotropie relatif aux acétanilides subs- tituées. À une époque où l’on cherche à établir des relations entre la structure cristalline et les formules stéréochimiques, il nous a semblé que le travail méri- tait d’être signalé. Ph.-A, GUYE. Mériau (Carlos), Ingénieur civil. — Histoire de l'in- dustrie sucrière dans la région du Nord. Ses commencements,ses progrès, son état actuel, ses rapports avec l'agriculture. Société industrielle du Nord de la France, supplément au bulletin du quatrième trimestre de 1890. Imprimerie L. Danel, Lille, 1891. Ce volume, intéressant par les détails qu'il contient et par l'importance, au point de vue de l’industrie na- tionale, du sujet qu'il traite, est assez complet, sauf en ce qui concerne les procédés d'analyse, indiqués seulement de facon sommaire, Il est divisé en deux parties : la première, relative au sucre, fait connaître les causes qui ont favorisé ou retardé le développement de l’industrie sucrière dans le Nord de la France, exa- mine les divers modes de perception de l'impôt et les compare aux systèmes fiscaux de l'Etranger; la se. conde, relative à la betterave, occupe presque tout le volume, Les questions de culture et d'engrais sont tout d'abord examinées, puis les questions industrielles d'extraction, d'épuration, de concentration des jus, de cristallisation ou de travail des mélasses. Le volume se termine par un chapitre consacré à l'examen des rapports de l'industrie sucrière avec RRROUANER BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 553 8° Sciences naturelles. Loriol (P. de). — Description de la faune juras- sique du Portugal. Embranchement des Echino- dermes. In-4°, 179 y., 29 pl. Lisbonne 1890-1891. La Commission des travaux géologiques du Portugal termine Ja publication d'un nouveau Mémoire ‘de M. Loriol sur les Echinodermes des terrains secon- daires. Comme résultats généraux nous y voyons que cette faune est relativement pauvre elle comporte 111 espèces d’Oursins, { espèce d’Astérie et 34 espèces de Crinoïdes, La disproportion entre les oursins régu- liers et les oursins irréguliers est fort surprenante ; tandis qu'en France le nombre de ces derniers dépasse le tiers de celui des premiers, il n'atteint que le 6° en Portugal. Nous voyons en outre se 9 oursins seulement sont communs au Portugal et à l'Algérie, tandis que la faune échinodermique du Crétacique por fugais présente le caractère algérien dès les assises inférieures. La distribution dans les étages est fort irrégulière ; elle présente des moments de hausse suivis de baisses subites ce qui lient naturellement à des changements dans les conditions d'existence. 3 P. CHorFAT. Brandza (M.) — Développement des téguments de la graine. Thèse de lu Faculté des Sciences de Paris. Revue générale de Botanique. Klinksieck éditeur, 52, rue des Ecoles. Paris, 1891, On admetlait jusqu'ici que, dans le plus grand nombre des cas, le tégument externe des ovules à deux téguments entre seul dans la constitution du té- gument “de l a graine, tandis que l’interne est résorbé. D° après Le travail de M. Brandza cette notion est tout à fait inexacte et presque l'inverse de la vérilé, Ainsi, à part les Renonculacées, Papilionacées, Amaryllidées et une grande partie des Liliacées, toutes les familles étudiées par l’auteur, et qui possèdent des ovules à deux téguments, conservent dans la graine le tégument interne, constituant la couche lignifiée protectrice de la graine, Parfois, le nucelle lui-même contribue à la formation des enveloppes de la graine mare, La disparition du tégument interne, considérée jusqu'ici comme un fail général, passe donc à l’état d’ exception, Si les conclusions de M. Brandza sont importantes, les observations qui l’ont conduit à les formuler ne sont peut-être pas à l'abri de toute critique. Déjà M. Guignard !, qui incidemment à eu l’occasion d’exa- miner Vorigine des téguments de la graine dans une seule famille, les Crucifères on admet point le bien fondé de toutes ses observations. D'ailleurs, si la mé- thode de travail employée par M. Brandza nous est indiquée par le plan de son exposition, elle ne parait pas avoir toute la rigueur désirable, Pour chaque es- pèce étudiée, il décrit, en effet 1° l'anatomie des tégu- ments de la graine el 20 Je developpement de ces tégu- ments, limité parfois à la description des téguments de lovule ; il nous semble que l’ordre inverse eût été plus logique, et l’on suit difficilement, chez certaines graines, pourquoi telle ou telle assise appartient à l’un ou à l’autre tégument; l’auteur parait d’ailleurs avoir parfois éprouvé le mème embarras par exemple à propos du Funaria, du Berberis el du Portulaca. C'est aussi en commencant par la fin qu'il a dû lire le tome XVI (1872} des Annales des Sciences naturelles, car autrement il n'aurait pas oublié de citer, dans son historique, le travail de M. Van Tieghem sur l'ovule et la graine, qui précède immédiatement dans ce volume celui de M. Le Monnier. Dans les dix planches qui accompagnent son mé- moire, l’auteur à prodigué les schémas de coupes de l'ovule, il en à représenté plus de trente, d'autant moins nécessaires qu'ils ne modifient en rien les no- l Journ. de Bot., déc. 1890. qui peut même jouer un rôle important en- tions classiques sur la structure de l’ovule; le lecteur préfèrerait à coup sûr y trouver le détail de quelques coupes longitudinales de l’ovule et de la graine, car celles-ci sont un guide beaucoup plus certain que les coupes transversales dans l'appréciation de la valeur morphologique des téguments, mais, malheureuse- ment, elles font presque totalement défaut ; l’auteur parait d’ailleurs n’en avoir fait qu'un usage très res- treint, malgré les services qu'elles ont rendus à l’un de ses prédécesseurs, M. Jumelle, = C. Sauva Bataillon (E.): Recherches anatomiques et expé- rimentales sur la métamorphose des Amphibiens anoures. Thèse de la Faculté des Sciences de Paris, G. Masson, 120, boulevard Saint-Germain, 1894. Comment les grenouilles perdent: elles leur queue ? C’est à résoudre ce problème, d'apparence futile, mais que tout physiologiste estime à sa valeur , que tendent les recherches de M. Bataillon sur la métamorphose des Batraciens. On sait que le nom de métamorphose est donné à une période du développement embryogé- nique de certains animaux, durant laquelle ils su- bissent des changements remarquables de forme, de structure et de fonctions, caractérisés moins encore par leur étendue que par leur rapidité. Les transforma- tions des tètards de grenouille comptent parmi les plus anc iennement connues; la fin du stade pisciforme s'annonce par la for mation des pattes postérieures, sui vie à un intervalle de temps variable de la sortie des antérieures. Au-devant de celles-ci se forme une bou- tonnière expiratrice supplémentaire ; en même temps les valvules nasales disparais , le bec corné tombe au milieu d’une mue épithéliale, a queue s’atrophie, l'intestin se raccourcit en vue du régime carnivore etc. Ces phénomènes généralement connus s'accom- pagnentde modifications physiologiques sur lesquelles M. Bataillon a le premier attiré l'attention, Elles portent sur les trois grandes fonctions de la digestion, de la respiration, de la circulation, La diminution de la nutrition avait déjà attiré l'attention de Barfurth et de Ross, qui firent un rapprochement entre le jeûne de la mélamorphose et le jeùne des animaux hibernants. Faut-il, avec ces deux auteurs, voir dans linanition la cause immédiate de la métamorphose ? M. Bataillon ne le pense pas; la critique des expériences de Barfurth ne montre en effet dans la durée de la métamorphose des animaux soumis au jeûne absolu ou nourris à leur satiété que des différences contestables. Le gavage des larves essayé par notre auteur n’a donné aucun résultat, Les modifications respiratoires ont plus d'importance car elles portentet sur les phénomènes mécaniques de cet acte, tels que le nombre des mouvements respira- toires, leur amplitude, la pression de l’eau péri-bran- chiale, et sur les phénomènes intimes de la respiration tissulaire. Le rythme s'élève de 10 à 13 inspirations par minute sans qu'on puisse cependant savoir si l’irriga- tion branchiale est par là améliorée ou diminuée, car le volume d’eau introduit dans la bouche à chacune de ces inspirations n’a pas été mesuré, La pression posi- tive de l’eau dans la bouche pendant l'expiration subit un abaissement qui n’a pu être mesuré directement mais qui est évalué à une colonne de deux ou trois cen- timètres d’après des mesures failes sur d’autres ani- maux, Si faible que soit cette variation, l’auteur veut qu'elle joue un rôle dans les phénomènes osmotiques de la respiration et cela l'amène à faire une courte in- cursion dans le domaine de la physique. Si deux solu- tions, dont l’une renferme un gaz, sont sé parées par une membrane de baudruche et qu'on vienne à exercer un excès de pression sur la solution gazeuse, les phé- nomènes osimoliques seront modifiés non seulement par la filtration de la solution gazeuse in toto dans le sens requ's par la pression, mais par un passage en excès du gaz dissous. Pour faire application de cette remarque à l'échange gazeux branchial, il fallait évi- demment mesurer et la pression de l'eau dans la 594 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX bouche et la pression du sang dans la branchie, deux problèmes de grande difficulté, Quoi qu'il en soit, le dosage de l'acide carbonique total expiré montre une diminution de près d’un tiers, ce qu'il faut expliquer par une rétention dans le sang ou par une diminution de la respiration des tissus. La première hypothèse, c’est-à-dire celle d’une asphyxie carbonique par réten- tion, est seule envisagée par l’auteur et s’il n’en a pas donné la preuve directe qui résulterait de lana- lyse gazeuse du sang, du moins lui apporte-til appoint de diverses altérations physiologiques généralement considérées comme asphyxiques. Le gaz carbonique n’est pas, du reste, le seul principe immédiat sur la va- riation duquel l'attention de l’auteur ait été attirée ; il a également dosé le glycogène total et le glycose. Pour le premier, ainsi que l'avait vu Claude Bernard, il fait constamment défaut,mais le second existe en quantité notable et augmente beaucoup durant la métamorphose pour diminuer après elle. Cette glycémie (le glycose étant probablement dans le sang?) est considérée comme asphyxique. A celle-ci se rattache encore le ra- lentissement des battements cardiaques et la sortie des globules blancs ou diapédèse qui précède les impor- lantes manifestations que Metschnikoff a décrites sous te nom de phagocytose. Celle-ci est pour M. Bataillon un fait très général qu’on trouve, ainsi que la diapédèse, dans toutes les régions du corps. Son rôle destructeur n'est pas exclusif et les tissus auxquels s'attaque l’ar- mée des globules blanes sont déjà en voie de consomp- tion spontanée manifeste, par suite de l’asphyxie locale, de l’inanition et des autres mauvaises conditions gé- nérales. Il est même telle région où les conditions gé- nérales de la nutrition peuvent se trouver si mauvaises que les globules blancs n'y prospèrent pas mieux que les autres éléments etqu'ils périssent tous ensemble dans le même charnier., Celte manière de voir ne laisse pas que d’être nouvelle et diminue notablement lPim- portance attribuée jusqu'ici au vaillant et providentiel appétit des phagocytes. Entreles diverses manifestations anatomiques, physio- logiques, histologiques qui caractérisent la métamor- phose des Anoures, M. Bataillon voit un lien étroitde cau- salité qu'on peut exposer de la manière suivante : La disparition des valvules nasales et apparition des spi- racula, en déterminant l’accélération du rythme respi- ratoire et la diminution de la pression intra-buccale, engendrent l'asphyxie carbonique par défaut d’exhala- tion; l’asphyxie détermine la glycémie, l'accélération cardiaque el favorise la diapédèse, terme premier de la phayocytose, Comme on le voit, e’est là toute une théorie de la métamorphose par lPasphyxre. Des physiologistes exi- geants demanderont peut-être des preuves plus rigou- reuses et plus nombreuses que celles qui leur sont offertes dans ce court mais excellent travail. M. Batail- lon conservera le mérite, non seulement d’avoir intro- duit et défendu une théorie intéressante, mais encore d’avoir enlevé aux spéculations stériles de l'anatomie et de l'histologie contemplatives, une question jusqu'ici rebelle et de l'avoir poussé dans la seule direction où elle puisse rencontrer sa solution, c'est-à-dire dans la voie expérimentale, L. CHary. Duval (E.).-— Traité pratique du pied bot, avecune préface du D* PÉAN. Un vol.in 8° avec 46 fig. dans le tecte (6 fr.)J.-B.Baillière, 49, rue Hautefeuille, Paris, 1891. D'une lecture facile, émaillé de traits d'esprit, le plus souvent à l'adresse des confrères qui se sont occu- pés du pied bot, le livre de M. E. Duval est le fruit de l'expérience consommée d'un orthopédiste, fils d’un autre orthopédiste renommé, Vincent Duval, qui a été pendant plus de 40 ans directeur du service orthopé- dique des hôpitaux. Comme on pouvait s'y attendre, l’auteur écrase de son mépris tout ce qui n’est pas ténotomie et redressement par les appareils. Il n’y a qu'une bonne méthode thérapeutique, celle de son père, qu'une classification bonne celle qu'il à apprise dans son enfance, Aussivoyons-nous reparaître dans cet ouvrage toutes ces vieilles dénominations de stréphe- xopodie., de stréphocatopodie, de stréphenpopodie, ete., qui sont aujourd'hui du domaine de l’histoire. Quelques points pratiques, ayant trait à la construction et à l’ap- plication des appareils donnent toutefois de la valeur à ce livre, auquel on peut pardonner bien des omis- sions, en tenant compte de ce que c’est, comme le dit l’auteur de la préface, M. Péan, « une œuvre de piété filiale, c'est-à-dire, moralement, une bonne action. » Henri HARTMANN. 4° Sciences médicales. Gamaleia. Sur la lésion locale dans les maladies microbiennes.— Arch.de Méd. Exp. 1891. L'inflammation, jadis envisagée comme la cause dé- terminante de toutes les maladies, tend depuis quelques années à être considérée au contraire comme un phé- nomène tutélaire, ayant pour objet essentiel de proté- ger l'organisme menacé contre l'infection générale. De nombreux travaux ont été entrepris sur ce sujet dans les laboratoires, M. Gamaleia s’est attaché à tirer des mémoires récemment parus les conséquences qui s'en dégagent. Ses conclusions offrent un haut intérêt pour la pathologie générale. Il est d’observalion courante que, chez les animaux qui sont rapidement alteints par une infection géné- rale, il n'existe presque jamais de lésion locale in- flammatoire, alors que cette dernière, avec tous ses phénomènes réaclionnels, se produit chez les animaux plus réfractaires. M. Gamaleia résume le problème qui découle de ce fait en deux questions : 4° Pourquoi les leucocytes font-ils défaut dans la lésion locale, chez les animaux sensibles à l'infection? 2 Pourquoi les leucocytes arrivent-ils au niveau de la lésion chez les animaux réfractaires ? La première de ces questions a surtout été abordée par MM. Bouchard, Charrin et Gley.Pour eux, la diapé- dèse est arrêtée par l’action des produits sécrétés par les microbes vivants, et notamment par la paralysie des vaso-moteurs. Or M. Gamaleia n’admet pas que ce soit uniquement en empêchant la diapédèse que les différents facteurs invoqués favorisent l'infection. Ges agents entravent, selon lui, la diapédèse parce quals permettent aux microbes de se développer, et non en empéchant l’arrivée des leucocytes. Des travaux de Buchner sur le deuxième point du problème sont ensuite exposés. C’est la substance constituante des bactéries, la protéine qui attire les leucocytes. Alors que vivants, ils éloignent ces der- niers à l’aide des produits sécrétés, morts ils deviennent au contraire un centre d'attraction. Le rôle tutélaire des leucocytes serait alors singulièrement diminué; ils n'interviendraient plus qu'après la mort de l'agent virulent, et ne seraient désormais, suivant la pitto- resque expression de M. Gamaleia, que les « balayeurs » du corps. Dans cette théorie, siles animaux réfractaires présentent des phénomènes d’inflammation locale, c’est uniquement parce que leurs humeurs possèdent un pouvoir antiseptique et antitoxique suffisant pour supprimer les bactéries et annihiler les effets des toxines. Si ingénieuses que paraissent les interprélations de M. Gamaleia, il nous semble qu'elles ne tiennent pas un compte suftisant de la différence d'action, pourtant très sensible, des divers microbes pathogènes. Sa théo- rie m'explique pas les faits d'attraction où de répul- sion dites chimiotactiques, observés notamment par MM. Metschnikoff, Wissochowich, Massart et Bordet. Eu0; ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 533 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER (La plupart des Académies et Sociétés savantes, dont la Revue «analyse ordinairement les travaux, sont actuellement en vacances.) ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 27 juillet 1891. 1° SGIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Parenty : Sur une représentation géométrique d'une formule de la loi d'écoulement des gaz parfaits à travers les orifices, — À propos de la note de M. S. P. Langley relative à la résistance de l'air, M. Drzewiecki annonce que les études théoriques entreprises par lui, en partant de l'identité des lois du vol des oiseaux et des aéro- planes, l’ont conduit précisément aux résultats que l'expérience a donnés à M, Langley. — M. J. Janssen annonce que, grâce au concours de MM. Bischoffsheim, R. Bonaparte, de Rothschild et Eiffel, des études vont ètre commencées en vue de la construction d'un Observa- toire au sommet du Mont-Blanc La première opération doit consister à déterminer l’épaisseur de la couche de glace au sommet de la montagne. 2% SCIENCES PHYSIQUES, — M. À. Leduc a déterminé à nouveau, en se servant de la méthode de Regnault avec divers perfectionnements, les densités de Pair, de l'oxygène, de hydrogène et de l'azote. Les chiffres obtenus pour l'oxygène el l'azote différent des chiffres de Regnault; les gaz dont cet auteur s’élait servi devant contenir, le premier des composés chlorés, le second del hydrogè ne, pour les raisons qu'a exposées M. Le duc dans une précédente communication, — M. P. Schützenberger a constaté que lorsqu'on réduit du chlorure de nickel anhydre pur par un courant d'hydro- gène sec au rouge sombre, il y à transport au loin du métal qui se dépose sous forme d’anneau si l'on chauffe au rouge sombre, sur une étendue de quelques centi- mètres, l’espace tubulaire traversé par le gaz à sa sortie de nes diverses expériences démontrent qu'il ne s’agit pas là d’une volatilisation du‘ chlorure de nickel, oi de la formation d'un composé volatil, probablement NiCIH. — M. J. Garnier allire l'atten- tion sur divers phénomènes qui s’observent dans la métallurgie du fer et du nickel et qui lui paraissent se rattacher à la formation de carbonyles de ces mé- taux. — MM. G. Rousseau et G. Tite ont transformé lazotate basique de cuivre en oxyde par l'action pro- longée de l’eau à 1649; ils ont transformé de même le sulfate basique en oxyde de cuivre après cent cinquante heures de chauffe à 240°; les auteurs montrent com- ment ces réactions s'expliquent, au point de vue ther- mochimique, par la chaleur de dissolution de l'acide. Au contraire de ces sels, Foxychlorure et le phosphate basique de cuivre résistent à l’action de l'eau. — M. E. Chuard a observé que les objets en bronze des pala- filtes sont recouverts d’une couche de sulfure métallique lorsqu'ils ont été recueillis dans la vase ; la composition de cette couche doit la faire considérer comme consti- tuée par de la chalcopyrite stannifère; ce fait montre une production de sulfures métalliques indépendante des eaux minérales, — MM, C. Lepierre et Lachaud ont obtenu à l’état cristallisé le chromate de thallium., après l'avoir dissous dans une solution chaude de potasse: les cristaux sont isomorphes avec le sulfate et le chlorale de potassium ; la potasse fondante a donné avec le même sel le sesquioxyde de (hallium cristallisé en paillettes hexagonales. — M, W, E. Mati- gnon à déterminé les constantes thermochimiques des acides parabanique et oxalurique, — M. Ch. E. Guignet a obtenu l'acide benzoïque en réduisant par lhydro- gène naissant l’acide gallique ; il pense qu'on pourra trouver dans la méthode de réduction un moyen d’étu- dier les tannins encore peu connus, — M, Scheurer- Kestner a éludié la polymérisation de l'acide ricino- léique par la chaleur, 3° SCIENCES NATURELLES. — M. L. Boutroux a re- connu que dans la fermentation panaire c’est bien la levure qui est l'agent de la fermentation; les diverses bactéries qui l’ac compagnent gé inéralement ne peuvent jouer qu’un rôle très secondaire; l'action produite con- siste essentiellement en une fermentation alcoolique normale du sucre préexistant dans la farine. — M. P. Binet, en précipitant du phosphate de chaux au sein de l'urine, à obtenu une substance insoluble dans l’al- cool, qui, injectée aux cobayes, délermine une éléva- lion de la température; celte substance existe dans les urines normales et pathologiques; elle est plus abondante dans les urines des tuberculeux, — MM. H. Bertin-Sans et J. Moitessier ont étudié la transfor- mation de l’hémoglobine oxycarbonée en méthémoglo- bine; contrairement à l'opinion de MM. Weil et von Anrep, ils n'ont pas observé la formation d’une com binaison de la méthémoglobine avec l’oxyde de car- bone; celui-ci reste simplement dissous; les auteurs proposent la transformation en méthomoglobine comme moyen de mettre en liberté l’oxyde de carbone pour le doser, — O. Gréhant : Sur un nouvel appa- reil destiné à mesurer la puissance musculaire. — MM. Gréhant et Quinquaud : Mesure de la puissance musculaire chez les animaux soumis à un certain nombre d'intoxicalions.(Poureesdeuxcommunications, V. Soc. de Biologie), — M. G. Demeny a réussi à fixer par la chronophotographie les mouvements des lèvres qui se produisent dans la parole articulée; un certain nombre des sons ainsi pholographiés ont pu être lus dans le zootrope par un sourd-muet, M. A. Char- pentier rapporte l'expérience suivante ‘sir lonnre garde une surface blanche uniforme à travers un disque rotatif à secteurs alternativement pleins el vides, et si l’on fait tourner le disque avec une vitesse telle que chaque impression lumineuse tombe sur la réline pendant la phase d’inexcitabilité produite par l'excitation précédente, on à une sensation intense de violel: l’auteur pense qu'il y à là vision en- toptique du pourpre rétinien, — À propos de la note communiquée par M. Charpentier dans la séance précé- dente, M. Mascart signale le fail suivant qu'il a observé dans diverses conditions : lorsqu'un objet noir passe rapidement sur un fond blane, œil étant immo- bile, il apparaït une De sombre à la suite de |” objet. — On avait dit que la chè vre est réfractaire à la tuber- culose; M. G. Colin, en inoculant sous la peau d’une chèvre de petits fragments de tubercules de la vache, à produit une tuberculose locale qui s’est étendue aux ganglions voisins; le poumon élait farci de tubercules. — M. L. Lortet a trouvé dans les vases de la Mer Morte, dont les eaux sont, comme on le sait, extrème- ment chargées en sels, deux espèces de microbes pa- thogènes très virulents, celui de la gangrène gazeuse et celui du tétanos. — M. A. F. Marion, en présentant le recueil des travaux de la station maritime d'En doume, expose diverses considérations sur le dépeu- plement de la Méditerranée et les remèdes qu'il serait bon d'y apporter après avoir éludié scientifiquement la question. — M. P. Marchal qui avait décrit déjà Pappa- reil excréteur du Palæmon a étendu ses recherches à Pen- semble de la famille des Caridides. Au point de vue physio: logique, il a pu s'assurer que chez les Crustacés en néral la production du liquide urinaire est une véri- table sécrétion avec séparation de parties cellulaires, — M,.G. Saint-Remy a étudié le système nerveux des ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES Monocotylides (Tristomiens). — MM. J. Kunckel d'Her- culais et F. Saliba signalent sur les racines des vignes d'Algérie la présence d’un nouveau parasite, le Rhizæcus falcifer; c'est une espèce de cochenille que M. Kunckel d'Herculais avait découverte en 1878 sur les racines des palmiers du Muséum; les racines piquées par l’insecte présentent des renflements et la plante dépérit comme lorsqu'elle est attaquée par le phvl- loxéra. — M. A Gaudry à examiné le grand Ichthyo- saure trouvé dans le lias supérieur à Sainte-Colombe près de Vassy (Yonne), C’est probablement une espèce nouvelle pour laquelle M. Gaudry propose le nom d’Ichthyosaurus Burgundiæ. — M. Géneau de Lamar- lière a fait des recherches sur l'assimilation dans la famille des Ombellifères ; il a reconnu que les espèces à feuilles très découpées, à surfaces étroites, présen- tent pour l'unité de surface une assimilation plus active que les autres, — M. G. Poirault a étudié les tubes criblés chez les Filicinées et les Equisetinées; les cloisons sont en général très obliques et présentent de nombreuses plages criblées; la présence de bou- chons calleux est le cas général, — M. C. Blanchard examine les faunes et les flores des contrées boréales de l'Asie et de l'Amérique pour démontrer, par la pré- sence de plusieurs espèces communes, l'existence des communications terrestres entre les deux continents pendant l’âge moderne de la terre, — MM. Daubrée el H. Meunier ont éludié deux échantillons de fer natif découverts dans les lavages d’or des enviroris de Be- rezowsk (Russie); l'analyse à démontré que ces échan- tillons ne contiennent pas de nickel, mais un peu de platine; d'autre part l'attaque par les acides se fait d’une facon uniforme; ces deux faits écartent lhypo- thèse d’une origine extra-terrestre. Les échantillons présentent une structure feuilletée et portent les traces d’un écrasement violent, comparable seulement aux effets des explosifs; les auteurs remarquent là une confirmalion des théories de l’un d'eux sur l'origine du fer natif. — M. H. A. Newton signale un document du xve siècle relatif au passage au-dessus de la Suisse de la météorite d'Ensisheim (7 novembre 1492). — MM. L. Duparc et B. Baeff ont étudié pendant un an le régime quotidien de l’Arve au point de vue de son débit et de la proportion de matières en suspension; ils ont déterminé la part qui revient aux divers affluents de cette rivière (affluents glaciaires etaffluents non gla- ciaires), dans lérosionet le transport suivant les saisons. Mémoires présentés. — M. G. Colin: Etudes expéri- mentales sur la tuberculose, —M. le Dr Pigeon : Surle mode de production des épidémies de choléra, Séance du 3 août 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Riceo a relevé pendant une période undécennale les variations pério- diques en latitude des protubérances solaires: les ta- bleaux dressés au moyen de ses observations comparés aux tableaux relatifs aux taches montrent que les deux séries de phénomènes suivent exactement la même loi. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Leduc a étudié au moyen d’un dispositif très sensible la variation de vo- lume que subit le phosphore au moment de sa fusion ; il a constaté que la dilatation qu’on savait se produire àcemoment estabsolumentbrusque.— M. D. Berthelot avait étudié par la méthode des conductibilités élec- triques la neutralisation des principaux acides orga- niques et les problèmes de mécanique chimique qui s’y rattachent. Il a généralisé les résultats qu'il avait obte- nus, en répétant la mème étude avec l'acide chlorhy- drique, l'acide acétique et le phénol d’une part, la potasse, l’ammoniaque et l’aniline de l’autre, — MM. Berthelot et Matignon ont déterminé les chaleurs de formation et de combustion des benzines nitrées; ils font remarquer que les chaleurs de formation des nitrobenzines par leurs éléments sont peu éloignées les unes des autres et mème de labenzine ; ilen résulte que l'oxygène entré dans la composition du corps nitré dégagerait, s'il était employé à en brûler complètement une quantité proportionnelle à son poids, à peu près la même quantité de chaleur que si cet oxygène était libre: cette considération est applicable aux corps nitrés en général et elle est intéressante pour expliquer leurs propriétés explosives, — M. A. Seyervetz a étudié systématiquement l’action de la phénylhydrazine sur les phénols diatomiques; il a constaté qu’il y a en général réaction avec les phénols diatomiques; pour mettre en évidence cette réaction, il suffit de trouver un dissol- vant où le produit de la réaction soit moins soluble que lescomposants ; certains phénolstriatomiques réagissent aussi, mais plus difficilement. 30 SCIENCES NATURELLES. —M. Y. Delage a étudié le dé- veloppement de la Spongilla fluviatilis ; 1 a reconnu que, conformément à l'opinion de M. Goette. l’ectoderme primilif est remplacé par un ectoderme définitif venu de la profondeur, et séparé d’abord de l'extérieur par une couche continue de cellules ciliées ; celles-ci sont à un moment donné capturées par les grandes cellules méso- dermiques de la masse du corps, et englobées par elles: plus tard elles sont mises en liberté et forment les corbeilles, — M. A, Giard résume ces communi- cations sur le parasite du ver blanc et fait voir que celles de MM. Prillieux et Delacroix n’ajoutent rien de nouveau ; il maintient que ce parasite doit, suivant la loi de priorité, porter le nom d'Isaria densa (Link). — M. Le Moult annonce qu'il a obtenu une grande quan- lité des cultures du parasite du hanneton.—M.Ch. Cor- nevin à recherché comment agissent sur la germina- ion des graines les poisons qui en proviennent; il a reconnu que la saponine n'a aucune action sur la ger- mination des graines de l’agrostemma, non plus que la cytisine sur celles du eytise; l'extrait aqueux d’opium hâte la germination des graines du pavot, la nicotine ralentit la germination des graines de tabac, — M. Jobert à inoculé avee succès en série le bulbe d’un lapin mort de la rage, conservé pendant dix mois à une température de — 109 à — 20°, — M. A. Char- pentier a constaté que si l’on éclaire subitement pen- dant un temps très court de petites surfaces blanches, ces surfaces paraissent colorées; l’auteur rattache ce phénomène à l'ondulation rélinienne dont il a exposé la théorie, — M. G. de Saporta signale dans la flore fossile dè Cereal (Portugal) encadrée entre le Cénoma- nien et le Néojurassique, des Monocotylées qui sont probablement l’origine de la Classe. — M. Paquelin décrit des perfectionnements qu'il à apportés à son thermocautère dans le but de diminuer son volume et de le rendre plus facile à manier. — M. de Pietra Santa décrit la série des précautions qu'il prend pour obtenir une eau de Seltz industrielle conforme aux lois de l'hygiène, — M. Daubrée continue ses expériences au moyen des exposifs en cherchant à faire couler divers matériaux solides par la pression brusque des gaz; des résultats obtenus lui permettent d'affirmer une parenté au point de vue de leur cause mécanique, entre toutes les éruptions qui se sont fait jour par les diatrèmes; 1l propose pour ces phénomènes le nom d’ecphysèmes. Mémoires présentés. — M. F. Gouttes adresse un Mé- moire « sur les aérostats métalliques »., —M. E. Gorges adresse divers échantillons des conserves alimentaires préparées par un procédé qu'il ne fait pas connaître. L. LapIcour. ACADEMIE DE MÉDECINE Séance du ?8 juillet 1891. M. Proust : Le choléra de Mésopotamie, de Perse el de Syrie, en 1889 et 1890. En 1889, il y a eu trois foyers de choléra : Fun en Espagne, l'autre dans la mer Rouge, à la Mecque, le troisième en Mésopotamie. De 1850 à 1870 il y a eu des épidémies alternatives de choléra en Perse et en Mésopotamie. De 1871 à 1889 il n'a été signalé de choléra ni en Perse ni en Méso- potamie, il n'y a eu qu’une épidémie en Syrie en 1875. En comparant les épidémies de 1889 à 1890 à celles de 1865 et 1875 on voit que la mortalité a été en décroissant, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 531 dix à quinze mille pour celle de 1865, el six à sept mille pour celle de 1875 ; en 1890 la mortalité n'a été que de quatre à cinq mille. De la fin de 1889 à 1890 il y a eu en Mésopotamie el en Irak-Arabie 7000 décès cholériques: En Perse 6000, en Asie Mineure el en Syrie, 5300, à la Mecque 5000 :; soit au total 23 000, ce qui indique un chiffre réel de décès de 30 à 40 000. Si l’on évalue à 7 ou 8 000 000 le nombre des habitants de ces pays où a sévi le choléra, on trouve qu'il y a eu { cas de mort pour 17% habitants. Il est peu probable que cette nouvelle éclosion puisse être attribuée à un foyer ancien qui se serait rallumé ; il faut done ad- mettre l'importation venue de lFinde par le golfe Per- sique. Gelle importalion à dû se faire par les navires anglais sur la mer Rouge, Le choléra à dù être im- porté par Camaran.— M. Léon Labbé : Double hyper- trophie mammaire, M. Labbé montre deux seins provenant d'une jeune fille de 1% à 16 ans qui tout à coup à présenté une hypertrophie considérable des seins sans fièvre; pendant8 mois, arrêt, puis nouvelle poussée, Le sein gauche pesait 3 500 grammes, le droit 3 900 grammes, — M. Guéniot : Cerveau rudimentaire chez un enfant microcéphale, Détails microscopiques. — M. Le Dentu : tumeur du côlon ascendant, suivies dans la même séance de Fextirpation des annexes de Putérus, Séance du 4 aout. M. Terrier montre une malade à laquelle il à enlevé une partie du frontal, la dure-mère sous-jacente et une partie de la faux du cerveau. La malade à guéri parfai- tement, — M. Polaillon présente un malade qui, tombé sur son parapluie, s’enfonca lPextrémité fer- rée de l'instrument dans l'orbite gauche et se frac- tura la voûte orbitaire, L'extraction de lagent vul- nérant fut difficile; le blessé élant dans le coma, M. Poirier fit, à l’aide de la gouge, une ouverture dans le frontal et put enlever des fragments osseux, une partie du lobe antérieur du cerveau et énueléer l'œil, La guérison fut complète; le malade ne présente ni pa- ralysie ni trouble de la sensibilité, — M. Semmola (de Naples) fait d’abord remarquer l'importance clinique de l'étude des urines au point de vue des toxines uri- naires, signalées el étudiées par le professeur Bou- chard, Le celinicien doit donc se préoccuper de lin- fluence que ces matières peuvent avoir sur la marche des maladies. L'analyse de ces produits toxiques étant fort complexe, M. Semmola eut l’idée d’injecter aux cobayes et aux lapins les urines provenant des ma- lades. Il a pensé que les substances toxiques devaient varier selon les symptômes présentés et qu'ils devaient reproduire ces symptômes chez les animaux, En effet, dans un cas de pneumonie grippale, le malade ayant eu des crises éclamptiques et tétaniques, l'injection de son urine reproduisit ces mêmes symptômes chez l'a- nimal. Ces recherches ont permis d'affirmer que dans ce cas il ne s'agissait pas de méningite, En effet, 24 heures après, les accidents cessaient et la toxicité urinaire redevenait normale. SOCIÉTÉS MARITIMES SCIENTIFIQUES INSTILUTION OF NAVAL ARCHITECIS. Session 1891. (Suite.) M. A. Blechynden : Influence des dimensions et pro- portions relatives de l'hélice sur la marche du navire. Ce travail résume les résultats expérimentaux obtenus par l’auteur, à la suite de recherches {théoriques expo- sées dans un précédent Mémoire en 1887. Les expé- riences, dont il s'était alors tracé le programme, ont été, exécutées sur des modèles de dimensions restreintes en vue de déduire de la poussée qu'ils subissent celle que subiraient des hélices semblables en vraie gran- deur. Cette étude sur modèles a l'avantage de permettre une détermination rapide de l'influence des change- ments de formes et de proportions, en dégageant les phénomènes à analyser de la masse des influences Entérectomie et entérorraphie pour élrangères qui s'y entremélent dans le fonctionnement de l'hélice unie au navire. Remarquons loutefois que même dans ces limites les comparaisons de modèle à modèle ne doivent être faites qu'avec beaucoup de précaution, et que la légitimité des assimilations fon- dées sur telle ou telle hypothèse doit être préalable- ment vérifiée, En outre, le degré d’approximalion dans les mesures de vitesse et de puissance doit être en rapport avec l’exiguité du modèle. Un premier dia- sramme donne des courbes du coefficient d'utilisation D2V3 K=————pour des valeurs du recul variant de 0,15 à [l 0,40, el des valeurs du rapport du pas au diamètre comprises entre 0,90 el 2,1, mais pour une forme el une fraction de pas délerminées. Pour passer à une autre fraclion de pas, on peut admettre, avec une exac- litude suffisante, la proportionnalité de la puissance à la racine carrée de la fraction de pas, du moins lors- que le pas reste compris entre D et 15 D. L'im- portance relative des fractions de pas des diverses sections cylindriques à été reconnue au moyen d’ailes fractionnées en parallélogrammes mobiles; on à pu comparer ainsi les poussées qui s’exercent sur les différentes régions concentriques de la sur- face, et une courbe donne, pour le rapport 1,25 du pas au diamètre, les variations de la poussée en fonetion de la fraction de pas; et l’on passe facile- ment à toute autre valeur de DA DDON du pas au dia mètre) au moyen de coellicients tirés du premier diagramme, On peut, dès lors, calculer d’après ces courbes la poussée d'une hélice quelconque, La com- paraison des résultats du calcul avec l'expérience dans une dizaine de cas rapportés par l’auteur n'indique que des écarts très faibles, Toutefois, la conclusion n'est valable que pour des hélices en fonte ou en acier d'épaisseur assez forte pour qu'elles soient pratique- ment indéformables, Avec des hélices en bronze, la flexion des ailes équivaut à une augmentation du pas. Quelle que soit l'exactitude avec laquelle on déduit du modèle la poussée du propulseur, si l’on cherchait, au moyen de courbes d'utilisation préparées avee les expériences faites sur le modèle, à déterminer pour un navire donné le propulseur de rendement maximum, on se heurterait à de grandes difficultés dues à lin- fluence de la coque jointe au propulseur, Cette influence modifie l’utilisation suivant des lois encore peu connues. On sait seulement que la finesse des formes de l'arrière, les dimensions relatives du navire et de l’hélice, la dis- tance de celle-ci à la coque ont une grande importances Dans les navires fins, l'utilisation diffère peu de celle de lhélice travaillant seule ; dans les navires à formes pleines, le recul est augmenté de 50 à 75% pour le plupart des cargoboats, Quant aux dimensions relatives du propulseur et du navire, lauteur à cherché à en déterminer séparément l'influence, en comparant les essais d’un certain nombre de navires aussi voisins que possible comme formes, dimensions, puissance, vitesse et nombre de tours, et en ramenant les résultats à l’aide des diagrammes précédents à une unilé com- mune de fraction de pas, et à la même valeur 1,25 du rapport du pas au diamètre. On constate que l’utilisa- SV3 (où S représente la surface mouillée de la < S : carène), augmente avec le rapport — (où s représente $ tion l'aire du cercle ayant pour diamètre celui de l'hélice), c'est-à-dire augmente lorsque le diamètre de lhélice diminue, jusqu'à une certaine limite au delà de laquelle SV3 ; a CNE L'utilisalion est donc maxima pour une F à valeur déterminée de —, qui a été trouvée voisine de $ 100 pour des vitesses voisines de 0,6VL et qui dimi- nuent graduellement pour des vitesses plus grandes. Si 598 v VIS NT TOUL At l'ARN Le ACADÉMIES ET SOCIÈTES SAVANTES l'on tient compte des formes au moyen de coefficients de finesse, on trouve que dans les navires fins le dia- mètre de lhélice peut être augmenté avec avantage. Telles sont les conclusions auxquelles est parvenu M. Blechynden, On peut regretter qu'elles ne soient pas d’un caractère plus général et que le nombre des essais rapportés soit un peu trop restreint pour bien dégager une loi d’un ensemble de faits si complexes et d'éléments si divers, L. Vive. SOCIÉTÉ DES INGÉNIEURS CIVILS Séance supplémentaire du 26 juin 1891. M. Jousselin donne quelques détails sur le nouveau paquebot transatlantique la Touraine, qui peut transporter 1090 passagers avec une vitesse de 19 nœuds, ce qui donne une durée moyenne de 7 jours au parcours du Havre à New York; la longueur de ce grand navire est de 157 mètres; sa force motrice de 42 000 chevaux. PARIS PORT DE MER. — M. Bouquet de la Grye ex- pose la situation actuelle de son projet. Celui-ci, présenté au ministre des travaux publics en 1886, à été soumis l'an dernier à une enquête qui lui a été en très grande majorité favorable. Il se distingue de celui présenté il y à dix ans par le même auteur et de ceux qui se sont succédés depuis deux cents ans, parmi lesquels l’un:proposé en 1825, l’autre étudié par Bel- grand, en ce qu'il est concu assez économiquement pour constiluer une entreprise industrielle, Tracé : La question du trafic a été étudiée d’une facon très complète par l’ancien chef de la partie commerciale du chemin de fer de lOuest, qui a conclu à un mouve- ment de » millions de tonnes au bout de 5 ans. Quant à l'économie de transport, elle résulte des chiffres suivants : de Paris à Rouen le chemin de fer demande par tonne 4 fr. 20, la batellerie 3 fr. 47; or, grâce au perfectionnement des machines marines, le transport d’une tonne de marchandise peut être abaissé à un quart de centime par kilomètre, ce qui donne — pour une distance de 185 kilomètres, qui est celle du canal — un chiffre qui doublé, pour tenir compte des difficultés de la navigation, est de 0 fr, 70, A ce prix il faut ajouter la taxe de 3 fr, 25 par tonne de jauge qui sera payée à l'aller et au retour à la société du Canal; mais l’éco- nomie persiste, car on supprime les intermédiaires et les taxes locales de Rouen, qui coûtent également 3 francs. Devis : Les chiffres précédents montrent que l'économie de transport sera annuellement de 13 millions de francs, ce qui représente un capital de 217 millions; donc le prix du canal ne devra pas atteindre ce chiffre. Le devis est de 135 millions; ila été porté à 150 millions pour tenir compte d’éventualités contraires; 10 millions sont comptés pour la déviation du chemin de fer de l'Ouest; 33, pour les intérêts et frais d'administration; la plus grosse somme 67 000 000, sera employée aux terrassements, dont lPévalualion a été faite en doublant le prix de tra- vaux similaires exécutés à Bordeaux; la transforma- tion des ponts auxquels il faudra donner des travées mobiles est évaluée à 500 000 francs pour chaque. Tracé : Il suit le lit de la Seine, car l’économie de transport qui résulterait de la coupure des boucles du fleuve ne serait obtenue qu'au prix de travaux trop coûteux, Ce n’est que pour éviter de faire franchir plu- sieurs fois le canal par le chemin de fer de l'Ouest que l’on coupera deux boucles de la Seine, (ce qui racour- cira de 32 kilomètres la distance actuelle de Rouen à Paris). Les rayons de courbure ayant 1500 mètres, n'offrent aucun inconvénient, Quant aux écluses on est forcé, par économie de les admettre; il y en a #. Enfin, en cas de crue, la navigation ne sera pas rendue impossible, car la vitesse ‘des eaux caleulée comme maxima ne dépassera par 2 m. 30; d’un autre côté on n'a pas à craindre de voir devant Elbeuf les eaux sans courant. Largeur et profondeur : La largeur du pla- fond est de 35 mètres (une fois et demi celle du canal de Suez); elle est de #5 mètres dans les courbes, Cette argeur est suffisante, Belgrand a indiqué qu'il suffit d'un intervalle de 3 m. 40 entre les bateaux au mo- ment du croisement, Quant à la profondeur, elle est de 6 m. 20, celle du fleuve à Rouen ne dépassant pas 6 mê- tres en mortes eaux, On pourra d’ailleurs augmenter les dimensions par des dragages et les travaux d'art sont prévus pour une profondeur de 7 m, 50. Les allu- vions sortis du fleuve et déposés sur les îles ou dans les faux bras assainiront les premières et ne cau- seront pas d'inondation en comblant les seconds, puisqu'il y aura deux émissaires au lieu d’un seul. Critiques : Les critiques n’ont pas porté sur moins de seize points. M. Bouquet de la Grye les examine une à une pour les réfuter, — M, Badois considère que ce projel est dangereux pour la vallée de la Seine; que d'ailleurs le fleuve peut actuellement transporter 6 millions de tonnes et n’en transporte que 1 200 000; qu'il n'y aura pas d'économie sur les prix actuels de transport à cause du chiffre qu'atteignent les frais journaliers de grands navires; qu’enfin les relations commerciales de Paris gagneraient davantage en se développant vers une ville du nord, telle que Boulogne ou Dunkerque. — M. J. Fleury reproche au chiffre admis pour le trafic d'être hypothétique, et au prix de 0 fr. 70 indiqué pour le transport d’être inférieur au prix qui tiendrait compte du manque de fret de retour, des frais de staries et de ceux du camionnage, qui sera coûteux depuis Clichy, où s’arrêtera le canal, jusqu'au centre de Paris, Il pense aussi que la navigation sera rendue difficile par les courbes et l’étroitesse du canal; que le coupage des ponts est fâcheux pour les populations et inadmissible pour le chemin de fer. — M. Bouquet de la Grye répond aux diverses critiques. Son projet a été concu pour reprendre à Anvers le trafic de l'Est de la France, et Paris n’a pas été choisi de parti pris, mais après qu’il a reconnu en examinant des cartes de possibilité, qu'il était impossible de prendre Rouen, le Havre ou Dunkerque. Quant au rayon de courbure de 1500 mètres il est supérieur à celui (1200 mètres) qu’on vient d'adopter au Havre pour les transatlantiques, qui sont plus grands et exposés à tous les temps; d’ailleurs si ces courbes sont un inconvénient à Suez, où les navires sont également beaucoup plus grands, où le canal n’a que 22 mètres de largeur au lieu de 35, elles n'empêchent pas de réaliser un trafic de 7 millions de tonnes. La gène causée par les ponts mobiles ne sera pas considérable, ceux-ci ne s’ouvrant que treize fois par Jour et pendant quelques minutes, tandis qu'à Paris le pont de la rue de Crimée s'ouvre plus souvent et plus longtemps; pour les ponts du chemin de fer de l'Ouest on peut éviter d’en couper un seul, en élevant le pont d'Argenteuil à 22 m. 50 au- dessus du plan d’eau ; dans ce cas l'installation actuelle du chemin de fer est peu modifiée, Quant à la distance du centre de Paris à Clichy, elle est plus petite qu'à la Villette ou aux gares d'Orléans et de Lyon. Relati- vement au fret de retour on peut dire que Paris a une exportation importante d'objets lourds et encom- brants; c’est d’ailleurs parmi les industriels et les négociarrts qu'ont été souscrites les 245 000 adhésions au projet. Enlin ni la batellerie, ni les villes de Rouen et du Havre ne serontruinées, mais la France reprendra à l'étranger le mouvement commercial qu’elle a perdu. Séance du 3 juillet 1891, M. Rémaury rend compte d’un mémoire de M. Gibon relatif à différents points d'économie sociale, — M. de Coëne reprend avec de nouveaux détails une question dont il s'est occupé dans une précédente séance : l'outil- lage d2s voies de communication, ports, canaux, rivières, chemins de fer; il traite particulièrement de limportance des questions douanières et fiscales en France, en An- gleterre et en Allemagne. Les frets sont de 10 0/0. moins élevés en Angleterre qu'en France, en parti- culier parce qu’en Angleterre tous les services de ports sont réunis sous une même direction. — M. Contamin présente un travail sur les valeurs des vcoeficients de + COURRIER DE SYDNEY 559 résistance des fers et aciers. I faut, dans l'évaluation de la fatigue à laquelle les pièces constituant les machines ou les ossatures métalliques seront soumises, consi- dérer deux points : la fatigue correspondant à l'effort statique des charges et la fatigue additionnelle résul- tant de leur mouvement. Si cette fatigue résultante à une valeur maxima inférieure à la limite d’élasticité la résistance du métal ne varie pas. Des rails et pièces de ponts en service depuis 35 ans au chemin de fer du Nord, et des essieux ayant parcouru { million de kilomètres et subissant dans le sens des efforts des alternances de 1000 par minute, — mais où la fatigue moléculaire ne dépassait pas la moitié de la limito d'élasticité — ont conservé toutes leurs propriétés élas- tiques. P. JANNETTAZ, ACADEMIE ROYALE DE BELGIQUE Séances du 6 juin et du 4 juillet 1891 1° SGIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. de Ruydts lit un travail sur l'extension «de la loi de réciprocité de M. Her- mite. Ce travail de haute analyse mathématique ne peut être résumé ici, 2e SCIENCES PHYSIQUES. — M. de Heen avait établi précédemment les lois de la vaporisation des liquides dont la surface est soumise à l'influence d’un courant yazeux. IL a recherché quelle est la vitesse d’évapo- ralion dans une atmosphère calme et a démontré qu’elle est généralement indépendante de la pression, et qu’elle est proportionnelle à la tension de la vapeur, comme Dalton Favait affirmé, et ainsi que M. Laval la vérifié ; enfin, que ce sont les gaz, dont le frottement intérieur est le plus faible, qui déterminent encore la plus faible vaporisation. En opérant à la température de 40°, et en faisant varier la pression de 755 à 162 mil- limètres, il n’a trouvé qu’un accroissement de £ environ dans la quantité de liquide évaporé, l'appareil étant absolument au repos, Mais s’il communiquait à celui-ci COURRIER Au moment de vous envoyer les comptes rendus des travaux de nos Sociélés savantes, et de vous parler du mouvement scientifique en Australie, je pense que les lecteurs de la Revue liront avec quelque intérêt des dé- tails sur ce pays si nouveau, que nous connaissons si peu en France. Quelques chiffres serviront à montrer le développement étonnant de cette grande contrée dont la prise de possession par l'Angleterre remonte à 100 ans, mais dont le développement n'a réellement com- mencé qu'avec la découverte de l’or en 1851. Pour nous, elle a encore un autre intérêt : sa proximité avec la Nouvelle Calédonie, les échanges continuels entre Sydney et Nouméa, l'impulsion énorme que le voisi- nage de ce nouveau monde donne à notre colonie, font que nous devons suivre avec intérêt la croissance ra- pide de ce pays. Nous ne devons pas oublier aussi qu'avant la prise de possession anglaise les Francais ont été nombreux qui sont venus explorer ces régions lointaines. On voit à Botany Bay, près de Sydney, et à la place où les marins de la Boussole et de l’Astrolade ont été vus pour la dernière fois, le monument élevé en 4825 à la mémoire de La Pérouse et de ses hommes par de Bougainville et Ducampier qui commandaient la Thétis et l’'Espérance. C’est un Francais, Guillaume Le Testut, qui en 1540 a figuré pour la première fois la côte nord de l’Austra- lie qu'il venait d'explorer. Après une période de dé- couvertes faites par les Hollandais et les Espagnols sur- tout, c’est en 1688 seulement quele capitaine Dampier s'arrête à Ræbuck Bay. Il est le premier Anglais qui foule le sol australien et il est le premier qui signale le Kangouro. En 1770, le capitaine Cook, à bord de l’Endeavowr, parti pour étudier le passage de Vénus, prend possession de la contrée au nom de l'Angleterre. un léger mouvement de rotation, afin de mettre la surface d’évaporation successivement en contact avec de nouvelles couches de gaz ambiant, l'accroissement dans la quantité de liquide évaporé tombait de 25 à 6 0/0 en moyenne. La loi de de Heen est très bien véri- fiée par les résultats énumérés ci-dessous, La première ligne exprime les tensions en millimètres de mercure ; la seconde, les quantités d’eau évaporée : Quant à l'influence de la nature du gaz, elle est ac- cusée par les nombres suivants. Toutes circonstances égales, et la vitesse d’évaporation dans l'air étant prise pour unité, elle est dans le gaz d'éclairage de 1,4, dans l'hydrogène de 2,26. 3° SCIENCES NATURELLES, — M, P. Van Beneden, l’'éminent zoologiste qui recoit de tous les points du globe des communications sur tout ce qui touche aux baleines, a lu une note sur deux crustacés parasites, trouvés sur les célacés, l’un dans la baie de Dakar, l’autre près des Acores. La forme et les allures de ces crustacés étaient tout à ftit singulières ; leur sac ova- rien permit de reconnaitre que c'étaient des Lermio- podes. M. P. Van Beneden, estimant que les squales sont des animaux essentiellement pélagiques, qu’on ne ren- contre qu'accidentellement dans les baies, à été fort surpris de trouver sur eux des crustacés parasites com plètement recouverts d'animaux mous cellulaires qu'on ne rencontre que sur les côtes. — Une discussion inté- ressante, à laquelle ont pris part MM. E. Dupont, E. Van Beneden et l'abbé Renard, s’est élevée sur cette question incidente de lhabitat des squales, Ces savants sont tous d'avis qu'un grand nombre de squales sont des animaux côtiers, ce qui expliquerait la pré- sence de nombreux animaux monocellulaires sur les crustacés décrits par M. P. Van Beneden, F.F. Membre de l'Académie. DE SYDNEY En 1772, le capitaine Marion avec le Mascurin el le Castres, deux navires français, explore la Tasmanie. Enfin en 1788, le Gouverneur Philipp s'arrête à Bo- tany Bay, pour y déposer les convicts qu'il amène d'Angleterre; mais, ne trouvant pas l'endroit favorable, il quitte Botany le jour où La Pérouse y arrive lui- même avec la Boussole et l'Astrolade et le Gouverneur Philipp vient à quelques kilomètres au nord, dans Port Jackson, fonder Sydney. La Nouvelle-Galles du Sud devient une colonie pénitentiaire. Elle continua d’être un lieu de transportation jusqu’en 1840. Actuellement les colonies anglaises de l'Australasie comprennent: {° le continent de l’Australre qui se divise encinqgouvernements;2°l’ile de Tasmanie, qui en forme un autre: 2° enfin les îles situées au sud qui constituent la septième colonie de la Nouvelle-Zélande. Les cinq gouvernements de l'Australie sont "à l’ouest, l'Australie de l'Ouest, dont la capitale est Perth, et qui s'étend sur toute la côte ouest du nord au sud. L’Aus- tralie du Sud, capitale Adélaïde, qui va du nord au sud, à l'est de la précédente colonie, Victoria avec Melbourne pour capitale occupe le Sud-Est, Au nord de Victoria la Nouvelle-Galles du Sud, capitale Sydney, et plus au nord encore, la grande et superbe colonie de Queensland qui va jusqu'au golfe de Carpentarie : la capitale est Brisbane. La Nouvelle-Galles du Sud, la plus ancienne colonie du groupe, date de janvier 1788. Elle possède un gou- vernement responsable depuis 1855. La Tasmanie, autrefois Terre de Van Diemen, fut colonisée par la Nouvelle-Galles du Sud, pour servir de dépôt pénitientiaire et resta sous la dépendance de cette colonie jusqu’en 1825, époque à laquelle la Tasmanie fut déclarée colonie indépendante, Elle 60 COURRIER DE SYDNEY possède un gouvernement responsable depuis 1855. Jusqu'en 1851, Victoria fut sous la dépendance de la Nouvelle-Galles du Sud et n’a un gouvernement res- ponsable que depuis 1855, J “ L'Australie de l'Ouest, établie en 1825, fut la 4° colo. nie du groupe; mais ce n'est qu'en 1890 qu'elle a été dotée d’un gouvernement responsable, En 1840 la Nouvelle-Zélande devint une colonie an- glaise; mais les habitants du pays n’élaient pas aussi pacitiques que ceux de l'Australie et pendant près de 25 ans, ce fut une guerre continuelle entre les blancs et les indigènes, En 1875 le roi des Maoris fit sa sou- mission à l'Angleterre. Depuis 1853 la colonie à un vouvernement responsable. - Queensland est un enfant de la Nouvelle-Galles du Sud; il en fut séparé en 1859 et obtint un gouverne- ment responsable, Toutes ces colonies s’administrent elles-mêmes; la mêre patrie y a bien peu d'influence; elle entretient une escadre, mais déjà plusieurs colonies ont un com- mencement d’escadre coloniale. Un seul fonctionnaire est payé par elle, c’est le directeur de la Monnaie. Les souverneurs de chaque colonie sont, en dehors de cela, Les seuls fonctionnaires nommés par la Reine; mais les traitements sont payés parles colonies. Letemps n'est probablement pas éloigné où les Etats-Unis de PAus- fralasie se sépareront de l'Angleterre, IL y a déjà eu un essai pour l'établissement de ces Etats-Unis en 1881 ; mais c’est cette année 1891, qu'une Convention réunie à Sydney à posé les bases d'une nouvelle constitution ; l'Angleterre ne perd pas complètement encore ses co= lonies:; mais le seul lien qui les rattacherait à elle serait la nomination par la Reine d’un gouverneur général payé par les Colonies, gouverneur sans pouvoir, puis- que le ministère fédéral serait responsable devant le Parlement. Seulement il est peu probable que la fédération se fasse actuellement, les Colonies, les unes protection- nistes, les autres libre-échangistes, ont des intérêts trop différents pour s'entendre en ce moment. Le développement de la population de PAustralasie de- puis le début des colonies est étonnant par sa rapidité : En 1788 il y avait une population de..... 1 030 1801... 6 508 1821 35 610 1841 251 000 1861 1 256 432 1881 2 822 046 1888 3 692 803 l'augmentation énorme de 18#1 à 1861 est due à lim- migration causée par la découverte de l'or en 1851. Voici l'augmentation successive de la population dans les principales villes. 1841 1861 1881 1891 Melbourne mere 4 419 139 916 222 947 480 000 SUANEV Eee EP ere et 10 815 93 686 224 211 397 000 Adélaïde 6 107 18 303 403 864 150 000 Brisbane. nsc cevee 829 GO051 31109 91 000 Il y a,en plus, environ 200 000 indigènes noirs qui, en uénéral, n’ont pasle droitde venir dans les grandes villes. Presque tout le mouvement scientifique de l'Aus- tralie se produit à la Société Royale de Sydney; après des vacances de quatre mois, elle vient de reprendre le cours de ses séancés et de nommer son bureau pour 1891-92. Le nouveau président est M. Russel, l’astro- nome distingué, directeur de l’observatoire de Sydney. Dans son adresse, le président sortant, M. Leibius, directeur de la Monnaie, fait une revue des événements scientifiques intéressant l'Australie pendant l’année qui vient de s'écouler. Il parle d'abord de l'expédition Lindsay, partie avec quatorze personnes, il y a peu de temps, d'Adélaïde, sur la côte sud, pour aller explorer le Continent australien dont l'intérieur est presque totalement inconnu. C’est ensuite le projet d'expédition au pôle sud, sous les anspices de la Suède et de l’Aus- tralie et sous la direction du baron Nordenskiold, En 1886, le baron de Muller, le célèbre botaniste, Prési- dent de la Société de Géographie de Melbourne, à attiré lattention sur les bénéfices que l'Australie reti- rerait d’une expédition antarctique. En 1887, l'Angle- terre rejeta une proposition du Gouvernement de Victoria qui lui demandait de donner 125 000 franes pour cette expédition, à la condition que le gouver- nement de Victoria fournit une somme égale pour une entreprise qui devait donner une certaine impulsion au commerce des colonies australiennes et à la science. Le gouvernement impérial de Londres refusa, parce que la première raison ne justifiait pas un subside du gouvernement impérial et que 250 000 francs, c'était une bien petite somme pour faire une expédition scien- tifique sérieuse. Les choses en étaient là lorsque, le 4 mars 1890, le Consul de Suède a été chargé de pro- poser de la part du baron Oscar Dickson de Gothenburg, une expédition suédo-australienne antaretique, sous la direction de Nordenskiold. 11 demandait que l'Australie donnât 150 000 francs, c'est-à-dire la moitié de la somme nécessaire, le baron Dickson payant l’autre moitié, Cette proposition a été accueillie avec enthou- siasme; mais, malgré cela, jusqu'à ce jour, la sous- cription publique qui devait couvrir les 150 000 francs ne s'élève même pas à 25 000 francs. En ce moment, le Dr Wild, ancien membre de l'expédition du Chal- lenger, fait des conférences pour montrer les résultats avantageux que l’expédition aurait pour l'Australie et essaie de récolter l'argent nécessaire; on espère, en outre, que les gouvernants donneront des subsides, mais l’expédition qui devait quitter la Suède en juil- let 1891, Melbourne en septembre, et la terre la plus près du pôle Sud, l’île Macquarie, en octobre, ne pourra pas partir cette année, l'été antarctique s'étendant d’oc- tobre à février. Le ministre des Mines et de l'Agriculture, M. Sydney Smith, vient de fonder une direction de l'Agriculture à la tète de laquelle M. Anderson, le nouveau directeur, vient de placer un état-major scientifique composé d’un chimiste, d’un entomologiste, d’un expert en pathologie végétale, enfin d’un inspecteur de lagri- culture, ancien élève du laboratoire des fermentations dirigé par M. Duclaux à Paris. Avec ces hommes com- pétents à sa tête,on espère que l’agriculture, qui est encore dans son enfance en ce pays pastoral, prendra un rapide développement, étant données la richesse du sol et l’excellence du climat. Auprès du même mi- nistère vient d'être installée une direction des forêts, chargée d'empêcher la destruction d’une des grandes richesses de ce pays. Adrien Lot, Directeur de Pasteur Pustitute of Australia Errata concernant l'article de M, E. GLEY, dans la Revue du 30 juillet 1891. P, 469, note 2, ligne 3, au lieu de : un rapport, lisez: ses rapports. P. 469, note 2, ligne 5, après : aussi, ajoutez : P, 470, note 3, au lieu de : /886, lisez : 1866. P, 474, 6° alinéa, ligne 2, au lieu de : transfuse, lisez : centrifuge. P. 475, dre colonne, ligne lisez : centrifugé. P. 475, 2° colonne, ligne raissant, lisez : n'apparait. P. 415, 2° colonne, ligne lisez : pouvant. Cyr. 2, au lieu de : /ransfusé, 14, au lieu de : »’appa- 16, au lieu de : pouvait, Le Directeur- Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 2° ANNÉE Noa 15 SEPTEMBRE 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER MÉCANISME DE L'ACTION DES ANESTHÉSIQUES Les anesthésiques généraux entravent, sus- pendent ou suppriment une fonction fondamen- tale, dont le libre exercice est indispensable à l'entretien des mouvements moléculaires intimes, qui caractérisent toute substance vivante, quelle que soit d’ailleurs sa forme ou son origine. Si l’on place, comme le fait Claude Bernard, des graines sur du coton humide, sous une cloche renfermant des vapeurs d’éther ou de chloroforme, à une température égale à celle qui favoriserait la germination dans les conditions ordinaires, elles resteront à l’étal de vie latente tant qu’elles seront en présence de l’agent anesthésique; mais dès qu’elles auront été soustraites à son influence pa- ralysante les phénomènes de germinalion com- menceront et suivront leur marche régulière. Pour qu'une graine germe normalement il lui faut : 1° de l’eau, 2° de l'oxygène, 3° une lempérature conve- nable. On peut s'assurer par l'expérience que ce n'est pas l’action de la chaleur qui est modifiée, ni celle de l'oxygène qui est suspendue par la présence de l’ageut anesthésique, le phénomène de la respi- ralion continuant au sein du protoplasma alors même qu'il est déjà anesthésié, On est en droit de se demander alors si ce n’est pas l'absorption et la fixation de l'eau qui est en cause. L'imbibition ou mieux l'hydratation est la condition liale de la reprise d’activité des phénomènes vitaux dans la graine qui va germer et la res- piration ne se ranime que lorsqu'elle a élé sa- tisfaite. Le rôle de l'eau est donc dans la graine plus important que celui de l'oxygène; on pourrait en dire autant d’ailleurs pour tousles êtres vivants. REVUE GÉNÉRALE, 1891. ini- Qu'il s'agisse d’une graine ou d’une spore micros- copique, l'oxygène et la chaleur seront impuissants à la faire germer ou développer sans le concours de l'eau et la dessiccalion produira le même effet que la vapeur anesthésique. Seulement, étant anesthésiée, elle pourra rester inerte mème en présence de l’eau, dans l’état de vie latente. On a pu conserver ainsi pendant longtemps des végé- taux inférieurs dans l’eau légèrement chlorofor- mée : ils ne reprenaient leur vitalité que lorsque le chloroforme s'était complètement éliminé du liquide par évaporalion. L'activité des nombreux ferments figurés peut être de mème suspendue par les anesthésiques généraux; sous l'influence de l’éther, du chloroforme, de l'alcool et d’autres composés chimiques analogues, les globules de la levüre de bière, par exemple, lombent dans une sorte de vie latente, même en présence d’une surabondance de matière fermentescible ou nutri- tive. C’est pour cette raison que les anesthésiques généraux sont souvent considérés comme des anti- septiques. L'alcool ordinaire, comme le chloroforme est un antiseptique : il est aussi un anesthésique puissant quand il est introduit dans l'organisme en quantité suflisante et le mécanisme de l'intoxi- cation est dans les deux cas absolument compa- rable. Beaucoup de composés organiques sont doués de cette action stupéfiante sur les êtres vivants, quel que soit le degré qu’ils occupent dans la série vé- gétale ou animale et c’est à ces poisons que l’on doit réserver exclusivement le nom d’anesthésiques yénéraur. 17 D' R. DUBOIS. — MÉCANISME DE L'ACTION DES ANESTHÉSIQUES Il Bien qu'ils soient loin d’appartenirlous au même groupe chimique et qu'ils soient au contraire re- présentés par des types très différents au point de vue de leur composition et de leur structure molé- culaire (alcools, éthers simples où composés, aldé- hydes, composés chlorés de carbures d'hydrogène, carbures d'hydrogène, elc.), les anesthésiques généraux n'en possèdent pas moins un ensem- ble de propriétés organoleptiques et physiques communes qui leur donnent comme un air de famille. Ils sont incolores et odorants, possèdent une saveur piquante et produisent lorsqu'on les applique sur les muqueuses une sensation de cha- leur plus ou moins brûlante. Ce sont des liquides mobiles, volatils, doués en général d’une Lension de vapeur d'autant plus grande et d'une solubilité dans l’eau d'autant moindre qu'ils sont plus anes- thésiques. Ils sont dysosmotiques, c'est-à-dire qu'ils traversent difficilement les membranes orga- niques ; leur chaleur spécifique est très inférieure à celle de l’eau, et généralement d'autant moins élevée qu'ils sont plus actifs. Mais aucune de leurs propriétés n'est aussi caractéristique que l’action qu'ils exercent, tous sans distinction, outre leur pouvoir anesthésique, sur le protoplasma animal ou végétal. Si l'on suspend dans un vase bien bouche, au-dessus de ces liquides volatils, un fragment d'un parenchyme végétal dense, c’est-à-dire pauvre en lacunes aérifères eten vaisseaux aériens, comme celui d’une feuille de cactus, on ne tardera pas à voir sourdre à sa surface de nombreuses gouttes de rosée qui iront en grossissant de plus en plus jusqu'à ce qu'elles tombent au fond du liquide oc- cupant la partie inférieure du récipient. L'expérience peut être rendue très saisissante en plaçant sous une cioche fortement suiffée el bien adhérente à son support un pied d’'Æchéveria (fig. 4), Fig. 4. — Etat des feuilles de l’Echéveria avant l'action des vapeurs anesthésiques. petite Crassulacée commune dans nos Jardins, à côté d’une capsule remplie d'éther. Au bout d’une heure, quelquefois plus tôt, si la température ambiante est voisine de 20°, les feuilles de la petite plante se montrent toutes chargées de grosses gouttes de rosée; leur couleur est devenue plus foncée et leurs feuilles dressées au début de l'expérience, ont pris l'attitude penchée qu’affec- tent certaines plantes sommeillantes pendant la nuit (fig. 2). Si on les pèse après les avoir essuyées, Fig. 2. — Feuilles de l'Echéveria après l'action de la vapeur anesthésique; elles sont abaissées et couvertes de grosses goutelettes d'eau. on constate que leur poids a notablement diminué et qu'une petite quantité d’éther est venue prendre la place de la masse d’eau chassée au travers de l’épiderme des feuilles, malgré la résistance assez forte offerte par celui-ci. Lorsqu’au lieu de végétaux denses on emploie des végétaux riches en trachées ou en lacunes aé- riennes, le phénomène peut passer inaperçu, parce que dans ce cas l’eau chassée du protoplasma des cellules ne s'écoule pas à l’extérieur : la teinte particulière que prennent les parties vertes rap- pelle alors celle des feuilles gelées et indique seule parfois le changement qui s’est opéré dans leur profondeur *. Ces vapeurs anesthésiques provoquent d’ailleurs des modifications intimes des tissus tout à fait comparables à celles qui résultent de l’action de la gelée. Il suffit pour s’en assurer de placer dans un vase bien bouché des oranges au-dessus d’une couche d’éther ou de chloroforme. Les vapeurs anesthésiques traverseront l’épicarpe et l’endo- carpe pour aller se substituer à l'eau du proto- plasma contenue dans les poils charnus de l'endo- carpe. Cette eau devenue libre entraine avec elle divers produits immédiats, entre autres l’acide citrique et va se déverser dans tous les interstices en donnant à l'orange l'apparence complète d’un fruit dégelé. On pourrait multiplier les exemples qui démon- trent que lesanesthésiques agissent comme la con- gélation sur les tissus en les déshydratant. 1 1] importe de ne pas confondre les phénomènes de déshydratation dont nous parlons avec la transpiration végé- tale qui est intimement liée à la fonction respiratoire, D' R. DUBOIS. — MÉCANISME DE L'ACTION DES ANESTHÉSIQUES 63 On sait que la congélalion est souvent utilisée pour produire chez l'homme l’anesthésie localisée. Les effets physiologiques du froid et des anes- thésiques sont de même ordre, puisqu'ils permet- tent d'obtenir également l’antisepsie temporaire, la vie latente, l’anesthésie, et qu'ils consistent princi- palement dans une déshydratation des tissus. La comparaison peut être poussée plus loin en- core. Tout le monde sait que lorsqu'on ébranle mé- caniquement un pied desensitive (Mémosapudica) les pétioless'abaissentet les foliolesse ferment. Ceteffet ne peut se produire qu’à la condition que les grosses cellules parenchymateuses qui forment les renfle- ments placés à la basedes folioles et des pélioles se flétrissent et ce phénomène ne peut s'effectuer que par le déplacement de l’eau qui gorge leur proto- plasma. Or le froid et les anesthésiques produisent le même résultat. On a dit que les vapeurs anes- thésiques faisaient perdre à la sensitive sa sensi- bilité. C'est là une interprétation erronée. Les mouvements de la sensilive provoqués par le choc ne sont pas dus à quelque chose de comparable à la sensibilité neurale, mais bien à un phénomène ayant les plus grandes analogies avec ceux de l'irri- tabilité musculaire ou dela contractilité. L’abaisse- ment du pétiole produit par l'influence du choc, du froid ou des vapeurs aneslhésiques est un phéno- mène actif résultant de la rétraction des cellules parenchymateuses qui perdent momentanément l'eau de constitution de leur protoplasma. Des ex- périences que j'ai faites dans le courant de l’au- tomne dernier sur les fruits du emordica elaterium, petite Cucurbitacée commune dans le Midi de la France, prouvent que l’on peut provoquer chez certains végétaux d’autres phénomènes manifes- tement aclifs par l'aclion de l’ébranlement, du froid ou des anesthésiques. Lorsque le fruit du Hemor- dica elaterium approche de la maturité complète, un léger coup frappé à sa surface suffit pour mettre en jeu l’élasticité de son enveloppe qui projette au loin, en se contractant, une fusée liquide renfer- mant les semences. Mais on peut cueillir facilement ces fruits, un peu avant le moment de la déhiscence naturelle et les conserver pendant plusieurs jours à l'air libre sans que celle-ci se produise spontanément. Au contraire si on les introduit dans un flacon bien bouché, renfermant des fragments de papier imbibé de chloroforme, d’éther ou de benzine, on pro- voque très rapidement la déhiscence. L’introduc- Lion de ces mêmes fruits à l'intérieur d'un tube plongé dans un mélange réfrigérant donnera lieu au même phénomène. Or, si l’on pratique une coupe transversale sur ces fruils, on constate que parmi les trois couches qui composent leur enveloppe, la couche médiane présente un aspect différent selon que la déhiscence ne s’est pas produite ou bien qu'elle a eu lieu. Dans le premier cas la couche moyenne, composée de grandes cellules gorgées de sues, est restée transparente; tandis que dans le second ces cellules sont remplacées par des la- cunes aérifères qui donnent à loute l'épaisseur de cette couche un aspect blane mat caractéristique. On doit donc admettre dans l’exemple que nous citons qu'il y a encore eu mouvement provoqué par la déshydratation d'un protoplasma sous l'influence d'un agent anesthesique. Mais ilne faudrait pas penser que ces phéno- mènes de déshydratation par les anesthésiques puissent être mis en évidence seulement chez les végétaux. Si, au lieu du tissu parenchymateux d'un cactus, on suspend au-dessus d'une couche d’éther ou de tout autre anesthésique, dans un flacon bien bouché, un fragment de muscle, les vapeurs de ce liquide pénètreront le protoplasma et s’y fixeront en éliminant ici encore une certaine quantité d’eau à l’état liquide. Il en sera de même pour beaucoup d’autres lissus animaux. Lorsque l’on substitue à ces fragments de tissus des œufs frais, l'aflinité des anesthésiques pour les matières colloïdales qu'ils renferment pourra être assez grande pour que l’eau soit chassée de l'œuf par une véritable transsudation au travers de la coquille, qui, dans certain cas, secouvre de gout- telettes, comme les feuilles d’Æchéveria. Cette der- nière expérience donne lieu à une remarque parli- culièrement intéressante, à savoir que la majeure partie des vapeurs anesthésiques traverse le blanc ou l'albumine de l'œuf pour aller se condenser dans le jaune ow vitellus, comme ferait une substance colorante ayant plus d'affinité pour le noyau de la cellule que pour son protoplasma. Or le vitellus de l'œuf se rapproche davantage par sa composition chimique du tissu nerveux que l’albumine, et il est possible que l'élection particulière des anesthésiques généraux pour le système nerveux chez l'animal vivant ne reconnaisse pas d'autre cause. Cette élection n’est pas absolue et l’action des anesthésiques généraux sur ces manifestations physiologiques des tissus animaux vivants, quelle que soit d'ailleurs leur na- ture, a été mise hors de doute. Les vapeurs d’éther, de chloroforme suspendent les mouvements rythmiques de la pointe du muscle cardiaque de la tortue, des cils vibratils des cellules épithéliales, des spermatozoïdes; elles arrêtent temporairement les mouvements des globules blancs du sang, des amæbes, etc. Mais lorqu’il s’agit de démontrer chez l'animal vivant et surtout chez l’homme que leur action est due à un véritable phénomène de déshydratation 04 D' R. DUBOIS. — MÉCANISME DE L'ACTION DES ANESTHÉSIQUES protoplasmique, on éprouve de sérieuses difficul- tés. On sait bien que la dessiccation entraine chez beaucoup d'animaux, comme chez un grand nombre de végétaux pendant l’hibernalion par exemple, l'état de vie latente : les anguillules du blé niellé, les rotifères sont des types d'animaux réviviscents. J’ajouterai même que des expériences récentes m'ont démontré que l’on pouvait également provoquer par la sécheresse l’état de vie latente sur des animaux plus élevés en organisation. Claude Bernard d’ailleurs avait déjà montré que si l’on plonge la patte d’une grenouille dans une solution de sel marin concentrée, on lui fait perdre assez rapidement la sensibilité en enlevant au sangune certaine quantité d’eau par exosmose. Dans ces conditions, l’action déshydratante est assez énergique pourque les milieux réfringents de l'œil perdent leur transparence par la production d’une opacité cristallinienne, c’est-à-dire d'une véritable cataracte. C’est aussi par l'observation de certains phénomènes qui prennent naissance du côté des milieux optiques de l'œil que l’on peut constater la diffusion de l’action déshydratante des anesthé- siques généraux sur les animaux supérieurs, J'ai eu souvent l’occasion d'observer. dans les anesthésies profondesel prolongées chez l’homme et chez le chien, que la cornée perdait une partie de son poli. En examinant ces cornées à l’aide d'un disque kératoscopique muni d'une loupe de Brücke, je n'ai pas eu de peine à reconnaitre que cette modification morphologique, qui disparait au réveil, était due à l’affaissement irrégulier du tissu cornéen d’où il résulte un véritable asti- gmatisme irrégulier. Lorsque j’annonçai ce fait, qui cependant avait été vérifié par M. Javal et d’autres observateurs. on parut quelque peu surpris que le chloroforme püt agir sur les milieux de l'œil et principalement sur la cornée, parce qu'il fallait admettre qu'une certaine quantité de ce liquide pouvait s'accumu- ler dans l'humeur £queuse. La réalité de ce fait est mise hors de doute aujourd’hui par la consta- tation que j'ai eu l'occasion de faire récemment en poursuivant l'étude de l’action physiologique des mélanges titrés des composés chlorés de l’éthane. Si l’on fait pénétrer dans l'organisme d'un chien par inhalation du chlorure d’éthylène ou huile des Hollandais, de facon à déterminer une anes- thésie de trois quarts d'heure environ, on trouve le lendemain les deux cornées de l’animal opaci- fiées. Cette opacité est le résultat d’un véritable œ- dème cornéen produit par la pénétration de l'hu- meur aqueuse dans les lames cornéennes. Si l’on s'était borné à cette simple conslatation, on au- rait pu en conclure que, loin de déshydrater la cornée, le chlorure d'éthylène avait la faculté de faciliter son imbibition par l'humeur aqueuse. En réalité le mécanisme de cette lésion est plus com- plexe. Chez le chien les lames cornénnes ne sont protégées contre l’action opacifiante du liquide de la chambre antérieure de l'œil que par une simple couche de cellules épithéliales. La couche élastique anhysle de la membrane de Descemet qui la ren- force chez l’homme, le chat et d'autres animaux, fail défaut chez le chien. Quand le chlorure d’éthy- lène pénètre dans lachambre antérieure, aprèsavoir été introduit dans la circulation par inhalation ou par injection hypodermique, ou bien parce qu'il y aura été injecté directement.les cellules dela couche épithéliale se rétractent en laissant entre elles des espaces par où pénètre l'humeur aqueuse. Celle-ci ne gonfle d'ailleurs les fibres des lames cornéen- nes que lorsque le liquide de la chambre anté- rieure a été dépouillé, ainsi que l’animal, de l'a- gent anesthésique. On peut très facilement se rendre compte du mécanisme de cette lésion en opérant à vitro sur une cornée détachée de l'œil d’un chien. Lorsque cette couche épithéliale est doublée d'une membrane anhyste élastique, on peut pro- voquer alors, chez le chat par exemple, des anes- thésies prolongées par le chlorure d'éthylène sans voir survenir d'opacité cornéenne. C'est pour la même raison que l’on n’a pas observé d'accidents du côté de l'œil chez l'homme dans les anesthésies pratiquées avec la liqueur des Hollandais. L'alté- ralion primilive résulte donc en définitive d’une déshydralation des éléments épithéliaux de la face interne de la cornée par un anesthésique général. Les hypersécrélions salivaires et stomacales qui accompagnent le début de l’anesthésie, la soif, la sécheresse de la bouche que l'ivresse anesthésique laisse après elle, comme l'ivresse alcoolique, sont autant de motifs pour penser que d'autres tissus subissent la même altération que les éléments ana- tomiques de la cornée. D'autre part, le phénomène de déshydratation du protoplasme entraine avec lui des modifications d'un autre ordre. En même temps que l’eau, divers principes immédiats s’éliminent et particu- lièrement des cristalloïdes, qui ne préexistent pas à l’état libre dans le protoplasme et résultent de dédoublements provoqués par la déshydratation. C'est par un effet de ce genre que l’hémoglobine sous l'influence del’éther ou du chloroforme aban-. donne le globule rouge dans lequel elle était à l'état de combinaison intime avec les principes colloïdaux, pour aller cristalliser à l’état de liberté dans un milieu liquide, où cependant elle n’est pas soluble. Il n'estpas sans intérêt de faire remarquer D' R. DUBOIS. — MÉCANISME DE L'ACTION DES ANESTHÉSIQUES 565 que dans ce cas encore le froid peut produire les mêmes effets que les anesthésiques généraux. Ces phénomènes, comme d’ailleurs tous ceux qui se passent au sein des protoplasmes appar- tiennent à la mécanique vitale ou biologique, c'est-à- dire à la physiologie et ne sont explicables ni par les lois ordinaires de la chimie, ni par celles de la physique. On ne devra done pas les considérer comme des phénomènes physico-chimiques, mais bien comme actes physiologiques. III Mécanisme de l'anesthésie générale dans un organisme différenciée. — Au fur et à mesure que le jeu des fonctions se perfectionne, le protoplasme ou sar- code se différencie et les éléments anatomiques qui résultent de cette différenciation prennent une constitution particulière en rapport avec le rôle spécial qui leur est assigné par la loi de division du travail ou du perfectionnement physiologique. Mais, à côté des propriétés spéciales à l'élément différencié, subsistent les propriétés générales qui caractérisent toute substance vivante : la fibre nerveuse ne se contracte pas comme le fait la fibre musculaire; mais toutes deux respirent et se nourii sent. Or, on conçoit aisément que si les fonctions générales sont entravées ou supprimées, les fonctions spéciales seront atteintes en même temps. On à vu comment les anesthésiques généraux arrêtaient le fonctionnement de la substance vi- vante des êtres les plus divers. Nous allons exa- miner maintenant commentilsse comportent dans un organisme différencié. Tous les anesthésiques généraux introduits d’une manière convenable dans l'organisme humain y produisent un ensemble de modifications qui, par leur marche et par leur nature, présentent le ta- bleau complet de l'ivresse alcoolique, qui peut servir de type dans ce genre d'intoxication. Leur activité est variable avec leurs propriétés géné- rales qui sont plus ou moins accentuées; mais on peut dire que tous donnent la même #ote fonda- mentale. Ils peuvent même dans certains cas se com- porter les uns vis-à-vis des autres comme de véri- tables succédanés. Si l’on prive brusquement un alcoolique de son poison habituel, on voit survenir des accidents dont l’ensemble constitue ce que l’on a appelé le delirium tremens. Ces accidents entière- ment différents, je dirai même absolument oppo- sés à ceux de l'alcoolisme aigu, disparaissent rapi- dement quand on rend à l'organisme sa ration de poison ordinaire. Mais on peut obtenir le même résultat en substituant à l'alcool toute autre liqueur enivrante, ou mieux encore, si l’on veut agir vite, un vérilable anesthésique, tel que l’éther ou le chloroforme. D'autre part les sujets mithridatés, c’est-à-dire habitués à supporter des doses consi- dérables d'alcool, exigent pour être endormis des quantités beaucoup plus fortes de chloroforme ou d'éther. On pourrait, en étudiant attentivement ces effets mixtes, dresser pour les anesthésiques géné- raux, comme pour les autres poisons d’ailleurs, une table de ce que j'ai appelé les équivalents toxiques. L'emploi d’un mélange titré de chloroforme et d'air à 8 ou 10 % ! respiré d’une manière con- tinue permet de suivre facilement les diverses phases de l'ivresse anesthésique. Il n'en sera pas de même si l'on ne respecte pas celle condition fondamentale du déterminisme expérimental. J'ai montré (loc. cit.) comment la marche de l'empoi- sonnement chloroformique pouvait varier d’une seconde à l’autre avec le titre du mélange et c’est ce qui explique pourquoi, avant Paul Bert, les expérimentateurs qui s'étaient placés dans des con- ditions défavorables et forcément variables n'ont pu obtenir de résultats rigoureusement compa- rables. Dans l’anesthésie chloroformique continue l’acti- vité des phénomènes de thermogénèse diminue de plus en plus et le corps tout entier se refroidit progressivement, comme dans le sommeil des animaux hibernants. Dans certaines anesthésies prolongées j'ai vu la température centrale du chien s'abaisser de 38° centigrades à 28° et l’animal revenir cependant à la vie malgré cel énorme refroidissement. En même temps montre que l’activité de la nutrition est ralentie ; les échanges respiratoires sont moins actifs et le sang artériel, riche en oxygène au début, tend à se charger de plus en plus d’acide carbonique, tandis que ce déchet de la nutrition diminue dans le sang veineux qui traverse le poumon et par conséquent dans l'air expiré dans un temps donné. Dans le système vasculaire la pression s’abaisse au point de n’atteindre plus dans le sommeil confirmé que le tiers de sa valeur primitive. Tous les troubles observés ne peuvent s'expli- quer par l'empoisonnement exclusif du système nerveux bien qu'il soit primitivement atteint el avec une violence qui parait être en rapport avec son importance physiologique. Si les désordres nutritifs sont en partie le résultat des troubles nerveux que provoque l'agent anesthésique, à son tour l'organisme entier, dont la nutrition est entravée, réagira sur le système nerveux et le l'expérience RS ———— 1 V. Revue générale des Sciences, du 15 juin 1891, t. IT, page 559. 566 D' R. DUBOIS. — MÉCANISME DE L'ACTION DES ANESTHÉSIQUES cerveau restera inerte, sans idées, sans conscience ni volonté tant qu'il ne recevra pas sous une pres- sion normale le sang qui entrelient dans l’état de veille son aclivilé. Par son aclion propre sur tous les Lissus, par son aclivité parliculière vis-à-vis du système nerveux et par tous les troubles secondaires qui en résultent, on voit sous l'influence de l’anesthé- sique général succomber successivement toutes les manifestalions physiologiques depuis les plus élevées jusqu'aux plus humbles. IV Le premier effet de l'ivresse chloroformique sur nos manifestalions cérébrales est de faire tomber le voile qui cache notre véritable personnalité, d’où il semble résulter que les facultés supérieures sont ordinairement employées à dissimuler le fond de la pensée ou la nature véritable du caractère. Celui-ci est-il gai, on le verra rire ou chanter dès le début de l’anesthésie. Cet autre est-il violent, il menacera, s'agitera, frappera. Un peu plus tard les idées commencent à se dis- socier : le cerveau peut encore à ce moment com- prendre un ordre et l’exécuter, mais bientôt à celte phase succède celle des erreurs de jugement el c’est la fin de l'intelligence. Dans cette période nouvelle les sensations sont encore perçues, l’homme sent, il voit, il entend, mais il interprète mal ce qu'il ressent. Passe-t-on par exemple une éponge mouillée sur la peau. il croit que l'opération commence, pousse des cris de douleur où cherche à se défendre. Certains obser- valeurs ont cru à tort qu'il s'agissait dans ce cas d’une véritable hypéranesthésie alors qu'il n‘y a en réalité qu'une illusion. C’est dans cette période surtout, si l’on veut éviter l'agitation du patient, qu'il importe de le laisser dans le repos le plus absolu. Aux illusions viennent s'ajouter de véri- tables hallucinations ; on entendra le son des cloches, par exemple; à ce moment la mémoire veille encore, car le souvenir de celte sensation peut persisier même après un long sommeil. Le désordre dans les idées va en s’accenluant de plus en plus el se traduit par celui de la parole, des gestes et des mouvements; puis de désordonnés qu'ils étaient les mouvements deviennent incoor- donnés : c’est après le cerveau, le cervelet qui est atteint, puis le bulbe. Les modifications qui se produisent du côté de ce centre pour êlre moins profondes, n'en sont pas moins évidentes; le rythme cardiaque et respiratoire est modifié, mais la respiration continue automatique et régulière, si aucun réflexe ne vient troubler son jeu inconscient. Le rôle de l’encéphale est maintenant effacé : c'est la nuil qui tombe et le sommeil qui com- mence el si le patient peut encore suivre machi- nalement des yeux une lumière que l’on promène. la conscience et la volonté ne participent plus à cet acte qui parait être purement réflexe, Le cerveau cessant d'ordonner, les membres restent dans l’inaction, tant qu'une excilation extérieure ne vient pas frapper les terminaisons sensitives. A ce moment la moelle veille encore et si la sen- sibilité à la douleur est depuis longtemps déjà atté- nuée, parce qu'elle a son siège dans l'encéphale, Va sen- sibilité tactile est au contraire conservée. Sa per- sistance est mise en évidence par les mouvements réflexes que l’on peut encore provoquer par les excilalions périphériques. Il est cerlain que dans celte période les pro- priétés physiologiques des racines postérieures el antérieures de la moelle, la conductibilité des nerfs et la sensibilité des terminaisons tactiles ne sont pas atleintes et que les centres réflexes fonc- tionnent encore. La sensibilité tactile à son tour va disparaitre et avec elle les mouvements réflexes. L'envahissement progressif, qui jusqu'alors #vait marché de haut en bas, va suivre une n che inverse et l’activité nerveuse se limite de | .us en plus à la région bulbaire et au système nerveux sympathique. La sensibilité tactile disparait d'abord dans le domaine des nerfs médullaires (tronc el membres). puis dans celui de la protubérance et du mésencé- phale (face) et lorsque l'opérateur peut toucher la conjonelive de l’œil sans provoquer la fermeture réflexe des paupières, ilne reste plus que quelques réflexes obscurs et l’insensibilité peut être consi- dérée comme complète au point de vue chirurgical. Pour obtenir l’inertie absolue, il ne reste plus qu'un obstacle à renverser : c’est la tonicité mus- culaire ; ce pas est vite fait et l’anesthésique con- tinuant sa marche envahissante plonge le corps entier dans la résoluticn musculaire. La vie de relation est éteinte : seule la vie végé- tative subsiste, surveillée par le bulbe encore actif et par le système nerveux sympathique encore intact. Tant que persiste cet état, le retour à la vie survient spontanément par la suppression de l'inhalation du mélange titré. Mais si l'anesthésie est prolongée au delà du temps pendant lequel le bulbe peut résister, la mort survient par arrêt de la respiration, puis du cœur qui est toujours, dans l'intoxicalion graduelle par lechloroforme, l'ultèmum moriens, comme dans la mort naturelle. Tous ces phénomènes peuvent être groupés en (rois périodes : D | D' R. DUBOIS. — MÉCANISME DE L'ACTION DES ANESTHÉSIQUES 567 1° Période d'excitalion des chirurgiens, qu'il serait préférable d'appeler période d'agitalion ; 29 Période d’anesthésie confirmée ou de sommeil; 3° Période ultime ou syncopale. Chacune de ces trois périodes est caractérisée par un état particulier de la pupille et d'une manière si nette que l'on pourrait dire, dans l’anes- thésie par les mélanges titrés, que l'œil est à la fois le miroir du corps et celui de l'âme. Au début de l’inhalation la pupille se dilate légèrement, mais il suflit d'en approcher une lumière pour provoquer immédiatement son resser- rement (réflexe rétinien). Dans la seconde période la pupille est contractée et le réflexe rétinien a disparu. Enfin la troisième période s'annonce par une dilatation brusque avec absence de réflexe rétinien : c'est le signe certain d’une menace de mort ou d'une syncope respiratoire imminente. A ces trois phases il convient d'ajouter celle du réveil pendant laquelle la pupille d’abord forte- ment contractée se dilate lentement, avec réappa- rition de réflexe rétinien. Le patient rentre alors successivement en possession de ses facultés, quil recupère en général dans le même ordre qu'il les a perdues. Ë Les phénomènes consécutifs sont très analogues à ceux de l'ivresse alcoolique, maisils se dissipent plus vite : le vomissement pituilaire se présente dans l’une et l’autre de ces deux intoxications; mais dans l’anesthésie chloroformique régulière par les mélanges litrés, il doit toujours être consi- déré comme, un phénomène de réveil brusque : il manque le plus souvent quand on laisse le patient se réveiller lentement en abaissant le titre du mé- lange. Le chloroforme n’est pas décomposé dans l’éco- nomie : il s’élimine progressivement par les voies respiratoires dès que cesse l’inhalation. D'une manière générale son action physiolo- gique se rapproche plutôt de celle des agents physiques que de celle des agents chimiques. V Si l’on cherche dans les phénomènes physico- chimiques connus quelque chose de comparable aux faits que nous avons exposés dans la première partie de cet article, c’est seulement dans les cu- rieuses études de Graham sur les matières col- loïdales minérales que l’on pourra trouver quelques analogies sans qu'il y ait pourtant identité à pro- prement parler. Graham a donné le nom d'hydrogèles à des subs- tances colloïdales que lon obtient en fixant de l’eau sur l’albumine ou la silice, En immergeant un hydrogèle dans l'alcool, ce liquide peut se subs- lituer à l’eau de constitution de l'hydrogèle sans que le composé perde sa consistance gélatineuse; on obtient ainsi un a/coogèle. À son tour l'alcool pourra être chassé par l’éther de lamême manière el celle nouvelle opération donnera naissance à un étherogèle. Mais ce qu'il y à de particulièrement remar- quable dans les expériences de Graham, c’est que l'alcoogèle pourra être inversement transformé en hydrogèle, s’il est mis en présence d’une masse d’eau suffisante. Dans le réveil du sujet anesthésié il semble se passer quelque chose d’analogue à cette transfor- mation, que le savant physicien anglais n’a pu expliquer que par une «action de masse ». Dès que l’inhalation chloroformique est suspen- due, l’agent anesthésique dissous dans le sang s'élimine parle poumon. Le sang, débarrassé de sa présence, enlève à son tour aux éléments analo- miques le chloroforme fixé par le protoplasma. qui récupère ses qualités premières,sans qu'à au- cun moment il y ait eu de véritable coagulation et sans quil se soit produit aucune altération de structure appréciable par nos procédés ordinaires d'investigation. En résumé, ce qui ressort le plus clairement de nos observations et de nos expériences, c’est que l’anesthésie générale n’est qu'un mode particulier de vie latente dans lequel l’eau joue, comme dans les autres, le rôle principal. L'état d'hydratation normal du protoplasme est une condition fonda- mentale de son fonctionnement physiologique et toutes les manifestations vitales peuvent être sus- pendues temporairement ou définitivement quand cette condition fondamentale n’est pas satisfaite. Les faits expérimentaux sur lesquels repose notre théorie du mécanisme physiologique des anes- thésiques généraux nous paraissent suffisants pour qu'il ne soit pas permis de la considérer comme une simple hypothèse « priori. On ne saurait d’ailleurs lui contester le caractère d’une théorie exacte puisqu'elle a permis non seulement d’ex- pliquer les faits connus, mais encore d’en décou- vrir de nouveaux tout à fait inattendus. D'R. Dubois, Professeur de Physiologie générale et comparée à la Faculté des Sciences de Lyon, D08 CH. TRÉPIED. -- LA CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU'CIEL LA CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL : ps {Suite et Fin). gl La Conférence de 1887 avait décidé que pour donner toute l’exactitude désirable au catalogue phographique d'étoiles qui résulterait des me- sures faites sur les clichés, on imprimerait sur chacune des plaques, avant de l’exposer à la lu- mière du Ciel, l’image latente d’un réseau dont les traits, servant de repères, permettraient de décou- vrir et d'éliminer toutes les déformations subies par la couche sensible dans les opérations succes- sives du développement, du fixage et du séchage. Si, en effet, on mesure, sur un cliché, les distances angulaires des images de deux étoiles, le résullat qu’on obtient ne représente exactement la dis- lance qui sépare les deux étoiles dans le Ciel que si la couche sensible ne s'est pas déformée ; or les déformations, s’il yen a, seront accusées par l'image du réseau. En effet, le réseau original, tracé sur une glace de verre argenté, a élé étudié avec un très grand soin; on connait exactement les posi- tions relatives de tous les traits. Chaque plaque, avant d'être exposée au Ciel dans le châssis de l'équatorial photographique, a été mise dans un châssis spécial presqu’au contact de la face ar- gentée du réseau original et exposée, dans cet élat, à de la lumière parallèle; il en est résulté une image absolument fidèle du réseau, image qui s'est développée en même temps que celles des étoiles. On découvrira done les déformations de la couche sensible en comparant les distances des traits suc- cessifs du réseau photographié aux distances correspondantes sur l'original. Or, des études faites sur la demande du Comité permanent, en diffé- rents observaloires et par des moyens différents, il résulte que pour une distance linéaire de 5 mil- limètres mesurée sur une plaque, la valeur du retrait ou de l'allongement de la couche sensible (car l'un et l’autre se produisent) ne dépasseront jamais la dix-millième partie de la distance, ce qui, à l’échelle adoptée, correspond angulairement à 0"03 et exprime une limite de précision bien su- périeure à celles des pointés.On a néanmoins main- tenu l'emploi du réseau; s'il n'y a pas de défor- mation à craindre, il sera d’une grande utilité pour les mesures. Les traits du réseau formeront, en effet, un grand nombre de systèmes parallèles d'axes rectangulaires auxquels on rapportera les éloiles du cliché, et comme l'équidistance des ne —————_—_——… —"—…— —…—…——— 1 La première partie de cette étude a paru dans la Revue du 30 août 1891, t. I, page 529. traits est fixée à 5 millimètres, on n’aura jamais a” mesurer aucune distance supérieure à 2%%5, d'où les avantages suivants : simplification de l’appareil | de mesure, économie de temps, sûreté plus grande des résultats. Il y avait à résoudre une autre question d'une difficulté extrème. On avait fixé, en 1887, les li- mites de grandeur des étoiles qui devraient êlre. reproduites sur les clichés; mais on n'avait pas in- diqué le temps de pose nécessaire pour atteindre ces limites de grandeur. Il faut dire que la ques- tion était alors toute nouvelle el qu'aujourd'hui encore elle est loin de pouvoir être résolue en toute rigueur. Après de longs débats, la Confé- rence de 1889 vota les deux résolutions suivantes : a) On adoptera, pour le temps de pose devant donner les étoiles de grandeur 11,0 le produit par 6,25 du temps de pose nécessaire pour obtenir la grandeur 9,0 de l'échelle d’Argelander. b) Chaque observateur devra s'attacher à obtenir sur ses clichés destinés au Catalogue la grandeur 11,0 déterminée aussi exactement que possible au moyen de l'échelle d’Argelander que l’on prolon- gera au delà de la grandeur 9,0 par l'emploi du coefficient 2,5. Quelques explications sont peut-être nécessaires pour bien fixer le sens de ces deux résolutions. On sait que l'œil juge mal les rapports d’intensités lu- mineuses, mais qu'il apprécie bien les différences d'intensité ; que la rétine ne commence à percevoir la différence d'intensité de deux lumières que lorsque cette différence atteint une certaine va- leur, appelée valeur sensible, el c’est une question de savoir comment, cette limite étant atteinte, l'intensité de la sensation varie avec l'intensité de la lumière excitatrice. Suivant la loi de Weber, déduite de l’observation, foule sensation croît en pro- gression arithmétique lorsque l’ercilation croît en pro- gression géométrique. Appliquons ces considérations à la définition précise d’une échelle de grandeur stellaire. Parmi toutes les étoiles visibles soit à l’œil nu, soit dans une lunette d'ouverture donnée, consi- dérons la plus brillante et la plus faible. Prenons deux axes de coordonnées Oz et O7; sur l’axe Oz, portons deux abscisses auxquelles nous ferons correspondre des ordonnées AM et BN proportion- nelles aux éclats des deux éloiles considérées. Entre ces deux éclats, on peut concevoir une in- finité d’éclats différents. Divisons l'intervalle CH. TRÉPIED. — LA CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL 569 formé par les extrémités des deux abscisses en 7 parties égales ; nous obtiendrons x + 1 points sur l'axe Oz et » intervalles. Nous pourrons dire que la première étoile est de première grandeur, la plus faible de (n + 1)° grandeur, et la division de l’in- tervalle formera une échelle de grandeurs stellaires. Mais cette échelle ne sera définie que lorsque nous pourrons indiquer comment varie l'éclat de l'étoile lorsque nous passons d’une grandeur à la suivante. Soit p un indice que nous ferons successivement égal à 1, 2, 3,... n + 1; chacune de ces valeurs de p, qui est le numéro d'ordre d’un de nos points de division de l'axe Oz exprime une grandeur d’é- toile et à chaque valeur de p correspond un éclat I,, qui dépend de la valeur de l'indice; si nous supposons que les grandeurs varient d’une ma- nière continue, nous pourrons concevoir l'éclat I, comme une fonction continue de l'indice, Il s’agit de déterminer cette fonction. Soient : petg, p'etgq! p'etq!l ... etc. un certain nombre de couples de valeurs de l'indice telles que l’on ait : .= Const. p—qg=p—-qg=p—q =. L'observation montre,et c'est en cela que consiste, dans ce cas, la loi de Weber, que l’on a : I ! f D pl ue pl 2i ee eee ent q qd qd Il en résulte : 1 OR 0 l 154 ue cel ep r er TE et CONST. P P Si, maintenant, nous supposons que le nombre des divisions de l'intervalle AB sur l’axe des + augmente indéfiniment, que p el g soient deux in- dices successifs, nous pourrons écrire : — I p—q4—=—dp Dm et, par conséquent, nous aurons l'équation diffé- rentielle : dl — I dp — (CONS. — "À en désignant par À la valeur de la constante. On obtient, en intégrant cette équation : log nép. I1=—=— À) + C la valeur de la constante C d'intégration étant dé- terminée par l'introduction de la valeur sensible I, qui correspond à une sensation nulle, nous REVUE GÉNÉRALE, 1891, trouverons, en désignant par p, la valeur de l’indice qui correspond à l'intensité I, : I d'a == Jo A(Po—p) Ce qui, en posant e— p, devient : ji = Lente I de même, pour une étoile d’une intensité différente [', nous aurons : l' Der Enr Lo il en résulte la relation : I P—p T—P entre les éclats des deux étoiles dont les grandeurs sont p et p’. C’est la loi de Fechner, appliquée aux sensations lumineuses, Le nombre best la raison de l'échelle de grandeurs ; si l’on donne à p la vaieur 2,512 dont le logarithme vulgaire est 0,4, on a l'échelle des grandeurs d’Ar- gelander. La résolution (b), rapportée précédem- ment, signifie donc que dans l'échelle de grandeur adoptée par la Conférence de 1889, on devra consi- dérer le nombre exprimant la grandeur comme augmentant d’une unité lorsque l'éclat diminuera dans le rapport de 4 à 2,5. Quant à la résolution 4, on aperçoit immédiate- ment qu'elle entraine ces deux conditions : 1° Que le temps de pose nécessaire pour obtenir l'image d’une étoile varie en raison inverse de l'éclat, c’est-à-dire qu’on a la relation : lé — const; mais il n'est pas encore démontré qu'il en soit ainsi rigoureusement ; 2° Qu'on devra photographier d'abord une étoile de grandeur 9,0 pour en déduire le temps de pose permettant d'obtenir les images des étoiles de grandeur 11,0; et si £ est le Lemps de pose pour une neuvième, le temps de pose pour une onzième sera : (2,5)24 — 6,25 £ On voit ce qui reste encore de vague dans ces décisions. Le diamètre de l’image photographique d'une étoile augmente avec la durée de la pose; il en est de même de l'intensité de cette image.Alors ne peut-on pas se demander ce qu'il faut entendre par ces mots : obtenir l'image photographique d'une étoile de grandeur 9,0? Ne faudrait-il pas lixer le diamètre el l’intensilé que devra posséder l'image d’une telle étoile? Mais ici les dificultés deviennent énormes, peut-être insurmontables 17" 910 CH. TRÉPIED. — LA CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL dans l’état présent de la science, et nous aurons à revenir sur ce point à l’occasion des travaux de la dernière Conférence du mois d'avril 1891. Avant d’en finir avec la réunion de 1889, il con- vient de dire un mot d’une grosse question inscrite au programme de cette réunion et d’un intérêt ea- pital pour l'avenir de l’œuvre; y avait-illieu de créer un Institut central pour exécuter les mesures, pour les réduire et les publier? Se fondant sur des con- sidérations d'ordre exclusivement scientifique, les astronomes français et un grand nombre de leurs collègues étrangers ont soutenu l’affirmative ; mais on a dû reconnaître qu'il n’était pas possible de retrouver sur ce point l’accord unanime avec le- quel toutes les autres questions avaient été réso- lues. La Conférence a jugé prudent d'ajourner toute décision à cet égard et de s'en tenir pour le présent à l'exécution de la carte elle-même, avec cette pensée qui élait, qui est encore dans l'esprit de beaucoup de ses membres, qu'un jour viendrait où la création d’un Institut central s’imposera. IV. LA coNFÉRENCE DE 1891 Avant de se séparer, les membres de la Confé- rence de 1889 avaient, d’un commun accord, re- connu que l’entreprise devait désormais sortir du domaine de la spéculation théorique pour entrer dans celui de l'application, qu'il était nécessaire de pousser les préparatifs avec la plus grande acti- vité dans toutes les stations, et que dès le jour où tous les instruments seraient installés, éprouvés, les astronomes coopérant à la carte se réuniraient une dernière fois avant de commencer le travail pour se communiquer les uns aux autres leurs ré- sultats, pour éclaireir en commun les doutes pou- vant subsister encore sur quelques points, et pour régler les derniers détails techniques de l’opéra- tion. Cette réunion eut lieu à l'Observatoire de Paris du 31 mars au 4 avril de cette année. La Confé- rence, après avoir entendu les rapports des direc- teurs d’observatoires sur leur installation astro- photographique, et sur les résultats oblenus, chargea une Commission de procéder sans délai à un examen approfondi des clichés présentés par les différents observatoires comme épreuves d’es- sai. Cet examen montra que les qualités optiques de tous les objectifs étaient fort satisfaisantes, et, dans son rapport,la Commission insista sur la par- faite similitude qu'avaient offerte tous les clichés présentés, tant au point de vue de la netteté des images qu'à celui de la grandeur du champ utili- sable. La Conférence régla ensuite deux questions sur lesquelles il ne pouvait y avoir de longs débats, et relatives l’une au mode d'impression des réseaux, l’autre à la manière dont serait faite l'orientation des plaques dans le châssis photographique, Sur la première, la Conférence de 1889 avait décidé que le réseau dont il a été fait mention plus haut, et destiné à fournir des repères,soit pour l’é- tude des déformations de la couche sensible, soit pour les mesures de position des étoiles, serait im- pressionné sur chaque plaque, par de la lumière parallèle, dans un chässis placé devant l'objectif de la lunette photographique elle-même au foyer de laquelle on auraït placé une source de lumière: Plusieurs membres firent observer qu'il était à désirer qu'on ne préparät pas d'avance un trop grand nombre de copies du réseau, qu'il serait préférable de n’impressionner les plaques par le réseau que dans la soirée même où elles devraient être exposées au Ciel; que, dans ces conditions, on perdrait nécessairement beaucoup de temps, en dispositions préliminaires, à placer la souree lumi- neuse au foyer de l'objectif de la lunette, à instal- ler le châssis à réseau devant l'objectif, pour défaire ensuite ces arrangements et pouvoir pro- céder au travail photographique proprement dit. Pour ces molifs, la Conférence décida que sa réso- lution antérieure serait abrogée et remplacée par celle-ci : le réseau sera impressionné par de la lumière parallèle, laissant à chacun la liberté de choisir entre ces trois systèmes pour l'impression des réseaux : emploi de la lunette photographique elle-même, emploi d'une lunette spéciale, emploi d'un miroir. La seconde question, relative au mode d'’orien- lation des plaques dans leur châssis, ne présentait pas non plus de grandes difficultés; mais elle avait une certaine importance, au point de vue des rédactions et des calculs. Il ne s'agissait d’ailleurs que d’une orientation approximative. Bien que, d’après le mode de construction adopté, le châssis maintienne la plaque dans une position à peu près invariable, il est certain que l'orientation définitive et exacte ne pourra être obtenue que plus tard, au moyen des mesures faites sur un certain nombre d'étoiles connues du cliché. Il n’en faut pas moins que l'orientation provisoire de la plaque soit déjà suffisamment approchée afin d'éviter de trop fortes corrections. Or, il avait été convenu que toutes les déterminalions de position des étoiles seraient rapportées à l’équinoxe de 1900, et la question à résoudre était celle-ci : orientera-t-on les plaques pour l’équinoxe de 1900, ou bien pour l’équinoxe apparent du jour? Lorsqu'un astronome veut faire, à l’équatorial, une mesure de position, il oriente son micromètre en laissant courir une étoile, en vertu du mouvement diurne, le long du fil de déclinaison, le mouvement d'horlogerie étant CH. TRÉPIED. - LA CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL o11 arrêté, etil s'assure que dans ce déplacement l'i- mage de l'étoile ne cesse pas d’être bissectée par le fil. L'astonome qui se prépare à obtenir un cliché dela carte du Ciel procède exactement de la même manière ; il met dans le châssis de la lunette une copie sur verre de son réseau; et'il oriente le châssis de manière que, dans son déplacement, l'image de l'étoile ne cesse pas d'être bissectée par le trait central du réseau. Mais l'orientation qu'il oblient ‘ainsi est celle qui se rapporte à J'équinoxe du jour; en vertu de la précession, elle diffère de celle qu'il aurait obtenue en 1900 et à laquelle on devra en fin de compte la ramener; elle en diffère d’une quantité qu'il est aisé decal- culér, très faible pour les éloiles voisines de l'équateur, mais atteignant une valeur assez grande pour les étoiles voisines du pôle. En con- séquence, il fut décidé que pour les zones équato- riales on pourrait se borner à donner au châssis l'orientation du jour, mais que, pour les calottes polaires, il convenait d'adopter l'orientation se rapportant à l'équinoxe de 1900, et les calottes polaires furent considérées comme limitées par les parallèles de 65° de déclinaison. Le lecteur, curieux de suivre jusqu'au bout et dans tous leurs détails les discussions qui ont eu lieu dans la réunion internationale de 1891, en trouvera l’image assez fidèle dans les procès-ver- baux des séances qui seront prochainement pu- bliés sous le patronage et aux frais de l’Académie des Sciences. Il n’y aurait aucune utilité à donner ici une analyse de toutes les questions résolues ou débattues, et nous nous bornerons à en retenir deux, tant à cause de leur importance fondamen- lale qu'en raison de la longueur et de la gravité des débats qu’elles ont soulevés. Avant d'aborder ces questions, disons seulement qu’en ce qui concerne le mode de reproduction des étoiles de la carte, il fut décidé que l’œuvre garderait jusqu'à la fin son caractère photographique, et qu'en conséquence les clichés devaient être reproduits par les procédés de la photogravure, sans aucune intervention de la main humaine. La première Conférence, celle de 1887, avait, on se le rappelle, établi en principe que deux séries de clichés seraient faites pour tout le Ciel; l’une donnant les étoiles jusqu’à la onzième grandeur et destinée à fournir les éléments d'un catalogue de haute précision, l’autre formant véritablement la carte du Ciel et contenant toutes les étoiles jusqu’à la quatorzième grandeur. M. l’amiral Mouchez, pré- sident du Comité permanent, avait proposé, comme mesure d'ordre, de décider que l’on n’entrepren- drait la seconde série qu'après avoir accompli la première. Il se fondait:1°sur ce que la grandeur 41 est actuellement définie d'une manière complète photomélriquement et qu'il n’y a aucune difficulté sérieuse à en donner une définition photographique, tandis qu'il n’en est pas encore ainsi pour la qua- torzième grandeur ;2° sur l'avantage qu'il y aurait, en faisant les deux séries séparément et commen- cant par la série à courtes poses, de pouvoir donner, dans un temps relativement court, aux astronomes, le catalogue qu’ils réclament pour les besoins actuels de l'astronomie, et d'arriver en- suite, grâce à l'expérience acquise dans l’exécu- tion de cetle première série, à effectuer la seconde dans des conditions bien meilleures. Cette propo- sition souleva un certain nombre d’objections. Plusieurs membres firent observer qu'adopter celte division du travail serait déroger aux pres- criplions de la Conférence de 1887 qui devait tou- jours être considérée comme la loi fondamentale de l’entreprise; d’autres exprimèrent la crainte de voir ainsi compromise l’exécution de la carte du Ciel, tandis que, dans leur opinion, comme dans celle de M. l'amiral Mouchez lui-même, elle devait être l’objet principal du Congrès. Dans ces condi- tions, M. l’amiral Mouchez, considérant qu'il y avail un intérêt trop grand à écarter toute espèce de doute et ne pas rompre l’unanimité, jusqu'ici générale dans les votes, s'empressa de se rallier à une proposition de conciliation présentée par plu- sieurs membres et ainsi conçue : « Les travaux décidés par le Congrès de 1887, «comprenant deux séries de clichés faites avec « des poses différentes, le Comité permanent, tout «en recommandant aux observateurs de pousser «avec la plus grande activité possible l'exécution « des clichés de la deuxième catégorie (clichés « destinés à la construction d'un catalogue), est « d'avis qu'on devra aussi profiter du plus grand « nombre possible de belles soirées pour faire des « clichés à longue pose de la première série. » Le principe de la simultanéité des deux séries dans l'exécution était ainsi maintenu; mais le comité exprimait l'espoir de pouvoir construire le catalogue dans un délai assez court pour en faire profiter l'astronomie contemporaine. Restait l’épineuse question du temps de pose à adopter pour atleindre photographiquement la quatorzième grandeur. Les résolutions votées à cet égard en 1887 et en 1889 ne fournissaient pas aux observateurs des règles suffisamment pré- cises; elles avaient besoin d’être complétées. Les membres de la Conférence s’accordaient tous à re- connaître ce besoin et aussi la nécessité d'assurer la plus grande homogénéité possible dans les ré- sultats du travail qui allait être entrepris; mais sur les moyens à employer pour satisfaire à ce be- soin et pour réaliser celte homogénéité, les diver- gences d'opinion étaient très grandes. Pendant les / CH, TRÉPIED. - deux années qui ont précédé la réunion de 1891, des recherches avaient élé faites dans un certain nombre d'observaloires sur la loi de variation du diamètre de l’image avec le temps de posé pour une étoile d’un éclat donné, sur la relalion qui existe entre les diamètres des images el les gran- deurs optiques d’éloiles d’éclats différents pour un même temps de pose déterminé, enfin sur la relation qui lie entre eux le temps de pose, le dia- mètre de l'image el la grandeur de l'étoile. On avait trouvé les résullats suivants : 1° Si l’on désigne par à le diamètre de l’image d'une étoile d'éclat donné, par £ le temps de pose et par à, une conslante, on aura : SAN l'exposant & ayant une valeur voisine de ;, dire que le diamètre varierait à peu près propor- lionnellément à la racine quatrième du temps de , : c'esl-à- pose; 90 m élant la grandeur optique d’une étoile blanche (les éloiles éolorées doivent être exclues de celte réchérche), à le diamètre de l’image obtenue en un témps de pose donné, « el b désignant deux constantes, on à la relation : Muse C b logô La significalion de la constante à est très claire; elle exprime la grandeur de l'étoile qu'on obtient sur une plaque dans un temps de pose donné avec un diamètre égal à l'unité; sa valeur dépend à Ta fois de la sensibilité de la plaque et du temps de pose; quant à la constante b, elle parail ne dé- pendre que de la sensibilité de la plaque; 39 On aurait, entre la grandeur, le diamètre el le temps de pose, la relation : ne à = blogô + ba lot 4 pouvant pouvant êlre pris égal à %. Si l'on conçoit que les coeflicients «el à aient élé déterminés pour des plaques d’une sensibilité donnée, on voit que celte dernière formule permet de calculer le temps de pose qui sera nécessaire pour obtenir l'image d'une étoile de grandeur m avec un diamètre égal à ô. Malheureusement, la valeur des coefficients varie beaucoup avec la sen- sibilité des plaques !; si la plaque à été plus ou moins voilée, soit pendant la fabrication, soil au moment d'en faire usage, on n'oblient plus, à beau- coup près, les mêmes valeurs pour le temps de pose. C'est ce qui explique les résultats si diffé- rents auxquels on est parvenu, En admellant, par 1 lille varie aussi avec la distance zénithale de l'étoile et le degré de lransparence de l'air, LA CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CTEL exemple, que l’image d’une étoile de quatorzième grandeur doive être représentée par un céréle de 4 de millimètre de rayon, on a trouvé, pouf'le temps de pose,des valéurs variant depuis 120" fus- qu'à 7 heures. Cependant les recherches effectuées dans les différentes observations s'accordaiént sur ce point qu'en multipliant le temps dé pose par ?, 5, on ne gagne pas une grandeur dé l’échélle d’'Arge- lander, comme cela étail implicitément supposé dans les résolutions de 1889, mais seulément une fraction de grandeur; les divergences né portaient que sur celle fraction de grandéur, mais il en résullail des différences considérables dans les temps de pose, Cela suffit à montrer là difficulté extrême de la question qui était à résoudre. Pour ce qui regarde les clichés dé là série à courtes posés, d’une durée probable de 3 à 5 mi- nues, on avait décidé que la durée du temps d'exposition nécessaire pour obtenir les images des éloiles de la onzième grandeur serait fixée en partant de celui qui convient pour les neu- vièmes grandeurs, dont la valeur photométrique est bien connue; el pour cela, le procédé suivant serail employé. On choisira, dans plusieurs ré- gions du Ciel, un cerlain nombre d'étoiles de la grandeur 9, bien déterminées au point de vue de leur éclal, Supposons la lunette photographique dirigée sur l’une de ces étoiles. Si, devant l'ob- jeclif, on place une toile métallique, on réduit l'éclat de l'étoile, et le nombre qui exprime sa grandeur augmente; la finesse de la maille peul être réglée de telle sorte que celte absorption de de grandeur soil exactement de 2 unités; l’image vue actuellement dans la lunette, ou impres- sionnée sur la plaque sensible est identique à celle d’une étoile de grandeur 44, Alors, par des ex- périences variées, faites dans des conditions atmos- phériques moyennes,on cherchera quel est le temps de pose nécessaire pour obtenir, de l’étoilé de grandeur 9 ainsi réduite à la onzième grandeur, une image ayant le diamètre jugé suffisant pour les plus faibles étoiles de la série du catalogue. Ces expériences devront être failes par une Com- mission spéciale. Mais pour les clichés de la carte proprement dite, il ne pouvait être question d'imposer aux observa- teurs des durées d'exposition de plusieurs heures; la durée d’une heure semblait une limite qu'on ne pouvail pas raisonnablement dépasser; plusieurs astronomes, principalement du groupe anglais, s'opposaient même à ce qu'on allàt au delà de 30 minutes; d'un autre côL6, il élait moins possible encore d'effectuer dans chaque soirée la détermi- nation des constantes d'uné formule: cela eût exigé une série de mesures et de calculs d’une telle longueur qu'il ne sérait plus resté de temps 4 CH. TRÉPIED, — LA CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL 573 pour le travail de la carte, Il fallait aboutir cepen- dant: l’une des séances dut être suspendue; une commission de six membres fut invitée à délibérer sans délai, avec le mandat d'apporter un projet de résolution définitive. Cette résolution, adoptée par la Conférence, à l'unanimité des voix, est la suivante : « La Commission, d'un avis unanime, indique « A0 minutes comme la durée de la pose pour les « clichés de la carte dans les conditions atmos- « phériques moyennes à Paris, el avec les plaques « Lumière actuellement en usage à Paris, « La Commission des Loiles métalliques remettra «à MM. Henry une toile mélallique au moyen de « laquelle ils détermineront le temps /, exprimé en « minutes, qui permet d'obtenir les onzièmes gran- « deurs en partant des neuvièmes d’Argelander. « Alors, pour tous les observateurs qui serontmunis PTT 10 « d'une toile identique, le rapport TE sera le fac- « teur par lequel on mullipliera le temps de pose « donnant les onzièmes grandeurs pour obtenir les « éloiles de la plus faible grandeur de la carte, » Cette résolution est loin d’être parfaite ; la Com- mission qui l’a présentée el la Conférence qui l'a adoptée, le savent mieux que personne; mais elle résout d'une manière pratique une question don toutes Les données ne sont pas encore bien fixées dans l'élal actuel de la science; elle a l’avan- tage d’être celle qui s’écarte le moins des résolu- tions antérieures, et de laisser à chacun, dans l'exé- eulion, la liberté d'appréciation des circonstances, que tout homme de science a le droit et le devoir de réclamer; elle permet enfin à la plupart des ob- servaloires de commencer leurs travaux, Aussi, M. l'amiral Mouchez pouvail-il, en prononcant la clôture de la Conférence de 1891, adresser à ses collègues les paroles suivantes, qu'on nous per- mettra de reproduire ici : «Mes chers collègues, je vous remercie profon- « dément de l'honneur que vous nous avez fait en « venant encore une fois el, pour quelques-uns « d’entre vous, de si loin, vous réunir à l’'Observa- « Loire de Paris. Vous aviez à trailer des questions «difficiles; vous l'avez fail ici « d’autres préoccupations que celles de la vérité sans apporter « et du progrès de la science. Des divergences de « vues se sont produites entre vous sur les moyens, « jamais sur le but. Ces divergences élaient inévi- « tables, elles étaient même nécessaires; elles n’ont « fait que mieux éclairer les questions el n’ont « à auçun moment troublé la cordialité de vos rap- « ports, L’unanimité avec laquelle toutes vos déci- « sions ont élé finalement prises esl un gage cer- « ain du succès définitif. C’est dans celle pensée « que je déclare terminée la Conférence de 1894, et , «commencée l'œuvre de la carte photographique « du Ciel, » On ne peul finir cel article sans indiquer le but, et la portée du lravail auquel coopèrent, dès à pré- sent, 148 observaloires distribués sur toute là sur- du globe !, Il ne S'agil pas seulèément de former un catalogue d'étoiles de comparaison pour les observateurs des astéroïdes, et une Carte pour faciliter la recherche des petites planètes. Un pareil catalogue, une telle carte dont l’émploi serait limilé à de tels usages, bien que constituant une face œuvre importante, ne justilieraient pas, du moins on en pourrail douter, la grande dépense de tra- vail, d'énergie l'œuvre actuelle, Il s'agit surtout d'éléver un mo- nument permettant d'aborder l'étude des grandes arc l  ‘di et d'argent que va nécessiter questions d'astronomie sidérale qui s'imposent déjà aux astronomes contemporains el qui s’impo- serontde plus en plus à ceux de l'avenir : distribu- tion de la densité stellaire dans le ciel, disparilion d'étoiles, mouvements propres, lois du mouvement de translation du système solaire dans l'espace, Celle dernière question est une des plus grandes qui, puissent faire lobjel des spéculations humaines, À deux époques éloignées l’une de l’autre on à déterminé le lieu de la sphère céleste occupé par une éloile; les observations sont parfaites; les erreurs accidentelles, les erreurs systématiques sont nulles; on a exactement appliqué loutes les corrections instrumentales el celle de la réfrac- lion; les résultats ont été affranchis des effets de la précession, de la nulation, de l'aberration; on doit s'attendre à trouver pour les deux époques, un lieu identique sur la sphère céleste, On trouve au contraire deux lieux différents; la différence augmente avec le Lemps; l'étoile parail avoir un mouvement propre. En comparant ces mouvements propres, pour un grand nombre d'étoiles, W, Hers- chel s'aperçoit qu'ils ne sont pas dirigés indifférem- 1 La distribution du travail est la suivantes ZONE EN NOMRUIE OBSEIRVATOIRES LATITUDE DÉOLINAISON DE PLAQUES Gécenwichunt ol dis 451929 H#9002-465° 1149 DT AE RAS GEO ES ADAU (BC CR ET 37.30 +54 +47 A0us Helsingfors......, ) 4-46 440 1008 Potsdam: so4ttn +39 +452 1252 a} pue ER AE +31 +25 1180 but NE SNA 0 0 +24 48 1260 Bordeaux../...,,, HAT M 1260 MOMIOUSO ne seviee ET +10 +5 1080 ANAO CONTACT 0 + 4 1) 1260 San-F'ernando 2131 Eu 9 1260 TMacubayal..ti., at 10 —16 1260 Santiago., —17 23 1260 La Plala.. —24 31 1360 Aio-Janciro.,. 2088 32 #0 1376 Cap de Bonne-Espérance —h1 51 1512 SL CN ONU OIENIONOT 1400 Melbourne. , 1149 574 J. VESQUE. — LA SÈVE ASCENDANTE ment dans tous les sens, sans aucune loi régulière. S'il les transporte sur une sphère solide qui repré- sente la sphère céleste, il trouve que chaque étoile parait s'être déplacée sur un grand cercle, et que tous ces grands cercles se coupent en un même point'. Ce résultat s'explique et devient une consé- quence nécessaire, si l’on admet que, les positions des étoiles demeurant fixes dans l’espace, le sys- tème solaire s’est transporté vers le point d'inter- section commune, que W. Herschel trouva placé près de l'étoile de la constellation d'Hercule. Telle est l’origine des notions actuelles sur le mouve- ment de translation du système solaire dans l’es- pace. La vitesse de ce mouvement est du même ordre que celle de la Terre dans sa translation au- tour du Soleil, et le mouvement parait, jusqu'à présent, s'effectuer en ligne droite. La translalion doit être, en effet, « priori, recti- ligne, si l’on admet que les actions subies par les différents corps du système solaire se réduisent aux actions mutuelles qu'ils exercent les uns sur les autres, c’est-à-dire si l’on néglige celles qu'ils reçoivent des corps extérieurs au système. Dans ce cas, la translation découverte par W. Herschel re- présente, en grandeur et en direction, la résultante des vitesses initiales qui, avec les forces agissantes, déterminent les mouvements actuels de tous les corps du système. La science actuelle regarde les aclions des corps extérieurs comme négligeables, et cela n’est, en définitive, qu'un aveu indirect de son impuissance à les connaître, à lès mesurer et à les introduire dans ses calculs. Mais ne peut-on prévoir un état futur de l'astronomie où ces at- tions des corps extérieurs au système solaire pourront et devront n'être plus négligées, où cette conception qui fait du système solaire un simple élément d’un système d'étoiles, ne sera pas seule- ment une hypothèse grandiose, mais l'expression d’une réalité prouvée par les faits, où l’on pourra demander aux observations de mettre en évidence une révolution des étoiles de notre système autour d’un centre commun de gravité? Mädler avait déjà fait, il y a 35 ans, une lentalive dans ce sens; elle ne pouvait aboutir complètement; mais nos suc- cesseurs résoudront sans doute ces questions et beaucoup d'autres encore avec les malériaux si nombreux et d'une authenticité si indiscutable que notre carte du Ciel leur lèguera. Ch. Trépied, Directeur de l'Observatoire d'Alger LA SÈVE ASCENDANTE Jamais aucun sujet de Physiologie n’a élé débattu avec autant d’ardeur que le problème de l’ascension de la sève. Jusqu'au milieu de ce siècle el même au delà, on se contentait de doctrines assez vagues qui reposaient sur l’osmose, sur la capillarité ou sur une force particulière, vitale, qu'on ne définissait en aucune façon, et dont l’application, telle qu'elle a été faite, n’était qu'une téléologie déguisée. De telles doctrines ne pouvaient subsister à une époque plus récente ; cependant il est curieux de noter dès à présent que toutes ces idées ont été reprises, sous une forme plus scientifique, il est vrai, pour l'édification des diverses théories qu'on devait substituer à celle que M. Sachs avait fail accepter partout et à laquelle il est aujourd'hui impossible de ne pas renoncer. I 4. La théorie d'imbibition de Sachs. — Guidé par 1 En réalité, par suite des erreurs d'observation, les grands cercles se coupent en des points différents, et le centre de gra- vité du groupe des points d'intersection doit être regardé comme la position plus probable du point d’intersection commun, EE —— des vues théoriques qui ne manquaient ni de gran- deur ni d'ingéniosité, M. Sachs a laissé de côté la capillarité proprement dite, l’endosmose et les forces aspirantes el foulantes des cellules vivantes, pour recourir à une autre force moléculaire, pro che parente de la capillarité, l’ünbibition. Tout curps organisé, dit Nœgeli, est composé de »icelles ou particules de structure cristalline qui attirent l’eau avec une telle force qu’elles s’écartent les unes des autres, et que le corps se gonfle. La yon- flabitité est le signe certain que le corps-esl organisé. Or l'attraction de micelle à micelle diminue moins vite avec la distance que l'attraction de micelle à eau, de sorte que, le corps gonflable étant en con= lacet avec de l’eau, il ne larde pas à se produire un état d'équilibre : le corps est saturé. Prenons done un corps organisé saturé d’eau d'imbibition et disposons-le de manière à ce qu'en un endroit circonserit il soit exposé à perdre de l'eau par évaporation, tandis qu'un autre endroit, situé à l'opposé, demeure en contact avec de l’eau liquide, le reste étant recouvert d’un vernis imper- méable. Sans détailler le phénomène, tout le monde comprendra qu'un courant d'eau s'établira dans la masse gonflée, de l’eau liquide à l'endroit J. VESQUE. — LA SÈVE ASCENDANTE 57 1 exposé à l'air, de telle sorte que, les surfaces étant bien calculées, le corps reste saturé. Evidemment cela ne suffit pas pour expliquer un mouvement de l’eau qui dépasse très souvent de beaucoup 2 mètres à l’heure. C’est pourquoi M. Sachs attribue aux seules pa- rois cellulaires lignifiées la propriété double et peu conciliable d’absorber l’eau avec une très grande énergie et de la laisser circuler dans sa masse avec une très grande facilité. Ceci étant admis pour le moment, il importe peu de connaître à fond la structure si compliquée du bois ; le tronc de l'arbre n’est plus physiquement qu'un échafaudage de lamelles cellulosiennes li- gnifiées et la sève ascendante ne cireule ni dans les vaisseaux, ni de cellule en cellule en traversant les parois, mais passe dans l'épaisseur même des pa- rois cellulaires. À mesure que la partie supérieure du bois perd l’eau enlevée par les cellules transpi- ratoires,une égale quantité d’eau est absorbée par la base. Cette théorie dite « de l'imbibition » doit son existence uniquement à l’absurdité des théories antérieures ; et malgré l’énormité physique qui est en quelque sorte son essence même, celte coexis- tence d’une grande attraction moléculaire et d’une grande mobilité des molécules attirées, elle a été acceptée et enseignée partout, 2. Chute de la théorie de l’imbibition. — Depuis bien longtemps cependant M. Bœhm s'était déclaré l'adversaire de la doctrine de M. Sachs ; mais il ne pouvait alors apporter ni de bons arguments con- traires à la théorie ni surtout une autre théorie plus acceptable. Déjà Unger et M. Rawenhoff avaient prouvé par des expériences que les quantités d’eau perdue par transpiration et absorbée en même temps par les racines ne sont pas nécessairement égales. En 1876 l’auteur de ces lignes fit de l'absorption de l’eau, dans ses rapports avec la transpiration, l’ob- jet de recherches étendues. Il démontra que, la transpiration augmentant de minute en minute, l'absorption suit d’abord cette augmentation pour se ralentir bientôt et atteindre une valeur qui n’est pas dépassée. Il en résulte que le poids vif d'une plante est essentiellement variable, qu'il diminue lorsque la perte très grande n’est que partiellement équilibrée par l’eau absorbée, grandit au contraire dès que, la transpiration étant fortement diminuée, la quantité d’eau absorbée dépasse les pertes. L'appareil très simple représenté figure 1 con- siste en un flacon À à large goulot C et portant à sa base une tubulure latérale dans laquelle on en- gage hermétiquement le tube B capillaire et gradué en centièmes de centimètre cube. Dans le goulot C on mastique hermétiquement une plante, par exemple une bouture de laurier rose. Tout l’appa- reil étant exactement rempli d’eau, on pèse le tout et on note le numéro de la graduation du tube B auquel est arrèté le ménisque. On expose ensuite la plante à l'air sec, pendant une demi-heure par exemple ; on pèse de nouveau l'appareil et on note la quantité d’eau absorbée en relevant la nouvelle position du ménisque dans le tube B. On verra que la plante a perdu beaucoup plus d’eau qu’elle n’en a absorbé. Si on abandonne ensuite la plante dans une enceinte très humide, on constatera au con- traire que le laurier rose a absorbé beaucoup plus d’eau qu'il n’en a perdu. On montre ensuite, à l’aide d’un instrument très sensible, qu'une élévation brusque de la tem- pérature d’une plante ligneuse se traduit par une diminution momentanée; et, inversement, un abaissement brusque par une exagération de l’ab- sorption de l’eau par les racines. Ce fait n’admet pas d'autre explication que la dilatation, l’augmen- tation corrélative de la pression de l'air contenu dans les éléments du bois, ou l'inverse. Voilà donc deux faits déjà peu compatibles avec la théorie de Sachs, qui exige l'égalité de l’absorp- tion et de la déperdition. Peu de temps après, un savant finlandais, M. Elf- ving, s'attaqua directement à la théorie de l'imbibi- tion. Si l’eau circule dans l'épaisseur des parois, si les cavités cellulaires n’y sont pour rien, la circu- lation doit continuer dans un tronçon de bois dont toutes les cavités sont injectées de beurre de cacao et par conséquent oblitérées. Le beurre de cacao présente cet avantage qu'il fond aux environs de 25 degrés et prend en se refroidissant une consis- tance très ferme. Le tronçon de bois ainsi préparé a élé trouvé imperméable à l’eau. Les plus fortes pressions n'ont pas suffi pour faire filtrer la moindre gouttelette d’eau à travers la masse des parois cellulaires. Vers la même époque parut la théorie de la sève ascendante de Bæœhm, dont je parlerai plus loin. 976 J, VESQUE. — LA SÈVE ASCENDANTE Ces diverses attaques ont provoqué la publication d'un mémoire de M.J. Dufour renfermant tous les arguments que l'auteur a pu opposer aux adyver- saires de la théorie de Sachs. L’ expérience de M. Elfvingne prouverait que ce fait, facile à prévoir, queles parois cellulairessaturées d'eaurefusent d'en absorber, même sous les pressions les plus fortes. Au lieu d'essayer de pousser de l’eau à travers le troncon de bois injecté de beurre de cacao, il aurait fallu laisser ce tronçon en contact avec de l’eau libre et lui enlever de l’eau de l’autre côté. Il était facile de corriger l'expérience. J'ai coupé sous l’eau plusieurs rameaux d’un même arbuste. Tous étaient d’abord plongés par leur base dans de l’eau chauffée à 36 degrés environ, puis on en a placé un certain nombre dans du beurre de cacao. Grâce à la transpiration, la matière grasse liquide a pénétré de quelques millimètres dans les vais- seaux du bois; on les a ensuite transportés dans de l’eau froide, où le beurre de cacao s’est figé, formant ainsi un bouchon hermétique dans chaque vaisseau; on à rafraichi la section à l’aide d’un rasoir et on a placé les rameaux dans l'eau à côté des témoins non injectés. L'expérience est des plus décisives : au bout de quelques instants déjà, les rameaux injectés commencent à se faner;le lende- main ils sont desséchés, tandis que les témoins ont conservé toute leur fraicheur. On ne pouvait plus faire qu'une seule objection : la matière grasse, par le simple contact, nuit à la conductibilité de la paroi lignifiée. Je n'ai pas répondu à cette objection, sachant comme tout le monde qu'il est extrêmement difficile, sinon impossible, d'imbiber d'un corps gras une matière saturée d’eau. Il est bon cependant que M. Errera ait songé, beaucoup plus lard, à écarter cette der- nière difliculté en substituant la gélatine au beurre de cacao. Le résullat à été exactement le même. Il est donc acquis dès à présent qu'il suffit de boucher les vaisseaux d’une plante dicotylédone sur une très faible longueur pour que l’afflux de l’eau ne puisse pas entretenir la transpiration; il est certain, en d’autres termes, que l’eau se meut dans les cavités cellulaires et non dans l'épaisseur des parois. Une autre objection est fournie à M. Dufour par des expériences déjà anciennes de Hales. Le savant anglais avait pratiqué sur un rameau d'une plante ligneuse deux enco- ches contrariées dépassant chacune la moitié de l'épaisseur du rameau (fig. 2). Il est clair que cette opération a pour résultat de couper et par conséquent d'in- terrompre tous les vaisseaux du bois. Un rameau traité de cette façon ne se fane pas; d’où M. Dufour conclut que les vais- Fig. 2. seaux et, d’une manière plus générale, les cavités cellulaires ne sont pas nécessaires à l’ascension de la sève. Après avoir répété bien des. fois celte expérience de Hales sur un, grand nombre de plantes ligneuses différentes, toujours avec le même résultat, après avoir constaté en revanche que la double encoche est fatale pourles plantes franchement herbacées qui ne possèdent pas d'autre élément conducteur que les vaisseaux, j'ai pensé que le court chemin oblique que l'eau avait à parcourir pour passer du (tronçon 4 au tronçon b, et de celui-ci au tronçon € n'était pas de nature à opposer à l'ascension de l’eau un obstacle suffi- sant pour entrainer l& fenaison. En effet le liquide doit traverser un certain nombre de cloisons qu'il aurait évitées dans le rameau normal,, mais, qui n'offrent peut-être pas à la filtration une résistance très grande. Il était facile d'augmenter cette résis- tance en forçant l’eau à parcourir un chemin oblique beaucoup plus long. Pour cela j'ai com- mencé par m'assurer que quatre encoches! super- posées deux à deux et alternativement à droite et à gauche du rameau, n’entrainent pas plus la fenaison que les deux encoches de l’expérience précédente. Puis sur d’autres rameaux des mêmes plantes j'ai disposé les quatre encoches en spirale successivement suivant les quatre faces d'un prisme carré circonscrit au rameau. Un coup d'œil sur les développements du cylindre ci-contre (fig. 3) sur lesquels l'emplacement des encoches est marqué par de simples traits horizontaux tandis que le cou- rant de sèveestindiqué paruneligne pointillée,suffit Fig. 3. pour faire voir que dans le second cas (fig. 3, B) le chemin oblique parcouru par la sève est beaucoup plus long que dans le premier (fig. 3, A)et que le courant doit rencontrer une résistance à la filtra- tion beaucoup plus grande. L'expérience a montré que la grande majorité des rameaux traités de cette manière, se fanent. Il en est cependant, par exemple ceux de Seringat (?hiladelphus) qui résistent même à cette mutilation. Il est donc évident que le passage de la sève est d'autant plus | (1/7: VESQUÉ! :— LA SÈVE ASCENDANTE difficile qu'on la force à suivre un parcours {rans- versal plus long, ce qui est encore une fois incom- > patible avec la théorie d'imbibition considérant le ni { ji : Leorps ligneux comme une masse de cellulose ligni- fiée dans laquelle l'eau doit pouvoir se déplacer ‘avec une facilité presque égale dans tous les sens. MM. Francis Darwin et Phillips ont repris cette expérience des encoches ; ils l’ont perfectionnée, en ce sens qu'ils ontsuivi exactement el au moment mème l'effet qu’elles produisent sur l'ascension de lursève. Il suffisait pour cela de mastiquer les rameaux dans un des appareils permettant d’éva- luer à chaque instant l'absorption de l'eau; le L'irésultat très intéressant de ces essais a été le sui- vant : chez les plantes ligneuses dicotylédones, pourvues de vaisseaux dans le bois secondaire, les encoches de Hales entravent considérablement l'ascension de la sève, quoique les feuilles ne se fanent pas, tandis que chez les Conifères qui ne pos- sèdent pas de vaisseaux dans le bois secondaire, l'effet est beaucoup moindre. Maintenant que nous connaissons ce résultat, nous serions presque tentés de dire qu'il fallait s’y attendre; en effet chez les Conifères le courant traverse normale- ment un nombre incalculable de parois, de sorte que quelques cloisons de plus ne peuvent produire qu'un effet relativement faible; il n’en est pas de même pour les plantes à bois vasculaire, chez lesquelles un petit nombre de cloisons supplémen- {aires à traverser doivent opposer une résistance très appréciable à côté de la faible résistance que l'eau éprouve dans un système vasculaire. On voit que l'expérience de Hales, convenable- ment étudiée et variée, au lieu de soutenirla théo- rie de l’imbibition, a fini par tourner contre elle. Mais avant d'aller plus loin, arrêtons-nous un ins- tant à la troisième objection de M. Dufour. Réunis en faisceau, tous ces faits et d'autres encore sont absolument contraires au mouvement de l’eau dans l'épaisseur des parois cellulaires, I1 semble acquis sans contestation possible que l’eausemeut dansles vaisseaux, danslestrachéides, bref dans les cavités cellulaires et que, si elle tra- verse des parois, ce qui doit arriver souvent, c’est perpendiculairement à leur surface et surtout dans ces endroits minces qu'on appelle les ponctuations. Cependant, chose assez étrange, l'observation directe faisait encore défaut. C’est une lacune que j'ai eu le bonheur de combler en 1883. On coupe sous l’eau unrameau d’une plante vas- eulaire quelconque; on en taille la base en forme d'un biseau très allongé; on couche ce biseau dans une forte goutte d’eau sur le porte-objet du microscope; on le recouvre d'une seconde lame de verre et on fixe le tout à l’aide des valets du microscope. Si l’on mêle à l’eau une goutte d’eau tenant en suspension un fin précipité d’oxalate de chaux, on voit les granules solides pénétrer en tourbillonnant avec une rapidité vertigineuse dans les orifices des vaisseaux du bois; ils s’y accumu- lent parfois au point de former un bouchon qui finit par être aspiré tout entier avec une grande violence. Ce jeu se continue pendant des heures; il ne saurait done être question ici d’un courant momentané tel que l'aurait produit l'existence d’un vide partiel dans les vaisseaux. Si l’on coupe la partie feuillée du rameau, le phénomène s’arrête instantanément. Il n'est pas rare de constater qu'un vaisseau absorbe directement de l’eau, alors qu'il est en apparence obstrué par une colonne d'air. Il était intéressant de voir ce qui se produi- rait si la plante ne pouvait pas absorber d’eau. A cet éffet j'ai hermétiquement bouché l'extrémité du rameau coupé et j'ai aminci la tige un peu plus haut de manière à voir ce qui se passe dans les vaisseaux. Des bulles d'air de plus en plus nom- breuses surgissent partout, finissent par devenir confluentes, de telle sorte que le vaisseau tout en- tier peut se remplir d'air. Si l’on amène de l’eau, des index liquides né tardent pas à se former dans les vaisseaux; les bulles d'air diminuent et sont entrainées par le courant dès que leur diamètre devient inférieur à celui du vaisseau. Cette dernière observation qui n'avait été faite que sur des rameaux coupés à élé répétée et con- firmée sur une plante enracinée (un Bégonia) par M. Capus. Il à suffi pour cela de faire une forte encoche d’un côté de la tige, d'y exlirper la moelle, d'amincir le bois de l’autre côté de la tige en re- gard de l’encoche et de faire les observations à l'aide d’un microscope horizontal. En présence de faits si nombreux et si précis, il était difficile de défendre davantage la théorie de l'imbibition. Mais le principe lui-même de lPimbi- bition et de la mobilité de l’eau d’imbibition a été bientôt l’objet de critiques très sévères, notam- ment de la part de M. Schwendener. Le savant professeur de Berlin ne croit pas qu'il ÿ ait une dif- férence de principe entre la capillarité et limbibi- tion. Les lois expérimentales de la capillarité ont été établies pour des espaces directement mesura- bles ; mais si les espaces deviennent plus petits (au- dessous d’un millième de millimètre par exemple tout ce qu'on sait, c’est que la force capillaire atteint une hauteur considérable (5 à 6 atmos- phères) sans pouvoir établir de rapport entre elle et la grandeur des espaces. Cela doit être d'autant plus vrai pour les espaces intermicellaires des corps organisés. Il est peu important de savoir que le corps imbibé d'eau augmente de volume ou se contracte. On sait que lorsque deux plaques de verre suspendues parallèlement sont rapprochées 518 J. VESQUE. — LA SÈVE ASCENDANTE à 0" 005 de distance et qu'on les touche à la partie inférieure avec de l’eau libre, l’eau s'introduit entre elles par capillarité et les deux plaques se rappro- chent l'une de l’autre d’une quantité mesurable. Théoriquement le même phénomène se produit dans un tube capillaire : ce tube se rétrécit pen- dant que l’eau monte. La rigidité des parois du vase ou du corps poreux quelconque ne saurail en aucune facon servir à caractériser la capillarité vis-à-vis de l’imbibition. Tout corps poreux doit diminuer de volume sous l'influence des ménis- ques concaves de l’eau qu'il absorbe par capilla- rité ; peu importe que la diminution de volume soit mesurable ou non. Qu'on empile, par exemple, les unes sur les autres 50 lamelles minces telles que les emploient les micrographes pourrecouvrir les préparations et qu’on mouille le bord de la pile à l’aide d'un pin- ceau chargé d’eau, on observe un raccourcissement de 0%00%, ce qui fait pour chaque espaces p. Si l’on imagine maintenant que les espaces capil- laires deviennent de plus en plus petits, jusqu’à ce que la portée appréciable de l'attraction entre la paroi solide et l'eau devienne plus grande que la moitié de l’écartement des parois solides opposées, attraction entre le solide et l’eau doit avoir pour effet d’écarter les parois solides; le corps, autre- ment dit, doit augmenter de volume quoique les ménisques concaves, après comme avant, tendent à produire une contraction. En diminuant graduel- lement, les espaces capillaires doivent passer par une largeur à laquelle les deux influences se font équilibre, à laquelle le volume reste constant ; mais au-dessous de cette valeur il y a nécessairement gonflement. Où est donc maintenant la limite entre l'imbibi- tion et la capillarité? Y a-t-il imbibition dès qu'il y à gonflement? Y a-{:il capillarité tant qu'on aperçoit des canaux préexistanis? Dans le premier cas on couperait en deux une succession de phéno- mèênes parfaitement continue ; dans le second on ferait de la perfection de nos instruments le crité- rium distinctif. Assurément tout cela est inadmis- sible. Quant à la mobilité de l’eau d'imbibition, telle que sela figure M. Sachs, mais qui n’a jamais été observée directement ni même déduite logique- ment de faits bien établis, il ne faut pas perdre de vue que la molécule d’eau en contact immédiat avee la paroi Solide est immobile et que, si de l’eau se déplace dans un système capillaire, l'eau glisse sur l’eau. Le frottement augmente d’ailleurs rapidement en même temps que les espaces capillaires dimi- nuent. Lorsqu'il s’agit d'espaces extrêmement pe- tits,comme ceux d'un corps gonflable, la force ca- pillaire en même temps que la résistance du frot- tement atteignent des valeurs très grandes. L'une ne va pas sans l’autre. Concluons done que l’eau se meut non dans l'épaisseur des parois, mais dans les cavités cellu- laires, qu'elle peut circuler librement dans les vaisseaux ou passer d’un élément dans l’autre, à travers les parois; les ponctuations, qui ornent ces parois et qui sont autant de fenêtres très per- méables, semblent précisément destinées à faciliter ce passage de l’eau. Il Voyons maintenant quelles tentatives ont élé faites pour mettre une théorie acceptable à la place de l’ancienne, 3. La structure du bois au point de vue physique. — Avant d'aborder l'étude critique des diverses théo- ries, ilest nécessaire denous faire une idée suffisam- ment exacte de la structure anatomique du bois. Le bois de Pin consiste en deux sortes d’élé- ments, les trachéides et les cellules des rayons médullaires, les premières mortes, les dernières vivantes. Les trachéides sont des cellules prisma- tiques, allongées, terminées en biseau aux deux extrémités, entièrement closes, assez larges, à sec- tion presque carrée el à parois médiocrement épaissies dans le bois de printemps (fig. 4), forte- Fig. 4. (semi-schéma= tique). — Bois du Pin. À, coupe transversale; B, coupe longitudinale radiale; C, coupe lon- gitudinale tangentiel- le. TT, T'T': lignes de terre. — R, rayon médullaire ; p, ponc- tuation aréolèée com- plète; p', ponctuation aréolée unilatérale, a- réolée du côté de la trachéide, simple du côté de la cellule du rayon médullaire. ment aplalies radialement, et à parois plus épaisses dans le bois d'automne. Toutes les tra- chéides d’une même file radiale, allant du centre à la périphérie, sont situées au même niveau (B) tandis que les trachéides contiguës occupent tou- jours des niveaux différents lorsqu'on les consi- dère sur une coupe longitudinale excentrique et m) bare. sd. als «mdr à dr J. VESQUE: — LA SÈVE ASCENDANTE 579 pérpendiculaire au rayon médullaire, c’est-à-dire parallèle au plan tangent. Les rayons médullaires peuvent être comparés à des murs assez bas, ver- ticaux, dirigés de la périphérie vers le centre sur une longuéur variable et composés de cellules pa- rallélipipédiques, rectangulaires, superposées en uné seule rangée comme les briques d'unmur. Les cellules qui forment les arêtes supérieures et infé- rieures de ces murs engagés entre les trachéides sont atténuées en biseau. Un coup d'œil sur la fi- gure 4 C montre comment le système continu des trachéides est coupé par ces rayons médul- laires. Seules les parois radiales, parallèles aux rayons médullaires, sont marquées de larges ponc- tuations dites aréolées, construites de manière à allier une grande surface mince et très perméable à une grande solidité de la paroi. Si l'on demandait à un ingénieur de construire un plancher à la fois solide et perméable à l’eau, il commencerait par former le plancher solide, il y percerait des fenêtres dans lesquelles il enchässerait des mem- branes perméables : ce seraient les ponctuations simples ; mais la perméabilité ainsi réalisée peut ne pas suflire ; il serait cependant dangereux d'agrandir purement et simplement les fenêtres perméables; dans ces cas nous construisons de chaque côté du plancher et sur le pourtour de chaque fenêtre une voûte surbaissée percée au sommet, à la place de la clef de voûte. L'eau passe librement à travers ces ouvertures, filtre à travers la large membrane perméable et s'échappe par l'ouverture de la voûte inférieure. Telles sont les ponctuations aréolées. Ajoutons que la membrane perméable est extensible el sensiblement épaissie au milieu, de telle sorte qu'elle peut, sous l'effort d’une pression unilatérale, se mouler sur la sur- face concave de l’une des voûtes en même temps que le milieu épaissi vient obstruer l’ouverture de la voûte. C’est donc par des poncluations sem- blables, très grandes et nombreuses que communi- quent entre elles les trachéides placées côte à côte sur une coupe langentielle ; il n’en existe pas entre une trachéide quelconque et une autre plus exté- rieure de la mème file. Il n’y a donc communica- tion qu'entre des trachéides placées à des niveaux différents. Les ponetuations communes aux tra- chéides et aux cellules des rayons médullaires ne sont aréolées que du côté des trachéides, taillées à pic de l’autre côté. Plusieurs auteurs et tout ré- cemment encore M. Bæhm, ont admis qu'il doit y avoir dans le bois des Conifères des files verticales des systèmes de trachéides communiquant libre- ment entre elles, non par des ponctuations mais par de véritables trous. Je crois qu'il est sage, du ‘moins jusqu'à nouvel ordre, de considérer les tra- chéides comme des cellules closes. Chez les Dicotylédones, la structure du bois es plus compliquée. Il y a généralement une différen- ciation plus avancée des éléments ligneux, en élé- ments conducteurs, vaisseaux el trachéides, (et en éléments mécaniques, des fibres très épaissies, le libriforme des auteurs allemands. A cela viennent s'ajouter des: cellules vivantes à parois assez minces, nombreuses, souvent réunies en un tissu qui traverse le bois sous la forme de larges rubans visibles à l’œil nu sur la coupe transver- sale, ou localisé aux environs des vaisseaux, les reliant obliquement entre eux et avec les rayons médullaires, d’autres fois isolément dispersées au milieu des autres éléments du bois : c'est le parenchyme ligneux: Les rayons médullaires présentent en principe la même structure et; la mème disposition que chez les Conifères, mais ils sont plus souvent formés par plusieurs rangées de cellules. TSH ES ee < Fig. 5 (schématique). — Coupes iransversale et longitudinale tangentielle (parallèle au plan tangentà la tige) dutbois d’une Dicotylédone. Les ponctuations ne sont pas figurées, Sauf quelques-unes dans le parenchyme ligneux, pour mon- trer qu’on doit voir par ci par là uné cloison transversale sur la coupe transversale du bois. — », vaisseaux, l’un deux avec son diaphragme percé de trois trous et qui, étant oblique, a été supposé enlevé en partie par le rasoir (coupe transversale); pl, parenchyme ligneux; f, files mécaniques du bois; R, rayon médullaire: la coupé transversale a tra- versé le rayon médullaire dans sa partie supérieure où il ne consiste qu’en une seule file radiale de cellules. Les vaisseaux, longs tubes dus à la fusion de cellules superposées en file et dont les parois transversales détruites laissent des diaphragmes incomplets, tantôt réduits à une légère saillie interne, annulaire, tantôt percés de trous ou de boutonnières parallèles, ont les parois! longitudi- nales épaissies intérieurement en forme d’anneaux horizontaux ou despirale lorsqu'ils se sont déve- 580 J. VESQUE. — LA SÈVE ASCENDANTE loppés avant l'achèvement de l'élongation de l'organe, ou des parois épaissies et couvertes de poncluations simples ou aréolées. Ils ne se dis- tinguent des trachéides que par la perforation complète des diaphragmes. Les vaisseaux et les trachéides du bois conducteur sont rarement entièrement remplis d’eau; ordinairement dans le bois frais ils renferment des chapelets de Jamin d'air et d’eau et peuvent même, à l’occasion, ne plus contenir que de l'air à une faible pression. Ces quelques données anatomiques sufliront, je l'espère, pour que le lecteur, peu au courant de l'histologie végétale, n’éprouve pas trop de diffi- culté à bien comprendre les chapitres suivants. 4. La théorie atmosphérique de Bœlmet de R. Hartig; la théorie capillaire d'Elfving. Le système conducteur se décompose en deux parties : 1° les tissus parenchymateux formés par des cellules vivantes entièrement remplies de liquides et limitées par des membranes non seule- ment élastiques, mais encore déformables; 2° le bois, qui consiste en cellules mortes et en vais- seaux pouvant renfermer à la fois de l’eau et de l’air et limitées par des membranes lignifiées et rigides. Les cellules vivantes du bois n’interviennent pas. Décrivons d’abord le mécanisme du mouvement de l’eau dans les parenchymes. M. Bæhm n’attribue pas à l’osmose le rôle prépondérant que je lui ai assigné plus haut; il croit au contraire que la paroi cellulosienne, perméable à l’eau, imper- méable à l'air gazeux, suflit pour expliquer la trans- mission de la succion qui résulte de l’évaporalion de l’eau à la surface des cellules transpiratrices. Une cellule donnée, perdant de l’eau, diminue de volume; sa paroi se rétrécit, se gauchit même; mais elle tend à reprendre son volume primilif; elle exerce done une succion sur une cellule située plus profondément; celle-ci abandonne de l’eau à la première, diminue de volume; sa paroi tend à reprendre la forme primitive et ainsi de suite de proche en proche. L'ascension de l’eau dans un système semblable serait donc une résultante de l’élasticité des parois cellulosiques et de la pres- sion atmosphérique. Il n’en est plus de même dans le corps ligneux. Soient (fig. 6} V un vaisseau, CC des files de cellules placées à droite el à gauche et contiguës au vais- seau, le tout à parois rigides. La transpiration active dont les parenchymes superficiels sont le siège a transmis sa succion jusqu'au vaisseau el aux cellules ; de l'air gazeux devient libre (4); pen- dant que le vaisseau se remplit d'un chapelet de Janin qui ne peut plus être déplacé en bloé, chacune des cellules montre bientôt une bulle d'air qui en occupe sensiblement Je centre. Il esticlair que les bulles d'air seront d'autant plus grandes el à une pression d'autant plus faible qu’elles sont plus proches du sommet!. Le parenchyme prend-il de l’eau aux cellules 1 et au vaisseau) le volume de l’eau diminue dans ces: éléments ; par conséquent les bulles d'air qu’ils renferment grandissent et diminuent de pression. Il en résulte que la pression de l'air est plus forte dansiles cellules 2 et dans la bulle 4 que dans les cellules1 ; de l'eau sera done chassée de ces cellules et: du vaisseau dans leurs voisines supérieures, mais alors les bulles d'air grandissent, leur pression diminue et ainsi de suite. L’eau suivra d’élément en élément, de I et de 3 en 2, deIlet de 4en 3, ete., le chemin indiqué par les flèches. Ce travail se continue jusqu'aux racines où d’une part la poussée osmotique peut déjà fournir de l’eau, où d’autré part la pression atmosphérique, pesant sur l’eau du sol, peut faire pénétrer de l’eau par un méca- nisme analogue à celui dont nous avons étudié les principes tout à l'heure. Dans le système ligneux à parois rigides, l’élasticilé de l'air inclus rem- place mécaniquement celle des parois cellulaires des tissus parenchymateux. Les chapelets de Jamin dans les vaisseaux, la résistance à la filtration opposée par les parois lignifiées des cellules empêchent la colonne liquide de descendre; la pression atmosphérique morcelée quant à son 1 On peut se rendre compte de la faible pression de Pair inclus dans les vaisseaux en coupant un vaisseau sous le mercure : si l'on force ce vaisseau longitudinalement, on trouve les vaisseaux injectés sur une assez grande longueur. (Expérience de M. Von Hæœhnel), | | J./VESQUE. — LA SÈVE ASCENDANTE o81 action, depuis les racines jusqu'aux feuilles, où lon peut admettre l'existence du vide de Toricelli dans les vaisseaux, est le moteur. Les diverses parcelles d’eau pèseraient done sur les parois cellulaires, ne se sommeraient pas en une colonne continue, et l'eau serait chassée de cellule en cellule, de cellale en vaisseau, de vaisseau en cellule, par des différences de pression de lair inclus. Les idées exposées par M. Elfving présentent trop d'analogie avee celles que je viens d'exposer pour que. je ne leur consacre de suite quelques mots. Nous en discuterons la valeur en même temps que nous critiquerons la théorie de Bæhm. Si l’on tâche de voir dans l’espace la distribution de l’eau et de l'air dans un groupe d'éléments ligneux, on peut arriver à deux résultats diffé rents : ou bien les pelites masses d’eau, abstrac- tion faite des cloisons perméables qui les coupent, sont suspendues isolément à l’intérieur des corps ligneux comme le seraient des gouttes séparées les unes des autres; où bien ces masses d’eau sont arrangées de manière à constituer par leur réunion un fil d’eau ou plusieurs fils d’eau allant de la base au sommet de l'arbre. Remarquons bien qu'il ne s’agit pas ici d’hypothèses, mais que nécessairement l’un ou l’autre cas, peut-être Lous les deux se présentent. Or le fil d’eau continu est la condition « sine qua non » des théories de MM. Bæœhm et Elfving de forme ondulée (fig. 7); il consiste en particules d’eau dont chacune est limitée en haut et en bas par une bulle d’air; les bulles d’air portent même les index d’eauet M. Zimmermann a démontré par l'expérience que les bulles d’air peuvent porter une colonne d'eau qui équivaut à la sixième partie de l’ascension capillaire. Chaque index d’eau est donc en équilibre, n’exerce aucune pression de haut en bas; il a, en quelque sorte, perdu son poids. Un pareil système peut donc s'élever à une hauteur quelconque. L’analogie avec le système de Jamin, qui 1gno- rait malheureusement la structure du bois, est évidente. Comme dans le corps poreux que ce physicien employait, nous avons affaire à des fils d’eau portés par des bulles d'air. Il est vrai que les espaces capillaires de l'appareil de Jamin sont beaucoup plus fins que ceux du bois; mais ceci n’est que d’une importance secondaire; la nature de la surface évaporante est au contraire très importante ; si cette surface est assez dense pour que l'air ne puisse pas la traverser, les espaces capillaires peuvent présenter une structure quel- conque. Mais dans la plante, non seulement la sur- face transpiratrice satisfait à ce désidératum, mais encore le fil d’eau est coupé par d'innombrables cloisons perméables à l’eau et imperméables à l'air gazeux. Passons maintenant aux objections qui ont été faites à ces Théories. Les fils d’eau dont parlent M. Bæœhm et M. Harlig son£ suspendus au ménisque supérieur. Mais au- dessus de ce ménisque supérieur est une bulle d'air d’une pression très faible, mettons même une bulle de vide. Si donc les tubes qui consti- tuent le bois n'étaient pas capillaires, la pression atmosphérique ferait monter l’eau à 10 mètres de hauteur; comme ils le sont, il faut y ajouter l'ascension capillaire; soit au maximum 4 mètres, ce qui donne pour la hauteur maxima de l’arbre 1% mètres. On accordera volontiers, je pense, que le système de M. Bæhm ou de M. Elfving, une fois suspendu dans le corps ligneux, peut s'y maintenir en équi- libre grâce à la résistance à la filtration au’oppo= sent les innombrables cloisons qui coupent le fil d'eau. Les bulles d'air n’y sont plus pour rien, car il est indifférent que le fil d’eau soit rectiligne ou onduleux, il n’en Lendra pas moins à descendre. La différence entre le système d’Elfving et celui de Jamin, réside en ce que les particules solides de Jamin y sont remplacées par des parois émi- nemment perméables qui font en quelque sorte elles-mêmes corps avec le fil d’eau. Maïs la résis- tance qui s'oppose à la descente de la colonne liquide est nécessairement la même qui s'oppose à son ascension si une force quelconque vient solliciter la colonne dans cette direction : mouve- ment perpétuel. Telle est l’objection faite, je ne dis pas par quelques-uns, maïs par la grande majorité des auteurs qui se sont occupés de la question. Est- elle inattaquable? Je n’oserais le soutenir. On à peut-être grand tort de faire intervenir la pression dans les affaires de capillarité. 11 y a un fil d’eau suspendu en équilibre dans un système quelconque! Si nous tirons sur ce fil d’eau, il suit tout entier: la limite est donnée non par le poids du fil qui n'existe plus, mais par le frottement: et la résis- tance à la traction du fil, résistance qui est d'autant plus grande que l’eau est parfaitement purgée d’air dissous. Cest évidemment vers cette dernière conception que penche le schéma de M. Elfving. Ce savant ne se préoccupe pas de la pression de l’air : il ne fait agir que la capillarité seule et croit que le corps ligneux est un système capillaire perfectionné comparable à celui que Jamin a réalisé en foulant dans un tube divers corps pulvérulents. M. Bœhm admettait que la pression ‘de l'air inclus, très faible au sommet de l’arbrel était de plus en plus forte à mesure qu’on approchaït de la base, mais que même à l'extrémité des racines elle était encore au-dessous de l'atmosphère. Cette différence était à ses yeux la principale cause de l'absorption de l’eau. Quant à l’osmose, elle lui semblait trop lente dans ses effets pour qu'on püt se dispenser d'y recourir. R. Hartig, au contraire, donne à la poussée des racines une importance dominante. Il admet en outre pour le mécanisme de l'ascension à l’intérieur du boïs une modification du schéma de Bæhm. Ce seraient bien les différences de pression aérosta- tique qui chassent l’eau de trachéide en trachéide, mais à l’intérieur de chacune de ces cellules l’eau monterait en vertu de la capillarité; il ne dit pas comment. Ce sont là, brièvement caractérisées, les diverses doctrines proposées par ceux des auteurs qui ad- mettent que les forces en jeu sont purement phy- siques. Je me réserve cependant d’en citer encore deux autres plus récentes, l’une due à M. Bæhm et qui a été publiée récemment, l’autre que j'ai proposée moi-même il y a trois ans et que je puis aujourd’hui appuyer sur des expériences nou- velles. En résumé, à toutes celles que je viens de décrire, on a reproché d'être contraires au principe de la conservation de l'énergie. III 5. Les théories physiologiques de Westermaier et de Godlewski. — M. Westermaier fait remarquer que chez un grand nombre de Dicotylédones le bois composé de vaisseaux, de trachéides, de fibres, tous éléments anatomiques morts, est parcouru par deux sortes de tissus vivants, les rayons mé- dullaires qui se dirigent de la périphérie à la moelle et le parenchyme ligneux touchant par ci par là aux vaisseaux, aux trachéides et en d’autres endroits aux rayons médullaires. Le bois renferme donc une sorte de réseau irrégulier el vivant qui enlace les éléments morts. Supposons mainte- nant que les vaisseaux renferment des chapelets de Jamin immobiles, et qu'un index d'eau occupe précisément l’endroil où le vaisseau confine à du parenchyme ligneux; ce tissu vivant absorberait de l’eau puisée dans le vaisseau et la transmettrait de proche en proche et par l'intermédaire d’un rayon médullaire à un autre vaisseau, mais à un niveau plus élevé. Cetle propriété des tissus vi- vants d'absorber de l’eau et de rendre de l'eau à un niveau plus élevé serait assurément fort étrange; mais les parenchymes de la racine sont certaine- ment dans le même cas : il y a done un précédent, Autre chose est de savoir si ce mouvement osmo- tique, d’ailleurs purement hypothétique, car il ne 582 J. VESQUE. — LA SÈVE ASCENDANTE repose sur aucune observation, est assez rapide pour expliquer l'ascension de la sève. M. Wester- maier a essayé de s’en rendre compte à l'aide della moelle vivante de quelque grande plante herba-: cée et qu’il a d’abord laissée se faner pour la plon- ger ensuite par une extrémité dans l’eau; ila noté le temps nécessaire pour que l’autre extré-| mité reprit sa turgescence. Le résultatial été peu encourageant. On a encore reproché à la théo- rie de M. Westermaier de ne pas s'appliquer aux Conifères qui ne possèdent pas de parenchyme! ligneux proprement dit et chez lesquelles, par conséquent, les rayons médullaires ne commu niquent point entre eux par des tissus vivants. On trouverait aisément d’autres bois qui manquent de parenchyme ligneux ou dont ce tissu est trop dis- séminé pour former des chaines continues. M. Godlewski n’a pas recours au parenchyme li- gneux ; il s’en tient aux Conifères dontil décritsoi- gneusement le bois, nous montrant qu'une cellule de rayon médullaire observée sur la coupe trans- versale confine à gauche et à droite à deux tra- chéides placées à des niveaux différents. Il suffi- rait donc que cette cellule puisàt de l’eau dans la trachéide inférieure et la déversât dans la trachéide supérieure pour qu'elle fût comparable à une sorte de cœur, à une pompe aspirante el foulante. Au- tant de cellules de rayons médullaires, autant de moteurs. Pour que cela fût possible, il faudrait que la perméabilité du protoplasma se modifiàät pério- diquement et très vite, afin de réaliser les deux soupapes d'arrivée et de départ sans lesquelles la pompe ne pourrait pas fonctionner. Que d’hypothèses! Même quand ces cellules :se- raient douces de cette merveilleuse propriété, il serait facile de démontrer que l’eau ne monterait en aucune façon. Il est vrai que les trachéides pla- cées à droite et à gauche d'un rayon médullaire appartiennent à des niveaux différents ; entre deux rayons médullaires il y a de nombreuses files de lrachéides qui communiquent facilement entre elles par les poncluations aréolées; or toutes ces files de trachéides sont disposées à des niveaux différents. La cellule vivante doit puiser à gauche, non pas seulement dans la trachéide à laquelleelle touche, mais par l'intermédiaire de celle-ci dans les suivantes; elle déverse de l’eau à droite non seulement dans la trachéide immédiatement con- tiguë, mais encore dans les suivantes, ete. Or comme toutes ces trachéides sont à des niveaux différents, et qu’elles sont nombreuses, on peut dire que leur niveau moyen est le même à droite et à gauche; les cellules des rayons médullaires sont condamnées au travail des Danaïdes. Néanmoins la théorie de Godlewski a eu assez de retentissement. Je pense même que plusieurs mt to om . E este dé on Dés à to tiie statues Er J. VESQUE. — LA SÈVE ASCENDANTE »83 auteurs, fatigués de la lutte, ont fini par l’adop- ter, M. R. Hartig me parail être de ce nombre. Un jeune savant hollandais, M. Janse, croyait même avoir démontré l'exactitude de cette théorie par des expériences dont il convient de dire quel- ques mots. La base d'un rameau ayant été luée par de l’eau chaude, si l’eau ne continue pas à monter dans ce rameau, c’est que les cellules vi- vantes sont nécessaires à l’extension de la sève. M. Janse, voyant que ces rameaux-se flétrissent et périssent à la longue, n'a pas hésité à se prononcer pour la théorie de Godlewski. Jai répété ces ex- périences sur plusieurs plantes, le troëne, le fram- boisier, le rosier, le pin, etc. Toujoursles rameaux soumis à ce traitement sont restés frais durant deux ou trois semaines; ce n'est qu'au bout de ce temps très long que les feuilles les plus jeunes commencent à souffrir visiblement, sans présenter bien manifestement les symptômes du manque d’eau. Si en ce moment on étudie au mi- croscope la partie vivante du rameau avoisinant la région tuée par l’eau bouillante, on trouve les vaisseaux au moins partiellement bouchés par une matière gommeuse, c’est-à-dire par de la gomme cicatricielle qui se forme régulièrement dans le voisinage des parties tuées par la gelée, les brü- lures, les blessures, etc. La présence de cette gomme explique d’une manière toute physique l'arrêt définilif de la sève ascendande. M. Bœhm a fait récemment des expériences analogues sur des boutures de saule, dont il avait tué par l’eau bouillante soit les racines seules, soit les racines et la base de la tige. Ces boutures, ne lrempant dans l’eau que par l'extrémité de leurs racines, ont continué à transpirer à peu près aussi aclivement que des boutures normales. Contrairement à l'opinion de M. Janse, ces expé- riences prouvent que l'ascension de la sève se fait normalement dans un rameau de quelques déci- mètres de longueur et dont les tissus vivants ont élé tués en tout ou en partie. Est-ce à dire que les choses doivent se passer de la même manière dans un grand arbre? Évidem- mentnon. Malheureusement nous n'avons aucune expé- rience qui puisse nousrenseigner à ce sujet. Il faudrait répéter l'expérience de M. Janse sur un arbre tout entier dont on tuerait tout le bois con- ducteur jusqu’à la hauteur de 14 à 16 mètres. L'ex- périence ne serait pas irréalisable, mais malheu- reusement très coûteuse, Si les feuilles ne se fa- naient pas en très peu de temps, si par exemple elles restaient fraiches pendant plusieurs jours, il faudrail en conclure que les tissus vivants du bois ne participent pas à l'ascension de la sève. On abattrait ensuite l'arbre pour s'assurer à l’aide du microscope de la profondeur à laquelle l’élévation de la température a été suffisante pour entrainer la mort des cellules. 6. Retour aux théories physiques. — Actuelle- ment nous sommes toujours en présence de l’al- ternative suivante : 1° Les forces purement phy- siques suffisent pour élever l’eau jusqu'aux feuilles des arbres et alors les théories physiologiques, dé- nuées de tout fondement expérimental, n'ont pasde raison d'être. 2° Elles ne suffisent pas, et alors il faut tächer de trouver la solution du problème dans l’osmose des cellules vivantes. IL me semble que le premier désidératum à sa- tisfaire est d'étudier soigneusement les phéno- mènes capillaires dont le bois est le siège. J'ai pu- blié à ce sujet, il y a quatre ans, un travail dont les conclusions n'ont pas été réfutées malgré la promp- titude avec laquelle quelques auteurs ont opposé aux théories physiques un « velo » généralement bien fondé.Je prends donc pour exemple le bois de Pin dont la figure ci-contre représente une coupe longitudinale langentielle. Fig. 8. — Schéma de la répartition et du mouvement de l'eau dans le bois conducteur d’une Conifère. La disposition des trachéides répond à ce qu'on voit sur une coupe tangen- tielle; mais on a été obligé de figurer les trachéides plus courtes relativement à leur largeur qu’elle ne le sont réel- lement. Il est donc probable que des masses d’éau résul- tant de la juxtaposition de deux ou plusieurs pointes, telles qu’on les voit auprès des lettres À et E doivent étre plus rares et moins volumineuses. Les: trachéides d’une même file radiale (perpendiculaire au plan du papier) étant sensi- blement situées au même niveau, il faut se figurer ces masses d’eau continuées sous la forme d’un fil horizontal étendu depuis le cambium jusqu’à la limite interne du bois conducteur. On y reviendra plus loin dans le texte, Chaque trachéide renferme une longue bulle d'air et dans chaque pointe une petite masse d’eau: elle est entièrement close par une membrane sa- 84 J. VESQUE. — LA SÈVE ASCENDANTE turée d’eau, imperméable à l’air gazeux, mais d’au- tant plus perméable à l’eau que les paroislatérales (perpendiculaires au plan du papier) sont garnies de nombreuses poncluations aréolées. On voit que, dans mon schéma, les petites masses d’eau ne sont pas disposées de manière à former un fil continu comme dans ceux de M. Bœhm et de M. Elfving. La pression de l'air inclus dans ces trachéides est d'autant plus faible que l'élément anatomique est situé à un niveau plus élevé. Cette pression est donc plus forte dans la trachéide B que dans la trachéide A, plus forte en À qu'en D et en G. La pression de A fait passer une partie de l’eau contenue dans la pointe supérieure dans la trachéide D ; en même temps la bulle d'air s’avance dans la pointe; mais, la pression de A ayant diminué, celle de B chasse de l’eau de la pointe supérieure de la trachéide B dans la trachéide A. Que devient cette eau librement répandue sur la paroi de A, et cela au moment même où le ménisque supérieur de la bulle d’air se trouve refoulé dans la pointe? En vertu de la tension de surface une partie de celte eau montera le long de la paroi pour aller se loger dans la pointe supérieure de À, et ce chemin qui équivaul ici à la moitié de la lon- gueur de la trachéide est parcouru entièrement en vertu de la capillarité. J'ai même dit, et je le prou- verai plus loin, que si, étant donnée une trachéide solée, on enlève de l’eau à la pointe supérieure, la pointe inférieure pouvant d’ailleurs recevoir de l’eau du dehors, une partie de l’eau contenue dans la pointe inférieure montera par capillarité le long des parois dans la pointe supérieure. Ce cas particulier estindiqué dans la trachéide E. M. Schwendener m'a objecté que la couche d’eau qui revêt intérieurement la paroi de la lra- chéide est trop mince pour être mobile et m'a opposé à ce sujet une expérience bien singulière. Il a étiré au chalumeau un tube de verre capil- laire de manière à lui donner la forme d'une tra- chéide ; après lavoir mouillé, il a introduit de l’eau pure dans la pointe supérieure et de l’eau colorée dans la pointe inférieure ; puis, ayant bouché la pointe supérieure, il plonge l'appareil verticale- ment dans l’eau; il a constaté qu'aucune trace de la matière colorante n'apparait dans la pointe supérieure. Cette expérience n’a rien de commun avec ce que j'ai avancé; il aurait fallu tout au moins enlever de l’eau à la pointe supérieure au lieu d’en pousser dans la pointe inférieure ‘. 1 Ce n’est pas la première fois qu'on fait intervenir le mouvement de l’eau libre le long des parois cellulaires. M. Sachs, encouragé par le physicien Quincke, avait adopté cette idée avant la théorie de l’imbibition ; mais il y a renoncé ui-même, surtout, semble-t-il, parce qu’il n’existe pas de communication ouverte dans le bois des Conifères. Mais il y a dans cette expérience une autre faute, qu'on a commise d’ailleurs toutes les fois qu'on a voulu assimiler les vaisseaux et les trachéides des plantes à des tubes de verre. La paroi de ces élé- ments anatomiques n’est jamais lisse : elle est au contraire ornée tantôt de saillies vives en spirale, et c’est ce qu'on observe dans ces vaisseaux parti- culiers qu'on appelle des trachées et souvent dans les vaisseaux ponctués du bois secondaire, tantôt de poneluations saillantes qui doivent retenir des quantités d’eau plus ou moins grandes. Le tube de verre qu'on a bien soin de nettoyer minu- tieusement, quand il s’agit d'expériences de capil- larité, est au contraire absolument lisse. Les vais- seaux ponctués et surtout les trachéides n’ont que rarement une section circulaire : ils sont ordinai- rement prismatiques ou hémicylindriques ou cylin- driques à section elliptique, ete.; les tubes de verre qu'on emploie sont des cylindres à section circulaire. Cela change notablement les conditions. La spirale des trachées, par exemple, formant une saillie nettement accusée, crée à l’intérieur du vaisseau deux rigoles dans chacune desquelles l’eau reste suspendue sous la forme de fils qui relient entre eux les index d’eau successifs d’un chapelet de Jamin. Si on enlève de l’eau à un index supérieur, il monte de l’eau par ces rigoles de l'index immédiatement inférieur dans celui dont on vient de modifier le ménisque. L'expérience est facile à réaliser avec un tube de verre thermométrique et de section circulaire. On roule un cheveu en spirale autour d’un fil de fer un peu plus fin que le calibre du tube, et, après avoir introduit le tout dans le tube de verre, on retire le fil de fer. En se déroulant un peu et, grâce à son élasticité, le cheveu reste dans le tube et simule la spirale du vaisseau. On fait passer de l’eau dans le tube pour le mouiller : il est rare alors que le cheveu ne se déforme pas en s'imbi- bant, mais peu importe. Il s’agit ensuite de former dans le tube un chapelet de Jamin, ce qui n’est pas une tàche aisée, tant les index d’eau coulent facile- ment les uns dans les autres ; on bouche l'extrémité avec un peu de plâtre en s’arrangeant de manière à ce que le plâtre touche à de l’eau, non à de l'air, et, le tube étant maintenu, le bouchon de plètre en haut dans une position verticale, on sus- pend à son extrémité une goutte d’eau teinte avec un peu de fuchsine. Au bout de quelques instants, grace à l’évaporation de l’eau à la surface du plâtre, on voit l'index inférieur se colorer, puis le suivant et ainsi de suite jusqu'au plâtre qui finit par se colorer lui-même, tout cela sans que le chapelet de Jamin ail subi la moindre modifi- cation. Qui oserait maintenant soutenir que les choses | J. VESQUE. — LA né se passent pas exactement de la même manière, dans une trachée contenant un chapelet de Jamin et qui perd de l’eau à sa partie supérieure? Cette expérience est applicable non seulement aux cellules dont la paroi est couverte d’ornements saillants et continus, formant par conséquent des rigoles, mais encore aux éléments anatomiques prismatiques, chez lesquels des rigoles sem- blables existent nécessairement dans tous les angles dièdres. Ainsi dans une trachéide prisma- tique telle que celles du bois de pin, contenant de l’eau dans les deux pointes, et une colonne d'air au milieu, les deux masses d’eau terminales sont nécessairement reliées entre elles par autant de fils d’eau qu'il y a d’angles, et si on enlève de l'eau à la pointe supérieure, grâce à la tension capillaire qui règne à la surface interne de la goutte d'eau creuse, de l’eau monte de la pointe inférieure dans la pointe supérieure. Il n'est même pas nécessaire qu'il existe des angles dans le tube ou dans les éléments anato- miques : il suffit que la section ne soit pas circu- laire, en effet la section de la colonne d’air empri- sonnée dans ce tube capillaire se rapprochera toujours plus de la forme circulaire que celle du tube, l'épaisseur de la couche d'eau maintenue sur la paroi, entre la bulle d’air et celle-ci, sera plus forte dans les endroits où le rayon de courbure est plus petit. On trouve dans le commerce des tubes de cristal dits « à trou plat » et qui sont destinés à la confec- lion des thermomètres. La section intérieure des tubes que j'ai eus entre les mains est elliptique, le grand axe mesurant à peu près le double du petit. Il n’est pas facile de réaliser un chapelet de Jamin dans ces tubes, mais enfin on y parvient, si on ne tient ni à une grande régularité ni à la petitesse des couples air et eau. Involontairement on admire, pendant cette opération délicate, l'utilité des pa- rois transversales perméables des trachéides ou des diaphragmes incomplets des vaisseaux, qui fixent l'emplacement des index d’eau. L'expé- rience que je viens de décrire réussit aussi bien avec ce tube à trou plat ne contenant aucun fil, même siles colonnes d'air ont plus d'un centi- mètre de longueur. On voit parfaitement à l'œil nu les deux rigoles contenant le liquide rouge et cor- respondant aux extrémités du grand axe de l'el- lipse. Au point de vue de la capillarité ce tube est comparable aux trachéides du bois d'automne; mais on comprend qu’on obtiendrait le même résultat SÈVE ASCENDANTE 289 avec un tube divisé longitudinalement par une cloison plane, avec un tube triangulaire à angles mousses, etc., formes qu'on observe si souvent lorsque les vaisseaux sont serrés les uns contre les autres. Ce serait done la capillarité surtout qui ferait monter l’eau; les différences de pression y contri- bueraient seulement en ce sens que c’est toujours: une trachéide inférieure qui déverse de l’eau dans une trachéide supérieure, non inversement parce que la pression de l’air inclus diminue de bas en haut. La pression atmosphérique n’est donc chargée que d’une petite partie du travail, la capillarité fait Le reste grâce à la lransniration. Il n’est même pas bien sûr que l'intervention des différences de pression soit absolument nécessaire. Dans son dernier travail, M. Bæhm, qui croil toujours à l'existence du fil d’eau continu, tel que je l'ai décrit à propos de son ancienne théorie, dé- montre nettement, sur des boutures de saule, que la capillarité seule suffit à tous les besoins. Il n’ex- clut cependant pas absolument l'intervention des différences de pression. Il tue par l’eau bouillante les racines et la partie inférieure de la tige de la plante; il la mastique dans un flacon rempli d’eau bouillie qui communique avec un manomètre éga- lement plein d'eau. La plante, en absorbant l’eau, faitmonter le mercure exactement à la hauteur ba- rométrique; mais l'absorption ne s'arrête pas; le vide barométrique apparaît et grandit indéfiniment dans la partie supérieure du tube manométrique. Dans une autre expérence, le flacon n’est que par- tiellement rempli d’eau et on fait le vide à l’aide de lamachine pneumatique. L'appareil étant fixé en même temps qu'une plante témoin placée dans des conditions normales, on voit au bout de quel- que temps que la transpiration n'a pas très nola- blementdiminué chez la plante ainsi traitée. M. Bœhm termine son mémoire par cette phrase que je ne puis pas admettre entièrement sans ré- serve : L'absorption de l'eau par les racines el l'ascension de la sève se font par capillarité, l’ap- provisionnement du parenchyme des feuilles par la pression atmosphérique ". J. Vesque, Maitre de Conférences de Botanique à la Faculté des Sciences de Paris, 1 On trouvera dans la collection des Annales agronomiques de M. Dehérain, le résumé critique de presque tous les tra- vaux qui ont été publiés à ce sujet depuis la création de ce recueil, ainsi que mes propres publications. 586 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Stoffaes (Abbé), Professeur à la Faculté catholique des sciences de Lille. — Cours de mathématiques supé- rieures à l'usage des candidats à la licence ès sciences physiques. 1 vol. in-8° de 428 pages(8 fr. 50), Gauthier-Villars et fils, Paris, 1891. Les livres destinés à venir en aide aux étudiants se préparant aux divers examens universilaires se multi- plient sous la plume des membres du haut enseisne- ment tant libre qu'ofliciel. Dans ce mouvement géné- ral, les maîtres de la Faculté catholique des Sciences de Lille se sont fait une place distinguée, Pour les can: didats à la licence ès sciences mathématiques, M. Vil- lié a rédigé ses Compositions d'analyse, de mécanique et d'astronomie et son Traité de cinématique; de même M. Witz, pour les candidats à la licence ès sciences physiques, son Cowrs de manipulations de physique et ses Exercices de physique et applications. C’est aujour- d’'hui au tour de M. l’abbé Stoffaes de donner aux étudiants de cette seconde catégorie le Cowrs de mathé- matiques Supérieures que nous signalons ici. Le degré de culture mathématique exigé pour la parfaite assi- milation du programme de physique de la licence ès sciences physiques n’est pas atteint sans quelque effort par certains candidats que la direction générale de leurs études a éloignés des spéculations purement ana- lytiques et qu’effraie un peu le maniement du sym- bole algébrique. C’est pour ceux-là que M. Stoffaes à condensé dans le volume qui vient de paraître les no- tions de mathématiques supérieures (c'est-à-dire dépas- sant le programme du baccalauréat ès sciences) dont la connaissance leur est indispensable, et qui se rap- portent à l'analyse algébrique, à l'analyse infinitési- male et à la géométrie analytique. Ces notions ne sortent pas, à la vérité, d’un domaine assez élémen- taire; encore convient-il de les préciser avec soin; cela ne va pas sans quelques développements. M. l’abbé Stoffaes nous semble y avoir parfaitement réussi, Nous ne pensons pas que son mode d'exposition très clair et très méthodique doive présenter de difficulté pour les lecteurs auxquels il s'adresse et nous estimons qu'il y a apporté toute la rigueur désirable. Il suffit, pour s’en convaincre, de jeter les yeux, entre autres, sur le chapitre consacré au développement des fonc- tions en séries. L'auteur a bien soin, à propos des séries de Taylor et de Maclaurin, de faire ressortir l'insuffisance de la convergence de la série pour que celle-ci soit applicable. Il prévient ainsi une idée fausse assez généralement répandue chez les élèves, et qui tient à l'emploi malencontreux fait par certains auteurs du mot reste pour désigner le ferme complé- mentaire de la série; reste et terme complémentaire sont choses essentiellement distinctes ; lorsque le premier tend vers zéro sans qu'il en soit de même du second, la série, bien que convergente, ne représente pas la fonction proposée. M. Stoffaes a fort bien mis en relief cette distinction, grâce en particulier, au soin qu'il a eu de se servir du mot ferme complémentaire. L'expres- sion de reste s’est pourtant encore glissée par inadver- tance sous sa plume (p. 101, 7° ligne), mais ne peut, à l'endroit cité, donner lieu à aucune ambiguité, L’excellent ouvrage de M. l'abbé Stoffaes est appelé à se trouver entre les mains de tous les candidats à la licence ès sciences physiques à qui il rendra les plus grands services en les dispensant d'aller puiser à droite et à gauche, dans des traités généraux, les enseigne- ments mathématiques dont ils ont besoin, Mais il n’est ET INDEX pas fait pour cette seule catégorie de lecteurs. Tous ceux qui, sans s’adonner d’une manière spéciale aux études mathématiques, ont besoin de s'en assimiler les théories fondamentales en vue d'applications à d’autres genres de recherches, pourront le consulter avec fruit, M. D'OCAGNE. Zôrawski(C.).—Opewnemodksztalceniu powierz- chni. (Sur une déformation des surfaces.) — Bulletin international de l’Académie des Sciences de Cracovie. juin 1891. Dans ce mémoire M. C. Z6rawski fait connaître une application de la théorie des transformations de M, Lie. Les notions fondamentales de cette théorie, telles que celles de « groupe de transformations », « transforma- tion infinitésimale », « invariant différentiel », ete. permettent de traduire analytiquement ce problème : « Quelles sont les propriétés d’une surface qui restent invariantes, quand on fléchit la surface d’une facon tout à fait arbitraire? » Cet énoncé est dû à M. Lie lui- même (Mathem. Annal., t. XXIV, p. 574-575); le tra- vail de l’auteur est un développement des recherches qu'il n’a fait qu'indiquer dans cette courte note. auteur nomme ces propriétés de la surface qui restent invariantes pendant chaque flexion « invariants de la flexion », et les divise en :« invariants de Gauss », «invariants de Beltrami » et « invariants de Minding », en se basant sur certaines analogies avec les invariants depuis longtemps connus : « courbure de Gauss », « paramètres différentiels de Beltrami » et « courbure géodésique de Minding ». En outre tous ces invariants se partagent en ordres. Dans la première partie du mémoire qui est aussi la plus importante, l’auteur recherche combien d'inva- riants de la flexion appartiennent à chacune des espèces indiquées, et combien à chaque ordre ; dans la seconde, il s'occupe du calcul des invariants de la flexion par l'intégration de certains systèmes d'équations aux dérivées partielles du premier ordre. Cette méthode, bien qu'il n’en existe pas de plus simple, nécessite des calculs assez pénibles. En terminant, l’auteur en indique une autre, dont il n’a pu toutefois déduire un mode systématique pour le calcul des invariants de la flexion. {Bulletin de l'Acad, de Cracovie) 2° Sciences physiques. Schuster (A.), de la Société Royale de Londres. — La décharge de l'électricité à travers les gaz. — Extrait, par l'auteur, de la « Bakerian Lecture » faite à la Société royale de Londres, le 20 mars 1890 (Pro- ceedings, t. 47, p. 526). Dans cette « lecture », j'ai rendu compte des expé- riences faites depuis six ans sur la décharge de l’élec- tricité à travers les gaz, dans le but de mettre à l’épreuve la théorie précédemment exposée, d'après laquelle les atomes gazeux transporteraient la même quantité d’élec- tricité que les ions d’un liquide. Il s'agissait d'abord de discuter les circonstances dans lesquelles une décharge entre une électrode et un gaz peut se produire. E. Becquerel découvrit le premier que l'air placé entre des électrodes de platine chauffées au rouge cesse d'isoler; dans ce cas, le phénomène est particulièrement compliqué, en raison de l’occlusion des gaz dans le platine. Des recherches faites dans mon laboratoire par M. Arthur Stanton l'ont conduit à l’intéressante conclusion qu’une électrode de cuivre chauffée au rouge laisse échapper librement l'électricité BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 587 positive, tandis que la déperdition de l'électricité néga- tive ne se produit que lorsqu'une action chimique a lieu à la surface ; par exemple, si l’électrode est légè- rement oxydée, l'électricité négative se décharge dans l'hydrogène ou dans l'air; lorsqu'elle est couverte d'une couche d'oxyde, la décharge ne se produit plus que dans l'hydrogène ; au contraire, elle à lieu dans Pair, et non dans l'hydrogène; lorsque l’électrode est parfaitement polie, Ces phénomènes, avec quelques autres, m'ont conduit à la conclusion suivante : Une libre décharge de l'électricité peut se produire entre l'anode et un ion négatif ; d'autre part, il faut une chute de potentiel considérable pour produire un d'électricité entre l'ion positif et la cathode, à moins que celle-ci ne prenne part à une action chimique, auquel cas l'échange d'électricité peut devenir plus considérable qu'à l’anode. J'ai démontré, en outre, par de longues observa- tions, que, dans un tube vide, l’électrode négative est entourée d’une atmosphère de particules chargées posi- tivement, La chute du potentiel dans l’espace obscur, près d'une plaque négative, peut être exprimée par (1) VV re en) Vo étant le potentiel dans l’auréole; À dépend de la pression, mais non de l'intensité du courant, La route décrite par les particules électrisées peut, comme on sait, être déduite de la luminosité produite par les chocs moléculaires. La trajectoire est rectiligne dans les circonstances ordinaires, mais elle s’incurve dans un champ magnétique. Si une particule de masse m, portant une charge e traverse à angle droit, avec une vitesse v, les lignes de force d'un champ magnétique d'intensité M, le rayon de courbure de la trajectoire est déterminé par l’équation (2) Es — Mve e que l’on obtient en égalant à la force centrifuge la force qui s'exerce à chaque instant sur la molécule. D'autre part, la force vive de la molécule est égale au travail exercé sur elle, lorsqu'elle passe, sans perte d'énergie de la cathode au potentiel zéro, en un point au potentiel V; donc (3) 2Ve — mu? En éliminant » entre (2) et (3), on trouve e 2V 4\ —\— . ce m M°r° Toutes les quantités du second membre peuvent être déterminées, et, comme on ne peut admettre que toute l'énergie Ve s’est transformée en force vive, cette dernière équation devient pratiquement une inégalité oo . a donnant la limite supérieure de me n En écrivant l’équation (2) sous la forme e v m Mr () 1 on en déduira une limite inférieure de —, en rempla- mn cant respectivement v et par la vile-se des molécules gazeuses d’après la théorie cinétique et le plus petit rayon de courbure qui peut être tracé dans l’auréole. On trouve de cette manière : 106 > © > 405, nt . “ 2 e nr tandis que, dans les liquides, on à —— 2.10, nm La discussion des phénomènes conduit à admettre e 1e : que la valeur de — est plus voisine de 10% que de 106: m des expériences en cours permettront sans doute de échange, | réduire ces limites. Jusqu'ici, aucune théorie ne ren- dait compte de la grande quantité d'électricité trans- portée par chaque atome de gaz. Le manque de symétrie, aux deux pôles d’un tube vide, est probablement causé par le fait que la loi des chocs entre les ions et les molécules neutres est diffé- rente pour les atomes positifs et négatifs. L'expé- rience semble montrer que la diffusion des ions négatifs se fait plus rapidement que celle des ions po- sitifs. L'espace obscur est probablement dû au fait que, si la chute de potentiel est plus grande qu’une certaine valeur critique, ces ions diffusent sans beaucoup de perte d'énergie au choc; si la chute est plus faible que cette valeur critique, la grande vitesse que ces parti- cules ont atteinte par la répulsion du pôle négatif est réduite par le choc, et transformée en énergie lumi- neuse. Arthur ScHusrER, Membre de la Société Royale de Londres, Armstrong (Henri) et Rossiter (E.).— Action de de l’acide nitrique sur les dérivés du naphtol, considéré comme indiquant le mode suivant le- quel s'effectue la nitration dans les composés aromatiques en général. — Mémoire présenté à la Société de Chimie de Londres, le 411 mai 1891. Les dérivés chlorés et brômés du G-naphtol, chauf- fés avec de l'acide nitrique se transforment en dérivés de la g-naphto-quinone; mais la formation de ces pro- duits est précédée par celle de composés intermédiai- res instables. Ces composés ont pu être isolés, Les auteurs pensent que ce sont des dérivés nitro-bromo- cétoniques correspondant aux composés dichloro-céto- niques de Zincke, et que leur formation montre que l'acide azotique réagit tout d’abord sur le 8-naphtol en donnant un produit d'addition : Br Az0? Br NY 0H OH AT OP = NoH Ce composé se déshydrate ensuite sous l'influence de la chaleur et l’on obtient la réaction suivante : =. + 20. Si l’on admet que la formation de ces produits d’addi- tion précède toujours celle des dérivés nitrés, on obtient une interprétation salisfaisante d'un certain nombre de faits restés encore inexpliqués. L'impossibilité d'obtenir des composés nitrés des paraffines, sauf dans un petit nombre de cas particuliers, apparait comme la consé- quence naturelle de l'incapacité des paraffines à don- ner des composés d’addition. On peut expliquer également le fait signalé par Nœælting de la formation de dérivés du phénol dans la nitration de cerlaines carbures (toluène et ortho- xylène), On aurait alors les 2 réactions : H OH / A ; DOUÉ (1) HALOH— IN, 0: H OH NA OH 7/4 (a NAzO2 — \ () + Az02H. Ici le composé d’addition perdrait AzO?H au lieu H20, D88 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Tout agent susceptible de favoriser la séparation des éléments de l’eau du composé d’addition augmenterait la production du composé nitré et diminuerait celle du dérivé phénolique, Or c’est un fait bien connu que l’on obtient des rendements plus élevés dans la préparation des dérivés nitrés par l'emploi d’un mélange d'acide nitrique et d'acide sulfurique. Un autre fait qui s'expli- que de la même facon a été signalé par M, Grove; c’est la production du trinitrophénol dans la préparation de la binitrobenzine, Georges CHARPY, 8° Sciences naturelles. Houzeau (À.), Correspondant de l'Institut. — Rapport sur les champs de démonstration. — Adressé à M. le Préfet du département de la Seine-Inférieure. Imprimerie de Espérance Cagnard, 88, rue Jeanne-d'Arc, Rouen, 1891. Ce rapport, résumé des travaux agronomiques exé- cutés en 1890 par M. Houzeau et par un certain nombre de collaborateurs, comprend un grand nombre de ta- bleaux qui en forment la majeure partie. Chacun d’eux est accompagné de quelques pages mentionnant les observations et les résultats généraux que l’on en peut tirer. Nous ne pouvons mieux faire, dans notre compie- rendu, que de suivre l’ordre adopté par le savant direc- teur de la station agronomique de la Seine-Inférieure. Première partie. Champs de démonstration. — Culture de l'avoine. — Certains champs ont donné une récolte rémunératrice, tandis que d’autres ont causé une perte, due à la verse qui s’est produite avec tant d'intensité en 1890. Culture du blé. — I à été cultivé comparativement en y ajoutant soit du fumier seul (20 000 kilos à l’hec- tare), soit cette même dose de fumier additionné d'engrais complet. Ce dernier a été partout rémuné- rateur, sauf dans un champ où la richesse du sol a rendu nul l'effet des engrais. Deuxième partie. Champs d'expériences. — Culture de lavoine. — En cherchant l'effet produit sur une même variété par des doses différentes d’engrais, on a cons- taté que, toutes proportions gardées, le bénéfice est plus grand quand on met plus d'engrais. Culture du colza. — Dans ces expériences, l’engrais complet n’a pas été payé par l'excédent de récolte, ce qui tient probablement à ce que la dose d’acide puos- phorique ajoutée était trop forte, le sol en contenant déjà une assez grande quantilé provenant des fumures antérieures. Culture des betteraves à sucre, — Avec l’engrais chi- mique seul, la variété qui a fourni le jus le plus sucré a été la Vilmorin améliorée, résultat constaté déjà souvent; mais la variété la plus productive en racines et en sucre à l’hectare a été la Fouquier d'Hérouel, L’engrais intensif comparé à l’engrais complet sur la variété Desprez élève le rendement à l’hectare de plus de # 500 kilos, sans grand avantage au point de vue économique. En associant le fumier à l’engrais chimique, ce der- nier produit un effet nul, pécuniairement parlant, ce qui s'explique par la grande quantité de potasse qui est mise ainsi à la disposition des racines et qui fait baisser la densité de leur jus. Culture du blé. — En recherchant l'influence des variétés avec un même engrais. on voit que cette influence est capitale, ainsi que l'ont déjà établi plu- sieurs agronomes compétents et notamment M. Dehé- rain. Dans les expériences rapportées par M. Houzeau, tou a pu porter le rendement par hectare de 17 hec- tolit, 1/2 de grains à 28 hectol. en faisant simplement un choix judicieux de la variété semée. L’engrais intensif a provoqué la verse des blés qui en avaient recu, On a aussi essayé les cultures à gros apports d'azote; malheureusement l’année a été défa- vorable. L'auteur signale à ce sujet les risques que l'on court de voir l’azote soluble entrainé par les eaux de drai- nage, et rappelle les expériences exécutées par M. Dehé- rain ! qui propose les cultures dérobées pour éviter ces pertes. À. HÉBERT. Parker (T. Jeffery). — Lessons in elementary Biology. 1 vol. in-8° (13 francs). Macmillan and ©, London, 1891. Cet ouvrage est destiné à servir de guide aux élu- diants qui se destinent aux sciences naturelles et à les aider dans leurs premiers exercices de laboratoire en leur donnant une description sommaire, mais très “suffisante, d’un grand nombre de formes végétales et animales inférieures, C’est en quelque sorte un com- plément de l'ouvrage très connu de Huxley, Practical Biology ?. Mais tandis que ce dernier auteur à choisi un petit nombre de types dont il a étudié à fond l’or- ganisation, le genre de vie, etc., M. Parker prend des exemples beaucoup plus nombreux; aussi se contente- t-il de consacrer quelques pages à chacun des types qu'il choisit, Je ne veux pas dire par là que les des- criptions soient trop courtes; je les trouve très sufli- santes et surtout très claires. Aussi j'ai regretté que M. Parker n'ait choisi ses exemples que parmi les formes les plus simples du règne animal et végétal : Amibe, Euglène, Protomyxa, Saccharomyces, Bactérie, Paramæcium, Foraminifère, Mucor, Vaucheria, ete. Il étudie très sommairement, ou, pour être plus exact, il n’étudie pas du tout les Végétaux Gymnospermes et Angiospermes, ni les animaux supérieurs aux Cœlen- térés, sauf le Polygordius : c’est là le reproche le plus grave que j'aie à lui adresser, Pourquoi donner dans le livre toute la place aux formes inférieures, incontesta- blement fort intéressantes, et négliger complètement les types supérieurs? Est-ce parce que l’histoire de ces derniers a été faite, d’une manière si remarquable d’ailleurs, par Huxley? Mais il me semble que dans un ouvrage destiné à des commencants ou à des étudiants, il serait préférable de choisir un exemple dans chaque classe ou dans chaque embranchement, et après avoir montré comment on étudie une Spirogyre ou une Vor- ticelle, de montrer comment on dissèque un Arthro- pode ou un Poisson. Mais cette critique faite, je n'ai plus qu'à louer la manière dont l'ouvrage est concu. C’est une série de petites monographies très bien faites, quelquefois très originales, qui indiquent aux éièves ce qu'ils ont à chercher et à voir. J’estime que dans un ouvrage qui doit être avant tout un vade-mecum pratique, l’auteur a eu raison de ne pas débuter par des définitions, des généralités et des questions de doctrine. Il entre de plain-pied dans son sujet en commencant l'étude d’une forme très inférieure : l’Amibe, et sans discuter les différences entre les végétaux et les animaux, il con- inue par l'Hæmatococcus, l'Heteromita, V'Euglène, etc. Ce n'est pas que M. Parker ait laissé systématique- ment de côté les questions générales; mais il ne les aborde que lorsque le lecteur possède déjà quelques notions sur la structure des êtres organisés; aussi la lecture des pages qui se rapportent à la cellule et à la division des cellules, à l’origine des espèces, à la dis- tinclion entre les végétaux et les animaux, à la fécon- dation, etc., est-elle beaucoup plus profitable au début tant que si on la lui avait imposée dès le commencement de l’ouvrage. Le livre de M. Parker rendra, j'en suis persuadé, de grands services aux étudiants et aux personnes qui veulent se familiariser avec les sciences biologiques. Il est regrellable que nous ne possédions pas un livre analogue écrit en français; pareil ouvrage serait cer- tainement bien accueilli par les candidats à la licence ès sciences naturelles. R. KŒuLer, 1 Voy. la Revue; 1890 ; p. 496. 2 Huxrey. Cours élémentaire et pralique de Biologie, ta- duit de l'anglais par Prieur. O. Doin, 8, place de l'Odéon Paris. + : BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 4° Sciences médicales. Babes et Oprescu, — Sur un bacille trouvé dans un cas de septicémié hémorragique pré- sentant certains caractères du typhus exanthé- matique. Ann. de l'Institut Pasteur, mai 1891. Le description du typhus exanthématique et des lésions qu'on y rencontre donne l'impression qu’il ne s'agit pas d'une maladie reconnaissant toujours la même étiologie, Cette maladie revêt des formes cli- niques très variables, et s’il est facile de la distinguer de la fièvre typhoïde, il n’en est plus de même en ce qui concerne la septicémie hémorragique, et il y a lieu de se demander si le typhus exanthématique mérite d'être décrit comme une entité morbide à part. Le mémoire de MM. Babes et Oprescu à trait à un cas de ce genre que les auteurs ont pu étudier complè- tement : ce cas étant unique, ils n’ont pas naturel- lement tiré de conclusion générale, mais leur étude fort complète sera un très important document pour la solution des problèmes que nous venons de soulever. Le malade avait succombé dans la prostration, après avoir présenté des troubles intestinaux, et une éruption de taches ecchymotiques analogues à une éruption de purpura hémorragique. On put, quelques heures après la mort, faire des ensemencements bactériolo- giques nombreux avec divers organes, et les diverses méthodes de culture permirent d'isoler un microbe, qui parait avoir été la cause première de l’évolution morbide. Ce micro-organisme se présente sous la forme d’un bacille court, se réunissant souvent deux par deux et légèrement ovale, sans sporulalion appréciable. 11 se colore, quoique faiblement, par la méthode de Gram. Le bacille est doué d'une grande mobilité ; il fait fer- menter le glucose en dégageant beaucoup de gaz, La gélatine n’est jamais liquéfiée, _ Les cultures de ce bacille sont virulentes pour le cobaye, la souris, le lapin, le pigeon, la corneille ; le chien s’est montré réfractaire, tandis que le lapin est très sensible, L'action locale du bacille, au point d’ino- culalion, consiste dans la production d’un œædème hé- morragique, tandis que l’action générale consiste dans l'envahissement de tous les organes par le bacille, dans une septicémie avec hypertrophie de la rate, lé- sions semblables à celles observées sur l’homme, Une excellente planche, annexée au mémoire de MM. Babes et Oprescu, montre la morphologie du micro-organisme et sa répartition dans les organes, D' H. Duvier. Salazar (\.E.), Newman (C.) et Blanchard (R.). — Examen quimico y bacteriologico de las aguas potables. (Examen chimique et bactériologique des eaux potables) avec un chapitre sur les animaux para- sites introduits par l'eau dans l'organisme. 1 vol, in-8& de 500 pages avec nombreuses fiqures dans le texte et planches photographiques hors texte. — Burns and Oates, 28, Orchard Street, London, 1891. La question de la pureté des eaux est devenue la préoccupation principale des hygiénistes. Le présent ouvrage témoigne de l'intérèt qu'elle suscite dans la jeune Amérique espagnole, où les administrations s'efforcent de doter d’eau salubre les villes nouvelles. Les auteurs se sont appliqués d’abord à préciser les caractères chimiques des eaux potables, ensuite à ex- poser les méthodes qui conviennent à l'analyse chi- mique et bactériologique des eaux. Pour que celles-ci aient « droit de cité », 11 ne leur suffit pas d’être, comme on disait autrefois, limpides, insipides, inodores, capables de faire mousser le savon et cuire les légumes; ilfaut de plus qu’elles contiennent, en de certaines proportions, des sels et des gaz, enfin qu'elles soient à peu près exemptes de matières orga- niques et surtout organisées. MM. Salazar et Newman discutent les quantités maxi- ma et minima des divers sels que l’eau doit tenir en solution, et décrivent avec beaucoup de soin les meil- | | D8) leurs procédés à employer pour doser ces sels, notam- ment les sels calcaires, sulfates, carbonates et chlo- rures, la matière organique et les gaz. Ils insistent sur les relations qu’il peut y avoir entre les substances dissoutes (salines, gazeuses et organiques) et les orga- mismes microscopiques en suspension dans le liquidé. On sait que la richesse en matière organique coïncide le plus souvent avec la richesse en bactéries, la durée individuelle et la prolifération de celles-ci dans l’eau pouvant dépendre de la qualité et dela quantité des aliments qu'elles y trouvent, C’est pourquoi les auteurs insistent sur le dosage, toujours délicat, de la matière organique et lui consacrent un chapitre étendu. Ils précomisent dans ce butla méthode de Nessler à l'io- dure de mercure et de potasse en solution potassique et celle de Wanklyn, Chapman et Smith, fondée sur ce fait que les albuminoïdes dégagent de l’'ammoniaque quand on les traite par le permanganate de potasse en solution fortement alcaline. à Le dosage de l'oxygène y est aussi décrit: mais les auteurs ont omis d'indiquer le procédé à l'acide pyro- gallique, que recommandent cependant sa rapidité et la facilité de son emploi. Nous regrettons aussi de ne point trouver dansleur livre assez de détails sur le do- sage de l'acide carbonique et de l'azote. Enfin il eût été utile de décrire avec soin la manière de recueillir une eau pour opérer le dosage exact de ses gaz, car les précautions à ce sujet sont importantes et en général peu connues, MM. Salazar et Newman pensent que l'abondance re- lative de la soude par rapport à la potasse dans les sels dissous indique l’origine animale de la matière orga- nique en solution ; le phénomène inverse, c’est-à-dire la richesse en sels de potasse, correspondrait à des substances dérivées des végétaux, C’est une remarque suggestive, mais à laquelle il serait pourtant dangereux de se fier. 2 Va La partie bactériologique est largement traitée. Elle comprend quelques notions générales sur la constitu- tion et l’évolution des bactéries, les infections que l’eau peut propager en devenant le véhicule de certains de ces micro-organismes, les procédés pour les rechercher dans l’eau, en déterminer le nombre approximalif, les étudier au moyen des méthodes variées de culture et d'inoculation. Toute cette technique est exposée en dé- tail : les meilleures méthodes y sont indiquées d’une facon claire et précise, avec accompagnement de fi- gures et de photogrammes bien choisis. Mais nous eussions aimé trouver dans ce livre, indépendamment de cette technique générale, la technique spéciale à la recherche des quelques virus animés dont le transport par l’eau est aujourd’hui hors de doute, le microbe de la fièvre typhoïde par exemple. C'est l'étude de ces cas spéciaux qui est surtout intéressante dans la pratique La troisième partie du livre reproduit l'important memoire que notre compatriote, le D' Raphaël Blan- chard, avait déjà fait paraître en notre langue (Revue d'Hygiène) sur les parasites non microbiens, suscep- AT Ad or ) LE C il à un ouvrage sur l’eau potable, constitue une heureuse innovation car, depuis quelques années, l'attention légitimement accordée aux bactéries, avait fait un peu oublier les parasites animaux et le danger des eaux où ils vivent Parmi les Protozoaires M. Blanchard décrit les es. pèces suivantes : Amœæba Coli, Cercomonas et Monoce- comonas Hominis, Trichomonas intestinalis et vaginalis Lamblia intestinalis, Balantidium Coli. 1 examine ensuite les conditions générales de l'infection par les Helmin- thes et fait connaitre les caractères des principaux de ces parasites aux divers stades de leur évolution Il étudie Successiyement Trématodes, Nématodes Ténias Botriocéphales, Distomes, Filaires, Rhabdonema variés et Linguatules, en ayant soin d'indiquer les moyens de déceler leur présence dans l’eau et quelquefois de l’en préserver, 590 ACADÉMIES ET SOCIÈTES SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER (La plupart des Académies el Sociétés savantes, dont la Revue analyse ordinairement les travaux, sont actuellement en vacances.) ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 10 août. 1° SGtENCES PHYSIQUES. — M. F. Dussaud à éludié par diverses méthodes la réfraction et la dispersion du chlorate de soude cristallisé; il a étendu cette étude à l’ultra-violet. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. N. Gréhant propose. pour rechercher l'oxyde de carbone dans un milieu uazeux qui n'en renferme qu'un dix-millième, la mé- thode suivante : on fait passer pendantune demi-heure d’une facon continue, au moyen d’un dispositif spécial, le gaz comprimé à ë atmosphères à travers 50 centimè- tres cubes de sang; la différence observée dans la capa- cité respiratoire de ce sang avant et après l'expérience montre nettement la présence de l’oxyde de carbone. — M. de Lacaze-Duthiers annonce que les huitres élevées dans le vivier de Roscoff ont commencé à se reproduire ; la constatation de cette reproduction hors de l’eau courante présente un intérêt au point de vue de l'élevage des huîtres. — M. F. Guitel a observé les mœurs du Gobius minutus au moment de sa repro- duction; le mâle construit un nid sous une coquille de bivalve retournée, y amène une femelle et prend soin de la ponte pendant le développement; en four- nisssant à ces poissons des verres de montre au lieu de coquilles, M. Guitel à pu étudier facilement les divers phénomènes qui se succèdent. — M. M: Men- delsohn, d'après de nombreuses observations person- nelles sur des malades atteints d’affections neuro- musculaires variées, établit une classification des altérations pathologiques de la forme de la secousse musculaire; il ramène ces formes pathologiques aux quatre types suivants : courbes spasmodique, paraly- tique, atrophique, dégénérative; ces types peuvent passer de lun à l’autre pendant l’évolution d’une même maladie, — M. Domingos Freire annonce que depuis sa dernière communication à l’Académie, il a pratiqué un nombre considérable d’inoculations préventives de la fièvre jaune, au moyen des cultures atténuées du microcoque qu'il cultive; les résultats statistiques qu'il présente accusent une diminution énorme de la mortalité par le fait de la vaccination, — M. Baÿ présente un thermocautère dont l'incandes- cence est entretenue automatiquement par un récipient à alcool d’une disposition spéciale; une seule main suffit pour la manœuvre de l’instrument, — MM. Fou- qué et MichelLévy, dans une série d'expériences déjà anciennes, avaient reproduit, par fusion ignée el recuit prolongé à la pression atmosphérique, un assez grand nombre de roches basiques; ils avaient reconnu en même temps l'impossibilité de reproduire de la mème facon la plupart des minéraux des roches acides, S'appuyant sur les recherches de Sénarmont, de M. Daubrée et de M. Friedel, ils ont pensé qu'il fallait, pour effectuer cette synthèse, combiner l’action de la chaleur avec celle de Peau sous pression, En chauffant au rouge vif pendant plusieurs semaines, dans des creusets en platine iridié, hermétiquement clos, du granite de Vire fondu et pulvérisé avec une petite quantité d’eau, ils ont obtenu un trachyte micacé com- prenant à l’état de cristaux nettement reconnaissables, l'orthose, le mica noir et des spinelles. MÉMOIRES PRÉSENTÉS : — M. Al. Bretin : « Réflexions sur la théorie actuelle de la thermodynamique, » — M. H. Arnaud : « L’urée n’est pas un poison, » — M. H. Baradue : « La Biométrie : procédé de mensu- ration de la tension vitale avec le magnétomètre Fortin,» Séance du AT aorïit 1891. 19. SGIENCES MATHÉMATIQUES, — M, À. Ribaucour : Sur les systèmes cycliques. — M. H. Deslandres à étudié par la photographie l'atmosphère du soleil dans la par- tie du spectre qui comprend le bleu, le violet, et l’ul- tra-violet jusqu'à x 380; il a reconnu que les raiesH et K du calcium y sont douées d’une intensité bien plus grande que les raies de l'hydrogèné ; la photographie de ces raies permet, étant donnée leur intensité, d’ob- server les protubérances avec une dispersion bien plus faible que celle que nécessite l'hydrogène; de plus, comme le temps de pose peut être assez court, on peul enregistrer photographiquement les formes et les vi- tesses des protubérances. M, Deslandres indique le dispositif de l'appareil qu'il destine à cette étude, — M. J. Fenyi a observé le 17 juin 1891 une protubérance solaire qui s'élevait avec une vitesse énorme ; d’après ses observalions, l'auteur calcule que la masse projetée ne doit jamais retomber sur le soleil. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. G. Hinrichs montre comment les relations établies par lui entre les tempé- ratures des changements d'état pour une série de corps et les formules de ces corps permettent de choisir entre les diverses représentations géométriques pos- sibles de l’arrangement des atomes; il applique cette méthode à la série des paraffines normales, et conclut que ces corps doivent être représentés par des prismes où la position de l'atome de carbone alterne d’un nœud à l’autre. — M. Paquelin présente un nouveau sys- tème de chalumeau à essence minérale, actionné par une soufflerie, et dont la partie originale est constituée par un carburateur à régulation variable. —M.Manuel- Périer, à propos d’une communication de M. Paquelin sur une nouvelle disposition du thermo-cautère, rap- pelle qu'il avait fait lui-même breveter en 1890 un appareil dans lequel le manche recoit de la soufflerie un courant d'air réfrigérant. 3° SCIENCES NATURELLES. — M, A. Schneider, frappé de la singularité anatomique que présentaient les Iso- podes dans la série des articulés par suite de la posi- bon de leur collier vasculaire en avant de l'anneau nerveux, a repris l'étude de la question ; il a constaté qu'indépendamment des deux artères qui continuent l'aorte en avant, il existe en arrière du collier nerveux deux artères qui contournent le tube digestif pour s'unir au-dessous de l'estomac, et au-dessus de la masse nerveuse inférieure, —M.Moynier de Villepoix a étudié chez l’Helix aspersa Va zone molle ef diaphane qui borde la coquille et par laquelle celle-ci s'accroît. Les éléments producteurs du testsont: 4° une gouttière formée par l’épithélium palléal au point de rencontre avec l’'épiderme recourbé en dedans de la coquille; il y a là des culs-de-sac glandulaires sécrétant des globules sphériques hyalins particuliers; 2 en arrière de cette soutüière, une bandelette glandulaire où s'effectue le dépôt du calcaire; 3° tout l’épithélium palléal situé en arrière de la bandelette ; celui-ci augmente l’épais- seur de la coquille par l’adjonction de couches organo- calcaires. Lorsque l’animal a atteint sa taille définitive les deux premiers organes glandulaires disparaissent: seul lépithélium du manteau demeure aclif, continue à épaissir le test en dedans, el répare de la même fa- con les brèches survenues accidentellement, tite tes ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 91 Séance du 2% août 1891. 1° Sciences maTHÉMATIQUES, M. Ribaucour : Sur les systèmes cycliques. — M. P. Serret: Sur une propriété d'involution commune à un groupe plan de cinq droites et à un système de neuf plans. — M. Tacchini adresse le résumé des observations solaires faites à l'Observa- loire du Collège romain pendant le deuxième trimestre de 1891. — Dom Et. Siffert examine les diverses causes qui peuvent contribuer à faire disparaître dans les comètes la queue antérieure que la théorie donnée en 1862 par M. E. Roche prévoit concurremment avec la queue postérieure, 2e SCIENCES PHYSIQUES. M. Ch. Antoine traite par le caleul la relation qui unit la tension de la vapeur d’eau à la température, jusqu'à 200 atmosphères, pour arriver à une formule qui rende compte des résultats obtenus par MM. Cailletet et Collardeau. 3° SCIENCES NATURELLES. M. E. Wertheimer a repris la question de savoir si le foie élimine directement les principes immédiats de la bile introduite dans le sang ou s’il transforme ces éléments. Déjà Baldi avait observé le changement de couleur de la bile d’un chien dans les veines duquel on injecte de la bile de bœuf. M, Wer- theimer a recherché au spectroscope, dans les mêmes conditions, le passage de la cholohématine de la bile des herbivores, matière colorante qui manque dans la bile du chien ; il a constaté nettement ce passage, qui s'effectue avec une grande rapidité. Histoire des Sciences. — M. A. Marre adresse une note établissant que La Condamine est né le 27, et non le 28 janvier 1701. Mémoires présentés. — M. G. Trouvé : « Etude sur la navigation aérienne, Hélicoptère électrique captif, Avia- teur-générateur-moteur propulseur, »» — M. F. Dali- gault : Note relative à un {élémètre. — M. D. Billy : Mouvement oscillatoire d’une plaque de plomb placée en équilibre sur une plaque de cuivre cintrée et chaude. L. LAPicQuE. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 11 août. M. le D' Chaput : Entéro-anastomose en un temps pour un carcinome du cœcum, guérison, — M. le D' Gérard-Marchant : Fixation d'un foie mobile et d’un rein mobile, guérison, —- M, le D' René Blache : La protection de l'enfance dans le département de la Seine pendant l'année 1889. — M. le Dr Girard (de Pa- nama) : Sur l’action de l'ozone sur le sang et son accu- mulation dans certains corps. Séance du 18 août 1891, Dans un mémoire lu précédemment à l'Académie, le Dr Motais (d'Angers) avait conclu à l’hérédité de la myopie; M. Javal ne partage pas cette opinion, Pour lui, la myopie résulte d’une hérédité de milieu et tient à ce que les parents, qui sont myopes, surveillent mal les premières études de leurs enfants et ne sont pas étonnés de les voir regarder de trop près. Par contre, l’astigmatisme esthéréditaire et prédispose à la myo- pie. L’astigmatisme, dû à une forme vicieuse de la cornée, rendant moins nette les images formées sur la rétine, oblige l'enfant à faire des efforts et à prendre de mauvaises attitudes qui deviennent une cause effi- ciente de la myopie, L’astigmatisme tient non seulement à la famille, mais à la race, Ainsi les Israélites sont astigmates; leur astigmatisme a pour effet de rendre les lignes horizontales moins nettes que les verticales, d’où leur écriture à traits pleins horizontaux, tandis que pour les Européens c’est le contraire qui a lieu. M. Javal est partisan de l’écriture droite et rappelle à ce sujet le précepte qu'avait formulé G. Sand : « Cahier droit, écriture droite, corps droit, » —M. Pinard : Nou- veaux documents pour servir à l’histoire de la gros- sesse extra-utérine. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 25 juillet 1891. M. Féré a exploré la forme du mouvement de pro- traction des lèvres par un procédé analogue à celui qu'il avait employé pour la langue; de mème que dans ce cas, il a trouvé dans les paralysies faciales tout à leur début, comme aussi chez les muets, une diminution considérable de cette force. Il à étudié aussi, au moyen d’un dynamomètre spécial, la force avec laquelle se rapprochent les mâchoires. — M. Féré à encore examiné chez 165 sujets de tout àge, comment varie la taille en passant de la position debout au décubitus dorsal. — M. M. Mendelsohn expose la méthode par laquelle il étudie le sens du tact, et les principaux résultats de ses recherches, — Après la communication de M. Sanchez Toledo sur la virulence du bacille létanique privé de ses toxines, M. Vaïillard à repris ses expériences en présence de son contradicteur; il à eu un seul cas de télanos:; une expérience faite par M. Sanchez Toledo fut également négative. — M. Sanchez Toledo fait ses réserves sur ce dernier cas, ses cultures n'étant pas suffisamment sporulées au moment de linoculation. — M. Ch. Cornevin a voulu vérifier l’action de la pilo- carpine sur la sécrétion du lait chez la vache laitière; il n’a constaté sous l'influence de l'alcaloïde aucune variation dans la quantité; la composition chimique ne varie que par une très légère augmentation de la lactose. — M, Lando Landi a recherché les substances solubles que la bactéridie charbonneuse sécrète tant dans ses cultures que dans le sang des animaux in- fectés ; il a obtenu des albumoses paraissant dépourvues de toxicité et des bases tétanisantes, — M. J. Déjerine donne lobservation détaillée d’un cas d’aphasie mo- trice accompagnée de paragraphie pour l'écriture spon- lanée et sous dictée, la faculté de copier restant intacte. A propos de ce cas, il fait la critique de la théorie du centre graphique, et conclut que tous les faits cliniques sont explicables sans l'hypothèse de ce centre, dont aucune observaiton n'a montré l'existence. — MM. Gil- bert et Roger ont inoculé à des cobayes la tuberculose aviaire spontanée, sans faire passer le virus par aucune culture; dans la moitié environ des cas, le résultat à été négatif, mais dans quelques-uns on a obtenu une tuberculose généralisée. De plus, les auteurs font re- marquer que dans deux séries la tuberculose aviaire, après quelques passages sur le cobaye, a perdu son action pathogène pour les oiseaux. — MM. Cadiot, Gilbert et Roger ont repris la question de l’inocula- tion aux oiseaux de la tuberculose humaine, le virus étant pris directement dans les formations patholo- giques; ils ont obtenu un cértain nombre de résultats positifs ; aucune des poules inoculées n’est morte, mais 5 sur 38, après qu’elles eussent été sacrifiées, montrè- rent à l’autopsie des lésions tuberculeuses, Examinant d’une facon générale les rapports de la tuberculose aviaire avec la tuberculose des mammifères, les au- teurs concluent qu'il n’y a pas entre les deux virus de différence essentielle, mais seulement deux races de microbes. — M, Strauss pense que les expériences de ces auteurs sont insuffisantes pour légitimer leur con- clusion; l'hypothèse de la tuberculose spontanée chez les sujets trouyés tuberculeux à l’autopsie n’est pas écartée d'une manière péremptoire, et la transforma- tion de l’un des bacilles dans l’autre n’a pas été direc- tement démontrée. — MM. Charrin, Gley et Lapicque ont examiné le sang artériel des lapins infectés par le bacille pyocyanique ; ils ont trouvé une diminution de l'oxygène dans tous les cas où l’inoculation a été efficace ; la proportion de fer du sang n'avait pas varié. — M. Lapicque indique quelques modifications qu'il a apportées pour ces expériences au dispositif de l’ap- pareil de MM. Schutzemberger et Rissler, — M. Du- camp à examiné la densité de l’encéphale chez des sujets morts d’affections diverses; il Va trouvée en gé- néral augmentée dans les maladies chroniques entrai- nant une émacialion considérable dans les maladies, 592 CHRONIQUE ————————— _ __ _ —— consistant en troubles de la circulation cérébrale, nor- male dans les autres cas. — M. H. Fischer décrit le développement du foie chez la Paludine. = MM. G. Her- mann et C. Canu signalent un champignon parasite du Talitre ; ils décrivent les lésions produites chez ce crustacé par l'infection. — M. P. Achalme, dans un cas de rhumalisme articulaire aigu, a trouvé dans le liquide d’une péricardite développée sous l'in- fluence de la maladie, un bacille qui se cultive bien dans le bouillon de bœuf à l'abri de Pair; ce bacille se retrouvait sur les coupes dans le myocarde, l’endo- carde et le péricarde. Les inoculations des cultures au Japin et au cobaye ont été sans effet, — M. E. Doumer a observé sur divers malades, présentant, à l'examen électrique des muscles, la réaction de dégénérescence, notamment dans un cas ancien de paralysie infantile, un signe électrique particulier, à savoir que le muscle réagit mieux au courant lorsque l’électrode inférieure est placée plus bas que l'extrémité du CPP, 1. LAPICQUF, ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 16 juillet 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Johann Unterweger : « Sur les relations entre les comètes et les courants météoriques avec les phénomènes solaires. » L'auteur complète un travail déjà communiqué à l'Académie , il cherche à expliquer les taches solaires, leur dispo- sition et leur périodicité par des comètes et des cou- rants météoriqués se déplacant sous l'action des forces solaires et planétaires ; à mieux établir la théorie cos- mique de la couronne, qui est le résultat de ses re- cherches ; et à montrer qu'il est possible de rendre comple des variations périodiques dans la température de l'air par les variations dans le rayonnement solaire, en étudiant comment ce rayonnement dépend de deux causes agissant en sens opposés : l'émission de chaleur par le Soleil, et la densité du courant météorique qui absorbe une plus ou moins grande proportion de la chaleur qui le traverse, 20 ScIENCES PHYSIQUES. — M. Franz von Hemmelmayr : Sur une nouvelle base provenant de la pyridine, — M. Otto Rossin : Sur les dérivés de l'acide mélahémi- pinique, — M. Gustave Koller : Sur quelques dérivés de la paraphénylbenzophénone, — MM. Jahoda et Goldäschmiedt : Sur les substances contenues dans les pélales des fleurs de la Gentiana verna. — M. Guido Goldschdmiedt : Sur la connaissance de l'acide opia- nique. — M. L. Haïtinger : Sur les spectres d'émission des oxydes de néodyme et de praséodyme et sur les pierres phosphorescentes contenant de la néodyme, — M. Alfred Kraus : Sur l’action des nitrates sur l'éther diéthylique de la résorcine et sur la triéthylrésoreine, — M. C. Pomeranz : Sur les bergaptes. — M. Moriz Lôw : Sur l'aldéhyde salicylique éthylée, — M. Fried- rich Lippmann : Sur la constitution de l’allyleyanide. — M. Schindler : Sur l'aldoxime crotonique, — M. Kwisda : Sur l'action de l'acide iodhydrique sur quelques acides amides, — M. Skraup : Sur l’action de l'acide iodhydrique sur les alcaloïdes quiniques, — M. G. Neumann : Sur l'acide a-orthostannique, — M. Pum: Sur les éthers de l'acide benzoïique, — M. Strache : Détermination quantitative de lPoxycar- bonyle des aldéhydes et des kétones. — M. Bamberger : Contribution à l'étude des résines de surabondance, — M. Carl Reich : Sur la solubilité du carbonate et du bicarbonate de soude dans des solutions de sel de cui- sine, — M. Ed. Lippmann: Sur la description des homologues de la quinine. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. W. Sigmund : Sur les ferments donnant lieu à des corps gras, dans le règne végétal, En variant les conditions dans lesquelles on prend des émulsions de graines de plantes oléagineuses, l’auteur prouve que le rendement en acides gras est le plus grand pour les graines au moment de là germina- tion, qu'on à séchées au plus à 35°C, et ensuite pour les graines à l’état de repos physiologique Séchées à lair; dans les graines cuites à l’eau, le rendement en acides sras devient très faible, etilne correspond plus à une fermentation, maisexelusivement à une action analogue à celle du blanc d'œuf, — M. Claus : Sur la struc- ture des yeux des Pontellidiens. Les Pontellina mediter- ranea et les Anomolocera Pattersonii ont un (roisième œil médian, dont l’auteur étudie la constitution, et les différences d'un sexe à l’autre, M. Zuckerkandl : « Sur le rudiment épithélial d’une quatrième molaire chez l'homme ». Des considérations d'embryogénie et lPa- natomie (comparée avec les carnivores) permettent d’é- tablir qu'un corps épithélial situé derrière la troisième molaire est bien une quatrième molaire rudimentaire. Il n’est pas rare que cette molaire surnuméraire repa- raisse chez certains carnivores ef quand elle manque leur mächoire présente ce corps épithélial identique à celui de l’homme. Emile WeyYr, Membre de l'Académie, CHRONIQUE ASSOCIATION FRANÇAISE POUR L'AVANCEMENT DES SCIENCES Session de Marseille 189 L'Associalion française pour l'avancement des sciences va se réunir à Marseille le 17 de ce mois, sous la présidence de M. De- hérain, membre de l'Institut. Un grand nombre de savants fran- cais se sont inscrits pour des communications, conférences el lectures.D'auire part, vingt-et-un savants étrangers ont promis de prendre part aux travaux du Congrès. Voici leurs noms : Branrs (Victor), Professeur d'économie politique à l'Uni- versité de Louvain. Cuzcer (C.), Professeur extraordinaire à l'Université de Genève. Caxevazzi (S.), Professeur à l'Université de Bologne. DexzA (le R. P ), Directeur de l'Observatoire central de Montcaliéri. Frozow (le général Michel), de Saint-Pétersbourg. Hawwoxp (J.), Professeur à l’Université d'Oxford. LiauraDo (A. de), Ingénieur en chef du district forestier de Madrid. Lorioc (P. de), Membre du Comité de la carte géolo- gique de la Suisse. Mazaise (le Professeur C), Membre de l’Académie royale de Belgique. Markorr, Membre de l'Académie des sciences de Saint- Pétersbourg. MourLox (Michel), Membre de l'Académie royale des sciences de Belgique. OvrrAmaARE (G.), Professeur à l'Université de Genève, PEerroxerro (le D’), Professeur à l'Université de Turin, Pérersex (Julius), Professeur à l'Université de Co- penhague. RAconA (D.}, Professeur, Directeur de l'Observatoire de Modène. Sizva (le chevalier J.-Da), Membre associé de l’Institut, architecte de S, M. le roi de Portugal, Taverni (le D'R.), Professeur de pédagogie à l'Uni- versité de Catane. Vernox-Harcourr, de la Société des Ingénieurs civils de Londres. Vizanova y Préra, Professeur de paléontologie à l’Uni- versité de Madrid. Vocr (Carl), Professeur à l'Université de Genève. Wine (P. de), Professeur de chimie à l'Ecole militaire et à l’Université de Bruxelles. Paris.— Imprimerie F. Le Directeur- Gérant : Louis Oruvier Levé, rue Cassette, 17. ttes 2° ANNÉE N° 18 30 SEPTEMBRE 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LES PROCÉDÉS NOUVEAUX POUR LE RAFFINAGE DE L'ACIER De nos jours, la fabrication de l'acier est sortie de l’empirisme pour devenir une opération chi- mique réglée par des principes rationnels. Le métallurgiste opère sur des masses énormes, comme le ferait un chimiste dans un creuset de laboratoire ; par l’addition de réactifs spéciaux, choisis en connaissance de cause et dosés avec pré- cision, il produit à chaque instant du travail les transformations qu'il veut, corrige les défauts de la matière première, et obtient, presque avec cer- titude, un métal ayant la composilion qu'il s’est proposée. C'est surtout vers la fin de l'opération que le travail prend le caractère d’une vraie manipulation chimique. À ce moment, le métal est décarburé et partiellement oxydé; on ajoute des réactifs divers destinés à corriger sa composition : c'est ce qu'on peut appeler la phase du raffinage ; la réussite y dépend presque exclusivement du bon choix de ces réactifs et de leur dosage. Je me propose d'étudier les principes de cette opération délicate, et surtout de signaler deux procédés nouveaux qui commencent à s'intro- duire dans l’industrie, et dont la véritable portée est encore mal connue : je veux parler de l'emploi du carbone pur (procédé Darby) et de celui de l'aluminium. l Dans les anciens procédés de fabrication de l'acier naturel au bas foyer ou au puddlage, on cherchait à affiner incomplètement la fonte, de manière à n’oxyder qu'une partie du carbone el REVUE GÉNÉRALE, 1891. à en laisser dans le métal la dose voulue. Pour cela, il fallait opérer très lentement, et on ne réus- sissait bien qu'avec les fontes manganésées, parce que le manganèse, plus oxydable que le carbone, protégeait ce corps et en retardail l'élimination. Quand Bessemer eut montré que par l'insuf- flation de l'air à travers la fonte en fusion, on pouvait oxyder le carbone en quelques minutes, et déterminer une élévation de température assez grande pour que l'acier restàt fondu, cette décou- verle, qui devait révolutionner l’industrie, fut d'abord entravée dans son développement par bien des diflicultés de détail. L'une d’elles provenait de la puissance même du nouveau moyen d’aflinage : on ne savait pas la modérer; on dépassait le but; une partie du fer se brülait et on oblenait un mélange de métal et d'oxyde. L’addition de charbon ou de fonte pure pouvait bien restituer au bain le carbone néces- saire à la constitution de l'acier; mais elle ne suf- fisait pas à détruire l’oxyde dont le mélange rend le métal presque impropre à tout usage. Le nouveau procédé ne devint d’abord pratique qu'en Suède, où l’on traitait des fontes manga- nésées. Tant qu'il reste du manganèse à brûler, l'oxygène ne se porte pas sur le fer : on peut alors opérer par la méthode directe, c'est-à-dire qu'on arrête l’insufflation de lair avant d'avoir éliminé tout le carbone, lorsqu'il en reste assez pour cons- tuer la qualité d'acier qu'on veut obtenir. Avec les fontes ordinaires, la méthode directe ne donnerait pas un métal sain, parce que l’oxyde de fer qui reste mélangé au bain, commencerait à 18 594 U. LE VERRIER. — LES PROCÉDÉS NOUVEAUX POUR LE RAFFINAGE DE L’ACIER se former avant que la teneur en carbone fût ré- duite aux proportions voulues. Cela tient à ce que le carbone ne réduit pas cel oxyde aussi énergi- quement que le manganèse. Ces difficultés disparurent, et le procédé Bes- semer put prendre son merveilleux essor dès qu'un autre métallurgiste anglais, Mushet, comprenant ce rôle du manganèse, imagina de l'introduire à la fin de l'opération, sous forme de fonte manga- nésée riche (spiegel-eisen, ou fonte miroitante). Depuis, on opère presque parlout suivant celle formule : c’est ce que l'on appelle la méthode érdi- recte. On insuffle l'air jusqu’à ce que Lout le carbone soit brûlé ; on a alors un mélange de fer et d'oxyde, et on ajoute la dose voulue de spiegel, pour dé- truire l’oxyde, et recarburer le fer de manière à le changer en acier. Cet alliage, qui contient 12 à 20 ?/, de manga- nèse, et 5 à 6°/, de carbone, a donc à remplir un double rôle : c’est à la fois un agent de raflinage et de recarburation. Le carbone se combine au fer; le manganèse opère le raflinage en réduisant l'oxyde de fer. Il se substitue à ce métal pour former un oxyde plus fusible, qui, au lieu de rester mélangé au bain, se scorifie, passe à l'élat de silicate et surnage. Le métal devient sain et homogène. Ce réactif précieux est employé de la même manière quand on fabrique l'acier au four Martin. La fonte est alors fondue avec du fer sur la sole d’un four chauffé au gaz, et le carbone, au lieu de s’oxyder rapidement, s’élimine peu à peu par l'ac- tion de l'oxygène des flammes ou des scories. Mais on dépasse presque toujours le point, on prolonge l’opération jusqu'à décarburation presque complète, et on régénère le bain en ajoutant du spiegel. Tant qu'on n’a disposé que de spiegels ordi- naires, les nouveaux procédés ont été limités à la production d’aciers durs où demi-durs. En effet, on ne peut réduire la dose de manganèse qu'on ajoute, au-dessous de la limite nécessaire pour détruire tout l’oxyde de fer. Il faut pour cela 8 à 10 ©}, de spiegel. ‘On est donc forcé d'introduire au moins de carbone; d'ailleurs, le métal re- tient toujours un peu de manganèse qui ne s’oxyde pas, et qui le durcit encore davantage. Dans ces conditions, l'acier a au moins 50 ou 60 kilos de résistance, et au plus 40 à 15 °/, d’allongement. Pour faire des aciers plus doux, que fallait-il? Opérer le raflinage au même degré, tout en mo- dérant la recarburation, c’est-à-dire introduire autant de manganèse avec moins de carbone. Comme on ne peut pas fabriquer de fontes man- ganésées qui ne soient très riches en carbone, le seul moyen était de les rendre plus riches en man- ganèse, Peu à peu on a surmonté les difficultés que présente la réduction du manganèse au haut four- neau, et on est arrivé à obtenir industriellement des alliages riches, des ferro-manganèses dont la teneur dépasse parfois 80 !/,. On pouvait donc employer ce nouveau réactif à des doses trois ou quatre fois plus faibles, et ré- duire à moins de ,%, la proportion de carbone qu'on ajoute (la teneur en carbone de ces alliages reste toujours à peu près la même). On est arrivé ainsi à produire des aciers qui ne prennent plus du tout la trempe, dont la résistance peut descendre à moins de 40 kilos, et l’allonge- ment aller à plus de 25 ?/,. Ce sont de véritables fers doux fondus, plutôt que des aciers. On peut employer moins de 1 ?/, de ferro-man- ganèse riche ; il semblerait done que lä teneur en carbone püût être réduite à un demi-millième. Mais l'élimination de ce corps avant le raflinage n’est jamais rigoureusement complète : au moment où l’on arrête, il reste encore un à deux millièmes de carbone dans le bain. Si on allait plus loin, il se formerait trop d'oxyde de fer, et on serait obligé d'ajouter plus de ferro-manganèse. Il y a donc une limite minima imposée par la pratique, et ce n’est qu'avec des ferro-manganèses extra-riches qu’on peut arriver à fabriquer des aciers à deux mil- lièmes de carbone. Dans la fabrication de l'acier par les procédés basiques, les réactifs manganésés ont conservé leur rôle essentiel. On sait que la différence entre ces nouvelles méthodes et les anciennes consiste essentiellement à faire les opérations dans des fours garnis de dolomie ou de magnésie; on peut alors, par des additions de chaux, obtenir des scories très basiques qui auraient rongé et dissous les revêtements siliceux, seuls employés autre- fois. Ces scories deviennent capables d’absorber le phosphore à l'état d'acide phosphorique ; de sorte qu'on élimine ce corps nuisible et qu'on peut em- ployer les fontes phosphoreuses, au lieu d'être obligé de choisir des fontes pures. L'élimination du phosphore ne s'achève guère qu'après celle du carbone, qui, tant qu'il existe en quantité notable, réduit l'acide phosphorique. On est donc obligé de pousser l’aflinage plus loin, on obtient un bain plus décarburé et plus chargé d'oxyde que dans le procédé acide. On est donc amené, par suilé, à ajouter plus de manganèse pour le raflinage. D'autre part, il y a intérêt à introduire le moins de carbone possible, pour éviter la réintégration du phosphore : car le carbone, réagissant sur l'acide phosphorique des scories, fait toujours repasser dans le métal un peu de phosphore réduit. On emploie de préférence le ferro-manganèse U. LE VERRIER. — LES PROCÉDÉS NOUVEAUX POUR LE RAFFINAGE DE L'ACIER 593 ou les spiegels riches. D'ailleurs, avant d'introduire le réactif, on procède à un décrassage soigné pour enlever autant que possible la scorie : le plus sou- vent, au lieu de faire l'addition dans le four comme autrefois, on place le ferro-manganèse dans la poche de coulée, et on verse dessus l'acier sé- paré des scories. Avec ces précautions, on limite la réintégration du phosphore à un eee environ. Dans le four basique, le manganèse a moins de tendance à se scorifier que dans le four -acide. parce que la silice, qui a une grande affinité pour l’oxyde de manganèse, est déjà sursaturée d’autres bases. On perd done moins de manganèse par oxydation directe, et il en reste davantage dans le métal. Pour tous ces motifs, les aciers basiques sont, à dureté égale, plus manganésés et moins carburés que les aciers acides. lea teneur en manganèse y atteint souvent près du double de la teneur en carbone. Il est plus difficile de fabriquer par ce procédé des aciers durs, quoique ce ne soit pas impossible avec un décrassage très soigné, qui rend l’intro- duction du carbone à peu près inoffensive. En revanche, comme le manganèse à faible donne beaucoup moins de dureté que le carbone, on arrive à fabriquer des aciers extra doux, ayant 30 kilos de résistance et 30 ‘/, d’allong lents comme les fers les plus purs. Tels étaient, il y a deux ans à peu près, les seuls procédés de raflinage employés pour les aciers ordinaires. Il nous reste à dire quelques mots des réactifs spécaux usilés dans la prépa- ration des aciers dits sans soufllures. L’addition du spiegel dans l'acier fondu pro- voque un bouillonnement dû à la formation d'oxyde de carbone : le bouillonnement continue quand on verse le métal dans les lingotières, et quand il devient päteux par le refroidissement, les gaz ne pouvant plus se dégager restent emprisonnés dans une foule de cavilés qui rendent le lingot poreux. L'acier ne peut redevenir compact qu'après un forgeage prolongé, qui aplalit et ressoude ces souf- flures. Pour obtenir à la coulée un métal sain, suscep- tible d’être utilisé sous forme de moulage comme la fonte, on a cherché un réactif qui ne dégageàt pas d'oxyde de carbone. On y est arrivé en faisant intervenir le silicium. Ce corps, qui a pour l'oxygène plus d'aflinité encore que le manganèse, l’absorbe et l'empêche de se porter sur le carbone. En ajoutant au bain de la fonte très siliceuse, non seulement il ne se produit pas de bouillonnement, mais on voit se calmer l’ébullition légère qui existait avant le raf- dose finage, par suite de la petite quantité de carbone restée encore dans le métal. On a d’abord employé le ferro-silicium (fonte à 10 à 15 °/, de silicium); mais on n’obtenait pas en- core d’aciers {out à fait sains : on évitait bien les soufflures ; seulement la silice, en se combinant avec l’oxyde de fer, forme des silicates infusibles dont il reste de petits fragments dans le bain : le mélal est souillé par le mélange de parcelles de scorie, On évite cet inconvénient par l'emploi du silico-spiegel : c'est une fonte dificile à nn au haut fourneau, qui contient de 8 à 40 Del silicium, avec 15 à 20 °/, de manganèse, Ces the corps s’oxydent à la fois et forment des silicates fusibles qui surnagent : le métal se sépare bien de la scorie. Depuis qu'on sait obtenir cet alliage complexe au haut fourneau, la fabrication des moulages d'acier est devenue pratique, mais elle est restée délicate. Sans parler des difficultés provenant de la structure cristalline que le métal prend au refroidissement et qu'on cherche à modifier par des trempes convenables, le réactif doit être dosé avec précision. S'il reste du silicium dans l'acier, ce corps, surtout en présence du carbone, donne de l’aigreur au métal: il ne peut guère en sup- porter plus de 3 millièmes. D'autre part, si on n’en mel pas assez, il reste des soufflures : il faut donc une grande expérience, une appréciation très exacte de l’état d'oxydation du bain, pour évaluer la dose convenable et le moment où l'addition doit ètre faite. En pratique, les moulages, surtout pour les grosses pièces, sont souvent de qualité irrégu- lière, et on n'arrive pas avec sûreté à la suppres- sion totale des soufllures. Il Tous les réactifs énumérés présentent ce carac- tère commun que le manganèse y joue un très grand rôle. En outre, c'est toujours d’un seul al- liage qu'on se sert pour remplir un double but, le raflinage (qui consiste à réduire l'oxyde de fer) et la recarburation (qui consiste à transformer le mélal en acier par la combinaison du fer avec du carbone). Il en résulte qu'il y a une relation néces- saire entre les quantités de carbone ajoutées et celles des corps servant au raflinage (manganèse C ou silicium). Le rapport entre les deux teneurs ME n est compris entre certaines limites. On a pu le diminuer au-dessous de 1 par l'emploi du ferro- manganèse : on ne peut le faire monter au-dessus de 1.50. En d’autres termes, on ne peut faire d’aciers contenant beaucoup de carbone et peu de manganèse 596 U. LE VERRIER. — LES PROCÉDÉS NOUVEAUX POUR LE RAFFINAGE DE L'ACIER C'est un inconvénient grave quand il s’agit de fabriquer des aciers durs. Les bons aciers à outils, tels qu’on les obtient par les anciens procédés de cémentation et de fusion au creuset, sont des mé- taux purs, contenant 8 à 12 millièmes de carbone, et seulement des traces d’autres corps étrangers. Ces aciers ont des qualités précieuses; ils dur- cissent beaucoup par la trempe; mais ils ont du corps, et ne deviennent pas cassants. Les aciers durs riches en manganèse (les Seuls qui fussent aciles à fabriq uer par les procédés Bessemer ou Martin), sont aigres et éclatent à la trempe si on n'opère pas avec des soins lout particuliers. Pour rester maitre du dosage relatif du carbone et du manganèse, il n’y a qu'à les ajouter séparé ment. On a, en somme, deux réactions différentes, mais également nécessaires à produire : le rafli- nage, c'est-à-dire la réduction de loxyde de fer, et la recarburalion. Pourquoi prétendre les réa- liser avec un seul réactif? C’est se créer des difli- cultés graluites. Ne vaut-il pas mieux séparer les fonctions et prendre pour chacune d'elles le corps qui la remplit le mieux, par exemple, faire d’abord le raflinage avec du ferro-manganèse, puis après avoir ainsi obtenu du fer à peu près pur, lui ajouter dans une autre forme, la dose de carbone nécessaire à la constitution de l'acier ? Cette solution, qui parait si simple quand on a bien analysé les phénomènes, les praticiens com- mencent seulement à l’adopter aujourd'hui, et ils y sont arrivés par de longs détours. Bessemer avait tout d’abord essayé les addi- tions de charbon ou de fonte d’hémalite (fonte pure, où le carbone n'est allié qu'à du fer). Il ne réussit pas, parce que le carbone seul ne réduisait pas assez énergiquement l’oxyde de fer dissout dans le bain. On avait demandé à ce corps un double service, celui d’agent de raflinage et de recarburation : il n’élait propre qu'au second. On en conclut trop vite qu'il n'était bon à rien, qu'em- ployé seul il s’alliait mal au fer, et dès qu’on eût découvert l'utilité du manganèse, on ne songea plus à employer autre chose que les alliages de ce métal. Un ingénieur anglais, M. Darby, a repris récem- ment l'emploi du carbone. Il a cru d’abord qu'il fallait faciliter sa combinaison avec le fer par un contact prolongé, et il a construit des appareils où l’on faisait en quelque sorte filtrer l'acier fondu à travers du graphite ou du charbon de cornues. Le dispositif était compliqué : il ne permettait pas de régler facilement la dose de carbone absorbée. On a reconnu que cette complication était inutile. Il suffit de placer le carbone en poudre dans la poche de coulée et de verser sur lui le métal fondu. La combinaison se fait très bien. La seule condi- tion essentielle, c’est que le fer ail été préalable- ment désoxydé par l'addition d’un peu de man- ganèse. On. ajoute donc d’abord dans le four (après décrassage des scories), du ferro-manganèse ou du spiegel riche, en quantité strictement suflisante pour que l’oxyde de fer soit régénéré, mais qu'il neresle que des traces de manganèse dans le bain. Le métal ainsi raffiné, mais peu carburé, est versé dans la poche où l’on a placé d’avance du charbon en poudre. On peut employer du graphite, du charbon de bois, de l’anthracite ou même du coke: il suffit que le carbone soit à peu près exempt de malières volatiles, et ne contienne pas trop de cendres. Il en disparait toujours un peu par l’oxydalion ; on peut compter que les ? environ du carbone ajouté se retrouvent dans l'acier. On obtient, par ce moyen, des aciers ayant le degré de carbu- ration voulue, et dans lesquels la teneur en man- ganèse peut être limitée au besoin à 3 millièmes, dose où il est absolument inoffensif. Je ferai remarquer l’analogie des nouvelles mé- thodes que je viens de décrire avec le procédé classique de la cémentalion. Dans ce dernier (en- core appliqué aujourd’hui pour les aciers à outil de qualité supérieure), on prend du fer pur en barres, obtenu par l'affinage lent de fontes de choix, on le carbure en le chauffant dans des caisses avec du charbon de bois, et on obtient ainsi des barres d'acier brut qu'il faut fondre au creuset pour avoir un mélal homogène. Au Bes- semer où au Martin, on afline également la fonte jusqu'au bout, de manière à obtenir du fer pur : puis ce mélal fondu est recarburé immédiatement. Les deux phases principales del'élaboration restent les mêmes au point de vue chimique : mais elles se succèdent sans interruption et sont réunies dans une seule opération rapide, faile à haute tempé- rature, dans des conditions où les réactions sont plus vives. Tout le travail, aflinage, carburation et fusion, se fait d’un seul coup, sur de grandes masses, d’où une diminution considérable du prix de revient. Pour compléter la comparaison, je rappellerai que lorsqu'on veut oblenir des fers supérieurs destinés à la cémentalion, il faut affiner des fontes pures, plus où moins manganésifères : dans les procédés actuels, on traite des fontes ordinaires, mais on ajoute du manganèse à la fin de l'opéra- tion. Ce corps joue donc le même rôle dans les deux cas. On croyait autrefois que cerlains mine- rais étaient seuls capables de fournir de l'acier, on leur attribuait une sorte de vertu mystérieuse, et cette superstition a été difficile à ébranler. Au fond, leur supériorité était de donner naturel- U. LE VERRIER. — LES PROCÉDÉS NOUVEAUX POUR LE RAFFINAGE DE L'ACIER 597 lement des fontes manganésées exemptes de phos- phore. Aujourd’hui, comme on sait enlever le phos- phore et ajouter le manganèse, on peut prendre comme matière première n'importe quelle fonte. J'ai dit plus haut que la combinaison directe du carbone avec le fer fondu se faisait très bien. Il ne faudrait pas en conclure qu'il est facile d'obtenir de grandes masses d'acier homogènes. Le carbure de fer a une tendance à se liquater; 1 se réunit de préférence au centre et à la partie supérieure des lingots. Mais c'est là une difficulté qui n’est pas inhérente au procédé Darby. Elle se présente toutes les fois qu’on coule de grandes pièces, quel- qu’ait été le mode de carburation. III Depuis que les nouveaux procédés électriques ont abaissé le prix de l’aluminium, on a employé ce métal au raffinage de l'acier : il a donné des résultats remarquables. Cependant, l'opinion n'est pas encore bien assise sur son eflicacité réelle : certains auteurs l'ont beaucoup surfaite, et lui ont prêté des vertus incroyables. Ce nouveau métal a été prôné avec un enthousiasme allant parfois jus- qu'au lyrisme. Les seuls métallurgistes qui, à ma connaissance, aient donné sur cette question des études impartiales et sérieuses, MM. Howe et Had- field, n’ont pas manqué d'exercer leur Aumour aux dépens des panégyristes de l'aluminium. L'un se demande si le pouvoir occulte de ce réactif doit s'expliquer par une conjonction de planètes; l’autre remarque qu'on lui attribue neuf propriétés spéciales, et que si on s’est arrêté à ce nombre, c’est sans doute en souvenir des neuf Muses. Au risque de tomber sur un autre chiffre mys- tique, on peut reconnaitre à l'aluminium trois avan- lages sur les réactifs employés jusqu'ici: 4° c’est un désoxydant énergique ; 2° il augmente la fluidité de l'acier doux; 3° il prévient, mieux que tout autre corps, la production des soufflures. 1° L’aluminium, bien qu'il soit difficile à oxyder directement, réduit à chaud presque tous les oxydes métalliques. Par sa combinaison avec un équiva- lent d'oxygène, il dégage plus de chaleur qu'au- cun autre élément, sauf les métaux alcalins et alcalino-terreux. C'est donc à ce point de vue un réactif plus énergique que le silicium et le manga- nèse. Plusieurs circonstances viennent augmenter son efficacité pour éliminer l'oxyde de fer de l'acier fondu. Il est fusible, léger et se mélange facile- ment au bain; il se répand dans toute la masse; il entre en contact intime avec toutes ses parties, ce qui facilite la réaction. En décomposant l’oxyde de fer, il donne l’alumine, corps léger, sans afli- nité pour l’'oxyde de fer ni pour la silice; cette alumine reste à l’état libre et se sépare facilement du métal; on la retrouve en enduits blancs sur les géodes du haut du lingot : le manganèse, et sur- tout le silicium donnaient des oxydes qui for- maient, avec celui du fer, des scories lourdes, plus sujettes à rester mélangées à l’acier. Il n’est donc pas étonnant qu’on oblienne plus facilement avec l'aluminium des lingots sains. D'ailleurs, l’énergie de ce réactif permet de l’'employer sans excès. Une dose d’un millième suffit en général : on dépasse rarement deux ou trois millièmes !; presque tout s’élimine par l’oxy- dalion : il ne reste dans le métal, à l’état d’alu- minium allié, que des traces qui, souvent, échappent à l'analyse. C'est un avantage considé- rable de pouvoir opérer le raflinage avec de si petites quantités ; on n’est plus exposé à introduire dans le métal des corps étrangers en proportion assez forte pour altérer ses propriétés. 2° Un autre effet, moins facile à expliquer, mais incontestable, c’est que l’aluminium augmente la fluidité de l'acier. Un lingot auquel on en a ajouté se creuse beaucoup plus par le refroidissement, parce que le centre reste plus longtemps liquide et susceptible de se tasser. Il peut même en résulter des inconvénients: quand on coule directement dans les lingotières, comme cela se fait dans cer- taines usines, et qu’on place des morceaux d’alu- minium au fond,comme le métal se solidifie instan- lanément sur les parois, le retassement produit au milieu un vide qui peut atteindre une longueur exagérée et rendre le lingot impropre à tout usage. Pour expliquer cette fluidité, on a dit que la présence de l’aluminium abaïissait sensiblement le point de fusion de l’acier : cette hypothèse est invraisemblable, si l’on songe qu'il ne reste dans le métal que des traces du réactif ; d’ailleurs, M. Osmond a reconnu qu'un acier à à °/, d’alu- minium, c'est-à-dire en contenant 20 ou 30 fois plus que la dose ordinaire, a son point de fusion à peine inférieur de 25° à celui d'un acier pur. On a proposé une explication plus rationnelle dans l’échauffement de température produit par l'oxydation de l’aluminium. Cet échauffement est réel, mais il doit être très limité. On l’a évalué à 30 ou 50° par des calculs qui me semblent peu rigoureux. La combinaison d'un équivalent d’'oxy- gène avec l'aluminium dégage 65 calories ; mais il faut en défalquer 34 absorbées par la réduction d’un équivalent d'oxyde de fer. La chaleur de com- binaison de l'aluminium avec le fer est certaine- 1 Avec les anciens procédés, on ajoutait au moins 1 0/, de manganèse, dont la moitié seulement disparaissait par l'oxy- dation. Pour les aciers sans souflures, la dose était ana- logue; seulement le tiers ou la moitié du manganèse était remplacé par du silicium. s: 598 U. LE VERRIER. — LES PROCÉDÉS NOUVEAUX POUR LE RAFFINAGE DE L'ACIER ment très faible par rapport à celle d’oxydation. Un gramme d'aluminium ne dégagera donc pas plus de 4 calories. Réparties sur 1 kilogramme de fer, dont la chaleur spécifique à l’état liquide est au moins de 0,20 (c’est à peu près sa valeur à la température de 1500°), elles ne produiront qu'un échauffement de 20°. C’est peu de chose par rap- port aux effets constatés. Il est probable que la fluidité s’accroit surtout par l'élimination plus complète de l’oxyde de fer : car il suflit de peu d'oxyde mélangé pour rendre un métal pâteux. L'emploi de l'aluminium offre l’avantage de ne pas introduire du tout de carbone; il est donc spécialement indiqué pour la fabrication des aciers doux. Le métal connu sous le nom de fer Mitis est du fer presque pur coulé sous forme de moulages, gräce à l'addition d’un peu d'aluminium. Pour les aciers durs, ce réactif réussit moins bien : on dit même qu'il les épaissit au lieu de les rendre plus liquides. Cela doit arriver surtout quand on ajoute des doses trop fortes, et qu’une portion considérable échappe à l'oxydation pour rester alliée au fer. Sous cette forme, l'aluminium, comme le silicium, jouit de la propriété de déter- miner la séparation du carbone à l’état de gra- phite. Il détruit donc une partie du carbure de fer et modifie profondément la constitution de l’acier. Mais cet effet ne doit pas se produire avec de faibles doses. 3° L'expérience montre que l'aluminium ajouté, même en très petites quantités, arrète le bouil- lonnement de l'acier, bien mieux encore que les réactifs siliceux et permet d'obtenir des aciers sans soufllure. L’augmentation de fluidité, déjà signalée, diminue certainement les chances de soufllure. Mais par quel mécanisme ce réactif peut- il calmer subitement l’ébullition ? Cette question se rattache à celle de la nature et de la cause même des dégagements gazeux. Nous ne ‘pouvons que l’effleurer ici. On sait que, dans un bain d'acier contenant de l’oxyde dissous, le carbone réagit sur cet oxyde et produit de l'oxyde de carbone qui s'échappe avec bouillonnement. On admettait autrefois que c'é- tait la cause principale, sinon unique des dégage- ments gazeux. Cetle idée, soutenue notamment par M. Pourcel, a conduit à des découvertes utiles, ear c’est elle qui a engagé à étudier l’action du silicium, et qui a mis sur la voie des moyens de fabriquer l’acier sans soufflures. L'action spéciale du silicium s’expliquait tout naturellement : il s'empare de l'oxygène en for- mant un produit solide, la silice; il prévient done la formation de l’oxyde de carbone. L’aluminium doit évidemment produire le même effet, et d’une manière plus complète, parce qu'il a plus d’affinité pour l'oxygène. Cette théorie simple, qui paraissait rendre compte de tous les faits, a cependant été battue en brèche par les expériences du D' Müller. Il a montré que les gaz dégagés se composent, pour la majeure partie, d'hydrogène. Ainsi, le bouillon- nement a surtout une cause physique : l'acier li- quide contient, à l’état de dissolution, plus d’hy- drogène qu'il ne peut en garder lorsqu'il est devenu solide. C’est cet excès qui se dégage pen- dant le refroidissement. Pour qu'il n’y eût pas de dégagement, il faudrait que tout le gaz dissous à chaud püt rester dans le métal, c’est-à-dire que sa solubilité ne diminuät pas avec la température. Or, MM. Troost et Hautefeuille ont montré que le silicium diminue la solubilité à chaud, dans l'acier fondu : d'autre part, le manganèse aug- mente la solubilité à froid, dans l’acier solide. Les aciers manganésés, tout en n'ayant pas de souf- flures, contiennent beaucoup plus d'hydrogène occlus que les autres. Ainsi, la présence simultanée de ces corps (qu’on introduit par le silico-spieyel) peut réaliser la con- dition demandée, la proportion d'hydrogène que dissout le bain cesse d’être supérieure à celle qui pourra rester occluse dans le lingot ; il n’y a plus de raison pour que ce gaz se dégage. Ces réactifs n'auraient donc qu’une action phy- sique. Cette explication parfaite en théorie, n'est pas cependant de nature à satisfaire entièrement ceux qui ont observé le phénomène dans les usines. Elle ne rend pas bien compte de l’apaisement subit qui se produit par des additions de réactif en quan- tité très faible. Un corps étranger ne peut modifier les propriétés physiques d’un métal qu'à condition d'y rester en proportions sensibles : comment se fait-il que l'aluminium, celui des réactifs qu'on ajoute à la dose la plus faible, et qui s’élimine le plus complètement, soit en même temps celui qui apaise le mieux les dégagements gazeux ? N'y a-t-il pas là un fait de nature à montrer que l’action chimique à une importance prépondérante, car l’aluminium, qui s'oxyde presqu’en entier, ne saurait modifier notablement les propriétés du métal et son eflicacité supérieure ne peut guère s'expliquer que par la réaction énergique exercée sur les oxydes. Je proposerai à ce sujet, une hypothèse qui m'est suggérée par la comparaison de phénomènes ana- logues plus faciles à étudier. On sait que, dans un liquide sursaturé de gaz dissous, l'agitation peut provequer un dégagement qui n'avait pas lieu : c’est ainsi qu'on fait mousser le champagne ou la bière en frappant sur la bouteille, On produirait le même effet en y insufflant de l'air. D'autre part la présence U. LE VERRIER. — LES PROCÉDÉS NOUVEAUX POUR LE RAFFINAGE DE L'ACIER 599 de bulles d'air libre dans un liquide facilite le dé- gagement des vapeurs : l’ébullition de l’eau est retardée quand elle est absolument privée d'air. Si donc nous considérons un bain d’acier sursa- turé d'hydrogène dissous, l'équilibre pourra se trouver rompu par la naissance, au sein de cetle masse, de bulles d’un autre gaz libre, et ce phéno- mène provoquera le dégagement d’une partie de l'hydrogène. C'est ce qui arriverait quand il se produit de l’oxyde de carbone, et il suffirait d’em- pêcher sa formation pour que l'hydrogène restàt dissous. L'oxyde de carbone, tout en ne formant qu'une faible partie du dégagement gazeux, serait l'agent nécessaire et suffisant pour amorcer le bouillonne- ment. On s'expliquerait ainsi que les réactifs ca- pables d'absorber l’oxygène sans produire des gaz calment l’ébullition mème à dose très faible. Les idées soutenues par M. Pourcel et confirmées par des résultats pratiques se trouveraientainsi d'accord avec la théorie ; l’oxyde de carbone serait bien le véritable ennemi, non par lui-même, il est vrai, mais par son action indirecté sur les autres gaz dont il provoque le dégagement. Je ne prétends pas nier l’action physique que ces mêmes corps peuvent exercer en modifiant la solubilité de l'hydrogène. Je la crois réelle, surtout pour le manganèse, car cet élément ne prévient les soufflures qu à condition de rester dans, l'acier en proportioa assez forte. Pour le silicium, qu’on emploie à dose beaucoup plus faible, et dont il reste peu dans le métal, s’il modifie avantageuse- ment la solubilité, il doit aussi une partie, peut-être la plus importante, de son eflicacité à son action chimique, à sa propriélé d'empêcher la production d'oxyde de carbone !, Enfin l'aluminium, qu'on emploie à dose homæopathique et qui disparait presque tout entier, doit jouer exclusivement un rôle chimique, en absorbant tout l'oxygène sans production de gaz. En somme, tous les avantages de l'aluminium seraient la conséquence indirecte de la facilité avec laquelle ce corps élimine l’oxyde de fer : ils se rattacheraient à une seule et même propriété, son aflinilé pour l'oxygène, jointe à sa fusibilité qui lui permet de réagir rapidement sur toute la masse liquide. À ce point de vue, les métaux alcalins et 1 Je sais que les expériences du D' Müller ne sont pas fa- vorables à cette manière de voir : ce savant a constaté qu'en ajoutant le silico-spiegel dans la lingotière, à l’acier bien sé- paré des scories, le silicium s'oxyde fort peu et reste dans le métal : son action serait done surtout physique. Mais ces expériences supposent la connaissance exacte de la composi- tion du bain avant et après l'addition : et il est impossible de faire une prise d’essai qui corresponde sûrement à la compo- sition moyenne, D’ailleurs, il y a fort peu d’oxygéne à ab- sorber, et l’action chimique peut être réelle quoique la quantité de réactif disparue soit très faible. le magnésium pourraient seuls l’égaler, peut-être le surpasser, si leur emploi était pratique. Quoi qu'il en soit, on emploie avec succès l’alu- minium pour éviter les soufflures dans les aciers moulés, qui ont en général une résistance de 50 à 60 kilos et une teneur en carbone de 5 à 6 mil- lièmes. Souvent on commence le raffinage avec du spiegel, qui sert en même temps à recarburer, puis on ajoute l’aluminium dans la poche de cou- lée, où sa présence calme instantanément l’ébulli- tion. On obtient ainsi des moulages plus sains que par l'emploi du silico-spiegel. On a d’abord employé l'aluminium sous forme d’alliage avec le fer. Le ferro-aluminium, tel qu’on le fabriquait au début des procédés électriques, ne contenait pas plus de 10 0/0 de métal actif. Cet al- liage avait l'inconvénient d’être très peu fusible. Il fallait le chauffer au blanc avant de l’ajouter à l'acier. D'ailleurs, il ne peut se conserver long- temps sans allération. Peu à peu on a fabriqué des alliages plus riches. Aujourd’hui on emploie de préférence l'aluminium pur(du moins celui qui est vendu sous ce nom, mais qui est loin d'approcher de l’état de pureté chimique). Grâce à sa grande fusibilité, on peut en placer les morceaux froids dans la poche de coulée. Ils fondent au contact de l’acier, et s’élèvent à travers le bain en réagissant vivement sur toutes ces parties. La réaction est immédiate et le contact intime. Plusieurs praticiens admettent aujourd’hui qu’il faut employer, dans la fabrication de l'acier, de l’a- luminium pur. Gelte opinion ne me parail pas jus- tifiable ; je serais bien tenté d'y voir une de ces superstitions qui s’accréditent souvent en métal- lurgie, par suite de la difficulté où l’on est d’ana- iyser tous les facteurs des phénomènes complexes dont on ne saisit que le résultat pratique. Les deux corps qui se rencontrent dans l’alumi- nium pur sont le fer et le silicium. Au point de vue des réactions chimiques, il est bien évident que la présence du fer est indifférente. Quant au silicium, son action est la même que celle de l’a- luminium ; iln’y a qu'une différence d'intensité : sa présence, à dose modérée, ne peut done être nui- sible. La seule condition à remplir, c'est que ces deux corps ne soient pas en quantité suflisante pour modifier les propriétés physiques de l’alliage, surtout sa légèreté el sa fusibilité. Le fer, à moins de 5 ou 6 0/0, ne semble pas avoir d'action sensible. Le silicium ne modifie pas la densité, et il augmente la fusibilité. Je crois que des alliages à 10 ou 15 0/0 de sili- cium, avec 6 ou 10 0/0 de fer, remplaceraient par- faitement l’aluminium pur. Leur adoption par les fabricants d'acier offrirait un grand intérêt : on pourrait les fabriquer à beaucoup plus bas prix 600 L. OLIVIER. — LE CONGRÈS D'HYGIÈNE DE LONDRES que l'aluminium, parce qu'on les obtiendrait en soumettant à l’électrolyse la bauxite brute‘. On pourrait même songer à utiliser le métal très sili- ceux extrait des argiles ordinaires. Il est à désirer que des essais méthodiques viennent trancher la question, déterminer l'effet que produit dans le traitement de l’acier l’alumi- nium siliceux, el la limite de teneur au-dessus de laquelle le siliciumoffriraitdes inconvénients réels. L'aluminium étant un réactif cher, il y a intérêt à en réduire la consommation. Lorsqu'on n'aura pas de raison pour proscrire absolument le manga- nèse, il semble logique d'adopter la formule sui- vante : 1° Raffinage par le ferro-manganèse (aciers doux) ou par le spiegel-laciers durs), ces réactifs étant ajoutés dans le four ou dans une première poche de coulée, s’il faut éviter leur action sur les scories phosphoreuses : 2° Transvasement dans une poche où on a placé le carbone en proportion néces- saire pour achever la carburation, avec quelques fragments d'aluminium pour éviter les souflures. Chaque élément est ainsi introduit à part, à la dose juste convenable pour remplir son rôle spéci- fique : le manganèse intervient d’abord comme réducteur des oxydes, plus efficace que le carbone et moins coûteux que l'aluminium; le carbone ar- rive à son tour pour se combiner au fer épuré, el l'aluminium est là pour empêcher le carbone de s'oxyder en provoquant des dégagements gazeux et des soufilures. Le travail est ainsi parfaitement réparti ; l’éla- boration complète, le procédé élastique, facile à régler, et on peut obtenir à quelques millièmes près un métal de composition déterminée. Le transvasement de la première poche de coulée dans la seconde, que j'ai indiqué d’une manière éventuelle, n’est pas comme on pourrait le croire, une complication matérielle fâcheuse. [la l'avantage de mieux brasser le métal, et de le rendre plus ho- mogène : on l’a déjà, pour ce motif, adopté dans plusieurs aciéries 6ù il n’a pas d'autre raison d’être et où on n’ajcute aucun réactif spécial dans la se- conde poche. M. Hadfield a montré dans une série d’éludes sur l'acier à l’aluminium que ce corps avait sensible- ment la même action que le silicium. Ilse demande si sa supériorité n'est pas seulement apparente, et due à ce qu’on l’emploie à peu près pur tandis que le silicium n'est introduit qu’à l’état d’alliages pauvres (le ferro-silicium ordinaire ne dépasse guère la teneur de 10 0/0; il atteint au plus celle de 15 à 20). Dans cette hypothèse, le silicium pur, ou du moins des alliages riches de ce corps, si on arrivait à en préparer à bon marché, pourraient prendre dans la fabrication de l'acier la place de l'aluminium. Je ne partage pas entièrement celte opinion: l'alu- minium offre deux avantages qu'il ne perdra pas : 1° son affinité plus grande pour l'oxygène, démon- trée par ce fait qu'il réduit la silice, en fait un réac- üf plus énergique pour la désoxydation; 2° sa fusi- bilité lui permet de se mélanger au bain plus rapi- dement. plus intimement que le silicium, et en rend l'emploi plus facile. Je crois donc que l'emploi de l'aluminium est appelé à se généraliser pour loutes les variélés d'acier, de même que le procédé Darby doit deve- nir d'une application courante pour les aciers durs. Bien compris el bien maniés, ces deux procédés permettront sans doute à l’industrie de sortir du cercle des aciers manganésés, et de fabriquer en grand, au Bessemer ou au Martin, les aciers supé- rieurs exclusivement carburés, qui jusqu'à présent ne pouvaient se faire qu'au creuset. U. Le Verrier. Professeur de Métallurgie au Conservatoire des Arts et Métiers. LE CONGRÈS D'HYGIÈNE DE LONDRES Le Congrès international d'Hygiène est triennal. Dans sa deuxième réunion, qui avait eu lieu à Vienne, Londres avait été désigné comme le siége du prochain congrès. L'Angleterre a su réaliser dans le vaste domaine de l'hygiène d'importantes réformes dont les résultats sont déjà très appréciables et qui mé- ritent de fixer l'attention des médecins et législa- teurs du monde entier. Nous ne sommes donc ‘ Ce problème a déjà été résolu par M. Adolphe Minet (Comptes rendus de l'Académie du 25 mai 1891, p. 4215.) point surpris que le Congrès qui vient de se lenir à Londres y ait attiré plus de deux mille sept cents hygiénistes. Mais le nombre des membres d’une réunion, leur qualité même ne suffisent pas pour la rendre utile. Sans aller jusqu'à dire avec le grand journal médical anglais, The Lancelt, que le Congrès.considéré dans sesrésullats, aété un échee, — a failure, — on doit constater qu'aucune décision importante n'y a élé prise. Tandis que dans les réunions précédentes quelques grandes questions avaient été discutées, puis soumises au vote de l'assemblée, rien de pareil n’a eu lieu cette année. L. OLIVIER. — LE CONGRÈS D'HYGIÈNE DE LONDRES 601 Bien que l'hygiène ne soit pas une science théo- rique et n'ait, en somme, sa raison d’être que dans les applications, il serait cependant injuste de contester l’imporlance du dernier Congrès. Les dispositions sanitaires découlent, en effet, des recherches scientifiques, el plusieurs de celles qui ont élé exposées offrent, pour la pratique de demain, un intérêt évident. Voici le résumé très succinct des principales communications faites sur les sujets à l’ordre du jour : J. — DE L'IMMUNITÉ Le D' Roux (de Paris) ouvre la discussion, en rappelant que c’est à M. Pasteur que l’on doit les méthodes d'atténuation des virus, soit par l’action d'agents physiques (température, lumière, oxygène) soit par le passage dans des animaux d'espèces différentes. Il expose les résultatsobtenus au moyen des vaccins chimiques, et insiste sur l'obscurité qui règne encore sur leur mode d’action, si dissem- blable qu’on peut supposer l'existence de plusieurs produits distincts, les uns toxiques, les autres ; vaccinants. M.Roux discute ensuite les faits invoqués contre la théorie phagocytaire : il montre que la qualité bactéricide des humeurs peut être impuissante à produire l’immunité et, dans bien des cas, sinon tous, ne suflit pas à en rendre compte ; puis il expose des expériences remarquables, faites avec M. Met- chnikoff, d’où il résulle que les sérums dits micro- bicides et prophylactiques agissent de deux façons à la fois : 1° en atteignant dans leur vitalité une cer- laine quantité des germes pathogènes introduits avec eux; 2° en provoquant par appel chimiotac- tique, au lieu même de l'injection, une abondante accumulation de leucocytes qui dévorent les mi- crobes infectieux !. Enfin il explique l’immunité acquise par l’accoutumance des leucocytes aux produits microbiens. M. Metchnikoff, très applaudi par l'assistance, traite de la théorie de la Phagocytose, qu'il a déjà exposée ici même ?. Cette théorie rencontre des adversaires dans MM. Buchner (de Munich), Fodor (de Buda-Pesth), Babès (de Bucharest), Hankin (de Cambridge). Ce dernier formule ainsi sa conception de l’immunité : L’immunité, soit naturelle, soit acquise, est due à la présence de substances formées par le méta- bolisme de l'animal plutôt que par celui du microbe, ces produits ayant pour effet soit de ! Ce remarquable discours, que nous regrettons de ne pou- voir analyser, vient de paraitre dans les Annales de PInstitul Pasteur (n° du 25 août 1891). ? MercaxiKorr. Recherches nouvelles sur la Phagocytose dans la Revue du 30 juillet 1890, t. I, page 495. REVUE GÉNÉRALE, 1891, détruire le microbe lui-même, soit de neutraliser les subsances pathogènes qu’il sécrète. M. Hankin ajoute, du reste, que cette théorie n'exclut pas les autres agents de protection et que chez certaines espèces l’immunité peut dépendre, soit partielle- ment, soit même totalement, d’autres facteurs. Pour lui, l’action bactéricide est due à l'existence, dans le sang, de protéïdes défensives, notamment d’un ferment particulier, le cel! ylobulin B, qu’il ne parait pas, du reste, avoir isolé. I. — ETIOLOGIE ET PROPHYLAXIE DE LA DIPHTÉRIE. M. Bergeron (de Paris), après avoir montré les ravages Loujours croissants que fait la diphtérie en France (5.000 victimes par an), insiste sur la néces- sité d’une désinfection énergique et complète. C’est par contagion directe que la maladie se propage. C'est donc contre les fausses membranes et les liquides de jetage qu'il faut diriger tous les efforts. Tous les objets susceptibles d’avoir élé souillés doivent être désinfectés, ce qui, dans les grandes villes au moins, est très réalisable. Il n’en est pas de même de l’isolement : il y a encore trop d'in- connues : à quelle période du début la diphtérie est-elle transmissible? Pendantcombien detemps le convalescent reste-t-il dangereux? Quelle quaran- taine faut-il imposer aux enfants simplement sus- pects? Il est encore difficile, selon lui, de rien pré- ciser à ce sujet. M. Seaaon (de Londres) fait remarquer que la diphtérie ne suit pas les lois qui paraissent régir les autres affections infectieuses. Elle est plus ré- pandue dans les campagnes que dans les villes. Les mesures d'hygiène paraissent sans influence sur son développement. C’est ainsi qu’en Angleterre la mortalité par diphtérie a augmenté à mesure que l’on a entrepris des travaux importants pour l’a- menée d’eau pure et l’assainissement des égouts, contrairement à ce que l’on observe pour la fièvre typhoïde. M. Schrevens (de Tournai) arrive, en s'appuyant sur la statistique belge, à des conclusions opposées à celles de l'orateur précédent. La fièvre typhoïde et la diphtérie suivraient une marche parallèle, diminuant toutes deux dans certaines régions, présentant au contraire une recrudescence dans d’autres. Les deux affections seraient d'origine fécale; toutefois le bacille de Læffler se développe- rait surtout à la surface du sol, tandis que le ba- cille d'Eberth aurait le fond du sol pour habitat. Dans les campagnes les progrès de la dipthérie s’expliquent facilement par le séjour du bacille dans les nombreux immondices amassés à la sur- face du sol. M. Adams (de Londres) admet un rapport cons- tant entre les épidémies de diphtérie et les oscilla- 18* 602 L. OLIVIER. — LE CONGRÈS D'HYGIÈNE DE LONDRES A tions de la nappe d’eau souterraine. Ces oscillations ont, selon lui, pour effet, de déplacer le micro-or- ganisme, d'en favoriser le développement, puis la dissémination au moment de la dessiccation du sol. III. — ÉTIOLOGIE DE LA MALARIA. M. Laveran décrit les formes sous lesquelles se présente l’hématozoaire de la malaria, qu'il s’al- tache à différencier des hématozoaires signalés chez les oiseaux par Danilewsky, par des considérations tirées de la morphologie et surtout des études ex- périmentales: jamais les injections de sang palustre n'ont déterminé l'infection chez les oiseaux. M. Crookshank admet volontiers que la malaria a pour agent les organismes décrits par M. Laveran ; mais ilne faut pas oublier, dit-il, que l'onrencontre également des hématozoaires chez les animaux sains. M. Hueppe (de Prague), admet absolument les vues de M. Laveran, tandis que M. Noth, après avoir fait remarquer que le plasmodium n’a jamais élé trouvé dans le sol ni dans l’eau incriminés, que les injections de liquides ayant lavé des terres mala- riques n’ont donné aucun résultat, croit qu'il s’agit d'un organisme plus élevé que ceux de M. Laveran. Les opérations chirurgicales suffisent dans les pays tropicaux pour faire éclater la fièvre intermittente, et le schock seul suffit peut-être à modifier la ther- mogénèse déjà impressionnée par les conditions climatériques. [V. — ÉTIOLOGIE DU CHOLÉRA. M. Hueppeindique les résultats qu’il a obtenus en cultivant le bacille virgule dans des milieux artifi- ciels. Il a réussi à déterminer la mort chez les ani- maux injeclés avec ces cultures; il insiste sur l'éla- boration des poisons chimiques par le bacille dans l'intestin. —MM. Klein'et Cunningham n'admettent pas au contraire la spécificité du bacille virgule; il existe toujours en trop petite quantité dans l'intes- tin des cholériques pour produire les effets obser- vés; quant à sa forme, elle est très variable, puis- que M. Cunningham a pu noter huit bacilles virgu- les différents par la forme et le mode de culture. Le Komma bacillus se rencontre enfin dans la muque- use du cobaye et du singe.—M. Bruce fait observer à ce sujet que es cobayes ont tous succombé à des cultures pures de bacilles, alors que les rats résis- taient. Le bacille se cultive bien à l’intérieur des œufs et y conserve longtemps sa virulence. V. — ÉYTIOLOGIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE. M. Schneider (de Paris), chargé par l’Adminis- lration de la Guerre d'exposer au Congrès les travaux entrepris pour lutter contre la fièvre Ly- phoïde, donne les chiffres officiels qui indiquent les progrès accomplis. Le nombre des cas, qui était de 6.000 en 1887, serait tombé au-dessous de 4.000 en 1890, soit une diminution de 30 %. Cette amc- lioration viendrail principalement de l’approvi- sionnement en eau pure de toutes les garnisons, soit qu'il s'agisse d’eau de source, soit que l’eau soil filtrée. : Les médecins anglais ont laissé de côté la ques- tion du contage par l’eau; ils ont surtout étudié la fièvre typhoïde dans les Indes. Le D' Noller in- siste sur la facilité avec laquelle les jeunes recrues contractent l'affection, surtout s'ils débarquent pendant la saison chaude; il demande le retour aux vieilles troupes coloniales, faisant de longs congés. M. Harvey montre combien il est difficile d’éta- blir des statistiques comparatives sur la fièvre ty- phoïde, étant données les divergences de diagnos- tic pour certaines maladies. C’est ainsi qu'il existe dans les pays tropicaux certains cas que l’on dé- signe sous le nom de fièvre typhoïde malarique et qui ne paraissent pas être la fièvre typhoïde, mais plutôt une malaria avec symptômes typhoïdiques. Celteopinion parait généralement admise, malgré l’assertion du D' Godfrey, des États-Unis, qui aurait trouvé, chez les mêmes malades, le bacille d'Eberth et le plasmodium de Laveran. M. Arloing communique les recherches de MM. Roux et Rodet, tendant à démontrer que le Bucille d’Eberth n’est qu'une simple variété du Ba- cillus Coli communis, recherches connues de nos lec- teurs VI. — NATURE INFECTIEUSE DU CANCER. MM.Shattock et Ballance décrivent les tentatives entreprises jusqu'ici pour cultiver les soi-disant microbe du cancer, ou inoculer des parcelles can- céreuses ; toutes ont jusqu'ici échoué. Telle est en résumé la conclusion de ces auteurs. MM. Duplay et Cazin n’admeltent pas que l’on puisse actuellement conclure à l'existence des coc- cidies dans les cancers épithéliaux. Ces importantes questions seront traitées ulté- rieurement avec plus de détail dans la Revue. VII. — INTOXICATIONS ALIMENTAIRES. Les aliments avariés peuvent déterminer des affections bien caractéristiques et qui sont nette-- ment d’origine infectieuse. M. Ballard décrit les variations observées dans la période d’incubation, quelquefois nulle, et les explique par le double 1 Voyez la Revue du 30 mars 1891, t. IT, p. 178. L. OLIVIER. — LE CONGRÈS D'HYGIÈNE DE LONDRES 603 mécanisme de l’intoxicalion : Les micro-organismes peuvent être ingérés avant qu'ils aient produit dans l'aliment une quantité suflisante de poisons chimiques : il y a alors incubation; les symptômes morbides n'apparaissent qu'avec le développement de la bactérie dans le corps. Si, au contraire, les poisons chimiques sont en quantité suffisante, on assiste à une véritable intoxication chimique, rapide et se produisant d'emblée. La propreté la plus rigoureuse dans le traitement des viandes est le moyen préventif par excellence. M. Vaughan insiste également sur les bactéries qui peuvent se trouver dans les aliments, soit qu'elles proviennent d'animaux atteints eux- mêmes d’une maladie infectueuse, soit qu'il s'agisse d'organismes saprophytes. M. Raphaël Blanchard rappelle que certains animaux, des poissons notamment, ont une chair toxique par elle-même, par suite de la présence de leucomaïnes physiologiques. A propos des maladies infectueuses des trayors de la vache, transmissibles à l’homme, M. Chauveau fait remarquer que la fièvre aphteuse et la vaccine sont les deux seules affections qu'il a reconnues transmissibles de la vache à l’homme. En ce qui concerne l'identité de la vaccine et de la variole, il n'a jamais pu transformer la variole en vaccine par le passage sur le veau. VIII. — LA QUESTION DES ÉGOUTS M. James Lemon compare le système anglais au système français. La description de ce dernier est un peu faite pour les besoins de la cause. Si le principe anglais est d'entraîner rapidement toutes les matières excrémentitielles, grâce à une pente rapide et une grande masse d’eau (120 litres au moins par habitant), les nouveaux travaux effectués en France, etle système d’appareil de chasse, per- mettent d'arriver presque au même résultat. Le système anglais diffère surtout du système français en ce que l’enlèvement des eaux ménagères est toujours au premier plan, tandis qu'en France on se préoccupe plus spécialement de la disparition des eaux provenant du lavage des rues. M. Thresh soutient que, pour purifier les eaux d’égout, il est nécessaire d'utiliser plusieurs pro- cédés combinés de désinfection : procédés méca- niques, chimiques ou électriques. Il critique suc- cessivement la décantation, la filtration sur le sable, et tous les procédés isolés, Aussi arrive-t-il à préconiser le système essayé en Angleterre depuis quelque temps et qui consiste à traiter les eaux décantées par la saumure de hareng et la chaux : la saumure agit comme antiseptique et la chaux précipite les matières. M. Carpener insiste sur la nécessité d'utiliser les principes fertilisants que renferment les eaux d'égouts. Il montre que les irrigations faites avec les eaux d’égouts n’exercent aucune influence délétère sur la population, que les produits de cul- ture obtenus n'offrent aucun danger, que l’eau sort pure des champs d'irrigation. La proposition suivante, présentée par le président, M. Roscoe, n’a été votée qu'après une vive opposilion de quel- ques membres : « L'assemblée est d'avis que la meil- leure manière de disposer les eaux d'égouts des villes est de les purifier et de les utiliser au moyen du sol. » IX. — INFLUENCE DES BROUILLARDS SUR L'ÉTAT SANITAIRE Les recherches poursuivies à Manchester par la Société d'étude des sciences naturelles avaient pour objet de déterminer l'influence qu'exercent sur la composition de l’air : la densité de la popu- lation, l’état sanitaire des différentes parties de la ville, la fumée et le dégagement des gaz et des vapeurs industrielles, les brouillards. Pendant les brouillards, la quantité d’acide sulfurique contenue dans l’air est considérablement augmentée. Les variations sont de 1 à 26. L'analyse de la neige a montré que, pendant trois jours de brouillard, il élait tombé dans le centre de la ville 10 à 30 mil- ligrammes d'acide sulfurique par mille carré. L'exa- men des dépôts faits sur les feuilles des arbres ex- plique la difficulté que rencontrent les plantés à se développer dans les villes. Le D' William proteste contre les mauvais effets attribués aux brouillards. S'ils ont causé quelque- fois des bronchites ou des pneumonies, ils ont parfois aussi exercé une salutaire influence sur les asthmatiques. Telle n’est pas l'opinion de M. Hart. Si quelques asthmatiques, en petit nombre, se trouvent bien des brouillards de Londres, les chiffres montrent que durant les périodes de grands brouillards la mortalité est accrue de beau- coup. Ge sont les maisons particulières qui sont la source principale des fumées qui planent sur les villes; il serait à désirer qu'une loi inter- vint pour réglementer les appareils de chauffage. M. Honglon appuie cette motion, en demandant qu'une taxe soit établie sur les maisons qui ne seraient pas pourvues d'appareils fumivores. Comme on le voit, les congressistes ont apporté cette année à beaucoup de questions pendantes d'importantes contributions personnelles et, en ces difficiles problèmes, préparé les voies aux solu- lions définitives. Louis Olivier. 60% MAURICE D'OCAGNE. — LA NOMOGRAPHIE LA NOMOGRAPHIE REPRÉSENTATION GRAPHIQUE DES LOIS A Le calcul est la clef de la technique d’une foule de professions; le financier, l’actuaire, l'in génieur, le mécanicien, l’électricien, le navigateur, l’artilleur, ete. sont forcés d'y recourir dans l'ap- plication de certaines formules dont le nombre est, en réalité, assez restreint pour chaque spécialité, mais qui reviennent très fréquemment. Il y a donc un intérêt très général à simplifier autant que faire se peut les opérations qu’exige le calcul numérique. Ce progrès a été recherché dans diverses voics, soit par l’artifice des opérations abrégées, soit par l'établissement de tables numériques, soit par 1 l'invention de machines ou de règles à calculer *, soit enfin par l'application de la méthode gra- phique. Cette application peut s'effectuer de deux manières très différentes et qu'on a souvent le tort de confondre sous l'appellation unique de calcul graphique. Ge terme nous semble devoir être réservé à l’ensemble des procédés qui ont pour but, certaines quantités étant représentées par divers éléments géométriques du plan (seg- ments de droite, angles...) d’en déduire au moyen d'une construction les quantités à déterminer liées aux premières par des formules connues. A cette catégorie se rattachent en particulier les procédés de la statique graphique. Mais la méthode graphique peut encore venir en aide au calculateur d'une facon toute différente, en traduisant par une image, dite abaque, la loi qui unit un certain nombre de quantités simultanément variables, de façon à permettre, par une simple lecture, étant données des valeurs particulières pour toutes ces quantités sauf une, d’avoir la ou les valeurs correspondantes de celle-ci. C’est cette dernière manière simplifiée d'opérer les calculs, à laquelle nous avons donné le nom de Nomographie (v6p.2s, loi), que nous avons seulement en vue dans le présent article. Nous nous proposons d'exposer sous une forme condensée les progrès qu’elle a réalisés en ces derniers temps, et nous espérons, par là, faire ressortir aux yeux de ceux qui voudront bien nous lire, la haute impor- tance pratique qu’elle a acquise aujourd'hui et les promesses qu'elle fait entrevoir dans l'avenir. Il Une équalion est l'expression analytique de la loi qui fait dépendre les unes des aulres un cer- 1 À celles-ci se rattachent les ingénieuses réglettes mobiles de M. Genaille sur lesquelles lattention du public savant a ét appelée par M. Ed. Lucas, inventeur lui-même de divers appareils à calcul habilement concus. UN NOMBRE QUELCONQUE DE VARIABLES lain nombre de quantités définies. La représentation géométrique d’une telle équation est fournie par la méthode cartésienne complétée par la notion con- ventionnelle des hyperespaces. Si, en effet, Les diverses quantités qui figurent dans l'équation sont prises pour des coordonnées courantes, celte équation définit un être géométrique qui peut à son tour en être considéré comme la représentation. Cette image, parfaitement suffisante pour le mathématicien, est, sauf dans le cas de deux variables, sans intérêt pour le calculateur. Pour ne prendre que le cas de trois variables, il est bien évident que la surface correspondante de l’espace, ne pouvant être effectivement, réalisée n’a aucune utilité pratique. Que dire dès lors de ces êtres fictifs que sont les surfaces à plus de trois dimensions! De là, la nécessité de la représentation graphique des équations dont le but est de ramener au seul plan l'interprélation des faits analytiques synthétisés dans ces équations. Est-il besoin d'ajouter qu’une telle représentation n'a lieu d’être réalisée dans la pratique qu'autant que la formule à laquelle elle s'applique est de celles dont l'usage est, en quelque sorte, permanent? La construction d’un abaque est, en pareil cas, la source d'une très sérieuse écono- mie de temps; elle ne serait autrement qu'une complication inulile. IL La représentation géométrique, dans le cas de deux variables, se confond, avons nous dit, avec la représentalion graphique. Une équation entre deux variables définit, en effet, dans l’admirable mé- thode de Descartes, une courbe tracée sur un plan. La difficulté ne commence qu'avec les équations à trois variables; mais pour celles-ci la solution générale est acquise depuis longtemps; elle con- siste en l'emploi des lignes d'égal élément ou lignes isoplèthes ; æ, y. 2, étant les trois quantités liées par l'équation considérée, si l’on donne à z une va- leur particulière, l'équation en z et y qui en résulte définit une cerlaine courbe qu’on pourra désigner par la valeur correspondante de z, dite sa cote. En faisant varier z, on obtient ainsi sur le plan une série de courbes cotées dites isoplèthes en raison de ce que pour tous les points de chacune d'elles la valeur de l'élément z est la même. Si l’on suppose ces diverses lignes tracées sur un plan quadrillé parallèlement aux axes de coordonnées, on obtient ‘ Terme proposé par M. Vogler et adopté par M. Lalanne. MAURICE D'OCAGNE. — LA NOMOGRAPHIE 605 l’abaque de l'équation proposée (fig. 1). Étant don- nées des valeurs particulières pour + ety, sion veut la valeur correspondante de z, il suffit de prendre le point de rencontre deslignes du quadrillage cor- respondant d’une part à la valeur de x, de l’autre à celle de y, et de lire la cote z de l’isoplèthe pas- sant en ce point. Ainsi sur la figure 1, pour DNS NI Ni 0 12345678 910 1121841515 Fig. 4. — Schema indiquant ia disposition générale d’un abaque. æ—À4, y—=8, onaz—5. On pourra de même se donner 2 et soit x, soit y, pour en déduire y ou +, À qui convient-il d'attribuer l'invention de cette représentation graphique des équations à trois variables? Nons ignorons s'il peut être fait une réponse précise à cette question. Les équations de cette sorte sont très fréquentes dans la pratique et il est tout naturel que divers auteurs aient été amenés, indépendamment les uns des autres, à avoir, sur un cas particulier, l’idée de ce mode de représentation. Celle-ci à été rencontrée notam- ment par Pouchet (Arithmétique linéaire; 1795), par d'Obenheim (Baltistique; 181%, -— Mémoire sur la planchette du canonnier; AS18), par Bellencontre (Construction graphique des tables Lombard ; 1830), par Allix (Nouveau système de tarifs ; 1840), par d’autres encore, sans doute. Mais il semble que ce soil à Ter- quem, le savant fondateur, avec M. Gerono, des Nouvelles Annales de Mathématiques, qu'elle ait dû d'être énoncée d'une facon à la fois précise et déli- nitive (Mémorial d'artillerie; n°3, 1830). Et Terquem, en formulant la méthode en termes généraux, fitob- server que celle facon de représenter les équations à trois variables était identique à la figuration sur un plan d'une surface topographique par la projec- tion de ses courbes de niveau. C’est cette idée féconde des courbes isoplèthes qui constitue la base de tous les procédés de re- présentation graphique des formules analytiques entre plus de deux variables. Toutefois sa mise en œuvre a été grandement facilitée par le moyen de quelques autres principes; c’est le point que nous allons maintenant examiner, TT Le premier de ces principes est celui de l’ana- morphose qui à été imaginé en 1843 par M. Lalanne, ingénieur des ponts et chaussées. Ce principe a pour but, lorsque la forme de l’équation s’y prête, d'opérer une transformation qui substitue aux courbes isoplèthes de simples droites. Il est inutile d’insister sur l’importance pratique de ce principe. Disons en quelques mots en quoi il consiste. Si l'équation proposée peut se mettre sous la forme (1) F4) + 8 (y)he G)+ 4 (5) = 0, il suMit de poser X — f(x) et Y — 9 (y), ce qui re- vient à coter z la parallèle à l’axe des y dont l’abs- cisse est égale à f(x) et y la parallèle à l’axe des x dont l'ordonnée est égale à + (y), pour transformer en équations linéaires les équations obtenues en particularisant la valeur de 2, c’est-à-dire pour avoir des droiles comme lignes isoplèthes (fig. 2). Fig. 2. — Schema indiquant la disposition générale d’un abaque anamorphosé. C'est grâce à cet ingénieux artifice que M. Lalanne æ pu dresser pour le calcul des profils de déblaï et de remblailes abaquesrectilignes, aujourd’hui clas- siques, qui ont rendu tant de services, notamment lors de l'établissement des projets de nos grands réseaux de chemins de fer !. D’autres applications importantes en ont été faites depuis, notamment par M. Collignon à diverses formules usuelles d'hydraulique, par le commandant Chéry (aujour- d’hui général) aux calculs de résistance des maté- HEURE On voit tout de suite que le principe de l’ana- morphose, tel que l’a formulé M. Lalanne, est susceptible d’être généralisé. Ce savant ingénieur 1M. Lalanne a donné un intéressant résumé de ses travaux sur la matière dans les Notices publiées par les soins du Mi- nistère des Travaux publics à l’occasion de l'Exposition Uni- verselle de 1878 (p. 429 à 48%). 606 MAURICE D'OCAGNE. — LA NOMOGRAPHIE suppose toujours, en effet, qu'aux variables # et y correspondentrespectivementdeux cours de droites cotées parallèles aux axes de coordonnées. Or ceux-ci peuvent tout aussi bien être remplacés par deux systèmes quelconques de droites graduées. 11 suffit pour cela de supposer que les coeflicients de l'équation de la droite qui engendre le premier de ces systèmes soient des fonctions de z seulement, et ceux de la droite qui engendre le second, des fonctions de 7 seulement. On a ainsi trois systèmes constitués par des droites variables dont les équa- tions ont des coefficients qui ne renferment respec- tivement que +, y ou z. La condition pour que ces droites soient concourantes se traduit précisément par l'équation en +, y et z dont l’abaque ainsi cons- truit fournit la représentation. Cette condition s'écrit immédiatement sous forme de déterminant ; on voit que celui-ci renferme six fonctions arbi- traires contenant groupées deux à deux, chacune une seule des trois variables, alors que les équations considérées par M. Lalanne ne contenaient que quatre fonctions arbitraires, une en #, une en 7 el deux en z. Cette généralisation dn principe de l'anamorphose se trouve indiquée dans un travail de M. Massau ! qui renferme de fort intéressantes considérations sur l'intégration graphique. Nous avons, à notre tour, fait voir comment une appli- cation judicieuse du principe de dualité permettait de substituer aux abaques à droites isoplèthes d'autres abaques à points isoplèthes, à la fois plus simples, plus clairs et se prêtant mieux à l’inter- polation à vue. C’est un point sur lequel nous revien- drons plus loin. IN Lorsque l'équation est à plus de trois variables, sa représentation graphique, dans le cas général, semble au premier abord n'être pas possible. S'il s’agit par exemple, d’une relation entre quatre va- riables, pour chaque valeur de l’une d'elles, l'en- semble des trois autres donne à lui seul naissance à un abaque recouvrant tout le plan. La superpo- sition de ces divers abaques est matériellement irréalisable. IL y a donc un très grand intérêt à chercher des catégories aussi générales que pos- sible d'équations de ce genre pour lesquelles on pourra faire connaitre un tel genre de repré- sentation. Un pas, des plus importants, a été fait dans cette voie par M. l'ingénieur des mines Lalle- mand, connu, par ailleurs, pour ses beaux travaux de géodésie. Les équations dont il a fait connaitre la représentation répondent au caractère suivant : chacun de leurs membres se compose d’une somme ) Annales de l'Association des ingéniewr's sortis des écoles spéciales de Gand, 1884. de produits de fonctions de deux variables seule- ment. Ces équalions sont donc de la forme. (2) F{x,7)® (p, q) Wu, v) .:. Æf(r, do (z, s) + : 4 (x, B) Y (y, à) Ces fonctions de deux variables peuvent être dites les éléments binaires de l'équation. Les valeurs de chacune d'elles sont fournies par un abaque à isoplèthes, anamorphosé ou non, qui les donne sur un axe gradué naturellement, c'est-à-dire en seg- ments proportionnels à leur grandeur. Grâce à un groupement convenable de ces abaques partiels ces segments représentalifs sont combinés par voie de multiplication, et les produits obtenus par voie d’addition au moyen d'un procédé très ingénieux imaginé à cet effet par M. Lallemand. Dans ce pro- cédé, l'addition graphique, basée sur une propriété remarquable d’axes inclinés à 60° les uns sur les autres, s’opère 44 moyen d’un indicateur transpa- rent dont les axes sont les diagonales d’un hexa- gone régulier; d’où le nom d'ubaques hezagonaux donné par Lallemand à ses tableaux graphiques. L'importance de ceux-ci est attestée par les nom- breuses applications qu’en a faites M. Lallemand au service du nivellement général de la France, dont il est chargé. Les opérations sur le terrain qu'exige ce nivellement sont, en effet, complétées, dans les bureaux, par des calculs laborieux résultant de l'application de formules de corrections compli- quées où entrent de nombreuses variables. Par la construction de ses abaques, M. Lallemand est par- venu à affranchir son personnel de cette fastidieuse besogne, réalisant ainsi une énorme économie de temps. Ila, en outre, dressé des abaques analogues pour des spécialités autres que la sienne; citons celui des déblais et remblais, celui de la déviation du compas, ete... La pratique offre, en effet, un champ d'application pour ainsi dire indéfini à l'application de la méthode de M. Lallemand. \ÿ Le groupement deux à deux des variables, des- tiné à faire apparaître dans l'équation les éléments binaires dont il a été parlé plus haut, n’est pas tou- jours possible. La difficulté peut parfois être tournée par l’admission de la même variable dans plusieurs éléments binaires; mais celle-ci donne alors naissance à un cours spécial d’isoplèthes dans l'abaque partiel correspondant à chacun d'eux. Outre qu'il résulte de là certaine complication, il faut remarquer que l'abaque ne permet le calcul d'une des quantités qui y figurent qu'autant qu'à celle-ci ne correspond qu'un seul cours d'isoplèthes. Cette remar- que montre, en particulier, que les abaques hexa- gonaux ne sauraient se prêter à la résolution des équations algébriques à plus de trois termes. Il est donc intéressant de rechercher des méthodes MAURICE D'OCAGNE. — LA NOMOGRAPHIE 607 s'appliquant à des équations à plus de trois va- riables, autres que celles qui rentrent dans le type (2) écrit plus haut et dans lesquelles ne cor- responde à chacune des variables qu’un seul cours d'isoplèthes. Nous avons, pour notre part, été amené à une telle méthode par une extension de celle que nous avons succinctement indiquée à la fin du $ II et dont nous allons maintenant dire quelques mots : dans les abaques anamorphosés les plus généraux, dont il a été question au $ IT, à chacune des trois variables correspond un système de droites cotées; ces droites sont les tangentes à une certaine courbe. Dès lors, si nous appliquons le principe de dua- lité, ‘en substituant l'usage de coordonnées tangen- tielles à celui de cordonnées ponctuelles, nous voyons qu'au lieu de l’ensemble des tangentes à trois courbes, nous aurons un abaque composé de l'ensemble des points de trois courbes, le mode de correspondance de ces points résultant de la for- mule donnée consistant en leur alignement sur une même ligne droite, En un mot, nous trans- formons l’abaque de telle sorte qu'au lieu de trois systèmes de droites cotées il ne comporte plus que trois systèmes de points cotés, autrement dit, trois courbes graduées. L'image ainsi oble- nue est à la fois plus claire et plus facile à cons- truire. Mais, ce n’est pas tout. Si dans le cas de notre premier abaque nous supposons que le système de droites répondant à une des trois va- riables dépende lui-même d’un quatrième para- mètre et que nous fassions varier celui-ci, nous aurons, pour chacune de ses valeurs, un nouveau système de droites, et la superposition de ces divers faisceaux cotés présenterail une telle con- fusion qu'il serait matériellement impossible de construire l’abaque qui en résulterait. Grâce, au contraire, à la transformation dualistique que nous avons indiquée plus haut, lorsque nous faisons varier le quatrième paramètre, la courbe graduée correspondante se déplace dans le plan ; chacune des positions de cette courbe correspond à une valeur de la quatrième variable qui en constitue la cote ; et les points de même graduation de ces courbes successives sont eux-mêmes distribués sur des courbes dont leur commune graduation fournit la cote. Telle est, en termes généraux, l’idée que nous avons appliquée dans un travail récent ?. Elle conduit pour des équations à quatre variables 1 Rappelons que ce principe consiste à faire correspondre l’une à l’autre deux figures de facon que les éléments corréla- tifs des points de l’une soient les droites de l’autre, et réci- proquement. Il résulte de là qu’à un ensemble de droites concourantes de l’une correspond, dans l’autre, un ensemble de points en ligne droite. 2 Comptes-Rendus de l’Académie des Sciences, 23 février 1891. æ,y, 2,1, dont le type général renferme six fonc- tions arbitraires (deux de +, deux de y, deux de z et {) à des abaques composés de deux courbes gra- duées répondant l’une aux valeurs de +, l’autre aux valeurs de 7, et de deux systèmes de courbes cotées répondant l’un aux valeurs de y, l’autre aux valeurs de { (fig. 3). Le mode de liaison entre points Fig. 3. — Schema indiquant la disposition générale d’un abaque d’équation à quatre variables dans la méthode des points isoplèthes. se correspondant en vertu de la formule donnée sera le suivant : la droite joignant le point coté x au point coté y passe par le point de croisement des courbes cotées respectivement z et #. Ajoutons que l'application de ce principe est particulièrement commode au moyen des coor- données tangentielles que nous avons appelées parallèles, préférables à cet égard aux coordonnées pluckériennes. On obtient notamment de cette manière des abaques résolvant l'équation complète du troisième degré, et, plus généralement, toute équation dont les coeflicients dépendent de trois paramètres arbi- traires !. Il est bien évident que de même qu’en partant du cas de trois variables, nous en avons associé une quatrième à l’une de celles-ci, nous aurions pu aussi en associer de nouvelles respectivement aux deux autres ou seulement à l’une d’entre elles. 1 Les équations du type a (0 + (2) (+ 0 ()43 (0 + 4 (0) 1 (0 = 0 représentées dans le système des abaques hexagonaux, exigent trois échelles binaires comportant chacune une gra- duation pour £{ et une graduation pour une des autres variables, soit en tout six graduations; en outre, l’abaque ainsi obtenu ne permet pas de prendre f pour inconnue. L'application de notre méthode conduit pour ces équations à des abaques à quatre graduations seulement (une pour chaque variable) qui permettent de prendre pour inconnue l’une quelconque des variables, 608 G. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE Nous obtiendrons ainsi les abaques de certains types généraux d'équations à six el à variables. cinq VI L'étude comparative des diverses méthodes ra- pidement indiquées dans les lignes qui précè- dent nous à amené à reconnaitre, en dépit des différences caractéristiques de leur mode d'applica- tion et de la diversité des points de départ d’où les ont fait dériver leurs auteurs, que ces méthodes ne résultent, au fond, que de variantes dans la mise en œuvre d'un principe unique qui se trouve ainsi dominer l’ensemble du corps de doctrine auquel nous donnons le nom de Vomographie. Cette remarque nous a permis dès lors de faire de ces diverses méthodes un exposé systématique ! auquel s'attache un double intérêt : un intérêt philoso- phique tenant à la mise en lumière du principe qui gouverne celte branche spéciale de la science appliquée ; un intérêt pratique tenant d’une part à la plus grande facilité d'assimilation de méthodes qui exigeaient jusqu'ici chacune une étude parti- culière, de l’autre à la plus grande sûreté des applications pour lesquelles la théorie générale indique, dans chaque cas, la facon dont il faut faire intervenir les principes. Ce nouveau corps de doctrine, dont l’ulilité pour les hommes techniques n'a pas besoin, croyons- nous, d’être démontrée, offre pour les mathémati- ciens l'intérêt d’une vaste application, à un ordre de choses purement pratique, des théories de la géométrie analytique. Il nous à paru utile de fixer, sous une forme succincte, dans l’article qu'on vient de lire, la genèse des idées qui ont présidé à son élaboration. Maurice d'Ocagne, Ingénieur des Ponts et Chaussées. REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE Jl nous a semblé, comme l’an dernier, qu'au lieu de citer en quelques mots une grande quantité de travaux, il était préférable de signaler avec quelques détails un petit nombre de publications importantes et d'un intérêt général. Nous nous sommes donc borné à rendre compte de diverses études sur la formation des roches cristallines, sur l’âge des principales montagnes de l'Asie, sur l'histoire géologique de l'Amérique du Sud, sur le mode d’accroissement des récifs de coraux, etc., laissant forcément de côté un nombre considérable de travaux remarquables, mais que le cadre restreint de cette Revue ne nous permet même pas de citer. Il Le compte rendu du Congrès géologique tenu à Londres en 1888 vient seulement d’être délivré aux souscripteurs, au moment même où les géo- logues de toutes les nations se réunissaient de nouveau aux Etats-Unis. Bien qu'une partie de ce gros volume ne soit que la reproduction de docu- ments qui avaient déjà été communiqués aux membres du Congrès il y trois ans, nous y trou- vons pourtant plusieurs mémoires intéressants el encore inédits. La principale question à l’ordre du jour était 1 Nomographie. Les calculs usuels effectués au moyen des abaques. Essai d'une lhéorie générale. Règles pratiques. Exemples d’applicalion ; 1 vol. in-8° de 96 pages, avec figures dans le texteet 8 planches. Gauthier Villars et fils; Paris; 1891. celle de l’origine et de la classification des schistes cristallins; sur la demande du Comité d’organisa- tion, tous les géologues qui avaient spécialement étudié ces roches avaient envoyé des mémoires qui ont pour la plupart été publiés avant le con-. grès et ont servi de base aux discussions. Seul le travail de M. Reusch n'était pas encore imprimé, étant parvenu trop tard à Londres : nous en don- nerons ici un aperçu. M. Reusch étudie depuis de longues années les terrains de la Norwège occidentale, etil y a recon- nu trois divisions : 1° l’Archéen, composé de gra- nite et de gneiss-granite; 2 le Cambro-silurien formé de schistes cristallins produits par le méta- morphisme régional de roches sédimentaires et mélamorphiques ; 3° quelques grès et conglomérats d'âge incertain, peut-être dévoniens. M. Reusch pense que les schistes cristallins du Cambro-silurien ont été produits par métamor- phisme aux dépens des schistes, grès et conglo- mérats qui constituent le facies normal de ce ter- rain ;la découverte de trilobites et d'autres fossiles encore reconnaissables, dans les schistes cristal- lins, lui semble le prouver indiscutablement. Mais des schistes semblables peuvent aussi se former par métamorphisme aux dépens de roches éruplives. Inversement ce géologue admet que des roches, considérées comme éruptives, peuvent être le ré- sultat d'un métamorphisme intense des roches sédimentaires. Tel serait le cas du granite de G. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 609 l'ile de Bômmelô, qui possède tous les caractères habituels des roches éruptives, mais qui renferme tantôt une bande rocheuse composée de cailloux arrondis et ressemblant à un conglomérat modi- fié, tantôt des fragments d’amphibolite, divers schistes calcifères ou un calcaire saccharoïde stra- tifié. Ces inclusions, qui ont souvent plus d’un kilomètre de longueur, seraient les restes des bancs qui existaient dans les sédiments (grès feldspathiques ?) par la fusion desquels le granite Jui-même aurait été formé. IL Dans la longue et remarquable discussion qui a eu lieu à Londres sur les schistes cristallins, les opinions les plus diverses ont été soutenues. Il semble pourtant résulter de l’ensemble des com- munications qu'il y a deux sortes de schistes eristallins : les uns, inférieurs au Cambrien, com- prennent les gneiss proprement dits; les autres, qui peuvent présenter une cristallisation plus ou moins complète, proviennent de terrains sédimen- taires ou de roches éruptives d’âges très divers. L'existence de cette deuxième série, produit du métamorphisme de pression, était repoussée par la majorité des géologues jusqu'à ces dernières années; mais la découverte de fossiles dans les couches cristallines elles-mêmes ou dans des bancs intercalés,en un grand nombre de points différents de la surface du globe, ne laisse plus de doute actuellement sur l'existence de schistes cristallins à divers niveaux de la série sédimentaire : on en cite de primaires, de secondaires et même de ler- tiaires (Alpes, Italie, ete.). III La classification du Primaire inférieur a fait aussi l’objet des discussions du Congrès; mais, malgré l’ardeur avec laquelle les géologues anglais s'occupent de cette question, il nous semble qu'elle n'offre que peu d'intérêt. Puisque tous sont d'accord sur l'ordre de succession des as- sises, peu nous importe que l’on adopte pour dé- signer les principales divisions les dénominations données par Sedgwick, celles qui ont été inven- tées par Murchison, ou d’autres encore proposées plus récemment? Malheureusement, les diverses écoles semblent s'être faitun point d'honneur de ne rien changer aux dénominations usitées par leurs chefs, et il se passera probablement encore long- temps avant que les termes de Cambrien et de Silurien aient pour tous la même signification. IV Enfin on s’est occupé à Londres de tracer la li- mite des terrains tertiaires et quaternaires ; mal- gré les objections présentées par quelques géolo- gues, la majorité était évidemment d'avis qu'il élait utile de maintenir le Quaternaire comme une division de premier ordre et non pas comme une subdivision du Tertiaire. V Grâce à la remarquable organisation de son Geological Survey, VInde anglaise sera bientôt aussi connue, au point de vue géologique, que beaucoup de pays de l’Europe, bien que l’immense étendue de son territoire etle manque de voies de commu- cation y rendent les observations longues et diffi- ciles. Nous appellerons l'attention celte année sur un travail de M. R. D. Oldham!, sur l’âge du sou- lèvement des Monts Himalayas; l’auteur a été amené, en effet, à rappeler dans cette note les traits principaux dela géologie de l'Inde, de sorte que l'a- nalyse que nous allons en faire donnera une idée générale de la structure de ce vaste pays. On divise ordinairement l'Inde en trois parties : la région péninsulaire, la région extra-péninsu- laire et la région des alluvions indo-gangétiques. La région péninsulaire a été exondée au moins depuis la période paléozoïque; elle consiste en un massif de gneiss contourné et fortement métamor- phisé, sur lequel on voit les restes d'une peau de roches sédimentaires d'âges divers et un grand développement de roches éruptives. Cette région n'a subi que desplissements peu im- portants; quant aux changements de niveau, ils ont élé à la fois peu nombreux et de faible ampli- tude, les bords de la péninsule seuls ayant été par- fois couverts par la mer. On doit signaler pourlant la chaine des Aravallis, qui est très disloquée; c’est d’ailleurs le seul groupe de montagnes decette partie de l’Inde. La région extra-péninsulaire a des caractères très différents. Si l’on excepte les couches ter- liaires supérieures au sommet de la série, et les gneiss archéens à la base, presque loutes les for- mations sédimentaires que l’on y rencontre sont d'origine marine : en outre, les couches sont forte- ment disloquées. C’est une région essentiellement montagneuse et formée de montagnes structurales, c'est-à-dire de chaines dont la direction générale est étroitement liée aux dislocstions des couches. Elle renferme les Himalayas, ce système de mon- tagnes qui succède sans transition aux plaines de l'Inde, pour monter, par une succession de chaines de plus en plus hautes, jusqu'aux sommets nei- geux qui forment les points les plus élevés de la croûte terrestre. 1 Geol, Mag., dec. HT, t. var, p. 8 et 70. 610 G. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GEOLOGIE L'aspect de ces deux régions est très différent. Dans l'Inde péninsulaire, sauf de rares exceptions, il n'existe que des surfaces arrondies et des pentes douces; le cours des rivières est plat, leurs lits sont sablonneux, et elles ne montrent qu'une puis- sance d’érosion presque insignifiante. C’est, en somme, une région offrant tous les caractères d’une ancienne surface terrestre, depuis longtemps exposée aux dénudations subaériennes et dans la- quelle les cours d’eau etles collines sont bien près d'être arrivés à un élat d'équilibre. Les Himalayas, au contraire, présentent des vallées et des gorges profondes, à parois fortement inclinées; la plupart des cours d'eau sont des tor- rents roulant d'énormes blocs et rongeant violem- ment leurs lits et leurs bords; les crètes aiguës et les versants abrupts indiquent un pays dans lequel l’action de la pluie et de la gelée n’est pas assez ac- tive pour contre-balancer le rapide approfondisse- ment des vallées par l'érosion. Le contact de chacune de ces régions avec l’allu- vion indo-gangétique se présente également dans des conditions très différentes : tandis que les Hi- malayas s'élèvent brusquement, laissant à leur pied les graviers récents, et que la limite des deux terrains forme une courbe régulière d’ure extré- mité à l’autre, au Sud, au contraire, du côté de la Péninsule, les couches s’enfoncent sous l’alluvion si doucement, que les contacts tracés par différents observateurs ont pu être éloignés de plusieurs milles les uns des autres. La limite esttrès irrégu- lière, de longues langues d’alluvion s'avancent fort loin dans la plupart des vallées, tandis que d’in- nombrables outliers des formations antérieures se voient au milieu de la plaine alluviale. Enfin du côté de la péninsule, ce sont des couches très diverses qui se trouvent en contact avec l'al- luvion, tandis que du côté des Himalayas, la limite est formée par une zone uniforme de terrains ler- liaires; dans le premier cas, c’est une limite d’é- rosion, dans le second une limite structurale. Le Tertiaire, comprenantdepuis le Nummulitique marin jusqu'aux dépôts subaériens du Phiocène, forme à l'extérieur des Himalayas une bande con- linue et concordante; mais on connait aussi des couches de même âge en différents points au nord de la principale chaîne neigeuse (territoire de Kas- chmir, etc.). Dans la haule vallée de l’Indus, le Nummulitique existe aussi; il est formé de grès grossiers et deconglomérats que M. Lydekker croit d'origine glaciaire. Que cette opinion soit ou non fondée, il est certain que ce Tertiaire présente un caractère littoral très prononcé et que le rivage ne pouvait être éloigné. La présence de ces couches marines au cœur mêmé des Himalayas el à des hauteurs de 19.000 à 20.000 pieds au-dessus du niveau de la mer, dé- montre qu'au commencement de la période ter- tiaire, les Himalayas n’existaient pas encore com- me chaine de montagnes distincte, ou tout au moins, que si le système himalayen de dislocation avait commencé à se faire sentir, il ne s’étendait pas au N.-0. d’une ligne tirée transversalement à la chaine, par les embouchures du Gange. La nature du contact entre le Nummulitique et les couches prétertiaires conduit à la même con- clusion : bien qu’en certains points de la haute vallée de l’Indus le Tertiaire repose directement sur les gneiss, dans les montagnes extérieures, au contraire, il recouvre des calcaires et des ardoises, sans qu'il existe de différence de plongement sen- sible entre les deux formations. Quoique M. Midd- lemiss ail montré qu’en certains points, le Préter- liaire avait été fortement disloqué avant le dépôt du Tertiaire, ce n’est là qu'un fait tout local; il n’y a pas eu de compression énergique ni de disloca- tion importante avant la fin de la période tertiaire. C'est ainsi que dans la région de Simla, on peut voir les couches tertiaires accompagner les forma- tions antérieures dans leurs plissements les plus compliqués. Tous ces faits semblent plus que suffisants pour montrer que le soulèvement des Himalayas ne peut être antérieur au dépôt du Tertiaire inférieur ; M. Oldham s'attache ensuite à prouver qu'il a eu lieu avant le Pliocène. Si,eneffet, l’on éludielaSiwalikseries (Pliocène), on constate que la situation, la distribution et la composition des conglomérats qu'elle contient, sont exactement les mêmes que pour les dépôts actuels; il faut done en conclure qu’à l'époque du dépôt des couches des Siwaliks, les Himalayas formaient déjà une région élevée dont les prinei- paux traits orographiques étaient marqués, et que la limite méridionale de la montagne devait dès ce moment se trouver {très approximaltivement au même point que la limite actuelle des roches des Himalayas et de la série des Siwaliks. L'épaisseur considérable de cette série (10 à 20.000 pieds au moins), bien que les couches qui les constituent ne montent pas à plus de quelques milles pieds au-dessus de la mer, indique qu’elle s'est déposée dans une région soumise à un affais- sement continu, de même vitesse que le dépôt. Comme, de son côlé, la région himalayenne était dans un état constant d’exhaussement pendant la période tertiaire, le contact des deux régions devait ètre marqué par une grande faille. C'est, en effet, ce qui se produit : entrele Tertiaire et les roches prétertiaires, existe une faille ren- versée de première importance, accompagnée aussi bien du côté de la plaine que du côté des Hima- G. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 611 layas, par une série de grandes failles parallèles dont la lèvre relevée est toujours du côté de la montagne. Après avoir encore liré quelques arguments de la différence de grosseur du grain de lalluvion en profondeur, constatée par plusieurs sondages, M. Oldham résume ainsi l'histoire géologique des Himalayas : Au commencement de la période secondaire, le système himalayen de dislocation n'avait pas encore commencé à faire sentir ses effets; c'est seulement vers la fin de cette période qu'il débuta au milieu de la chaine et s'étendit graduellement au dehors, gagnant la partie maintenant accessible à l'observation de la région N.-0. des Himalayas, au commencement du Tertiaire. Mais à cette épo- que, les plissements et les cassures étaient de peu d'importance, et n’appartenaient pas par leur di- reclion au système himalaven; c’est seulement à une époque postérieure que les couches ont été soumises à des compressions et des dislocations énergiques et continues, en même temps que la dénudation faisait sentir son action d'une manière ininterrompue. Aussitôt que les Himalayas se furent individua- lisés en chaine de montagne distincte, une série de dépôts subaériens de grande épaisseur commen- cèrent à se former dans une région d’affaissement, le long de leur bordure extérieure, les areas d’af- faissement et de dépôt d'un côté, d’exhaussement et de dénudation de l’autre élant séparées par une limite abrupte qui se traduit maintenant par une faille gigantesque. A mesure que les Himalayas poursuivaient leur mouvement d’exhaussement, la limite entre les deux régions s’avançait lentement au Sud : les couches qui s'étaient déposées le long du pied des premières chaines étaient comprimées, dislo- quées, soulevées et par suite exposés à la dénu- dation; la nouvelle limite entre les deux régions d’élévation et de dépression était abrupte comme l’ancienne et une nouvelle faille se formait, avec sa lèvre relevée du côté de la chaine montagneuse. En même temps que la bordure des Himalayas s'avançait de la sorte vers le Sud, la dépression occupée par l’alluvion indo-gangétique s’étendait dans la même direction par suite de l'affaissement graduel de la région péninsulaire. Après avoir ainsi exposé ses vues sur l’histoire géologique de l'Inde dans un chapitre intitulé « Les faits », bien qu’il nous paraisse renfermer de fort nombreuses hypothèses, M. Oldham se de- mande comment on peut expliquer théoriquement ce qui se serait passé, d'après lui, pendant la for- mation des Himalayas. Comment deux régions voisines el séparées seulement par une faille, peuvent-elles être affectées de mouvements in- verses, l’une d'elles s’élevant constamment pen- dant que l’autre s’affaisse d’une manière continue ? L'auteur voit là une application de la théorie dé- veloppée récemment par 0. Fisher (Physics of the Earth’s crust), et il suppose que la croûte terrestre est divisée en compartiments reposant sur un fluide comme des sortes de flotteurs ; la dénuda- tion de la partie montagneuse occasionnant une diminution de poids, cette région s'élève, tandis que la partie basse devenant de plus en plus chargée par les dépôts d’alluvion, s’affaisse chaque jour davantage. VI Les arguments présentés par M.Oldham semblent difficiles à réfuter en ce qui concerne l’âge du sou- lèvement des Himalayas; aussi n’est-on pas peu surpris de trouver dans le même recueil! une série d'articles de M. Howorth tendant à prouver que non seulement les Himalayas, mais aussi toute la partie haute de l'Asie centrale, n’ont commencé à s’exhausser qu'à une époque très récente. L'un des arguments qu'il met en avant pour soutenir celte thèse est la découverte des mam- mouths le long des côtes arctiques de l'Asie; pour lui, il est absolument démontré que le mammouth et ses compagnons ont vécu aux lieux mêmes où nous retrouvons maintenant leurs restes. L'exis- tence d'arbres avec leurs racines, enfouis à côté d'eux, la présence dans les mêmes gisements de coquilles fluviatiles du Sud, prouvent incontesta- blement que le caractère de la flore et de la faune du N.-E. de la Sibérie pendant l’àge du mammouth doit être expliqué autrement que par une migra- lion. Les gros animaux dont les restes sont si abondants sur les bords de la basse Lena, dans les iles aux Ours, etc., ont vécu là où leurs squelettes se montrent aujourd'hui. Il en résulte forcément qu'au lieu d'être une tundra dénudée, couverte de neige la plus grande partie de l’année, balayée par des vents glacés, el n'ayant pas un élé de plus de six semaines, celle région jouissait alors d'un climat assez tempéré pour permettre le développement d’une végétation abondante existant toute l’année, non seulement sur le rivage actuel de la mer arctique, mais aussi dans toute la Sibérie jusqu'à l'Alaska. Quelles peuvent avoir élé les causes de cette profonde modification dans le climat, modification certaine d’après M. Howorth? L'auteur en trouve deux :la première est le voisinage de l'océan Arc- tique, la seconde ét la plus importante, la présence au Sud des vastes plaleaux glacés de la Mongolie et du Thibet. M. Howorth a cherché à démontrer 1 Geol. Mag. dec. 3, t. vin, p. 97, 156, 294. 612 G. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE dans des travaux antérieurs que la plus grande partie tout au moins de la région polaire était occupée par la terre ferme à l'époque du mam- mouth, ce qui aurait permis à ces animaux et à leurs compagnons de passer de Sibérie en Amé- rique, comme il est certain qu'ils l’ont fait; l’ab- sence ou tout au moins la réduction de la mer po- laire supprimait une des sources des vents glacés qui désolent maintenant la Sibérie. Mais dans la vallée de la basse Léna, ce ne sont pas les vents du nord qui sont le plus à redouter, mais bien ceux du sud, excessivement froids, sur- tout en été. La plus grande cause de la basse température actuelle dans ce pays est donc l’exis- tence de vastes masses de terres montagneuses et de hauts plateaux dont les points culminants sont le Tian Shan, le Kuen Lun etles Himalayas et qui comprennent la chaine de l'Allaï et les grands steppes élevés du Pamir, du Thibet et de la Mon- golie ; ilest doncprobable 4 priori que cette masse montagneuse n'existait pas à l'époque du mam- mouth. Cette hypothèse parait, pour M. Howorth, s’ap- puyer sur des preuves irréfutables. En effet, ni dans l'Altaï, ni dans l’Oural, on ne trouve de traces de l’âge glaciaire; pas de roches striées, pas de cailloux anciens. De même, sur l'immense plateau qui forme la plus grande partie de l'Asie centrale, les voyageurs sont unanimes pour constater l’ab- sence de ces preuves d’une glaciation ancienne que nous trouvons dans l’Europe occidentale et dans l'Amérique orientale; l'auteur cite à l'appui de son opinion des passages lirés des ouvrages de nombreux voyageurs el savants. De même, dans les Himalayas, il n’y a que des traces insignifiantes d'anciens glaciers, surtout si l’on compare l’imposante hauteur de ces mon- tagnes à l'altitude des Alpes ou des autres mon- tagnes de l’Europe occidentale. Malgré l'énorme épaisseur de cette chaine et sa puissante action comme condenseur qui en est la conséquence, sur- tout avec le voisinage de la grande masse d’eau qui couvrait alors l'Asie centrale, on ne trouve aucune trace de ce grand dévéloppement des gla- ciers qui a caractérisé l’âge du mammouth en Europe et dans l'Amérique du Nord. M. Howorth ne voit qu'une explication possible de cette absence de traces de l’époque glaciaire, c'est qu'aucune de ces chaines de montagnes n'existait à cette époque. Il s'appuie également sur la présence de lacs salés, et de plaines couvertes d’efflorescences sa- lines sur les hauts plateaux de l’Asie centrale; ces faits démontreraient l'existence, à une époque peu éloignée, d’une vaste nappe d’eau plus ou moins continue et peut-être réunie à la mer qui occupail la dépression aralo-caspienne , et par suite l’âge récent du soulèvement de la région. En résumé, pour M. Howorth, les grandes masses de montagnes de l'Asie centrale, avec le plateau qu'elles entourent et supportent, forment un trait récent de la géographie physique de ce continent, et leur soulèvement ne parait pas pouvoir dater d’une époque plus ancienne que la fin de l’âge du mammouth. Si, en effet, l’on admet cette hypothèse, on explique en même temps comment le climat autrefois doux de la Sibérie est devenu si rude de nos jours; comment la grande Méditerranée asia- tique s’est trouvée asséchée et une notable portion de son lit transformée en ces plateaux incrustés de sel du Thibet et de Kaschgaria, comment enfin l'écoulement des eaux de cette mer intérieure a balayé la faune de l'Asie septentrionale, noyant les animaux et enfouissant leurs squelettes dans un lit de gravier et d'argile qui se poursuit sur plusieurs degrés de longitude. NII M. Blanford ! n’est pas convaincu par l’argu- mentalion de M. Howorth et il déclare qu'aucun géologue ayant étudié les Himalayas ne pourra admettre que cette chaîne de montagnes soit venue au jour postérieurement à l’époque où le mam- mouth vivait en Sibérie. Certes il n’est pas impos- sible que les Himalayas aient continué à s'élever pendant les temps pliocènes ou même pléistocènes, mais tout ce que l’on sait plaide en faveur de l'opi- nion,soutenue par M.Oldham,que leur période d'é- lévation principale a coïncidé avec l'ère tertiaire. L'identité de composition des dépôts pliocènes de la bordure méridionale de la chaine, et des couches qui se forment actuellement aux mêmes points, montre que les conditions géographiques étaient alors les mêmes que maintenant; il est également prouvé que lors du Pliocène, les grands fleuves himalayens coulaient déjà dans leurs lits actuels. Aussi tout le monde est-il d'accord pour déclarer que les Himalavas ne peuvent être post- tertiaires; on ne discute plus que sur le point de savoir si ces montagnes sont lerliaires ou anté- tertiaires. Le grand argument de M. Howorth est l'absence de traces importantes de l’époque glaciaire; or, malgre l'abondance des témoignages cités par cet auteur, M. Blanford ne se déclare nullement con- vaincu. À des récits de voyageurs qui ne s'occu- paient qu'accessoirement de géologie, il oppose les résultats des explorations spéciales faites dans les Himalayas; il cite l'existence de grandes mo- raines dans toutes les vallées importantes qu'il a, 1 Geol. Mag. dec. 3, t. VIII, p. 209, 372. G. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 613 visitées dans le Sikkim, à 10.000 pieds environ plus bas que les glaciers actuels, comme sir J. Hooker l'avait déjà constaté il y a plus de quarante ans; il en est de même dans le Kaschmir. Certes les glaciers himalayens n'ont jamais atteint la plaine indo-gangétique, el ne peuvent ètre com- parés aux glaciers anciens des Alpes, qui se pro- longeaient fort loin du pied de ces montagnes; mais la différence de lalitude suffit à expliquer ce fait. Est-ce qu'à l'heure actuelle les glaciers des Alpes descendent jusqu'à la mer comme ceux du Groenland? Quant à l'existence d’une ancienne mer intérieure de grandes dimensions dans l'Asie centrale, lors du Pléistocène, M, Blanford n'y croit pas. Il y avait bien une étendue considérable couverte d’eau dans le région aralo-caspienne, pendant le Tertiaire su- périeur et peut-être le Pléistocène, mais cette ré- gion était, alors comme maintenant, séparée du Thibet et des Himalayas par les grandes chaïnes qui s'étendent du Pamir par le Tian-Shan jusqu'à l’Altaï, et entourent le Turkestan oriental à l’ouest et au nord. Les plaines et lacs salés indiquent seu- lement l'absence d'écoulement et en aucune façon l'existence d’une ancienne mer desséchée. Un autre argument de M. Howorth est l'existence sur les hauts plateaux de la faune fossile de Hundes, composée de bœufs, de chevaux, de rhi- nocéros, d’antilopes, etc.; mais la plupart de ces animaux vivent encore aujourd’hui sur les hautes montagnes, notamment l’antilope qui a été re- connue pour être une Pantholops dont les congé- nères existent actuellement sur les plateaux les plus élevés du Thibet. D'ailleurs M. Lydekker, après avoir hésité, pense maintenant que cette faune de Hundes appartient au Pliocène supérieur el non au Pléistocène. En tous cas, la présence de ces animaux ne peut suffire à contre-balançer toutesles raisons qui font regarder l'élévation des Himalayas comme beaucoup plus ancienne que le Pléistocène. Aucun de ceux qui ont vu les superbes et gigantesques exemples de dénudation et d’érosion présentés par les vallées des Himalayas ne pourra admettre que ces énormes sillons aient été creusés par la pluie et les rivières depuis que les mammouths ont été enfouis dans les graviers des tundras de la Si- bérie. Ce dernier argument ne louche pas M. Howorth; pour lui le creusement des vallées himalayennes n’est pas dû à l'érosion par la pluie et les cours d’eau, mais nous doutons fort qu'il soit suivi par de nombreux géologues, lorsqu'il attribue à un agent inconnu les phénomènes qu'il est si simple d'expliquer par une longue application des phéno- mènes actuels. VII Le Geological Survey de l'Inde fait rechercher avec soin les minéraux utiles que peut renfermer son vaste territoire; c’est ainsi que dans l’un des der- niers fascicules des Records publiés par cet Institut, nous trouvons un rapport de M. Nætling! sur les combustibles de la partie septentrionale des Shan States. Il existe à l'Est de Mandalay, entre l'Irraouaddy et le Salween, une formation tertiaire puissante dont l’âge précis n'est pas déterminé, mais qui pa- rait appartenir au Miocène supérieur. Elle se com- pose de grès et d’argiles avec veines de lignite, dont l'épaisseur totale peut atteindre 30 pieds dans la région de Lashio et 50 dans celle de Namma. Ce combustible renferme 34,94 0/0 de carbone fixe; il appartient au même niveau que celui déjà signalé dans le Sud des Shan States, ete. Son éloi- gnement des voies de communication en rend l'exploitation impossible. IX M. v. Jhering ? recherche quels ont été les rap- ports de l'Amérique du Sud avec les autres terres pendant les périodes géologiques. Pour lui ce con- tinent n'existait pas au commencement de la for- malion tertiaire ; il était seulement représenté par diverses parties isolées. Le Brésil septentrional et la Guyane formaient une grande île et le Sud constituait une autre région isolée (Santa-Cata- lina, Rio Grande del Sul, Uruguay, Argentine, Chili), caractérisée par une faune d'eau douce identique. La faune des mollusques d’eau douce, qui a fait l’objet des études de l’auteur, ne permet pas de penser qu'il y ait eu communicalion terrestre entre les deux Amériques depuis le Jurassique jusqu’à la fin du Pliocène. M. F. Ameghino ne croit pas non plus que cette communication ait eu lieu pendant toute cette pé- riode; mais il lui parait indubitable que pendant les dépôts les plus anciens de l’Eocène, ou à une époque antérieure, il s’est produit un échange de mammifères entre les deux Amériques. De même à partir dela fin du Miocène, on peut constater un phénomène semblable, ce qui met hors de doute l'existence d’une communication entre l'Amérique du Nord et l’Amérique du Sud à certains mo- ments. Par contre, pendant la majeure partie de l'Eocène, tout l’Oligocène et le Miocène inférieur, la faune sud-américaine était complètement iso- l Records Geol. Survey India, t. 24, p. 99. ? Revista argentina de hisloria natural, 1. 1, p. 280. GI G. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE lée et n’'échangeait aucune forme avec l'Amérique du Nord. M. Ameghino ne serait pas opposé à l’idée qu'il existait pendant un certain temps de l’époque ter- liaire, une sorte de pont réunissant l'Amérique du Sud à l'Europe ou à l'Afrique. Il s'appuie pour soutenir cette thèse, qui parait assez étrange, sur la filiation des Vertébrés; en effet les genres eu- ropéens Zheridomys el Archæomys de l'Oligocène ; Omegodus, Issiodoromys, Protechimys, Trechomys, Nesokerodon, Hystrië du Miocène, ont tous une origine exclusivement sud-américaine; MVesokero- don et Issiodoromys sont très proches parents du genre éocène argentin Zocardia et font partie du même groupe; enfin le tronc commun de tous les rongeurs histricomorphes du Vieux Monde se trouve dans les Zchinampide et les Æystricide éocènes de la République argentine. Tous ces groupes n'ont pas de représentants dans l’Amé- rique du Nord jusqu'au Miocène supérieur et au Pliocène. De plus en même temps que ces animaux de la faune sud-américaine émigraient en Europe, les Carnivores ursidés {Arctolherium) et subursidés {Cyonasua) pénétraient dans l'Amérique du Sud; or ces groupes sont représentés en Europe, mais non dans l'Amérique du Nord. Enfin M. Ameghino pense que la séparation de l'Atlantique et du Pacifique date d’une époque géo- logique très ancienne; une terre longue elétroite, dirigée du Nord au Sud existait dans la région des Andes du Chili et de l'Argentine depuis l'é- poque crélacée, car les dépôts de cet âge ne se montrent sur les deux versants des Andes qu'à une certaine distance de l'axe de la chaine. Toutes les formations marines qui se succèdent à partir du Crétacé jusqu'à l’époque actuelle, tant à lEst qu'à l'Ouest, sont disposées en forme de bandes longues et étroites dirigées constamment du Nord au Sud et d'autant plus distantes de l'axe des Andes qu’elles sont d’une époque plus récente; toutes ces formations élaient évidemment litto- rales. Rien jusqu'à présent ne permet de dire quelles étaient les limites septentrionale el méri- dionale de ce continent pendant l’époque crétacée. X Le mode de eroissance des récifs de coraux a donné lieu dans ces derniers temps à une assez vive controverse, les uns pensant avec Darwin que ces organismes ne peuvent s’accroitre que par un affaissement continu du sol, tandis que. d’autres supposent que le développement de ces petits êtres est facilité par l’exhaussement des côtes. consciencieuse, comme celle Aussi une étude MM. Jukes-Browne et Harrison sur la Bar- bade , présente-t-elle une grande importance, parce qu'elle apporte de nombreux éléments nouveaux pour la solution de cette question. Les auteurs s'occupent d'abord des récifs de co- raux qui vivent et s'accroissent actuellement au- tour de l'ile. Ils font remarquer que celle-ci n’est pas d'origine volcanique et qu’elle est soumise à un exhaussement important et de longue durée, sans le plus petit indice d’un affaissement inler- miltent ; les coraux récents se sont formés sur un fond stationnaire ou s’élevant lentement, mais qui certainement ne s'abaissait pas. Ils pensent que des récifs peuvent se développer sur un fond de 25 à 30 brasses, de sorte qu’en sup posant le sol stationnaire, le récif peut atteindre une épaisseur de 480 pieds. Ils ont remarqué en outre qu'il y a toujours des dépôts de débris de coraux et de sables calcareux en avant des plus bas récifs, de telle sorte que si la région vient à s'élever, ce fond de débris peut parvenir à la limite de la croissance des coraux et former la base d'un nouveau récif; c’est ainsi qu’il peut y avoir 20, 30 ou même 50 piedsde ces matériaux à la base des récifs actuels. En dehors de ces coraux encore situés sous la de . mer, la Barbade présente sur la plus grande parlie de sa surface une roche corallienne ou un calcaire formé principalement de débris de coraux. Cette roche constitue une sorte de manteau recouvrant les formations plus anciennes qui occupent le noyau de l'ile, mais ne se montrent pas comme une seule nappe continue; il consiste au contraire en un certain nombre d’élages ou de plates-formes séparés, construits les uns autour des autres à mesure que l'ile sortait lentement de la mer. Chacune de ces plates-formes était autrefois un ré- cif frangeant comme celui qui entoure encore maintenant la plus grande partie de l'ile; elles forment une succession de terrasses d’une largeur plus ou moins grande, s’élevant l’une au-dessus de l'autre depuis le niveau de la mer jusqu'à l'altitude de 1100 pieds environ au centre de l'ile, chacune de ces terrasses étant un peu-plus ancienne que celle qui lui est inférieure. Les auteurs ont constaté que l'épaisseur d’un ré- cif de coraux formé dans une région stationnaire ou en voie d’exhaussement n'excède pas souvent 200 pieds et atteint rarement 266; mais il ne faut pas en conclure que les coraux peuvent commen- cer à vivre à une profondeur d’eau aussi grande, car ily à toujours à la base une couche d’une certaine épaisseur formée de débris de coraux, de sables, ete. La profondeur d’eau maxima qui a 1 Quarterly Journal Geol. Soc., t. XLVII, p. 197. G. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 615 été constatée pour les récifs croissants est d'en- viron 430 pieds. La roche détritique de la base des anciens récifs peut atteindre jusqu'à cinquante pieds, et peut- être même davantage; elle semble s'être ac- cumulée à l'extérieur d'un récif plus ancien. Quant à la disposition en terrasses SUCCESSIVES, elle peut être expliquée par ce fait que des pério- des de repos ou de soulèvement lent ont alterné avec des périodes plus courtes d’exhaussement ra- pide. MM. Jukes-Browne et Harrison ont pu recueillir quelques mollusques fossiles dans les récifs soule- vés de laBarbade; toutesles espèces appartiennent à un âge géologique très récent, bien que certai- nes formes soient jusqu'à présent inconnues dans la Mer des Caraïbes. Ces récifs datent certai- nement du Pléistocène et probablement du Pléis- tocène le plus récent, contrairement à ce que pen- sait le Prof. Duncan. Ge géologue rapportail en effet ces dépôts coralligènes au Miocène, en s’ap- puyant sur la ressemblance des coraux avec des espèces connues dans les terrains miocènes de l'Europe. Mais il est maintenant prouvé que cette ressemblance est beaucoup moindre qu'il ne le supposait et d’ailleurs l'argument fourni par les mollusques à une importance bien plus grande que celui tiré de ces organismes bien difficiles à déterminer avec certitude ,dans l'état de conservation où on les rencontre. De plus, il ne faut pas oublier qu'il existe à la Jamaïque et à Saint-Domingue des fossiles (mollusques et coraux) du Tertiaire supérieur, très différents de ceux qui ont élé recueillis à la Barbade. Quoi qu'il en soit d’ailleurs de cette question d'âge, il n’en reste pas moins établi que les récifs de coraux peuvent se développer sur un fond de mer soumis à un exhaussement plus ou moins ra- pide sans alternative d’affaissement. XI Nous avons déja appelé l'attention l’an dernier sur des phénomènes intéressants de plissement et de renversement présentés par différentes parties de la chaîne des Alpes; depuis cette époque, de nombreuses observations nouvelles ont été pu- bliées sur le même sujet : nous rendrons compte de quelques-unes d’entre elles. Dans les Alpes-Maritimes, M. Zurcher!, pour- suivant à l'Est les remarquables études de M. Ber- trand sur les plis couchés de la Provence, s’est occupé des environs de Roquebrussane et de Bri- gnoles (Var). Les couches rencontrées dans cette région comprennent le Trias, le Jurassique (Infra- ! Bull. Services Carte géol. France. lias, Lias moyen, Lias supérieur, Bajocien, Batho- nien, Jurassique supérieur), puis le Crétacé, qui se divise de la façon suivante : Urgonien Calcaires blancs compacts à Requicnies. Aptien … À Marnes à Belemniles semicanaliculatus. ROAD Claire isiles. Calcaires marnes et grès à hippurites et radiolites avec nombreux polypiers. Marnes et grès à Rhynchonella difformis. Grès bariolés. Sénonien Grès bariolés. Marnes à Melanopsis galloprovincialis. Calcaires et grès à Cyrena galloprovincialis. Danien…. \ Ces différentes assises sont loin de se suivre régu- lièrement; le Crélacé occupe la ligne de dépres- sion axiale (E.-0.) de la région considérée, mais le Sénonien et le Danien se voient seuls sur la plus grande partie de la longueur de la vallée, les étages inférieurs n’apparaissant qu’à son extrémité orientale. Le grand intérêt de l’étude de cette ré- gion consiste dans les successions anormales constatées en de nombreux points; c’est ainsi qu'à l’ouest de Mazauges, on peut voir la superposition la plus nette de l'Infralias surmonté de Lias, aux bancs détritiques et aux calcaires du Sénonien, suivant un plan très peu incliné. De même au sud de la ferme de Candelon, les dolomies jurassiques recouvrent le calcaire à hip- purites replié sur lui-même en forme de W. Enfin au sud de la bastide du Pérégrinage, à l’ouest de Flassans, les calcaires compacts de la région moyenne de l’Infralias sont superposés de la façon la plus nette aux couches marneuses du Bathonien inférieur, Indépendamment des superpositions anormales constatées directement, la région considérée pré- sente des contours tellement étranges, qu'ils ne peuvent être expliqués que par l'hypothèse d'un vaste pli couché venu du Sud et ayant amené la superposition d'une masse triasique et jurassique aux couches crétacées. Ce pli serait l'extrémité orientale de celui de la Sainte-Beaume décrit par M. Bertrand, XII Le nombre des plis couchés constatés dans les Alpes augmente d’ailleurs très rapidement à me- sure que les études de détail se poursuivent. C'est ainsi que M. Kilian signale un accident de ce genre dans le massif de Varbuche entre Moutiers et Saint- Jean-de-Maurienne. La coupe menée de l’est à l’ouest par les ai- guilles de la Grande Moënda, le Coin: et le Bonnet- du-Prètre, montre la succession suivante de haut en bas, les couches semblant former une série con- tinue et régulière : Trias supérieur Infralias 616 G. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE Lias Infralias Trias supérieur Trias moyen Trias supérieur Infralias Lias Infralias Trias supérieur Trias moyen Nummulitique Ces faits s'expliquent très bien par l'existence d’un pli couché, qui n’est d’ailleurs pas hypothé- tique, mais peut se voir directement sur le flanc nord de la Grande Moënda. Il n’en est pas moins intéressant de constater dans une série d'aspect régulier l'apparition des mêmes couches à quatre reprises différentes. XII L'origine des cargneules et des gypses qui se montrent si fréquemment dans le Trias préoccupe depuis longtemps les géologues. M. Kilian !, étu- diant les chaines comprises entre Mouliers (Savoie) et Barcelonnette (Basses-Alpes), a constaté la suc- cession suivante des couches triasiques : a. Quartzites, assise très constante et bien con: nue. bd. Cargneules et gypses atteignant un grand déve- loppement dans certaines localités (Ceillac), réduits ailleurs à une assise de quelques mètres seule- ment, et disparaissant totalement au nord de l'Arc. ce. Calcaires dolomitiques, formant une bande à peu près continue de la Vanoise à l'Ubaye et s’at- ténuant fortement à l’ouest. d. Gypses et cargneules supérieurs bien déve- loppés en Maurienne. Les gypses et cargneules d’une part et les cal- caires dolomitiques de l’autre ne seraient que des modifications diverses d'un seul etmême ensemble, car on peut voirle passage latéral de l’une de ces sé- ries à l’autre soitau Grand-Galibier, soitau mont Ge- nèvre. De plus leurs épaisseurs paraissent croitre aux dépens l’unede l’autre, etleur position relative est très variable, les gypses el cargneules occupant tantôt la base, tantôt la partie supérieure des cal- caires. Enfin, on remarque fréquemment dans les gypses des blocs anguleux de calcaire noyés dans la masse sulfatée et semblant, comme les fragments analogues contenus dans les cargneules, n'être autre chose que des restes de la roche primitive, épargnés par la transformation qu'a subie la masse entière. XIV M. Renevier émet une opinion différente basée sur les recherches qu'il poursuit depuis de longues années dans les Alpes vaudoises !. Il proteste con- tre l'opinion, plusieurs fois soutenue, que les gypses et cargneules (cornieules) sont le produit d'altérations épigéniques postérieures, sur toutes sortes de terrains, par des émanations gazeuses, le long des lignes de fracture du sol, et déclare que, pour lui, l’origine sédimentaire, simultané- ment hydrochimique et mécanique, des gypses, curgneules et calcaires dolomitiques alpins est su- rabondamment démontrée. La stratification des gypses est nettement vi- sible, celles des cargneules l'est moins, mais elle ne peut pourtant être révoquée en doute; or, si ces roches étaient un produit de métamorphisme, elles ne devraient constituer qu'une masse informe. Quant à la présence de lambeaux de cargneule in- terstratifiés dans le gypse ou de lentilles de gypse dans la cargneule, elle s’expliquerait par une dif- férence momentanée dans la concentration de la nappe d’eau. Il semble d’ailleurs impossible de comprendre, dans l'hypothèse de la transforma- tion postérieure, comment un même agent peut mélamorphiser un calcaire partie en gypse, partie en dolomie. Enfin le phénomène aurait dû se produire princi- palement le long des failles, ce qui n’a pas lieu; le gypse se trouve dans des régions tranquilles, tan- dis que le calcaire existe dans les parties les plus fracturées. Pourquoi d’ailleurs chercher une origine méta- morphique aux gypses, quand on les voit se former de nos jours concurremment avec le sel, absolu- ment comme dans les dépôts triasiques (mer Morte, Caspienne, etc.). M. Renevier conclut que les roches salines, gyp- seuses et dolomitiques, associées dans les Alpes vaudoises, constituent une formation d'une na- ture particulière, analogue aux dépôts actuels des nappes extra-salées. Les calcaires dolomitiques devaient se former dans les eaux les moins salées, peut-être les moins profondes; le gypse, l’anhy- drite et enfin le sel gemme demandaient un degré de concentration de plus en plus grand qui pouvait exister simultanément en différents points des lacs salés ou mers intérieures de l’époque tria- sique. L'accord, on le voit, n’est pas encore fait sur la délicate question de l’origine des gypses, des sels et des cargneules; l'opinion de M. Renevier est, en effet, absolument opposée à celle émise presque en même temps par M. Kilian. G. Carez, Docteur ès sciences. 1 Comptes rendus Ac. Sc., 5 janvier 4891. 229. l Eclogæ geol. Helveliæ, À. 11, p. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX [ep] = 1 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Darboux (G.), Membre de l'Institut, Doyen de la Fa- culté des Sciences de Paris. — Lecons sur la théorie générale des surfaces. Troisième partie, deuxième fascicule, (45 fr. le volume). Gauthier- Villars, Paris, 1891. M. Darboux poursuit la publication de ses Lecons sw la théorie générale des surfaces. Les lecteurs de la Revue connaissent déjà l’esprit général et la portée de cet ouvrage par l'étude qu'en a faite M. Tannery (1891, n°3). Le deuxième fascicule du troisième volume est en- core consacré à la théorie des surfaces applicables. La place d'honneur y est réservée aux remarquables théo- rèmes de M. Weingarten sur les surfaces (surfaces W), dont les rayons de courbure ont entre eux une rela- tion, M. Weingarten relie le problème de la détermi- nalion de ces “surfaces à deux autres : l’un, dont on connait un certain nombre de solutions : «Mettre l’élé- ment linéaire de la sphère sous la forme : do? = à du? + 4% (a) dy; le second, qui n’est autre que la recherche des sur- faces applicables sur une surface de révolution. On ap- préciera l'importance de ce résultat par ce fait qu'il fournit un cas nouveau, le seul connu en dehors de celui du plan, pour lequel on sait résoudre le problème des surfaces applicables : ce cas est celui du parabo- loïde de révolution. Les théorèmes dont nous venons de parler donnent à la développée ou surface des centres un intérêt ca- pital. Aussi le chapitre VIT est-il consacré à cette sur- face et à l’étude de ses éléments infinitésimaux, quand on connait ceux de la surface primitive, A cette étude, M. Darboux rattache une importante question destinée à revenir à propos des surfaces à courbure constante, et relative aux lignes droites ou courbes liées à une surface qui se déforme. Les résultats obtenus dans ce chapitre permettent alors de reprendre les surfaces de M. Weingarten, de démontrer, sur leurs lignes de cour- bure et les asymptotiques de leurs développées, deux importantes propositions, et, en particulier, d'étudier d'une facon détaillée les surfaces applicables sur le paraboloïde de révolution, ce qui mène à une défini- tion géométrique simple de ces surfaces M. Darboux aborde ensuite les surfaces à courbure totale constante, Là encore les théorèmes de M. Wein- garten trouvent leur application, et cela de deux manières différentes. Car les surfaces à courbure cons- tante sont des surfaces W et aussi des surfaces appli- cables sur certaines surfaces de révolution. Le premier point de vue a été le plus étudié : il donne le moyen de former simplement l’équation dont dépend la solu- tion du problème et de trouver plusieurs propriétés importantes des surfaces en question. L'exposition de ces propriétés est faite dans un chapitre spécial et avec un soin tout particulier pour les surfaces à courbure constante négative qui offrent un si puissant intérêt en raison de leurs rapports avec les principes fonda- mentaux de la géométrie (géométrie non-euclidienne). Leur représentation plane est liée également aux tra- vaux les plus récents de l'Analyse, tels que la théorie des fonctions fuchsiennes de M. Poincaré. M. Bianchi a envisagé le second point de vue et en a tiré une méthode de transformation qui permet de dé- duire d’une surface quelconque à courbure constante une double infinité de surfaces jouissant de la même propriété et dont la détermination, ainsi que l'a montré M. Lie, se ramène à des quadratures, Cette ET INDEX méthode revient au fond à une méthode donnée par M. Ribaucour, qui la rattache aux questions de géomé- trie auxquelles il a été fait allusion précédemment. Enlin cette même méthode est susceptible d’une inter- prétation tue très simple et se relie à des re cherches de M. Bäcklund par l’exposition desquelles M. Darboux termine le volume, J. Hipawarp. Milne (Rev. John. J.) and Davis (R.F, trical Conics. (2 fr. 50). Street, 29, Covent Garden, ). — Geomé- Macmillan et C°. Bedford London, 1590. Ce petit volume traite uniquement de la parabole; les auteurs y ont réuni, sous forme didactique, toutes les propriétés de cette courbe; un grand nombre d'exemples choisis avec soin et des problèmes intéres- sants, classiques d’ailleurs pour la plupart, terminent l'ouvrage. DAOX 2° Sciences physiques. Georges Ibumont : Annales d'Electricité et de Magnétisme 1889-1890. — Un beau volume grand in-89, 428 pages, 570 gravures (412 francs). Veuve La- rousse, 15, rue Montparnasse, Paris, 1891. La préface de M. Dumont constitue la meilleure bi- bliographie de son ouvrage; aussi ne saurions-nous mieux faire que d’en transcrire quelques lignes: « L'accueil qui a été fait à notre dictionnaire nous à démontré qu'il est véritablement utile à l’inventeur, au pratic ien, et, en général, à tous ceux qui ont besoin d'avoir immédiatement un rensei ixnement théorique ou pratique. « Mais l’œuvre serait évidemment incomplète sinous ne suivions pour ainsi dire au jour le jour les progrès si rapides faits par cette science nouvelle, « l’Electri- cité ». Aussi avons-nous l'intention de publier pério- diquement, à intervalles aussi rapprochés qu'il sera nécessaire, et sous forme de diclionnaire, les faits nouveaux qui viennent compléter les renseignements contenus dans notre premier ouvrage. Ces publications, qui constitneront des suppléments au Dictionnaire de 1888, porteront le nom d’Annales de l'Electricité. » Nous avons dit, il y a peu de temps, tout le bien que nous pensions du Dictionnaire d’Electricité; nous ne pouvons que le répéter au sujet de ces Annales, ras- semblées et éditées avec le même soin, la même cons- cience, et dignes, à tous les points de vue, de continuer l’œuvre si bien commencée. Dans l'immense littérature électrique de notre temps, il est inévitable que l’on rencontre un grand nombrede travaux sans valeur, beaucoup de répétitions, des dis- cussions dont, après quelques années, le résultat seul DRnone les diverses étapes de l étude d’une question, étapes dont la connaissance ne peut intéresser que l'historien. Pour le praticien, la conclusion seule, le progrès définilivement acquis est intéressant. Il faut donc élaguer beaucoup, et condenser ce qui lui reste ; enfin, disposer le tout sous une forme qui épargne des recherches, Tel est le but de ces Annales, qui rendront le plus grand service. Puisse l’auteur, quicontinue seul l’œuvrecommencée avec une si précieuse collaboration, ne pas se lasser de ce labeur de bénédictin, et nous donner pendant de longues années encore les suites qu'il nous promet. Cette série du Dictionnaire constituera le véritable va- de mecum de la science électrique. Ch. Ed. GUILLAUME. 618 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Poisson (Albert). -— Théorie et symboles des al- chimistes. 1 vol, in-8°.Chacornac, 1 quai Saint-Michel, Paris, 1891. L'éditeur Chacornac publie une collection d'ouvrages relatifs aux sciences hermétiques, qui comprend, à côté des divagations de M. Tiffereau, l’alchimiste du xixe siècle, et de fantaisies dues à M. Lermina, des études consciencieuses sur l’alchimie, par M. Albert Poisson, L'ouvrage que nous signalons aujourd’hui est divisé en deux parties. Dans la première, l’auteur ré- sume très nettement les théories alchimiques; dans la seconde, il s’attache à interpréter les symboles que l'on retrouve constamment dans les traités hermé- tiques, et déchiffre un certain nombre des rébus que constituent les figures de ces ouvrages. Ce petit livre se termine par une bibliographie des principales œuyres des alchimistes. Georges CHARPY, Guye (Philippe A.), Docteur des Facultés des Sciences de Genève et de Paris. — Etude sur la dissymétrie moléculaire. Thèse pour le doctorat présentée à la Fa- culté des Sciences de Paris. Gauthier-Villars et fils, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1891. Les travaux de Pasteur, et ceux de MM. le Bel et Van T'Hoff sur la dissymétrie moléculaire ont conduit aux conclusions suivantes : Tout milieu actif sur la lumière polarisée est par cela même dissymétrique ; Le pouvoir rolatoire des cristaux dont les solutions sont inactives a pour seule cause la structure cristal- line dissymétrique ; Le pouvoir rotaloire des corps liquides dissous a pour seule cause la structure dissymétrique de la molécule, en d’autres termes, larrangement dissymétrique des atomes dans la molécule ; C’est à l'étude de cette dernière proposition qu'est consacré le travail de M. Guye. On peut résumer cet important mémoire, dans ses grandes lignes, de la facon suivante : Toute molécule optiquement active, contenant un atome de carbone asymétrique (Le Bel et Van T’Hoff), peut être représentée graphiquement par un tétraèdre, au centre duquel se trouve un atome de carbone, quatre radicaux différents étant placés aux sommets. La dissymétrie de la molécule peut être mesurée par le produit PEINE ENT EG AL"ILES lettres d représe ntant les distances du centre de £Ta- vité aux 6 plans de symétrie du tétraèdre, Ce produit d'asymétrie S'annule, en effet, si le carbone n’est pas asymétrique; de plus,il change de signe quand on passe de la dissymétrie droite à la dissymétrie gauche. Si donc on détermine pour les composés actifs, d'une part le produit d’asymétrie, d'autre part le pouvoir rolatoire, on doit trouver que ces deux grandeurs con- servent toujours le même signe. Une substitution qui déplace le centre de gravité de la molécule de facon à changer lesigne du produit d'asymétrie, doitfournir un composé dont le pouvoir rotatoire est de signe con- traire à celui du composé primitif, Dans une première approximation, on peut supposer les masses des quatre radicaux concentrées aux som- mets du tétraèdre, En opérant de celte facon, M. Guye à pu vérifier l'exactitude de ses déductions sur plus de 100 dérivés actifs, notamment sur des dérivés amyliques, tartriques et maliques. Quelques exceptions, observées avec des Corps pour lesquels les quatre radicaux ont des masses très peu différentes, semblent indiquer quel hypothèse des masses concentrées aux sommets du tétraèdre n'est qu'une première approximation, M. Guye se réserve de revenir sur ce point. Nous n'avons fait que signaler l’idée qui domine cet important travail Au cours de ses recherches M. Guye a rencontré plusieurs particularités intéressantes, notam- ment une relation entre la position du centre de gra- vité de la molécule et l'inclinaison des facettes hé- mièdres dans les dérivés fartriques, l'interprétation de certains faits d'équilibre chimique au moyen des lois du pouvoir rotatoire, etc. Nous ne pouvons que signa ler ici ces détails, espérant que ce rapide résumé aura suffi à montrer à quel point les recherches de M. Guye sont empreintes de hardiesse et d'originalité. G. Cranpy. 8° Sciences naturelles. Perdrix (L.). — Sur les fermentations produites par un microbe anaérobie de l'eau. Thèse de la Faculté des Sciences de Paris. (Annales de l'Institut Pasteur, Mai 1891.) Le mémoire de M. L. Perdrix présente un très grand intérêt et mériterait mieux qu'une analyse bibliogra- phique, forcément sommaire; il est intéressant surtout par le jour qu'il jette sur certains côtés obscurs jus- qu'ici de la fermentation des matières amylacées ; je vais tenter d’en donner ici une idée au lecteur, 1° M. Perdrix a isolé son bacille de l’eau des conduites de la ville de Paris et lui a donné le nom de bacille amylozyme, pour spécifier la propriété qu’il possède de faire fermenter l’amidon. 2° Séparation et purification du bacille, — Pour ob- tenir le bacille cherché, M. Perdrix se sert de la pomme de terre. Des fragments ‘de pommes de terre sont intro- duits dans des tubes à essais, à parois résistantes, avec un peu d’eau; le tout est stérilisé à l'autoclave. On y ensemence ensuite quelques gouttes d’eau des conduites de Paris, puisle vide est fait avec la pompe à mercure, les tubes scellés au chalumeau et placés à l’étuve. Au bout de quelques jours, un peu de cette première culture est prélevé au moyen d'une pipette et maintenu dix minutes à 88°, Le produit de cette opération est ensuite ensemencé sur des tubes à pommes de terre de Roux, par stries. En quelques Jours, on obtient des colonies isolées qui permettent d'obtenir rapidement des cultures pures. 3° Morphologie et physiologie générale du bacille am y- lozyme.— Ge bacille est mobile ; ;il a de 2 à 3 w de long et 0,5 & de large; la présence de l'oxygène arrête com- plètement ses mouvements, Il se € colore facilement et produit des spores très faciles à observer. Le bacille amylozyme est essentiellement anaérobie; il ne peut pousser à l'air, mais croit facilement dans le vide, dans l'hydrogène, l’azote ou lacide carbonique. La tempé- rature optimum est 35° environ. [1 se développe en dégageant une grande quantité de gaz. Le bacille amy- lozyme pousse bien dans les liquides employés ordi- nairement en microbiologie ; il fait fermenter les sucres, agit éners giquement sur la matière amylacée, mais n’a pas d'action sur la cellulose et sur le lactate de chaux. Ces drones le différencient de l’'Amylo- bacter de M. Van Tieghem et du vibrion butyrique de M. Pasteur. IL est très sensible aux acides et aux alcalis : la culture s’arrète quand l'acidité atteint 0,10 °/, et l’alcalinité 0,08 0/,. Comme ce bacille trans- forme partiellement les hydrates de carbone en acides, il convient, pour avoir des fermentations complètes, d'ajouter du carbonate dechaux dans les vases deculture. 4° Fermentation des sucres.— Avec le glucose, les gaz dégagés sont de l’acide carbonique et de l'hydrogène en proportion à peu près égale. Les acides produits sont de l'acide acétique et de l'acide butyrique, ce der- nier fournissant à lui seul 80 0/, de la masse totale des acides fixes, Avec le saccharose et le lactose, les résultats ont été semblables. 5° Fermentation de la matière amylacée. — Sur les substances amylacées, le bacille amylozyme commence par provoquer par hydratation de l’amidon un sucre susceptible de fermenter comme le glucose. Ce sucre peut être constaté et dosé dans les cultures, grâce à la sensibilité du microbe aux acides; il suffit, pour cela, de ne pas introduire de carbonate de chaux dans la culture, Si, au contraire, on a incorporé ce dernier sel, la culture ne devient pas acide, et le sucre formé fer- BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 619 mente au fur et à mesure de sa production, et à la fin de l'expérience on trouve seulement un mélange d’acé- tate et de butyrate de chaux. La caractéristique du bacille amylozyme, dans les milieux amylacés, c’est de produire des alcools éthy- lique et amylique dans la proportion de 2 à 3 0/, du poids des pommes de terre employées. Le sucre formé dont nous avons parlé plus haut est très voisin du glu- cose, mais il en diffère par son pouvoir rotaloire ; sous l'influence de la levure de bière, il subit la fermen- tation alcoolique ordinaire. Si lon “mélange de la levure de bière et du bacille amylozyme, et qu'on fasse agir ce mélange sur des substances amylacées, tout se passe comme si chacun d’eux était seul : l'amylozy me transforme l’amidon en sucre et la levure agit sur ce sucre pour en faire de l'alcool. L'alcool produit par les deux organismes réunis contient de lalcool amylique. D'où vient-il? M. Perdrix montre que la levure de bière agissant seule sur le sucre de fécule ne peut pro- duire cet alcool amylique. C’est donc l’amylozyme qui est l’auteur de cette production d'alcool amylique. Cette étude a conduit M. Perdrix à penser que, dans les fermentations industrielles {alcools de pomme de terre et de grains), la présence de l'alcool amylique est due à l'action de microbes anaérobies pour lesquels lamidon est un aliment, microbes qui se trouvent mélés à la levure commerciale, C’est par cette intéres- sante conclusion pratique que M. Perdrix termine son importante étude. D' H, Dumer, Arthus (Maurice). — Recherches sur la coagula- tion du sang. Thèse de la Facullé des sciences de Paris. H. Jouve, imprimerie des Ecoles, 15, rue Racine, Pa- ris, 1891. Le sang qui circule à l’état fluide dans l'organisme normal se coagule quand il est extrait des vais- seaux ou bien, encore parfois dans les vaisseaux eux- mêmes sous l'influence de certaines altérations mor- bides. Le phénomène de la coagulation est donc plutôt pathologique que physiologique : toutefois il intéresse également le médecin et le physiologiste, car celui-ci peut arriver à savoir comment le sang reste fluide à l’état normal par la connaissance du mé- canisme de la coagulation. Les recherches expérimentales ont fait connaître un assez grand nombre de conditions qui s'opposent à la formation du caillot fibrineux. Parmi les principales on peut citer l’action du froid, de certaines solutions de sels neutres, l'intégrité des parois vasculaires. A ces conditions MM. Pagès et Arthus viennent d’en ajouter une nouvelle. Une petite quantité d’un oxalate alcalin ajouté au sang, au moment de sa sortie des vaisseaux, lui conserve sa fluidité ; mais la coagulation peut se pro- duire quand à ce sang, oxalaté on ajoute une quantité donnée de chlorure de calcium. On avait noté déjà la fluidité du sang dans les empoisonnements par l’oxa- late de potasse, mais on n’avait pas songé à tirer de ce fait les cons idérations importantes relatives au mé- canisme de la coagulation qui font l’objet principal du mémoire de M, Arthus. L'auteur montre comment les ae de Denis (de Commercy}, de Buchanan (de Glascow), de Schmidt (de Dorpat), de Brücke, ont conduit la généralité des phy- siologistes à admettre que la formation du caillot fibri- neux nécessite le concours de trois substances albu- minoides : une substance fibrinogène, une substance plastique et un fibrinferment. Hammarsten toutefois n’admet comme nécessaires que la susbtance fibrinogène et le fibrinferment : sous l'influence de ce dernier, la matière fibrinogène se dédouble en deux substances : la fibrine qui se dépose et une globuline qui reste en dissolution. Il découvre que le troisième albuminoiïde considéré comme indis- pensable par Schmidt,la substance fibrinoplastique, peut être remplacé par le chlorwre de calcium, et démontre par là le rôle essentieldes composés calciques au point de vue fibrinoplastique. D'ailleurs, Freund, considérant que la fibrine ren- ferme toujours des cendres, .qui sont généralement formées de chaux et de magnésie à l’état de phosphates, avaitété également conduit à penser queles phosphates alcalino-terreux jouent un rôle important dans la coa- gulation du sang. C'est ce rôle important que M. Arthus s'est proposé de mettre en lumière et de préciser en s'appuyant sur de nombreuses expériences sur le sang et sur des re- cherches faites antérieurement avec M. Pagès sur l’ac- tion du labferment sur le lait !, De l’ensemble de ce travail M. clusions suivantes : Du sang additionné d’un oxalate ou d’un fluorure alcalin (moins de 0, 1 °/, de chlorure, moins de 0,2°/, de fluorure) est rendu incoagulable spontanément ; et ce n’est ni en détruisant le fibrinogène ou le fibrinfer- ment, mais seulement en précipitant les sels de cal- cium que ces sels rendent le sang non spontanément coagulable, La fibrine est un composé calcique et les-sels de cal- cium sont bien des agents fibrino-plastiques en ce sens que le fibrinferment ne peut agir sur le fibrinogène qu'en présence de sels de calcium. Les sels de strontium ont les mêmes propriétés que les sels de chaux, mais il n’existe ni fibrine barytique, ni fibrine magnésienne. La coagulation du sang est d’ailleurs un phénomène de même ordre que la caséification du lait, qui con- siste dans une transformation chimique d’une subs- tance albuminoïde sous l'influence d’un ferment et la production d’un composé alcalino-terreux. La caséine est l’homologue du fibrinogène, le lab- ferment du fibrinferment le caséum de la fibrine, la substance albuminoïde du petit lait de la globuline de Hammarsten, coagulable à 6%°. Ces résultats expérimentaux donnent à la théorie d'Hammarsten, qu'ils complètent, une plus grande netteté et permettent de se faire une idée plus précise de ce que l’on doit entendre par substance fibrino- plastique dans la théorie de Schmidt. La formation de la fibrine nécessite donc bien trois substances comme le prétend Al. Schmidt : une subs- tance fibrinogène, une substance fibrinoplastique et un fibrinferment ; mais la substance fibrinoplastique n’est pas une paraglobuline, c c’est un composé calcique. Pour expliquer comment le sang reste fluide dans les vaisseaux, il est nécessaire d? Fadmettre, d'après M. Arthus, que le fibrinferment ne préexiste pas dans le sang circulant et qu'il ne se forme pas par suite de l’activité vitale des éléments cellulaires en dehors des vaisseaux : il résulterait de la destruction des éléments cellulaires. Il est peut-être regrettable que M. Arthus n’ait pas insisté sur la différence qu'il admet entre l’activité vi- tale des éléments cellulaires en dehors des vaisseaux et leur destruction, qui peuvent être considérés ce- pendant comme un seul et même phénomène biolo- gique. D'autre part le rôle actif capital du fibrinfer- ment ne nous parait pas encore suffisamment expliqué pour que l’on puisse considérer la coagulation du sang comme un phénomène chimique. Hâtons-nous de dire cependant qu'on ne saurait mé- connaitre l'importance du fait expérimental signalé par M. Arthus et des déductions ingénieuses qu'il en a tirées tant au point de vue théorique qu'au point de vue pratique ; il serait à désirer que l’on apportàt tou- jours dans l’étude des phénomènes biologiques une rigueur expérimentale aussi grande que celle qui a été mise en pratique par l’auteur des Recherches sur la coagulation du sang. Arthus tire les con- Dr Raphael Durors. 1 Archives de Physiologie (avril et juillet 1890). 620 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 4° Sciences médicales. MHugounenqg (Louis), Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Lyon. Traité des poisons. Hygiène industrielle. Chimie légale (8 fr.) G. Masson, 120, boulevard Saint- Germain, Paris, 1891, M. Hugounenq a reproduit dans ce livre les confé- rences de toxicologie faites pendant trois ans à la Faculté mixte de Médecine et de Pharmacie de Lyon Ce volume comble une lacune qui existait depuis longues années dans la littérature d'enseignement mé- die al. Il manquait, en effet, un livre assez élémentaire dans lequel le lecteur pût trouver tous les rensei- gnements concernant la toxicologie de tel ou tel corps et les considérations auxquelles peut prêter celte étude toxicologique dans les différentes applications dont ce corps est susceptible, Il est précieux, aussi bien pour l’étudiant que pour le spécialiste, de pouvoir, par la lecture de quelques pages, acquérir une notion exacte de l'importance et de l’intérèt que présentent le phos- phore, l’arsenic, le plomb, le chloroforme, les alca- loïdes, etc., au point de vue de l'hygiène des ouvriers qui fabriquent ou manient ces produits, de leur emploi à litre médicamenteux, des symptômes et des lésions que leur absorption détermine, C’est là une facon toute spéciale d'envisager l'étude des corps et dont l’utilité, au point de vue médical, n’a pas besoin d'être mise en évidence. Ne voulant pas s’en tenir aux classifications physio- logiques, encore mal arrêtées, l’auteur a divisé en quatre groupes les corps dont il a fait l'étude, Le pre- mier comprend les composés minéraux indestructibles et faciles à isoler : arsenic, antimoine, plomb, mer- cure, zinc, etc. Le second comprend les caustiques: acides et alcalis, Le troisième renferme les composé: volatils, minéraux ou organiques : phosphore, gaz véné- neux, alcool, anesthésiques, acide cyanhydrique, ete. Enfin, le quatrième comprend les alcaloïdes et les com- posés analogues. C’est l'ordre en quelque sorte imposé par les procédés de recherche chimique ; il offre l'avantage de familiariser progressivement le lecteur avec la complication que présente tant la recherche chimique que l'étude toxicologique proprement dite de chaque composé. Au point de vue purement toxicologique, on constate cependant, dans cet ouvrage, certaines lacunes regret- tables : c’est ainsi que la loc alisation des poisons n’est pas traitée avec les détails dont elle est susceptible el l'importance qu'elle mérite; le fait de la ace de l’oxyde de carbone dans le sang, très longtemps après la mort, n’est même pas mentionné; l’auteur dit, à propos de lempoisonnement par les vapeurs de sulf- hydrate d’ammoniaque dans les fosses d'aisances, que l'analyse spectrale du sang ne présente rien de parti- culier, ce qui est en complet désaccord avec les obser- faites jusqu'ici, au moins lorsque lautopsie vations n'est pas trop longtemps différée ; ce sont Jà autant de détails qu'il serait indispensable de trouver dans un livre comme celui de M. Hugounenq, car le lecteur ne pensera pas à aller les chercher ailleurs, En revanche, certains chapitres sont remarquables et présentent un vif intérêt : tels sont ceux qui traitent de généralités au sujet de la toxicologie, du poison, de l'étude phy- siologique et médico-légale de l’empoisonnement, de la recherche chimique des poisons et de la putré- faction; on est vraiment désappointé à la lecture d’autres chapitres dans lesquels on se trouve réduit à une assez sèche description des procédés de recherche chimique des alcaloïdes. Il semblerait que l’auteur n'ait pas saisi toute l'immense utilité, la nécessité ab- solue même de l'intervention de l’expérimentation physiologique pour conrnes et préciser les résultats de l'analyse chimique. J'ai bien remarqué, en certains points, qu'il élail question de l'expérimentation sur les animaux, de l’utilisation des symptômes, ete., mais cette mention est tellement accessoire qu'elle se perd tout à fait dans l'exposé des caractères et des réactions chimiques et que le lecteur ne peut pas se faire une idée de l'importance capitale de ce moyen d’obser- vation en toxicologie. Pour ne citer que quelques exemples, il est à peine question de DU pourtant si remarquable, de la vératrine sur la fibre musculaire, de celle de l'aco- nitine sur le cœur de la grenouille, alors que les indi- cations obtenues dans ces cas par une expérimentation physiologique bien conduite sont de beaucoup supé- rieures à toutes les réactions chimiques qu’elles doivent, je ne saurais trop y insister, confirmer abso- lument. Certes, il est utile de pouvoir obtenir, comme résultat des opéralions chimiques, un corps bien pur, cr istal- lisé, offrant des réactions précises ; mais, grâce à l'in- tervention des méthodes si délicates et si exactes de l’'expérimentation physiologique, il est possible de vérifier ces premières observations et d'acquérir, au point de vue médico-légal, la certitude que l’on ne peut obtenir sans cela. Voilà une lacune considérable dans le travail de M. Hugounenq et, bien qu’il nous dise dans sa préface, que ce livre « n’est pas un traité complet du poison et de l’empoisonnement »., il n’en est pas moins vrai qu'il ne justifie pas suffisamment son titre de Traité des poisons. Il me parait injustifiable de ne pas donner, actuellement, la plus large place à l'expérimentation physiologique et à la description de ses méthodes si précieuses, dans les chapitre qui traitent des empoi- sonnements par les alcaloïdes. D° Gabriel Poucuer. Leed &t Davis. The chemistry and clinical value of sterilized Milk. (La composition chimique et la valeur clinique du lait stérilisé.) — The american Jour- nal of the medical scienves, page 561, Juin 1891. Dans la première partie de ce travail, M. Leed s’est attaché à déterminer les modifications que subissent les éléments constituants du lait, quand ce liquide est stérilisé par la chaleur. Mais avant d’exposer le résul- {at de ses recherches personnelles, le professeur de chi- mie du Stevens Institut passe en revue les travaux nou- veaux entrepris sur le lait, entre autres les recherches de M. Duclaux sur les trois états de la caséine dans le lait, ainsi que celles de M. Halibuston et de M. Bé- champ. M. Leed insiste sur l’existence dans le lait d’un fer- ment capable de liquéfier l’amidon, ferment qui existe après passage à travers le filtre Pasteur. Ce ferment se détruit à 75°. Le lait de femme aurait sur l’amidon une action plus énergique encore que le lait de vache. Examinant successivement l’action de la présure, de l'acide chlorhydriqne, du suc gastrique et du suc pan- créatique, l’auteur fait voir que du lait porté au-dessus de 75° à subi d'importantes modifications. Les résidus des digestions peplique et pancréalique sont en effet beaucoup plus considérables dans le cas des laits sté- rilisés, ainsi que le montrent les chiffres suivants: Digestion peptique. Résidu : Lait cru 0,154. Stéri- lisé 0,449. _Digesti on pancréatique. Résidu : Lait cru 1,26, Sté- LLODMP I ; Mais ces altérations se produisent moins si l’on se contente de porter le lait à 68°, température suffisante, d’après l’auteur, pour rendre innoffensifs les micro-or- ganismes, surtout si l’on prend la précaution de neu- traliser l’acidité du lait avant le chauffage. Le Dr Davis, qui a étudié la question au point de vue clinique, se montre encore plus sévère. Pour lui, le lait stérilisé employé seul et tel qu'il est préparé, cons- tiltue une nourriture insuffisante, qui peut être utile dans les cas d’entérite aiguë, mais à la condition de ne pas en prolonger l'usage unique. Cette contribution à l'étude du lait stérilisé est inté- ressante, mais, à notre sens, encore insuffisante pour imposer une conclusion pratique. 0: ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 624 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER (La plupart des Académies et Sociétés savantes, dont la Revue «analyse ordinairement les travaux, sont actuellement en vacances.) ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 31 août 1891. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Serret : Sur une propriété d’involution commune à un groupe plan de cinq droites ef à un système de neuf plans. — M. Bosscha s’est occupé de déterminer le degré d’exactitude que possède le metre international com- paré au prototype des Archives. Il s'est assuré d’abord que ce prototype, dans son état actuel, est susceptible de fournir une mesure de longueur invariable à un demi-millionième près ; quatre systèmes d’observa- tions, en effet, entièrement indépendants Les uns des autres, qui avaient pour objet de déterminer la diffé- rence de longueur entre l’un des mètres nationaux et le mètre des “Archives, ont donné quatre valeurs dont É ms : aucune ne s’écarte de = de la moyenne, Quant au mètre international, les comparaisons faites de sa longueur avec celle du mètre des Archives à diverses tempéra- tures ne permettent pas d'établir entre ces longueurs à 0° une comparaison rigoureuse; pourtant on peut admettre, conformément aux conclusions de la Com- mission Néerlandaise, que le mètre international est trop court. — M. G. Faurie donne deux formules destinées à exprimer les lois de l’écrouissage et des déformations permanentes; il a déterminé pour quelques cuivres et alliages de cuivre les constantes de ces formules. — M. J. Léotard : Observation de la comète Wolf. 2° SGIENCES NATURELLES.— M. Ad. Chatin, en présen- {ant à l’Académie le dernier fascicule de la partie de son Anatomie comparée des végétaux relative aux espèces parasites (Phanérogames), rappelle l’origine de ses recherches dans cette branche de la botanique, les principaux résultats qu y a obtenus, l'importance qu'elle a acquise par la suite, et le rôle e qu ’elle joue et qu’elle est appelée à jouer encore dans la taxonomie, Mémoires présentés. — M. G. Trouvé soumet au jugement de l'Académie une : « Etude sur un nouveau système de navigation avec pile à l’eau de mer. » — M. E. Nadalon adresse la description d’un instru- ment qui permettrait d'évaluer le diamètre d’une cl 1 EE . à — ou — de millimètre près. 100 200 Séance du T septembre 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Picard : Sur le nombre des racines communes à plusieurs équations simultanées. — M. E. Cosserat : Observations de la planète Palisa (1891, août 30), faites à l'Observatoire de Toulouse. — M. P. Tacchini adresse le tableau de la distribution en latitude des phénomènes solaires observés à l'Observatoire royal du Collège romain pen- dant le premier semestre 1891; les protubérances ont été plus fréquentes dans l'hémisphère austral, comme en 1889 et 1890, avec le maximum de fréquence tou- jours dans les zones + 40° Æ 50°, tandis que les taches ont conservé leur grande prédominance au nord de l'équateur, comme les facules; tous les phénomènes présentent une fréquence très faible au voisinage de l'équateur solaire, -— A propos des communications faites récemment à l’Académie sur le mouvement des protubérances solaires, M. Fizeau remarque que ces mouvements sont d’une vitesse telle qu'il importe au plus haut degré, lorsqu'on applique le principe du déplacement des raies par le mouvement du corps lu- mineux, de tenir compte de laberration. Examinant ces mouvements quant à leur nature, M. Fizeau fait observer que les raies de l’hydrogène, dans les labo- ratoires, n'apparaissent jamais que sous des influences électriques; d'autre part, que laspect des protubé- rances solaires, avec leurs changements rapides de forme et d'éclat, leur apparence rubanée, ondulée, in- terrompue, rappelle les aurores boréales ; à ce point de vue, on doit considérer les apparences lumineuses des protubérances, non comme dues à des transports de matière, mais comme résultant de la propagation non instantanée de phénomènes électriques à travers des masses gazeuses. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. P. Henry a réalisé la synthèse directe des alcools primaires à partir de lal- cool méthylique, en faisant réagir les composés organo- zinciques sur les éthers méthyliques simples mono- chlorés; le rendement est presque théorique. — A propos de la communication récente de MM. Fouqué et Michel Lévy, sur la reproduction de certains éléments des granites, M. H. Le Chatelier indique une théorie générale des conditions de la cristallisation, en partant de laquelle il a institué des expériences pour repro= duire les différents minéraux. Le principe consiste à produire sur des matériaux qui, à la pression ordinaire, donnent après fusion une masse vitreuse, une pression considérable à la faveur de laquelle la masse fondue doit cristalliser en se refroidissant, Les expériences ont porté sur des mélanges ayant la composition du feldspath orthose et de la pegmatite, comprimés entre deux cylindres d'acier à 5 000 atmosphères et fondus par une spirale de platine incandescente; elles n’ont point encore donné de résultats posilifs, faute d’avoir pu prolonger le refroidissement au-delà de quelques minutes. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. À. Chauveau a obtenu la fusion des sensations chromatiques percues isolé- ment par chacun des deux yeux, en superposant au moyen du stéréoscope deux surfaces égales teintées de deux couleurs différentes ; l'expérience réussit le mieux avec une lumière faible ou avec un éclairage ins- tantané., — M. S. Arloing a constaté que le Staphy- locoque doré sécrète une substance soluble qui pro- duit chez l’animal, auquel on l'injecte, une excitabilité particulière des centres vaso-dilatateurs; cette excita- bilité est facile à constater au moyen de deux excita- tions égales du nerf de Cyon, avant et après l'injection des produits de culture; la seconde réponse est plus intense et plus prolongée que la première. Cet état des centres est nécessaire pour la formation du pus par l’action du microbe, — M, P. Lesage a observé la for- mation d’amidon dans la racine du radis, qui, norma- lement, n’en contient point, après des arrosages avec de l’eau contenant une certaine proportion de sel marin; un excès de sel empèche cette production d’amidon. Mémoires présentés. — M. P. Masson adresse un projet de dispositif destiné à éviter les collisions entre les trains de chemin de fer, — M. C. Zalikiewiez adresse une note concernant la réforme du service télégraphique. — M. L. Mignot adresse une note con- cernant l’emploi de la potasse pour la destruction du Phylloxera et la régénération de la vigne. — M. Pigeon adresse diverses notes concernant l’emploi thérapeu- tique de l’air ozonisé, la production des épidémies de choléra et la transmission de diverses maladies par la 622 ACADÉMIES ET SOCIËÈTES SAVANTES vaccination. — M. Paquelin adresse une réponse aux observations présentées par M. Manuel-Périer, concer- nant la nouvelle disposition de son thermo-cautère, — M. Ch. Zurcher adresse une note intitulée : « Re- cherche de la loi de succession des nombres premiers, » — M. Pimpar adresse une note sur un projet d'appa- reil destiné à la transmission de la vision à distance. L. LAPICQUE, ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 25 août 1891. M. A. Béchamp : Considérations sur les méthodes actuelles de l'analyse du lait, sur les matières extrac- tives de cette humeur et sur les substances réductrices du réactif de Fehling, autres que le lactose, qu'elles con- tiennent.—M.Lucas-Championnière : Cureradicale des hernies. Depuis sa première cure radicale dehernie non étranglée l’auteur a fait deux-cent-cinquante-quatre opé- rations de ce genre, sur lesquelles il n’y a eu que deux morts. L'un de ces derniers élait dans des conditions détestables, et l’autre a succombé sans que M. Lucas Championnière en ait été prévenu, L'opéralion a réussi sur une femme de cinquante et un ans, pesant 100 ki- logs, ayant une hernie ombilicale de 78 centimètres de tour à sa base; sur une femme ayant une hernie in- guinale descendant au genou, etc... L'opération, diffi- cile en elle-même, réussit sila méthode employée est bonne. On peut affirmer que la cure radicale doit être aujourd’hui la règle, mais avec les réserves suivantes : L'opération n'est pas à conseiller chez les très jeunes enfants. Chez le vieillard, l'opération est dangereuse. Même chez le sujet ayant dépassé la quarantaine, il faut être prudent. De sept à quarante ans, au con- traire, on peut opérer toutes les hernies, tous les su- jets voulant se passer du bandage, etc. I n°y a de ré- serves à faire que si les sujets sont déjà malades ou si les parois abdominales sont mauvaises. La hernie in- guinale congénitale doit être opérée sans exception. Enfin, chez la femme, dans des conditions de jeunesse suffisante, l'opération devrait être pratiquée sans exception puisqu'elle présente pour elle des bénéfices plus assurés, et la débarrasse de l'imminence d’acci- dents particulièrement graves. — M. Guermonprez (Lille) : Autoplastie de la main par désossement d'un doigt. Séance du 4% Septembre. M. Tholozan : La grippe en Perse en 1889-1890. Tout le Nord de la Perse a été envahi en 1889. La mortalité fut cousidérable, Quand cette épidémie eut disparu, à la fin de mars 1890, on observa des affections consé- eutives, névralgies, débilité, ete, La ville de Rècht fut atteinte en septembre 1889; Téhéran au mois d’oc- tobre, et Ispahan à la fin du même mois. La maladie fut signalée au commencement de décembre 1890 à Méched. La grippe a d’abord atteint le lilloral sud- ouest de la Caspienne et peu après la capitale de ce royaume. D'Ispahan pour alteindre Chiraz l'épidémie a mis environ deux mois, et de là pour se montrer à Bouchir, deux mois et demi. La propagation de ce fléau en Perse, a été lenteettrès irrégulière.—M, Béchamp: Considéralions physiologiques sur les globules et les microzymas laiteux de laits de vache anormaux. Les microzymas sont l’unique cause des altérations spon- lanées carcatéristiques diverses du lait. Les microzy- mas, dans les laits anormaux présentés, sont eux aussi anoraaux par leur abondance et leur ténuité. — M. Folaillon : Note sur un procédé de palato- plastie en deux séances. L'auteur présente des ma- lades opérés par son procédé, lequel consiste à faire, dans uue première séance, deux incisions latérales et à décoller la muqueuse jusqu'à la perforation en rasant les os avec soin. L'écoulement du sang estarrèté par la compression, Le lendemain ou surlendemain on fait l'avivement et la suture. SOCIÉTÉ DES INGÉNIEURS CIVILS Séance du 17 juillet 1891 M. Jouffroy s'occupe des condilions économiques actuellement réalisables dans la machine à vapeur, De ses calculs, établis par la méthode directe de décompte des calories, il déduit qu'une machine munie d’une enveloppe, avec des parois sans masse et un réchauf- fement intermittentr,éaliserait le rendement maximum, En appelant puissance théorique de l'enveloppe la quantité de chaleur nécessaire pour empêcher toute condensation pendant la détente, on peut calculer l'utilisation de cette puissance. Si, pour une machine à cylindre unique, le nombre ainsi calculé est criti- quable, il est, au contraire, légitime pour une machine à quadruple expansion, ce qui est précisément le cas de la machine marine étudiée par M. Jouffroy : on peut y admettre une utilisation égale à 60 0/0 de la puissance théorique. De là résulte que, pour une ma- chine à condensation, recevant la vapeur à une pression de 11,5 atmosphères, la consommation de charbon peut descendre au-dessous de Ok. 600 par cheval. Pour diminuer encore la consommation, il faudrait aug- menter la pression initiale. Cette communication et l'étude du rendement théorique maximum des ma- chines à vapeur donnent lieu à une intéressante dis- cussion entre MM. Casalonga, Salguès el Richard. Séance supplémentaire du 2% juillet pp J M. Chaudy expose de xouvelles méthodes pour le calcul de différentes poutres : 1° Pour les poutres ar- mées, il tire la valeur de la tension du cäble inférieur qui relie les extrémités de la poutre rigide, d’une équa- ton du premier degré obtenue en évaluant de deux manières différentes l’allongement de ce câble, De la tension ainsi obtenue, il est facile de déduire les réac- tions des contrefiches réunissant le câble et la poutre rigide, et, par suite, les moments fléchissants produits dans cette poutre. Gette méthode s'applique aux ponts à tablier rigide en remarquant que, — dans ce cas, — il faut calculer la tension pour les différents brins ; 20 Pour le calcul des poutres continues reposant sur n appuis, M. Chaudy obtient les réactions inconnues en écrivant, outre les deux conditions ordinaires d’équi- libre,n—? deux équations basées sur la formule du tra- vail de flexion; 3° En déterminant préalablement par la statique graphique les déplacements élastiques, il applique la méthode analytique indiquée pour les poutres continues droites, par M. Bertrand de Font- violant, aux poutres continues en arc s’archoutant, aux ares avec points d'appui intermédiaires, et aux arcs ou aux systèmes d’ares reliés à des poutres continues, — M. Hinstin traite des droits de douane, au point de vue industriel, I signale l'erreur des théoriciens pour qui le commerce et l’industrie ne font qu'une seule et même chose : il n’y a pas seulement en présence le producteur et le consommateur; mais le prix que le consommateur paie un produit est augmenté considé- rablement, doublé souvent, par le bénéfice de linter- médiaire et par les frais de transport : la surcharge qui résulte d’un droit de douane est bien faible vis- àä-vis des précédentes. IL faut également distinguer entre les deux sortes de bénéfices : bénéfice brut et bénéfice net. Un droit de douane bien appliqué peut, tout en maintenant la concurrence, faire revenir le bénéfice net en France et repasser le brut à l'étranger, En somme, il est bon d’avoir des droits modérés qui, sans élever le prix des marchandises au profit de quelques industriels, permettent au travail national de se développer. Pour fixer ces droits, il faudrait que les Comités et les chambres consultatives fissent dans leur sein une grande place aux ingénieurs el aux indus- triels. — M. Polonceau considère ces questions de protection ou de libre échange comme un marchan- dage entre les divers Etats. Au point de vue des trans- ports, il rappelle que les Compagnies ont des tarifs communs avantageux; il souhaite aussi voir suivre le ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 623 système employé en Autriche, où les négociants pro- posent leurs prix aux Compagnies de chemin de fer. — MM. Coignet et J. Fleury sont partisans du libre échange. Les droits exagérés ralentissent les progrès de l’industrie, D'ailleurs, la France n'a pas d'intérêt à se fermer; elle importe trois fois moins de produits fabriqués qu’elle n'en exporte; elle a tendance à l’ex- pansion. Ce qu'il faut chercher à faire est d’abaisser le prix de revient : c’est le rôle de l'ingénieur. P. JANNETTAZ. SOCIÉTÉS MARITIMES SCIENTIFIQUES INSTITUTE OF MARINE ENGINEERS Session 1891 M. W. Wilson : Sur les progrès des machines ma- rines. Les progrès accomplis récemment dans la cons- truction des machines sont tels que malgré la com- plication des organes qui a crû sans cesse, et la puissance qui a quadruplé depuis vingt ans, le per- sonnel de la chambre des machines n’a pas eu besoin d'être sensiblement augmenté. M. Wilson, ingénieur en chef de la Compagnie Péninsulaire Orientale, expose dans ce travail ceux de ces progrès qui peu- vent être considérés comme consacrés par la pratique, et qui indiquent par suite l’ordre d'idées à suivre pour réaliser désormais de nouveaux progrès. Les anciens ressorts des pistons exerçaient sur les parois du cylindre une pression énorme, donnant lieu à un frottement exagéré, et entrainant une usure et des réparations incessantes des garnitures, ainsi que le changement des ressorts eux-mêmes dont les cas- sures étaient fréquentes. On n'avait alors en vue que l'étanchéité. Aujourd’hui on emploie surtout des gar- nitures flottantes, L’anneau Ramsbottom paraît donner jusqu'ici les meilleurs résultats. Pourtant il est moins efficace dans les cylindres à basse qu'à haute pression, Il suffirait done d'appliquer aux bagues de légers r'es- sorts à boudin ne faisant que contrebalancer la raré- faction à l’intérieur des logements, qui tend à dé- lacher les bagues du cylindre. Les tiroirs doivent être bien équilibrés; parmi les plus récents, le tiroir Church se recommande spécialement. Les distributeurs à soupapes ont l’avantage de supprimerles glaces dont le dressage exige des soins minutieux, ainsi que les plaques frottantes du tiroir. D'importants perfection- nements sont : l'emploi des graisseurs automati- ques à réglage, et à débit visible; la substitution des huiles minérales qui n'attaquent pas le métal et ne donnent pas d'empâtement, aux huiles végétales dont les nombreux inconvénients sont connus, — On à compris dans le montage de la ligne d'arbres tout l'intérêt d’un ajustage exact, et l'utilité des larges sortées pour la diminution des frottements et grippe- ments. Aussi le besoin d'arrosage se fait-il de moins en moins sentir, ce qui restreint les chances de rup- ture. Cependant les excentriques n’ont pas encore une surface de portage suffisante; aussi donnent:ls lieu à de fréquents échauffements et à une usure rapide, etce sont les parties qu'on est le plus obligé d’arroser. Le meilleur moyen consiste à placer au dessous une cuvette remplie d'huile et d’eau douce mélangées, où l’excentrique plonge à chaque tour. On à également augmenté la surface des paliers de butée, La butée à anneaux indépendants semble donner les meilleurs résultats. Dans cette disposition, la poussée de chaque collet de Parbre est recue par une semelle spéciale, ou anneau en deux parties, ayant son serrage distinct. Cest supérieur au système en fer à cheval, où les demi-anneaux supérieurs exIs- tent seuls. Les collets de l'arbre ne sont alors soumis au frottement que dans leur demi-révolution supé- rieure ; dans l’autre, ils plongent dans un bain d'huile. Chaque moitié d'anneau peut être réglée séparément au moyen d'écrous, de manière à le faire porter exac- tement sur le collet correspondant, Mais il en résulte l'inconvénient que la poussée est supportée par ces écrous de réglage. Pour le graissage de la butée, on dispose à l'avant et à l'arrière une cuvette demi-cylin- drique, L'huile amenée vers l’avant par la rotation de l'arbre, retourne à larrière par un tuyau spécial, Les collets baignent ainsi dans lhuile dont la circulation régulière. est assurée, Un désavantage qu'offre ce palier, c’est que la base n’est pas accessible, et l’on est obligé de soulever l'arbre pour nettoyer les canne- lures, les gratter, et assurer un bon portage. L'auteur propose d'y remédier en faisant cette base en deux pièces longitudinales réunies dans l'axe. Les der- niers progrès des chaudières sont dus aux soupapes de sûreté à ressort, telles que les soupapes Adams ef Cockburn; aux robinets à garniture d’asbestos; aux évaporateurs et réchauffeurs d'alimentation, aux pompes alimentaires de Weir, dont l'emploi se géné- ralise de plus en plus. M. Wilson conseille dans les grands navires à passagers l'emploi d’un condenseur supplémentaire avec pompe à air et pompe d’alimen- tation, desservantles guindeaux et les autres appareils à vapeur auxiliaires, si nombreux aujourd'hui à bord de ces bâtiments. L'eau de condensation retourne aux chaudières. Il recommande enfin l'usage de ringards mécaniques. NORTH EAST COAST INSTITUTION OF AND SHIPBUILDERS Session 1891 M. W. HÔk : Sur l'Insubmersibilité des navires de com- merce (2° mémoire)! — M. Hôk rappelle que, dans un précédent mémoire, il à établi l'insuffisance de la sub- division actuellement pratiquée par les constructeurs, avec la sanction même du Lloyd. On n’a fait à son tra. vail que des objections d’ordre économique. Cependant, ces objections mêmes sont fort exagérées, car la sup- pression des sinistres si nombreux dus aux abordages compenserait largement pour la prospérité générale l'augmentalion de dépense résultant de la compli- cation du chargement et de l’arrimage. L'objet du présent mémoire est d'indiquer les subdivisions néces- saires aux diverses catégories de navires, On verra d'ailleurs que ces subdivisions sont parfaitement pra- tiques. On peut cloisonner un navire dans le sens trans- versal, longitudinal ou horizontal L'auteur s'occupe uniquement des cloisons étanches transversales, qui n’ont pas l'inconvénient, comme les longitudinales, de forcer le navire à prendre de la bande. ou comme les horizontales, d'être fatalement endommagées par la collision. En outre, les cloisons transversales sont moins coûteuses, et contribuent à la solidité, De même que dans son premier mémoire, M. Hôk fait plusieurs hypothèses sur les conditions d’insubmersibilité qu'il entend assurer au navire, Puis il détermine pour Chaque catégorie la distance maxima des cloisons élanches compatible avec ces conditions. Les résultats sont consignes dans une série de tableaux, Le pre- mier indique pour chaque longueur et chaque type de navire le nombre des cloisons nécessaires en dehors des deux (voiliers) ou des quatre (vapeurs) cloisons ‘on- damentales. Il donne lieu à des remarques intéres- santes. Pour les spardecks, il suffit, dans tous les cas, d'établir une cloison à l'avant et une autre à l'arrière. Pour les awning-decks (navires à pont-abri), il faut, en certains cas, ajouter jusqu'à trois cloisons à l'arrière, deux à l’avant, et deux dans le compartiment des ma- ENGINEERS 1 Les deux Mémoires de M. Hôük sur l'insuffisance du cloisonnement des navires et la nécessité d’y remédier em- pruntent un surcroit d’intérét à.ce fait qu'au moment où ils étaient lus à l’Institut de N. E. Coast, le Board of Trade était occupé à rédiger un règlement sur les cloisons étanches. Ce réglement vient de paraitre et sera prochainement soumis au Parlement anglais, pour servir de base à des mesures législatives complétant le Merchant Shipping Act. Bien que plusieurs de ses dispositions soient discutables, on ne peut que rendre hommage à lesprit qui l'a inspiré. L'œuvre du Board of Trade corrobore les conclusions de M. Hôük, et leur donne la juste sanction que réclament les progrès de la science qui ont pour but la sauvegarde de la vie humaine. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES chines et chaudières. Les voiliers peuvent se contenter de trois cloisons supplémentaires. D'après cela, on constate que sur les navires classés au Lloyd, 61/, 0/, tout au plus, ayant six cloisons, peuvent être submer- sibles. Ce tableau montre encore qu’en élevant cer- taines cloisons plus haut qu'on ne le fait ordinairement, on pourrait restreindre leur nombre. Ainsi, dans les hurricane-decks, si toutes les cloisons montaient au pont supérieur, on m'aurait plus besoin d'ajouter que deux cloisons, une à l'avant, l’autre à l'arrière. On re- marque que lorsqu'un nombre inégal de cloisons est exigé à l'avant et à l'arrière, c’est toujours à l'arrière qu'il en faut une de plus. Ceci est dû à la forme de ja tonture qui s'y abaisse trop. Contrairement à la pra- tique, ce sont les plus petits navires que l'on devrait munir du plus grand nombre de cloisons, car le nombre dépend, non des dimensions absolues, mais du rapport du tirant d’eau au creux, rapport qui déeroit quand la longueur augmente, L'application des règles découlant de ce tableau entraine certaines difffeultés; mais il est aisé de les surmonter. Ainsi l'établissement parfois exigé de deux cloisons dans l’espace des machines et chaudières serait absolument inadmissible. Mais les navires dont il s’agit sont soit de petits hurricane-decks, dans lesquels il suffirait de faire monter les cloisons jusqu'au pont supérieur pour se dispenser de toute cloison dans cet espace des machines; soit de petits vapeurs ayant des superstructures sur moins de 0.70 de leur longueur; et pour ce type, il suit de ce qui pré- cède que leur tirant d’eau est trop fort, et qu'il y au- rait lieu de reviser sur ce point les fables de franc- bord du Board of Trade. Le coefficient de finesse, le rapport de la longueur au creux, la tonture ont pour influence de modifier la position des cloisons plutôt que leur nombre. Cependant le tableau montre encore qu'il est possible, par un choix judicieux de ces élé- ments dans un projet de navire, de réduire parfois de un ou deux le nombre des cloisons additionnelles. — Un second tableau donne les positions absolues des cloisons par leurs distances complées à partir de la perpendiculaire arrière, ainsi que les écarts maxima que l’on peut faire subir à ces positions. — D'autres tableaux indiquent les variations de longueur dont est susceptible l’espace réservé aux machines et chau- dières, ainsi que les variations possibles des écarte- ments des cloisons en fonction de la longueur du na- vire. Ils permettent par suite de faire les interpolations pour les coefficients de finesse intermédiaires entre 0,70 et 0,19, pour les proportions comprises entre 12 et 15 et pour des valeurs de la tonture comprises entre une fois et une fois et demie la tonture normale. M. Hôk tire de cette étude les conclusions suivantes : Il est possible et pratique d'établir dans tous les na: vires un nombre de cloisons étanches suffisant pour leur garantir une flottabilité convenable lorsque lun quelconque de leurs compartiments est en libre com- municalion avec la mer. Pour cela, le tirant d’eau ne doit en aucun cas dépasser 0,92 du creux. Il y a lieu d'augmenter la tonture habituelle, surtout à l'arrière. Les cloisons doivent s'élever le plus haut possible, jus- qu'au pont supérieur dans les hurricane-decks et dans plusieurs autres types de navires. L'espace réservé aux machines et chaudières doit parfois être subdivisé; mais jamais plus d'une cloison n’est nécessaire. Tous les navires ont besoin d'au moins deux cloisons sup- plémentaires; les voiliers en demandent deux ou trois selon leur longueur, La cloison d’abordage pourrait avec avantage être reculée quand il n’y a pas de car- gaison dans la cale avant. L'observation des règles précédentes réduirait dans de fortes proportions le nombre considérable de sinistres dus au défaut de cloi- sons étanches sans porter atteinte aux intérêts des armateurs, Ces prescriptions ne sont d’ailleurs qu'un minimum au point de vue de ce qui doit être fait pour la sécurité de la vie humaine, M. Hôk rend hommage en terminant aux efforts tentés dans ce sens par T Bureau Veritas, qui a créé dans son registre une marque spéciale pour les voiliers munis d’un certain nombre de cloisons additionnelles. L. Viver. ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE Aer août 1891. SCIENCES NATURELLES. — L'Académie a entendu dans cette séance l’une des communications les plus inté- ressantes qui lui aient élé faites depuis longtemps, et que nous croyons devoir résumer d'une manière assez détaillée, M. L. Errera a fait un grand nombre d’ex- périences sur l’action physiologique à distance, décou- verte par Elfving, de certains agents sur les plantes. Il a opéré sur le Phycomyces nitens et dans des condi- tions très variées. Les résultats qu’il a obtenus sont très nettement représentés sur des photographies qu'il fait circuler parmi ses confrères, et dont la plupart se- ront annexées à son travail, La conclusion remar- quable de celui-ci est que tous les phénomènes ob- servés sont simplement hygroscopiques et n’appellent nullement l'intervention d’autres forces plus ou moins obscures, comme certains botanistes l'avaient cru né- cessaire. La plupart des organes végétaux en état de croissance sontsensibles à l'excitation de certains agents extérieurs et y répondent par des courbures. On connait, à cet égard, les phénomènes de géotropisme, d'héliotropisme, d’hydrotropisme, d’haptotropisme, etc. Mais des faits très curieux, décrits récemment par le botaniste finlandais Elfving, semblaient ne rentrer dans aucune des catégories connues et l'ont conduit à supposer l'existence d'une force spéciale qui se mani- feste par son action physiologique à distance. Il a vu que le fer et, à un moindre degré, le zinc et l’alumi- nium, ainsi que diverses malières organiques, telles que la cire à cacheter, la colophane, les racines vi- vantes, exercent une attraction sur les filaments en voie de croissance d’un pelit champignon, le Phyco- myces nilens. Tous les autres métaux essayés sont restés inactifs, tandis que les cultures de Phycomyces manifestent, au contraire, les unes sur les autres, une action répulsive. Après avoir donné un apercu des phé- nomènes d'hygroscopicité et en avoir proposé une classification rationnelle, M, Errera montre qu'ils permettent de ramener à de l’hygroscopicité la pré- tendue action physiologique à distance. L'agent in- connu qui occasionne la répulsion du Phycomyces sur lui-même, aussi bien que l'attraction du fer ou de la cire à cacheter, n’est autre, en effet, que la vapeur d’eau : Le Phycomyces se courbe vers les corps qui at- tirent l'humidité et s'écarte de ceux qui en émettent. M. Errera explique comment il se fait que ces expé- riences, dues à des différences d'humidité, réussissent même dans une atmosphère saturée, et il confirme ses conclusions par des expériences de contrôle sur les ra- cines. Sans entrer dans les détails, on peut ajouter que la sensibilité hydrotropique du Phycomyces est si grande qu’elle à permis de prédire l'existence d'hygros- copicité chez un corps, tel que le camphre, où elle n'avait pas encore été constatée, Enfin, lPensemble de ses observations à amené l’auteur à une façon quelque peu nouvelle d'envisager la sensibilité des or- ganismes vis-à-vis de l'humidité ambiante. — M. Mour- lon fait une communication sur la prédominance des dépôts de l’éocène supérieur asschien dans la région comprise entre la Senne et la Dyle. Le savant géologue a élucidé, dans ses levés, plusieurs points restés dou- teux, même depuis la publication de la carte et des notes de Dumont, et au sujet desquels l'Académie avait en vain mis une question au concours pour 1890, F.F. Membre de l'Académie. Séance du Le Directeur- Gérant : Louis Ouivier Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 2e ANNÉE N°19 15 OCTOBBRE 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCE PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LES IDÉES NOUVELLES SUR L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES APERÇU DE LA QUESTION Étudier la spermatogénèse, c'est avant tout re- chercher comment dans le (eslicule d’un animal adulte se forment les spermatozoïdes, el comment la formation spermalogénique peut pour un temps plus ou moins long se faire d'une façon continue, ou bien recommencer après avoir momentanément cessé. Enfermée dans ces limites étroites, la ques- tion de la spermalogénèse nous apparait compa- rable à celle du mécanisme de la sécrétion dans une glande quelconque : ils'agit de savoir comment les cellules sécrètent, et commentensuite, épuisées par la sécrétion, elles se régénèrent, ou, devenues produit de secrétion elles-mêmes, elles sont rem- placées. Ici seulement le produit de l’activité glandulaire, le spermatozoïde, au lieu d'être une parlicule de la cellule détachée du reste, est une cellule tout entière qui est excrétée en lotalité et doit être en {otalité remplacée : exemple unique, croyons-nous, de ce que les physiologistes nom- ment sécrétion morphologique. Ce spermatozoïde est une cellule, mais une cellule profondément modifiée, à tel point qu'en le voyant on peut au premier abord se demander si c'est bien une cel- lule que l’on a sous les yeux. L'ensemble des transformalions profondes qui ont conduit une cellule testiculaire, la cellule sper- malique ou spermatide, à tozoïde, peut porter le nom d’ontogénèse du sperma- tozoïde. L'étude de ces transformations est inté- REVUE GÉNÉRALE, 1891. la forme de sperma- ressante à un double point de vue : tout d'abord, au point de vue spécial du mode de formation de l'élément reproducteur mâle ; ensuite, au point de vue général de la biologie cellulaire et de la connaissance de la constitution de la cellule. Sous ce dernier rapport, il est évident, en effet, que l'étude de la structure intime de la cellule doit être faite non seulement pour l’élat statique, indif- férent, de cette cellule, mais encore pour son état dynamique, différencié. Il y a intérêt à connaitre non seulement la manière d’être d’une cellule, mais encore ce que celte cellule peut devenir, et com- ment elle peut le devenir; il faut être renseigné sur les potentialités diverses des cellules, sur leurs différencialions possibles, comme on dit en histo- logie. Bien plus, il faut savoir non seulement ce que devient la cellule considérée dans son en- semble, mais encore quels sont les changements subis dans cetle évolution de la cellule par les dif- férentes parties dont cetle cellule se compose à l’état indifférent. A cet égard l'étude de l’ontogé- nèse du spermatozoïde, ou, ce qui revient au même, celle de la différenciation de la cellule spermatique, est des plus instructives. Mais la cellule spermatique, des métamorphoses de laquelle résulte le spermatozoïde, a elle-même une origine, et nous rechercherons quels sont les générateurs de cette cellule à son tour; nous ferons l'étude de la descendance du spermatozoïde. Il va 19 626 D' A. PRENANT. — L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES de soi que, dans la recherche de celte descendance, on peut remonter plus ou moins haut, On peut se borner au testicule adulle, ou bien remonter au testicule jeune, non encore mür, ou bien même à l'ébauche de la glande chez l'embryon. Il arrive alors que l’histoire des origines du spermatozoïde coïncide à peu près avec celle du développement du testicule même. Enfin, l’équivalence des éléments sexuels, du spermatozoïde et de l'œuf, nous invite à rechercher si le processus de la spermatogénèse el celui de l’ovogénèse, qui donnent naissance à des produits de même valeur, sont semblables ou tout au moins comparables, et comment, dans ce cas, la compa- raison peut être faite. Nous examinerons successivement les diverses questions suivantes : 4° Descendance du spermatozoïde ou histogé- nèse du testicule ; 2° Transformation de la cellule spermatique en spermatozoïde ou ontogénèse du spermatozoïde ; 3° Parallèle de la spermatogénèse et de l’ovogé- nèse, où comparaison morphologique du sperma- tozoïde et de l'œuf. I. — DESCENDANCE DU SPERMATOZOÏDE OÙ HISTOGÉ- NÈSE DU TESTICULE Nous examinerons deux processus typiques d'his- togénèse différents. L'un est simple, l’autre com- plexe. L'un se déroule tout entier chez l'adulte, l’autre s'étend depuis la vie embryonnaire jusqu'à l’époque de la maturité sexuelle de l'animal. Le premier nous sera présenté par l'Ascaride du Cheval, le deuxième par les Mammifères. A. Le testicule de l'Ascaride du Chevul. — La glande génitale màle des Ascarides est un long tube dans lequel se succèdent, depuis lextrémilé borgne du tube jusqu’à sa terminaison, les diffé- rentes générations de cellules séminales des- quelles descendent les spermatozoïdes. Avec E. van Beneden et Julin et avec O. Hertwig, on peut dis- tinguer dans le tube testiculaire plusieurs régions ou zones successives, dans chacune desquelles les éléments séminaux se trouvent en un état déter- miné de développement. La première région, ou « zone germinalive », est constituée par de petites cellules qui se multiplient activement par division, et que l’on peut appeler cellules séminales primor- diales ou spermatogonies ; les cellules-filles des sper- matogonies sont appelées spermatocyles. Dans la deuxième région ou «zone d’accroissement » les spermatocytes précédemment formés ne se mul- liplient pas, mais s’accroissent beaucoup. La lroi- sième région peut porter le nom de « zone de divi- sion ou de maturation ». Les spermätocytes S'y mêne remarquable qui ne se retrouve que dans l'ovogénèse et sur lequel nous reviendrons plus lard. Les produits de cette bipartilion deux fois répétée sont des cellules spermatiques ou des sper- malides, qui ne se divisent plus, mais qui, dans la partie plus inférieure du testicule,se transformeront directement en spermatozoïdes, au cours de modifi- calions qui feront l'objet du paragraphe suivant. Chaque spermalocyte a ainsi donné naissance à deux spermatocytes-filles, dont chacun, se divisant à son tour, produira deux cellules séminales-filles ou spermatides; de chaque spermatocyle sont donc issues quatre spermatides qui se transfor- meront en autant de spermatozoïdes. B. Le tube séminifère des Mammifères el son déve- loppement. — Chez nombre d’'Invertébrés, chez les Verlébrés et en particulier chez les Mammifères pris comme type, les dispositions sont plus com- pliquées que celles que nous venons d'examiner. Chez les Mammifères, en outre, on ne serait plus suflisamment renseigné sur la généalogie du sper- malozoïde, si l’on étudiait seulement le testicule de l'animal adulte, et il faut remonter aux phases jeune et embryonnaire de l'organe pour trouver les ancêtres cellulaires des spermatozoïdes. C'est là une nécessité qui ressortira de l'exposé que nous allons faire de la constitution du tube séminifère adulte des Mammifères. La coupe transversale du tube séminifère d'un Mammifère (y. 1) peut être décomposée en rayons et interrayons. Les rayons (R) sont occupés par une file d'éléments qui,sionles considère dela péri- phérie au centre du tube, dérivent successivement les uns des autres. Les éléments les plus internes sont les spermatozoïdes sp°; ils dérivent direcle- ment d'éléments plus extérieurs, qui sont les cel- lules spermaliques ou spermatides sp? ; celles-ci, à leur tour, sont les cellules-filles de cellules situées plus en dehors, les spermaltocytes spl; les sper- matocytes enfin sontissus de la division de cel- lules plus extérieures encore, les spermatogo- nies (sp). Nous retrouvons ici, échelonnés de la périphérie au centre dans une coupe de tube séminifère, les Lrois Lypes successifs d’ancètres cellulaires du spermatozoïde, que nous avons trouvés dans les différentes régions du tube testiculaire de l'Asca- ride. Les spermatozoïdes et les éléments dont ils dérivent forment ensemble une lignée cellulaire parfaitement continue. Que sont maintenant les cellules (/) qui occu- pent les inlerrayons (12)? Ces éléments, dont il n'existe qu'un seul dans chaque interrayon, avaient été d'abord considérés comme des « spermato- blastes », c'est-à-dire des producteurs de sperma- divisent deux fois de suite, sans se reposer, phéno- | tozoïdes, parce qu’on avail cru voir dans l’extré- D' A. PRENANT. — L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES 627 mité centrale de leur corps cellulaire se former les spermatozoïdes : opinion qu'a abandonnée l’auteur même (v. Ebner) qui l’avail avancée autrefois. On . en a fail ensuile des « cellules fixes » (Sertoli), afin d'exprimer par celte appellation l'opposition que Fig. 1. — Porlion d'une coupe du lube séminifère d'un Mammifère représentée demi-schématiquement.— R, rayons. — iR, interrayons figurés par des traits radiés. Le tube est décomposé par des lignes courbes pointillées en zones concentriques qui correspondent de dehors en dedans aux régions dont se compose le testicule de l'Ascaride de son extrémité borgne jusqu’à sa terminaison. — Dans les inter- rayons, /, la cellule fixe. — Dans les rayons, la lignée sé- minale représentée de dehors en dedans par les spermato- gonies sp, les spermatocytes sp', les spermatides sp? etles spermatozoïdes sp. La spermatogonie sp (rayon gauche) est devenue en augmentant de volume le spermatocyte spl (rayon droit): celui-ci, devenu plus considérable (rayon wauche), est en voie de division spl; ses deux cellules- files sp! (rayon droit) se préparent à une nouvelle division de laquelle résulteront les quatre spermatides sp?, dont chacune deviendra un spermatozoïde sp. l'on peut établir entre ces éléments toujours identi- ques à eux-mêmes et les cellules séminales, sou- mises à une incessante évolution, qui remplissent les rayons du tube séminifère. Onles a regardés en- suite comme des « cellules de soutien », parce qu'on admettait que de leur extrémité centrale partent des prolongements qui s'unissent entre eux de ma- uière à former des niches destinées à loger les cel- lules séminales et à les protéger dans le cours de leur évolution (Merkel, Renson, Benda, etc.). Enfin on les a fait servir à la nutrition des éléments sé- minaux et en particulier des spermatozoïdes (Benda, v. Ebner dans un deuxième travail), et on les a opposés sous le nom de « cellules végétatives » aux élémentsséminaux ou « cellules germinatives » (Benda). Ilest possible que les éléments cellulaires, dont la signification nous occupe, remplissent l’une ou l’autre des diverses fonctions que les auteurs leur ont attribuées. Il est certain toutefois qu'ils ne sont pas générateurs de spermatozoïdes, et ne mé- ritent pas la dénomination de spermatoblastes que x. Ebner leur avait donnée; il est presque aussisür qu'ils ne forment pas pour les cellules séminales un système de soutien Lel que celui que Merkel avait décrit. Qu'ils jouent dans la spermatogénèse un, rôle protecteur et nutritif à l'égard des élé- ments séminaux (rôle dont, il faut bien l'avouer, nous ne connaissons pas complètement les condi- tions), c'est une hypothèse que l’on peut accepter, mais qui ne saurait nous donner la véritable raison d'être de ces éléments etpar suite leur réelle signi- fication. La dénomination de cellules fixes que Sertoli leur avait imposée fait ressortir à la fois leur caractère le plus saillant et le mieux établi, c'est-à-dire leur immutabilité et leur quiescence au milieu des transformations, des multiplications des cellules séminales ; leur noyau, en effet, comme Sertoli l’a fait observer nettement le premier, est toujours identique à lui-même avec son nucléole caractéristique, et sans présenter jamais les figures qui distinguent la division : il demeure indéfini- ment au repos. Si done nous ne voyons pas les cellules fixes se transformer directement en quelqu'une des cellules séminales, non plus que se diviser pour produire des cellules-filles qui pourraient devenir cellules séminales, les liens de parenté nous paraissent nuls entre les cellules fixes et les générations sémi- nales successives. Et quand nous nous posons la question que plusieurs auteurs et nous-même avons soulevée: font-elles partie de la lignée séminale ou en sont-elles indépendantes ? y a-t-il, en d’autres termes, dans le tube séminifère adulte des Mammifères deux sortes de cellules absolument étrangères l’une à l’autre, des cellules séminales et des cellules fixes, ou bien n’y existe-t-il qu'une seule famille avec deux formes cellulaires? — la première réponse seule parait acceptable. Mais si, ne nous limitant plus à l'étude du tube séminifère sexuellement développé, nous examinons son développement, il devient évident que la seconde solution seule est autorisée par les faits. Ce sont ces faits qu'il nous faut apprendre à connaitre à présent. Faisons une coupe (ransversale du corps d'un embryon de Poulet au 4° jour de l’incubation, ou d’un embryon de Lapin du 13° jour. Nous trouvons (fig. 2, D) l'ébauche de la glande génilale représen- tée par un épaississement localisé de la bordure cellulaire où épithélium de la future cavité périto- néale (2) ; cet épaississement porte le nom d’épithé- lium germinatif \eg); 11 est constitué par de petites cellules épitheliales ordinaires {rès serrées. Déjà, à l’époque que nous considérons, ontparu, au milieu de ces petites cellules, d’autres éléments qui se distinguent par leur taille considérable etauxquels leur ressemblance avec des œufs a mérité le nom d'œufs primordiaux (o). Les œufs primordiaux ne peuvent provenir que des cellules épithéliales ordi- 628 D' A. PRENANT. — L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES paires dont ils sont une forme différenciée. À ce stade done nous n'avons qu'une seule sorte d’élé- ments cellulaires, puisque les uns et les autres.ont la même origine; mais ces éléments se présentent sous deux formes bien tranchées. Au-dessous de l’épithélium germinatif on ne Fig. 2. — Coupe transversale de la région génilale d’un em- bryon de Poulet en deux stades successifs (demi-schéma- tique). — I, stade le plus jeune. — e, épithelium péritonéal ; eg, épithelium germinatif correspondant à la glande géni- tale; o, œuf primordial parmi les cellules ordinaires de cet épithéllum germinatif; s/, stroma de la glande génitale, formé de cellules connectives embrvonnaires; V, vaisseaux sanguins ; W, région du rein primitif ou corps de Wolff. II. Stade plus avancé. — es, cordons sexuels. trouve que des cellules lächement unies entre elles (sé), formant un « tissu conneclif embryon- naire », un € mésenchyme ». D'après les idées qui sont actuellement en faveur, on peut admettre, bien que la preuve directe du fait n'ait pas été four- nie, que les cellules connectives embryonnaires sous-jacentes à l’épithélium germinalif ont été pro- duites par celui-ci à une époque très précoce du développement. C'est aux dépens de ces cellules, qui vont éprouver maintenant des modifications importantes, que se constituera le stroma c’est-à- dire le corps même de la glande génilale. On voit, en effet, bientôt (fig. 2, II) les cellules du mésenchyme situé au-dessous de lépithélium germinalif se serrer çà et là, de manière à former des cordons cellulaires denses, épithélioïdes sinon épithéliaux, dont l’aspect est comparable à celui de l’épithélium germinatif; ce sont les cordons sexuels (es). Tout comme les cellules de l’épithélium germinalif, celles des cordons sexuels se distin- guent en cellules épithéliales ordinaires et en grandes cellules ou œufs primordiaux; mais si leur forme est différente, il n’en est pas de même de leur véritable nature, puisque les unes et les autres dérivent en commun de cellules conneclives embryonnaires, qui procèdent toutes à leur tour des cellules de lépithélium germinatif. Jusqu’alors il n’y a dans la glande génitale au- cun caractère qui permette de reconnaître le sexe auquel elle appartiendra; la glande est dite indif- Jérente. Mais à présent elle se différencie en testi- cule. À cet effet, les cordons sexuels jusqu'alors pleins se creusent d'une lumière et deviennent ainsi des tubes, les fvbes séminifères embryonnaires. Comme les cordons sexuels dont ils dérivent, les tubes séminifères renferment les deux formes cel- lulaires que nous connaissons, affectant des rap- ports tels que leur ensemble rappelle les follicules de Graaf de l'ovaire, c'est-à-dire que l'œuf pri- mordial est entouré par une rangée de cellules épi- théliales, de même que dans l'ovaire l'œuf est revêtu de cellules folliculeuses (fig. 3, A). Quand, à partir du moment où les tubes sémini- fères ont la constitution que nous venons de leur trouver, on suit leur évolution pendant toute la vie embryonnaire et durant les premiers temps qui suivent la naissance, il arrive un moment où le tube ne se montre plus constitué que par une seule forme d'éléments cellulaires : fait que Balbiani a indiqué le premier et que nous avons confirmé ainsi que Benda. Ge sont pour Balbiani et pour nous-même les cellules épithéliales qui persistent et qui représentent cette forme cellulaire unique. Les œufs primordiaux, après avoir proliféré pen- dant tout le cours de la vie embryonnaire, mais d’aulant moins activement que l'embryon avançait en âge, ont fini par dégénérer et par disparaitre. Quoi qu'il en soit, le fait essentiel, c’est que les deux formes cellulaires que présente le testicule adulte devront se différencier plus lard aux dépens de cette forme unique, que nous observons actuel- lement, ce qui démontre incontestablement l'ori- gine commune et par suile l'unité de ces deux sortes de formes de cellules. Plus tard, en effet, et avant même que la fonc- tion sexuellese soit établie, nous voyons, dans le testicule d'animaux non encore sexuellement mûrs, se reconstiluer les deux formes cellulaires que nous avons trouvées jusqu’à présent. Les cellules épithéliales produisent en effet: d’une part des cellules à grand noyau clair remarquablement nu- cléolé, (fig. 3, B, 7) qui seront les cellules fixes de l’âge adulte et dans lesquelles nous n'avons pas de peine à reconnaitre les œufs primordiaux des pé- riodes précédentes; d'autre part une série d’élé- ments séminaux. Ces derniers apparaissent succes- . D' A. PRENANT. — L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES 629 sivement les uns après les autres, les spermato- gonies d’abord (B, sp), puis les spermatocytes (B, sp ‘), enfin les spermatides (GC, sp ?). Dans une Fis. 3. — Coupes ou porlions de coupes du tube séminifère d'un Mammifère à différentes périodes de son développe- ment. — A. Cobaye de 15 jours; cellules épithélialese, et œufs primordiaux 0. — B. Jeune Rat; à la périphérie, cellules fixes f: sp, spermatogonies; sp", spermal ocytes.— C. Jeune Rat; l cellules fixes: colonnes cellulaires formées à leur base de spermatogonies sp et à leur sommet de tides sp?, dont quelques-unes sont en voic de cence. série de tentatives de spermatogénèse de plus en plus complèles à mesure qu'elles se répètent, le canal séminifère gagne chaque fois un type cel- lulaire de plus. Toutefois, ces phénomènes que nous avons fait le premier connaître el que F. Her- mann à retrouvés depuis, ne sont pas effectivement préparatoires de la période spermatogénique. Cette « préspermatogénèse » n'est, en effet, qu'un essai infructueux de spermalogénèse; car tous les élé- ments séminaux formés successivement sont frap- pés de dégénérescence, et, Lant que l'animal n'est pas arrivé à l’époque de sa maturité sexuelle, le termeultime de la série séminale, lespermatozoïde, ne saurait être atteint. L'œuf primordial, devenu cellule fixe, demeure étranger à toutes ces manifes- lations de l'activité séminipare. La spermalogénèse ne se distingue pas aulre- ment de la préspermalogénèse qu'en ce que la lignée séminale se complète par le dernier terme, qui est aussi le terme essentiel, le spermalozoïde. Si plus tard, pour une raison quelconque (vieil- lesse, jeûne expérimental, maladie), la spermato- génèse s'arrête, on voit que les cellules fixes (œufs primordiaux) seules persistent. Ce sont alors ces éléments qui, par division, devront présider à la régénéralion des éléments du testicule (Sanfelice et à peu près aussi Grandis). En somme, nous voyons se reproduire, à toutes les périodes du développement de la glande géni- tale mâle, un élément de même forme, toujours caractéristique, l'œuf primordial des périodes em- bryonnaire el jeune, la cellule fixe de l’état adulte. Ilest le résullat de la différenciation sans cesse recommencée, que subit un autre élément, de forme banale, la cellule épithéliale des stades em- bryonnaire et jeune. Aux approches de la matu- rilé, les œufs primordiaux une dernière fois pro- duits persistent indéfiniment pour constituer les cellules fixes du testicule adulte, tandis que, d’au- tre part, les cellules épithéliales, donnent nais- sance à toule une série d'éléments à qui leurs caractères mäles nettement accusés méritent dès lors l’épithèle de séminaux. Quant à l'œuf primor- dial ou cellule fixe, quelle est cette forme énigma- tique, maintes fois reproduite et toujours sous le mème aspect, dont l'activité prolifératrice sans cesse décroissante s'éteint avec l'apparition de la fonction sexuelle? L'étude du développement du testicule nous a révélé ses principaux caractères, mais ne nous à pas appris sa vérilable nature, et sur ce point nous sommes aussi peu avancés qu'à la suite de l'examen de la constitution du tube séminifère adulte. Le parallèle de l'ovogénèse et de la spermalogénèse nous permettra au con- traire de proposer deux interprétations de cette remarquable forme cellulaire, entre lesquelles nous choisirons. En somme, el pour revenir à notre point de dé- part, malgré la complication que présente le canal séminipare des Mammifères, malgré l'apparence de deux calégories de cellules entrant dans sa cons- titution, l'étude da développement du testicule nous permel de considérer l’une de ces catégories cellulaires comme un rameau divergent, issu de la différencialion de l'autre, de façon que le schéma de la descendance du spermatozoïde de l'Ascaride se retrouve sans altération dans celui des Mammi- fères. C’est ce que fera comprendre le tableau sui- vant, en même temps qu'il résumera les données que nous avons acquises : TUBE TESTICULAIRE DE L’ASCARIDE ZONE GerMINAAUE NPC eee Zone de division ou de maluralion....... CANANUE ENEN TA ENENERREE ee spermalogonies É L Spermatlocytes spermatocytes spermalocytes Hi Spermatides spermatozoïdes 630 D' A. PRENANT. — L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES TESTICULE DES MAMMIFÈRES PÉRIODE INDIFFÉRENTE. Épilhélium germinalif.......... SIBERMATOGENESE ne ee ee Ce nmannate eee etes IT. — TRANSFORMATION DE LA CELLULE SPERMATIQUE EN SPERMATOZOÏDE OU ONTOGÉNÈSE DU SPERMATOZOÏDE. Ilest à peu près généralement admis aujour- d'hui que le spermatozoïde résulte de la transfor- mation lotale d’une spermatide, et que toute cette spermatide, par son noyau aussi bien que par son protoplasma, s'emploie à former un spermatozoïde. Mais quant aux détails de l'emploi des diverses parties constituantes de la cellule, quant à la facon dont elles se retrouvent transformées dans le sper- matozoïde, quant au mode de formation, en d’au- tres termes, des différentes parties constitutives du spermatozoïde, les opinions divergent de toutes parts, et l’on ne s'accorde que sur Les points tout à fait essentiels. Pour essayer de fixer les idées dans une étude où les faits observés sont presque aussi nombreux que les objets étudiés, nous procéderons de la façon suivante. Nous mettrons en regard d’une part une cellule, la spermatide en particulier avec ses éléments composants, et d'autre part un spermalozoïde avec la plus grande complexité de structure que nous lui connaissions, ef nous ver- rons ensuite comment l’une devient l’autre. À.— Au repos toute cellule différenciée (fig. 4, À se compose d'un noyau el d’un corps protoplasmique ou protoplasma bien dislinets. Le noyau qu'entoure une «membrane nucléaire » (m) renferme deux subs- tances différentes : l'une est « chromatique », c'est- à-dire se teint vivement par certains agents colo- rants; l’autre est « achromalique », c’est-à-dire ne prend dans les mêmes conditions aucune colora- lion. La première substance ou «chromatine » imprègne une parlie achromalique condensée sous forme de charpente réticulée ou sous la forme de boyau pelotonné: les deux ensemble constituent le «réseau oule boyau chromatique » du noyau (7); le reste de la substance achromatique cons- ülue une sorte de « suc nucléaire » qui baigne les cellules épithéliales (2 X \, œufs primordiaux N X œufs primordiaux cellules épithéliales l S Ÿ cellules épithéliales 24 + … Y N ones reves cellules épithélialcs œufs primordiaux Ë Ÿ N, Ÿ N “oooeduinano spermatogonies cellules fixes [H Sondo oo co spermatocytes f L spermatides Le V spermatozoïdes mailles du réseau chromatique. Le corps protoplas- mique présente, lui aussi, une structure réticulée ; les mailles de son réseau, lequeln'est pas chroma- Fig. 4. — Division cellulaire (figures demi-schématiques). = À, cellule au repos; », membrane du noyau; 7, réticulum chromatique du noyau; €, corps accessoire. — B, début de la division; e, l’un des deux corps accessoires; s, segments chromatiques jumeaux résultant de la segmentation trans- versale suivie de la fissuration longitudinale du réticulum chromatique. — C, f, début du fuseau. — D, j, fuseau défi- nitivement constitué; €, l'un des corps accessoires devenu corpuscule polaire. Cheminement des segments jumeaux vers les pôles du fuseau; à droite du fuseau, l’un des seg— ments ne s'est pas encore écarté de son jumeau. — E, fin de la division; #, noyau-fille; f, restes du fuseau. La divi- sion du protoplasma en-deux moitiés est en train de s’opérer. tique, sont occupées par une substance molle. Dans le protoplasma est logé un corps de figure très particulière, le «corps ou noyau accessoire » (c), qui parait formé lui-même par un corpuseule et par un filament. Les phénomènes de la division d'une cellule ainsi constituée sont connus, grâce aux recherches de Flemming, E. van Beneden, Guignard, C. Rabl, Boveri, et de Lant d’autres, parmi lesquels il con- vient de ciler Platner, qui a fait connaître récem- ment une série de faits intéressants, que nous reproduirons, D' A. PRENANT. — L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES 631 La division de la cellule est annoncée (B) par celle du corpuseule du noyau accessoire, dont l'é- tude est de date toute récente. Le corpuscule se par- tage en deux (E. van Beneden, Boveri, Platner), en même lemps que le filament du noyau acces- soire se segmente en un certain nombre de bäton- nets (Platner). Les bâätonnets se disposent en deux groupes, et chacun d’eux subit une fissuration lon- gitudinale qui le partage en deux éléments paral- lèles ; puis les deux groupes formés de demi-bäton- nets s’éloignent l’un de l’autre, accompagnés par les corpuscules (B,e, et C, f), en glissant à la surrace du noyau sur laquelle ils laissent une trainée de substance plus colorée (Platner) !. Alors parait dans l’intérieur du noyau une figure en forme de fuseau, le «fuseau achromatique » (GC, f), vraisemblable- ment formé aux dépens de la trainée dontil vient d'être question (Platner). Le fuseau constitué (D, f, montre à chacun de ses pôles un centre plus clair, le « corpuseule polaire », dans lequel nous recon- naissons l’un des deux corpuscules précités, autour duquel irradie l’un des groupes de bätonnets issus du noyau accessoire (D, c). Il en résulle à chaque pôle du fuseau la présence, signalée dès longtemps, d’une sorte d'étoile ou d’aster sur laquelle les recherches de E. van Beneden, Boveri, Vejdovsky, Kôlliker, Vialleton, Garnault, Flemming, Guignard, Henneguy, ele., ont attiré l'attention, en faisant connaitre son mode de formalion. Pendant ce temps le réseau ou boyau chromatique du noyau subissait une série de transformations connues de- puis longtemps et rassemblées sous le nom de «caryokinèse » (mouvements dont le noyau en di- vision est le siège). Il se partage transversalemeni en un certain nombre de segments chromaliques, dont chacun ensuite se fissure longitudinalement en deux demi-segments jumeaux parallèles (B, s). Chaque demi-segment s'éloigne de son jumeau en glissant le long des filaments du fuseau, et forme avec ses congénères un groupe chromatique qui se dirige vers le pôle du fuseau (D), pour y devenir le début de l’un des deux noyaux-filles (E, »). Dès lors la division de la cellule n’a plus qu'à se com- pléter par l’étranglement du corps protoplas- mique, qui vient altribuer à chaque noyau fille la moitié du protoplama de la cellule-mère (E). Ajoutons que la portion équatoriale du fuseau achromatique (E, f) se conserve temporairement dans la cellule-fille, et que, suivant Platner, elle forme, après remaniements, le noyau accessoire de celle-ci. 1 Ces phénomènes de division du corps accessoire n’ont pas été reconnus par certains auteurs. Guignard, EF, Hermann ont toujours trouvé dans une cellule au repos deux corps accessoires à côté du noyau, et ne les ont jamais yus pro- venir de la division d'un corps unique. Munis de ces données sur la division cellulaire, nous pouvons établir le bilan de la cellule-fille du spermalocyte, de la spermatide. Cette cellule, qui ne doit plus se diviser, mais qui se transformera directement en spermatozoïde, doit nécessaire- ment contenir les parties suivantes, qui lui ont été acquises lors de la dernière division du spermato- cyte dont elle est issue : le noyau, le protoplasma, la partie équatoriale du fuseau achromatique trans- formée en noyau accessoire, le corpuscule polaire, avec les bätonnels qui irradient autour de lui. Nous verrons comment Platner veut retrouver ces différentes formations dans le spermatozoïde. B. — Le spermatozoïde est le plus communé- ment un élément filiforme, auquel on distingue une partie antérieure renflée en fête, la portion postérieure étant effilée en une queue. La tête, de forme très variable, tantôt arrondie ou plus souvent allongée, rectiligne ou spiroïde, offre des particularités de structure qui sont les suivantes. La partie antérieure de la tête peut être élirée en une « pointe céphalique » qui diffère du reste de la tête par ses réactions vis-à-vis des agents colorants. Ou bien l'extrémité antérieure de la tête présente un «bouton céphalique » sous la forme d'un petit nodule clair et brillant. On peut encore trouver la tête recouverte à sa partie anté- rieure d'une « coiffe céphalique ». Dans certains cas on peut déceler autour de la tête du spermato- zoïde l'existence d’une enveloppe ‘. La queue du spermatozoïde, dont les recherches de plusieurs auteurs et celles en particulier de Ballowitz nous ont révélé la constitution, est essentiellement formée d’un « filamentaxile » en- touré d’une « enveloppe » ou bordé par une lon- gue « membrane ondulatoire ». Le filament axile possède une structure fibrillaire à laquelle il doit la contractilité. L'enveloppe forme autour du filament axile une gaine lisse et continue, ou bien est représentée par un filament enroulé autour de lui en une spirale très surbaissée. On peut distinguer dans la queue plusieurs régions : celle qui est voisine de Ja tête à laquelle elle s’attache est la « pièce d'union » ou «pièce intermédiaire », souvent très courte ; elle est suivie par la « pièce principale » de la queue ; celle-ci se termine à son tour par une « pièce ter- minale » dans laquelle, l'enveloppe ayant cessé d'exister à ce niveau, le filament axile est à nu. Le filament axile de la queue s’insère sur l’extré- mité postérieure de la tête par un « bouton cau- dal », de structure parfois très compliquée; à ! Tous ces détails de structure ne se présentent pas à la fois sur un méme spermatozoïde, D'autre part ils n’existent que sur le spermatozoïde incomplè tement achevé, et dispa- raissent plus tard, 632 D' A. PRENANT. — L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES l’union de la pièce intermédiaire et de la pièce principale de la queue s’observe un autre nodule qu'on peut appeler « bouton intercaudal » ou «intermédiaire », silué qu'il est entre deux ré- gions de la queue. Rien n’est plus variable d’ailleurs, malgré une structure fondamentale identique, que la forme des spermatozoïdes, et ne pouvant songer ici à suivre cette forme dans ses innombrables variations, nous devons nous en tenir à la description qui précède, plus particulière aux Vertébrés. C. — Il nous reste à retrouver dans les diffé- rentes parties constitutives du spermatozoïde les divers éléments dont se composait la spermatide. Il y a dans l’histoire de l’ontogénèse du sperma- tozoïde des faits bien établis et d’autres qui sont encore l’objet de nombreuses controverses. Il est à peu près élabli que la tèle et la queue du sper- matozoïde dérivent respectivement du noyau et du protoplasma de la spermatide. On à soutenu ce- pendant (Külliker, Fürst, Niessing) que le sperma- tozoïde tout entier est de provenance nucléaire. Ou bien au contraire on à fait intervenir dans sa formation le protoplasma exclusivement: opi- nion qui est moins acceplable encore que la pre- mière. (« On ne peut admettre qu'avec peine, dil Waldeyer dans un excellent résumé de la structure et du développement des spermatozoïdes !, que de telles différences, des différences d'une impor- lance fondamentale, puissent exister en fait dans le développement d'une formation aussi univoque dans le monde animal entier et en parte aussi dans le monde végélal, que le sont les spermato- zoïdes. Mais nous sommes provisoirement hors d'état de dissiper ces contradictions. » Le phénomène le plus important et aussi le pre- mier en date dans la lransformalion de la sper- matide, c’est l'allongement de celle-ci (fig. 5). Le noyau s'étire et prend, si la Lèle du spermatozoïde mûr a la forme filamenteuse, une figure ellipsoi- dale, puis cylindrique, en même temps qu'il di- minue de volume. Celte diminution de volume se fait au prix d’une condensalion de toutes les par- ties du noyau, qui en mème temps se fusionnent en une masse homogène, et elle s'accompagne d’une modification chimique que traduisent des changements de coloration. Voilà ce que l'on peut dire de plus général de la destinée du noyau. Quant au protoplasma, il se réduit lui aussi de plus en plus en subissant des transformations pro- fondes, et forme, dit-on communément, la queue tout entière et peut-être aussi une enveloppe de la têle du spermatozoïde. Ce qui demeure indécis ‘ Wazpeyer. Bau und Entwicklung der Analom, Anzeiger, 1887, n° 12, Samenfüiden. cependant, c'est la question de savoir si dans la queue le filament axile et la gaine de ce filament sont tous deux d'origine protoplasmatique, ou si la gaine seule reconnait une (elle origine. Cette seconde manière de voir a été soutenue en effet, et l’on à regardé le filament axile comme produit par l'issue de la substance chromatique hors des limites du noyau de la spermatide. Ce qui est bien certain en lout cas, c’est que le protoplasma de la spermalide est ulilisé pour la formation de la gaine du filament axile. Quelle est maintenant l’origine des différentes formations accessoires de la tête et de la queue Fig. 5, — Ontlogénèse du spermalozoïde ou b'ansformations de la spermatide chez les Mollusques pulmonés. — À, la spermatde {elle qu’elle se présente récemment formée par division; €, corpuscule polaire; fe. restes du fuseau en train de s’agencer en un corps accessoire — B, allongement et homowénéisation du noyau: bc,bouton céphalique résultant du corpuscule polaire du stade précédent; /c, corps acces- soire de la spermatide. Début du filament axile de la queue. Bouton caudal bc’ par lequel le filament axile s'insère au pôle caudal de la tête. Bouton intercaudal bi à l'extrémité du fila- ment axile. — C et D, le noyau prend la forme de la tête du futur spermatozoide. Etirement du protoplasma. Désagréga- tion du corps accessoire. Le filament axile est bien constitué. Il se continue au delà du bouton intercaudal en formant la pièce terminale de la queue. — KE, la tête du spermatozoïde a pris sa forme définitive. Etirement très considérable, et enroulement du protoplasma autour du filament axile pour former l'enveloppe ou le filament spiral de la queue. L’extré- mité du protoplasma lose le reste du corps accessoire désa- srégé et en voie de disparition. — F, spermatozoïde définitif. Filament spiral autour du filament axile. du spermatozoïde, complètement ou à peu près complétement développé? C'est ici que surgissent D' A. PRENANT. — L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES 633 les contradictions. Du corps accessoire, par exem- ple, on fait dériver tour à tour la tète du sperma- tozoïde (Langerhans, Duval, Metschnikoff, Grob- ben), le capuchon céphalique (Nussbaum), la pièce d'union (Bütschli, v. La Valette Saint-George), l'enveloppe du filament axile (Platner et nous), la pièce d'union et l'enveloppe du filament axile à la fois (F. Hermann). Il semble aujourd’hui, qu'en posant la question autrement et aussi plus rigoureusement qu'on ne l'avait fait jusqu'alors, la solution définitive du problème ne puisse pas se faire attendre longtemps. C’est, à notre sens, le mérite de Platner d’avoir compris qu'il fallait non pas se demander d'où proviennent les différentes formations que présente la tête du spermatozoïde; mais, élant donnés certains corps contenus dans la sperma- tide, chercher ce qu'ils deviennent. En suivant cette voie, que nous croyons féconde, Plalner a vu que, chez les Mollusques pulmonés, le corpuscule polaire devient le bouton céphalique du sperma- tozoïde et même la partie antérieure de la tête ou la pointe céphalique, que le corps accessoire contribue directement où indirectement (indirec- tement avons-nous pensé pour notre part) à former l'enveloppe du filament axile. Chez les Papillons, les filaments du fuseau, aux dépens desquels se forme le noyau accessoire de la spermalide, cons- tituent deux corps dont un se transformera pour donner l'enveloppe du filament axile, tandis que l’autre sera le bouton caudal par lequel ce fila- ment s’insère sur la queue. En manière de conclu- sion générale à ses recherches, Platner fait ob- server que les différentes parties constitutives de la spermalide se retrouvent dans le spermatozoïde en la même situation qu'elles occupaient dans la spermatide (fig. 5). III. — PARALLÈLE DE LA SPERMATOGÉNÈSE ET DE L'OVO- GÉNÈSE, OU COMPARAISON MORPHOLOGIQUE DU SPER- MATOZOÏDE ET DE L'OŒUF,. On a cherché de tout temps à comparer la sper- malogénèse à l’ovogénèse, et le spermatozoïde à l'œuf. On sait que l’œuf, avant d’être fécondé, subit une division deux fois répélée. Cet œuf O se divise en effel une première fois en deux cellules très iné- gales À et B. La cellule À, plus petite, est expulsée pour former le premier globule polaire, lequel en- suite peut encore se partager en deux globules polaires plus pelits «& et a'. La cellule B se divise elle à son tour en deux cellules inégales, dont l’une est expulsée et forme le deuxième globule polaire db, tandis que l’autre demeure et constitue l'œuf mûr 0. Nous obtenons donc finalement quatre cellules-petites-filles de l'œuf O : ce sont les élé- REVUE GÉNÉRALE, 1891, ments a, 4, beto. Les cellules 4, a’ et b sont re- Jetées comme inutiles et représentent des œufs avortés; la cellule o seule est fertile, seule apte à être fécondée. Ce qui caractérise ces divisions éprouvées par l'œuf, c’est qu'elles se font d’une façon continue, sans interposition d’un stade de repos. Comme maintenant la partie essentielle de toute cellule, la chromatine du noyau, n’a pas le temps de se régénérer entre deux divisions, puis- que celles-ci se font sans interruption, il s’en suit que les cellules-filles A et B, issues de la première division, ne renfermeront que la moitié de la chro- maline contenue primitivement dans le noyau de la cellule O, et les cellules-petites-filles 4, 4’, b, 0, produites par la seconde division, que chacune un quart de la masse chromatique primitive. Dans l'œuf définitif o, la chromatine de l’œuf primitif O se trouvera donc réduite au quart : fait sans exemple ailleurs que dans la formation des élé- ments sexuels, qui sans contredit a une portée physiologique considérable. On a trouvé d'autre part que les deux dernières divisions éprouvées par les spermatocytes, à la suite desquelles se forment les spermatides et par conséquent les spermatozoïdes qui en dérivent, sont entièrement comparables à celles qui donnent naissance à l'œuf et aux globules polaires. Nous avons ici aussi un spermatocyte S de même valeur que l'œuf primitif O, qui se divise en deux sperma- tocytes À et B; chacun de ces derniers se partage à son tour en deux cellules s et s',s'ets!", qui sont les spermatides, toutes équivalentes et toutes capables de se différencier en un spermatozoïde fertile. Comme dans le cas de l’œuf et pour les mêmes raisons, chacune de ces spermatides et par suite chacun de ces spermatozoïdes ne renfer- mera que le quart de la chromatine contenue dans le spermatocyte-mère (Flemming, Platner, Carnoy, O. Hertwig). | Ainsi les phases dernières de la spermatogénèse et de l’ovogénèse concordent absolument. De la double division du spermatocyte tout comme de celle de l'œuf primitif résultent quatre cellules- petites-filles, les spermatides dans le cas mâle, les globules polaires et l'œuf mûr dans le cas femelle, Il n’y a que cette différence, que chez le mâle les quatre cellules sont fertiles, tandis que chez la femelle une seule est apte à la fécondation; dif- férence qui reconnait pour causes des nécessités physiologiques : &« La dissemblance des cellules sexuelles, mâles et femelles, dit O. Hertwig, s’ex- plique parce qu'il s’est fait entre les deux une division du travail, en rapport avec des rôles dif- férents à remplir. La cellule femelle a pris pour fonction de pourvoir aux substances qui sont né- cessaires pour la nultrilion et l'accroissement du 19° 63% D' A. PRENANT. — L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES protoplasma cellulaire dans la marche rapide des processus embryologiques. C'est pourquoi elle a emmagasiné dans l'ovaire du matériel vitellin, destiné à servir de réserve pour l'avenir, et elle est devenue conformément à cela grosse et immobile. Mais comme maintenant l’union avec une deuxième cellule appartenant à un autre individu est néces- saire pour donner lieu à un processus embryolo- gique, et que des corps immobiles ne peuvent se réunir, l'élément mâle, pour s'acquitter de ce deuxième rôle, s’est modifié dans ce sens. Pour acquérir la mobilité lui permettant de s'unir avec la cellule ovulaire immobile, il s’est trans- formé en un filament contractile et s’est complè- tement libéré de toutes les substances qui, telles que le matériel vitellin par exemple, feraient obs- tacle à ce but essentiel. » Ainsi la concordance, est absolue entre les phé- noménes ultimes de la spermatogénèse el ceux de l’ovogénèse. Les produits sexuels,le spermatozoïde et l'œuf, sont équivalents, et les processus par lesquels ils se forment sont semblables. Equiva- lentes aussi seront donc les cellules-mères dont ils dérivent, le spermatocyte et l'œuf non mûr. Mais celte équivalence, qui est toute physiolo- gique, ne se double pas nécessairement d'une équivalence morphologique, d’une homologie. Il est possible que les cellules du testicule et de l'ovaire, qui donnent respectivement naissance au spermatocyle et à l’ovule définitif, soient très éloignées l'une de l’autre, mais que leurs produits se rapprochent jusqu'à se fusionner, en suivant à partir d’un cerlain moment de leur évolution le même chemin, le seul possible pour des raisons physiologiques : manière imagée de s'exprimer pour faire comprendre que les phénomènes ?n ex- tremis de l’ovogénèse et de la spermalogénèse peu- vent être les mêmes,sans que le reste du processus soit identique dans les deux cas. Que trouvons-nous dans toule ovogénèse, ou du moins dans les cas les plus fréquents de l'ovogé- nèse ? Aux dépens de l’épithélium germinatif se constituent deux formes de cellules; les unes, grandes et peu nombreuses, sont les cellules ovu- laires, les œufs; les autres, petites et plus nom- breuses, sont les cellules folliculeuses, qui forme- ront plus tard une enveloppe autour de chaque œuf ?. Dans la spermatogénèse, il y à habituellement aussi production de deux formes de cellules, chez les Mammifères par exemple : les unes, plus grandes et plus rares, sont les œufs primordiaux 1 Nous examinerons plus loin le cas où toutes les cellules de Pépithélium germinatif se transforment en œufs, où par conséquent il m’existe pas de cellules folliculeuses, où l'œuf est dépourvu de follicule. de l’âge embryonnaire et du jeune àge, les cellules fixes de l’état adulte, nos éléments énigmatiques en somme ; les autres, plus petites et plus abon- dantes, sont les cellules épithéliales de l'embryon et de l'animal jeune,les cellules séminales de l’état adulte !. Comme maintenant nous avons le droit de faire une comparaison, bien plus de poser une équation entre le testicule et l'ovaire, puisqu'ils dérivent d’une même ébauche primitivement indifférente, il devient alors nécessaire que leurs éléments épi- théliaux soient aussi équivalents, et nous pouvons écrire : cellules séminales et formes énigmaliques du testicule = ovules + cellules folliculeuses de l'ovaire. Ainsi posé, le problème comporte deux solutions?. Nous pouvons faire : cellules séminales — ovules, ou bien : cellules séminales cellules folliculeuses; les formes énigmatiques du testicule deviennent égales alors, dans le premier cas, aux cellules folli- culeuses de l’ovaire, et, dans le second, aux ovules. A. La première solution se présente tout natu- rellement, et de fait a élé généralement adoptée. En effet, après ce que nous venons de voir des phénomènes ultimes de la spermatogénèse compa- . rés à ceux de l’ovogenèse, et conformément à l'é- quivalence physiologique de chaque spermatozoïde et de l'œuf mûr, il parait satisfaisant de penser qu'à un moment quelconque de l’évolution, les cellules séminales et les ovules se correspondent chez le màle et chez la femelle et même s'équiva- lent. D'autre part notre cellule énigmatique, indi- rectement utile dans la spermatogénèse, soit comme élément protecteur, soit comme cellule nu- tritive, revêlue dans toule la série animale d’un caractère accessoire, parait bien être le représen- tant de la cellule folliculeuse de l’œuf, qui, elle aussi, fonctionne comme cellule protectrice ou nourricière de l'œuf, et ne joue dans l’ovogénèse qu'un rôle secondaire. Aussi s’explique-t-on que l’on ail désigné sous le même terme de cellule fol- liculeuse la cellule accessoire de l'ovaire et celle du testicule. (v. La Valette Saint-George, Swaen et Masquelin, F. Hermann, etc. *). 1 Nous avons décrit la spermatogénèse de l’Ascaride du Cheval pris pour type, comme se faisant avec le concours d’une seule forme d'éléments. Nous y reviendrons tout à l'heure. : 2 Cette équation à deux solutions n’est, bien entendu, qu’une image alwébrique de la question, que nous avons schématisée mathématiquement pour la mieux poser. 3 La cellule folliculeuse du testicule a été retrouvée dans un grand nombre de groupes de la série animale; chez tous les Vertébrés, chez les Arthropodes, les Mollusques Gastéro- podes, les Spongiaires, et aussi chez les Annélides où cepen- dant elle se présente avec des caractères très particuliers. Il est bien établi que les éléments, à qui l’on impose la signi- fication de cellules folliculeuses, sont dans les divers groupes où on les rencontre une seule et même formation. D' A. PRENANT. — L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES 635 B. Bien que la première solution ait pour elle toutes les apparences de l’exactitude, nous propo- sons cependant de la remplacer par la seconde, c’est-à-dire de considérer les formes énigmatiques du testicule comme représentant non plus les cel- lules folliculeuses de l'ovaire, mais les œufs mêmes. Cette deuxième manière de voir n’a pasle mérite d'une entière nouveauté; elle a été formulée déjà. Mais, à cette époque, elle n’était appuyée que par des faits insuffisants ou même actuellement con- trouvés. Fondée sur de telles bases, elle ne pou- vait revêtir qu'une forme incomplète où même inexacle. Aujourd’hui que nous sommes en pos- session de données plus étendues, et que les don- nées erronées ont été écarltées, nous pouvons re- prendre l'interprétation qu'on avait cru devoir abandonner, et chercher à l'appliquer aux faits dont nous disposons actuellement. S'adressant ainsi à des faits plus nombreux, elle n’en aura que plus de solidité, et d'autre part de la nouveauté des choses à expliquer tirera peut-être quelque originalité. Sedgwick-Minot a pensé que chez les Insectes nos cellules énigmatiques du teslicule étaient l’é- lément femelle de la cellule-mère testiculaire pri- mordiale, les cellules séminales desquelles dé- rivent les spermatozoïdes représentant l'élément mâle. D'autre part les globules polaires sont l’élé- ment mâle de l'œuf, et l'œuf mûr représente l’élé- ment femelle. Mais si, dans la Lhéorie de S. Minot, nous sommes disposé à admettre l’équivalence de la cellule énigmatique du testicule avec l'œuf", il nous faut rejeter celle des cellules séminales avec les globules polaires. Car, d’après ce que nous a appris la comparaison des derniers phénomènes de l'ovogénèse et de la spermatogénèse, les glo- bules polaires représentent chez la femelle, non pas des cellules séminales, mais leurs produits termi- naux, les spermatozoïdes. E. van Beneden a émis une opinion analogue à celle de S. Minot, qui doit être écartée pour les mêmes raisons. Sabatier a émis une théorie remarquable, dont voici les points essentiels. Dans le protoplasma d’une cellule-mère primordiale prennent naissance, dans le cas femelle, des cellules nucléées qui émi- grent de cette cellule et forment les cellules folli- culeuses de l’œuf, ce qui reste de la cellule-mère constituant l’œuf définitif. De même, dans le cas male, se forment à l'intérieur d'une cellule-mère primordiale des spermatozoïdes qui émigrent de la cellule tout comme les cellules folliculeuses ; ce qui subsiste de la cellule-mère représente un élé- 1 Non pas toutefois avec l'œuf mür, mais avec l'œuf non encore muüri, ment comparable à l'œuf définitif de la femelle, et qui n’est autre que notre forme cellulaire énigma- tique. du testicule, prenant ainsi la signification d’élément testiculaire femelle. Si nous acceplons cette spéculation dans ce qu'elle a d’exelusivement théorique, nous devons rejeter les faits sur lesquels elle s'appuie. Nous gardons en un mot le plan, et le réalisons avec d’autres matériaux. Balbiani a présenté à son tour des considéra- tions théoriques qui méritent de prendre place à côté de celles qui précèdent. Pour lui aussi, il existe dans chaque glande génitale deux éléments, l’un mäle, l’autre femelle. Dans le cas du testicule, il y a un ovule, qui est l'élément femelle, et des cellules épithéliales ou séminales, qui sont la par- tie mâle. Dans le cas de l'ovaire, l'élément femelle, c'est l'œuf; quant à l'élément mâle, Balbiani veut le trouver dans une formation (dans une vésicule qui porte son nom) logée au sein du protoplasma de l’œuf. Nos connaissances actuelles sur cette formalion condamnent l'interprétation que Bal- biani a voulu en donner. En somme, nous voyons que, parmi les théories exposées ci-dessus, une seule, celle de Sabatier, a la forme complète que doit prendre la deuxième solution de notre problème. Mais nous avons dit aussi que les faits qui forment les bases de cette théorie sont trop gravement compromis pour que nous ne cherchions pas à l’asseoir sur d’autres fondements. Eprouvons la valeur de la théorie de Sabatier, qui est donc aussi celle que nous adoptons, en l'appliquant à l’un des exemples les mieux connus, celui de la spermatogenèse ou plus exactement de l’évolution du testicule des Mammifères, que nous avons appris à connaitre déjà, du moins dans ses plus grandes lignes, et que nous résumerons ici à plus grands traits encore. Il y a d’abord, aux dé- buts de l'ébauche de la glande génitales, des cel- lules épithéliales morphologiquement indifférentes et réellement épithéliales, et qui demeureront telles jusqu'aux approches de la puberté. Par dif- férenciation de certaines de ces cellules ou plutôt de quelques-unes de leurs cellules-filles se formeut de grands éléments que l’on à nommés œufs pri- mordiaux pour rappeler par là leur ressemblance avec des œufs. Ces éléments fonctionnent pendant quelque temps comme cellules reproductrices gé- nitales, en produisant par leurs divisions des cel- lules semblables à elles-mêmes ; par là elles jus- üifient une fois de plus la dénomination qui leur a été donnée, car les œufs ne sont d’une façon géné- rale que des formes cellulaires reproductrices. A mesure que l'embryon avance en âge, l’activité prolifératrice des œufs primordiaux diminue, et 636 D' A. PRENANT. — L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES leur vitalité devient moindre, si bien qu'on les voit subir des phénomènes de dégénérescence et s’a- trophier. En tout cas, il arrive un moment où il n’y a plus, dans le tube séminifère, que des cellules épithéliales. Celles-ci, en même temps qu'elles s’essayent à donner naissance à une lignée sémi- nale,et qu’elles manifestent ainsi par leurs produits un état de différenciation sexuelle que l’on ne pou- vait leur soupçonner jusqu'alors, forment d’autre part une dernière fois des œufs primordiaux qui persisteront jusqu’à la fin de la période spermato- génique, sans plus jamais se diviser, et constitue- ront les cellules fixes de l’état adulte. Dans cette évolution,ce qui nous frappe surtout, c'est la reproduction à différentes reprises d’une forme cellulaire (œuf primordial) semblable à un œuf; c’est aussi l’affaiblissement progressif de la puissance reproductrice de cet élément, et la dis- parilion brusque de cette puissance à l’époque de la puberté. C’est, d'autre part, pendant toute la période embryonnaire et jeune, la constilution in- différente de la plupart des éléments du testicule qui se conservent sous la forme de cellules épithé- liales ; et presque subitement dans une phase ra- pide de tentatives spermatogéniques, l'affirmation chez ces cellules d’un état de différenciation pro- fonde, jusqu'alors fruste, mais se manifestant tout à coup par le caractère nettement séminal des élé- ments qu'elles viennent de produire. Il nous sem- blerait voir comme un anlagonisme, ou tout au moins un balancement entre les œufs primordiaux et les cellules épithéliales ou séminales dans leur vitalité, leur différenciation, leur proliféralion. Comme maintenant nous voyons les cellules épithéliales produire, avant de disparaitre du tube séminifère, des éléments séminaux, se trans- former done en éléments séminaux, nous leur reconnaissons un caractère sexuel mäle. Et nous donnons à l’autre élément, à l'œuf primordial du testicule impubère et à la cellule fixe du testicule mür le caractère sexuel femelle. Nous en faisons l'élément femelle du testicule, dont l'élimination par voie de division cellulaire, la seule histologi- quement possible (contrairement à Sabatier), per- met aux autres éléments de la glande, aux cellules épithéliales, de se différencier sexuellement. Il faut bien dire, d’ailleurs, que nous ne don- nons à ce terme « femelle » qu’une valeur relative, et relative à l'élément mâle. L'élément femelle du testicule, en effet, n’est qu'une différence. Comme les cellules épithéliales sont devenues mâles en prenant le type séminal et que nous partons d’un stade indifférent, ce qui resle du complèxus cellu- laire de la glande génitale doit être forcément considéré comme femelle, encore que les carac- tères femelles de ce résidu sexuel n’arrivent jamais à se manifester, encore que l’élément femelle ne donne jamais, si l’on peut dire, de preuves de son sexe. Il résulte de là cette conséquence, que plus les éléments màles seront mâles, moins ainsi l'élément femelle sera femelle. C’est là, non pas une simple déduction de l'esprit, mais un fait, car l’on peut montrer l'effacement progressif du féminisme de l'élément femelle. L'œuf, l'élément femelle par excellence, est en effet une forme cellulaire repro- ductrice. Or, l'élément femelle du testicule, l'œuf primordial, se reproduit d'autant moins aclive- ment que l’on s'adresse à un stade plus avancé, et il devient inactif quand les éléments mâles, lors de la spermatogénèse, manifestent leur activité. Une autre conséquence est celle-ci : La sexualité male d’un individu ne peut lui être acquise tout à coup ni tout d'un coup; il ne devient pas subite- ment male, et il ne conquiert pas toute sa sexua- lité à la fois. Mais à mesure de l'élimination des œufs primordiaux ou éléments femelles, le carac- tère mâle des éléments épithéliaux demeurés en place se purifie ; ce sont ces éléments qui réelle- ment se différencieront sexuellement d’une façon durable, mais lente, tandis que la différenciation rapide des cellules femelles n’est qu'éphémère. Tel est, dans le cas mâle, le processus de matura- tion, c’est-à-dire de différenciation du produit sexuel ; il n'y en a peut-être pas d'autre à cher- cher ‘. Et maintenant, l'hypothèse de l'existence de l'élément femelle du testicule exclut-elle l'idée de toute utilisation de cet élément comme cellule protectrice ou comme cellule nourricière ? Nulle- ment. Nous pensons même qu'un pareil rôle doit exister, puisque la cellule femelle du testicule, si elle était privée de toute fonction, aurait dû dis- paraitre. Ainsi, dans toute glande génilale indifférente, dans tout testicule ou ovaire jeune, dans tout testicule ou ovaire adulte, nous avons deux formes de cellules : des petites et des grandes, celles-là nombreuses, celles-ci plus rares. Dans la glande en aclivité ce seront tantôt les petites, tantôt les grandes qui seront l'élément essentiel, sexuelle- ment nécessaire, tantôt les petiles, tantôt les grandes qui seront sexuellement accessoires. Dans le testicule, les petites sont essentielles {cellules épithéliales du testicule embryonnaire el jeune, cellules séminales du testicule adulte) ; les grandes sont accessoires (œufs primordiaux du testicule PR SR RTIEEM EC Te 1. Nous avions déjà exprimé ailleurs cette idée que la maturation des spermatozoïdes s’acquiert peu à peu à travers les longues étapes de l'histogénèse du testicule (voir : Élé- ments dembryologie de l'Homme et des Vertébrés, Paris, Steinheil, 1891, pp. 41 et 12). D' A. PRENANT. — L'ORIGINE ET LA FORMATION DES SPERMATOZOIDES embryonnaire et jeune, cellules fixes du testicule adulte). Dans l'ovaire, les grandes sont essen- tielles (ovules de l'ovaire embryonnaire et jeune, œufs non mürs de l'ovaire adulte); les petites sont accessoires (cellules folliculeuses). On pourra donner le nom générique de « cellule folliculeuse » ou de «cellule végétative » (Benda) à l'élément accessoire, celui de « cellule sexuelle » ou de « cellule germinative » (Benda) à l'élément essen- tiel. 11 devient alors très remarquable que l’élé- ment folliculeux et l'élément sexuel sont faits dans l'un et l’autre sexe avec des cellules différentes tant par leur forme que par leur nombre. Il nous reste à examiner l'exception (exception fréquente) à la règle que nous venons d'établir, c’est-à-dire à considérer le cas où la glande géni- tale mâle ne renferme bien certainement que des éléments mâles et manque d'élément femelle. Ce cas, nous l'avons étudié chez l’Ascaride dans la partie descriptive de cet article, au paragraphe I. On peut penser, relativement à cette exception, que, comme le testicule et l'ovaire doivent chez un animal donné être constitués suivant le même plan, comme, en d'autres termes, le testicule et l'ovaire sont histologiquement et physiologique- ment symétriques, si, chez l’Ascaride, la cellule femelle du testicule fait défaut, il ne doit pas y avoir dans l'ovaire de cellule mäle, c'est-à-dire que l'œuf ne doit pas être entouré de cellules folli- culeuses. Nous serions ainsi en présence d’un cas d’ovogénèse et de spermatogénèse plus simple que ceux examinés plus haut. Cette disposition peut être d’ailleurs primilive et, en se compliquant, avoir conduit à celle que nous avons étudiée précé- demment ou bien, elle peut être le résultat de la simplification de cette dernière. Or pour l’Ascaride nos prévisions sont exactes : l'œuf n’est pas entouré de cellules folliculeuses chez cet animal. Bien plus, le fait parait se con- firmer, autant que nous le permet l’état de nos connaissances, pour d’autres types de la série animale, chez lesquels d’une part le testicule est privé d’élément accessoire femelle, d'autre part l'ovaire dépourvu d'élément accessoire mâle, l’un et l’autre étant réduits à l'élément essentiel. Il nous faut maintenant examiner si l’hypo- thèse de l'élément femelle du testicule comparé à l'œuf de l'ovaire peut s’harmoniser avec les faits et les considérations théoriques que O. Hertwig vient de fournir dans un très remarquable {ravail sur la comparaison de la spermatogénèse et de l'ovogénèse chez l’Ascaride et sur l'essence des phénomènes de la maturation et de la fécondation de l'œuf‘, 11 nous faut voir en outre si la même 1 O. Hertwig. Vergleich der Ei-und Samenbildung bei Nematoden. Arch. für. mikr. Anat., Bd. XXXVI, 1890. 637 hypothèse peut être conciliée avec l'existence des cas simples de constitution ovarique et tesliculaire que nous venons de voir !. Dans la théorie de Hertwig, les globules polaires ne sont plus des parties mâles éliminées par l'œuf, destinées à être remplacées par les parties mâles apportées par le spermatozoïde dans l'acte de la fécondation, comme l’ont admis Balfour, S. Minot, E.van Beneden dans leurs théories du «remplace- ment ». Ce sont des œufs abortifs qui se forment par un dernier processus de division aux dépens de l'œuf primitif, de la même façon que les spermato- zoïdes aux dépens du spermatocyte. Mais, tandis que dans ce dernier cas les produits de division sont tous employés comme spermatozoïdes fécon- dants, un seul des produits de division de l'œuf primitif devient l'œuf définitif, en s’enrichissant de toute la masse vitelline aux dépens des autres produits qui demeurent rudimentaires et sont les globules polaires. Chacun des produits ultimes de division, l'œuf définitif et chaque globule polaire d’une part, chaque spermatozoïde d’autre part, ne contient que le quart de la chromaline ren- fermée dans le noyau de la cellule-mère initiale. Ce qui caractérise la fécondation, avant l'acte même de la conjugaison des noyaux des produits sexuels, ce sont les phénomènes singuliers de di- vision qui préludent à cette conjugaison et la né- cessitent pour ainsi dire. En effet, quand une cellule quelconque se divise, elle lègue à chacune de ses deux ceilules-filles la moitié de la substance chromatique contenue dans son noyau; chaque cellule-fille doit ensuite com- pléter jusqu'à l'unité sa teneur en substance chro- matique. Jei au contraire une cellule se divise deux fois de suite, et chacune des quatre cellules-petites- filles formées n'hérite que du quart de la chroma- tine, et par conséquent sera à sa naissance deux chromatine que ne l’est une cellule-petite-fille ne pourra chromatique une cellule-fille fois moins riche en cellule-fille. Cette égaler en richesse qu’à la condition de s'unir avec une autre cellule- petite-fille. Cette union est réalisée dans le phé- nomène de la fécondation. Si maintenant les deux cellules-petites-filles unies dans l'acte de la fécondation, le spermato- zoïde et l'œuf définitif, renferment chacune un quart, leurs cellules-mères contiendront chacune une moitié et seront complémentaires l’une de l’autre, et leurs cellules-aïeules possédant cha- 1 L'examen de cette hypothèse ne pourra étre ici que su- perficiel. Aussi prions-nous le lecteur qui serait curieux d’un exposé plus approfondi de la question de vouloir bien se re- porter au travail que nous lui consacrons in Journal de l’Anatomie. 638 E. DE BILLY. — L'ÉDUCATION TECHNIQUE DES INGÉNIEURS AUX ÉTATS-UNIS cune une unité seront supplémentaires. Cet état supplémentaire des cellules-aïeules, du spermato- eyte et de l’œuf primitif, est la conséquence néces- saire de tout ce qui précède. En remontant dans le développement, il devra se maintenir dans les cel- lules-mères du spermatocyte et de l'œuf définitif jusqu'à la première cellule testiculaire et jusqu'à la première cellule ovarienne. Nous aurons alors : dans le testicule un élément unique, qui contien- dra en puissance tous les éléments séminaux à venir, et que nous pourrons appeler #m; dans l'ovaire un élément unique F qui renfermera tous les œufs futurs; ces éléments seront supplémen- taires l’un de l’autre et leur somme 4 »m + F — 2. Ce cas est réalisé dans les dispositions histologi- quement simples des glandes génitales de l’Asca- ride. D'emblée la première cellule de l'ovaire et la première cellule du testicule sont ici des éléments supplémentaires, capables de donner naissance à des produits complémentaires l’un de l'autre, et par conséquent d'emblée elles seront sexuées. Dès l'ori- gine aussi le testicule et l'ovaire seront des glandes sexuellement différenciées, ou plutôt il n'y aura pas de différenciation sexuelle. Si nousavons à faire à un hermaphrodite, la dislinetion des sexes ne sera pas poussée plus loin; mais dans le cas de répartition des sexes sur deux individus différents, dans le cas de diœcie en un mot, chez l'Ascaride par exemple, les deux individus seront dès le début supplémentaires l’un de l’autre et sexués. Mais supposons que nous meltions en présence deuxindividus dérivant chacun d'un hermaphrodite à formule génitale simple 4m + F, et ayant con- servé chacun les deux éléments de cette formule, Nous aurons alors d'un côté 4m — EF, et de l’autre 4m + F également ; les éléments de cette formule seraient supplémentaires deux à denx el forme- raient ainsi deux points de départ aboutissant chacun à deux éléments complémentaires et par suite à deux individualités nouvelles. Mais si nous supposons que, dans le premier membre de cette formule, 4m ne fonctionne pas, et que dans le se- cond ce soit F, que maintenant nous désignions par le signe ‘les éléments qui sont perdus fonc- tionnellement pour la glande, notre formule de- vient (4m'+F — Am H F1), ou, ce qui nous ra- mène au cas précédent F Æ 4m». Dans le cas de diœcie, nous aurons : F pour la femelle, 4m pour le mâle. La formule histologique complexe de la glande génitale, qui est celle des Mammifères par exemple, s’est ainsi simplifiée, grâce à ce que l’élé- ment F'du testicule et l'élément 4m’ de l'ovaire ont été éliminés de ce testicule et de cet ovaire ou tout au moins privés de fertilité et adaptés àtoute autre fonction que la fonction reproductrice. À ce prix a pu se faire la réalisation d’un testicule et d’un ovaire dans une glande hermaphrodite, ou la sépa- ration des sexes sur deux individus différents. L’élimination de l'élément femelle du testicule, de l'élément mâle de l’ovaire constitue la différen- cialion sexuelle, qui ne laisse dans ce testicule, dans cetovaire, que des éléments supplémentaires, aptes à donner des produits complémentaires fé- conds. Avant toute élimination, il existe done une période indifférente des cellules de la glande géni- tale, de cette glande génitale elle-même, des indi- vidus à leur tour, qui ne deviennent sexués que secondairement, au lieu qu'ils l’étaient primiti- vement chez l’Ascaride. En terminant, il nous a paru que l'hypothèse que nous venons de présenter pouvait êlre émise ou plutôt renouvelée, en même temps que développée, en présence des faits dont nous disposons aujour- d'hui sur l’ovogénèse et la spermalogénèse. Nous ne nous flattons nullement cependant de l'espoir qu'elle ait une existence durable et ne la regret- tons pas si elle tombe sous les coups de nouveaux faits. Il nous suffit qu'en l’état présent de la science, l'hypothèse de l'élément femelle du testicule pa- raisse en harmonie avec les données actuelles. D' A. Prenant, Chef des travaux d'Histologie à la Faculté de Médecine de Nancy. L'ÉDUCATION TECHNIQUE DES La question des laboratoires de mécanique est aujourd’hui à l’ordre du jour. Elle à été, à deux reprises, traitée avec autorité dans cette Revue ?. Je n'ai done pas la prétention de la trailer à mon tour. Mais avant eu l’occasion de visiter, dans un 1 Voyez : Dwersnauvers-Dery : Les laboratoires de mé- canique, dans la Revue du 15 juin 1891, t. II, p. 353, et ux MÉcANICIEN, le Laboratoire de Mécanique du Conservatoire des Arts et Métiers dans la Revue du 30 juillet 4891, t, I, p. 465. INGÉNIEURS AUX ÉTATS-UNIS récent voyage aux États-Unis, plusieurs des prin- cipales écoles de ce pays, J'ai pensé qu'il pourrait être intéressantde présenter aux lecteurs de la Revue quelques détails surles laboratoires etcollèges dont ils ont entendu parler. Je me bornerai donc à une simple descriplion, me proposant seulement de dire quelques mots des deux établissements des États- Unis les plus importants au point de vue de Ja mé- canique appliquée :Sibley College, à Ilhaca, et le Massachussets Institut of Technoloyy, à Boston. E. DE BILLY. — L'ÉDUCATION TECHNIQUE DES INGÉNIEURS AUX ÉTATS-UNIS 639 I Sibley College fait partie d’une Université célèbre, Cornell University, située à Ithaca, auprès du lac Cayuga, dans l'État de New-York. Une loi du Con- grès du 2 juillet 4862 avait distribué des terres fé- dérales aux divers Élats de l’Union, à charge pour ceux-ci de créer des collèges spécialement destinés à l'enseignement de l’agriculture et des arts méca- niques. L'Etat de New-York reçut pour sa part 990.000 acres ! (396.000 hectares). L'Université d'Ithaca fut fondée pour répondre à la volonté du Congrès. C'est un établissement libre, comme la plupart des universités américaines. Elle a été constituée personne civile par son acte d'incorporation, qui cor- respond à notre déclaration d'utilité publique, avec celte différence que l'acte d’incorporation est toujours une loi d'Etat, et que la législature peut organiser chaque établissement sous le régime qui Jui convient le mieux. L'acte constitutif de l’Uni- versité correspondait aux conditions de la loi de 1862. En conséquence, M. Ezra Cornell fut auto- risé, en 1866, à acheter à l'État 270 acres de terres fédérales (108 hectares) au prix de 30 cents (4 fr. 50) l’acre, et à en faire don à l’Université. Il y ajoula un don en espèces de 500.000 dollars (deux mil- lions et demi). Ainsi dotée, l’Université acheva ra- pidement de s'organiser. Les hauts fonctionnaires de l'État de New-York font de droit partie de son Conseil d'administration. Les Américains sont jaloux de leurs établisse- ments d'instruction. Ils tiennent à honneur de les doter royalement. C'est par la munificence privée que l'Université d'Ithaca fut pourvue de biblio- thèque, de collections, et de capitaux. Elle a donné aux divers collèges qui la composent les noms de sesbienfaiteurs, dontles largesses sesont comptées par centaines de milliers de dollars, et même, pour Fun d'eux, par un million de dollars : aujourd’hui l'Université possède un revenu annuel de deux millions de francs. Sur les 270 acres qui lui ont été concédés, 200 acres environ sont occupés par la ferme-école et par l’école d’horticulture. Le reste est consacré aux collèges, aux habitations des professeurs, et aux /rounds réservés aux jeux athlétiques. Les col- lèges sont exclusivement occupés par les salles de cours et de conférences, les collections, les labo- ratoires, les bibliothèques. Les élèves logent dans des bâtiments spéciaux, appelés dormitories. Les jeunes filles, admises à suivre lous les cours de l'Université, habitent un bäliment spécial, Sage Coilege. Le régime de l'internat françaises! inconnu : chaque élève a sa chambre, parfois deux. 1 L'acre a une superficie de 40 ares et demi. L'instruction comprend toutes les branches de l’enseignement, littéraire et scientifique : l’uni- versilé délivre des diplômes de baccalauréat ès arts, ès lettres, ès sciences et en philosophie, des diplômes d'agriculture, d'architecture, de chimiste, d'ingénieur civil, d'ingénieur mécanicien et d’in- génieur électricien. Elle comprend aussi des écoles qui délivrent, non des diplômes, mais de simples certificals : une école d'art industriel, et une école préparatoire de médecine. Elle comprend enfin une école de droit. Les programmes comportent quatre années d'’é- tudes. Après avoir obtenu leur diplôme, les élèves peuvent encore passer une année à l’Université, pour suivre des cours supplémentaires, et tra- vailler au laboratoire. Le nombre des élèves est actuellement de 4,350, dont 500 boursiers, désignés par l'État de New-York. Ces bourses ne portent que sur les frais d'instruction, qui s'élèvent à 125 dollars par an (725 fr.) Les autres frais restent à la charge des élèves : il faut compter 1.000 à 1.500 fr. par an pour la nourriture, le logement, le chauffage, l'éclairage et le blanchissage, et 200 à 400 fr. pour frais de livres. Les anciens élèves ont fondé une quarantaine de bourses de 4.000 fr. L'éducation des ingénieurs mécaniciens el élec- triciens se fait à Sibley College. Le fondateur de ce collège, M. Hiram Sibley, n’a pas donné à l’'Uni- versilé moins de 200.000 dollars (un million de francs). Les salles de cours et de dessin, la biblio- thèque et la salle de lecture, sont renfermées dans un bâliment à trois étages, qui forme l’un des côtés d’un rectangle, dont les trois autres côtés sont formés parles ateliers. Un premier bâtiment, de 50 mètres de longueur sur 13 mètres de largeur, contientlesateliers d’ajustage etdemenuiserie.Dans un second bäliment de mêmes dimensions sont la forge et la fonderie. Un troisième contient : au rez-de-chaussée, un laboratoire où sont diverses machines à essayer les métaux, des appareils à essayer les lubrifiants, et divers appareils hydrau- liques ; au second étage, des salles de dessin de machines. En dehors de ce groupe de bäliments sont une batterie de chaudières et une halle de machines, qui contient sept machines à vapeur de divers types, d’une puissance totale de 600 chevaux, des machines à gaz, à air chaud, à pétrole, divers types de dynamos. Cette année le Conseil d'administration avait affecté au budget du labora- toire de mécanique la somme de 100.000 fr. On en a profilé pour commander à l’une des meilleures maisons de construction des États-Unis une ma- chine à triple expansion de la force de 200 che- Vaux. Toutes ces machines servent à l’enseignement et aux recherches des professeurs. C'est là en 640 E. DE BILLY. — L'ÉDUCATION TECHNIQUE DES INGÉNIEURS AUX ÉTATS-UNIS grande partie que M. Thurston, l'éminent direc- teur de ce collège, a fait ses récentes expériences sur le frottement. C'est également là que tous les jours, par groupes de deux ou trois, les élèves viennent s'exercer à faire marcher les machines, à les démonter, à les régler, à les essayer au frein, à prendre des diagrammes, et à faire des mesures de rendement : la méthode de Hirn pour l'étude expérimentale des machines à vapeur y est jour- nellement appliquée par les élèves, Lorsque les élèves sortent du collège, ils ont passé 300 heures à l'atelier de menuiserie, 200 heu- res à la forge, 200 heures à la fonderie, 400 à 500 heures aux machines-outils. Mais je ne veux pas décrire ici la méthode d'enseignement : c'est un sujel qui a élé traité avec autorité, tout récem- ment, dans la Revue el dans le Génie Civil, par M. Dwelshauvers-Dery : je voulais seulement don- ner ici une idée des installations de ce collège, de l'extension que les Américains donnent à l’ensei- gnement pratique, à côté d'un enseignement théo- rique sérieux. Un peut discuter les avantages qu'ont, dans une école d'ingénieurs, les ateliers de machines-outils. Je les ai entendu notamment criliquer, même aux États-Unis, par un des plus célèbres mécaniciens de ce pays, M. Richards, ac- tuellement professeur à l'Université de Yale. Les élèves n’ont guère le temps, au collège, de devenir des artisans habiles: et, s'ils se font l'illusion d'avoir, au sortir de l’école, la pratique des ma- chines-outils, on peut craindre qu'ils ne soient exposés à commettre des erreurs dans la conduite d'un atelier. Mais faire suivre l’enseignement oral de l’enseignement individuel et vivant, par l'étude des machines et de leurs organes, et par la pra- tique des méthodes d'essai, c’est le complément nécessaire pour que les lecons se gravent fortement dans l'esprit ; c'est ajouter à l'intérêt du cours l’at- trait de l'observation personnelle. I L'Institut de technologie de Boston est, comme l'Université d'Ithaca, un établissement privé, doté par la générosité de l'État et des particuliers, ad- ministré par un Conseil dont font partie le Gou- verneur et les hauts fonctionnaires de l'État de Massachussets. C'est le premier établissement de ce genre qui ait été fondé aux États-Unis ; il a célébré en 1890 son 25° anniversaire. Avant la fon- dation de cet établissement l'instruction des ingé- nieurs aux États-Unis était purement pratique, — comme elle l’est encore aujourd'hui partiellement en Angleterre. C’est l’Institut de technologie de Boston qui a inauguré dans ce pays l’ère de l’en- seignement technique ; et son exemple a été large- ment suivi dans ces dernières années : les Améri- cains se sont engagés dans cette voie avec l’ardeur qu'ils mettent à toutes les entreprises nouvelles. Aujourd'hui l’Institut de technologie compte 900 élèves. Ila à sa tête un homme du plus grand mérite, bien connu en France par ses travaux d'économie politique et de statistique : le général Francis A. Walker. Comme à Sibley College, le programme comporte quatre années d'études, avec une cinquième année facultative pour les élèves diplômés (graduate stu- dents. C’estessentiellement un établissement d’ins- truclion technique. Les diplômes correspondent à des études de construction (civil enginering), d’ar- chiteclture, de mécanique appliquée, d'électricité, d'exploitation des mines et de métallurgie, de chi- mie industrielle et de biologie. Les laboratoires de chimie, de physique, de mé- tallurgie, de biologie, les ateliers de machines- outils, de menuiserie, de forge et de fonderie, sont admirables. Le laboratoire de métallurgie est doté de la plupart des appareils de préparation et de traitement des métaux; les élèves passent chaque année plusieurs journées à les faire marcher. Il n’est pas une expérience de chimie ou de physique, faite au cours, qui ne soil répétée par les élèves au laboratoire, sous diverses formes. Les séances de manipulation durent trois heures; les élèves s'y rendent, par groupes de deux ou trois; et ils trouvent à leur place, avec des instructions sur ce qu'ils ont à faire, les appareils dont ils au- ront besoin. Et là, sous la surveillance du pro- fesseur, ils exécutent le programme qui leur a été préparé. On se rendra compte du nombre d'appa- reils nécessaire, et de la richesse des collections, quand on saura que le laboratoire de physique, à lui seul, recoit 150 élèves. Au laboratoire de méca- nique se trouvent : une machine à triple expan- sion de 450 chevaux, une machine Harriss-Corliss de 16 chevaux, et une machine à tiroir de 8 che- vaux; deux machines pour les épreuves de trac- lion des mélaux, de la capacité de 25 tonnes, etc. Cette énumération suffit à donner une idée de ce laboratoire ,un des plus complets qu'on puisse ima- giner, qui renferme les modèles des mécanismes les plus divers, et tous les appareils destinés aux épreuves et aux essais des matériaux. Je n'ai parlé que des écoles supérieures, de celles où l’on entre vers 17 ans, pour en sortir, après % années d'études, avec un diplôme d'ingénieur. Les écoles d’arts-et-méliers, qui reçoivent les élèves à partir de 1% ou 15 ans, et qui forment soit des ouvriers d'élite destinés à devenir rapidement contremaitres, soit de futurs élèves des écoles d’in- génieurs, ne sont pas moins remarquables. L'une des mieux organisées est celle de Chicago : Chicago manual training school, fondée en 1883 par le Com- mercial Club de Chicago, et dont le diplôme dispense R.-H. THURSTON. — LABORATOIRE D'ITHACA GA de l'examen d'entrée à Sibley College, et à nombre d'établissements d'instruction technique. Ces diverses écoles sont montées avec un grand luxe. Tout en admirant la générosité intelligente des Américains, qui consacrent des millions à dé- velopper l'instruction dans leur pays, il est permis, je crois, de faire quelques réserves. Peut-être y a-t-il dans tout ce luxe un peu de superflu; il n’y aurait sans doute pas besoin de tant de dollars pour créer en France des laboratoires de mécani- que très suffisants. Je terminerai par une dernière remarque sur un pointquimeparaitcaractéristique del’enseignement technique aux États-Unis. En France, dans nos écoles d'ingénieurs, les élèves voient peu leurs pro- fesseurs, en dehors des cours. Le professorat est souvent une parlie d’un service administratif très chargé. Quaad les professeurs ne sont pas fonction- naires, ils ont en dehors de leurs cours des occu- pations qui absorbent une grande partie de leur temps:il ne saurait en être autrement, car les émo- luments de professeur ne sont qu’un complément de traitement. En Amérique le temps du professeur est entièrement consacré à ses élèves ou à des travaux personnels relatifs au cours qu'il professe. Après le cours, il se rend au laboratoire; et là, avec l’aide de ses « assistents », il surveille les ma- nipulations des élèves, guide leurs travaux; et, par des entretiens fréquents, fait pénétrer dans leur esprit les idées qu'il a développées au cours. Le laboratoire lient, en Amérique, dans l’enseigne- ment des diverses branches de la mécanique et des sciences appliquées, la place qu'il lient, dans nos Facultés des sciences et nos Écoles de médecine, pour l’enseignement des sciences physiques et na- turelles. E. de Billy, Ingénieur au corps des Mines. A l'occasion de l'article de M. ÆE. de Billy, à nous paraît intéressant de publier le passage suivant d'une lettre récemment adressée par l'illustre ingénieur Thurs- ton, directeur du Sibley-College, à notre éminent colla- borateur, M. le Professeur V. Dwelshauvers-Dery. On y verra combien sont fondées les assertions de nos divers collaborateurs qui ont décrit ici, comme des modéles à imi- ler, les laboratoires de mécanique des Etats-Unis, et fait campagne pour obtenir des pouvoirs publics l'institution d'établissements analoques. Il y a là une question d’in- lérêt vital pour notre pays, dont la grande industrie ga- gnerait à être plus souvent guidée par la science. L'é- motion soulevée en France et à l'Étranger par les articles que nous avons publiés à ce sujet \ nous fait bien ! Ces articles, qui ont vivement attiré l’attention du monde industriel, ont été dans la presse politique elle-même lobjet de nombreux commentaires. Indépendamment des discussions espérer de la décision de nos gouvernants. En réalité ce que nous leur demandons est peu de chose en compa- raison des installations grandioses que possèdent les Américains el dont ils sont, comme le remarque le Pro- Jesseur Tlurston, justement fiers. Lettre de M, ER.-H,. Hhurston « Mon cher ami, «.…, L'année scolaire est à sa fin; je n’en suis pas moins fort occupé aux préparatifs nécessaires pour — toutes bienveillantes — auxquelles elles ont donné lieu dans les revues techniques et les grands journaux de Paris, une centaine de feuilles de province en ont reproduit les principaux passages, réclamant, chacune dans l'intérêt de l’in- dustrie, la création d’un laboratoire où la résistance des ma- tériaux et les qualités des machines fussent déterminées par l'expérience et suivant des méthodes uniformes. En s’associant, comme il veut bien de dire, « à la campagne entreprise par la Revue générale des Sciences pures el appli- quées, pour arriver à fonder en France un laboratoire de mécanique expérimentale », M. A. Roche écrit dans le Mémo- rial de la Loire et de la Haute-Loire en date du 10 août 1891: « La question me parait étre d’une importance considéra- ble non seulement pour la science, mais aussi pour le progrès, actuellement très enrayé, de notre grande industrie. Il faut avoir le courage de le dire, en matière de mécanique appli- quée, notre pays s'est laissé distancer. Depuis plusieurs années les autres nations, en particulier l'Angleterre et les États-Unis, ont compris que le perfectionnement des machi- nes employées dans l’industrie exige autre chose que l'appli- cation de considérations théoriques. On ne méconnait point l'importance du calcul : sans mathématiques, il n’y a pas de mécanique ; mais les mathématiques ne suflisent pas; on ne saurait y recourir pour établir les conditions physiques aux- quelles les matériaux et les mécanismes eux-mêmes doivent satisfaire sous peine de fonctionner mal ou même de devenir dangereux. L'intervention de l'expérience est nécessaire. Sans elle l'ingénieur ne pourrait résoudre aucun des grands pro- blèmes de la mécanique industrielle : il lui serait impossible de déterminer la résistance à la rupture, le cocflicient d'élas- ticité des pièces métalliques, la composition qu’il convient de leur attribuer suivant la nature du travail qu'on leur de- mande, le meilleur mode d'emploi du combustible, les avan- tages que présentent, aux points de vue de la déperdition de chaleur et du rendement, les divers types de moteurs à gaz ou à vapeur. Toutes ces questions et bien d’autres, qui se ratta- chent au fonctionnement des machines, exigent, pour ètre résolues, des expériences, lesquelles ne peuvent étre faites que dans des laboratoires spécialement outillés en vue de cette étude. » A l'appui de ces idées M. A. Roche décrit dans le Mémorial de la Loire et de la Haute-Loire les principaux progrès que la mécanique industrielle doit à l'expérience ; puis il expose, d’après la Revue, les circonstances qui ont amené la ruine du laboratoire fondé par Morin et Tresca au Conservatoire des Arts et Métiers. « En signalant ce triste état de choses, j'espère, dit-il, sus- citer lindignation des lecteurs. Ce n’est pas seulement le monde des mécaniciens et des ingénieurs qui doit protester contre un tel abandon, et demander le relëvement du labora- toire; ce sont aussi, avec eux, tous les esprits réfléchis, qui ont ‘quelque souci de notre avenir industriel. Nous les conjurons de se joindre à nous pour obtenir des pouvoirs publics les crédits nécessaires à la fondation d’un laboratoire national de mécanique expérimentale. » Que le lecteur veuille bien le remarquer, cette protestation traduit, non l'opinion isolée d’un savant, mais le sentiment unanime des ingénieurs et des industriels, exprimé, à la suite des articles de la Revue, dans une centaine de journaux français. 642 G. CHARPY. — LA CONSTITUTION DES SOLUTIONS SALINES recevoir les cinq cents étudian(s que nous attendons en septembre au Sibley College. Je suis à agran- dir les locaux et les aménagements, à en bâtir de nouveaux, à placer une turbine de 200 chevaux sous notre chute de 40 pieds, pour fournir l’éclai- rage électrique du College. Je viens justement de recevoir une machine Compound-tandem de 60 che- vaux, Cadeau d'amis;je prends les dispositions pour le placement d’une chaudière de 250 chevaux tüimbrée à 14 atm.,et de notre machine expérimen- tale de 200 chevaux, qui n’est pas encore tout à fait prète. « Votre idéal de machine expérimentale ne dif- fère pas considérablement de ce que la nôtre réa- lise. Tous les distributeurs sont aussi indépendants et chacun ajustable à part. Nos condenseurs à surface recevront l’eau de circulation directement de notre grand réservoir sous une charge de 150 pieds par un tuyau de 0 m. 25 de diamètre. Nous disposons en ce moment de 800 chevaux nomi- nalement; mais en réalité nous pourrons facilement obtenir un quart à un tiers en plus, soit mille che- VAUT. «Je fais faireles fondations d’un banc d'épreuve de 300 à 350 (onnes, avec enregistration automa- tique ; placer la lumière électrique dans notre nou- velle bibliothèque (4.300.000 frs) qu'on vient de terminer, dans le College-Sage (collège de jeunes filles), etc. « Je cherche encore un professeur à mettre à la tête de notre département du Génie naval... « J'ai reçu votre article sur les Laboratoires !. C'est un plaisir de voir comment les nouvelles mé- thodes ont pris possession du monde. Dans notre pays, toute école qui se propose l'étude de la science pure ou appliquée érige un laboratoire de mécanique tout aussi bien que des laboratoires de physique ou de chimie. On y fait d’excel- lente besogne... Mais nous y éprouvons un désa- vantage d'autre part : ces écoles viennent me cher- cher mes meilleures hommes, et je cours perpé- tuellement le danger de rester sans assistant expérimenté. D'un autre côté notre réputation est telle que nous pouvons, en général, remplir les of- fices vacants en choisissant parmi les professeurs les plus renommés des autres écoles, car ils considèrent comme avantageux de venir dans la nôtre. Il nous vient même de tous les points des États-Unis des professeurs qui désirent se mettre au courant de nos méthodes et du maniement de nos appareils. Ainsi se répand avec rapidité le nouveau système. Nombre de nos plus brillantssu- jets vont aussi à l’Université Stanford de Californie, qui est assez bien modelée sur l'Université Cornell. Son président est un de nos anciens élèves... » R.-H. Thurston. Sur ce même sujet des laboratoires de mécanique, qui passionne en ce moment nos ingénieurs, la Revue & reçu de quelques-uns d’entre eux d'importants documents, dont elle les remercie et gw'elle se propose d'utiliser pro- chainement. L. O. LES THÉORIES RÉGNANTES SUR LEA CONSTITUTION DES SOLUTIONS SALINES Les travaux de M. Van T Hoff sur la pression osmotique ont considérablement avancé la théorie de la dissolution, Il semble incontestable, d’après les nombreuses recherches provoquées par les idées du savant hollandais, que les molécules d’un corps dissous se comportent au sein du dissolvani comme les molécules d'un gaz dans un espace vide, et que les conditions d'équilibre à l’état gazeux ou dissous peuvent se déduire des mêmes équations !. Dans le cas particulier des solutions très étendues, on aura donc entre le volume, la température et la pression osmotique d’une dissolution contenant une gramme-moléeule ? a relation Ivy =RT, iden- 1 Voir l’article de M. Erarp sur la Constilution des solu- lions élendues, dans la Revue générale des Sciences, du 15 avril 1890. 2 Gramme-molécule = nombre de grammes égal au poids moléculaire. tique à l'équation qui, pour les gaz parfaits, résume les lois de Mariotte, de Gay-Lussac et d'Avogadro?. I De nombreuses vérilications expérimentales, effectuées soit par la détermination directe de la pression osmotique, soit par la détermination des abaissements des températures de congélation ou des tensions de vapeur, qui sont des fonelions simples de la pression osmotique, ont montré que la théorie concordait bien avec l'expérience, sauf dans un cas, celui des solutions salines aqueuses; (nous comprenons ici, dans le terme solutions sali- nes, les dissolutions aqueuses des acides et des 1 V. Dwelshauvers-Dery, Les Laboratoires de mécanique dans la Revue du 15 juin 1891, t. I, page 353. 2 [I] — pression osmotique; v — volume; R — constante — 84700; T = température absolue. : G. CHARPY. — LA CONSTITUTION DES SOLUTIONS SALINES 643 bases hydralés). Pour toutes ces solutions, l'équa- tion Hv=RT doit être remplacée par Iv—iRT, à étant un coefficient numérique, supérieur à l’unité, variable avec le corps considéré, et dépendant aussi de la température et de la concentration de la dissolution. La détermination de ? est immédiate quand on connait la pression osmolique ; lorsque l’on a dé- terminé l’abaissement du point de congélation ou de la tension de vapeur de l’eau, on peut calculer i en s'appuyant sur les règles suivantes ! : 1° La valeur de i est égale à l’abaissement molé- _culaire du point de congélation divisé par 18,5; 2 La valeur de z est égale à 5,6 fois le poids moléculaire (”) du corps considéré, multiplié par Ja partie (A) dont sa présence diminue la tension de vapeur de l’eau (dissolution à 1 pour 100) : = pie SON UNS L'existence de ce facteur numérique conduit à attribuer aux solutions salines aqueuses une cons- titution spéciale, hypothèse que vient confirmer d’ailleurs l'étude d'un grand nombre de propriétés physiques de ces solutions. Reste à déterminer quelle est cette conslitulion spéciale. - Les explications, proposées jusqu'ici par les nombreux chimistes et physiciens qui se sont occupés de celte question, sont très diverses, el parfois même contradictoires. Cela ne doit pas ‘surprendre beaucoup, si l’on remarque que le fait que l’on poursuit n’est pas directement acces- sible. Ce n’est que par l’étude des propriétés des solutions, principalement des propriétés phy- siques, que l’on peut avoir une idée de leur cons- titution intime ; et, le plus souvent, un même fait pourra être interprété d'une façon satisfaisante, au moyen de deux hypothèses totalement diffé- rentes. À la longue, en accumulant les résultats expérimentaux, on pourra éliminer cerlaines hypo- thèses et augmenter la probabilité des autres ; mais on ne peut compter arriver à la certitude absolue. Le fait incontestable qui ressort de ces données est que la constitution des solutions salines aqueuses est variable avec la température et la concentration. Une telle dissolution doit donc être considérée comme un système en équilibre chimique. Sur ce point là tout le monde est d'accord; les divergences n’ap- paraissent que lorsqu'il s'agit de décider quels sont les corps entre lesquels s'établit l'équilibre. Il Dans la théorie cinétique des gaz, on arrive directement à la formule PV = RT pour les gaz * parfaits, en considérant la pression P comme pro- duite par le choc des molécules gazeuses contre 1 Van T° Horr. Archives néerlandaises des Sciences, t. XX. les parois. Le raisonnement peut être répété pour une solution saline enfermée dans un vase semi- perméable, c'est-à-dire se laissant traverser par le dissolvant et non par le corps dissous. La pression osmotique, c'est-à-dire la différence des pressions de part et d’autre de la paroi semi-perméable est due alors, en partie aux chocs des molécules du corps dissous qui s’exercent d’un seul côté, en partie à la différence d'action du liquide, qui d’un côté est pur, et de l’autre est soumis à une attrac- tion de la part des molécules du corps dissous. Dans les solutions très étendues, cette seconde action est négligeable : le choc des molécules dis- soutes constitue seul la pression osmotique, et l’on se trouve absolument dans le même cas que pour les gaz. C’est le résultat auquel est arrivé M. Van der Waals, qui a traité la question dans toute sa généralité. Si l’équalion à laquelle on arrive expérimenta- lement est PV —%RT, il faut en conclure, dans la théorie cinétique, que le nombre des molé- cules est augmenté dans le rapport de à à 1. Cest ce que l’on fait pour les gaz qui ne sui- vent pas la loi d’Avogadro et pour lesquels on admet que la molécule est dissociée en plusieurs autres. Deux cas sont alors à distinguer; pour certains corps, l'acide acétique par exemple, on admet que la molécule de vapeur saturée est for- mée par l'agglomération de plusieurs molécules d'acide acélique qui se séparent quand la {empé- rature s'élève, ou que la pression diminue. Cette hypothèse s'impose toutes les fois que le corps qui échappe à la loi d'Avogadro est un corps simple (iode, soufre). Pour d’autres corps, tels que le chlorhydrate d'ammoniaque, le perchlorure de phosphore, on suppose que la molécule se dissocie en plusieurs molécules différentes, acide chlorhy- drique et gaz ammoniac, chlore et trichlorure de phosphore. Ces deux hypothèses peuvent se répéter dans le cas des corps dissous, sans qu'on puisse « priori choisir l’une ou l’autre; ou bien la molécule du corps solide est formée par l’agrégation de plu- sieurs molécules identiques qui se séparent par la dissolution, ou bien la molécule du sel se sépare en molécules différentes. Cette seconde hypothèse a été adoptée par M. Arrhénius. Remar- quant que les solutions pour lesquelles on était obligé d'admettre un coeflicient À différent de l'unité donnaient toutes des solutions conductrices de l'électricité, susceptibles, par suite, de subir l’électrolyse, ce savant a admis que la séparation du sel en ions,que produit le passage d’un courant, était déjà obtenue par simple dissolution, et que l'électricité n'avait d'autre rôle que de diriger cha- cun de ces ons vers l’une ou l’autre des électrodes. 644 G. CHARPY. — LA CONSTITUTION DES SOLUTIONS SALINES Cette hypothèse a soulevé de violentes contra- dictions ; il semblait contraire à toutes les idées reçues en chimie d'admettre que les composés les plus stables fûssent séparés en leurs éléments par une simple dissolution, donnant lieu à des phéno- mènes thermiques très faibles, et surtout qu'il pût exister dans une dissolution de chlorure de potas- sium, par exemple, du chlore et du potassium en liberté. À cela, M. Arrhénius répond qu'il ne faut pas considérer les ions libres au sein de la disso- lution comme identiques aux molécules isolées des mêmes corps. La différence réside peut-être d'abord dans l'état d'agrégation moléculaire, et surtout dans ce fait que les ions possèdent une très forte charge électrique, positive ou négative, qui empêche toute action de l'ion sur le dissolvant et représente une grande quantité d'énergie. L'ion est donc tout à fait différent de la molécule, et il ne faut pas chercher à retrouver dans la dissolution où l’on suppose les ons libres les propriétés des corps qui constituent ces ions. Voici maintenant quelques-uns des faits qui viennent à l'appui de l'hypothèse de M. Arrhénius. Les solutions électrolytiques ne pouvant trans- mettre l'électricité sans subir de décomposition, on est conduit à admettre que le transport de l'électricité ne se fait que par l’intermédiaire des ions ; la conductibilité moléculaire variera donc en même temps que le rapport du nombre des molécules dissociées au nombre des molécules non dissociées. Dans les solutions très éten- dues on trouve une conduclibilité moléculaire constante ; c’est qu'alors le sel est complètement dissocié en ons. Quand la concentration augmente, la conductibilité moléculaire diminue; c’est qu'un certain nombre de molécules salines restent indé- composées. On peut, d'après le rapport des con- ductibilités, calculer la proportion de molécules dissociées et, par suite, le coefficient &. Par exemple, laconductibilité moléculaire-limite pour le chlorure de potassium est 1,217 (multipliée par 10%); à la concentration 0,74 par litre la conductibilité est 1,147; le rapport F7 — 0,91 est, d'après M. Arrhénius, égal au rapport du nombre n de molécules dissociées au nombre tolal »m de molécules. Le nombre de molécules libres est done égal à im —n +2n, chacune des molécules dissociées donnant naissance à deux autres; par suile : M — n +9n hier É 10 LL Pour BaCEË on aura : mMm—n+an 1= —— —=1+2—, m m n car chaque molécule se dédouble en trois autres (Ba, CI, C,); or les conductibilités sont les sui- vantes : Conductibilité moléculaire limite... AN 0Mparlitre en -penerer Ce cecere donc i—1#10,81X 22 14; On peut donc calculer au moyen de la conduc- tibilité électrique, et comparer la valeur ainsi obte- nue aux valeurs déduites dela pression osmotique, de la tension de vapeur, ou de l’abaissement du point de congélation. Les différentes valeurs ainsi obtenues concordent assez bien; voici quelques résultats numériques : 1°5,, calculé d’après la conductibilité électro- lytique ; ï», déduit de la pression osmotique. (Mesures de M. de Vries) : L ve rapport = 0,87 3 K CI NaC!I | AzH4CI | AzOSNa AzOK ù 1,87 1,82 1,85 1,73 1,807 do 1,80 1,72 1,82 1,16 1,76 2° %,, calculé d’après la conductibilité élec- trique ; î, déduit de l’abaissement du point de congéla- tion (Raoult) : | K CI AzO3Na (Az05)2 Pb | KOH | HCI ÿl 1,86 1,82 2,08 1,93 1,90 î 82 1,82 9,02 1,91 1,98 30 1',, calculé d’après la conductibilité élec- trique ; i,, déduit de la diminution de tension de vapeur (Tamman) : NaCIl | TiCl Na OH SOiK?2 Sr C2 di 1,75 1,69 1,80 2,02 2,15 ü 1,80 1,76 1512 2,00 2,45 L'hypothèse d’Arrhénius donne une explication simple des propriétés modulaires des solutions étendues. M. Valson, en étudiant les densités des so- lutionssalines normales, c’est-à-dire contenant une molécule de sel par litre, était arrivé à formuler la loi suivante : La densité d'une solution saline normale peut se déduire de celle d’une solution prise comme type en y ajoutant deux nombres, correspondant : l’un au radical électro-positif, l’autre au radical électro- négatif. Ces nombres ou modules sont caractéris- tiques d'un radical et indépendants de l’autre ra- dical auquel il se trouve associé. G. CHARPY. — LA CONSTITUTION DES SOLUTIONS SALINES 645 Cette loi modulaire a été étendue depuis à un grand nombre de propriétés physiques (volume spécifique, dépression capillaire, chaleur de neutra- lisation, compressibilité, frottement interne, pou- voir rotatoire, indice de réfraction). L'existence des modules des radicaux suffirait presque, à elleseule, à conduire à l'hypothèse de la dissociation électro- lytique. Voici comment s'expriment à ce sujet MM. Favre et Valson dans un mémoire daté de 1873 : « En présence de ces résultats, n’est-on pas au- torisé à se demander si l’action dissolvante de l’eau sur les sels n'aurait pas pour effet de dis- socier leurs éléments et de les amener, sinon àun état de liberté complète, du moins à un état d’in- dépendance réciproque qu'il serait difficile de dé- finir maintenant, mais du moins très différent de leur état primitif. » Dans son beau mémoire sur le point de congé- lation des dissolutions salines, M. Raoult arrive à la conclusion suivante: « Donc, pour les dissolutions étendues, la dimi- nution des hauteurs capillaires, l'accroissement des densités, la contraction du protoplasma, l’abaisse- ment du point de congélation, bref la plupart des effets physiques produits par les sels sur l’eau dissolvante sont la somme des effets produits sépa- rément par les radicaux électro-positifs et électro- négalifs qui les conslituent, el qui agissent comme s'ils étaient simplement mélangés dansle liquide. » Il faut donc reconnaitre, que MM. Valson et Raoult avaientété conduits parleurs recherches ex- périmentales à l'hypothèse de la dissociation élec- trolytique, mais sans oser attribuer à la séparation en ions une réalité objective, comme l’a fait M. Ar- rhénius d’après l'étude des propriétés électriques. De nombreuses recherches ont été effectuées dans ces dernières années pour contrôler cette hypo- thèse. Il faut citer principalement les expériences de M. Ostwald, en particulier celles relatives à l'in- terversion du sucre par les acides. M. Ostwald attribue l’interversion du sucre par les acides à l'hydrogène mis en liberté par le fait de la dissociation électrolytique. D’après cela, la vitesse de la réaction doit être d'autant plus grande que la proportion d'hydrogènelibreest plus grande. C’est ce que vérifie, en effet, l'expérience. De plus, si l’on a délerminé pour un acide à une série de concentrations différentes, d'une part la proportion d'hydrogène libre au moyen de la conductibilité électrique, d'autre part la vitesse d’interversion du sucre, on pourra calculer pour d’autres acides la vitesse d’interversion qui correspondra à une concentralion et par suite à une proportion d'hy- drogène libre connue. Les expériences d'Ostwald ont très exactement vérifié ces conclusions. Enfin M. Ostwald a cherché à mettre directe- ment en évidence l'existence des ions libres ‘ au sein de la dissolution; mais l'interprétation des expériences qu'il a réalisées est trop délicate pour qu’on puisse les considérer comme apportant une preuve décisive. III L'augmentation du nombre des molécules dans une solution saline peut aussi s'expliquer, comme cela a été indiqué plus haut, en admettant que les molécules salines sont des agglomérations qui se désagrègent par la dissolution. Ce cas sera sûre- ment le cas réel, si le corps dissous est un corps simple. C'est ce qui semble se présenter pourles so- lutions d’iode, de soufre et de phosphore. M. Aignan, en éludiant la polarisation rotatoire de l'acide tartrique, a élé conduit à considérer la molécule comme double et pouvant se dédoubler partiellement en solution aqueuse. Un certain nombre de faits tendent d’ailleurs à faire admettre que la condensation moléculaire n'est pas la même pour certains corps à l’état liquide et à l’état gazeux et que cette condensalion peut encore s'augmen- ter beaucoup à l’état solide ?. M. Raoult, d'après ses recherches cryoscopiques, suppose que la mo- lécule de l'eau doit être considérée comme mul- tiple, ainsi que celle de l'acide acétique. M. Ph. A. Guye, dans des recherches tout à fait indépen- dantes, arrive à lamême conclusion pour l’eau, l'al- cool méthylique, etc. Tous ces faits rendent parfaitement admissible l'hypothèse que les molécules d'un sel se dédou- blent par la dissolution en plusieurs molécules semblables ; mais ilestbien difficile, dans l’état actuel de la science, de choisir entre ce mode de dédoublement el celui qu'adopte M. Arrhénius. Il faut cependant reconnaitre que la théorie de la dissociation électrolytique fournit une interpré- tation très simple et très élégante d’un grand nombre de faits que la théorie de l’association des molécules laisse complètement inexpliqués. IV Enfin, un certain nombre de savants, se refusant à admettre la théorie cinétique de la dissolution, expliquent la constitution variable des solutions salines par l’existence, au sein du liquide, d’hy- drates définis en voie de dissociation. De nom- breux faits, il est vrai, conduisent à admettre qu'il existe un lien entre l’eau et le sel dissous, surtout lorsque ce sel peut donner des hydrates solides stables. On sait que la dissolution de ces sels, pris 1 Osrwazp et Nerxsr. Uber freie Jonen. Zeitschrift fur physikalische Chemie, 1889. 2 V. Sterry Hunt. The coefficient of mineral condensation in chemistry. Chemical News, 19 et 26 décembre 1890. 646 G. CHARPY. — LA CONSTITUTION DES SOLUTIONS SALINES à l'état anhydre, donne lieu à un dégagement de chaleur parfois considérable; que certaines solu- tions (chlorure cuivrique, chlorure de cobalt) pré- sentent une coloration variable avec la concentra- tion et la température, coloration qui est tantôt celle du sel anhydre, tantôt celle du sel hydraté. L'hypothèse la plus ancienne sur la constitution des sels dissous, et celle qui se présente le plus nalu- rellement, consiste à admettre que le selest au même état d'hydratation dans la dissolution que les cristaux obtenus par évaporation à la même température. Mais cela ne correspond évidemment pas à la réalité, car une même dissolution peut, à une même température, laisser déposer différents hydrates pourvu qu'on la metle en contact avec une parcelle de l’un de ces hydrates. M. Berthelot, à la suite de sesrecherches calorimétriques, arrive à concevoir les solutions salines comme contenant tantôt le sel anhydre, tantôt des hydrates par- tiellement dissociés en eau et sel anhydre, ou bien en eau et hydrate moins hydraté. Celle concep- tion a élé reprise par M. Mendeleeff qui a voulu voir dans cette dissociation des hydrates la cause des anomalies que présentent les solutions salines très étendues et a cherché à déterminer quels sont les hydrates qui peuvent exister en dissolution. Voici quel est le principe de sa méthode : Supposous qu'on fasse varier d’une façon conlti- nue la concentration d’une dissolution et qu'on étudie en même temps l’une quelconque de ses propriétés physiques. A un certain moment il exis- era dans la dissolution des hydrates à 7H?0 et 8H20, par exemple. Quand la concentration aura atteint la valeur qui correspond à la formation intégrale de l’hydrate à 8H°0, on verra appa- raître un nouvel hydrate, à 10H°?0, par exemple. La constitution de la solution a done changé brus- quement, et ce changement doit se traduire par un point anguleux dans la courbe qui représente, en fonction de la concentration, la propriété phy- sique étudiée. On doit donc obtenir sur cette courbe une série de points anguleux correspondant aux différents hydrates qui peuvent exister dans la dis- solution, Celte méthode a été appliquée par M. Mendeleeff à la densité des solutions d'alcool et d'acide sulfurique, par M. Crompton à la conduc- libilité électrique des solutions d'acide sulfurique, par M. Pickering à la densité, la chaleur de dilu- Lion et l’abaissement des points de congélation des solutions d'acide sulfurique et de chorure de eal- cium. La méthode est contestable en elle-même, et les objections auxquelles elle donne prise on déjà été signalées dans la Revue |; mais ce qui est plus 1 Pickering. Nature of solution, analysé dans la Revue du 15 janvier 1890. grave, c’est que les résultats des différents expé- rimentateurs ne sont pas concordants. M. Mende- leeff trouve pour l'acide sulfurique 4 hydrates, M. Crompton 5, M. Pickering 16. Dans les solutions trèsétéendues, quisont celles dans lesquelles on a ob- servé la variation dei, la détermination des points anguleux devient presque complètement arbitraire. Il ne semble donc pas qu'il y ait de raison bien sé- rieuse d'admettre l'existence d’hydrates contenant jusqu'à 1900 molécules d’eau, comme le fait M. Pickering. Si l’on doit regarder comme certaine l'existence d’un lien entre le dissolvant et le corps dissous, au moins dans certains cas particuliers, on ne peut rien aflirmer sur la nature des composés que peu- vent former l’eau et les sels dissous. VŸ Les différentes théories, entre lesquelles s’est lo- calisée actuellement la discussion, reposent toutes sur des faits d'observation incontestables (si l’on met à part la détermination de la composition des nydrates dissous). On peut d’ailleurs remarquer qu'elles ne sont pas incompatibles, et que rien ne s'oppose à ce que plusieurs effets se superposent dans les dissolutions. Nous avons vu que, dans les gaz qui n'obéissent pas à la loi d'Avogadro, le dédoublement de la molécule pouvait se faire sui- vant deux modes différents. Il n’est pas diflicile d'imaginer des cas dans lesquels ces deux modes de dédoublement se produiront simultanément ; si l’on chauffe, par exemple, de l’acétate d'’ammonia- que, on aura d’abord le äédoublement du sel en acide et base, puis le dédoublement de la molé- cule d'acide acétique, On peut donc admettre que ces deux cas se présentent également dans les dis- solutions et, de plus, comme les molécules salines se déplacent, non dans le vide, mais dans un milieu actif, l'eau, il n'y a rien d'étonnant à ce que ce milieu puisse réagir sur elles et donner dans cer- tains cas des agrégalions moléculaires complexes. Il semble donc qu’en somme, on peut admettre qu'il se produit plusieurs effets par la dissolution d'un sel dans l’eau, l’un ou l’autre de ces effets dominant, suivant les conditions dans lesquelles on opère, sans qu'il soit possible de les distinguer nettement dans l’état actuel de la science. Ces effets seront : 4° Une associalion des molécules de l’eau avec celles du sel, ne se produisant que dans certains cas particuliers; 2° Un dédoublement des molécules salines pouvant s'effectuer, soit par désagrégation, soit par dissociation électrolyti- que, et devenant d'autant plus marqué que la dis- solution est plus étendue. Georges Charpy, Professeur à l'Ecole Monge. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 647 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques. WWiladimir de Œannenberg, (M.), Professeur au Lycée de Lyon : Sur les équations aux dérivées partielles du premier ordre à deux variables indépendantes, qui admettent un groupe continu de transformations. Thèse de doctorat soutenue le 23 juillet 1891 devant la Facullé des Sciences de Paris. Gauthier- Villars et fils, 55, quai des Grands-Augus- tins, Paris, 1891. La théorie des groupes continus de transformations due à M. Sophus Lie commence à devenir classique en France comme ailleurs !, Nos géomètres n’ont pas perdu de temps pour utiliser dans leurs recherches un pro- cédé si éminemment suggestif, qui fournit tant de points de vue nouveaux et inattendus. Il suffira de citer comme exemple plusieurs passages du Mémoire de M. Picard, couronné en 1888 par lAcadémie des Sciences, — sur les fonctions algébriques de deux va- riables indépendantes ?, M. de Tannenberg, personnellement élève de M. Lie, a présenté une thèse de doctorat, qui est une appli- cation des groupes à un problème indiqué par M. Lie lui-même. Ce travail est bien propre à montrer com- ment une théorie neuve transfigure une matière aussi ancienne et rebattue que les équations aux dérivées parüelles du premier ordre à deux variables indépen- dantes. À une pareille équation F,M. de Tannenberg associe une équation ® aux différentielles totales du premier ordre, qui se déduit de F par un procédé simple. L’équation EF définit dans l’espace un système bien connu de courbes caractéristiques; les deux équations d'une pareille courbe contiennent, outre les coordon- nées æ,y elz, trois paramètres, à, b et e, qui distinguent les unes des autres les diverses caractéristiques, Si l’on prend maintenant #, y,z pour paramètres, a et b pour coordonnées d’un point dans un plan, c pour le coeffi- cient angulaire de la tangente à une courbe passant par le point, les deux équations de la caractéristique définissent un système de courbes planes à trois pa- ramètres æ, y el 3. Ce système est aussi défini par une équation différentielle ordinaire H du troisième ordre entre & et b, La connaissance de l’une quelconque des trois équations F, ® ou H assure celle des deux autres, M. de Tannenberg étudie les équations F qui possèdent la propriété de l’invariance par rapport à un groupe de M. Lie de transformations effectuées sur les variables æ,y et z: ce groupe substitue à ces variables d’autres x/,y° et z/, fonctions des premières et de quatre paramètres au moins. H possède alors la propriété de l’invariance par rapport à un groupe de transforma- tions planes de contact, c’est-à-dire de celles qui n’al- tèrent pas le contact des courbes, Telle est l’idée fon- damentale, indiquée par M. Lie, de la thèse. Les groupes de transformations de contact ont été depuis longtemps construits par M. Lie; M. de Tan- nenberg cherche parmi eux ceux qui ne changent pas H. Il trouve alors que H peut se ramener à une forme canonique particulièrement simple et facile à intégrer. Il existe de ces formes canoniques sept pour H et huit pour F ou , 1 Un résumé succint de la théorie des groupes de Lie fait par MM. de Tannenberg et Vessiot a été inséré au Bulle- lin des Sciences Mathématiques, année 1889. 2 J'ai moi-même fait une application des groupes à l’inté- gration de l’équation différentielle ordinaire du premier ordre (Comptes rendus, 16 mars 1891). Telle est la matière des sept premiers chapitres de la thèse; les deux derniers contiennent des considérations géométriques originales et intéressantes. M.de Tannen- berg étudie les courbes intégrales des équations canoni- ques ® aux différentielles totales et les complexes, sur lesquelles sont situées leurs tangentes; puis sont cons- truites les caractéristiques des équations canoniques F aux dérivées partielles ; ces courbes sont très sim- ples : droites ou transformées homographiques d’une hélice ou d’une loxodromie.. .. Une note en appendice contient la réduction à la première des huil formes canoniques de deux équa- tions F et ®, connues depuis longtemps : il s’agit de léquation F aux dérivées partielles de Monge, dont les normales aux surfaces intégrales touchent une sphère, et de l’equation ® aux différentielles totales, étudiée par M. Darboux, où les tangentes aux courbes intégrales sont normales à une quadrique d'un fais- ceau homofocal. M. de Tannenberg annonce qu'il va, dans une publi- cation prochaine, indiquer les caractères grâce auxquels on pourra, sur une équation donnée F, recon- naître si elle possède la propriété de l’invariance vis-à- vis d’un groupe de Lie: ce sera un progrès sérieux pour le calcul intégral, car il existe des méthodes générales d'intégration pour les équations de l'espèce considérée qui admeltent un groupe, Le travail de M. de Tannenberg continue dignement la brillante série des thèses de mathématiques que nous sommes habitués à voir à la Faculté des Sciences de Paris, Léon AUTONNE, Sir William Mhomson, — Popular lectures and addresses. — Vol. I. Navigational affairs (Lectures sur la navigation) (9 fr. 50). Macmillan and Co, Bedford Street, Covent Garden, London, 189. Sous ce titre Sir W. Thomson a réuni des articles de revue ef des lectures faites par lui sur des sujets qui intéressent la navigation, Il ne faudrait pas se mé- prendre sur le sens du mot « populaire », ni croire qu'on se trouve en présence d’une œuvre plus ou moins banale de simple vulgarisation, On n’y rencon- tre pas, 1lest vrai, beaucoup de formules algébriques ; les explications scientifiques sont relevées de compa- ons heureuses, agrémentées de détails historiques et d’excursions dans le domaine des autres sciences mais, ainsi quil arrive pour les productions littéraires bien connues des Tyndall et autres savants anglais, le fond n’est pas sacrifié à la forme : les faits sont pré- sentés avec une rigueur el une précision qui doivent salisfaire le savant autant que homme du monde, L’éminent professeur de Glascow, sans être un marin de profession, s'intéresse beaucoup, comme tous ses compatriotes, aux choses de la mer. Il a lui-même parcouru les océans sur son yacht de plaisance, et son esprit inventif s’est donné carrière dans l'étude des perfectionnements que comporte la navigation. Ainsi, au moment d'écrire un article sur les boussoles ou compas de bord, il s'apercoit que le type ordinaire de ces instruments est mal concu, théoriquement et pra- tiquement imparfait; il en invente un nouveau modèle, pour lequel il obtient des qualités qui semblaient in- compatibles, la stabilité mécanique unie à la sensibilité, en même temps qu'une facilité nouvelle pour compenser | les déviations; puis il complète son invention par des procédés ingénieux pour mesurer à bord les deux composantes du magnélisme, pour corriger les compas au moyen de ces observations de force, pour déter- | miner el observer l’azimut astronomique, Une autre 648 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX fois, frappé des difficultés qu'on éprouve à sonder exactement par de grandes profondeurs, il imagine de remplacer la ligne en chanvre par une corde de piano, puis de contrôler les indications directes par ladjonc- lion d’un ingénieux manomètre enregistreur sur lequel on lira la pression hydroslatique du fond. Toutes ces inventions, d’autres encore, très complètes et très étudiées, portent un cachet d'élégance scientifique et de simplicité pratique qui leur à conquis d’emblée les suffrages des marins. Analysons rapidement le livre qui est sous nos yeux. D'abord la navigation proprement dite, c’est-à-dire les moyens par lesquels on détermine la position en mer et l’on fixe la route ; un apercu des méthodes de la na- vigation astronomique, avec le sextant, le chronomètre et le compas. L'auteur est partisan résolu de ce qu'on appelle la nouvelle navigation, celle qui tire de chaque hauteur observée un lieu géométrique du navire et qui déduit le point de la combinaison de ces lieux. Puis des détails sur la navigation à l'estime et sur les causes d'erreur qui l’affectent : les courants marins, et des notions sur les signaux sonores employés en temps de brume. Nous avons déjà dit que sur ces su- jets l'auteur à une compétence toute spéciale. Le chapitre des marées donne un apercu de la théo- rie dite d'équilibre, telle qu'elle à été posée par Newton et acceptée jusqu'à Laplace : il montre linsuf- fisance de cette théorie, insiste surtout sur l'étude expé- rimentale du phénomème et développe les principes de l'analyse harmonique, au moyen de laquelle on dé- compose l'onde résultante observée en éléments simples représentant les effets de toutes les forces en jeu. C'est là en effet le meilleur moyen d'appliquer pratiquement la théorie de Laplace. Sir W. Thomson élait particuliè- rement bien préparé pour traiter celte question. En 4867 il avait soumis à l'Association Britannique un programme complet d'observations et de calculs de réductions; puis il avait combiné un appareil pour exécuter ces calculs mécaniquement. L'étude sur les compas débute par d’inféressants dé- tails historiques sur l'emploi de la boussole, sur ses déviations puis vient la description du compas Thomson. Le caractère de celte invention est d’avoir réduit à la fois le poids et le moment magnétique sans détriment dé la sensibilité : laccroissement de la durée d’oscillation élimine l'influence des mouvements de roulis du navire; la petilesse des aiguilles permet d'appliquer rigoureusement les procédés d’Airy pour la compensation des déviations, à l’aide de masses de fer doux et d’aimants. Mentionnons encore le chapitre relatif aux cäbles sous-marins, aux éludes que leur pose comporte, notamment aux sondages à de grandes profondeurs. Signalons enfin une étude du plus haut intérêt sur les ondes produites par le déplacement des navires, et sur les relations entre ces ondes, la forme du flotteur et le travail nécessaire pour imprimer à celui-ci des vitesses déterminées, Sur tous ces poinis, ainsi que sur les phares, l’auteur a fait des travaux originaux dont il expose les résultats en même temps qu'il résume les études de ses devanciers. : Nous avons donc là un livre qui se recommande à tous les marins, même, et surtout, aux plus instruits. Il s'adresse encore aux savants que les choses de la mer intéressent, mais qui n’ont pas le loisir de les étudier à fond. En dehors d'une riche collection de faits, on y trouvera, racontés d’une facon très sugges- tive, l'historique etila filiation des inventions qui font de sir W. Thomson un des savants contemporains qui ont le mieux mérité de la marine, E. CaspaRt. MWitz (Aimé), Docteur ès sciences, Ingéniewr des Arts et Minufactures. — La Machine à vapeur. Un vol. in-18 de 324 pages et 80 figures dans le texte. (Prix :4 fr.) J.-B. Baillière et fils, 19, rue Haulefeuille, Paris, 1891, Dans ce petit livre très élémentaire, M. A. Witz s’est proposé de mettre à la portée de tous la théorie et la pratique de la machine à vapeur; aucune des questions que soulève cet important sujet n’a été laissée de côté; certaines d’entre elles n’ont pu naturellement être ap- profondies, mais toutes ont été suffisamment indiquées pour laisser au lecteur des idées justes. Ce volume fait partie de la Bibliothèque des Con- naissances utiles; M. À. Witz, en l’écrivant, ne s’est donc pas adressé à des savants ou à des praticiens déjà au courant de la mécanique, mais bien au grand pu- blic ; il a voulu être très clair, très simple, et cependant très complet; on doit reconnaître qu’il a remarqua- blement atteint ce double but. J. Pouzer. Atkinson Longridge (James), Memb. Inst. Civil eng. — The artillerie of the future and the new powders. (L'artillerie de l'avenir et les nouvelles pou- dres). E. et F. N. Spon, 125, Strand, London; New- York : 12, Cortlandt Shreet, 1891. Ainsi que M. Longridge le remarque lui-même, le titre qu'il a choisi est fait pour étonner au premier abord ; intituler un livre l’Artillerie de l'avenir, c’est indiquer implicitement que de grands perfectionne- ments seront réalisés en artillerie, alors que d’une facon générale, dans tous les pays civilisés, on se croit, sur ce point, bien près de la perfection. Le titre adopté par M. Longridge heurte donc une opinion généralement admise; c’est pour cela qu'il l’a inscrit en tête de son ouvrage. En profond désaccord sur les principes mêmes avec les comités d'artillerie de l'Angleterre et du Continent, il a voulu appeler la discussion sur ces divergences et apporter l'autorité de son nom, de ses travaux, à ce qu'il croit être la vérité. Son livre est un livre de combat : « Celui qui a la vérité de son côté, dit Pauteur, est aussi sot que lâche s’il craint de la confesser parce que les opinions des autres ont la vogue ou la majorité, » Depuis de longues années déjà, la tendance des fa- bricants de canons est d'augmenter la longueur de ces engins et de réduire la pression qui s’y produit : ils cherchent à diminuer la force explosive en la faisant agir plus longtemps. M. Longridge est d’un avis dia- métralement opposé; il veut de hautes pressions dans des canons forts et comparativement courts. Nous ne pouvons naturellement prendre parti dans une ques- tion aussi délicate et aussi spéciale; mais, quel que soit le sort que l’avenir réserve à l’opinion de M. Lon- gridge, il l'appuie sur des expériences trop sérieuses, il a une notoriété trop considérable, pour que son ou- vrage ne fixe pas l'attention de tous ceux que préoc- cupent les progrès de l'artillerie. AUS Faye (Hervé), de l'Académie des Sciences. — Sur une révolution dans lesidées météorologiques. Extrait des Comptes-Rendus des séances de l'Académie des Scien- ces, t. CXIT, Séances du 19 mai et du 8 juin 1891. M. Faye a réuni en brochure ces deux communica- tions déjà analysées ici-même !. Les météorologistes trouveront dans cette plaquette une discussion remar- quable des idées nouvelles relatives aux grands mou- vements de l'atmosphère. LAC? Barral (G.), — Histoire d'un inventeur. Un fort volume in-4° de 600 pages avec 280 figures (8 fr.). Georges Carré, éditeur, 58,rue Saint-André-des-Arts, Paris, 1891. Ce beau volume est consacré tout entier à l'exposé des travaux de M. G. Trouvé sur l'électricité, et à la description des appareils si ingénieux qui ont donné au nom de cet inventeur sa notoriété. L. O: Poche (G.). — Origine des forces de la Nature. Nouvelle théorie remplaçant celle de l'attraction. 1 vol. in-18 (3 fr.). G. Masson, éditeur, 120, boulevard Saint-Germain, Paris, 1891, me 1 Voyez à ce sujet la Revue du 15 juin 1891, t. IT, p. 385, et du 30 juin 1891, t. Il, p. 428. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 649 2° Sciences physiques. Everett (J.-D). — Illustrations of the C. G. S. System of units, with tables of physical cons- tants; (Unités et constantes physiques) petit in-8° (6 fr. 25). Macmillan and Co, Bedford Street, Covent Garden, AS 1891. 5 Cet ouvrage, sous un titre nouveau, m'est autre que la troisième édition profondément modifiée, des Unités et constantes physiques, dont le grand et légitime succès a été consacré par des traduc tions francaise, alle- mande, russe, polonaise et italienne. Arrivé au bon moment, ce pelit livre a rendu un réel ous à la physique, en popularisant le système C. G.S., qui s’y Des exposé dans toute sa rigueur, avec l'appui, et coeflicients de transformation dans les autres systèmes usuels d'unités. L’arrangement général du livre est resté nous connaissons par la traduction de 1883 : Tables de réduction des mesures anglaises en C.G.S théorie des unités; choix des unités fondamentales ; unités mécaniques ; hydrostatique, élasticité, viscosité, déformations; astronomie (pourquoi en cet endroit ?); vilesse du SON ; lumière; chaleur; magnétisme ; élec- tricité. Un appendice contient Les rapports du Comité des unités nommé par Association britannique. L'auteur a entendu rester pratique ; en fête de chaque chapitre, il rappelle en quelques lignes les no- tions indispensables à Pintelligence du sujet, discule les dimensions des grandeurs à mesurer, en indique les unités C. G. S. et usuelles, puis donne quelques tableaux de constantes. Le tout est clair, précis, facile à saisir. Nous remar- quons, dans cette nouvelle édition, quelques para- graphes extraits des fravaux de MM. ’Rücker et Fitzge- rald, et concernant les dimensions des unités élec- trostaliques et électromagnétliques en fonelion de la perméabilité du milieu, L'auteur nous avertit que lin- troduction du chapitre de la chaleur a dù subir une pelite révolution par suite de la découverte de M. Row- land concernant la variation de la chaleur spécilique de l’eau. Nous croyons qu'il eût pu faire mieux, et maintenir les anciens nombres, en attendant des déter- minations précises qui pourraient fort bien infirmer le résultat trouvé par M. Rowland à l’aide d’une méthode trop indirecte, Par compensation l’auteur conserve en d’autres endroits des nombres bien vieillis, ceux de Pouillet par exemple sur la dépression capillaire du mercure; les points critiques mentionnés déjà par M. Van der Waals dans sa thèse ; on n'ignore pas que, sous l'impulsion même de ce travail magistral, de nombreuses et importantes déterminations ont élé faites qui complètent et rectifient ce tableau. Le lecteur pourra éprouver quelque embarras dans le choix des longueurs d'onde, légèrement discordantes citées d’après MM. Rowland et Bell et d’après le dic- lionnaire de Watt. On s’étonnera’ aussi que, dans un livre aussi purement C. G. S., certains résultats soient donnés dans des unités différentes; citons les compres- sibilités en atmosphères ou en tonnes par pouce carré, Ces quelques criliques, formulées pour la bonne règle, nous tenons à dire qu'il ne faudrait pas s’en exagérer l'importance. L'ouvrage de M. Everett demeure un guide exc ellent à travers le système GC. G.S. Mais il ne dispense en aucune facon le physicien de l'emploi de tables de constantes plus complètes, établies sur un type uniforme, el avec une sévère critique des sources, Ch.-Ed, GUILLAUME. Baume-Pluvinel (De la), — La Re au gélatino-bromure d'argent. 3° série ( 2 fr. 55) Bibliothèque photographique, Gauthier- Villars, D), quai des Grands-Augustins, Paris, 1891. Dans deux ouvrages précédemment parus, le comte Aymar de la Baume-Pluvinel avait déjà traité avec une compétence et une clarté ile les ques- üons du temps de pose et du développement :-ces deux 2, celui que livres, le dernier surtout, sont des ouvrages qui sont dans les mains de tout praticien ou amateur sérieux, car ce ne sont pas des traités écrits à la légère par un professionnel empirique, mais des traités müris et raisonnés, écrils par la main d’un photographe doublé d’un savant. Aujourd’hui, l’auteur expose avec la même autorité tout ce qui a trait aux actions latentes de la lumière : son action sur les substances sensibles, et en particu- lier sur les émulsions au gélatino-bromure d’ argent si universellement répandues aujourd’hui. Tout ce qui se rapporte aux actions chimiques de la lumière se trouve consigné, analysé et disculé dans ce petit livre, écrit dans une langue sobre et claire. C’est un livre utile, je dirai même nécessaire, un de ces opuscules que liront tous ceux qui ne se contentent pas d’un manuel opératoire appris par l'usage. mais de désirent aller au fond des choses; qui ne s'arrêtent pas au comment, mais désirent aller jusqu’au powrquoi. I n’y a que des félicitations à adresser à l’auteur pour la rédaction de son nouvel ouvrage ; il n'y aura, j'espère, que des félicitations à lui adresser pour son succès, qui me semble assuré par son nom même. Alphonse BerGer. Georges Lemoine, — Dissociation du bromhy- drate Fe one sous de faibles pressions. — In-8°, Gauthier- Villars et fils, 55, quai des Grands- Au- gustins, Paris, 1891. Les expériences de mesure sur les équilibres chi- miques sont relativement peu nombreuses, surtout en ce qui concerne les systèmes homogènes. Les seules recherches de ce genre sont celles de M. Lemoine sur l'acide iodhydrique, expériences qui ont été reprises ensuite par MM. Troost et Hautefeuille. L'acide 1odhy- drique présente un cas particulrer: e’est qu'il est formé sans varialions de volume. Il élait très important de savoir comment se comporleraient, sous l'influence des variations de pression, des composés formés avec va- rialions de volume, C’est le but que s’est proposé M. Lemoine en étudiant la dissociation du bromhy- drate d’amylène, De nombreuses mesures, effectuées par la méthode des densités de vapeur, le conduisent au résultat qu'annoncait la théorie : Powr les corps for- més avec condensation, une diminution de pression facilite la dissociation. GEORGES CHaARPY. Le Chatelier (H.). Ingénieur en chef des Mines. — Note sur le dosage du grisou par les limites d’in- flammabilité. — Annales des Mines, 8° série, tome XIX, 2° livraison de 18)1, page 388. Les Américains emploient depuis quelque temps un nouvel indicateur de grisou que M, Paul Bayard, an- cien élève de l'Ecole Polytechnique, à décrit dans les Annales des Mines, 8° série, lome XIX, page 379. Cet appareil, constitué en fait par un avertisseur et un analyseur, repose en principe sur la fivité absolue de la proportion de £az combustible nécessaire dans un mélange avec de l'air pur pour que l’inflammation se produise. Celte proportion serait de 0,060 pour le gri- sou, de 0,085 pour un gaz d'éclairage moyen. Le fait précédent, énoncé par M. Shaw, l'inventeur du nouvel averlisseur, est en contradiction avec les idées généralement admises : aussi M. Le Chatelier a-1- L voulu tout d'abord le vérifier, Les expériences qu'il & faites lui ont montré l'exactitude parfaite de cette He : « J'ai constalé, dit-il, que les limites d'inflammabilité pouvaient être déterminées d'une facon certaine et sans difficulté à + près du volume lotal. » Les irré- gularilés que lon avait cru rencontrer au voisinage des limites d’inflammabhilité tiennent sans doute au manque de précision dans la mesure des volumes ga- ZEUX. M. Le Chatelier, remarquant que les appareils de M. Shaw sont d’une assez grande complication, indique une méthode qui conduit d’une facon beaucoup plus simple au même résultat; le procédé qu'il décrit per- 650 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX met de faire très rapidement l'analyse précise de l'air des mines; nous n'avons pas besoin d’insister dès lors sur l'intérêt qu'il présente. L 0: Gautier (Armand), de l'Institut. — Sophistication et Analyse des vins. 4° édilion, 1 volume in-18. (6 fr.) Librairie J.-B. Baillière et fils, 19, rue Haute- feuille, Paris, 1891, Dans ce nouvel ouvrage, destiné principalement aux chimistes et aux experts, M. A. Gautier complète ses précédentes publications en s'inspirant des progrès ac- tuels de la science au sujet des falsifications du vin. Après avoir passé rapidement en revue les causes des sophistications des vins et les procédés employés par les falsificateurs, éminent auteur aborde la pre- mière partie de son ouvrage, comprenant la composi- tion et l'analyse des vins. Après une élude générale des matériaux du vin se trouve une série de tableaux très soignés donnant la composition des principaux vins francais et étrangers. Les méthodes d'analyse qui viennent ensuite sont décrites avec les plus grands détails. Le dosage de lalcool est indiqué par les procé- dés de l’alcoomètre, de l’ébullioscope et de l'œnorhéo- mètre, basé sur les vitesses variables d'écoulement à travers les tubes étroits de liquides plus ou moins alcooliques. Quant à l'extrait sec, M. A. Gautier préco- nise sa détermination par l’évaporation dans le vide, au point de vue de l'exactitude. L'auteur décrit, outre les dosages qu’on exécute ordinairement, l’apprécia tion du coefficient de coloration, les déterminations des acides malique, borique, sulfureux, de l'hydrogène sulfuré, de l'acide cause de l'acide ‘sulfurique libre ou à l’état de bisulfate, de l’azote, de la saccharine. Dans la seconde re consacrée à la caractérisation de chaque sophistication et à l'influence des procédés de vinification sur la composition des vins, M. A. Gautier examine l’ensemble des caractères permettant de dire qu'un vin à été mouillé, additionné de piquettes, de vins de raisins secs, qu ‘il à subi le vinage, le sucrage, le glycérinage ou le mutlage, le phosphatage ou le lartrage, La coloration artificielle des vins prend une grande place dans cette seconde partie : les diverses matières colorantes végétales ou dérivées du goudron de houille sont d’abord étudiées en détail; puis viennent les divers essais des vins par la craie armée de réac- tifs ou par les réactifs ordinaires, et enfin des tableaux indiquant la marche à suivre pour reconnaître la na- ture de la couleur ajoutée au vin suspect. L'auteur continue en indiquant les considérations permettant de dire qu'un vin à été plâtré, déplâtré, salé, aluné, additionné de matières minérales ou de tannins. Le volume se termine par un examen sommaire Les maladies des vins : ascescence, lourne, pousse, amer tume, graisse, et des remèdes à f apporter. Enfin, un chapitre spécial sous le titre : documents à consulter, comprend les lois, circulaires, rapports, ete., relatifs aux vins. Deux planches coloriées relatives aux essais par la craie albuminée et deux planches reproduisant les le- vures et les germes des maladies du vin, complètent l'ouvrage de M. A. Gautier, Ce livre est à recommander, non seulement par sa précision el sa clarté, mais aussi par les nombreuses observations et innovations théoriques et pratiques qu'il contient et que l’auteur a acquises par son habi- leté et sa longue expérience du sujet traité, A, HÉBERT. 3° Sciences naturelles. Costantin (J.)el Bufour (L.). — Nouvelle Flore des Champignons. 1 vol. in-12 (Prix à fr. 50 broché. 6 fr. reliure anglaise.) Librairie Paul Dupont, Paris, 1891, Les prospectus sont souventitrompeurs: ilspromettent plus qu'ils ne donnent ; mais c’est là, nous sommes heureux de Je dire, un reproche que l’on ne pourra pas faire au pelit volume lout récemment publié par MM. Costantin et Dufour. aux bolanistes n'avaient, à coup sûr, rien de séduisant : le papier était mauvais, le texte et les figures mal tirés; mais le livre a fort heureusement les qualités inverses, et son exéculion typographique est remar- quable, malgré les nombreuses difficultés qu’elle pré sentait. Le but que les auteurs se sont proposé est de mettre à la portée de tons la connaissance des Ghampignons basidiomycètes dans un livre complet et d’un prix mo- déré, et ils y sont arrivés : ils ont dressé pour cela des clefs dichotomiques faciles à consulter, qui renvoient à de charmants croquis réunis en planches. La flore de MM. Costantin et Dufour, qui s'adresse surtout aux débutants, deviendra le vade mecum du mycologue, et nous lui souhaitons {out le succès qu'elle mérite, 2. SAUVAGEAU. Les prospectus adressés Chauveaud (Guslave). — Recherches embryogé- niques sur l'appareillaticifère des Euphorbiacées, Urticacées, Apocynées et Asclépiadées. — Thése présentée à la Faculté des Sciences de Paris. Ann. des Se. nat. G. Masson, 120, boulevard Saint-Germain, Paris, 1891. Bien que la liste soit déjà fort longue des travaux consacrés à l'étude des laticifères et du latex, il reste encore, dans ce coin obseur de l'anatomie et de la physiologie végétales bien des questions à élucider et de nombreux problèmes à résoudre. M. Chauveaud n’a pas abordé le moins difficile et le moins intéressant de ces problèmes en se proposant de rechercher Pori- gine des laticifères jusque dans l’embryon d’un cer- tain nombre de plantes appartenant aux quatre familles citées plus haut, Il a été précédé dans celte voie par Schmalhausen qui dans un travail relativement récent (1877) a étudié l’origine des laticifères non-seulement chez les Euphor- bes, mais encore chez les Asclépiadées, Apocynées, Urticées, Chicoracées et Campanulacées, Cet auteur à montré que chez Euphorbe, par exemple, les laticifères se différencient de très bonne heure comme cellules distinctes à l’intérieur de l’embryon; il a indiqué la situation respective de ces cellules initiales et, les sui- vant dans leur évolution, les a vues émettre des prolon- gements qui s'anastomosent pour former un anneau, d'où se détachent des rameaux qui se rendent à la racine, aux cotylédons, au cône végétatif, pour donner naissance à tous les laticifères de la plante, aucune nouvelle formation de cellules laticifères nintervenant ultérieurement. Ce sont ces résultats que M. Chauveaud s’est proposé de vérifier, de compléter et d'étendre, Au sujet de Pori- gine des laticifères par des cellules déjà nettement distinctes dans les tissus de l'embryon, ï n'a pu que confirmer les fails énoncés par ses devanciers ; mais grâce à une technique nouvelle qui lui à permis ‘d’étu- dier les embryons les plus petits, il a fixé dans beaucoup de cas le nombre et la situation respective de ces cel- lules initiales ; il a montré qu’elles apparaissent tou- jours dans le mème plan transversal de l'embryon (plan nodal) et qu'elles appartiennent dans la plupart des cas au péricycle. Poursuivant ses investigations pen- dant le développement de l'embryon, il a décrit en détail la formation de l’anneau qui doit donner nais- sance aux laticifères de la racine, des cotylédons et de la tige et il a suivi attentivement le trajet des lati- cifères dans Jes deux premiers de ces organes au début de la germinalion; enfin il a cru pouvoir affirmer que, dans les cas où la plante acquiert des formations secon- daires, ces formations sont parcourues par des latici- fèresissus des branches voisines des assises génératrices et appartenant au système laticifère primitif; on ne constaterait jamais l'apparition de nouvelles initiales après les premiers stades du développement embryon- naire. A l'encontre de Schmalhausen qui niait le passage des laticifères de la racine dans les radicelles, il à BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX établi l'existence des laticifères dans ces derniers organes, confirmant ainsi les résultats de Schullerus; il a montré en même temps que ces laticifères des radicelles n'existent jamais que dans le cylindre cen- fral et que leur nombre, toujours très restreint, est intimement lié à celui des faisceaux, é Malheureusement M. Chauveaud ne paraît pas avoir suivi bien loin les prolongements des laticifères primor- diaux dans la tige et dans les feuilles, de sorte que ce chapitre de l'histoire des laticifères, de tous le plus intéressant, nous échappe encore. L'auteur à beau soutenir que seule l'étude du développement embryon- naire peut donner une notion exacte et complète de l'appareil laticifère de la plante adulte, nous ne voyons pas très bien comment la connaissance de ce dévelop- pement embryonnaire pourra nous expliquer là marche et la distribution des laticifères dans la tige, les bran- ches et les feuilles, d'autant plus qu'il avoue lui-même (p.149) avoir vainement cherché les débuts de l'appa- reil laticifère dans l’embryon des Vinea major, Vinca minor, Amsonia latifolia et Tabernæ montana qui pos- sèdent cependant des laticifères dans les organes de la plante adulte ; nous sommes bien obligé d'en conclure que tous les latcifères n’ont pas une origine embryon- naire et qu'il est peut-être fort imprudent d'émettre une opiniou aussi générale sans preuves suffisantes à l'appui. L'auteur discute dans les deux derniers chapitres la nature morphologique des laticifères et leur importance au point de vue de la classification. Nous ne croyons pas que ces deux questions puissent être éclairées d’un jour nouveau par les observations contenues dans la thèse de M. Chauveaud, puisque ces observations inté- ressent presque uniquement le développement des lati- cifères dans l'embryon; nous ne suivrons donc pas l’auteur dans les considérations théoriques qu'il à cru devoir émettre. Nous ne le chicanerons pas non plus outre mesure sur un certain nombre de points de détail qui seraient peut-être fort discutables, ni sur le singulier travers dans lequel il est tombé en affublant des noms les plus bizarres les objets les plus vulgaires : il était bien inutile en effet d'inventer le nom de mi- croplyne pour désigner un entonnoir et celui de microzète pour un support à verres de montre. Nous devons malheureusement adresser à l’auteur une cri- tique dont l'importance ne lui échappera pas. Son travail est surtout une œuvre de vérification destinée à préciser utilement les détails de faits déjà énoncés ; or les qualités maîtresses d’un mémoire de celte nature doivent être évidemment la minutie dans les détails et la rigueur dans les descriptions. Nous sommes obligé de reconnaitre que ces qualités de précision se trouvent singulièrement amoindries par ce fait que l’auteur n'a pas pris soin d'établir une correspondance rigoureuse entre les numéros des figures et les indications de son texte. Nous n'avons pas relevé moins de trente de ces indications erronées qui rendent la lecture du mémoire particulièrement pénible, sinon impossible. Nous nous permettons de signaler ce fait, car de telles incorrec- tions surprennent, surtout quand on les rencontre dans un travail présenté à la Faculté ef soumis à sa sanc- tion, Henri Lrcoure. Verneau (R). Les races humaines. (Collection des merveilles de la Nature, de Brehm.) — Un vol in-8° de 800 pages avec 500 figures (11 francs). J.-B. Baillière et fils, 19, vue Hautefeuille. Paris, 1891. Depuis l’ouvrage de Richard en 1843, il n’y aurait pas eu, d’après la préface que M. de Quatrefages a écrit pour le livre de M. Verneau, de traité complet d’anthro- pologie. Après avoir éliminé comme trop suecincts ou trop incomplets les livres de Latham, d’Omalius d'Hal- loy, le savant professeur présente le travail de son pré- parateur au Muséum. Qu'il nous soit permis de rappe- ler le précis d'anthropologie de Hovelacque et Hervé, paru en 1887, ouvrage dont la lecture semble un peu aride et sèche, mais qui est très documenté et très complet, Un apercu d'anthropologie générale constitue une introduction très utile à l'étude des Races humaines, et permet à l’auteur d'exposer ses vues personnelles sur quelques points encore fort contestés de la science. Sur plusieurs M. Verneau hésite à suivre docilement son maitre, M. de Quatrefages; c'est ainsi qu'il ne se décide pas à trancher la question du Règne humain, mais se contente d'exposer les faits apportés par les monogénistes et les polygénistes pour la défense de leur opinion. à Signalons les pages consacrées à l’homme préhislo- rique, aux divers âges de cette préhistoire, et notam- ment l'exposition critique des faits qui tendent à établir l'existence d’un ancêtre à l’époque tertiaire. Les chapitres consacrés aux races actuelles sont pleins de renseignements sur les caractères ethniques, les habitudes sociales et les mœurs. La linguistique, si importante aujourd'hui, est malheureusement oubliée. Parmi les nombreuses figures qui illustrent le livre, un grand nombre proviennent de clichés bien connus, un peu usés; mais il en est quelques-unes nouvelles. copiées sur les photographies appartenant à la collec- tion du Muséum, ES (0) 4° Seiences médicales. Duroziez (D'P.), — Traité clinique des maladies du cœur.— 1 vol. in-8° (10 fr.) G. Steinheil, 2, rue Ca- simir-Delavigne, Paris, 1891. Depuis sa thèse sur la digitale, publiée en 1853, M. Duroziez n’a cessé de s'occuper du cœur, et de nom- breux mémoires sur ce sujet ont montré que ses re- cherches n’élaient pas stériles. C’est l’ensemble de ces travaux, le résultat de cette longue expérience que l'auteur nous donne dans un volume qu'on liraavec un grand intérêt, Ce n’est pas là un traité didactique des maladies du cœur, mais une sorte d'enseignement familier, comme on peut le faire à la visite d'hôpital, On sent que l’au- teur à fouillé passionnément son sujet, qu'il n’a pas accepté aveuglément les opinions transmises par les maitres, mais qu'il les à contrôlées au lit du malade ; il en est résulté que la complexité des cas l’a éloigné des types classiques et qu'il a cherché à rendre fidèle- ment les très nombreux aspects que peuvent présenter les cardiaques. Comme il le dit lui-même : « le mé- decin voit des malades et non des maladies. » Cette complexité même peut dérouter un peu l’étu- diant qui débute; mais pour peu qu'on ait quelque expérience de lauscultation, on sera bien aise de trouver ici une interprétation raisonnée des apparentes contradictions qu'on a cru relever entre les signes ob- servés et la description officielle du type idéal corres- pondant, La première partie du traité contient les données anatomo-physiologiques nécessaires à connaitre pour comprendre le mécanisme des troubles cardiaques. La deuxième partie est consacrée à la Pathologie du cœur : elle s'ouvre par un chapitre de sémiotique très intéressant par le caractère essentiellement pra- tique des observations : on voit que l’auteur s’est ap- pliqué à se faire une méthode personnelle d'examen du malade, et c’est le résultat de cette expérience dont il veut faire profiter le lecteur. On y trouve déjà les découvertes originales auxquelles le nom de Duroziez reste attaché: le claquement présystolique des veines crurales, le double souffle intermittent. Viennent ensuite les différents types cliniques, di- visés en lésions des membranes, rétrécissements et insuf- fisances, lésions combinées, lésion de l'aorte, ete. Signalons en passant le rétrécissement mitral pur, dé- crit pour la première fois par l’auteur en 1877, d’ori- gine congénitale, qu'il faut distinguer du rétrécisse- BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX ment mitral rhumatismal,saturnin, et caractérisé par la constance et la pureté des bruits et du rythme, de plus, spécial à la femme. Gelte lésion, d'abord dis- cutée, souvent méconnue, est rare, en somme, el peut- être aujourd'hui trop facilement admise dans des cas qui n'ont rien à voir avec elle, A noter la description du grand cœur rhumatismal, montrant bien limprésnation de tout l'organe par le rhumatisme, et combien il faut faire bon marché ici de la mécanique cardiaque isolée. Plusieurs autres chapitres méritent d’être mention- nés comme ayant un caractère de réelle originalité : cœur et hystérie, dégénérescence graisseuse et électri- sation du cœur, angio-sclérose, etc. Le chapitre du traitement est surtout une étude consciencieuse et pratique de la digitale : les autres médicaments cardiaques, si nombreux depuis quel- ques années, et pour lesquels beaucoup de praliciens tendent à abandonner la digitale, ne sont admis par l’auteur que d'une facon très secondaire. Une troisième partie résume la partie fouffue du volume, et schématise en quelque sorte les descrip- lions causées et entremèélées d'observations, dont nous avons indiqué le caractère complexe : c’est le tableau diagnostique des maladies du cœur. Tout ce livre, nous le répétons, est écrit d’un style familier et se lit très facilement : M. Duroziez à bien fait de réunir ainsi ses nombreux fravaux disséminés dans diverses publications; leur ensemble constilue un tout d'intérêt réel et d’une utilité pratique incon- testable, D' Ray. Duranp-FARDEL. Ærousseau (D'). — Guide pratique pour le choix des lunettes (Prix : 1 fr. 50). Societé d'édition, 4, rue Antoine-Dubois, Paris, 1891. Comme le Dr Trousseau le dit lui-mème dans sa préface, son petit guide en 80 pages ne contient aucune considération théorique : il est exclusivement pratique. Cependant il paraît difficile qu'un étudiant ou un médecin puisse trouver dans ce court résumé les notions nécessaires à l'examen des yeux et à Ja correction des diverses amétropies, Cette tâche sera encore rendue plus difficile par un certain nombre de lapsus ou plutôt d'erreurs typographiques qui pour- raient induire en erreur les personnes peu habituées à l’étude de la vision, Ainsi il est dit page 38 qu'en enlevant le cristallin on ne rend l'œil hypermétrope qu'au cas très rare où la myopie dépasserait 11 D; c’est évidemment le contraire que le D' Trousseau à voulu dire, De même plusieurs passages clairs pour celui qui sait, seront lus difficilement par tout le monde. Aussi pensons-nous que cette petite brochure devra plutôt servir d’aide-mémoire au médecin quia su, mais auquel la mémoire peut faire défaut par suite d’un manque d'habitude de ce genre de question; à cet égard elle rendra de réels services. Dr G. Weiss, Straus et N. Gamaleia. — Recherches expéri- mentales sur la tuberculose. La tuberculose hu- maine. Sa distinction de la tuberculose des oi- seaux — Arch. de méd. expérim. et d'anat. pathol., Paris, juillet 1891 T. IL, p. 457. MM. Straus et Gamaleia donnent dans ce mémoire le résultat d’une étude qu'ils ont faite aussi complète que possible du bacille de la tuberculose humaine et de celui de la tuberculose aviaire, différents l’un de l’autre par leurs effets, ainsi que cela a été établi récemment par Rivolta, Maffucci, Koch, Cadiot, Gilbert et Roger. Semblables pour la forme et pour la réaction à l'égard des matières colorantes, les bacilles de ces deux variétés de tuberculose se distinguent déjà par l'aspect de leurs cultures sur milieux solides. Tandis que les cultures de tuberculose humaine sur le sérum, sur la gélose glycérinée, sont sèches, écailleuses ou verruqueuses, ternes et dures, celles de laviaire sont humides, grasses, plissées et molles. Le bacille humain ne se développe pas à 43°; l’aviaire pousse rapidement et abondamment à celte température. Leurs effets pathogènes sont différents : le chien jouit d’une immunité très grande à l’égard de la tuber- culose aviaire; il est facile de lui communiquer la tuberculose humaine. La poule, au contraire, absolu- ment réfractaire à la tuberculose humaine, succombe régulièrement à Vlinoculation de la tuberculose aviaire. Chez les animaux, tels que le lapin, le cobaye, offrant de la réceplivité pour les deux bacilles, les effets de linoculation sont différents: le bacille humain pro- voque constamment chez ces animaux l'apparition de tubercules dans le poumon, la rate etle foie. Le bacille aviaire les tue sans lésion apparente dans les organes internes. L'emploi des milieux glycérinés ne modifie pas les propriétés pathogènes des deux bacilles. Dr Henri HARTMANN. Ch. Carrière, Etude sur la purification des eaux courantes. — Transactions of the American Society of civil Enginers, 1891. p. 21. L'assainissement spontané des fleuves a déjà été ob- servé par un grandnombre d’hygiénistes : lesétudes sur la purification de l’Isar à sa sortie de Munich, où il recoit toutes les immondices, de la Vupper après son passage à Elberfeld, de la Seine enfin, sicontaminée par les déjections de Paris, sont classiques. Il est néan- moins très difficile de déterminer le parcours néces- saire dans chaque cas à cette purification, tant sont peuplées les rives de ces fleuves. Le D° Carrière a pu entreprendre quelques recherches à ce sujet dans des circonstances plus favorables : il a étudié à ce point de vue certains fleuves américains des régions encore peu habitées du Far-West. Ces rivières, polluées par les agglomérations humaines, coulent ensuite pendant plu- sieurs milles sans être exposées à de nouvelles sources de contamination. Il était donc plus facile d'éliminer les causes d’erreur et d'observer avec plus de précision les variations de la richesse bactériologique des cours d’eau. Malheureureusement les observations, comme l'ont fait remarquer quelques membres de la Société des ingénieurs civils dans la discussion qui a suivi ce Mé- moire,ne sont pas suffisamment nombreuses ; quelques unes même sont en contradiction avec les conelu- sions de l’auteur.Pour le Dr Carrière, les eaux courantes possèdent un pouvoir de purification très net, et cette action est constatée par la diminution du nombre des bactéries dans les échantillons d’eau pris à différentes distances du point de contamination. Quant à la dis- tance où cette purification est suffisante, elle est natu- rellement très variable; dix milles sufliraient, d'après certaines observations, alors que dans d’autres cas l’eau serait encore {rès polluée après une course de trente milles; mais la méthode d’énumération des colonies es£ insuffisante ; il importe avant tout de savoir ce que deviennent les bactéries pathogènes, le sort des autres intéressant peu les hygiénistes. M. Carrière suppose que ces bactéries pathogènes perdent une partie de leur virulence ou sont tellement diluées que leur petit nombre dans une cerlaine quantité d’eau les rend imof- fensives, Ces suppositions acceptables ne sontappuyées par aucun fait précis. Quant au mécanisme de l’assainissement, il est des plus complexes : action des algues et des micro-orga- nismes non pathogènes, phénomènes d’oxydation, dé- pôt de bacilles aux points morts. Ce sont là des causes déjà connues et généralement admises. Dans la discus- sion, on à rappelé le rôle que le D' Sorby accorde aux organismes plus élevés, tels que les Infusoires et les Entomostracés, dans l'assainissement des cours d’eau, les agents animés jouant, selon lui, un rôle beaucoup plus important que les processus chimiques. AUDE ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 653 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET:DE L'ÉTRANGER (La plupart des Académies et Sociétés savantes, dont la Revue analyse ordinairement les travaux, sont actuellement en vacances.) ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 1% septembre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Le Cadet : Ob- servations de la comète Wolf, 1884 III, faites à l’équa- torial coudé de l'Observatoire de Lyon. 20 SGIENCES PHYSIQUES. — M. H. Faye résume la discussion qui s’est élevée récemment entre M. Hann et M. Ferrel au sujet de la théorie des cyclones. M. Hann, s'appuyant sur une nombreuse série d'obser- vations de température dans les montagnes, avait dé- montré que la variation de la température atmosphé- rique suivant la verticale ne peut pas être la condition première des cyclones comme l’admet la théorie de la convection. M, Ferrel, partisan de cette théorie, discute la valeur des observations de M. Hann et celui-ci pré- sente leur défense. M. H. Faye fait remarquer à quelles difficultés se heurte maintenant la théorie de la con- vection, qu'il combat depuis longtemps.— M. Paquelin présente un foyer formé de fils de platine demeurant incandescent au milieu de l’eau. Le dispositif de ce foyer, qui a donné à l’auteur les meilleurs résultats, consiste en une bande de toile de platine, enroulée sur elle-même en forme de cylindre plein et enchassée dans une cupule de même métal à tige creuse. On chasse dans ce foyer un mélange gazeux d'air et de vapeurs hydrocarbonées en proportions convenables. On enflamme le mélange ; la flamme disparait bientôt comme absorbée par le platine el le foyer devient incandescent, Lorsque le gaz y est projelé sous la pres- sion produite par la poire de Richardson, ce foyer prend un éclat comparable à celui de la lumière élec- trique ; il peut être plongé dans Peau sans cesser d’être lumineux. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. À. Rommier rapporte l'observation suivante d’un viticulteur du Bordelais, M. H. de Meynot. Deux vignobles, situés l’un à Saint-Emilion, l’autre dans la Dordogne, donnent normalement des vins très différents, celui de la Dordogne étant de qua- lité inférieure; mais si les raisins de ce dernier sont lransportés à Saint-Emilion et foulés dans une cuve ayant contenu de ce vin, ils donnent un vin semblable au Saint-Emilion ; ilen est de même si les cuvées de la Dordogne sont ensemencées avec une petite proportion du moût de Saint-Emilion. —- M. Maupas à pu détermi- ner, pour l'Hydatina senta, une condition de milieu dont l’action sur les générateurs détermine la sexualité des produits. On sait que, dans celte espèce, certaines mè- res pondent exclusivement des œufs mäles, d’autres exelusivement des œufs femelles, Or, en faisant varier la température du milieu où s’engendre lœuf dont sortira la femelle, on obtient à volonté des pondeuses de mâles ou des pondeuses de femelles, Les œufs dé- veloppés entre 26° et 28° C. donnent des pondeuses de mâles; ceux développés entre 14 et 15° C. donnent des pondeuses de femelles. —M. À. Chatin a étudié lestruf- fes blanches de Syrie connues sous le nom de Kammé ; il les détermine comme une espèce nouvelle de Terfezia le T, Claveryi, du nom du Directeur du Commerce aux Affaires étrangères, qui a procuré les matériaux de son {travail à M. Chatin. Mémoires présentés. — M. $. Philippidès adresse un mémoire sur la sériciculture dans la région de Brousse. — M. F. Quénisset adresse une observation de Jupiter pendant le passage du troisième satellite devant la planète, — M. Rollet adresse une note relative à la théorie des polyèdres. — M. A. Maury adresse une note relative à un projet de modification du théodolite pour la mesure des angles avec une grande approxi- mation. £ Séance du 21 septembre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. Sy : Observations de la nouvelle planète Charlois (28 août) faites à lé- quatorial coudé de l'Observatoire d'Alger. — M. &. Le Cadet : Observations de la comète Wolf (1884 e IN) faites à l’équatorial coudé de l'Observatoire de Lyon, — M. J.J. Landerer : Sur l’éclipse partielle du pre- mier satellite de Jupiter par l’ombre du second. — M. Mouchez présente le deuxième volume du Catalo- gue de l'Observatoire de Paris; les observations néces- saires pour le Catalogue entier sont à peu près termi- nées ; C’estle manque de calculateurs qui retarde la publication des deux derniers volumes. — M, Mouchez présente à l’Académie la première partie des : « Obser- vations des nébuleuses et d’amas stellaires » de M. G. Bigourdan : cet astronome s’est proposé de mesurer avec précision toutes les nébuleuses observa- bles à Paris; un assez petit nombre l'avait été Jusqu'ici malgré de nombreux travaux sur ce sujet ; grâce à une méthode nouvelle, M. Bigourdan à pu en sept années effectuer une partie considérable de sa tâche aujour- d’hui avancée plus qu’à moitié. 2° SCIENCES NATURELLES. — M, Chauveau s’est posé la question de savoir si, dans le phénomène de Feschner (sensation chromatique subjective dans les deux yeux succédant à l’excilation d’un seul œil par une lumière colorée, l'œil excité percevant la complémentaire de la couleur excitatrice, l’autre œil cette couleur même), il s’agit d'une illusion de notre jugement ou bien de la transmission de l'excitation d’un centre perceptif au centre symétrique. Appliquant à l'analyse de ce phénomène le dispositif employé pour ses expériences récentes sur la fusion des couleurs au moyen du sté- réoscop?, el, opérant sur ces couleurs subjectives comme sur des couleurs objectives, il conclut des faits : observés qu'il s’agit bien de la diffusion de l'excitation d’un des deux centres à l’autre. —M. Ch. Brongniart : Les métamorphoses des criquels pèlerins (Acridium peregrinum). L'auteur a observé, entre autres choses, que, lors de la dernière métamorphose, le corps du criquet est rouge violacé, Plus tard, il devient jaune en passant par des couleurs intermédiaires. L'auteur conclut que la couleur des insectes, lors de l'invasion peut fournir des indications utiles sur la siluation de leur point d'origine, —- M. L. Daniel a fait de nombreux essais de greffe sur les parties souterraines (racines et tubercules) de plantes voisines ou éloignées de l'espèce ayant fourni le greffon ; il a obtenu des résultats positifs et des résultats négatifs dans l’un comme dans l’autre cas, De l'examen de ces divers cas, il conclut que la condition capitale pour la réussite d’une greffe consiste dans la possibilité du passage direct des réserves nu- tritives d’une plante dans l’autre. Mémoires présentés. — MM, P. Ribard, E. Suarës, Ravet-Dumesnil adressent des communications rela- tives à divers dispositifs destinés à prévenir les ren- contres des trains de chemin de fer, — M. À. P. Marty adresse une communication relative à un traitement des maladies parasitaires de la vigne et des plantes en général, — M. Millot-Carpentier : De la galvano- tuberculose ; méthode pour obtenir la destruction du bacille de Koch et des autres éléments microbiens pathogènes dans les lissus. L. Laprcoux. 654 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 8 septembre M. Charpentier : Néphrite infectieuse puerpérale, Le début de l’albuminurie a été très insidieux; elle n'a apparu que #4 jours après l'accouchement, Il y a eu des frissons répétés sans accidents locaux du côté de l'utérus et des annexes. La température a présenté de srandes oscillations (35°, 6 à 41°). Le pouls a oscillé entre 100 et 120 pulsations, Quant aux urines, elle ne sont devenues franchement albuminuriques que 35 jours après le début des accidents. La dyspnée existail longtemps avant que Purine présentät de l’albumine. — Discussion sur la race juive et sa pathologie, à la- quelle prennent part MM. Worms, Lagneau, Javal, GSée: Séance du 15 seplembre M. Hardy : Discussion sur la pathologie de la race juive. — M. Hérard : Rapport sur un mémoire de M. le Dr Nadaud intitulé : Du traitement de la tuber- culose pulmonaire par les injections hypodermiques d’aristol. Séance du 22 septembre. M. Cadet de Gassicourt lit un rapport sur le con- cours pour le Prix de la fondation Monbinne en 1891. — M. Charpentier : Rapport sur un cas d’amnésie post-éclamptique, publié par le D' Bidon (de Marseille). — M. le D' Duret (de Lille) : De la diplopie monocu- laire comme symptôme cérébral. — M. le D' Guer- monprez(de Lille) : 1° Une nouvelle observation d'hys- térectomie abdominale totale ; 2° Hémostase préventive de la carotide externe au moyen de la compression élastique. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 25 septembrel891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. À. C. Oudemans présente Ja troisième partie de son travail « Die Trian- sulation von Java ». de SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. P. N. Franchimont annonce que M. C. A. Lobny de Bruyn s’esl occupé de la préparation et de l'examen des propriétés d’une matière nouvelle, l'hydroxylamine., Il fait circuler un pelit flacon rempli de cette substance, en beaux cris- laux. sans couleur ni odeur, obtenue en décomposant la solution méthylalcoolique du chlorhydrate d’hy- droxylamine à l’aide du méthylate de sodium et en distillant et fractionnant le résultat dans le vide. La purelé de l'échantillon est 99,6 1/,; la substance entre en fusion à 31°,5 et, sous une pression de 35 |}, elle distille à 60° ou 61°, — M, E. Mulder présente un mé- moire « sur une substance composée, déduite de l'acide lartrique ». 39 SCIENCES NATURELLES. — M. H. Behrens annonce qu'à l’aide d’un microscope à grossissement considé- rable et à éclairage convenable il a pu mettre en évi- dence le réseau d'acier trempé sur des plaques polies sans gravure préalable à l'eau forte et sans se servir des couleurs de recuit. Les courbes serpentines fon- cées doivent être attribuées au polissage fort et corres- pondent aux courbes claires du réseau obtenu à l’aide de la gravure par MM. Sorby et Wedding; il démontre que l'acier trempé est un mélange intime de fer doux et de grains durs et irréguliers d’un carbure, Quelques va- riétés de fonte grise à grains fins se prêtent à la trempe tout aussi bien que l'acier. Le métal trempé montre des cristallites rectangulaires, Par la gravure à l’eau forte les globulites brunissent et le réseau reste clair, Le graphite a disparu à quelques lamelles près. Quand on radoucit le métal, une grande quantité de poussière noire se dépose autour des globulites. Donc, au heu de la décomposition en fer el en carbure dur de fonte blanche supposée par M. Sorby, il se montre une dé- composition en fer et en carbone libre. — M, A, A. W. Hubrecht présente son mémoire « The develope- ment of the germinal layers of Sorex vulgaris », — M. M. Weber présente le premier fascicule du tome second de son travail « Zoologische Ergebnisse einer Reise in Niederländisch-Ost-Indien », — M, J. M. van Bemmelen montre des cartes géologiques, qui font connaître les résultats des travaux de MM. J. L. C. Schroeder van der Kolk el H. van Capelle. 4° SCIENCES MÉDICALES. — M. B.J. Stokvis lit un éloge de Donders, le réformateur de l’ophthalmologie, qui était membre de l'Académie dès 1855, jusqu'à sa mort en 1889, el occupait la présidence de la section des sciences exactes de 1865 à 1883, — M. Th, W. En- gelmann fait connaitre le résultat des expériences de M. G. Gryns concernant une fonction centrifugale du nerf optique. Ces expériences démontrent in- contestablement que les fibres énaisses de ce nerf transportent des excilations lumineuses ou chimi- ques de lun des deux yeux à la rétine de lautre, ce qui se trahit par un changement des courants élec- triques constatés par M. Holmgren., — M. Engelmann présente ensuite un mémoire de M. H.J. Hamburger sur l'influence de Ja respiration sur la perméabilité des globules du sang. — MM. Engelmann et C. A. Pekel- haring sont nommés rapporteurs. — M. Stokvis pré- sente son travail « Voordrachten over geneesmid- delleer, » SCHOUTE, Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE SAINT-PÉTERSBOURG Depuis le dernier compte-rendu de ses séances, l’Académie a reçu les communications suivantes: 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Backlund présente un mémoire intitulé : Eléments el éphémérides de la comète d'Enché pour l'année 1891. — M. Bredikhin lit une note sur les radiants des Andromédides, dans la- quelle il recherche, d'après les observations faites dans ces derniers temps en Italie, les propriétés du courant des météores de la comète de Biela, Il insiste notam- ment sur la forme de la surface de la radiation et sur la durée du phénomène; suivant lui, tous ces faits concordent avec son hypothèse de l’origine des étoiles filantes. L'existence de deux courants, — l’un, connu depuis la fin du siècle dernier, l’autre ayant apparu il y a une trentaine d'années, — peut être ainsi aisément expliquée. Dans les flots qui ont formé le premier courant, la vitesse initiale était telle, que le temps de la rotation de la partie principale de ce courant était plus grand que celui de la rotation des la comète; l'excédent de vitesse était tel que les orbites des mé- téores du courant n’ont pas subi de trop grandes per- turbations par suite de l’action de Jupiter; cette pla- uèle a, au contraire, beaucoup influencé la position de l'orbite de la comète. Le deuxième courant fit son appa- rilion après que l'orbite de la comète eut pris sa nou- velle position, et ses éléments diffèrent de ceux du premier courant autant que la nouvelle position de l'orbite diffère de l’ancienne. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. Wild présente pour la publication dans le Repertorium fur Meteorologie de l’Académie, la note de M. E. Berg : Sur la fréquence et la distribution géographique des fortes pluies dans la Russie d'Europe. En se servant des observations faites pendant la période quinquennale (1886-90) dans toutes lesstalions pluviométriques de la Russie, M. Bergcherche à déterminer la périodicité et la distribution des averses pendant lesquelles il est tombé plus de 402 d’eau en 24 heures. Voici les résultats auxquels l'ont conduit ses recherches : 1° La périodicité des averses est sujette à des varialions notables d'année en année, 2% Elle - dépend de la topographie du pays, surtout en ce qui concerne la position plus ou moins continentale des localités. 3° La périodicité la plus marquée a été ob- ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES servée sur la côte sud-est de la Crimée et vers la fron- tière sud-ouest de l’Empire. Une périodicité un peu moins accentuée à été remarquée dans toute la zone qui s'étend à l’est du Dniéper, à travers Smolensk, vers le Nord. Dans le reste de l’Empire, la fréquence des averses est trop peu notable pour donner lieu à une périodicité. 49 Les averses paraissentaugmenter d'intensité en allant du nord-est au sud-ouest. 5° La limite nord de la zone où l’on a constaté des averses de plus de 100% d’eau tom- bée par 24 heures se trouve dans la Russie centrale, au voisinage de la province ou gouvernement de Moscou. 6 Sauf dans le sud-est, la fréquence des averses se répartit ainsi, suivant les saisons : très grande en été, moindre au printemps qu'en automne, 7 La durée des averses pendant la période annuelle présente son mi- ninmum dans le nord-est de l'Empire. Elle augmente à mesure que l’on s’avance vers le sud-ouest etatteint son maximum dans les provinces du sud-ouest où, dans tous les mois, sauf en février, on à pu observer des quantités d’eau tombée dépassant 40mm par 24 heures. 8° En général, les averses sont limitées comme éten- due ; cependant, on en à remarqué souvent simulla- nément sur des espaces considérables. 9 Les averses répandues ainsi sur des grands espaces sont toujours en connexion avec les dépressions barométriques ; sur la carte, la zone de la fréquence maxima des averses se présente toujours comme une mince bande entou- rant l'aire de la dépression. 10° Les grandes averses observées sur des espaces élendus sont surtout fré- quents en juillet ef août. Le mémoire original de M. Berg sera accompagné d’une carte, 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Famintsin commu- nique le projet d’un Rapport sw les progrès de la Botu- nique en Russie pendant l'année 1890. En imitant l'exemple donné par la Société russe de chimie qui publie des rapports annuels, traduits presque aussitôt en allemand à Berlin, le savant académicien pense que son rapport, le premier de ce genre pour les sciences naturelles, sera bien accueilli par (ous les savants russes qui pourront ainsi se tenir au courant des tra- vaux de leurs compatriotes et faire connaitre leurs découvertes à l'étranger. La plus grande partie du rap- port est déjà achevée par M. Famintsin en collabo- ration avec MM. Kouznetsoff et Ivanovski; elle contient les analyses d’un grand nombre de travaux botaniques. D’après une décision spéciale de l'Académie, le Rap- port sera publié en un volume à part. — M. Strauch présente, pour la publication dans le Bulletin de lAca- démie, une note sur les espèces de lézards du genre Stellio, contenant, outre l'étude critique des espèces conservées au musée de PAcadémie, la description d’une espèce nouvelle: Stellio Lehmanni. Ce lézard a été découvert vers 1840 par le D' Lehmann, dans les montagnes d'Oalyk-Taou; d’autres exemplaires (plus d’une vingtaine)ont été envoyés depuis par lesvoyageurs zoologistes russes qui onttraversé le Turkestan : MM. Kou- chakevitch, Roussof, Regel et Lidski. — MM. Shrenck, Strauch et Pleske présentent le travail de M. E. Bich- ner, conservateur du Musée zoologique de l’Académie, intitulé : Sur les dessins de la Rhytine (Rhytina Gigas Zimm.), surtout d'après les matériaux trouvés dans les manuscrits de la Bibliothèque privée de Sa Majesté l'Em- pereur, à Tsarskoïe Selo. Les manuscrits en question sont ceux de Sven Vaksel, relatifs à la deuxième expé- dition de Bebhring, dans la presqu'ile de Kamtchatka. Ignorés jusqu'à présent, ces manuscrits renferment des dessins originaux, d’après nalure, de l'animal disparu. Après avoir fait une analyse critique de tous les ren- seignements que l’on possède actuellement sur les dessins originaux de la Rhytine découverte par Steller, et après les avoir comparés à ceux que lon trouve dans les manuscrits de Tsarskoïe Selo, M. Bich- ner arrive à celte conclusion, que toutes les images connues jusqu'à présent ne sont que des copies plus ou moins réussies de celles que Väksel avait dessinées lui-même, ou bien qu'il avait fait faire à différentes époques. Les dessins qui accompagnent le journal de voyage manuscrit de Vaksel, frappent par leur exécu- tion artistique et par la vérité dans les détails. La trouvaille de M. Bichner est certainement une bonne acquisition pour la science, surtout si l’on ajoute que les notes manuserites de Vaksel donnent la descrip- lion détaillée de l'extérieur de la Rhytine etfournissent des détails sur le genre de vie de cet animal, disparu il y a déjà un siècle, Le travail de M. Bichner sera publié dans les « Mémoires » de l’Académie avec la reproduelion phototypique des dessins originaux de Vaksel. — M. Pleske lit le rapport sur l'ouvrage de M. A. Nikolsky, relatif à la faune des Vertébrés de la Crimée. Ce travail est un résumé critique de tout ce que l'on sait, soit d’après les mémoires publiés, soit d’après les collections, sur les Vertébrés de la Tauride. Dans la partie générale de son mémoire, l’auteur pose différentes questions relatives à la faune de la Crimée, montre la distribution géographique des Vertébrés dans cette contrée, suivant les saisons de l’année, et ex- plique les rapports que présente celte faune avec celles des pays adjacents. Le travail de M. Nikolsky sera publié comme supplément aux Mémoires de l’Aca- démie. — M. Strauch lit la note de M. Zaroudnyi sw une nouvelle variété de faisan : Phasianus principalis, Delat. var. Klossoiwskii Tarn., trouvée dans le Turkestan, M. Khrouchtchof donne la description d'une roche spéciale des monts Taimyr, rapportée par l’expédition dirigée par le membre de l'Académie, M. A.-Th. Mid- dendorf. Cette roche, composée exclusivement de sa- nidine et de nauséane, présente une struclure grani- toide, M. Khrouchtchof propose de Jui donner le nom de Taimyrit, d'après le lieu de son gisement, — M. Kar- pinsky fail une communication sw la structure de la chaine de montagnes qui s'étend au nord des monts Il- menskiia (dans l’Oural), et qui forme avec ces derniers un tout au point de vue orographique, aussi bien qu'au point de vue géologique. La structure pétrographique de cette chaine est beaucoup plus homogène que celle de l’Oural central, Parmi les roches dominantes, la plus remarquable estune syénile nefelilique (miaskit), trouvée tout d’abord dans les monts IImenskia, puis dans leur prolongement septentrional, près du lac de Balk, dans le mont Sobatchia et dans les collines Vichniovyia, Dans une autre communication, le savant académicien fait connaitre Les meilleures méthodes de la détermination quantitative directe de la silice; ces mé- thodes sont au nombre de deux : 1° celle proposée par lui-même encore en 1871, et qui consiste à traiter la substance examinée par l'acide su'furique concentré, dans un tube clos, à une température élevée et sous une haute pression; 2° la méthode de Bronner ou le trai- tement par l'acide hydro-fluo-silicique, qui donne de bons résultats, malgré toutes les objections que l’on ait formulées dans ces derniers temps. En terminant, M. Karpinsky montre à l'assemblée un remarquable échantillon d'opale trouvé dans le district d'Ekaterin- bourg (Oural) et que lon pourrait prendre, d’après son aspect extérieur, pour de l’obsidienne. Séance du 10 septembre 1891, 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, le Secrélaire de l’Académie lit la communication de M. Bredikhin, dé- posée sous pli cachelé, par ce dernier le 18 juillet dernier, Elle se rapporte aux courants météoriques. Voici le résumé de celle communication faite par l’auteur lui-même : « Je considère comme un couron- nement essentiel de ma théorie de l’origine des étoiles filantes, l’ernlication (basée sur les données de cette théorie) de la durée loujours plus ou moins grande des courants météoriques. Ainsi les Perséides tombent pen- dant plus d’une quinzaine de jours, ete. Cette durée est étroitement liée aux dimensions du plan de radiation. Les orbites des météores qui sont projetés de la comète au dehors dans un moment donné et sur un point donné, près de l’un des nœuds de l'orbite de la comète, se réunissent en un nœud précisément dans 656 ACADÉMIES ET SOCIÈTES SAVANTES ce point, Quant aux autres nœuds de ces orbites à dimensions diverses, ils se réunissent dans le plan de l'écliptique (et de l'orbite de la comète) ; cette réunion n'a pas lieu cependant dans un point, mais le long d’une ligne droite allant du Soleil vers l'autre nœud de l'orbite de la comète. (Voyez mon mémoire: Sur les propriétés importantes des cowrants méléoriques.) Les distances entre ces nœuds et le Soleil correspondent aux différences du temps de rotation; elles présentent, dans certaines conditions, toutes les quantités possibles depuis les unités (Punité est ici la distance du Soleil à la Terre) jusqu'aux dizaines et centaines des unités. Les grandes planètes : Jupiter, Saturne, Uranus, Nep- tune, se rapprochent périodiquement de cette ligne des nœuds, chacune après sa rotation complète : elles produisent de grandes perturbations dans les orbites des météores qui passent en même temps qu'elles à travers la ligne des nœuds et dont les rayons vecteurs ne présentent pas de grandes différences avec les rayons vecteurs des planètes. Dans le courant des Perséides les orbites des météores s'unissent en un faisceau. près du nœud descendant de l'orbite de la comète, par 317°5 de longitude : les autres nœuds se trouvent sur la ligne allant du Soleil vers la longitude 137%5. Jupiter passait près de cette ligne dans les années 1884.85, 1872,98, 1861.12, c’est-à-dire dans les intervalles de 11.86 d’an- née. Les passages de Saturne par la même orbite s'effectuent tous les 29 ans, ceux d'Uranus tous les 84 ans, ceux de Neptune fous les 16% ans, etc. Jupiter a produit de grandes perturbations dans les orbites des météores dont le rayon vecteur aux environs de la ligne des nœuds ne différait que peu de 5.2, Parmi les éléments de perturbation, les plus inté- ressants sont ceux de la longueur du nœud et de la modification de l'inclinaison, car on peut les déter- miner directement d'après les observations des mété- ores. Si, par suite des différences dans les perturbations des orbites du courant, produites par différentes pla- nètes, les nœuds des orbites s’écartent l’un de l’autre de quelques degrés, la visibilité du courant se trouve pro- longée d'autant de journées de 24 heures. La position de l'orbite de la comète (d'après le nœud et l’inclinaison) sera également modifiée, seulement à un moindre degré, par suite de perturbations subies par la comète elle-même ; ainsi la position de l'orbite de la comète 1862, IIT entre ses météores, a été sensiblement mo- difiée par l'action d'Uranus en l’an 129. Tout ce qui vient d'ètre dit sur les Perséides peut s'appliquer dans ses traits généraux aux autres courants météoriques, sauf un léger changement dans les détails, c’est-à-dire dans les nombres, » Le mémoire détaillé de M. Bre- dikhin sera bientôt présenté à l'Académie. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. Famintisin présente une note de M. Kouznetsof accompagnée d’une planche et portant le titre : Su: les nouvelles Gentianées asiatiques. O. BackLuxp, Membre de l'Académie, CHRONIQUE LE CONGRÈS ASTRONOMIQUE DE MUNICH La Société astronomique internalionale, qui se réunit tous les deux ans et qui compte aujourd'hui 318 mem- bres, à tenu à Munich sa 14° assemblée. La première séance a eu lieu le 5 août dernier sous la présidence de M. Gyldén, directeur de l'Observatoire de Stockholm. C’est principalementsous l'impulsion de cette société qu'a été entrepris le travail grandiose, concu par Ar- selander, d'observer avec précision toutes les étoiles jusqu'à la 9° grandeur inclusivement : dans la séance du 5 août il a été rendu compte de l’élat d'avancement de ce travail, aujourd’hui presque terminé, et auquel ont pris part un grand nombre d'Observatoires des di- yers pays. Cette Société surveille aussi la détermination des orbites des comètes, et Le Prof, Weiss, directeur de lOb- servatoire de Vienne, a émis le vœu qu'un Bureau spé- cial fût chargé de ces calculs. Après avoir entendu diverses communications sur des sujets très spéciaux, et décidé que la prochaine réu- nion se tiendrait dans deux ans à Utrecht, on s'est occupé enfin des petites planètes, dont les observations et les calculs constituent pour l'astronomie actuelle une charge extrèémement lourde, mais que l’on ne peut songer à négliger, car on tomberait aussitôt dans un inextricable désordre, D’ailleurs, ainsi que nous avons eu l’occasion de le dire ici (Revue, T. L p. 171) ces astres nous ont révélé des faits intéressants et peuvent rendre encore d'importants services. La Société astronomique a nommé une Commis- sion pour l'étude de cetle question et on décidera sans doute que dans chaque pays on calcule les pla- nèles qui y ont été découvertes. Or il a été découvert en France près de 100 de ces astéroïdes, Le personnel des Observatoires francais serait insuffisant pour un tel labeur; mais il sera sans doute secondé par des ama- teurs astronomes de bonne volonté qui auraient là un champ tout à fait propre pour exercer leur activité. Ces amateurs seraient sûrs de trouver auprès du per- sonnel des Observaloires tous les renseignements qui leur seraient utiles, et d’ailleurs il existe une traduc- {ion francaise récente d'un ouvrage qui leur rendrait ce travail bien facile !. r Tant au point de vue des calculs qu'à celui des ob- servalions, ce commerce des amateurs sérieux avec le personnel des Observatoires pourrait devenir des plus féconds et permettrait d'utiliser des forces importantes, aujourd'hui infructueuses faute de direction sérieuse. G. BIGOURDAN, Astronome adjoint à l'Observatoire de Paris, Erratum. — La revue annuelle de géologie, pu- bliée dans le dernier numéro de la Revue (p. 609 à 616), a été faite par M. Léon Carez ; une coquille ayant estropié la première lettre du prénom de notre colla: borateur, nous nous empressons de la rectifier. 1 Nous voulons parler du Trailé de la détermination des orbites des Comètes el des Planètes d'Oppolzer, traduit récem- ment en francais par M. E. Pasquier, professeur d'astronomie à l’Université de Louvain. Cette traduction, plus correcte encore que la dernière édition de l'ouvrage original, a été dès son apparition jugée lrès favorablement par tous les journaux astronomiques; à chaque pas la théorie est éclaircie par des exemples où rien n’est omis et qui indique même la disposition à donner aux calculs. Un appendice résumeles formules à em- ployer dans la pratique et dispense de recourir chaque fois au texte de la démonstration. L'ouvrage se termine par des tables numériques très étendues, d’une rare correction et qui abrè- gent beaucoup le caicul des orbites. Le Directeur- Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 11. 2 ANNÉE N°20 30 OCTOBRE 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER L'ÉPUISEMENT DES TERRES PAR LA CULTURE SANS ENGRAIS ACIDE PHOSPHORIQUE Depuis 1875, époque à laquelle a été dessiné le champ d'expériences de l’École de Grignon, j'ai cultivé quelques parcelles sans leur fournir d’en- grais pour savoir après combien d'années elles manifesteraient des signes non équivoques d’épui- sement. Dès 1887, cet épuisement devint sensible tandis qu’on obtenait 40.000 kilos de betteraves à sucre environ sur des parcelles maintenues en bon état de fumure, les rendements tombaient, sur les parcelles restées depuis douze ans sans en- grais, à 10 et à 13.000 kilos de:racines à l’hectare. Quels étaient les éléments disparus dont l’ab- sence se faisait si cruellement sentir? Cest là le point qu'il fallait éclaireir. Les dosages d'azote accusaient encore dans le sol : 15 environ par kilo, quantité très suffisante, d'autant plus qu'en étudiant les eaux de drainage écoulées de ces parcelles, on y trouvait une quan- tilté notable de nitrates, sunérieure à celle qui est nécessaire pour alimenter d’abondantes récoltes. Les dosages du carbone des matières organiques montrèrent au contraire une diminution très con- sidérable de l’humus, en même temps que l’exa- men des eaux de drainage indiquait que la ma- lière organique restante était très différente de celle qu'on trouvait dans les terres en bon état de fumure. Celles-ci laissent écouler des eaux ambrées, tandis que les terres épuisées fournissent des eaux inco- lores ne renfermant pas de matière organique. L'humus disparait donc assez vite d’une terre REVUE GÉNÉRALE, 1891. cultivée sans engrais, et l'on conçoit qu'il en soit ainsi; la terre est peuplée d’une multitude d’in- sectes, de microorganismes qui brûlent la matière organique et fournissent les quantités notables d'acide carbonique que décèle l'analyse de l'air confiné dans la terre arable. Je ne veux pas cependant insister sur ce point aujourd'hui, mais altirer l'attention sur un autre élément de fertilité, sur l’acide phosphorique. Il est inutile, dans une AÆevue qui s'adresse à un public d’une instruction très étendue, d'insister sur l'utilité agricole de l’acide phosphorique : le mot qu'a inséré Th. de Saussure dans ses admirables Recherches chimiques sur la végétation, écrites au commencement du siècle, reste absolument juste : « J'ai trouvé le phosphate de chaux dans les cendres de toutes les plantes que j'ai examinées et il n'y à aucune raison de supposer qu’elles puissent exister sans lui. » 1l était donc naturel, en voyant les récoltes diminuer sur les parcelles sans engrais, de rechercher si elles renfermaient encore une quantitésuflisante d'acide phosphorique. Les terres du champ d'expériences de Gri- gnon maintenues en état de ferment de 15 à 4#2 d'acide phosphorique par bon fertilité ren- kilogramme, et, contrairement à ce qui arrive pour les nitrates qui sontentrainés par les eaux de drai- nage, les phosphates ne s'y rencontrent qu’en pro- portions insignifiantes ; il n’y avait donc d’autres 9) 658 P.-P. DEHÉRAIN. — L'ÉPUISEMENT DES TERRES PAR LA CULTURE SANS ENGRAIS déperditions à craindre que les prélèvements des récoltes et ceux-ci sont en général trop faibles pour qu'on pût supposer «priori qu'ils eussent soustrail au stock énorme d’acide phosphorique, que ren- fermait le sol de Grignon, une quantité suffisante pour amener la stérilité. Ce fut donc un peu par acquit de conscience, qu'au printemps de 1889, un peu tardivement peut-être, je mis sur un trèfle qui garnissait les parcelles épuisées, une faible dose de 200 kilos à l’hectare de superphosphates ; l'effet ne fut pas bien sensible et je n’y pensais plus, quand, en 1890, le blé qui succéda au trèfle se montra infiniment plus beau, plus fort sur les parcelles qui avaient reçu le superphosphate l’année précédente que sur celles qui en avaient été privées : les parcelles phosphatées donnèrent la valeur de 22 quintaux de grains à l’hectare, rendement médiocre montrant que le sol n’était pas en bon état, puisqu'on en obtient dans les années favorables de 30 à 40 quintaux, mais bien que faible, infiniment supérieur dant aux 8 quintaux que donnèrent les parcelles épuisées qui n’avaient pas reçu de superphosphates. En 1891, de l’avoine fut semée sur une parcelle épuisée : sans phosphate, elle donna 28 quintaux métriques de grain à l'hectare ; sa voisine, pourvue de phosphate, en donna 304%, restant un peu infé- rieure aux autres terres en bon état, qui fourni- rent 361%, Les faits précédents sont singuliers, et ils méri- tent une analyse attentive : je les résume dans le tableau suivant : cepen- TERRES ÉPUISÉES BIEN FUMÉES ST sans phosphates avec phosphates Blé. 1890 (grain à l’hect.) 8 qtm. Ayoine.1891 (gr. àl’hect.) 28 qtm. 20 qtm. 30 qtm. 30 qtm. 36 qtm. Il est visible, ce que l’on sait depuis longtemps, que le blé est beaucoup plus exigeant que l’avoine, etje n'y insiste pas; mais l'avoine, pas plus que le blé, ne peut se passer d'acide phosphorique, et il faut admettre qu’elle sait le prendre et l'utiliser dans une terre où, au contraire, le blé est impuis- sant à le saisir et souffre de son absence. Pour concevoir comment des différences semblables peuvent se produire, il est nécessaire de rappeler à quel état se trouve l'acide phosphorique dans la terre arable. II Nous avons aujourd'hui d'excellentes méthodes de dosage de l'acide phosphorique : on attaque la terre par l'acide azotique et un peu d'acide sulfu- rique si elle est très calcaire; on évapore lentement à sec pour détruire la matière organique; on re- prend par de l’eau aiguisée d'acide azotique et, après une digestion de quelques heures, on filtre, on rapproche les eaux de lavage maintenues tou- jours acides par l'acide azotique, jusqu'à les ame- ner à une vingtaine de centimètres cubes; on y ajoute du nitromolybdate d’ammoniaque qui donne un précipité jaune grenu se rassemblant très bien dans les liqueurs chaudes et renfermant out l'acide phosphorique, tandis que toutes les bases restent en dissolution. Le précipité ne présente pas une composition assez constante pour qu'on puisse le peser : on le redissout dans l’ammoniaque, on ajoute des sels de magnésie, on sépare le phosphate ammoniaco-ma- gnésien par le filtre et on dose enfin, soiten pesant le phosphate de magnésie apres calcinalion, soit à l’aide de liqueurs tiltrées d'urane; on trouve ainsi facilement l'acide phosphorique total contenu dans la terre analysée. ù En employant ces méthodes, on dose de 3 à 4 mil- lièmesd'acide phosphorique dans lessols dejardins, 2et 3 millièmes dans les sols volcaniques, 2 mil- lièmes dans les bonnes terres arables, et moins de 1 millième dans les terres pauvres. Le sol du champ d'expériences, cultivé sans en- grais, renferme 1 gramme environ d'acide phospho- rique total ; un hectare de 4000 tonnesencontiendrait done 4000 kilos, et cependant cet hectare ne peut fournir à l'alimentation du blé, qui exige, pour 100 kilos de grain, environ 800 grammes d'acide phosphorique et pour 100 kilos de paille 220 gram- mes; les 81 de grain obtenu ont donc pris 6 k. 4 d'acide phosphorique et la paille correspondante 3, à ou environ 10 kilos ; ainsi une très faible frac- tion de l'acide phosphorique total a été utilisé, et c'est seulement quand on a donné, avec les 200 kilos de superphosphates ajoutés, 32 kilos d’a- cide phosphorique au sol d’un hectare, que la ré- colle a pu s'élever à 221%, exigeant de 17 à 18 kilos pour le grain et 8 à 9 kilos pour la paille. Ilest visible que la plus grande partie de l'acide phosphorique, contenu dans la terre arable du champ d'expériences épuisé, s’y trouve à un état tel que les racines de blé ne peuvent pas s’en emparer, qu'il n’est pas assimilable ; il n’en est plus ainsi dans le reste du champ qui est fumé régulièrement, car, sans addition directe d’acide phosphorique, on ob- tient les récoltes maxima, et habituellement les su- perphosphates n’exercent aucune action favorable. L’acide phosphorique se rencontre donc dans la terre arable à deux états différents: il est engagé dans des combinaisons telles qu'il est utilisé par les végétaux ; il se rencontre en oulre sous une forme où il reste absolument inerte et inutilisable. l Ann. Agron. Tome V. p. 160. ! P.-P. DEHÉRAIN. — L'ÉPUISEMENT DES TERRES PAR LA CULTURE SANS ENGRAIS 659 Pour distinguer ces deux formes, il importe de savoir comment se fait l'assimilation, de quelles matières les racines se saisissent. Elles prennent : 1° des matières solubles dans l’eau, 2 des matières insolubles dans l’eau, mais solubles soit dans les liquides qui circulent dans la terre arable, soit dans lessucs légèrement acides qui imprègnent leurs tissus. Le premier point ne mérite pas d’être discuté : on sait qu'il est possible de faire vivre des plantes en- racinées dans des dissolutions nutritives, où elles acquièrent un développement normal; on trouve en outre dans presque toutes les plantes des ré- serves, souvent considérables, de nitrates, qui ont été soustrailes aux dissolutions contenues dans le sol. Ce premier point n'a pas d'intérêt pour la ques- tion que nous abordons en ce moment : sans doute les phosphates alcalins sont solubles dans l’eau, mais ils sont retenus par les propriétés absor- bantes des terres arables! et ne se rencontrent qu’en très minimes proportions soit dans les eaux qui circulent dans le sol, soit dans les eaux de drainage. Ce n’est donc pas après dissolution dans l’eau pure, que les phosphates sont utilisés, mais seule- ment quand ils ont été arrachés au sol par des dissolvants plus énergiques, par l’eau aiguisée d’a- cide carbonique, ou encore par les sues acides que sécrètent les racines.Ces sucs sont assez énergiques pour corroder le marbre; l'expérience est facile à répéter. On place une plaque de marbre bien polie au fond d'une de ces terrines larges et plates qu'emploient les jardiniers pour faire des semis; on recouvre celte plaque de sable, puis on y plante quelques haricots ; ils germent, leurs racines tra- versent le sable et viennent buter contrele marbre, elles rampent à la surface, le dissolvent, y creusent des sillons qui représentent exactement la (race des racines, avec leurs linéamentsles plus délicats; ils sont très visibles à l'œil nu. Cette expérience montre que la racine s’insinue entre les molécules de terre, s'y applique, s’y 1 Les terres arables jouissent de propriétés absorbantes, analogues à celles du noir animal pour les matières colorantes; si l’on agite une dissolution étendue de potasse, d'ammoniaque ou de phosphates avec de la terre, puis qu'on examine le li- quide aprés cette agitation, on le trouve dépouillé des ma- tières dissoutes ou au moins très appauvri. Les nitrates au contraire ne sont pas retenues : leurs dissolutions filtrent au travers du sol et sont entraînés au dehors; toutes les eaux de drainage en contiennent; elles les conduisent aux ruisseaux, aux rivières; ous les fleuves jettent à la mer des quantités énormes de nitrates et c’est pour compenser ces pertes inces- santes que les cultivateurs font de lourdes dépenses d'engrais azotés, qu'une véritable flotte est constamment employée à rapporter du Chili le nitrate de soude qui s’y trouve et qui constitue le seul gisement important d'azote combiné actuel- lement connu à la surface du globe. moule, el qu'un contact intime s'élablit entre la racine et le sol, contact nécessaire pour que les forces capillaires du végétal entrent en lutte contre les propriétés absorbantes du sol. D'une part la racine cherche à s'emparer de l’eau et des matières retenues par affinité capillaire, de l’autre la terre les retient. La victoire n’est complète ni d’un côté ni de l’autre, et quelque énergique que soit la force que dépense la racine, elle n'arrive jamais à dé- pouiller complètement la terre de l’eau et des ma- tières assimilables qu'elle renferme: Julius Sachs a vu un pied de tabac enraciné dans une terre ar- gileuse se faner par manque d'eau, quand la terre en contenait encore 8 centièmes. C'est pendant ce contact intime que les sucs acides des racines agissent sur les matières absor- bées retenues par la terre et finissent par les arra- cher; il semble, d’après l'expérience que j'ai rap- portée plus haut, queles racines de toutes lesespèces n'exercent pas sur le sol la même action dissol- vante; nous avons vu que l’avoine parait avoir su tirer parli des grandes réserves d'acide phospho- rique du sol épuisé du champ d’expériences, des quantités suffisantes pour acquérir un développe- ment normal, tandis que le blé en était incapable ; il ÿ a là évidemment une notion nouvelle qui mé- rite une étude approfondie. Les plantes peu exi- geantes, qui se développent encore dans de mau- vais sols, sont peut-être des plantes à racines sécré- tant des acides plus énergiques ou plus concentrés que ceux que produisent les plantes qui ne se dé- veloppent bien que dans des sols fertiles. Quel est l'acide sécrété par les racines, qui dissout le marbre etattaque parfois les phosphates du sol ? Est-ce seulement de l'acide carbonique ? Est-ce de l'acide acétique, de l’acide lactique, de l'acide oxa- lique, malique, citrique ? Nous l’ignorons encore, mais on peut supposer que c’est un acide faible, el j'ai pensé depuis longtemps qu'on pourrait peut-être se faire une idée de l’état dans lequel se trouvait l'acide phosphorique dans un sol, en attaquant non plus par l'acide azotique qui dissout tous les phosphates, mais par de l'acide acétique, et comme il s’agit de prévoir, par une attaque rapide, ce que fera le végétal pendant six mois de végéta- tion, j'ai opéré à l’ébullition. En attaquant la terre par l'acide acétique à l’é- bullition, j'ai cherché à distinguer l'acide phospho- rique assimilable de l'acide phosphorique total. Ce mode d'opérer est-il justifié? C’est ce nous devons maintenant examiner. III La méthode de vérification est facile à imaginer; si l'acide phosphorique soluble dans l'acide acé- tique mérile le nom d’acide phosphorique assimi- que 660 P.-P. DEHÉRAIN. — L'ÉPUISEMENT DES TERRES PAR LA CULTURE SANS ENGRAIS lable, il est visible que nous devons trouver : 1° Que les terres, qui abandonnent à l'acide acé- tique une fraction notable de l’acide phosphorique total, nedoiventpas bénéficier de l'emploi dessuper- phosphates; elles renferment assez d'acide phos- phorique assimilable pour que l'addition d’une nouvelle quantité d'acide phosphorique soitinutile. 9° Qu'au contraire une terre qui ne cédera à l’a- cide acélique que peu ou pas d'acide phosphorique devra bénéficier de l'emploi des superphosphates. Or l'expérience vient nettement appuyer ces prémisses; au champ d'expériences de Grignon, on trouve sur les parcelles en bon état de fumure en- viron 0 gr., 3 d'acide phosphorique soluble dans l'acide acétique par kilog. de terre : les superphos- phates n’exercent aucune action. Le limon du Nil, dont la fertilité est proverbiale et qui renferme plus de 2 gr. d'acide phospho- rique total par kilog., en abandonne 0 gr.6 à l'acide acétique; les terres de la Limagne d'Auvergne, sur lesquelles les superphosphates n'exercent aucune action utile, renferment un tiers environ de leur acide phosphorique total à l’état soluble dans l'acide acétique, c’est-à-dire de 0 gr., 5 à O gr., 1 par kilogr.. Réciproquement une terre du département du Nord sur laquelle les superphosphates sont néces- saires, ne donne que 0 gr.,l d'acide phosphorique soluble dans l'acide acétique par kilog., c'est une proportion insuffisante ;enfin la terre épuisée du champ d'expériences de Grignon, sur laquelle les betteraves ou le blé ne peuvent plus se dévelop- per, n'abandonne plus à l'acide acétique que des traces indosables d'acide phosphorique. Le procédé de recherche me paraît donc de na- ture à permettre de prévoir si l'emploi des super- phosphates sera avantageux ou non; comme ce- pendant en ce moment les superphosphates se ven- dent à très bon compte, il est toujours utile de les essayer surdes surfaces peu étendues; s'ils ne mar- quent pas el si l'analyse a indiqué que le sol cède à l'acide acélique une quantité notable d'acide phosphorique, les deux indications étant dans le même sens, il n'ya pas à hésiter : il faut cesser tout achat de superphosphate. Si les deux indications sont d'accord, dans le sens opposé, c'est-à-dire si les superphosphates marquent et que l'acide acétique ne dissolve rien, l'acquisition des superphosphates s'impose : elle sera largement compensée par l'augmentation des récoltes. Un dernier cas peut enfin se présenter : les su- perphosphates augmentent les récoltes et cepen- dant l'acide acétique a dissous l’acide phospho- rique; il faut généralement en conclure que la couche superficielle est seule riche, qu’elle est peu épaisse, que le stok de terre dans lequel les raci- nes puisent leurs aliments est restreint et que non- seulement il y a avantage à employer les super- phosphates, mais qu’en outre il faut s’efforcer par des labours profonds et par de copieuses fu- mures d'augmenter l’épaisseur de la couche ac- tive. IV La méthode de recherche étant appuyée par les résullats constatés dans diverses cultures, un der- nier point reste à élucider pour arriver à com- prendre comment les parcelles du champ d’expé- riences cultivées sans engrais sont épuisées d’acide phosphorique. Au moment où a élé dessiné le champ d’expé- riences de Grignon en 1875, une fraction impor- tante de l’acide phosphorique s'y trouvait à l’état assimilable ; celte fraction a persisté dans les terres régulièrement fumées, tandis qu'au contraire l'a- cide phosphorique assimilable fait défaut actuelle- ment dans les terres maintenues sans fumure. Qu'est-il devenu ? Nous ne pouvons pas supposer que les récoltes aient été assez abondantes pour s’en emparer; en poussant les choses à l'extrême, les douze récoltes qui ont précédé les betteraves mal venues de 1887 ont peut-être pris chacune 30 kilos d'acide phos- phorique; ce serait donc 360 kilos d’acide disparu; or le sol contenait 1260 kilos environ d'acide phos- phorique assimilable, c’est-à-dire trois fois plus que les récoltes n'ont pu en prendre. Une autre cause’ est donc intervenue et ce n’est pas aux seuls prélèvements des récoltes qu’on peut attri- buer la disparition complète de l'acide phospho- rique assimilable. Pour concevoir comment il a disparu, il faut remonter à des expériences déjà anciennes exécutées parle baron P.Thénard (1858); il avait élé très frappé de voir que des terres argileuses, rougeàtres, par conséquent chargées d'oxyde de fer, amendées avec du noir animal, ne renfermaient plus, quelques années plus tard, que des phosphates de sesquioxyde, insolubles dans l'acide acétique. J'ai eu occasion d'observer le même fait sur une lerre de Sologne; il est facile, au reste, àreproduire au laboratoire : ondis- sout du phosphate de chaux gélatineux dans de l'eau de Seltz et on le met au contact d’une terre argileuse; après quelques heures tout l'acide phos- phorique à disparu de la dissolution ; plus simple- ment, on agite une dissolution de phosphate de potasse avec du sesquioxyde de fer ou de l’alumine en gelée; ils arrachent l'acide phosphorique à la potasse; celui-ci devient tout à fait insolubleetl'on conçoit par suile que du phosphate de chaux intro- duit dans le sol ou y préexistant passe peu à D' FREDK. J. BRODIE. — LA RÉCENTE ÉPIDÉMIE D'INFLUENZA À LONDRES 661 peu à l'état de phosphate de sesquioxyde. Ces mé- tamorphoses, ces changements dans les matières dissoutesintroduites dans le sol sont très fréquents : on filtre sur de la terre légèrement calcaire du chlorhydrate d’ammoniaque ; on recueille du chlo- rure de calcium : l'ammoniaque a été retenue, la chaux a pris sa place. Il est donc vraisemblable que dans notre sol de Grignon cullivé longtemps sans engrais, il n’y a pas eu réellement épuisement en acide phospho- rique, mais métamorphose du phosphate de chaux ou de magnésie préexistant en phosphates de sesquioxyde insolubles dans lacide acétique, et non assimilables, et que c’est à cause de cette transformation que les superphosphates apportant de l'acide phosphorique assimilable exercent une influence heureuse. Comment enfin n’en est-il pas de mème dans les terres régulièrement fumées? Comment l'acide phosphorique y persiste-t-il sous une forme utilisable? Les raisons sont faciles à trouver : quand on distribue à une terre du fumier de ferme, on lui donne par tonne 3 kilog. d'acide phosphorique uni à de la potasse ou à de l’ammoniaque, par conséquent soluble dans l’eau ; les apports de fumier constituent donc une fumure phosphatée qui n’est pas sans importance; mais en outre, le fumier apporte au sol une quantité notable de carbonate de potasse ; le fumier a tou- jours une puissante réaction alcaline : or, les carbonates alcalins non seulement empêchent les sesquioxydes d'amener l'acide phosphorique à l’état insoluble, mais leur enlèvent même l'acide qu'ils renferment aussitôt qu'ils se trouvent dans le mélange en proportions notables; si l’on agite des phosphates de sesquioxyde avec des carbonates alcalins, on retrouve de l'acide phosphorique en dissolution; si l’on immerge dans l’eau de Seltz de la terre renfermant des phosphates de sesquio- xyde et du carbonate de chaux, on retrouve dans la dissolution de l’acide phosphorique qui a été re- pris aux sesquioxydes; les deux réactions inverses sont possibles : elles sont limitées par les poids des matières réagissantes, et l’on concoit dès lors qu'une forte fumure de fumier apportant du car- bonate de polasse, qu'un chaulage énergique, em- pêchent l'acide phosphorique de s'engager dans les combinaisons où il devient inerte et inutili- sable et l’on conçoit en outre que les parcelles du champ d'expériences, qui reçoivent régulière ment du fumier de ferme, ne bénéficent pas de l'emploi des superphosphates, non seulement parce qu'elles reçoivent une fumure phosphatée avec le fumier, mais parce que ce fumier empêche la réac- tion qui à amené l’acide phosphorique assimilable à l’état inerte dans les parcelles restées sans en- grais depuis 1875. : Il est bien probable que les observations pré- cédentes ne s'appliquent pas seulement au cas particulier étudié, mais qu'au contraire un grand nombre de terres, sur lesquelles les superphos- phates exercent une influence heureuse, ne sont pas réeliemenl épuisées d'acide phosphorique, mais ne le renferment plus qu'à un état inerte, qui peut cesser soit par l’action des fumures de fumier de ferme, soit par l’action des chaulages et des mar- nages. Si nos terres fumées régulièrement ne montrent aucune pénurie d'acide phosphorique, c’est non seulement parceque le fumier leur a ap- porté de l'acide phosphorique, mais en outre parce qu'il à maintenu à l’état assimilable celui que le sol renfermait naturellement, tandis qu'au contraire, dans la terre abandonnée sans fumure pendant plus de dix ans, la réaction inverse s’est produite, les sesquioxydes ont décomposé peu à peu le phosphate de chaux dissous par l'acide carbo- nique et l'ont rendu non assimilable pour la plu- part des plantes de grande culture : betteraves, trèfle, blé, qui toutes ont bénéficié de l'emploi des superphosphates sur les parcelles épuisées. Quant à l’avoine, elle sait utiliser les phosphates qui restent inutiles aux autres espèces et c’est une preuve de plus qu'après avoir étudié d’une facon générale la nutrition des plantes, les agronomes doivent reprendre ces études au point de vue du mode d'alimentation particulier de chacune des espèces. P. P. Dehérain, de l'Académie des Sciences LA RÉCENTE EPIDÉMIE D’'INFLUENZA A LONDRES x La mortalité causée par l’influenza à Londres a montré vers sa fin un décroissement régulier de semaine en semaine. En considérant seulement la mortalité par l’in- fluenza,nonseulementnoustrouvonsquel’épidémie fut plus courte l’année dernière, mais encore qu'elle fit beaucoup moins deravagesetcausaun nombre de morts très inférieur à celui de cette année. L'épi- démie de 1890 éclata brusquement au commence- ment du mois de janvier. Pendant la semaine qui se termina le 28 décembre 1889, il n'y eut à Londres aucun décès par cette maladie, et dans la semaine suivante seulement 4. Dans la semaine terminée le 11 janvier 1890, le nombre s’éleva à 67, landis 662 D' FREDK. J. BRODIE. -— LA RÉCENTE ÉPIDÉMIE D'INFLUENZA A LONDRES que dans le cours de la semaine suivante il attei- gnit le maximun, 127. La mortalité commença alors à diminuer progressivement et fut de 105, 75, 38 et 30 dans les quatre dernières semaines. La gravité de l'épidémie sembla alors disparue. 11 faut cependant observer qu'encore pendant trois semaines la mortalité dépassa 20, tandis que pen- dant les quatre semaines qui suivirent celles-ci, elle fut de 10 à 17. En prenant comme totalité les six semaines pendant lesquelles l'épidémie exerça ses ravages, il est démontré que le minimum des décès fut à Londres 442, donnant une moyenne de T4 par semaine. L’apparilion de l'épidémie, cette année, date du commencement du mois de mai. Pendant le mois d'avril il n’y eut qu'un petit nombre de morts par l'influenza. Pendant les quatre semaines consi- gnées dans le Registrar-General, on trouve 1359} 10 décès. Cependant dans la semaine terminée le 2 mai le nombre des décès atteignit 37, et à partir de ce moment la maladie fit des progrès alar- mants : pendant trois semaines consécutives le nombre des morts fut de 148, 266 et atteignit le maximum de 319 dans la semaine du 16 au 23 mai. Pendant les deux semaines suivantes la mortalité excéda encore 300; après quoi elle tomba progres- sivement à 249, 182, 417 et 56; pendant la période écoulée du 4 au 41 juillet le nombre des décès se réduisit à 40. En prenant la période totale, c’est-à-dire les onze semaines terminées le 11 juillet, le nombre des morts causées à Londres par l'influenza avec ou sans complication d’autres maladies, fut de 2.027, donnant ainsi une moyenne de 184 par semaine, ou environ deux fois et demie aulant que la moyenne de 1890.Pendant septsemaines sur onze le nombre des décès excéda le maximum atteint pendant la période épidémique de l’année dernière. Après un examen des statistiques données par un estimable journal et lues devant la Sroftish meteorogieal Society le 31 mars 1890, par sir Arthur Mitchell et le D° Buchon !, il est tout à fait évident que la récente épidémie d'influenza a été la plus grave qu'il y ait eu à Londres depuis la première publication hebdomadaire de mortalité, ce qui remonte à environ quarante-cing ans. Comme les chiffres sont d'un grand intérêt, nous reproduisons le tableau donné par ce journal, en indiquant le nombre des décès pendant les cinq principales épidémies depuis l'année 4847. On remarquera que le nombre donné pour l'année dernière est très supérieur à celui dont nous avons parlé plus haut; mais les auteurs du journal cité ont compris toute la période des trois mois de janvier à mars. Pendant ce dernier OR Rens OT 1 Un extrait fut publié dans le journal anglais Nature vol. XLT, p. 596. mois l'épidémie ne fut certainement pas d’une grande rigueur; mais, comme les chiffres ne chan- gent pas l'argument général, nous avons trouvé préférable de ne rien changer aux résultats. Une addition a cependant été faite à ce tableau, celle de la mortalité par l'épidémie de cette année : Morts De décembre 1847 à avril 1848....... ........: 1.631 De mars à mai 1851........ secte ELEC 258 De janvier à mars 1855..........:..... ....".. 130 De novembre 4857 à janvier 1858... .. ... , 123 De janvier à mars 1890......... : 545 Détrnanile ASIE PEER PETER 2.027 On voit par ce tableau que la mortalité récem- ment constatée a été de beaucoup supérieure à n'importe quelle autre période depuis quarante- cinq ans. L'année 1841-48 arrive en second avec environ 400 décès de moins. En se rappelant qu'il y à quarante-cinq ans la population de Lon- dres était beaucoup moindre qu'elle n'est au- jourd'hui, il semble, de prime abord, qu'au point de vue de la rigueur, il n'y ail pas eu une grande différence. Il ne faut cependant pas oublier quela première épidémie dura plus de cinq mois, tandis que la seconde ne comprend que deux mois el demi. Un fait frappant dans cetle maladie, impropre- ment nommée influenza, consiste en ce qu’elle affecte particulièrement les poumons et les tubes bronchiques. Elle est invariablement accompagnée d'une grande mortalité par les maladies des voies respiratoires. Les statistiques relatives à ces mala- dies pourraient donc induire en erreur, notam- ment en ce qui concerne l'épidémie de 1890. Pen- dant les derniers jours de 4889 et le commencement de l'année suivante un vent froid et pénétrant fut observé sur l'Angleterre et, dans la métropole, ac- compagné, ce qui arrive souvent, d’un brouillard épais. Dans ces circonstances il s'en suivit, ce qui est naturel, une grande mortalité par les maladies des voies respiratoires et en examinant la statis- tique nous voyons que l’influenza ne faisait qu'ap- paraître, lorsque les décès par les maladies des poumons atteignaient le maximum. A partir de la première semaine de janvier, cependant, le temps devint extraordinairement doux pour la saison et les vents du sud-ouest amenèrent une hausse anormale de la température. il n'ya en effet aucun doule qu'à ce moment l'épidémie de 1890 faisait rage, la douceur de la température ayant enrayé les désordres des autres maladies des voies respi- ratoires. Cette année, cependant, l'élément météo- rologique peut presque être éliminé; bien que les vents froids furent fréquents en mai et dans la première partie de juin, la rigueur de la tempé- rature ne fut pas telle à pouvoir augmenter la | mortalité dans les maladies en question. A. WITZ. — LE RENDEMENT PHOTOGÉNIQUE DES FOYERS 663 Malgré l'étendue de l’influenza pendant les quinze jours précédant le 6 juin, la mortalité par les ma- ladie des voies respiratoires augmenta de plus de deux fois la moyenne, cette augmentation étant causée surtout par les pneumonies et les bron- chiles. La diminution de l’influenza fut accompa- gnée d'une diminution correspondante des ma- ladies des voies respiratoires; mais ce ne fut que pendant la dernière semaine de la période que les décès tombèrent, à peu dechose près, à la moyenne. En prenant la totalité des onze semaines, on voil que la mortalité par les voies respiratoires atteint 5138 ou environ 75 pour cent de plus que la moyenne. Pendant la période épidémique de 1890 ce nombre fut très supérieur; mais pendant les mois d'hiver la moyenne est aussi augmentée et, par ce fait, l'excédent ne fut l’année dernière que de 26 pour cent. L'influence de la température pendant les deux épidémies semble s'être excercée dans deux di- rections différentes. Pendant la période épidé- mique de 1890, la température fut, ainsi que nous l’avons dit, très haute pour l'époque de l’année, et les vents du sud-ouest qui souffièrent en jan- vier aidèrent à la dispersion des germes miasma- tiques. La température fut, en effet, aussi favo- rable qu’on pouvait la désirer, et l'épidémie, quoique rigoureuse, l’eût été bien plus encore si l'hiver eût été froid et humide. La récente épidé- mie n'eut pas tant d’ennemis à combattre, car non seulement le temps fut très froid, mais aussi calme et tranquille. Le germe put ainsi s'installer chez nous, sans rencontrer d’opposilion sérieuse, et la nature défavorable de l'atmosphère a été pour beaucoup dans les maladies des poumons et des bronches qui suivirent l'influenza. Trompés par l'approche du printemps, et oublieux de son mau- vais cortège, beaucoup de convalescents se ris- quèrent à sortir et contractèrent un refroidisse- ment qui empècha le rétablissement d’un grand nombre !, D: Fredk. J. Brodie. (de Londres.) LE RENDEMENT PHOTOGÉNIQUE DES FOYERS La théorie mécanique de la chaleur, partant de l'hypothèse très probable que la chaleur consiste dans un mouvement moléculaire et que la quan- tité de chaleur est la mesure de la force vive des masses mises en mouvement, arrive à établir le premier principe de la thermodynamique, par appli- cation du théorème de l’équivalence de la force vive et du travail : pour cela, il n’est point nécessaire de rien préjuger de la nature de ce mouvement. En tenant compte ensuite de ce que ce mouve- ment s’opère nécessairement dans un espace limité et qu'il est périodique, Clausius a montré que la force vive moyenne des molécules d’un corps à pour mesure sa température absolue et qu'on peut déduire aussi le second principe de la thermody- namique des lois générales de la mécanique. À l'aide des principes de Mayer et de celui de Carnot, lesingénieurs calculent lerendement d'une machine thermique, transformant des calories en kilogram- mètres : un moteur à gaz donnant le cheval-heure effectif par 600 litres d’un gaz dont le pouvoir calo- rifique est de 5.400 calories par mètre cube, a un rendement d'environ 20 pour cent, double par con- séquent de des meilleures machines à vapeur. Or, il y a des appareils alimentés aussi au gaz, par lesquels on semble transformer des calories en unités de lumière : le mécanisme de l'opération est tout autre assurément et il n'est plus néces celui saire de faire parcourir au gaz ur cycle fermé; mais, au point de vue industriel, l’analogie est parfaite, car on brûle du gaz dans le moteur pour recueillir du travail, de mème qu'on en brüle au bec pour recueillir de la lumière. D'autre part, les plus ignorants sentent par intuition qu'il doit y avoir un rendement photogénique d’un foyer comme il y à un rendement mécanique d'un moteur, et ils ne se trompent pas. Mais quel est le rendement photogénique d’un bec de gaz donnant le carcel au prix de 105 ou de 35 litres d’un gaz développant 5.400 calories par mètre cube? Les physiciens ne répondent rien à celle question : il nous parait utile d'expliquer leur silence en exposant tout ce que nous pouvons dire à ce sujet. Et d’abord, remarquons que la lumière n’est pas le résultat de la transformation de la chaleur, mais que c'est le plus souvent un phénomène concomi- tant de la chaleur. Le mouvement moléculaire, qui constitue la chaleur, peut être transporté au dehors sous forme de radiations calorifiques obscures et de radiations, lumineuses ou chimiques, froides : ces formes diverses de l'énergie s’accompagnent d’er- dinaire, mais non pas toujours. Objectivement elles ne diffèrent que par leur longueur d'onde. La cha- leur ne crée done point la lumière, mais elle en 1 Cet article est extrait du journal anglais Nature, XCI, p. 283. 664 A. WITZ. — LE RENDEMENT PHOTOGÉNIQUE DES FOYERS devient une source, quand elle est utilisée d’une certaine facon. Il n’y aura jamais de théorie méca- nique de la lumière; mais on pourrait faire une théorie luminique de la chaleur. Le rendement photogénique d'une source peut être défini: c’est le rapport de la force vive du mouvement lumineux à la force vive disponible dans le foyer. Pour calculer la force vive qui anime une masse d’éther, il faudrait connaître cette masse : le calcul est donc actuellement impossible. En ce moment, nous n'avons pas d'autre moyen d'apprécier les quantités de lumière émises par une source que par le degré d’excitalion plus ou moins grand du nerf optique; cela permet une comparaison, et non pas une mesure. Mais il y aurait peut être une manière indirecte avec deslongueurs d'onde d'environ 0#60; les autres couleurs du spectre suivent rapidement et le violet porte les longueurs d’onde à 0360 ; puis se forme le spectre ultra-violet. À ce moment l'infrarouge disparait-11? Nullement, et son intensité augmente même au fur et à mesure que le spectre s'enrichit de nouvelles radiations chimiques. Nous en con- cluons à bon droit qu’il ne doit pas exister de corps donnant un spectre composé uniquement des radiations exerçant une aclion sur la rétine de l'œil de l’homme. Nous n'avons donc pas le droit d'espérer la découverte d’un foyer de lumière possédant un rendement égal à l'unité. Toutefois, il n'est pas absurde de concevoir l'existence d'un foyer n'émettant qu'une faible proportion de radiations obscures. Les animaux phosphorescents semblent oo, POUVOIR INTENSITÉ SR :s CALORIES DER DÉPENSE oO CALORIES She SOURCES Ge 1 \ à : LUMINEUSE PAR DERSCESSSE SUBSTANCE DEÉPENSÉES | EN CARCELS | CARCEL-HEURE EE & e 1 Boumerde ibtoile Er Sr ErE CCE 10 vr. 5 par heure 10,5 cal, par gr. 110 —— 716 Lampe modérateur Carcel à huile de 65 COLA ee eee ete ee ele en 42 gr. par heure 9,8 cal. ir or. 411,6 il 412 Lampe intensive à pétrole, bec belve.| 13 gr. 6 par heure 11 cal. or 149,6 1 150 Bectde pariBenpelRee etre cc er 105 litres par heure 5400 FL _ ir NT 567 1 567 Lampe à récupération... 35 litres par heure Id. 189 Il 189 Lampe électrique à incandescence....| 3,5 watts par bougie 3,9 X 3600 3,1 Î 20 9,81 X 425 53 ATCVOLATQUES rer re ee 4,6 watts par carcel 4,6 X 3600 4 1 4 9,81 X 425 de déterminer le rendement d’une source de | réaliser ce cas, d’après MM. Langley et Very ! : ces lumière ; cette étude rentrerait dans le programme de notre théorie luminique de la chaleur. Suppo- sons qu’il existe une source dont toute l'énergie se transforme en chaleur lumineuse, et dont le spectre soit entièrement composé de radiations calorifiques lumineuses, à l’exclusion des radia- lions calorifiques obscures et des radiations chi- miques; le rendement de cette source serait égal à l'unité. Or, voyons, avant toute chose, source-lype peut exister : il nous semble que c’est un mythe, et voici les raisons sur lesquelles se base notre opinion. Prenons un corps et élevons gra- duellement sa température par un courant ou par un procédé quelconque : faisons-le passer de 0 de- gré à 2000 degrés. Aux températures les plus basses, ce corps rayonne de la chaleur autour de lui; mais ces radiations, pour lesquelles la longueur d'onde est fort grande, sont absorbées par le milieu, et elles échappent à notre examen dans le spectre obscur; on les observe quand la longueur d'onde est devenue égale à 2#15 et M. Mouton a relevé les positions de ces radiations dans le spectre infra- si celte rouge. À la lempérature de 525° le rouge apparait } | physiciens ont analysé notamment la lumière émise par le Pyrophorus noctilucus de Cuba, en l'étudiant à l’aide du bolomètre et du spectroscope ; le rouge parait manquer dans le spectre de cette lumière, alors que le vert y domine : voilà donc une source qui n'émet pas de radiations obscures sensibles et nous sommes autorisé à admettre qu'il peut exister des foyers photogéniques dont le rendement ap- proche d'être égal à l'unité. Admettons encore que nous puissions connaitre l'énergie ou bien le nombre de calories dépensées pour produire une quantité de lumière donnée par notre source-lype; ce n’est point le cas des pyrophores; mais, avec tout autre foyer, ce résultat serait facile à acquérir. Nous pos- séderions dès lors la valeur exacte des rendements phologéniques des lumière, puisque nous connaissons déjà leurs rendements relatifs. Nous avons entrepris en effet quelques re- cherches dans ce but : le tableau ci-dessus résume les chiffres auxquels nous avons élé conduit en rap- portant à la calorie le pouvoir luminique des foyers exprimé en carcels ou en bougies à 7,5 par carcel. diverses sources de 1 Tonranl de Physique, février, 1891. A. WITZ. — LE RENDEMENT PHOTOGÉNIQUE DES FOYERS 665 Notre source-type nous permettrait de passer facilement du rendement relatif au rendement absolu. À son défaut, contentons-nous d’une large approximation : l'examen du spectre de la lumière de l’arc voltaïque, qui renferme une grande pro- portion de radiations obscures, nous porte à croire que son rendement absolu ne dépasse pas 0,50; dès lors, celui d’une bougie de stéarine serait de 0,003. Ces chiffres nous donnent une idée du gaspillage énorme d'énergie qui se fait dans les foyers lumi- neux ; la perte est de plus de 99 7% dans une bougie et dans un bec Bengel, quand nous l’esti- mons à 0 % dans un arc voltaïque. L’énorme différence de rendement que nous rele- vons entre les foyers à gaz et les foyers électriques ressort encore mieux des expériences suivantes. Ayant été amené à étudier une installation parallèle d'éclairage au gaz et par l'électricité à Lille, à la succursale de la Grande Maison de Paris, j'ai pu comparer la quantité de gaz brülée aux becs avec celui qui est consommé par un moteur à gaz faisant mouvoir des dynamos pour l'éclairage électrique du même local. Dans le premier cas, le gaz élait brûlé par 6 lampes Sée-Wouters à double récupération, par 91 becs annulaires et 19 papil- lons ; dans le second cas, un moteur Simplex action- nait une dynamo Compound Thury, type Ce, qui alimentait 10 arcs de 9 ampères, 6 de » et 90 lampes à incandescence de 16 bougies; celte dernière ins- tallation, faite par M. Guerre, ingénieur de la maison Cuénod et Sautter, était particulièrement réussie. L’éclairement obtenu dans le second cas était notablement supérieur à celui que donnaient les brûleurs de gaz, ainsi que l'on peut s’en rendre comple en additionnant le pouvoir lumineux des divers foyers; je m'en suis assuré d’ailleurs à l’aide d'un photomètre Decoudun, qui me per- mettait de comparer les quantités de lumière déversées sur les planchers; je ne crois pas être loin de la vérité en estimant au moins à 15 % l'excès de lumière fournie par les appareils élec- triques. Du reste, deux ares sur rue, un arc dans un couloir et deux lampes à incandescence étaient disposés en dehors des locaux éclairés au gaz, de telle sorte que nous devons compter au moins 20 pour % de lumière en plus pour l'électricité. Ajoutons enfin que le moteur avait accidentelle- ment une consommalion de gaz exagérée, par suite de causes diverses qu'il me suffit de signaler. Or, deux essais faits consécutivement m'ont fait constater que la consommation du moteur n’était que de 21.500 litres par heure, alors que les becs brülaient 26.000 litres. Ainsi donc, quand on emploie le gaz à créer de la force motrice et qu'un moteur actionne une dynamo, laquelle alimente des REVUE GÉNÉRALE, 1891. foyersélectriques, on dépense17?/,demoinsenviron qu'en brûlant le gaz directement aux becs et l’on obtient cependant en plus 20 °/, de lumière. En d’autres termes, malgré l'emploi de deux inter- médiaires, moteur et dynamo, il reste encore une économie : le résultat semble paradoxal; mais il est incontestable. On pouvait le prévoir. L'entretien d’une lampe à incandescence de 16 bougies coûte 65 watts environ, puisqu'on fait 16 bougies par 100 volts et 0,65 ampères. Ces 65 watts sont au plus la ? partie de l’énergie distribuée par un moteur d'un cheval : en d’autres termes, un cheval peut alimenter neuf lampes de 16 bougies pour le moins. Pour un bon et fort moteur à gaz, ce travail correspond à une dépense de 720 litres de gaz : donc une lampe à incandescence de 16 bougies dépense 2 — 80 litres de gaz. Ces 16 bougies valant 2,4 carcels, la carcel represente une dépense de 5% — 33 litres. C'est la dépense par carcel des meilleures lampes à gaz intensives Siemens, Giroud, Delmas, Cromartie, Wenham, Esmos, Bandsept, Sée, etc. Il est vrai de dire que je me suis placé dans l'hypothèse d'un excellent moteur, mais j'aurais eu beau jeu d’op- poser à nos lampes à incandescence un bec de gaz Bengel, donnant la carcel par 105 litres. Les chiffres changeraient si je prenais pour terme de comparaison, non plus la lampe électrique par incandeseence, mais larc voltaïque. Un arc de 10 ampères par 45 volts donne facilement 90 car- cels : la carcel coûte donc 5 watts el un moteur d’un cheval en alimentera 1,3, donnant ainsi 117 carcels, ce qui met l’unité de lumière à un peu plus de 6 litres. Quelle lampe à gaz donnera jamais semblable résultat? Nous ne devons dès lors point nous étonner des résultats relevés dans une installation d'éclairage électrique actionné par moteur à gaz. De ce que le rendement du système moteur dynamo-lampe électrique est supérieur à celui des bees de gaz, nous pouvons déduire une indication précieuse relativement au rendement photogé- nique absolu de ces becs. Un bon moteur rend au plus 20 %, la transmission et la dynamo 75 et les lampes électriques, 68 : 0,20 X 0,75 x 0,68 — 0,10. Le rendement photogénique des brûleurs de gaz est par conséquent notablement inférieur à 10 7%, puisque l'installation mixte est grevée par avance d'une perte de 90 Z et qu’elle possède cependant encore un rendement relatif fort supérieur. La pratique industrielle confirme donc les données théoriques. Aimé Witz. Professeur de Physique à la Faculté libre des Sciences de Lille. 20* 666 L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE Dans ma Revue de physiologie de l'année dernière", j'évaluais à plus d’un millier le nombre des mémoires qui paraissent chaque année sur les différentes branches de la physiologie. J’ai eu la curiosité de rechercher le degré d’exactitude de celte évaluation toute approximative. A cet effet, j'ai eu recours aux listes de publications énu- mérées chaque quinzaine, par catégories, dans le Centralblatt für Physiologie. J'ai laissé de côté les rubriques : Physiologie générale, zoologie, botanique, physique, chimie, psychologie et reproduction, parce que la plupart des travaux qui ÿ sont mentionnés, ne se rapportent pas directement à la physiologie. Je me suis borné à relever le total brut des mémoires sur la physiologie du sang, de la circulation, de la respiration, etc..., el je suis arrivé aux résultats numériques suivants : Publications Physiologie générale des nerfs et des muscles ... 147 — spéciale des mouvements............ si —— RÉSDITAO EEE ee eee th 101 — CHalenr anal EEE FETE CCE CE 42 — San Me MCIILUIADDNE-------ERLCCELEE 34% — glandes. -#F2-s.-Lorec-rr-e-rr-cpr 263 — digestions et nutrition.............. 206 — OrPANESIAPSISPNS ES ere 265 — VOILE IRATOIE ECC eee rene 66 — SYSTÉMENNENTEUX LE rame eee 400 — technique expérimentale. ........... 68 Motalt ste tracer centres 1.983 Ce total comprend un assez grand nombre de travaux de morphologie pure ou de pathologie, qui sortent par conséquent du cadre des études physiologiques. Je pense qu'il faut de ce chef le réduire d'un tiers ou tout au moins d’un bon quart. Il n’en reste pas moins un total fort respectable de 1.200 à 1.400 mémoires ou notices de physio- logie pour la seule année 1890. Les lecteurs de la Revue ne s’attendent certai- nement pas à ce que je lise à leur intention ces 1.200 à 1.400 publications écrites dans toutes les langues civilisées, pour leur en offrir la quintes- sence. Ce travail de bénédiclin est d’ailleurs fait chaque année en Allemagne par plusieurs spé- cialistes qui se partagent la besogne : le résultat de leur labeur sera publié vers la fin de 1891 ou de 4892 en un ou deux gros volumes sous le titre de Comptes rendus annuels des progrès de la phy- siologie pendant l’année 1890. Je renvoie les physio- logistes de profession à ces excellentes publica- lions. Je me borneraiï à traiter ici, un peu au hasard de 1 Revue générale des Sciences du 30 octobre 1890, t. I, 20, p. 636, la plume, quelques-unes des questions de physio- logie qui sont à l’ordre du jour, ou auxquelles je me suis particulièrement intéressé dans ces der- niers temps. Je ne donnerai aucune indication bibliographique : ceux qui désirent recourir aux sources, trouveront immédiatement ce qu’ils cher- chent, dans la table des noms d’auteurs de l’an- née 1890 du Centralblatt für Physiologie, ou dans les relevés trimestriels du même recueil. I. — SANG, LYMPHE, etc. Le sang, soustrait à l'organisme, se coagule, comme on sait, au bout de cinq à dix minutes, c’est-à-dire qu'il se transforme en une gelée cohé- rente. Il est facile de constater au microscope que la solidification du sang est due au dépôt de la fibrine, substance solide qui se concrète sous forme de filaments enchevêtrés, emprisonnant, entre les mailles du réseau, et les globules et la partie li- quide du sang. La fibrine qui se forme ainsi résulte de la trans- formation chimique d’une matière albuminoïde , le fibrinogène, primitivement dissoute dans le plasma sanguin. La transformation du fibrinogène en fibrine est un phénomène de fermentation, dû à l'intervention d’un ferment soluble (ferment de la fibrine) qui prend naissance au moment où le sang s'épanche au dehors des vaisseaux. On sait depuis longtemps que la fibrine contient toujours une petite quantité de sels minéraux, notamment de phosphates de calcium; mais on était générale- ment porté à considérer ces éléments minéraux comme des impuretés. Dans ces derniers temps, E. Freund (de Vienne) avait attaché une grande importance à cette précipitation de phosphate calcique et avait même pris ce fait comme base d’une théorie nouvelle de la coagulation du sang, théorie destinée dans la pensée de son auteur à détrôner la théorie classique de la fermentation. J'ai, ici même, fait l’année dernière, la critique des idées de Freund et relaté les expériences de Latschenberger et de Strauch qui contredisent formellement sa théorie. Dans une excellente thèse de doctorat !, soutenue devant la Faculté des Sciences de Paris, M. Arthus me parait avoir placé dans son vrai jour le rôle que les sels des métaux terreux et alcalino-terreux jouent dans le phénomène de la coagulation du sang. Arthus a montré que le calcium n’est pas un composant accidentel du caillot sanguin, mais 1 Sur cette thèse voyez la Revue du 30 septembre 41891, | t. I, p. 619. L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 667 qu'il constitue un élément normal et indispensable de la molécule de fibrine. La fibrine est un com- posé calcique, et la transformation du fibrinogène en fibrine, sous l'influence du ferment, suppose la présence d'un sel de calcium disponible dans le liquide. Enlevez au sang le calcium qu'il contient, et il suffit pour cela de l’additionner d’un oxalate ou d’un fluorure alealin (moins de 0,1 ?/, d’oxa- late, moins et 0,2 /, de fluorure), de manière à former un précipité d'oxalate ou de fluorure cal- cique ; du même coup vous supprimez la coagula- tion spontanée. Le liquide sanguin privé ainsi de calcium se coagulera au contraire spontanément, si vous lui restituez le calcium (addition de quel- ques gouttes d’une solution de chlorure de cal- cium), à condition, bien entendu, qu'il contienne du fibrinogène et du ferment. Les fails découverts par Arthus ne contredisent nullement la théorie classique de la fermentation, telle qu'elle a été établie principalement par les travaux d'Alexandre Schmidt el de Hammarsten. Mais ils impliquent une modification de cette théo- rie : outre le fibrinogène et le ferment, la production de la fibrine semble nécessiter encore la présence d’une substance fibrinoplastique ; cette substance fibrinoplastique n’est pas une globuline, comme l'avait admis Alex. Schmidt dans ses premiers tra- vaux : c’est un sel de calcium ou de sfrontium. Le sérontium peut en effet remplacer le calcium dans ces expériences, et l’on obtient alors une fibrine strontique à la place de la fibrine caleique ordinaire. Il suffit de prendre du sang ou du plasma oxalaté, c’est-à-dire privé de calcium, et d'y ajouter une petite quantité d'un sel de stron- tium, qui, joint au ferment et au fibrinogène, amène la formation d'un coagulum de fibrine strontique. Les sels de calcium interviennent d’ailleurs dans une autre coagulation, celle du lait. Hammarsten a démontré, il y a plusieurs années, que la forma- tion du fromage ou caséum, c'est-à-dire la précipi- tation de la caséine du lait par le suc de la caillette (quatrième estomac du jeune veau), est, toutcomme la coagulation du sang, un phénomène de fermen- tation. Il a donné le nom de Labferment, en français ferment de la présure, au ferment soluble qui préside à la précipitation de la caséine. Hammarsten a in- sisté sur les analogies nombreuses que présentent les deux phénomènes : coagulation du sang, caséi- fication du lait. Pagès et Arthus ont montré que le caséum est (comme la fibrine du sang) une com- binaison calcique, et que la coagulation du lait (additionné du ferment de la présure) peut être suspendue ou rétablie par la précipitation des sels calciques du lait ou par leur restitution à ce liquide (Confirmation des travaux de Hammarstien.) lei les sels de strontium, de baryum ou de ma- gnésium peuvent remplacer ceux de calcium. Les applications des faits découverts par Arthus concernant le rôle du calcium dans la coagulation du sang sont nombreuses et susceptibles de rendre des services importants aux physiologistes. Dans toutes les recherches où l’on doit conser- ver du sang liquide, sans le défibriner, on pourra avec avantage substituer aux procédés ordinaires plus où moins compliqués, le procédé si simple à l’oxalate alcalin. Citons : les expériences de mesure de la pression sanguine, où le sang doit rester pendant longtemps fluide malgré son contact avec des corps étrangers, tels que le mercure ou les parois du manomètre. Citons encore les expérien- ces de séparation des globules et du plasma san- guin, qui, jusqu'à présent, ne pouvaient être réa- lisées que par des artifices délicats (refroidissement intense du sang, isolement d'un vaisseau emprunté à un animal de forte taille : la jugulaire du cheval), ou par des additions de quantités notables de substances étrangères (sulfate de magnésium, sul- fate de sodium), altérant complètement la compo- sition des liquides naturels. Enfin, peut-être sera- t-il possible de répéter les expériences de circula- tion artificielle, en injectant dans les organes que l’on veut soumettre à ce genre d'investigation, du sang complet, non défibriné, mais rendu incoagu- lable par addition d’un peu d'oxalate ou de fluorure. La coagulation du lait sous l'influence du ferment de la présure, celle du sang par le ferment de la fibrine, a été étudiée récemment à un autre point de vue, par Fick, de Jager et J. Latschenberger. Fick rappelle ce fait, connu depuis longtemps, qu'une goulte de solution de présure versée dans un grand volume de lait provoque, pour ainsi dire, instantanément la coagulation de la masse entière du lait. 11 lui semble extrêmement peu probable que, dans cette opération, chaque molécule de caséine ait pu subir directement le contact d’une molécule de ferment de la présure : n'est-il pas plus rationnel d’admettre que la précipitation dela casèine, commencée en unpoint par le contact direct de la présure, s’est ensuite propagée de molécule de caséine en molécule de caséine, et a envahi toute la masse, sans participation ultérieure de la pré- sure? L'ébranlement moléculaire imprimé par le ferment à la première molécule de caséine au mo- ment de sa précipitation se serail ensuite transmis de proche en proche. Fick a émis une opinion analogue au sujet de la coagulation du sang qui, elle aussi, une fois com- mencée dans une portion du plasma, se propage- rail Sans participation ullérieure du ferment. Il a même élabli une espèce d'opposition entre : 4° Zes Jermentations de coagulation, dans lesquelles le pro 668 L. FREDERIC. -- REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE cessus de précipilation (coagulation du lait, coagu- lation du sang) mis en train par le ferment en un point du liquide, s’étend ensuite de lui-même avec une grande rapidité à toute la masse; et 2° les for- mentations de dissolution (diastase, pepsine, tryp- sine, etc.), qui ne se déroulent jamais instantané- ment, etoù chaque molécule de corps fermentescible doit nécessairement subir le contact du ferment. De Jager a encore renchéri sur l'hypothèse de Fick. Non seulement l’action du ferment soluble peut se transmettre, sans contact Girect, à travers la masse du liquide en fermentation, mais elle pourrait s'exercer à distance à travers des subs- tances absolument inertes. Ainsi de la pepsine, con- servée à l'intérieur d’un dialyseur, pourrait, sans diffuser au dehors, attaquer et dissoudre des flo- cons de fibrine placés dans de l’eau acidulée, à l'extérieur du dialyseur. Bien plus, un fragment de pancréas (tissu riche en ferment diastasique), suspendu à une petite distance au-dessus d’une soucoupe remplie d'empois d'amidon, exercerait son action fluidifiante et saccharifiante sur cette substance, à travers la couche d'air qui sépare le pancréas de l’amidon. Latschenberger croit que Fick dans ses expé- riences ne s'est pas suffisamment mis à l'abri de la diffusion possible des ferments à travers la masse du liquide coagulable. Latschenberger a répété les expériences de coagulation du sang ou du fibrinogène et celles du lait, en cherchant à évi- ter cette cause d'erreur. Il introduit dans une des branches (la plus large) d’un tube en U, une co- lonne de liquide coagulable (plasma sanguin, lait, etc.) et dans l’autre branche (la plus étroite) une colonne de solution de ferment (ferment de la fibrine ou présure), en ayant soin d'éviter le mé- lange des deux liquides. Dans ces conditions, la coagulation ne se produit au début qu'au niveau de la petite surface de séparation des deux liqui- des : elle progresse ensuite fort lentement, mettant plusieurs heures à envahir une épaisseur de quel- ques millimètres de liquide. La diffusion du fer- ment dans la solution coagulable explique ici suf- fisamment la coagulation, sans qu’il soil nécessaire de recourir à l'hypothèse de Fick. Signalons parmi les travaux parus dans ces dernières années sur la coagulation du sang, les intéressantes découvertes faites au laboratoire de physiologie de Leipzig par Lukjanow et Ch. Bohr. Ces expérimentateurs ont trouvé que le tissu pul- monaire exerce sur le sang, qui le traverse, une action anticoagulante des plus prononcées, tandis que les autres tissus du corps augmentent la coa- gulabilité du sang, et lui restituent ses propriétés plastiques, queson passage à travers le poumon tend à lui faire perdre. L'expérience la plus démonstra- tive et que j'ai eu l’occasion de répéter moi-même, consiste à supprimer complètement sur un chien vivant le cycle de la grande circulation, pour ne laisser au sang d’autre trajet à parcourir que celui de la circulation pulmonaire et du cœur. Il faut, pour arriver à ce résultat, lier l’aorle et toutes les branches qui en partent, sauf une seule (une artère sous-clavière par exemple), lier autant que pos- sible les veines qui ramènent le sang des différents organes à l'oreillette droite en épargnant un de ces vaisseaux (une branche de la veine cave supé- rieure). On abouche la seule artère restée perméable avec la seule veine conservée, ce qui permet à l’on- dée sanguine lancée par le ventricule gauche, de gagner directement l'oreillette droite, sans passer par les capillaires de la circulation générale, qui se trouvent exclus du circuit. Le trajet que suit le sang est donc le suivant : ventricule gauche, aorte, une artère, une veine, veine cave supérieure, oreil- lette droite, ventricule droit, artère pulmonaire, capillaires pulmonaires, veines pulmonaires, oreil- lette gauche et ventricule gauche; puis le même cycle recommence. Au bout de moins d’une heure de cette circulation restreinte, dans laquelle le sang n'est plus soumis qu’à l'influence unique du cœur et du poumon, ce liquide a perdu complè- tement sa coagulabilité. Le fibrinogène a-t-il dis- paru du sang? Les sels de calcium y font-ils défaut, les éléments producteurs du ferment sont- ils altérés, ou l’absence de coagulation tient-elle à l'introduction dans le sang d’une substance nou- velle qui empêche la réaction de se produire? C’est ce que des recherches nouvelles ne tarderont sans doute pas à nous apprendre. Quoi qu'il en soit, les expériences de Leipzig ont établi cet autre fait intéressant, c’est que le sang rendu incoagulable par son passage à travers le poumon, récupère la faculté de fournir de la fibrine, quand on lui permet à nouveau de traverser les capillaires de la circulation générale; d’après Bohr, le parenchyme des organes abdominaux jouerait le principal rôle dans le rétablissement de cette propriété du sang. Nous sommes ainsi conduits à admettre qu'il y a dans l'organisme vivant une lulte incessante entre ces deux tendances antagonistes, l’une sus- pendant la coagulabilité du sang, et émanant du tissu pulmonaire, l’autre au contraire s’exerçant dans le sens de la coagulation et provenant des différents Lissus du corps. Les dernières recherches publiées par Alexandre Schmidt et par ses élèves sont précisément con- sacrées à l'étude chimique des influences coagu- lantes ou anticoagulantes que les cellules vivantes exercent sur le plasma sanguin. Schmidt a reconnu que les différentes formes de L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE protoplasmes sont capables de produire le ferment de la fibrine, — mais qu'elles produisent égale- ment des substances anticoagulantes, auxquelles il a donné le nom de Cytoglobines. Nous attendrons la publication intégrale des recherches de Schmidt, avant d'en entreprendre ici l'exposé. L'étude des propriétés chimiques des matières albuminoïdes, de leurs dérivés, de l’hémoglo- bine, etc., a donné lieu, comme les années précé- dentes, à un nombre considérable de publications, dans le détail desquelles il n’est pas possible d'entrer ici. Signalons ce fait intéressant que d’Arsonval a réussi à pholographier les spectres d'absorption de l'hémoglobine et des combinaisons de cette substance avec l'oxygène, l'oxyde de car- bone, etc. IT. — CIRCULATION. Les mémorables travaux de Chauveau et Marey sur le rythme cardiaque, qui datent de 1863, ceux de Marey sur la circulation dans les artères ont de- puis longtemps passé dans le domaine classique de la physiologie. Ces recherches cardiographiques et sphygmographiques sont à la fois les premières en date et les plus importantes : on peut dire qu'elles représentent encore aujourd’hui, sur ce su- jet difficile, le dernier mot de la science. Cepen- dant chaque année quelques-uns des résultats classiques de ces recherches sont remis en ques- tion ou attaqués directement par les uns et défen- dus au contraire par d’autres expérimentateurs. Fick, von Kries, v. Frey et Krehl ont affirmé que les ondulations secondaires du tracé artériel fourni par le sphygmographe, ou par les manomètres élas- tiques, élaient en partie d’origine périphérique et produites par réflexion. Hoorweg, Hürthle, etc. ont défendu la doctrine de Marey, qui fait naître l’on- dulation dicrote à l’origine du système artériel, et qui admet la propagation de cette ondulation, du cœur vers la périphérie. Je ne puis que répéter ce que je disais lan der- nier. L'accord se fera le jour où les physiologistes dissidents se donneront la peine de répéter les expériences classiques de Chauveau et Marey, en se plaçant dans les mêmes conditions de réussite, c'est-à-dire en prenant comme sujet le cheval, qui se prète, bien mieux que l’homme ou le chien, aux recherches cardiographiques. Martin a décril un nouveau procédé pour prendre chez les animaux domestiques de grande taille (cheval, bœuf, etc.) le tracé de la pulsation de l'aorte abdominale. Le sphygmographe à trans- mission est introduit par l’anus dans le gros intes- tin et appliqué à la main contre l'aorte. Hürthle, Jacquet, Bernstein, Hermann, Fr. Franck, Roy, Potain ont fait connaitre des perfec- PHYSIOLOGTIE 669 tionnements ingénieux apportés à la construction des appareils enregistreurs. Colson a étudié les effets de l’occlusion de l'aorte abdominale, et Slosse ceux de la ligature des artères abdominales. Slosse a constaté qu’a- près ligature des trois artères intestinales, chez le chien, le rein continue à fonctionner et à fournir une urine’à la préparation de laquelle le foie com- plètement anémié ne peut plus coopérer. L’urine obtenue dans ces conditions est moins abondante qu'à l’état normal, et contient beaucoup moins d’urée et d’ammoniaque. On y trouve de l’albu- mine et de la propeptone. Les chiens opérés meurent au bout de quelques heures, en présentant des symptômes d’intoxica- tion du système nerveux central, notamment des convulsions analogues à celles qui caractérisent l’empoisonnement par la strychnine. Ces convul- sions ne se présentent pas, comme on sait, si, au lieu de lier les artères des organes abdominaux, on lie la veine porte. Arthaud el Butte ont lié l'artère hépatique et constaté la disparition du glycogène hépatique à la suite de cette opération. François Franck a continué ses intéressantes re- cherches sur la circulation veineuse. L'année 1890 nous a apporté également un con- tingent nombreux ‘de travaux se rapportant au fonctionnement des nerfs vaso-moteurs. Bornons- nous à signaler les recherches d’Arthaud et Butte et celles de Morat. Arthaud et Butte ont montré que le nerf vague exerce une action vaso-constrictrice sur le rein. L'excilation de ce nerf, pratiquée en dessous du cœur, arrête la sécrétion rénale, et arrète l’écoule- ment du sang par la veine rénale, tout en augmen- tant la pression générale du sang artériel. On sait que les nerfs sensitifs, centripètes, quittent la moelle épinière par la voie des racines postérieures, tandis que les nerfs moteurs, sécré- toires. inhibiteurs. etc., en un mot tous les nerfs centrifuges, suivent la voie des racines antérieures. Cette donnée fondamentale dans l'étude du sys- tème nerveux a été établie à la suite des travaux de Bell et de Magendie (/oi de Magendie). La seule exception à cette loi, signalée par Stric- ker (1876), concernait les nerfs vaso-dilatateurs qui, d’après lui, quitteraient la moelle par la voie des racines postérieures. Gärtner (1889) avait confirmé les résultats obtenus par Stricker. Morat a repris récemment cette question; il a constaté que chez le chien, les nerfs vaso-dilatateurs du pénis sortent par antérieures deuxièmes paires sacrées, el obéissent par consé- quent à la loi de Magendie, contrairement à l'opi- nion de Stricker. les racines des premières et 670 L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE IJI, — RESPIRATION. Le sang subit un double changement chimique, lors de son passage à travers le poumon : la ma- tière rouge des globules, l’hémoglobine, absorbe l'oxygène de l'air des alvéoles, oxygène nécessaire à la combustion organique ; et d’autre part, le sang se débarrasse de l’acide:carbonique qu’il contient en excès, el qui provient de la combustion organique. Ces deux phénomènes d'échange gazeux, ab- sorplion d'oxygène et exhalation d'acide carbo- nique, se font entre l'air des alvéoles d’une part et le sang des capillaires pulmonaires d'autre part, à {travers une mince paroi membraneuse. La surface totale des vésicules pulmonaires a été évaluée chez l'homme à 200 mètres carrés ; en admettant que les capillaires en occupent les trois quarts, cela donnerait une surface de 150 mètres carrés à la nappe sanguine qui se trouve en contact presque immédiat avec l'air, et qui se renouvelle constam- ment. L’épaisseur de cette nappe est fort pelite : 022008 en moyenne (diamètre des capillaires pul- monaires). Les surfaces de contact entre le sang et : l'air présentent done dans le poumon un dévelop- pement colossal, condition éminemment favorable à la diffusion gazeuse, et à l'établissement rapide d'un équilibre de tension entre les gaz du sang et ceux de l’air des alvéoles. L'air que nous respirons contient près de 21 ?/, d'oxygène et seulement 3 à 4 dix-millièmes d’acide carbonique. La tension de l'oxygène à la pression barométrique ordinaire est donc de 21 ‘/, d’une atmosphère et celle de l’acide carbonique presque nulle, 0,03 à 0,04 !/, At. L'expérience directe a mon- tré que le sang veineux qui arrive au poumon pré- sentait une tension d'oxygène faible, ne dépassant guère 3 ‘/, d’une atmosphère, tandis que la tension de l'acide carbonique était comprise entre 3,81 ?/, et 5, 4°, d'une atmosphère. Les lois de la diffu- sion exigent que l'air des alvéoles pulmonaires cède de son oxygène au sang, tant que l'équilibre de tension n'est pas atteint; el que réciproque- ment le sang veineux cède de son acide carbonique à l’air du poumon. Les échanges gazeux dont le poumon est le siège semblent donc pouvoir s’ex- pliquer en quantité et en qualité par un simple phénomène de diffusion physique : diffusion dans laquelle la mince membrane qui sépare l'air et le sang, jouerait un rôle purement passif. Telle est la doctrine classique, que l’on se plaisait à considé- rer comme établie sur des bases inébranlables. Pour Bohr, la respiration pulmonaire n’est pas un phénomène physique simple, réduetible à un échange, par diffusion physique, de gaz séparés par | une membrane inerte, et présentant des tensions différentes sur les deux faces de la membrane. Bohr a repris les expériences dans lesquelles ses prédécesseurs, principalement Pflüheretses élèves, avaieut déterminé la tension de l'oxygène et celle de l'acide carbonique dans le sang artériel et dans le sang veineux, et est arrivé à des résultats numé- riques très différents. Il a trouvé la tension de CO? nulle ou presque nulle dans le sang : aucune rai- son physique lirée de la diffusion ne peut done expliquer l'exhalation de ce gaz au niveau des alvéoles pulmonaires. Et quant à l’oxygène, dans plusieurs de ses ex- périences le sang artériel, c’est-à-dire le sang qui revient du poumon, lui a présenté une tension de ce gaz supérieure à celle qui règne dans l’air des alvéoles. Ici aussi, la diffusion seule est incapable d'expliquer complètement l'absorption d'oxygène. Pour Bohr, le tissu pulmonaire, c'est-à-dire la paroi de la vésicule qui sépare le sang et l'air dans l'acte de la respiration, n’est pas la membraneinerte admise jusqu’à présent par les physiologisles. Les cellules qui tapissent la surface interne des alvéoles interviennentactivement pour décomposer les com- binaisons de l’acide carbonique du sang, et pour re- jeter le gaz carbonique du côté de l’atmosphère des vésicules. Ces éléments histologiques président pareillement à l'absorption de l'oxygène. Le pou- mon deviendrait ainsi l’analogue physiologique des autres glandes du corps, dont ilest d’ailleurs l’ana- logue au point de vue anatomique et embryogé- nique. | Les recherches de Bohr tendent également à ré- volutionner toutes les notions classiques sur l’état dans lequel se trouvent l'oxygène et l'acide carbo- nique du sang. Bohr admet l'existence de quatre combinaisons différentes de l'oxygène avec la ma- tière rouge du sang ou hémoglobine : Une oxyhé- moglobine 4, une 6, uné -; et une à, absorbant res- pectivement 0,4, 0,8, 1,7 et 2,7 centimètres cubes d'oxygène par gramme. Il y aurait de même une série de combinaisons de l'hémoglobine avec l’a- cide carbonique : Carbo-hémoglobine 8 absorbant Fe centim. cube de CO?, = û — 6 Il existe, dans l'organisme, d'autres surfaces comparables à celles du poumon, formées égale- ment d'un revêtement de cellules plates que l’on avail Loujours considérées comme constituant des membranes inertes, laissant indifféremment pas- ser les liquides et les gaz en vertu des lois de la diffusion. Citons la surface interne des vaisseaux capillaires, à travers laquelle une partie du plasma sanguin filtre constamment pour former la lym- phe. La lymphe est encore, pour la plupart des physiologistes, un simple liquide de transsudation physique, formé sous l'influence de la pression L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 671 sanguine. J'ai relaté ici l’année dernière les expé- riences de Heidenhain, qui tendent au contraire à faire considérer la lymphe comme un produit de sécrétion des parois des capillaires. Les cellules des parois des capillaires font, parmi les subs- tances contenues dans le sang, une véritable sé- lection, laissant passer les unes pour en former la lymphe, et retenant plus ou moins les autres. Les branchies des animaux aquatiques nous présentent également un système de membranes séparant le sang de l'animal, de l'eau de mer exté- rieure. C’est à travers ces membranes, que se font les échanges gazeux de la respiration : absorption de l'oxygène de l’eau, et rejet au dehors de l'acide carbonique du sang. J’ai fait l'année dernière sur la branchie des poissons de mer quelques expé- riences qui m'ont conduit à des résultats curieux. J'ai constaté que la membrane branchiale n’est pas non plus une cloison poreuse inerte; elle laisse passer les gaz oxygène et acide carbonique, qui ser- vent aux échanges respiratoires; mais elle arrête les sels de l’eau de mer : elle fait donc un véri- table choix parmi les substances dissoutes dans le milieu extérieur. L’eau dans laquelle vivaient les poissons sur lesquels j’ai expérimenté contenait près de 4°}, de sels solubles (eau de la Méditerranée, prise à Banyuls-sur-Mer), tandis que leur sang n'en con- tenait que 18 ®/,. L'équilibre salin entre le sang et l’eau était donc loin d'être atteint. Cet équilibre, au contraire, s'établit rapidement si l’on remplace la membrane branchiale vivante par une membrane de papier parchemin. Pour réaliser celte condition expérimentale, il suflit de placer le sang dans un boyau de papier parchemin faisant office de dialyseur, et de suspendre le tout dans uü gobelet contenant de l’eau de mer. Les sels de l'eau de mer diffusent vers le sang, jusqu'à ce que l'équilibre osmotique soit établi. Le placenta, ce gàleau vasculaire qui sert d’in- termédiaire physiologique entre la mère et l’en- fant, pendant la vie intra-utérine, nous présente également des cloisons membraneuses séparant le sang de la mère de celui du fœtus. Les expériences de Zuntz et de Krukenberg nous avaient déjà appris que les sels contenus dans le sang maternel ne passent pas indifféremment dans le sang du fœ- tus. E. Wertheimer et Meyer ont décrit deux cas d'intoxication mortelle par l’aniline et la toluidine observés chez des chiennes pleines. Dans les deux cas, la substance toxique existait en quantité no- table dans lesang de la mère, mais n'avait pas passé dans le sang des fœtus qui n’en contenait pas trace. L'année 4890 nous a fourni plusieurs travaux de valeur concernant l’innervation des centres respi- ratoires. Les physiologistes ne sont pas d'accord sur la cause à laquelle il faut attribuer la production des premiers mouvements respiratoires chez le fœtus des mammifères au moment de la naissance. Les uns, adoptant les idées de Preyer, admettent que l'activité des centres nerveux respiratoires est mise en jeu par voie réflexe, au moment de la nais- sance. Le point de départ devrait donc être cher- ché à la périphérie : la vive irritation des nerfs sensibles de la peau, due au froid extérieur, et au contact des corps étrangers, se transmettrail aux centres et provoquerait leur excitation. Mais la plupart des physiologistes expliquent, avec Schwarlz et Rosenthal, la production des pre- miers mouvements respiratoires par un mécanisme tout différent. Il s'agirait d’une action directe du sang fœtal sur les cellules nerveuses des centres respiratoires. Dès que le jeune mammifère est né, les conditions de l'hématose changent complète- ment. La consommation de l'oxygène et la pro- duction de l’acide carbonique éprouvent brusque- ment une augmentation colossale, par suite des mouvements musculaires : en même temps, le re- nouvellement des échanges gazeux n’a plus lieu dans le placenta maternel, par suite de l'arrêt de circulation qui s’y produit. Ce réservoir d'oxygène n'est done pas accessible au sang de l'enfant. Ce sang acquiert en peu de temps un degré de véno- sité suflisant pour exciter les centres respiratoires et provoquer leur intervention active. Les expériences récentes d'Engstrôom montrent que chez des fœtus de cobayes et de lapins encore contenus dans leurs membranes, et suffisamment protégés contre le froid et contre toute cause d’ir- ritation des nerfs cutanés, la simple interruption de la circulation placentaire suflit pour provoquer des mouvements respiratoires. L’excitation des nerfs cutanés n’est pas indispensable à l'établissement de ces mouvements; mais elle constitue un puis- sant adjuvant de leur production, comme le savent les accoucheurs. Sandmam, François-Franck ont fait des expé- riences sur les conditions dans lesquelles se produit la contraction des muscles bronchiques : excitation du pneumogastrique, irritation de l’endocarde ou de la surface interne de l'aorte. IV. — CHALEUR ANIMALE. Plusieurs physiologistes ont constaté que, chez l’homme et les animaux à sang chaud, la valeur des combustions interstilielles (mesurée par l’im- portance de l'absorption d'oxygène et de l'exhala- tion d'acide carbonique qui s'effectuent dans les poumons) présente un minimum, lorsque la tem- pérature extérieure est voisine de Æ 18° à + 20°. Dès que cette température s’abaisse, les combus- 672 L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE tions interstitielles augmentent d'intensité; il en est de même silatempérature extérieure dépasse notablement -+ 20°. Rosenthal et Ansiaux ont constaté la même relation entre les variations de la température du milieu extérieur et la quantité de chaleur produite par les animaux à sangchaud; ils ont eu recours à la méthode calorimétrique di- recte, si facile à appliquer gràce au calorimètre à air imaginé par d'Arsonval. La quantité de chaleur cédée au calorimètre par les lapins et les cobayes estau minimum pour une température extérieure voisine de + 20°, Elle augmente dès que la tempé- rature extérieure s'éloigne notablement en plus ou en moins de cette température moyenne de + 20°. Il ya donc accord complet entre les résultats four- nis par la méthode calorimétrique directe, el par les méthodes indirectes qui déduisent la produe- tion de chaleur de la consommation de l'oxygène. Ce résultat facile à prévoir demandait cependant à être vérifié expérimentalement, attendu que plusieurs physiologistes, notamment Ch. Richet et ses élèves, étaient arrivés dans leurs expériences à ce résultat paradoxal, que l'augmentation ou l'a- baissement de la température extérieure agit dif- féremment sur la consommation d'oxygène et sur le rayonnement calorifique des animaux homéo- thermes. Le minimum des échanges respiratoires correspond pour eux au maximum de la radia- tion thermique. Ch. Richet a continué ses recherches sur l'in- fluence que la taille, ou plus exactement la surface de refroidissement, c’est-à-dire l'étendue du tégu- ment cutané, exerce sur la thermogénèse. Il y a proportionnalité rigoureuse entre ces deux gran- deurs. Toutes choses égales d’ailleurs, l'exhalation de l'acide carbonique est proportionnelle à l’éten- due de la surface culanée (0%. 0027, par centi- mètre carré de surface et par heure). D'Arsonval a perfectionné sesappareils calorimé- triques. Berthelot et André ont déterminé les cha- leurs de combustion des principaux composés azo- tés contenus dans les êtres vivants. M. Kochs a émis récemment une théorie nou- velle de l’acclimatement de l'homme et des ani- maux domestiques dans les pays chauds. Les ani- maux à sang chaud, dit-il, ne peuvent résister aux tempéralures élevées des régions tropicales, que par une diminution notable de la valeur de leurs combustions interstitielles. Cette diminution elle- même est obtenue, grâce à un changement dans la composition centésimale de la substance de nos tissus : la proportion de substance active diminue considérablement par rapport à la proportion d'eau. c'est-à-dire de substance indifférente. Tandis que dans les climats tempérés, la proportion centési- male d’eau contenue dans les museles de l'homme et des ruminants, varie de 72 à 75 ?/,, cette pro- portion s’élèverait à plus de 80°/, chez les indivi- dus vivant dans les pays chauds. Dans cettethéorie, l'Européen qui se transporte dans un pays à tem- pérature élevée serait acclimaté lorsque ses tissus ont acquis cette proportion élevée d’eau. Ce chan- gement de composition chimique serait cause de la diminution de l’activité musculaire et intellec- tuelle. V.— DIGESTION ET NUTRITION. Nous ne pouvons citer ici tous les travaux de dé- tails parus depuis l’année dernière sur la sécrétion des sucs digestifs. Mentionnons cependant les re- cherches de Wertheimer sur la sécrétion salivaire. D'après Wertheimer le ganglion sous-maxillaire peut jouer réellement le rôle d’un centre nerveux réflexe, pour la sécrétion de la salive dans la glande sous-maxillaire, comme l'avait admis Claude Ber- nard. Schiff avait contesté le fait. Arloing a montré que le grand sympathique cer- vical contient chez le bœuf et la chèvre des filets excito et fréno-sécrétoires destinés anx glandes du mufle et à la glande lacrymale. Moussu a déter- miné les nerfs excilo-sécrétoires des glandes pa- rotides chez le bœuf, le mouton, le cheval et le porc, et a montré que ces nerfs partent de la racine mo- trice du trijumeau, et non du facial comme on l'ad- mettait jusqu'à présent. Dastre a continué ses études sur la sécrétion bi- liaire etindiqué un procédé qui permet l’établis- sement d'une fistule permanente de la vesicule biliaire chez le chien. Un grand nombre d'expérimentateurs ont con- tinué à prendre la fonction glycogénique du foie comme sujet de leurs investigations. Je me pro- pose d'analyser ici dans une autre occasion les principaux travaux parus sur cette importante question depuis queiques années. VI. — PnYSIOLOGIE DES MUSCLES. Depuis quelques années, l'emploi de lélectro- mètre capillaire de Lippmann tend à se généraliser pour l'étude des phénomènes électriques présentés par les nerfs et les muscles. Comme on le sait, cel instrument révèle l'existence des courants élec- triques et deleurs variations, par des déplacements microscopiques d'une colonne de mercure con- tenue dans un tube de verre capillaire. La masse de mercure mise en mouvement dans le capillaire est si minime, qu'on peut entièrement faire abs- traction de l'influence de l’inertie : les déplace- ments de la surface libre du mercure sont ca- pables de suivre, sanstemps perdu appréciable, les variations les plus rapides etles plus compliquées dans l'intensité d’un courant électrique. vit © as L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 673 Les boussoles et les galvanomètres employés couramment jusqu'à présent en électrophysiologie, présentaient sous ce rapport un grave défaut, dû à l'inertie de la masse métallique de l’aimant que le courant électrique avait à ébranler et à mettre en mouvement. Ces instruments étaient incapa- bles de suivre des variations tant soit peu ra- pides de l’état électrique d’un nerf ou d’un musele; et les physiologistes avaient dû, pour ces études, imaginer des méthodes fort compliquées (Rhcotome de Bernstein). L'emploi de l'électromètre, combiné avec l’ins- cription pholographique des excursions du mé- nisque mercuriel de l'instrument, a permis de résoudre quelques-unes des questions d’électro- physiologie que les anciennes méthodes avaient laissées indécises. Onne connaissait pas la relation exacte de temps, qui existe dans la contraction musculaire, entre le début du phénomène méca- nique de raccourcissement et celui du phénomène électrique connu sous le nom de variation négative. On admettait assez généralement que le phéno- mène électrique précède le début de la contraction, etse développe par conséquent pendant la période dite latente de la contraction, c’est-à-dire pendant l'intervalle fort court (quelques millièmes de se- conde) qui sépare le moment de l'excitation de celui du début du raccourecissement musculaire. Burdon-Sanderson a réussi à photographier sur la même plaque sensible le tracé du signal d’excita- tion du muscle, celui de la contraction musculaire ainsi que celui de l’électromètre capillaire. La vitesse de translation de la plaque était contrôlée par l'inscription photographique des vibrations d’un diapason. Burdon-Sanderson à constaté, au moyen de cette méthode élégante, que la variation électrique et la contraction mécanique du musele débutent exactement en même temps, environ deux centièmes et demi de seconde (=;4) après le moment de l'excitation. Les deux phénomènes pré- sentent donc un retard ou temps perdu identique. Gad et Heymans ont étudié l'influence que la température exerce sur la contraction musculaire. Leur travail a été couronné par l'Académie des Sciences de Paris. La contraction du muscle triceps fémoral, qui se produit chez l'homme ou chez les animaux quand on percute le tendon rotulien, est considéré par les physiologistes et les pathologistes comme un phénomène réflexe, nécessitant par conséquent l'intervention de nerfs sensibles, de centres ner- veux spinaux et de nerfs moteurs. A. D. Waller combat celte explication classique, en se basant principalement sur la faible durée (moins d'un centième de seconde, selon lui) du temps perdu, c’est-à-dire du temps qui s'écoule entre le moment de l'excitation mécanique, par choc du tendon, et le début de la contraction musculaire. La contrac- tion serait, d’après lui, produite par excitation mé- canique directe du muscle. Le temps perdu corres- pondant aux réflexes les plus simples comporte toujours, comme on le sait, un minimum de plu- sieurs centièmes de seconde. Deux des maitres de la Physiologie, Chauveau et Marey, nous ont donné chacun un ouvrage capi- tal sur la physiologie du mouvement, le Vol des Oi- seaux (Marey) et la Contraction musculaire (Chauveau). Zuntz a récemment repris une question inté- ressante, celle de la comparaison du muscle vivant avec les machines à vapeur ou à gaz, au point de vue de l’utilisation de l'énergie chimique et de sa transformation en énergie mécanique. Les meil- leures machines à gaz n’utilisent, d’après Schottie, que 7,33 1/, de la chaleur de combustion du char- bon; et dans les machines à gaz on ne recueille sous forme de travail que 10, 82°, de l’énergie calorifique du gaz brûlé. Les expériences de Zuntz, Lehmann et Hagemann faites sur le cheval, celles de Katzenstein, Gärt- ner, elc., faites chez l'homme, ont montré que le moteur vivant utilise jusqu’à 35 °/, de l'énergie de combustion des aliments, et la fait apparaitre sous forme de travail extérieur. Le moteur vivant est donc, sous ce rapport, très supérieur à la machine à feu. Les moteurs électriques alimentés par des piles présenteraient seuls un rapport encore plus favorable entre l'énergie chimique dépensée dans la pile et le travail extérieur fourni par le moteur. Mais il ne faut pas oublier que si la chaleur rayonnée par une machine à gaz peut légitime- ment être considérée comme un déchet, il n’en est plus de même pour l’animal à sang chaud envi- sagé comme moteur. La chaleur produite dans les muscles, concurremment au travail, est aussi ulile, aussi nécessaire à l'organisme que ce dernier. La portion d'énergie chimique des aliments qui se convertit en chaleur doit être rangée dans la colonne des profits, et non dans celle des pertes, lorsque l’on dresse le bilan de l'organisme. Voici quelques chiffres intéressants cités par Zuntz : 1000 kilogrammètres de travail pendant l'ascension (déplacement vertical) correspondent à la combustion de 1%, 663 de chair musculaire. ou 0,7151 de graisse, ou 1#,6313 de fécule ou 1#,6846 de sucre, c’est-à-dire à la mise en liberté de 2857,1 kilogrammètres d'énergie chimique, dont 1857,1 sont transformés en chaleur (4.3695 calo- ries). Chez l'homme, 1.000 mètres de déplacement horizontal correspondent par kilogramme de poids à la combustion de 0#,1270% de chair musculaire (05,05457 de graisse, ou 0*",12471 de fécule, ou 0# 12854 de sucre). 67% En ce qui concerne la physiologie spéciale des mouvements, la mécanique du larynx et celle de la phonation ont fait l’objet de plusieurs travaux intéressants. Les recherches de Hermann et de Pipping sur le timbre des voyelles se rattachent au même sujet. NII. — SYSTÈME NERVEUX. Les expérimentateurs avaient jusqu’à présent deux procédés d'investigation à leur disposition dans l'étude des localisations cérébrales : 4° l’ex- tirpation de la portion du cerveau dont on veut déterminer la fonction, exlirpation suivie d’une suppression ou d'une altération profonde de la fonction ; 2° l'excitation directe, électrique ou chi- mique, de la substance nerveuse, excitation qui pour certaines régions déterminées de la substance cérébrale, donne lieu à des mouvements limités à un petit nombre de muscles, soit du membre anté- rieur, soit du membre postérieur, soit d’une autre portion du corps. C’est ainsi que la destruction d’une parlie déter- minée de la surface du cerveau, dans la région occipitale droite du singe, abolit la vision dans la moitié droite de chaque rétine. L'animal opéré ne voit plus rien dans toute la moitié gauche du champ visuel. Au-devant de cette région psycho- optique de l'écorce cérébrale, il y a une région dite psycho-motrice, dont l'excitation électrique pro- voque des mouvements des muscles de l'œil. On a pareillement déterminé à la surface du cerveau des régions psycho-acoustique, psycho-olfactive, etc. Beck a imaginé un troisième procédé appelé à compléter et à contrôler les résultats fournis par les deux premières méthodes dans l'étude fonc- tionnelle de la topographie cérébrale. Ce procédé ulilise la variation électrique néga- tive, comme signe révélateur de l’activité de telle ou telle portion de l'écorce cérébrale, survenant à la suite d’une excitation sensorielle appliquée à la périphérie. Ceci demande un mot d'explication : du Bois- Reymond a montré que les nerfs, les muscles et les éléments vivants en général, lorsqu'ils sont excités et qu'ils passent de l’état de repos à l’état d'activité, sont le siège d’un phénomène élec- trique spécial auquel il a donné le nom de varia- lion négative. D'après Hermann, la variation négative consis- terait en ceci, que la portion irritée de substance vivante devient négative par rapport aux portions voisines restées au repos. Sciecznow, Gotch et Horsley ont montré récemment (1888-1889) que les centres nerveux, notamment la moelle allongée et la moelle épinière, présentent (comme les nerfs et les muscles) le phénomène de la variation néga- L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE tive quand on les excite. C'est ce fait que Beck a utilisé pour l'étude topographique du cerveau. Supposons qu'il s'agisse de déterminer la situa- tion du centre psycho-optique.On appliquera deux élec- trodes impolarisables sur deux points symétriques de la surface du cerveau et on les reliera à un gal- vanomètre très sensible. On n’observera aucune déviation ou une déviation insignifiante de l’aimant tant que l'animal est au repos. À ce moment on fera tomber une vive lumière sur un endroit déter- miné de l'une des rétines de l'animal : si l’une des électrodes appliquée à la surface du cerveau touche le centre psycho-optique correspondant, on en sera immédiatement averti par le dévelop- pement d’un courant électrique et d'une déviation de l’aimant indiquant que cette électrode est élec- trisée négalivement. S'il n’y a pas de déviation de l’aimant, cela indiquera que les électrodes ne sont pas à la bonne place : il s’agit alors de trouver cette place par tàtonnements, en déplaçant les élec- trodes, jusqu’à ce que la déviation se produise au moment où l’œil droit est excité par la lumière. En excitant ensuite la portion symétrique de l'œil gauche, on obtiendra une déviation semblable de l'aimant, mais dans l’autre sens. Ces faits ont été pleinement confirmés par Fleischl v. Marxow qui avait fait des expériences analogues en 1883 et en avait consigné les résul- tats dans un billet cacheté déposé à l'Académie des Sciences de Vienne. La publication du travail de Beck l’a déterminé à rompre le silence. Fleischl a constaté en outre que l’anesthésie par le chloroforme supprime complètement les mani- festations électriques dans les centres nerveux, au moment de l'excitation de la rétine ou des nerfs sensibles. Cette observation peut servir jusqu’à un certain point à résoudre la question suivante : La suppression de la douleur est-elle réelle dans l’anesthésie chloroformique ; ou, y a-t-il seulement, après le réveil, suppression du souvenir de la douleur perçue réellement malgré l’anesthésie ? Puisque le chloroforme supprime la manifestation matérielle (variation électrique) du phénomène psychique de la sensibilité, il est probable que le phénomène psychique fait lui aussi défaut pendant l’anesthésie. Peut-être les faits signalés par Beck, par Fleischl, par Gotch et Horsley mettront-ils fin à la controverse qui se poursuit depuis plusieurs années entre les partisans et les adversaires de la doctrine des centres corticaux psycho-moteurs et psycho- sensibles. Signalons parmi les travaux parus l’année dernière sur ce sujet, les expériences de Brown-Séquard, les recherches de Munk, Mott, Schaefer, Obregia, Gilman Thompson et Sanger- Brown sur les centres corticaux de la vision, celles L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE de H. Krause sur le centre cortical des mouve- ments du larynx, celles de Mott et Schaefer sur l'excitation du corps calleux, celles de v. Koränyi sur la destruction du corps calleux, de Flechsig sur les fonctions acoustiques des tubercules qua- drijumeaux inférieurs !, etc. «Un chapitre très intéressant de la physiologie du bulbe est celui de l'influence qu'exercent les uns sur les autres la plupart des centres nerveux groupés dans cel organe. L'activité de l’un d’entre eux retentit pour ainsi dire forcément sur celle du centre voisin, et souvent le phénomène ainsi pro- voqué parirradiation ne parait être d’aucune uli- lité pour l'acte auquelil s'associe ». (Wertheimer). C’est ainsi que, chez le chien, chaque mouvement d'inspiration s'accompagne d’une accélération des pulsations cardiaques et d’une dilatation des petits vaisseaux. Il s’agit d’une association d'action des centres nerveux respiratoire, modérateur du cœur et vaso-constricleur, situés, comme on sait, dans la moelle allongée el très voisins les uns des autres. Par un mécanisme semblable, les mouvements de déglutition peuvent, eux aussi, modifier le rythme de la respiration et celui du cœur. D’après Meltzer (1883), chaque mouvement de déglutition s'accompagne chez l’homme d'une accélération pas- sagère des battements du cœur et d’un arrêt de la respiration. Celle accélération est suivie d’une période ultérieure de ralentissement du rythme cardiaque. Wertheimer et Meyer ont constaté que chez le chien, au contraire, les mouvements de dégluti- tion s'accompagnent d'un ralentissement ou même d’un arrêt complet du cœur. Le ralentissement du cœur doit son origine à l'association fonctionnelle de trois centres bul- baires impliqués dans le phénomène. Le centre de la déglutition, au moment où il entre en action, exerce une influence d’arrèt sur le centre de la respiration, et l'inhibition respiratoire a elle- même comme conséquence un renforcement d’ac- tivité de l'appareil modérateur du cœur. A. Charpentier a poursuivi ses intéressantes recherches sur la comparaison des sensations visuelles et auditives au point de vue de la durée et de l’intensité d'action de l'agent excitant. On sait que les animaux empoisonnés par la naphtaline présentent des altérations du cristallin amenant une véritable cataracte. P. Kolinski a montré récemment que la naphtaline agit non seulement sur les yeux, mais en même temps aussi sur les organes internes. Les lésions anatomiques nn © À Le PE En net OS M NE ! Les intéressants travaux de Steiner sur les fonctions des centres nerveux des animaux invertébrés méritent également une mention spéciale, 675 provoquées par la naphtaline dans divers organes peuvent être ramenées principalement à des chan- gements dans le système vasculaire. Quant à la cataracte, elle est d’origine secondaire et due aux lésions de la choroïde, de la rétine et du corps vitré. VIII. — REPRODUCTION. On sait que l'enfant, encore contenu dans l'utérus maternel, est plongé dans un bain de liquide amnio- tique. Quelle est l’origine de ce liquide? Est-ce un produit de transsudation emprunté aux vaisseaux maternels et destiné à contribuer à la nutrition du fœtus, ou faut-il y voir au contraire une accumu- lation d'urine fœtale? Les deux opinions ont été soutenues. Doederlein a cherché à élucider cette question en s'adressant à l'espèce bovine, où le liquide allantoïdien (prove- nant de la sécrétion rénale du fœtus) reste séparé, pendant toute la durée de la gestalion, du liquide amniotique proprement dit. Il résulte des analyses qu'il a faites de ces deux liquides, aux différentes périodes de la gestation, que le liquide amnio- tique proprement dit ne contient pas d’albu- mine,etprésente une composition saline constante semblable à celle du sérum sanguin: Ce liquide parait se former uniquement pendant la première moitié de lavie intra-utérine, par transsudation aux dépens des vaisseaux materneis. Dans la seconde moitié de la gestation, le liquide en question dimi- nue peu à peu en quantité : il est avalé par le fæ- tus, comme le prouve l'analyse du contenu stoma- cal de ce dernier. On ne peut cependant pas le con- sidérer comme un véritable liquide nutritif, puis- qu'il ne contient pas d’albumine. Il ne peut four- nir à l'organisation fœlale que de l’eau, des sels et une petite quantité de matières organiques. Le liquide allantoïdien au contraire présente une composition saline semblable à celle de l'urine du jeune veau et très différente de celle du plasma sanguin. Ce liquide, dont la quantité augmente pro- gressivement jusqu'au moment de la naissance, doit être considéré comme formé par une accu- mulation de l'urine du fœtus. Le fait qu'il contient de l’albumine en quantité notable n’est nullement contraire à celte manière de voir, puisque les pre- mières urines du jeune veau sont albumineuses. Si ces données sont applicables à l'espèce hu- maine, il faut considérer le liquide amniotique (comprenant le liquide amniotiqne proprement dit et le liquide allantoïdien) comme ayant une dou- ble origine : ce serait un mélange liquide de trans- sudation sanguine et de produits de la sécrétion rénale du fœtus. Léon Fredericq, Professeur de Physiologie à l'Université e Liège, 676 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Poincaré (H.), Membre de l’Institut. — Sur la réso- nance multiple des oscillations hertziennes. (Archives de Genève, t. XXV, ». 609, juin 1891 !.) MM. Sarasin et de la Rive avaient expliqué leur dé- couverte du curieux phénomène de la résonance mul- tiple par l'hypothèse que l’excitateur de Hertz produit un spectre continu entre certaines limites. Sans vou- loir contester l'exactitude de cette théorie, M. Poincaré cherche à montrer que l’on peut trouver, par une autre voie, une explication plausible des phénomènes. Si la théorie élémentaire est exacte, l’excitateur ne doit donner que certaines harmoniques distinctes, aux- quelles l’étincelle excitatrice communique un certain flou; mais une cause probablement plus efficace, de la résonance multiple repose sur le rapide amortissement des oscillations émises par l’excitateur. M. Poincaré développe donc le calcul rigoureux de cet amortisse- ment, calcul auquel il avertit, du reste, de ne pas prè- ter plus de précision que le phénomène n’en comporte. Dans l’excitateur sphérique de Lodge, lamortissement est tel que chaque oscillation est d’un sixième en- viron de la précédente; dans l’oscillateur de Hertz, le décrément est moindre, quoique considérable encore : une bonne partie de cet amortissement tient à l'é- nergie rayonnée, qui atteint un sixième de l’énergie totale, | Quant à l'amortissement du résonateur, que l’émi- nent auteur calcule pour un fil rectiligne et pour un 4. En notre temps, où chaque branche de nos connais- sances s’émiette en menues parcelles, où de simples chapitres d’une science possèdent leurs revues spéciales, il ne sera peut- être pas inutile d'indiquer, — à l’occasion de quelques mé- moires parus dans les Archives de Genève, — le programme qui valut à ces Archives leur antique renom; il suflit cependant de parcourir les derniers volumes de ce beau recueil pour se convaincre que, légèrement modifié, limité à certaines ques- tions spéciales des sciences physiques et naturelles, il reste en tous points digne du passé. Les Archives sont, avant tout, l'organe des savants suisses, et, en particulier, de la Société helvétique des sciences naturelles, dont l’objet le plus ori- ginal est l’étude des nombreux phénomènes que la Suisse, seule en Europe, offre à profusion : le terrain extraordinaire- ment soulevé et érosé présente au géologue le plus beau champ d’études; c’est en Suisse aussi qu'il faut aller pour étudier les glaciers et la flore de la haute mon- tagne. Cela seul suflirait pour assigner aux Archives une place à part. Mais, en physique et en chimie, la Suisse ne possède, semble-t-il, aucun privilège spécial; tandis qu'il existe une physique allemande, anglaise ou française, il n'existe pas, à proprement parler, de physique suisse; ici l'originalité restait à créer; la rédaction des Archives a com- pris que l’on rendrait grand service aux lecteurs de langue francaise en leur faisant connaitre, par des traductions de mémoires originaux et souvent inédits, et par des analyses très complètes, les découvertes importantes des autres pa] limitées à quelques questions spéciales et à l’ordre du jour: les Archives en deviennent le centre de publicité. C’est ainsi qu’elles ont donné le premier mémoire original et semi-popu- läire de M. Hertz sur les ondulations électriques, mémoire reproduit ir exlenso par quelques revues francaises; les beaux travaux exécutés à la suite de ceux de M. Hertz par MM. Sarasin et de la Rive ont paru dans les Archives, et c’est là aussi que M. Poincaré a donné ses derniers mémoires sur la question. L'analyse faite par M. Ph.-A. Guye des théories de M. Van der Waals a été, pour la plupart de nos confrères, une véritable révélation et a provoqué la publica- tion, dans les Archives, d'importants Mémoires sur la ques- tion. ET INDEX inducteur circulaire, en faisant le rapport de Fénergie totale et de l'énergie rayonnée pendant une demi- oscillation, il est inférieur à 4 pour le premier, et beaucoup plus petit pour le second; il est négligeable vis-à-vis de celui de l’excitateur, La force électrique en un point quelconque du réso- nateur, et à un instant postérieur à l'éclatement de l'étincelle, est donnée par le produit d’une sinusoïde par une exponentielle du temps; en d’autres termes, c’est une oscillation harmonique amortie. Le problème est ramené ainsi à l'intégration de l'équation dt? —at SU m?z = Ae az cos nl. La valeur de z, quantité dont dépend l'amplitude des oscillations de la première harmonique, s’en déduit aisément; elle est constituée par l’ensemble de deux oscillations, dont l’une est amortie, et l’autre d’am- plitude constante ; elles ont respectivement la période d'oscillation de l’excitateur et du résonateur. On en déduit, en comparant les paramètres, que l'amplitude de la vibration du résonateur est plus grande que l’am- plitude initiale de celle de l'excitateur, En faisant va-. z Fée 27% à rier la période — du résonateur, on trouve que le m : maximum de résonance se produit pour m —\ n?—4®; sa valeur est sensible, hors de l'égalité de m et n, si a, c’est-à-dire l'amortissement, est très grand. Dans le cas d’une réflexion sur une paroi métal- lique, les termes qui contiennent le facteur e7“! sont évanouis au moment où l’on observe la résonance; la période du résonateur intervient seule, et linter- nœud correspond à sa longueur, Ch.-Ed, GUILLAUME. Bjerknes (V.). — Sur le mouvement de l'électri- cité dans l’excitateur de Hertz (Archives de Ge- nève, t. XXVI, p. 228, septembre 1891.) Dans ce mémoire, ainsi que dans deux notes parues aux Annales de Wiedemann (t, XLIV, p.74 et 92). « Sur l'amortissement desoscillations électriques » et « Surla résonance multiple» l’auteur partd’une hypothèse ana- logue à celle de M, Poincaré; il arrive aux mêmes équa- tions, et trouve que l'amortissement considérable de l'excitateur suffit à expliquer la résonance multiple, Ce qui fait l'originalité et la réelle valeur de ce travail, c’est que l’auteur a déterminé par l'expérience le décrément des oscillations de l’excitateur et du résonateur. Pourle premier le rapport de chaque oscillation à la précé- dente est 0,77, tandis que, dans le second, l’amortisse- mentestde ? pour mille seulement, Il en résulte qu'après un petit nombre d’oscillations de l’excitateur, celui-ci n'agit plus sensiblement sur le résonateur, dont les ondes décroissent lentement; et, si la différence d’os- cillation propre des deux systèmes n’est pas telle que l’interférence soit complète pendant que les ondes excitatries ont une valeur sensible, on observera tou- jours l’étincelle induite. Une autre conséquence de cet amortissement est que les ondes de retour, dans le cas d’une réflexion, n'in- terfèrent pas complètement avec les ondes d'aller, et qu'il n'existe pas de nœuds absolus ; ainsi, le mouve- ment dans le premier nœud dépasse le dixième de celui qui règne dans le premier ventre. Ch.-Ed. GUILLAUME. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 677 Sparre (Ce de). — Sur le pendule de Foucault. Annales de la Société scientifique de Bruxelles, 14° an- née, 1890, 2° partie, page 284. Bruxelles, 1891. Le très intéressant Mémoire de M. de Sparre, dans lequel il établit les équations du pendule de Foucault, en tenant compte des termes de l’ordre du carré de la vitesse angulaire de rotation de la Terre, a été présenté à l'Académie des Sciences au début de cette année et soumis à l'examen d’une Commission formée de MM. Hermite, Resal, Sarrau, Léauté. Nous ne pouvons mieux faire que de renvoyer ceux de nos lecteurs qui voudraient apprécier l'importance de ce travail, au rapport qui a été fait par M. Resal dans la séance du 43 avril, rapport à la suite duquel, conformément aux conclusions de la Commission, l’Académie a voté l’in- sertion au Recueil des Savants étrangers. IL AD} Æhurston (R.-H.). — Reducing internal wastes of the steam-engine. (Réduction des pertes de cha- leur dans la machine à vapeur.) American Society of Civil engineers. Transactions, vol. XXIV, 1891. M. R.-H. Thurston a entrepris depuis un certain temps dans son laboratoire de mécanique, à Sibley College, une série d'expériences, dont la Revue a déjà parlé, sur un procédé permettant de diminuer les pertes de cha- leur qui se font dans une machine à vapeur, à tra- vers les parois métalliques. Le procédé consistait, en principe, à attaquer la surface du métal de facon à y faire prédominer le carbone et à imprégner la très légère couche spongieuse ainsi formée d’une matière non conductible, susceptible d’y pénétrer et d’y durcir. La précédente communication de M. Thurston sur cet important sujet indiquait les résultats obtenus dans les premières expériences faites; mais ces expériences, instituées pour établir l’intérèt de la méthode, n'avaient pas eu la durée et la précision nécessaires pour qu'il fût permis de donner des chiffres; dans sa note ré- cente, le savant mécanicien américain revient sur ce point et fait connaître les résultats des longs essais qu'il a instilués et poursuivis. Il a reconnu qu'en disposant simplement une couche d'huile sur une surface métallique capable de retenir cette couche, on avait une réduction de 10 ©/, dans la perte de chaleur à travers la paroi correspondante. Il a trouvé ensuite qu'en attaquant la surface de facon à y produire une pellicule de carbone, sans d’ailleurs y mettre ensuite aucune matière, on obtenait une réduc- tion de 20 à #0 0/,. Il est arrivé enfin, en combinant les deux procédés, à un gain de 60 à 70 (},, selon les cir- constances et suivant la manière d'opérer. Nous ne connaissons pas le détail des expériences faites par M. Thurston et devons nous contenter de rap- porter ici les chiffres qu'il donne; mais son autorité dans tout ce qui touche à la Mécanique est si incon- testée, les moyens dont il dispose sont si puissants, qu'on doit porter la plus grande attention à toute affir- mation donnée par lui. « Je ne désespère pas, dit-il, d'assurerparcemoyenuneactionsicomplèteetsiefficace que la perte de chaleur à travers le métal soit réduite à presque rien, » Et plus loin : « Nous arriverons peut- être sensiblement aux condilions de la machine idéale et réduirons ainsi la consommation de vapeur et de combustible aux chiffres regardés aujourd’hui comme purement hypothétiques, bien inférieurs à tout ce qui a été atteint actuellement dans la meilleure des pra- tiques modernes. » Ce serait un très gros résullat et, malgré notre res- pect pour M..Thurston, nous demandons à faire des réserves; mais, en admettant même qu'une faible partie seulement de ces espérances fussent réalisées, ce serait encore un progrès considérable, car les pertes de cha- leur à travers les parois du cylindre sont, dans la ma- chine à vapeur, une des principales causes de l’infé- riorité du rendement. J. Pourer. 2° Sciences physiques. Mascart(E.) Membre de l'Institut.—Traité d'Optique, D LeiT Tigres (Prin TT, 20/fn TAIT) 227fr3) Gauthier-Villars et fils, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1889 et 1891. L'analyse d’un travail aussi considérable que celui de M. Mascart est impossible à donner, avec détails, dans les quelques lignes consacrées à cette notice, J'essaierai pourtant d'indiquer brièvement les points essentiels qui caractérisent ce magistral ouvrage, Nous n'avions pas, en France, jusqu'à présent, de livre unique, écrit par la même main et dans le même esprit, dans lequel fussent exposées en détail toutes les parties de l’oplique, qui est pourlant une science essentiellement francaise, Les œuvres de Fresnel for- maient bien, il est vrai, la source à laquelle allaient puiser ceux qui avaient désir de connaître ab ovo les principes fondamentaux et les recherches du créateur de l'optique physique; de mème les conférences de Verdet rendaient, au point de vue de l’enseignement, d'immenses services aux professeurs; mais, depuis Fresnel, que de travaux importants ont été faits, tant en France qu’en Allemagne et en Angleterre, qu’il fal- lait aller chercher dans tous les recueils spéciaux où ils étaient disséminés ! M. Mascart vient, à la grande salisfaction de tous les physiciens qui s'occupent d’oplique, soit pour y faire des recherches, soit pour l’enseigner, de combler cette lacune, et de la combler d’une facon heureuse. Pré- paré de longue main à ce travail par ses cours du Col- lège de France et par toute une carrière consacrée à des travaux d'optique de premier ordre, il pouvait, mieux que tout autre, entreprendre celle tâche colossale et la mener à bonne fin. Dès le commencement de l'ouvrage, l’auteur expose la théorie Ces ondulations, point de départ naturel et logique de toute son étude, Le principe d'Huyghens, ses constructions géométriques viennent ensuite, ainsi que quelques propriétés géométriques des ondes ; après quoi l’on entre en plein dans cette partie élémentaire de l'optique qui fait partie du cours de mathématiques spéciales, et qu'on appelle l'optique géométrique, étude des systèmes et des instruments d'optique (p. 1 —156). Aussitôt après l'optique géométrique, M. Mascart entre dans la théorie des interférences, immédiate- ment appliquées à l'étude de la diffraction, qui fait l’ob- | jet d’un long et important chapitre, puis traite l’inter- férence dans les lames isotropes, anneaux de Newton, lames de Jamin, etc.; là se trouve dans tous ses détails la théorie des bandes de Talbot, dont l’auteur a su faire une si élégante application à la mesure des in- dices de réfraction des gaz. Puis vient un chapitre sur les applications des inter- férences : mesures de dilatation, réfractomètres inter- férentiels. Le chapitre VIIT est consacré à la polarisation et con- tient l'exposé de la loi de Malus, et le chapitre IX, qui termine le premier volume, traite de la double réfrac- tion et des polariseurs et analyseurs biréfringents. Le tome IT est consacré à l’étude très approfondie, de lapolarisation chromatique, de la polarisation rotatoire, de la réflexion etde la réfraction sur le verre et sur les métaux, Il est à peine nécessaire de dire que le livre est au courant et que la découverte de M. Lippmann, la belle expérience de M. Otto Wiener y sont exposées à leur place. C’est dans ce volume surtout que le lecteur appréciera quel avantage immense il y a à trouver groupées les théories diverses que l’on à proposées, et qui sont exposées avec une unité de rédaction et une unité de notations qui sont une des qualites les plus précieuses de l’ouvrage. Là s'arrête le tome Il; mais l'optique n’est pas finie, ct M. Mascart, dans la préface du second volume, s'excuse de n'avoir pas su répondre au programme qu'il s'était tracé, de faire en deux volumes l'exposé de toute la science de la lumière. 678 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Est-ce sa faute? Nous ne le croyons pas. Il n'y a peut- être pas, l'électricité à part, de sujet aussi vaste que celui-là. Quand on entreprend un tel voyage, on s’aper- çoit que le chemin est plus long qu’on ne l'avait prévu. Ce n’est pas un gros inconvénient quand les forces du voyageur lui permettent d'achever la route qui reste à parcourir sans montrer trace de fatigue. M. Mascart est de ces voyageurs-là : dans son tome IT, que nous atten- dons impatiemment, il nous conduira au bout de la carrière, et il pourra avoir la conscience d’avoir rendu à tous les savants et à tous les professeurs un immense service en publiant son Traité d'Optique dont le succès sera certainement aussi grand à l'Etranger qu’en France, ALPHONSE BERGET. Huntington Williams (George), — Elements of Cristallography for students of chemistry, phy- sics and mineralogy. (Eléments de cristallographie). 2e édition (2 fr.). Macmillan et C° Bedfort Street, Co- vent Garden. Londres, 1891. Ce livre n’a pas la prétention, dit l’auteur, d’être un traité complet de cristallographie, mais seulement d’être utile et de fournir des indications assez étendues, soit aux étudiants, soit aux physiciens et aux chimis- tes, dans les besoins qu'ils ont de reconnaître et de déterminer une forme cristalline. L'étude des divers systèmes cristallins y est cependant très complète; formes simples et composées, holoèdres et hémièdres, macles simples et multiples y sont représentés par de nombreuses figures, claires et bien faites, ce qui faci- lite toujours beaucoup l'emploi d’un livre élémentaire. Celles relatives aux mâcles sont à signaler d’une facon spéciale, car plusieurs d’entre elles ne se trouvent pas communément dans les ouvrages de cristallographie. Ce petit traité est surtout un traité pratique, cher- chant à fournir les moyens d'étudier la cristallogra- phie ou de déterminer une forme cristalline avec le minimum de travail possible. La partie mathématique y est complètement et volontairement laissée de côté. On peut lui reprocher diverses imperfections qui proviennent de l'influence de l’école allemande, laquelle y domine entièrement. On y trouve, par exemple, la non-séparation des systèmes hexagonal et ternaire, qui sont réunis en un seul dans lequel les formes rhom- boédriques sont considérées comme des hémièdres des formes hexagonales; c’est là une hérésie qui n’est admissible ni au point de vue théorique, ni au point de vue pratique. Le système de notations adopté est celui de Nau- mann, c'est-à-dire le moins commode et le plus com- plexe de tous ceux existants; en revanche le seul sys- tème de notations qui ne soit pas décrit est celui de Lévy; c'est cependant celui qui est employé en France d’une facon dominante. Ce qui se passe en Allemagne et en Angleterre à cet égard est assez curieux : il existe en cristallographie un système de notations indispensable, par l'intermé- diaire duquel il faut que tous les autres passent, dès qu'il s’agit d'effectuer des calculs cristallographiques : c’est celui de Miller. Il est relativement peu employé. Quant aux systèmes usuels de Nauman et de Lévy, le premier est incommode et complexe : il nécessite des signes conventionnels désagréables en imprimerie, très sujets aux erreurs ; il ne parle pas aux yeux et chaque expression demande un raisonnement pour qu'on arrive à se rendre comple de ce qu’elle repré- sente; ses termes ne tiennent pas sur les figures et nécessitent le recours intermédiaire à des lettres annexes quelconques. Le système de Lévy au contraire est très clair, il est éminemment représentatif aux yeux; à la simple lecture on sait immédiatement à quelle forme cristalline on a affaire; ses termes peu- vent être placés sur les figures. 11 possède donc comme système usuel (ous les avantages qui manquent à l’autre; cependant, de ces deux systèmes, c'est celui de Nauman qui est couramment adopté en Allemagne et en Angleterre, celui de Lévy n'y étant souvent, comme dans ce traité, pas même décrit. Cela découle évidem- ment du même genre d'esprit qui fait conserver en Angleterre l’usage de mesurer en pouces et en lignes et de peser en onces et en grains. J. Cure. Mond (Ludwig) Sur le nickel-tétracarbonyle et ses applications dans les arts et manufactures. Communication faite à la British Association. Session de 1891. : Le premier mémoire de MM. Mond, Langer et Quincke sur le nickel-tétracarbonyle a déjà été analysé dans la Revue (t. I, page 657, et £.II, pages 483). Dans sa communication, M. Ludwig Mond rappelle les résultats obtenus alors et y ajoute ceux qu'a fournis depuis l'étude du corps qu'il a découvert. L'abaissement du point de congélation de la benzine, par dissolution du nickel-tétracarbonyle, conduit àJui attribuer comme poids moléculaire 156,5; la formule Ni (CO) correspondrait à 170,5. Le coefficient de dilatation de ce liquide entre 0° et 36°, est considérable ; il a pour valeur 0,001853. La réfraction est à peu près égale à celle du sulfuré de carbone : lindice correspondant à la raie D, à 10, est 1, 45843. La réfraction moléculaire est de 58,63. Si l’on attri- bue au groupe CO la réfraction ordinairement trouvée dans les composés organiques, la réfraction atomique du nickel serait 25,02. Cette valeur est très considé- rable par rapport à celle que l’on déduit de l’étude des autres composés du nickel, et qui est voisine de 10. Elle tendrait à faire admettre que, dans le nickel-tétracar- bonyle, le nickel a une atomicité bien supérieure à 2, M. Mond pense que la constitution pourrait être repré- sentée par le schéma : le nickel étant ainsi octovalent. L'étude du pouvoir rotatoire magnélique conduit aux mêmes résultats, Cette conclusion est d'accord avec toutes les propriétés chimiques connues du nickel-tétracarbonyle. M. Mond signale les résultats négatifs qu’il a obtenus en cherchant à réaliser des composés analogues avec d’autres métaux, Le fer seul a donné un composé conte- nant 4 atome de fer uni à #,126 molécules d'oxyde de carbone, c’est-à-dire sensiblement 1 et 4. Ge composé est un liquide, de couleur ambrée; il se solidifie à — 24° et bout à 102°, Son étude, qui n’est pas encore terminée, semble indiquer des propriétés chimiques très difré- rentes de celles du composé du nickel. La propriété du nickel de former avec l’oxyde de carbone un composé volatil peut être utilisée pour re- ürer ce métal de ses minerais. MM. Mond et Langer ont obtenu de bons résultats en opérant avec des minerais de nickel contenant de #4 à 40 pour cent de métal à Pétat de combinaison avec l’arsenic et le soufre. Voici comment il convient de procéder: Le minerai est soumis d’abord à une calcination, en vue d'amener le métal à l’état d'oxyde. La masse est ensuite soumise à l’action de gaz réducteurs, à 4509. Pratiquement on emploie dans ce but le gaz à l'eau, (mélange d'hydrogène et d'oxyde de carbone obtenu par l’action de la vapeur d’eau sur le charbon au rouge). Le nickel refroidi est traité par l’oxyde de car- bone. On emploie pour cela un appareil dans lequel le minerai se déplace en sens inverse du courant gazeux, ce qui renouvelle les surfaces et facilite la réaction. Quand au bout d’un certain temps la combinaison se ralentit, on chauffe quelque temps le métal à 360° dans un courant d'acide carbonique, ce qui lui rend toute son activité, Le gaz qui a passé sur le nickel est dirigé: dans un espace chauffé à 200. Là, le nickel-tétracar- bonyle se décompose, laisse déposer du nickel à peu BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX >rès chimiquement pur (contenant pourtant parfois Res traces de fer), et l’on retrouve de l’oxyde de car- bone qu’on peut faire passer de nouveau sur le minerai. L'oxyde de carbone peut servir ainsi indéfiniment, el comme on n’en emploie que de petites quantités, on eut le prendre à peu près pur. Le dépôt de métal se fait sur de petits fragments de nickel que l’on place dans l’espace chauffé à 200°. Le dépôt de nickel étant parfaitement homogène et cohérent, on peut produire directement divers objets en métal, en effectuant ce dépôt sur des moules chauf- fés à 200°, On obtient ainsi un métal tout à fait ana- logue à celui que fournit l’électrolyse. Enfin, on peut recouvrir des objets d’une couche de nickel en les immergeant, après les avoir chauffés, dans une solution de nickel-tétracarbonyle dans la benzine ou le pétrole. Le curieux composé, découvert par MM.Mond, Langer et Quincke, est donc déjà susceptible d'applications dont le nombre croitra certainement encore d’ici peu. Georges CHarpy. Genvresse (P.).— Contribution à l'étude de l'é- ther acétylacétique, — Thèse présentée à la Faculté des Sciences de Paris. Imprimerie Gauthier-Villars, 55, Quai des Grands-Augustins, Paris, 1891, Les principaux faits qui ressortent du travail de M. Genvresse sont lessuivants : L’éther acétylacétique bichloré de M. Allihn n’est pas identique avec celui de M. Conrad : cela résulte de lac- tion qu’exerce l’ammoniaque sur ces deux éthers. Le premier donne, avec ce réactif, de l’éther acétique bichloré et de l’acétamide; il a pour formule : CHS — CO — CCI? — CO — OC?H°. Dans les mêmes conditions, l’éther de M. Conrad se dédouble en éther acétique et dichloroacétamide; il correspond donc au schéma : CHCP — CO — CH2— CO — OCIHS L'éther trichloré de.M. Mewes, obtenu par action di- recte du chlore sur l’éther acétylacétique, n’est qu'un mélange de deux isomères que l’auteur a pu préparer à l’état de pureté. M. Genvresse établit ensuite que les produits de la réaction de l'acide chlorhydrique et de l'acide sul- furique sur l’éther acétylacétique sont différents contrairement à l'opinion de M. Hantzsch, le corps que ce dernier avait désigné sous le nom d'éther mésitène-lactone-carbonique n’est pas identique au carba- cétylacétate déthyle. L'auteur termine son mémoire par l'étude de l’action de différents réactifs sur le carbacétylacétate d’éthyle. H. GAUTIER, 3° Sciences naturelles. Bastit (E). — Recherches anatomiques et phy- siologiques sur la tige et la feuille des Mousses. — Thèse présentée à la Faculté des Sciences de Paris. Extrait de la Revue générale de Botanique. Klincksieck. Paris, 1891. Les auteurs de thèses pour le doctorat ès sciences accordent généralement beaucoup de soin à l'historique des travaux de leurs devanciers, et en donnent une analyse détaillée, qui met le lecteur au courant de la question, lui montre ce qui a été fait et ce qui restait à faire. M. Bastit n’a pas cru devoir consacrer plus d’une vingtaine de lignes à l'exposé des travaux qui ont pré- cédé le sien. Ce procédé peut prêter à des confusions. Ainsi, en lisant la description de l’anatomie de la tige du Sphagnum (p.5 et suiv.), on ne croirait pas qu'elle se trouve tout aussi détaillée dans quelques traitésde bota- nique. De même, lorsque M. Bastit dit, en parlant dela tige du Polytrichum : « On constate cà et là, au milieu du tissu cortical, des formations particulières auxquelles J'ai donné (sic) le nom de faisceaux foliaires… » (p.14), on ne se douterait pas que ces faisceaux foliaires sont 679 figurés et désignés sous le même nom dans des traités classiques. La manière dont est faite la description des lamelles qui courent à la surface des feuilles du Polytrichum juniperinum (p. 25 et suiv.) ne laisse pas davantage supposer au lecteur que leur constata- lion n’est pas une découverte, et que, figurées déjà en 1818 par Schimper, elles sont actuellement pour les bryologues l’un des meilleurs caractères despécification des Polytrichées. Un tel mépris de la bibliographie rend bien difficile l'analyse d’un travail. Aussi, renoncant à chercher, parmi les 21 conclusions énumérées par M. Bastit comme résultat de ses recherches anatomiques, quelles sont celles qui lui sont personnelles, nous passerons de suite à la deuxième partie, les Recherches physio- logiques. Dans cette seconde partie, l’auteur a soumis les tiges d'une seule espèce, le Polytrichum juniperinum, à des conditions variées; il les a placées dans l’air et dans l'eau, à la lumière et à l'obscurité, dans l'air sec et dans l'air humide ; ila consigné les résultats de ses expériences et les à étendus sans hésitation à toutes les Mousses, Tout le monde a observé que, si l’on place une touffe de mousse dans une chambre, devant une fenêtre, au- trement dit, si on l’éclaire d'un seul côté, les tiges, au lieu de rester dressées comme lorsqu'elles sont éclai- rées normalement, se courbent vers la lumière; la lu- mière exerce donc sur elles une action qui prime celle qu'exerce la pesanteur. M. Bastit s’en est rendu compte à son tour. De plus, le 12 janvier 1890 ila planté des touffes de Polylrichum juniperinum au fond de tuyaux de grès, et trois mois après, il a tiré de l’état de ses cultures la conclusion suivante: « Les tiges des Mousses aériennes, éclairées seulement par le haut, sont douées d’un pouvoir héliotropique positif de même sens que le pouvoir géotropique négatif. La résultante de ces deux forces, égale à leur somme, provoque sur les tiges nouvelles une croissance dirigée verticalement de bas en haut (p. 64). » Tout le monde sait aussi que la plupart des Mousses ont leurs feuilles étalées à l’état humide, tandis que par la sécheresse elles se crispent, se contournent en spirales très serrées autour de la tige; ces modifications sont si bien connues qu’elles fournissent même des caractères spécifiques. M. Bastit, lui aussi, s’est assuré de l'existence du phénomène, et non d’une manière banale, mais par des « expériences fondamentales » (p. 67) et il l’a suivi dans ses moindres détails; aussi s’est-il préoccupé de lui donner un nom, dans un para- graphe spécial intitulé : « choix d’une dénomination » (p. 71). Il s’est arrêté à celle de « sommeil hygromé- {rique » ; elle est harmonieuse et passera peut-être dans le langage courant, car elle serait commode pour indi- quer l’état dans lequel se trouve, par exemple, un copeau où un cheveu qui se tord sous l'influence des variations hygrométriques. Dans le but de connaitre l'influence du « sommeil hygrométrique » sur la respiration, M. Bastit a institué, suivant la méthode de MM. Bonnier et Mangin, des expériences sur le Polytrichum juniperinum et il a cons- taté que l’état de sommeil provoque une diminution dans l'intensité de la respiration (p. 96). L'auteur enseigne, comme résultat de ses mesures, que le rapport —- — 1— const.; mais il faut pour cela, si l’on suit les chiffres donnés dans les tableaux, admettre, entre autres choses, que (p. 90) : = — 14.001 —10,94— 10,85. —10,66 —10;62 —"1 — const. M. Bastit admet, il est vrai, que ces écarts peuvent s'expliquer par des différences d’âge. En lisant cette conclusion (p. 93) que « dans la respi- ration, à l'obscurité, des Mousses à l’état de veille » (ou de sommeil, p. 94), «le rapport du volume d’acide car- bonique dégagé au volume d'oxygène absorbé est cons- 680 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET JNDEX tant, quelle que soit la température », on pourrait croire que les expériences ont porté sur plusieurs espèces soumises à des écarts notables de température; mais les tableaux indiquent que toutes ont été faites sur l'unique Polytrichum juniperinum et seulement de 17° à 20°. Un écart de 3° a suffi, C’est un peu abuser de l'esprit de généralisation. Après lesexpériences de MM, Bonnier et Mangin, on de- vait prévoir que la fonction chlorophyllienne s'exerce chez le Polytrichum juniperivum comme chez les autres plantes vertes. C’est, en effet, ce que M. Bastit a constaté et ce qu'il énonce comme conclusion, après avoir donné beaucoup de chiffres, de formules, de tableaux : « Chez les Mousses à l’état de veille » (ou à l’état de sommeil, p. 409), « la fonction chlorophyllienne s'effectue norma- lement et rentre dans le cas général de l'assimilation chlorophyllienne » (p. 104). L'A0° Lang (A.) Professeur de zoologie et d'anatomie comparée à l'Université de Zwrich. — Traité d’'Anatomie compa- rée et de Zoologie, #raduit de l'allemand par G. Curtel. 1°7 fascicule. 4 vol, in-8° de 340 pages, avec 191 figures dans le texte (Prix 12 fr.) G. Carré, éditeur, 58. rue Saint-André-des-Arts, Paris, 1891. Les étudiants ne peuvent plus aujourd'hui, comme leurs aînés, se plaindre de la pénurie d'ouvrages di- dactiques à ieur usage pour les sciences naturelles. Depuis quelques années, traités d'anatomie comparée, de zoologie, d'embryogénie se succèdent sans inter- ruption etl’on en annonce toujours de nouveaux. Ne pourrait-on pas chercher une des causes de cette abondante production dans un défaut que chacun reconnait chez ses devanciers et se flatte en vain d’évi- ter : c’est que, écrits pour des débutants, tous ces trai- tés ne sont pourtant, dans leur souci d’être complets et au niveau de la science, guère accessibles qu'aux naturalistes déjà exercés. Le nouveau traité d'A. Lang, dont deux fascicules seulement ont paru dans l'édition allemande et dont le premier vient d’être excellemment traduit en francais par M. G. Curtel, n'échappe pas non plus entièrement à ce reproche. Les descriptions d'animaux ou d’organes y sont som- maires et, malgré leur précision, peuvent parfois laisser dans l'esprit place au vague et au doute quand les figures ne viennent pas les compléter. Le règne animal est divisé en neuf embranchements correspondant à peu près à ceux du traité classique de Claus, sauf que les Molluscoïdes (Bryozoaires et Bra- chiopodes) rentrent, à juste titre, parmi les Vers, et qu'en revanche les Platodes en sont séparés. Chaque embranchement est étudié à part; pour cha- cun une première parlie est consacrée à la classifica- lion, une deuxième à l'étude comparative de l’organi- sation et le tout se termine par un ou plusieurs cha- pitres annexes où sont exposées quelques-unes des questions générales auxquelles les types étudiés aï- dent le plus à répondre. C’est ainsi que la connais: sance des Protozoaires conduit à la définition de la cellule, et de là, en vertu de la division du travail physiologique, à l'étude des tissus des animaux supé- rieurs, que l’auteur range sous quatre chefs princi- paux: tissu épithélial, conjonctif, musculaire et nerveux. De même la conjugaison des Protozoaires est la pre- mière apparition de la sexualité, Les cellules n'étant pas encore différenciées, cette première ébauche de la fécondation se réduit à l'échange entre les conjoints de deux noyaux identiques auxquels on ne peul qu'arbitrairement donner les noms de mäle et de fe- melle : là encore, c’est la division du travail qui amène, chez les Métazoaires, le dimorphisme sexuel entre l'élément mâle, petit, mobile, débarrassé de tout excès de substance qui ne pourrait que nuire à sa pénétra- tion, et l'élément femelle, sédentaire et volumineux, puisqu'il doit emmagasiner la provision de substance nécessaire au développement ultérieur de l’embryon. L'auteur estainsi amené à étudier la cellule-œuf, la cel- lule-spermatozoïde et la fécondalion des Protozoaires. La première évolution de l'embryon et la formation de la gastrula trouvent, de même, leur place légitime dans le deuxième chapitre consacré aux Cœlentérés, qui ne sont qu'une gastrule permanente. L'importance et Ja généralité de cette forme amènent l’auteur à traiter de la fameuse loi biogénétique fondamentale (l’ontogénie est une courte récapitulation de la phylo- génie) qui a été si fortement altaquée dans ces derniers temps, ainsi que la distinction du développement em- bryonnaire en palingénétique, tel qu'il a été légué par ‘les ancêtres, et cænogénétique, où modifié par l’adap- tation personnelle, On voit par là que le traité du savant professeur de Zurich n’est pas un ouvrage d'anatomie descriptive, mais que la théorie y tient une large place. La partie systématique est relativement peu développée, — un court sommaire des caractères généraux de chaque division avec la simple énumération de quelques-uns des genres principaux—etpourtantla classification pro- posée par l’auteur montre des différences importantes avec celles admises jusqu’à présent, différences qui auraient eu besoin, au point de vue des débutants sur- tout, d’être soulignées. Auteur de très remarquables travaux sur les Plato- des, A. Lang, par un phénomène très naturel, est frappé de leurs profondes différences avec les autres types animaux : il se refuse à les laisser dans les Vers et crée pour eux un embranchement spécial, qu'il rap- proche plutôt des Cœlentérés par l'intermédiaire des Cténophores et de deux animaux encore très imparfai- tement connus, la Cæloplana et la Ctenoplana. N'est-l pas curieux de voir ainsi deux formes, telles que les Planaires et les Némertes, réunies, il n’y a pas quinze ans encore, dans le même ordre des Turbellariés, s'être séparées progressivement à chaque publication nouvelle au point d'appartenir maintenant à deux embranchements différents, sans que les recherches aient depuis ce temps montré entre elles de différences nouvelles bien fondamentales ? Parmi les Vers, il faut aussi signaler la classe nou- velle des Prosopygiens, proposée pour réunir aux Bryozoaires et aux Brachiopodes les Siponculacés; leur caractère commun est d’avoir l'anus dorsal et rappro- ché de la bouche.ll a fallu pour l’établir démembrer les anciens Géphyriens,etfairerentrerles Géphyriens armés, tels que la Bonellie et l'Echiure, parmi les Annélides Chétopodes. On peut se demander si ce nouveau groupement est vraiment plus naturel. La classification des Cnidaires est particulièrement intéressante : l’auteur y sépare complètement les Mé- duses craspédotes et acraspèdes. De même que les premières sont liées aux Hydraires, les Acraspèdes, qu'il désigne sous le nom de Scyphoméduses, doivent se rattacher aux Anthozoaires par la présence d’un æsophage ectodermique et de septums avec filaments gastriques, et ainsi se (rouvent constituées deux séries parallèles, les Hydrozoaires et les Seyphozoaires, mon- trant chacune deux formes principales, l’une fixée, le Polype, l’autre libre, la Méduse. On ne peut nier que cette conception soit un progrès réel de nature à porter la clarté dans le dédale des formes si multiples des an- ciens Acalèphes. A signaler aussi l'interprétation du Siphonophore, déjà proposée, du reste, par Hæckel, d’après laquelle le Siphonophore représente une Méduse dont le pneu- matophore est l'ombrelle, et la tige commune, le manu- brium sur lequel ont bourgeonné d'autres Méduses différenciées, d’après la loi de la division du travail, en individus nourriciers, locomoteurs et reproduc- teurs, Cette opinion tient le milieu entre les deux théories opposées qui font du Siphonophore, l’une une Méduse unique dont tous les appendices ne sont que les organes, et l’autre une colonie polymorphe dans laquelle chaque appendice représente un individu. Én somme, le traité de A. Lang est une œuvre pleine d’aperçus originaux et de théories intéressantes. C’est peut-être mème ce qui en rendra parfois la BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 681 lecture difficile aux débutants. Mais ils y trouveront, en revanche, un précieux secours dans Pabondance et le choix judicieux des gravures ; les 191 figures de ce premier fascicule sont ou des schémas originaux ou empruntées aux travaux les plus autorisés; toutes complètent, de facon heureuse, les indications som- maires du texte, qui est surtout consacré aux inter- prétations et aux comparaisons ; elles sont la véritable partie descriplive de l'ouvrage. L G. Pruvor. 4° Sciences médicales. Fournier (P'Alfred). — L'Hérédité syphilitique. — Lecons cliniques, recueillies et rédigées par le D' P. Por- talier, À vol. in-8° (7 fr.) G. Masson, 120, boulevard Saint-Germain. Paris, 1891. Dans un moment où la dépopulation de la France est un sujet de préoccupation publique, le livre du Pro- fesseur A. Fournier constitue une actualité d’un énorme intérêt, L'hérédo-syphilis est, en effet, un des facteurs les plus notoires de la mortalité infantile, qui, plus encore que le malthusisme, influe sur la diminution de la population. On sait combien, depuis les travaux modernes, le champ de la syphilis s’est étendu, combien d'états pathologiques, considérés jusque là comme indépen- dants, sont attribués maintenant à l'infection syphili- tique, surtout à la transmission héréditaire de cette infection. À côté des accidents spécifiques manifestes, qui ne sont contestés par personne, et dont l’évolution a lieu à échéance plus ou moins éloignée, il faut mettre à l'actif de la syphilis des états pathologiques que M. Fournier à proposé d'appeler pœrasyphilitiques : c’est la cachexie fœtale, qui tue les enfants dans l'utérus, ou à peine nés, ou plus tard, sans qu’il soit possible de trouver à leur mort d'autre raison que la tare des parents; ce sont les troubles dystrophiques généraux ou partiels, retards de développement, infantilisme ou arrêt d'évolution du cerveau, des testicules, des ovaires, elc.; ce sont les malformalions congénitales, pied-bot, bec de lièvre, hydrocéphalie; enfin, et sur- tout, ce sont les prédispositions morbides, les terrains favorables à la culture du bacille scrofulo-tubercu- leux, au développement des maladies du système ner- veux, ete. Cette terrible hérédité, dont le domaine s'étend ainsi singulièrement, a été méconnue ou mal interprètée dans son mode de provenance, parce que l’apprécia- tion des différents facteurs est toujours d’une difficulté extrême en matière d’hérédité humaine. L'hérédité combinée du père et de la mère est naturellement la plus fatale et la plus nocive ; l’hérédité exclusive de la mère l’est plus que celle du père isolément : ce sont là des faits encore récemment contestés, mais que les observations de l’auteur mettent hors de doute. Et cependant, que de conditions viennent modifier ces influences originelles! En dehors des conditions personnelles, qui font l'inégalité des individus devant la syphilis comme devant toute autre maladie, infec- tieuse ou diathésique, il y a des modifications régu- lières, c’est-à-dire dont on peut jusqu'à un certain point calculer l’action ; c’est ainsi que plus la conception aura eu lieu en un temps rapproché du début de la maladie chez les parents, plus la gravité des manifestations héré- do-syphilitiques sera grande. Mieux une syphilis aura été soignée, moins lourd à porter sera l'héritage, «Avec du mercure et du temps, tout médecin peut faire d’un sujet syphilitique, sauf exceptions rares, un mari et un père non dangereux. » C’est là une assurance dont il faut se pénétrer, et qui vient un peu éclairer le sombre tableau : car si la syphilis est une menace perpétuelle suspendue sur l'individu contaminé, son pire danger est l’hérédité, dont la probabilité de transmission est de 50 %. Et cette hérédité est terriblement meurtrière: « la vérole tue les jeunes, et les tue parfois par véri- tables hécatombes, » au point que la mortalité répétée des enfants, dans une famille, soit avant l’accouche- ment, soit après, doil entrainer souvent le diagnos- tic rétrospectif d’une syphilis plus ou moins mécon- nue. Devant un semblable danger, il faut d'autant moins rester les bras croisés, que nous avons une arme entre les mains et que le traitement antisyphilitique est l’ar- gument le plus irréfutable à opposer à l'accusation d'impuissance si souvent portée contre la médecine. Il faut donc traiter, mais il faut aussi prévenir : le syphilitique doit être éloigné du mariage (ant qu'un traitement prolongé ne l'aura pas mis non seulement hors d’état de transmettre la syphilis à sa femme, seule chose que comprennentles gens du monde, mais encore dans des conditions telles que la transmission à l’en- fant soit aussi peu probable que possible. Marié, il faut lui défendre la paternité et le traiter d’une facon in- tensive pour le cas où celte paternité se produirait. Bien plus délicate est la conduite à tenir vis-à-vis de la mère qui, femme indemne d’un homme syphilitique, court le risque de donner le jour à un enfant syphili- tique et d’être infectée par lui : ici encore, il faut traiter, mais non aveuglément, eten se guidant sur les circonstances de la grossesse, des grossesses anté- rieures, Le traitement antisyphilitique bien dirigé est innocent, quoi qu’on en ait dit, des avortements qu’on lui à attribués, et qui doivent être imputés à la syphilis elle-même. Ce qui n'est pas douteux, c’est le dan- ger que court l'enfant, et celui qu'il fait courir à sa mère. Puis tout n’est pas fini avec l’accouchement : l'enfant porteur de la tare paternelle est un danger pour sa nourrice, danger qu'il est du devoir du médecin de signaler aux intéressés. Enfin, l'enfant de parents syphilitiques, venu au monde sans lésions spécifiques apparentes, doit être tenu pour suspect, et dès que sa nutrition paraîtra en souffrance, il doit être soumis à un traitement appro- prié, longuement prolongé. On concoit combien sont délicates ces différentes interventions du médecin dans une famille dont les membres semblent jouir d’une parfaite santé, combien il faut être pénétré de l'importance de son mandat pour imposer des mesures souvent importunes et qui sem- blent purement vexatoires, combien enfin il faut de savoir-faire et de tact pour le faire sans heurter les conventions sociales, et sans troubler pour jamais les relations des époux entre eux. L'immense expérience du Professeur A. Fournier était seule capable de montrer la route à suivre dans ces circonstances difficiles : la finesse de ses observa- tions et la multiplicité des cas complexes auxquels il à eu affaire, lui ont permis de donner dans son livre des indications précises, appuyées par des exemples bien nets, qui mettent le médecin à même de ne pas faire fausse route et de diminuer dans une notable propor- tion le terrible impôt payé par la population au fléau syphilitique, Ainsi envisagées, les lecons cliniques sur l’hérédité syphilitique revètent une portée sociologique dont l’im- portance ne saurait échapper à personne. D', Ray. Duranp-FARDEL, Levillain (D°K.). — Hygiène des gens nerveux, précédée de notions générales et observations sur la structure, les fonctions et les maladies du système nerveux, in-12. 308 p. (3 fr. 50). Félix Alcan, 108, boulevard Saint-Germain. Paris, 1891. Le titre de ce livre indique suffisamment ce qu’il est; il contient un grand nombre de renseignements pra- tiques et d'explications théoriques très simplifiées qui seront utiles au pubiic auquel il s'adresse. Ça et là, quelques propositions bizarres,comme celle-ci : «l/hyp- notisme est une forme des maladies nerveuses »; et celle-ei : « Sous l'influence du travail intellectuel, on observe une augmentation de volume des membres », ; L. LAPIGQue. 682 ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER (La plupart des Académies et Sociétés savantes, dont la Revue analyse ordinairement les travaux, ne reprennent que ces jours-ci leurs Séances.) ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 28 septembre. 10 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — À propos de la com- munication récente de M. Bosscha sur le prototype international du mètre, M. Fœærster, président du Comité international des poids et mesures, fait la dé- claration suivante : Tout en renvoyant, pour la discus- sion scientifique de l'équation du mètre des Archives, par rapport au prototype international du mètre, à la publication détaillée des comparaisons exécutées en 1884 par la Commission mixte instituée en commun par la Section francaise et le Comité international des poids et mesures, le Comité international déclare que le prototype international du mètre en platine iridié, déposé au bureau international des poids et mesures, et sanctionné par la Conférence générale en 1889, est le seul représentant légal de l'unité fondamentale du système métrique, reconnu par tous les pays ayant adhéré à la Convention du Mètre. Le Comité admet qu'il n’est pas sans intérêt d'établir, aussi exactement que possible, les rapports entre d’autres étalons im- portants et la nouvelle unité ; mais lorsqu'il s’agit de comparer à cette unité, qui est un prototype à traits, un étalon à bouts comme celui des Archives, le degré d’exactitude auquel on peut parvenir ne permet pas d'établir sûrement des équations aussi faibles que celles qui figurent dans le mémoire de M. Bosscha. Le Comité conclut que, dans l'intérêt de l’invariabilité et de l’unité des poids et mesures, il n’est pas admissible de faire dépendre de corrections incertaines et inces- santes, la base du système métrique, maintenant définie matériellement par le prototype international. — M. Charlois : Observations de quatre nouvelles petites planètes, découvertes à l'Observatoire de Nice les 28 août, 1°*, 8 et 11 septembre 1891, — M. Maurice Lévy lit une notice sur les travaux de Pierre-Prosper Boileau, correspondant de la section de Mécanique, décédé à Versailles le 11 septembre 1891. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Perot a vérifié la loi de déviation des surfaces équipotentielles par un diélectrique en forme de prisme (réfraction électrique) au moyen du dispositif suivant: une grande plaque métallique À est disposée parallèlement à l’une des faces d'un prisme de résine ; une autre grande plaque métallique B au potentiel 0 est placée de l’autre côté du prisme et inclinée d’angles variables sur la pre- mière, jusqu'au moment où une petite plaque en com- munication avec un électroscope à feuilles d’or peut être déplacée parallèlement à B sans influencer l’élec- troscope ; à ce moment, la plaque B est parallèle aux surfaces équipotentielles du champ créé par À à travers le prisme, L'angle des plaques A et B réalisant cette condition a été trouvé unique et indépendant de la distance du milieu de B à l’arèête du prisme ; la mé- thode permet donc de déterminer la réfraction; les fang & _K, tang 5 UK, M. Aymonnet a éludié le pouvoir diathermane de l’eau, de l'alcool, de la benzine, du chloroforme et du sulfure de carbone : il à déterminé pour chacun de ces corps la courbe de variation de la transmissibilité avec l'épaisseur ; il a reconnu qu’on peut appliquer à celte variation les formules de conductibilité calorifique avec le même degré d’exactitude que pour celle-ci. Ayant remarqué que les spectres calorifiques de divers chiffres obtenus vérifient la relation corps présentent une série de maxima périodiques dont les longueurs d'onde sont les multiples d'un même nombre dépendant de la nature du corps, il compare les milieux diathermanes à des corps sonores, pouvant produire, sous le choc calorifique, plusieurs séries d’harmoniques ; de cette théorie, il tire une relation entre l'indice de réfraction, la densité, le poids moléculaire et le pouvoir diathermane ; l’expé- rience vérifie la loi. — M. G. Tissandier adresse une relation du cyclone de la Martinique du 18 août 1894, rédigée par un industriel de Saint-Pierre, M. L. Sully; cette relation est accompagnée de photographies et de la courbe barométrique tracée par un appareil Richard pendant la tempête. Mémoires présentés. — M. Laillet : Sur les causes qui ont déterminé le dernier cyclone de la Martinique. — M. Meunier adresse un complément à ses précé- dentes communications sur les moyens propres à assurer la sécurité des chemins de fer. —M.H.Hermite: Sur l'unité des forces en Géologie, — M. Ed. Bertele : Sur un système de soupape de sûreté, à siéges multi- ples, pour chaudières à vapeur. Séance du 5 octobre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Cosserat : Obser- vations de la comète Wolf (1884 e III) faites au grand télescope de l'Observatoire de Toulouse, — M. E. L. Trouvelot décrit un phénomène solaire qu'il a observé du 6 au 10 août 1891, et qu'il considère comme la chute d’une protubérance dans l'ouverture d’une tache. 20 KGIENCES PHYSIQUES. — M, L. dela Rive traite par le calcul la valeur de la tension électrostatique dans le diélectrique, en parlant de la seule hypothèse d’un fluide incompressible émanant d'un centre ou d’un nombre quelconque de centres, hypothèse mentionnée par Maxwell dans un de ses mémoires; il démontre que la valeur de la tension dans le diélectrique est celle que l’on obtient en caleulant la quantité de mouvement du fluide électrique supposé incompressible. 39 SCIENCES NATURELLES, — MM. À. Rodet et J. Cour- mont avaient montré précédemment l’action prédis- posante des cultures filtrées du Staphylocoque pyogène ; ils ont reconnu l'existence dans ses cultures d’une ma- tière soluble vaccinante, à côté de la substance prédis- posante qui masque les effets de la première ; on peut séparer ces deux substances par l'alcool, qui précipite la première et dissout la seconde; les lapins, qui ont recu en injection lPextrait alcoolique des cultures, suc- combent plus vite que les témoins aux inoculations virulentes du Staphylocoque; les lapins qui ont recu en injection la substance précipitée par l'alcool, redis- soute dans l’eau, résistent au même virus. — M. E.Canu décrit quelques Copépodes parasites nouveaux, qu'il a observés dans le Pas-de-Calais : Splanchnotrophus Wil- lemi, dans Eolis coronala; une Modiolicola, sp., dans Pecten opercularis ; il a observé aussi Sabelliphilus Sarsii (Claparède) sur les branchies de Sabella pavonina. — M. G. Lechartier a étudié les variations de composition des topinambours au point de vue des matières miné- rales, dans les conditions suivantes : quatre parcelles d’un sol naturellement riche en phosphates et pauvre en potasse ont été plantées en topinambours pendant cinq années consécutives et ont recu comme engrais : la première, rien ; la deuxième, du phosphate ; la troi- sième, du chlorure de potassium ; la quatrième, le mé- lange de ces deux engrais. Les récoltes en tubercules, feuilles et tiges ont été chaque année pesées et analy- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 683 sées, M. Lechartier examine la variation des principes minéraux dans les récoltes des différentes parcelles et suivant les conditions climatériques de chaque année. Mémoires présentés. — M. L. Mirinny adresse une nouvelle note sur l'heure universelle. Séance du 12 octobre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Cosserat : Sur les systèmes conjugués et sur la déformation des sur- faces. — M.G. Bigourdan : Observations de la comète périodique Tempel-Swift faites à l'Observatoire de Paris. — Mlle D. Klumpke : Observation de la comète Tempel-Swift faite à l'Observatoire de Paris. — M. Stroobant a fait des recherches expérimentales sur son équation personnelle au moyen de l’appareil à passages artificiels de M. Wolf. Les principaux ré- sultats tirés d’un grand nombre de séries sont les suivants : la méthode électrique et la méthode de l’æil et de l’oreille ont donné presque les mêmes valeurs; les observations dans les passages de gauche à droite ont été constamment en retard par rapport aux obser- vations dans l’autre sens; l'équation diffère sensible- ment pour le bord précédent et pour le bord suivant d’un astre, quel que soit le diamètre de lPastre., — M. Rateau propose une théorie générale des fwrbo- machines (turbines, ventilateurs centrifuges et à hélice, pompes centrifuges et à hélice). 20 SCIENCES PHYSIQUES. — En s'inspirant des idées émises par M. H. von Helmholtz dans sa théorie de l'énergie libre, M. H. Güilbault est arrivé à la formule suivante, pour la variation de la force électro-motrice dE des piles avec la pression : Free dv; E représente la force électro-motrice d’un élément; g est la quantité d'électricité qui se développe lorsqu'il se produit par suite de la réaction une variation de volume, p est la pression. Pour les piles exemptes de dégagement ga- zeux, on trouve que la formule donne, jusqu'à des pressions qui ne soient pas trop élevées, une fonc- tion linéaire; l’expérience vérifie ce résultat, Pour les piles à dégagement gazeux, la formule devient E, — E— ALp pour les pressions pas trop élevées; la variation pour 100 atmosphères, calculée d’après cette formule et mesurée directement sur huit espèces de piles, a donné des valeurs absolument concor- dantes. — M. D. Tommasi a imaginé de disposer l’oxyde de plomb des accumulateurs dans une série de tubes perforés avec une tige de plomb dans l'axe ; cette disposition présente plusieurs avantages sur les accu- mulateurs à plaques, notamment un allègement con- sidérable et la faculté d'employer au chargement les courants de grande intensité. — M. E., H. Amagat publie un nouveau réseau d’isothermes de l'acide car- bonique, beaucoup plus complet que celui qu'il avait établi en 1878. La méthode employée pour les déter- minations a été celle décrite dans la communication du 8 décembre 1890; la pression a été poussée jusqu'à 1000 atmosphères. Les courbes ont été établies de 0° à 100° de 10° en 10°, de plus, pour les températures 437, 198° et 258; de plus encore, pour les tempéra- tures 32° el 35° qui encadrent la température critique, et qui ont été étudiées en vue de permettre la déter- minalion indirecte du point critique. — M. G. Hinrichs montre comment on peut calculer à priori la chaleur spécifique des liquides au moyer des principes ex- posés par lui dans ses communications antérieures; il traite comme exemple les éthers des acides gras et les éthers chloracétiques. — M. L. Vignon continue ses recherches sur les anomalies que présente le point de fusion d’un mélange de deux composés orga- niques; avec tous les systèmes possibles résultant de la combinaison deux à deux d'amines, de phénols, de carbures d'hydrogène, d'acides et de bases, il a obtenu, comme dans ses recherches précédentes, toujours une différence entre le point de fusion calculé etle point de fusion observé; mais les fonctions chimiques des corps mis en présence l’un de l’autre ne semblent pas influer sur cette variation, — M, F. Osmond, reprenant les expériences de MM. Troost et Hautefeuille sur la chaleur de combinaison entre le silicium et le fer dé- terminée par voie indirecte, a trouvé que, au-dessous d'une certaine proportion de silicium, celui-ci est dissous par le fer avec absorption de chaleur; pour l’alliage d'aluminium, au contraire, le dégagement de chaleur diminue avec la proportion d'aluminium, mais reste toujours positif, — M. L. Pigeon a déterminé les chaleurs de formation du bromure platinique et de ses principales combinaisons. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Chauveau examine la théorie de l’antagonisme des champs visuels en s’ap- puyant sur ses expériences récentes, Après avoir éli- miné l'hypothèse que le phénomène se passerait à la périphérie, M. Chauveau montre qu'on ne peut s’ex- pliquer le phénomène que par une action inhibitrice exercée par un des centres visuels sur l’autre, les con- nexions étant supposées telles que partout les points identiques des rétines soient en communication l’un avec l’autre par l’intermédiaire des noyaux d’origine des nerfs optiques. On doit admettre pour ce pouvoir inhibiteur un rythme d’alternance assez lent, de facon à permettre, comme dans les expériences de l’auteur, la combinaison d'images égales vues stéréoscopique- ment dans un éclairage de courte durée, C’est de même par l’action inhibitoire qu'il faut expliquer les sensa- tions chromatiques excitées dans un œil par l'éclairage coloré de l’autre œil, Ainsi, les figures blanches, pen- dant l'illumination en rouge d’un œæil, au moyen de l'éclairage latéral, seraient vues verles par cet œil et rouge par l’autre, parce que l'effet inhibitoire de la fatisue s’exercerait sur le rouge dans l'œil éclairé et sur la couleur complémentaire du rouge dans lœæil opposé. M. Chauveau décrit ensuite le détail du dispositif expérimental qu'il a employé pour ses expé- riences, — M. A. Labbé a étudié les hématozoaires de la Grenouille ; il expose ses observations sur le Drepa- nidium, et sur des Hémamibes intraglobulaires ; il signale un Polimitus muni de trois ou quatre longs flagella, qui est sans doute une forme d’un Trypanosoma. — M. G. Lechartier (suite à sa communication du 5 oc- tobre) a examiné la composition minérale des divers organes végétatifs des topinambours arrachés en sep- tembre, et la compare à la composition au moment de la récolte normale, en décembre. Dans les parcelles n'ayant recu aucun engrais minéral ou bien un seul, il existait, à la base des tiges, des feuilles noires dessé- chées, et au-dessus d’elles des feuilles jaunissantes, celles du sommet étant seules entièrement vertes. De l'analyse de ces feuilles, il résulte que c’est le manque d'une substance minérale qui détermine leur dessica- tion, et que la substance qui leur a été retirée a servi à l'édification d’autres parties de la plante. Mémoires présentés. — M. J. Fenyi : Remarques sur l'interprétation de certains phénomènes observés dans les protubérances solaires. — M. Alf. Basin adresse un projet d’aéroplane-ballon dirigeable, — M. De- cohorne adresse la description d’un appareil auquel il donne le nom de Régleur solaire; c’est un système de cadran solaire dont les indications se lisent sur un cylindre orienté suivant l’axe du monde. — M, Léopold Hugo : Sur une formule relative au nombre +. L. Larrcoue. ACADEMIE DE MEDECINE Séance du 29 Septembre M. Semmola lit l'observation d’un malade chez lequel il a guéri par les courants continus une occlusion in- testinale d’origine nerveuse, avec paralysie vésicale, dé- veloppée à’ la suite d’une diarrhée violente et après une purgation répétée. Les ressources thérapeutiques usuelles ne donnèrent aucun résultat. Les courants continus (le pôle positif dans le rectum et le négatif sur le ventre) amenèrent la cessation de la polyurie, et 684 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES le malade reprit complètement, à la fin du troisième jour, ses fonctions intestinales normales. — M. Lan- cereaux présente au nom de M. Thiroloix, son interne, un chien rendu diabétique par l’ablation presque com- plète du pancréas, Pour M. Lancereaux les résultats obtenus peuvent se résumer ainsi : La destruction to- tale, sur place, du pancréas n'amène pas le diabète, tandis que la section, l’ablation de la glande normale ou fonctionnellement supprimée le produit toujours. Cette communication donne lieu à une discussion à laquelle prennent part MM. G. Sée, Lancereaux, Aug. Ollivier, Semmola et Lagneau. Séance du 6 octobre M. Béchamp termine sa communication sur le lait, Dans le cours de son discours l’auteur décrit l’expé- rience suivante : Un petit chat a été enterré entre deux couches de carbonate de chau£ pur, préparé exprès et créosoté, dans une vase de verre, Le tout, soigneuse- ment mis à l'abri des poussières de l'air, a été laissé en cet état pendant sept ans. Au bout de ce temps, il ne resta plus dans la région où avait été placé le chat, que quelques fragments d'os blanchis et une masse sèche blanche, laquelle, examinée au microscope, contenait une foule de microzymas; ceux-ci introduits dans l’em- pois créosoté le firent fermenter et finalement se trans- formèrent en vibrions. M. Béchamp termine sa commu- nication par trente-six conclusions dont voici quelques- unes : Le lait de vache, lait à caséine, s’aigrit et se caille spontanément; ceux d’âänesse et de femme, laits sans caséine, s’aigrissent sans se cailler. L'air n’est pour rien dans l’altération des différents laits. Les vibrions, le ferment lactique, les ferments végétaux ne sont, dans aucun cas, la cause de ces altérations. Les microzymas propres, inhérents, de chaque espèce de lait, en sont la cause unique. Les vibrions n apparais- sent qu'après l'altération accomplie. Les laits de vache et de chèvre, saturés d’éther, se conservent longtemps liquides; au bout de plusieurs mois ces laits finissent par se cailler sans aigrissement. Le lait de vache, exposé au large contact de l’air, s’aigrit et se caille avant toute apparition de vibrions ou d’autres ferments. Le lait de vache bouilli pendant deux minutes peut se cailler sans aigrir. Les microzymas n’ont pas pour origine les germes de l'air, mais celle de l’être même qui les contient. Bref, le miCroZY ma est au commence- ment et à la fin de toute organisation. Le microzyma peut devenir vibrion, bactérie, bacille, Le microzyma, atome de l’organisation, résiste à la mort. Les germes de l'air ne sont que les microzymas des êtres disparus et détruits dans le passé (microzymas géologiques) ou se détruisant sous + yeux, Dans le temps présent, avec les microzymas et les poussières, l'air charrie les spores, les conidies des plantes, etc. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 17 octobre. M. Dubief a fait fermenter une solution de glucose par le bacille d’'Eberth d'une part, et par le Bacillus Coli communis de l’autre; dans les deux cas, il a ob- tenu une fermentation de mème inteusité, donnant comme produits, dans l’un et l’autre cas, de l'acide ear- bonique, de lalcool, de l’acide butyrique et de l'acide lactique; la seule différence consiste en ce que le B. Coli communis a donné plus d'acide lactique. — M. Féré a constaté que les bromures doivent être ran- gés de la facon suivante par ordre de toxicité décrois- sante : bromures de potassium — de strontium -- d’ammonium — de sodium. Il a pu remplacer le bromure de potassium par le bromure de strontium dans toute ses applications, avec des effets iden- tiques. Il a examiné la question des aptitudes morbides créées par le régime bromuré, en instituant des expé- riences sur des cobayes ; il a reconnu que les cobayes recevant du bromure de potassium contractent plus facilement la tuberculose que les sujets normaux. — En commun avec M. Herbert, M. Féré a reconnu que le bromure de potassium s’accumule dans lor- ganisme; cette accumulation a lieu principalement dans le foie. — M, Sabouraud présente une obser- vation de tuberculose congénitale avancée sur un enfant ayant vécu dix jours, — M. Charrin à fait l'examen bactériologique d'un cas de granulie, diag- nostiqué pendant la vie et présentant à l’autopsie les lésions caractéristiques; il n’a pu trouver, par aucune méthode, un seul bacille de Koch; mais ila obtenu des cultures d’un petit bacille court, inoculable au cobaye. — M. Brown-Séquard € xpose les f laits récents observés dans toute l'Europe au sujet de l'emploi du liquide tes- liculaire. Plusieurs médecins, entre autres M. Wictorow, en Russie et M. Gibert (du Havre) ont obtenu des amé- liorations et même des guérisons de l’ataxie locomo- trice. M. Waterhouse (de Londres) a eu des améliora- tions notables dans des cas de myélite. De nombreuses tuberculoses ont été traitées par ces injections, no- tamment par M. Lemoine (de Lille); les avantages ont été la disparition de la fièvre et des sueurs nocturnes. En somme, les injections de liquide testiculaire sont indiquées dans toutes les affections où prédomine un affaiblissement morbide du bulbe et de la moelle. Les résultats négatifs publiés récemment en Allemagne par M. F ührbringer n'ont pas de valeur, les injections ayant été faites non avec le liquide provenant du broyage des testicules, mais avec du sperme, additionné d’ailleurs d’un grand excès d’antiseptiques. — M. Hénocque pré- sente un nouveau modèle de son hématoscope, modifié de facon à se prêter à l'examen microscopique. — MM. Gréhant et Jolyet ont étudié la production d’urée dans l'appareil électrique de la Torpille, par rapport à l’état d'activité de l'organe. On sait que cet appareil con- tient normalement des quantités énormes d’urée; mais si on sectionne les nerfs électriques d’un côté, de facon à paralyser Pappareil électrique de côté, on trouve, quelques heures après, dans cet appareil une quantité d’urée qui est seulement la moitié ou le tiers de la quan- tité contenue dans l’autre appareil resté actif. —M. Blan- chard rapporte un cas d’Irodes ricinus entièrement sous- cutané chez l’homme. Il pense que l'espèce Distoma ingens (Moniez), parasite intestinal de la Bonite, doit être iden- tifiée à l'espèce D. clavatum de Rudolphi. Ses re- cherches sur la sangsue, qui infecte tous les marais de l'Afrique septentrionale e et spécialement de l Algérie, lui permettent d'affirmer qu'il ne s’agit pas de l'Hæmopis sanquisuga, qui n’existerait pas dans la faune algé- rienne, mais de la Bdella (Limnatis) nilotica de Savigny. —MM. Massartet Bordet critiquent les expériences de MM. Charrin et Gley sur l’action vaso-motrice des pro- duits solubles du bacille pyocyanique. —M.Gley répond et montre que ces critiques ne sont pas fondées. — A propos de travaux parus récemment en Allemagne sur le diabète asphyxique, M. Dastre rappelle qu ‘il a étu- dié,ily a LE plusieurs années et d’une facon plus complète, l a question de la glycémie asphyxique ; il annonce de nouvelles recherches sur ce sujet. — MM. Mairet et Bose : Toxicité de l’urine des aliénés. — M. Nepveu : Corps flagellés inclus dans les cellules blanches chez les paludiques. L. LAPICQUE. SOCIÉTÉ DE PHYSIOLOGIE DE BERLIN Séance du 16 octobre 1891, M. Lüderitz a étudié dansle rétrécissement artificiel de l'aorte la pression sanguine prise dans le ventricule gauche et dans la carotide droite. L’aorte étant libre, le manomètre, mis en relation avec le ventricule, inscri- vait une courbe composée d'une ascension brusque, d'un plateau ondulé et d’une descente rapide; la courbe de la carotide avait également une montée brusque, puis descendait lentement en escalier jusqu’à la chute suivie d’une remontée constituant le dicrotisme, A la suite du rétrécissement de l'aorte, la pression sanguine dans la carotide tomba à la moitié ou au tiers de sa valeur primitive, chez le lapin comme chez le chien; dans le ventricule, elle doubla chez le lapin, tripla et CORRESPONDANCE 685 quadrupla chez le chien. La durée de la contraction ventriculaire augmenta en même temps que son éner- sie; elle s’accrut de 50 °/,. La forme de la courbe ma- nométrique changea également; le plateau de la courbe ventriculaire fit place à un cintre à sommet médian; la courbe de la carotide de son côté présenta une ascension inclinée, — M. T, du Bois-Reymond pré- sente des photographies du fond de l'œil qui laissent bien loin en arrière toutes les tentatives dans cette voie. — M, Wertheim, dans ses recherches sur la vision indirecte, à fait l'observation suivante : Si, dans une chambre noire éclairée par un bec de gaz, on fixe un point de la muraille, de manière que l’image d’un dis- que vivement éclairé tombe à la périphérie de la rétine, cette image disparaît lorsqu'on ferme le bec de gaz; le disque lumineux réapparaît au moindre mouvement de l'œil. De même, si l’on regarde indirectement le disque clair avec l’un des yeux et, avec l’autre, une large sur- face bien éclairée, l’image indirecte disparaît quand cette surface s'éteint, — M. Lilienfeld a étudié la na- ture chimique des globules sanguins, en les soumettant sous le microscope dans une chambre humide à l’action digestive d’une solution chlorhydrique de pepsine. Une partie des globules se dissout et il reste un résidu granuleux, insoluble dans l'alcool, l’éther et les acides, se dissolvant dans la potasse. Les réactions chimiques ont montré qu'il en est de même du résidu de la diges- tion des noyaux des leucocytes; or, ceux-ci sont cons- titués par de la nucléine: la partie dissoute est l’albu- mine; on doit donc considérer les globules sanguins comme une nucléo-albumine, où indubitablement l’albumine et la nucléine forment une combinaison chimique et non un mélange, Divers faits viennent à l'appui de cette thèse, comme le fait que les globules rouges ne sont pas des éléments primitifs du sang, mais bien des produits résiduaires d’autres formations, probablement des leucocytes. D' W. ScLAREK. ACADÉMIE DES SCIENCES DE SAINT-PÉTERSBOURG Séance du 23 septembre 1891, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M, Imchenetsky présente le travail de M. Bougaïeff, professeur à l'Université de Moscou, sur les Intégrales fractionnaires partielles des équations différentielles. Le sujet de ce travail est en connection étroite avec la question traitée déjà par M. Imchenetsky en 1887 (Voyez les Suppléments au t. LV des Mémoires de l’Académie de Saint-Péters- bourg) et se rapportant aux équations différientielles linéaires à coefhicients ralionnels. En comparant son travail à celui de M. Bougaieff, le savant académicien conclut ainsi qu'il suit : « L'avantage de la méthode proposée par M. Bougaïeff consiste en ce qu’elle est applicable à toute équation différentielle susceptible d’une solution fractionnaire rationnelle, tandis que les anciennes méthodes n'avaient pour objet que les équations linéaires. Cependant, malgré toute la sim- plicité théorique de cette nouvelle méthode, son appli- cation pratique est assez difficile à cause d’un grand nombre de transformations auxquelles il faut sou- mettre consécutivement l'équation différentielle pour obtenir l’intégral partiel sous forme d’une fraction ininterrompue. En outre la méthode ne contient pas de critérium qui permettrait de conclure d’ayance si -la solution est possible ou non dans chaque cas parti- culier donné; de sorte que l’on est exposé quelquefois de faire toutes les transformations en pure perte ». En somme la méthode de M. Bougaïeff n'exclut nullement celles proposées par M. Imchenetsky qui paraissent ètre plus pratiques et plus rapides.— M, Brédikhin com- munique une note de M. G. ©. Struwe, astronome à l'Observatoire de Pulkova, sur la Libration d'Hypérion. Les observations faites sur ce septième satellite de Saturne à l’aide d’un réfracteur de 30 pouces, durant les dernières cinq années, ont amené la découverte d’un phénomène remarquable en ce qui concerne son mouvement. L'on sait que les mouvements movens des deux satellites de Saturne, Titan et Hypérion présentent un certain rapport avec le mouvement des apsides du second de ces satellites, et notamment : ë n (Hyp.) —- 3 n (Tit.) = d x; les latitudes moyennes de ces satellites sont liées entre elles par l’équa- tion #4 1 (Hyp.) — 3 1 (Tit.) — x — 180° + Ja libration. Cette équation est analogue à celle que l’on rencontre dans la théorie des premiers trois satellites de Jupiter. Or, il se trouve que la libration, négligeable pour ces derniers, est très sensible dans les mouvements d'Hypérion, Elle serait, d’après M. Struwe, de 36° et sa période égalerait 640 jours. Les observations anté- rieures de Lassel et du professeur Hall (de Washington) concordent parfaitement avec ce résultat, La libration dépendant principalement de la masse du plus grand satellite, Titan, détermine de grandes variations périodiques dans les longitudes moyennes d'Hypé- rion ; il ressort des observations, que ces variations peuvent atteindre 9 degrés, c’est-à-dire plus de la moitié du mouvement exécuté pendant les 24 heures 2° SCIENCES NATURELLES. — M. Famintsin lit une note sur une nouvelle bactérie : Nevskia ramosa. Cette bactérie constitue des colonies de formes variées, munies d’un pedoncule ramifié. A l'extrémité des ramifications aplaties du pédoncule on observe les cellules en forme de bätonnets de la bactérie, une par pédoncule dispo- sées parallèlement au bord externe de ce dernier. Le pedoncule est le produit d’une secrétion mucilagineuse des cellules; le mucus s’'accumulant sur l’un des bords de la cellule en quantité plus considérable que sur les autres, se transforme en un pédoncule de la cellule Après avoir atteint sa {aille normale, chaque cellule de la bactérie se divise transversalement en deux cellules; en même temps à l'extrémité de l’ancien pédoncule en apparaissent deux nouveaux. C’est ainsi que s'opère l'accroissement de colonie et la ramification du pédoncule. Les cellules de la bactérie contiennent des gouttelettes d’une huile volatile. L’enveloppe de la cellule se voit surtout nettement après que la cellule s’est complètement dégagée du mucus qui l’englobait Les caractères mentionnés plus haut suffisent ‘d’après notre éminent confrère, pour justifier la création d'un genre nouveau de bactérie, auquel il donne le nom de Nevskia. O. BackLunp membre de l'Académie. CORRESPONDANCE SUR LES LABORATOIRES DE MÉCANIQUE Les commentaires consacrés, dans la presse, aux ré- cents articles de la Revue sur les laboratoires de méca- nique ! ont surtout visé, comme ces articles eux-mêmes, 1 Voyez les articles signés : V. Dwelshauvers-Dery, Un Mé- canicien, E. de Blliy, R. H. Thurston dans la Rewwe des 15 juin, 30 juillet et 15 octobre 1891. la nécessité d'appliquer l'expérience à l'étude des machines en marche. Sur une autre face de la question, — l'utilité des laboratoires au point de vue de l'enseignement, — nous avons désiré avoir, outre l'avis des professeurs déjà exprimé ici, le sentiment des praticiens : nous nous sommes adressé dans ce but à l'un des plus grands indus- 686 CORRESPONDANCE triels de l'Angleterre, M. B. Donkin, dont la compé- tence en matière de Mécanique appliquée et de Métallurgie est connue dans le monde entier. Voici la réponse de l'il- lustre ingénieur : Lettre de M, Donkin Cher Monsieur, C'est avec grand plaisir que je réponds à votre demande et vous envoie mes idées, en tant qu'ingé- nieur, sur l'utilité de laboratoires de mécanique bien outillés non seulement dans les écoles et collèges techniques, mais aussi dans les universités. Il y à grand avantage, à mon avis, à créer une bonne éducation moderne, spécialement pour les jeunes gens qui se destinent aux différentes branches de l’art de l'ingénieur, électricité, chemins de fer, constructions navales, etc. Pourquoi, demanderons-nous, enyoie-{-on un jeune homme dans une école ou un collège d'ingénieurs? N'est-ce pas principalement pour le préparer à sa future vie pratique? Pour cela, il devra acquérir une connais- sance des machines que ne peut lui donner l'étude exclusive sur le papier et dans les livres. Pour qu’il fasse le meilleur usage de son temps, il faut que les systèmes et méthodes d'enseignement l'intéressent autant que possible à son ouvrage. Ce résultat sera obtenu, je crois, en complétant les cours par l'étude de bons modèles, Un jeune homme tra- vaillera toujours mieux ce qu'il travaille avec plaisir. S’il est attiré et intéressé, il fera un bien meilleur usage de son temps, avec beaucoup plus de profit, et cela, sans pression extérieure, Il apprendra parce que cela lui fera plaisir et non parce qu'il y sera forcé. Le travail manuel avec des outils, des tours, etc., est géné- ralement un plaisir pour les jeunes gens. Un collège, pour être aussi attrayant et aussi utile que possible, doit posséder une bonne collection de modèles susceptibles d’être démontés ou mis en mou- vement. Il faut qu'il y ait aussi une machine à essayer le bois, le fer, l'acier, les fils de fer, les cordes, etc..., aussi bien que des tours, des raboteuses et d’autres machines à travailler les métaux; une machine à vapeur est aussi très utile pour permettre aux jeunes gens de faire des expériences sous la direction du professeur; il en est de même pour un petit moteur à gaz et une presse hydraulique. Quelque capable que puisse être un professeur, un laboratoire bien monté lui sera toujours une aide inap- préciable pour ses cours, qui devraient, à mon avis, être faits dans Le laboratoire même. Tout serait disposé ainsi pour familiariser l'élève avec les différentes appli- cations mécaniques. Quand j'étais au collège de l’Université à Londres, ou à l'Ecole Centrale de Paris, nous n'avions aucune machine à notre disposition, aucun modèle à démonter et nous nous bornions à apprendre dans les livres. Le ré- sultat était qu'à notre sortie nous avions à faire, de toutes pièces, notre éducation pratique, nous n'avions aucune connaissance réelle des propriétés de la fonte, du fer ou de l’acier, Les deux branches de ces études devraient, à mon avis, marcher de front pendant un certain temps, pour le plus grand avantage des élèves aussi bien que de leurs maîtres. Les jeunes gens qui, après avoir terminé leurs études, doivent entrer dans un atelier de mécanique seront ainsi capables de faire beaucoup plus de choses dans le même temps. Ceux-là même qui n’entreront pas dans un atelier se ressentiront néanmoins des avantages de l'éducation pratique qu’ils auront reçue au collège. Nos professeurs d'Angleterre ont souvent noté que des jeunes gens qui, avant d’entrer au collège, avaient passé quelques mois dans un atelier, suivaient les cours avec beaucoup plus d'intérêt et de profit que ceux qui n'avaient pas subi le même entrainement. Le nombre des collèges qui possèdent, dans leurs laboratoires d'ingénieurs, des machines à vapeur et de bons appareils, a considérablement augmenté en An- gleterre, dans ces dernières années. Il y en à environ 15; et j'espère bien que d'ici 10 ou 15 ans, il y en aura plus de cent, tellement ceux qui existent sont appré- ciés par les élèves et les professeurs. Que diriez-vous d’une méthode d'enseignement de la. chimie qui ne comporterait pas de laboratoire ? Ou d’un enseignement de la médecine sans la pratique de l’hô- pital? Les jeunes ingénieurs doivent apprendre à cou- per des métaux comme les étudiants en médecine ap- prennent à couper des muscles et des os. Comparons entre eux deux collèges : l’un de l’ancien modèle, ne comportant ni moteurs, ni machines; le second, fourni au contraire de machines et d'appareils mécaniques. Supposons que les professeurs et le mode d'éducation soient identiques dans les deux cas. Peut- il y avoir un doute sur le choix que fera un père qui veut envoyer son fils au collège après avoir examiné les deux maisons, et sur le choix que fera le fils si on lui demande ses préférences ? Après avoir écrit ceci, j'ai interrogé mon fils qui vient de quitter le collège de l’Université de Londres, et lui ai demandé de me donner l'avis d’un jeune homme de vingt ans sur ces questions. Il me répondit que les jeunes gens aiment beaucoup tous les modèles et ma- chines-outils, que les lecons sont rendues ainsi plus intéressantes et plus attrayantes. IL ajouta que si les lecons du professeur étaient faites sur de simples cro- quis, les étudiants n’écouteraient pas avec la même attention que devant un modèle d'étude. Un dessin immobile ne suffit pas dans la plupart des cas pour donner une idée des mécanismes el permettre d’en suivre la description avec intérêt. Agréez, etc. B. Doxkix, La crainte d'insister outre mesure sur une question maintenant bien connue de nos lecteurs, nous prive du plaisir d'insérer diverses lettres que nous avons reeues sur ce même sujet. Nous nous bornerons à publier la plus courte, adressée à M. le professeur V. Dwelshauvers- Dery par M. Ch. de Comberousse, professeur à l’École Centrale des Arts et Manufactures, lettre qui emprunte à la situation et à la haute notorieté de son auteur un intérêt tout particulier : Lettre de M. Ch. de Comberousse Mon cher ami, Je tiens à vous dire que je partage complèlement vos opinions au point de vue de l’utilité des laboratoires d'essai annexés aux écoles techniques supérieures. Je voudrais qu’on püt y étudier de près, non seule- ment le fonctionnement des machines à vapeur, mais celui des pompes et autres machines hydrauliques. Je voudrais aussi que toutes les recherches relatives à la résistance des matériaux y fussent poursuivies sous les différentes formes nécessaires : traction, compression, flexion, glissement, torsion, etc. Ces recherches devien- nent tous les jours plus importantes en raison mème des progrès métallurgiques et des nouveaux produits qui en résultent. Il y à trois obstacles à vaincre : l'inertie habituelle opposée à toute création, le petit nombre actuel de sujets capables d'organiser convenablement de pareils laboratoires, largent à trouver. ; Je souhaite qu'on puisse bientôt les surmonter en France. Je crois que vous êtes en avance sur nous en Belgique. Votre tout dévoué, CH. DE COMBEROUSSE. CHRONIQUE 687 CHRONIQUE LA PHYSIQUE AU RÉCENT CONGRÉS DE L'ASSOCIATION BRITANNIQUE A CARDIFF Le congrès que l’Association britarnique a tenu cette année à Cardiff avait attiré moins de monde que les années précédentes. Les décisions relatives aux étalons de mesures électriques ont néanmoins donné à cette session un grand intérêt. La section de Mathématiques, Astronomie etPhysique était présidée par M. Oliver Lodge, Le discours d’ou- verture que ce savant a prononcé à fait sensation. M. Lodge a préconisé la création d'un Laboratoire national où une direction commune, jointe à des ressources que ne sauraient avoir des laboratoires particuliers, permettrait aux chercheurs de donner à la Physique la précision de l’Astronomie. Cette extrème précision — que permet seule d'atteindre une installation telle que celle d'un Observatoire — est de la plus haute importance, bien moins pour son utilité pratique ou pour la satisfation qu’elle peut procurer à un esprit qui aime l’exactitude, que parce qu'elle est souvent la condition indispensable de nou- elles et brillantes découvertes. A quoi tient la magni- fique découverte de l’aberration de la lumière, sinon à ce que Bradley reconnut une anomalie portant sur la cinquième décimale ? Le danger d’une pareille insti- tution serait peut-être, il est vrai, de créer une science officielle et d'enlever aux chercheurs l'indépendance et l'initiative hardie qui sont la condition du progrès scientifique. Cette hardiesse de pensée, M. Lodge en donne une preuve nouvelle en recommandant aux physiciens de se livrer à l’étude de ces phénomènes dits de «transmission de la pensée » qui nous paraissent aujourd'hui si mystérieux ef qui cesseront de l'être le jour où des expériences sérieuses et systématiques en auront établi les lois. Il y aurait bien quelques réserves à faire sur les digressions métaphysiques de l’auteur des Idées modernes en Electricité et sur sa doctrine de l'Intelligibilité ultime de l'Univers. Dans tous les cas, on ne peut qu'applaudir à sa conclusion, lorsqu'il déclare qu'un coup d'œil d'ensemble jeté de temps à autre sur la constitution du Monde est indispensable au savant: sans quoi son attention, sans cesse con- centrée sur les moindres faits et leurs moindres détails, finirait par lui rendre l’étude monotone, malsaine et intolérable. L'Association britannique demande en général à l'un de ses membres de faire un rapport exposant état de la science sur un sujet déterminé et à l’ordre du jour. Le rapport qui paraïlra cette année est l’œuvre de MM. Bryon et Larmor ; il résumera l’état de nos connaissances en thermodynamique, en particulier sur le second principe, qui a donné lieu à tant de discussions. Parmi les communications faites à l’Association, nous signalerons seulement quelques-unes de celles qui se rapportent à la Physique, Optique. — Lord Rayleigh a exposé le résultat d’expé- riences qu'il a faites sur la réflexion de la lumière sous l'angle de polarisation à la surface des liquides limpides. Jamin avait montré que dans le voisinage de l'incidence de polarisation, il y a réflexion elliptique: Lord Rayleigh trouve une ellipticité de l’ordre du mil- lième de celle qu'avait indiquée Jamin. Il attribue les résultats de ce savant à des impuretés résidant à la sur- face du liquide. C’est là un point qui méritera confir- mation. Electrochimie. — M. Swinburne a présenté une étude très soignée sur l'élément Latimer Clark. Il recom- mande l'emploi de l'élément en forme d’H tel que la construit Lord Rayleigh. Une de ses remarques les plus intéressantes, au point de vue pratique, est rela- tive à la facon dont le coefficient de variation avec la température diffère d’un élément à l’autre : il varie du simple au double pour des éléments qui paraissent identiques, Avec cette cause d'erreur, il est difficile de répondre de la valeur de la force électromotrice du Latimer Clark à moins d’un millième : aussi, comme on le verra plus loin, la Commission a-t-elle toléré un écart de 1/400€ dans la construction des étalons de force électromotrice, — Quant aux méthodes indiquées par M. Swinburne pour l’élude des résistances liquides, je ne vois pas en quoi elles diffèrent, au fond, de la méthode fondée sur l'emploi des électrodes impolari- sables, telle que l’applique M. Bouty. Etude des ondes électromagnétiques. — Diverses com- munications ont trait à ce sujet: signalons, entre autres, le travail de M, Jones, qui a intercalé des couples thermo-électriques sur les fils mêmes qui gui- dent la décharge. Quand la soudure du couple est à un nœud, on ne devrait avoir aucun courant : on obtient seulement en fait un minimum d'action. Téléphonie. — M. Preece a traité du téléphone établi entre Paris et Londres, La ligne, établie il y a quel- ques mois, a donné d'excellents résultats, Sa résistance totale est de 692 ohms, sa capacité de 10,62 microfa- rads ; le produit CR, qui est, on le sait, le principal élément qui détermine le degré de netteté de la pa- role !, est égal à 7350; on doit donc entendre très bien, La transmission est même meilleure qu’on ne serait tenté de le croire, si l’on s’en tenait à cette seule considération, M. Vaschy avait prévu et indiqué d'avance ce résultat, M. Preece cherche à le justifier par des considérations qui ne sauraient trouver place ici. Une autre communication sur la téléphonie a été faite par M.R. Bennett. Elle est relative à la téléphonie dans les grandes villes. La téléphonie ne prendra une plus grande extension que lorsqu'on aura abaissé le prix des abonnements. M. Bennett estime qu’on arrivera, à Lon- dres, à réduire ce prix à 200 francs. Une simplification importante, ayant pour conséquence la diminution des frais d'installation des postes, serait réalisée par l’em- ploi du système « Mann », déjà appliqué en Ecosse et à Manchester, au lieu du système ordinaire pour l'appel et la mise en communication des abonnés. Voici la forme simple que M. Bennett propose de donner au sys- tème « Mann ». Le téléphone de labonné étant nor- malement en communication avec le double fil de ligne, il suffit d’abaisser une clef pour relier le téléphone à la terre par un bout, l’autre bout étant relié alors au double fil de ligne. Dans le voisinage du poste télépho- nique est disposé un fil isolé qui court parallèlement au double fil de l'abonné; ce fil est limité à une extré- mité, et relié par l’autre à la terre à travers le téléphone de l'employé. Quand l’abonné baisse sa clef, le double fil de ligne constitue l’une des armatures d’un con- densateur dont l’autre armature est le fil isolé unique du poste. Tout se passe comme si les deux téléphones de l’abonné et de l'employé étaient intercalés sur un circuit à fil unique, relié aux deux bouts à la terre, et sur lequel serait embroché un condensateur. On n'est pas dans les meilleures conditions pour la transmission de la parole; mais c’est bien suffisant pour que l’abonné indique à l'employé son numéro et celui de la per- sonne avec laquelle il veut correspondre. Tout le tra- vail de l'employé consiste à insérer deux fiches reliées par un double conducteur aux jack-knives des deux 1. M. Preece a remarqué que, quand le produit CR (ohms- microfarads) dépasse 15000, da transmission est impossible ; quand il est voisin de 10000, la transmission est possible, elle ne devient très bonne que pour CR voisin de 5000 ; enfin, si CR est inférieur à 2500, elle est parfaite. CR représente le nombre de millionièmes de seconde que met le courant induit à atteindre sa valeur maxima. 688 abonnés. L’abonné relève alors sa clef et l'employé ne peut alors en aucune facon surprendre sa conversation avec l’autre abonné. Ceci, on le voit, supprime sonne- ries et annonciateurs et dispense l'employé de se met- tre d’abord en communicationavecl’abonné qu’il appelle, avant d'établir la communication définitive. Le poste de distribution est énormément simplifié; et quant au fil supplémeutaire qui est nécessaire, ce seul fil peut suffire pour 60 à 100 circuits de double fil, reliant au poste autant d'abonnés. Le coup sec de la clef d’un abonné mettant son téléphone à la terre suffit pour éveiller l'attention de l'employé; l'inconvénient de ce système est que les 60 ou 100 abonnés correspondant au mème fil du poste peuvent parler à la fois à l'employé : comme ce qu'ils ont à dire se réduit à peu de chose, M. Bennett déclare qu'avec un peu d'habitude, l'employé arrive aisément à les contenter fous en peu de temps. Unités électriques. — Dans les travaux de l’Association la question capitale a été celle des unités électriques. Une Commission nommée par le Conseil du Commerce (Board of Trade) était chargée de présenter un rapport qui a été soumis à la discussion de deux sections réunies. Ce rapport fixe les noms et les définitions des étalons de mesures électriques proposés pour être officielle- ment adoptés par le Board of Trade. La Commission émet les vœux suivants : 4. Que de nouvelles dénominations des étalons de mesures électriques, approuvées en Conseil par Sa Majesté, définissent les étalons du Board D Trade. 2. Que la grandeur de ces étalons soit déterminée dans le système électromagnétique de mesures rapporté au centi- mètre comme unité de longueur, au gramme comme unité de masse et à la seconde comme unité de temps, — en enten- dant par les termes : centimètre et gramme les étalons déposés au Board of Trade et ainsi nommés. 3. Que l’étalon de résistance électrique s’appelle l’ohm et ait pour valeur 1.000.000.000, en prenant pour unités le centi- mètre et la seconde. 4. Que la résistance opposée au passage d’un courant constant par une colonne de mercure ayant 4 mm. carré de section droite et une longueur de 106cm,3 à la température de la glace fondante, soit adoptée comme valant un ohm, 5. Que la valeur de l’étalon de résistance construit par un Comité de l'Association brilannique pour l’avancement des sciences en 1863 et 186% et connu sous le nom d’unité de l'Association britannique soit prise comme représentant 0 ohm,9866. 6. Qu'un étalon matériel, construit en métal solide et vérifié par comparaison avec l’unité de l'Association britan- nique, soit adopté comme ohm étalon. 1. Que, pour pouvoir remplacer cet étalon, s’il venait à être perdu, détruit ou endommagé, et pour l’usage courant, un nombre limité de copies en soient faites, qui seraient périodiquement comparées à l’ohm-étalon et à l'unité de l'Association brilannique. 8. Que des résistances construites en métal solide soient adoptées comme étalons du Board of Trade pour les multi- ples et les sous-multiples de l’ohm. 9. Que l’étalon de courant électrique s'appelle Pampère et ait pour valeur 0,1 (un dixième) en prenant pour unités le centimètre, le gramme et la seconde. 10. Qu'un courant constant qui, en passant dans une solution de nitrate d'argent dans l’eau, dans les conditions que spécifie la note jointe à ce rapport ! dépose de l'argent à raison de 0e8r,001118 par seconde, soit considéré comme un courant d’un ampère. 11. Qu'un courant alternatif d’un ampère signifie un cou- rant tel que la racine carrée du carré moyen de son inten- sité, évaluée en ampères, soit 1. 12. Que des instruments construits sur le principe de la balance, dans lesquels la disposition particulière des conduc- teurs donne lieu à des forces attractives ou répulsives qui 1. On recommande d'employer, pour la mesure des courants de l’ordre de 1 ampère, une solution de 15 gr. de AgAzOSpour 85 gr. d’eau. La capsule de platine servant de cathode et recevant le dépôt a un diamètre de 10 cm. et une profondeur de 4 à 5 ; l'anode est une plaque d’argent pur de 30 cm. carrés et d’une épaisseur de 2 à 3 mm. CHRONIQUE ne dépendent que de la grandeur du courant qui passe, forces contrebalancées par des poids connus, soient adoptés comme étalons du Board of Trade pour la mesure des courants, soit constants, soit alternatifs. £ 13. Que l’étalon de pression électrique s'appelle le volt ét soit-la pression qui, appliquée à un conducteur d'un ohm de résistance, y produit un courant d’un ampére. 14. Que la pression électrique à la température 620F, (169,67C.) aux pôles ou électrodes d’une pile voltaïque connue sous le nom d’élément Clark, soit regardée comme ne diffé- rant de 1volt,#33 que d’une fraction qui sera déterminée par un Comité nommé pour étudier la question et qui préparera une note pour la construction et l’usage de cet élément. J 15. Qu'une pression alternative d’un volt désigne une pression telle que la racine carrée de son carré moyen, exprimée en volts, soit égale à l’unité. 16. Que des instruments construits sur le principe de l'électromètre à quadrants de Sir W. Thomson, employé idiostatiquement, et par les hautes pressions des instruments fondés sur le principe de la balance où les forces électrosta- tiques soient contrebalancées par un‘poids connu, soient adoptés comme étalons du Board of Trade pour la mesure de la pression constante ou alternative. On se réserve de fixer les modèles d'appareils qui seront employés pour les diverses mesures. On tolérera dans les 1 étalons un défaut d’exactitude de 70 pour 100 (c’est-à-dire ) dans l’étalon de résistance, de — pour 100 dans 10000 10 l’étalon de courant, et de 1/4 pour 100 dans l’étalon de pres- sion électrique. On remarquera que, contrairement à ce qui a eu lieu pour le mètre, qui, destiné dans le principe à repré- senter la dix-millionième partie du quart du méridien, n’en est pas moins défini aujourd’hui par la longueur du mètre-étalon des Archives, l’ohm est défini comme valant un milliard d'unités électromagnétiques G.G.S.; et l’on admet ensuite que la colonne de mercure de 106 em. 3 réalise suffisamment cette unité théorique- ment définie. On a franchement adopté la valeur 106,3 pour la longueur de la colonne de mercure d’un ohm. On ne s’est plus arrêté aux susceplibilités qui avaient empê- ché les électriciens d'adopter ce nombre, moyenne des mesures récentes, au lieu de garder le nombre 106 qui tenait trop de compte des premières mesures, très remarquables, il est vrai, mais notablement moins précises que les suivantes. Les étalons de résistance devront être non en mer- cure, mais en métal solide. Remarquons enfin les noms donnés aux grandeurs électriques. On ne parlera plus d'intensité de courant, mais seulement de courant: c’est une simplification de langage qu'avaient déjà adoptée nombre de savants. On substitue au nom de force électromotrice celui de pression électrique : on a voulu une désignation courte pour les applications : peut-être l’adoption du mot pression, déjà employé dans une acception tout autre, n'est-elle pas très heureuse. On ne peut songer à résumer la discussion générale sur les unités électriques. Disons seulement qu’on a proposé pour l’unité pratique de selfinduction, égale à 10° centimètres, les noms de quadrant, de secohm et de henry. C’est le mot henry qu'emploie M, Preece dans ses travaux de téléphonie. Quelques savants, frappés de certains inconvénients du système C.G.S., proposaient d'en changer et indi- quaient d’autres systèmes d'unités. Mais l’Association n’a pas paru disposée à recommencer tous les dix ans le travail du Congrès des Electriciens. Elle a sanctionné les conclusions du rapport du Board of Trade : c’est la consécration officielle et légale d'une grande œuvre scientifique, à laquelle l'Association britannique a con- tribué pour sa large part, Beraard BRUNHES, Agrégé des Sciences physiques. Le Directeur- Gérant : Louis Over Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 11. 2e ANNÉE N°°21 15 NOVEMBRE 1891 REVUE GÉNÉRALE ES SCIENCE PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LA CHRONOPHOTOGRAPHIE NOUVELLE MÉTHODE POUR ANALYSER LE MOUVEMENT DANS LES SCIENCES PHYSIQUES ET NATURELLES Les sciences progressent en raison de la préci- sion de leurs méthodes et de leurs instruments de mesure. La balance, le thermomètre, le mano- mètre ont donné à la chimie et à la physique la précision que nous admirons aujourd'hui. Ces divers instruments expriment la valeur statique des forces qu'ils doivent mesurer : la balance indique le poids actuel d’un corps en lui faisant équilibre avec des poids connus; le manomètre équilibre pareillement la pression d’un gaz par celle d’une colonne de mercure. Mais, sous leur forme primitive, ces instruments seraient incapabies d'exprimer les variations qui surviennent à chaque instant dans le poids d’un liquide qui s’'évapore, ni dans la pression d'un gaz dont on change latempérature. Aussi, pour mesurer les variations qui surviennent dans l'intensité des forces physiques, a-t-il fallu créer de nouveaux ins- truments que l’on nomme ##nscripleurs où enregis- treurs, et grâce auxquels on obtient, sous forme de courbes plus ou moins sinueuses, l'expression des changements de poids, de pression, de tempé- rature, de tension électrique, etc. C’est avec ces instruments que les météorologistes suivent, en chaque point du globe, les variations de l’état de l'atmosphère, que ies physiologistes inscrivent les changements les plus délicats de la pression du . ! Conférences faites par M. Marey au Collège de France en juillet 1894. REVUE GÉNÉRALE, 1891. sang, de la force des muscles, de la température des organes. Or, tous les corps de la Nature présentent des caractères extérieurs sur lesquels notre vue nous ren- seigne, à la condition que ces caractères ne varient pas de manière à rendre l’observation impossible. La forme des corps, leurs dimensions, leur position dans l’espace peuvent être exactement appréciées à l’état statique; nous savons même, depuis un temps immémorial, représenter par le dessin ces caractères extérieurs. Mais cette laborieuse repré- sentalion- des objets est souvent insuffisante, car elle ne peut montrer qu’à l'état de repos, des corps qui changent de forme ou qui se déplacent cons- tamment. La photographie est venue porter à la perfection la représentation des objets immobiles; elle nous en donne les images avec les détails les plus déli- cats; elle sait en réduire ou en agrandir la dimen- sion, à une échelle connue et avec une précision que nulle autre méthode ne saurait atteindre. La photographie est donc, pour certaines sciences, l’auxiliaire le plus puissant: les sciences naturelles, par exemple, nesauraient plus se passer de son con- cours ; aussi notre savant confrère M. Janssen a-t-il caractérisé d’une manière fort heureuse les pro- priétés de la plaque photographique en l’appelant la rétine du savant. Eh bien, cette rétine merveilleuse qui perçoit en un court instant l'aspect des corps à l’état statique 21 690 E.-J, MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE ou d’immobilité, et qui fixe ces caractères d’une facon immuable, peut-elle saisir et fixer aussi les caractères du mouvement? Les appareils photo- graphiques peuvent-ils se rattacher de quelque façon à la série des appareils inscripteurs qui tra- duisent les phénomènes de la Nature où les forces sont toujours en action, la matière toujours en mouvement? On peut aujourd'hui répondre à cette question par l’affirmalive, et nous espérons montrer que la photographie, appliquée de certaine manière, ren- seigne de la façon la plus exacte sur des mouve- ments que notre œil ne saurait saisir parce qu'ils sont trop lents, trop rapides ou trop compliqués. Cette méthode que nous allons décrire, c’est la Chronophotographie *. Si l’on considère la propriété physiologique de l’œil humain, on voit que cet organe représente, au point de vue dioptrique, un appareil photogra- phique avec son objectif et sa chambre noire; les paupières en forment l'oblturateur, tandis que la réline, sur laquelle viennent se former les images réelles des objets extérieurs, serait la plaque sen- sible. Or cette rétine jouit à un certain degré des pro- priétés de la plaque photographique : Boll a dé- montré qu'il se forme à sa surface des images qu'on voit persister quelques instants sur la rétine d’un animal récemment sacrifié, de sorte que la vision serait la perception que nous aurions d’images photographiées dans notre œil. Loin d’être per- manentes, comme celles des appareils photogra- phiques, les images rétiniennes sont fugitives; elles persistent toutefois quelques instants, prolon- geant ainsi la durée apparente du phénomène qui leur a donné naissance. Cette propriété de larétine va nous permettre d'étudier comment une image photographique peut représenter un mouvement. Si nous sommes dans l’obscurité, de sorte que ien ne vienne mettre en action la sensibilité de aotre œil, sauf un point lumineux ou un objet vivement éclairé, l’image de ce point ou decetobjet se peindra sur notre rétine et nous en conserverons l'impression quelque temps encore après que la source de lumière aura disparu. It s’est peint dans notre œil l'image d’un objet à l’état statique, c’est- à-dire d'immobilité. Cette opération est identique à celle que nous faisons en prenant, au moyen de nos appareils, la photographie d’un objet immo- bile. Mais sile pointlumineux se déplacerapidement 1 Nous avions d’abord désigné notre méthode sous le nom de Photochronographie; mais le Congrèsinternational de Pho- tographie réuni à Paris, en 1889, a fixé la terminologie relati- vement aux différents procédés (Voir procès-verbaux et ré- solutions du Congrès, p. 66), et adoptéle nom de Chronophoto- graphie. Nous nous conformerons à cette décision, au devantde notre œil, nous conserverons quelques instants une impression plus complexe, celle du trajet suivi par l’objet dans l’espace. Quand un enfant agite une baguette dont l'extrémité est in- candescente et qu’il s'amuse à voir le ruban de feu qui semble onduler dans l'air, il photographie en réalité sur sa rétine {4 trajectoire d’un point lumi- neux ; cette trajectoire n’est pas très longue, car la rétine ne garde pas longtemps les impressions reçues. Une plaque photographique donnerait, en pareil cas, l'image entière et permanente du chemin parcouru par le point lumineux ; toutefois ce ne serail pas encore l'expression complète du mouvement, puisque celte image n’exprimerait que les positions successives occupées par le corps lumineux, abstraetion faite de la durée de son parcours. Pour exprimer complètement les caractères du mouvement, il faut introduire dans l’image la no- tion de temps; cela s'obtient en faisant agir la lumière d’une manière intermittente et à des inter- valles de temps connus. Ainsi, pendant que nous recevons l'impression rétinienne, si nous battions des paupières d’une manière intermittente, deux fois par seconde par exemple, l’image du ruban de feu qui se peindrait dans notre œil présenterait des interruptions, et le nombre des interruptions contenues sur une cer- taine longueur de la trajectoire lumineuse expri- merait, en demi-secondes, le temps que le mobile a employé pour effectuer ce parcours. Or, ce sont là, précisément, les conditions de la chronophoto- graphie. Nous nous proposons d'indiquer d’une façon som- maire ses méthodes et ses principales applications. Méthodes Î. — CHRONOPHOTOGRAPHIE SUR PLAQUE FIXE Supposons qu'on braque un appareil photogra- phique sur un champ obscur et que, l'objectif étant ouvert, on lance devant ce champ une boule brillante éclairée parle soleil, de telle sorte que l'i- mage de cette boule impressionne sucessivement différents points de la plaque sensible. On trouvera sur cette plaque une ligne continuc représentée (fig. 1) par la courbe supérieure qui représentera exactement la trajectoire suivie par le corps bril- lant. Si nous répétons l'expérience en admettant la lumière dans lachambre noire d’une manière inter- mittente, et à des intervailes de temps égaux, nous obtiendrons une trajectoire discontinue (courbe inférieure de la même figure), dans laquelle seront représentées les positions successives du mobile aux instants où se sont produites les admissions de la lumière : c’est la courbe chronophotogra- phique. E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 691 Cette méthode suppose que l'intervalle de temps qui sépare deux images successives soit toujours Fig. 4. — Trajectoire simple et trajectoire chronophotogra- phique d'une boule brillarte qui se déplace devant un champ obscur, le même et qu'on en connaisse exactement la va- leur.Pourobtenirles meilleures images possibles, il faut que l’objet soit vivement éclairé et le fond sur lequel il se détache parfaitement obscur ‘; en outre, la durée des admissions de lumière doit être très courte et les intervalles entre deux éclaire- ments successifs parfaitement égaux. La figure 2 représente la disposition primitive que nous avions donnée à l'appareil chronophoto- ré 27 1 : 1 Fig. 2. — Disposition de l'appareil pour la chronophotogra- phie sur plaque fixe et sur champ obscur. graphique. On faisait tourner au moyen d’une ma- nivelle un disque fenêtré D, dont la rotation était ré- glée et parfaitement uniformisée au moyen d’un ré- gulateur. La plaque sensible s’introduisait avec son châssis C au foyer de l'objectif O. A chaque passage d’une fenêtre (f), cette plaque recevait une image représentant l’objet éclairé, avec sa forme et sa po- sition actuelles. Or, comme l’objet se déplaçaitentre deux images successives, on obtenait une série di- mages analogues à celles de la boule (fig. 1), indi- quant les attitudes et les positions successives de l’objet en mouvement. L'intervalle entre les images élait parfaitement réglé à 1/10 de seconde ; la durée des éclairements était de 1/500 de seconde: enfin, une règle métrique avec ses divisions était placée 1 Voir pour la manière d’obtenir un bon champ obscur, la Méthode graphique {supplément p. 22 ct suiv.,) Paris, Masson, 1884. devant le champ obscur, dans le même plan que l'objet photographié. L'image de cette règle, re- produite sur la plaque sensible, servait d'échelle pour mesurer la grandeur réelle de l’objet et les espaces qu'il avait parcourus dans chaque dixième de seconde. . L'image ainsi obtenue donnait, avec toute la pré- cision d’une épure géométrique, les deux notions d'espace et de temps qui caractérisent tout mouve- ment. Toutefois, ces deux notions qu'il s'agissait de concilier dans la chronophotographie, sont, dans une certaine mesure, incompatibles entre elles, de sorte que, pour les obtenir toutes deux, on est sou- vent obligé de recourir à certains artifices, ainsi qu’on va le voir. Pour une même vitesse de translation , si l'objet étudié couvre peu de surface dans le sens du mouve- Fig,.3. — Un homme qui marche : attitudes successives don- nées par la chronophotographie sur plaque fixe. ment, on en peutrecueillir un grand nombre d’ima- ges sans que celles-ci se confondent en se superpo- sant. C’est le cas du projectile que nous considérions tout à l'heure. La notion de temps est donc très complète quand celle d'espace est très restreinte. Mais si nous prenons les images successives d’un homme qui marche (fig. 3), la notion d'espace est plus complète : chaque image couvre une surface étendue, etrenseigne sur les positions que prennent Fig. 4. — Cheval arabe au galop. La swrande surface cou- verte par chacune des images fait qu’elles se superposent entre elles presque complètement. le corps, les bras etles jambes.Mais, par cela même que chaque image occupe plus d'espace, le nombre qu'on en peut prendre est moins grand, sans quoi la confusion se produirait par superposition de ces images. 692 E.-J. MAREY. Avec un gros animal, un cheval par exemple, le nombre des images devra être très restreint, car la longueur de chacune d'elles, mesurée dans le sens du mouvement, est très grande et la superpo- sition se produirait ainsi qu'on le voit sur la figure 4 représentant un cheval au galop. Pour des vitesses de translation différentes, le nom- Fig. 5. — Homme qui court. Chronophotographie sur plaque fixe. bre des images qu'on peut prendre en un temps donné sans que la confusion se produise est d’au- Fig. 6. — Homme vétu de noir et par conséquent invisible quand il passera devant le champ obscur. Des.ignes blan- ches qu'il porte sur les bras et les jambes seront seules marquées dans l’image chronophotographique. tant plus grand que la translation est plus rapide. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE On peut s’en convaincre en comparant les images successives d’un homme qui court ee 5), avec celles d’un homme qui marche (fig. 3) : les images du coureur sont bien plus éloignées les unes des autres, quoique la fréquence des éclairements ait été la même dans l’un et l'autre cas. Ainsi, la confusion des images par superposition est la limite qui s'impose aux applications de la chronophotographie sur plaque fixe. Dans bien des cas cependant, au moyen de certains artifices, on échappe à cet inconvénient. Le moyen le plus naturel consistait à réduire artificiellement la surface du corps étudié. On rend invisibles, en les noircissant, les parties qu'il n’est pas indispensable de représenter dans l’image, el l’on rend lumineuses au contraire celles donton veut connaître le mouvement. C'est ainsi qu'un homme vêtu de velours noir (fig. 6) et portant sur les membres des galons et des points brillants, ne donne, dans l’image, que des lignes géométriques sur lesquelles pourtant se reconnaissent aisément les attitudes des différents segments des membres. Dans l’épure que l’on obtient ainsi (fig. 7), le nombre des images peut être considérable et la ve sue au Dada ne de NAS des 28 RARE VOIS Fig. 7. — Images d’un coureur réduite à des lignes brillantes qui représentent l'attitude de ses membres s. Chronophoto- graphie sur plaque fixe. notion de temps très complète, puisque celle d’es- pace a été volontairement restreinte au strict nécessaire. II, — CHRONOPHOTOGRAPHIE SUR PELLICULE MOBILE Les résultats donnés par la chronophotographie pour l'analyse des mouvements sont donc très suffisants lorsqu'on n’en veut connaître que les caractères mécaniques ; nous les passerons en revue plus tard. Mais cette méthode ne saurait satisfaire le physiologiste qui veut analyser les mouvements d'ensemble d’un elle ne satisferait pas non plus l'artiste qui, dans un groupe de personnages, voudrait suivre les attitudes et les expressions de chacun d'eux. En outre, la chrono- photographie sur plaque fixe ne peut être réalisée que dans des conditions spéciales, devant un fond organe ; E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE parfaitement obscur; un grand nombre de phéno- mènes lui échappent donc : les mouvements des nuages, ceux de la mer, la marche des navires, les allures des animaux sauvages, etc. Pour obtenir une série d'images dans ces diffé- rents cas, il faut les recueillir sur une plaque sen- sible qui se déplace et présente successivement des points différents de sa surface au foyer de l'ob- jectif photographique. Le revolver astronomique avec lequel M. Janssen recueillit une série d'images _de la planète Vénus passant sur le disque lumineux du Soleil renferme le principe de ce procédé. Mais les images des deux astres étaient prises à des intervalles assez longs, il fallait, pour saisir les” mouvements si rapides qu'exécutent les êtres ani- més, trouver un mécanisme (rès rapide lui-même. Nous avons construil à cet effet, il y a quelques années, une sorte de fusil dont le canon contenait un objectif et qui renfermait dans sa culasse une glace photographique circulaire !. On visait l’objet en mouvement, et en pressant sur la détente, on mettait en action le mécanisme. La glace sensible tournait sur elle-même et s’arrèlait douze fois par seconde pour recevoir les images de l'objet; la durée de la pose était à peu près de 1/720 de se- conde, Malgré les difficultés mécaniques qu'il avait fallu surmonter pour obtenir une telle fréquence d'images, le résultat obtenu n'était pas encore sa- tisfaisant : ces images étaient trop petites et, à l'agrandissement, ne donnaient que des détails in- suffisants. Si nous avons éliminé systématiquement les appareils à objectifs multiples, comme celui de Muybridge qui a donné pourtant de.si admirables résultats, c'est que, dans ces appareils, les divers objectifs votent, sil’on peutainsi dire, l’objet photo- graphié sous des incidences différentes. Orces chan- gements de perspectives, s'ils n’ont pas d'inconvé- nients quand on opère sur des objets éloignés et de grandes dimensions, ne permettraientpas d'étudier les objets de petite taille, qui doivent s’observer de très près, à plus forte raison les êtres micros- copiques. C’est pourquoi nous nous sommes décidé à l'emploi d’un objectif unique au foyer duquel une longue bande de pellicule sensible passe ens’ar- rêtant pour recevoir chaque image ; passe encore, s'arrête de nouveau, et cela avec une telle vitesse qu’on peut obtenir jusqu'à 60 images à la seconde, . chacune de ces images n'employant à se former qu'un temps de pose très court variant de 14/1000 à 1/25000 de seconde. Nous ne rappellerons pas les nombreuses tenta- tives à travers lesquelles il a fallu poursuivre la 1 Voir supplément à la Méthode graphique, p. 12. 693 réalisation de ce programme ; nous nous bornerons à décrire l'appareil unique dans lequel sont défini- üvement réunies les disposilions nécessaires pour lachronophotographie, soitsur plaque fixe, soit sur pellicule mobile. Cet appareil recueille également bien les images réduites de grands objets éloignés, les images en grandeur réelle de petits objets rap- prochés, enfin les images très amplifiées des êtres qui se meuvent dans le champ du microscope. Ajoutons que la difficulté de saisir un mouve- ment ne tient pas toujours à sa trop grande vitesse ; cerlains mouvements nous échappent encore par leur lenteur : c’est ainsi que l’aiguille d’une montre nous parait immobile, Or il y a des mouvements bien plus lents qu'il est important de rendre saisis- sables: la chronophotographie se prête également bien à l'analyse de ces mouvements très lents. ILE, — DESCRIPTION DU CHRONOPHOTOGRAPHE COMPLET. Le chronophotographe complet (fig. 8) renferme, avons-nous dit, tout ce qui est nécessaire pour ES Fig. 8. — Disposition nouvelle de l'appareil, se prétant à toutes les applications de la chronophotographie. (Echelle 1/10.) prendre des images, soit sur une plaque fixe, soit sur une bande pelliculaire qui se déplace; son tirage variable et la possibilité de changer l'ob- jectif dont on se sert permettent d'obtenir, suivant le besoin, desimages réduites ou amplifiées ; la fré- quence et l'étendue de ces images, la durée des temps de pose et l'intensité des éclairements peu- vent être réglés suivant le besoin. Nous décrirons d’abord les pièces qui sont néces- saires pour la chronophotographie sur plaque fixe, c’est-à-dire pour le cas le plus simple. A. Pièces qui servent à la chroncphotographie sur plaque fire. — Nous avons vu qu'un appareil pho- tographique très simple, dans lequel la lumière arrive d’une façon intermittente, suffit pour appli- quer cette méthode. Ces pièces sont faciles à reconnaitre dans la fig. 8, où l’on voit les deux corps de l'appareil réunis par un soufflet. L'ar- rière-corps glisse sur un rail au moyen d’un bou- 69% E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE ton à crémaillère, suivant les besoins de la mise au point. L'objectif dont on se sert doit tou- jours être contenu dans une boite fendue en des- sous (fig. 9) et qui coulisse dans une ouverture Fig. 9. — Objectit photographique en partie contenu dans sa boîte. La planchette située en avant entre dans une cou- lisse de l’avant-corps de l’appareil. La fente située au-des- sous de la caisse laisse passer les disques obturateurs. (Echelle 1/3). de l’avant-corps de l'appareil qu’elle remplit exac- tement. La la boite coupe en deux l'objectif perpendiculairement à son axe optique principal, et laisse passer les disques fenêtrés qui produiront, en tournant, des intermittences dans l'admission de la lumière. Le soufflet s'adapte par une de ses extrémités à la boite de l'objectif, tandis que l’autre, collée à fente située au-dessous de Fig. 10. — Châssis à verre dépoli V pour la mise au point dans la chronophotographie sur plaque fixe. l’arrière-corps, se trouve, par sa large ouverture, en rapport soit avec le chässis à verre dépoli (fig. 10), soitavecle châssis photographique (fig. 11). Les seules pièces qui méritent une description spéciale sont les disques obturateurs et V'arbre qui sert à leur transmettre le mouvement. Les disques obturateurs tournent en sens con- traire l’un de l’autre; la rencontre des ouvertures dont ils sont percés produit les éclairements. Cette disposition permet d'employer des disques de petit diamètre et par conséquent de réduire beaucoup les dimensions totales de l'appareil Celui-ci, en effet, n'excède pas le volume ordi- naire d’une chambre 18-24. Quant à l'arbre qui fait tourner les disques, il emprunte son mouvement à des rouages actionnés par une manivelle et qu'il n’y a pas lieu de décrire en ce moment; cet arbre se fixe d’autre part à Fig. 44. — Châssis recevant la glace sensible dans la chrono- photographie sur plaque fixe. Le volet du chassis est tiré. l'axe de l’obturateur rotatif. Or, dans la mise au point, le tirage doit varier, et les deux corps de l'appareil s'éloigner plus ou moins l’un de l’autre; il faut donc que l’arbre s’accommode à ces chan- gements de longueur : pour cela, il est formé de tubes carrés glissant à frottement l’un dans l’autre. Cette disposilion se prête à toutes les ap- plications dela chronophotographiesur plaque fixe, ainsi qu'on le dira plus loin. B. Pièces qui servent à la chronophotographie sur pellicule mobile. — On a vu que, si l'objet à étu- dier exécute des mouvements sur place ou que, présentant une grande surface, il se déplace avec peu de vitesse, on ne peut recourir àla chronophoto- graphie sur plaque fixe, parceque lesimages se con- fondraient par superposition. Il faut alors rece- voir ces images sur une plaque qui se déplace en présentant successivement au foyer de l'objectif les différentes parties de sa surface. Nous nous servons à cet effet de plaques souples ou pellicules, taillées en longues bandes et montés sur bobines. La bande pelliculaire doit défiler très vite pour re- cevoir en un temps donné un grand nombre d’i- mages sans que les dimensions de ces images soient trop réduites ; elle doit s'arrêter au moment de chaque pose, sans quoi les images obtenues n'auraient aucune netteté; il faut que cette bande sensible puisse être introduite dans l’appareil et en puisse être retirée sans subir l’action de la lumière ; il faut enfin, pour la bonne utilisation de la pellicule, qu'il n’en passe, entre deux éclaire- ments consécutifs, que la quantité rigoureusement E.-J. MAREY. nécessaire pour recevoir une image. Voici les dispo- sitions qui réalisent ces conditions multiples. Reprenons la description de l'appareil chrono- photographique au point où nous l'avons laissée tout à l'heure. Le chàssis qui porte la plaque fixe doit être enlevé, puisque ce n’est plus lui qui doit recevoir les images. À sa place on introduit une planchette percée d'une ouverture, fenêtre d'ad- mission (fig. 12), dont la largeur, réglable à volonté, Fig. 12. — Fenètre d'admission se substituant au chassis LPO A LES lorsqu'on opère sur une pellicule qui se déroule. La largeur de la fenétre se règle par le glissement des rideaux R R, suivant la dimension que doit avoir l'i- mage. est justement égale à celle que doit présenter chacune des images. A lravers celle fenêtre, la lumière pénétrera dans la chambre aux images où elle rencontrera la pellicule mobile qu'un rouage d’hologerie déroule, d’un mouvement saccadé, en la faisant passer d’une bobine sur une autre. La disposition de ces bobines nous occupera tout d’abord, car elles constituent l'organe essentiel qui permet de charger ou de décharger l'appareil en pleine lumière. Les bobines ! (fig. 13) ont 9 centimètres de hau- Fig. 143. — Deux bobines de métal destinées à l’enroulement de la pellicule sensible, Ces bobines sont situées en sens contraire l’une de l'autre; les lettres H et B indiquent sur chacune d’elles le haut et le bas. LT Une bande de papier fort et opaque, ayant 9 centimètres de largeur sur une longueur de 1 Les bobines sont faites de métal. Deux fonds, l’un supé- rieur, mince, l’autre inférieur, épais, sont soudés aux deux bouts d'un tube métallique léger. Un trou percé au centre des deux fonds permet le passage d'une broche verticale fixée à l’intérieur de la chambre. Une couronne de petits trous percés dans la face inférieure de la bobine sert à son entrai- nement: quant une cheville implantée dans un disque tour- nant pénétrera dans l’un de ces trous, le disque entraînera la bobine dans son mouvement rotatif. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 695 plusieurs mètres, s'enroule sur une bobine dont elle remplit plus ou moinsla gorge. Or, en même temps que cette bande de papier,on enroule aussi la bande de pelliculesensible qui devra recevoir les images. Voici comment on procède pour cet enroulement. La bande de papier opaque étant, par exemple, d'un mètre plus longue que celle de pellicule, on enroule sur le noyau de la bobine, 0 “. 50 de pa- pier seul; puis, on applique sur le papier la bande pelliculaire, la couche sensible en dehors, et on les enroule toutes deux sur la bobine en les serrant fortement. Quand on arrive à la fin de la bande pelliculaire, on fixe cette extrémité contre la bande opaque au moyen d’un morceau de papier gommé à la façon des timbres-poste ; puis on achève l’en- roulement des 0 *, 50 de papier qui restent encore; enfin on maintient le tout avec un lien de caout- choue. Cette opération se fait, bien entendu, dans le laboratoire photographique et à la lumière rouge. Pour montrer qu'une bobine est chargée, on glisse sous la bande de caoutchouc un petit mor- ceau de papier blane qui sert de signe ; ce papier tombe de lui-même au moment de emploi, et ne se trouve plus, par conséquent, sur les bobines qui ont été impressionnées!, Voilà donc notre surface sensible bien protégée contre l’action de la lumière; il s’agit de l'intro- duire dans l'appareil. Prenons une bobine chargée M, ll | Il I 1 LL | 1 nl IE 1 Fis,14. — Bobine magasin chargée, a on déroule l'extrémité de la bançe de papier qui la recouvre pour l'enrouler en sens contraire sur la bobine réceptrice R. bobine magasin, Aéroulons les premiers tours du papier qui la recouvre et enroulons cette extré- mité sur une seconde bobine R, en sens inverse de l’enroulement de M: de sorte qu’en passant d’une bobine sur l’autre, la bande de papier affecte la forme d'un S. Ouvrons alors la chambre aux images (fig. 15), nous y trouvons deux broches verti- cales dont l’une, à gauche, reçoit la bobine-maga- 1 Quand on opère sur des pellicules très longues, comme il serait encombrant d’avoir une égale longueur de papier, on réduit celui-ci à deux courtes bandes que l’on colle aux deux extrémités de la pellicule. Ces bandes de papier sont taillées en pointe à leur extrémité libre; on engage celle-ci dans la fente longitudinale de l'axe de la bobine au moment de pro- céder à l’enroulement, 696 E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE sin, tandis que celle de droite reçoit la bobine réceptrice R. Deux rouleaux compresseurs exer- cent une pression élastique sur les bobines pour assurer la régularité de l’enroulement ou du dé- roulement de la bande, Quant à la bande elle-mê- me, on l’engage dans une fente verticale (suivant la ligne ponctuée) où elle subira l’action de certains organes que nous allons décrire : Le Zaminoir, le fixateur et le ressort élastique. Laminoir. — 11 est formé d’un cylindre mo- teur L (fig. 15)en bois durci recouvert de caoutchouc et sur lequel se bobine immobile jusqu’au moment où s’abattra le compresseur du laminoir. Une autre condition s'impose encore dans le mouvement de la bobine R : il faut que cette bobine enroule la bande à mesure que le laminoir la lui livre, sans être en retard ni en avance. Or, l'accroissement continu du diamètre de la bobine,à mesure qu'elle reçoit un plus grand nombre de tours de bande, eût produit des irrégularités dans l’enroulement. L'uniformité de l’enroulement est naturellement obtenue par cette condition, déjà signalée, que la broche qui tend réfléchissent les à entrainer la bo- bandes de pa- bine tourne à frot- pier et de-pelli- tement dans son intérieur. Ils’en- cule dansleur tra- jet d'une bobine _ sur l'autre. C'est = E | l'organe moteur de la pellicule. Pourlefaire fonc- tionner, on ap- puie sur une dé- suit que la bande n'est jamais tirée avec assez de for- ce pour surmon- ter la résistance du laminoir. Nous voici dé- tente qui abat un jà en mesure de rouleau compres- produire les ac- seur élastique, a- nalogue à qui pressent sur les bobines, mais d'une plus gran- de force. Tant que le compresseur n'est pas abattu et ne serre pas la pellicule, le laminoir tourne librement en glissant derrière la bande qui le recouvre; dès que le compresseur agit, la bande est entrainée. Celte disposilion a pour but de mettre tout d’abord les rouages en marche avant de commencer l’expérience et de les amener graduellement à leur vitesse uniforme; à partir de ce moment, l’opéra- teur est prêt à saisir les images dès que l'objet en mouvement se présentera dans des conditions favorables, La bobine réceptrice R est placée, avons-nous dit, sur une broche verticale. Celle-ci tourne sur elle-même et devra entrainer cette bobine aussitôt que fonctionnera le laminoir; de cette facon la pellicule s'enroulera à mesure qu'elle aura reçu des images. Mais tant que le laminoir ne fonctionne pas, la bobine R ne doit pas tourner, car le moment n’est pas venu d’enrouler la pellicule. La broche tournera donc seule, en produisant toutefois un frottement qui tend à entrainer la bobine, mais ne l'entrainera effectivement qu'au moment où le la- minoir entrera en fonction. Ce résultat est obtenu au moyen d’un cliquet : cet organe maintient la ceux Fig. 15.— Chambre aux images, dont le couverele est soulevé. M, bobine ma- gasin et R bobine réceprtice sur leurs broches; r > > petits rouleaux com presseurs appuyant la bande sur les bobines. L, laminoir avec son rou- leau compresseur. F fenêtre d'admission. V, verre dépoli tournant à charnière. Une ligne ponctuée indique le trajet de la bande et de la pelli- cule., C, C' fxateur et sa came produisant les arrêts intermittents de la bande. tions suivantes : La pellicule et son support de papier étant mis en place, nous pouvons impri- mer aux rouages de l'appareil une rotation rapide, Les disques éclaireurs font, par exemple, 10 tours par seconde et le laminoir en fait autant. À un moment donné, on presse sur un bouton qui fait saillie sur le couvercle de la boîte aux images; le compresseur du laminoir s'abat, et, du même coup, la bobine réceptrice devient libre. Aussitôt le pa- pier est entrainé, et la bande tout entière passe d'une bobine sur l’autre dans l’espace d’une ou deux secondes. Fivateur. — Si l'on opéraitavec la disposition ei- dessus décrite, on recevrait des images sur une surface en mouvement, et aucune de ces images ne serait nette. Il faut qu'au moment de l’éclairement, la bande pelliculaire cesse de se mouvoir. Or on ne pouvait pas songer à arrêter les rouages animés de la grande vitesse dont nous venons de parler; mais il était possible d'arrêter la pellicule toute seule. Voici la disposition que nous avons employée pour cela : Au moment où la bande pelliculaire, sortant de la bobine M, s'engage dans l’étroit espace où elle défile au foyer de l'objectif pour recevoir des E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 697 images, cette bande passe devant un organe nommé le firateur. Celui-ci est formé d’un demi cylindre d'acier (C! fig. 16), maintenu verticalement par deux lames de ressort qui le pressent doucement contre la face postérieure de la pellicule p qui se Fig. 16. — Fixateur C' de la figure précédente, représenté seul ici avec ses cames O ; p bande pelliculaire que le fixa- teur comprime contre la paroi de la chambre aux images, chaque fois qu'une dent de la came passe sur Je rouleau. trouve ainsi légèrement étreinte entre cet organe et la platine du rouage. Cette légère pression n'en- trave pas la marche de la pellicule, mais celle-ci s'arrêtera soudain si le fixateur est fortement poussé contre la platine. Cet effet est obtenu par une came dont l’action se produit pendantun temps très court, et précisément à l'instant de l’admis- sion de la lumière dans l'instrument. On aura done une parfaite fixité de la pellicule au moment de chaque pose. Voici comment est construit le fixateur : C’est une portion de cylindre d’acier, évidé dans son centre pour loger un galet cylindrique sur lequel passera une came aumoment de l’éclairement. Or, la pres- sion de cette came contre le cylindre fait plier celui-ci à sa partie moyenne, évidée et flexible, mais produit par ses extrémités une forte étreinte de la bande pelliculaire contre la platine de l’ap- pareil. On peut graduer cette pression et considérer comme bonne celle qui permet de tirer avec un ef- fort de 2 à 3 kilogrammes sur une bande de papier serrée dans le fixateur, sans que celte bandeglisse. La construction des cames présente aussi quel- ques particularités. Chaque came est d'acier; elle est taillée en forme de virgule et serrée par une vis qui la traverse. La came est mobile et peut tantôt se cacher à l’intérieur du disque qui la porte, tan- Lôt saïllir à l'extérieur de ce disque de manière à frotter sur le galet et à faire serrer la bande par le fixateur. Lame élastique. — La bande pelliculaire, énergi- quement entraînée par le laminoir, et d'autre part REVUE GÉNÉRALE, 1891. arrêtée, en amont, par le fixateur, devrait nécessai-’ rement se rompre ou glisser dans le laminoir.! Pour éviter ces accidents, on recourt à une disposi- tion qui a pour effet de faire varier la longueur du parcours de la bande entre le laminoir et le fixa-: teur. Cela s'obtient au moyen d’uné lame de ressort? sur laquelle la pellicule se réfléchit dans son trajet. Ainsi, au moment de la fixation de labunde, le laminoir continue son action etentraine la pelli- cule qui cède en faisant plier la lame élastique; puis, quand la fixation est terminée, la détente de la lame tire soudainement la pellicule qui se remet à marcher d'un mouvement uniforme. Sans entrer dans les détails du rouage qui con- duit les pièces que nous venons de décrire, disons que, par construction, le laminoir, la came du fixateur et les disques obturateurs tournent avec la même vitesse; qu'on établit la coïncidence des éclairements avec les fixations de la pellicule, de sorte que ces différents actes soient coordonnés d’une manière automatique. Nombre, dimensions et intervalles des images. — C’est une manivelle qui actionne le rouage. Un tour de cette manivelle produit cinq tours du disque obturateur et du laminoir; or, comme on peut aisément faire à la main deux tours de la manivelle par seconde, on obtient ainsi dix images. Cette marche de l'appareil donne des images de grande dimension, dont chacune correspond au pé- rimètre entier du cylindre laminoir, c’est-à-dire à 9 centimètres; or, comme la hauteur de la bande est aussi de 9 centimètres, chaque image a pour dimension 9 centimètres en carré. Mais on peut, dans bien des cas, se contenter d'un champ moins étendu; on obtient alors deux, trois ou six images pour un tour de laminoir, ce qui en porte le nombre à vingt, trente ou soixante par seconde. Il suffit pour cela de changer le nombre des dents de la came du fixateur, et de changer simultanément le nombre des fenètres des disques obturateurs. Avec deux dents à la came et deux éclairements, on a une image à chaque demi-tour du laminoir:la longueur en est donc de 4 cent. 1/2. Trois arrêts et trois éclairements par tour du laminoir donnent des’ images de 3 centimètres; six arrêts et six éclaire- ments réduisent les images à 1 cent. 1/2. Avec un peu d’habilude, on arrive à régler fort bien la marche de la manivelle, ce qui donne, à: chaque seconde, un nombre d'images sensiblement: constant. Mais, comme cette approximation ne! suffirait pas pour les mesures précises que com- porte une expérience scientifique, si l’on veut con- naitre rigoureusement le nombre des images par secondes, on contrôle le nombre des tours du 21% 698 E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE disque par les procédés ordinaires de la chrono- photographie !. Quant à la régularité de la marche de l'appareil, elle est assurée par la masse des disques rotatifs qui, tournant avec une grande vitesse, forment un excellent régulateur. IV. — EXPÉRIENCES. Lorsqu'on veut prendre une série d'images sur dans des conditions favorables, on presse sur le bouton qui met le laminoir en action; aussitôt la pellicule passe en recevant les images. Les plus longues pellicules que le commerce fournisseactuel- lement et qui ont un peu plus de 4 mètres de long, n'emploient pour passer que 4" 2/3. La bobine réceptrice estensuite retirée de la boîte el conservée jusqu'au moment où elle devra être développée. Fig. 17.-— Phases successives du mouvement d’un une bande pelliculaire, on fait d’abord la mise au point sur le verre dépoli situé dans la boite aux images, et qui, tournant comme un volet sur des gonds, vient se placer au lieu même où pas- sera la pellicule sensible ?, Puis, après avoir dé- tourné le verre dépoli, on charge l'appareil en y en- gageant les deux bobines, ainsi qu'on l’a dit tout à l'heure. On ferme alors la boite aux images et l’on met la manivelle en marche. Quand le rouage a pris la vitesse voulue, si l'objet en expérience se montre 1 Voir la Méthode graphique p. 133. 2? Pour plus de précision, la mise au point doit se faire à la loupe par un trou situé à la partie postérieure de la boite, et qui se ferme avec un rideau de métal. » vague qui vient frapper des rochers. Réduction à 2/5. Quelques personnes ont cru que, dans la cons- truction assez compliquée à laquelle nous avons eu recours pour obtenir des arrêts de la pellicule, nous nous élions donné une peine inutile, et l’on a dit qu'avec des éclairements très courts, la translation de la pellicule sensible élait négligeable. Il serait facile de prouver par le calcul que, pen- dant la durée de l’éclairement, la pellicule pro- gresse d’une quantité suflisante pour enlever aux images la netteté qui en fait toute la valeur. Il est plus simple et plus convainquant peut-être, de montrer par une expérience que, sans les arrêts, on n'oblient pas de bonnes images. Pour cela, réglons l'appareil de manière à avoir deux images par tour E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 699 de laminoir : c’est-à-dire, rétrécissons la fenêtre d'admission aux dimensions voulues, et produi- sons deux coïncidences dans les fenêtres du disque obturateur; mais, au lieu de régler le fixateur pour deux arrêts par tour, ne mettons qu’une seule came en relief. IL arrivera nécessairement que, de deux images successives, l’une se fera sur la pellicule arrêtée, l'autre sur la pellicule en mouvement. Or, après développement de ces images, on constatera, au premier coup d'œil, que celles qui se sont pro- duites pendant les arrêts ont seules des contours parfaitement nets. V. — DISPOSITIONS DIVERSES DE L'APPAREIL, SUIVANT LA NATURE DU SUJET QU'ON ÉTUDIE. On vient de voir la disposition de l’appareil pour la chronophotographie sur bande mobile; il reste à indiquer la manière d'appliquer cette méthode suivant la nature du sujet qu'on étudie. À. Disposition à donner aux images sur la bande pel- liculaire. — Quand le chronophotographe fone- tionne dans sa position normale, c’est-à-dire repo- se sur son chariot, il donne des images qui se suivent en série horizontale de gauche à droite. La figure 17 montre 12 de ces images, dans lesquelles on peut suivre les phases du mouvement d’une vague qui vient frapper des rochers : la vague monte d’abord et couvre ces rochers d'écume, puis se relire et l'agitation de la mer se calme peu à peu !. Pour étudier les phénomènes de ce genre, la meilleure manière de rendre le mouvement sen- sible, c’est de le reproduire synthétiquement au moyen du 200frope. Tout le monde connait la belle invention de Plateau qui, plaçant à la circonférence d’un disque de carton une série d'images représentant les phases successives d’un mouvement, reproduisait, pour l'œil, l'apparence de ce mouvement, en fai- sant tourner le disque en face d'un miroir dans lequel on regardait les images à travers de petites fentes percées à la circonférence du carton. Pla- teau donna le nom de Phénakisticope à cet instru- ment, qui resta longtemps à l’état de jouet scienti- fique. Depuis quelques années, on a donné au phénakisticope des dispositions nouvelles qui en rendent l'emploi plus commode connue sous le nom de z0o/rope se prête fort bien celle qui est 1 On ne peut suivre qu'une courte partie du phénomène dans le petit nombre de phases représentées dans la figure ci-contre; encore a-t-il fallu les rédune beaucoup pour les faire tenir dans la justification de la page. Dans leurs dimensions réelles, c’est-à-dire forme de carrés de 9 centimètres de côté, ces images étaient d’une pureté par- faite et pouvaient même supporter un agrandissement de 4 diamètres sans perdre sensiblement de leur netteté. sous à l'étude des mouvements obtenus sur bandes pel- liculaires. La bande de papier sensible qui a reçu les images positives se place à l’intérieur d'un cylindre creux et porte à sacirconférence les fentes par lesquelles l’œil voit se succéder les images pen- dant que le cylindre tourne sur son axe. On sait qu'il suffit d’une dizaine d'images suc- cessives par seconde pour que l'œil éprouve la sen- sation d’un mouvement continu. Or, comme la chronophotographie peut donner à chaque seconde 40 à 60]images, en faisant tour- nerune telle ban- de dans le z00- trope, à raison de 10 images par seconde, on ob- tient la tion du mouve- ment ralenti de quatre à six fois, et par consé- quent, bien plus facile à dans toules ses phases.Cette mé- thode nous a ser- vi, il y a quel- ques années, pour l'analyse sensa- suivre des mouvements du vol Oi- seaux !. des Pour l’analyse délicate d’un mouvement ; cette méthode n'est cependant pas suflisante ; elle comporte en- core les incerti- tudes insépara- RS bles des sensa- lions subjecti - ves:elleest donc très inférieure à la chronophoto- graphie sur pla- que fixe qui livre Fig. 18. — Série des phases de lPal- lure d'un chevalau pas ; lesimages directement (fig. Let 7) l’é- se pure que du mouvement étudié. Or, il est possible de ramener la seconde forme de chronophotographie à succèdent de bas en haut, géométri- | Voir Marey, le Vol des Oiseaux. Paris, G. Masson, 1889. 700 E.-J, MAREY. la première, c'est-à-dire de reporter sur une même surface les images obtenues sur des surfaces diffé- rentes. On y arrive, dans certains cas, par la superposition de clichés transparents, d’autres fois par une série de décalques successifs, ou même par une série d'opérations du genre de celles que F. Galton a nommées photographies com- posites. Dans un grand nombre de cas, il suflit, pour rendre les phases du mouvement parfaitement intelligibles, de disposer les images en série verli- cale. C'est ce qui a été fait, figure 18, pour les mouvements du cheval au pas. Lues de bas en haut, c'est-à-dire dans leur ordre de succession naturel, ces figures montrent d’abord que le cheval s’avance graduellement vers la droite de la figure, et permettent, d’après l'échelle métrique, d'apprécier la valeur de ce déplacement pendant chaque dixième de seconde. Elles montrent aussi, pour chaque membre, les phases de son changement d’attitude, soit dans la période d'appui, soit dans celle de lever. Pour obtenir sur la bande pelliculaire cette disposition des images en série verticale, il suflit de coucher l'appareil sur le côté ; le déroulement de la bande pelliculaire et son passage d’une bobine sur l’autre se font alors dans le sens ver- lical. B. Fréquence des images. — Suivant la vitesse du mouvement qu'on veut analyser, on doit faire va- rier la fréquence des images; il en faut en général une dizaine au moins pendant la durée d’un acte complet pour en faire saisir les phases. Ainsi, pour analyser le coup d’aile d’un oiseau, si cet acte dure 1/5 de seconde, les éclairements et par conséquent les images doivent se suivre à raison de 40 par seconde. Le pas d’un homme, qui est bien plus lent, n’exige qu’une dizaine d'images par seconde. Pour d’autres actes plus lents encore, il faut mettre un plus grand intervalle. Ainsi, une astérie placée à la renverse au fond d'un aquarium met environ 10 minutes à se retourner; pour suivre les phases dumouvement.il suffit de prendre une image toutes les minutes. Enfin, l'épanouissement d’une fleur, s’il met 10 heures à se produire, permet de laisser | 2% minutes d'intervalle entre deux images succes- sives. . La manivelle placée à l'arrière de l’appareil im- prime au rouage moteur un mouvement très ra- pide;ilserait difficile de la tourner assez lentement pour réduire la fréquence des images au-dessous d’une par seconde ; aussi procède-t-on autrement quand on doit mettre un long intervalle entre les éclairements successifs. L’axe des disques obturateurs se prolonge en — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE avant de l'appareil sous forme d'un carré sur le- quel s'adapte la manivelle. Celle-ci, à chacun de ses tours, ne produit plus alors qu’un seul tour du disque ; il est donc très facile de réduire à volonté la fréquence des images, en faisant faire à la mani- velle un tour toutes les secondes, toutes les minutes ou toutes les heures. Dans les cas où les images doivent être prises à de très longs intervalles, au lieu de tourner la ma- nivelle à la main, il vaut mieux confier ce rôle à un rouage auxiliaire qui s’en acquitte parfaitement. C. Durée des éclairements. — La durée des éclaire- ments présente un rapport naturel avec la fré- quence des images ; cela résulle de la construclion même de l’obturateur. En effet, si le grand disque a un mètre de circonférence, et les fenêtres éclai- rantes 1 centimètre de diamètre, la coïncidence des fenêtres produira l’éclairement pendant 1/200 en- viron du tour de disque !. Or, àmesure que le disque tournera plus rapidement, cette durée absolue de l’éclairement deviendra plus courte : avec un tour de disque par seconde on aura une image avec pose de 1/200 de seconde; avec deux tours, deux images avec pose de 1/400 de seconde; avec dix tours, dix images avec pose de 1/2000 de se- conde. Cette relation naturelle entre la fréquence des images et la durée du temps de pose est en général avantageuse; mais il est parfoisutile de changer ce rapport, dans l’intérèt même des épreuves photo- graphiques; sans cela elles pourraient avoir des temps de pose trop longs ou insuflisants ? ; on y arrive en modifiant la largeur des fenêtres. D. Choix des objectifs suivant la nature du sujet qu'on étudie. — Dans tout appareil photographique, on doit changer d'objectif suivant les dimensions et la distance du sujel dont on prend l’image. Cette né- 1 Ces évaluations sont approximatives ; il serait bien dificile de les faire plus exactes, ainsi que l’a montré M.de La Baume- Pluvinel. 2 Ainsi, dans lecas où lintervalle des images serait de 2% minutes, si les disques obturateurs tournaient uniformé- ment,la durée de la pose serait de plus de 7 secondes. Il faut alors laisser le rouage arrêté dans l'intervalle des poses, et tourner vivement la manivelle quand on veut produire une image. A vitesse de rotation égale du disque, la fréquence des images croit et décroit suivant qu’on augmente ou diminue le nombre des fenêtres de l'obturateur; et si ces fenêtres con- servent le même diamètre, la durée d’éclairement ne change pas. Enfin, à égale vitesse de rotation et à fréquence égale des images, on change la durée des éclairements en faisant varier le diamètre des fenêtres. C'est ainsi que pour les mouvements extrémement rapides comme ceux des ailes des insectes, on doit, au moyen d'un rideau-fenétré, transformer les ouver- tures des disques en fentes étroites. Nous avons pu, -de cette facon, réduire le temps de pose à 1/25000 de seconde. E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE cessité est plus grande encore avec le chronopho- tographe, car cet instrument s'applique aux études les plus diverses. Tous les objectifs dont onse sert doivent être montés sur une boite analogue à celle qui est représentée figure 9et qui permet de les couper à leur partiemoyenne pourlaisser passer les disques obturateurs au centre même de l'objectif. Toutefois, une dispositiun spéciale doit être em- ployée quand la chronophotographie s'applique à l'étude des mouvements dans le champ du micros- cope. Nous en parlerons ultérieurement à propos des applications spéciales de la méthode. Dans toutes les circonstances, et quel que soit l'objectif employé, la chronophotographie peut êlre pratiquée sous ses deux formes, c’est-à-dire sur plaque fixe devant un champ obscur, et sur pellicule mobile s’il s'agit d'objets se détachant sur un fond lumineux. Applications En définissant la chronopholographie, nous l’a- vons représentée comme le développement le plus complet de la Méthode graphique et comme un précieux moyen pour étudier les phénomènes de la Nature. Tout phénomène, en effel, consiste en une série de changements d’élat d'un corps sous l'influence de conditions déterminées; étudier un phénomène, c'est observer successivement la série de ces changements etles comparer entre eux. Est- il besoin de dire que l’insuflisance de nos sens ou l’imperfection de notre mémoire rendent bien sou- ventces comparaisons défectueuses, sinon impos- sibles ? Les appareils inscripteurs ont en partie remédié aux difficultés de l'observation directe, mais ils ne sont applicables qu'à des cas relativement simples : les phénomènes qu’ils traduisent doivent avoir élé préalablement ramenés au cas uniforme du mouvement d’un point sur une droite. C’est ainsi que les oscillations de Ja colonne du thermomètre ou du baromètre s'inscrivent sous forme d’une courbe sinueuse qui retrace les change- ments de hauteur de cette colonne, en fonction du temps. La chronophotographie embrasse un champ bien plus vaste : elle ne traduit pas seulement les mou- vements d’un point sur une droite, mais les dépla- cements de tous les points d'un objet, ou du moins de tous ceux qui seraient visibles d'un même point de vue ; elle saisit ces mouvements,quel que soit le sens suivant lequel ils s'effectuent. Comme les autres formes de la méthode gra- phique, la chronophotographie suit les phases de phénomènes qui échappent à l'observation parleur lenteur extrême, aussi bien que les actes qui sont très rapides ; mais où sa supériorité éclate, c’est 701 lorsqu'elle s'applique à des mouvements d’une extrême complexité. Notre méthode, ilkest vrai, ne donne pas l’ex- pression continue des changements qu'elle retrace, mais les images qu’elle saisit peuvent être si rap- prochées les unes des autres qu'on peut loujours, par une interpolalion légitime, concevoir les pha- ses intermédiaires à celles qui sont représentées. Ce qui frappe au premier abord, dans les appli- cations de la chronophotographie, c’est sa puis- sance pour l'analyse des actes rapides. Lorsqu'on voit que les ailes d’un insecte qui vole sont aussi nettement représentées que si elles étaient immo- biles, etquand on sait que, pour obtenir cette net- teté des images, il faut réduire la durée de chaque pose à 1/25000 de seconde, on conçoit que, parmi les actes les plus rapides, il doive s’en trouver bien peu qui résistent à la chronophotographie. On se représente beaucoup moins bien les avan- tages de cette méthode pour l’analyse des mouve- ments lents, et pourtant il doit y avoir tout un monde de phénomènes qui nous échappent par leur lenteur. Il est permis d'espérer que nous sui- vrons un jour, sur des images prises àde trèslongs intervalles, les déplacements lents des glaciers ou les changements de la configuration géologique d’un pays; à plus forte raison les phases beaucoup moins lentes de l'accroissement d’un animal, ou celles du développement de certains embryons observés à travers leurs membranes transparentes. Sur ce sujet le professeur Mach a tracé un curieux programme d'expériences. Il imagine qu'on ait recueilli, à des intervalles de temps égaux et pen- dant une longue suite d'années, les portraits d’un individu, à partir de sa première enfance jusqu'à son extrême vieillesse, et qu’on dispose la série d'images ainsi obtenues dans le phénakisticope de Plateau; pendant la durée de quelques secondes, cette série de changements, qui ont mis en réalité si longtemps à s’accomplir, passera sous les yeux de l'observateur; et celui-ci verra, sous forme d’un mouvement étrange et merveilleux, se dérouler à ses yeux toutes les phases d’une existence hu- maine. Mais revenons aux applications immédiates de la chronophotographie, et voyons-la aux prises avec les problèmes habituels des sciences: ce sera un champ assez vasie; nous ne pourrons guère que l’effleurer rapidement en commencant par les différents types de la locomotion animale. VI. — LOCOMOTION TERRESTRE : MOUVEMENTS DE L'HOMME ET DES QUADRUPÈDES, 1° Mouvements de l'homme. — Dès le xvn° siècle, Borelli a montré aux physiologistes que les lois de la mécanique, récemment découvertes par Galilée, 702 E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE s'appliquaient aux êtres vivants; son analyse des mouvements des animaux est empreinte d’une haute sagacité. Toutefois, l'absence de moyens exacts pour mesurer le temps, l’espace et les forces, n’a pas permis au savant professeur de propres à chaque allure. Aussi, en se guidant sur de pareilles images, est-il facile d’imiter la manière de marcher et de courir du sujet qui a servi de modèle, de reproduire sa facon d'étendre ou de fléchir les jambes, de balancer les bras, de poser a. | Fig ,19. — Phases successives d’un saut en longueur. Chronophotographie sur plaque fixe. Naples de résoudre les problèmes si multiples de la Mécanique animale. Au commencement de notre siècle, les frères Weber, disposant d’instru- ments moins imparfaits, ont donné sur la loco- motion de l’homme quelques notions plus exactes ; mais si l’on considère la complexité du sujet, on sent l'insuffisance des moyens d’analyse employés le pied sur le sol ou de l’en détacher. Il serait bien plus difficile chant à les surtout aux d’imiter ces mêmes actes en cher- saisir sur le modèle lui-même, car, allures vives, les mouvements sont trop rapides et échappent à l’observation. Cet enseignement par les images s’appliquerait très bien aux différents exercices corporels; à Fig. 20. — Phases successives d’un saut à la perche. Chronophotographie sur plaque fixe. jusqu'ici. La chronophotographie traduit de la façon la plus précise, et dans tous leurs détails, les mouvements de l’homme qui marche, court, saute ou se livre à divers exercices corporels. A. Cinématique de la locomotion de l'homme. — Re- portons-nous aux figures qui représentent sur pla- ques fixes les images successives d’un marcheur et celles d’un coureur. On peut suivre sur ces figures les principales phases des mouvements; elles expriment, mieux que tout langage, les caractères ce point de vue 1l serait d’une véritable utilité. La figure 19 représente un gymnaste qui exécute un saut en longueur; le nombre des images n’est que de cinq par seconde; cela suffit pour définir la série des actes qui doivent s’accomplir dans un saut de ce genre. En suivant les images dans leur ordre de suc- cession, on voit que le sauteur acquiert par une course préalable la vitesse qui lui fera franchir un long espace pendant sa période de suspension. Au moment du saut, la jambe à l'appui s'étend E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 103 vigoureusement et imprime au corps une impul- sion verticale; en même temps les bras s'élèvent, ce qui donne un surcroit d'énergie à l'effort im- pulsif. Les images successives montrent le sauteur détaché du sol, les bras levés d’abord et les jambes écartées; plus tard les bras s’abaissent et les jambes se rassemblent en se portant de plus en plus en avant, de sorte que les pieds rencontrent -le sol parles talons, eu avant du centre de gravité du corps, de manière à prévenir une chute sur la face. Enfin, au moment de la chute, les jambes se fléchissent en résistant, pour amortir la force vive dont le corps est animé. Suivant que cette série d'actes est plus ou moins bien exécutée, l’espace franchi est plus ou moins | que horizontale, c'est-à-dire normale au rayon du cercle parcouru. Le sauteur retombe ainsi naturel- lement sur les pieds à une distance beaucoup plus grande que celle d’où il était parti. Ainsi, dans le saut à la perche, l'impulsion ini- tiale n’est pas, comme dans le saut en longueur, la force unique d’où dépend l'étendue du saut, mais cette distance peut être accrue par les actes que le sauteur exécute, en prenant son point d’ap- pui sur la perche, pendant qu’il esten l’air. Pour une étude plus détaillée des mouvements exécutés dans un exercice corporel, il faudrait re- courir à ces photographies partielles dont nous avons déjà donné un exemple à propos de la marche de l’homme. Ainsi, un homme revêtu de velours Fig. 21. — Analyse des phases d’un saut en hauteur, précédé d’upe course, Des images partielles, lignes brillantes sur un yètement sombre, sont recueillies sur plaque fixe (25 images par seconde). étendu, et le sauteur retombe plus ou moins bien sur le sol. S'il a mal calculé sa vitesse et s’il n’a pas assez porté les pieds en avant au moment de la chute, il ne pourra rester sur place, mais devra courir pendant quelques pas, jusqu’à ce que cette vitesse soit éteinte. Pour le saut à la perche, fig. 20, iln’est pas moins facile d’en suivre les phases successives. Le coureur fiche en terre l'extrémité de sa perche, en même temps qu'il s’enlève du sol par une vigoureuse extension de la jambe. L'action combinée de cette impulsion verticale et de la vitesse horizontale fait que le corps décrit un arc de cercle dont la perche est le rayon. En continuant à suivre cette courbe, le corps retomberait au delà du centre du mouve- ment, à une distance égale à celle du point de dé- part; mais un artifice intervient qui permet à un bon sauteur d'augmenter beaucoup l'espace qu'il franchit. Cela consiste d’abord à allonger le rayon du cercle parcouru, en grimpant vers le haut de la perche au moment où elle passe par la verticale, puis à incliner le corps dans une direction pres- noir et portant sur les bras et les jambes des lignes brillantes, donne la fig. 21, pour un saut en hauteur précédé d’une course. Ici toutes les phases du mouvement s’échelonnent sans transition brusque, à cause du grand nombre d'images (25 par seconde) prises pendant la durée du saut. Afin de rendre plus instructives les chronopho- tographies du mouvement, il faudrait que ces images fussent prises sur les sujets les plus forts et les plus habiles, sur les lauréats des concours de gymnastique par exemple. Ces sujets d'élite livreraient ainsi le secret de leur habileté incons- ciemment acquise et qu’ils seraient sans doute incapables de définir eux-mêmes. La même méthode se prêterait également bien à l’enseignement des mouvements qu’on doit exé- cuter dans les différents travaux professionnels ; ils feraient voir en quoi le coup de marteau d’un forgeron habile diffère de celui d’un apprenti. Il en serait ainsi pour tous les actes manuels, pour tous les genres de sport. Ainsi, sur des séries de figures recueillies sur bandes pelliculaires en mouvement, 704 E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE on suit très bien la série des mouvements d’un homme qui monte sur son vélocipède ou qui en descend. Recueillies sous cette dernière forme, les images chronophotographiques peuvent être examinées avec le zootrope, ce qui en rend l'étude encore plus facile et plus précise. B. Etude dynumique des mouvements de l'homme. — Sur la plupart des figures que nous venons de passer en revue, les variations de vitesse du corps se traduisent par des différences d’espace par- couru entre deux images consécutives, c’est-à-dire dans des temps égaux ; on peut donc apprécier les accélérations et les ralentissements de la masse du corps. Or, comme la balance nous fait connaître cette masse, les chronophotographies sur plaque fixe renferment les éléments nécessaires pour apprécier les forces mises en jeu dans la loco- motion de l’homme, puisque ces forces sont pro- portionnelles aux masses en mouvement et aux accélérations qu'elles leur impriment. Mais, en pratique, il est assez délicat de déterminer la position de la masse, c’est-à-dire du centre de gravité du corps, aux différentes phases d’un mouvement; en revanche il est possible, dans cer- tains cas, d'obtenir une détermination expéri- mentale des forces mises en jeu. Cela s'obtient en combinant les indications d'un dynamomètre inscripteur avec celles de la chronophotographie. L'exemple suivant fera saisir cette combinaison. Supposons que nous désirions connaitre la force avec laquelle le pied presse le sol aux différents instants de sa période d'appui : nous recueillons en même temps les photographies partielles de la jambe pendant un demi pas (fig. 22) et d'autre part Fig..22— Chronophotographie partielle des mouvements du membre inférieur de l’homme dans la marche. le tracé du dynamomètre enregistreur de la pres- sion du pied (fig. 23). Il s’agit, pour résoudre le problème que nous ve- nons de nous poser, d'établir les coïncidences entre chacune des images chronophotogra- phiques et l’ordonnée qui lui correspondrait dans la courbe du dynamographe. A cet effet, comptons sur la figure 22 combien d’images correspondent à la période d’appui du pied; nous en trouvons 12. Il est clair que le tracé dynamographique, pris dans toute sa longueur, correspond à la durée des douze attitudes de la jambe à l'appui ; si done nous divi- sons l’abscisse de cette courbe en douze parlies égales et si nous traçons les ordonnées correspon- Fig. 23. — Tracé du dynamographe exprimant les phases de la pression du pied sur le sol dans la marche, dant à ces douze divisions, chacune d'elles expri- mera l'effort vertical exercé contre le sol pendant l'attitude correspondante de la jambe à l'appui. Des numéros d'ordre tracés sur chacune des deux figures en facilitent la comparaison. Nous n’entrerons pas dansle détail des différents problèmes de Mécanique animale qu'on peut ré- soudre ainsi. Nous avons fait sur ce sujet de nom- breuses expériences avec le concours de M. De- meny, notre préparateur à la Station physiolo- gique !. 99 Locomotion des quadrupèdes. — De tous les ani- maux quadrupèdes, c'est le cheval qui est le mieux connu au point de vue de la locomotion. Depuis longtemps des hommes spéciaux se sont appliqués à étudier ses allures, franches ou défectueuses, et à définir les caractères de chacune d'elles; ils ont ainsi acquis une habileté surprenante dans l’obser- 1 Cet établissement, créé au Parc des Princes, gräce au concours de l'Etat et du Conseil municipal de !a Ville de Paris, se prête à ce genre d’études qu'on ne saurait réaliser dans les laboratoires ordinaires. C’est un champ d’expé- riences comme il n’en existe encore nulle part : on y trouve une longue piste circulaire, parfaitement horizontale, de 500 mètres de circuit, sur laquelle l'homme et les grands animaux peuvent être étudiés dans leurs allures normales, Un champ obscur, de 11 mètres de largeur sur 4 de hauteur, permet d'appliquer la chronophotographie sur plaque fixe à l'analyse de mouvements très étendus. Un champ uniformé- ment éclairé et de pareille surface se prète à la chronopho- tographie sur pellicule mobile; des dynamomèêtres inscrip- teurs, des spiromètres, des compteurs de pas, des appareils divers pour la mensuration des sujets en expérience sont destinés aux études sur la locomotion de l'homme, D'autre part, des pneumographes, sphygmographes et cardiographes permettent de saisir les effets des exercices physiques sur les fonctions de la vie organique et de suivre pas à pas les pro- erès de l’entrainement des sujets. Enfin, des espaces spéciaux, servent à élever en liberté les différentes espèces d’animaux dont on veut étudier la locomotion, normale ou modifiée, E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 705 vation. Mais, si précis que soit le coup d’œil d'un homme exercé, il est encore insuffisant : nous n'en, voulons pour preuve que les incertitudes et les di- vergences d'opinion des différents auteurs sur les caractères et le mécanisme des allures de che-. val. Nous croyons avoir rendu à cet égard un service en appliquant à l'analyse des allures du . cheval et au mécanisme des transitions d'une al- lure à une autre, la chronographie ! d’abord, qui traduit avec une grande précision la succession des appuis et levés des pieds à toute allure. Mais c’est surtout la chronophotographie ? qui a donné la * connaissance complète des allures du cheval, déjà bien éclairées par les mémorables expériences de M. Muybridge. Et pourtant il reste encore bien des points à élu- cder relativement au mécanisme des actions du cheval,ainsi que des réactions qu'elles impriment à la masse du corps et à celle de son cavalier; enfin à la mesure des efforts exercés sur le sol aux diffé rents instants. Ici interviendra la chronophotogra- phie sur plaque fixe combinée à l’emploi des dynamomètres inscripteurs. On vient de voir (fig. 22 et 23), à propos dela loco- motion humaine, les précieux renseignements que donne la combinaison de ces deux méthodes pour étudier cetté fonction au point de vue dynamique. On arrivera sans doute à déterminer la manière dont les forces du cheval doivent être appliquées pour produire le maximum d'effet utile, ce qui est le but pratique de ce genre d’études. 3° Locomotion comparée chez les differents mamimi- fères. — On saitque l’'hommeetles autres mammi- fères présentent entre eux des analogies manifestes au point de vue de leur conformation générale. Les membres inférieurs de l'homme correspon- dent aux membres postérieurs des quadrupèdes, et dans toute la série des mammifères on peut re- connaitre dans ces membres des pièces homo- logues, osseuses ou musculaires, qui ne différent, d'une espèce à l’autre, que par leurs proportions relatives, leur développement inégal, la fusion, l’atrophie ou la déformation de certaines d’entre elles. Or, si l'anatomie comparée signale, dans la con- formation des diverses espèces d'animaux, ces analogies et ces différences de structure, c’est la physiologie comparée qui devra les expliquer. . La chronophotographie montre clairement com- ment se comportent, dans la marche, les diffé- renis segments des membres homologues de di- ‘ Les allures du cheval étudiées par la Méthode graphique. C.R. de l’Acad. des sciences. 4 nov. 1872. 2 Analyse cinématique des allures du cheval. Marey et Pagès C.R. 12 sept. 1885. — Ibid. 27 sept. 1888. REVUE GÉNÉRALE, 1891. vers animaux. Les figures 24, 25, 26, chronophoto- graphies partielles sur plaques fixes, représentent, réduits à peu près à la même échelle, les déplace- . 24. — Mouvements des divers rayons du membre inférieur de l’homme dans un pas de marche. ments des divers segments du membre postérieur pendant un demi-pas de marche, chez l'Homme, l'Éléphant et le Cheval. Elle montre qu'un même rayon osseux a des mouvements différents chez Fig. 25, — Mouvement du membre postérieur de l'éléphant. deux espèces différentes, c'est-à-dire qu'il prend une part inégale aux flexions et extensions aller- natives du membre. On conçoit alors pourquoi les muscles chargés de mouvoir ces rayons osseux présentent chez les divers animaux des diffé- Fig. 26. — Mouvement du membre postérieur du cheval. rences de longueur et de volume en rapport avec les mouvements qu'ils produisent. C'est en ana- lysant de cette manière les types de locomotion propres à un très grand nombre d’espèces ani- males qu'on aura les éléments nécessaires pour saisir les rapports qui existent entre la forme des DE E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE organes et les caractères de la fonction qu'ils ac- complissent !. Et si l’on revient alors à l'étude de l’homme, combien plus clairement n'apparaîtra pas la signi- fication des particularités individuelles dans la conformation du corps ! Les variétés dans la longueur des rayons osseux des membres ou dans le développement de cer- tains muscles, qui s’accentuent si fortement quand on compare entre elles différentes races d'hommes, rapprochent chaque type human de quelque espèce animale qui présente à un haut degré des caractères analogues. Si, par exemple, par le dé- veloppement des gastrocnémiens ou par celui des muscles extenseurs de la cuisse, un homme se rap- proche des animaux sauteurs, on en pourra con- clure, avec quelque vraisemblance, qu'il présente pour le saut des aptitudes spéciales, el ainsi du reste. Ici encore s'ouvre un vaste champ à explorer; nous y convions les zoologistes qui pensent que la comparaison des êtres vivants, au point de vue morphologique, doit s’éclairer par celle de leurs aptitudes fonctionnelles. NII. — APPLICATION AUX BEAUX-ARTS Dans les arts, le document photographique à déjà rendu des services réels : certains maitres l'acceptent ouvertement; beaucoup d'artistes l’uti- lisent, ainsi qu'on peut s’en assurer en comparant les œuvres les plus récentes à celles qui datent de quelques années à peine. C’est la photographie instantanée surtout qui a exercé une influence sensible sur les arts, en permettant de fixer en une image authentique les attitudes de l'homme ou des animaux dans leurs mouvements les plus ra- pides. Nous ne sommes pas qualifié pour parler ici d'esthétique, encore moins pour discuter la ques- lion de savoir si l’art a le droit de représenter les actions violentes, ou s’il doit se restreindre aux altitudes paisibles dont les caractères et les ex- pressions sont plus faciles à saisir sur le modèle vivant. Mais, si l’on s’en tient aux faits, il est incontes- {able que, dans l'antiquité aussi bien que de nos jours, les artistes ont maintes fois représenté le mouvement, même dans ses actions les plus rapi- des, telles que la course et le combat. Or, si l'on compare les œuvres les plus anciennes à celles d'époques plus récentes, on est frappé de cette différence, que chez les modernes les attitudes sont plus calmes, plus équilibrées, pour ainsi dire, 1 Voir Marey. Recherches expérimentales sur la morpholo- gte des muscles. C. R. 12 Sept. 1887. tandis que dans l'art antique, les figures sont parfois franchement hors d’aplomb. La figure 27 empruntée à l'art grec présente nettement ce caractère. Chacun a gardé le souvenir de quelque œuvre moderne représentant un sujetanalogue. En sculp- Fis. 27. — Ocydromes ou coureurs de vitesse : décoration d’un vase panathénaïque. ture surtout, les coureu*s sont tout autrement représentés : la jambe qui soutient le corps s’y voit ordinairement verticalement étendue au-des- sous du centre de gravité du corps. Entre ces deux manières de représenter le même acte, la course, il ne saurait être interdit de pren- dre pour arbitre la Nature elle-même et de deman- der à la photographie instantanée de montrer les vrais atlitudes d'un coureur. Fig. 28. — Photographie instantanée d’un coureur; la posi- tion des jambes est la même que sur la dernière image à gauche de la figure précédente. La réponse n'est pas douteuse : la figure 28, par exemple, montre qu’un homme qui court offre, à E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 707 certains moments, l’aspect représenté dans les plus anciennes peintures !. On pourrait démontrer que le coureur ne se pré- sente jamais dans la posilion adoptée par certains arlistes modernes qui semblent avoir oublié que le caractère de la course, et celui de la marche elle- même est une perpétuelle instabilité. Nous ne nous arrêterons pas sur ces réflexions. En critiquant sur des points de détail des œuvres qui d’ailleurs ont une valeur réelle, nous crain- drions l'avertissement : Ne sutor ultra crepidam. Faisons remarquer seulement que, dans l'infinie variété des at- tiludes que montre la chro- nophotogra- phie suivant les phases d’un mouvement, il en est cerlai- nement plu - sieurs que les artistes pour- raient accepter sans enfrein - dre les lois de l'esthétique ; cela donnerait à la représen- tation de ces mouvements une variété intéressante (fig. 29.).1ls trouveraient aussi dans ces images l'expression fidèle de l’action des muscles dont les reliefs va- riables, visibles sous la peau, traduisent les con- traclions et les relàächements. Or, ces deux états opposés des muscles sont liés par des rapports né- cessaires avec chaque phase du mouvement qu'ils produisent. Ces reliefs des muscles en action ont pour ainsi dire une physionomie propre, une expression pareille à celle que nous savons reconnaitre sur les muscles d'un visage. Et si les données les plus 1 Le groupe représenté sur le vase grec présente toutefois quelque chose de fort singulier dansles allures des coureurs. On sait que, dans toutes ses allures, l’homme déplace en sens in- verse le bras et la jambe du mème côté ; les mouvements du bras et de la jambe correspondants sont, comme on dit, asso- ciés diagonalement. Or, sur le vase dont nous reproduisons les figures, on voit partout que le bras et la jambe du méme côté se meuvent dans le même sens; cette allure, qui rappelle celle de l’amble des quadrupèdes, était-elle vraiment pratiquée dans les courses du stade? Est-elle due à une erreur de lar- tisan qui a décoré le Nous ne saurions trancher cette question. Cette manière de courir s’é entièrement de e toutefois pas impos- vase ? oisne nos habitudes modernes ; elle ne semb sible au point de vue physiologique. Le sujet mérite d’être étudié. subtiles de la physiologie pouvaient trouver leurs applications dans l’art, on pourrait dire que le modelé d'un membre ne traduit pas seulement l'acte qui s'exécute, mais permet jusqu'à un certain point, de prévoir les actes qui vont suivre. D'intéressantes observalions de M. Demeny sur les images chronophotographiques montrent que l'ex- tension d’un bras qui frappe, si elle doit s'achever complètement, s'accompagne du relächement com- plet des muscles fléchisseurs; ces muscles au con- traire entrent en jeu pendant l'extension même, si ce mouvement doit être borné : si, par exemple, l'homme qui frappe veut retenir tout à l'heure le Fig. 29. — Exemple du modèle obtenu sur épreuve chronophotographique. coup qu'il porte actuellement. En prenant d’un lieu élevé les images chronophoto- graphiques d'un hommeen mouvement (fig. 30), on a la projection, sur un plan ho- rizontal. de tous les tours con- de son corps. Ce docu- ment, de même que ceux que fourniraient des images a- | nalogues prises sous différents angles, serait sans | doute fort utile aux statuaires !. | Enfin, les mouvements du visage étudiés par la | chronophotographie présentent un grand intérèt, car on en peut saisir les nuances les plus délicates. Dans une série d'images recueillies sur pellicule mobile, on peut suivre, par exemple, toutes les nuances qui établissent la transition entre un sou- rire à peine perceptible et l'éclat de rire le plus franc. De récentes expériences de M. Demeny montrent même que les actes de la parole sont traduits si fidèlement, que des sourds-muets, habitués par des ! Depuis longtemps déjà, on a proposé sous le nom de photoseulpture un procédé pour reproduire mécaniquement les formes générales dun individu, On place le sujet au centre d’un cercle sur la circonférence duquel une série d’ap- parcils photographiques sont disposés. Chacun de ces appa- reils prend, au même moment,une image du sujet qui se trouve ainsi représenté sous des angles différents. Chacune de ces images, agrandie à l'échelle convenable et appliquée sur une lame de métal, est ensuite transformée en un sorte de ga- barrit. En faisant passer la matière plastique successivement par chacun de ces gabarrits présenté sous l’angle qui lui correspond, on obtient une maquette extrèmement précise. au point de vue de l'attitude et à laquelle la sculpture donnera le modelé définitif. 708 E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE exercices spéciaux à lire sur les lèvres les paroles prononcées, ont pu, d’après les images chronopho- Fig 30, — Coureur chronophotographié d’un lieu élevé en projection horizontale, tographiques, reconstituer les mots que le modèle avait articulés pendant la prise de ces images. Représentation artistique du cheval. — C’est en étu- diant consciencieusement la Nature que nos peintres et nos sculpteurs ont atteint une grande habileté dans la représentation du cheval. Pour ne citer qu'un des plus illustres, Meissonier n’avait pas reculé devant les plus laborieuses études. Assis au centre d’un manège que faisait tourner un cheval et ayant ainsi loujours l'animal devant lui, il des- sinait, à une phase constante de l’allure, la posi- tion d’un membre, puis d'un second, puis l'en- semble. C’est ainsi qu'il était arrivé à cette fidélité parfaite qu’on admire dans ses représentations du cheval au pas, au trot et à certaines phases-du galop. Aussi est-ce avec enthousiasme que Meissonier accueillit les belles séries de photographies ins- lantanées de Muybridge dont les peintres se sont depuis lors fréquemment inspirés. Sur les albums de M. Muybridge, le document authentique est livré à l'artiste avec une facilité singulière; les images, bien qu'obtenues avec des appareils mul- tiples, ne sont pas sensiblement affectées par la lifférence de perspective, parce que les appareils pouvaient être placés à une assez grande distance pour rendre ce défaut peu sensible. La chronophotographie sur bande pelliculaire en mouvement donne des images plus nettes en- core, à cause de l’extrème brièveté du temps de pose que seuls peuvent donner les obturateurs rotatifs. La fig.31, qui représente un cheval au petit galop, a été prise devant un champ obscur et sur un cheval blanc. Ces conditions n'étaient pas indis- pensables, puisqu'on peut également opérer sur un fond lumineux ; mais elles donnent aux images un modelé qui fait mieux ressortir les reliefs des muscles, des tendons, des veines même de la peau. Parmi les attitudes représentées, il en est une, image inférieure, qu'on rencontre fréquemment dans les frises du Parthénon; mais on en trouve Fig. 31. — Cheval au petit galop. La succession des images se lit de bas en haut. d'autres aussi que l’art n'avait pas encore représen- tées. Ces dernières seraient-elles défectueuses au E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 109 point de vue artistique? Nous croyons bien plutôt qu’elles n'avaient pas encore été aperçues par les artistes, et que si elles paraissent tout d’abord un peu étranges, c’est précisément par ce que nous ne sommes pas encore habitués à les voir repré- sentées. VIII. — LOCOMOTION AQUATIQUE Les animaux terrestres trouvent sur le sol un point d'appui solide; chez eux, les différents types de locomotion se rattachent toujours au méca- nisme suivant : Un effort plus ou moins brusque des membres tend à repousser le sol dans un sens, et le corps de l'animal en sens inverse; or, comme le sol présente une résistance à peu près absolue, c'est sur le corps de l’animal que se produit tout l'effet de l’action musculaire. Toute autre est la locomotion des animaux aqua- une résistance inégale dans les deux phases de leur mouvement : comatules, crustacés, etc. Progression par l'effet d’une onde qui se pro- page le long du corps en sens inverse de la trans- lation de l'animal : anguille et poissons allongés. Progression par chocs alternatifs d’une palette flexible : carinaria, nageoire caudale de la plupart des poissons. C'est l'invention de l'aquarium qui à permis d'étudier les différents types de la locomotion aquatique. Mais ici, comme pour les autres mou- vements des animaux, l’œil est souvent incapable de suivre les phases de ces actes rapides et com- pliqués. Voici ce que nous ont donné les premières tentatives d'application de la chronophotographie à ce sujet encore bien peu connu. Les manières d'opérer varient beaucoup suivant les circonstances. Fig. 32, — Méduse cheminant horizontalement en s’éloignant de l'appareil (image négative). tiques. Pour eux, le point d’appui est un liquide qui se déplace et consomme, en pure perte, une partie plus ou moins grande du travail musculaire dépensé, Tous les genres de propulseurs que l'homme croit avoir imaginés pour naviguer : voiles, rames, godilles se trouvent à un haut degré de perfection dans les organes locomoteurs des animaux aqua- liques. Et si l’hélice, en tant que mouvement ro- tatif, ne s'observe pas dans la nature organisée, du moins y trouve-t-on certains mouvements on- dulatoires du corps ou de la queue des poissons qui, au point de vue de leur fonction, ont certaines analogies avec l’action de l'hélice. En outre, les animaux aquatiques présentent de nombreux moyens de propulsion que l'homme n’a jamais employés et dont l'imitation pourra être tentée avec avantage. Sans prétendre faire l'énumération complète des divers modes de progression qu'on observe chez les êtres aquatiques on peut citer les suivants : Progression par réaction, lorsqu'un jet de li- quide est projeté par l'animal : poulpe, méduse, larves de certains insectes, mollusques bivalves. Progression au moyen d'organes qui trouvent Dans les cas les plus simples, or braque l’objec- tif sur un aquarium transparent enchässé dans l'é- paisseur de la paroi d’une chambre ; un réflecteur de toile blanche, convenablement incliné et rece- vant la lumière solaire, forme un fond lumineux sur lequel les animaux se détachent en silhouette. On recueille une série d'images sur pellicule mo- bile et l’on obtient la suite des attitudes qui corres- pondent aux phases successives du mouvement qu'on voulait connaître. La plus grande difficulté consiste à obliger l'animal à se mouvoir dans un espace restreint, afin qu’il ne sorte pas du champ qui projette son image sur la plaque sensible. Après avoir tracé sur la paroi de l'aquarium quatre lignes qui limitent l’espace visible dans les images, on guette l'instant où l'animal traverse ce champ. Pour peu que ce passage ne dure pas moins d’une seconde, il est facile de recueillir une série de 20 ou 30 images; cela suffit en général pour saisir les phases du mouvement!. La méduse (fig. 32) est assez facile à étudier ; la ! Comme les dimensions d’une page ne permettent pas de représenter des séries aussi longues, nous ne pourrons don- ner ici que quelques spécimens incomplets de ces images. 710 E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE transparence de ses organes fait que la silhouette montre quelques détails des organes intérieurs. réaction, propulsent l’animal en sens inverse. Si la méduse est verticalement orientée, la propul- sion se fait de bas en haut et l’animal s'élève; si elle est inclinée horizontalement, la propulsion se fait dans le sens horizontal : c’est ce qui a lieu fig. 32; la méduse nageait en s’éloignant de l’ob- servaleur. Cette disposition permet de voir com- ment les franges qui bordent l’ombrelle se retour- nent tour à tour en dedans ou en dehors suivant les mouvements de l’eau aspirée et refoulée alter- nativement. La comatule (fig: 33) présente un mode de locomo- tion fort curieux. Généralement fixée sur quel- que appui solide, comme une fleur sur la branche qui la porte, elle exécute avec ses bras des mouve- ments obscurs et très lents; mais si on la détache de son point d'appui, et si on l'irrite au moyen d’une baguette,onla voit,au bout d’un certain temps,agiter Fis. 33. — Comatule exécutant des mouvements pour s'élever au-dessus du fond de l’aquarium. La succession des images se lit de bas en haut. Au moyen d’une baguette plongée dans la- quarium, on amène la méduse dans le champ sur RANAAAAAEANA Fig. 34. — Anguille se déplacant dans un plan horizontal. Une ligne horizontale 00 sert de repère pour apprécier l’obli- quité des lignes qui joignent les ventres et les nœuds des ondes formées par le corps, ainsi que la vitesse de progres- sion de l’animal, exprimée par l’obliquité de la ligne 04. ses bras d’un mouvement rapide qui a pour effet de transporter l'animal loin des contacts impor- tuns. De même que pour la méduse, la transla- tion a lieu dans le sens de l’axe du corps : si la comatule incline obliquement son calice, elle se transporte obliquement. Dans le cas représenté ci- contre (fig. 33) l’animal cherchait à s'élever du fond de l'aquarium. Voici le mécanisme dela propulsion. Les bras de la comatule sont au nombre de 10; il y en a tou- jours cinq qui s'élèvent et cinq qui s’abaissent. Fig. 35, — Allure quadrupède d’une tortue d’eau qui nage en montant. lequel l'objectif est braqué; on la voit alors exécuter des contractions et des relàchements alternatifs de son ombrelle; ces mouvements chassent, à chaque fois, un certain volume d’eau et, par la Deux bras consécutifs sont animés de mouvements contraires; ceux qui s'élèvent se rapprochent de l'axe du corps, ceux qui descendent s’en éloignent. Enfin, penaant la phase d'élévation de chaque E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 711 membre, les cirres sont invisibles, accolées qu’elles sont par la résistance de l’eau sur le bras auquel elless’'implantent; dans la phase descendante, au contraire, ces cirres s'écartent, el trouvent sur l’eau une résistance qui sert de point d'appui pour la locomotion de l'animal. L'anguille (fig. 34), et les poissons qui ont une structure analogue, progressent par l'effet d'un mouvement d’ondulation du corps; cette onde se propage de la tête à la queue. Il nous à semblé que ces poissons, lorsqu'ils veulent reculer, don- nent à leur mouvement onduleux une direction contraire, c’est-à-dire que l’onde chemine de la queue à la tête. Mais ce mouvement est difiicile à provoquer et nous n'avons pas encore pu le fixer par la chronophotographie. C’est l'onde rétrograde produisant la progression de l'animal qui, dans la figure 34, est représentée en projection horizon- tale. Les distances entre les images étant égales el correspondant à des intervalles de temps égaux, 1/10 de seconde, il est facile, au moyen d’une cons- truction fort simple, d'apprécier la vitesse de l'onde et celle de l’anguille elle-même. Une ligne horizontale 0 o représente, sur Loutes les images, la position où se trouverait l'extrémité antérieure de la tête si l’anguille n’avait pas pro- gressé ; or, on voit qu'à la cinquième image comp- lée de gauche à droite, c'est-à-dire au bout d’une demi-seconde, l'anguille a progressé de plus du quart de sa longueur, soit environ 075, ce qui donnerail 15 centimètres à la seconde. D'autre part les lignes p', p?,... n! n°... qui joi- gnent entre eux les ventres et les nœuds d'une même onde dans la série des images ont, par rap- port à la ligne 00, une obliquité qui exprime la vitesse de ces andes et permet de la mesurer. Il résulte de cette mesure, que la marche de l’onde d'avant en arrière est un peu plus rapide que la progression de l'animal ; il y aurait doncici, comme dans l’action de l’hélice d'un navire, un léger recul qui tient à la mobilité du point d'appui. Nous avons étudié de la même manière la rep- tation de diverses espèces de serpents, soit sur terre, soit dans l'eau ; la reptation des uns et la na- tation des autres présentent de grandes analogies avec la natation de l’anguille, mais nous n’y avons pas trouvé la même régularité des mouvements. Les tortues d'eau offrent différents modes de natation : tantôt c’est une sorte d’allure quadru- pède avec association diagonale du mouvement des membres, comme dans le trot d’un animal; c’est ce qui estreprésenté figure 35. Chez les espèces exclu- sivement marines, les pattes affectent la forme de nageoires, ou mieux d’ailes rudimentaires, et les mouvements des membres antérieurs sont parfois symétriques comme ceux des ailes d’un oiseau. Il en | résulte une espèce de vol dans l’eau analogue à ce- lui des pingouins. Ce genre de locomotion, que - Œ Fig.36.— Phases du mouvement d’une astérie qui se retourna nous n'avons pas encore eu l'occasion d'étudier E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE par la chronophotographie, rapproche, par les ana- | logies fonctionnelles, les chéloniens et les oiseaux, déjà si voisins par leurscaractères morphologiques. | Les mouvements très lents de certains animaux aquatiques, faciles à étudier au moyen d'images étudier de près, il faut recourir à une disposition particulière. On forme, avec deux glaces lutées au mastic, un petit aquarium dont les dimensions soient égales à celle du champ que devra couvrir l'image, et l’on place l’animal (une crevette, par Fig, 37. — Mouvements des pattes d’une crevette. successives, présentent également un grand in- térêt. Rien n'est plus curieux que d'assister aux évolutions par lesquelles une asférie qu'on a re- tournée sur le dos travaille à se remettre sur le ventre. Elle y arrive (fig. 36) par des merveilles d'équilibre. On la voit glisser peu à peu l’un de ses rayons sous son corps, tandis qu’elle en sou- lève deux autres, jusqu'à ce que son centre de exemple, fig. 37), dans cette petite caisse remplie d'eau de mer. En recueillant sur pellicule mo- bile les images successives qui se détachent en silhouette sur un fond lumineux, on oblient la série des mouvements des membres; ceux, par exemple, qu'exécutent les pattes pour seconder la respiration. Nous décrirons plus loin une disposi- tion analogue pour l'étude du vol des insectes. Fig. 38. — Trajectoire de l'extrémité de l’aile d’une corneïlle. Une paillette brillante attachée à la 2€ rémige suivait le parcours indiqué par de petites flèches courbes. En bas de la figure une flèche droite et horizontale exprime la direction du vol. gravité se trouve en dehors de sa base de susten- | tation. Alors, tout à coup, perdant l'équilibre, elle | tombe sur sa face ventrale; elle n'a plus ensuite qu'à étendre graduellement ses rayons pour être dans son altitude normale, et progresser sur le fond de l'aquarium par le mode de reptation qui lui est propre. | Ce mouvement produire, et exige de dix à vingt minutes d’ordi- naire ; aussi doit-on, pour en rendre les phases sai- | de culbute est assez long à se sissables, laisser environ une minute d'intervalle | entre deux images successives. | | Pour les très petits mouvements, qu’on doit | IX. — LOCOMOTION AÉRIENNE 1° Vol des oiseaux. — Le mouvement des ailes de l'oiseau qui vole, bien plus rapide encore que celui membres des quadrupèdes, échappe presque entièrement à l'observation. A peine l'œil entrevoit-il certaines attitudes qui durent un peu plus longtemps que les autres. C’est précisément ces phases du coup d’aile que les artistes repré- sentent : en Europe, ils figurent généralement l'oiseau avec les ailes élevées; au Japon, suivant la juste observation de M. Muybridge, la phase d'abaissement des ailes est tout aussi fréquem- des E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 113 ment représentée. Mais les atlitudes intermé- diaires des ailes sont restées inconnues jusqu'à l'emploi de la chronophotographie qui en traduit exactement la succession. Dansil'analyse des mouvements du vol, on doit, de lumière intermittentes on eût obtenu la même trajectoire sous forme de points successifs dont l'écartement, variable à chaque instant, eûl ex- primé les variations de la vitesse de l’aile aux dif- férents instants de son parcours. Fig. 39, — Vol d’un héron aigrette. Une échelle métrique, au bas de la figure, permet d'évaluer la vitesse de l'oiseau (5 images par seconde). suivant le but images, soit sur une plaque fixe, soit sur une qu'on se propose, recevoir les bande pelliculaire animée de translation. La première méthode se prête à l'inseription de la trajectoire de la pointe de l'aile d'un oiseau (fig. 38). Une corneille volait devant un-fond La même méthode s'applique encore à prendre une série d'images complètes d’un oiseau blanc qui vole devant un champ obscur, pourvu qu'on n'ait pas besoin d'un très grand nombre d'images en un temps donné. Avec cinq images par seconde, on à obtenu la fig. 39, montrant un héron qui Fige 40. — Vol du canard. Des fils verticaux, écartés entre eux d’un mètre, permettent d'évaluer la vitesse du vol. L’abais- sement de l'aile se prononce de plus en plus dans lés images suivies de droite à gauche. (5 images par seconde). obseur ; elle portait, à l'extrémité de l’une des pre- mières rémiges, une paillette métallique qui bril- lait au soleil. La trajectoire singulière décrile dans l’espace représente le mouvement assez compliqué résultant de la rotation de l'aile autour de l’articu- lation scapulo-humérale et des flexions et exten- sions des différents segments du membre. Cette trajectoire a été obtenue avec ouverture permanente de l'objectif photographique; aussi est-elle continue. En produisant des admissions vole à rames et dont les ailes se montrent alternati” vement dans leur position d’élévation et d’abais- sement extrêmes. On voit nettement que l'aile, au moment de son élévation la plus grande, se trouve fortement portée en arrière; elle est au contraire très porlée en avant dans sa phase d’abaissement, On a photographié dans des conditions sem- blables le vol du canard (fig. 40). Ici le nombre des images est voisin de celui des coups d'ailes, de sorte que l'oiseau est représenté dans une série 714 E.-J. MAREY. - LA CHRONOPHOTOGRAPHIE d'attitudes assez rapprochées les unes des autres. On observe d’abord l’abaïissement complet des ailes, puis des degrés de moins en moins prononcés de cel abaissement, jusqu’à la dernière image qui le montre avec les ailes en élévation. L'ordre de sue- cesion doit donc se lire de droite à gauche, Pour rendre plus intelligibles les mouvements de l'aile d'un oiseau, il faut aussi pouvoir en prendre les images d’un lieu élevé, comme on l'a fait pour l'homme dans la figure 29. Un pigeon dont les chronophotographies ont été prises ainsi, d’en haut, a donné la figure A où, malgré la superposi- lion partielle des images, on peut suivre les vol appelé vol plané, dans lequel ils glissent sur l'air sans donner de coups d'ailes. Des appareils nommés aéroplanes imitent ce glissement dans l'air et exéculent des planements d'un assez grande étendue. Ces différentes sortes de machines, lorsqu'elles évoluent dans l'air, sont aussi difficiles à observer que les oiseaux véritables ; il est donc très utile de recourir à la chronophotographie pour apprécier la façon dont s’exécutent, soit leurs battements d'ailes, soit leurs glissements sur l'air, La figure 42 représente un petit appareil planeur en carton qui tombe d’un lieu élevé et décrit des courbes alter- Fig. 41. — Pigeon qui vole; les images sont prises d’un lieu élevé, — _ Chronophotographie sur plaque fixe (25 images par seconde), »hases du coup d’aile, d'aprèsles attitudes projetées ! sur un plan horizontal. On conçoit que la combi- naison d'images d'un même oiseau, projetées sur trois plans perpendiculaires entre eux, donne des renseignements suflisants pour construire des figures en relief de cet oiseau; celles-ci rensei- gnententièrement sur ses attitudes successives aux différents inslants du vol. C'est ce que nous avons fait et décrit dans un ouvrage spécial sur la physio- logie du vol des oiseaux !. Si l’on trouvait insuffisant le nombre des images données par la chronophotographie sur plaque fixe, on recourrait à l'emploi de la pellicule animée de translation; cela permettrait de recueillir jus- qu'à soixante images distinctes par seconde. Ces études sur le mécanisme du vol des oiseaux. en dehors de l'intérêt qu’elles présentent au point de vue physiologique, conduiront à certaines applications pratiques. Elles montrent comment on pourrait construire des appareils capables de se transporter dans l'air. Or, on sait que, dans ces der- nières années, on a déjà réussi à construire de petites machines qui battent des ailes et volent à la facon d'oiseaux, exécutant un parcours de 10 à 20 mètres. Les oiseaux, d'autre part, ont un autre forme de l Le Vol des oiseaux, Paris, G. Masson, 1889. nalivement concaves et convexes, sous les in- fluences combinées de la pesanteur et de la résis- tance de l’air. Cette trajectoire, dont l’œil ne saurait suivre les inflexions ni les variations de vitesse, Fig. 42. — Reproduction schématique de la trajectoire chronophotographique d’un appareil planeur décrivant dans l'air une courbe sinueuse (20 images par seconde.) est exprimée, dans tous ses détails, sur la figure ci-contre où les images sont prises à raison de 20 par seconde. L'écartement variable des images sucessives permet d'apprécier la vitesse du mo- bile et ses variations, ainsi que les inclinaisons diverses de l'axe de ce mobile sur sa trajectoire. Toutes ces inflexions s'expliquent assez bien au- jourd'hui par les lois de la résistance de l'air contre les plans inclinés !. 1 Voir le Vol des oiseaux, p. 293 et suivantes. E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 71 © 2° Vol des insectes. — Le vol des insectes diffère profondément de celui des oiseaux, au point de vue de son mécanisme. Nous croyons avoir dé- montré que ce vol présente de grandes analogies avec la fonction d’un propulseur que certains bate- liers emploient et qu’on appelle la yodille. L'aile de l’insecte, dans son battement rapide, décrit en effet dans l'air la même trajectoire que la godille dans l’eau. L'action propulsive est, dans les deux cas, la même : celle d’un plan incliné qui se déplace dans un fluide; l'effet en est compa- rable à celui de l’hélice ?. Mais sile mécanisme du vol des insectes est aujourd'hui connu dans ses caractères essentiels, bien des détails manquaient encore, que l’obser- valion élait impuissante à saisir, car la fréquence laquelle se voit l’insecte maintenu captif à l’extré- milé d’une pince. Le faisceau concentré traverse la première lentille de l'objectif, et ses rayons con- vergent sur les disques obturateurs: ils traversent ces disques au moment de la coïncidence des fe- nètres et vont former sur la pellicule sensible un champ lumineux au milieu duquel se détache en silhouette l’image de l’insecte. Le vol captifque l’on oblient avec ce mode de contention de l’insecte ne réussit pas pour toutes les espèces; il permet, il est vrai, d'orienter à vo- lonté l'animal et de saisir les attitudes de ses ailes sous différents aspects; mais il donne lieu à des mouvements d'une amplitude et d’une rapidité exagérées. Pour étudier le vol normal, on dispose, en avant Fig, 43. — Disposition théorique de l'éclairage employé pour étudier le vol des insectes. des battements de l'aile des insectes est extrême. Nous avons pu constater par l'inscription directe que certains d’entre eux donnent jusqu’à 300 coups d'aile par seconde et ce n'est certainement pas la limite de fréquence de ces mouvements. Malgré les difficultés du problème, on pouvait espérer que la chronophotographie arriverait à saisir les phases du coup d’aile d’un insecte: mais il était probable qu'il faudrait encore diminuer le temps de pose, déjà réduit à 14/2000 de seconde dans les expériences sur le vol des oiseaux. Or, comme il était à craindre qu'avec des poses si courtes l'éclairage ne devint insuffisant, on devrait diriger sur l'insecte de la lumière extrêmement concentrée. La figure 43 représente théoriquement la dispo- sition : laquelle nous avons eu recours. On y voit de droite à gauche: en premier lieu, le faisceau de lumière parallèle qu'un héliostat dirige suivant l'axe optique principal du photochronographe. Ce faisceau est concentré par une lentille C? derrière 1 Voir Marey. La Muchine animale. ? La longueur focale de cette lentille doit être au moins double de celle de l'objectif. de l'objectif, une boîte de carton fermée en avant par une glace qui vient toucher la lentille-con- densateur. Introduit dans cette boite, l’insecte va aussitôt voler contre la vitre qui a été mise préala- blement au foyer de l'objectif. Du reste, on sur- veille la manière dont s'accomplit le vol et, au mo- ment voulu, on presse le bouton qui met en marche la pellicule sensible. C’est ainsi qu'a été obtenue la figure 44. Une grande brièvelté des temps de pose était nécessaire pour obtenir des images nettes des ailes de l’insecte, à cause de l'extrême rapidité de leurs mouvements. Avec des fenêtres de 2 centimètres de largeur dont les coïncidences donnaient des éclairemenls de = de seconde, les images n'étaient pas nettes, du moins pour l'extrémité des ailes. Nous avons graduellement réduit le diamètre de ces fenêtres, en les remplaçant par des rideaux de métal percés de fentes étroites dirigées suivant les rayons du disque. Ces fenêtres, n'ayant que 4%" 5 de largeur, leur coïncidence réduisit la durée de l’éclairement à 1/25000 de seconde. L'insecte qui vole contre la vitre occupe, en pro- fondeur, un espace assez grand ; il faut done, pour 116 E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE que toutes les parties de son corps soient nette- ment représentées, que l'objectif ait une grande profondeur de foyer. Or, il arrive précisé- ment que l’extrème étroitesse des fentes par les- quelles doit passer la lumière, au centre de l'objectif, constitue un excellent diaphragme qui donne au foyer plus de deux centimètres de pro- fondeur *. X. — PHOTOGRAPHIE DES MOUVEMENTS DANS LE CHAMP DU MICROSCOPE Les mouvements des êtres microscopiques sont particulièrement difficiles à suivre : leur rapidité est en général si grande que, dans bien des cas, ments très rapides, on doit donner aux temps de pose une extrême brièveté. IL fallait donc que l’objet à photographier fût soumis à sant éclairage. Mais l’action prolongée d’une lumière très con- centrée, et surtout celle de la chaleur qui l’accom- pagne, allèrerait bien vite les petits êtres qui se meuvent dans la préparation microscopique. Pour éviter ce danger nous avons recouru à la disposi- tion que voici : La lumière, très concentrée, n’est projetée sur la préparation que d’une manière intermittente et pendant des temps très courts, généralement infé- rieurs à 41/1000 de seconde. Le chronophotographe un {rès puis- is À Lie RE Ù Es | Fix. #4, montrant deux fipules, dont l'une est immobile et posée contre une vitre, pendant que l’autre vole au-dessous d'elle, en agitant ses pattes de diverses manières et en donnant à son corps des inclinaisons variées. laire. les organesmoteurs sont Lout à fait invisibles. Aussi, la translation de infusoires a-t-elle quelque chose de mystérieux ; ce n’est qu’en tuant l'animal qu'on apercoit nettement des cils vibra- liles, ou des organes du même genre, que leur agi- tation rapide empêchait d'apercevoir. certaines Il se passe dans le champ du microscope une in- finité de mouvements des plus curieux, mais dont l'analyse par la chronophotographie présentait quelques difficultés. En premier lieu, l'agrandissement considérable des images entraine une diminution proportion- nelle de l'intensité de la lumière qui agit sur chaque point de la plaque photographique. D'autre part, pour obtenir des images nettes de mouve- 1 Nous nous proposons de modifier les conditions de l'ex- périence et d'établir un système d’éclair des insectes qui les rende lumineux devant un champ obscur. On se trouvera ainsi dans les conditions de la chronophotographie sur plaque fixe et l’on pourra suivre avec plus de précision les phases, si tugitives, d’un coup d’aile de l’insecte, Cette figure est un fragment d'une longue bande pellicu- se prête aisément à cette disposition : il suffit de placer l'objet à photographier en arrière des dis- ques oblurateurs ; ceux-ci ont dès lors pour fonction de couper le faisceau de lumière concentrée et de ne le laisser arriver sur la préparation que pendant les courts instants de la coïncidence des fenêtres. La figure 45 montre, dans ses principaux détails, la pièce spéciale qui s'adapte au chronophotogra- phe pour l’analyse des mouvements microscopi- ques. Une caisse de bois, ouverte à sa partie cen- trale, s'adapte à glissière sur l’avant-corps de notre appareil à la façon des boîtes à objectifs déjà dé- crites. Cette caisse porte, en avant, un objectif G qui ne sert qu'à condenser la lumière envoyée par un héliostat. Le foyer de ce condensateur vient se for- mer sur la platine p à l'endroit même où sera placée la préparation. Pour la mise au point, on règle la position de la platine porte-objet, d'abord au moyen du bouton B qui commande une crémaillère, puis avec la longue tige » v qui commande la vis mi- crométrique. E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 717 L'objectif microscopique O est braqué sur la préparation ; en arrière de cet objectif, les rayons qui portent l’image traversent une boite cubique de mélal, puis, se continuant à travers la caisse de bois dans le soufflet qui s'y adapte, arrivent enfin sur la glace dépolie de la chambre aux images ‘. Sur le côté de la caisse mélallique, est oblique- ment implanté un tube de microscope avec son oculaire. Une disposition introduite par M. Nachet permet d'envoyer à volonté l’image, soit sur le verre dépoli, soit dans le microscope; elle consiste dans l'emploi d’un prisme à réflexion totale que On tire alors sur le bouton du prisme et l’on met l'appareil en marche !. La figure 46 montre, à un grossissement considé- rable, plusieurs Vorticelles attachées à des fila- ments de Conferves. Pendant la succession des dix images représentées sur la figure, plusieurs Vorticelles exécutent des mouvements ; leur style se rétracte et les tire obliquement en bas et à droite. Ce mouvement, trop brusque pour que l'œil puisse le saisir, peut être suivi, dans ses phases, de la facon suivante : Prenons pour points de repère les fibres de Con- Fig. 45. — Pièce spéciale qui s'ajoute au chronophotographe pour étudier les mouvements des êtres microscopiques. l'on met en mouvement au moyen du bouton P. En pressant sur le bouton, on avance le prisme et on rejette l’image de la préparation dans le micros- cope ; en tirant sur le bouton, on éloigne le prisme et l’image va se former directement sur le verre dépoli ou sur la plaque sensible. Comme il serait impossible de rechercher les points intéressants de la préparation lorsqu'on est placé à l'arrière de l’appareil pour regarder l’image sur le verre dépoli, cette recherche se fait en regar- dant par l’oculaire du microscope qu'une lentille de correction permet de régler de telle sorle que les images soient exactement au point dans le mi- croscope et sur la plaque sensible. Tout étant préparé pour les photographies sur pellicule en mouvement, on vérifie par l’oculaire du microscope si la mise au point est exacte, et si les mouvements se produisent à l’endroit voulu. 1 Voir ci-dessus la description de cette chambre, p. 695. ferves qui s'entrecroisent sur la préparation; nous voyons une fibre transversale croisée par trois fibres verticales et formant avec elles des compar- liments à peu près rectangulaires. Dans le plus grand de ces compartiments se voient deux Vorti- celles munies de leurs styles contournés en spi- rales. Ces deux Vorticelles se meuvent, car on peut constater que, de la première à la dernière image , elles s'approchent graduellement de la fibre trans- versale et de l'angle inférieur droit du comparti- ment qui les renferme ?. l Pour pouvoir opérer sansle secours d’un aide qui tourne la manivelle du rouage, nous avons mis celui-ci en rapport avec un barillet à ressort et avec un volant régulateur. On embraye le volant, on remonte le barillet, et tout est prèt pour que l'appareil se mette en marche dès que le volant sera rendu libre. Lors donc qu'on à constaté, en regardant par le microscope, que la préparation est bien au point, on n’a plus qu’à tirer le bouton du prisme et à lâcher le volant pour que appareil se mette en marche et que les images se prennent. . ? Le procédé de gravure qui a servi à reproduire ces images ne se prête pas à rendre la pureté des détails que 718 E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE Cet exemple n’est peut-être pas un des plus in- téressants qu'on puisse choisir pour montrer les applications de la chronophotographie aux mou- vements des êtres microscopiques ‘. Mais nos expé- riences ne sont encore qu'à leur début, et nous nous proposons de les poursuivre. Nous espérons surprendre ainsi les mouvements des globules du sang dans les vaisseaux capillaires, les actes in- times de la contraction de la fibre des muscles et des ondes qui les parcourent; enfin, les mouve- ments des cils vibratiles et, en général, des organes qui servent à la locomotion des infusoires, etc. Nous ne doutons pas non plus qu'il ne soit pos- sible d'appliquer aux êtres microscopiques la chro- très faciles à déterminer expérimentalement par la chronophotographie. Choisissons pour exemple l'expérience de Galilée sur les lois du mouvement d’un corps qui tombe sous l’action de la pesanteur. Il a fallu au grand physicien de Florence un effort de génie pour trouver le moyen de réduire la vitesse du mouvement, à l’aide du plan incliné, sans en al- térer les caractères, et pour en rendre saisissable l'accélération uniforme. Ce même problème, traité par la chronophotographie, peut se résoudre de la facon la plus simple, sans aucun dispositif spécial. On place une échelle au-devant du champ obscur et l'on prend dans sa main une boule pesante nophotographie sur plaque fixe, en se servant d’un éclairage oblique, du système imaginé par M. Na- chet, qui montre les objets lumineux sur fond obscur. XI. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE APPLIQUÉE AUX SCIENCES PHYSIQUES Pour terminer cette revue déjà longue des appli- cations de la chronophotographie, nous n'ajoute- rons que quelques mots, destinés à montrer le parti qu'on en peut tirer pour étudier le mouve- ment dans le monde inorganique. La Cinémalique et la Dynamique trouveront un auxiliaire puissant dans emploi de notre méthode. Les mémorables expériences de Galilée qui ont déterminé les lois de la chute des corps peuvent être considérées comme le point de départ de la Mécanique scientifique. C’est en généralisant ces lois, et en les appliquant à toutes les forces qui agissent sur la matière, qu'on a créé la Dynamique. Or, les mouvements si compliqués des masses sou- mises à différentes forces, s'ils sont parfois diffi- ciles à déterminer par le calcul, sont en général présentait la préparation et qui se retrouvait sur les clichés originaux. 1 Nous avons également obtenu d'assez bonnes images du mouvement des globules du sang dans les vaisseaux capil- laires, et de la croissance des cristaux arborisés dans des so- lutions saturées. is. 46, montrant les mouvements de Vorticelles qui rétractent leur style en spirale. La succession des mouvements se lit de gauche à droite. blanchie à la craie: on laisse tomber cette boule d'une certaine hauteur, tandis que l'appareil chro- nophotographique en recoit les images sur plaque fixe. Ne voit-on pas dans la fig. 47 la série des po- silions occcupées par le mobile à chacun des ins- lants successifs (à chaque 40° de seconde)? Et n’est- il pas facile, au moyen, d’une échelle métrique, de comparer entre eux les espaces parcourus dans ces unités de temps successives ? L'expérience, il est vrai, a été réalisée dans des conditions assez grossières !, mais on pourrait y introduire toute la précision désirable. La même méthode pourrait servir à déterminer les lois de la résistance de l’air agissant sur des mobiles de différentes formes et de différentes den- silés. ) En général, tous les mouvements des corps soumis à différentes forces peuvent s'inscrire d'eux-mêmes par la chronophotographie sur pla- que fixe. Les phases de l’oscillation du pendule simple, celles du pendule composé; la trajectoire d'un projeclile unique, ou celle de projectiles de masses différentes reliés entre eux ; la composition des mouvements de rotation et de translation, elc.; l Les intervalles de temps sont trop courts; on n’a pas photographié la règle métrique dans le plan où se produit la chute du mobile; l'ombre des barreaux de l’échelle se projette sur le mobile et en rend parfois la position indé- cise, etc. E.-J. MAREY. — LA CHRONOPHOTOGRAPHIE 719 tout cela se traduit sur les images dans sa forme la plus expressive, celle d'une figure géomé- trique. Il serait même possible, en recueillant par cette méthode des images stéréoscopiques, d'exprimer les caractères d’un mouvement qui se produit sui- vant les trois dimensions de l’espace. En pratique, notre méthode offre de grands avan- tages pour contrôler la marche des machines et FE [4 € : cs A F t c. , or - € € ps € € e LC] 13.2 9 4 Fig. 47. — Phases du mouvement d'un corps qui tombe étudiées par la chronophotographie sur plaque fixe. pour s'assurer qu'elles ne présentent pas dans leur fonctionnement quelque défaut qu'on n'a pas su prévoir. Une des grandes préoccupations de notre époque est la construction de machines vo- lantes capables de se transporter dans l'air et de s’y diriger. Dans les essais fort nombreux qui ont été faits jusqu'ici, les appareils se sont souvent mal comportés et se sont parfois brisés dans leur chüle sans qu'on ait eu le temps de saisir le vice de leur fonctionnement. Étudiées par la chrono- photographie, ces machines eussent révélé tous les détails de leurs mouvements el défauts qui ont occasionné la chute. Rappelons à cet sur la translation du petit appareil planeur. On eût pu s'attendre à ce que l'appareil décrivit dans l'air une trajectoire plus simple. Les courbes ondu- leuses qu'il a suivies, et dont une seulement se voit sur la figure, montrent que, d’après la loi de montré les égard l'expérience Joëssel, le centre de pression de l'air contre un plan qui suit une trajectoire oblique se déplace en raison de la vitesse et produit des changements d'orientation du mobile qui se corrigent et se reproduisent d'elles-mêmes d'une façon pério- dique !, Il n'est pas jusqu'au domaine de la Géométrie qui ne soit, à certains égards, accessible à la chro- nophotographie. On considère la plupart des figures de la Géométrie dans l’espace comme en- gendrées par le mouvement de lignes ou de points qui se transportent en sens divers. Ainsi, un cône esl engendré mouvements d’une droite qui décrit un cercle par l’une de ses ex- trémités, tandis que l’autre est fixée en un point par les d'une perpendiculaire élevée au centre de ce cercle. Cette genèse peut être réalisée d'une manière concrète en photographiant sur plaque lixe les images d’un fil blanc qui se meut devant un fond noir suivant les conditions ci-dessus indiqués. Des conoïdes sont engendrés par le mouvement d’un fil qui se meut circulairement à l’une de ses extrémités, tandis que l’autre se dé- place en ligne droite. On obtient une cycloïde en faisant rouler devant le champ obscur un cercle noir qui porte un point lumineux, etc. Pour toutes ces applications si variées, le chro- nophotographe n'exige aucune disposition spé- ciale, sauf parfois le changement d'objectif, lorsque les dimensions de l’objet qu'on étudie et la dis- tance à laquelle il se trouve rendent ce change- ment nécessaire. En rapprochant, comme il est naturel de le faire, la chronophotographie des autres formes de la Méthode graphique, nous lui avons attribué une supériorité sur ces dernières dans beaucoup de cas. En effet, cette méthode est plus simple, chaque fois qu'on peut recueillir sur une plaque fixe, et par une opération toujours la même, la succession des phases d’un phénomène. Elle est plus puissante, puisqu'elle aborde des phénomènes d’une plus grande complexité. Elle est plus sûre, car, à l’in- verse des procédés mécaniques d'inscription des mouvements, elle n'emprunte rien à la force dont elle étudie les effets et n’en altère en rien les mani- festatations. Enfin elle est plus générale, et nous croyons avoir montré par des exemples assez nom- breux qu’elle s’applique également aux sciences physiques et aux sciences naturelles. E.-J. Marey de l'Académie des Sciences, 1 Voir le Vol des Oiseaux, p. 305. 120 L. LINDET. — LES PRODUITS FORMÉS PENDANT LA FERMENTATION ALCOOLIQUE LES PRODUITS FORMÉS PENDANT LA FERMENTATION ALCOOLIQUE LEUR ORIGINE; LEUR INFLUENCE SUR LA QUALITÉ DES BOISSONS FERMENTÉES Lavoisier annonça en 1789 que, sous l’influence d'un ferment qui est aujourd'hui pour nous la levüre, le sucre se dédoublait en alcool et en acide carbonique. Gay-Lussac, en 1815, reprenant la découverte de Lavoisier, sut montrer que les quan- tités de l’un et de l’autre corps élaient sensible- ment égales, et que leur somme représentait à peu de chose près le poids du sucre décomposé. Il se crut donc autorisé à mettre ce dédoublement sous la forme d’une équation chimique, dont la science s’est contentée pendant longtemps. Le grand nombre de corps découverts depuis dans les produits de la fermentation, la forme nouvelle sous laquelle la science envisage aujour- d'hui ce phénomène, nous interdisent de le repré- senter avec une semblable précision. À côté de l’alcool et de l'acide carbonique sont venus en effet dans l'équation de Gay-Lussac s’in- troduire bien des termesnouveaux : ce sont d’abord la glycérine et l’acide succinique, que M. Pasteur a retrouvés d’une façon constante dans tous les produits fermentés; ce sont l’aldéhyde, l’acide acétique, etmême des acides gras supérieurs, dont l'existence a été constatée par MM. Duclaux, Schutzenberger, Béchamp, etc; ce sont des alcools supérieurs (alcool propylique, isobutylique, amyli- que, isolés parChancel, Wurtz, Isidore Pierre, etc.); ce sont des glycols et spécialement le glycol iso- butylénique ; ce sont des composés basiques, découverts par MM. Kræmer et Pinner, et étudiés par M. Morin. Il convient enfin de faire figurer, pour une certaine part, dans les produits nés de la fermentalion, comme l’a montré M. Pasteur, la levüreelle-même, dont la partie hydrocarbonée s’est formée aux dépens du sucre. Dans les théories actuelles de la science, basées sur les travaux de MM. Pasteur, Schutzenberger, Béchamp, Duclaux, Nœgeli, Laurent, etc., la fer- mentalion alcoolique n’est plus un simple phéno- mène de dédoublement de la molécule sucrée sous l’action de présence de la levûre, mais constitue un acte biologique, dont les conséquences sont su- jettes à toute la complexité, à toutes les variations auxquelles la physiologie végétale nous a habitués. Devant cette double considération, comment pour- rait-on songer aujourd’hui à enserrer la vie de la levüre, dans les limites d’une égalité chimique ? L'équation de Gay-Lussac était simple, et bien simple aussi la théorie de la fermentation. Maisil est un fait général, dont nous retrouvons ici la manifestation : c’est que plus la science se perfec- tionne et approfondit les phénomènes naturels, plus elle en découvre la complication, el ce phé- nomène de la fermentalion, qui pouvait se résu- mer en quelques mois à l’époque où on ne le connaissait que superficiellement, devient aujour- d’hui un des problèmes les plus étendus de la chimie biologique, et l’un de ceux qui laissent aux savants le plus de points à éclaircir. Quand un problème présente de telles difficultés à résoudre, il est intéressant pour celui qui veut se rendre compte de ce qui a été fait el de ce qui reste à faire, de regarder en arrière et d'examiner la question telle qu'elle se pose aujourd’hui. C'est ce que nous avons voulu faire danscet article, non pas pour le problème dans son ensemble (car il fau- drait nous occuper des espèces de levüre, de leur alimentalion, etc.), mais pour une des questions seulement de ce problème, celle qui nous sollicite de lui dire l’origine des différents produits nés pendant la fermentation alcoolique. Il La levûre, — qu’elle soit une cellule de Saccharo- myces Cerevisiæ, comme celle qui faitla bière, qu'elle soit une cellule de Saccharomyces ellipsoideus, de Sac- charomyces Pastorianus, ele. comme celles qui pro- duisent le vin, — végète dans un milieu sucré : en dehors de sa fonction alcoolique, cette levüre vit, c’est-à-dire respire, se nourrit et se reproduit. Par sa respiration elle dégage de l'acide carbonique, et cet acide carbonique doit par conséquent, dans le compte final de la fermentation, être soustrait de l'acide carbonique qui provient dela décomposition du sucre. MM. Gréhant et Quinquaud (C.R. CVI, 609 et1249)ont montré qu’en faisant vivre de lalevûre dans l'eau pure,puis dans l’eau sucrée et en recueil- lant le gaz dégagé dans chacun des cas, on pouvait établir la distinction entre l'acide carbonique de respiration et l'acide carbonique de fermentation. Pour se nourrir et reproduire incessamment des êtres semblables à elle-même, lalevüre décompose lesaliments hydrocarbonés, azotés et minéraux qui se trouvent à sa disposition. Elle abandonne donc au liquide fermenté les résidus chimiques de cette alimentation, résidus chimiques qui ne sauraient dès lors être comptés parmi les produits de la fer- mentalion normale. Ces résidus seront nécessaire- ment variables avec la nature des matériaux que l’on présente à la levüre, avec les conditions dans lesquelles elle se trouve pour les assimiler. Sur ces résidus, nous ne connaissons rien et nous devons L. LINDET. — LES PRODUITS FORMÉS PENDANT LA FERMENTATION ALCOOLIQUE 721 nous borner à constater leur existence dans les pro- duits de la fermentation, sans chercher à les définir. Il Laissons de côté, pour le moment du moins, les produits sécrétés par la levûre considérée comme cellule qui végète, vit et se reproduit, et recher- chons ceux qu’elle doit former, quand, indépen- damment de sa vie végétale, elle accomplit sa vie de ferment et décompose la molécule sucrée. La question est difficile à résoudre et est loin d’être résolue; car, pour l'élucider d’une façon complète, il nous faudrait non seulement empêcher la levüre de vivre, ce qui est impossible, mais encore suivre cette levûre à chacune des périodes qu'elle accomplit dans son rôle de ferment; car il est très probable que la levûre ne fournit pas, au commencement et à la fin de la fermentation qu'elle provoque, les mêmes produits, ou les fournit en proportions différentes. Nœgeli, puis M. Laurent ‘, ont montré que la levûre s'assimile le sucre qu’elle doit ensuite faire fermenter ; elle s'en fabrique une réserve hydro- carbonée, un glycogène, en le combinant à son tissu, puis le décompose à l’intérieur même de sa cellule. Mais elle ne décompose ce glycogène qu'à la condition de le reconstituer immédiatement en réabsorbant le sucre qui se trouve autour d'elle. Voilà donc une première période de la vie fermen- tative de la levûre, celle où elle assimile et désas- simile continüment. La cellule est pleine : elle est dans toute l’activité de sa vie. A cette première période en succède une autre, celle où la levüre, n’ayant plus de sucre à sa dis- position, consomme sa réserve hydrocarbonée, son glycogène, sans en reconstituer de nouveau. Enfin, la levûre arrive à accomplir une troisième période, dite d’autophagie ; la cellule maigrit, se remplit de granulalions et se déforme, vit sur elle- même etconsomme sa cellulose etsa matière grasse. Les deux premières périodes ne sont pas essen- tiellement différentes, etilse peut que les produits sécrétés dans les deux cas soient les mêmes ; mais ils ne sont certainement pas les mêmes, ou ne sont pas engendrés en quantités semblables, quand s’accomplit la troisième période,dite d’autophagie. MM. Béchamp, Schutzenberger, Duclaux ont montré que dans cette dernière période il se forme beaucoup d'acide acétique ; il se forme également de la leucine et de la tyrosine. Enfin, M. d’'Udrans- ky ? a récemment émis l’opinion que la glycérine elle-même prenait naissance pendant l’autophagie. On voit alors combien cette question est déli- l, Annales de l’Instilut Pasteur, 1891, 113. 2. Bulletin Soc. chim., 1890, p. 4171. cate, puisque la nature et la proportion des pro- duits sécrétés dépend de la période de la fermen- tation à laquelle on considère la levûre. Elle n’est cependant pas insoluble et pourra être éclaircie le jour où l’on parviendra à faire fermenter, à l'abri de toute contamination, par une levûre pure de race, une assez grande quantilé de solution sucrée, préalablement stérilisée, et où l'on parviendra à séparer nettement les produits sécrétés à chacune des périodes que nous venons de distinguer. III Nous avons supposé, dans les considérations qui précèdent, que la levüre, végétant dans un milieu sucré, était de race pure, c’est-à-dire représentait une colonie de cellules, née d’une cellule unique. Mais ce n’est pas avec cette homogénéité que se présentent les cellules qui président soit à la fabri- cation du vin, soit à la fabricalion de l'alcool, soit même souvent à la fabrication de la bière, On n'introduit pas dans la vendange des levüres cultivées, et ce sont les organismes déposés sur la grappe qui entrent en évolution, les plus nom- breux et les plus vigoureux prenant le pas sur les plus faibles. Le procédé qui consiste à ajouter au raisin une levüre déterminée pour communiquer au vin un goût et un arôme rappelant le goût el l’arôme du vin dont elle provient, n’est pas encore, malgré les travaux de MM. Rommier, Martinand et Rietch, Marx, Jacquemin, etc, passé dans la pratique industrielle. C’est dans la brasserie que l'on se rapproche le plus des conditions énoncées plus haut, puisque l’on ensemence dans la cuve soit un levain purifié des ferments de maladie, soit même un levain provenant de la reproduction d’une seule cellule. Enfin c’est avec une pureté extrêmement variable que l’on voit se présenter les levains de distillerie ; suivant l'importance plus ou moins grande de la distillerie, suivant le soin plus ou moins attentif que l'industriel apporte à sa fabrication, on voit les levains contaminés à diffé- rents degrés par les organismes étrangers. A côté des Saccharomyces (Cerevisie, ellipsoïdeus, Pastorianus, exiquus, conglomeratus, minor Engel, Marriunus, levre de Roux, levère caséeuse, ete.), se rencontrent des organismes possédant la fonction alcoolique également, étrangers cependant à la classe des Saccharomyces, en ce sens qu'ils sont in- capables de former des endospores (Sacch. exiquus, Torula;levüre de Duclaux, Mucor circinnelloies, ete.) ; se rencontrent également des bactéries (ferment lactique, butyrique, bactérie de la fermentation visqueuse, etc.), des mycodermes (A{ycoderma Vini, Bacterium Aceti, Bacterium Pastorian um); se rencon- trent enfin des moisissures (Botrytis cinerea, Peni- cillum glaucum, Eurotium, Dematium pulluluns, Mucor 122 racemosus, Mucor Mucedo).Tous les Saccharomyces, dont les actions sont parallèles pendant la fermentation, vont-ils donner les mêmes produits? Tous les or- ganismes de maladie, 7orula, bactéries, myco- dermes, moisissures, ne vont-ils pas, au cours d’une fermentation industrielle, superposer leur action ? C'est dans cel ordre d'idées que nous avons entre- pris une expérience ! qui a consisté à rechercher si, au cours d’une opération industrielle,le moût con- tenait,par rapport à l'alcool formé, moins d’alcools supérieurs au commencement qu’à la fin de la fer- mentation. Si les alcools supérieurs sont les pro- duits de la vie d'êtres microscopiques étrangers à la levûre proprement dite, au Saccharomyces prédo- minant, la proportion des alcools supérieurs doit augmenter au moment où la fermentation touche à sa fin,c'est-à-dire au moment où lalevüre a terminé son œuvre et où les organismes étrangers dont la vie aété, au début, étouffée,reprennentleur activité. C’est, en effet, à cette conclusion qu’a abouti le dosage des alcools supérieurs dans des fractions de moût prélevés à la cuve à différents moments de la fermentation. Si, après avoir fait ce dosage, on rapporte la quantité d’alcools supérieurs, formés à chaque période, à l'alcool brut produit pendant le même temps, on obtient les chiffres suivants : Alcools supérieurs % de l'alcool formé I. — Pendant les 14 premières heures... 0,36 IL. — Entre la 14£ ei la 20e heure ......... 0,5% IT. — Entre la 20e et la 38e heure (fermen- tation terminée) ne" ---rrac-ce-r-.e 0,88 IV.— 24 heures après la fermentation ter- MANOÉB Es see eme mile Shell e aie = lle 14,07 C'est à une conclusion identique que nous à conduit encore le dosage des alcools supérieurs dans des moûts dont la fermentation avait eu lieu dans des conditions différentes d’activité ?. Chaque fois que la fermentation a été spécialement active, dans le cas, par exemple, où l'on a ensemencé la cuve avec une grande quantité de levûre,dans le cas où l’on a ajouté au moût de la drèche (drèche, qui, d’après M. Delbruck, produit une aération conli- nuelle de la levûre, en ramenant celle-ci sans cesse à la surface de la cuve), on a vu la teneur normale en alcools supérieurs diminuer dans une notable proportion. Or, cette activité communiquée artifi- ciellement au moût qui fermente, correspond à un développement plus énergique de la levûre vraie, et à un dépérissement des organismes étrangers : Alcools supérieurs formés par litre d'alcool Fermentation de moût clair avec quantité susante de levres ar. Neue 5,29 Fermentation de mout clair avec quantité exagérée de levüre.::.1.:.1.........., 3,96 Fermentation de moût clair additionnée de drèche, avec quantité suflisante de levüre 4,70 1C. R. CXII p. 120. — ? C.R. CXII. p. 663. L. LINDET. — LES PRODUITS FORMÉS PENDANT LA FERMENTATION ALCOOLIQUE Ces organismes étrangers, peul-être même ces levüres étrangères au Saccharomyces prédominant qui sécrèlent la grande quantité d'alcools supérieurs que l’on trouve dans les moûts fermentés, sont en- core à découvrir. La question a déjà fait un grand pas ; M. Perdrix ! a en effet décrit récemment une bactérie (le bacille amylozyme) qui a la propriété singulière d'attaquer l’amidon et de produire aux dépens de celui-ci une quantité d'alcool amylique qui représente 50 ‘/, environ du produil dé- composé. La présence des organismes étrangers dans les moûts n’influe pas seulement sur la production des alcools supérieurs : elle influe également sur la pro- duction des bases dont nous avons parlé plus haut. Quand on recherche ces bases dans les produits alcooliques commerciaux, comme nous l'avons fait il y a quelques années ?, on remarque que ceux qui en renferment le plus, sont d'abord les flegmes de mélasses; or, les mélasses sont peuplées, au moment où elles arrivent à la distillerie, de co- lonies nombreuses de bactéries; viennent ensuite les eaux-de-vie de vin, de cidre, de marcs, dont l'alcool à été produit en présence de tous les or- ganismes déposés primitivementsur la grappe. Les flegmes de betteraves, obtenus dans les distilleries agricoles au moyen de levains très impurs, en con- tiennent encore; les flegmes de grains, à la pro- duction desquels est intervenue une levûre cultivée et soignée, n’en renferment que des quantités in- signifiantes ; on se trouve donc autorisé à conclure que là encore, comme dans le cas des alcools supé- rieurs, la majeure partie des bases a élé fournie par les organismes étrangers à la levûre. IV Les divers composés, que l’on rencontre dans les produits alcooliques industriels, sont dus, comme nous l’avons indiqué, soit à la fonction vitale de la levûüre, soit à l’action décomposante qu’elle exerce sur le sucre, soit enfin au développement d’orga- nismes étrangers. Il est encore d’autres composés comme le furfurol, que l’on a fait figurer à tort dans les produits de la vie de la levüre. Nous avons fait voir que ce furfurol *, dont on constate la pré- sence dans les eaux-de-vie, dans les alcools de grains travaillés à l’acide, dans les flegmes de mélasses, obtenus en présence du grain, a pour origine soit la torréfaction des matières orga- niques au cours de la distillation, soit l’action spé- ciale des acides minéraux sur l'enveloppe des grains au cours de la saccharification. Les flegmes de grain saccharifiés à la diastase, les flegmes de l Annales de l’Institut Pasteur 189, p. 286. 2 C. R. CVI, p. 421. 3 C. R. CXI, p. 236 L. LINDET. — LES PRODUITS FORMÉS PENDANT LA FERMENTATION ALCOOLTQUE 793 betteraves, de pommes de terre, distillés à La va- peur, ne contiennent pas de furfurol. Le furfurol doit donc être rayé des produits de la fermentation alcoolique. \? Nous venons de voir quelle était l’origine pro- bable des produits secondaires (et sous ce nom nous désignons tous les produits formés en petite quantité à côté de l'alcool et de l’acide carbonique). Une double question industrielle se trouve dès lors être la conséquence de ce que nous venons d'exposer. Peul-on éviter la formation de ces produits secondaires ? Y a-t-il intérêt à l'éviter? A la première question nous répondrons qu'en donnant à la fermentation toute son activilé, en ensemençant les moûts avec des levains purs ou des levains protégés contre le développement des ferments étrangers par l'addition de sous-nitrate de bismuth (M. Gayon), d’acide fluorhydrique (M. Effront), on peut diminuer sensiblement la proportion des alcools supérieurs, des bases, peut- être aussi celle d’autres impuretés; mais on ne saurait, en aucun cas, en éviter la formation, car, même en admettant l'exactitude de l'équation de Gay-Lussac en ce qui touche la décomposition du sucre par la levûre, tant que celle-ci est à sa pre- mière période, et n’est pas encore obligée de con- sommer ses réserves, on ne peut éviter que la le- vûre ne vive et ne se reproduise, éviter qu’elle n'accomplisse sa période d’autophagie, et ne sé- crête par conséquent les produits nécessaires, qui résultent de l’accomplissement de ses actes biolo- giques. : La seconde question sollicite une réponse, qui ne peut être d’un ordre aussi général que la pre- mière ; car la fermentation est l'opération capitale de plusieurs industries et chacune de ces indus- tries possède des intérêts différents. Il va sans dire que l'industrie de la distillerie, qui se propose de fabriquer au moyen des bette- raves, des pommes de terre, des mélasses, des grains, un alcool absolument pur, neutre au goût et à l'odorat, doit se mettre dans les meilleures conditions pour éviter la formation des aldéhydes, des alcools supérieurs, etc. Moins le flegme, c’est- à-dire l'alcool brut provenant de la première dis- tillation, contient d'impuretés, moins la perte est grande à la rectification. Le levain devra être aussi pur que possible, et la cuve, aussitôt après la fermentation terminée, devra,si l’on veut arrêter la production des alcools supérieurs, être passée à la colonne distillatoire. Le brasseur est obligé de faire usage égale- ment de levains très purs, et cela pour éviter non pas les produits secondaires, maisla présence dans ces levains d'organismes de maladie, qui vien- draient, une fois la fermentation achevée, trou- bler la bière, la rendre amère, acide, filante, etc. Les mêmes précautions ne sauraient être prises quand on se propose de fabriquer du vin, du cidre, des eaux-de-vie. Les raisins sont foulés, les pommes sont écrasées, et le jus entre en fermenta- tion sous l’action des organismes dont la grappe étaitrecouverte. De nombreux composés se forment, de l’aldéhyde, des éthers, etc., qui tous viennent donner au liquide alcoolique un bouquet déter- miné. Le vin et le cidre subissent la fermentation complémentaire, et, pendant cette fermentation secondaire, des alcools supérieurs se produisent. L'alcool amylique, par exemple, qui, à l'état isolé, possède une odeur désagréable, peut, dilué con- venablement dans l'alcool, communiquer à celui- ci un arôme qui n’est pas à repousser. Pendant cette fermentalion complémentaire les alcools s'éthérifient et l’on sait que les éthers amyliques sont très parfumés. Ces bouquets se retrouvent alors dans l'alcool distillé, et les eaux-de-vie de vins, de cidres, possèdent un arôme dont il est superflu de faire l'éloge. Les eaux-de-vie de marc, dont le goût est re- cherché par un cerlain nombre de consomma- teurs, renferment une forle proportion d'alcool amylique, dont l’origine est certainement due à ce que les marcs de la vendange ont séjourné long- temps au contact de l'air avant d’être distillés, et à ce que les ferments étrangers, producteurs d'alcool amylique, ont eu le temps de se développer. Dans ce cas encore comme dans le cas de la fabrication du vin, du cidre et des eaux-de-vie correspon- dantes, il faut favoriser la formation des pro- duits secondaires de la fermentation alcoolique, puisque ce sont eux qui donnent à ces liquides leur cachet particulier. Les hygiénistes se sont préoccupés, dans ces dernières années, de la présence, dans lesliqueurs fermentées, de ces produits secondaires, etils ont attribué à leurs propriétés nocives les nombreux cas d’alcoolisme que les médecins constatent chaque jour. Mais il est facile, en s'appuyant sur la discussion qui précède, de démontrer que les alcools consommés aujourd’hui, et qui sont des alcools d'industrie transformés artificiellement en eaux-de-vie, contiennent beaucoup moins d’im- puretés toxiques que les eaux-de-vie naturelles dont on faisait usage autrefois. C’est à une autre cause, qui échappe entièrement à la discussion scientifique, c’est à l'accroissement de la consom- mation de l'alcool qu'il faut attribuer l’accroisse- ment de l’alcoolisme. L. Lindet, Professeur à l'Ipstitut national agronomique. 124 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques. ere de l'Elasticité et, sans entrer dans des QUEUE À en Rte développements analytiques que ne comporte pas un Madamet (A.), Directeur de l'Ecole d'application du | mraité destiné à des praticiens, il a su mettre à role Génie Maritime. — Résistance des Matériaux, un volume in-k° de 486 pages et 326 figures dans le texte. (20 fr.) E. Bernard et Ci, éditeurs, 53 ter, quai des Grands-Augustins, Paris, 1891, Le nom de M. Madamet est bien conna de tous les mécaniciens; il est un des rares savants qui font, en France, de la Mécanique appliquée ; à la fois professeur et ingénieur, il joint aux connaissances mathématiques du théoricie en, une expérience consommée des choses de la pratique; les divers ouvrages qu'il a publiés présentent ce caractère très net d’être écrits par un ingénieur pour des ingénieurs. C'est ce qui à déterminé le succès de ses volumes précédents et, en particulier, de celui qu'il a fait pa- raître sur la Thermodynamique ; c’est ce qui fera, nous n’en doulons pas, le succès de son nouvel ouvrage sur la Résistance des matériaux. Cette science de la résistance des matériaux, si im- portante par ses applications, ne peut s'appuyer que sur l'expérience ef ne saurait, quoi qu'on en ait dit, trouver une base suffisante dans des théories mathé- matiques pures. Très voisine, par la nature des pro- blèmes qu’elle traite, de l’Elasticité, elle en diffère com- plètement par le but qu’elle vise; celle-ci est une science abstraite, à déductions rigoureuses, utilisant toutes les ressources de l'Analyse et qui, après avoirac- ceplé l'hypothèse fondamentale de la proportionnalité des forces moléculaires aux déformations correspon- dantes, ne se départ plus, pour les quelques problèmes qu ‘elle peut a border, de l'a plus entière rigueur ; celle- là, au contraire, n’a aucun souci des solutions ‘tout à fait exactes et ne cherche, ce quiest fort différent, que des solutions suffisamment approchées. Bien assurée d'avance que les formules rigoureuses sont impossibles à obtenir, convaincue d’ailleurs que si on y arrivait, elles seraient inapplicables par leur complication même, elle se résigne à n’avoir que des formules approxima- tives et leur demande simplement de ne pas trop s’écarter des résultats. On peut aisément, par un mot, caractériser cette différence de but entre l’Elasticité et la Résistance des matériaux : la première est une science de Savants et la seconde, une science d'Ingénieurs. La Résistance, d’ailleurs, a, sur certains points, un champ plus vaste que celui de l’Elasticité : l'étude des modes de rupture des divers corps, la manière dont ces corps se com- portent lorsque la limite d’élasticité a été dépassée, sont autant de questions capitales dans la pratique, dont l'Ingénieur ne saurait se désintéresser et sur lesquelles la théorie ne peut fournir encore aucune lumière, C'est ce qu'a bien compris M. Madamet; préoccupé ayant tout d'indiquer aux constructeurs des règles simples et sûres, leur évitant tout mécompte dans les applications, il a pris {tout d’abord pour premières bases de son Traité un certain nombre de faits dus à l'expérience ; il s’est attaché ensuite à donner une analyse aussi complète que possible des phénomènes étudiés, de manière à déterminer le sens précis des formules obtenues, à connaître leur degré d’exactitude, à fixer les limites dans lesquelles elles sont applica- bles et à mettre ainsi le lecteur en garde contre les conclusions exagérées qu’on pourrait en tirer, Tout en donnant de la sorte à son ouvrage un carac- tère pratique, qui en constitue le grand mérite et le haut intérêt, M. Madamet ne s’est pas privé toutefois dés enseignements que pouvait lui fournir la théorie les savants travaux de Navier, de de Saint-Venant et de Clebsch pour la résistance des plaques et la torsion des prismes. Dans le mème ordre d'idées il a eu soin de prendre pour base de la théorie de la résistance composée, c'est-à-dire de la résistance des pièces soumises à plusieurs genres d'efforts, la considération des écarte- ments molée ulaires, qui en est jusqu'ici le fondement le plus certain. Nous ne saurions trop recommander cet ouvrage à tous ceux qui ont à mettre en œuvre des matériaux ; comme esprit, comme méthode, comme exposition, il est remarquable; très sobre de détails et cependant. très complet, il nous parait à tous égards digne de la signature qu'il porte; c’est le plus bel élogec que nous en puissions faire. H. LÉaUTÉ de l'Académie des Sciences. Brillouin (Marcel). — Recherches récentes sur diverses questions d'Hydrodynamique. Première partie : Tourbillons (2 fr. 50). Gauthier- Villars et fils, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1891. La première partie de cet ouvrage a seule paru. Elle est relative aux tourbillons et a été déjà publiée dans les Annales de la Facullé des Sciences de Toulouse. M. Brillouin fait un exposé très serré et très clair des travaux de Stokes, Helmholtz, Thomson, Kirchoff, Maxwell, etc. sur le mouvement tourbillonnaire (vortex motion) dans les fluides parfaits, puis des expériences effectuées sur le mème sujet,notamment par J.-J. Thom- son et Nerval. Il est difficile de faire une analyse som- maire de cette première partie de l'ouvrage de M. Brillouin qui est elle-même un résumé fort concis de mémoires nombreux et étendus. Il faut signaler, comme pAQuE originale, le chapitre qui termine le volume : la célèbre “théorie des atomes-tourbillons, de sir W. Thomson, y est exposée et discutée avec la clarté et l'originalité de vues que les lecteurs de la Revue ont déjà pu apprécier dans les articles de M. Brillouin. G. CHarpy. Legros (Le Commandant), — Élements de photo- grammétrie. Application élémentaire de la pho- tographie à l'architecture, à la topographie, aux observations scientifiques et aux opérations militaires (5 fr.). Société d'Editions scientifiques, 4, rue Antoine-Dubois, Paris, 1891. C’est dans une très bonne pensée que ce livre a été rit sous une forme peut-être un peu sévère pour iver à tous les amateurs de vues photographiques ; mais cette apparence didactique ne fait que recouvrir un solide traité de perspective à l'usage de ceux qui font du paysage et qui manquent souvent des notions les plus élémentaires sur ce sujet important. C’est même ce qui fait que, pour bien des gens, la photo- graphie n’est qu'un procédé, tandis que, rationnelle- ment conduite, elle peut être et est certainement un art, Le livre du Commandant Legros est fait pour la pousser dans cette voie en indiquant une de ses plus solides pierres de fondation. L'auteur ne mérite que des félicitations ; mais les éditeurs doivent se pénétrer de l’idée que la lecture des ouvrages photographiques ne peut que gagner à être aidée par de beaux caractères et des figures bien faites ; il sera facile de remédier, dans une édition nouvelle, à ces petits défauts de la première. Alphonse BERGET. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 725 = 2° Sciences physiques. Dvelshauvers-Dery (F.-V.) Grundlage einer neuen Methode der Schallstärkemessung (lon- dements d'une nouvelle méthode pour Li mesure de l'intensité du son). Thèse de l’Université de Leipzig. C. Wild, Leipzig et Baden-Baden, 1891. Deux méthodes ont été proposées jusqu'ici pour la mesure des oscillations de l'air; la plus immédiate consiste à enregistrer le mouvement transmis à une membrane; la seconde est fondée sur une action ob- servée d’abord par Lord Rayleigh, et qui consiste en ce qu'un disque suspendu dans un ventre d’oscillation tend à se placer perpendiculairement à la direction de la propagation. Cette action, qui serait inexplicable si l’on admettait que tous les éléments du disque sont frappés également par les molécules de l’air,est due en entier à des déviations des filets au voisinage du disque, autrement dit à des remous. On conçoit que ce phéno- mène est presque inaccessible à l'analyse, et que le premier pas doit consister à examiner par lexpé- rience ce qui se passe dans le cas, plus simple, d’un courant d’air; ici, l’action est encore complexe, mais elle atteint un régime qui n’a pas le temps de s'établir dans le cas d’oscillations acoustiques. M. Dwelshauvers-Dery, partant d’une équation dé- montrée par Thomson et Tait, est conduit, pour le cas d’un disque frappé à 45° par un fluide animé d’une vi- tesse constante, à l'expression suivante de l’angle de déviation : w représente la densité du fluide, w sa vitesse, a le diamètre du disque, R le moment qui cherche à ra- mener le disque à sa position d'équilibre, c’est-à-dire à 45° de la direction du courant. Dans un tube de 4% mm. de diamètre, on suspend un disque amené à 45° de l'axe, au moyen d’un aimant faisant partie de l’équipage; puis on fait passer un courant d’air dont la vitesse moyenne se calcule par l'évacuation d’un gazomètre; celte vitesse est supposée constante dans toute la largeur du tube; les déviations sont lues par la méthode de Poggendorff, Les vitesses employées variaient entre 0,445 et 3,560 em par s; les diamètres des divers disques, étaient de 1,42 1,68 2,08 cm. Les résultats des expériences faites sur l'air sont les suivant(s : les déviations observées sont plus fortes que les déviations calculées par la formule, et la loi empi- rique relative aux vitesses donne un accroissement d'action plus faible que celui du carré; la loi des dia- mètres est assez bien vérifiée. Des expériences comparatives faites avec un courant d’eau fournissent des déviations beaucoup plus faibles que la formule n'indiquerait; la loi du carré donne aussi des résultats croissant beaucoup trop rapide- ment {au moins entre 0,1 et 1,0 cm pars), et la relation entre le diamètre et l’action indique une proportion moindre que celle du cube. Ces expériences, intéressantes à plus d’un point de vue, montrent la complexité du phénomène et la né- cessité de rechercher les relations empiriques soit dans le cas d’une surface exposée à un courant d'air, soit pour la mesure des ondes sonores. Ch.-Ed. GUILLAUME. Duclaux (E.), de l'Institut. — Cours de Physique et de Météorologie, professé à l'Institut agronomi- que. Un volume in-8° de 500 pages avec 175 figures. (1 fr.) — À, Hermann, 8, rue de la Sorbonne. Paris, 1891, Autrefois on avait coutume de faire suivre les traités de Physique d’un court chapitre consacré à la Météo- rologie. Cette dernière science a pris, depuis vingt ans, un tel développement qu'il devient impossible d’en indiquer en appendice même les premiers rudiments. Ses procédés exigent aussi qu'on la traite à part, car, s’il faut voir, avec M. Duclaux, dans la Météorologie une application de la Physique, c’est à la condition de ne point comprendre cette application dans le sens d'une simple déduction : on ne construit pas la Météo- rologie avec des données uniquement tirées de l'Hy- urométrie, de la Thermodynamique, de lElectri- cité, ete, : pour l’édifier, l’observalion positive des phénomènes naturels est d’abord nécessaire : c’est seulement après avoir établi les faits, qu'il convient d'en chercher lexplication dans la Mécanique géné- rale et la Physique. Les lois de cette dernière science devant être cons- tamment présentes à l'esprit du météorologiste, c’est à elles que M. Duclaux a consacré la première partie de son livre. Cette partie est de beaucoup la plus courte, le but de l’auteur étant, non d'écrire un traité de Phy- sique pénétré des vues nouvelles qui se font jour dans la science, mais d'enseigner à de futurs agriculteurs, plus préoccupés de pratique que de théorie, les prin- cipes fondamentaux, éprouvés et indiscutés, le mini- mum de faits physiques, requis pour aborder les études météorologiques. Le caractère volontairement élémentaire de celte exposition ne la pas empéchée d'être magistrale : on n'y trouvera ni longs calculs, ni formules compliquées, mais, sous une forme lumineuse, les idées que les formules expriment, L'actinométrie et l’hygrométrie, quelques phéno- mènes astronomiques aussi, ont été, en raison de leur importance pour la physique du globe, l'objet de dé- veloppements particuliers. La partie météorologique comprend notamment la circulation générale de l'air et des eaux, les lois des tempêtes, la distribution de l'humidité dans latmos- phère, celle des pluies et de la température à la sur- face de la Terre, M. Duclaux s’est efforcé de ramener tous ces phénomènes à une cause unique: l’inégal échauffement de régions voisines, « L'inégalité, dit-il, est introduite, sur terre, par la distribution des con- tinents et des mers, et, dans l'atmosphère, par les iné- walités dans la proportion et la distribution de la vapeur d’eau, » En attendant qu'une multitude d'observations sur toute la surface du globe permettent de rattacher effectivement à cette explication générale l’interpré- tation de tous les phénomènes météorologiques, M. Duclaux a pris soin de décrire les plus importants, insistant sur les circonstances les mieux connues de leur production.Les phénomènes électriques, encore peu débrouillés et, à l’heure actuelle, dépourvus d’ap- plication agricole, ont été passés sous silence. Peut- être, cependant, eùt-il été intéressant de discuter la question soulevée par des expériences célèbres de M. Berthelot au sujet de la fixation directe de Pazote atmosphérique par les plantes sous l'influence de faibles différences de potentiel. Mais M. Duclaux ne s’est pas proposé de traiter tous les problèmes qui se posent en Météorologie : il a voulu apprendre à ses élèves, parmi les faits dominants de la science, ceux dont la connaissance leur sera pratiquement le plus utile ; il a surtout appelé leur attention sur ce grand œuvre de la météorologie, — chimère d'aujourd'hui, vé- rité de demain, — qu'on appelle la prévision du temps. Le peu que l’on sait, — où plutôt l’ensemble des docu- ments déjà assez nombreux, mais encore incohérents que l’on possède à ce sujet, —est décrit dans son livre avec une verve entrainante. Ce n’est pas que l’auteur dissimule les difficultés, les lacunes, actuellement énormes de la science. « J'ai essayé partout d’être clair, déclare-t-il dans sa préface, mais je ne veux pas dire que j'ai partout vu clair. » Un grand nombre de cartes d’isobares et d’isother- mes, choisis comme types, ajoutent à l'intérêt de cet attrayant ouvrage de science vulgarisée, mais non vulgaire. L. 0. Lévy (Lucien). — Contribution à l'étude du titane. Thèse pour le doctorat présentée à la Faculté des Scien- ces de Paris. Gauthier- Villars et fils, 55, quai des Grandis- Augustins, Paris. 1891. Malgré les nombreuses recherches effectuées sur le titane, depuis que Sainte-Claire Deville et Wühler ont isolé cet élément, un certain nombre de ses propriétés ne sont pas suffisamment connues, Le travail de M. Lévy vient combler dans l'histoire de ce corps, d'importantes lacunes : 4° Recherches sur le titane cristallisé. Le titane cristal- lisé, que l’on n'avait pas encore obtenu, a été produit par M. Lévy dans l’action du chlorure de titane sur le titane, le magnésium, l’étain et le silicium. Ce dernier corps donne les meilleurs résultats et conduit néan- moins à des rendements très faibles. L'action dissolvante de l'aluminium en fusion sur le titane amorphe a donné naissance à un alliage défini de titane et d'aluminium. 20 Composés dérivés de l'acide titanique. Dans cette deuxième partie, M. Lévy reprend l'étude du peroxyde de titane obtenu par l’action de l'eau oxygénée sur la solution sulfurique d'oxyde de titane, sur lequel on avait des renseignements contradictoires, Il établit que le composé est très instable et se décompose faci- lement pendant le lavage; l'action de l’eau oxygénée est lente, de sorte que le précipité obtenu au bout d'un temps insuffisant est un mélange d'oxyde per- titanique et d'acide titanique; enfin cet oxyde per- titanique ne posséderait pas la fonction acide, M. Lévy indique ensuite des procédés de préparation de plu- sieurs litanates métalliques. 3° Composés dérivés du chlorure de titane. Une série de composés de l'acide titanique avec les phénols sont obtenus par l'action du chlorure de titane sur ces phé- nols. L'action du chlorure de titane sur l'acide phényl- sulfureux donne le sulfoconjugué du titanate de phé- nol. 4° Etude du titane au point de vu2 analytique. Les composés del'acide titanique avec les phénols sontforte- ment colorés. On obtient également des colorations très nettes par l’action de l'acide titanique sur cer- tains alcaloïdes; ces réactions colorées peuvent servir à caractériser le titane et à le distinguer en parti- culier du niobium, Enfin M. Lévy étudie les différents modes de dosage du titane et l'influence qu'exerce la présence de corps étrangers. Ê G. Carey, 3° Sciences naturelles. Hegler {Robert), — Histochemische Untersuchun- gen verholzter Membranen. (Recherches histochi- miques sur les membranes lignifiées); avec une planche, Flora, 1891; Heft 1. Parmi les réactifs employés en histologie pour mettre en évidence la présence de la lignine dans la mem- brane cellulaire, on peut citer la solution chlorhy- drique de phloroglucine, la résorcine, etc., dont l’action se traduit par diverses colorations. L'auteur introduit dans la technique des tissus ligni- fiés deux nouveaux réactifs très sensibles, savoir, la thalline (tétrahydro-p-chinanisol) et le toluilène-diamine. 1. — La thalline est employée sous la forme de sul- fate, en dissolution concentrée hydro-alcoolique. Les coupes soumises à l’observation sont d’abord plongées dans l’alcool, puis amenées au contact du réactif : plus l’action se prolonge, plus la coloration orange-foncé des membranes lignifiées est belle ; les membranes cellulosiques ou subérifiées ne se colorent d’aucune manière. Divers auteurs ont montré que les menbranes ligni- fiées sont constamment pourvues de coniférine, gluco- side qui donne facilement, comme l’on sait, de la va- niline. Partant de là, M. Hegler a éprouvé directement son réactif, en opérant soit sur du coton imprégné d’une BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX solution de coniférine ou de vaniline, soit sur ces so- lutions elles-mêmes. Lorsqu'on mélange une solution alcoolique de vaniline à une solution de sulfate de thalline, en ajoutant un peu de chloroforme, on obtient, après évaporation de ce dernier liquide, un corps oléa- gineux orangé qui abandonne plus tard des lamelles cristallines. En faisant le même essai avec une solution de coniférine, il ne se produit aucune réaction colorée. 2. — Le toluilène-diamine s'emploie en solution aqueuse concentrée, additionnée d’une petite quantité d'acide chlorhydrique, Au contact de ce réactif les membranes lignifiées se colorent en orange-foncé, et cette teinte est beaucoup plus nette et plus stable que celle donnée par l’aniline et la naphtylamine. La réac- tion se produit même au début de la lignification; elle a lieu aussi bien en présence de la vaniline que de la coniférine. 3. — L'auteur a appliqué ces deux réactifs à un grand nombre de plantes, en comparant les résultats obtenus à ceux que donne la solution de phloroglucine dans l’acide chlorhydrique ; cette dernière agit, comme le toluilène-diamine, à la fois sur la coniférine et sur la yaniline. Les différences observées avec chacun de ces réactifs tiennent à ce que les membranes faiblement lignifiées renferment beaucoup de coniférine et peu de vaniline, tandis que les membranes fortement lignifiées sont abondamment pourvues de ce dernier principe. 4. — Passant ensuite à l’étude de l’origine physio- logique de la vaniline dans les membranes lignifiées, l'auteur rappelle que Thiemann a déjà montré que les diastases, par exemple l’émulsine, hydratent la coni- férine à environ 30 degrés et la dédoublent en glucose et alcool coniférylique; qu’ensuite cet alcool donne naissance par oxydation à la vaniline. M. Hegler a re- pris cette question. Une solution aqueuse de coniférine à 0,51 °/,, additionnée d’émulsine et de deux centièmes de chloroforme, est exposée à Ja température de 40°, Le chloroforme empêche le développement des ferments organisés, mais n’agit nullement sur la diastase. Or la réaction précédemment indiquée se produit très neltement. Il en est de même avec la levure de bière. On peut ainsi admettre que la vaniline des mem- branes lignifiées âgées procède d’un dédoublement de la coniférine, dédoublement qui lui-même résulte d’une action diastasique, d’origine protoplasmique. Un argument, en faveur de cette manière de voir, tiré de la structure anatomique, résulte de ce que dans le bois d’une tige la réaction de la coniférine diminue à mesure que l’on s'approche de la moelle, tandis que celle de Ja vaniline s’accuse de mieux en mieux; or c’est le bois le plus Jeune qui occupe la périphérie du corps ligneux. 5. — On peut encore employer avantageusement pour ces recherches histochimiques la solution hydro- alcoolique de thymol additionné de sulfate de thalline. Dans le Nerium oleander par exemple, cette solution colore en bleu verdàtre le bois jeune dépourvu de va- niline, mais riche en coniférine; en vert foncé, puis en vert pur le bois de parties plus âgées dont les mem- branes sont imprégnées de vaniline. Du reste, dans une seule et même coupe ces différences se trouvent mises en évidence pour le bois externe et pour le bois in- terne. Er, BELZUNG. Simon (Eugène). — Observations biologiques sur les Arachnides (Voyage de M. E. Simon au Vene- zuela — décembre 1887-avril 1888.) — 11° Mémoire des Annales de la Société entomologique de France, Paris, 1891. Les Annales de la Société entomologique de France s’a- dressant à un public très spécial, on nous saura gré de signaler ici les Observations biologiques sur les Arachnides que M. E. Simon vient d'y insérer. L'auteur les a prises sur le vif au cours d’un voyage au Venezuela (dé- cembre 1887-avril 1888), pendant lequel il a d’ailleurs BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 127 recueilli des collections zoologiques fort intéressantes, Les Araignées éludiées par M. Simon sont sociables. Le fait est d'autant plus remarquable que, suivant l’ex- pression même de l’auteur : « L’Araignée est le type de l'animal solitaire, jaloux de profiter seul de son travail ; quand deux individus d’une même espèce viennent à se rencontrer, il en résulte généralement un combat qui finit par la mort de l’un des adversaires et 1 on sait que, dans certains genres, le mâle n'échappe pas tou- jours à la voracité de la femelle, quand il s’en approche pour l'accouplement » «Il y à cependant des degrés dans celte sauvagerie ; à l'approche de l’hiver, un grand nombre de Clubiones établissent leurs coques sous la même écorce ; certains Attides, comme les Heliophanus, les Evophrys, les Icius, placent souvent la leur côte à côte, sous la même pierre, etc. Mais ces rapprochements fortuits, indices d’un caractère moins féroce de certaines espèces, ne peuvent passer pour de véritables associations. » Celles-ci n'avaient été signalées que dans les régions tropicales de l'Amérique du Sud ; encore avaient-elles été révo- quées en doute. M. Simon a observé au Venezuela divers cas de socia- bilité chez des espèces se rapportant à plusieurs fa- milles. Cette sociabilité présente différents degrés : elle est tantôt temporaire et limitée à l’époque de la reproz duction. Ce cas se présente chez l’Epeira Bandelieri E. Sim, Habituellement cette espèce «ne paraît pas dif- férer par ses mœurs des Epeires ordinaires; sa toile est normale et individuelle, mais au moment de la ponte, plusieurs femelles se réunissent pour construire en commun, dans un buisson, une grande coque de tissu jaunâtre et laineux, dans laquelle elles s’enferment pour pondre et fabriquer leurs cocons ». — «Nous avons ouvert, ajoute M. Simon, plusieurs de ces coques ren- fermant jusqu’à 10 cocons et 8 ou 6 femelles parta- geant les soins de la maternité. » « La sociabilité est tout à fait complète chez Anelosi- mus sociaïis E. Sim., de Ja famille des Theridiidæ ; plu- sieurs centaines, souvent plusieurs milliers d'individus de cette espèce, se réunissent pour filer une toile lé- sère et transparente, mais de tissu serré et analogue à , celui des toiles d’Agelenes; cette toile est de forme in- déterminée ; elle atteint parfois de grandes dimensions et peut envelopper un Caféier tout entier. Au premier abord, cette immense toile rappelle plutôt le travail de chenilles sociables que celui d’une Araignée.…. Les Araignées s’y promènent librement, se rencontrent en se palpant comme feraient des Fourmis avec leurs an- tennes et se mettent quelquefois à plusieurs pour dévo- rer une proie un peu volumineuse, » « Le troisième type d'association que nous avons ob- servé chez l’Uloborus republicanus E. Sim. est de beau- coup le plus parfait, car il offre sur la même toile un travail commun auquel contribuent tous les associés, en même temps qu'un travail individuel propre à cha- cun d'eux, — Plusieurs centaines d'Uloborus vivent ensemble ; ils filent entre les arbres une toile immense, formée d’un réseau central assez serré sur lequel se tiennent côte à côte beaucoup d'individus des deux sexes, mais principalement des mâles; ce réseau est suspendu par de longs fils, divergeant dans toutes les directions et prenant attache sur les objets environ- nants. Dans les intervalles des mailles, formées par ces grands fils, d’autres Uloborus tissent des toiles orbicu- laires, à rayons et à cercles, qui ne sont alors habitées que par un seul individu. On peut voir de temps en temps une Araiynée se détacher du groupe central pour chercher dans les câbles supérieurs un endroit propice à la fabrication de sa toile orbiculaire ». 1 L’étude de ces collections, réparties entre un grand nombre de spéciaïistes, a déjà donné lieu à la publication de plusieurs mémoires insérés dans les Annales de la Société entomologique de France (Insectes de divers ordres), et dans les Mémoires de la Société zoologique de France (Oiseaux et Mollusques), tn « C’est dans le réseau central que doit avoir lieu l’ac- couplement, autant que nous avons pu en juger par la quantité de mâles qui y étaient réunis. C’est certaine- ment là que s'effectue la ponte. — Celle-ci paraît être presque simultanée pour toutes les femelles d’une même colonie; à ce moment, les mäles ont disparu, les fe- melles ont cessé de filer des toiles régulières ; elles se tiennent sur le réseau central, à quelques centimètres les unes des autres, gardant chacune son cocon dans une immobilité complète. — Le cocon est lui-même des plus singuliers et ressemble plus à un débris végétal accidentellement tombé, qu’au travail d’une Araignée. » Nous ne saurions mieux faire que de renvoyer aux excellents dessins qui complètent fort heureusement les descriptions reproduites en partie ci-dessus. Le texte de M. Simon est en effet accompagné de 4 planches. — Ajoutons que les espèces qui ont fait l’objet de ses études, sont toutes inédites et que le genre Anelosimus est également nouveau. Mais la description de ces formes, toute soignée qu’elle puisse paraître, semblera de médiocre intérêt après la lecture des curieuses et suggestives observations qui précèdent. JULES DE GUERNE. 4° Sciences médicales. Féré (D'Ch.).Les Epilepsies et les Epileptiques, in- 8 vir-636 pages, avec 2 planches hors texte. (Prix : 20 fr.) F. Alcan, 108, boulevard Saint-Germain. Paris, 189, On ne saurait avoir la prétention d'analyser ici en détail le livre de M. Ch. Féré; c’est en effet un traité complet de l’épilepsie : description clinique de la ma- ladie, étiologie, anatomie et physiologie pathologiques, traitement, toutes les questions enfin qui se rapportent au sujet, sont passées en revue et traitées longuement, L'analyse physiologique et psychologique des phéno- mènes épileptiques ne tient cependant que la moindre place dans cet ouvrage ; c’est à la description de la maladie, à l’étude de ses causes et de son traitement que M. Féré s’est spécialement attaché. Le titre même du livre indique en quel esprit il est concu et quelle est la doctrine de son auteur. « L’épilepsie, dit M. Féré, ne reconnaît pas pour cause une lésion spécifique précise; il est bien établi, au contraire, que ses diverses mani- festations se produisent en conséquence de lésions ou d’altérations fonctionnelles très diverses, L'épilepsie ne doit donc plus être considérée comme une maladie, mais comme un groupe de syndromes, les épilepsies, dans lesquelles il faut faire rentrer les éclampsies, qui sont en réalité des épilepsies aiguës. et l’épilepsie par- tielle, qui paraît destinée à éclairer la pathogénie des autres formes. » Ces syndromes peuvent être divisés en quatre groupes principaux : 1° moteurs, 2° sen- soriels, 3° viscéraux, 4 psychiques, Ces syndromes ne sont pas d'ordinaire dissociés et se rencontrent de cou- tume simultanément ou successivement chez un même sujet; ils peuvent se combiner de manières très diflé- rentes; aussi, bien que les phénomènes épileptiques soient, à tout prendre, toujours les mêmes, y a-t-il en réalité autant d’épilepsies que de malades ou peu s’en faut, Les causes des accidents épileptiques sont extrèmement variées, mais ce ne sont en somme que des causes occasionnelles; la cause véritable, c'est la prédisposition congénitale, la dégénérescence hérédi- taire, Plus cette prédisposition est intense, plus étroite est la place qu'il faut faire à l’action de la cause occa- sionnelle. Dans l’épilepsie dite essentielle, cette action est réduite au minimum, mais dans l’épilepsie par- tielle ou jacksonienne elle-même, le rôle de la lésion irritante ou de la tumeur est un rôle secondaire; il n’y a pas de différence profonde entre l’épilepsie vulgaire et l’épilepsie partielle : les accidents convulsifs sont les mêmes dans les deux cas; mais dans l’épilepsie essen- tielleils semblent généralisés d'emblée ; ce n’est au reste qu'une apparence ; en réalité ils se généralisent très rapidement et se généralisent toujours, tandis que dans l’épilepsie jacksonienne, ils se généralisent lentement 728 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET JNDEX et peuvent se limiter à un groupe de muscles, Dans les deux cas les troubles moteurs ou sensoriels sont d’abord localisés; cela est frappant dans les cas d’épi- lepsie générale où l'attaque est précédée d’une aura, Les accès incomplets ne diffèrent du grand accès clas- sique, avec convulsions foniques, convulsions cloni- ques et période de stertor, que par l'intensité et l'extension des spasmes; ils peuvent être accompagnés et suivis de tous les phénomènes accessoires du grand accès, Les vertiges mêmes ne sont que des crises con- vulsives en abrégé. L'épilepsie aiguë (état de mal) et léclampsie ne diffèrent l’une de l’autre que par les causes occasionnelles qui en déterminent l'apparition ; la description de l'attaque d’éclampsie puerpérale s'appliquerait exactement aux phénomènes que pré- sente un épileptique en état de mal. Dans la plupart des cas, les attaques d’éclampsie apparaissent chez des sujets qui ont des antécédents névropathiques avérés, et très souvent lorsqu'à la suite d’une scarla- tine ou d'une grossesse, il se développe des attaques éclamptiques; cette épilepsie aiguë passe ensuite à l’état chronique et se manifeste alors par des attaques isolées d’épilepsie vulgaire. M. Féré montre que c’est à tort que certains auteurs ont attribué récemment un rôle primordial aux maladies infectieuses dans l’étio- logie de l'épilepsie; la condition première et presque suffisante, c'est toujours l’hérédité névropathique, M. Féré doute même que les excès d’absinthe puissent suffire à eux seuls à créer de toutes pièces l'épilepsie chez des sujets sains. Cette conviction que les syndromes épileptiques ne peuvent se développer que chez les prédisposés, la amené à relever avec grand soin les stigmates physi- ques et psychiques de dégénérescence que l’on peut rencontrer chez les malades atteints du mal comitial. Ce qui établit un lien de plus entre les diverses formes d’épilepsie, c’est l'identité des phénomènes d’épuisement qui succèdent aux accès. M. Féré a étudié ces phénomènes consécutifs aux paroxysmes (para- lysies, troubles sensoriels, troubles de la nutrition) avec une attention toute particulière, Les troubles de la nutrition, quelle qu'en soit la cause, favorisent le développément de l’épilepsie chez les prédisposés et d'autre part les attaques répétées épuisent les sujets et déterminent chez eux un ralentissement de la nutrition. Les épileptiques ont d'ordinaire en dehors des accès peu de vigueur musculaire et cette vigueur diminue encore, comme M, Féré l’a montré par des expériences dynamométriques précises, dans la période qui suil immédiatement les paroxysmes ; il y a chez eux dimi- nution de l’acuité visuelle, diminution de la sensibilité acoustique ; leurs réactions volontaires sont plus lentes que celles des sujets normaux; souvent aussi ils pré- sentent des troubles trophiques de la peau. Enfin on sait quelle atteinte profonde portent à l'intelligence des malades les paroxysmes épileptiques qui se pro- duisent à court intervalle, et avec quelle rapidité ceux qui ont à les subir arrivent à la démence, M. Féré se rallie à la théorie qui attribue à l’épilepsie une origine corticale; il donne un résumé rapide des re- cherches et des arguments des partisans de cette théorie (Hughlings Jackson, Francois-KFranck, ete.) : « L’anato- mie pathologique, ditil, d'accord avee les recherches expérimentales, nous indique que c’esten général daus l’écorce cérébrale qu'il faut chercher la cause anato- mique de lépilepsie… Elle nous apprend aussi que, suivant le mode de début et suivant la prédominance ou la localisation des troubles périphériques, la localisa- tion des lésions de l'écorce présente des variétés assez précises, au moins en ce qui concerne les troubles mo- teurs. » M. Féré attache une importance spéciale à une variété particulière de sclérose qu'il a été amené à étudier en détail ; c’est une sclérose superficielle dif- fuse, qui est due à une prolifération de la névroglie. Il insiste à plusieurs reprises sur l’analogie qui existe à certains égards entre les lésions de la paralysie géné- rale et celles de l’épilepsie, et surtout sur l'étroite ressemblance qui unit au point de vue des symptômes les deux maladies. Il à du reste une tendance à élargir le domaine de l’épilepsie : il y fait rentrer à peu près tous les phénomènes convulsifs; ce n’est qu'avec peine qu'il laisse en dehors les tics et même l’hystérie. M. Féré a consacré six chapitres au traitement; il a spécialement insisté sur l'emploi des bromures et sur le traitement chirurgical en usage dans les cas d'épi- lepsie partielle; à ses yeux l'intervention chirurgicale est formellement indiquée toutes les fois qu'il y a eu un traumatisme; il donne avec quelques détails le manuel opératoire de la trépanalion. Dans le chapitre consacré à la médecine légale, M. Féré fait preuve d'une très grande réserve, Voie quelles sont ses conclusions : « Le médecin peut, après la constatation de quelques phénomènes somatiques, affirmer l'existence de l’épilepsie, IL doit être plus ré- servé lorsqu'il s’agit de troubles mentaux qui n’acquiè- rent de valeur que par leurs accompagnements soma- tiques. Quant aux accidents qui se sont produits hors de sa présence, il ne peut qu’en accepter la vraisem- blance ou la possibilité, C’est au juge compétent qu'il appartient de faire l’application des constatations mé- dicales au texte de la loi. Le médecin n’a pas à inter- venir dans l’interprétation légale des faits : la question du libre arbitre et de la responsabilité morale lui échappe complètement, » Ilest inutile de faire l'éloge de ce livre considérable, le nom de M. Féré suffit à le recommander à tous les lec- teurs, L. MaRiILLIER. Dmitri de Ott, Professeur de gynécologie à Saint-Pé- tersbourg. — Sur quelques modifications du pro- cédé opératoire de l’hystéro-myomectomie. — Annales de gynécologie, septembre 1891. p. 161. Pour éviter les deux grands accidents de l'hystérec- tomie abdomimale, la septicité et l’hémorrhagie, Ott (de Saint-Pétersbourg) commence par désinfecter la cavité viscérale par un curettage suivi d’une cautéri- sation au fer rouge. Après avoir lié et coupé les liga- ments larges jusqu'au voisinage de l'utérus, il place sur celui-ci un lien élastique provisoire et l’ampute. Les ligatures définitives sont faites à la soie. Les fils, au nombre de 2 ou de #%, suivant le volume du moi- gnon, sont passés avec une aiguille forte à travers le tissu utérin, cheminant à 1 centimètre de la surface de section et laissant béante la cavité viscérale. Par celle-ci on glisse une mèche iodoformée jusque dans le vagin de manière à drainer la surface du moignon si, par malheur, elle suintait, ce qui n'arrive guère lorsqu'on a eu la précaution de la toucher au fer rouge. a D' Henri HARTMANN. W ürtz (D'R.)et Leudet (D'R.). — Recherches sur l'action pathogène du bacille lactique. — Arch.ude méd. eæp. et d'anat. path. t. IT, p. 485, Paris 1891. Würtz et Leudet se sont proposé de chercher si le bacille lactique, dont la diffusion dans l'atmosphère est extrème, ne possédait pas, outre sa propriété de former de Pacide lactique aux dépens du lait, une aclion pathogène chez les animaux et chez l’homme. D'après leurs expériences, les cultures du bacille lactique possèdent une action pathogène chez le co- baye et le lapin. Si on le cultive dans le bouillon ou dans une solution de peplone, la culture présente une réaction alcaline. Elle contient, outre de l’ammoniaque, une loxine énergique dont les effets chez les animaux sont les mêmes que ceux que provoque l’inoculation de la culture vivante. Il y aurait dès lors lieu de rechercher si une fer- mentlation de cette nature, aboutissant à la production de cette (oxine, ne s'effectue pas dans certaines mala- dies du tube digestif, dans la dilatation de l'estomac en particulier. D' Henri HARTMANN. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 729 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 19 octobre, 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Elliot : Sur la ré- duction à une forme canonique des équations aux déri- vées partielles de premier ordre et du second degré. — M. E. Cosserat : Sur les systèmes cycliques et sur la déformation des surfaces. —MM. Rambaud et Sy : Ob- servation de la comète Wolf faites à l'Observatoire d'Alger. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Becquerel commu- nique les observations de températures sous le sol qu'il a effectuées au Muséum d'Histoire naturelle, pendant l'hiver 4890-1891, au moyen des appareils thermo-élec- triques de son grand-père. La persistance de conditions clhimatériques identiques pendant plusieurs mois con- sécutifs a offert pendant cet hiver une occasion favo- rable pour l'étude de la conductibilité calorifique du sol. Les appareils donnaient la température à des pro- fondeurs diverses d'une part sous un sol dénudé, d'autre part sous un sol gazonné. La comparaison des températures en ces deux points montre que le revé- tement de gazon équivaut à peu près à une couche de terre de 50 centimètres, M. Becquerel compare la marche du refroidissement et du réchauffement à tra- vers les couches de terre avec la théorie de Fourier sur la propagation de la chaleur dans la terre, les faits confirment cette théorie, — M. G. Hinrichs calcule la rotation magnétique du plan de la lumière polarisée, en partant de lhypothèse d’une torsion imprimée par le champ magnétique au prisme que constitue la mo- lécule de paraffine, d'alcool, d’aldéhyde etc. —M.Berthe- lot appelle l'attention de l’Académie sur les mémoires de M. Carey Lea relatifs aux états allotropiques de l’argent, et met sous les yeux des membres les échan- tillons couleur d’or et couleur de pourpre adressés par l’auteur. Il explique l'importance de ces résultats, qui rappellent les travaux des anciens alchimistes, tout en réservant la question de savoir si ces substances sont réellement des états isomériques de l'argent ou bien des composés complexes et condensés, participant des propriétés de l'élément qui en constitue la masse prin- cipale (97 à 98 centièmes) conformément aux faits con- nus dans l’histoire des divers charbons, des dérivés du phosphore rouge et surtout des différentes variétés de fer et d'acier. — M. E. Boyer a reconnu que si l’on fait agir simultanément, au rouge, sur un nitrate, l’oxalate de chaux etle soufre en présence de la chaux sodée, il ya réduction complète de l'azote nitrique en ammoniaque ; il indique un rouveau procédé de dosage de l'azote nitrique et de l'azote total fondé sur cette réaction, — Dans leur communication du 6 avril dernier sur les dérivés nitrés de l’ortho-anisidine diméthylée, MM. Gri- maux et Lefèvre décrivaient un dérivé trinitré de cette base, possédant un groupement CH?470°, M. P. van Romburg, en raison de ses recherches antérieures sur les amines aromatiques allylées en général, a pensé qu'il devait au contraire se produire la substitution du groupe méthyl par un groupe nitro; il a repris la ques- tion et présente diverses preuves que le corps de MM. Grimaux et Lefèvre serait en effet une nitrosamine d'initrée de l'orthoanisidine monométhylée. 39 SCIENCES NATURELLES., — M, G&. Daremberg a étudié avec détail la propriété, que possède le sérum sanguin d’une espèce d’animal, de détruire les globules rouges du sang de tout animal d’une autre espèce; ce pouvoir globulicide est supprimé par le chauffage à plus de 50° — par une exposition prolongée à la lumière dif- fuse — par une trace d'essence d'ail; diverses subs- & tances la modifient diversement; le blanc d'œuf n’a pas de propriétés globulicides ; les noyaux des globules d'oiseau ou de grenouille résistent à cette action.— M. C. Phisalix a étudié les mouvements des chroma- tophores de la peau des céphalopodes ; il a déterminé les centres et les voies d’innervation de ces organes; il considère le mécanisme de ces mouvements comme produit par une couronne de muscles radiaires, exten- seurs, et non comme étant de nature amiboïde; en effet, la destruction du centre d’un chromatophore laisse subsister le mouvement, une incision circulaire périphérique le supprime.— M. F.-P. Le Roux expose, dans un extrait du mémoire qu’il présente, une théorie de la diathèse rhumatismale, à laquelle il reconnaît comme cause la production de glaires intestinales, Mémoires présentés. M. Parenty : Etablissement des lois générales de l'écoulement et de la détente des gaz à travers les orifices de contractions et de conductibi- lités diverses, d’après les travaux de Hirn. — M. le Dr Pigeon adresse diverses notes relatives aux vaccina- tions et au mode de production des épidémies de cho- léra. — M. E. Delaurier adresse une note relative à son « Moulin universel », — Nouvelles : M. Tondini informe l’Académie qu'un synode général des Armé- niens catholiques à décidé l'adoption du calendrier grégorien à la place du calendrier julien, Séance du 26 octobre. 1° SGIENCES PHYSIQUES. — M. H. Poincaré examine les équations auxquelles doivent satisfaire, dans la théorie de Maxwell, les oscillations hertziennes ; ces équations jouissent de propriétés qui peuvent dans cer- tains cas faciliter le calcul de la période ; de plus, elles permettent d'étendre à un excitateur quelconque les résultats de Hertz relatifs à l’état du champ électro- magnétique et à la radiation de l'énergie. —A propos de la communication de M. H. Gibault (12 octobre) sur la variation de la force électro-motrice des piles avec la pression, M. P. Duhem rappelle qu'il a furmulé dans diverses publications antérieures la relation que les expériences de M. Gibault viennent de confirmer. — M. E. Gossart a fait de nouvelles recherches sur l’état sphéroïdal des liquides: en observant la tempé- ralure minimum des plaques à caléfaction, il a reconnu que sur des métaux entièrement polis, les sphéroïdes peuvent se maintenir bien au-dessous de leur point d’ébullition ; il a étudié aussi le roulement des liquides les uns sur les autres, principalement dans les liquides alcooliques ; il établit pour ces faits divers principes, d’où il tire une méthode pour déceler les impuretés de ces liquides, — M. Faye présente un mémoire de M. de la Monneraye sur une trombe observée aux Comores et un mémoire de M. Le Goarant de Tro- melin « Sur les causes originelles des cyclones et sur leurs signes précurseurs ». Les observations contenues dans ces mémoires concordent avec le schéma du cyclone de M. Faye. — M. Leteur a préparé les divers bromostannates alcalins en mélangeant les solutions concentrées du bromure alcalin et du bromure stanni- que et évaporant dans le vide; les bromostannates s’obtiennent ainsi en beaux eristaux jaunes, — Dans une communication-antérieure M. G. Rousseau avait montré qu'une solution concentrée de perchlorure de fer, maintenue quelque temps entre 160° et 220° donne naissance à l’oxychlorure ferrique cristallisé 2 Fe 05, Fe°Clô, 3 H20. En chauffant la solution très concentrée de perchlorure à des températures supérieures à 220° en présence d’un fragment de marbre, il a obtenu succes- sivement les deux oxychlorures anhydres, 2 Fe?205, 730 ACADEMIES ET SOCIÉTES SAVANTES Fe? CIS, entre 225° et 280°, et 3 Fe203, Fe? CIF, entre 3000 et 3409, — M. H. Baubigny indique la marche à sui- vre pour obtenir des dosages exacts du thallium par précipitation à l’état de proto1odure, — M. H. Causse a reconnu que le chlorure du sodium en solution sa- turée s’oppose à la dissociation par l’eau des sels de bismuth, comme il l’avait déjà reconnu pour le chlorure d’ammonium; partant de ce fait, il a préparé le sa- licylate basique de bismuth.— MM. Mallard et C. Cu- menge ont découvert dans le gissement de cuivre du Boléo (Mexique) un minéral en beaux cristaux eubi- ques, bleu indigo ; l'analyse y a montré la présence de l'argent, du cuivre, du plomb, et du chlore; la com- position centésimale est représentée assez exactement par la formule PbCP-ECu 0, H0 a Ag CI. L'examen cristallographique montre qu'il s’agit d’un système pseudo-cubique ; on trouve d’ailleurs quelques cristaux octaëdriques. — M. C. Matignon donne les résultats expérimentaux qui l'avaient amené il y à plusieurs mois déjà à concevoir la loi suivante qui vient d’être énoncée par MM. Stohmann et Langbein: la substitution d’un radical alcoolique lié à l’azote augmente plus la chaleur de combustion que la substitution du radical alcoolique lié au carbone, Il montre comment cette loi peut servir à l'établissement des formules de cons- titution ; comme exemple, comparant les chaleurs de combustion de l’allantoïne et du pyvurile, il démontre par cette méthode calorimétrique que ce dernier corps est bien, comme l'avait dit M. Grimaux, le dérivé mé- thylé de l’allantoïne où le groupe CH* remplace le seul hydrogène qui ne soit pas lié à l’azote, — MM. G. Bou- chardat et J. Lafont ont fait réagir l’acide benzoïque sur l’essence de térébenthine à 150°; ils étudient les produits multiples de cette réaction, — MM. H. et A. Malbot: Sur la formation d’iodures d’ammonium qualernaires par l’action de la triméthylamine, en so- lution aqueuse concentrée, sur les éthers iodhydriques de divers alcools primaires et d’un alcool secondaire, — M. C. Chabrié, coagulant du sérum du sang humain à 100°, reprenant sur l’eau chaude et précipitant par l'alcool, a obtenu un corps en petite quantité, qu'il considère comme une substance albuminoïde nou- velle pour laquelle il propose le nom d’albumone. 20 SCIENCES NATURELLES,— M. Ch. Bouchard examine d’une facon générale le mécanisme de la diapédèse et de la phagocytose, et détermine quelle place doit tenir dans la série des phénomènes l’action vasomotrice des produits solubles microbiens. Il rappelle qu’il a signalé dans les cultures du bacille pyocyanique une substance empêchant la diapédèse, substance que MM. Charrin et Gley ont démontré agir par paralysie du centre vaso- dilatateur; il propose pour cette substance le nom d’anectasine. Elle peut être employée comme hémosta- tique. Il rappelle également qu'il avait soupconné dans les cultures bactériennes une subtance antago niste de celle-là, puis M. Arloing a démontré lexis- tence d’une telle substance sécrétée par le staphylo- coque; enfin M. Bouchard vient de constater une substance excitatrice du centre vaso-dilatateur dans l'extrait de cultures tuberculeuses connu sous le nom de tubereculine de Koch; il propose pour cette substance le nom d’ectasine. — M. A. Charrin, sur des malades auxquels il injectait dans un but thérapeutique les substances solubles du bacille pyocyanique, a constaté que ces substances provoquent la fièvre. — M. Roger, inoculant à des lapins des cultures atténuées du strep- tocoque de l’érysipèle, a vu se développer chez ces animaux une maladie chronique qui se rapproche de l’atrophie musculaire progressive, telle qu'on l’observe chez l’homme. — M. E.-L. Bouvier a étudié au point de vue anatomique un Hyperoodon rostratus fe- melle échoué près du laboratoire maritime de Saint- Vaast, — A propos de la note de M. Phisalix sur les mouvements des chromatophores des Céphalopodes, M. R. Blanchard rappelle qu’il a constaté que les pré- temlus muscles rayonnants de ces organes sont des fibres conjonctives., — M. P. Bonnier examine théori- quement comment l'oreille peut donner la perception de l’espace. — M. Ad. Chatin a étudié de nouvelles espèces de Kamés (truffes blanches) de Bagdad qu'il dé- crit sous les noms de Terfezia Hafizi et T. Metaxasi; il détermine un Kamé très abondant à Smyrne comme le T. Leonis de Tulasne, — M. Decaux a remarqué que les chiffons imbibés de pétrole, provenant du nettoyage des machines, préservent des insectes nuisibles les champs de betterave dans lesquels on les répand. Mémoires présentés. — M. A. Brousset adresse un mémoire relatif à un système de chauffage à l'essence minérale, évitant les explosions. — M. E. Müller adresse un mémoire relatif à la locomotion aérienne : analyse et synthèse. — M. Teguor adresse la démons- tralion d’un théorème relatif à la théorie des nombres. L. LAPICQUE. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 13 octobre M. Marjolin : Recherches sur les résultats de l’ap- plication de la loi Th. Roussel aux enfants du premier âge placés en nourrice hors de leur famille, — M. Ed. Nocard : Sur l’emploi de la tuberculine comme moyen de diagnostic de la tuberculose bovine. Cinquante-sept bovidés furent soumis aux injections de tuberculine, Dix-neuf ont réagi; sur ces dix-neuf, dix-sept furent trouvés tuberculeux, après l’abatage. Huit au moins de ceux-ci n'auraient jamais pu être soupconnés de tuber- culose, Ce procédé a donc une réelle valeur au point de vue du diagnostic; aussi M. Nocard voudrait-il le voir employé régulièrement par les éleveurs et surtout les propriétaires d’étables, producteurs de lait pour la con- sommation, M. Nocard à employé d’une part la lymphe de Koch, et d'autre part une lymphe préparée à l’ns- titut Pasteur. Certains de ces échantillons ont donné exactement les mêmes réactions que la tuberculine de Koch. — M. Semmola : Sur le traitement physiologique de quelques maladies cutanées. Certaines formes d’ec- zéma et de psoriasis ne se montrent que pendant la saison froide. Ces dermatoses sont déterminées par l’action irritante des produits éliminés par la peau. Dans ces cas il faut stimuler le fonctionnement de la peau. Pour cela, l'auteur prescrit des bains chauds pendant trois heures par jour et des douches écossaises durant tout l'hiver. Il prescrit en outre le bicarbonate de soude aux malades arthritiques et l’iodure de so- dium aux scrofuleux. Séance du 20 octobre. M. A. Chauveau : Sur la transformation des virus à propos des relations qui existent entre la vaccine et la variole, — Les expériences récentes de l’auteur ne lui ont fourni qu'une réponse négalive en ce qui concerne la transformation du virus variolique en virus vaccinal. Différentes tentatives de cette transformation ont été faites à Hambourg, Carlsruhe, Genève, mais w’ont donné aucun résultat positif, ainsi que le démontrent les ex- périences de contrôle faites par Pauteur. Celui-ci arrive à la conclusion suivante relativement à l'influence que l'organisme du bœuf exerce sur le virus variolique : « Le virus variolique, dans l’organisme dés animaux de l'espèce bovine, reste virus variolique, Il ne se trans- forme point en virus vaccinal et ne manifeste même aucune tendance à subir cette transformation, » Séance du 27 octobre. M. A. Chauveau continue la lecture de sa commu- nication de la séance précédente sur la transformation des virus, S'il n'y a pas trausformation du virus vario- lique en virus vaccinal, peut-être y a-t-il atténuation? A cette question lauteur répond que ces deux virus sont deux agents infectieux également forts, également aptes à s'atténuer, mais latténuation ne va jamais jusqu’à la transformation d’un virus en l’autre, En un mot, le virus vaccinal n'est pas du virus variolique atténué Si atténué qu'il soit, l’auteur affirme que : 1° le virus vaccinal ne donne jamais la variole à l’homme ; 2° le ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES virus variolique ne donne jamais la vaccine au bœuf ou au cheval; 3° la vaccine n’est pas la variole atténuée et ne peut être comparée à l'infection charbonneuse bénigne communiquée aux animaux par l’inoculation du virus charbonneux atténué; 4° si la vaccine dérive de la variole, c’est par suite d’une transformation ra- dicale — jusqu'à présent hors de la portée des expé- rimentateurs — du virus variolique ; 5° enfin, ces der- nières propositions en entrainent une dernière plus générale qui est celle-ci : l’atténuation des virus n’est pas une opération qu'on puisse identifier avec leur transformation, C’est un virus d'espèce différente qui crée l’immunité antivariolique, quand on inocule la lymphe vaccinale à lhomme, ou limmunité anti- vaccinale lorsqu'on inocule la lymphe variolique au cheval ou au bœuf, SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 24 octobre 1894. MM. Lion et Marfan : Deux cas d'infection générale apyrétique par le Bacillus Coli communis dans le cours d'une entérite dysentériforme. — M. Hénocque a exa- miné au moyen de son procédé les variations de la quantité d’hémoglobine dans le sang des tuberculeux , 1° sous l'influence d’injections de tuberculine, il ya des oscillations suivies d’une baisse progressive ; 2° sous l’influence d’injections de liquide testiculaire , il y a une ascension lente, — MM. Mairet et Bosc : Recherches sur la toxicité de l'urine des aliénés, — M. G. Daremberg : Sur le pouvoir destructeur du sérum sanguin pour les globules rouges. (Voir Acad. des Sciences, 19 octobre.) — M. H. Moraua continué à inoculer en série la tumeur épithéliale spontanée de la souris blanche, sur laquelle il à fait une communica- tion antérieure; sur les animaux de sa série, il a observé deux fois le fait suivant : la gestation arrétant évolution du néoplasme, qui reprend une marche rapide aussitôt après le part. — MM. Brown-Séquard et d’Arsonval ont constaté que les extraits aqueux de divers organes animaux, injectés dans le sang d’autres animaux, sont bien moins toxiques qu'on ne le pensait: il en est ainsi, en particulier, pour le pancréas. — À ropos de la communication de M. R. Blanchard sur es sangsues d'Afrique, qui peuvent vivre longtemps dans les premières voies des mammifères, M, Mé- gain rapporte qu’il a observé à Vincennes des sangsues algériennes dans la bouche de chevaux d'artillerie qui revenaient de la campagne de Tunisie, Séance du 31 octobre, M. Roger, à propos de la communication faite à la séance précédente par MM, Brown-Séquard et d’Arson- val, sur la toxicité des extraits des tissus normaux, communique les résultats de ses recherches sur le même sujet; il a constaté aussi que ces extraits sont peu toxiques, — M. Gaube a étudié au point de vue chimique la sueur de l’homme et celle de divers mam- mifères, principalement du cheval ; il y a trouvé l’albu- mine comme élément constant; il a constaté aussi l'existence de diastases (kydroiymases) saccharifiant lamidon et peptonisant l’albumine. — M. L. Lapicque expérimentant le citrate de soude sur un homme bien portant, mais de tempérament arthritique et se nour- rissant presque exclusivement d’albuminoïdes, a cons- taté, sous l'influence de lalcalin, une diminution dans la sécrétion de l’urée ; ce résultat diffère de celui obtenu dans les expériences physiologiques récentes faites dans le cas d’une nutrition normale, L. Lapicoue. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 6 novembre 1891 M. Dufet a déjà montré dans plusieurs travaux tout le parti qu’on peut tirer de l'emploi de la méthode de la réflexion totale pour la mesure des indices de ré- fraction. Mais des doutes ont été formulés sur la légi- 731 timité même de la méthode ; on a objecté que le polis- sage de la lame à étudier devait modifier la couche superficielle, et pouvait par suite influer sur le phéno- mène de la réflexion totale. Pour apprécier la valeur de l’objection, M. Dufet a mesuré les indices d’un grand nombre de substances simultanément par cette mé- thode et par celle du prisme. Il a opéré avec des appa- reils très parfaits, goniomètre de Brünner, réflec- tomètre de Pulfrich, et a imaginé des dispositifs ingénieux pour obtenir un haut degré de précision, La perfection des méthodes a été confirmée par l'accord des résultats avec les déterminations antérieures les plus autorisées, Le nombre trouvé pour le quartz par la méthode du prisme est identique à celui de M, Macé de Lépinay. Pour toutes les substances dures, telles que le quartz ou le spath, la méthode de la réflexion totale conduit exactement aux mêmes nombres que celle du prisme, quelle que soit la substance employée pour le polissage. Mais pour les substances tendres, sel gemme, sylvine, gypse, alun, ete., il n’en est plus tout à fait de même, La méthode de la réflexion totale donne des résultats toujours légèrement plus grands que l’autre, et les écarts variables avec l’orientation cristallogra- phique de la lame sont nettement supérieurs aux er- reurs possibles, Mais ils n’affectent jamais que la cin- quième décimale, Aussi peut-on affirmer que, pour une précision ne dépassant pas la quatrième décimale, les deux méthodes se valent, et donnent exactement les mêmes résultats, Toutefois il faudrait se garder de géné- raliser ces conclusions relatives aux indices, et de les étendre à l'angle de polarisation. Dans ce cas, au con- traire, les résultats diffèrent considérablement suivant le mode de polissage. Pour l’auteur, ces deux phéno- mènes, réflexion totale, angle de! polarisation, doivent être d’un ordre essentiellement distinct et se produire dans des couches superficielles d'épaisseur différente, — La détermination des densités de l’azote, de l'oxygène et de la composition de l'air semblait, après les travaux de Regnault et de Dumas, être une question définitive- ment élablie, M. Leduc y a pourtant signalé une dis- cordance singulière, qui a été pour lui le point de départ d’un ensemble de recherches d’une grande importance, Les nombres de Regnault conduisent à une proportion centésimale d'oxygène en poids de 23,38, tandis que Dumas trouve rigoureusement 23. En exa- minant la probabilité des erreurs possibles, l’auteur a montré qu'elle a toutes chances de porter sur la den- sité de l'azote, dont la valeur admise doit être trop faible, Pour reprendre la détermination de cette den- sité, il a suivi la méthode de Regnault en y apportant différentes modifications importantes et susceptibles d’en accroître la précision. Ces recherches, conduites avec une très grande habileté d'expérimentation, lui ont donné le nombre 0,97203, au lieu de 0,97137, admis par Regnaulf. Il a pu en même temps découvrir la cause de cet écart, Dans la préparation de l’azote par le cuivre en planures, le métal doit être préalablement dépouillé des matières grasses par une oxydation super- ficielle suivie d’une réduction par l'hydrogène purifié, Or M. Leduc à montré d’une facon irréfutable que dans cette réduction l'hydrogène peut être absorbé par le cuivre. Dès le rouge sombre, il se forme un hydrure rouge hyacinthe dont la dissociation commence au rouge cerise, Regnault, non prévenu, n'a pas pris soin d'opérer la réduction au-dessous du rouge; l'azote sur lequel il a opéré contenait de l'hydrogène, et lui a donné une densité trop faible. M. Leduc a ensuite re- pris les expériences directes de Dumas et Boussingault sur la compositon de l'air atmosphérique, Le nombre 23,23 pour la proportion centésimale de l'oxygène ne poids, qui résulte d'expériences très concordantes, coïncide aussi exactement que possible avec la valeur déduite de la composition en volume de Gay-Lussae et de Humboldt. D'autre part, de nouvelles déterminations de la densité de l'oxygène préparé en électrolysant une dissolution de potasse pour éviter la présence de composés chlorés, inévitables avec le chlorate de po- 132 tasse, l’ont conduit à substituer au nombre 1,10563 de Regnault la valeur 1,10506. La composition de l'air dé- duite de ces nouvelles densités de l’azote et de l’oxyène coïncide à 755 près avec la valeur trouvée par la mé- thode précédente, Pour le poids du litre d'air, M. Leduc trouve 1,2633 au lieu de 1,2936 (Regnault). Enfin il a contrôlé l’exactitude de son mode opératoire en déter- minant par la mème méthode la densité de l'hydrogène, Quel que soit le mode de préparation employé, élec- trolyse d’une dissolution de potasse ou procédé clas- sique par le zinc et l'acide sulfurique, il a obtenu le même nombre 0,06948, qui conduit pour le poids du litre d'hydroyène normal au nombre même de Regnault 0,08984. Edgard Haunié. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 4 novembre 189. M. d'Ocagne expose dans ses grandes lignes la doc- trine que, sous le titre de Nomographie, il vient de constituer dans un livre récent en vue de faire rentrer dans une même théorie générale aussi simple que possible toutes les constructions de tableaux graphi- ques de calculs tout faits ou abaques. Il signale à ce propos le parti qu'il a pu tirer, à un point de vue exclu- sivement pratique, des principes de dualité et d’homo- graphie qui semblaient jusqu'ici ne devoir intervenir que dans des recherches purement spéculatives, — M. Fouret fait une communication sur les transfor- mations homographiques ou dualistiques qui laissent inaltérée une congruence de droites du premier ordre et de la première classe. Il démontre en particulier qu'une pareille congruence est polaire, réciproque d'elle-même, par rapport à deux séries distinctes de surfaces du second ordre. Les surfaces de l’une des sé- ries passent par les deux directrices de la congruence. Celles de l’autre sont conjuguées par rapport à ces deux droites. — M. Laïisant présente, au sujet de l’interpolation quelques remarques tendant à indiquer non pas une méthode ni une formule nouvelle, mais un procédé pratique ayant pour objet d’abréger le plus possible les calculs dans les applications. Une formule quelconque étant donnée et satisfaisant à un certain nombre d'observations, on peut par l’adjonction d’un terme complémentaire facile à calculer faire qu’elle satisfasse à une observation de plus. — M. Raffy, en appliquant aux surfaces de révolution un théorème récemment publié par M. Weingarten, prouve que la détermination de toutes les surfaces applicables sur une surface de révolution donnée revient à celle des surfaces dont les rayons de courbure p et 8° vérifient l'équation (e — OP) (p — OP) = f (MP) où M désigne un point de la surface, O un point fixe, P le pied de la perpendiculaire abaissée de O sur le plan tangent en M, et f une fonction déterminée par la nature de la méridienne donnée. — Dans une seconde communication, M. Raffy montre comment on peut former des éléments linéaires en nombre infini, tels qu'on connaisse des surfaces (imaginaires) ad- mettant cet élément linéaire et dépendant d’une fonc- tion arbitraire. Il indique aussi de nouvelles surfaces dont on peut trouver des déformations dépendant d’un paramètre arbitraire. M. d'OcaGxe. SOCIÉTÉ DES INGÉNIEURS CIVILS Pendant les vacances, la Société a recu les communi- cations suivantes : M. Coste dans une étude sur les Chemins de fer à voie étroite, compare les voies de 1",00 et 0®,60 au double point de vue des conditions d’établis- sement et d'exploitation et de l'effet utile qu’on en peut obtenir, Traitant successivement de l’épaisseur et de la largeur du ballast, des déclivités et rayons des courbe s, de la vitesse des trains, du nombre des voyageurs et du ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES poids utile en marchandises, du poids des rails et locomotives, de la dépense kilométrique d’établisse- ment et des frais d'exploitation, il conclut que Ja dépense d'établissement d'une voie de 1,00 est peu supérieure à celle d’une voie de 0,60; et qu’au con- traire les résultats d'exploitation sont beaucoup plus considérables. — M, Grille est partisan de chemins à voie de 060, c’est-à-dire de la brouette, du camion à vapeur, qui est économique et se prête à des courbes de très petit rayon. — La discussion du projet de Paris Port de mer, projet exposé dans une précédente séance donne lieu à de nombreuses observations, — M. Badois tend à démontrer que le projet présente des dangers au point de vue hydrologique et hydrographique par suite de l’abaissement des plans d'eau et de l’asséche- ment de la Normandie qui résulteraient de sa réalisa- tion ; il examine les accidents possibles dans le cas d'une grande crue, ou, au contraire, de l’abaissement subit des eaux. D'ailleurs, il conteste l'utilité du canal : ce qu'il faut — selon lui — c’est développer le commerce de Paris vers le nord en le reliant à Bou- logne et Dunkerque. — M. Boxquet de la Grye rappelle d’abord que son projet a été déclaré exécutable par le Conseil général des Ponts et Chaussées; quant au service de la navigation, il est à la fois juge et partie. Au point de vue de l'utilité, c’est un fait qu'il est de toute nécessité de faire avancer les navires dans les terres. Relativement aux objections concernant la transformation que le canal est accusé de faire subir à la Normandie, on peut dire que cette région doit sa fertilité à son climat maritime; d’ailleurs la différence maxima entre les plans d’eau futurs et l’étiage est de 3 mètres, et les approfondissements n'existent que sur des longueurs insignifiantes; enfin dans chaque mairie, le long de la Seine, on a consulté les intéressés qui se sont déclarés favorables au projet. M. Bouquet de la Grye insiste ensuite sur le nombre des écluses : il n'y en a que quatre, et c’est ce qui plaira aux marins. Si l’on passe à l'augmentation de la vitesse du courant en cas de crue, on trouve, en la calculant, qu'elle n’empêchera jamais les navires de remonter; quant aux débäcles elles seraient moins dangereuses pour les navires qu'elles le sont pour les chalands. A propos de l'utilité, plus encore maintenant qu’en 1878, le canal donnera des résultats économiques, car la consommation du combustible nécessaire aux machines a baissé. Si enfin, comme on l’a dit, Paris n’est pas exportateur, pourquoi les autres ports se plaignent-ils de la concurrence que leur fera le canal? Il y a là une répétition du fait qui s’est passé quand le Havre s'oppo- sait au développement de Rouen. M. Bouquet de la Grye démontre que les armateurs auraient un béné- fice plus grand à envoyer leurs navires à Paris qu'à Rouen et que les commercants jouiront dans le pre- mier cas d'avantages équivalents, Cet avantage écono- mique que procurera le canal est également prévu par les chambres de commerce, qui toutes, — sauf celles de l'Ouest — lui sont favorables. Enfin il n’y a pas d’alié- nation de la Seine, puisque la batellerie pourra con- linuer sa concurrence. — M.Roy conteste l'utilité du canal en se fondant sur le ralentissement de vitesse qu'y subiront les bateaux et sur les prix du camion- nage. — M. Vauthier adopte les mêmes conclusions basées sur ce que les quantités de marchandises par tonneau de jauge sont plus faibles que celles adoptées par M. Bouquet de la Grye.— L'importance de ce projet, dont l'intérêt national est évident, a fait remettre la suite de la discussion à une autre séance, Séance du 2 octobre 189, M. Moreau fait une communication sur les moteurs à gaz ; il rappelle les développements qu'ils ont pris depuis l'exposition de 1867 où 3 modèles seulement étaient réunis, jusqu’à la dernière exposition qui con- tenait 53 modèles différents, et les avantages spéciaux qui expliquent ces développements. Ces avantages ne sont pas seulement pratiques, tels que la facilité d’ins- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 733 tallation et de surveillance ; ils sont aussi théoriques ; le moteur à gaz a, en effet, au point de vue thermique, un rendement sensiblement double de celui de la ma- chine à vapeur. Relativement au rendement lumineux le moteur à gaz peut encore produire, ainsi que l’a montré M. Aimé Witz, une économie singulière : il est préférable, au lieu de consommer directement le gaz dans un brüleur éclairant, de lutiliser comme source calorifique à produire la lumière par l'intermédiaire d’un moteur, d’une dynamo et d’une lampe électrique; cela tient à ce que le rendement thermique du gaz est supérieur à son rendement lumineux, ce qui est Pin- verse pour l'électricité. M. Moreau étudie ensuite le nouveau motewr système Niel ; c'est un moteur qui suit le cycle à quatre temps indiqué dès 1852 par Beau de Rochas, utilisé pour la première fois par Otto en 1876, et d’un usage si répandu aujourd'hui, On sait que ces quatre périodes son£ : 1° aspiration du mélange de gaz et d'air; 2 compression du mélange; 3° explosion; 4° expulsion des produits de la combustion. Il n'y à ainsi une explosion utile que tous les deux tours du volant; mais il y a économie de gaz. Le moteur Niel est à un seul cylindre; M. Moreau y signale principalement le système de distribution disposé de telle sorte qu'on peut caler sur l'arbre deux volants symétriques et obte- nir ainsi une grande régularité ; puis le régulateur qui permet de faire varier, d'un moment à l’autre, Pallure du moteur du simple au double. — M. Molinos présente quelques observations au sujet du projet de Paris-Port- de-Mer ; il rappelle les préoccupations relatives aux inté- rêts de Rouen et discute les chiffres de M. Bouquet dela Grye ayant trait à l'augmentation de trafic qu'apportera le canal, dont la profondeur devrait, selon lui, atteindre 8 mètres, et au prix d'exécution de ce canal, P. JanNErraz. SOCIETES MARITIMES SCIENTIFIQUES INSTITUTION OF NAVAL ARCHITECTS Session 1891 M. David Joy : Cylindre auxiliaire pour machines marines. Les organes de détente des machines marines à grande vitesse sont devenus très compliqués et en- combrants, M. Joy cherche depuis plusieurs années à substituer à ce mécanisme l’action directe de l’eau ou de la vapeur. La détente bien connue et aujourd’hui très répandue qui porte son nom était déjà un premier pas dans la voie de la simplification. Le cylindre auxi- liaire qu'il vient d'inventer en est un nouveau: ila pour effet de diminuer les efforts auxquels sont soumis les organes de détente, en vertu de leur masse et de leur vitesse considérables. Le moyen le plus simple et le moins dispendieux d'y parvenir était, sans toucher au tiroir, de remplacer par un cylindre où la vapeur aurait un rôle actif dans la conduite du tiroir, le cy- lindre ordinaire destiné à compenser le poids du train du tiroir au moyen de la vapeur qui agit sur son piston monté sur la tige du tiroir et calculé de manière à équilibrer le poids de ce train. L'auteur décrit les dif- férentes phases par lesquelles a passé la disposition adoptée pour son cylindre, Tout d’abord, il eut un tiroir spécial mû par la vapeur; puis le piston fut mo- difié de manière à faire lui-même office de tiroir. Les premiers essais donnèrent lieu à bien des difficultés. Au moment où les orifices étaient démasqués, le choc de la vapeur à l'admission, ou l'influence du vide à l'évacuation, secouaient le piston, et la vapeur s’échap- pait d’un côté vers l’autre du cylindre. En outre, l’ajus- age était fort délicat. Mais M. Joy arriva à donner au corps du piston une forme telle que ladmission et l'évacuation s’effectuant sur tout le pourtour à la fois, il se trouvait parfaitement équilibré. Le système Joy s'applique également bien aux machines horizontales. La manœuvre est des plus simples. Pour la mise en train, on admetune légère quantité de vapeur, qui équi- libre l'appareil. Puis, dès que le piston du grand cylindre s’est mis en mouvement, la vapeur, entre de plus en plus et actionne la détente. — Dans la dis- cussion générale qui a suivi cette communication, M. Thom dit avoir relevé des diagrammes des efforts supportés par une tige de tiroir, et les avoir trouvés semblables à ceux d’une pompe à air : tout le travail s’accomplit vers le commencement et vers la fin de la course, Aussi approuve-t-il invention de M. Joy ; mais il suggère d’en modifier le dispositif de manière à rendre aussi efficace que possible à bout de course l'action du cylindre auxiliaire. Il croit possible d'y arriver par une forte compression, IL pense que lc fonctionnement du cylindre Joy doit être parfait dans les machines horizontales, mais que dans les machines à pilon cet auxiliaire doit être moins utile, le poids du train du tiroir étant suffisant pour agir dans le mouvement de descente. NORTH EAST COAST INSTITUTION OK ENGINEERS AND SHIPBUILDERS Session 1891 M. J. Petree : Sur la base des échantillons des navires. Les échantillons de toutes les pièces qui entrent dans la construction des navires se déterminent d’après des nombres calculés en fonction des dimensions principales, et appelés bases d'échantillons, Chacune des Sociétés de classification a sa base propre. La base actuelle du Lloyd anglais prête le flanc à bien des objections et soulève des protestations de jour en jour plus nombreuses. La question d’un changement de base est à l’ordre du jour.— Avant son système actuel, qui dure depuis vingt ans, le Lloyd employait le ton- nage sous le pont (underdeck tonnage.) Cette base avait plusieurs inconvénients : d’abord le tonnage prévu est souvent modifié pendant la construction; le tonnage officiel provient de mesures prises directement à bord après l'achèvement, et peut différer notablement de la capacité prévue, En second lieu, le tonnage n’a pas de relation déterminée avec le déplacement; or, ce der- nier auquel les efforts sont proportionnels doit inter- venir dans la détermination des échantillons et acces- soires de coque, Le tonnage est la base fiscale, car il est la mesure de la valeur commerciale dw navire. Pour les échantillons, il faut autre chose, Si L re- présente la longueur du navire, B la largeur, D le creux , les nombres actuels du Lloyd sont, en négligeant l'arrondi des bouchains B + 2 D et L(B + 2 D)c'’est -à-dire le périmètre de la section droite et la surface latérale d’un parallélipipède rec- tangle. Le premier de ces nombres déprécie le creux sans raison, La somme B + D, choisie par le Bureau Véritas, est bien préférable. Or, ce nombre est impor- tant :il règle toutes les liaisons transversales, à l’excep- tion des barrots., Peut-être serait-il à désirer que l’on exceptät aussi les varangues, qui, comme les barrots, pourraient être fixées par la largeur. Le deuxième nombre du Lloyd, qui règle les échantillons des pièces longitudinales, bordé extérieur, carlingues, etc... représente une surface; il varie comme le carré des dimensions homologues pour des navires semblables, tandis que le tonnage varie selon une puissance plus élevée, le déplacement selon Le cube, et le moment de flexion longitudinale selon la quatrième puissance. Le nombre du Lloyd n’a donc aucun rapport avec les efforts auxquels il a la prétention de proportionner les échantillons, En passant d'un nombre au suivant, les poids et les efforts réels varient bien plus rapidement que les nombres eux-mêmes. La finesse des formes a beaucoup d'influence sur le déplacement qu’elle peut faire varier du simple au double, et pourtant, elle ne modifie pas le nombre, ni par conséquent les échan- tillons, ce qui est évidemment irrationnel, l’auteur ajoute que la détermination des ancres et des chaînes devrait aussi être basée non sur le nombre du Lloyd, mais sur le déplacement. Remarquons cependant que la puissance de ces accessoires de coque dépend dans une large mesure de l'importance des œuvres mortes sur lesquelles agit fe vent, et que le déplacement ne 134 serait pas par suite une meilleure base que celle du Lloyd à cet égard. Pour revenir à la coque elle- même, l’auteur reconnaît que le choix du déplacement comme base n’est pas exempt de difficultés ; mais elles ne sout point insurmontables. D'ailleurs le déplacement est l'élément le plus important en même temps que le plus élastique, C’est lui qu'on peut le mieux régler pour un navire d'échantillons donnés. Il est d’ailleurs lié au franc-bord de telle sorte qu’il semble naturel que sa limitation devienne une condition de classification pour tous les navires, comme il Pa toujours été pour les hurricanedecks. Il suffirait que les constructeurs soumettent aux Sociétés de classifications le déplace- ment des navires en même temps que les dimensions principales et les plans. En résumé, sans proposer de formule précise, M. Petree demande une nouvelle réglementation des échantillons, basée sur le déplace- ment en charge, comme étant l'expression la plus exacte de la solidité des navires, et par conséquent de la cote que leur attribue le registre de classification. L. Viver. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 31 octobre 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. K.-J. van den Berg : Sur le calcul de systèmes centrés de lentilles. — M. C.-H.-C, Grinwis présente son mémoire : L'énergie cinétique du mouvement central (décompo- sition de la vitesse en deux composantes rectangu- laires, dont l’une est dirigée vers le centre, et étude de la variation des énergies correspondantes en quelques cas particuliers). — M. P.-H. Schoute s'occupe de deux problèmes de timbres-poste proposés par M. Em. Lemoine (Voir page 120 de la Théorie des nombres, de M. Ed. Lucas, dont la mort inattendue est une grande perte pour les sciences mathématiques). Il transforme la première question de la bande de p timbres-poste, de manière qu'elle ne se rapporte qu'à des permuta- tions des nombres 1, 2, 3... p, déduit les solutions du problème pour p+ 1 de celles du problème pour p et explique la table synthétique suivante du nombre X, des solutions du problème jusqu'à p— 9. 0 Xp dr 20 ) 6 L... L 16 De D 50 62516 144 Her 462 8... 8 1392 FSC] 4527 Ensuite, il fait voir que les nombres X,, des solu- tions du problème de la feuille rectangulaire de pq timbres-poste doit surpasser l’expression vi EE) RIRE PA à cause de la fixation des positions intermédiaires par les plis transversaux. Ainsi, au lieu de X33— 216, Nu — 5120... Xo,o — 263754 292230, on trouve des nom- bres plus considérables X3,3 — 296, X4.4 — 16096, ete. 2° ScrENCES PHYSIQUES. — Rapport de MM. H. Kamer- lingh Onnes et H.-W.Bakhuis Roozeboom sur le mémoire intitulé : Recherche bolométrique de spectres d’absor- ption, de M. W.-H. Julius (examen de la partie extrême de linfra-rouge des spectres d'absorption de quelques liquides et du diamant; résultats remarquables), — MM. S. Hoogewerff et W.-A. van Dorp: Sur la réac- tion entre le chlorure de phtalyle et Pammoniaque et la formation de l'acide orthocyano-benzoïque. La réaction de l’ammoniaque sur le chlorure de phtalyle a été déjà étudiée par MM. Kichara, Graebe, Pictet, et récem- ment par M. Auger, MM. Hoogewerff et van Dorp se sont occupés de cette réaction en continuant leurs re- cherches sur la phtalimide, dont ils avaient trouvé la ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES transformation en acide anthranilique !, et cherchant à élucider la question de Ja constitution symétrique ou asymétrique de cet imide. En faisant tomber le chlorure de phtalyle dans un excès d’ammoniaque aqueux re- froidi et en acidulant la solution obtenue par de l'acide chlorhydrique dilué, il se dépose un corps qui, sèché sur de l'acide sulfurique, est purifié en le dissolvant dans de l’acétone, et en le précipitant de cette solution par de l’éther de prétole. La composition des fines ai- guilles ainsi obtenues est celle de la phtalimide ; son point de fusion est néanmoins à 80° — 1909; le corps fondu se solidifie pour ne fondre après qu'à 230. Il s’est transformé en phtalimide ordinaire, Il a un ca- ractère franchement acide, décompose les carbonates et les acétates alcalins et alcalino-terreux; l’acide chlo- rhydrique sépare le corps inaltéré de la solution aqueuse des sels formés, En préparant son éther éthy- lique, les auteurs le trouvèrent identique à l’éther éthylique de l'acide orthocyano-benzoïque obtenu par Müller ? et donnant la même phtalimidoxime (point de fusion, 250°). Par l'acide sulfurique, le corps se trans- forme en acide phtalamique. Les auteurs concluent que le corps n’est autre chose que l’acide orthocyano- benzoïque libre, qu’on ne connaissait pas à l’état libre. Ils montrent que, de cette réaction, on peut déduire la constitution symétrique de la phtalimide ordinaire; quant au chlorure de phtalyle, on lui attribue la for- mule asymétrique. Cette conclusion est affirmée par la préparation d’une diamide, qu’on obtient en décompo- sant par de l’ammoniaque dissous dans de l'alcool méthylique, l’éther de l'acide phtalique; cette diamide est identique à celle qu'on obtient par la réaction de lammoniaque aqueux sur la phtalimide ordinaire, Les auteurs continuent leurs recherches, — M. H.-W. Ba- khuis Roozeboom : La solubilité des mélanges de sels isomorphes ?, 3° SCIENCES NATURELLES, — M. C. van Wisselingh : Sur la lamelle de liège et la subérine., MM. N.-W.-P. Rau- wenhoff et J.-W. Moll sont nommés rapporteurs. — M. Rauwenhoff présente la thèse de M. J.-C. Konings- berger, intitulée : Sur la formation de fécule chez les Angiospermes. — M.J.-M. van Bemmelen fait connaître le résultat des recherches de M. J. Lorié sur la cons- titution du sol du Brabant et du Limbourg. 4° SCIENGES MÉDICALES. — Est décidée l'insertion, dansles œuvres de l'Académie, du mémoire de M. H.-9. Possion 30 Ménactar Fig. 1. Hamburger : Sur l'influence de la respiration sur la perméabilité du sang. — M,.J.-B. Stokvis commu- l Voir Recueil des travaux chimiques des Pays-Bas, 1. X, p. 6, et Revue générale des Sciences, t. II, p. 94. ? Berichle der deutschen chemischen Gesellschaft, 1886, p. 1498. 5 Oswald's Zeitschrift für physikalische chemie, t. VII, p. 504. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 1 CS ©£, #ique les résultats de ses expériences sur l’antago- nisme mutuel des poisons et l’action combinée d’an- tagonistes mutuels. Dans ces expériences, il s’est servi du cœur de la grenouille, isolé et nourri artificielle- ment par du sang de bœuf dilué, Dans une première série d'expériences, il a constaté que la muscarine et la digitaline se comportent par rapport à cet organe comme des poisons antagonistes mutuels, c'est-à- dire que les effets paralysants de la muscarine sont toujours annihilés par l'action excitante de la digi- taline, et vice versa. Ajoutant en même temps au sang qui traversait le cœur, de la muscarine et de la digi- taline, il trouve que l’action antidotaire se prononce d'autant plus, étant donnée une solution invariable de muscarine (1/25000), que la solution de digitaline appliquée en même temps est plus diluée, En effet, ïa représentation graphique (fig. 1) montre que l’intensité de la contraction du cœur, mesurée par la pression du sang, s'abaisse très vite quand le sang contient 1/25000 de muscarine et 41/5555 de digitaline, tandis qu’elle ne présente pas de changement considérable quand le sang contient 1/25000 de muscarine et 1/33333 de digi- taline. En dernier lieu, il remarque que le rétablis- Pression 102 90 x È cé l'aide de l'antidote co de digitaline 35, NE us aridote 22 E----------. te 0 SRE 15 1820 85 Minntes sement du cœur empoisonné s'effectue beaucoup plus lentement dans le cas de la muscarine seule que dans le cas des deux antagonistes à la fois. Cette différence est indiquée dans la figure 2 où les deux croix font connaître le moment où le sang empoisonné a été remplacé par du sang normal, SCHOUTE, : Membre de lPAcadémie, SOCIÉTÉ DE PHYSIOLOGIE DE BERLIN Dans le compte-æendu de la séance du 16 octobre, paru dans le précédent n° (p.685), au sujet de la note de M. Li lienfeld, lire partout « plaquettes du sang » au lieu de « glo- bules sanguins ». Séance du 30 octobre. M. J. Gad en excitant la portion de l'écorce du cer- veau du lapin qui est située de part et d’autre du sillon longitudinal en avant du point de rencontre de celui- ci avec la suture coronale, a vu se produire des mou- vements des lèvres, et des mouvements de préhension et de mastication. D'autre part, il a pratiqué une abla- tion limitée de l'écorce en ce point; alors une feuille de chou présentée à l'animal était bien saisie par les lèvres et mâchée, mais au bout de peu de temps, la mastication cessait et la feuille mâchée tombait hors de la bouche; en touchant le palais avec la côte d’une feuille de chou on obtenait des mouvements de déglutition, Par conséquent, les mouvements de masti- cation et les mouvements de déglutition étaient intacts, mais il manquait l’acte intermédiaire, de former le bol et de le pousser vers l’arrière-bouche, Quatre ou cinq jours après l'opération, les lapins opérés présentaient une autre réaction anormale; ils mâchaient des ban- delettes de papier imprégnées d’une solution de qui- nine, comme des bandelettes simplement mouillées, tandis que les lapins normaux rejettent aussitôt la solution de quinine. Le sens du goût, très facile à mettre en évidence chez le lapin, est aboli par l’abla- tion d’une parlie déterminée du cerveau. C’est lPassence de ce sens que M, Gad considère comme la cause des troubles qui apparaissent dans la facon de manger des lapins qui ont subi cette ablation, Au bout de quelque temps la fonction se rétablit et les animaux mangent normalement, comme les non-opérés. L’au- teur, S'appuyant sur ces expériences, s'élève contre l'opi- nion assez répandue que les lapins ne sont pas propres à servir de sujets pour l’expérimentation sur le cer- veau, — M. H, Munk, au cours de la discussion, expose les trois facons différentes dont on peut s'expliquer la restitution d’une fonction abolie par l’ablation d’une partie déterminée du cerveau. Ou bien on admet que les centres inférieurs qui ont même fonction entrent en action après l’ablation des centres du cerveau; ou bien que les parties voisines remplacent le centre en- levé ; ou bien que toute cellule ganglionnaire peut rem- plir une fonction quelconque, suivant la nature de l'excitation qui lui parvient. Cette dernière explication exclut l'énergie spécifique du système nerveux. M. Munk pour sa part n’a jamais observé la restitution d’une fonction disparue après l’ablation totale du centre, Dr W, SkLAREK, ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 8 octobre 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M, Schober, d’Innsbruck : « Sur la théorie polaire des sections coniques. » 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Puschl1 : « Sur les forces intérieures des liquides et des gaz, » Il résulte de l’ex- rience que le travail de la chaleur pour un changement de volume du corps sous une pression p est en général différent du travail extérieur, et dans un rapport déter- p +i — l’auteur étudie la variation de à pour un corps observé, avec la pression et la température. Pour toute substance qui se raréfie à partir de l’état critique, qui passe à l’élat gazeux ordinaire, cette quantité di- minue etelle s'accroît pour un accroissement de densité, Mais la diminution de à avec la densité ne s’observe que dans des certaines limites variables avec la tempé- rature ; à passe en réalité par un maximum au-delà duquel à diminue pour un accroissement ultérieur de densité. à peut se déduire pour l’eau des expériences relatives à l’étude de l’eau sous de hautes pressions et pour les solides, des expériences d'Edlund. Quant à la variation de à avec la température, à peut sous une pression donnée finir par changer de signe pour une élévation comme pour un abaissement de température ; i reste toujours positif entre certaines limites fixes aussi bien de température que de pression, mais est négatif en dehors de ces limites, — M. Pitsch : «Sur l’'achromatisme.» L'expérience montre qu'un double prisme achromatique dont l’achromatisme est calculé pour un angle d'incidence déterminé des rayons lumi- neux, présente une position de meilleur achromatisme pour un angle d'incidence qui ne concorde pas avec celui pour lequel le caleul à été fait, En vain Fraunhofer et d’autres auteurs ont cherché à faire un calcul plus exact; ils n’ont pas réussi à retrouver le résultat de l'expérience. L'auteur cherche à donner une théorie de l’achromatisme qui soit d'accord avec l'expérience, etil arrive à ce résultat, qu'on obtient un achroma- lisme aussi bon que possible, quand des rayons voisins parallèles de la couleur la plus lumineuse du spectre (d'après Fraunhofer cela correspond à peu près à la longueur d'onde 8,874) restent parallèles après la ré- fraction, L'accord de la théorie avec l’expérience est miné 136 CHRONIQUE ———————————————————————————.————————————————…———…—…—…——…—…—…—…—…—…—…——…—………—…—…——…_——_————__——_…_……_—…—…—….…_’_<— alors prouvé par les mesures de Steinheil et Vogt, aussi bien que par celles de Fraunhofer. 3e SGiENCES NATURELLES. — M. Adamkiewiez présente un premier apercu des résultats de ses recherches sur la pression cérébrale et présente comme conclusion ses tableaux « sur l’orientation des surfaces du cerveau de l’homme vivant. » — M. Alfred Nalepa, de Linz, con- tinue ses communications sur de « nouveaux acarides » : le phytoptus enanthus, qui vient des déformations de flo- raison de la Jasione montana ; —phytoptus informis, lego- natus dentatus, ete. — M. Claus communique un exem- plaire de son ouvrage : « Les halocyprides de l'Océan Atlantique et de la Méditerranée » (avec 26 planches). — Le secrétaire annonce que les recherches scientifi- ques dans la Méditerranée orientale, qui ont été con- duites cet été, comme l’été précédent, par le vaisseau Pola, ont conduit à la découverte d’une profondeur plus grande que celles qu'avaient révélées les précédents sondages. Cette profondeur atteint 4.400 mètres et se trouve à 35° 44° 20” de latitude nord et 21° 44° 50° de longitude est, au sud-est de l’île de Cérigo. La plus grande profondeur, connue jusqu'ici était située beau- coup plus à l’ouest : elle était de 4000 mètres. Séance du 15 octobre, 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. Wernicke : La loi d'attraction des formes barycentriques. — M. Gustave Kohn : Sur les résultants d’un covariant et d’une forme fondamentale, —M. Bidschof, assistant à l'Observatoire de l’Université de Vienne : envoie un mémoire, « Déter- mination de la trajectoire de la planète Thulé, » Epoque : 20 février 4891, 0, temps moyen de Berlin: L'= 104021/30",8 M = 155.36.48,8 x —= 308.44.42,0 G = 15.26.12,1 | écliptique moyen et w — 223.18.29,9 équinoxe 1890,0. t—002:22.3430 p 4.43.14,2 loga — 0,629667 u —= 403'1860 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Trabert : « La marche journalière de la température et de la radiation solaire sur le sommet du Sonnblick. » D’observations qui ont duré quatre ans, on a déduit les lois suivantes : Même au Sonnblick la quantité de chaleur amenée par con- vection est plus de trois fois plus grande que la quan- tité de chaleur recue directement par l'absorption des rayons solaires. La loi de la variation de la radiation avec la température peut s’énoncer en disant que la chaleur rayonnée dans l’unité de temps par l'unité de masse d’air vers une enceinte dont la température est le zéro absolu, est proportionnelle à la température absolue de la masse. Enfin les jours sereins finissent au Sonn- blick, durant toute l’année, 1° ou 2° plus chauds qu'ils n'ont commencé, c'est l'inverse pour les jours bru- meux.— M. Garzarolli : Sur l'acide-y-trichlor-B-oxybu- tyrique et une nouvelle synthèse de l'acide malique. — M. Haubner : Action de l’acide sulfureux sur Pal- déhyde crotonique. 3° SCIENCES NATURELLES, — M. Léopold Réthi : Sur l'acte d’avaler et ses relations avec la partie antérieure du gosier, Emil Wer, Membre de l'Académie, CHRONIQUE LES OSCILLATIONS L'apparition soudaine d’un volcan à Pantellaria vient d'appeler l'attention des géologues sur cette petite île, située, comme on sait, au milieu du détroit de Sicile !. C’est un rocher volcanique, dont le sommet atteint l'altitude de 740 mètres; les sources minérales, — froides et chaudes, — sont nombreuses en temps normal, ainsi que les jets de vapeur. Les fumerolles sont particulière- ment abondantes dans une grotte dont la température est tellement élevée qu'il est impossible d’y séjourner plus de quelques instants. Ailleurs, les vapeurs condensées forment un lac d'une certaine étendue. C’est dire que, jusqu’à ces dernières semaines, les évents de l'ile se trouvaient dans des conditions d'activité solfatarienne. Autour d’elle la profondeur de l’eau est très variable, Un plateau sous-marin, — banc de l’Aventure des ma- rins, — baigné par environ 40 mètres d’eau, la relie à la Sicile. Au Sud-Est et du côté de l’Afrique la mer est au contraire très profonde. Rien ne faisait prévoir en ces derniers temps une modification de cet état de choses. L'activité volcanique semblait sommeiller, Elle vient de se manifester brus- quement. Depuis quelques semaines, l’île est secouée par des tremblements de terre et paraît avoir subi un mouvement de bascule du nord au sud. Certaines par- ties du littoral se sont élevées d'environ un mètre, On signale des feux jaillissants au centre de l’île. Des maisons se sont écroulées par suite des oscillations ! Les coordonnées sont : 360 4445" — 36° 52! Latitude Nord. 9032 — 9043 45" Longitude Est. La superficie de l'ile est de 103 kilomètres carrés: son péri- mètre, de 46 kilomètres. Sa population, répartie en 5 villages, se compose de 7.300 habitants. DE PANTELLARIA du sol, Des sources ont tari; toutes les citernes d’un village se sont brusquement vidées. Les falaises basal- tiques se sont écroulées sur certains points, et la côte, plus ou moins rectiligne auparavant, présente aujour- d'hui des anfractuosités profondes qui rappellent les fiords de Norwège. Un volcan nouveau a surgi du sein des flots. M. le professeur Riccio a été envoyé, par le gouver- nement italien, pour étudier ces phénomènes, Les dé- tails de l’'émersion ne sont pas encore connus. Tout porte à croire que l’on est en présence de phénomènes semblables à ceux qui, en 1831, ont accompagné la soudaine apparition de l'ile Julia, demeurée celèbre dans les annales des sciences géologiques. La Revue aura prochainement l’occasion de revenir sur ce sujet. G. Ramoxp. L'Encyclopédie scientifique des Aide-Mémoire On annonce pour le 4% janvier prochain, chez les éditeurs Gauthier-Villars et Masson, les premiers vo- lumes d'une grande publication dirigée par M. Léauté, membre de l’Institut, sous ce titre : Encyclopédie scien- tifique des Aide-mémoire. Cette Encyclopédie,qui comprendra toutes les sciences appliquées, depuis la mécanique, l'électricité, Part de l'ingénieur, la physique et la chimie industrielles, etc., jusqu’à la biologie et la médecine, se composera de petits volumes d’un caractère pratique sous une forme condensée, très au courant de la science, publiés rapi- dement et avec régularité, signés chacun d’un nom autorisé. Le catalogue des 300 ouvrages qui paraîtront successivement et des séries qu'ils formeront sera donné sous peu de jours. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 2 ANNÉE N°22 30 NOVEMBRE 1891 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER L'INDUCTION MAGNÉTIQUE ET LES PHÉNOMÈNES MOLÉCULAIRES Certaines hypothèses sur les phénomènes molé- culaires et la structure intime des corps per- mettent de concevoir la façon dont se produit l’in- duction magnélique et d'expliquer l'existence de l’aimantation résiduelle. Je me propose d'exposer les expériences que j'ai faites à ce sujet. Quand un morceau de fer, de nickel ou de cobalt est aimanté par induction, l’état magnélique pé- nètre le morceau entier; ce n’est pas seulement un changement superficiel. Brisez ce morceau en aulant de fragments que vous voudrez: vous ver- rez que chacun de ces fragments est un aimant. En cherchant une théorie magnétique, il faut péné- trer dans l’organisation même de la matière, recou- rir aux molécules. À priori deux hypothèses paraissent admissibles. On peut supposer, avec Poisson, que chaque molé- cule s’aimante quand elle est dans un champ ma- gnélique. On peut aussi admettre la théorie de Weber, d'après laquelle chaque molécule de fer est un aimant dont l’induclion ne fait que changer l'orientation. Dans cette théorie, un morceau de fer. vierge de toute aimantation, ne présenterait aucun pôle, — bien que ses molécules soient elles-mêmes des aiments, — parce qu'elles sont pêle-mêle quant à la direction et ne se trouvent pas plus orientées d’un côté que d’un autre. Mais aussitôt qu'on les soumet à l’action inductrice du champ, elles changent d'orientation el viennent se placer dans la direction du courant ; tout se passe comme si chaque particule élémentaire présentait un pôle magnétique. REVUX GÉNÉRALE, 1891. Tous les faits confirment l'hypothèse de Weber. Il en est un que je dois indiquer tout de suite, car il se présente comme la conséquence de sa théorie : cette théorie exige que, lorsque les ai- mants moléculaires se trouvent tous tournés dans la même direction, le morceau ail reçu toute l’ai- mantalion dont il est capable. Si donc l'hypothèse de Weber est conforme à la réalité, il faut nous attendre à trouver une limite à l’aimantation pro- duite dans un morceau de fer ou de tout autre mé- tal susceptible de s'aimanter sous l’action d’un champ magnétique, si puissante que puisse être celte influence. Or, c’est là le fait qu’on observe. Le phénomène de la saturation a été établi il y a nombre d'années déjà à la suite d'expériences qui fixèrent la limite de l'intensité d’aimanta- tion. Lorsqu'un morceau de fer est placé dans un champ magnétique, ilne devient saturé que si le champ est extrèmement fort. Un champ faible ne produitque très peu d’aimantalion; à mesure qu’on augmente Sa puissance, l’aimantation augmente jusqu'à une certaine limile. Cela montre que les molécules ne s’alignent que lentement sous l’in- fluence inductrice. La résistance des molécules est vaincue à mesure que croit la puissance du champ. Quelle est la force qui empêche les molécules de se rendre immédiatement à l'influence ortentante du champ, et d’où vient cette force? Enfin, com- ment se fait-il que les molécules, après avoir été déplacées, ne retournent que partiellement à leur place, et non pas d'un coup toutes ensemble 22 133 J.-A. EWING. — L'INDUCTION MAGNÉTIQUE ET LES PHÉNOMÈNES MOLÉCULATRES aussitôt que l’action du champ vient à cesser? Je crois qu'on peut résoudre ces questions d’une facon satisfaisante et complète en tenant compte des actions que les molécules exercent nécessai- rement les unes sur les autres par cela même qu'elles sont des aimants. Nous allons étudier cette question en examinant la façon dont se comportent des groupes de petits aimants montés sur des pivois comme des aiguilles de bous- soles, libres par conséquent de tourner, mais influencés chacun par la présence de ses voi- sins. Examinons d'abord ce qui arrive lorsqu'un morceau de fer, d'acier, de nickel ou de cobalt est aimanté par un champ dont la puissance augmente graduellement : nous pouvons faire l'expérience en plaçant un morceau de fer dans une bobine et en lançant un courant qui croitra progressivement, notant à chaque phase le de- gré d'aimantation acquise et la puissance du champ. L'observation du rapport entre la force magné- tisante et le moment magnétique n’est pas facile : la courbe qui le représente (fig. 1) montre que Z = + Wu z G < = MAGNETIC FORCE Fig. 1. le processus comprend trois phases bien distinctes. Dans la première (a) l’aimantation n'est acquise que lentement : si nous acceptons l'interprétation de Weber, les molécules ne répondent pas immé- diatement; elles sont lentes à se remuer. Dans la seconde phase (4) leurrésistance est bien moindre, car l'accroissement de l’aimantation suit de très près l'augmentation de la puissance inductrice. Dans la troisième (c) l'accroissement d’aimanta- tion devient peu sensible : on voit que l’induit ap- proche de très près de l’état de saturation, bien que l’action inductrice soit encore loin de son terme. Si l’on suit le progrès de cette action jus- qu’au point P, et si l’on supprime graduellement le courant de la bobine, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus aucun champ magnétique, on obtient la courbe que figure la ligne pointillée P Q; la hauteur de 1 Q correspond à la totalité de l’aimantation, dite | rémarente ou résiduelle, qui subsiste après induc- tion. Lord Rayleigh a montré que, dans la première phase (4), il ne se produit que peu ou point d’ai- mantalion résiduelle; pendant toute la durée de la seconde phase (b), on en trouve, au contraire, une grande quantité; dans la troisième phase (c) il y en a seulement un peu plus qu’à la fin de la seconde. Donc l’action orientante qui s’exerce sur les molécules au début de l'induction (a) ne con- tribue aucunement à l'aimantalion rémanente. La | dernière phase (c) n'yintervient guère, tandis que la seconde, en b, agit puissamment pour créer l'aimantalion résiduelle. : La distinction de ces trois élats @, b, c, est inéga- lement nette suivant les métaux. Pour les voir manifestement séparés, ily a manière d'employer la puissance inductrice. M. Nagaoka, — chef d’une | légion de travailleurs japonais qui expriment par des découvertes leur recon- naissance aux savants de l'Occident, — a fait à ce su- jet une jolie expérience. Il a montré que, lorsqu'un mor- ceau de nickel est soumis à la Fig. 3. — A, pivot. fois à une traction et à B, B, aimant. une rotation dans un champ de puissance crois- sante, la première phase de son aimantation (a fig. 2) se prolonge d'une façon exception- nelle, tandis que, dans la seconde, l’influence est subite (à). Le rapport de ces faits avec la théorie molécu- laire va devenir évident, si nous examinons les systèmes de petites tiges aimantées, montées sur pivot, que j'ai imaginées pour figurer d’une façon grossière les particules élémentaires d’un métal susceptible d’aimantation. On peut faire de grands modèles où les aimants sont des morceaux d’acier en feuilles, les uns cou- pés en barres plates, d’autres taillés en forme de J.-A. EWING. — L'INDUCTION MAGNÉTIQUE ET LES PHÉNOMÈNES MOLÉCULAIRES 139 brillants à deux pointes, d'autres ressemblant à des champignons ou à des ombrelles (fig. 3); dans ceux-ci le champ magnétique est produit par une bobine de fil de laiton isolé; le fil est enroulé autour d’un grand chàssis de bois et placé sous les aimants. Quelques-uns de ceux-ci, montés sur un réseau horizontal de tiges articulées, sont suscep- libles d'écart ou de rap- prochement; cette dispo- sition permet de varier facilement les respectives des aimants pour actions mutuelles molé- cules à l'intérieur des corps soumis à l’aimanta- lion. Mettons d’abord un seul barreau aimanté sur le plateau. Lorsque le champ (y compris le champ Fis. 4. distances imiter les des terrestre) n’agil barreau peutpointer dans n'importe quelle direction , pas, ce n’a- yant pas de pré- férence.Maisaus- sitôt qu'on em- ploie un champ magnétique, mé- me très faible, le pivot tourne dans la direction de la force, rien (sauf un très léger frottement Fig. 5. —H, direction du courant. sur le pivot) ne lempêchant de tourner. Maintenant, essayons deux aimants, le courant inducteur étant ouvert : nous voyons qu'ils ontune volonté. Nous pouvons les remuer ou les déran- ger:ils reviennent pointer dans la même direction, le nord d'un côté et l’autre Si on les le sud de fig. 4). dérange, ils re- viennent à cette même position : la figure qu'ils dessi- nent reste la méê- me. Observons ce qui va arriver lorsque le courant inducteur sera fermé et que son intensité croitra. D'abord, tant Fig. 6. que le champ est faible (fig. 3), la déclinaison est insignifiante ; mais dès qu’elle augmente, la stabi- lité s'évanouit : l’état devient critique, jusqu’à ce que (fig. 6), le lien qui unit les deux aiguilles ai- mantées semble brisé; elles se alors de façon à constituer chacune une ligne presque parallèle à la direction du courant. Diminuons champ tournent graduellement la nous consta- tons alors que les aiguil- les sont lentes à retour- ner sur leurs pas; après un léger balancement, elles reprennent cepen- puissance du dant leur position pre- mière (fig. 4). Si nous devions repré- morceau de formé d’un senter un fer comme grand nombre de paires d’aimants moléculaires de cetle sorte, chaque paire Fie. 7. étant assez éloignée de sa voisine pour n’en point subir l'influence, nous pourrions déduire de cette hypothèse un grand nombre de propriétés magnétiques correspondant qu'on mais à celle observe , non pas à tou- que l'on connait. ne pour- tes celles Nous rions particulier, ren- Fig. 8, dre*compte de pas, en toute la quantité de magnétisme rémanent que l'on trouve après l'expérience. Pour établir un rapport entre les idées et les faits, il est néces- saire de con- sidérer que les molécules doivent for- mer de veaux liens nou- lorsque les anciens sont rompus; leurs relations sont d'un ordre plus compli- qué que les Fi. 9 mouvements d'ensemble, seuls visibles, du solide qu’elles cons- tituent : chaque molécule est membre d’une grande famille, et probablement peut être influencée par ses voisines. Nous nous ferons une meilleure idée de ce qui 740 J.-A. EWING. — L'INDUCTION MAGNÉTIQUE ET LES PHÉNOMÈNES MOLÉCULAIRES arrive en examinant quatre aimants (fig. 7). D’a- bord, en l’absence de champ inducteur ils se grou- pent par paires. Ét, comme dans le cas précédent, aussitôt la force induclrice appliquée, ils se dé- placent peu à peu, ainsi que je l’ai indiqué au degré a du processus magnélique. Vient ensuite l'instabilité. Le premier lien brisé, les aimants os- cillent violemment, mais, trouvant une nouvelle possibilité de former un système stable (fig. 8), ils s’y arrêtent. Enfin, le courant inducteur devenant plus fort, ils s’alignent tous les quatre parallèlement à la direction du courant (fig. 9). Les figures 10, 11 et12 montrent ces trois mêmes états dans des groupes diversement composés. D'abord si, pour une cause quelconque, le groupe est agité, les aimants se placent péle-mêle, ce-qui ne donne aucune polarité résultante pour ce groupe (fig. 10). Une force faible ne produit guère plus d'effet qu'une lorsion quasi-élastique; une force plus grande brise les lignes anciennes pour en former de nouvelles plus inclinées vers la di- rection de la force (fig. 11). Une force très grande amène la saturation (fig. 12). Dans un morceau de fer réel il y a des multitudes de groupes différemment orientés, peut-être aussi différemment disposés quant aux distances de leurs éléments. Quelques-uns se trouvent à la deuxième phase, alors que d’autres en sont encore à la pre- mière, etc. La courbe de l’induetion ne saurait donc être constituée par une ligne brisée à coude accentué; elle ne peut être qu’une ligne à angles arrondis (fig. 1). Observons en d'aimants élémentaires s'accordent avec ce que j'ai outre comment ces réunions dit du magnétisme rémanent. Si nous arrêtons la puissance inductrice avant la première phase, l'effet Flo.11: s'évanouit avant qu'aucun des aimants se soit dé- placé. Mais si nous poussons l’aimantation jusqu’à une déclinaison complète des particules élémen- taires, celles-ci restent en dehors du champ dans la position où on les a placées (fig. 11), et une partie de l’aimantation persiste. Encore les déclinaisons quasi-élastiques qui se produisent pendant la troi- Fig, 19 sième phase n’ajoutent-elles rien à l'aimanlation résiduelle. J.-A. EWING. — L'INDUCTION MAGNÉTIQUE ET LES PHÉNOMÈNES MOLÉCULAIRES 74 Notons ensuite ce qui arrive quand, après avoir appliqué la force magnétique, on la retire pour la faire agir dans une direction opposée. Il n'y a d’abord qu’une très petite réduction de la polarité formant résidu, jusqu'à ce qu'on obtienne un com- mencement de mouvement; alors la cassure se produit d’une façon précipitée. Nous trouvons là une image assez saisissante de ce que l’on cons- tale réellement quand on observe un morceau de fer ou de tout autre métal magnétique dans un cycle d’induction (fig. 13). Au cours de ce phéno- mène, il se produit en effet une boucle dans la courbe qui indique la rela- tion entre l’aiman- tation et la force in- ductrice. Le chan- gement du magné- tisme induit en- traine toujours un changement corré- latif de la puissance inductrice avec un retard dans ce chan- gement. C’est cette tendance au retard qu'on appelle l’Ays- lérésis. L'hystérésis manifeste quand l’aimantation métal magnétique vient à modifier, de n'importe quelle façon, la force in- ductrice, à moins que ces changements ne soient si petits qu'on puisse les classer dans ce que j'ai appelé le premier degré (a, fig. 1). Le magnétisme rémanent n'est qu'un cas particulier de l’hystérésis. S ss È 2 x ÿ$ Ÿ NS S S se d’un L'hystérésis se produit, quels que soient le carac- tère ou la cause du changement magnétique, pourvu qu'il entraine l'orientation des molécules. Les mouvements moléculaires qui produisent le changement d’aimantation ne sauraient être subi- tement détruits par les forces mêmes qui ont déterminé ces mouvements d'une façon successive comme quand la puissance in- ductrice est supprimée. ils cessent Nous savons d'autre part que, lorsque l'action magnétisante exercée sur un morceau de fer ou d’acier est renversée ou subit un changement cy- clique quelconque, une partie du travail est em- ployée à l'opération : le fer ne recoit de l'énergie que pendant une phase, et la restitue pendant l’autre; mais si le cycle est considéré dans son en- semble, alors il y a une perte sèche ou plutôt dé- Fig, 13. — Cycle reversible de l'action inductrice dans un morceau de fer doux (AA) et dans le même métal ayant subi une traction (BB). pense inutile d'énergie. Remarquons que cette perte est proportionnelle à la boucle dans nos graphiques. L'énergie consommée est restituée sans effet utile sous la forme de chaleur. C’est ainsi que le noyau de fer d'un transformateur dont le ma- gnétisme est renversé à chaque passage du cou- rant alternatif, tend à s’échauffer. En réalité, la perte d'énergie qui résulte de l’hystérésis réduit de beaucoup l’eflicacilé des systèmes qui distribuent l'électricité au moyen de courants alternatifs. C'est là la principale raison pour laquelle ils absorbent, pour chaque unité d'élec- tricité consommée, plus de chaleur que les systèmes à cou- rants continus. La théorie molé- culaire indique comment cette per- te d'énergie se pro- duit. Quand la mo- lécule devient chan- celante, puis perd tout à coup l’équi- libre, elle oscille-et provoque l’oscilla- tion de ses voisines, jusqu’à ce que leurs oscillations soient amorties par les courants induits tourbillonnaires qu’elles engendrent dans la masse con- ductrice ambiante. Le travail utile qui se fait pendant que la molé- cule tombe est moindre que le travail qui se produit lorsqu'elle se remet en place dans la phase symétrique du eyele. Ceci est une simple déduc- tion mécanique du fait que le mouvement offre des élats instables Dans cet article, je ne puis donner que quelques apereus sur les faits obscurs et compliqués qu'é- claire la théorie dès qu’on admet que la contrainte des molécules est due à leur action mutuelle comme aimants. On sait depuis Gilbert que la vibration facilite beaucoup le phénomène de l'induction magnétique. Que l’on frappe violemment sur un morceau de fer péndant qu'il est dans le champ inducteur, il en résultera une grande augmentation du magnétisme introduit; si l’on examine les états successifs de ce processus tandis qu’on tient le fer en vibration, on trouve que le premier degré (a sensiblement supprimé et qu’il y a une rapide et croissante aug- mentation de magnétisme presque à partir du est 742 J.- A. EWING. — L'INDUCTION MAGNÉTIQUE ET LFS PHÉNOMÈNES MOLÉCULAIRES commencement de l'opération. Ceci est facile à comprendre. La vibration fait osciller les aimants moléculaires et leur permet, en rompant leurs liens primitifs, de répondre par une légère décli- naison aux forces qui les sollicitent. Pour la même raison, la vibration doit tendre à réduire le résidu magnétique qui subsiste lorsque la puissance in- ductrice est absorbée; c’est en effet ce que constate l'expérience. Peut-être le plus sûr moyen pour montrer l’in- fluence de la vibration est-il d'appliquer d’abord une faible force magnétique avant de frapper. Si la force arrive presque à la limite de la phase 4, un grand nombre d’aimants moléculaires sont, pour ainsi dire, sur le point de chanceler, et, lorsqu'on frappe le morceau de fer, ils tombent l’un sur l’autre comme un château de cartes, et le magnétisme s'accroit brusquement. La vibration exerce toujours quelque effet de ce genre, même lorsqu'il n’y à au- cune disposition spéciale du champ. Outre la vibration, d’autres causes agissent aussi de la mème facon en précipitant le morcelle- ment des groupes moléculaires lorsque leurs liens sont déjà tendus. Il en est ainsi du changement de température ou bien de lapplication ou modifi- cation d’un effort mécanique : supposons, par exemple, que nous tendions un fil de fer suspen- du dans un faible champ magnétique, en lui fai- sant porter un poids. La première fois que nous placons le poids, le magnétisme du fil augmente, quelquefois beaucoup, en raison de l’action que je viens de décrire (fig. 14). Les molécules étant surle point de tomber, le léger effort du poids suffit pour les entrainer. Retirons le poids : il n'y aura plus qu'un très pelit change- ment dans le magnétisme, car la plus grande partie du mouvement molécu- laire ne disparaîtra pas aussitôt que le poids sera retiré.Remettons lepoids: nousne trouverons qu'une légère différence ; il v a encore des traces du pre- mier mouvement provo- qué par le poids; c’est-à- dire qu'il reste quelques groupes de molécules dont les liens n’ont pas été bri- sés dans la première ap- plication et qui cèdent, maintenant qu'elles ont perdu l’appui de leurs voisines entrées dans de nouvelles combinaisons. En réalité on peut appli- Z 4 3 ui Z & < Z Fig. 14. — Les abcisses se rapportent au Poids (Load). queretretirer le poids plusieurs fois (fig. 14), et c’est seulement lorsque ce procédé à été plusieurs fois employé qu’on voit la variation d’aimantalion pro- duite par l'extension contrebalancer exactement le changement de magnétisme, consécutif au re- trait du poids. Lorsqu’en effet nous observons une altération physique dans l’état magnétique du fer, il faut dis: tinguer entre l'effet primitif, qui est souvent très grand et ne peut être annulé, et le dernier effet, perceptible seulement après plusieursrépétiions du processus qui rend en quelque sorte fixe la slruc- ture moléculaire. Des expériences sur les effets de la température, de la tension et d’autres facteurs, ont montré depuis longtemps que cette distinction est très importante : la théorie moléculaire la rend extrêmement intelligible. Cette théorie rend compte aussi d’un autre résul- lat très curieux de l'expérience. Lorque nous ayons plusieurs fois chargé et déchargéun fil de fer, de telle sorte que l'effet ne soit plus compliqué par l’action primitive que j'ai décrite, nous trouvons encore que les changements magnétiques survenus sous l’action du poids, ne sont pas simplement détruits lorsque le poids est retiré. Séparons le poids en en plusieurs parties : nous voyons que le magné- tisme a deux valeurs différentes, en montant et en descendant, pour une seule et unique valeur inter- médiaire du poids. Les changements d'aimantation restent en arrière sur les changements de poids : en d’autres termes, il y a de l'hystérésis dans les rapports du magnétisme et du poids (fig. 15). Ceci arrive parce que chaque fois plusieurs des groupes moléculaires se trouvent brisés pendant le char- gement, et rélablis pendant le déchargement. En conséquence, le chargement et le déchargement exigent la dépense d’une petite quantité d'énergie, laquelle se convertit en chaleur et échauffe le métal. Il en résulte une conclusion remarquablement intéressante. Cette hyslérésis, avec la perte d’é- nergie qu'elle entraine, se produira aussi, même quand il n'y aura aucune aimantation d'ensemble du morceau de fer: c’est une conséquence forcée de la théorie qui fait des molécules autant d’ai- mants. Nous devons trouver et l'expérience établit! la loi suivante : Lorsque le fil de fer est chargé d’un poids et déchargé, même en dehors de tout champ inducleur et sans aimantation, le change- ment que le poids apporte à ses qualités physiques, entraine une hystérésis. En particulier, si l’on fait varier le poids du corps tenseur, la longueur du fil sera, pour un même poids, moindre pendant la charge que pendant la décharge, de sorte que du travail sera perdu dans chaque cycle. Il ne peut y l Phil. Trans., 1885, p. 614. J.-A. EWING. — L'INDUCTION MAGNÉTIQUE ET LES PHÉNOMÈNES MOLÉCULAIRES 743 avoir d’élasticité parfaite dans un métal susceptible d’aimantation, à moins cependant que la direction de l'effort soittellement fixe qu'elle ne permette pas aux molécules de chanceler. Ceci se rapporte au fait, bien connu des ingénieurs, que les nombreuses répétitions d'un effort, inoffensif en lui-même, exercent un effet dangereux sur la structure du fer et de l'acier. La théorie projelte aussi quelque lumière sur le Z 2 k uw z G < Z Fie. 45. — Les abscisses se rapportent au poids Load) — Unloading æ déchargement ; loading = chargement. phénomène ‘du retard dans l’aimantation. Si l'on place un morceau de fer dans un champ magné- tique constant, il ne prendra pas subitement autant de magnétisme que si on l'y laisse longtemps. La gradation est très sensible lorsque le champ est faible et le morceau de fer épais. Observonsla facon dont se dissocieun groupe de petits aimants soumis à une force magnétique : nous constatons d’abord que le phénomène met quelque temps à se pro- duire ; la première molécule qui cède est une molé- cule limite, relativement peu attachée au reste, comme peuvent nous apparaître les molécules à la surface d'un morceau de fer. Elle tombe, et ses voisines, affaiblies par la perte de son appui, imitent successivement sa chute ; le trouble se pro- page dans tout le groupe, de molécule en molécule. Dans un très petit morceau de fer — un fil par exemple — ily a tant de molécules à la surface et par conséquent tant de points qui peuvent devenir la source de désordres, que la séparation de la communauté moléculaire disparait trop vite pour rendre le processus quelque peu appréciable. Les effets de la température peuvent aussi être interprétés au moyen de la théorie moléculaire. Quand le fer, le nickel ou le cobalt sont chauftés dans un champ magnétique faible, on observe que leur susceptibilité magnétique augmente jusqu'à une certaine valeur; puis une température plus élevée fait évanouir presque subitement et com- plètement les propriétés magnétiques. La fig. 16, empruntée aux travaux d'Hopkinson, montre ce qui arrive lorsque la température d’un morceau d'acier augmente. La destruction subite d'aimantation a lieu lorsque le métal est chauffé à blanc: la qualité magnétique revient lorsqu'il est CAPACITY mn > = o 3 a z = 2 F w Z & < Z 200 300 4 TEMPERATURE suffisamment refroidi pour cesser de brûler. Quant à ce qui a trait au premier effet, — l'augmentation de susceptibilité à l’aimantation corrélative de l’ac- croissement de température, —je crois que c'estune conséquence de deux effets de la chaleur indépen- dants. Le métal subit dans sa structure interne une extension qui éloigne considérablement les centres moléculaires. Mais la liberté avec laquelle les molécules obéissent à l’impulsion d'une force magnétique ne dépend pas seulement de cette cir- constance : elle peut être beaucoup plus influencée par l’état vibratoire. Par conséquent lorsque le champ est faible, la chaleur aide l’aimantation à se produire et quelquefois d’une façon puissante en précipitant le passage du degré a au degré à du processus inductif. On est donc en droit de se de- mander si la perte subite de propriété magnétique à une haute température n’est pas due aux vibra- tions, alors assez violentes pour chasser les molé- eules dont la polarité ne peut plus servir à produire l’aimantation. Nous savons d'autre part que dans le passage de l’état magnétique à l’état non magné- tique il y a un changement moléculaire profond : la chaleur est absorbée; elle est restituée quand le changement contraire a lieu. Laissons refroidir un morceau de fer à partir du rouge; le métal s'étend comme l’a montré Gore au moment précis où se 744 produit le changement de température : puis il pa- rait tout à fait terne; mais bientôt, de lui-même, il redevient rouge, suivant la belie observation de Barret, par suite de la rétraction de ses molécules !, Les changements qui se produisent dans le fer et l'acier par l’effetde latempérature semblentcompli- qués, et je n'indique l'expérience précédente qu'à titre de suggestion pour les recherches. Peut-être l'explication complète des faits appartient-elle autant à la Chimie qu à la Physique. M. Arthur Hoopes, de New-York, donne-au su- jet de ces faits une intéressante illustration 2.11 a construit la courbe des rapports entre un groupe de petits aimants sur pivols et le champ magné- tique, quand le champ est mis en action, supprimé, renversé, el ainsi de suite. Les lignes ainsi obtenues sont remarquables, car elles sont identiques, quant à la forme et l’ordre de succession, aux courbes que nous savons être celles du fer solide lui-même. Les modèles que nous venons d'examiner offrent, je crois,en Physique un avantage plus général que -eluid’indiquer simplementle processus de l'aiman- tation. Les molécules des corps peuvent aveir une L'EXPÉDITION SCIENTIFIQUE DE L « TROIS LETTRES DE M. Chercheurs persévérants el sagaces, les Améri- cains du Nord ont apporté, dans les études d'his- toire naturelle, les qualités d'initiative et de raison qui les ont placés au premier rang dans les luttes industrielles et commerciales. Après avoir donné le signal des grandes explorations sous- marines en équipant le Corvin en 1867 et le Bibb en 1868, pour étudier les profondeurs du Gulf- Stream, ils se lancèrent dans des expéditions plus étendues avec le Æassler (1872), qui doubla le cap Horn, ou étudièrent presque minutieusement, à bord du Blake, la zone plus restreinte des Antilles, de la Floride et du golfe du Mexique. Dans ces campagnes mulliples, ils recueillirent des richesses considérables que purent égaler, mais non sur- passer, les merveilleuses récoltes qui ont depuis donné lant d'éclat aux recherches désormais cé- lèbres du Challenger, du Travailleur et du Talisman. Mais c'est surtout lesmersorientales du Nouveau- 1 Expérience montrant la rétraction des molécules et le re= tour de la chaleur, au moyen d'un long fil de fer, chauffé à blanc par le courant électrique. 2 Son Mémoire publié cette année dans l’£lectrical-World, a paru aussi dans l’Electrician du 29 mai 1891. E.-L. BOUVIER. — L'EXPÉDITION SCIENTIFIQUE DE L’ « ALBATROS » polarité qui ne soit pas d'ordre magnétique,polarité due, par exemple, à l’action de l'électricité statique; sous son influence les molécules se groupenten effet d'après des formes stables, de telle sorte qu'il y a dissipation d'énergie quand on brise ou qu’on réta- blit ce système. Lorsqu'on allonge un corps solide au delà de sa limite d'élasticité, on perd sans retour du travail, comme s’il se produisait un frottement interne. Et à quoi ce frottement interne est-il dû, sinon à la rupture et à la formation de liens mo- léculaires ? Si le fait existe dans le cas du frotte- ment interne, pourquoi n’existerait-il pas aussi dans le travail externe qui oblige le travail à se perdre lorsque deux corps frottent l’un surl'autre? Clerk Maxwell, dans un remarquable passage d'un de ses écrits !, émet l’idée qu'un grand nombre de phénomènes irréversibles de la Physique sont dus à la rupture et à la reconstruction de groupes mo- léculaires. Les modèles nous aident done à com- prendre la pensée de Maxwell; en les étudiant dans cet article, nous avons fait, je crois, un grand pas dans la voie que cetillustre guide nous a montrée ?. J. À. Ewing. de la Société royale de Londres, Professeur à l'Université de Cambridge ALBATROS » ALEXANDRE AGASSIZ Monde que les Américains avaient explorées jus- qu'ici; quand elles eurent abandonné leurs trésors et livré la plupart de leurs secrets, ils résolurent d'étudier, avec la même précision scientifique, les mers occidentales qui baignent leur continent. Ils aménagèrent à cet effet un excellent steamer, l’Albatros, déjà connu par ses dragages sur la côte orientale des États-Unis, et confièrent la direction scientifique de l'expédition au savant naturaliste du Blake, M. Alexandre Agassiz. L'expédition commença le 22 février dernier et comprit trois campagnes successives. Dans la pre- mière fut explorée la baie de Panama, et notam- ment la zone comprise entre Panama, l'ile des Cocos et l’ile Malpelo; dans la deuxième, l’espace / compris entre Panama, les îles Galapagos et Aca- pulco, à travers le courant de Humboldt; dans la troisième enfin le Golfe de Californie et les mers voisines, à partir du cap Corrientes sur la côte du Mexique. 1 Encyc. Brit. Art. Constitution of Bodies. 2 Cet article est extrait d’une conférence de l’auteur à la Royal Institution, publiée par le journal anglais Nature du 15 octobre 189. E.-L. BOUVIER. — L'EXPÉDITION SCIENTIFIQUE DE L' « ALBATROS » Les résultats généraux de ces recherches vien- nent d’être consignés dans trois lettres ‘adressées par M. Alexandre Agassiz au colonel Mac Donald, commissaire des pêcheries aux Élats-Unis d'Amé- rique. Ils sont du plus haut intérêt en ce sens qu'ils apportent des données suffisamment précises sur les relations qui ont existé aux époques géologiques entre les mers orientales et occidentales du Nou- veau-Monde et sur les modifications que les orga- nismes de ces mers ont dû subir depuis la forma- tion de l’isthme. D'ailleurs M. Agassiz a réalisé des expériences d’une très grande précision pour déterminer la distribution verticale des faunes dans l'Océan, et il paraît avoir réglé bien définiti- vement (c'est là peut-être le résultat principal de l'expédilion) la question si longtemps débattue des faunes océaniques intermédiaires. Au lieu de suivre M. Agassiz dans chacune de ces trois campagnes, nous croyons plus utile d'étudier successivement : 4° la distribution ver- ticale des faunes dans les océans ; 2° les caractères généraux de la faune dans les eaux explorées par V'Atbatros ; 3° l’histoire naturelle des iles Gala- pagos, dont l'illustre Darwin avait esquissé les pre- miers traits. ÏJ. — DISTRIBUTION VERTICALE DES FAUNES M. Agassiz commence par tracer une esquisse rapide des diverses opinions jusqu'ici émises sur la distribution verticale des animaux dans les Océans. « Je me suis loujours plus ou moins inté- ressé à l'élude des faunes pélagiques, écrit-il, et pendant mes premiers voyages à bord du Bluke, J'avais porté la plus grande attention à leur dis- tribution verticale ; aussi éprouvais-je le désir bien naturel de concilier les expériences et les opinions des naluralistes du Challenger et de la Gazelle et mes observations personnelles. Murray et Studer pensent l'un et l’autre qu'entre la faune pélagique et la faune des profondeurs, il existe dans les Océans une faune qu'on pourrait appeler inter- médiaire, qui à ses espèces propres el qui ne pré- sente rien de commun avec les deux autres. Je soutenais d'autre part, d’après mes expériences du Blake, qu'une telle faune iiterméditire n'existe pas, mais que la faune pélagique peut descendre, pen- dant le jour, à des profondeurs considérables pour échapper aux effets de la lumière, de la chaleur et à l’influence troublante des vents de surface ; j'a- 4 Three lettres from Alexander Agassiz to the Hon. Marshall. Mc Donald, U. S. Commissioner of Fish and Fisheries, on the Dredging Operations of the West Coast of Central Ame- rica to the Galapagos, to the West Coast of Mexico andin the Gulf of California, in charge of Alexander Agassiz, carried on by the U.S. Fish Commission steamer Albatross, Lieut. Com- mander Z.L. Tanner, U.S.N. Commanding. — Bulletin Mu- seum Comp. Zoël., t. XXI, 1891. REVUE GÉNÉRALE, 1891. 745 Joutais même que la faune de surface, dans les eaux américaines de l’Atlantique, ne devait pas descendre beaucoup au-dessous de 150à 200 brasses, quand on l’étudie loin des côtes et en eau profonde. Dans le but de vérifier ces assertions, le D° Chun entrepritunesérie d'expériences près desiles Ponza, sous les auspices de la station de Naples. Il se servit d'un filet trainant qu'il pouvait fermer, au moment voulu, à l’aide d’un appareil spécial, el dont il put se servir jusqu'à 1,400 mètres de profondeur, mais toujours à une distance relativement faible du continent et des iles du golfe de Naples; il for- mula ses conclusions en disant que « {a faune péla- gique existe à tous les niveaux jusqu'au fond ». Eflectuées au voisinage plus ou moins immédiat des côtes, et dans une mer fermée dont la tempé- ralure ne varie point au même degré que celle des Océans, les expériences du D Chun prêtaient le flanc aux critiques et, dans tous les cas, ne paru- rent pas concluantes à M. Agassiz. C'est au large, dans la mer libre et profonde, que le naturaliste voulut les répéler à bord de l'Albarros, en choisis- sant d’ailleurs un appareil qui püût capturer les organismes à un niveau délerminé et, sui- vant les besoins de l'observation, sur tout le par- cours du filet depuis ce niveau jusqu'à la surface. Les filets constamment ouverts présentent en effet un inconvénient capital qui a dans une cer- taine mesure, entaché d'erreur la plupart des re- cherches sur la distribution verlicale des faunes ; ilcapture non seulement les animaux de profon- deur, mais aussi lous ceux qu'il rencontre sur sa route quand on le ramène à la surface ; il renferme ainsi un faune mixte dont les éléments hétérogènes sont très souvent fort difliciles à démêéler, Le filet du capitaine Tanner, qui servitaux expériences de l’Atbatros répondait aux exigences multiples des expériences les plus précises; dans sa partie infé- rieure qui pouvait, au point voulu, se fermer automatiquement, élaient recueillis les organismes d’un niveau parfaitement déterminé; dans la partie supérieure ouverte s'accumulaient, au contraire, ceux des niveaux plus élevés, à mesure que le filet élait remonté vers la surface. Les expériences réalisées par M. Agassiz, avec le filet Tanner,sonttrèsnombreusesetontété répélées en divers points, dans les trois zones indiquées plus haut. Je signalerai seulement ici quelques- unes des plus probantes et des plus curieuses : «À peu près à mi-chemin entre le cap San-Fran- cisco et les Galapagos, en un point où lasonde indi- quait 1832 brasses, le filet Tanner fut descendu à une profondeur comprise éntre1739 et 1773 brasses, trainé entre ces deux limites 20 minutes environ durant, et hissé ensuite à bord. La partie inférieure ne renfermait rien que quelques fragments de 22 746 feuilles, mais la partie supérieure ouverte conte- nait les mêmes animaux de surface qu'avait précé- demment recueillis le filet jusqu'à 200 brasses. C'étaient des Doliolum, des Appendiculaires, une Sagitta énorme et une autre de petite taille, un grand nombre de Lucifers et de Sergestes, plusieurs espèces de Schizopodes et de Copépodes, deux espèces d'Hypérines probablement parasites d’une Salpe qui fut trouvée en abondance, de nombreux Calanus finement colorés, quelques Isopodes, et des fragments attribués à un Béroé qui devait mesurer de > à 6 pouces (de 12 à 15 centimètres) de diamètre. Il y avait aussi des Leptocéphales, des spécimens de Stomias, de Scopelus, de Melam- phæs et d’autres animaux, dont plusieurs, tels que certains Schizopodes, avaient élé jusqu'ici con- sidérés comme caractéristiques des grandes pro- fondeurs. Parmi les Méduses qu'on est convenu de considérer comme abyssales, plusieurs indivi- dus des genres Atolla et Periphylla furent trouvés dans la partie du filet restée ouverte. Je dois mentionner aussi, comme d'unintérèt tout spécial, un gigantesque Ostracode ‘ qui fut en deux autres circonstances capturé par moins de 200 brasses: voisin des Crossophorus, cet Ostracode était revêtu d’une mince carapace à demi transpa- rente et atteignait un peu plus d’un pouce de lon- gueur, c'est-à-dire trois fois au moins la taille du plus grand Ostracode jusqu'ici connu. » Quelle que fût la profondeur, les expériences donnèrent toujours le même résultat : de la surface jusqu'à 200 brasses la partie inférieure du filet ramenait les mêmes animaux que la partie supé- rieure restée ouverte; au-dessous de 200 brasses, et jusqu’à 100 brasses au moins du fond, le sac in- férieur restait vide, mais le supérieur renfermait les espèces qu'on trouve ordinairement au voisinage plus ou moins immédiat de la surface; enfin, à moins de 100 brasses du fond, le sac inférieur pou- vait ramener en quantité variable des espèces nageuses abyssales ?, A la suite de ces expériences, la conclusion qui s'impose est celle qu'avait déjà proposée M. Agassiz, quand il fit ses recherches préléminaires à bord du Blake : En mer ouverte la faune pélagique ne des- cend pas au-dessous de 200 brasses et se localise par 1 Les explorations scientifiques des mers ont fait connaitre jusqu'ici un certain nombre d'animaux qui peuvent être con sidérés comme gigantesques, étant donnés les groupes aux- quels ils appartiennent. A côté des Ostracodes, des Béroës et des Sagilta de grande taille dont parle ici M. Agassiz, il faut citer le Bathynomus giganteus, espèce de Cloporte qui atteignait la taille du Homard et l'énorme Pyrosome que captura le Talisman à la surface de l'Atlantique. 2 Les expériences tentées par M. Agassiz à moins de 100 bras- ses du fond paraissent peu nombreuses et, en tous cas, ont donné des résultats moins précis que les autres; elles sont d'ailleurs beaucoup plus difficiles à réaliser. E.-L. BOUVIER. — L'EXPÉDITION SCIENTIFIQUE DE L' « ALBATROS » conséquent dans les limites où la lumière et la ch2leur sont susceptibles de produire quelque ariation dans l’état physique des eaux. ll nya pas de faune pélagique intermédiaire entre ce niveau et le fond; enfin les espèces abyssales restent confinées près du fond, et celles qui sont nageuses ne paraissent pas s'en éloigner à une distance supérieure à 100 brasses. Bien différente est la distribution verticale des faunes dans les mers closes, surtout à une faible distance des côtes : la limite inférieure des espèces pélagiques s'abaisse, la limite supérieure des es- pèces abyssales au contraire se relève et l’on peut arriver, par conséquent, à un mélange des faunes dans les niveaux intermédiaires ou même au voi- sinage du fond. « Le 23 avril, dit M. Agassiz, quelques heures avant d'atteindre Guaymas, nous fimes un nouvel essai avec le filet Tanner, qui fut trainé entre 500 et 570 brasses, le fond étant par 620 brasses. Dans la partie inférieure du filet, qui revint complètement close, nous trouvämes dans ce cas un Scopèle,un Pénéide et une Hyale» c'est-à- dire un mélange de formes pélagiques et de formes abyssales. Il est à noter que Guaymas est dans le Golfe de Californie, c’est-à-dire dans une mer in- térieure peu largement ouverte vers le sud. À Toutes les expériences tentées dans le golfe de Californie, à une distance assez faible des côtes, donnèrent des résultats analogues el par consé- quent assez semblables à ceux qu'obtint le D'Chun dans la Méditerranée. M. Agassiz pense que ce mé- lange des faunes, dans les mers intérieures, doit être attribué, au moins en partie, à l’uniformité rela- tive de la température des eaux. Dans la Méditer- ranée, par exemple, le thermomètre marque 56° Ft à 100 brasses de profondeur et reste sen- siblement le même depuis ce niveau jusqu’au fond ; dans la région du Pacifique où se trouvait l’Albatros, il variait de 49° à 53° par 200 brasses de profondeur, ce qui revient à dire que la Médi- terranée, dans ses parties les plus profondes, a une température plus élevée que celle des bas- sins océaniques à la limite de 200 brasses. II. — CARACTÈRES GÉNÉRAUX DE LA FAUNE ÉTUDIÉE PAR L'Albatros. Faune pélagique. — Quelques mots sufliront maintenant pour compléter ce que nous a- vons dit plus haut sur la faune pélagique des eaux silionnées par l’Albatros. Elle est beau- coup moins riche que celle des Indes occiden- tales, surtout dans la région de Panama où le filet de surface, à part quelques rares exceptions, ne ramena guère qu'un petit nombre de Salpes, de Doliolum et de Siphonophores.On connait déjà les espèces plus nombreuses recueillies pendant la | deuxième campagne, c'est-à-dire entre les Gala- no € Ô E.-L. BOUVIER. — L'EXPÉDITION SCIENTIFIQUE DE L' « ALBATROS » 147 . pagos et Acapulco ; aux formes déjà citées on peul ajouter toutefois des Hyales, des Criséis, des Diphyes, des Cristalloïdes, des Scopèles et, en cer- tains points, des Nautiloyrapsus qui nageaient par myriades à la surface de l’eau. Dans le Golfe de Californie la faune pélagique était sensiblement la même ; le gigantesque Ostracode fut retrouvé, en compagnie d'une Bougainvillea nouvelle qui présentait huit groupes de tentacules marginaux el seulement quatre canaux chymifères. Faune abyssale. — Comme la faune pélagique, la faune abyssale des mers explorées par lPAtbatros est moins riche et beaucoup moins variée, surtout dans la région de Panama, que celle des Indes oc- cidentales. Au reste, bien qu'elle présente des variations secondaires suivant les lieux et la na- ture des fonds, on peut la caractériser par un cer- lain nombre de traits qui lui donnent une physio- nomie toute particulière. Ce qui frappe au premier abord, c’est la pauvreté en Mollusques, en Crinoïdes et en Oursins, c’est l'absence à peu près complèle de Coraux, mais c'est avant tout la rareté extraordinaire des Ophiu- res, ces Stellérides bizarres qui, dans les eaux américaines de l'Atlantique, grouillent parfois en telle abondance qu'ils occupent à eux seuls le fond de l'Océan. Les Étoiles de mer sont, au con- traire, fort abondantes, mais semblables, en géné- ral, à ceiles des Antilles et du golfe du Mexique ; quant aux Holothuries, elles donnent à la faune des régions qui nous occupent un caraclère spé- cial et sont surlout représentées par des espèces abyssales (du groupe des Elasipodes) qui présentent toutes, à divers degrés, des variations étonnantes dans l'épaisseur et la consistance des téguments. A signaler en passant un Cystechinus de très grande taille, un Clamocrinus qui « présente un mode de fixation semblable à celui des Apiocri- nidés fossiles », de curieux Bryozoaires du genre Naresia, une nouvelle espèce de Crustacé du genre Willemæsia, une Aclinie abyssale, et les Poissons caractéristiques des profondeurs, des Ceralia, des Bathypterois, des Balhynomus, ete. Les Foramini- fères n'étaient jamais nombreux à la surface, encore que la boue à Globigérines fut abondante en divers points ; par endroits, au contraire, s’éten- dait sur le fond, en masses énormes, un Forami- nifère arénacé, qui formait des rubans sinueux, de longueur parfois démesurément grande; atta- chés aux roches sous-jacentes ou simplement enfoncés dans la vase des abysses, ces Foramini- fères gigantesques semblent se développer par anneaux concentriques plus ou moins réguliers et présentent une couleur vert-olive foncé quand ils arrivent à la surface. — Les Annélides sont celles qu'on trouve communément dans les profondeurs de la mer des Antilles et du Golfe du Mexique; elles sont pour la plupart linicoles et remplissaient parfois la drague ou le chalut, de leurs tubes aban- donnés; elles sont fréquemment accompagnées par des Planaires et de brillantes Némertes. « Dans presque tous les groupes de la faune ma- rine, conclut M. Agassiz, parmi les Poissons, les Vers, les Echinodermes et les Polypes, nous avons retrouvé les types ordinaires des eaux de la côte, dont la vaste distribution géographique était déjà orientale, avec un certain nombre de formes con- nues, mais que nous avons signalées pour la pre- mière fois dans cette partie de l'Océan Pacifique. Autant qu'on peut en juger, il parait très évident aujourd'hui qu'il existe sur la côte occidentale de l'Amérique centrale, même dans les eaux pro- fondes, une faune très importante, qui a son ho- mologue dansles Indes occidentales et qui rappelle les temps précrétacés où la mer des Caraïbes! n'était tout simplement qu'une baie du Pacifique. En vérité, il existe dans les abysses, et jusqu’à un certain point même dans les eaux peu profondes, des genres qui manifestent des affinités plus grandes avec la faune du Pacifique qu'avec celle de l'Atlantique; mais des explorations ultérieures permeltront sans doute d'établir que certains de ces genres au moins doivent se ranger avec ceux dont la distribution géographique est très éten- due. » Le savant naturaliste américain attribue d’ailleurs aux grands courants équatoriaux la dis- tribution de certaines espèces sous (outes les lon- gitudes dans l'océan Pacifique ; quant à la pauvreté relative de la faune dans les régions explorées par l'Albatros, elle serait due à l'absence de tout grand courant océanique trouvant à transporter, comme le Gulf-Stream, la masse de matériaux nutrilifs dont s'emparent les animaux des profondeurs. II. — LES ILES GALAPAGOS M. Agassiz modifie singulièrement l’idée qu’on s'était faite jusqu'ici de l’Archipel des Galapagos : «En arrivant aux Galapagos au début d’un printemps très pluvieux, écrit-il, je fus frappé parle vertdécor des terres, dont les pentes élaientcouvertes de mas- sifs relalivement épais de buissons, d'arbustes et d'arbres de toute taille. Et je songeais malgré moi à la description de Darwin qui représente ces iles, au plus fort de la saison sèche, comme la suprème expression de la désolation et de l’aridité. Quel contraste! On voyait bien çà et là, sur les rives, de longues lrainées de blocs et de cendres volcaniques ornées de quelques maigres cactus, des espaces cou- verts d’une boue de même origine que les cendres, ou un gigantesque champ noir de roches volcaniques, 1 La mer des Antilles. 748 D: E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE fleuve de laves envoyé vers la mer par quelque ancien cratère; mais les grandes iles étaient recou- vertes, ordinairement, par de vastes espaces d'une terre riche et fertile, tout à fait propre à la cul- ture. Les lentatives faites à l'ile Charles, où l’on voitune plantalion abandonnée, et à l’île Chatham où M. Cobos a établi de grandes plantations et élevé de nombreux troupeaux, tout montre la fertilité de ces îles. Elles sont aussi favorablement siluées, pour la culture, que les îles Sandwich ou Maurice, et il n'y a aucune raison pour qu'elles ne rému- nèrent pas avec la même largesse leurs proprié- taires, si elles sont bien cultivées. » Les Galapagos sont tout entières d'origine vol- canique; le prétendu grès qu'on y trouve est un calcaire oolithique peu compact, formé par les débris cimentés des coraux, des mollusques et des autres Invertébrés. Les coraux qui constituent la roche appartiennent pour la plupart au genre Po- cillopore et vivent à quelque distance des côtes en masses plus ou moins étendues.Mais on n’observeja- mais de vrais récifs coralligènes dans le district de Panama, sauf peut-être, si l’on en croit les cartes de l'Amirauté, celui de Clipperton, à 700 milles environ au sud-ouest d'Acapulco. « L’absence totale de récifs coralligènes dans le district, dit M. Agas- siz, a été signalée déjà par d’autres naturalistes. D’après Dana, elle serait due à la basse température des eaux qu'amènent dans la baie de Panama, pour les diriger ensuite vers l'Ouest, le courant de Hum- boldt qui vient du Sud, et le courant froid qui vient du Nord en suivant la côte occidentale du Mexique et de l'Amérique centrale. D’après les recherches que vient d'effectuer l’A/batros, je suis plutôt porté à croire que l'absence de tout récif coralligène sur la côte occidentale de l'Amérique centrale est due à l'énorme quantité de vase qu'arrache aux flancs des collines et des mon- tagnes chaque saison pluvieuse, et qui forme une couche à la surface de l’océan jusqu’à une distance très considérable des côtes. La vase, dans la baie de Panama, se dépose en lits fort épais, dont l'in- fluence fâcheuse sur le développemeut des récifs coralligènes est, à coup sûr, considérablement accrue par le puissant apport de malières végétales qui se mêle aux dépôts terrigènes. » M.Alexandre Agassizs'occupe ensuite des origines de la faune et de la flore des Galapagos. Les cou- rants de sens contraire qui suivent la côte des deux Amériques pour atteindre la baie de Panama et refluer ensuite vers l'Ouest, sont des agents de transport très aclifs pour les animaux comme pour les plantes. Si l’on songe que le groupe vol- canique des Galapagos est à 500 milles seulement de la côte de l’Equateur (pointe de Galera el cap San-Francisco) et à 600 milles à peine de Costa- Rica, si l’on observe, d'autre part, que la force des courants est fort grande et peut atteindre parfois 15 milles par jour, on comprendra très bien que des gravines, des fruits ou des masses végélales chargées d'animaux terrestres, puissent parcourir sans dommage la distance qui sépare les îles de la côle américaine. « La flore des Galapagos, en effet, se rapproche essentiellement de celle de l’'Amé- rique, et leur faune présente des aflinités étroiles avec celle du Mexique, de l'Amérique centrale, de l'Amérique du Sud, et même avec celle des Indes occidentales, dont elle tire probablement son origine. Cette dernière observalion n’est pas sans intérêt; comme l'étude des animaux marins recueillis par l'Albatros, elle nous montre les con- nexions étroites qui ont dû autrefois exister entre la région de Panama, la mer des Caraïbes et le Golfe du Mexique. » E.-L. Bouvier, Prefesseur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris: REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE La Revue annuelle de médecine de 1890 parais- sait au moment même où il n'était question que de la découverte par Koch du remède de la tu- berculose. De tous côtés des expériences étaient poursuivies avec ardeur, imposées même par l’opi- nion publique, là où, comme en France, les mé- decins répugnaient à essayer chez l’homme une substance dont ils ne connaissaient ni la nature, ni les effets. Ces expériences, alors trop peu avan- cées pour que nous ayons pu en rendre comple, ont donné des résultats tels et si connus de tous, que nous pouvons nous dispenser de les analyser dans notre Revue de 1891. En deux mots, il a été jugé universellement : que la tuberculine de Koch ne pouvait être qualifiée de remède, puisque non seulement elle n'a pas guéri de malades, mais encore qu’elle a aggravé l’état de beaucoup d’entre eux; que la réaction produite chez les tuberculeux ne doit pas être recherchée au point de vue du diagnostic, en raison des dangers immédiats et éloignés qu'elle présente. C'est en vain que le Pr Ehrlich, au Congrès d'Hygiène de Londres, en a tenté une réhabilitation, en invoquant l'emploi de doses trop élevées du remède pour en expliquer les insuccès; son opinion n’a rencontré que des contra- dicteurs, le P' Cornil, entre autres, qui sont venus à nouveau proclamer les dangers de la tuber- culine. | Dr E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 149 + [ Cet essai, pour le moins infructueux, étant don- nées les circonstances dans lesquelles il a été tenté, ne touche en rien à l'avenir de la bactériothérapie, mais il porte en lui un enseignement : c'est que, dans cette branche nouvelle de la thérapeutique, on ne doit jamais, sous aucun prétexte, se départir de la méthode aussi prudente que rigoureusement scientifique, suivie par Pasteur dans ses recherches relatives au traitement de la rage. C'est en suivant les principes de cette méthode que MM. Grancher et H. Martin ?, expérimentant sur des lapins avec de la tuberculose aviaire, ont pu obtenir une action vaccinale du virus tubercu- leux contre le virus tuberculeux lui-même. Les mêmes expériences les ont conduits à dire que le virus atténué contient vraisemblablement une sub- stance vaccinale et une substance toxique. Le but à poursuivre serait donc de tenter l'isolement de ces deux substances. Dans cet ordre d'idées, un méde- cin anglais, William Hunter ?, recherchant les principes constituants de la tuberculine, les à trouvés au nombre de trois, de la nature des albu- moses, alcaloïdes et matières extractives; les albu- moses ayant les propriétés curative et inflamma- toire. les autres les propriétés pyrétogènes. Il a pu obtenir quatre variétés d'extraits, dont deux se- raient propres au traitement de la tuberculose : l’une ayant encore des propriétés inflammatoires, pouvant servir dans la cure des tuberculoses externes, l’autre, sans action phlogogène , dans celle des tuberculeses internes. Ces travaux, fort intéressants d’ailleurs, deman- dent à être contrôlés et complétés par de longues et minutieuses recherches, et il est probable que longtemps encore les médecins devront avoir pré- sente à l'esprit cette conclusion si pratique et si sage que MM. Grancher et Ledoux-Lebard ? formu- laient en terminant une étude de tuberculose expé- rimentale : «La production si fréquente de néphrites et de paralysies par le virus tuberculeux ou par les substances chimiques qu'il élabore, doitnous mettre en garde contre les résultats éloignés de toute méthode thérapeutique, fondée sur l'emploi des substances Luberculeuses ou de leurs produits. » Dans les conditions normales de leur existence, certains animaux sont réfractaires à certaines maladies: de ce fait est née l’idée de traiter une maladie infectieuse par le sang d’un animal réfrac- taire. C'est ainsi qu'ont été réalisés des essais de 1 Comptes rendus du Congrès de la tuberculose, 1891. 2 William Hunrer, Brit. Med. Journ., 25 juillet 1891, — Et Comptes rendus du Congres internat. d'hyg. de Londres. Sect. de Bact. 3. Gnancner et Lepoux-Leparn, Archives de Méd. expérim. 3e année, n° 2, 4er mars 1891. traitement de la tuberculose par le sang ou le sé- rum de la chèvre, du chien. C’est dans le cours de recherches relatives à un animal vaccinifère, rebelle à l'infection tubereu- leuse, pour le substituer à la vache, que MM. Bertin et Picq (de Nantes) ‘ ont été conduits à faire dans un but thérapeutique, leurs injections de sang de chèvre à l'homme tubereuleux. Au préalable, ils ont fait de nombreuses expériences sur le lapin, desquelles il est résulté que cet animal injecté à la fois de culture bacillaire et de sang de chèvre, résiste à l'infection tubereuleuse, qu'il triomphe de cette infection lorsque l'injection de sang de chèvre est faite après celle de tuberculose. Chez l’homme, leur pratique consiste à faire tous les dix à quinze jours une injection intramuseulaire de 45 à 20grammes; celle-ci ne produit pas d'accidents sé- rieux, à peine des poussées d’urticaire ; la douleur qu'elle provoque disparait assez rapidement. Cette méthode semble avoir donné de bons résultats dans le cas de tuberculoses externe, pulmonaire au pre- mier et même au second degré. — M. Bernheim ?, aidé de MM. Garnier et Pellier, après avoir tenté en vain de rendre des chèvres tuberculeuses, même par des injections intraveineuses de cultures bacillaires, a essayé aussi de se servir du sang de chèvre, mais en l'employant directement par le passage de la carotide de l’animal dans la veine céphalique du malade, opération qu'il considère comme sans danger quand le manuel opératoire est bon. La quantité de sang transfusée est de 100 à 120 grammes en une minute, mais les premières séances ne doivent pas dépasser 15 à 20 secondes. D'après les quelques observations qu'il à faites, M. Bernheim pense que la tuberculose au début peut être ainsi favorablement modifiée. — MM. Ri- chet et Héricourt * ont eu l'idée de faire des injections de sérum de sang de chien, à la dose de 1 à 2 centimètres cubes, deux à trois fois par semaine: leurs premières injections à l'homme datent de décembre 1890; depuis lors, ils ont pu s'assurer qu'elles étaient absolument inoffensives, sans réaction locale : elles ne produisent pas d'abcès, déterminent assez souvent des crises pas- sagères d'urticaire. Au point de vue thérapeutique, ils ont constaté que leur méthode ne donnait rien chez les tuberculeux anciens, chez les phtisiques à la troisième période; elle améliore les tubercu- loses externes, les lupus, qui prennent bientôt une tendance marquée à la cicatrisation; elle améliore aussi localement les tuberculeux pulmonaires peu 1 Compte rendu du Congrès de la tuberculose, Paris, 1891, et Bulletin de l'Académie de médecine, 1891. 2 Congrès de la tuberculose, 1891. 3 Compte rendu de la Société de biologie et Congrès de la tuberculose, 1891, 750 avancés, mais elle modifie surtout leur état géné- ral en augmentant leur appétit et en relevant leurs forces. Cette action salutaire sur la nutrition, ne se fait pas seulement sentir sur les tuberculeux : le P' Pinard l'a mise en œuvre avec succès chez des nouveau-nés débiles; de même, le P' Fournier, dans des cas de syphilis à formes malignes. L'intérêt de ces travaux qui aboutiront certai- nement un jour à ce que nous pouvons appeler le traitement de l'avenir, ne doit pas faire oublier tout ce qu'il y a d'utile dans les médications depuis longtemps employées, et négliger ce que l’on peut tirer d’elles en adaptant leur mode d'emploi aux doctrines actuelles sur l'évolution de la tuberculose. Tous les cliniciens sont d'accord depuis les travaux du P' Bouchard et les observations déjà anciennes de Gimbert (de Cannes) pour recon- naître dans la eréosote un médicament d’une efficacité réelle. La grande difficulté de son em- ploi consiste à le faire absorber à des doses suffisantes et longuement prolongées : or, l’esto- mac se fatigue vite; c’est là ce qui a donné l’idée de recourir aux injections sous-cutanées. Le Pr Picot ! (de Bordeaux) fait ses injections avec un mélange de gaïacol (principe actif de la eréosote) et d'iodoforme dissous dans de l'huile d'olive et de la vaseline, formulé de telle façon que 1 centi- mètre cube contienne 4 cenligramme d'iodoforme et3degaïacol ; la dose est de 1 à3 centimètres cubes introduits dans l'hypoderme entre les épaules. Les résultats obtenus dansles tubereuloses pulmonaire et pleurale ont consisté en une amé- lioration manifeste «ouvrant un espoir à un arrêt dans la marche de la tuberculose et peut-être une guérison possible.» Robertson? (de Peterborough) a employé aussi avec succès le gaïacol iodoformé, ainsi que Pignol (chef de clinique à l'Hôtel-Dieu) qui le considère comme supérieur à l'eucalyptol seul ou iodoformé, associé à la créosote, au créosol qu'il a expérimentés concurremment. M. Burlureau ‘ (du Val-de-Gràce) se sert d'huile créosotée dans la proportion de 1 de créosote pour 44 d'huile, qu'il injecte très lentement, à laide d'un appareil spécial imaginé par lui, à la dose de 50 à 220 grammes. Il a pu faire, sans accidents, 2,500 injections, à la suite desquelles il a cons- taté une grande amélioration dans toutes les formes de tuberculose, surtout les ganglionnaires. Ces in- jections, bien que représentant de très fortes doses médicamenteuses, n'ont pas produit d'accidents lo- caux : mais M. Besnier®, qui les a mises en usage, à deux 1 Académie de médecine, mars 1891 et Congrès de la tuberculose. 2 Associalion médicale britannique, juillet 1891. 55° session. 3 Médecine moderne, 1891. P. 223. 4 Société française de dermat. el syph. 12 mars 1891. 5 Société française de dermatologie et syph., mai 1891. D' E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MÉDECI altiré l'attention sur ce fait que l'action substitutive « de la créosote pouvait déterminer dans la région malade des réactions plus ou moins violentes, ne compromettant en rien la méthode, mais comman- dant une certaine prudence dans son application. Tous les médecins ne sont pas d'accord sur les doses auxquelles on doit administrer la eréosote. Les uns préconisent les doses massives, s'appuyant « sur les expériences du P' Bouchard, qui ne la considère comme dangereuse qu'à partir de M 10 grammes; c’est ainsi que Revillet, élève de Lépine, administre en lavements 3 grammes par jour; nous avons vu les doses recomman- | dées par Picot, Burlureau, etc., elc.; par contre, le professeur Peter ! s'élève contre ces pratiques et recommande de n’agir que par centigrammes, 5 à 10 à 15, mais jamais par grammes. Quel que soit le traitement employé contre la tuberculose, celui-ci n'aura de prise que si les accidents sont peu avancés; plus tard, ses effets deviennent nuls ; aussi le but de tous les cliniciens est-il de dépister l'infection bacillaire tout à fait à son début. Mais s'il est relativement facile de déli- miter la période d’'incubation d’une maladie infec- tieuse aiguë comme la variole, la scarlatine ou la rougeole, il est, par contre, fort difficile de le faire pour une maladie à marche insidieuse, subaiguë, à évolution lente, à grandes variations individuel- les, comme l’est la tuberculose. En ce qui con- cerne la tuberculose pulmonaire, le P' Grancher ? a bien montré les délicatesses d’auscultation, de percussion qui permettent de poser un diagnostic précoce; mais du fait même que l’auscultation est invoquée, il résulte que déjà des lésions tubereu- leuses existent, et ce qu'il faudrait, c'est pouvoir arriver au diagnostic avant qu’elles soient formées, dans cette période que Landouzy a si bien dé- nommée « bacillaire prétuberculeuse ». D’après Cuffer #, dès que l'organisme est envahi par la bacillose, il se produirait un certain nombre de faits constants, plus ou moins accentués, pouvant passer et passant même le plus souvent inaperçus et qu'il faut rechercher. Ce sont : la fièvre, surve- nant par accès souvent passagers et caractérisée « par un abattement extrème et une température en déseccord avec la sensation perçue par le ma- lade » ; l'anémie avec diminution considérable des globules, la splénomégalie. Ces trois symptômes, survenant chez un sujet dont les caractères sont, d'autre part, ceux d’un candidat à la tubercu- lose ou qui a présenté déjà des attaques sus- pectes, ont une importance capitale et nul doute que le jour où nous aurons à notre disposition | Semaine Médicale, 18 nov. 1891. 2 Voir Revue générale des Sciences, t. I, 15 janvier 4890. 3 Revue de Médecine, 2° année, n° 6, juin 1891, D: E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MEDECINE 751 une médication bacillicide, c’est à la période de leur apparition qu'elle devra être appliquée. Ilne suffit pas d'avancer le plus possible le dia- gnostic de la tuberculose d'évolution normale, il faut savoir aussi la reconnaitre dans ses formes larvées, là où elle prend le masque d'une autre ma- ladie, pour parler le langage des anciens. Dans cet ordre d'idées, Landouzy !, revenant sur un sujel déjà traité par lui en 1886, vient d'éclairer le dia- gnostie de certaines formes anormales de fièvres typhoïdes qu'il a prouvé n'être autre chose que de la fièvre, indice d'une infection bacillaire plus ou moins intense et qu'il a définie : fièvre bacillaire pré-tuberculeuse à forme typhoïde. Cette affection, susceplible de guérir, le malade restant dans la bacillose, sans entrer dans la tuberculose, se dis- tingue de la fièvre typhoïde par l'absence des taches rosées lenticulaires, l'absence de catarrhes, par ses oscillations thermiques beaucoup plus marquées, avec irrégularités d’un jour à l’autre, par l'élévation du pouls sans rapport avec la tem- pérature ; tandis que le sulfate de quinine a prise sur la fièvre typhoïde, il n’en a aucune sur la fièvre bacillaire, passible de l’antipyrine, quia dans l'espèce une action presque spécifique. C’est à mesure que l'on connaîtra mieux la va- leur de Lous ces faits antérieurs à la tuberculose proprement dite que l’on pourra faire réellement la prophylaxie de cette maladie. Actuellement, presque toujours le médecin n'est appelé à soigner que de vrais tuberculeux et le plus souvent à période déjà avancée. Même dans ces conditions il obtient parfois des résultats encourageants, sur- tout si le malade peut suivre une Aygiène sévère et appropriée. Comme l'a si magistralement ex- posé le P' Verneuil au Congrès de la tubercu- lose, l’émigration vers les villes est une des causes les plus actives de l’augmentation du chif- fre des tuberculeux ; au contraire il est évident que l’émigration vers la campagne empêche ou recule l’éclosion de la tuberculose, qu'elle l'amé- liore même, amène souvent une guérison tem- poraire, une (rêve qui se prolongera parfois assez pour qu'on puisse parler d’une guéri- son radicale. Les traitements suivis dans les sanutoria ne sont autres que des applications ri- goureuses et méthodiques de l'hygiène, dont les effets sont encore plus frappants. À Falkenstein, .Dettweiller ? a soigné, en 1888, 265 malades: 30 sont partis sans bacilles, et n’en ont pas eu depuis. En France, au sanatorium du Vernet, Sabourin * a obtenu d'excellents résultats, malgré les rigueurs de l'hiver 1890-1891. Mas ce sont là des questions l Semaine médicale. Juin 1891. 2 Congrès de Médecine interne de Berlin, 18. 3 Gazette hebdomadaire, nov. 1891. qui relèvent de la Revue d'Hygiène et si nous en avons dit quelques mots, c’est qu'il nous à paru intéressant, à la fin de cette année 1891, au début de laquelle on croyait avoir trouvé le moyen d’en- rayer la tuberculose, de présenter une mise au point aussi complète que possible de la ques- traitement de cette terrible maladie, IT La question de savoir si la syringomyélie et la maladie de Morvan étaient deux affections diffé- rentes a été définitivement tranchée par le profes- seur Charcot! à la suite de deux autopsies de Joffroy qui ont démontré que la symptomatologie de Mor- van pouvait relever des lésions médullaires de la syringomyélie. La maladie de Morvan n’est done plus considérée comme une forme nosologique à part, mais comme une simple variété de syringo- myélie ; cette opinion, que Roth, Czerny et Grasset avaient déjà soutenue, est maintenant adoptée par tous tant en France qu'à l'Étranger, comme l’ont établi des travaux récents de Bernhardt et de J, Hoffmann. Cependant toutes les difficultés cliniques sont loin d'être aplanies, les symptômes ne sont pas parfaitement définis; ainsi Déjerine avait consi- déré comme habituel le rétrécissement du champ visuel ; or, sur 25 cas où l'examen a été fait, ana- lysés à la Clinique de la Salpêtrière, il n'y en a eu que 9 avec rétrécissement ; encore sur ces 9, deux sont-ils imputables à l'hystérie. De même en ce qui concerne le diagnostic différentiel avec d’autres affections, comme la selérose latérale amyotrophi- que, l'hystérie, la lèpre, sur laquelle une observation récente de Thibierge vient d'attirer l'attention, car il ne faut pas oublier qu’il existe bien dans Paris une centaine de lépreux et que l’on trouve encore celte maladie dans certaines localités du Midi, sans parler de nos rapports fréquents avec l'Orient et les pays où elle est endémique. D'après Mares- tang ?, le signe différentiel pathognomonique entre la lèpre et la syringomyélie est la dissociation tion du syringomyélique ({analgésie, thermanesthésie — conservation de la sensibilité tactile), bien qu'on l'ait observée, mais rarement, dans la lèpre. De plus dans la lèpre il y a de l’atrophie et de la parésie des muscles superficiels de la face, des épaississe- ments des nerfs avec renflements nodulaires, des taches insensibles sur le corps, de la chute des poils que l’on n’observe pas dans la syringomyélie. En 1889, devant la Société de Biologie, Chaslin avait prouvé l'origine névroglique de la sclérose que l’on trouve fréquemment chez lesépileptiques, en montrant par des réactions particulières, entre 1 Gazelle hebdomadaire, avril 1891. ? Revue de médecine, 11° année, n0 9, 11 septembre. autres la réaction histo-chimique de Malassez, com- ment les fibrilles et faisceaux de fibrilles se distin- guent du tissu conjonclif. Cette étude a été re- prise par lui d’une facon plus détaillée ; prenant pour point de départ la sclérose névroglique pure, il a tenté de mellre un peu d’ordre dans le chaos des scléroses cérébrales, el est arrivé à leur grou- pement en deux grandes classes suivant que la prolifération de la névroglie est ou non inflamma- toire. Les seléroses inflammatoires sont primitives ou secondaires : les premières sont disséminées (sclérose en plaque) ou diffuses (paralysies géné- rales, encéphalites et méningo-encéphalites) :.les secondes sont partielles (réaction contre trauma- tismes, corps étrangers, lumeurs, etc.) ou diffuses (par disparilion primitive des fibres ou des cel- lules nerveuses). Les scléroses non inflammatoires sont, elles aussi, primitives ou secondaires : les primitives ont pour type la gliose (sclérose né- vroglique pure de l’épilepsie); les secondaires sont dues à des arrêts de développement, à des lésions d'évolution ou d'involution (sénilité), à des troubles de nutrition. Cette classificalion, bien que sché- matique et sujette à révision, n'en est pas moins déjà d'un grand secours pour l'étude si complexe des scléroses. Roger a publié récemment des faits fort intéres- sants relatifs à la pathogénie infectieuse de cer- taines affections du sysième nerveux. Inoculant à des lapins des cultures modifiées du streptocoque de l’érysipèle, il a pu reproduire chez quatorze de ces animaux des symptômes comparables à ceux de l'atrophie musculaire progressive, qui étaient dus à une myélile systématique caractérisée par la dé- générescence des cellules des cornes antérieures de la moelle, avec intégrité complèle du système nerveux périphérique. II Dans une série d’études fort intéressantes M. Mosny ! a élucidé la question encore si obscure des broncho-pneumonies. Ayant pris pour point de départ de ses recherches les rapports qui existent entre les agents pathogènes des pneumonies lobu- laires d’une part et les lésions histologiques, puis les affections ayant précédé l’éclosion des broncho- pneumonies d'autre part ; ayant bien établi que la pneumonie franche lobaire est exclusivement due au microbe lancéolé de Talamon-Frankel, il a d’abord rattaché à cetle pneumonie lobaire la pneumonie pseudo-lobaire, spéciale aux enfants, et considérée jusqu’à ce jour comme une forme de broncho-pneumonie. Puis il a démontré que la broncho-pneumonie,exceptionnellement primitive, estpresque toujours la complication de diverses af- l Broncho-pneumonie. — Thèse de Paris 4871, et Méde- cine moderne, n? 1, 52 D' E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE fections,en particulier de la rougeole et de la diph- térie ; que jamais elle n’est produite par les orga- nismes de ces affections, mais toujours par des microbes, en nombre très restreint, se rappro- chant beaucoup du streptocoque pyogène ; que ces microbes peuvent être introduits dans les poumons par l'air inspiré qui les tient en suspension, ou par auto-infection. La broncho-pneumonie est donc contagieuse et épidémique : d’où la nécessité d'isoler les malades alteints el de prendre vis-à- vis des menacés toutes les précautions néces- saires pour éviler le transport des contages. Récemment, Achard et Renault ‘ont publié un de ces cas rares de broncho-pneumonies primitives à sireptocoques. Chez un homme de cinquante-deux ans, la broncho-pneumonie était devenue le point de départ d'une vérilable pyohémie médicale, avec envahissement du rein, phlébite des sinus et phleg- mon de l’œil; faits bien en rapport avec les acci- dents infectieux propres au streptocoque pyogène. IV La pathologie de l'estomac a été l'objet d’inté- ressantes éludes tant à l'Étranger qu'en France ; de même qu’en 1890, les recherches ont porté presque exclusivement sur le chimisme stomacal. W est bon de rappeler que le but poursuivi est, d'une part de démèêler dans la chimie complexe de l’es- tomac, quels sont les véritables facteurs de la di- gestion, d'autre part, de trouver un procédé réel- lement pratique d'analyse chimique. En possession de ces deux éléments le praticien pourra facile- ment saisir la cause intime des dyspepsies et par suite y apporter le remède. MM. Hayem et Winter ? considèrent comme ab- solument insuffisantes les méthodes basées sur la recherche de l'acide chlorhydrique libre : «La di- gestion stomacale est une fermentation ayant pour résultat chimique de faire passer le chlore de l’élément minéral sécrété par les glandes sur la malière albuminoïde introduite à litre d'aliment,. L'altération chimique de ce processus doit done ètre essentiellement constituée par un défaut plus ou moins notable dans la proportion des combi- naisons chloro-organiques. » La méthode de ces auteurs consiste à doser, par une seule opération, la quantité de chlore total contenue dans le suc gastrique, le chlore de l'acide chlorhydrique libre, le chlore combiné aux substances albuminoïdes, enfin le chlore des chlo- rures fixes. Ces valeurs, exprimées en milligrammes d'acide chlorhydrique el pour cent centimètres cubes, ont été calculées à l'état physiologique et 1 Gazette hebdomadaire, n° 91. 2 Havem et Wixrer: Chimisme slomachal, Paris. son, 1891. Mas- ST PT Dre 2 D' E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE notées dans une table qui rend facile l’établisse- ment de rapports fixes entre elles : de l’inversion de ces rapports dans des combinaisons mulliples, réalisées à l’élat pathologique, résu!tent diverses formes de dyspepsies dont MM. Hayem et Winter donnent une classificalion un peu schématique. Pour faciliter l'intelligence de ces combinai- sons, les valeurs normales ont été représentées par des lettres À = acidité totale, ete., ete. les va- leurs augmentées, suivies du signe —., les valeurs diminuées, du signe —. Le groupement de ces signes abréviatifs constitue des formules qui figu- rent l’état de la secrétion chlorée dans le suc gas- trique examiné; ces formules, dont l’aspect algé- brique n'a pas été sans effrayer quelque peu les cliniciens, se lisent cependant facilement avec un peu(d'habitude. MM. Mathieu et Rémond, ‘considérant, d'une part, la grande quantité de chlore en combinai- sons organiques constatée par les recherches pré- cédentes, d'autre part, la faible proportion de peptones existant dans l’estomac au moment le plus actif de la digestion, estiment que le travail digestif exécuté par l'estomac n'est qu'un travail de désagrégation et de dissolution des matériaux azolés, qui les prépare à la digestion duodénale : ce travail, ulile, mais non indispensable, pourrait être à peu près nul chez des personnes cependant d’une santé suffisante. Dès lors, l'acide chlorhy- drique stomacal aurait surtout un rôle anlifer- mentescible, son rôle chlorhydro-peptique passant au second plan. Contrairement aux auteurs précédents, MM.Ma- thieu et Rémond considèrent le vert brillant comme un excellent réactif de l'acide chlorhy- drique : le virage immédiat est dû à l'acide chlor- hydrique libre, volalil, et la décoloration lente (1/2 heure à 24 heures) à l'acide chlorhydrique faiblement combiné aux substances organiques. Cetle recherche de l'acide chlorhydrique libre continue à faire l’objet de plusieurs travaux alle- mands; Boas ? approuve le procédé de Sjüquist, qui emploie le chlorure de baryum, mais en le modifiant : ilse sert principalement d'une solu- tion de rouge du Congo mélangée au liquide d'essai, dans lequel il verse une solution titrée de lessive de soude. v IL n'avait élé fait jusqu'à présent aucune re- cherche sur la pathogénie des suppurations dans les Æystes hydaliques du foie. MM. Chauffard et Widal ont comblé cette lacune. Ils ont établi que 1 A. Marmæu et À, Rémono. Les divers facteurs de l’aci- dité gastrique. — Gazette des Hôpitaux. Février 189, 2 Boas : Centralblat, f. Klin. Medec., n° 2,1891, le liquide kystique ne renfermait aucun microor- ganisme, mais pouvait constituer à lui seul un bon milieu de culture pour les microbes pyogènes ; que la membrane kystique formait pour les microbes un filtre naturel qu'ils ne pouvaient franchir, mais que pouvaient traverser leurs produits s0- lubles et en général les substances colloïdes et cris- talloïdes. Il résulte de ces faits : que la suppu- ration ne peut envahir la poche kystique que dans les cas où ses parois ont été préalable- ment altérées et fissurées (c'est donc un véritable accident indépendant de l’évolution du kyste): que des produits d'origine microbienne peuvent se trouver dans le kyste sans que son contenu ren- ferme d'organismes pyogènes. Les lésions viscérales ont élé considérées pen- dant longtemps comme appartenant exclusivement à la période tertiaire de la syphilis; cette idée est encore enracinée dans l'esprit de beaucoup de cliniciens qui persistent à ne voir qu'une simple coïncidence, quand certaines affections surviennent dans les premiers temps de la syphilis. Cepen- dant, de nouveaux faits viennent chaque jour prouver que, dès qu'il a envahi l’économie, le virus syphilitique peut faire sentir ses effets aussi bien sur le cerveau, la moelle, le foie, le rein que sur la peau et les muqueuses, ce qui est, du reste, parfaitement en rapport avec l'idée que nous nous faisons de la syphilis en tant que maladie infec- lieuse. Aux faits déjà connus de syphilis rénale précoce, MM. Lecorché el Talamon! viennent d'en ajouter un autre, des plus probants, nouvelle confirmation qu'il existe cliniquement un mal de Bright aigu syphililique, au même titre que le mal de Bright aigu des autres maladies microbiennes comme la scarlaline, la typhoïde, etc., ete. Le fait est done très intéressant par lui-même et au point de vue doctrinal ; mais il l’est peut-être plus encore au point de vue pratique, en ce sens qu'il comporte une indicalion thérapeutique des plus nettes. En effet, chez le malade observé par MM. Lecorché et Talamon, le traitement habituel de l’albuminurie, — ventouses lombaires, régime lacté, alcalins, digi- tale, ete., etc. —, fut absolument sans effet, alors que l'amélioration se fit sentir dès l'application du traitement mercuriel qui amena bientôt la guéri- son complète. Or, ce résultat vient tout à fait à l’en- contre de la manière de faire de nombre de clini- ciens, Senator entre autres, qui, songeant aux né- phrites par intoxication mercurielle, considèrent comme dangereux, dans le cas de néphrite syphi- litique, le traitement par le mercure, à plus forte 1 Lecorcné et TaLamon : Médecine moderne. 2° année, n° 37, p. 656, bu: 194 D' E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE raison le traitement intensif comme celui par les frictions qui fut suivi dans l'espèce. Nous ajoute- rons, d'après certains faits qu'il nous a été donné d'observer, que, dans ces manifestations viscé- rales précoces, le traitement mercuriel doit être intensif et prolongé, appliqué suivant les pré- ceptes formulés par le P' Fournier pour les cas de syphilis cérébrale et médullaire. Le rein, plus que tout autre organe, est peut-êlre à sur- veiller, car ce traitement longuement el prudem- ment conduit, peut seul effacer les effets de cette première atteinte qu'il a subie et éviler que, plus tard, le filtre rénal ne se trouve insuffisant, alors que dans le cours d'une maladie infectieuse, fièvre typhoïde par exemple, son intégrité deviendrait absolument nécessaire. A propos d’un cas de cancer du rein qui s'était caractérisé par la forme douloureuse et l'infection rapide, Brault a fait une étude anatomo-patholo- gique de cette affection, dans laquelle il arrive à la conclusion que tous les cancers du rein sont des épithéliomas. Ils appartiennent aux variétés adénomateuses ou glandulaires, molles ou encé- phaloïdes, dures ou squirrheuses, hémorrhagiques et autres, suivant que les tubes sont plus ou moins remplis de cellules et que le développement en est plus ou moins rapide; mais dans tous les cas, les cellules se présentent toujours avec des caractères spéciaux qui sont ceux des épithélio- mas du rein et non de l'intestin ou d’un autre or- gane. Ces cellules se retrouvaient dans un noyau d’envahissement rachidien, à tel point qu'à l’ins- pection de ce nodule on aurait pu savoir que la tumeur primitive était rénale. Brault insiste tout particulièrement sur ce fait anatomique important qui ne peut être expliqué que par un mécanisme de greffe cellulaire et le considère comme une démons- tration du parasitisme cellulaire des tumeurs qu'il a toujours opposé au parasilisme microbien. NI Le diabète a été l’objet d’intéressants travaux dirigés dans le but d’en éclairer la pathogénie. Les nombreuses expériences qui ont été faites de- puis 1889 par von Mehring et Minkowski, Hedon, Gley, Lépine, etc., etc., sur les fonctions du pan- créas, magistralement exposées parGley! dans cette Revue, tendent à prouver que l’on ne doit plus, en clinique, considérer le diabète comme une entité morbide; qu'il en existe plusieurs espèces. C'est la confirmation expérimentale de ce que Lancereaux avait soutenu depuis 1877 et que Lépine ? a ré- sumé ainsi : « Le diabète résulte d’un excès de production ou d'apport de sucre, relativement à sa destruction; la rupture de l'équilibre entre le sucre produit ou apporté du dehors, et le sucre détruit peut se faire de différentes manières. Il y a donc plusieurs espèces de diabète. » Ces espèces pourraient se ranger en deux groupes, suivant qu’elles proviennent d'un excès de production ou d'un défaut d'utilisation. Les glycosuries passagères des maladies aiguës, des intoxications, du surme- nage physique et cérébral, des émotions violentes, toutes celles causées par une congestion bulbo- protubérantielle appartiennent au premier groupe ; le diabète maigre, que les expériences citées plus haut ont prouvé être d’origine pancréatique, au second. Quant au diabète gras, celui des hérédi- taires, des arthritiques, il appartiendrait au second groupe comme résultant d'un défaut d’assimila- lion, d’un ralentissement de la nutrition, d'après Bouchard, au premier, d’après Lécorché, puis A. Robin, qui se fondant sur de nombreuses analyses d'urine, aflirme que chez le diabétique gras les oxydations sont augmentées, qu'il y a une activité cellulaire plus grande dans la fonction hépatique, donc une origine nerveuse, Il est fort difficile aujourd'hui de conclure entre ces deux théories, car si, d'une part, le diabète gras alterne ou coïncide presque toujours avec d'autres maladies par ralentissement de la nutrition, d’autre part on voit souvent, dans le cours de son évolu- tion, la glycosurie coïncider ou alterner avec d’au- tres manifestations bulbaires, comme la polyurie. Vil Parmi les maladies et affections réunies sous le nom de Rhumatisme, il apparait de plus en plus que la forme dite articulaire aiguë ne présente aucun lien de parenté, autre que celui du nom, avec les divers états morbides du même groupe. C'est que, dans l’ensemble de son évolution, se retrouvent tous les caractères des maladies infec- tieuses ; aussi, la recherche de son agent patho- gène est-elle, depuis quelque temps déjà, à l'ordre du jour. Les faits pouvant éclairer ce point de doc- trine sont encore rares jusqu'ici, ce qui vient aug- menter l'intérêt de celui présenté récemment par M. P. Achalme!.Il est relatif àun malade mort avec des accidents cérébraux, dans le cours d’une se- conde attaque de rhumatisme articulaire aigu. Dans les lésions cardiaques valvulaires et dans la sérosité du péricarde, M. Achalme a pu isoler et cultiver un bacille anaérobie, qu'il considère comme pathogène. À l’autopsie, on ne trouva aucune lésion cérébrale apparente ; ce fait négatif est un excel- l Revue générale des Sciences : 2° année, n° 14, p. 469. ? Lyon médical, 25 octobre, 1891, 1 P. Acnazme, Comptes rendus de la Sociélé de Biologie, octobre 1891. states et D' E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 755 lent argument en faveur de la nature infectieuse de la maladie, car les accidents cérébraux peuvent et doivent être considérés comme ayant été causés par uneintoxication violente due aux produits solu- bles sécrétés par le micro-organisme pathogène. La question du microbe pathogène de la fièvre typhoïde ‘ a fait l’objet d’intéressantes recherches suscitées par l'opinion soutenue depuis deux ans environ par Gabriel Roux et Rodet (de Lyon), à la suite d'un certain nombre de faits de bactériologie pure, que le bacille d'Éberth, considéré comme spécifique de la fièvre typhoïde, n'est qu'une va- riété créée dans l'organisme des typhiques du Bacil- lus Coli communis. Cette observation aurait pour conséquence pratique que l’eau contenant le 2a- cillus Coli doit être aussi bien proscrite de l’ali- mentation que celle contenant le bacille d'Éberth. Chantemesse et Widal se sont élevés énergique- ment contre cette manière de voir. Entre autres moyens de différenciation des deux organismes ils en ont montré un très facile. Ensemencé dans des bouillons de culture sucrés avec de la lactose, de la glucose et de la saccharose, le Bacillus Coli déter- mine une grande quantité de bulles de gaz, tandis que le bacille d’Eberth n’en produit aucune visible à l’œil nu; en somme, fermentation d'un côté, ab- sence de fermentation de l’autre. Si, dans certaines condilions, comme Dubief l’a indiqué, le bacille d'Éberth détermine une légère fermentation dans la glucose et la saccharose, il n’en produit jamais dans la lactose. Nous ne pouvons suivre Chante- messe et Widal dans les détails techniques de leur exprimentation qui les a conduits à conclure que les faits invoqués par G. Roux et Rodet pour éle- ver leur théorie, ne résistent pas au contrôle. Si le Bacillus Coli et le bacille d'Éberth appartiennent à la même famille, leur souche est tellement éloi- gnée, qu'aujourd'hui ils sont aussi bien « différen- ciés entre les microbes, que la fièvre typhoïde entre les maladies. » C'est le sort commun de toutes nouvelles décou- vertes scientifiques, bien qu'élayées de faits sem- blant indiscutables à la plupart, d'être révoquées en doute par certains esprits cependant fort dis- tingués ; c'est ce qui arrive actuellement pour la découverte, par Laveran, de l'hémalozoaire du palu- disme. Le docteur Treille ?, professeur à l’école de médecine d'Alger, qui s’est adonné à l'étude de la malaria, qui à vu et longuementsuivi de nombreux fiévreux, dit n'avoir jamais rencontré dans le sang 1 Comptes rendus de l’Académie de Médecine, — de la So- ciélé de Biologie, — du Congrès d'Hygiène de Londres. ? Dr Trerzce. Bulletin de l’Académie de médecine, séance du 6 octobre 1891. des malades atteints de fièvre quarte, tierce ou quotidienne, un seul des organismes décrits par Laveran. Pour lui, l'agent pathogène de la fièvre intermittente est un microbe, lequel est suscep- tible d'atténuation : les formes tierce et quarte, que dans l’évolution de la maladie on voit survenir après la quotidienne, soit spontanément à la lon- gue, soit à la suite d’un traitement, devant être considérées comme les expressions cliniques de cette atténuation. Quoi qu'il en soit de cette manière de voir, elle ne semble pas pouvoir entrer en lutte avec les nombreuses observations confirmatives faites dans tous les pays à malaria et surtout en Italie. S'il existait un doute, il ne pourrait résister d’ailleurs à l'analyse des travaux de Laveran ! sur le éraite- ment du paludisme. Examinant l’action du sulfate de quinine sur les hématozoaires, il a vu cette substance arrêter les mouvements de leurs fla- gella, les déformer, leur donner un aspect ca- davérique. Dans ces conditions, {tués ou même simplement engourdis, ils deviennent facilement la proie des leucocytes dont l'énergie, si elle n’est pas augmentée, n’est certainement pas entravée par l’action de la quinine qui, d’après les expé- riences de Hayem et Bochefontaine, n’a pas d'action dépressive sur leurs mouvements amy- boïdes, contrairement à ce qu'avait avancé Bing. La présence, dans le sang, d'organismes à di- verses périodes d'évolution, par conséquent dans un état de résistance plus ou moins grande au sulfate de quinine, dans un état de dé- fense plus ou moins énergique vis-à-vis des leu- cocytes, permet d'expliquer sans invoquer une atténuation microbienne, et les formes à rechute etles formes atténuées de la fièvre intermittente. En somme l’évolution de la malaria dépend des péripéties de la lutte engagée entre les héma- tozoaires et les leucocytes. Ceux-ci peuvent triom- pher seuls (ce sont les cas exceptionnels de gué- risons spontanées), ou mieux, aidés par des toniques — hydrothérapie, arsenic, ele., etc. — qui viennent renforcer leur action; mais, le plus souvent, ils ne sont victorieux que si la puissance défensive des hé- matozoaires a été primitivement réduite par le sul- fate de quinine : alors, ou bien il s’ensuivra la des- truction totale des hématozoaires, d'où la guérison, ou la destruction incomplète, d'où les rechutes de la maladie, les types atténués, tierce, quarte, qui ne céderont qu'après de nouveaux combats. D' E. De Lavarenne. | LaverAx. Le Paludisme, 1891. Masson, éditeur. 756 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX ANALYSES ces mathématiques. Pollard (J.) et Budebout (A.) Théorie du Na- vire. — Tomes I et II. (13 francs le volume). Gauthier- Villars et fils, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1890 ef 1891. Les cours professés à l'Ecole du Génie Maritime forment l’exposé Je plus complet de la Science et de l’Art des constructions navales. Mais simplement auto- graphiés jusqu'à ces dernières années, ils n'avaient guère franchile cerclerestreintdes i ingénieurs du corps. Aussi cette branche de la littérature scientifique en France paraissait-elle singulièrement pauvre, en com- paraison de la multiplicité des ouvrages anglais. Cette lacune sera bientôt comblée, Après s la Construction du Navire publié en 1886 par M. Hauser, et les Machines marines de M. Bienaymé (1887), les deux premiers tomes de la Théorie du Navire par MM. les ingé- nieurs de la marine Pollard et Dudebout viennent de paraitre. Ce nouveau cours forme le complément natu- rel de l'ouvrage de M. Hauser : tous deux constituent par leur ense mble un traité € omplet d'architecture na- vale. La théorie du navire a pour objet l'établissement des formes du navire, et la réalisalion des qualités nau- tiques qui sont exigées de lui, Les progrès de cette science ont toujours élé intimement liés à ceux des mathématiques, l'analyse étant le seul moyen d’inves- tigation assez puissant pour élucider les difficiles pro- blèmesauxquels donnent lieula statique etla dynamique des flotteurs, Aussi, bien des auteurs se laissent-ils en- traîner à des développements mathématiques exagérés. Il faut savoir gré à MM. Pollard et Dudebout, dont l'œuvre est, après tout, didactique, de ne pas avoir trop cédé à la tentation, et d'avoir eu constamment en vue, dans l'exposé et la comparaison des diverses théories, le côté pratique qui intéresse si fort l'ingénieur. On doit les féliciter aussi de l'esprit d’ impartialité dont ils ont fait preuve, dans leurs appréciations et leurs cita- tions, impartialilé à laquelle les auteurs anglais, même célèbres, ne nous avaient point habitués. En tèle du tome I‘ se trouve une curieuse notice bibliographique et historique de la littérature maritime scientifique, renfermant la nomenclature de plus de quatre cents ouvrages. Elle présente d'autant plus d'in- térêt qu'un grand nombre de travaux, dont quelques- uns font époque dans l’histoire des sciences navales, n'ont jamais été publiés séparément, et sont disséminés dans des Revues spéciales telles que le Mémorial du Génie Maritime en Krance, et les Transactions des Naval Architects en Angleterre, I suffit d'un cn d'œil jeté sur cette lisle pour parcourir toutes les étapes de Architecture navale théorique, depuis le Traité du Navire de Bouguer, qui, dès le milieu du xvui sièele, introduit la notion du mélacentre, et pose les premières lois de la stabilité, jusqu'aux dée ouvertes et aux travaux modernes auxque 1$ sont attachés les noms de Rankine, Froude, Reech, de Saint-Venant, de Bénazé, Risbec, ele. La 1'° partie est consacrée au Calcul des éléments géométriques des carènes droites et inclinées. Les sur- faces des carènes ne sont pas susceptibles de définition géométrique ni analytique; ce sont des surfaces topo- graphiques, dont la quadrature est approximative. Les diverses méthodes en usage, celle des trapèzes et ses dérivées (Poisson, Poncelet), celles des paraboles des divers degrés (Simpson), la méthode plus générale des différences fondée sur la série de Taylor, sont éludiées et comparées au point de vue de l'exactitude et de la simplicité, BIBLIOGRAPHIE ET INDEX Les propriétés des courbes différentielles et intégrales des divers ordres, et leurs tracés forment l’objet d’un chapitre des plus “utiles s, que suit une descriplion des planimètres et intégromètres (Amsler, Marcel Deprez, intégraphe d'Abakanoviez). On ne peut plus se passer aujourd'hui de connaître la théorie et le mécanisme de ces instruments qui rendent de si grands services aux Ingénieurs marilimes en leur permettant d’effec- tuer rapidement les intégrations que l’on rencontre soit dans le calcul des aires, soit dans celui des moments res et des moments d'inertie. Après quelques indications sur le tracé du plan des formes et les tableaux de calcul des carènes droites, les auteurs posent nettement le problème des carènes inclhinées sous sa forme la plus # générale, gràce à l’in- troduction des courbes qu'ils pro posent d'appeler iso bathes, et qui avec les isocarènes et les isoclines, consli- tuent trois faisceaux fondamentaux, dont les relations mutuelles mettent en pleine lumière les divers moyens d'obtenir les éléments inconnus. Cette considération permet dès lors d'établir une heureuse classification des nombreuses méthodes dont on se sert pour déter- miner les coordonnées du centre d’une carène quel- conque : méthodes employant des réseaux spéciaux de sections parallèles aux flottaisons inclinées (Benja- min, Spence ; méthodes planimétriques de Fellow etc.); — méthodes qui, comme celles de Rossin, de Clauzel, ou des échelles Bonjean, n’emploient que le réseau des sections droites du plan des formes ; — méthodes faisant usage des onglets immergés ou émergés (Reech, Barnes, Daynard); — enfin méthode de Guyou et Simart, qui n’emploie que les ordonnées des flottaisons droites. Viennent ensuite les méthodes expérimentales, etles méthodes approximatives rapides. Il n'était pas moins important de rendre compte de la valeur relative de ces méthodes, dont la varieté un peu confuse jusqu'ici laissait souv ent l'ingénieur dans une certaine indécision sur le choix à faire dans tel ou tel cas spécial, C’est ce qu'ont très bien compris les auteurs, en établissant une comparaison minutieuse des divers systèmes au double point de vue de lexac- titude et de la rapidité. La 2° partie, relative à la Géométrie du navire, com- prend l'étude de la surface des centres de carènes iso- carènes, de lasurface enveloppe des flottaisons, et de ï surface des centres de volume des tranches isoca- rènes. Les théorèmes sur les centres de courbure de ces surfaces sont démontrés avec clarté et rigueur, La considération des carènes symétriques, complé men- taires et supplémentaires, donne lieu à une serie de corollaires, qui mettent en relief certaines propriétés fort utiles des surfaces dont nous parlons. Enfin cette partie est complétée par un certain nombre d'exercices, de problèmes usuels, et d applications des théorèmes précédents à des flotteurs de formes Re La Statique du Navire qui fait le sujet de la 3° par- lie, a pour objet la recherche des posilions d’équi- libre des flotteurs et la détermination des forces ex- térieures à leur appliquer pour les maintenir dans une position différente de celle de l'équilibre. Elle se rattache à la Géométrie du Navire, car les conditions d'équilibre des flotteurs et la valeur des couples de redressement pour différentes inclinaisons, sont inti- mement liées à la forme des surfaces précédemment étudiées, Aussi cette théorie a-t-elle recu un dévelop- pement considérable, Le tracé des diagrammes de sta- bilité statique, qui est la représenlalion synthétique des qualités de stabilité du navire, est exposé avec toute la clarté et la méthode désirables. Les différents dia- BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX grammes Benjamin, Gray, Daymard (en coordonnées semi-polaires), Elgar, Reech (en coordonnées rectangu- laires), sont soigueusement décrits et comparés au point de vue de la précision et de la simplicité. Nous dirons peu de chose ‘des problèmes classiques qui se rattachent à la théorie générale de la stabilité : le déplacement, l’addition et la soustraction de poids à bord. Cependant il faut noter la théorie du charge- ment liquide, et les conseils qui en découlent, avec leur application aux navires transportant le pétrole en vrac — de même la théorie du chargement semi- liquide, tel que celui des grains, qui permet de substi- tuer des règles rationnelles à des manœuvres empi- riques, et qu'il estbon de recommander aux capitaines. Signalons surtout des théories entièrement nouvelles dues à M. Dudebout : celle des soufflages, avec l’ingé- nieuse idée d’en faire l'application aux docks flottants sans portes, en considérant le navire comme un souf- flage du dock, et aux voies d’eau, en considérant les compartiments envahis comme des soufflages négalifs. Citons encore la théorie de la poussée complexe d'un liquide et d'un fluide compressible, à laquelle a donné lieu la disposition adoptée sur le Neversink. Les 4°et 5° parties traitent de la Dynamique du Navüre dans le mouvement de roulis en milieu calme ; dans Pune le milieu est supposé non résistant; dans l’autre on tient compte de la force vive transmise par le flot- teur au liquide sous forme soit d’agitalion, soit de chaleur, ou sous toute autre forme de l'énergie. Cette étude presque entièrement théorique comporte d'assez longs développements mathématiques. L'analyse seule peut jeler la lumière sur ces difficiles questions, mais l'analyse habilement maniée. Les conditions physiques qui pèsent sur le problème sont si complexes el si ma- laisées à exprimer qu'il faut savoir s'arrêter à temps sur la pente des recherches spéculalives pures, pour introduire successivement ces conditions sans fausser les résultats. C’est ce qu'ont bien compris les auteurs. Après avoir posé et intégré les équations différentielles du mouvementinfiniment petit, ils arrivent rapidement aux simplificalions, De même pour le mouvement fini du roulis, dont l'étude analytique est dégagée par les méthodes d'intégration approchée de MM. de Bénazé el Risbec, ainsi que par l'intégration graphique de Mo- seley. M. Dudebout a ingénieusement rattaché, par la con- sidération des développantes d'ordre supérieur d'un cercle, la période du roulis (ou du tangage) à la forme de la développée métacentrique transversale (ou lonyi- tudinale) et assimilé le mouvement de roulis au mou- vement d'un point pesant sur une certaine courbe. Il en à déduit la forme de la développée métacentrique qui donne au navire le tautochronisme pour des roulis d'amplitude finie, Ce sont là des résultats nouveaux fort intéressants. La théorie de la pesanteur et sa détermination ana- lytique et expérimentale offrent aussi un certain inté- rêl pour la connaissance des efforls auxquels sont sou- mis les corps pesants aux divers points d'un navire, Dans la cinquième partie est introduite l'influence du milieu résistant Les conditions de stabilité de l’équi- libre d’un flotteur dans ce milieu ontété déterminées par Moseley, Risbec et Guyou. Les deux premiers par l'analyse, le troisième par la géométrie, onttenu comple de la force vive absorbée par le liquide. Quant à l'étude complète du roulis lui-même en milieu résistant, elle est longuement développée dans cet ouvrage : elle com- porte la recherche de l'expression du couple résistant en fonction des caractéristiques du mouvement soit par le calcul, soit par l'observation expérimentale. On en déduit son influence sur la période et sur lPamplitude du roulis et du tangage, ainsi que la courbe d'’extine- tion du roulis. Dans celte théorie rentrent les procédés artificiels pour augmenter la rapidité d'extinction du roulis, tels que les quilles latérales et les comparti- ments à eau ; ceux-ci, expérimentés en Angleterre dans ces dernières années, ont donné quelques bons résultats, Le tome II se termine par l'exposé des divers sys- tèmes de mesure du roulis et du tangage en eau calme, Cette partie est toute pratique ; elle renferme avec l’ex- périence réglementaire de roulis qui donne le moment d'inertie du navire et la durée des oscillations, la des- cription des appareils enregistreurs du mouvement angulaire, les oscillographes de Bertin et de Froude, le trace-roulis de l'amiral Pàris, enfin l'appareil enre- gistreur du mouvement complet de MM. de Bénazé et Rishec. Léon Viver. 8° Sciences physiques. Capitaine W. de WW. Abney, — Colour measu- rement and mixture (La mesure, et le mélange des couleurs). (Prix 3 francs 10 c.). Bibliothèqu: de la So- ciété pour la propagation de connaissances chrétiennes. Northumberland Avenue, Charing Cross, W. C., Londres, 1591. La Société pour la propagation des connaissances chrétiennes à entrepris, bien en dehors de son activité ordinaire, la publication de pelits ouvrages de science sur des sujets spéciaux, ef on peut, jusqu'ici, la féliciter sans arrière pensée du choix de ses auteurs. La plu- part de ces ouvrages sont très populaires; celui ci, écrit sous une forme aisément compréhensible, est de haute science. Nul mieux que le capitaine Abney, dont les remarquables travaux sur ces matières sont bien connus, n'était préparé à traiter cette délicate question de la théorie des couleurs, qui participe au- tant de la physiologie que de la physique; le physicien trouvera, dans ce pelit ouvrage, une quantité de docu- ments jusqu'ici épars dans les nombreux mémoires publiés dans ces dernières années, L'auteur en fait une synthèse qui n’est pas une compilation, mais bien un tout parlaitement homogène. Les premiers chapitres sont consacrés aux radiations considérées objectivement; le spectre y e:t traité en détail, el la description des méthodes d'investigation y est succinctement donnée; l’auteur y fait choix d'une lumière type, et s’arrète à la radiation de lare ; mais on peut remarquer, en le regrettant, que l’étalon Violle est absent de la discussion. Dans les chapitres sui- vants, nous trouvons la description des appareils servant spécialement à la production des couleurs pures, et à leur mélange. Dans les chapitres VIL et VIIL, l’auteur traite de la luminosité du spectre et de la réflexion par les pigments : ce dernier chapitre contient des diagrammes particulièrement interes- sants relatifs à la lumière réfléchie ou tamisée. L’ex- tinction des couleurs l’une par l’autre ou par le blanc forme l’objet des chapitres suivants; celle extinction fournit une méthode de mesure de l'intensité relative des diverse: couleurs, L’épuration des couleurs, leur mélange, les couleurs complémentaires pures ou pro- pres à des pigments, enfin les effets physiologiques de persistance des couleurs, de fatigue de l'œil, des cou- leurs par contraste sont traités dans les derniers cha- pitres. En terminant, nous voudrions seulement expri- mer un regret, c’est que dans cet ouvrage d'une incontestable valeur, l’'illustralion, importante en cette matière, laisse un peu à désirer. Cu.-Ep. GUILLAUME. Griner (G.) Sur quelques cas d'isomérie dans la série en C0, — Thèse de Dnctorat de la Faculté des Sciences de Paris. Gauthier- Villars et fils, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1891. Le travail que M. Griner a présenté à la Faculté des Sciences de Paris, comme thèse de Doctorat, est cer- tainement l’un des plus importants et des plus inté- ressants parmi ceux qui se sont produits dans ces der- nières années, Il nous donne de plus un exemple re- marquable d’un travail expérimental, poursuivi avec une habileté qui révèle un chimiste consommé; con- duisant forcément à l'emploi des notions stéréochimi- 158 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX ques et donnant des principes de cette théorie de nou- velles et importantes vérifications. C’est par un rapide et trés clair résumé des principes de la stéréochimie, devenue le fil conducteur au milieu de ces délicates questions d’isomérie, que débute le mé- moire de M. Griner; la lecture de cette introduction, du reste très facile, est nécessaire pour la complète intelligence de la suite du mémoire. Je vais résumer rapidement, en me bornant à énoncer les faits prinei- paux, le travail de M. Griner, une analyse détaillée dé- passerait de beaucoup le cadre de cette Revue. Le point de départ a été la recherche des carbures non saturés à chaine normale isomériques avec le ben- zène, dont un seul était connu, le bipropargyle. Pour cela M. Griner a dû d’abord étudier le biallyle, et ses produits d’additior; il a reconnu que le biallyle est un carbure unique, qui par addition d'acide iodhydrique conduit à un seul monoiodhydrate et à deux diodhy- drates isomères stéréochimiques. Il a établi définitive- ment que l'addition de brome au biallyle donne deux tétrabromures dont l’isomérie est également stéréo- chimique. L'action de la potasse alcoolique sur le monoiodhy- drate de biallyle a conduit l’auteur à la découverte d’un carbure issmérique avec le biallyle : Pallylpropényle, qui existe sous deux formes géométriquement isomères. CH3 — CH — CH — CH? — CH — CH? Dans les mêmes conditions les biiodhydrates conduit sent à un second isomère du biallyle, le bipropényle qui existe sous trois formes géométriquement isomères. CH$ — CH = CH — CH = CH — CHS Les deux tétrabromures de biallyle, sous l'influence de la potasse alcoolique, donnent naissance au bipropar- gyle. M. Griner a montré que ce carbure est un mé- lange de deux corps isomériques avec le benzène : l’un biacétylénique, le bipropargyle, le second monoa- cétylénique, l’allylénylallyléne. CH — C=C— CH? — C = CH. Ce dernier se produit seul en partant des tétrabro- mures d’allylpropényle. Un nouveau carbure également isomérique avec le benzène, le diméthylbiacétylène, s'obtient par l’action de la potasse alcoolique sur l'un quelconque des tétra bromures de bipropényle ; l'auteur a fait une seconde synthèse de ce composé, par l’oxydation ménagée de Vallylénure cuivreux, ce qui fixe sa constitution; par addition de brome on n'obtient qu'un seul tétrabro- mure. À Un fait particulièrement neuf et intéressant, décou- vert par M. Griner est l’action qu’exerce la potasse al- coolique sur tous ces carbures. L’altylpropényle est transformé en bipropényle; c’est le premier exemple d’une transformation intra-molé- culaire d’un carbure éthylénique dans ces conditions. Le bipropargyle est rapidement altéré en donnant d'abord son isomère monoacétylénique, puis ce dernier se polymérise. Le diméthylbiacétylène fixe une molécule d'alcool; c’est le premier exemple d'un carbure fixant les élé- ments de l'alcool. L’hydratation de ce même carbure par des procédés divers donne naissance à une 8 dicétone : l'acétyl- propionylméthane, la formation de cette dicétone fournit une nouvelle preuve de la formule de constitution du diméthylbiacétylène. Enfin par un procédé d’hydrogénation nouveau qu'il a appliqué à l’acroléine, l’auteur à obtenu un glycol non saturé nouveau : le divinylglycol CH? = CH — CHOH — CHOH — CH = CH2 dont il a fait une étude détaillée, etobtenu des dérivés parmi lesquels il convient surtout de remarquer la di- chlorhydrine d'uu alcool hexatomique isomère de la mannite ; et des alcools tétratomiques non saturés. On voit par ce rapide résumé des faits expérimentaux obtenus par M. Griner quelle est l’étendue et l’impor- lance de son travail. L'intérêt des déductions théoriques qu'il a su en tirer n’est pas moindre ; car il a montré quelle était l’utilité des considérations stéréochimiques dans l'étude des isoméries, ela, en particulier, appliqué ces théories : 1° A l’explication des isoméries que présentent les tétrabromures et les diiodhydrates de biallyle. 2 A l'explication des isomères qui se produisent dans la formation des carbures dérivant de ces com- posés, ce qui permet de leur assigner des formules de structure dans l’espace. 3° À établir que les bromures des allylpropényles et des bipropényles sont des isomères stéréochimiques. 1! résulte des expériences de M. Griner que le nombre des isomères obtenus est souvent égal, mais jamais su- périeur à celui que prévoit la théorie de MM. Le Bel et Van’ T. Hoff. En dernier lieu un fait d’une importance capitale est celui-ci : M. Griner montre que les bibromures de la dibromhydrine du divinylylycol, et les alcools tétrato- miques non saturés qui dérivent de ce glycol s’obtien- nent sous deux formes isomériques prévues par la théorie, et que ces deux formes doivent être des racé- miques ; mais ces deux racémiques se forment en quanttés trés inégales ; ce qui peut s'expliquer soit en supposant que l’existence d’un carbone asymétrique dans une molécule exerce une action directrice sur les autres carbones asymétriques que l’on introduit dans la mo- lécule; soit en admettant comme M. Friedel l'avait déjà fait pour les tétrachlorures de benzène, que les isomères engendrés n'ayant pas les mêmes propriétés physiques, se forment en quantités qui dépendent des conditions du milieu où on opère. C’est la première fois que ce fait est établi pour un composé renfermant des carbones asymétriques. Le beau travail de M. Griner apporte à la considé- ration des isoméries prévues par les formules atomi- ques, et par la théorie stéréochimique, un solide appui expérimental qui en augmente encore la certitude. L'étude dés carbures isomériques découverts par l’auteur et qui ne diffèrent que par des relations de saturation entre les atômes de leurs molécules pré- sente un intérêt très grand, et doit nous faire pré- sager une longue suite de recherches heureuses. A. COoMBEs, 8° Sciences naturelles. €Chodat (R). — Contribution à l'étude des plas- tides. — Archives des Sciences physiques et naturelles, Genève, 1891. Les plastides, plus connus en France sous le nom de leucites, sont des corpuscules de forme déterminée, inclus dans le protoplasme des cellules végétales ; Les plus répandus sont les chloroplastides ou grains de chlo- rophylle. La connaissance de leur structure exige des recherches d’une grande délicatesse. Certains auteurs leur attribuent une structure granuleuse, d’autres, une structure spongieuse. D'après M. Chodat, ce sont des corps spongieux, formés d’un stroma protoplasmique incolore, circonserivant des lacunes nombreuses et irrégulières. Dans le Calanthe Sieboldi, les lacunes, pen- dant la période de repos du plastide, sont disposées sans ordre; au moment de la division, le plastide prend la forme d’un biscuit: une sorte de polarisation des lacunes, ou mieux, des bandes du stroma, les dispose toutes parallèlement à la longueur, et la séparation se fait vers le milieu. D’après M. Chodat et contrairement à l'opinion de M. Tschirch, les plastides d'aucune sorte ne possèdent de membrane, mais parfois, par suite d’une vacuoli- sation périphérique, on voit une fausse membrane sur une portion de leur pourtour. Quant au pigment, il tapisse d'une couche mince les parois des lacunes, tandis que la masse du stroma reste incolore, Le travail BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX de M. Chodat vient donc ajouter plusieurs faits inté- ressants à nos connaissances encore bien incomplètes sur les plastides. C. SAUVAGEAU. Hérail (F.), Professeur de matière médicale à l'Ecole de Médecine et de Pharmacie d Aiger. et Bonnet (Va- 1ère), ancien préparateur des Travaux micrographiques à l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. — Manipu- lations de Botanique médicale et pharmaceu- tique. Iconographie histologique des plantes médicinales, avec 36 planches colorices et 223 fobre dans le texte (20 fr.). J.-B. Baillière et fils, 19, rue Hautefeuille, Paris, 1891. Sous le titre de Manipulations de Botanique médicale el pharmaceutique, M. Hérail vient de publier, en colla- boration avec M. Bonnet, pour la partie iconographique, un excellent ouvrage que l'on peut recommander cha- leureusement à {ous ceux qui, de près ou de loin, s’oc- cupent de questions touchant à la matière médicale. C'est une étude succincte et très claire de la structure histologique des plantes médicinales; il n’y faut pas chercher des théories ou des phrases creuses; l’auteur expose des faits et il appuie ses deseriptions de nom- breuses et belles figures exécutées par M. Bonnet el dispersées dans le texte ou réunies en planches accom- pagnées de brèves explications. Dans les planches, la teinte des principaux tissus est représentée telle qu’elle se présente au microscope. La légèreté des tons colorés produit le plus heureux effet et donne une grande valeur à l’ensemble de l'ouvrage qui revêt une “allure arlistique que lPon n’a point coutume de rencontrer dans les publications scientifiques. Une première partie est consacrée à l’histologie géné- rale. Quelques documents essentiels sur la technique microscopique sont suivis de l’étude de la cellule, puis successivement de celle des tissus et des organes, La seconde partie comprend la description histologique des parties des plantes usitées en médecine. Pour cha- cune d'elles, il est traité en quelques lignes de l’ori- gine botanique, ‘de la description extérieure, de l’his- tologie, des substitutions et des usages. M. Hérail a dirigé brillamment pendant plusieurs années les travaux pratiques s de micrographie de l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. On peut juger, d’après le bel ouvrage qui résume en quelque sorte l’enseignement donné, de. la valeur de cet enseigne- ment et du mérite de celui qui était appelé à ces fonc- tions difficiles, D' H. BEAUREGARD. Gautier (Emile.). Unerévolution agricole. Georgés Ville et les engrais chimiques. —- Un vol. in-8° de 88 pages. (0fr.7Ts) Lecène, Oudin et C*°,17 rue Bonaparte. Paris, 1892. On lit dans le prospectus de ce petit livre des phrases comme celle-ci : « Au prix de quarante années de tra- yail et de combat, un homme de génie, dont l’œuvre n'a de comparable peut-être, dans toute l’histoire des progrès de l’esprit humain, que l’œuvre de Lavoisier, M. Georges Ville, est parvenu... » etc.; etc. Evidemment cet ouvrage à paru à l'insu de lémi- nent professeur du Muséum. L. O. Lubbock (sir John). — Lessens et l'instinct chez les Animaux etprincipalement chez les Insectes, Un vol. in-8° de la Bibliothèque scientifique ‘internatio- nale avec 136 fig. dans le texte. (6 fr.) Félix Alcan, édi- teur, 108, boulevard Saint-Germain, Paris, 1891, Sir John Lubbock, tout en résumant, avec la clarté qui caractérise tous ses écrits, l’état actuel de nos connaissances sur is organes des sens dans la série animale, consacre la plus grande partie de son ouvrage à l’exposé de ses nouvelles observations sur les In- sectes. Nous nous bornerons À indiquer ici ses princi- pales conclusions. Chez les Insectes, les organes du goût sont constitués par des poils modiliés occupant la bouche elle-même et les organes tout à fait voisins. Les antennes sont des organes complexes, offrant des terminaisons nerveuses en rapport avec des poils de nature diverse, qui servent les uns au toucher, d’autres à l’odorat et d’autres probablement à l’ouie. Les organes auditifs peuvent, en effet, être situés dans diverses parties du corps el être très différemment construits; chez le Grillon, par exemple, le sens de l’ouie peut avoir son siège en par- tie dans les antennes et en partie dans les pattes ; chez la larve de Corèthre, on trouve dans plusieurs segments du corps des organes chordoltonaux, qui doivent être considérés comme les organes auditifs les plus simples. Bien que la structure des organes visuels, yeux à facettes et ocelles, soit aujourd’hui à peu près bien connue, nous ne possédons que des données im- parfaites sur la manière dont s'opère la vision chez les Insectes. Suivant l’auteur, les ocelles serviraient sur- tout pour la vision dans l’obscurité et dans la vision de près. Ses nouvelles expériences sur les Abeilles lui ont montré que non seulement ces Hyménoptères dislin- guentles couleurs, mais encore qu'ils manifestent une préférence marquée pour le bleu, puis le blanc, et suc- cessivement pour le Jaune, le rouge, le vertet l orange. D'accord avec Forel, Lubbock admet que les Fourmis percoivent les rayons ultra-violets avec leurs yeux et non par leur surface cutanée, ainsi que Graber en avait émis l’opinion, Les Daphnies préfèrent la lumière à l'obscurité, mais une lumière trop vive ne leur convient pas ; elles peuvent faire la distinction entre des rayons de longueurs d'onde différentes, et recherchent ceux qui nous donnent la sensation du vert et du jaune, Les derniers chapitres de l'ouvrage de Lubbock sont consacrés à l'instinct des Insectes et à l'intelligence du Chien. L'auteur yrapporte ses propres observations sur la reconnaissance entre Fourmis, qui aurait lieu, non à l’aide de l’odorat, mais par le toucher au moyen des antennes, Il établit ensuite d’après ses recherches et celles de Romanes, qu'il n’existe pas de preuves suffi- santes pour admettre, chez les Insectes, un sens qui pourrait être appelé « sens de direction ». Nous insisterons davantage sur les ingénieuses et curieuses expériences relatives à l'intelligence du Chien, Lubbock, en placant des cartons sur lesquels étaient écrits en grosses lettres des motstels que «nourriture», « eau », € os » etc,, auprèsdes objets que ces mots re- présentaient, est arrivé à apprendre à un caniche à dis- tinguer ces cartons au milieu d’autres cartons iden- tiques portant des mots quelconques, et à établir une liaison entre le mot et l’objet. Le Chien apportait le carton sur lequel était écrit le mot qu'on prononcait devant lui et savait, lorsqu'il voulait boire ou manger, présenter les cartons portant les mots « eau » ou «nourriture », L'auteur s'est assuré que ce n'était pas l’odorat qui permettait à l’animal de reconnaitre les cartons, mais bien la vue, car l'expérience réussissait avec des cartons neufs que le Chien n'avait pas encore flairés. « Les expériences que j'ai faites, dit Lubbock, sont très incomplètes, je le sens ; mais je me suis dé- cidé à les rapporter, espérant que leur publication m'apporterait quelques idées nouvelles ou bien qu’elles entraineraient d’autres expérimentateurs, ayant plus de loisirs, à faire des observations pareilles qui, je n'en doute pas, donneront des résultats intéressants, » F. HENNEGUY. 4° Sciences médicales. Pichon (l' Georges). — Folies passionnelles.études philosophiques et sociales, in-18, xI1 — 378 p. (3 fr. 50) E. Dentu, place Valois, 3 et 5, Paris, 1891. Le livre de M. Pichon est un livre de vulgarisation, il s'adresse au grand public, mais je ne sais s’il sera très bien compris des lecteurs auxquels il est destiné; il n’est pas composé avec l’ordre et la méthode, écrit ayec la clarté et la précision qui semblent indispen- sables aux ouvrages de ce genre. Peut-êlre après tout ne faut-il point le regarder comme un livre d’enseigne- 760 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX ment, mais comme un ensemble de sermonslaïques sur les dangers de l'intempérance. La thèse que M. Pichon s'attache à démontrer, c’est que l’on a fait à l’hérédité une part beaucoup trop large parmi les causes de la folie, qu'il ÿ à en réalité un grand nombre de folies acquises. Les raisons qu'il donne à l'appui de son opi- nion peuvent sembler étranges; la conviction que la folie est une maladie hérédita aire et par conséquent in- curable est de nature, dit-il, à décourager le malade, la famille et le médecin. Tout d’abord la conséquence n'est point certaine,ce n'est point une raison parce qu'une maladie est congénitale, pour renoncer à la soi- yner; un traitement approprié réussira SOUV ent à amé- liorer l’état du malade, sinon à le guérir, je n’en veux d'autre exemple que P action du traitement bromuré sur les épileptiques. Puis, quand cela serait vrai, ce ne se- rait point une raison pour nier que les maladies men- tales n'apparaissent que chez les prédisposés, si tel est réellement le cas. On s'étonne de voir un homme de science contester l'exactitude de faits scientifiques, en disant que les admettre, c’est fournir des arguments nouveaux aux doctrines falalistes et un prétexte à l'i- naction du médecin. M. Pichon semble dans les pre- mières pages de son livre restreindre étrangement le rôle de l’herédité dans le développement des "maladies mentales etse faire l'adversaire décidé d’une doctrine universellement admise par les cliniciens el par tous ceux qui ont quelque expérience des aliénés; il affirme que la folie peut se développer d'emblée sous l'influence des passions chez des sujets dont l'hérédité est intacte. Mais il est vite obligé de reconnaitre, lorsqu'il veut dresser la liste de ses folies passionnelles, qu'aucune vésanie vraie, ni le délire chronique, ni les delires des dégénérés, nt même la mélancolie n'apparaissent chez des individus normaux, dont le système nerveux n'a recu jusque-là aucune ‘alleinte : et cette liste qui pro- metlait tout d'abord d'être longue ne comprend en réalité que la paralysie générale et les folies toxiques (alcoolisme, absinthisme, morphinisme, etc). M. Pichon tente bien d'y ajouter une folie érotique, mais son expérience de clinicien l’oblige à avouer que les perversions. et les excès sexuels sont le plus sou- vent le résultat et non la cause de l’état mental du su- jet; les observations qu'il rapporte montrent ‘que dans les cas mêmes où ces excès ont élé la cause PR ne de la maladie, il s'agissait de prédis- posés. On savait depuis longtemps que, malgré le rôle considérable joué par l'hérédité dans la paralysie gé- nérale, qui au reste n’est point à proprement parler une psychose, celte maladie pouvait se developper chez des sujets qui n'avaient aucune tare héredi- taire; Magnan par exemple a montré que l'alcool pou- vait produire des lésions identiques à celles dela para- lysie générale et il a décrit une paralysie générale alcoolique. Il n’est pas besoin d’insister pour faire voir que l'alcool, l’absinthe, la morphine peuvent détermi- ner des accidents toxiques, aigus ou chroniques, chez les sujets normaux, que ces accidents apparaîtront seulement plus rapidement chez les prédisposés.Mais il n'y a rien dans tout cela qui permettre de créer un groupe de « folies passionnelles »; la cause même que M. Pichon attribue à la paralysie g générale, le surmenage cérébral, n'a que bien peu de choses à faire avec les passions. En realité le livre de M. Pichon consiste en un cerlain nombre de remarques sur la paralysie géné- rale et les folies toxiques, où sont encadrées quelques observations intéressantes et que précède une longue dissertation sur les dangers médicaux du fatalisme. L. MARILLIER. Miquel. — Manuel pratique d'analyse HU EN gique des eaux, 1 vol. in-18 jésus (2 fr. Tà) Gauthier- Villars, 55, quai des Grands-, Augustins. Paris, 1891. Les premières analyses bactériologiques des eaux ont été publiées par M. Miquel, il y a bientôt onze ans. Depuis celte époque l’importance de ce genre de re- cherches s’est singulièrement accrue, L'analyse chi- mique, jadis seule : appréciée pour déterminer la « po- tabilité » de l’eau, a dû céder Le pas à l’analyse bacté- rivlogique. La théorie, actuellement dominante en France, de la propag ation presque exclusive de Ja fièvre typhoïde par l’eau de boisson, à suscité de nom- breuses recherches de ce côté. Quand une ville songe à organiser une amenée d’eau ou encore lersqu'une épi- démie éclate dans une agglomération, la: préoccupa- tion des autorités municipales ou centrales est de faire vérilier Pélat de l’eau. Les procédés d'analyses se sont heureusement simpliliés depuis l'époque où M. Miquel faisait paraitre son premier mémoire; comme il l'écrit dans la préface de son manuel, « actuellement les ana- lyses doivent et peuvent s s'effectuer partout », Mais quels que soient les progrès accomplis, les sim- plifications apportées, l'analyse bactériologique d'une eau quelconque est et sera toujours un travail difficile, délicat, surtout exigeant une méthode rigoureuse. On concoil qu'un manuel écrit Par un savant passé maitre en cet art soit un guide précieux pour ceux qui seront appelés à poursuivre des recherches de ce genre. Le plan adopté est très net, très précis el il est in- diqué dans le titre des cinq chapitres qui forment le manuel : prélèvement des échantillons, transport de l’eau prélevée, analyse quantitative, analyse qualita- talive, lecture des résultats obtenus. Dans le chapitre IT « Transport des eaux », M. Miquel insiste sur les précautions a prendre quand l’analyse quantitative ne peut être faite sur les lieux mêmes. Les bacteries pullulent rapidement dans les eaux main- tenues quelque temps enfermées dans des vases à la température ordinaire; il est donc de toute nécessité de maintenir les récipients à une température voisine de 0°, Dans le chapitre IL « Analyse quantitalive », l’ardent promoteur des cultures en milieux liquides n'hésite pas aujourd'hui à conseiller dans un grand nombre de cas l'emploi des cultures sur milieu solide, qui offre l’avan- tage incontestable d'être plus rapide et plus pratique. Mais quelle que soit l'importance de l'analyse quan- titative, ce n’est pas elle qui renseigne le mieux l’hygié- niste : Les travaux de Wolffhugel, de Meade, de Bol- ton, elc., ont montré que la numération des colonies est bien insuffisante pour trancher la question de la potabilité d'une eau. Ce qu'il importe surtout, c’est de pouvoir aflirmer qu'une eau destinée à l'alimentation ne renferme pas de microorganismes pathogènes, Aussi le chapitre IV, consacré à la recherche des microbes connus, est-il peut-être le plus intéressant de ce travail. M. Miquel donne la technique pour la recherche des bacilles du tétanos, de la fièvre typhoïde, du choléra. Nous eussions souhaité plus de développement à ce sujet : le bacille d'Eberth, dit typhique, dont la dia- ynose est si difficile, mérite en effet une minulieuse description : en ce moment surtout on ne saurait trop attirer Pattention des hygiénistes sur les précautions à prendre pour le déceler sûrement, Dans les dernières ieRe de sa préface, M. Miquel fait remarquer que si l'analyse n’a actuellement en vue que l’uygiène et la recherche des orxanismes pa thogènes, un jour viendra où son champ d'action s'é- tendra et où l'industrie lui demandera de nombreux renseignements. Celte opinion ne nous paraît pas chi- mérique : on sait que certains élablissements indus- nee de tannerie, teinturerie, brasserie ete., doivent leur prospérilé à la qualité des eaux qu’ils emploient. Très souvent l'analyse chimique la plus minutieuse n'a pu déceler, dans deux eaux qui présentaient des propriétés industrielles très différentes, des variations appréciables de composition; peut-être faudrait-il son- ger dans ce cas à un rôle joué par les micro-organis- mes ou leurs produits, rôle jadis complètement ignoré, encore mystérieux aujourd’ hui, mais qui demain finira sans doute par être reconnu. ne ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 761 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 2 novembre 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M Parenty : Sur les dimensions et la forme de la section d'une veine gazeuse où règne la contrepression limite pendant le débit limite, — M. Charlois : Observations de deux nouvelles petites planètes découvertes à l'Observatoire de Nice les 24 septembre et 8 octobre 1891. —M,. Mas- cart, rappelant que Bradlay avait émis l'opinion ac- ceptée par Arago, et ensuite par tout le monde, que la constance de laberration prouve que la lumière se meut uniformément dans tout l’espace céleste, fait remarquer que l’on n'a pas le droit de tirer cette con- clusion; la vitesse constante de la lumière n’est rigou- reusement démontrée par l’aberration constante que pour l’intérieur de l'orbite terrestre, — M. J. Janssen expose l’état actuel des travaux entrepris sous sa direc- tion en vue d'établir un observatoire au sommet du Mont Blanc; la galerie horizontale 2ttaquant la calotte glacée à 12 mètres au-dessous du sommet a parcouru 416 mètres, dont 23 au-dessus de l’arète rocheuse, qui forme sans doute l'ossature du haut de la montagne, sans rencontrer la roche, Prévoyant alors le cas où l'on tenterait d'établir Pédifice sur la neige durcie elle- même, projet qu'il ne considère nullement comme inacceptable, M, Janssen a fait construire au sommet même un édicule provisoire en bois, solidement as- semblé et rendu solidaire d’une masse importante de neige, pour voir comment une construction de ee genre supportera l'hiver et à quels déplacements elle sera soumise. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. G. Trouvé présente un modèle réduit de fontaine lumineuse où, le principe de Colladon n'étant utilisé qu'en partie, l'éclairage se fait directement à travers l’ajutage même de sortie, quiesten cristal, —M. Faye donne communication d'une note sur louragan qui a sévi sur la Martinique le 18 août dernier, note extraite de l'American journal of Meteorology. — MM. H. Gautier et G. Charpy ont étudié la facon dont les métalloïdes halogènes réa- gissent sur les métaux; en meltant en contact prolongé des fils métalliques bien décapés avec du chlore et du brome secs, ils ont constaté que la plupart des métaux, à l'exception de l'aluminium, sont à peine attaqués à la température ordinaire; il est à remarquer que le magnésium résiste complètement; les chlorures et les bromures d'aluminium et de magnésium présentent dans leurs propriétés et dans leur formation à partir des oxydes des analogies qui ne permettaient pas de prévoir celte différence, L'attaque est rapide pour tous les métaux lorsqu'il se trouve une certaine quantité d’eau en présence, — M. E. Reboul fait connaître un nouveau butylène bromé, dont la structure est repré- sentée par la formule CH#— CH? — CBr— CH, et qui se forme en enlevant HBr au bromure d’éthyléthylène ; il bout à 88; chauffé à 100° en vase clos avee de la potasse et de l’alcool, il donne de l'éthylacétylène; M. Reboul passe en revue les divers butylènes mono- bromés antérieurement décrits, et propose pour le sien le nom de bromhydrate « d’éthylacétylène. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A.Gautier, en pré- sentant son traité de Chimie biologique, ajoute quelques développements sur les chapitres de ce livre où sont exposés plus particulièrement des idées nouvelles ou des travaux inédits : sur les chlorophylles et leur rôle dans les synthèses qui s’accomplissent dans la feuille, sur la constitution de l'acide urique et des corps des séries urique et xanthique, sur les leucomaines, les ptomaïnes et diverses albumines, sur l’origine de l'énergie et du travail musculaire, avec la démonstra- tion que le musele ne peut être assimilé à une machine thermique; enfin sur les relations générales de l’ani- mal avec le monde extérieur et la facon dont celui-là emprunte son énergie à celui-ci, — M. C. Chabrié a étudié, en vue d'applications à la théorie de la fonction rénale, la facon dont se comporte le sérum du sang lorsqu'on le fait passer à travers la porcelaine sous une faible pression; il a constaté que les principes immédiats du sérum passent dans un ordre fixe qui est déterminé par les grandeurs relatives de leur molé- cule, les plus petites molécules passant les premières, — M. de Lacaze-Duthiers dément l'information re- produite dans la presse, d’après laquelle le laboratoire Arago aurait été démoli par un coup de mer, — M. A. Chatin compare les {ruffes blanches d'Afrique et d'Asie, Kamés ou Terfaz, avec les truffes d'Europe; le parallèle porte tant sur les divers faits relatifs aux conditions de vie de ces végétaux que sur leur composition chimique et leur importance ali- mentaire et commerciale; M. Chatin fait remarquer que bien que les Terfaz ne donnent lieu qu'à un mouvement commercial beaucoup plus faible que les Truffes, leur rôle est cependant des plus considé- rables dans l’alimentation des populations arabes. — M. A. Gaudry communique la relation de l’excursion géologique qui a eu lieu dans les Etats-Unis et particu- lièrement dans les Montagnes Rocheuses, à la suite du Congrès international de géologie de Washington; quatre-vingt-neuf géologues ont parcouru 2.500 lieues dans un train spécial qui s’arrêlait à tous les endroits intéressants. M. Gaudry insiste spécialement sur les grands fossiles jurassiques des Montagnes Rocheuses, qu'il a pu étudier dans les collections du professeur Marsh, à Newhaven,et du professeur Cope, à Philadelphie, — M. A. de Lapparent établit la chronologie des roches éruptives de Jersey. — M. Ch. de Stefani pré- sente un ensemble d'observations géologiques nouvelles sur lile de Sardaigne, — M. Forsyth Major donne la liste complète de la faune des Vertébrés (Miocène supérieur) qu'il a découverte dans l’ile de Samos el sur laquelle il a fait en 1880 une communication prélimi- naire. 1l donne quelques détails sur les espèces de cette faune qui ne sont pas représentées dans les gisements analogues, Pikermi, le mont Léberon, eic. — M. Ed. Piette fait connaître que l’on vient de découvrir à Montfort (Ariège) une petite station de l’âge du renne où les amas magdaléniens sont recouverts par une couche à galets coloriés, analogues à ceux qu'il a été le premier à signaler dans la grotte du Mas-d’Azil, Mémoires présentés : M. L. Barraud : « De l’obscu- ration des eaux-de-vie et la nouvelle loi belge: moyen proposé pour y remédier. » — M. Chicandard adresse, à propos d'un travail de M, Boutroux, une communica- tion relative à la fermentation panaire; il maintient que cette fermentation est due à des bacilles et non à des levures. — M. Léop. Hugo : Sur une combinaison relative aux décimales du nombre x, — M. Delaurier : Genèse des maladies contagieuses et épidémiques, Séance du 9 novembre 1891. 1° SCIENGES MATHÉMATIQUES. — M. Autonne : Sur les intégrales algébriques de l'équation différentielle du premier ordre. — M. Lelieuvre : Sur les surfaces à génératrices rationnelles, — M. Rateau, dans une com- munication précédente, avait défini une classe spéciale d'appareils, les {wrbo-machines, dont il faisait une étude d'ensemble, Il traite divers points accessoires de sa 762 ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES théorie, et établit un parallèle entre les turbo-machines et les dynamos. — M. Marey indique les services que la chronophotographie pourrait rendre dans l’étude des appareils destinés à la locomotion aérienne; il présente une épreuve reproduisant la trajectoire et les positions d’un appareil construit par M. Bazin et exécu- tant le vol plané. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. C.-J.-A. Leroy indique un moyen simple de vérifier le centrage des lentilles dans un objectif de microscope ; ce moyen consiste à examiner l'objectif avec un ophtalmoscope : les images catoptri- ques fournies par les diverses lentilles se superposent ou se projetent suivant une droite si le centrage est exact. — M. H. Becquerel a repris l'étude des lois de Vintensité de la lumière émise par les corps phospho- rescents, étude qui-avait été ébauchée par son père. Celui-ci, comparant l'extinction de la phosphorescence au refroidissement des corps, avait posé ? — ie. M. H. Becquerel établit, en partant de cette loi d’extine- tion, la loi à laquelle doit obéir la période d’excitation lumineuse dans le phosphoroscope; la formule ainsi obtenue est en désaccord avec l'expérience. L'auteur cherche alors à établir par des considérations méca- niques simples une relation entre l'intensité de la lumière émise par un corps phosphorescent et le temps écoulé depuis le moment où l'excitation lumineuse à cessé; il aboutit à une formule qui rend compte du phénomène pour un certain nombre de corps phospho- rescents ; les autres peuvent être soumis à la loi si on les considère comme constitués par un mélange; cette hypothèse est justifiée par l'examen de la phospho- rescence provoquée sur ces corps au moyen d’un spectre; on reconnait en effet dans ce cas plusieurs bandes distinctes. — A propos d’un travail récent de sir W., Thomson sur le potentiel d’un grillage composé de fils parallèles en nombre infini, M. Haton de la Goupillière rappelle la communication qu’il a pré- sentée sur ce sujet, il y a trente-deux ans, — M. R. Blondlot : Détermination de la vitesse de propagation des ondes électro-magnétiques. (A ce sujet voir plus loin le compte-rendu de la Société française de Physique, p. 764) — M. D. Berthelot avait montré, dans des communications antérieures, que lorsqu'on ajoute à un acide monobasique dilué des quantités croissantes d’alcali, la conductibilité de la solution décroît jusqu’à la formation du sel neutre, puis augmente de nouveau; dans le cas d’un acide fort et d’une base forte, la marche du phénomène peut être représentée par deux droites qui se coupent au point de neutralisation. En réalité, au voisinage immédiat de ce point, les deux droites sont reliées par une courbe; c’est l'étude précise de cette courbe que M. D. Berthelot fait aujourd’hui pour l'acide chlorhydrique et la baryte ; cette marche non linéaire du phénomène indique l'existence dans les solutions diluées de traces de sels acides ou basiques. — M. G Rousseau avait indiqué la formation aux tem- pératures élevées d’hydrates salins, en particulier des ferrites et des manganites hydratés ; pour répondre à l’objection qui lui avait été faite, que leau de ses com- posés pouvait provenir d’une hydratation pendant les lavages, il a repris quelques-unes de ses expériences, en n'employant comme dissolvants que la glycérine et l'alcool absolu; les manganites ont été identiques à ceux obtenus précédemment; les ferrites ont contenu un peu moins d’eau, ce que l’auteur attribue à l'action déshydratante de la glycérine. — M. H. Moissan a fait réagir le phosphore sur l’iodure de bore au sein du sulfure de carbone pur et sec; il a obtenu le phos- phoiodure de bore PhBol; réduit par l'hydrogène, ce corps devient PhBol; M. Moissan décrit quelques pro- priétés de ces deux corps, —M. A. Chassevanta obtenu un chlorure double de cuivre et de lithium, disso- ciable par l’eau, mais stable en présence d’un excès de chlorure de lithium. — M. J. Houdas a repris l'étude des principes immédiats de la digitale solubles dans l’eau; il a reconnu qu'il n’exite que la digitaléine de Nativelle et que la digitonine de Schmiedeberg n'en est pas distincte, Une propriété caractéristique de la digitaline est celle de former des combinaisons crista- lisables avec les divers alcools de la série grasse; la solubilité de ces cristaux est en raison inverse du poids moléculaire de l'alcool. M. Houdas a dédoublé la digi- taléne en deux glucosides, sans mise en liberté de glu- cose, — MM. Jungfleisch et Légeront répété le travail de MM. Comstock et Kænig en vue d'obtenir le corps désigné par ceux-ci sous le nom d’isocinchonine ; MM. Jungfleisch et Léger ont reconnu que ce corps n'est pas leur cinchonigine appelée actuellement isocin- chonine par M. Hesse, mais leur cinchoniline ; la dési- gnation d’isocinchonine semble donc devoir disparaître, comme prètant à une confusion, d'autant plus que M. Hesse l'avait d’abord appliquée à un mélange de divers produits du dédoublement de la cinchonine par l'acide sulfurique. — MM. Lezé et Allard indiquent comment le procédé de M. Lezé pour le dosage de la malière grasse dans le lait (chauffage à 40° après traite- ment par HCI et saturation par Az H*, mesure du volume occupé par le beurre fondu) peut être appliqué aux divers produits du lait, crème, fromage, etc. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. B. Griffiths a traité par l’éther et l'acide tartrique en solution aqueuse les urines des malades atteints de diverses maladies infectieuses ; il a obtenu des ptomaines toxiques, il a extrait les mêmes ptomaïnes des cul- tures de l'agent infectieux. — M. G. Demeny a étudié par la chronophotographie les saillies que produisent les muscles, pendant les mouvements ; il est possible, d’après ces saillies de reconnaître si un membre, pris dans une attitude donnée, est en train de se fléchir ou de s'étendre ; ilexiste des formes caractéristiques du repos, de l'effort statique et de l’effort dynamique. — M. Mitrophanow a étudié chez les Sélaciens la forma- tion du système nerveux périphérique. Ses conclusions principales sont les suivantes : le germe du système nerveux périphérique apparaît après la fermeture du tube nerveux ef sa séparation de l’ectoderme: il prend naissance dans la paroi supérieure dutube nerveux par suite de la multiplication des éléments de ce dernier; sa croissance ultérieure dépend de la multiplication in- dépendante de ses éléments. — M. P. Vuillemin à repris l'étude des modifications que l’Ustilago anthera- rum produit dans les fleurs femelles du Lychnis dioïca, modification qui porte dausla classification de M. Giard le nom de castration parasitaire androgène. Ila constaté qu'il y a bien castralion, le développement du pistil étant arrèté, mais l’androgénie n’est qu'apparente;les rudiments des étamines subissent une hypertrophie morbide, sans produire de pollen; ce sont les spores de l'Ustilago qui remplissent leurs loges, — M. des Val- lières décrit, d’après un grand nombre d’observations faites par lui, la lutte du vent du sud-est et du vent d'ouest sur le sommet des Cévennes, lutte dont l’étude permet de prédire le mistral. Mémoires présentés. M. P. Delestre adresse un mé- moire sur les météores cosmiques. — M. Ch. V. Zen- ger: Parallélisme de la vitesse du vent, des pertur- bations magnétiques et desaurores boréalesen 1888. — M. E.Serrant adresse une note relative à une culture de pommes de terre à grand rendement. L. LaPieQuE, ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 3 novembre, M. Bérenger-Féraud : Notesur le cornet à chloro- forme en usage dans la marine. L'auteur rappelle que dans la marine francaise, où l’on pratique depuis long- temps l’anesthésie au moyen d’un cornet, les accidents sont extrêmement rares, De l'enquête à laquelle il s’est livré, il résulte que depuis 4855 les chirurgiens de la marine ne se souviennent que de quatre cas de mort par le chloroforme. L'auteur lui-même n'a observé qu’un cas de mort par le chloroforme au début de ses études. Il conclut de ces faits que l’on doit proclamer la supériorité du cornet sur la compresse ordinaire iÛ ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 7163 appliquée sur la figure de l’opéré qu'elle cache en partie, en même temps qu'elle gène la respiration. Le cornet, au contraire, permet de surveiller la figure du patient pendant l’anesthésie ; il n’expose pas l’'opéré à recevoir le contact direct du chloroforme dans les narines et permet l’arrivée de l’air en même temps que les vapeurs anesthésiques. — M. Ver- neuil : Gangrène partielle du pied, consécutive à des injections hypodermiques d’antipyrine. Après avoir décrit les observations concernant deux sujets, l’auteur recherche la cause de la gangrène et dit, comme con- clusion pratique, que si les injections hypodermiques d’antipyrine méritent d’être conservées en thérapeu- tique, il faudra compter avec l’état anatomique et fonctionnel des systèmes nerveux et vasculaire de la région sur laquelle on se proposera d'opérer. — M. Le Dentu : Rein gazeux; analyse des gaz; examen histolo- wique. L'auteur rappelle qu'il a présenté à l’Académie, au mois de mai dernier, unrein kystique dontla cavité était remplie de gaz. À 0°,et sous la pression de 760mm., le volume des gaz recueillis fut de 8 cc. 16 dont la com- position pour 100 parties se trouva être de 92,16 d’Az et O (environ dans les proportions que donne l’analyse de l’air atmosphérique) et de 7,84 de CO?. Ces gaz ne ouvaient provenir que du sang; mais il est à noter que eurs proportions sont très différentes de celles que ré- vèle l'analyse de ce dernier, En effet, dans le sang ar- tériel, on trouve de 26 à 31 parties d’CO?, de 11 à 17d'0 et de 1 à 1,80 d’Az, et dans le sang veineux de 27 à 34 parties d'CO?, de 10 à 12 d'Oet de 1 à 1,25 d’Az. On voit donc que l’écart porte principalement sur les quantités res: pectives d'azote dans le sang et dans les reins, La pro- portion d’azole a été de beaucoup la plus forte dans le rein malade. Séance du 10 novembre. M. le D' Ricochon (de Champdeniers) réclame la priorité au sujet de la communication de M. Verneuil sur la gangrène causée par l'introduction de l’antipy- rine dans le tissu conjonctif. Ce praticien rappelle en effet qu'il a été témoin d’un fait tout pareil relaté dans la Gazette hebdomadaire du 11 novembre 1887. SOCIETE DE BIOLOGIE Séance du T novembre 1891 M. F. Regnault décrit la dilatation des joues qu'ila observée chez les souffleurs de verre; il fait remarquer que cette déformation est reproduite fort exactement dans les œuvres d’artdu xvu®siècle, tandis qu'elle semble depuis avoir été ignorée des artistes. — M. Adenot rap- porte plusieurs cas d'appendicite où l'examen bacté- riologique à décelé le Bacterium Coli commune, pur ou associé au slaphylocoque. — MM. Chantemesse et Widal discutent les expériences récentes par lesquelles on a voulu identifier le bacille d'Eberth avec celui d’Escherich; si, comme l’a indiqué M, Dubief, le B. Coli commune fait fermenter la glucose, cette fermentation est plus lente que parle bacille typhique; mais, avec la lactose, la différence est radicale, et l'existence ou l’absence de fermentation est un véritable critérium. Quant aux expériences par lesquelles MM, Rodet et G. Roux auraient transformé le B, Coli commune en bacille d’Eberth, MM. Widal et Chantemesse les ont répétées sans obtenir jamais cette transformation. En résumé, sans vouloir discuter la question d'une origine ancestrale commune, les auteurs affirment que dans l’état actuel, au point de vue expérimental, le bacille d'Eberth et celui d'Escherich constituent deux espèces distinctes, — M. Mégnin a observé chez le pigeon une espèce de tænia qu'il identifie à une espèce créée par Rudolphi et depuis mise en suspicion, le T. sphenoce- phala. — M. Saint-Hilaire a constaté que les antisep- tiques ont une action plus puissante à 45° qu'à 15°, — M. Dopoff : Du mélange des couleurs matérielles et de leur contraste simultané, Séance du 1% novembre. M. A. Binet décrit l’organisation d’un ganglion tho- Lo] [a] racique chez quelques Coléoptères de la tribu des Mélo- lonthiens, — M. Mégnin a découvert sur les poules dites poules de Padoue un Acarien de grande taille, voisin des Dermanysses, qui vit dans la huppe de ses victimes. M. Mégnin lui impose le nom de Lophoptes patavinus; g. n., Sp. n. — M. P. Sollier signale l’exis- tence de la gustation colorée ; il en rapporte un cas ob- servé par lui sur un hypocondriaque, — M. Ch. W. Stiles a recherché quel était en Amérique, où le han- neton n'existe pas, l’hôte intermédiaire de l’Echinorhyn- chus gigas, fréquent chez les pores; il a trouvé cet hôte 3 dans diverses espèces de Lachnosterna. Séance du 21 novembre 1891. A propos de la note de M. Sollier sur la gustation colorée, M. Féré rappelle qu’il a autrefois communiqué à la Société un fait de ce genre. — En commun avec M. Habert, M. Féréa recherché le bromure dans les di- versorganes d’épileptiques morts dans son service; l’accu- mulation diffère suivantque la bromuration estancienne ou récente, M. Richet, dans ses recherches sur la toxici té des alcalins, avait constaté une accumulation remar- quable de chlorure de lithium dans le rein, — M. Féré classe 18 bromures métalliques au point de vue de leur dose toxique. — M. Henriquez a constaté dans un cer- fain nombre de cas des microbes pathogènes dans lu- rine, recueillie aseptiquement, de sujets indemnes de toute maladie infectieuse ; il s'agissait en général du staphylocoque; il a trouvé aussi quelquefois des mi- crobes dans l'urine de lapins et de cobayes sains. — M. Laveran étudie uu hématozoaire fréquent dans le sang du pinson ; il a trouvé aussi un hématozoaire chez des pigeons venus de Toscane, Il a obtenu des résultats positifs en inoculant le sang d’alouettes infectées à des alouettes saines; on observe chez les sujets en même temps que la prolifération du parasite, une anémie considérable. — M- Chouppe rapporte un cas de der- mographie de la face, chez un sujet qui semble normal d'autre part. — M. Paulier décrit un procédé de me sure de la surface des organes, et du cerveau en parti- culier, — M. Gillis a repris l'étude anatomique des museles scalenes ; il en décrit trois au lieu des deux clas- siques. — M. Winter : Considérations nouvelles sur le chimisme stomacal. — MM. Voisin ct Aran main- tiennent contre MM. Gilles de la Tourelte et Cathelineau que la nutrition, étudiée au point de vue de la compo- silion des urines, est fort peu troublée dans l’état hyp- notique. L. Lapicoue. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 20 novembre 1891 ; M. Bouty expose le résultat de ses travaux sur les propriétés diélectriques du mica. La méthode employée est celle qui lui a servi antérieurement à établir la loi du résidu dans les condensateurs étalons Carpentier (Voir la Revue,t, I, p. 614). Il a d'abord cherché le meil- leur procédé à employer pour armer une lame de mica et constituer les armatures du condensateur. Le procédé ordinaire, qui consiste à coller les feuilles d’étain sur le mica par du vernis à la gomme laque, ne produit qu'une adhérence imparfaite et donne des lames de capacité très variable : la capacité est parfois à peu près indépendante de l’épaisseur, et varie consi- dérablement quand on exerce une pression sur les lames. Le seul procédé rigoureux consiste à argenter directement les faces du mica. Avec des lames ainsi constituées, si l’on a pris des précautions suffisantes de dessiccation, de manière à éviter les fuites superfi- cielles, on trouve que les lois établies pour le résidu des condensateurs étalons s'appliquent rigoureuse- ment. M. Bouty s’est alors proposé de rechercher sur le mica si la constante diélectrique était bien un élé- ment invariable. Pour cela, il a fait varier la tempé- rature dans des limites étendues : en protégeant l’ar- mature d'argent par une couche de cuivre électrolytique, 76% ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES il a pu pousser ses recherches jusqu'à 400 degrés, Il a montré ainsi avec certitude que, au degré de précision des expériences, c’est-à-dire à £ près, le pouvoir induc- teur spécifique conserve rigoureusement la même valeur, bien que le résidu varie dans des proportions énormes. Aussi la constante diélectrique doit-elle être considérée comme appartenant au groupe des pro- priétés spécifiques des corps que la température altère peu, comme la densité, l'indice de réfraction, ete: Pour le mica, cette valeur certaine de la constante diélec- trique est égale à 8. La loi de Maxwell est donc loin de s'appliquer à ce corps, sans doute parce que ce n’est pas un diélectrique homogène à la manière des liquides purs. Outre leur portée théorique, les recher- ches de M, Bouty trouvent une application immédiate dans la construction des condensateurs étalons com- merciaux. Au procédé imparfait actuellement employé pour armer le mica, et qui exige des quantités de ce corps beaucoup trop considérables, il convient de subs- lituer le procédé par argenture. Les condensateurs actuels pourront être remplacés par des appareils d’un volume et d’un poids beaucoup moins considérables; un condensateur d’un microfarad devient ainsi un instrument de la dimension d’un livre de poche, En outre, on gagne au point de vue de l'invariabilité du condensateur. — La mesure absolue de la vitesse de propagation des ondes électro-magnétiques de Hertz a déjà été l’objet de nombreux travaux, mais jus- qu'ici aucun n’a conduità de bons résultats. M. Blondlot a abordé à son tour ce difficile problème; la méthode qu'il a imaginée lui a permis de le résoudre avec un succès complet. La longueur d'onde que l’on observe étant, comme l’ont montré MM. Sarrazin et de la Rive, celle qui est propre au résonateur, il s’agit de se placer dans des conditions où la détermination exacte de la période propre du résonateur soit possible, La forme rudimentaire adoptée par Hertz ne se prête pas à un calcul rigoureux. En adoptant, par exemple, un réso- nateur constitué par un condensateur formé de deux plaques de cuivre circulaires, distantes d’une fraction de millimètre et reliées entre elles par un circuit rec- tangulaire de dimensions convenables, M. Blondlot se trouve dans des conditions où la formule de M. Lipp- mann, qui donne la période en fonction de la capacité et de la self-induction, est applicable. On mesure la capacité électromagnétique par la méthode classique ; quant au coefficient de selfinduction, la forme du ré- sonateur permet de le calculer rigoureusement. La période T étant connue, il suffit de mesurer la longueur d'onde pour en déduire la vitesse cherchée V, d’après la formule x — VT, M. Blondlot a mesuré cette lon- gueur d'onde le long de fils métalliques, Il s’est servi de deux fils parallèles, On donne une certaine position au résonateur et on cherche par tâtonnement à quelle distance on doit placer sur les fils une tige métallique transversale servant de pont pour que le résonateur soit à l’extinclion. La distance du pont au résonateur À = À ‘ donne SM Blondlot, en modifiant les dimensions du résonateur, a pu faire varier la longueur d'onde du simple au quadruple. Les valeurs de V demeurent très concordantes et donnent comme moyenne 297.600 ki- lomètres par seconde, On sait, d’après les travaux de MM. Sarrazin et de la Rive, que la vitesse à travers l’air serait la même que le long des fils. On voit qu'au degré de précision d'expériences aussi délicates, ce nombre est identique au v de Maxwell et à la vitesse de la lu- mière, — M. Cornu fait ressortir toute l’importance et la portée du magistral travail de M. Blondlot, : EnGarp HAUDIÉ. SOCIETE FRANÇAISE DE MINERALOGIE Séance du 12 octobre 1891, M. Dufet donne la description cristallographique de quelques sels nouveaux ou peu connus à ce point de vue. M. Mallard décrit en son nom et en celui de M. Cumenge un nouveau minéral, la boléite 3 [PbCI (HO), Cu CI (HO) + Ag CI)], voisine de la percylite. Il se trouve à Boléo (Mexique) en cristaux cubiques attei- gnant 24» d’arête, ou en petits octaèdres quadratiques. De très remarquables anomalies optiques débrouillées par ce savant le conduisent à considérer cette substance comme ayant la forme quadratique représentée par les paramètres « : ce — £.1,645, Quand ce réseau pseudo- cubique n’est pas groupé, la. forme habituelle est celle d'octaèdres a 2, Les groupements donnent naissance tantôt à des groupements octaédriques, tantôt aux cris- taux d'apparence cubique. — M. A. Lacroix signale dans les trachytes du Plateau central des enclaves de sanidinites, analogues à celles des Acores, du Vésuve et riches en minéraux, parmi lesquels se fait surtout re- marquer le zircon affectant soit la forme habituelle, al- longée suivant l’axe vertical, soit celle de petits oc- taèdres identiques à l’azorite. — M. Ch. Friedel montre un échantillon de pyrite épigène de Meymac renfer- mant de petits cristaux de soufre natif. — M. Wyrou- boff fait voir un microscope renversé qu’il a fait cons- truire et qui permet d'observer les lames cristallines et de mesurer leurs extinctions à hautes températures. Il entretient ensuite la Société des recherches qu'il pour- suit sur la série des sels MO‘ NP2, 21P0 ;,(M=S, Se,Te); (N=Mg, Zn, Fe, Co, Ca);[P=K, (NH*), Rb]|. Ces sels sont tricliniques, il présententlesmêmes formes dominantes, les mêmes clivages, les mêmes mâcles, des paramètres très voisins et cristallisent ensemble; ils ne se distin- suent que par leurs propriétés optiques. Ils paraissent donc parfaitement isomorphes. Prenant pour exemple Se 0‘ Zn K? et Soi Fe K?, l’auteur montre que la cha- leur ne modifie pas les propriétés optiques du premier, mais qu'à 75° le second subitune transformation réver- sible lui donnant les propriétés optiques du second. M. Wyrouboff en conclut que ces sels ne sont pas isomor- phes, mais dimorphes, avec des réseaux extrêmement voisins qui ne deviennent identiques qu'à une certaine température. Ces faits confirment l’idée émise par l’au- teur, à savoir que l’ellipsoïde optique dépend du réseau cristallin et qu'à un réseau donné correspond toujours le même ellipsoide, Les corps isomorphes seraient ceux qui possèdent même réseau et même ellipsoïde opti- que. A. Lacroix. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 18 novembre 1891, M. Bioche étudie les surfaces réglées qui, passant par une courbe, ont le long de cette courbe une cour- bure totale donnée, constante ou variable. Il généralise ainsi diverses propositions relatives aux développables (cas de la courbure totale nulle). — M. Lemoine : Sur la transformation systématique par continuité des for- mules relatives à la théorie du triangle. — M. Fouret fait une communication sur les points singuliers des équations différentielles du premier ordre et du pre- mier degré, Il détermine par une méthode simple le nombre des points singuliers d’une équation différen- tielle et ajoute quelques remarques sur le rôle de ces points, au point de vue de l'intégration. — M. Hum- bert : Sur les surfaces desmiques du quatrième ordre. Etude de quelques courbes remarquables tracées sur ces surfaces, basée sur un mode de correspondance des courbes linéaires de la surface et des droites d’un plan. M. D'OcAGNE. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 6 novembre 1891. M. Sydney Young : Sur les généralisations de Van der Waals relatives aux températures, pres- sions et volumes « correspondants ». L'auteur donne les résultats de ses recherches faites en vue de dé- terminer dans quelle mesure les déductions théori- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 765 ques s'accordent avec les faits expérimentaux. De son équation (+5) (ù — b)= R (A + ab) Van der Waals conclut que si les températures ab- solues de diverses substances sont proportionnelles à leurs températures absolues critiques, leur tension de vapeur sera proportionnelle à leur pression critique, et leurs volumes spécifiques, soit le volume du liquide, soit celui de la vapeur saturée, seront proportionnels à leurs volumes critiques. Ces déductions ont été main- tenant soumises au contrôle de l’expérience, Il y a quelques années, le professeur Ramsay et l’auteur publièrent des données établissant la relation entre la température, la pression et le volume spécifique dans les alcools méthylique, éthylique et propylique, et l'acide acétique. Depuis lors des expériences ont été faites sur la benzine et ses dérivés halogènes, fluorés, chlorés, bromés et iodés, le tétrachlorure de carbone et le chlorure stannique, et dans quelques cas les obser- vations ont été poussées jusqu'au point critique. Les volumes critiques étant dans bien des cas difficiles à déterminer avec quelque exactitude, l’auteur, au lieu d'exprimer les températures, pressions et volumes de chaque substance en fraction des valeurs critiques, trouve nécessaire de comparer lesdifférentes substances avec une d’entre elles prise comme terme de compa- raison. Il choisit le fluorbenzène (benzine fluorée) à cause des relations très simples observées entre les dérivés halogènes monosubstitués de labenzine, et aussi parce que ses trois constantes critiques ont été déter- minées avec une grande précision. L'auteur donne des tables indiquant les points d’ébullition à des pres- sions correspondantes, les tensions de vapeur à des tem- pératures correspondantes, les volumes moléculaires du liquide et de la vapeur saturée à des pressions cor- respondautes, et les rapports qu'on en déduit par le calcul, Il en conclut : 1° que les généralisations de Van der Waals sont très exactes pour les benzines chlorée, bromée, iodée, comparées au fluorbenzène; 2° que, pour la benzine, le chlorure de carbone, le chlo- rure stannique et l’éther, les généralisations ne peuvent être considérées que comme grossièrement approxi- matives, et 3° que pour les trois alcools et l'acide acétique elles ne donnent rien de bon. Les tables montrent que les résultats les plus cohérents s’ob- tiennent quand on fait la comparaison à pressions correspondantes plutôt qu'à températures correspon- dantes, particulièrement dans le cas des volumes moléculaires des vapeurs saturées., La question des vapeurs saturées a donc été traitée par une autre méthode. Si les déductions de Van der Waals étaient strictement exactes, les rapports des densités réelles des vapeurs saturées de diverses substances à leurs densités théoriques seraient égaux à des pressions correspondantes, Ces rapports ont donc été calculés, et ils présentent un accord approché pour la benzine et les dérivés halogènes, le chlorure de carbone, le chlo- rure stannique et l’éther. L'accord est moins satisfai- sant pour les autres substances. On trouve que le rapport de la densité critique réelle à la densité théo- rique est pour une susbtance quelconque voisin de 4,4, Les alcools différant si visiblement des autres com- posés, on les a comparés entre eux au lieu de les comparer au fluorbenzène, et l'on a trouvé alors une concordance un peu meilleure, les écarts étant toutefois encore en dehors des limites des erreurs expérimentales. Des constantes critiques, le volume est la plus difficile à déterminer, parce qu'au point critique les courbes reliant la température et le volume ou la pression et le volume sont parallèles aux axes des volumes. L'auteur a dans quelques cas déduit cette quantité en portant sur une courbe en fonction des températures, les nombres représentant les rapports des volumes moléculaires du liquide et de la vapeur saturée à ceux du fluorbenzène aux températures cor- respondantes et aussi aux pressions correspondantes. Il en résulte quatre courbes qui doivent se couper à la température critique, et le point d'intersection donne le rapport du volume moléculaire critique de la substance à celui du fluorbenzène, Cette mé- thode conduit à des résultats en parfait accord avec les déterminations directes. Dans la discussion qui suit, M. Ramsay dit que ces résultats prouvent que les généralisations de Van der Waals ne sont que grossiè- rement approximatives, et émet l’idée que certaines forces ont été négligées et qu'il manque un terme dans l’équation. Peut-être l'hypothèse de l’incompres- sibilité des molécules n'est-elle pas correcte ? 11 proteste contre les conséquences déduites de la loi de Van der Waals tacitement admise comme vraie, et qui sont si fréquentes dans les ouvrages allemands en particulier, M. Perry demande si les quantités «4, b, «, ont été déterminées pour diverses substances et trouvées cons- tantes. M. Ramsay dit que pour des substances dans des états analogues à ceux des gaz parfaits, les quan- tités sont approximalivement constantes; mais quand on approche de l’état liquide, il est loin d’en tre ainsi. D’après le professeur Tait, les deux états ne sont pas continus. M. Herschel remarque que le professeur Tait a élabli sa loi en supposant que ce volume estquatre fois le volume occupé par les molécules, et cette loi a été plèinement vérifiée par les expériences sur les explo- sifs. M. Burton, se rapportant aux remarques de M. Ramsay sur la compressibilité des molécules, dit que la loi de la force attractive entre les molécules devrait être bien exactement connue avant qu'on püt en tirer des conclusions, etil remarque que, à volume constant, la pression serait proportionnelle à la tempé- rature absolue si l’on consentait à regarder l'attraction comme une pression négative. M. Blabesley, parlant de forces moléculaires, dit qu'il a observé que quand on fait évaporer l’eau dans du verre, il se forme un sillon qui marque le niveau du liquide à l’origine. Selon toute apparence, les particules de verre sont attaquées en vertu de forces moléculaires agissant à la surface de séparation, SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES Séance du 6 novembre 189%. M. Schunck lit le discours d'inauguration de la première séance de l’année 1891-1892, Parlant d'abord du mouvement qui a lieu actuellement en Angleterre en faveur de l'éducation technique, et des sommes considérables qui ont été votées dernièrement par le Parlement pour subventionner des écoles, il déclare qu'à son avis il ne faut pas s'attendre à des résultats très marqués de ce nouveau mouvement dans le pro- urès des industries chimiques. Pour créer de nouvelles industries, 1l faut une connaissance approfondie de la science, ce que les écoles techniques ne peuvent pas prétendre donner. D'autre part, une fois les méthodes créées, l’ouvrier n’a qu’à travailler, sans s'inquiéter des réactions chimiques qui s’opèrent. M. Schunck envi- sage ensuite la question qui agite beaucoup les esprits, c'est-à-dire celle des impuretés atmosphériques, Il admet volontiers que les grandes villes sont insa- lubres, et que leur atmosphère contient des impuretés chimiques désagréables aux sens. Mais il n’est nulle- ment démontré, selon lui, que les impuretés chimiques soient la cause de linsalubrité. Il mentionne les tra- vaux de l'Air Analysis Committee de Manchester, qui pourront servir de base aux physiologistes pour dé- terminer si les impuretés, dans les proportions où elles se trouvent actuellement dans l'air, ont réelle- ment une action nuisible sur l’économie animale. En attendant, iltientà prévenirle grand public qu’il est très peu politique, à lheure présente où les grandes indus- ‘ trieschimiques d'Angleterre souffrent déjà tant au point ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de vue commercial, de faire surgir de nouvelles diffi- cultés en demandant la suppression pure et simple de la fumée des cheminées, — M. Weber lit un premier mémoire sur les laques formées par l'union des matières colorantes basiques avec un acide, Il pense que l'acide tannique convient le mieux pour la production des laques de ce genre, mais on n'obtient de résultats satisfaisants qu’en présence de l’acétate de soude. Jusqu'ici on n’a pas suffisamment étudié la question de savoir combien d'acide tannique il faut ajouter à une quantité donnée de laque. La détermina- ton se fait facilement en précipitant un poids connu de la matière colorante avec un excès d'acide tan- nique, et en dosant cet excès au moyen du permanga- nate de potasse acide en dissolution étendue. L'auteur à fait une série de déterminations de cette espèce; les résultats ont été réunis dans une table qui sera pu- bliée avec son mémoire, Les matières colorantes ba siques se combinent à une ou deux exceptions près (la chrysoïdine, etc.) avec une quantité d’acide tan- nique dépassant celle nécessaire à saturer un groupe- ment amidé, même pour les sels où un seul groupe- ment est saturé par d’autres acides qui ont des pro- priétés colorantes. Si l’on opère avec un excès de la matière colorante, cet excès se précipite en grande partie avec la laque, par entraînement mécanique, et il y a de ce fait non seulement une perte, mais la couleur obtenue s’oxyde facilement et par suite est fu- gace, L'auteur préconise l'emploi de Pémétique dont la combinaison avec ces laques a pour effet d’augmen- ter le brillant et la fixité de celles-ci. P, J. Harroc. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE BERLIN Séance du 23 octobre 1891 M. Rubens expose une méthode pour mesurer la dispersion dans la partie ultra rouge du spectre. Deux rayons parallèles traversent deux plaques en sel ma- rin et sont concentrés avec leur différence de phase sur la fente d'un spectroscope. On observe dans la* partie visible du spectre des raies noires, dont la dis- tance est donnée par la formule connue : mA = 24 cosu a étant l’angle d'incidence. Pour la partie ultra-rouge du spectre on remplace l'oculaire du spectroscope par un bolomètre à l'aide duquel on cherche les raies froides, Connaissant par les observations antérieures la lon- gueur d'onde en fonction de la distance des raies, on peut mesurer la dispersion des raies calorifiques. Les courbes que M. Rubens a dessinées ressemblent beau- coup à celles de M. Langely, mais il y a certaines diffé- rences sur lesquelles on reviendra plus tard. Séance du 6 novembre 1891 M. Raps présente sa machine pneumalique-automa- tique à mercure. La bombe inférieure à mercure est fixée à un balancier et est balancée par un contrepoids 0 mobile, On fait monter le mercure à l'aide de Pair 1 comprimé dans un tambour | au moyen de l’eau des con- duits. Dès que le mercure / est monté Jusqu'à un certain point, le balancier tourne par l'effet du sureroit du contre-poids mobile et ferme le robinet du conduit d’eau. Le mercure s'écoule et fait | le vide; la bombe inférieure Cd 5 7 s'étant remplie, elle abaisse É le balancier; le robinet du conduit d’eau s'ouvre de | nouveau et le jeu recom- inde 1 mence. Ces machines fonc- ‘ tionnent avec une régula- rité et une vitesse extraordinaires En un quart d'heure, M. Raps a fait le vide dans un tube de Geissler jus- qu'au point auquel apparaît la fluorescence verte. — M. du Bois-Reymond présente quelques photographies de la rétine humaine, exécutées par M, Oswald Ger- loff, donnant les détails de la structure et de l’expan- sion du nerf optique avec une netteté admirable. Les photographies sont faites dans une chambre obscure à l’aide de la lumière du magnésium. — M. Hundt pré- sente un appareil construit par M. Zehnder pour sé- parer les rayons interférents. La partie essentielle de l'appareil consiste en un système de quatre petits mi- roirs (fig. 1). Le rayon 1 parcourt le chemin O a!b! L?, tandis que le rayon 2 traverse le miroir a! et est réfléchi par a? vers b?, Les deux rayons ont la même même longueur d'onde. En plaçant a! a? et b162 dans des milieux différents, les deux rayons acquièrent des différences de phases, donnant lieu à des raies d’inter- férence, D' Hans JAN. SOCIÉTÉ DE PHYSIOLOGIE DE BERLIN Séance du 13 novembre M. H. Munk, discutant avec MM. Exner et Müller à propos de l’action de la section du laryngé supérieur, sur le larynx chez le Cheval, a tout d’abord constaté que du tronc du vague, précisément à l'endroit où s’en sépare le laryngésupérieur, part un fin ramuscule ner- veux qui va au muscle cricothyroïdien; quelquefois ce nerf part directement de la partie supérieure du la- ryngé, Au-dessous de ce point, la section du laryngé n'entraîne ni la paralysie des cordes vocales, ni latro- phie des muscles du larynx. Les conclusions opposées de MM. Exner et Müller tiennent sans doute à une obser- vation inexacte; les chevaux sur lesquels ils ont expé- rimenté ont probablement eu du « sifflement dularynx» affection du récurrent gauche. — M. Gad maintient l’exactitude des faits publiés par M. Müller, qui a tra- vaillé sous sa direction, et engage une longue discus- sion sur les paralysies et les atrophies des muscles dont les nerfs sensilifs ont été coupés. — M. Martin KRrüger a étudié laconstitution chimique de l’adénine. Les auteurs ont montré que lescorps dela série xanthi- que appartiennent au groupe de l'acide urique et que leur décomposition par l'acide chlorhydrique, donne aussi bien que la décomposition de l'acide urique; du glycocolle a côté de lacide carbonique et de l’am- moniaque, M. Krüger a décomposé de même l’adé- nine et l’hypoxanthine; il a obtenu en traitant ces corps à 130° par HCI de lPammoniaque, de l’acide car- bonique, de l'acide formique, et aussi du glycocolle. De plus en traitant l’adénine bromée par le chlorate de potasse et l'acide chlohrydrique, il a obtenu entre autres produits de dédoublement, de l’alloxanthine et de l’urée, L'auteur doit instituer de nouvelles recher- ches pour savoir si ce dernier corps est un produit di- rect du dédoublement de l’adénine ou bien s’il provient de Valloxanthine. Dr W. SKLAREK. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 22 octobre 1891. SCIENCES PHYSIQUES. — M. G. von Greorgievics : Sur l’action de l'acide carbonique et de l’oxyde de fer hy- draté sur le phosphate tricalcique. En présence d’un excès d’eau, l'acide carbonique enlève d’abord au phos- phate une partie de sa chaux en donnant du phosphate dicalcique et du carbonate ; dans la suite de la réaction le phosphate tricalcique se dissout sans décomposition. Dans les mêmes conditions, en présence de l'acide carbonique, l’oxyde de fer hydraté enlève au phosphate tout ou partie de son acide phosphorique et le transforme en sel de basicité plus élevée, probablement en phos- phate tétracalcique. De ses recherches résulte ce fait important au point de vue de la chimie agricole que, dans un sol contenant une quantité suffisante de fer hydraté et d'acide carbonique, tout l'acide phospho- AC réléf iltait ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 767 rique qu'on lui fournit sous forme de phosphate de chaux se retrouve finalement sous forme de phosphate de fer. — M. Pum: Sur l’action de l'acide iodhydrique sur la cinchonine. Le résultat essentiel de ce travail est que le produit de la réaction a pour formule, non pas : CH3%31°0, comme l'ont prétendu MM. Lippmann et Fleissner, mais C!*H24124220 ; la cinchonine, surlaquelle on n’a encore pu fixer qu'une molécule d'acide chlo- rhydrique ou bromhydrique peut fixer deux molécules d’acide iodhydrique. Cette base, trailée par l’éthylate de sodium ou le nitrate d'argent abandonne les molécules qu'elle a fixées en donnant un mélange de cinchonine et peut-être d’isocinchonine, ou simplement de la cin- chonine. Séance du 5 novembre. Le ministère de la guerre — section de la marine — exprime au bureau de l’Académie son assentiment au projet de donner à la profondeur découverte lors de l'expédition du vaisseau Pola celte année, et qui est jus- qu'à ce jour la profondeur la plus grande que les son- dages aient révélée dans la Méditerranée, le nom de profondeur Pola, et annonce que le service hydrographi- que du Pola à recu des instructions pour publier les données relatives à cette profondeur, et de lui donnerce nom dans les « Annales hydrographiques. » 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. Stolz, d’'Innsbrück : « Les maxima et minima des fonctions de plusieurs va- riables, » C’est un complément au mémoire présenté sous le même titre à l’Académie le 16 mai 4890. — M. Weiss: « Sur le calcul de la trajectoire d’une comète quand on a égard aux termes d'ordre supérieur, » 2° SCIENCES PHYSIQUES, — M. E. Mach (de Prague) in- dique une modification au réfactomètre interférentiel de Jamin due à M. Ludwig Mach. Au lieu des 4 surfaces ré- fléchissantes des deux miroirs de Jamin, on emploie # lames planes à faces parallèles exactement égales qui peuvent être placées par paires sur deux chariots, sur lesquels elles sont réglables et mobiles au moyen de vis micrométriques. Ces chariots peuvent tourner autour d’axes qui passent par les extrémités d’un diamètre d’un grand anneau métallique et sont dirigés normalement au plan de cet anneau; l’on peut régler leur parallé- lisme. Le plan de l'anneau peut à volonté être mis ho- rizontal ou vertical, Cette disposition a l’avantage d’aug- menter le champ qui est trop restreint dans l'appareil de Jamin. — M.Liznar : «Une méthode de représenta- tion graphique des variations de direction de la force magnétique terrestre, » D'ordinaire on représente sépa- rément les variations de la déclinaison et celles de l'inclinaison ce qui ne donne pas à simple vue une idée claire de la variation de la direction. M. Liznar consi- dère le cône engendré par la direction de l'aiguille aimantée durant une période, période diurne, période annuelle etc., et mène le plan normal à la direction moyenne ; le cône est coupé par ce plan suivant une courbe qui est facile à construire quand on connaît les variations de la déclinaison et de l’inclinaison, si ces variations sont petites. L'aspect dela courbe donne une idée claire de la variation de direction. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Alfred Nalepa envoie la suite de ses communications sur « de nouveaux acarides ». Emil Weyr, membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE SAINT-PÉTERSBOURG - Séance du 21 octobre 1891 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Backlund présente le commencement de son mémoire sur la comète d'Encke, intitulé : Calculs et recherches sur la comète d'Encke, Première livraison de la première partie : Ta- bles pour le calcul de l'anomalie excentrique et du loga- rithme du rayon vecteur, Depuis plus de 70 ans, plu- sieurs astronomes qui se sont occupés des comètes ont formulé des vœux que des calculs de l’anomalie excen- {rique d’après l’anomalie moyenne fussent faits, mais tous reculaient devant l’immensité du travail à exé- cuter. Grâce aux efforts réunis de M. Backlund et de ses collaborateurs, ce travail est aujourd’hui ac- compli. Les tableaux présentés à lAcadémie donnent lanomalie excentrique pour chaque minute de l’ano- malie moyenne, et le logarithme du rayon vecteur pour chaque minute de l’anomalie excentrique. L’éten- duc des tableaux correspond aux variations dans l’ex- centricité produite par les perturbations. Ces variations peuvent aller jusqu’à 36 minutes. 2° Sciences PaysiQ0es. — M. Wild présente, pour la publication dans le Repertorium fur Meteorologie, une note de M. A. Glassek sur la Température du sol à Pétersbourg. Depuis 1873, à l'Observatoire physique de Saint-Pétersbourg, on fait des observations sur la tem- pérature du sol à différentes profondeurs. Ces obser- vations, publiées dans les « Annales » de l'Observatoire, n'ont été synthétisées que pour les cinq premières années par M. Wild, qui les a comparées avec des observations analogues faites à Noukous (Turkestan russe). Le travail de M. Wild a été publié en son temps dans le « Repertorium ». Aujourd'hui que l’on connait, d’après les travaux de M. Leist, sur la tempé- rature du sol de l'Observatoire de Pavlovsk (près Pétersbourg), les éléments nécessaires à la réduction de la température observée à la température moyenne réelle de la journée, il a paru urgent de donner une conclusion générale sur les observations qui embrassent une période de 17 années consécutives, M. Glassek à entrepris cette tâche laborieuse et l’a menée à bonne fin dans un très court espace de temps. Après avoir ra- mené à un système uniforme toutes les observations qui ont varié par suite de modifications et d'améliorations successives dans le mode opératoire, l’auteur à pu cal- culer non seulement les moyennes réelles, mais encore les variations des moyennes mensuelles et annuelles à différentes profondeurs, ce qui parait avoir été fait pour la première fois en général. Il ressort de cette der- nière partie de ses recherches, que la variation, par exemple, de la température annuelle moyenne à la sur- face du sol est presque égale à celle de la température moyenne de l'air, tandis qu’à une profondeur de 320, cette variation est deux fois moindre. De même, la va- riation des températures moyennes mensuelles à la sur- face est seulement légèrementinférieure à celle de l'air, tandis qu'à la profondeur de 320, elle est quatre à cinq fois moindre. En outre, la variation, à cette profondeur, est à son minimum pendant les mois d'hiver et à son maximum pendant les mois d'été, tandis qu’à la sur- face du sol et dans l'air, le maximum de la variation s’observe, comme on le sait, en hiver, et le minimum en été, Cette anomalie apparente est cependant très compréhensible si l’on considère que, à la profondeur de de 320, on observe un déplacement presque semes- triel de la marche ordinaire annuelle de la température de l'air, car à cette profondeur, la température atteint son maximum enhiver, et son minimum en été. Si les variations de température du sol étaient en rapports directs et simples avec celles de l'air, les problèmes de la climatologie auraient fait un grand pas en avant. Malheureusement, il n’en est pas ainsi. Prenons comme exemple la comparaison des observations faites à Pav- loysk et à Saint-Pétersbourg. À Pavlovsk, la moyenne annuelle de la température à la surface du sol étant de 1°3, celle que l'on observe à la profondeur de 320 est supérieure de 2 degrés à cette dernière; à Saint- Pétershbourg, au contraire, la température moyenne de la surface étant de 0°9 (un peu inférieure à celle de Pavlovsk), celle de la profondeur de 320 est de 34}, c’est-à-dire de 1°8 supérieure à celle de Pavlovsk. Un des faits intéressants qui découlent des recherches de l’auteur, c’est le retard dans l'élévation de la tem- pérature que l’on observe pendant les mois d'avril et de mai, retard dû aux effets du dégel. M. Glassek à eu également occasion de déterminer la profondeur à 168 CORRESPONDANCE laquelle on ne conçoit plus aucun changement de tem- pérature, ou des changements très minimes (jusqu'à 0°019). Cette profondeur est de 1150. Enfin, M. Glas- sek déduit des comparaisons et chiffres qu'il a obtenus cette conclusion importante, que la température moyenne du sol à Pétersbourg ne varie pas suivant la nature de sa surface : elle reste la même quand là sur- face est couverte été et hiver de sable, aussi bien que quand la surface est couverte de gazon en été, de neige en hiver. 3° SciENCES NATURELLES. — M. le comte Delianof, ministre de l'instruction publique, annonce à l’Aca- démie qu'il va présenter prochainement au Conseil d'Etat, avec avis favorable, le projet de lorganisa- tion d’un Comité ornithologique russe, élaboré par l’A- cadémie, — M. Karpinski lit une note sur les affleu- rements des couches du cambrien et du silurien infé- rieur trouvés par lui dans le gouvernement (province, de Minsk). Ce pays est un des moins connus en Europe, au point de vue géologique. On supposait jusqu'à pré sent que son sol se composait, en dessous des couches superlicielles, des terrains appartenant au crétacé et au tertiaire ; la découverte tout à fait inattendue des couches paléosoïques les plus anciennes qu’on vient d'y faire, jette un jour nouveau sur la structure géo- logique d’une bonne partie de la Russie. — MM, Schrenck et Strauch présentent une note de M. Semenoff, inti- tulée : Revisio Hymenopterorum Musei Zoologici Aca - | demiæ Cæsareæ Scientiarum Petropolitanæ, 1, Genus Cleptes Lotr. C'est un catalogue raisonné de 10 es- pèces du genre Cleptes, avec des indications détaillées sur leur provenance; quatre de ces espèces sont dé- crites comme nouvelles. O: BACkLUND, membre de l'Académie, CORRESPONDANCE SUR LE MUSEUM D'HISTOIRE NATURELLE La lettre suivante soulève une question d'autant plus utile à examiner que jusqu'à présent la presse, poli- tique ou scientifique, semble lavoir volontairement dédaignée. Il y a quelque mérite à lu trailer, par cela - même qu'elle parait un peu délicate el secondaire dans l'ordre des préoccupations scientifiques. La première rai- son commande et la seconde ne dispense pas de s'en occu- per. En réalité ce sont des intérêts importants, — ceux de la bonne organisation matérielle de la science, — qui sont en cause. Il suffit, croyons-nous, d'attirer sur eux l'intelligente attention du Conseil municipal de Paris pour leur gagner sa bienveillance. L. O. Pa ris, le 25 novembre 1891. Mon cher ami, Dans ces derniers {emps on a beaucoup parlé du Muséum et des projets de réorganisation de cet Etablis- sement : on a dit que son état matériel élait peu pros- père, que ses finances laissaient fort à désirer. Les causes générales de cet état sont bien simples; sans vouloir les discuter ici, je désirerais seulement faire remarquer qu'elles tiennent surtout à l'insuffisance notoire des crédits qui sont restés les mêmes depuis vingt-cinq ans, alors que le personnel et les bâtiments ont plus que doublé, Permettez-moi, de plus, d'attirer l'attention des lecteurs de votre excellente Revue sur des causes de détail : les petites causes ont quelquefois de grands effets, Il y a, par exemple, au Muséum la question dû gaz. Notre établissement national paie le gaz comme le public, soit 0 fr. 30 le mètre cube, alors que la Ville ou les établissements qui en dépendent ne le paient que Or A5: Nos édiles ignorent sans doute ce fait, car je ne doute pas un instant que le Conseil municipal, ami des sciences et du progrès, ne désapprouve hautement cet abus, aisément réparable, du reste, puisque le Conseil pourra, comme il le voudra, au renouvellement du privilège de la Compagnie du gaz, lui imposer la charge de fournir le gaz au même prix aux Etablisse- ments de l'Etat qu’à la Ville, Dans tous les cas, on peut être sûr que la Compagnie ne sera pas en perte. Pour certains laboratoires du Muséum, — on me permettra de citer le mien, — la consommation du gaz équivaut au quart du budget annuel. Il y aurait donc là une écono- mie qui serait loin d’être négligeable. La Ville elle-même traite durement le Muséum, qui paie une {axe de pavage annuelle de 4.900 francs probablement pour l’entretien des rues qui le bordent. L'eau de source n’est pas non plus délivrée gratuite- ment. Le Muséum doit s'en interdire l'usage, les taxes à payer à la Ville étant hors de proportion avec ses ressources. Cependant ces eaux de source auraient de grands avantages pour nos laboratoires ; elles possèdent à leur arrivée une pression considérable, susceptible d’être utilisée de mille manières, On pourrait encore, à la rigueur, comprendre la parcimonie avec laquelle les ingénieurs de la Ville distribuent l’eau de source; mais ce qui ne peut s'expliquer, c’est la prétention qu'ils ont d'arrêter complètement l'écoulement des eaux pen- dant les gelées. Ainsi, l’hiver dernier, il a gelé près de quarante jours, pendant lesquels, d’après cette théorie singulière, il aurait fallu arrèter tous les travaux, toutes les recherches dans les laboraloires du Muséum, car comment travailler sans eau ? Celte ordonnance vexatoire n’est pas toujours obser- vée ; aussile Muséum est-il frappé d’amendes, que quel- quefois on parvient à faire retirer à force de démarches. Ce qu'il y a à noter de particulièrement injuste dans cetle affaire, c’est que l'écoulement de l’eau devient nui- sible par la faute seule de la Ville, qui, jusqu'ici, a né- gligé de faire des égouts dans la rue Cuvier, qui borde le Muséum d’un côté : Peau s’écoulant à ciel ouvert se congèle par le froid et menace alors de gêner un peu la circulation. Dans le même ordre d'idées, les alcools dénaturés que nous employons en assez grande quantité sont frappés du droit d'entrée ordinaire, C’est encore un moyen de diminuer nos crédits déjà si maigres et d'encourager la science à rebours. Je pourrais continuer à citer d’autres exemples. Je suis persuadé que les Pouvoirs publics et le Con- seilmunicipal ignorent cet état de choses; sans cela ils y mettraient bon ordre; ils n’admeltraient pas, j'en suis sür, la distinction mesquine, toujours mise en avant par les employés plus ou moins supérieurs de la Ville : les Etablissements de l'Etat ne sont pas ceux de la Ville! Au-dessus des abstractions Etat et Ville il y a, ce me semble, lintérêt de la France, l'intérêt général, l’inté- rêt du travail scientifique. Veuillez agréer. A. ARNAUD, Professeur au Muséum. Paris.— Imprimerie K Le Directeur- Gérant : Louis OLIVIER . Levé, rue Cassette, 17. 2° ANNÉE N° 23 15 DÉCEMBRE 1894 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LES GÉOMÉTRIES NON EUCLIDIENNES Toute conclusion suppose des prémisses; ces pré- misses elles-mêmes ou bien sont évidentes par elles-mêmes etn’ont pas besoin de démonstration, ou bien ne peuvent être élablies qu'en s'appuyant sur d’autres proposilions, etcomme on ne saurait remonter ainsi à l'infini, toute science déductive, et en particulier la géométrie, doit reposer sur un certain nombre d’axiomes indémontrables. Tous les traités de géométrie débutent donc par l'énoncé de ces axiomes. Mais il y a entre eux une distine- tion à faire : quelques-uns, comme celui-ci par exemple : « deux quantitéségales à une même troi- sième sont égales entre elles », ne sont pas des pro- positions de géométrie, mais des proposilions d'Analyse. Je les regarde comme des jugements analytiques à priori, je ne m'en occuperai pas. Müuis je dois insister sur d’autres axiomes qui sont spéciaux à la géométrie. La plupart des trai- tés en énoncent trois explicitement : 1° Par deux points ne peut passer qu’une droite ; 2° La ligne droite est le plus court chemin d’un point à un autre; 3° Par un point on ne peut faire passer qu'une parallèle à une droite donnée, Bien que l’on se dispense généralement de dé- montrer le second de ces axiomes, il serait possible de le déduire des deux autres et de ceux, beaucoup plus nombreux, que l’on admet implicitement sans les énoncer, ainsi que je l’expliquerai plus loin. On a longtemps cherché en vain à démontrer également le troisième axiome, connu sous le nom de postulatum d'Euclide. Ce qu'on a dépensé d’ef- forts dans cet espoir chimérique est vraiment ini- REVUE GÉNÉRALE, 1891. maginable. Enfin au commencement du siècle et à peu près en même temps, deux savants, un Russe et un Hongrois, Lowatschewski et Bolyai établirent d’une façon irréfutable que cette démonstration est impossible; ils nous ont à peu près débarrassés des inventeurs de géométries sans postulaltum; depuis lors l’Académie des Sciences ne reçoit plus guère qu'une ou deux démonstrations nouvelles par an. La question n’était pas épuisée; elle ne tarda pas à faire un grand pas par la publication du célèbre mémoire de Riemann intitulé : Ueber die Hypothesen welche der Geometrie zum Grunde liegen. Cet opus- cule a inspiré la plupart des travaux récents dont je parlerai plus loin et parmi lesquels il convient de ciler ceux de Beltrami et de von Helmholtz, La Géométrie de Lowatchewski. — S'il était possible de déduire le postulatum d’Euclide des autres axiomes, il arriverait évidemment qu'en niant le postulatum, et en admettant les autres axiomes, on serait conduit à des conséquences contradictoires: il serait done impossible d'appuyer sur de telles prémisses une géométrie cohérente. Or c’est précisément ce qu'a fait Lowatchewski. Il suppose au début que : L'on peut par un point mener plusieurs parallèles à une droite donnée ; EL il conserve d’ailleurs tous les autres axiomes d’'Euclide. De ces hypothèses, il déduit une suite de théorèmes entre lesquels il est impossible de relever aucune contradiction et il construit une géométrie dont l’impeccable logique ne le cède en rien à celle de la géométrie euclidienne, Les théorèmes sont, bien entendu, très différents 23 770 H. POINCARÉ. — LES GÉOMÉTRIES NON EUCLIDIENNES de ceux auxquels nous sommes accoutumés et ils ne laissent pas de déconcerter un peu d’abord. Ainsi la somme des angles d’un triangle est tou- jours plus petite que deux droits et la différence entre cette somme et deux droits est proportion- nelle à la surface du triangle. Il estimpossible de construire une figure sem- blable à une figure donnée mais de dimensions différentes. Si l'on divise une circonférence en n parties égales, et qu'on mène des langentes aux points de division, ces 7 tangentes formeront un polygone si lerayon dela circonférence est assez pelit; maissi ce rayon est assez grand, elles ne se renconlreront pas. Il est inutile de multiplier ces exemples; les propositions de Lowatchewski n’ont plus aucun rapport avec celles d'Euclide, mais elles ne sont pas moins logiquement reliées les unes aux autres. La Géométrie de Riemann.— Imaginons un monde uniquement peuplé d'êtres dénués d’épaisseur ; et supposons que ces animaux «infiniments plats » soient tous dans un même plan et n’en puissent sortir. Admettons de plus que cemonde soit assez éloigné des autres pour être soustrait à leur in- fluence. Pendant que nous sommes en train de faire des hypothèses, il ne nous en coûte pas plus de douer ces êtres de raisonnement et de les croire capables de faire de la géométrie. Dans ce cas, ils n'attribueront certainement à l’espace que deux dimensions. Mais supposons maintenant que ces animaux imaginaires, tout en restant dénués d'épaisseur, aient la forme d’une figure sphérique, et non d’une figure plane etsoient tous sur une même sphèresans pouvoir s'en écarter. Quelle géométrie pourront- ils construire? Il est clair d’abord qu'ils n’attribue- ront à l’espace que deux dimensions; ce qui jouera pour eux le rôle de la ligne droite, ce sera le plus court chemin d’un point à un autre sur la sphère, c'est-à-dire un arc de grand cercle; en un mot leur géométrie sera la géométrie sphérique. Ce qu'ils appelleront l’espace, ce sera cette sphère d’où ils ne peuvent sortir et sur laquelle se passent tous les phénomènes dont ils peuvent avoir connaissance. Leur espace sera donc sans limites puisqu'on peut sur une sphère aller tou- jours devant soi sans jamais être arrêté, et cepen- dant il sera fini; on n’en trouvera jamais le bout, mais on pourra en faire le tour. Eh bien, la géométrie de Riemann, c’est la géométrie sphérique étendue à trois dimensions. Pour la construire, le mathématicien allemand a dû jeter par-dessus bord, non seulement le pos- tulatum d’Euclide, mais encore le premier axiome : Par deux points onne peut faire passer qu'une droite. Sur une sphère, par deux points donnés on ne peut faire en général passer qu'un grand cercle (qui, comme nous venons de le voir, jouerait le rôle de la droite pour nos êtres imaginaires); mais il y a une exception : si les deux points donnés sont diamétralement opposés, on pourra faire pas- ser par ces deux points une infinité de grands cercles. De même dans la géométrie de Riemann, par deux points ne passera en général qu'une seule droite; mais il ya des cas exceptionnels où par deux points pourront passer une infinité de droites, Il y a une sorte d'opposition entre la géométrie de Riemann et celle de Lowatchewski. Ainsi la somme des angles d’un triangle est: Égale à deux droits dans la géométrie d’Euclide. Plus petite que deux droits dans celle de Lo- watchewski. : Plus grande que deux droits dans celle de Rie- mann. Le nombre des parallèles qu’on peut mener à une droite dennée par un point donné est égal : À un dans la géométrie d'Euclide, A zéro dans celle de Riemann, A l'infini dans celle de Lowatchewski. Ajoutons que l’espace de Riemann est fini, quoique sans limite, au sens donné plus haut à ces deux mots. Les surfaces à courbures constantes. — Une objec- tion restait possible cependant. Les théorèmes de Lowatchewski et de Riemann ne présentent aucune contradiction; mais quelque nombreuses. que soient les conséquences que ces deux géo- mètres ont tirées de leurs hypothèses, ils ont dû s'arrêter avant de les avoir toutes épuisées, car- le nombre en serait infini; qui nous dit alors que: s'ils avaient poussé plus loin leurs déductions, ils n'auraient pas fini par arriver à quelque contra-- diclion? Cette difficulté n’existe pas pourla géométrie de- Riemann, pouvu qu'on se borne à deux dimensions; la géométrie de Riemann à deux dimensions ne diffère pas en effet, nous l’avons vu, de la géo- métrie sphérique, qui n’est qu'une branche de la. géométrie ordinaire et qui est par conséquent en dehors de toute discussion. M. Beltrami, en ramenant de même la géomé- trie de Lowatchewski à deux dimensions à ne plus. être qu'une branche de la géométrie ordinaire, æ réfuté également l’objection en ce qui la con- cerne. Voici comment il y est parvenu. Considérons sur une surface une figure quelconque. Imaginons que cette figure soit tracée sur une toile flexible et inextensible appliquée sur cette surface, de telle façon que quand la toile se déplace et se déforme, H. POINCARÉ. — LES GÉOMÉTRIES NON EUCLIDIENNES 771 et traduisons-les à l’aide de ce diclionnaire les diverses lignes de cette figure puissent changer de forme, sans changer de longueur. En général, cette figure flexible et inextensible ne pourra se déplacer sans quitter la surface; mais il y a cer- taines surfaces particulières pour lesquelles un pa- reil mouvement serait possible : ce sont les surfaces à courbure constante. Si nous reprenons la comparaison que nous fai- sions plus haut el que nous imaginions des êtres sans épaisseur vivant sur une deces surfaces, ils regarderont comme possible le mouvement d'une figure dont toutes les lignes conservent une lon- gueur constante. Un pareil mouvement parailrait absurde, au contraire, à des animaux sans épaisseur vivant sur une surface à courbure variable. Ces surfaces à courbure constante sont de deux sortes : Les unes sont à courbure positive, et peuvent être déformées de façon à être appliquées sur une sphère. La géométrie de ces surfaces se réduit done à la géométrie sphérique, qui est celle de Riemann. Les autres sont à courbure négative. M. Beltrami a fait voir que la géométrie de cessurfaces n’estautre que celle de Lowatchewski. Les géométries à deux dimensions de Riemann et de Lowatchewski se trouvent donc railachées à la géométrie eucli- dienne. Interprétation des géométries non-euclidiennes. — Ainsi s'évanouit l’objection en ce qui concerne les géométries à deux dimensions. Il serait aisé d'étendre le raisonnement de M. Bel- trami aux géométries à trois dimensions. Les es- prits que ne rebute pas l’espace à quatre dimen- sions n'y verront aucune difficulté, mais ils sont peu nombreux. Je préfère donc procéder autrement, Considérons un certain plan que j'’appellerai fon- damental et construisons une sorte de dictionnaire, en faisant correspondre chacun à chacun une double suite de termes écrits dans deux colonnes, de la même façon que se correspondent dans les dic- tionnaires ordinaires les mots de deuxlangues dont la signification est la même : ESDACOERE EST EN. Portion de l’espace située au-dessus du plan fondamental. PI Tr se Sphère coupant orthogonalement le plan fondamental. : Drorte-: Cercle coupant orthogonalement le plan fondamental. ET ERA ee Sphère. (CFTCUARATEERRERCE Cercle. MITOIBE RER ee su Anvple, Distance de deux DOUNISEREE TE. Logarithme du rapport anharmonique de ces deux points et des intersections du plan fondamental avec un cercle passant par ces deux points et le cou- pant orthogonalement. etc. Etc Prenons ensuite les théorèmes de Lowatchewski REVUE GÉNÉRALE, 1891. comme nous traduirions un texte allemand à l’aide d’un dictionnaire allemand-francçais. Nous obtien- drons ainsi des théorèmes de la géométrie ordinaire. Par exemple, ce théorème de Lowatchewski:« la somme des angles d’un triangle est plus petite que deux droits » se traduit ainsi : &« Si un triangle curviligne a pour côtés des arcs de cercle qui pro- longés iraient couper orthogonalement le plan fondamental, la somme des angles de ce triangle curviligne sera plus petite que deux droits. » Ainsi, quelque loin que l’on pousse les conséquences des hypothèses de Lowatchewski, on ne sera jamais conduit à une contradiction. En effet, si deux théo- rèmes de Lowatehewski étaient contradictoires, il en serait de méme des traductions de ces deux théorèmes, faites à l’aide de notre dictionnaire. mais ces traductions sont des théorèmes de géo- métrie ordinaire et personne ne doute que la géo- métrie ordinaire ne soit exemple de contradiction. D'où nous vient cette certitude etest-elle justifiée? C'est là une question que je ne saurais traiter ici, mais qui est bien intéressante et que je ne crois pas insoluble, Il ne reste done plus rien de l’ob- jection que j'ai formulée plus haut. Ce n’estpas tout. La géométriede Lowatchewski, susceptible d’une interprétation concrète, cesse d'être un vain exercice de logique et peut recevoir des applications ; je n'ai pas le temps de parler ici de ces applications ni du parti que M. Klein et moi en avons tiré pour l'intégration des équations li- néaires. Cette interprétation n’est d’ailleurs pas unique, et l’on pourrait établir plusieurs dictionnaires ana- logues à celui qui précède et qui tous permettraient par une simple « traduction » de transformer les théorèmes de Lowatchewski en théorèmes de géo- métrie ordinaire. Les axiomes impliciles. — Les axiomes explicite- ment énoncés dans les traités sont-ils les seuls fondements de la géométrie? On peut être assuré du contraire en voyant qu'après les avoir succes- sivement abandonnés on laisse encore debout quelques propositions communes aux théories d'Eu- clide, de Lowatchewski et de Riemann. Ces pro- positions doivent reposer sur quelques prémisses que les géomètres admettent sans les énoncer. Il est intéressant de chercher à les dégager des dé- monstrations classiques. Stuart-Mill a prétendu que toute définition con- tient un axiome, puisqu'en définissant on aflirme implicitement l'existence de l’objet défini. C’est aller beaucoup trop loin;il est rare qu'en ma- thématiques on donne une définition sans la faire suivre par la démonstration de l’existence de objet défini, et quand on s’en dispense, c’est générale- 99*+ 23 H. POINCARÉ. — LES GÉOMÉTRIES NON EUCLIDIENNES ment que le lecteur y peut aisément suppléer. Il ne faut pas oublier que le mot existence n'a pas le même sens quand il s’agit d’un être mathématique et quand il est question d'un objet matériel. Un être mathématique existe, pourvu que sa définition n'implique pas contradiction, soit en elle-même, soit avec les propositions antérieurement admises. Mais si l'observation de Stuart-Mill ne saurail s'appliquer à toutes les définitions, elle n’en est pas moins juste pour quelques-unes d’entre elles. On définit quelquefois le plan de la manière sui- vante : Le plan est une surface telle que la droite qui joint deux quelconques de ses points est tout en- tière sur cette surface. Cette définition cache manifestement un nouvel axiome ;on pourrait, il est vrai, la changer, et cela vaudrait mieux, mais alors il faudrait énoncer l’axiome explicitement. D'autres définitions peuvent donner lieu à des réflexions non moins importantes. Telle est par exemple celle de l'égalité de deux figures : deux figures sont égales quand on peutles superposer; pour les superposer il faut déplacer l’une d’elles jusqu'à ce qu’elle coïncide avecl’autre; mais comment faut-il la déplacer ? Si nous le de- mandions, on nous répondrait sans doute qu'on doit le faire sans la déformer et à la façon d’un so- lide invariable. Le cercle vicieux serait alors évi- dent. En fait, cette définition ne définit rien : elle n’au- rait aucun sens pour un être qui habiterait un monde où il n’y aurait que des fluides. Si elle nous semble claire, c'est que nous sommes habituésaux propriétés des solides naturels qui ne diffèrent pas beaucoup de celles des solides idéaux dont toutes les dimensions sont invariables. Cependant, toute imparfaite qu’elle soit, cette définition implique un axiome. La possibilité du mouvement d’une figure inva- riable n’est pas une vérité évidente par elle-même; où du moins elle ne l’est qu’à la façon du postu- latum d'Euclide et non comme le serait un juge- ment analytique « priori. D'ailleurs en étudiant les définitions et les dé- monstrations de la géométrie on voit qu'on est obligé d'admettre, sans les démontrer, non seule- ment la possibilité de ce mouvement, mais encore quelques-unes de ses propriétés. C’est ce qui ressort d’abord de la définition de la ligne droite. On en a donné beaucoup de défec- tueuses, mais la véritable est celle qui est sous-en- tendue dans toutes les démonstrations où la ligne droite intervient : « [Il peut arriver que le mouvement d’une figure invariable soit tel que tous les points d’une ligne appartenant à celte figure restent immobiles pen- dant que tous les points situés en dehors de cette ligne se meuvent. Une pareille ligne s’appellera une ligne droite. » Nous avons à dessein, dans cel énoncé, séparé la définition de l’axiôme qu’elle implique. Beaucoup de démonstrations, telles que celles des cas d'égalité des triangles, de la possibilité d’abaisser une perpendiculaire d’un point sur une droite, supposent des propositions qu'on se dis- pense d’énoncer, puisqu'elles obligent à admettre qu’il est possible de transporter une figure dans l’espace d’une certaine manière. La quatrième géométrie. — Parmi ces axiomes implicites, il en est un qui me semble mériter quelque attention, non seulement parce qu'il a donné lieu à une discussion récente, mais parce- qu'en l’abandonnant, on peut construire une qua- trième géométrie aussi cohérente que celles d’Eu- clide, de Lowatchewski et de Riemann. Pour démontrer que l’on peut toujours élever en un point À une perpendiculaire à une droite AB, on considère une droite AC mobile autour du point A et primitivement confondue avec la droite fixe AB; et on la fait tourner autour du point A Jus- qu’à ce qu’elle vienne dans le prolongement de AB. On suppose ainsi deux propositions : d’abord qu'une pareille rotation est possible, et ensuite qu'elle peut se continuer jusqu’à ce que les deux droites viennent dans le prolongement l’une de l’autre. Si l’on admet le premier pointet que l’onrejette le second, on est conduit à une suite de théo- rèmes encore plus étranges que ceux de Lowat- chewski et de Riemann, mais également exempts de contradiction. Je ne citerai qu'un de ces théorèmes et je ne choisirai pas le plus singulier : wne droite réelle peut être perpendiculaire à elle-même. Le Théorème de Lie. — Le nombre des axiomes implicitement introduits dans les démonstrations classiques est plus grand qu'il ne serait néces- saire, et il serait intéressant de le réduire au minimum. On peut se demander d’abord si cette réduction est possible, si le nombre des axiomes nécessaires et celui des géométries imaginables n'est pas infini. Un théorème de M. Sophus Lie domine toute cette discussion. On peut l’énoncer ainsi : Supposons qu’on admette les prémisses sui- vantes : 1 Voir MM. Renouvier, Léchalas, Calinon. Revue Philoso- phique, juin, 1889. Critique Philosophique, 30 septembre et 30 novembre 1889; Revue Philosophique, 1890, page 158; voir en particulier la discussion sur le « postulat de perpen- dicularité ». H. POINCARÉ. — LES GÉOMÉTRIES NON EUCLIDIENNES 113 4° L'espace a » dimensions. 2 Le mouvement d'une figure invariable est possible. 3° Il faut p conditions pour déterminer la posi- tion de cette figure dans l’espace. Le nombre des géométries compatibles avec ces pré- muisses sera limité. Je puis même ajouter que si x est donné, on peut assigner à p une limite supérieure. Si donc on admet la possibilité du mouvement, on ne pourra inventer qn'un nombre fini (et même assez restreint) de géométries à trois dimensions. Les géométries de Riemann. — Cependant ce résul- tat semble contredit par Riemann, car ce savant construit une infinité de géométries différentes, el celle à laquelle on donne ordinairement son nom n’en est qu'un cas particulier. Tout dépend, dit-il, de la façon dont on définit la longueur d’une courbe. Or il y a une infinité de manières de définir cette longueur, et chacune d'elles peut devenir le point de départ d’une nou- velle géométrie. Cela est parfaitement exact; mais la plupart de ces définitions sont incompatibles avec le mouve- ment d’une figure invariable, que l’on suppose possible dans le théorème de Lie. Ces géométries de Riemann, si intéressantes à divers titres, ne pourraient donc jamais être que purement analy- tiques et ne se préteraient pas à des démonstra- tions analogues à celles d’Euclide. De la nature desaxiomes. — La plupart des mathé- maticiens ne regardent la géométrie de Lowal- chewski que comme une simple curiosité logique ; quelques-uns d’entre eux sont allés plus loin cependant. Puisque plusieurs géométries sont pos- sibles, est-il certain que ce soit la nôtre qui soit vraie ? L'expérience nous apprend sans doute que la somme des angles d'untriangle est égale à deux droits ; mais c’est parce que nous n'opérons que sur des triangles trop petits; la différence, d’après Lowatchewski, est proportionnelle à la surface du triangle : ne pourra-t-elle devenir sensible quand nous opérerons sur des triangles plus grands ou quand nos mesures deviendront plus précises? La géométrie Euclidienne ne serait ainsi qu'une géométrie provisoire. Pour discuter cette opinion, nous devons d’abord nous demander quelle est la nature des axiomes géométriques. Sont-ce des jugements synthétiques à priori, comme dirait Kant? Ils s’imposeraient alors à nous avec une telle force, que nous ne pourrions concevoir la proposi- tion contraire, ni bâtir sur elle un édifice théo- rique. Il n’y aurait pas de géométrie non eucli- dienne, Pour s’en convaincre, qu’on prenne un véritable jugement synthétique a priori, par exemple ce- lui-ci : Si l’on & une suite infinie de nombres entiers positifs. tous différents entre eux, il y en aura toujours un qui sera plus petit que tous les autres. Ou cet autre quiest équivalent : Si un théorème est vrai pour le nombre À, si on a de- montré qu'il est vrai de n+1, pourvu qu'il le soit de n, il sera vrai de tous les nombres entiers positifs. Qu'on essaie ensuite de s'y soustraire et de fonder, en niant ces propositions, une fausse arithmétique analogue à la géométrie non eucli- dienne, — on n'y pourra pas parvenir; on serail même tenté au premier abord de regarder ces jugements comme analytiques. D'ailleurs, reprenons notre fiction des animaux sans épaisseur ; nous ne pouvons guère admettre que ces êtres, s'ils ont l'esprit fait comme nous, adopteraient la géométrie euclidienne qui serait contredite par toute leur expérience ? Devons-nous donc conclure que les axiomes de la géométrie sont des vérités expérimentales? Mais on n’expérimente pas sur des droites ou des circonférences idéales ; on ne peut le faire que sur des objets matériels. Sur quoi porteraient donc les expériences qui serviraient de fondement à la géo- métrie ? La réponse est facile. Nous avons vu plus haut que l’on raisonne cons- tamment comme si les figures géométriques se comportaient à la manière des solides. Ce que la géométrie emprunterait à l'expérience, ce seraient donc les propriétés de ces corps. Mais une difficulté subsiste, et elle est insur- montable. Si la géométrie était une science expé- rimentale, elle ne serait pas une science exacte, elle serait soumise à une continuelle révision. Que dis-je? elle serait dès aujourd’hui convaincue d'erreur puisque nous savons qu'il n'existe pas de solide rigoureusement invariable. Les axiomes géométriques ne sont donc ni des juge- ments synthétiques à priori nides faits expérimentaux. Ce sont des conventions ; notre choix, parmi toutes les conventions possibles, est guidé par des faits expérimentaux ; mais il reste Zbre el n’est limité que par la nécessité d'éviter toute contradiction. Cest ainsi que les postulats peuvent rester rigou- reusement vrais quand même les lois expérimentales qui ont déterminé leur adoption ne sont qu'ap- proximalives. En d’autres termes, es ariomes de la géométrie (je ne parle pas de ceux de l’arithmétique) ne sont que des définitions déquisées. Dès lors, que doit-on penser de cette question : La géométrie euclidienne est-elle vraie ? Elle n’a aucun sens. 114 D MAGNAN ET SÉRIEUX. — SUR LES ALIÉNÉS PERSÉCUTEURS Autant demander si le système métrique est vrai et les anciennes mesures fausses; si les coor- données cartésiennes sont vraieset les coordonnées polaires fausses. Une géométrie ne peut pas être plus vraie qu'une autre; elle peut seulement être plus commode. Or la géométrie euclidienne est et resterarla plus commode : 1° Parce qu'elle est la plus simple; el elle n'est pas telle seulement par suite de nos habitudes d'esprit ou de je ne sais quelle intuition directe que nous aurions de l’espace euclidien; elle est la plus simple en soi de même qu'un polynôme du premier degré est plus simple qu’un polynôme du second degré. 2 Parce qu'elle s'accorde assez bien avec les propriélés des solides naturels, ces corps dont se rapprochent nos membres et notre œil et avec les- quels nous faisons nos instruments de mesure. La géométrie et l'astronomie. — On a également posé Ja question d'une autre manière. Si la géométrie de Lowatchewski est vraie, la parallaxe d'une étoile très éloignée sera finie; si celle de Riemann est vraie, elle sera néga- tive. Ce sont là des résultats qui semblent acces- sibles à l'expérience et on a espéré que les obser- tions astronomiques pourraient permettre de décider entre les trois géométries. Mais ce qu'on appelleligne droite en astronomie, c'est simplement la trajectoire du rayon lumineux. Si done, par impossible, on venait à découvrir des parallaxes négatives, ou à démontrer que toutes les parallaxes sont supérieures à une certaine limite, on aurait le choix entre deux conclusions : nous pourrions renoncer à la géométrie euclidienne ou bien modifier les lois de l’optique et admettre que la lumière ne se propage pas rigoureusement en ligne droite. Inutile d'ajouter que tout le monde regarderait cette solution comme plus avantageuse. La géométrie euclidienne n'a done craindre d'expériences nouvelles. Qu'on me passe, en terminant, un petit paradoxe: Des êtres dont l'esprit serait fait comme le nôtre et qui auraient les mêmes sens que nous, mais qui n'auraient reçu aucune éducation préalable, pour- raient recevoir d’un monde extérieur convenable- ment choisi des impressions telles qu'ils seraient amenés à construire une géométrie autre que celle d'Euclide et à localiser les phénomènes de ce monde extérieur dans un espace non euclidien ou même dans un espace à quatre dimensions. Pour nous, dont l'éducation a été faite par notre monde actuel, si nous étions brusquemment trans- portés dans ce monde nouveau, nous n'aurions pas de difficultés à en rapporter les phénomènes à notre espace euclidien. Quelqu'un qui yconsacrerait son existence pour- rait peut-être arriver àse représenter la quatrième dimension. Je crains dans ces dernières lignes de n'avoir pas élé très clair; je ne pourrais l'être qu'avec de nouveaux développements ; mais j'ai déjà été trop long et ceux que ces développements pourraient intéresser ont lu Helmholtz. Dans mon désir d'être bref, j'ai affirmé plus que je n'ai prouvé; que le lecteur veuille bien me le pardonner. On a tant écrit sur ce sujet; on a tant émis d'opinions différentes que la discussion en remplirait un volume. rien à H. Poincaré, de l'Académie des Sciences Sous le nom d'aliénés persécuteurs nous ne vou- lons point comprendre Lous ceux que le hasard de leur délire peut pousser un jour ou l’autre à se venger de leurs ennemis imaginaires : Lels sont, par exemple, les délirants chroniques à évolution sys- tématique qui, arrivés à la période de persécution, réagissent violemment contre ceux que leurs hal- lucinations leur désignent; tels sont encore les dégénérés à délires systématisés de perséculion où de grandeur, hallucinés ou non, qui, plus ou moins rapidement, se transforment en persécu- teurs et poursuivent ceux dontils croient avoir à se plaindre. Nous entendons au contraire décrire un groupe clinique que ses allures spéciales, tou- jours semblables à elles-mêmes, isolent d’une fa- SUR LES ALIÉNÉS PERSÉCUTEURS con bien nelle. Les sujets auxquels nous faisons allusion et que l’on désigne habituellement sous le nom de persécutés-persécuteurs, de persécuteurs-rai- sonnants, ne persécutent point d’une façon secon- daire, épisodique pour ainsi dire, comme les ma- lades précédents :le besoin de poursuivre leurs ennemis, d'obtenir justice de torts imaginaires ou d'une condamnalion soi-disant injuste, est au contraire chez eux la note dominante, l'élément fondamental de leur délire ; leurs actes plus encore que leurs conceptions sont de nature patholo- gique. Chez eux point de désordre dans les idées, ni de délire bruyant et extravagant, ni de troubles hallucinatoires; point de ces conceplions ambi- lieuses ou de ces idées de persécution dont l’inco- D‘: MAGNAN ET SÉRIEUX. — SUR LES ALIÉNES PERSÉCUTEURS 1175 ———_—_——————"—"————"—————"— ——— hérence ou l’absurdité éclatent aux yeux de tous : rien en un mot de ce qui est caractéristique, pour le public, de l’aliénation mentale. Invite-t-on ces sujets à exposer leurs doléances, à rédiger leur histoire, on constate que les faits sont racontés avec précision, que la mémoire est intacte, que les facultés syllogistiques persistent. Quelle est donc, dira-t-on, la folie d’aliénés que l’on dépeint si lucides? Pour mettre bien en lumière la réalité des troubles psychiques de ces persécuteurs, il faut faire d'abord leur histoire naturelle, et voici ce que nous enseigne la clinique : Le persécuté-persécuteur appartient à la grande famille des dégénérés. On sait que les états de dé- générescence, qui reconnaissent le plus souvent pour cause les lares psychopathiques ou les into- xications des ascendants, sontcaractérisés par des anomalies du développement tant physique que psychique. Le persécuteur, habituellement issu d’une famille tarée au point de vue cérébral, est fréquemment porteur des stigmates physiques de la dégénérescence (malformations craniennes, asymé- trie faciale, anomalies des organes génitaux, etc.); il présente en outre l'état mental propre aux dégé- nérés : c'est dire que chez lui la déséquilibration des diverses facultés est la règle. Grâce à ses la- eunes morales et intellectuelles peuvent se montrer des idées obsédantes, des impulsions, des préoc- cupations hypochondriaques, des troubles émotifs, des idées de suicide, des manifestations anormales de l’instinet sexuel, des accès maniaques. Dès l’en- fance du sujet se révèlent des tendances aux idées de persécution et à la chicane; plus tard son carac- tère déteslable, son besoin de dispute mettent partout la discorde : son orgueil démesuré, son habitude de se poser en viclime, ses dénonciations calomnieuses en font un véritable fléau. Etant données ces prédispositions, qu’un accident sur- vienne (procès perdu, ete.), et le dégénéré se révèle par la nature de ses réactions : l'équilibre mental très instable est dès lors détruit; l'idée fixe d’ob- tenir justice s'installe d’une façon irrévocable. Le ressentiment des échecs que le sujet a subis et qui ne sont imputables qu'à ses imperfections psy- chiques se transforme ainsi en une véritable idée obsédante qui est seule désormais à diriger une activité dévoyée. Accumulant les interprétations fausses, stimulé par les insuccès qui sont pour lui autant de dénis de justice, le déséquilibré poursuit avec un acharnement aveugle ses prétendus enne- mis etse transforme ainsi en persécuteur. Les anomalies du développement psychique de cesaliénés n’excluentpas d'ailleurs chez quelques- uns la prédominance de certaines aptitudes (dége- nérés supérieurs). Rusés et menteurs, d'une pa- tience et d’une activilé infatigables , ils mettent leur mémoire, leurimagination, leurs facultés syl- logistiques, leur facililé d’élocution, parfois très développées, au service de leurs sentiments mala- difs, de leur haine profonde. Condamnés une pre- mière fois à la suite d’actes extravagants ou dé- boutés de demandes non fondées, ils prélendent obtenir des indemnités el faire proclamer l'erreur judiciaire dont ils ont été victime. L'idée obsé- dante qui les tourmente ne leur laisse plus désor- mais un instant de repos : ils veulent redresser les torts, flétrir les dénis de justice, obtenir des répa- rations pourles prétendus dommages portés à leur considération. Si, au début, leurs discours et leurs démarches semblent ne tenir que de la passion, à mesure qu'ils s'exaltent, leur désir de faire triom- pher leur cause n’a plus de frein et les subjugue complètement : le caractère maladif devient évi- dent. Il s'agit là, non pas, comme pourraient le croire ceux qui ne sont pas familiarisés avec les réactions de ces aliénés, d'un étalpassionnel, non pas d’une revendication légitime de droits injuste- ment lésés, mais bien d’une obsession de jour en jour plus tyrannique et pour la satisfaction de la- quelle le malade, négligeant sa profession, sans souci de l'avenir et de ses véritables intérêts, tout entier à sa soif de vengeance, n’hésile pas à sacri- fier sa fortune, sa famille, sa liberté même. Ce qui caractérise encore les persécuteurs, c’est la haute idée qu'ils ont de leur personnalité : d’un orgueil et d’une vanilé incommensurables, ils s’i- maginent que le monde entier a les yeux sur eux, qu'ils sont appelés à jouer un rôle important. « Le moule qui me fit se brisa après ma naissance, écrit l’un d'eux. [n'y a qu'un Dieu, s'il yen a un, ce qui est douteux, mais il n’y a qu'un moi, et ce moi vaut bien la peine qu'on s'en occupe. » Une fois internés, ils s’étonnent que leur arrestalion n'ail point causé plus d'émotion, qu'une révolution n'ait point éclaté. Ils restent persuadés que s'ils n'ob- tiennent point leur liberté, c’est que des considéra- tions politiques s’y opposent, que les ministres se préoccupent de leurs faits et gestes, etc. Un autre trait bien typique de ces aliénés est la présence de lacunes morales plus ou moins pro- fondes ; dénués souvent de toute notion du bien et du mal, ils commeltent des indélicatesses, des abus de confiance, mais ont toujours à la bouche les mots de conscience et d'honneur. Ils ne crai- gnent pas de porler contre des personnes hono- rables les accusations les plus injustes : tous les fonctionnaires à qui ils ont eu affaire ont trahi leur cause, sont vendus à leurs ennemis ou veulent tirer vengeance des révélalions qu'ils ont faites : « C'est une comédie indigne de la justice, disent- ils. » Ces persécuteurs partent parfois d’un fait vrai 716 D“ MAGNAN ET SÉRIEUX. — SUR LES ALIÉNÉS PERSÉCUTEURS mais démesurément amplifié, et, insensibles à toute considération, avides de scandales, ils entre- prennent une campagne acharnée, montrant dans leurs revendications une ténacité infatigable. Ils cherchent par tous les moyens possibles à attirer l'attention sur leur affaire : l’un s’affubie d’un costume étrange, l’autre tire un coup de revolver en l’air au passage du chef de l'État; quelques-uns posent leur candidature aux élections. Très pro- lixes, très loquaces, ils accumulent leurs préten- dues preuves avec une logique apparente, s’'ap- puient sur des arguments tirés de la lecture du Code, sur des faits vrais auxquels ils ajoutent des compléments imaginaires, ou qu'ils interprètent d’une façon erronée ; ils en imposent parfois ainsi et rendent difficile la distinction du vrai et du faux. Souvent dans ces périodes d’excitation intellec- tuelle le persécuteur offre l'aspect clinique décrit sous le nom de #”anie raïsonnante : l'exaltation psychique est à son summum, mais la lucidité persiste, bien que le malade n’ait pas conscience de son état de surexcitation. Dévoré par un besoin d'activité Jamais satisfait, il se multiplie de tous côtés, aborde mille entreprises, écrit aux person- nages en vue, consulte des avocats, demande des audiences, passe ses nuits à rédiger de volumineux mémoires, réclame à des médecins des certificats constatant qu'il jouit de la plénitude de ses facul- tés, dépose des plaintes, cherche à gagner à sa cause la Presse, fait parvenir des pétitions au Parlement, aux autorités, ete... Dans leurs écrits interminables ces sujets affectent une grande pré- cision, font suivre chacune de leur allégations des mots : dont témoignages... preuves... sic. L'aspect de ces factums est parfois à lui seul ca- ractéristique : la plupart des phrases sont souli- gnées 2, 3 et 4 fois ; certains mots sont écrits en caractères spéciaux, ou avec une encre de couleur différente, ete. Dans le long récit de leur existence ils opposent leur désintéressement, leur dévoue- ment à la vénalité de leurs juges, aux trahisons de leurs avocats, au manque de conscience de leurs médecins : «leur vie n’est qu’un martyre... on les lue à coups d'épingles, à coups de poings, à coups de cœur »; ils apostrophent leurs ennemis et les adjurent « si la mèche dela conscience et de l'hon- neur fume encore en eux » de cesser leurs ini- quités. Parfois ils prennent des allures de pro- phète : « Prenez garde! s'écrient-ils, il y a un Dieu vengeur de l'innocent »! Une persécutrice observée par nous qui signe ses lettres ; Æ... quin- truple victime, adressail à divers personnages des requêtes intitulées « Appel aux âmes justes et aux cœurs nobles pour une quintruple victime. » Les échecs répétés que subissent ces malades, loin deles décourager, sont poureux autant d'ini- quités nouvelles, autant de stimulants venant ai- guillonner leur activité maladive dans une lutte qui est devenue désormais leur seul but. Leur excilation intellectuelle s’accroissant, ils veulent bientôt se faire arrêter, espérant comparaître de- vant un tribunal, cherchent à s’introduire auprès du Président de la République; ils en viennent ensuite aux injures, aux écrits et aux placards dif- famatoires ; ils impriment eux-mêmes des affiches pour demander «la nullité de jugements entachés de dol, rendus contre eux en secret et en abus de loi»; ils font distribuer sur la voie publique des mémoires justificatifs. Enfin ils en arrivent aux tentatives de chantage, aux menaces et aux actes de violence, et parfois, s’érigeant en justiciers, ils n'hésitent pas à frapper mortellement celui qu'ils ont condamné. Ce qui les distingue nettement des délirants chroniques, des persécutés, c'est l'absence de troubles hallucinatoires ; les hallucinations ne se montrent chez les dégénérés persécuteurs qu'à litre d'exception. Celles de l’ouïe, quand elles existent, n’offrent pas celte marche si curieuse qui du mot isolé, du monologue, conduit au dia- loque et à l'écho de la pensée (le patient écoutant deux interlocuteurs imaginaires discuter ensemble, ou entendant répéter chacune de ses pensées). Cepen- dant, il est des circonslances où le diagnostic peut être malaisé au début : il arrive parfois qu'un persécuteur raisonnant présente des hallucina- tions passagères qui, en l'absence de renseigne- ments, peuvent embarrasser pendant quelque temps le médecin. D'autre part un délirant chro- nique chez lequel la psychose n'est pas ancienne, qui dissimule ses hallucinations, et qui, dans son mode de réagir, emprunte les procédés des persé- cuteurs, peut également faire hésiter le diagnos- tic. Une autre distinction importante, c'est absence chez les aliénés que nous étudions d’une évolution méthodique, d’une métamorphose des idées de persécution en délire de grandeur comme dans le délire chronique. Il y a dans l'existence du déli- rant chronique deux parts bien tranchées : une première, souvent longue, sans manifestation mor- bide; une seconde, avec des symptômes et une marche caractéristiques. Chez les persécutés-per- sécuteurs il n’en est plus de même ; faire l'histoire de la maladie, c’est faire celle du malade. Il se montre dès le début orgueilleux et persécuté ; il est aujourd'hui ce qu’il était hier, ce qu'il sera toujours. L'étude des antécédents héréditaires de ces sujets fait déjà pressentir un prédisposé qui se révèle souvent par l'existence de sti- gmates physiques de dégénérescence; celle de ses antécédents personnels le montre avec sa D MAGNAN ET SÉRIEUX. — SUR LES ALIÉNÉS PERSÉCUTEURS 111 déséquilibration psychique, avec les lacunes d'une intelligence brillante parfois par certains côtés, avec les anomalies de ses instincts et les contradiclions de son caractère. Tandis que chez le délirant chronique l’affection mentale contras- tait avec le passé cérébral du sujet, pour le per- sécuteur au contraire elle n’est que l’exagération du caractère antérieur chez un individu toujours mal équilibré. Si la psychose du persécuteur raisonnant ne procède pas par des étapes bien délimitées, si elle ne subit pas une transformation totale comme le délire chronique, ce n’est pas à dire qu’elle reste stéréotypée à jamais : elle n’évolue pas sans doute, mais elle prend une extension toujours en- vahissante. Au début, en effet, les réclamations de ces aliénés portent sur un fait personnel : ils exi- gent une part d'héritage dont ils prétendent avoir été frustrés, ils veulent obtenir une indemnité pour une condamnation injuste; plus tard ils se découvrent de nouveaux ennemis, accumulent de nouveaux sujets de plaintes ; le cercle de leurs accusations s'agrandit, mais leurs intérêts propres sont alors seuls en jeu. Avec les années ils finis- sent presque par oublier le point de départ de leurs réactions maladives : ce n’est plus leur cause à eux qu'ils défendent, mais celle des opprimés, celle de la vérité et de la justice. Ce rôle désinté- ressé qu'ils s’attribuent leur donne une idée tou- jours plus haute de leur personnalité; ils en arrivent à se croire les instruments de la Provi- dence: l’un se proclame « le martyr de la vérité », l'autre « la victime et le bouc d'Israël» ; ils se com- parentà Jésus-Christ; comme lui, ilsontétlé vendus : « Si Dieu, écrit l’un d'eux, fait le miracle incessant de me conserver la vie, il me force par là de con- linuer mes réclamations : c’est une volonté spéciale d'en haut pour l’accomplissement de vues particu- lières… Mon triomphe sera celui de la gloire de Dieu et du bien-être général ». Comme on le voit, si les idées d’orgueil atteignent avec le temps à un degré extrême, jamais cependant elles n’aboutis- sent à de véritables conceptions délirantes, à la mégalomanie. Enfin, si chez les persécuteurs rai- sonnants les troubles psychiques peuvent être précoces, ils peuvent en outre se prolonger indéfi- niment sans s’effacer dans la démence comme dans le délire chronique. Quelquefois surviennent des accidents apoplectiques déterminés par des foyers d'hémorrhagie cérébrale, comme chez San- don; mais ces complications sont moins fré- quentes qu'on ne l'avait pensé. Les aliénés atteints de délire systématisé font parfois, on le sait, partager leurs idées délirantes à ceux qui vivent avec eux dans un contact jour- sécuteur raisonnant peut encore bien plus facile- ment communiquer à autrui ses convictions erro- nées. Il s'était fait le combattant du Droit, il a souffert et lutté seul contre les tribunaux, les mé- decins, les autorités; son attitude d’opprimé que l’adversité n’a pas abatlu lui conquiert des sym- pathies ; ses infortunes émeuvent bien des gens, en même temps que son activité intellectuelle, la dialectique avec laquelle il soutient ses revendi- cations, l’absence de trouble sensoriel, entrainent la conviction de certains. Mais tandis que la con- tagion pour le délirant chronique se limite aux proches, pour l’aliéné persécuteur, elle rayonne bien au delà et le malade trouve des défenseurs dans la Presse et dans le publie, D’après leurs tendances maladives, et suivant les procédés qu'ils emploient, les persécuteurs peuvent être distingués en différents groupes. Les uns, per- séeuleurs processifs, n'emploient pas, en général, les moyens violents : ils déposent des plaintes au Parquet, traduisent leurs ennemis en justice, aflir- ment qu'on recrute contre eux de faux témoins, étudient les codes dont ils apprennent par cœur tous les articles se rapportant à leur affaire, font procès sur procès, réclament des indemnités for- midables aux médecins qui les ont examinés, épuisent toutes les juridictions sans jamais se lasser de leurs échecs. Quelques-uns s'unissent à d'autres processifs, fondent une « Union des opprimés pour la protection de ceux qui ont eu à subir les injustices des tribunaux », et notifient la constitution de cette Société au Gouvernement. Nous avons observé un de ces processifs, âgé de trente ans, fils d’aliéné, dont la déséquilibration mentale s’élait manifestée dès la jeunesse. Fan- tasque, exalté, il prétendait, étant militaire, que ses chefs lui en voulaient, qu’on cherchait à l’em- poisonner; il eut à subir plusieurs condamnations assez sérieuses motivées par des actes qui révé- laient ses tendances, entre autres pour avoir poursuivi de ses obsessions une jeune fille, et pour avoir fait un rapport contre un de ses offi- ciers. Interné pour des idées de persécution avec hallucinations passagères de l’ouïe, il attribue sa séquestration à « des influences occultes »: « Le Parquet, dit-il, veut étouffer sa voix, le déshonorer. » Une fois en liberté, il entreprend une campagne très active, fatigue de ses requêtes toutes les autorités, poursuit les médecins qui ont délivré contre lui des certificats « devant, dit-il, être considérés en Cour de Justice comme pièces à conviction d’un crime qui, après avoir reçu un commencement d'exécution, ne fut pas entière- ment perpétré par suite de circonstances indé- pendantes de la volonté de leurs auteurs ». Il nalier (folie à deux, folie communiquée); le per- | accable un médecin de lettres injurieuses, exige D* MAGNAN ET SÉRIEUX. 1175 SUR LES ALIÉNÉS PERSÉCUTEURS — — — —"""" — — ————"——]—]————"—"—"—""— — —— ———]—]—"—— un certificat de sortie, fait suivre sa signature de litres fantaisistes tels que : « attaché de minis- tère », « Ciloyen de la République Française », ou encore de lettres rangées en carré : H. W. D. R. Il adresse des pétitions aux Chambres « en répara- tion d'un préjudice indûment causé », envoie des lettres de protestation aux journaux qui publient son histoire sous le titre de « Crime sans nom », convoque les médecins à des réunions publiques dans lesquelles il expose sa séquestration, ré- clame l'assistance judiciaire pour « suivre contre le médecin et le personnel du service une action en justice », et obtenir des dommages-intérêts. D'autres, d'un naturel plus violent et qui on! parfois déjà subi de nombreuses condamnations pour injures, menaces el coups, se lassent bientôt de recourir inutilement aux voies légales : ils se montrent agressifs et menaçants : « J'ai déjà em- ployé tous les moyens conciliants el juridiques possibles, écrit l'un d'eux; les moyens extrêmes me sont permis maintenant devant Dieu et devant les hommes. » Après avoir employé la diffamation par cartes postales et par voie d'affiches manus- crites placardées dans les rues, ils poursuivent sans répit celui auquel leur haine s’est atlachée : ils se postent à sa porte durant des heures entières, le suivent dans la rue, l’interpellent, l’'outragent, pro- voquent un attroupement: «Je suis attaché à la porte de votre ministère comme le hibou à la porte d’une écurie, » écrivait l'un d'eux à un ministre. Enfin ils n’hésitent pas à se faire justice eux-mêmes par des voies de fait el même par un meurtre (Per- sécuteurs homicides.) Nous avons observé à Sainte-Anne un persécu- teur qui a fait de nombreux séjours à la fois dans les prisons et dans les asiles d’aliénés. Fils d’un père ivrogne, s'excilant lui-même facilement sous l'influence d'excès alcooliques, il présentail une conformation vicieuse du crâne et une prononcia- tion défectueuse. À son retour des colonies, où il avait été cassé de son grade de caporal, il exerça successivement diverses professions. En 1879, se croyant frustré dans une succession, il fait écrire à des parents des lettres de menaces etse livre à des voies de fait sur son oncle, délit pour lequel il est condamné à six moix de prison. Deux ans après, nouveaux actes de violence suivis de trois mois de prison. Plus tard, il se figure que M. X..., le maire, fait courir le bruil que sa condamnation lui enlève ses droitsélectoraux : il étudie alors le Code, écrit au procureur de la République, enfin invective M. X..., qui, d'après lui, le persécute de toutes fa- cons. Arrêté en 1885, il est, après un mois d'empri- sonnement, transféré dans un asile d’aliénés. En 1886 nouvelle condamnation pourinjures à l’adjoint du maire : à peine sorti de prison il est de nouveau arrêté et condamné pour des faits identiques. Aus- sitôt en liberté, il se décide à faire connaître son histoire par voie d'affiches manuscrites qu'il colle dans sa commune, sur les principaux monuments de Paris et à la porte du Crédit Foncier (dont le con- seil d'administration compile M. X..… parmi ses membres). Il placarde ainsi 150 affiches de grand format quine lui demandent pas moins de 3 heures de travail chacune. En outre il continue à diffamer M X.._etil est condamné de nouveau pour avoir frappé le garde champêtre. Il se fait arrêter au moment où il collait son immense affiche à l'entrée du Palais-Bourbon. Il veut « lancer son affaire », dit-il, et compte sur l'appui d'avocats célèbres pour défendre sa cause. En 1888, il entre à Sainte- Anne pour la troisième fois. Il avait fait le pari de toucher la main de M. X... : ils’introduit chez ce dernier, lui prend la main et se retire. Quelque temps après il affiche un placard injurieux à la porte du Crédit Foncier : il est assigné en police correclionnelle. Enfin on l’arrête couché sur la voie publique, porteur d’un revolver. Il parle avec volubilité, récite par cœur son affiche et des pages entières du Code; il proteste hautement contre son internement. Ajoutons qu'ayant reçu une somme de 5,800 francs qui lui revenait de l'héritage pater- nel il reste convaincu, malgré l’affirmation de sa mère, que cet argent lui a élé remis de la part de M. X... comme indemnité. Dans certains cas ce n’est pas seulement, comme chez les persécuteurs précédents, le souvenir ob- sédant d'une injustice subie qui poursuit le ma- lade el qui arme son bras contre ceux dont il croit avoir à se plaindre : c’est l'intérêt d’un parti poli- tique, d’une classe sociale, le salut de la Patrie qui le pousse au meurtre. Une fois l’idée installée qu’il peut par la mort d’un homme sauver tous ces grands intérêts, il n'y a plus dans sa vie place pour autre chose ; il va à son but avec une ténacité aveugle, faisant bon marché de son existence pour accom- plir la mission dont il s’est chargé. Certains régi- cides nous offrent des exemples de cet état de dé- séquilibration mentale. Chez eux également une idée obsédante envahit la conscience, absorbant à son profit toute l’activilé psychique du sujet : La- martine dans le portrait qu’il trace de Louvel, l'assassin du duc de Berry nous montre un de ces fanatiques « roulant dans une tèle étroile une pensée mal comprise et somffrant jusqu'à ce que su main fatale lait déchargé par un crime du poids et du martyre de son idée. » Nous avons eu occasion d'examiner à Sle-Anne un de ces sujets qui avait fait une tentative d’assas- sinat sur un haut personnage politique. Intelligent et actif, mais instable et mal pondéré, il a fait des dupes, a vécu d’expédients, s’est lancé dans les Fr D MAGNAN ET SÉRIEUX. — SUR LES ALIÉNÉS PERSÉCUTEURS 719 entreprises les plus diverses, a pris une quaran- taine de brevets d'invention. Il a travaillé égale- ment à la solution de questions sociales, a rédigé un dictionnaire de synonymes, composé des poésies, des pamphlets, etc. Malgré cette suractivité intel- lectuelle que son manque d'équilibre psychique rend inféconde, il mène une vie misérable ; à la suite d’une condamnation à un moisde prison qu'il estime illégale, il s’écrie : «on entendra parler de moi », et réagissant, comme il avait vécu, en désé- quilibré, il profère des menaces de mort contre ses juges, et se prépareà faire unexemple relentissant. Il entend rendre responsable ceux qui sont à la tête du Gouvernement d'échecs qui ne sont impu- tables qu'à lui-même ; tous ceux dont il croitavoir àse plaindre, ou que ses convictions lui désignent comme nuisibles au bien du pays doivent être punis. Pesant les responsabilités de chacun, il fait quatre catégories de victimes ; 19 ont été choisies : 3 sont condamnées à mort; 2 viclimes politiques et une personnelle ; 4 recevront des’blessures très graves, 7 des blessures plus ou moins graves, à des blessures légères ; et, comme une seule vic- time doit payerpour toutes, il fait une loterie dans laquelle il donne à chacun un nombre de numéros en rapport avec le degré de culpabilité qu'il lui attribue. Il prépare ainsi 132 bulletins : l’un en a 18, l’autre 4; un juge d'instruction 6, le général F.….. 6, etc. «Je condamnele misérable D..., écrit-il, le faux témoin, le voleur, le faussaire, à avoir les deux paltes cassées au genoux, et le V... recéleur et ca- lomniateur ingrat à subir la même peine, avec huit numéros au chapeau pour D... et 6 numéros pour NV... » Pour légitimer ces jugements sommaires, il fait la biographie de chacune de ses victimes, etla termine par la condamnation dont il frappe le coupable : «encore un qui ira dans mon chapeau avec dix numéros ; il paiera son iniquité par une patle cassée au genou, ce sera sa récompense.» Magistrats, avocats, avoués, notaires, députés, mi- nistres, tous comparaissent à son tribunal : il pèse, juge etcondamne; il n'y a que lui d’honnèête et de juste. Il explique avec complaisance les avantages de ce qu'il appelle « sa justice sommaire » : € et vous ne trouvez pas que cette loterie ainsi combi- née ne soit cent fois plus salutaire, plus morale et plus réconfortante, plus juste et autrement expé- ditive que la justice, si souvent boiteuse et injuste. Comparez et soyez certains qu'avant peu, au lieu de la faire passer pour folle, tous les gens aimant la vraiejustice la trouveront sensée et morale. J’au- rai desimitateurs, soyez-en sûrs... J'ai tiré aujour- d’'hui ma loterie, écrit-il ailleurs, c’est X... qui a gagné. Et dire qu'il va falloir que ce soit moi, le pauvre inventeur ridiculisé, moi tant de fois cons- pué, pillé, calomnié, diffamé, failli, ruiné, con- REVUE GÉNÉRALE, 1891. damné à la prison pour chantage, moi, Pygmée, dire que c'est à moi que vient d’échoir la noble tâche de supprimer X... le fléau, d'en délivrer la France ! J'ai sorti son numéro de mon chapeau, c'est vraiment trop de chance après tant de gros malheurs immérités, et ma vie peut bien payer une telle récompense. » Au moment de l'élection présidentielle son exaltation va en grandissant : enfin ilréussit à pénétrer au Palais Bourbon et tire sur M. X... deux coups de revolver. Au cours de l'interrogatoire ce malade fut pris au Dépôt d’un accès délirant qui dura cinq jours. — A Ste-Anne il se montrait préoccupé avant tout par les travaux importants qu'il avait en tête : solution de la ques- tion politique et humanitaire, étude de l'éducation des garçons, de celle des filles, ete. «Si un jury im- bécile m'acquiltait, écrivait-il, je recommencerais ; je ne cache pas ma manière de voir, j'ai agi avec préméditalion. » L’aclivité intellectuelle de ce su- jet, sa lucidité, l'habileté avec laquelle il a ac- compli sa tentalive d'homicide auraient pu en im- poser pour un état passionnel; mais en dehors de l'accès délirant passager qu'il a présenté, l'examen approfondi de cette existence dont tous les actes révèlent un déséquilibré, ses oppositions et ses contradictions incessantes, cette obsession de vengeance qui le poursuit, cette liste de victimes qu'il dresse en mettant le nom d’un homme d’État à côté de ceux de l'expert en écriture qui l’a dé- claré insolvable, de l'avocat qui a plaidé contre lui, du magistrat qui l’a reconnu coupable, de l’ouvrier typographe qui l’a poursuivi, de sa belle-mère dont il prétend avoir à se plaindre; ces verdicts qu'il rend, cette échelle de peines, cetteloterie, ce choix de la viclime laissé au hasard, dénotent bien les troubles profonds de son intelligence et le carac- tère maladif de ses actes. On peut distinguer encore les persécuteurs hypo- chondriaques qui, convaincus d’avoir été mal soignés par un médecin, le poursuivent de leur haine, en veulent à tous les médecins qu'ils rencontrent dans le cours de leur vie et mettent à les persé- cuter un acharnement qui ne recule pas toujours devant les actes de violence. Signalons aussi les perséculeurs filiaux s'imaginant avoir retrouvé un père qu'ils poursuivent de leurs tendresses et de leurs revendications; les persécuteurs amoureux dont Teulat, l’'amoureux de la princesse de Br..., était un magnifique exemple. Si le but des persécutions de ces derniers sujets est bien différent de celui des processifs, leurs allures, leurs actes sont de tout point identiques : ce sont bien au point de vue clinique, les mêmes malades. Habituellement il s’agit d’amoureux chez lesquels la sphère géni- tale lient peu de place : ils aiment d'un amour purement psychique (Erotomanes). Ils suivent leur 21 780 victime dans les églises, au théâtre, en voyage et cela pendant des années; la nuit même, ils sont sous les fenêtres de celle qu'ils aiment. Nous avons eu à Sainte-Anne une persécutrice de ce genre: il s'agissait d’une jeune fille, femme de chambre chez une dame de 50 ans; elle s'était prise pour sa maitresse d’une affection très vive, qui, bien que dégagée de toute préoccupation charnelle, n’était pas exemple de jalousie. Renvoyée par sa maitresse à la suite de scènes violentes, notre malade, obsédée par sa passion, ne peut se résigner à vivre loin de celle qu’elle aime, et alors com- mence une série de persécutions. Elle attend dans la rue, pour la frapper, la personne qui l’a rem- placée, se poste devant la porte durant de longues heures, parfois une journée entière, malgré les intempéries, les yeux dirigés vers la fenêtre de la pièce où se tenait sa maîtresse. Celle-ci change de domicile pour se soustraire à celte surveillance ; peine inutile : notre déséquilibrée la suit dans la rue, les magasins, les églises; « reprenez-moi, gémissait-elle. » Parfois pendant la nuit, escala- dant la grille, elle venait sonner un glas funèbre à la grosse cloche. Elle fut, pour des excentricités de ce genre, conduite au commissariat de police une vinglaine de fois. Chaque jour elle écrivait à sa maitresse en termes tantôt suppliants, tantôt menaçants ; elle lui a adressé ainsi plus de 500 lettres; « il faut que l’une de nous deux dispa- raisse », disail-elle chez les voisins. Mise en liberté après un premier internement, elle recom- mence ses persécutions, dépose des plaintes contre le commissaire de police, fait comparaitre sa maitresse devant le juge de paix, lui réclame des dommages-intérèêts, porte des accusations contre les médecins; enfin ses excentricités nouvelles la font interner pour la deuxième fois ; elle montre à ce moment des tendances plus agressives et parle de se venger un revolver à la main. Si de graves questions médico-légales peuvent parfois se présenter à propos de l'appréciation de la responsabilité des persécutés hallucinés, des dé- lirants chroniques, les difficultésse montrent bien plus délicates à résoudre, quand il s’agit de persé- cutés-persécuteurs. De tous les aliénés ce sont ceux qui donnent lieu aux controversesles pluslongues, parfois même aux plus vives polémiques : ce sont eux aussi qui fournissent prétexte aux diatribes virulentes de la Presse, aux articles à sensation sur les « séquestrations arbitraires » et les « Bas- tilles modernes ». La chose peut s'expliquer jus- qu'à un certain point par les allures raisonnantes, la physionomie si particulière de ces malades : à un examen superficiel on pourrait croire à de simples états passionnels, à une surexcitation in- D MAGNAN ET SÉRIEUX. — SUR LES ALIÉNÉS PERSÉCUTEURS tellectuelle entretenue par une longue série d’injus- tices. Tandis que chez le délirant chronique le phé- nomène morbide capital, l'hallucination, ne peut, par son évidence, laisser planer aucun doute sur la nature des actes du sujet, il n’en est plus toujours de même chez le persécuté-persécuteur dont la maladie ne fait qu'exagérer les tendances natives. Ce qui fait en outre la difficulté réelle de ces ex- pertises médico-légales, c’est, ainsi que nous l’a- vons vu, la nature particulière des conceptions de ces aliénés. Ils savent ne point verser dans l’in- vraisemblable ; ils savent échafauder leur roman sur des faits en partie exacts. Au début ils n’é- mellent que des réclamations dont quelques-unes peuvent être justifiées, tandis que d’autres, mal fondées, restent encore modérées. Ce n’est qu’in- sensiblement que des réclamations nouvelles viennent se greffer sur les anciennes, et, chose curieuse qui montre bien alors le caractère mala- dif, le persécuteur oublie pour ainsi dire le fait réel qui a servi de base à son délire pour s'attacher à des réclamations imaginaires, mais qui le re- haussent à ses propres yeux. L'adversité fait au persécuteur un piédestal; il perd la notion exacle de sa situation sociale, du rôle qu'il peut jouer. Parfois il réussit à arracher un secours à des fone- tionnaires imprudents : c’est pour lui une preuve de plus qu'on le craint, qu’il est dans son droit, et il poursuit sa campagne. Pour arriver, malgré la persistance chez ces aliénés de certaines facultés, mémoire, logique, activité intellectuelle, à démon- trer la nature délirante des sentiments qui les animent et le caractère pathologique des actes auxquels ils sont conduits, il faut reconstiluer l'histoire entière du sujet qui révèle d'ordinaire un état psychopathique congénital, et montre dans sa conduite les réactions maladives d’un cerveau profondément déséquilibré. Bien qu'empruntant quelques traits aux foux moraux et aux maniaques raisonnants, le persécuté-persécuteur s’en dis- lingue cependant par des différences très tranchées qui le font classer dans le groupe si homogène que nous étudions. L'examen des faits qu'il in- voque,faits dont quelques-uns peuvent être exacts, mais dont le plus grand nombre sont complète- ments dénaturés ou de pure invention, les réac- tions complètement hors de proportion que ceux- ci ont provoquées, l’opiniàtreté aveugle avec la- quelle il poursuitses revendications sans qu'aucune considération, même celle de son intérêt person- nel, puisse l'arrêter, les arguments qu’il emploie à les justifier et qui portent la marque d’une lo- gique subtile, mais faussée, le caractère obsédant de conceptions dont le cercle va toujours s'éten- dant, ses menaces, ses calomnies, réservées d’abord à ceux dont il se dit la victime, puis s'adressant à PE ET J. BERGERON. — LA FAUNE DITE « PRIMORDIALE » EST-ELLE LA PLUS ANCIENNE ? tous ceux qui ne partagent point son délire, enfin les actes d'extrême violence devant lesquels il ne recule pas, sont autant d'actions relevant d’un état de déséquilibration mentale sans cesse grandis- sante, el de jour en jour plus dangereuse. Si la so- ciété a le droit et le devoir de se garantir des actes violents ou nuisibles de ces persécuteurs-raison- 781 nants, il n'en faut pas moins se souvenir qu'il s’a- git de véritables malades dont la place est non point dans une prison, mais dans un asile d’alié- nés. D' Magnan, Médecin en chef de l'Asile Sainte-Anne, D' Sérieux, Médecin-adjoint des asiles d'aliénés de la Seine, LA FAUNE DITE « PRIMORDIALE » EST-ELLE LA PLUS ANCIENNE ? Lorsque les travaux de Darwin eurent attiré l’at- tention sur la théorie de l’évolution qui, cependant, avait été déjà émise par Lamarck un demi-siècle auparavant, ce fut à la Géologie que les partisans aussi bien que les adversaires de cette théorie em- pruntèrent leurs arguments les plus sérieux. En effet, la Géologie s'appuie d’une part sur la Paléon- tologie, qui étudie les faunes etles flores fossiles, et d’autre part sur la Stratigraphie, qui permet d’éta- blir la superposition relative ou chronologie des différentes assises sédimentaires renfermant ces formes organiques éteintes. Cette science, qui s'occupe des temps passés, devait donc, semblait-il, permettre d'établir la théorie sur des faits qui seraient indiscutables; mais ces faits mêmes purent être interprétés de façons différentes, et de là naquirent des discus- sions où transformistes et antitransformistes dé- ployèrent une égale ardeur. Nous n'avons pas l'intention de revenir sur ces luttes, heureusement apaisées ;mais il nous a paru intéressant de rechercher si les travaux géologiques récents ne permettraient pas une interprétation nouvelle ou plus complète de quelques faits déjà connus. Ce qui frappe tout d’abord lorsqu'on étudie la succession des êtres organisés, c’est l'apparition brusque d’une première faune constituée surtout par des Brachiopodes et des Crustacés. Les pre- miers occupent une place assez basse dans la série animale; il est d’ailleurs à remarquer que plusieurs d’entre eux (Lingules) se sont perpétués jusqu'à nous sans grand changement. Quant aux seconds, ils appartiennent à un groupe bien spécial qui a reçu le nom de Trilobites et qui n’a pas dépassé la période primaire. Ges Trilobites, d’après les vestiges qui nous en sont restés, présentaient des organes bien différenciés et devaient être aussi élevés dans la série que certains Crustacés actuel- lement vivants. Une pareille faune, à en juger par l’ensemble de ses caractères, devaitètre,d’aprèsles transformistes, le résultat d’une évolution longue et suivie; au contraire, elle confirmaitles partisans des créations successives dans leur conviction que les faunes apparaissaient les unes après les autres, avec des êtres dont l’organisation atteignait toute sa per- fection dès leur apparition. À l'appui de cette manière de voir, les anti-évo- lutionnistes invoquaient encore d'autres faits qu semblaient leur donner raison. Les premières strates renfermant la faune primordiale sont, par- tout où on les rencontre, peu éloignées de la série dite cristallophyllienne, dont la plupart des élé- ments sont cristallins. Or, il était admis autrefois que le mica, le quartz et le feldspath qui entrent en proportions très variables dans les gneiss et les micaschistes qui constituent cette série, s'étaient formés dans un bain fondu au sein duquel ils se précipilaient; dans ces conditions, aucun orga- nisme n'avait pu vivre lors de leur dépôt. D'autre part, l'épaisseur des sédiments compris entre cette série réputée sûrement azoïque et les assises ren- fermant la faune primordiale, semblait trop faible, d'après les faits observés, pour pouvoir corres- pondre à un laps de temps assez long pour per- mettre à l'évolution des Trilobites de s'accomplir. Nous allons voir comment on explique actuelle- ment tous ces faits. Il De toutes les formes primordiales, ce sont les Trilobites qui offrent le plus d'intérêt, au point de vue de l’évolution, puisqu'ils représentent les organismes les plus élevés, c’est-à-dire ceux sur lesquels les causes efficientes de l’évolution se sont fait le plus sentir. Ce sont des Crustacés par l’ensemble de leurs caractères (Arthropodes à test chitineux, vivant dans l’eau, respirant par des branchies, munis de nombreuses paires de pattes thoraciques,dont quel- ques-unes sont transformées en pattes mâchoires, et de paires de pattes abdominales); mais ils ne sont comparables à aucune forme vivante, sauf peut-être à quelques Branchiopodes ou à quelques Isopodes. Nous rappellerons en quelques mots leurs caractères, parce que nous aurons à y revenir plus tard. 182 J. BERGERON. — LA FAUNE DITE « PRIMORDIALE » EST-ELLE LA PLUS ANCIENNE? D'abord, chez tous, il y a une trilobation très nette qui leur a fait donner le nom qu'ils portent. La partie antérieure du corps, ou tête, présente un relief médian, dit glabelle (fig. 1, G), qui est tantôt en forme de massue (fig. 4 et 4), tantôt triangulaire, avec partie arrondie en avant (fig. 8). Cette glabelle porte des sillons qui alleignent, au maximum, le nombre de quatre et qui divisent la glabelle en cinq parties à surface légèrement bombée, appelées lobes (fig. 1). Derrière la glabelle se voit un sillon dit occipital qui existe chez tous les Trilobites. Il sépare la glabelle d'un bourrelet occipital fig. 4, 0 qui se prolonge de chaque côté et permet une dis- linetion très nette entre la tête et le thoyax. De chaque eôté de la gla- belle se voit un œil (fig. 1, E) dont la structure va- rie avec les genres; en- fin, du côté externe de l'œil, il y a une partie presque plate se termi- nant en pointe : c’est la joue mobile portant la pointe génale. Le {horax qui fait suite Py à la tête est composé | d’un nombre d'anneaux Fig. 1. — Paradoxides Bohemi- Variable avec le genre, Sedo d'aprés Barrande, avog l'espèce et même relet occipital; A, axe du avec l’âge pour une Et PA plèvres; Py,PJ8- même espèce. La partie médiane du thorax cor- respond à l'axe (fig. 1, A); les parties latérales aux plèvres (fig. 1, P). Enfin, le corps se termine par un pygidium (fig. 1, Py), résultant de la soudure d’un certain nombre d’anneaux; la forme de ce pygidium est très variable. La face inférieure, qui portait sans doute des té6- guments moins résistants que ceux de la face supé- rieure, n’est presque jamais conservée. Cependant MM. Billings, Woodward et surtout M. Walcottont pu reconnaitre, dans quelques échantillons con- servés dans des calcaires, la structure de cette face inférieure. D’après M. Walcott, sous la tête, en arrière d'une pièce, dite 4ypostome (fig. 2, H), qui s'articule sur le bord de la tête, se trouvent quatre paires de pattes mâchoires (fig. 2, pm) dont la quatrième est plus forte que les autres. Tous les anneaux ou segments, mème ceux du pygidium qui sont soudés entre eux, portent une paire de pattes articulées. Telle est la constitution des Trilobites arrivés à leur état adulte, Mais on a maintenant, sur le déve- loppement de quelques-uns d’entre eux, et nolam- ment de quelques espèces primordiales, des no- tions qui sont fort intéressantes, car elles nous donnent certains renseignements relatifs à l’'évolu- ion de ces Crustacés. À parlir du stade où ils ont alleint une taille suffisante pour laisser quelque trace par fossilisalion, on peut reconnaitre cer- tains caractères sur leur carapace. Les caractères se modifient à mesure que la carapace prend des dimensions de plus en plus grandes : c'est ainsi que Barrande ! et M. Matthew ? ont pu suivre le développement de quelques Trilobites. Fig. 2. — Face inférieure restaurée de Calymiene senaria, d’après Walcott.— H, hypostome; pm, pattes mâchoires. Le Trilobite passe par trois phases ou stades em- bryonnaires avant de présenter des caractères génériques. Dans le premier stade, l'animal a la forme d’un disque plus ou moins ovale; celui-ei est traversé par une crête longue et cylindrique qui correspond à la glabelle et qui n’atteint pas les bords du disque (fig. 3, 1). La partie antérieure de cette crête ou lobe antérieur s'élargit en forme de tête de clou, tandis que dans la partie postérieure, apparait déjà une ligne transversale qui corres- pondra plus tard à la suture occipitale. Dans cer- lains exemplaires, on peut déjà reconnaître, sur la partie postérieure de la crête, des indices des sil- lons de la glabelle. Dans le second stade (fig. 3,2), le disque s’allonge ; la partie antérieure de la crête glabellaire se rétrécit en même temps que son relief s’accuse; les sillons glabellaires se creusent et deviennent très nets. l Système silurien du centre de la Bohême, 1. I, p. 1. 2 Illustrations of (he fauna of S. Johns Group, n° IV, part. IT. The smaller Trilobites with Eyes. (Trans. Roy. So>. Ca= nada, Section IV, 1887, p. 115). Sur le développement des premiers Trilobites. Traduction par M. Forir. (Extr. des An- nales de la Société Royale malacologique de Belgique, t. XXIII, 1888.) J. BERGERON. — LA FAUNE DITE « PRIMORDIALE » EST-ELLE LA PLUS ANCIENNE? 183 Mais tous ces sillons, ainsi que le sillon occipital, qui est déjà très accusé, sont très rapprochés les uns des autres et cantonnés sur la partie posté- rieure de la crête glabellaire. Cependant, on voit déjà se détacher très distinctement des autres un sillon antérieur. Le bord occipital de la tête est à ce moment très visible; il la délimite trèsnettement, et au-dessous, on reconnait le pygidium, extrème- ment réduil, avec sa forme générale. Dans le troisième stade (fig. 3.3), la tête prend une forme plus voisinede celle que présentera l'adulte. La crète glabellaire s’est élargie; lessil- lons postérieurs se sont rapprochés du sillon antérieur. La parlie antérieure de la glabelle est cir- conscrite par une rainure. Parfois, il semble qu'il y ait déjà, sur le contour des bords latéraux, des bandes oculai - res faiblement ar- quées; les yeux n’ap- paraissent qu’au quatrième stade sur ces mêmes bords latéraux et ils se rapprochent de plus en plus de la glabelle dans les stades suivants. C’est à partir du quatrième stade que se recon- naissent les caractères génériques. En même temps que ceux-ci s’accusent, l’animal se déve- loppe : à chaque stade nouveau, le nombre des segments du thorax augmente el les dimensions de toutes les parties du corps croissent également. Fig. 3. — Différents stades du déve- loppement du Sao hirsula, d’après Barrande, très grossis. — 1, 1er sta- de : ?, 2e stade; 3, 3° stade; 4, ani- mal portant vingt anneaux et ayant atteint son développement presque complet. Les joues mobiles, qui ont disparu dans l’exemplaire fi- curé, ont été dessinées seulement au trait !. Ces observations ont été faites par M. Matthew sur les genres Liostracus, Ptychoparia et Solenopleura dont toutes les espèces passent par les trois pre- mières phases que nous venons d'indiquer, sans qu'il soit possible de les distinguer génériquement. Il est donc bien probable qu'ils ont une même ori- gine et il est naturel de les grouper en une même famille. Quant aux Paradozides qui se trouvent dans les mêmes couches cambriennes, et qui sont beaucoup plus importants à cause de leur grand nombre, leur développement est encore mal connu; cepen- \ Bien que le Sao hirsula ne soit pas un type étudié par M. Matthew et que, dans son développement, il offre quelques légères différences avec ce que l’on observe chez les espèces décrites par le savant paléontologiste américain, j'ai cru cependant devoir emprunter ces figures à Barrande, parce que ce sont les plus claires qui aient été faites d’embryons de trilobites. On y reconnait d’ailleurs les caractères princi- paux des stades décrits par M. Matthew. dant ils présentent, dès les premiers stades, des différences sensibles avec les genres précédents. Le lobe oculaire s’y montre beaucoup plus tôt, et, dès son apparition, il occupe sa position définitive de chaque côté de la glabelle, contrairement à ce que nous avons signalé plus haut. Nous voyons donc que, dans les Trilobites de la faune dite primordiale, il y a déjà des différences dans le mode de développement, et ces différences, chez des formes d'un même groupe vivant à une mème époque, correspondent certainement à un degré d'évolution qui n’est pas le même, ce qui nous porte à admettre qu'avant le temps où vivait cette faune trilobitique, il a dû y en avoir une autre d'où elle provient. On a vu plus haut que le Trilobite adulte peut porter sur sa glabelle jusqu'à quatre sillons et, par suite, cinq lobes. Si nous appliquons aux Trilobites la théorie émise par Milne-Edwards pour les Crus- tacés vivants, nous pouvons considérer les lobes comme correspondant à cinq somites soudés entre eux, D’après ce qui a été dit précédemment, sur la face inférieure du Trilobite se voient quatre paires de paltes mächoires qui correspondraient aux quatre lobes postérieurs, le lobe antérieur correspondant aux organes des sens. En étudiant le développement des Trilobites, nous avons vu que c'était ce lobe antérieur qui s’accusait le premier et qu'il restait longtemps de beaucoup le plus developpé ; il semble en résulter que pendant le jeune âge, les organes des sens jouaient un rôle des plus importants. Ce fait est curieux si nous le rapprochons de cette particularité que dans les embryons de Crustacés vivant actuelle- ment, ce sont également les organes des sens cor- respondant aux somites antérieurs qui sont les plus développés. Ce caractère embryonnaire du grand développement du lobe antérieur de la gla- belle devrait se retrouver chez les plus anciens Trilobites et s’atténuer à mesure que l’ordre accom- plissait son évolution. Il semble, au premier abord, qu’en effetil en ait élé ainsi; chez les Ole- nellus (fig. 4) et les Paradoxides (fig. 1), qui sont es- sentiellement caractéristiques du Cambrien, la partie antérieure de la glabelle est très développée. Mais dans les genres de la famille des Phacopidæ, qui se perpétuent durant le Silurien et le Dévo- nien, nous retrouvons le lobe antérieur de la gla- belle prépondérant ; aussi ne pouvons-nous attri- buer une grande valeur à ce caractère. La faible dimension du pygidium par rapport à celle de la tête est un caractère vraiment embryon- naire que nous retrouvons d’une façon remar- quable dans les deux genres Olenellus et Paradoxides. 184 J. BERGERON. — LA FAUNE DITE « PRIMORDIALE » EST-ELLE LA PLUS ANCIENNE ? D'autres Trilobites moins anciens ont bien, il est vrai, un pygidium de petite taille, mais chez aucun ce caractère n’est aussi net que dans les espèces de ces deux genres cambriens. Fig. 4. — Olenellus Gilberti, d'après H. Walcott. Il y a encore des Trilobites primordiaux présen- tant des caractères embryonnaires incontestables : ce sont les Agnostus (fig. 5), qui sont toujours de petite taille et chez lesquels la tête et lé pygidium ont sensiblement les mêmes dimensions; mais le thorax ne présente jamais plus de deux anneaux. C'est un genre dont le stade de plus grand déve- loppement correspond, d’après M. Matthew, à un stade embryonnaire des autres Trilobites. En effet, la glabelle n'offre que des caractères encore peu distincts. Dans certaines formes, les deux sil- lons postérieurs sont encore très rapprochés; le sillon antérieur est distant des autres et plus accusé qu'eux. Ce groupe a d'ailleurs subi une évolution dans le même sens que les autres Trilo- bites, ainsi qu'il résulte des travaux de M.Tullberg. En effet, les formes les plus anciennes, telles que V’Agnostus rex de Scandinavie (fig. 5), présentent un élargissement très sensible de la partie antérieure de la glabelle, tandis que dans les formes moins anciennes, celle-ci est plus réduite. Les Olenellus, comme les Paradoxides, nous offrent encore certaines particularités importantes au point de vue auquel nous nous placons. Leurs yeux, au lieu d’être composés comme ceux des Arthro- podes et même de la plupart des Trilobites (fig. 6), sont constitués seulement par une bande visuelle, une simple surface sans lentille (fig. 7). Une dis- position analogue est connue chez quelques formes vivantes de Crustacés qui se trouvent actuel- lement cantonnées dans les grandes profondeurs de l'Atlantique !. Il y a là une appropriation qui ne se produit qu'à la suile de modifications dans les organes visuels de genres dont les yeux étaient conformés primitivement comme ceux des autres Arthropodes. MM.Suess * et Neumayr * ont voulu tirer de celte disposition des yeux des Olenellus et des Paradorides la conclusion que la faune primordiale était une Fig. 5. Fig. 6. Fig. 7. Agnoslus rex, Œïl composé Œïlde Paradoxides spino- d’après Bar- de Dalma- sus, d’après Barrande. rande, niles, da- près Bar- rande. faune de mer profonde. Sans nous arrêter à cette opinion qui n'est rien moins que prouvée, nous ferons remarquer que, d’après ce que nous savons, celle modification du système visuel correspond à une certaine évolution. Pour qu’elle s’observe chez les Olenellus et les Paradoxides, il faut qu'il se soit écoulé, entre l'apparition des types souches de ces deux genres et le moment où se montrent ces formes, un temps nécessaire à l’évolution de ces yeux. L'étude des yeux dans d’autres genres primor- diaux nous conduit encore aux mêmes conelu- sions. On trouve, en effet, dans les mêmes couches cambriennes, des espèces de Conocoryphe adultes avec des yeux, et d’autres sans yeux (fig. 8). Pour qu'il en soit ainsi, il faut qu'il y ait, d’une façon ou d'une autre, modification du type Conocoryphe pri- mitif: ou celui-ci n'avait pas d’yeux et ces organes ! Voir les résultats des dragages opérés à de grandes pro- fondeurs par les expéditions scientifiques anglaises et fran- Caisecs. = Das Antlilz der Erde, t. I, p. 272. 3 Erdgeschichte, t. II, p. 42. mas trad. de dm. tin Dites J. BERGERON. — LA FAUNE DITE « PRIMORDIALE » EST-ELLE LA PLUS ANCIENNE? 785 n'ont apparu qu’à la suite de l’évolution, ou bien, au contraire, certaines espèces sont devenues aveugles. Quelque cause qu'il faille attribuer à cette cécité, elle vient encore à l'appui de la conclusion que nous avons déjà énoncée. Les études dont les gisements cambriens ont élé l’objet depuis de longues années, ont permis de reconnaitre que si, d’une ma- nière générale, la faune cam- brienne est sensiblement la même partout, quand on la prend dans son ensemble, elle n’est pas cependant identique à elle-même dans toutes les régions où on l’a rencontrée. Dans les continents septentrio - naux, tels que l'Amérique du Nord, l'Angleterre, les Pays scandinaves, on à pu établir dans le Cambrien trois divi- sions dont l’inférieure est caractérisée par la pré- sence du genre Olenellus, landis que la seconde est riche surtouten Paradoæides et la troisième en Olenrs. Dans l’Europe centrale et méridionale (Bohême, Sardaigne, Languedoc, Espagne), il n’y a guère que la division moyenne qui soit bien connue. Ce ne serait pas une raison suflisante pour qu'on fut autorisé à distinguer les deux régions septentrio- nale et méridionale, car c’est un caractère né- galif et l’on peut arriver un jour ou l’autre à ren- contrer dans la dernière les genres caractéris- tiques des étages inférieur et supérieur. Mais ce qui juslifie pleinement cette distinction, ce sont les caractères des Paradoxides. En effet, ceux de la région septentrionale forment un groupe dans lequel les yeux sont plus petits et placés plus haut que dans les Paradoxides de la région méridionale. De plus, parmi les Paradoxides d'une même région, il y a un certain nombre de formes très voisines les unes des autres, mais qui semblent être cantonnées chacune, pour ainsi dire, dans une province. Elles sont, suivant expression adop- tée, représentatives les unes des autres. Dans l’état actuel de la nomenclature scientifique, on les a désignées sous des noms spécifiques différents; mais, en réalité, ce sont de simples variétés. Elles dérivent certainement toutes d'un même type, qui s’est modifié différemment selon les conditions physiologiques locales. Comme ces variétés sont sensiblement synchroniques, elles nous conduisent encore à admettre l'évolution des Trilobites anté- rieurement à l'époque cambrienne. D'ailleurs, nous pouvons nous-même suivre l’évo- lution des Paradoxides.En effet, d’après M.Matthew, les espèces qui apparaissent les premières sont Fig. 8. — Conocory- phe coronala, (es- pèce aveugle), d’a- près Barrande, petites; les dimensions vont en croissant à mesure que l’on s'élève dans la série stratigraphique. Cette évolution aboutit à des formes relativement gigan- tesques, telles que Par. Regina Matthew, qui mesure 41 centimètres de long sur 45 cent. de large. Par- tout d'ailleurs où a été trouvée la faune dite pri- mordiale, on a rencontré des vestiges d'individus de très grande taille. Comme à ces très grandes formes ne succède aucun autre Paradorides, il semble que nous ayons à constater, dès cette époque reculée, l'effet d'une loi bien connue, d'après laquelle certains organismes tendent durant le cours de leur évolution à atteindre un maximum de développement. Dès qu'ils y sont parvenus, ils disparaissent sans qu'il y ait dégé- pérescence, uniquement par arrêt des fonctions reproductrices. Cette loi, qui semble exister également pour d'autres genres de Trilobites tels qu'Asaphus et Iænus de la faune seconde, est véri- fiée pour bien des groupes (ammonites, reptiles secondaires, certains mammifères tertiaires). Dans ce qui précède, l'étude des caractères propres aux Trilobites du Cambrien nous a ame- nés à conclure que ceux-ci présentaient des in- dices certains d’une évolution antérieure à l’époque où ils’ont vécu. Par cela même, nous sommes con- duits à penser qu'il a dû vivre, antérieurement à la faune dite primordiale, une faune pouvant renfermer les types ancestraux des formes les plus anciennes que nous connaissons actuellement. Voyons maintenant à quelles conclusions nous porte l'étude des sédiments plus anciens que le Cambrien. IT Nous avons rappelé, au début de cet article, que sous l’élage cambrien, se trouve une série d'assises réputées azoïques. Elle commence, en partant des couches les plus récentes, par des schistes compacts passant aux phyllades et des grès passant aux quartzites. Puis, viennent des schistes à surface miroitante, dits autrefois tale- schistes ou schistes talqueux, qui constituent l'étage des schistes à séricite; enfin, à la séricite ou mica hydraté, succède peu à peu le mica noir, en même temps que la roche devient plus cristal- line : alors commence la série cristallophyllienne comprenant, à la partie supérieure, les schistes mi- cacés et, à la partie inférieure, les gneiss avec leur cortège habituel d’amphibolites, de pyroxé- niles, etc. Jusqu'ici, les schistes et les grès précambriens n'ont pas fourni de traces d'organismes détermi- nables. Maïs il n’y a aucune raison apparente pour que ces assises soient azoïques, et elles nous four- niront peut être, un jour ou l’autre, une faune encore inconnue. Quant aux horizons sous-jacents 186 J. BERGERON. — LA FAUNE DITE « PRIMORDIALE » EST-ELLE LA PLUS ANCIENNE? Re pe nt LES SP ME PEN ils offrent déjà des indices de cristallinité, el par suite, sont moins propres à conserver les traces des organismes fossiles. Les premières roches cristallines commencent dans l'étage des schistes à séricilte; la séricite forme des lits très minces, entre lesquels s’en (rou- vent d’autres plus épais, constitués uniquement par des grains de quartz dont un certain nombre offre des contours cristallins. Cest encore la même disposition des éléments que dans les schistes ; mais il y a eu transformation de l’argile en séricile. Au-dessous se voient les schistes micacés dans lesquels les lits de séricite sont remplacés par des lits de mica noir; la structure est la même que dans la roche précédente; mais la cristallinité est bien plus accusée. Puis ces schistes micacés se chargent peu à peu de feldspath et passent ainsi insensible- ment aux gneiss, dans lesquels il y a alternance de lits de mica noir et de lits constitués par une association de cristaux incomplets de quartz, de feldspath et de mica blanc. Cette dernière associa- tion rappelle beaucoup la structure de la roche éruptive dite granulite. Les micaschistes et les gneiss forment par leur ensemble la série cristallophyllienne; mais on y rencontre encore des roches constituées par une association d'amphibole, de quartz et quelquefois de feldspath : ce sont les amphibolites qui ne font défaut à aucune série cristallophyllienne, quelle que soit la région étudiée. Souvent encore, il y a d’autres roches où le pyroxène joue le même rôle que l’amphibole dansles amphibolites : ce sont les pyroxénites. Enfin, au milieu des assises les plus cristallines se voient des lentilles de caleaire cris- tallin ou cipolin, dont l’épaisseur peut être consi- dérable. Si la série cristallophyllienne est le seul sys- tème composé uniquement d'éléments cristal- lins, cela ne veut pas dire qu'au milieu des assises les plus franchement sédimentaires, on ne puisse trouver parfois des roches à structure cristalline et à stratificalion bien nette rappelant celles que nous venons d'étudier. Mais ici, nous nous trou- vons en présence de phénomènes de métamor- phisme. Vaguement pressentis, et mal définis par les géologues de la première moitié de ce siècle, ces phénomènes, depuis l'emploi du microscope dans l'étude des roches, ont été l’objet, dans ces der- nières années, de nombreux travaux dus à MM. Brôgger en Suède, Lehmann, Lüssen et Rosen- busch en Allemagne, Michel Lévy et Barrois en France. Il serait trop long d'entrer dans la discus- sion des différentes théories émises à ce sujet; nous nous contenterons d'exposer les faits qui ont le plus de rapport avec ce que nous observons dans la série cristallophyllienne. Lorsqu'une roche éruptive, telle que le granite ou la granulite a traversé un schiste, elle a pro- voqué le développement, dans ce schiste, de pail- lettes de mica noir, et les grains de quartz de la roche sédimentaire sont nourris, c’est-à-dire que de la silice nouvelle s’est déposée autour d'eux. Dans le voisinage immédiat de la roche éruptive, les phénomènes sont très accusés el la roche qui résulte de ce métamorphisme est un vrai schiste micacé. Au contact du filon de granite ou de gra- nulite, le feldspath de la roche éruptive a été en- trainé, ainsi que M. Michel Lévy l’a démontré, jusque dans ces schistes micacés; alors on à affaire à une roche composée de feldspath, de mica et de quartz et dont tous les éléments sont disposés en feuillets comme dans le gneiss. Lors- que les schistes sont calcareux, il se développe en plus dans le voisinage immédiat du filon éruptif des cristaux d’amphibole et de pyroxène; par- fois ces schistes se transforment en de véritables amphibolites, et les granites, qui en ont entrainé et pour ainsi dire dissous des débris, se chargent d'amphibole. Enfin, quand la roche éruptive tra- verse des calcaires, il y a formation de pyroxène et la roche sédimentaire passe à l’état de corne verte, roche essentiellement pyroxénique. Tels sont les phénomènes bien établis de méta- morphisme dûs à l'action des roches éruptives acides, c’est-à-dire riches en silice. Ils nous per- mettent de reconnaître que, sous l'influence de roches éruptives, des assises incontestablement sédimen- laires, formées d'éléments détritiques, peuvent devenir cristallines. Si, partant de ces phénomènes de mélamor- phisme, nous nous reportons aux faits signalés dans l'étude des roches primilives, nous voyons bien des analogies apparaitre, ce qui fait penser que les roches de la série cristallophyllienne ne sont en réalité que des roches métamorphisées; les schistes auraient été transformés en mica- schistes et en gneiss, el les roches calcaires en amphibolites et en pyroxénites. IL est vrai que les filons de roches éruptives ne se montrent pas sous la forme qu'ils affectent lorsqu'ils traversent des roches sédimentaires plus récentes ; mais ce- pendant, on en retrouve lous les éléments entre chaque feuillet de gneiss, en pelits lits parallèles à la schistosité. Dans ce cas, la roche schisteuse semble avoir été imprégnée lit à lit par la roche éruptive. Dans les termes de la série cristallo- phyllienne autres que le gneiss, la roche éruptive a pu agir, non par son contact, mais à distance, par les émanalions (gaz et vapeurs) qui ont accompa- gne sa venue au Jour. soit dt tata té arts L. BOUVEAULT. — LA SYNTHÈSE DES ALCALOIDES NATURELS 781 IL est naturel que ces actions métamorphiques aient été d'autant plus puissantes que la période considérée était plus rapprochée de celle durant laquelle la Terre se trouvait à l’état incandescent, car, depuis, les émanations ont dû perdre peu à peu de leur importance. La croûte terrestre, durant sa formation, devait se rompre à de fréquentes re- prises, permettant ainsi l'injection des roches fon- dues et des vapeurs qui les accompagnaient dans les parties déjà solidifiées. Ge fait explique com- ment, lorsque les premières assises franchement sédimentaires se sont formées, elles ont pu être métamorphisées successivement et, pour ainsi dire, au fur et à mesure de leur dépôt. On a pu reconnaitre par les discordances de stra- tification que peu avant le dépôt des assises ren- fermant la faune dite primordiale, il y avait eu des soulèvements importants du sol. Il n’y a aucune raison pour qu'une injection de roches granitiques ou granulitiques dans les dépôts sédimentaires an- térieurs, n'ait pas correspondu à ce mouvement, ce qui expliquerait pourquoi les gneiss et les schistes cristallins sont si rapprochés des assises cam- briennes. L'étude pétrographique des as azoïques ‘antérieures au Cambrien aboutit done à cette conclusion qu'elles ne se présentent pas à nous avec la structure qu'elles avaient lors de leur for- mation, mais qu'elles ont pu se déposer dans les ises mêmes conditions que celles de toutes les autres assises sédimentaires et par cela même renfermer des formes organiques. Ce n’est que par suite d’un mélamorphisme intense qu'elles ont changé de nature. Les travaux récents de Paléontologie et de Pétrographie concourent donc à nous faire croire qu'il a pu exister, avant la faune que nous avons considérée comme primordiale, une faune plus ancienne, ainsi que le pensaient à priori les évolutionnistes. Mais rien ne nous permet encore de nous faire une idée de ce que pourraient avoir été ces formes tout à fait primitives. Cette faune, d’ailleurs, aurait pu commencer à paraitre longtemps avant l’époque cambrienne, car l’épais- seur des gneiss, telle que nous l’évaluons, est consi- dérable (et peut-être celle que nous leur attribuons n'est-elle qu'une faible partie de leur épaisseur réelle) et peut correspondre à une longue série de dépôts !. Ces conclusions reculent de beaucoup la date de l'apparition de la vie; mais de plus, elles nous conduisent à la conviction que jamais on ne trouvera la faune vraiment primordiale et encore moins l'archétype d’où seraient descendues toutes les formes organiques qui couvrent la Terre. J. Bergeron, Docteur ès sciences. LA SYNTHÈSE DES ALCALOIDES NATURELS Les alcaloïdes naturels sont des composés orga- niques azotés, extraits des sucs végétaux ou des tissus animaux, qui s'unissent aux acides, à la fa- con de l’ammoniaque, pour donner des sels. I. — PREMIÈRES RECHERCHES Séguin et Derosne en 1803, Sertuerner en 1804 obtinrent les premiers alcaloïdes connus, qu'ils retirèrent de l’opium ; mais ils n’attachèrent pas à celte découverte toute l'importance qu’elle méri- tait. On admettait à cette époque que la Nature ne pouvail produire que des composés neutres ou acides, et l’on attribua l’alcalinité des nouveaux composés à l’action ou à la présence des réactifs employés pour les extraire. Cest seulement en 1817 que Sertuerner, rompant nettement en vi- sière au préjugé, démontra, dans un mémoire cé- lèbre, l’alcalinité propre de la morphine. A partir de ce moment les découvertes se suc- cèdent rapidement. Pelletier et Caventou extraient en 1818 la strychnine de la fève de Saint-Ignace ; en 1820, ils retirent la quinine et, en 1821, la cin- chonine de l'écorce de quinquina. Ilest nécessaire de faire remarquer l'importance énorme, au point de vue médical, qu'eurent ces découvertes, principalement celle de la quinine. Quand les plantes médicinales sont employées à l’état d'extraits, aqueux ou alcooliques, d’infu- sions ou de macérations, de teintures et alcoola- tures, on fait absorber au malade, outre la ou les substances actives, une quantité infiniment plus grande de substances sans action déterminée; de plus, les rapports pondéraux entre ces deux sortes 1 On a distingué dans les gneiss deux horizons : les gneiss gris à la base et les gneiss granulitiques à la partie supé- rieure. Certains auteurs ont pensé que les roches de l'horizon inférieur représentaient la première croûte qui se serait formée à la surface de la Terre, lorsqu'elle commenca à se solidifier. Mais il y a tous les passages entre ces variétés de gneiss, et le processus de leur formation semble bien avoir été le même. D’autre part, il est bien invraisemblable que les dislocations de l’écorce terrestre aient amené au jour les plus anciennes roches qui s2 soient formées ct, par suité, les plus profondes. 188 L. BOUVEAULT. -- LA SYNTHÈSE DES ALCALOIDES NATURELS de substances sont essentiellement variables et dépendent d’une foule de circonstances telles que le lieu et la date de la cueillette ou l'habileté du droguiste. Au lieu de cela l’alcaloïde, une fois ob- tenu à l’état de pureté et dûment étudié au point de vue physiologique et thérapeutique, est tou- jours comparable à lui-même et ne trompera ja- mais celui qui l’'emploie. Il serait cependant regrettable que l'usage trop exclusif des alcaloïdes fit abandonner complète- ment les préparations de l’ancienne pharmacopée, dont certaines sont encore très précieuses. Les extraits des plantes sont des mélanges très com- plexes dont l’alcaloïde connu et généralement employé, forme la portion la plus importante, mais non pas la seule active; il se trouve parfois à côté de lui d’autres composés dont l’activité extrème compense la faible proportion. Il peut même arri- ver qu'un extrait, quicontient plusieurs alealoïdes, ait une action très différente de celle du plus ré- pandu d’entre eux; c’est le cas de l'extrait thé- baïque et de la morphine. Les tissuset les liquidesdes animaux contiennent également, à l’état normal, des alcaloïdes. Leur existence fut niée pendant très longtemps. Liebig professait que les organismes animaux ne pou- vaient donner naissance qu'à des acides ou à des corps neutres. Aussi rangeait-il dans la classe des amides des composés tels que la xanthine, la sar- cine, la créatine, — ce qui le conduisait à faire un nitrile de la créatinine, qui est une base énergique (sa solution bleuit le tournesol), sous prétexte qu'elle se forme en partant de la créatine par perte d'une molécule d’eau. Ces idées sont abandonnées aujourd'hui, prin- cipalement grâce aux travaux de M. Armand Gau- tier. Ce savant a montré que les muscles des ani- maux contiennent à l’état normal, outre de la créatine et de la créatinine, des bases voisines de cette dernière, qu'il a nommées leucomaïnes, el dont certaines possèdent une toxicité très nette. On peut aussi considérer comme alcaloïdes ani- maux cerlaines bases organiques, produites par le dédoublement ou la destruction de principes contenus dans l'organisme. Nous citerons : la tau- rine, extraite, en 1826, de la bile par Gemlin; la choline, produit de dédoublement des acides bi- liaires, isolée par Strecker, en 1845, qu'on a trou- vée très voisine de à la névrine, obtenue en 1865 par Liebreich, dans le dédoublement de lalécithine du cerveau. Enfin les microbes produisent, aux dépens de leurs bouillons de culture ou des tissus sur les- quels ils vivent, des alcaloïdes, en général extré- mement loxiques, auxquels on a donné le nom générique de toxines. Les mieux connues d’entre elles sont les plomaïnes, ou alcaloïdes de la putré- faction, qui ont été découvertes simultanément par MM. Armand Gautier et François Selmi et qui ont élé ensuite étudiées par MM. Gautier et Etard et par M. Brieger. Tandis que l'étude des alcaloïdes végétaux est très avancée et a rendu à la thérapeutique de nom- breux services, celle des toxines est encore dans l'enfance. Mais cette étude doit marcher parallèle- ment avec la bactériologie, et l'on peut déjà pré- dire que, dans un avenir prochain, elle formera un chapitre important de la chimie biologique et sera pour la thérapeutique un précieux auxiliaire. Quand une espèce chimique a été préparée à l’état de pureté et analysée, que ses propriétés ont été déterminées, tant au point de vue des cons- tantes physiques que des réactions chimiques, son étude n’est pas encore terminée. Il faut encore établir sa constitution chimique, c'est-à-dire démêler de quelle manière sont unis entre eux les atomes qui constituent sa molécule. Le but final vers le- quel tendent toutes ces études si délicates est de reproduire à l’aide des matériaux dont nous dis- posons et des méthodes de travail de la chimie, l'édifice que la Nature a construit, en un mot, de réaliser la synthèse:totale du composé, en partant, soit des éléments, soit de composés dont la syn- thèse a déjà été faite, Les composés existant dans la malière vivante, ou provenant de sa destruction par les agents phy- siques et chimiques, ont été synthétisés pour la plupart au cours des travaux célèbres de Liebig et Wôbhler, de Berthelot, de Würtz, de Baeyer et de ceux, tout récents, d'Émile Fischer ; cependant la classe des alealoïdes naturels a jusqu'ici résisté presque en entier; le grand nombre des atomes contenus dans les molécules des corps, la com- plexité de leurs fonctions chimiques rendant la tâche extrêmement ardue. Un certain nombre de succès et beaucoup de résultats intéressants ont élé cependant obtenus; c’est leur histoire que nous allons retracer rapi- dement. II. — SYNTHÈSES PARTIELLES. Il arrive parfois qu’en faisant subir à un com- posé, qui nous est fourni par la Nature, une suite de transformations chimiques plus ou moins com- pliquées, on obtient un corps identique à un autre produit naturel; on dit alors qu'on a fait la syn- thèse partielle de ce dernier. Le jour où l’on réa- lise la synthèse totale du premier, on transforme la synthèse partielle du second en une synthèse totale. Ainsi l’aniline a été obtenue pour la première fois dans la distillation de l'indigo avec de la chaux; L. BOUVEAULT. — LA SYNTHÈSE DES ALCALOIDES NATURELS 789 on a fait plus tard une synthèse partielle de l'ani- line en la préparant au moyen de la benzine du goudron de houille; cette synthèse est devenue totale quand M. Berthelot à fait la synthèse de la benzine à l’aide de l’acétylène. Nous citerons parmi les synthèses partielles d’alcaloïdes celles qui nous paraissent les plus in- téressantes : 4° Celle de la créatinine réalisée par Liebig en traitant la créatine par l’acide chlorhydrique con- centré et bouillant. Cette synthèse est devenue to- tale depuis que Volhard a obtenu la créatine en combinant ensemble la sarcosine et la cyanamide. La synthèse de la sarcosine avait été faite, au préa- lable, au moyen de l'acide monochloracétique et de la méthylamine. 2 Celle de la codéine au moyen dela morphine. M. Grimeux : démontra par cette synthèse que la codéine est l’éther méthylique de la morphine et qu'ily a entre ces deux bases le même rapport qu'entre le phénol CfH°—OH et l’anisol CFH—OCH*. — Ce procédé a été fécond entre les mains de M. Grimaux; il a reconnu que le même rapport avait encore lieu entre la cupréine et la quinine, ce qui lui a permis de réaliser, en commun avec M. Arnaud, la synthèse de la quinine. Quand on a dédoublé au moyen d'un réactif un alcaloïde en un certain nombre d’autres composés et qu'on peut recombiner ces composés en repro- duisant l’alcaloïde primitif, on en fait une syn- thèse partielle. L'atropine se dédouble en une base nouvelle, la tropine et en acide tropique; M. Rugheimer a pu recombiner ces deux corps et reproduire l’atropine. On a extrait de la jusquiame une base nommée l'hyosciamine, qui ne diffère de l’atropine que par son pouvoir rotatoire et ses propriétés physiques et qui se dédouble également en acide tropique et tropine. M. Ladenburg a réussi à transformer l’a- tropine en hyosciamine en la maintenant plusieurs heures à la température de 120°. Il travaille sans relâche à la synthèse de la tropine, ce qui lui per- mettrait de rendre lotales les deux synthèses par- tielles de l’atropine et de l'hyoseiamine. Les synthèses partielles peuvent avoir parfois des applications très intéressantes, témoin celle de la cocaïne. Cet alcaloïde est actuellement très répandu comme anesthésique local; c’est l’éther méthylique d’un acide aisément dédoudable en acide benzoïque et une base nouvelle, l'ecgonine. On a réussi, en traitant l'ecgonine par le chlorure de benzoyle et éthérifiant la benzoylecgonine ainsi obtenue, au moyen de l’alcool méthylique et de l'acide chlorhydrique sec, à reproduire la cocaïne. Or, la cocaïne est accompagnée, dans la feuille de coca, d’un grand nombre d’alcaloïdes d’une constitulion analogue à la sienne, mais qui ne possèdent pas ses propriétés thérapeutiques. Il se trouve que tous ces alcaloïdes sont dédoublables en ecgonine, alcool méthylique et un acide acoma- tique, qui n’est pas l'acide benzoïque. On décom- pose le mélange des bases, on en retire toute l’ec- gonine, et on la transforme ensuite en cocaïne, comme nous l'avons indiqué. On arrive, gràce à cette synthèse partielle, à extraire de la feuille de coca beaucoup plus de cocaïne qu’elle n’en con- tient, résultat qui peut paraitre paradoxal. IIT —. SYNTHÈSES TOTALES. Les synthèses totales d’alcaloïdes naturels sont aujourd'hui fort rares. Nous avons déjà cité celles de la créatine et de la créatinine. La muscarine a été extraite par Schmiedeberg de la fausse-oronge ; cet auteur a pu réaliser sa synthèse en oxydant la névrine par lacide ni- trique. La bétaïne a été retirée en 1866 par Schiller de la mélasse de betterave. Liebreich a pu la repro- duire en 1869 en traitant la triméthylamine par l'acide monochloracétique. On l’obtient également au moyen du glycocolle et de l'iodure de méthyle. La xanthine est un alcaloïde qui a été trouvé dans la chair musculaire el dans l'urine des ani- maux; elle aété reproduite par M. Armand Gautier en chauffant ensemble en tube scellé de l’acide cyanhydrique et un excès d'acide acétique élendu. La conicine, alcaloïde volatil et non oxygéné, extrait en 1827 par Giesecke de la grande ciguë (Conium maculatum), n'a pas par elle-même une grande importance, mais les travaux de M. Hof- mann et sa synthèse par M. Ladenburg ont appelé sur elle l'attention des chimistes. En distillant la conicine avec la poudre de zine, M. Hofmann remarqua qu'elle perdait six atomes d'hydrogène et se transformait en une nouvelle base, la conyrine, qu'il reconput identique à l’a-pro- pylpyridine, ce qui l'induit à admettre que la co- nicine était l'x-propylpipéridine : CH caen / CS HU7 Az = 6H + b | CHLANICÆ CH = CHE = CH A7 Conicine œ — Propylpyridine Il annonça même avoir reproduit la conicine au moyen de la conyrine et de l'acide iodhydrique et réalisa ainsi une synthèse partielle de l’alealoïde naturel. Peu de temps après, M. Ladenburg découvrit un procédé permettant d'obtenir des dérivés a4-substi- tués de la pyridine, et sa méthode d’hydrogénation 7190 L. BOUVEAULT. — LA SYNTHÈSE DES ALCALOIDES NATURELS si précieuse pour transformer les composés pyri- diques en dérivés correspondants de la pipéridine. En chauffant en tube scellé l’4 — picoline avec de paraldéhyde, polymère de l’aldéhyde ordinaire, il parvint à préparer une nouvelle base : Pa — al- lylpyridine : san CH° — CHO — œ — Picoline CH AIN CH on CH = H20 cal” Ne _ cx = cu — em NA Aldéhyde Az a — Allylpyridine En hydrogénant cette base par le sodium et l’al- cool absolu bouillant, il lui fit fixer huit atomes d'hydrogène et la transforma en 4 — propylpipé- * dine : CH DE< 10. Conductibi- lité électrique à 870° : 3,1. La conductibilité électrique G peut se calculer en fonetion de la température au moyen de la re- lalion : C, = 3,1 [A + 0,0022 (£ — 8100). Pour un courant d’une intensité de 4.200 am- pères, la masse du bain, nécessaire el suffisante, est représentée par un poids de 20 kilogrammes de matière. À 800°, sa fluidité est assez grande pour que l'électrolyse s'opère normalement ; sa volatilité assez faible pour qu'il ne se perde, en 24 heures, pas plus des -# de sa masse totale. RÉGÉNÉRATION DU BAIN. — Au passage du courant électrique, le fluorure d'aluminium se décompose ; l'aluminium se porte au pôle négatif, et en même temps sont mis en liberté, au pôle positif, du fluor qui se dégage dans l'atmosphère et du fluorure de sodium qui reste dans le bain. Si l'alimentation s’opérait avec de la eryolithe seule (fluorure double d'aluminium et de sodium), le bain s’enrichirait de fluorure de sodium et l’on serait vite arrêté à cause de l’excès de ce sel, ou bien l’on produirait du sodium au lieu d'aluminium. On peut éviter cet inconvénient de deux façons. (x) Régénération du bain par le fluorure d'aluminium. — Cette méthode était tout indiquée. Il suffit, en effet, de verser dans le bain, au fur et à mesure de la décomposition du fluorure d'aluminium, des quantités équivalentes de ce sel qui se combinent aussitôt avec le fluorure de sodium devenu libre, pour maintenirrigoureusement constante, pendant toute ladurée de l'opération,la composition du bain. () Régénération du bain par l'oxyde d'aluminium ou alumine. — Qu'arrive-t-il si, au lieu de fluorure d'aluminium, on ajoute dans le bain de l’alumine, à l’état de poudre fine, en ayant soin de verser cet oxyde au voisinage de l’électrode positive ? Première hypothèse. — L’alumine se dissout dans le fluorure de sodium libre ou dans la masse du bain et s’électrolyse en même temps que le fluo- rure d'aluminium. Elle peut former également , avec ce dernier sel, un oxyfluorure qui se dissou- drait dans le fluorure de sodium en excès ou dans la cryolithe qui est toute formée dans le bain. Les résultats de l’expérience ne seraient pas conformes à cette première hypothèse. Seconde hypothèse. — Au contact du fluor, qui est mis en liberté à l’électrode positive, l’alumine se transforme en fluorure d'aluminium : A1203 + 3F1 = ALFI + OS. quise combinerail avec le fluorure de sodium libre. C’est l'hypothèse que nous avons adoptée et qui du reste peut se vérifier par l'expérience. En fait, comme le fluor qui se dégage n’est pas complète- ment absorbé par l’alumine, il est nécessaire d’a- jouter, en même temps que cetoxyde, des propor- tions de fluorure d'aluminium équivalentes au fluor perdu. Voici la formule du mélange de sels employé à l'usine de Creil pour l'alimentation, et avec lequel on obtient de très bons résultats : Alumine en partie desséchée: 6 (AI O3, 2 HO) Fluorure d'aluminium et de sodium Al? F1, 3 Na F1 Oxyfluorure d'aluminium Al F15, 3 A2 O5 814 A. MINET. — L'ÉLECTROMÉTALLURGIE DE L'ALUMINIUM Pendant tout le temps de l'expérience, le niveau du bain est maintenu constant par l'addition d’un mélange de chlorure de sodium et de fluorure double d'aluminium etde sodium aux proportions indiquées plus haut. Il NATURE ET DIMENSIONS DU VASE QUI CONTIENT L’ÉLEC- TROLYTE ; NATURE ET DIMENSION DES ÉLECTRODES. — Un électrolyte étant donné, il fallait établir un vase et des électrodes qui salisfissent à certaines conditions. La cuve ou vase qui renferme l’électrolyte doit être inattaquable par les sels en fusion; outre qu'une détérioration nuirait à la constance du bainen y apportant des éléments étrangers, la cuve de ce fait serait rapidement mise hors d'usage. Or, aucune substance, hormis le charbon, ne ré- siste à l’action corrosive des fluorures fondus. Le problème, ainsi posé, a été résolu de deux façons. On a adopté, en premier lieu, une euve métal- lique (fonte) ayant la forme d’un parallélipipède, | dont les arêtes présentaient une longueur variant entre 20 et 40 centimètres, suivant l'intensité du courant lancé dans l'électrolyte, intensité qui dans les premières expériences a varié entre 89 el 1.500 ampères, Cette cuve, quelle que soit le métal quila consti- tue, serait invariablement attaquée par le bain, sans l’artifice physique que représente la figure 1. La cuve V est, revèlue d’une garniture en ma- connerie MM qui la protège contre l’action des gaz chauds qui l’enveloppent. Les électrodes (A, positive ou anode ; D, néga- tive ou cathode) sont constituées de charbon ag- gloméré dont la composition est analogue à celle des charbons à lumière. Immédiatement sous la cathode, est disposé un petit creuset «, qui reçoit le métal fondu au fur et à mesure que celui-ci se dépose. La cuve est établie en dérivation sur l’électrode négalive, par l'intermédiaire d’une résistance R, dont la valeur est calculée de façon qu'il ne s’é- chappe par la cuve que les -& du courant total. 100 Par suite les # du courant total, qui traversent la cathode , agissent utilement pour l'électro- lyse. Grâce à cet artifice, les parois intérieures de la cuve sont continuellement recouvertes d’une couche d’a- luminium très mince, qui les protège contre l’action cor- rosive du bain; en fait, l'aluminium reçu dans le creuset ce ne renferme que des proportions très faibles du métal de la cuve, proportions variant entre nets. À La figure 2 représente une autre disposition. LIL LL LL] NS LIL, ÉÉÉRRRRRKEE LLLALLI TT PL TI TI LT 222 SS SNJYJY,SS OZLLLLLILLLIL > L’anode occupe le milieu du bain ; la cuve elle- même sert de cathode ; ellea la forme d'un parallé- lipipède et elle est en fonte; un trou de coulée (vers {) est ménagé à la partie inférieure du vase, par lequel s'écoule le métal. Lorsqu'on désire produire de l'aluminium pur, la cuve recoit intérieurement une garniture de charbon aggloméré CC. Si au contraire l'aluminium doit entrer uilérieurement dans un alliage dont le mélal de la cuve est une des parties constituantes de cet alliage, la garniture CG peut être suppri- mée. IT MARCHE GÉNÉRALE DE L'ÉLECTROLYSE PAR FUSION IGNÉE. — Le tableau suivant (lableau 1) témoigne de la régularité de l'opération : A. MINET. — L'ÉLECTROMÉTALLURGIE DE L'ALUMINIUM 815 TABLEAU 4. DIFFÉRENCE INTENSITÉ|DE POTENTIEL| POIDS DATE DURÉE DU AUX DU MÉTAL COURANT | ÉLECTRODES DÉPOSÉE ae | | | | 1887 heures| amp. volts gr HÉTRAL ---e 45 89 EuE 200 BRIE ee 12 124 Hal 320 Mimet. 1% 90 4.0 260 PE EEE 24 113 4.5 570 30 octobre...... 12 200 4.25 520 26 novembre 12 142 415 380 10 décembre 12 160 5.75 420 1888 97 janvier...... 12 110 5e 270 & février...... 13 180 6.0 500 Damars:.-. =. A2 255 Lab) 600 HART -- se 12 360 6.0 1009 23 juillet....... 22 650 5.8 2430 24 juillet....... 22 650 5.8 2559 20 septembre 20 700 5.6 2600 10 octobre ..... 20 700 5.6 2600 20 novembre...| 20 800 5.6 2800 1890 HANÉÉVELCrN. - 7 1200 6.35 1680 DÉTMATSR eeeee 1E4//2)M330 6.00 1850 10 décembre ...| 22 1500 4.55 6500 On remarque, en effel, que bien que l'intensité du courant ait varié dans de grandes proportions, puisqu'elle partait d’un minimum égal à 89 ampè- res et atteignait un maximum de 1500 ampères, abstraction faite du courant dérivé sur la cuve, la différence de potentiel aux électrodes restait sen- siblement constante. Ce résullat a été obtenu en augmentant la sur- face des électrodes proportionnellement à l’inten- sité, c'est-à-dire en maintenant constante la den- sité! du courant. Et, remarque importante, chaque fois qu'on se départait de cette précaution, la marche du phé- nomène devenait irrégulière et ne pouvait être exprimée par aucune expression mathématique. Le point qui correspond au 10 décembre 1890 a été obtenu avec une cuve, garnie de charbon inté- rieurement etservant de cathode (fig. 2); les autres chiffres d'expérience se rapportent à une cuve établie en dérivation (fig. 1). Expression mathématique du phénomène électrolytique en fonction des constantes du courant. Lorsqu'on opère l'électrolyse d’un sel en dissolution avec des inten- silés de courant aux électrodes croissantes, et que la résistance de l’électrolyte reste invariable, les constantes électriques satisfont à l'équation : (4) ee + pl es n’est autre chose que la différence de potentiel aux électrodes, e la résistance de l’électrolyte, : l'intensité du courant le centimètre carré. 1 On entend par densité de couran qui traverse l’unité de surface : REVUE GÉNÉRALE, 1891, e la force électromotrice de décomposition, I l'intensité du courant. L'expérience démontre que l’électrolyse par fu- sion ignée suit la même loi. Pour tous les points de l'expérience, en effet, qui correspondent à des densités de courant inférieures à 2,5 ampères pour la cathode et à À ampère pour l’anode, l’ex- pression (1) s'applique rigoureusement. FORCE ÉLECTROMOTRICE MINIMA €; RÉTISTANCE 9 DE L'ÉLECTROLYTE. — On sait que la force électromo- trice minima d'un électrolyte est proportionnelle à sa chaleur de formation «. La chaleur de formation du florure d'aluminium à la température où s'opère l’électrolyse (810° à 980°) n’est pas connue, pas plus que celle des com- posés de fer et de silicium qui souillent parfois le bain. Ces diverses quantités ont pu être déterminées par l'expérience, ainsi que la résistance de l’élec- trolyte qui y correspond. Voici les résultats trouvés : les termes 2etpde l'expression (1) sont remplacés par leur valeur : l € —— mesurée calculée Ainp Volts Sels de fer 1 1.45 1725 147.5 2.20 DA (e — 0.75 + 0.0093 1). 225 2.85 2.85 Sels de silicium | 65 1.95 195 137.5 2.65 2.61 (e = 1.31 00089 D).Ù 217.5 3.35 3.31 Sels d'aluminium 100 3.00 3.08 130 3.28 3.25 (e = 2.15 + 0.0085 I).[ 187.5 3,175 3.15 Ces chiffres conduisent directement à cetle con- clusion intéressante qu'on peut arriver, par une suite d’électrolyses fraclionnées, à obtenir dans le même bac et avec une alimentation rationnelle toute la série des alliages de ferro-silicium, sili- cium-aluminium employés dans l’industrie, el, à la fin de l’opération, de l'aluminium pur. C'est du moins ce qui à été réalisé à Creil !. Poids du métal produit en fonction des quantités d’elec- ricité (10) et (TH). — Faisons remarquer que (10) représente la quantité d'électricité qui traverse l'électrolyte, exprimée en Coulombs seconde). ([ H) représentera la même quantité exprimée en ampères-heure. On a évidemment : ampêres- 16 (2) IH = —, 3600 le poids d'aluminium mis en liberté par le 1 MM. Bernard frères, qui étaient propriétaires de lusine de Creil, installent en ce moment à Saint-Michel, près Mo- dane, en Savoie, une station électrique où ces méthodes se- ront également appliquées. DIRE: 816 A. MINET. L'ELECTROMÉTALLURGIE DE L'ALUMINIUM passage d'un Coulomb, autrement dit l'équivalent électrochimique de l'aluminium, correspondant aux sesquisels, étant égal à 0,095 milligrammes. La quantité du métal déposé pendant un ampère-heure (1 H = 1) se calcule ainsi : (3) P — 0,095 X 3600 — 0 gr 34. D'après les poids du métal déposé, inscrits au tableau 1, dans les expériences effectuées à Creil, de cette dernière valeur, on n'aurail eu que les # soit 0£,204 d'aluminium par ampère-heure. Dans certaines opérations on a pu atteindre ce- pendant un rendement de # ou mème de #; mais alors on avait abaissé la différence de potentiel correspondant à une dépense d'énergie dans les bains égale à un cheval-heure, s’exprimera ainsi : P P; Ogr. 272(1H) X 9,809 X 75 Li] EE — F Wir € X (1H) d'où 200 (7) + PES J On arrive à celte conclusion que le poids du métal produit pour une dépense dans les bains d’une quantité d'énergie équivalente à un cheval-heure, est indépendante de la quantité d'électricité qui traverse le bain; sa valeur esl inversement propor- TasLeau 2 COMPOSITION DC MÉTAL —_—— a Silicium DU Aluminium \Coule. }Martele. \Coulé. (Martelé. {Coulé. IMartele. [Laminé. {Coulé. IMartelé. {Coulé. IMartelé. \Coulé. IMartelé. {Laminé 0.32 Laminé \Coulé. {Laminé. \Coulé. }Laminé. {Coulé. )Martelé, NATURE TRAVAIL écroui, (Laminé recuit à 400° écroui. Laminé écroui. Laminé écroui. RÉSISTANCE A LA RUPTURE EN KILOGR. PAR MILLIM. CARRÉ ALLONGEMENT 12 15 FE CE CS de CO O0 Or He 20 © O2 Ce © e 1 © Ci © San = 9 © 2 D OF CS DE = 19 19 ke 10 D DE 19 = Ge = 22 = © IN IN ee © =} SNS MOTS RNTIE É: DS DEEE ENRR ee ERLSRLERr eo & de 00 = Qt miOS DOC: ©: DIS o-10: 119 _ FA Eu aux électrodes jusqu'à ce qu'elle atteignit une valeur de 4 volts. C’est le rendement de 80 ‘/, qu'il faut adopter pour l'avenir. Il en résulte que le poids d'aluminium P, pro- duit industriellement pourra se calculer en fonction de la quantité (1H) au moyen de la formule : (4) P, = 0 gr. 34 X 0.8 X (EH) = 0 gr. 272 (IH) Poins DU MÉTAL PRODUIT EN FONCTION DE LA QUAN- TITÉ D'ÉNERGIE DÉPENSÉE DANS LE BAIN. — L'unilé pratique d'énergie est le cheval-heure. Pour une différence de potentiel € lrodes, on aura, comme dépense d'énergie dans le bain, exprimée en chevaux-heure, l'équation aux élec- connue ;: : (1H 5 ARR A ETS ë Wen g8u9€ x 15 et par suite la quantité de métal produit P, tionnelle à la différence de potentiel aux électrodes. Si l’on marche normalement avec une différence | de potentiel aux électrodes de 4 volts, le poids du ! métal correspondant à une dépense d’un cheval- heure sera d'environ 50 grammes. La force motrice totale nécessaire à la produc- tion d’un kilogramme d'aluminium descendrait à vingt-huit chevaux, en lenant compte des pertes subies par le moteur électrique et la transmis- sion. La dépense nécessitée par cette force motrice n'est pas très élevée, comme on le voit, même dans le cas où la machine dynamo-électrique serait actionnée par une machine à vapeur. Elle peut être réduite considérablement par l'emploi des forces naturelles comme source d’é- nergie, ainsi que cela aura lieu à Saint-Michel, où la force disponible peut atteindre le chiffre de trente mille chevaux. P.-P. DEHÉRAIN. — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 517 IV L'ALUMINIUM ÉLECTROLYTIQUE PUR ET ALLIÉ, — L’alu- minium qu'on obtient par l’électrolyse peut attein- dre à un degré de pureté très élevé. C’est ainsi qu'on a produit à Creil des lingots dont la teneur en aluminium dépassait 99,5 °/,. Cependant l'alu- minium à 98 (/, est plus recherché dans l'industrie ; il se travaille à froid aussi bien que l’aluminium pur; il fond à la même température que ce der- nier (625°) et présente plus de résistance. Les élé- ments qui constituent, suivant l'expression cou- rante, les impuretés de l'aluminium, sont : le fer et le silicium. Nous avons pensé que le fer et le sili- cium pouvaient former avec l'aluminium de véri- tables alliages dont l'étude présenterait quelque intérêt. Le tableau 2 renferme les résullalts d’une première série d'expériences. IL y à lieu de faire quelques observations sur les | chiffres qui précèdent : 1° La présence du silicium dans l'aluminium, contrairement aux idées généralement répandues depuis les recherches d’Henry Sainte-Claire-Deville, ne nuit pas aux qualités mécaniques de ce métal. Les alliages de silicium-aluminium présentent, au contraire, jusqu'à uue leneur en silicium voisine de 13°/,, une résistance supérieure à celle de lalu- minium pur. La présence du fer avec des propor- tions dépassant 1,5 ?/, devient nuisible. L’alliage type du silicium-aluminium aurait la composition suivan(e : aluminium 89, fer 1, silicium 10. Il pour- rait atteindre, par le travail, à une résistance de 25 kilogrammes par millimètre carré el conserver un allongement variant entre 12 et 15 °/,. Un tel alliage s’appliquera à la construction mécanique à la place de l'acier doux dans une foule de cas spéciaux ; il s'imposera toutes les fois que l’appa- reil à construire devra présenter avant tout une grande légèreté. 2° Les alliages du silicium aluminium, pour les- quels la teneur en fer n’excède pas 0,75 °/,, offrent une structure fibreuse semblable à celle de l’alu- minium pur; de plus ils sont très homogènes et ne présentent aucune liguation en fondant. Ces pro- priélés caractéristiques résultent sans doute de ce que le silicium a le mème poids atomique, la même densité el par suite la même volume atomique que l'aluminium, el qu'il peut, par conséquent, s’intro- duire dans la masse du métal sans changer sa structure moléculaire. L'aluminium forme également avec le bore et les métaux usuels des alliages qui présentent un grand intérêt, industriellement parlant, et qui feront l’objet d'un article spécial. Adolphe Minet, Ingénieur, Directeur de l'usine d'aluminium de Saint-Michel (Savoie). REVUE ANNUELLE D’AGRONOMIE I. — PERTES ET GAINS D'AZOTE DES TERRES ARABLES Fivation d'azote par les végétaux et les sols. — De- puis que Boussingault à montré, il y a plus de trente ans, que l'abondance de la matière végétale élaborée par la plupart des plantes de grande cul- ture était étroitement liée à la proportion d'azote nitrique introduite dans le sol, qu'il eût ainsi établi que l'azote est le principal facteur de la fertilité, les agronomes n'ont cessé de chercher | comment l’azote gazeux de l’atmosphère interve- nait dans les phénomènes de la végétation. Ilsemble au premier abord que si les trois dix- | millièmes d'acide carbonique contenus dans l'air suffisent à fournir aux végétaux la masse énorme de carbone qu ils renferment, les quantités prodi- gieuses d'azote de l'atmosphère doivent également être utilisées à la formation des proportions rela- tivement restreintes des matières quaternaires des | végétaux. C'est là l'opinion que professa M. Georges Ville pendant bien des années. Il aflirmait, avec expé- riences à l'appui, que certaines plantes s’em- parent de l’azote atmosphérique. Ces expériences toutefois étaient irrégulières, réussissant, échouant sans qu'on sût à quelles causes attribuer les échecs ou les succès. M. Boussingault en France, MM. Lawes el Gilbert en Angleterre avaient tou- jours échoué dans les expériences de vérification qu'ils avaient disposées. M. Georges Ville toutefois maintenail son opi- nion avec fermeté, assurant que si, en se plaçant dans les conditions où avaient opéré ses contradie- teurs, on ne pouvait pas constater la fixation de l’azote atmosphérique, il en était tout autrement si l'on commencait par donner au sol une certaine dose d'engrais azoté, notamment de nitrate de po - tasse; avec l’aide d’unefaible quantité decet engrais très efficace, { gramme par exemple pour une di- zaine de kilogrammes de sable, on donnait aux plantes semées dans un sol stérile une vigueur qu'elles n’atleignent jamais quand on ne leur ap- porte aucune aide et il ajoutait que ces plantes devenues vigoureuses acquerraient dès lors la 818 P.-P. DEHÉRAIN. — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE propriété de fixer l'azote atmosphérique, de l’em- ployer à l’élaboralion de leurs tissus, tellement qu'à la récolte on trouvait dans ces végétaux infi- niment plus d'azote que n’en avaient apporté la graine el l’engrais. On avait reconnu d'autre part que des terres maintenues en prairies naturelles présentent une richesse en azole considérable ; non seulement on savail que depuis des siècles les prairies hautes de montagne qui ne reçoivent aucun engrais se cou- vrent d'herbes qui servent d'aliment au bétail dont les produits descendent dansla plaine ,et que malgré cette exportation constante d'azote, ces prairies présentent des richesses exceptionnelles de 5, 7 et 9 grammes par kilo; mais on avait en outre à Rothamsted et à Grignon montré par des dosa- ges successifs d'azote que des terres maintenues en prairies de graminées s’enrichissent d'azote chaque année, malgré les des foins exportés. IL semblait done qu'effectivement l'azote de l'air intervient dans la végétation ; mais on ignorait profondément le mécanisme de sa fixation quand, en 1884, M. Berthelot décou- vrit que les sols pauvres en matières azotées s’enrichissent en azote par une simple exposition à l'air, tant qu'ils n'ont pas été stérilisés par l’action du feu : d'où l'idée que la fixation de l'azote serait due à l’action d'un micro-organisme. Cette mémorable découverte, mème appuyée par le grand nom de son auteur, ne fut pas acceptée sans hésitation. L’azote est tellement inerte, indif- férent, il faut le soumeltre à des actions si éner- prélèvements giques pour n’en engager que des traces en com- binaison, que l’étonnement était profond de le voir obéir à des bactéries, quand il résiste aux forces puissantes que nous mettons en jeu dans le laboratoire. On était donc encore quelque peu indécis quand nous arriva d'Allemagne la nouvelle que MM. Hellriegel et Wilfarth venaient trouver, dans l'étude des légumineuses, la Jus- lification de l'opinion toujours soutenue par M. Georges Ville, en même lLemps qu'un solide appui aux idées de M. Berthelot. Lorsqu'on arrache avec précaution les racines du trèfle, de la luzerne, des pois, des haricots, des lupins, on y découvre aisément de pelits tubercules irrégulièrement distribués. Si l'on écrase un de ces tubercules sur une lamelle de verre pour l’examiner au microscope, on voit de apparaitre de nombreux organismes mobiles, des bactéries, qui sont l'agent actif de la fixation de l’azote atmosphérique. Si, en effet, on cultive des légumineuses dans un sol privé de germes vivants et simplement addilionnés de matières minérales, elles y végè- tent misérablement et leurs racines sont dépour- vues de nodosités; mais (out change comme par enchantement si l’on arrose ce sol stérile avec de l'eau dans laquelle on a délayé de la terre qui a porté des légumineuses; cette eau renferme des germes qui se développent sur les racines, provo= quent la formation des nodosités, leur peuplement, et la plante devient vigoureuse, se couvre de fleurs, puis de fruits, comme si, au lieu d’être enra- cinée dans un sol stérile, elle végétait sur une terre fertile. L'eau de lavage qui a déterminé cette transformation ne l’a produite que grâce aux organismes qu’elle renfermait, car si on la fait bouillir, elle perd toute vertu. Au reste, M. Bréal a donné au Muséum, il y a deux ans, une preuve décisive de l'intervention des micro-organismes dans la fixation de l'azote par les légumineuses; pour réaliser sa remarquable expérience, il emprunte aux médecins le mode opératoire qu'ils suivent dans la vaccination : il pique avec une aiguille une nodosilé bien formée sur une racine de luzerne et transporte sur une racine encore indemne de lupin, par exemple, les germes qu'il a empruntés au tubercule piqué; cette inoculation réussit merveilleusement ; la plante, ainsi traitée, acquiert un développement normal, tandis qu'un pied voisin, issu d'une graine semblable à celle qui a donné la plante vigoureuse, mais qui n’a pas reçu les bactéries fixatrices d'azote, reste chétif el finit par mourir sans avoir, Comme son voisin ino- culé, emprunté à l’air une notable quantité d'azote. Il semblait qu'on püt déduire avec certitude de ces expériences que lazote atmosphérique était bien l’origine des matières azotées des légumi- neuses inoculées. Pour qu'aucun doute ne fût plus possible, il restait une dernière expérience à réa- liser : il fallait non seulement voir l’azote augmen- ter dans les végétaux éludiés ; il fallait, en outre, le voir disparaître d’une atmosphère confinée dans laquelle ils étaient maintenus. Pour réussir dans une semblable tentative une rare habileté expérimentale était nécessaire; cette habilité, M. Schlæsing fils ne la possède pas moins que son père. S’associant à un botaniste belge très distingué, M. Laurent, il a réussi, l'an dernier, à faire vivre des pois inoculés dans une atmosphère rigoureusement mesurée; les auteurs ont conslaté que l'azote y diminuait d'une quantité précisément égale à celle qui avait élé fixée, enga- gée en combinaison par la plante. Cette méthode directe vient donc appuyer les méthodes indirectes de dosage de l'azote combiné avec une telle force qu'elle triomphe de loutes les incertitudes. Il est donc acquis que les légumineuses fixent" l'azote de l’air et méritent absolument ce vieux nom de plantes améliorantes que leur avaient im- posé les sagaces observations des praticiens. = 0.5, à rte P.-P. DEHÉRAIN, — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 819 Quel est le mécanisme de celte fixation d'azote? C'est ce qui reste encore un peu confus. Un grand nombre de micrographes se sont, cependant, atla- chés à cette question ; M. Prazmowski notamment y a consacré plusieurs mémoires!. Il en résulte que les tubercules des racines n’ap- paraissent qu'autant que le sol renferme les germes des bactéries et que « ces tubercules sont des pro- ductions symbioliques communes aux bactéries el à certaines parties des végétaux très élevés en organisation. Les bactéries trouvant dans le sue de la racine une nourriture appropriée à leurs besoins peuvent s'y multiplier durant une infinité de géné- rations et se répandre de nouveau dans le sol pen- dant la vie de la plante hospitalière aussi bien qu'après sa mort. Quant à cette plante, la bactérie lui fournit le moyen de se pourvoir d’un aliment extrêmement important, l'azote, qui peut ne pas se trouver en quantité suffisante dans le sol. « La légumineuse est cependant mieux parta- gée que la bactérie, puisqu'elle finit par s’en empa- rer pour en élaborer la substance à son profit; elle enferme les bactéries dans un tissu spécial protégé par une couche de celiules subérifiées qui s'oppose à l'invasion d'organismes étrangers et en même temps à la sortie des bactéries prisonnières; elle dispose à l'extrémité extérieure des tubercules un mérisième, un tissu perpéluellement en voie de cloisonnement, qui fournit constamment de nou- velles cellules aux bactéries el s'assure de cette façon des réserves successives de bactéries à me- sure qu'elle digère celles qui occupent les parties inférieures des tubercules. Les faisceaux ramifiés dans la couche intermédiaire amènent les hydrates de carbone nécessaires à l’alimentation des bacté- ries et à la formation des matières albuminoïdes, et servent en même temps à conduire jusqu'aux organes aériens les substances résultant de la dis- solution des bactéroïdes. La migration des prin- cipes immédiats est favorisée par la minceur extrème des parois cellulaires du tissu à bactlé- roïdes. Pour éviter enfin que les hydrates de car- bone ne fassent défaut à un moment donné, une réserve d’amidon est déposée dans l’assise de cel- lules qui entoure directement le tissu à bacté- roïdes. «La structure anatomique du tubercule est done admirablement adaptée aux conditions qui ré- sultent des relations symbhiotiques entre la légu- mineuse et les bactéries. » Il est manifeste que la question est loin d'être 1 M. Vesque, dont le nom est bien connu des lecieurs de la Revue, a donné des résumés de ces travaux dans les tomes XV, page 137, et XVI, pages 44 et 513 des Annales agronomiques. épuisée, el que si nous savons que la légumineuse profite de l'azote fixé par les bactéries qui pullulent dans les nodosités des racines, nous n'avons aucune idée du mécanisme de cette fixation. Il est certain qu'une malière aussi compliquée qu'un albumi- noïde ne se forme pas de toute pièce el qu’elle n'est produite que par une série de synthèses analogues à celles qui, partant de l’aldéhyde formique, arrive jusqu'aux matières sucrées, de structure cepen- dant infiniment plus simple que les albuminoïdes. Il reste done de grands efforts à faire pour éluci- der complètement celle fixation de l'azote par les légumineuses. Sont-ce seulement les plantes de cette famille qui ont la propriété d'utiliser l'azote de l'air, ou bien au contraire cette propriété se rencontre-t-elle à des degrés divers dans d’autres familles ? C’est pour élucider ce sujet que MM. Schlæsing fils el Laurent ont disposé, pendant celle année 1891, une nouvelle série d'expériences non moins impor- lantes que celles de l’an dernier. Ils ont encore em- ployé simultanément les deux méthodes directes et indirectes qui se contrôlent l’une par l’autre : déterminant par de rigoureuses mesures les chan- gements survenus dans latmosphère confinée où les plantes ont vécu, établissant d'autre part par des dosages d'azote, au commencement et à la fin des expériences, si le système plante et sol avait gagné l’azote gazeux disparu de l'atmosphère con- finée. Quatre plantes ont été mises en expériences : Topinambour, Avoine, Pois et Tabac; plusieurs vases renfermant le même sol que les précédents ont été en outre introduits dans les appareils, mais sans être ensemencés autrement que de délayure de terre. La première série d'expériences a montré que de l'azote gazeux avail loujours disparu, mais en faible proportion, sauf dans le cas des pois, qui ont fixé une quantité notable d'azote; « la sur- face des sols s’élait peu à peu et à divers degrés recouverte de plantes vertes, parmi lesquelles on a reconnu des mousses (Pryum, Leptobryum) et des algues (Conferva, Oscillaria, Nitzschia). À quelles espèces était due la fixation de l'azote, aux pha- nérogames, Où au contraire aux végélaux infé- rieurs? Pour le savoir, MM. Schlæsing fils et Lau- rent suppriment l'apparition des cryptogames en recouvrant la surface des sols, après l’enfouisse- ment des graines et l’arrosage avec la délayure de terre, d'une couche de quelques millimètres de sable quartzeux; dès lors aucune trace de matière verte n’est apparue, el,sauf pour les légumineuses, on n'a plus observé la fixation d'azote. Ainsi, landis que dans ces expériences les sols nus, l'avoine, la moutarde, le cresson, la spergule 820 P.-P. DEHÉRAIN. — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE n'ont pas fixé d'azote, on constate que certaines plantes vertes inférieures empruntent de l'azote gazeux à l'atmosphère. Il y a là un point fort important, qui montre que l'ancienne expérience de Boussingault, pendant la- quelle il n'avait observé aucune fixation d'azote gazeux sur le développement du Penirillum glaucum sur le sérum du lait, n'avait pas la portée générale que, très à tort, on lui avaitattribuée. L'expérience de MM. Schlæsing fils et Laurent expliquent sans doute, partiellement au moins, les désaccords qui se sont produits entre M. Geor- ges Ville et les personnes qui ont voulu répéter ses expériences et n'ont pu réussir. Quand, dans un laboratoire de physiologie, on emploie des liqueurs nutritives renfermant des nitrates, on y voit très rapidement apparaitre des algues; il n’est pas invraisemblable que les sols de sable de M. Georges Ville, additionnés de nitrates, aient été parfois envahis par ces végélations cryp- togamiques, fixatrices d'azote qui, enrichissant le sol de leurs dépouilles, ont permis à la plante en expérience d'acquérir une dose d’azote supérieur à celle qu'on avait ostensiblement fournie. Si, d'autre part, les autres observateurs ont préservé leurs sols de l’envahissement des cryplogames, si surtout le manque de nitrate ajouté n’a pas favo- risé ces envahisseurs, ils n’ont plus observé la fixa- lion d'azote libre ; de là les désaccords. Les expériences de MM. Schlæsing fils et Lau- rent expliquent égalementles fixations d'azote con- sidérables qui se produisent dans les sols mainte- nus longtemps en prairies, auxquelles nous avons fait allusion plus haut ; ces enrichissements ont été constatés par MM. Lawes et Gilbert dans une prairie de Rothamsted; j'ai reconnu moi-même à Grignon qu'un sol qui, n’aceusant plus que 1550 d'azote par kilo en 1879, en accusait 160 en 1881, 1477 en 1885 el 198 en 1888. Si l’on admet que la terre d'un hectare pèse 4.000 tonnes, on trouve que de 1879 à 1888 la prairie a gagné par son sol 1.920 kilos d'azote, auxquels il convient d'ajouter 1.210 kilos enlevés par les ré- coltes, soit en tout 3.130 kilos, plus de 300 kilos par hectare et par an. Les faits observés par la pratique agricole sont done maintenant d'accord avec ceux que les ex- périences de laboratoire les plus délicates ont per- mis de découvrir. Le sol d'une prairie permanente est habituellement envahi de mousses, de crypto- games variées, parmi lesquels se rencontrent sans doute les espèces capables de fixer l'azote atmos- phérique et de l'employer à la formation de leurs albuminoïdes. Quand ces plantes meurent, elles en- richissent le sol de leurs dépouilles. Aux êtres inférieurs, bactéries ou végétaux cryptogamiques, appartient donc cette curieuse propriélé detriompher del’inertie de l'azote gazeux; elle n'appartient qu’à eux, car jusqu'à présent on ne l’a sûrement constatée chez aucun animal ni aucune phanérogame. Ces découvertes récentes justifiant les anciennes observations des cultivateurs vont-elles développer la création des prairies de graminées et les verra- t-on, dans les domaines qui souffrent de la pénurie d'engrais azoté, prendre une place régulière dans les assolements ? Si, à première vue, il parait rationnel de rendre à un sol fatigué sa richesse perdue par la création de prairies temporaires, on n'obtient pas toujours cependant de cette transformation tous les pro- lits qu'on en attend. Une terre légère comme celle de Grignon, restée en prairie pendant plu- sieurs années, devient l'habitat d'une multitude d'insectes, qui se jettent avidement sur les ré- coltes qui suivent les défrichements, et le nombre 4 en d'espèces à cultiver se restreint singulièrement. En 1889 et 1890, nous avons élé obligés M. Pa- turel et moi de renoncer à cultiver de l’avoine ou des betteraves sur des prairies défrichées; les pommes de terre et le maïs-fourrage ont résisté, mais n'ont fourni que des récoltes bien inférieures à celles qu'on avait oblenues des sols labourés chaque année. Nitrification. — Dans ceux-ci, les fixations d'azote ae sont plus guère sensibles d'ordinaire, les pertes surpassent les gains ; et pour maintenir la fertilité l'emploi des engrais s'impose. Ces pertes sont dues à la nitrification. Sous son influence, les matières azotées du sol prennent une forme éminemment favorable à l'assimilation : cette formation de nitrates aux dépens des matières azoltées de la terre est donc essentiellement utile; mais, d'autre part, elle s’exagère aisément, se perd encore quand le sol est découvert et n’a plus de plantes à nourrir, et comme les nitrates sont solubles, qu'ils ne sont nullement retenus par les propriétés absorbantes des terres arables, ils sont entrainés dans les eaux de drainage, passent dans les ruisseaux, les rivières, les fleuves qui jettent constamment dans l'Océan des masses énormes d'azote combiné. C'est pour réparer ces pertes incessantes que les cultivateurs achètent à grands frais les matières azotées de toute espèce, qu'une flotte est toujours en mouvement pour ramener des côtes du Chili et du Pérou en Europe le nitrate de soude, res- source provisoire largement exploitée aujourd’hui et dont l'épuisement laissera nos successeurs dans un profond embarras. La nitrification, source de fertilité, source d’épuisement, mérite done une étude attentive. P.-P. DEHÉRAIN. — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 821 Ce n’est que récemment que le ferment, dont MM. Schlæsing et Muntz avaient signalé l'existence et les fonctions dès 1876, a été isolé par M. Wino- gradski ; la nitromonade, qu'il a décrite d’abord, est seulement un ferment nitreux; son action s'arrête quand la transformation de l’ammoniaque en acide nitreux est accomplie, et c’est un autre ferment qui complète loxydation et transforme l'acide nitreux en acide nitrique. « C’est un très petit bätonnet, de forme anguleuse,irrégulière, qui n'a aucune ressemblance avec le ferment nitreux de la même terre; l’une des plus curieuses pro- priétés de ce ferment nitrique est de ne pas oxyder l’ammoniaque. Ensemencé dans les solutions am- moniacales les plus facilement nitrifiables par les ferments nitreux, il n'y donne ni nitrite ni nitrate. Les deux genres de ferment qui amènent l’am- moniaque à l’état de nitrates sant abondants dans toutes les terres, et toutes nitrifient quand les con- ditions nécessaires à l’activité du ferment sont réunies, mais elles sont bien loin cependant de fournir dans le même temps des quantités égales de nitrates. Cette quantité varie avec l'abondance de la ma- tière organique azotée, avec l'aération plus ou moins facile du sol considéré ; elle varie aussi dans le même sol avec les conditions climatériques; une température de 25° à 30°, une humidité suffisante exaltent l’activité du ferment nitrique, et très habi- tuellement cette activité s'exerce à contretemps; elle est d'ordinaire insuffisante au printemps : si la terre est dans un état d'humidité convenable, la température esttrop basse; delà l'utilité des fumures de nitrate de soude au premier printemps; elles sont très efficaces précisément parce que la nitri- fication naturelle ne présente pas une activité suf- fisante. En revanche, pendant l'été, la température du sol s'élève, et si la pluie n’est pas trop rare les quantités de nitrate formées sont considérables et souvent inutiles. En effet, le blé, dès la fin de juin, cesse d’assimiler les matières azotées du soi. La betterave, il est vrai, en profite largement, si large- ment que ces nitrates s'accumulent dans leurs Lissus en nature et deviennent nuisibles aux animaux qui consomment ces racines. En résumé, les nitrates formés pendant la saison d'été sont presque com- plètement perdus, car, à ce moment, la plus grande partie des terres est découverte, et quand arrivent les grandes pluies d'automne, ils sont entraînés dans les eaux de drainage. Les pertes d'azote com- biné que subissent les sols par les lavages des eaux qui les traversent sont énormes. En réunissant dans une moyenne les nombres trouvés à Grignon pendant les trois automnes 1889, 1890 et 1891, j'arrive à 40 kilos environ d’azote uitrique représentant à peu près 250 kilos de ni- trate de soude, c’est-à-dire plus qu’on n’en achète habituellement. Il est donc du plus haut intérêt de restreindre ces pertes : on y arrive aisément par la pratique des cultures dérobées comme engrais; aussitôt que la moisson est faite, on donne un léger labour de déchaumage et on sème une plante à évolution rapide, de la vesce ou de la moutarde; s'il pleut, elle lève, et bientôt le sol est absolument couvert d’une végélation drue, vigoureuse qui empêche la déperdition; cette année, à Grignon, la vesce a éva- poré assez d’eau pour empêcher complètement les drains de couler; par conséquent les pertes ont été radicalement supprimées; la moutarde n'a pas em- pêché absolument l'écoulement, mais elle s'était emparée ayidement des nitrates formés, et la perte s’est réduite à moins d’un kilog. par hectare. Au mois de novembre, ces cultures sont écrasées par un rouleau et enfouies; elles apportent au sol une quantité d'azote considérable ; elle s’est élevée cette année à 83 kilos par hectare pour la moutarde, à 141 pour la vesce; c'est une fumure abondante équivalant dans le premier cas à une demi-fumure de fumier de ferme, dans le second à une fumure ordinaire de 30.000 kilos. Je crois que cette pratique des engrais verts pour engrais déjà répandue dans certaines parties de la Normandie, dans la Limagne d'Auvergne est des- tinée à se généraliser. En résumé, pendant ces dernières années, nos connaissances sur les causes de gains et de pertes des sols arables se sont accrues et ont acquis un degré de précision remarquable. Nous savons que l'azote se fixe dans les sols par l'action de micro-organismes, que cette fixation est plus active quand les terres se couvrent de végé- tations inférieures, algues et mousses ; qu’elle s’exalle enfin dans les légumineuses portant sur les racines des nodosités à bactéries,et ces découvertes de laboratoire sont appuyées par les observations recueillies directement dans les champs d'expé- riences et dans la grande culture. Nous savons en outre que ces gains sont contre- balancés par les pertes qu'occasionne la nitrifi- cation, pertes dues à l’activité de deux ferments dont l’action se superpose; enfin nous avons entre les mains une méthode facile à employer pour restreindre ces déperditions d’azote et diminuer les lourdes dépenses qu'occasionne l'entrainement des nitrates dans les eaux souterraines. Il. — LA CULTURE DU BLÉ Notre récolte de 1891 est la plus mauvaise que nous ayons faite depuis 1879; elle reste voisine de 80 millions d’hectolitres, tandis qu'il nous en faut 822 P.-P. DEHÉRAIN. — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE environ 120 millions; le déficit est donc considé- rable : il est dû à la destruction des semis du blé d'automne par les alternatives de gel et de dégel du mois de février 189 : les petites lames de glace qui se forment dans le sol finissent par couper les jeunes racines du blé, Quand cet acci- dent se produit, on enlève à la main les tigelles, déjà affaiblies, sans le moindre effort. Pour réparer ce désastre, il a fallu faire de nouvelles semailles, et les rendements des blés de printemps, du peu de blé d'hiver qui avait résisté, ont été faibles. D'une année à l’autre, les récoltes de blé varient entre des limites très étendues; on peut en voir les raisons dans un travail de M. Hébert, chi- miste de la station agronomique de Grignon, dans lequel il a résumé non seulement ses propres recherches, mais celles que j'ai exécutées depuis longtemps avec les jeunes collaborateurs qui se sont succédé à mon laboratoire depuis vingt ans. Le cultivateur influe sur l'abondance de la récolle en choisissant une variété appropriée à son sol et au climat de son domaine, en préparant sa terre avec soin, en l’ameublissant par les labours, les hersages, l’aérant par le drainage, l’enrichissant par les engrais; il assure ainsi l’ali- mentation azotée et minérale du blé semé; par des sarclages répétés, il le débarrasse des plantes adventices dont la concurrence est redoutable ; quand, au mois d'avril, les travaux sont terminés, le cultivateur n'a plus qu'à abandonner sa récolte aux chances favorables ou fâcheuses qu'amèneront les alternatives de pluie et de soleil; ce sont ces conditions climatériques qui récompenseront ses efforts ou les rendront stériles. Pour bien comprendre cette influence décisive de la saison, il faut suivre de près les phénomènes qui se succèdent pendant le développement du blé; on y distingue deux périodes successives : celle qui s'écoule depuis le semis jusqu'à la floraison, est employée par la plante à constituer ses propres tissus, et à accumuler les réserves de malières azo- tées et minérales nécessaires à l'alimentation du grain. Les racines, tiges et feuilles du blé sont sur- tout formées par des hydrates de carbone, dont l’un n'est connu que depuis peu d'années. Ce pro- duit a été désigné sous le nom de gomme de paille; c'est une matière soluble dans les alcalis, précipi- table de cette dissolution saturée par les acides, par l'alcool sous forme d’une substance blanchâtre, amorphe, qui, saccharifiée par les acides, donne un pentaglycose, la xylose analogue à l’arabinose des gommes. Cette xylose réduit la liqueur cupropotassique comme les sucres; elle prend naissance, ainsi qu'il vient d'être dit, par saccharificalion, à l’aide des acides, de telle sorte que pendant longtemps elle a été confondue avec la glycose que donne la saccharification de l’amidon. Cette confusion avait conduit à mal comprendre la maturation du blé; en voyant au mois de juin, au moment dela floraison, les tiges et les feuilles four- nir sous l'influence des acides étendus, un sucre ré- ducteur, on croyait que pendant la première partie de sa vie, les hydrates de carbone élaborés par l’activité chlorophyllienne étaient destinés à deux usages différents : on pensait que si une fraction, prenant la forme de cellulose, servait à la forma- tion de ses lissus, le reste, accumulé dans les cel- lules sous forme d’amidon, constituait des réserves destinées à l'alimentation du grain. En réalité, il en est autrement; tous les hydrates de carbone formés jusqu’à la floraison sont em- ployés à l'édification de la plante. Ce que nous pre- nions pour de l’amidon est de la gomme de paille qui persiste en place dans les tiges et les feuilles jusqu’à la maturation et ne concourt en aucune facon à la nourriture du grain. Si celui-ci trouve dans les matières azotées des tiges et des feuilles les matériaux destinés à for- mer son gluten, il ne rencontre comme hydrate de carbone de réserve que de petites quantités de glycose et de dextrine, et c’est pendant le temps qui s'écoule entre la floraison et la maturation que les feuilles doivent élaborer tous les hydrates de carbone qui se concrètent dans le grain sous forme d'amidon. Or ce travail est essentiellement soumis aux conditions climatériques. Si le soleil est ardent, la pluie rare, les feuilles perdent plus d’eau par éva- poration qu'elles n’en recoivent par la racine ; or une dessiccation même médiocre de la feuille y arrète le travail d’assimilation; si elle se sèche, la petite usine est fermée et la quantité d'hydrate de carbone produite, par suite celle d’amidon, est trop faible; on conçoit donc que si quelques pluies mo- dérées n'arrivent pas à la fin de juin, au commen- cement de juillet, on ne recueille que des grains médiocrement garnis d'amidon, légers, de mau- raise qualité; c’est surtout la proportion de cet amidon qui est variable d'une année à l'autre. En 1888, nous avons eu au champ d’expériences de Grignon une bonne récolte de grains; les par- celles, sur lesquelles ont été pris les échantillons d'analyse, ont fourni la valeur de 341,8 à l'hectare ; en 1889,nous avons eu seulement 291,2. Si l'on exa- mine la composilion du grain, on trouve pour la même variété : 1888 1889 438,9 447k 2689 1808 Matières azotées à l’hectare. ....... AMATON ER ere -crerEeTerE EEE Ce qui a manqué en 1889, c'est l'élaboration de a A Pg tés de P.-P, DEHÉRAIN. — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 823 l'amidon; or, cetle année-là, on à moissonné le 23 juillet, tandis qu'en 1888 le blé était resté sur pied jusqu'au 13 août; dans un des cas, les cellules ont pu fonctionner bien plus longtemps que dans l’autre. Un ciel voilé, un temps un peu humide sont donc bien plus favorables à la production du blé qu'un soleil éclatant, qui, s’il favorise par sa lumière le travail de la cellule, la paralyse par sa chaleur, amenant une dessiccation prématurée : le midi de la France ne produit guère que 10 hectolitres à l’hectare. La région septentrionale en fournit sou- vent 25, autant que l'Angleterre. Si une pluie légère est favorable, les orages sont absolument funestes; le blé tel que l’ont fait des siècles de culture est une plante mal équilibrée; un épi lourd est porté à l'extrémité d’une tige longue, grèle, médiocrement résistante, et la verse est fréquente, elle est très fâcheuse. Les tiges su- perposées ne reçoivent plus lesradiations solaires, et le travail chlorophyllien imparfait n’envoie plus aux grains qu'une quantité insuffisante d’'hydrates de carbone. On conçoit done, ainsi qu'il a été dit, queles ré- colles soient très variables d’une année à l'autre, et que jusqu à présent les efforts qui ont été faits pour élever les rendements, contrariés par les intempéries, n'aient pas produit {ous les résultats désirables ; ces efforts ont été cependant considé- rables, et certaines espèces résistantes à la verse, telles que les blés à épi carré, fournissent, pendant les bonnes années, des rendements dépassant 60 hectolitres à l'hectare dans celte région du Nord et du Pas-de-Calais, où le sol est enrichi par les fumures prodiguées aux betteraves, où le cli- mat plus tempéré que celui des environs de Paris est aussi bien plus favorable à la culture du blé. Les rendements ne sont élevés que lorque la ma- luration n’est pas précipitée; or, au printemps de 1891, les blés ont été semés tardivement; toutes les phases du développement ont été précipitées et la récolte forcément médiocre. III. — CULTURE DES POMMES DE TERRE Gràce aux efforts de M. Aimé Girard, les progrès réalisés dans celle culture depuis quelques années ont été considérables. La variété qu'il a préconisée, la Richter’s Imperator, est beaucoup plus prolifique que les autres espèces cultivées naguère. En 1889, deux des cultivateurs qui, à la suite de M. Aimé Girard, ont planté la Richter, avaient atteint 40.000 kilos à l’hectare; en 1890, 22 sur 57 ont atteint et dépassé ce chiffre. La Richter est en outre très riche en fécule : elle en contient 17, 18, 19 et 20 centièmes ; la production de la fécule à l’hectare estcomprise entre 5 et 7.000kilos et devient suscep- tible d'alimenter les distilleries agricoles et de laisser des résidus capables de nourrir un bétail nombreux. Ajoutons que cette culture n’est plus soumise aujourd'hui aux chances de perte qu’elle présen- tait naguère ; en effet,les sels de cuivre exercent sur les champignons parasistes qui s'attachent aux feuilles une action nocive si puissante que l’on peut aussi bien employer, pour combattre le paylo- phora infestans de la pomme de terre que le pero- nospora de la vigne, les mélanges de sulfate de cuivre avec la chaux ou le carbonate de soude, connus sous les noms de bouillie bordelaise et de bouillie bourguignonne. La culture de la pomme de terre, qui réussit même dans les terres médiocres où se développe mal la betterave, est en voie de prendre dans les assolements une place considé- rable. IV. — L'’OLIVIER EN TUNISIE. Il est toujours dangereux pour la prospérilé d'une contrée de restreindre à une seule plante sa production agricole; nos colons tunisiens se sont jetés avec une extrème ardeur dans la culture de la vigne, et les résultats obtenus justifient pleine- ment les dépenses qui ont été faites pour dévelop- per les vignobles de Tunisie. Ils ont produit cette année 98.000 hectolitres de vin, en progrès sur l’an dernier de 47.000 hectolitres, avec un rendement moyen de 30 hectolitres à l'hectare. La production du vin est due exclusivement aux Européens; les indigènes ne l’ont pas entreprise, et il était ulile de chercher à développer d’autres cultures qui leur sont familières. Parmi celles-ci, aucune ne mérite une plus sé- rieuse attention que l'olivier; il n’y a de ce côté rien à créer, mais seulement à encourager une production établie en Tunisie depuis la haute antiquité. D'après un rapport de M. Bourde, di- recteur de l’agriculture de la régence !, le nom- bre des oliviers existant actuellement dépasse 10 millions de pieds. « Cest une des forêts les plus considérables du monde; son existence justi- fie celte assertion bien souvent répélée que si les bords de la Médilerranée sont l'habitat naturel de l'olivier, la Tunisie est dans la Méditerranée son lieu de prédilection ». On conçoit par suite que le protectorat ail songé à étendre encore la plantation de l'olivier et la pro- duction de l'huile. I fallait tout d’abord savoir où elle en était. On a procédé à une enquête ; il en résulte que la production d'huile varie beaucoup ! Le très intéressant rapport de M. Bourde paraitra dans | le cahier de janvier des Annales agronomiques. 824 d’un contrôle à l’autre : à Sfax et à Sousse, pendant ces dernières années, 4.523.481 oliviers ont pro- duit plus de 25 millions de litres d'huile dans les contrôles de Tunis, de Bigerti et de Djerbohat, dans le caïdat de Soliman, 5.270.000 oliviers n’en ont fourni que 12 millions de litres. La différence est donc énorme ; elleest due surtout aux soins apportés à la culture. Tandis qu'à Sfax la taille et la forme données à l'arbre sont très ra- tionelles, que le sol est bien labouré, que les arbres sont tellement éloignés les uns des autres, qu’on n'en compte que 60 par hectare, et que, profitant de cet espacement, ils acquièrent tout leur déve- loppement, à Sousse la taille est déjà moins bonne, les arbres sont aussi plus serrés; enfin, dans le contrôle de Tunis on compile par hectare de 120 à 150 arbres, non {aillés, mais hachés sans aucune méthode. Comment les soins apportés à la culture sont-ils si différents d’une région à l'autre? Parce que, dans tous les contrôles, les oliviers sont soumis à des régimes fiscaux différents aussi. « Dans les contrôles de Sousse et de Sfax, les oliviers payent le Æanoum, c’est-à-dire un droit fixe par pied. L’impôt acquitté, le propriétaire dis- pose librement de son olivette, la cultive, en traite et en vend les produits à son gré. Ce système d’im- pôt le pousse à chercher à augmenter les rende- ments, car plus le revenu d'un arbre est élevé, moins l’impôt fixe qui le frappe est lourd. « Dans les contrôles de Djerba, de Nabeul, de Tunis et de Bizerte, les oliviers sont soumis à la dime de l'huile, c'est-à-dire, que sur l'huile tirée des olives récoltées, l'État prélève un dixième. Étant ainsi directement intéressé dans les résultats de la récolte, l'État a été entrainé à intervenir dans tous les détails de la culture de l'olivier et de la fabrication de l'huile, afin de s'assurer qu’on ne lui porterait pas préjudice soit par négligence, soit par fraude. » Non seulement la culture est ainsi mal conduite, mais en outre la fabrication de l'huile est déplo- rable; les moulins arabes, dont l'emploi est imposé aux producteurs d'olives, ne travaillent que len- tement : les olives fermentent avant d'être pressées et les huiles perdent de leur valeur. Tandis que les produits des moulins européens valent 80 francs les 100 kilos, ceux des moulins arabes ne trouvent preneur qu’à 60 francs. La récolte se trouve encore réduite par cette circonstance qu'un cinquième environ des oliviers de la Régence appartient à l'État ou aux biens Habous. Or ces arbres administratifs sont en général très délabrés. « Au milieu des beaux oli- viers de Sfax, quand on aperçoit des arbres souf- freteux sur un sol abandonné aux herbes, on est P.-P. DEHÉRAIN. — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE certain qu'on est en présence d’un bien ha- bous ». Ce dépérissement provient du mode d'exploita- tion auquel les oliviers domaniaux étaient soumis jusqu’en ces dernières années et auquel les oliviers habous sont soumis encore. Ce mode d'exploitation consisle à confier le soin des olivettes domaniales aux administrations locales qui n’ont aucun intéret personnel à la prospérité des arbres, et par suite n'entreprennent jamais de travaux d’'améliora- tion. L'intérêt privé est le seul ressort que veut mettre en œuvre la direction de l’agriculture de la régence, et elle propose de louer à long terme les olivettes domaniales ou de biens habous; dans l’un et l'autre cas, la production serait rapidement aug- mentée et la redevance perçue par pied d’arbre rapporterait infiniment plus que les misérables récolles que fournissent aujourd’hui les arbres abandonnés! Le rapport de M. Bourde indique en outre com- ment il faut procéder pour augmenter le nombre des oliviers dans la régence. Dans le gouverne- ment de l’Arad, tout à fait au sud, les perspectives ouvertes à la culture de l'olivier sont pour ainsi dire illimitées. Elle y a été autrefois très floris- sante; elle faisait la fortune des villes importantes dont les ruines se voient le long de la côte; elle a été si complètement détruite par les ravages des pillards, qui trouvent un refuge dans la Tripolilaine toute voisine, que le principal obstacle à la création de nouvelles olivettes se trouve dans la pénurie des drageons, des éclats de souche ou des boutüres pour la plantation; aussi, pour cette région est-il in- dispensable d'établir des pépinières où les indi- gènes pourront trouver les éléments de la recons- titution des olivettes. Après avoir procédé à ces études, M. Bourde a soumis aux délibérations de la Commission qui siège auprès de la résidence une suite de propo- sitions qui ont élé adoptées et vont changer l'état des choses; il a proposé : Louer à long terme les oliviers domaniaux ou habous; en effet, pour les restaurer, il faut les soumettre à une faille énergique qui empêche la production pendant deux ou trois ans, et les loca- taires ne consentiront à s'imposer cette privation de revenus que s'ils sont sûrs de pouvoir quel- ques années plus tard être récompensés de ce sacrifice. Régulariser la situation des planteurs du contrôle de Sfax qui ont envahi des biens domaniaux. Enfin faciliter la plantation de nouveaux oliviers en vendant à très bas prix les terrains que les acquéreurs consentiront à planter; le prix de l’hectare serait de 15 francs quand on ne sera P.-P. DEHÉRAIN. — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 825 pas obligé de faire des travaux spéciaux d'irri- gation, de 10 francs seulement s'il faut établir des machines propres à élever les eaux souter- raines. Toutefois, pour éviter que les terres nues ne soient accaparées par la spéculation, un artiele résolutoire du contrat porte que si après cinq ans les parcelles n’ont pas été plantées, l'état se ré- serve d'annuler la vente. Ces mesures libérales ont élé couronnées de succès, les demandes d'achat de terrains sont devenues nombreuses; enfin, au lieu de faire porter l'impôt sur l'huile, on prendra pour base une éva- luation de la récolte encore sur larbre. La majeure partie des olives est en Tunisie vendue chaque année aux enchères par une Commission composée de notaires et d'experts qui se transporte d’olivette en olivette; au moment de la vente le montant de l'impôt sera établi, puis le propriétaire ou l'exploitant seront libres de porter leurs olives où bon leur semblera ; ils n'auront plus à attendre les presses insuffisantes des moulins arabes, et la qualité de l'huile sera améliorée. Dans cette nouvelle organisation l'état cesse d'intervenir dans la cullure ; il ne prend qu'une fraction de la somme versée au propriétaire qui a tout intérêt, en faisant prospérer son oli- vette, à obtenir une récolle aussi forte que pos- sible, Il suflit de passer quelques jours en Tunisie pour voir combien ce pays se prête à ces cultures arbustives ; dans la région septentrionale que par- court le chemin de fer qui relie l'Algérie à la Ré- gence, les oliviers sauvages abondent au milieu des bois que traverse la ligne. Au sud, tout autour de Sousse, les oliviers sont nombreux ; mais quand on s'enfonce dans l'intérieur, qu’on se dirige, par exemple, vers Kerouan, on n'en trouve plus; on parcourt pendant des heures une grande plaine verte absolument déserte; rarement, bien rare- ment se dessine dans le lointain la silhouette de quelques chameaux portant une maigre charge; puis la solitude recommence ;°la terre cependant n’est pas stérile; au printemps elle est absolu- ment couverte de verdure et pour produire n'at- tend que du travail. A voir cet abandon, on se prendrait à dou- ter de la richesse de l'ancienne province ro- maine ; mais quand on visite la grande mosquée de Kerouan, on reste convaincu que les anciens auteurs n'ont rien exagéré; quand on a franchiune grande cour carrée, bordée à l’intérieur d’une série d'arcades et qu'on pénètre dans l'édifice, on est frappé d’étonnement : un nombre prodigieux d’ar- ceaux s’aligne régulièrement, soutenu par une fo- rèt de colonnes. En quelques instants on est con- vaincu qu'elles n’ont pas été laillées pour servir dans l'édifice qu'elles soutiennent aujourd'hui; elles sont essentiellement disparates. Quelques- unes, trop hautes, ont été sciées, et leur fût, dé- pouillé des ornements de la base, repose directe- ment sur le sol; d’autres, trop courtes, s'appuient sur un dé de pierres. Les chapiteaux corynthiens, composiles, accu- sent sans conteste leur origine. Ces colonnes ap- partenaient à des monuments romains semblables à ceux qu'on trouve encore debout à Douagga ou à Lambessa ; or, pour avoir fourni à la mosquée de Kerouan le nombre prodigieux de colonnes qu’elle renferme, il fallait que les édifices luxueux fussent très communs dans la province; ils n'ont pu ètre élevés que par un peuple arrivé à un haut degré de prospérité, et leurs nombreux vestiges, aceu- mulés dans cette mosquée, témoignent du degré élevé de civilisation auquel était arrivée la Tunisie pendant la grande paix romaine. Quand les Arabes envahirent le pays, ils firent un immense butin; « l'un des chefs de bande Abdallah ben Saad ayant demandé d'où venaient tant de richesses, un habitant ramassa une olive : De là dit-il. » Dans l'antiquité, l'huile d'olive servant à la fois à l'alimentation et à l'éclairage était consommée en plus grande quantité qu'aujourd'hui: aussi ne suffit-il plus actuellement de faire de l'huile, il faut la faire excellente; à cette condition, facile à rem- plir avec une bonne culture, des moulins euro- péens bien outillés, les débouchés s’ouvriront, et la Tunisie, couverte d'oliviers, verra reparaître la prospérité qu'ont anéanti douze cents ans d'incurie arabe. P.P. Dehérain, de l’Académie des Sciences. 826 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Cels (Jules), Ancien élève de l'Ecole normale supérieure, Agrégé des Sciences mathémathiques : Sur les équa- tions différentielles linéaires ordinaires. Thôse de doctorat soutenue devant la Faculté des Sciences de Paris. Gauthier- Villars et fils, 55, quai des Grands- Augustins, Paris, 1891, La thèse de M. Cels est particulièrement intéressante comme procédé de composition : d’une remarque très simple et en apparence banale, l’ingénieux auteur tire un excellent parti par le rapprochement heureux de théories fort étrangères, semble-t-il, lesunes aux autres. Soit E une équation différentielle linéaire d'ordre p ; on connait depuis longtemps, grâce à des travaux classiques de Lagrange et Jacobi, une équation E' de même nature et de même ordre que E (adjointe de Lagrange), déduite de E par un calcul simple, lequel appliqué à E’ reproduit E. L'intégration de E assure celle de E’ et réciproquement, M. Cels remarque (c’est là le point de départ de ses recherches) que le même calcul, modifié à peine, fournit non seulement l’adjointe de Lagrange, mais en tout p adjointes E,, E,,..., E,, correspondant d'une certaine facon aux entiers Éoie p ; la dernière E, est précisément E’.L’auteur construit ces diverses adjointes et établit des relations entre les solutions des diverses équations E, E,,..., E» Chacun des p procédés, qui permet de passer de E à Ey, répété indéfiniment et combiné avec les p—1 autres fournit une infinité d'équations transformées de E, Si l’on finit par tomber sur une transformée inté- grable, E est intégrée du coup; la connaissance d’une solution particulière pour une transformée quelconque assure celle d’une solution de E, sans qu'on ait besoin au plus que d'effectuer des quadratures. M. Cels ne produit done aucune méthode d’intégra- tion nouvelle, mais étend le champ d’application des méthodes anciennes, multiplie le nombre des cas intégrables, L'auteur traite par sa méthode l’équation généralisée de Gauss (relative à la série hypergéométrique) et l'équation généralisée de Bessel; plusieurs résultats intéressants sont énoncés, notamment en ce qui con- cerne les solutions rationnelles et les solutions entières. Les racines de l'équation fondamentale déterminante de Fuchs jouent, comme il fallait s’y attendre, un grand rôle dans la matière, On peut aussi, et c’est ce que M. Cels ne manque pas de faire, étudier la série infinie des transformées de E d’après le programme suivi par M. Darboux dans ses recherches classiques sur la méthode de Laplace et l'équation aux dérivées partielles du second ordre (tome IT des Lecons sur la théorie générale des sur- faces). On peut se demander, par exemple, ce qui arrive lorsque la suite des transformées est périodique : alors l'équation primitive E se ramène à une équation à coefficients constants par un changement de fonetion combiné avec un changement de variable (transfor- mation d’Halphen). Ingénieusement composée, suffisamment originale, la thèse de M, Cels constitue pour son auteur un débul fort honorable dans la carrière des recherches person- nelles, Léon AUTONNE. Mouret (G.). — L'égalité mathématique. — Revue philosophique. Août et Septembre 1891. L'étude de M. Mouret est beaucoup plus vaste que son litre ne l'indique. Elle contient, en réalité, toute ET INDEX une théorie nouvelle de la connaissance, que l'auteur applique, en particulier, à la notion de l'égalité, en prenant comme exemple la force, la masse, la tempé- rature et la quantité de chaleur, — l’article de M, Mou- ret est remarquable, tout d'abord, par le soin que prend l'auteur de préciser la significatiou des mots qu'il emploie : voilà un procédé peu habituel aux phi- losophes ; il est vrai que les discussions seraient trop courtes si l'on savait toujours bien sur quoi l’on discute. Dès la troisième page, M. Mouret est amené à se de- mander : Qu'est-ce que la Logique ? Et il arrive à con- clure que ce qu'on enseigne généralement en France sous le nom de Logique ne correspond pas au sens de ce mot. Pour lui, la Logique a pour objet l'étude des objets extérieurs de la connaissance, considérés indé- pendamment de leur nature particulière, c’est-à-dire l'étude des relations et des concepts généraux. Le but à obtenir est de ramener les formes de la connaissance aux notions fondamentales dont l'étude est du domaine de la psychologie, Appliquée à une science en particu- lier, l'analyse logique doit permettre de ramener toutes les notions de cette science aux cone epts primordiaux, communs à foules ces sciences, savoir : l’ordre, le nombre, l’espace et le temps. Il n’est pas possible de résumer en quelques lignes les pages que M. Mourel emploie à préciser le sens qu'il faut attribuer aux mots relations et concept, et à indiquer, en les illustrant au moyen d’une élégante représentation géométrique, quelles sont les conditions qui doivent être remplies pour qu'il existe une rela- tion définie entre deux termes donnés. Ces quelques pages contiennent une méthode d’in- vestigation des plus originales, qu'il serait bien inté- ressant d'appliquer aux différentes sciences exactes, M. Mouret se contente d'en faire l'application à la notion de légalité mathématique, qui est pour lui la notion primordiale que l’on rencontre au début de toute science. C'est là une opinion contraire à celle qu'on admet le plus souvent, sans chercher à approfondir le sujet. M. Mouret regarde la notion d'égalité comme devant précéder la notion de grandeur; et, se reportant à ce propos aux définitions que l'on donne d'ordinaire en mathématiques, il proteste éner- giquement contre ceux qui veulent voir dans ces énon- cés des productions de la « raison pure ». Pour lui, ce qu'on croit ou ce qu'on nie par les lois des mathéma- tiques, ce sont des relations entre les objets du monde extérieur, et pour arriver à obtenir une connaissance positive de ces lois, il faut arriver à les examiner dans leurs termes concrets qui sont les corps ou les phéno- mèénes., La même méthode doit done être employée pour les mathématiques et les sciences objectives. Cette idée reparaît à plusieurs reprises et sous des formes diverses : elle conduit encore M. Mouret à dire : « Une définition n’est pas une opération arbitraire et indéterminée de lesprit; elle ne contient rien de con- ventionnel et est étroitement limitée par des condi- tions, sous peine d'être contradictoire, dépourvue de signification et sans objet réel. » Et plus loin : « Toute définition suppose au moins un fait, lors même que l'objet défini est fictif et n’a pas d'existence réelle, » Je ne prétends pas,parces quelques lignes, avoir donné une idée de l’article si touffu de M. Mouret; j'aurais voulu seulement indiquer quelle quantité d'idées neu- ves contient ce court travail, et signaler ces études, d’un genre trop délaissé en France, surtout au point de vue de l’enseignement, : Georges CnaARPY, BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 821 2° Sciences physiques. Æhomson (Sir W.), Popular Lectures and Addres- ses, T. I. Constitution of Matter (Constitution de la matière) ; (Prix : 9 fr. 50). Macmillan, and C°, Bed- ford Street, Covent Garden, Londres, 1891. C'est une véritable bonne fortune de trouver ras- semblés en un volume ces discours de haute science sous forme populaire, dans lesquels une admirable imagination, guidée par un savoir immense, s’est donnée libre carrière. Beaucoup de ces discours ont jeté dans la physique des idées nouvelles, qui ont rapidement conquis le droit de cité et sont devenues le point de départ d'importantes recherches. Ce premier volume, qui sera suivi à bref délai d’un second (le troisième vient déjà de paraître), est consa- cré presque entièrement à la constitution de la ma- lière ; 5l débute par un discours sur l’attraction capil- laire; on y trouve, en particulier, des diagrammes cal- culés par M. J. Perry d'après la méthode de sir W. Thom- son, et représentant la forme d'équilibre de diverses surfaces libres; il est suivi de courtes notes complé- mentaires, venues postérieurement à l'esprit de l’au- teur, puis de trois importants appendices : Sur certains mouvements que l’on observe à la surface du vin — gravité el cohésion — sur l'équilibre de la vapeur au voisinage d’une surface liquide courbe, —— enfin une note de lord Rayleigh : mesure de la quantité d'huile nécessaire pour arrèter les tourbillons du camphre, La troisième de ces notes, on le sait, est fondamentale, Dès ce premier discours on voit paraitre une notion que l’on retrouvera en plusieurs endroits, celle des forces inter-moléculaires el des sphères d'action, utili- sée plus loin pour la détermination de la grandeur des molécules. Dans la seconde conférence, consacrée aux unités électriques (1883), nous trouvons émise pour la pre- miére fois cette idée du retournement du problème qui conduit à déduire unité de temps de la constante v; les idées qui y sont exposées ont fait trop de chemin pour qu'il soit nécessaire d'entrer dans leur détail. Le discours sur le démon classeur n’est donné qu'en résumé, « Ce démon peut, à son gré, arrêter, où frap- per, ou presser, ou lirer chaque atome de matière, et modifier le cours naturel de son mouvement. Il ne peut ni créer ni annuler de lénergie, mais il peut, comme un animal vivant, en emmagasiner et la rendre quand il lui plait. En opérant par sélection sur les atomes individuels, il peut renverser la dissipation naturelle de l’énergie, peut chauffer la moitié d’un vase plein d'air ou d'un barreau de métal, tandis que l’autre se re- froidit. » Bref, si ce petit démon bienfaisant existait, il nous protégerait contre l’incessante dégradation de lénergie; ce raisonnement par antlithèse nous fail comprendre mieux qu'aucun autre le principe de cette dégradation, L’'Elasticité considérée comme un mode possible de mou- vement (1881), et Les pas vers une théorie cinélique de la malière (1884) laissent entrevoir cette synthèse future des propriétés de la matière, expliquées par le mouve- ment, En ce qui concerne l’élasticité, lanalogie est fort attrayante, Une chaîne fermée, que lon fait tourner rapidement, prend l’aspect d’un anneau rigide parfaite- ment élastique. Nous ne pouvons que mentionner ra- pidement les discours sur : Les Six Chemins de la con- naissance, — autrement dit les six sens, le toucher étant remplacé par le sens de la force et le sens de la tempé- rature — la Théorie ondulatoire de la lumière, la Chaleur solaire, pour en venir au discours fondamental sw la grandeur des alomes (1883); c’est dans ce mémoire que sont indiquées les méthodes au moyen desquelles nous pouvons fixer les limites de grandeur des molé- cules. Cette grandeur est déduite dans l’un des procédés de la chaleur de combinaison du cuivre et du zinc, comme due à une action électrique; nous ne pour- rions mentionner les autres sans entrer dans trop de détails. La conclusion, qui a été confirmée par les esti- mations ultérieures, est que la distance moyenne entre les centres de deux molécules voisines est comprise entre + et is de micron, « Supposons un globe d’eau ou de verre de la grosseur d’un football (15 cm) am- plifié jusqu'à la grosseur de la terre, chaque molécule étant agrandie dans la même proportion. Les sphères ainsi obtenues seront probablement plus grosses que de la grenaille, mais plus petites qu'un football, » Si maintenant nous voulions caractériser la « ma- nière » de l’auteur, nous dirions que l’on chercherait en vain, d’un bout à l’autre du livre, des préoccu- pations littéraires ou oratoires ; la causerie, rendue sans retouches, est familière et vive à la facon an- glaise; l’auteur n'hésite pas à revenir sur ses pas lorsqu'un raisonnement, plus convaincant que les autres lui vient tardivement à l'esprit ; heureux ceux qui peuvent se permettre de ces charmantes négligences, qui donnent à la lecture l’impression d’une singulière fraicheur; ici, au risque de nous voir traité d’imperti- nent, nous dirons que le système est parfois poussé un peu loin, Dans le discours sur la grandeur des atomes, l’auteur montre une difficulté de la théorie de Cauchy, qu'il croit pouvoir expliquer. « Il n’y à pas encore dix-sept heures, dit-il, que j'ai vu la possibilité de cette explication. Je crois la voir très clairement, mais, dans ces conditions, vous m’excuserez de ne pas entrer dans plus de détails. » Le lecteur, en cet endroit comme en quelques autres, n'est-il pas en droit de dé- sirer une petite retouche, indiquant ce qu'ont enseigné les années écoulées entre la publication sténogra- phique de la conférence et sa rédaction définitive ? Ch.-Ed. GUILLAUME, E. de Montserrat et E. Brisac (MM), — Le gaz et ses applications (éclairage, chauffage et force motrice.) — Un volume cartonné, in-18, 366 p. avec 86 figures (4fr.). Paris, J.-B. Baillière et fils, 1891, La bibliothèque des connaissances utiles de MM. J.-B. Baillière et fils vient de s'enrichir d’un nouveau volume qui sera apprécié, parce qu'il est écrit par des hommes compétents et qu'il renferme beaucoup de choses. Ses auteurs sont des ingénieurs de la Compagnie parisienne du gaz; mieux que tous les autres, ils étaient à même d'écrire l’histoire du gaz, de ses progrès et de ses mul- liples applications, Après une étude technique sur les procédés de fabrication, ils passent en revue les divers brûleurs dont ils comparent le pouvoir éclairant et le rendement; puis ils décrivent les meilleurs appareils de chauffage, sans oublier les rôlissoires au gaz, Un chapitre de 40 pages est consacré aux moteurs à gaz: c’est bien court el par suite trop incomplet, mais il sera aisé de combler cette lacune en seconde édition. A, Wirz. Estrati (C. 1.). Professeur de Chimie à la Faculté des Sciences de Bucharest. Curs elementar de Chimie. (Cours élémentaire de Chimie.) 1 vol. gr. in-8° (5 fr.) Carol Gôbl, strada Doamnei, 16, Bucarest, 1891. Lorsque la Convention nationale entreprit la tâche d'organiser en France l’enseignement élémentaire, Lakanal se plaignit fort des livres que divers auteurs composèrent à cette occasion : « Les citoyens, disait « l'illustre conventionnel, qui ont travaillé à ces « ouvrages ont confondu deux objets très divers : des « élémentaires avec des abrégés. Resserrer, coarcter un « long ouvrage, c’est l’abréger; présenter clairement « les premiers germes et, en quelque sorte, la matinée « d’une science, c’est l’élémenter ; il est facile de faire « un abrégé de Mézerai, tandis qu'il faudrait un Con- « dillac pour écrire les éléments de l’histoire. » Je crois qu'on peut, sans se tromper, féliciter le jeune professeur de Bucarest d’avoir su éviter l’abrégé et de nous avoir donné un excellent traité élémentaire de chimie. Elève distingué de M, Friedel, connu du monde chi- 828 - BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX mique par une brillante thèse de doctorat et par la découverte récente de ces belles matières colorantes, auxquelles, pour faire honneur à notre pays, il a donné le nom de Francéines, M. Istrati a exposé avec un indis- cutable talent de professeur les principes fondamentaux de la théorie atomique, aujourd’hui enseignée partout, IL a montré ainsi que cette exposition était susceptible ‘être faite d’une facon simple et avec une grande clarté. Après avoir donné d’abord une classification générale des sciences, pour montrer plus précisément la place occupée par la chimie dans l’ensemble des connais- sances humaines, l’auteur expose les propriétés géné- rales de la matière, définit les atomes et les molécules, les corps simples et composés, et arrive tout de suite à la notion du poids atomique après avoir insisté sur les valences des divers atomes, La Thermochimie et ses lois sont ensuite présentées en quelques pages, pour être suivies des lois des combinaisons, dont l'exposé termine cette introduction. La chimie des métalloïdes commence aussitôt. Ici, l’auteur a quelque peu rompu, fort heureusement d’ailleurs, avec la tradition et le mode d'enseignement consacré par icelle. C’est par familles qu'il étudie les corps, en décrivant simultanément les composés ana- logues. Ainsi, aussitôt après l'hydrogène, sont traités le fluor, le chlore, le brome, l’iode. Un tableau récapi- tulatif et comparatif de leurs propriétés est placé à la fin du chapitre. Dans le paragraphe suivant, M. Istrati étudie, tou- jours simultanément, les quatre hydracides, fluorhy- drique, chlorhydrique, bromhydrique et iodhydrique; nouveau tableau d'ensemble pour récapituler cette étude ; et ainsi de suite pour toutes les familles et les groupes des corps analogues. On voit immédiatement ce que cet ordre a de ration- nel, C’est la chimie mise à sa place et sortie du rang des sciences mnémotechniques comme la botanique. On fait appel au raisonnement de l’élève au lieu de faire appel à sa mémoire, ce qui est infiniment préfé- rable, Partout aussi, les formules de constitution sont données à côté des formules brutes. La manière dont les atomes se combinent entre eux saute ainsi aux yeux ; en outre dans ces formules, M. Istrati a inscrit en caractère plus grosle symbole de l’atome principal, qui attire ainsi l'attention du lecteur et apparaît immédiate- ment comme le centre du groupement. La chimie des métaux est traitée dans le même esprit. Après la chimie minérale et avant la chimie organique, l’auteur a exposé succinctementla théorie de M. Mendeléeff, et a donné le tableau des périodes proposées par le savant russe. Les récentes découvertes de M. Lecoq de Boisbaudran et de M. Winkler rendent très inté- ressantes ces vues sur les groupes naturels des corps simples, et il était tout naturel de les indiquer aux élèves. La chimie organique occupe les À de l'ouvrage envi- ron ; elle est traitée de main de maitre ; la compétence particulière de l’auteur s’y devine à chaque pas, ainsi, du reste, que l'esprit général de notre école atomique française dont M. Friedel est le chefincontesté,. C’est à lui que M. Istrati a dédié son livre, en ajou- tant au-dessous de sa dédicace : « ca semn de recunus- cinta, si admiratiun, si in acelas limp ca omagiu adus seiintei franceze, care a contribuit atat de mult la des- voltarea nostra intelectuala. » C’est un bel hommage rendu à notre Sorbonne, dont les douze professeurs de la Faculté des Sciences de Bucarest sont d’ailleurs d'anciens élèves, En terminant, j'’ajouterai un dernier mot : il serait à souhaiter qu’un ouvrage aussi excel- lent fût traduit en francais. La traduction aurait certai- nement autant de succès que l'original, écrit dans cette belle langue roumaine, que l’auteur a su assouplir au style élégant, clair et sobre, qui convient à une œuvre scientifique. Alphonse BERGET, 3° Sciences naturelles. Sauvageau (C.). — Sur les feuilles de quelques Monocotylédones aquatiques. — Thèse présentée à la Faculté des Sciences de Paris. Ann. des Sc. nat. G. Masson, 120, boulevard Saint-Germain, Paris, 1891. M. Sauvageau, qui est déjà bien connu des botanistes par les nombreuses notes qu'il a publiées sur les Mo- nocotylédones aquatiques, a entrepris la tâche longue et diflicile d'étudier, au point de vue anatomique et en une sorte de monographie, les plantes formant la classe des Fluviales d’Ad, Brongniart; c’est une partie seulement de ce vaste sujet qu'il traite aujourd’hui dans sa thèse. Celte étude générale ne sera pas seule- ment intéressante au point de vue de l'extension de nos connaissances en Analomie générale; mais elle pourra encore nous éclairer sur un certain nombre de questions qu'il sera très intéressant d’élucider. En premier lieu, dans quelle mesure les caractères anatomiques peuvent-ils aider à la classification? En effet, si les Fluviales ont certains caractères communs qui les réunissent, elles offrent aussi des caractères importants qui les séparent, et dès lors, il y a lieu de se demander si ce groupe n’est pas constitué par des plantes d’origine très différente, qui se seraient adap- tées peu à peu à la vie aquatique et auraient ainsi acquis les caractères communs par où elles sont main- tenant rapprochées. L'étude histologique complète des Fluviales et des Monocotylédones voisines permettra seule de résoudre ce problème. En second lieu, tous les botanistes descripteurs sa- vent combien il est difficile de déterminer les plantes aquatiques, surtout les espèces exotiques, sur des échantillons dépourvus le plus souvent des organes de fructification et presque toujours constitués par des fragments de tiges feuillées; de cette difficulté même il est résulté une synonymie très compliquée, à tel point que la même plante a pu recevoir jusqu'à dix noms différents. Il y a donc un grand intérêt à savoir s’il est possible à l’aide de l’anatomie de faire, sur de simples fragments,une détermination spécifique rigou- reuse. Enfin, en dernière analyse, quel peut être le de- gré d'influence exercé par lemilieu sur la structure? _ Pour mener à bien l’œuvre dont nous venons de donner un apercu sommaire, M. Sauyageau se pro- pose de faire successivement la description anato- mique de chacun des groupes de cette classe, en étudiant pour chacun d’eux les différents organes végétatifs de Ja plante : tige, feuille et racine. Le mé- moire de première importance qu'il vient de nous donner comprend l’étude complète et détaillée d’un seul organe, la feuille, considéré dans la famille des Potamogétonacées d’Ascherson; cette étude, qui est faite surtout dans le but de rechercher des caractères histo- logiques assezconstants pour caractériser les différentes espèces, a cependant permis à son auteur d'observer, chemin faisant, quelques faits intéressants et d’un caractère général dont il sera fait mention plus loin. L'auteur consacre un chapitre spécial à l'étude de chaque groupe, ce qui facilitera beaucoup les recher- ches et les comparaisons des botanistes désireux de contrôler leurs déterminations à l’aide des caractères histologiques; on y trouve aussi un chapitre relatif à l'étude des stomates des feuilles aquatiques et un autre traitant des échanges liquides. Les 8 genres que renferme la famille des Potamogétonacées sont succes- sivement passés en revue avec la plupart des espèces qu'ils renferment, Pour chaque genre, on {trouve une étude minutieusement détaillée de l’une des espèces, ce qui permet d’être beaucoup plus bref dans la des- cription des autres, puisqu'il suffit alors d’insister quelque peu sur les caractères différentiels de ces espèces, Dans chaque espèce, l’auteur étudie, non seu- lement la feuille végétative proprement dite, mais en- core la préfeuille et la feuille spathe dans les groupes où elle existe (Zos{érées); pour chacun de ces organes, il note le nombre des nervures, la constitution des BIBLIOGRAPIITE. — ANALYSES ET INDEX 829 faisceaux libéro-ligneux, la manière d’être du paren- chyme et des canaux aérifères, la distributiondes fibres seléreuses, l'absence ou la présence de diaphragmes perforés dans les canaux aérifères, l'absence ou la présence des cellules sécrétrices, etc. Ajoutons enfin que tous ces éléments sont examinés dans le limbe, la gaine, la ligule et le pétiole. Signalons maintenant les résultats les plus intéres- sants de ce mémoire. En premier lieu, il est possible de déterminer spécifiquement les plantes de cette famille par l'examen histologique de la feuille. Cette méthode est pour le moment inapplicable aux Pota- mogelon, car elle donne pour ce senre des résul- lats incertains, mais il y a lieu de penser que le pro- blème pourra être résolu, quand à létude de la feuille viendra s'ajouter celle de la tige, et au besoin celle de la racine. M. Sauvageau à pu encore différencier l’'Althenia filiformis de l'A, Barandonii que les floristes avaient confondu dans ces derniers temps. — Les dia- phragmes qui cloisonnent les canaux aérifères ont, dans tous les cas, même structure et même origine. — L'épiderme des plantes marines n’est pas, comme on l’a cru jusqu'ici, la seule assise chlorophyllienne ; on trouve aussi de la chlorophylle dans les celluies du parenchyme. — Dans un certain nombre de genres (Posidonia, Ruppia, Cymodocea, etc.), on trouve des cellules sécrétrices dont le contenu parait être une ma- tière tannique, — Le bois des faisceaux des feuilles pé- liolées des Potamogeton est tout à fait particulier : il se compose de deux sortes de bois primaire qui sont différentes comme origine, comme structure et comme mode de disparition, — Le système mécanique, con- trairement à l'opinion généralement acceptée, subil très incomplètement l’action modificatrice du milieu, car il prend dans certaines espèces un développement très important, — Les stomates qui manquent géné- ralement dans les feuilles submergées, se rencontrent dans les feuilles de quelques espèces; s'ils ne sont pas utiles à la plante, ils ne lui sont pas nuisibles ainsi qu'en témoignent les expériences faites à ce sujet par l’auteur, Au reste, quand un index de liquide pénè- tre dans un canal aérifère, la plante se protège en subérifiant la membrane des cellules du canal en con- tact avec l'index de liquide. — Jusqu'ici on n'avait jamais signalé l'existence d’une communication entre la nervure médiane et le milieu extérieur ; cependant chez un grand nombre d’espèces, les cellules épider- miques du sommet de la feuille tombent, et la nervure médiane s'ouvre réellement au sommet de la feuille: c'est l’ouverture apicale. Ce fait a conduit l’auteur à prouver l’existence d'échanges liquides entre les plan- les aquatiques et le milieu ambiant, de sorte qu’elles sont parcourues par un courant d'eau analogue au courant d’eau de transpiration des plantes terrestres ; cette constatation des plus intéressantes n'avait jamais été faite jusqu'ici. Après l’énumération des résultats importants etnom- breux de cet excellent mémoire, il me parait bien inu- tile d'en faire ressortir davantage l’incontestable valeur. Cest là un travail longuement et consciencieusement müri, auquel l’auteur n’a pas craint de consacrer plu- sieurs années, et qui se recommandera de lui-même à l'attention de tous les botanistes sérieux; nous sommes d'autant plus heureux d’en faire l’éloge que depuis quelque temps, il faut bien l’avouer, les thèses de Bota- nique n’ont pas été très brillantes, comme les lecteurs de la Revue ont pu en juger. J. Hérarz. Roché (D' Georges). — Contribution à l'étude de l'Anatomie comparée des réservoirs aériens d'ori- gine pulmonaire chez les Oiseaux. These présentée à la Fuculté des Sciences de Paris. Ann. des Se, nat., Masson, 1891. Jusqu'ici tous les travaux consacrés à l'étude anato- mique de l'appareil aérifère des Oiseaux, n’ont inté- ressé qu'un très petit nombre d'espèces. Il est vrai que M. Sappey avait donné une excellente description de cet appareil chez le Cygne et le Canard, que Campana avait fait une étude minutieuse des sacs aériens du Poulet: mais ces travaux ne pouvaient évidemment avoir une portée très générale, et l'anatomie comparée de ce groupe d'organes restait entièrement à faire. C’est ce qui ressort de l'aperçu historique,conscien- cieux dont M. G. Roché a fait précéder son travail, Avec les anciens procédés de dissection, il eût été à peu près impossible d'entreprendre une pareille tâche, et c’est ce qui a amené l’auteur à instituer une tech- nique nouvelle, qui lui a permis d'injecter toutes les vésicules aérifères d’un Oiseau sous une même pression et dans des conditions identiques. Ainsi, il a pu con- naitre la forme, les capacités relatives, les rapports des différents sacs aériens d’un même animal et les varia- tions de ces sacs suivant les divisions zoologiques et les conditions biologiques des différents Oiseaux. Grâce à cette méthode rigoureuse, il a été relative- ment facile à l’auteur d'étudier l'appareil aérien d'un très grand nombre d'individus, et l’on peut voir, d’après les descriptions qu'il fournit, que ces recherches anato- miques apportent à la diagnose zoologique de sérieux et uliles renseignements. Au cours de son travail, il a été amené à envisager le problème de l’aération sous-cutanée, question en- core controversée jusqu'à ce jour, en dépit des impor- tants travaux auxquels elle à donné lieu. M. Georges Roché a démontré d’une facon définitive la présence de lacunes aérifères sous-cutanées, et en a même étu- dié les variations avec la place zoologique et le genre de vie des êtres considérés. L'étude des modifications anatomiques enfin, suivant les conditions biologiques des Oiseaux, dans leurs or- ganes aérifères, l'a amené à quelques remarques ecu- rieuses sur le fonctionnement de ceux-ci. Bien que l’auteur se défende de vouloir élever une théorie anatomique de ce fonctionnement, et qu’il laisse à la physiologie expérimentale le soin d'éclairer cette délicate question, il montre que toutes nos connais- sances sur ce sujet étaient au moins improvisées, sinon fausses, et que, sans l’étude de l'anatomie comparée des réservoirs aériens, il était impossible d’en entre- prendre l’examen physiologique. La classe des Oiseaux constituant un groupe beau- coup plus homogène que la classe des Mammifères ou celles des Reptiles, on admettait volontiers que les no- tions fournies par l’étude monographique de certains types étaient applicables aux autres types du même groupe et, par suite, que la structure et les fonctions des Oiseaux étaient suffisamment connues. Le mémoire de M. Roché, qui a valu à son auteur le titre de Doc- teur ès sciences naturelles, montre que c'était là une idée complètement erronée, et qu’il était téméraire de tirer des déductions générales de quelques notions isolées ou incomplètes. En même temps, ce travail, l'un des plus considérables qui aient été publiés dans ces derniers temps sur l’anatomie et la physiologie des Oiseaux, fournit au zoologiste des éléments nouveaux pour la classification intérieure d’un groupe dont la distribution présente de sérieuses difficultés et dont les divisions n’ont été que trop souvent établies sur des caractères d’une importance secondaire, E. OusraLrr. 4 Sciences médicales. Bureau, — Guide pratique d’accouchements. (prix: 6 fr.) Société d'éditions scientifiques, rue Antoine- Dubois, Paris, 1892, Exposé critique des meilleures méthodes de traite- ment usitées en obstétrique. Avant de présenter la thé- rapeutique, Pauteur rappelle brièvement, à propos de chaque cas particulier, les principaux caractères cli- niques, c’est-à-dire qu'il s’agit là d’un livre essentiel - lement pratique. L'ouvrage se divise en cinq parties : 1° de la conduite à tenir pendant la grossesse; 2° pen- dant l’accouchement ; 3° dans les cas de dystocie; 4° dans les suites de couches; la cinquième partie 890 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX est un abrégé de la technique opératoire obstétricale, D' Henri HARTMANN. Sollier (D: Paul). Psychologie de l’Idiot et de l'Im- bécile. in-8, III — 276 pages avec 12 planches hors texte (5 francs). — F. Alcan, éditeur, 108, boulevard Saint-Germain, Paris, 1891. Le livre de M. Sollier était destiné à combler une im- portante lacune de notre littérature médicale, On s’est peu occupé jusqu'ici, du moins en France, d'analyser l’état mental des idiots et des imbéciles ; on n’a que très rarement songé à tirer parti des matériaux consi- dérables que leur étude pouvait fournir à la psychologie expérimentale, et c'était rendre un véritable service que d'attirer de ce côté l'attention des psychologues. M. Sollier l’a compris et il faut lui être reconnaissant d’avoir entrepris de nous donner un tableau d'ensemble de la vie mentale des dégénérés inférieurs, C'était là une tâche très difficile et qu'on ne pouvait guère espé- rer mener à bien en un premier essai. Il aurait fallu pour interpréter exactement les phénomènes une connaissance approfondie de la psychologie normale et en particulier de la psychologie physiologique qu’il serait injuste d'exiger de M. Sollier. Il est plus fami- lier, et cela est tout naturel, avec la clinique qu'avec les méthodes analytiques de la psychologie ; il se meut avec aisance au milieu des théories contemporaines sur le mécanisme de la volonté, de l'attention ou du jugement, mais il semble qu'ilen ait une connaissance récente et comme extérieure. Il cite Ribot ou Binet comme les scolastiques du xmr° siècle citaient Aristote et comme on cite encore aujourd'hui les autorités dans les séminaires, De là des longueurs, l'exposé très inu- tile parfois de lois psychologiques, familières à tous les hommes du métier, et qu'on irait chercher, s'il en était besoin, dans les traités élémentaires ou les mono- graphies classiques. Le caractère spécial de cet ouvrage (c’est la thèse inaugurale de M. le D" Sollier) peut pro- bablement expliquer les vices de composition qu'il renferme, et je ne doute pas qu'ils ne disparaissent d’une seconde édition, M. Sollier a été, comme tous ceux qui se sont occupés de la question, très embar- rassé pour donner une définition de l’idiotie, Voici celle à laquelle il s’est arrêté : « L'idiotie est une affection cérébrale chronique, à lésion variée, caractérisée par des troubles des fonctions intellectuelles, sensitives et motrices, pouvant aller jusqu’à leur abolition pres- que complète et qui n'emprunte son caractère spécial, particulièrement en ce qui concerne ces troubles intel- lectuels, qu'au jeune àge du sujet qu’elle frappe. » C’est, on le voit, une définition très générale et qui par sa généralité même semble soustraite à toutes les objections. Mais elle nous apprend bien peu de choses et ne peut servir à différencier l’idiot de l’imbécile. II est un point cependant que M. Sollier à signalé et sur lequel il eût insisté utilement, c’est quil faut se garder de considérer l’idiotie où Pimbécillité comme de simples arrêts de développement; l’idiot n’est pas un homme resté enfant, c’est un malade comme l’aliéné ; les troubles moteurs et sensoriels dont il est le sujet, le montrent assez clairement: c’est un dégénéré. M. Sollier a réparti en trois classes les malades dontil s’occupe : Idiots absolus, Idiots simples, Imbéciles. Je ne m'arréterai pas à faire la critique de ces dénomi- nalions qui auraient pu être mieux choisies : absolu el simple sont deux termes qui s'opposent mal l’un à l’au- tre; mais ce sont de simples étiquettes destinées à dési- gner tel ou tel groupe d'individus, M. Sollier a adopté comme principe de sa classification l’état de Pattention chez les malades qu'il étudie; l’idiotie absolue est caractérisée d’après lui par l'impossibilité de l’attention, l'idiotie simple par la faiblesse et la difficulté de l’at- tention, l’imbécillité par son instabilité, C’est à un phé- nomène à la fois complexe et dérivé que s’est attaché M, Sollier : aussi sa classification est-elle arbitraire en quelque mesure et en tous cas empirique. L’attention est un résultat : elle dépend de l’état des sensations, des images et des réactions motrices; sa faiblesse ou son instabilité peuvent provenir de causes très diverses : y a-t-il rien de commun par exemple entre l’inattention du dément et celle du maniaque? Il semble donc que M. Sollier se soit exposé à réunir en un même com- partiment des malades dont les anomalies psychiques soient très différentes; s’il en est ainsi, sa classification n'aurait plus qu’une valeur pratique ; c'est au reste en vue de éducation des idiots et sur les indications des instituteurs qu'elle semble avoir été faite, A en juger par cette classification, les imbéciles seraient de très proches parents des idiots simples ; la faiblesse et l'ins- tabilité de l'attention sont en effet choses très voisines et qui tiennent souvent aux mêmes cduses ; mais dans un autre passage de son livre (p. 266), M. Sollier oppose les idiots et les imbéciles. « L’idiot est, avant tout, un être incapable d’actions et d'idées. C’est un individu incomplètement développé. L'imbécile est au contraire un individu anormalemnt, irrégulièrement développé, capable d'actions et d'idées qui forcément sont anor- males pour la plupart, comme le cerveau qui les éla- bore., L'idiot peut présenter une certaine sensibilité affective, durable; l’imbécile est égoiste, souvent mé- chant, même pour ceux qui lui font du bien. L'idiot agit plus sous l'influence de la douceur, Pimbécile sous celle de la crainte; l’un est timide, l’autre arro- gant; lun est capable de travailler, l’autre est un paresseux endurci; l'un est bon, l’autre est mauvais. Chez l'un le raisonnement est faible, chez l’autre il est faux; chezle premier, la volonté est faible, chezle second, elle est instable, L'idiot n’est guère suggestible, Pim- bécile l’est beaucoup... Les idiots sont extra-sociaux, les imbéciles anti-sociaux. » Il y a sans doute des imbéciles et des idiots qui correspondent à la descrip- tion de M. Sollier, mais il s'en faut beaucoup quelle puisse s'appliquer à tous les idiots et à tous les imbé- ciles; c’est une grande exagération que de prétendre que l'idiot est incapable de mouvements volontaires et que son intelligence est vide d'idées : il y a des idiots éducables, M.Sollier: le sait mieux que personne; tous les imbéciles ne sont pas les êtres brutaux, méchants etingouvernables que décrit M.Sollier : il en est de très doux et qui sont certainement beaucoup moins anor- maux que certains idiots chez lesquels il existe des tics, des contractures, des paresthésies, qui constituent de véritables tares nerveuses et non pas de simples arrêts de développement. En réalité il n’y a pas de fron- tières nettes qui séparent les idiots des’ imbéciles, ni les imbéciles des débiles; tous sont à des degrés divers des déséquilibrés comme les dégénérés supérieurs. — Il a manqué un fil conducteur à M. Sollier dans cette analyse de l’état mental des imbéciles et des idiots ; il l'aurait trouvé très probablement dans l'étude expéri- mentale des sensations et des réactions motrices sim- ples des malades sur lesquels il faisait porter ses recherches. Ce qui fait Le plus défaut à son livre, c'est une vue d'ensemble qui en relie les diverses parties; les variations de l'attention chez les malades lui ont servi à les répartir en diverses catégories, mais cette classification n'est pas une classification explicative ; l'auteur semble souvent n'y pas songer et les différents chapitres de l'ouvrage sont simplement juxtaposés, En réalité, malgré son titre, le livre de M. Sollier est avant tout un ensemble de descriptions cliniques, d'ordinaire fort intéressantes et qui n'ont que le défaut d’être trop générales et un peu superficielles. Le chapitre qui est consacré au langage est peut-être le meilleur; les re- cherches sur l'écriture des idiots et des imbéciles mé- rilent tout particulièrement d'arrêter l'attention, Il faut signaler aussi le chapitre VI qui traite des sentiments et qui renferme de très utiles et très intéressantes des- criptions, et les remarques très curieuses que M. Sollier a faites sur les formes diverses de l'association des idées chez les dégénérés inférieurs. Le livre de M. Sol- lier rendra des services, malgré les vices de méthode que nous avons dù signaler, et les psychologues auront grand profit à le lire. L. MARILLIER, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 831 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 7 décembre. 49 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. À. Markoff : Sur la théorie des équations différentielles linéaires, — M. H. Parenty: Sur les modifications de l’adiabatisme d’une veine gazeuse contractée. 20 SGiENCES PHYSIQUES. — M. G. Hinrichs indique comment on peut, suivant les principes de mécanique chimique exposés dans ses précédentes communi- cations, calculer la température d’ébullition des éthers isomériques des acides gras. — M. H. Moissan répond à la réclamation de priorité formulée par M. A. Besson relativement à la découverte des phosphures de bore. — M..G. Charpy a étudié la variation de la tension de vapeur des solutions de chlorure de cobalt avec la température, La courbe représentative du phénomène est constituée par deux parties reclilignes raccordées par une partie curviligne; la couleur de la solution est rouge franc aux lempératures correspondant à la première partie rectiligne de 1 la courbe, bleu franc aux températures correspondant à la seconde. Ces fails relatifs aux tensions de vapeur sont superposables à ceux observés par M. Etard relativement aux variations de la solubilité; ils comportent la même conclusion, à savoir l'existence de deux états stables pour le chlo- rure de cobalt dissout. — M, Joannis a constaté que le sodammonium et le potassammonium sont décom- posés par divers métaux, notamment par le mercure, le plomb et Pantimoine; l’auteur étudie particulièrement l’action du mercure et celle du plomb en excès, — M. G. Massol à déterminé la chaleur de dissolution de lacide malique actif anhydre, et les chaleurs dé- gagées dans la neutralisation de cet acide par la potasse et la soude ; il a obtenu les malates neutres à l’état cristallisé, — M, Léo Vignon a étudié les pouvoirs rotatoires de scomposants de la soie ; le grés, dissout dans une lessive de soude étendue, à donné une dévia- tion [æ]n — — 39°; la fibroine, desout dans l’acide chlorhydrique a donné une déviation [al = — 409, Ce pouvoir rotatoire varie peu par la dilution ou la neu- tralisation des solutions. La soie est donc lévogyre, comme toutes les matières albuminoïdes, ; 3° SCIENCES NATURELLES, — A propos de la communi- cation de MM. Marcano et Müntz sur la quantité d’am- moniaque contenue dans l’eau de pluie à Caracas (Vénézula), quantité donnée comme plus élevée qu’en Europe, M. Albert Lévy fait remarquer que le chiffre choisi par les auteurs pour représenter la moyenne européenne est notablement trop bas. Beaucoup d’ob- servateurs, et M. Albert Lévy lui-même ont obtenu une moyenne supérieure à celle trouvée par MM, Mar- cano et Müntz à Caracas, — M. N. Wedensky dans des recherches précédentes, avait établi que des excitations électriques très fréquentes et très fortes du nerf moteur mettent les muscles en état d’inhibition. Il a recherché dans quelle partie de l'appareil nervo-musculaire se produit cette inhibition. L'état inhibitoire peut être établi dans un muscle en portant directement les exci- tations sur ce muscle ; mais cet effet est impossible à obtenir sur un muscle curarisé. Le phénomène avait donc son siège dans les plaques motrices, — M, J, Bon- nier a recherché chez ee Orchestiidæ la glande anten- nale, pour décider par la présence ou l’absence de cet organe (rès constant dans le groupe, si cette famille doit être, comme on Je fait généralement, séparée des Gammmarilæ. M. Bonnier a reconnu l'existence de cette glande antennale, mais elle n’est pas ce qu'a décrit sous ce nom chez le Talitrus locusta M. Y. Delage, qui aurait pris pour une glande et son canal excréteur un muscle etson tendon, — MM. G. Pouchet et H. Beau- regard communiquent la liste des grands Cétacés échoués sur la côte francaise depuis 1885 ; le ministère de la marine à organisé un service d'informations spécial qui a permis de profiter de ces échouements pour enrichir les collections du Muséum de nombreuses photographies et pièces anatomiques. — M, A. Giard a continué l'étude du champignon parasite des Criquets pèlerins qu'il a décrit sous le nom de Lachnidium acri- diorum. En variant les milieux de culture eten laissant vieillir ces cultures, il a obtenu des formes nouvelles de fructitication, sur lesquelles il se fonde pour discuter la position systématique de cette espèce. — M. Ed. Heckel a observé dans les graines de l’Arauraria Bidwilli un mode de germination très particulier, dont on retrouve seulement quelques indices chez A. Brasi- liensis. Quand la radicule est sortie des enveloppes de la graine, elle se renfle en un tubercule dans lequel passent peu à peu toutes les réserves de la graine et des cotylédons, qui restent coiffés des enveloppes; puis toute cette partie vidée est coupée par une zone subé- reuse qui se forme à la base des cotylédons, et la gem- mule reste seule attenante au tubercule radiculaire. Sous cette forme, la plantule est plus résistante que dans la graine; c'est pourquoi elle est généralement expédiée d'Australie en cet état. Histoire des Sciences. — M. Nordenskiold, dans une lettre adressée à M. Berthelot, annonce qu'il a entrepris la publication des Lettres et Mémoires inédits de Scheele, Mémoires présentés. La CHAMBRE SYMDICALE de commerce en gros des vins et spirilueux de Paris et de la Seine transmet à l’Académie un apor sur le déplâtrage des vins; elle demande l'avis de la Compagnie sur l'emploi de la strontiane à cet usage. — M. François adresse un Mémoire relatif à un système de torpille automobile, — M. L.Camescasse soumet au jugement de l’Aca- démie une note sur la suppression du postulatum d'Euclide. Séance du 14 décembre 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Poincaré : Sur la distribution des nombres premiers. — M. R. Liou- ville : Sur les intégrales du second degré dans les problèmes de mécanique. — M. A. Petot : Sur une classe de congruences de droites. — M, le général Venukoff expose l’état actuel des travaux géodésiques et topographiques en Russie, — Mile D. Klümpke : Observations de la planète Borelly (Marseille, 27 no- vembre 1891) faites à l'Observatoire de Paris. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. Carvallo, dans une précédente communication, avait montré que des équations du type Boussinesq-Helmholtz satisfont rigoureusement aux lois de la double réfraction en même temps qu'à la dispersion. Il montre aujourd'hui comment ces équations peuvent contenir aussi les lois de la polarisation rotatoire et de la dispersion. — M. H. Bagard propose comme étalon de force électro- motrice un Sn thermo-électrique constitué par deux liquides ; en disposant dans un récipient de forme particulière un amalgame de zinc (contenant 0,0005 de zinc pour 1 de mercure) avec une solution de sulfate de zinc saturée à zéro, les contacts étant maintenus respectivement dans la glace fondante et dans l’eau bouillante, il obtient un couple impolarisable donnant une force électromotrice invariable de Ovolt 1167. — M. Lecoq de Boisbaudran rappelle qu'en l’an- née 1866, il adressait à l’Académie deux notes relatives à la sursaturation, qui ne furent pas insérées aux 832 Comptes-Rendus ; il rappporte textuellement quelques passages de ces deux notes pour montrer que, dès cette époque, il avait reconnu que la sursaturation est un fait absolument général, indispensable à la cristalli- sation, et accompagnant tous les changements d'état, — Dans une précédente communication, M. A. Etard avait montré qu'il est de règle pour les sulfates que leur solubilité dans l’eau décroisse à partir d’une cer- taine température. 1l a cherché si le sulfate de soude obéissait à cette règle, et il a reconnu en effet que la solubitité de ce sel, après avoir présenté les pertur- bations indiquées par Gay-Lussac, reste constante jus- qu'à 230°, et décroît à partir de cette température, De la marche de la solubilité, il tire des conclusions sur l’état du sel en solution. Un hydrate parfaitement défini, mis en présence de l’eau, peut donner lieu à des phé- nomènes plus complexes que la simple dissolution de cethydrate. Cette hypothèse est vérifiée par l’étude de la courbe de solubilité du chlorure de strontium SrCL,6H£0, courbe qui présente une perturbation vers 60°, comme l'avait déjà indiqué Mulder. — M. D. Berthelot, étu- diant par la méthode des conductibilités électriques l’état des sels alcalins de l'acide phosphorique en solu- tions étendues, a reconnu que les phosphates mono et bibasiques sont stables, tandis que le troisième équi- valent de base est presque complètement dissocié. — M. À. Recoura a reconnu l’existence, pour le sesqui- oxyde de chrome, de deux variétés de même composi- tion, mais de propriétés différentes, l'une verte, l’autre violette. Ces deux variétés sont complètement compa- rables à celles que l’auteur a signalées pour le sesqui- chlorure, et se produisent dans les mêmes conditions; — M. G. André a repris l'étude du composé BiO'H, il pense qu'il faut le considérer réellement comme un acide bismuthique; il a réussi en effet à préparer des bismuthates de potassium, de composition plus constante que ceux signalés jusqu'à présent, et qui jouissent d’une certaine stabilité vis-à-vis de l’eau bouillante. — M, C. Friedel reprend, pour les exposer d'ensemble, ses recherches sur la constitution de l'acide camphorique, recherches démontrant que ce composé n’est pas un acide bibasique, mais qu'il a à la fois les fonctions acide, acétone et alcool ter- tiaire, C’est le voisinage de deux groupements fonc- tionnels CO?H et CO et de l’oxhydrile alcoolique qui imprimerait à ce dernier un caractère acide particu- lièrement marqué. D'abord, une telle constitution per- met de faire dériver facilement de la formule du camphre établie par M. Kékulé et généralement admise, une formule de l'acide camphorique, qui traduit bien les propriétés et les réactions de ce composé. Ensuite, il y a diverses réactions dans lesquelles l’acide campho- rique se comporte comme un acide-alcool et non comme un acide bibasique, par exemple le virage de l’orangé Poirier, qui se produit quand on a ajouté à l'acide camphorique une seule molécule de potasse, Enfin, l'étude des éthers camphoriques fournit des preuves convaincantes. Il existe en effet pour chacun des acides camphorique où isocamphorique deux éthers acides isomériques. M. Friedel a obtenu ces isomères, l’un en saponifiant par la potasse l’éther camphorique dié- thylique, l’autre en combinant directement l'alcool à l'acide camphorique en présence d’H CI. Ces deux éthers ont des propriétés physiques distinctes, quoique voi- sines, mais l’un est saponifié très facilement par la polasse, tandis que l’autre résiste à cette saponification ; les mêmes faits s’observent avec l’acide isocampho- rique. — M. P. Mahler a établi de la facon suivante le bilan calorifique de la distillation en grand d’une houille; il a déterminé, d’une part, la chaleur de com- bustion de la houille, d'autre part, les chaleurs de combustion de tous les produits de la distillation et du coke; la somme des pouvoirs caloriques de ces pro- duits accuse sur le pouvoir calorique de la houille un déficit d'environ 3,5 0/,. — M, F. Garras a obtenu par la cuisson à 1200° d’une pâte d'amiante pulvérisée une porcelaine translucide, à pores très fins; cette porce- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES laine fournit des filtres convenant très bien pour la stérilisation des liquides, car les micro-organismes ne la pénétrant pas, il suffit de laver extérieurement le filtre pour le nettoyer. 3° SCIENCES NATURELLES, — MM. A. Gautier et R. Drouin, à propos de la communication récente de MM. Schlæsing fils et E. Laurent sur la fixation de l’azote par les plantes, rappellent leurs travaux sur la fixation de l’azote par le sol, et après avoir comparé les deux séries de recherches, concluent comme ils le faisaient en 1888 : Les sols pourvus de matière orga- nique, et ceux-là seulement, fixent l’azote libre ou am- moniacal de l’atmosphère, même en l'absence des plantes, et la matière organique qui existe dans tout sol arable est l'intermédiaire indispensable de cette fixation d'azote, — M. de Bruyne décrit le tissu con- jonctif réticulé qu’il a observé dans la tunique museu- laire de l'intestin de divers animaux, particulièrement de la grenouille et du cobaye ; les cellules conjonctives anastomosées sont entremélées étroitement avec les fibres musculaires lisses, et réunissent les éléments conjonctifs de la muqueuse à ceux de la séreuse à travers toute la paroi intestinale. — M. L. Roule décrit les premières phases du développement des crustacés édriophthalmes. — M. R. Moniez a reconnu dans un parasite de l'intestin de l'Oxyrhina glauca l'état parfait du Gymmorhynchus reptans, qui m’était jusqu’ici connu qu'à l’état enkysté dans les muscles et le foie de divers autres poissons. — M. F. Regnault a étudié chez les Hindous, où elle est très développée, la fonc- tion préhensile du pied; il a reconnu que le gros orteil possède des mouvements étendus et énergiques d’adduction, d'abduction, d’élévation et d’abaissement, mais jamais d'opposition. — M. de Quatrefages. qui présente cette note, ajoute qu'elle clôt la discussion sur le prétendu gros orteil opposable de l’homme, et que cet argument ne peut plus être invoqué en faveur de l'origine simienne de l’homme. — M. Bleicher ‘signale la présence de coquilles terrestres tertiaires dans le tuf volcanique de Limbourg (Kaiserstuhl, Grand- Duché de Bade). — M. Duponchel énonce sept prin- cipes, qui règlent la circulation des vents à la surface du globe, Mémoires présentés. — M. Fr. Lesska adresse une note d'analyse mathématique. — M de Backer adresse une note sur un nouveau procédé de conservation des matières organiques et sur les applications médicales qu'on en peut tirer. M. A. Fernandus adresse une note relative à un mode de traitement des vignes phylloxérées. — M. Léopold Hugo adresse une note : Sur l’ancienne disparition (1886) de l'étoile nouvelle d'Andromède. — M. Huber adresse une note relative à la formation des anneaux de Saturne. L. LAPIcQuE. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 2% novembre. M. Ed. Nocard : Sur l'emploi de la tuberculine comme moyen de diagnostic de la tuberculose chez les animaux de l’espèce bovine. L'auteur, dans cette note, complète sa communication antérieure (voir la séance du 13 octobre 1891, p. 730) sur deux points importants. Ses nouvelles recherches en confirment d’abord les ré- sultats, en montrant que la tuberculine permet de faire aujourd’hui avec une quasi-certitude le diagnostic de la tubercolose bovine, même dans le cas où la lésion est très limitée. Elles démontrent ensuite et surtout que les injections de tuberculine n’ont aucune influence sur la qualité ou sur la quantité du lait produit, ni sur l'issue de la gestation. Séance du 1°' décembre. M. Lereboullet lit un rapport sur les remèdes secrets. — M. Cornil : Rapport sur le prix Portal. — M. Mé- nière donne lecure d’un mémoire sur les tumeurs adé- noides. — M, Chaumier (de Tours) lit un travail sur _. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 833 l'hystérie chez les nouveau-nés et les enfants au-des- sous de deux ans, Séance du 8 décembre. Le Président annonce à l’Académie la mort de M. Fé- réol, secrétaire annuel, et celle de M. Barthez. Sur la demande du Président, la séance est levée en signe de deuil, Séance du 15 décembre. M. Féréol : Rapport général sur les prix décernés en 1891, lu par M. Bergeron. — M. Le Président : Proclamation des résultats des concours de 1891. Prix proposés pour 1892, 1893 et 1894. — M. Cadet de Gassicourt : Coup d'œil sur la médecine française au x1x° siècle, SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 28 novembre. M. A. Chauveau : Sur le circuit sensitivo-moteur des muscles. (Voir l'analyse de ce travail dans la Revue du 15 décembre, p. 804.) — MM. Chamberlent et Saint-Hilaire ont voulu vérifier expérimentalement si VPasphyxie hâte l’accouchement, conformément à l'opi- nion généralement admise, Une ‘chienne prète à mettre bas a été mise de diverses manières en état d'asphyxie: l'avortement ne s’est pas produit, — M. E. Bourque- lot : Sur la répartition des matières sucrées dans le Cèpe comestible (voir G. R. de l'Académie du 23 no- vembre, p. 798). L'auteur indique un procédé pour dé- celer la tréhalose dans l'extrait alcoolique des champi- gnons ; il frotte une lamelle de verre avec un cristal de tréhalose, dépose au même point une goutte d’ex- trait et observe au microscope; des cristaux caracté- ristiques apparaissent très facilement, — On sait que les courants d’induction appliqués au gastro-enémien de la grenouille dans leur forme habituelle produisent une secousse musculaire plus vive à la rupture qu'à la fermeture du cireuit inducteur. M. Courtade indique diverses manières de disposer les circuits pour obtenir soit l'égalité de la secousse à la clôture et à la rupture, soit une secousse plus forte à la clôture. Les effets physiologiques sont en raison de la vitesse des varia- tions du potentiel. — M. R. Blanchard signale que le Distoma heterophyes de Bilharz, parasite de l'homme, vient d’être retrouvé en Egypte par M. W. Innès. — MM. Abelous et P. Langlois ont détruit les capsules surrénales chez la grenouille, par cautérisation ignée ; ils ont observé les faits suivants : la destruction des deux capsules surrénales entraîne fatalement la mort ; la durée de la survie paraît être en raison inverse de l’activité des échanges. Si on laisse subsister une des deux capsules, ou une partie notable d'une capsule, l'animal ne meurt pas. L'insertion sous la peau, après l'opération, des fragments de capsules, ou bien linjec- tion d'extrait aqueux des capsules retarde la mort. L’injection intra-veineuse du sang d’une grenouille mourante, à la suite de la destruction de ses deux capsules, à une grenouille chez laquelle on vient de détruire ces deux organes, entraîne une mort rapide, — M. P. Langlois à constaté par des recherches calo- rimétriques faites sur le cobaye que la section de la moelle produit une augmentation de la thermogénèse, en même temps que 1 l'animal se refroidit, — M. P. Morau a injecté à des souris du suc cancéreux filtré sur porcelaine ; les résultats ont été contradictoires, — MM. Héricourt et Ch. Richet ont inoculé à deux sin- ges la tuberculose aviaire; les deux animaux ont résisté. Six mois plus tard, inoculés avec la tuberculose hu- maine, ils sont devenus malades, mais vivent encore (52 jours), tandis qu’un témoin est mort au bout de 32 jours. — M. P. Sérieux donne la relation détaillée d'un cas d’agraphie d’origine sensorielle; l’autopsie fit constater des lésions portant sur les centres visuels et auditifs, tandis que les centres psycho-moteurs étaient restés intacts. Séance du 5 décembre. MM. Féré et Herbert ont dosé le bromure de potas- sium dans l'organisme total des cobayes qui en avaient absorbé de fortes doses pendant leur vie. Ils en ont retrouvé des quantités considérables accumulées chez des sujets qui n'avaient présenté aucun symptôme d'intoxication. Chez des femelles pleines, ils ont retrouvé un peu de bromure chez les fœtus. — M. La- borde rappelle à ce propos qu'il a noté autrefois que le lapin est réfractaire à l’action toxique des bromures, A propos du passage du bromure de la mère aux fœtus, il rapporte avoir observé que des femelles de cobayes rendues épileptiques par le procédé de M. Brown-Séquard et qui donnaient naissance à des petits épileptiques donnaient naissance à des petits normaux lorsqu'elles avaient été bromurées avant la gestation, Il a pu, dans un cas chez l’homme, empêcher de la même manière la transmission héréditaire de l’épilepsie, — M. Dupuy rappelle que l’hérédité de l’épilepsie expérimentale n’est pas la règle chez les cobayes, qu'il faudrait donc des expériences très nom- breuses pour démontrer l'influence d’un médicament sur celte transmission, — M. de Coninck signale le pouvoir antifermentescible des ptomaïnes en C8, — MM. Charrin et Gley ont observé que les lapines qui ont été infectées par le bacille pyocyanique et qui ont survécu, où bien qui ont recu en grande quantité les produits solubles de ce bacille, ne peuvent plus repro- duire normalement; elles avortaient ou bien les petits ne grandissent pas et meurent jeunes, — M. Galippe a trouvé des parasites dans des fragments de foie et de rein normaux, recueillis dans des conditions rigou- reuses d’ aseptie. Il conserve quelque temps ces s frag- ments à l’étuve avant que les mettre en contact avec les milieux nutritifs, et se sert pour cela des tubes de culture spéciaux. — A propos de cette communication, M. Richet rappelle que dans des expériences faites avec M. L. Olivier, il a trouvé fréquemment des microbes dans les muscles des poissons. — M. Pou- chet rapporte avoir observé souvent des microbes en grande quantité par l’examen microscopique direct des rates de poissons. — M. Physalix confirme le fait, — M, Laborde rapporte des faits cliniques des- lüinés à établir la grande tolérance des malades pour lé bromure de strontium à haute dose; mais il importe de s'assurer que le strontium est rigoureusement exempt de baryum, Il fait remarquer que la loi de toxicité moléculaire, telle que M. Richet l’a démontrée pour la famille des métaux alcalins, ne semble pas s'appliquer à la famille des métaux alcalino-terreux. L. LAPICQUE. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 18 décembre, M. A. Berget indique la méthode qu'il emploie pour mesurer la durée d’oscillation d’un pendule. Il a re- cours à un enregistrement optique. Le pendule est muni d'un écran percé d'une fente sur laquelle une len- tille fait converger de la lumière ; une autre lentille re- prend ces rayons et donne une image de la fente sur une bande photographique, Quand le pendule passe dans la verticale, la fente laisse passer la lumière du- rant un temps très court, et l’on a un trait sur la bande photographique : cette bande se déplace comme une bande de récepteur Morse, On peut inscrire ainsi les oscillations pendant un jour sidéral. Le commence- ment et la fin du jour sidéral se déterminent par le passage d’un même astre sous la croisée de fil d’une lunette méridienne, Une seconde fente lumineuse, constamment occultée par un écran peut être dévagée en touchant un bouton qui ferme un courant: on presse ce bouton au passage de l’astre dans la lunette,et l'on a ainsi les traits marquant ‘le commencement et la fin de lPexpérience sur la même bande que les traits indi- quant les oscillations. Une modification de cette mé- 834 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES thode permet d'avoir non seulement les durées des os- cillations, mais leurs amplitudes, ce qui permettra la correction due à ce que l'amplitude n’est pas infini- ment petite, dans le calcul de g. Une lentille faisant partie du système oscillant donne d’un point lumineux fixe une image qui se déplace horizontalement à chaque oscillation, sur une bande qui se déroule verticale- ment, On a une sinusoide qui représente le mouve- ment même du pendule, Pour marquer le commence- ment et la fin du jour, on occulte le point lumineux lors du passage de l’astre : on a une petite interruption sur la sinusoide, Enfin, comme il est difficile de se procurer des bandes photographiques sensibles assez longues pour permettre l'enregistrement pour un jour entier, on peut, par un artifice, ramener celte inscrip- tion à une inscription électrique. Il ne faut en aucun cas fixer quoi que ce soit à l'appareil oscillant, car la durée de son oscillation serait altérée par le frottement le plus léger. Mais on peut faire tomber un rayon lu- mineux qui n'est transmis qu'à chaque passage dans la verticale sur l’une des électrodes d’une pile photo- électrique formée de deux lames d'argent iodé en solu- tion chlorhydrique : on a un courant trop faible cepen- dant pour permettre un enregistrement automatique. On se sert du galvanomètre comme relai : une goutte de mercure placée à côté de l'aiguille mobile est tou- chée par cette aiguille dès qu’elle est déviée, et ce con- tact ferme le circuit métallique d’un autre courant qui est aussi fort que l’on veut, et sur lequel est inséré un récepteur Morse, Ces diverses méthodes permettent d'a- voir la durée d’oscillation d’un pendule sans fatigue et avec une très grande précision, — M. H. Becquerel rappelle quelques résultats obtenus par son père dans l'étude de la phosphoroscence ; il a cherché à relier ces résultats par une formule déduite de considérations théoriques. M. Edmond Becquerel étudiait la déperdi- tion d'intensité lumineuse avec le temps, d’une surface phosphorescente, en plongeant à côté de cette surface dans l’obscurité, une surface de papier huilé éclairée par une lampe placée derrière et mobile sur un banc perpendiculaire à cette surface, On déployait la lampe de facon qu’à chaque instant les deux surfaces parais- sent également éclairées, et on étudiait les variations de la distance de la lampe avec le temps. L'inverse du carré de cette distance est proportionnel à l’in- tensité lumineuse de la substance phosphorescente, M. H. Becquerel a songé à expliquer la phosphores- cence en admettant que les vibrations lumineuses s'a- mortissent peu à peu, eten leur appliquant les résultats relatifs au mouvement du pendule dans un milieu ré- sistant, En prenant une force amortissante proportion- nelle à la vitesse du mouvement, on a la formule con- nue qui relie l'intensité au temps par une exponentielle négative. La perte de lumière suivrait dans cette hypo- thèse la même loi que le refroidissement : mais cette formule ne s'accorde pas du tout avec l'expérience. Si l’on suppose que la force amortissante est proportion- nelle au carré de la vitesse, on arrive pour l’intensité à 1 (a + bt} des constantes, ce qui revient à dire que la distance 7 de la lampe est une fonction linéaire du temps. La comparaison avec les nombres de M. Edmond Bec- querel montre que cette relation se vérifie très bien dans le cas où l’on a affaire à des substances simples bien définies, Dans le cas de mélanges de substances phosphorescentes, comme le sulfure de calcium du commerce, on à une loi plus complexe, car l'intensité résultante est la somme de plusieurs termes tels que 1 (a + bt)2 néaire du temps, On peut toujours représenter les résul- fats en admettant que à est une fonction de la forme > ———— dont on détermineles constantes à, b, ete., 2 (a + bt}* par les expériences mêmes, — M. Guillaume donne à une formule très simple i — où «a et b sont et la distance y n’est plus une fonction li- la Société quelques détails sur les décisions de la Com- mission anglaise du Board of Trade relatives aux uni- tés électriques, en renvoyant pour plus de détails à l’article qui a paru dans la Revue sur le Congrès de Cardiff, (Revue du 30 oct., p.687.) Bernard BRUNHES. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 2 décembre M.Adriansignaleles difficultésquel’on rencontre dans la préparation des sels de strontium purs, qui sont ac- tuellement employés en pharmacie ; ilest presqueimpos- sible de les débarrasser complètement du baryum,incon- vénient grave à cause de la toxicilé des sels de ce métal, Parmi les méthodes qui lui ont semblé les meilleures pour la séparation des dernières traces de baryum, celle qui donne les meilleurs résultats consiste à traiter les sels de strontium par le sulfate de strontium dis- sous. À la suite de cette communication, MM. A. Gau- tier, Prillat, Meunier et Lindet présentent quelques observations sur l'emploi des sels de strontium et sur la séparation de ces sels d’avec ceux de baryum. — M. Lindet rappelle que M. Baudry a imaginé un procédé rapide pour le dosage de la fécule dans la pomme de terre; ce procédé repose sur la transforma- tion de la fécule en amidon soluble par l’action de l'acide salicylique à 100° et l'observation au sacchari- mètre de la solution, M. Lindet a étendu le procédé de M. Baudry à toutes les matières saccharifiables et fermentescibles contenues dans les orges et les malts destinés au travail de la brasserie; il a dû modifier le procédé : la solubilisation de l’amidon se fait à 407-108° dans une solution saturée de sel marin; les liqueurs filtrées ne sont pas examinées au saccharimètre, mais saccharifiées au moyen de l'acide chlorhydrique, et le glucose dosé par la liqueur de Fehling, on calcule en partant de ce dosage la quantité d’amidon. Il résulte d'a nalyses faites par l’auteur que le développement des radicelles pendant la germination n’emprunte au grain que l’amidon, les matières azotées, les matières grasses et les sels, mais le ligneux reste intact. — M, À. Gau- tier communique une note de M. Grawitz sur la tein- ture en noir d'aniline, et indique comme nouvelle et donnant des résultats supérieurs à toutes les autres formules la proportion qu'il emploie, — M. Lauth discute la valeur des indications de M. Grawitz, et sur- tout leur nouveauté, et rappelle qu'il a depuis long- temps proposé et appliqué des formules qui permettent de teindre sans les altérer les tissus légers. — M. Zune envoie une note dans laquelle il dit que ses recherches sur les corps gras l’ont amené à démontrer que le point de fusion et celui de solidification des graisses sont identiques. Que la détermination des indices de ré- fraction des solutions saturées de matières grassses dans les divers dissolvants constitue un des meilleurs moyens de rechercher la falsification de beurres. Enfin qu'on peut facilement au moyen du réfractomètre re- chercher l'huile de résine dans l'essence de térében- thine. Séance du 11 décembre. M. Gasselin, en faisant agir le fluorure de bore sur l'alcool méthylique absolu, a obtenu plusieurs com- posés intéressants qui sont des fluorhydrines boriques : ce sont des composés bouillant à basse température 56-58, 90°: le second est cristallisé et fond à 41°. Ils répondent aux formules F1? FI Bo£ Bo< Dé N'(ocH3)2 N(OCH:) Il a également obtenu le composé Bo (OCH°). — M. Auger a réussi à obtenir l’a-naphtylamine mono- nitrée, par l’action directe de l'acide nitrique sur l'anaphtylamine en solution acétique; ce procédé de préparation n'avait pas encore été indiqué, et on se servait de la réduction partielle du dinitronaphta- ACADEMIES ET SOCIËÈTÉS SAVANTES 835 lène, Avec la B-naphtylamine dans les mêmes condi- tions on obtient une naphtylamine dinitrée., — M. L. Bourgeois a continué ses recherches sur la sublima- tion des composés azotés dans le vide, et a réussi à sublimer de l’urée sans l’altérer, — M. Maquenne a remarqué que si l’on distille dans un courant d’azote de l’amalgame de baryum, afin de l’enrichir en baryum, il y a fixation par ce métal d’une grande quantité d'azote gazeux, qui est reslituée ensuite par l’action des réactifs sous forme d’ammoniaque, A, CouBes. SOCIETE MATHEMATIQUE DE FRANCE Séance du 2 décembre M. Carvallo, revenant sur le théorème fondamental pour la résolution numérique des équations qu'il a fait connaître dans sa thèse, précise les conditions de son emploi et signale diverses applications, impor- tantes au point de vue pratique, qui peuvent en être faites. — M. Raffy montre que, parmi les surfaces dont les rayons de courbure principaux sont fonctions lun de l’autre, les seules qui soient applicables sur une surface de révolution à méridienne générale, sont les hélicoïdes. — M. F. Lucas a élé amené à penser, au cours de ses études de mécanique électrique, que les lois concrètement homogènes du fonctionne- ment d’une machine doivent pouvoir se représenter par des formules indépendantes du choix des unités fondamentales de longueur, de masse et de temps. Il cite, à l'appui de cette thèse, deux exemples remar- quables relatifs à une dynamo à courants alternatifs avec induit sans fer et flux inducteur sinusoïdal. Si, pour une fréquence déterminée quelconque, on fait varier la résistance extérieure, on obtient divers ré- gimes permanents ; la puissance électrique moyenne totale W est alors liée à l'intensité moyenne I du courant par la formule 1) Ne et pu (1) T dans laquelle figurent comme constantes la force élec- tromotrice moyenne E, le coefficient de self-induction TNCDE ; ÉLUS L de linduit et la fréquence T° Si, pour une valeur déterminée quelconque de la résistance extérieure, on on oblient divers régimes fait varier la fréquence T: permanents ; l'intensité moyenne I du courant est alors liée à la fréquence par la formule 9 x? Q 2 LR —— @) R2T2 + 47° L? dans laquelle figurent comme constantes le flux induc- teur maximum Q,, la résistance totale R du circuit et le coefficient de self-induction L. Remplacant dans la formule (1) les variables con- crètes W et I par les variables abstraites, 27 L 2rL PM ET ENT Tr = on trouve (L bis) Yi x? — m4. Remplaçant dans la formule (2) les variables con- crètes I et Te les variables abstraites, PU L Ve . D EN = YU= —— R T ? y QG ; on trouve (2 bis) ay? — à + y = 0. Les phénomènes sont ainsi représentés, aux échelles près, par des courbes absolument indépendantes des éléments concrets de la machine. M. F. Lucas estime qu'il y a là l'embryon d’une loi de philosophie natu- relle qu'il se réserve d'approfondir. Séance du 16 décembre M. Hermann expose sa nouvelle méthode crypto- graphique, méthode de correspondance des lettres ou es clefs indéfinies, La méthode la plus rapide pour chiffrer et déchiffrer consiste à ranger les doubles co- lonnes des planches 2 et 3 de la brochure de M. Her- mann dans l’ordre des lettres de la clef, — M. Félix Lucas fait une nouvelle communication relative aux équations abstraites du fonctionnement des machines. Con- sidérant l'équation différentielle des courants induits alternatifs, entre l'intensité I du courant et un instant quelconque {, il démontre que si l’on admet à priori qu'il doit exister une équation finie numérique entre let, cette hypothèse conduit à l'intégration de l’équa- tion proposée et se trouve entièrement confirmée par le résultat obtenu, — M. Carvallo à été amené par la précédente communication de M. Luc as sur ce sujet à l'énoncé de théorème que voici : Si, dans un type de machine, une fonction dépend seulement de 3 paramètres caractéristiques de la machine, et si on construit les courbes qui représentent cette fonction dans deux machines du méme type, la-deuxième courbe se déduit de la première par un simple changement dans les échelles des abscisses et des ordonnées. La démonstration de ce théorème est basée sur l’homogénéité des équations de la physique par rapport aux trois grandeurs fondamentales : lon- gueur, temps et masse. — M. Fouret expose, en la simplifiant encore, une démonstration très simple du théorème de Budan-Fourier donnée par M. Niewen- glowski dans son Cours dalgèbre. I rappelle comment on en conclut immédiatement le théorème de Descartes et la méthode de Newton pour trouver une limite supé- rieure des racines d’une équation. — M. Désiré André fournit des indications sur des démonstrations égale- ment très simples du théorème de Descartes et du théorème de Budan-Fourier, données il y a plusieurs années, par Finck et par M. Ossian-Bonnet. M. n'OcAGne. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 26 novembre. 1° SGIENCES MATHÉMATIQUES. — Sir William Thomson fait une communication sur l'instabilité du mouve- ment périodique. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. F. G. Sinclair présente une note sur un nouveau mode de respiration chez les Myriapodes. Les Scutigéridae, d’après l’auteur, res- pirent au moyen d'une série d'organes placés sur la ligne dorsale médiane, au bord postérieur de chaque anneau, excepté du dernier, Ce type de respiration diffère à quelques égards de celui des autres Myriapodes; mais à d’autres points de vue on peut rapprocher ces organes des trachées de certains Myriapodes. Les or- ganes respiratoires des Scutigères occupent donc une situation intermédiaire entre les trachées des Myria- podes et les poumons des araignées. On peut ainsi constituer une série dont le terme le plus bas est formé par les trachées, les termes moyens par l'organe res- piratoire des Scutigères et les poumons des araignées et le terme le plus élevé par les poumons des scorpions. — MM. Wood-Mason et A. Alcock présentent une nouvelle note sur la gestation chez les raies indiennes. Ils ont fait des observations : 1° sur la femelle du trygon walga au moment de la parturition et sur les jeunes au moment de la naissance ; 2 sur l’utérus et les fila- ments nourriciers (trophonémata) du trygon walga à la fin de la gestation, et 3° sur l'utérus et les filaments nourriciers (trophonémata) du trygon walga au com- mencement de la gestation. Les auteurs ont constaté qu'au début de la gestation, il existe à la surface des trophonémata, une membrane muqueuse composée de 836 grandes cellules à noyaux non différenciés et de glandes pleines (solid) non encore développées; et que, d'autre part, au terme de la gestation il existe un feuillet épi- thélial composé de cavités glandulaires à divers stades de dégénération; ces observations fournissent une preuve démonstralive du fait que ces glandes se déve- loppent pour les besoins spéciaux de la xestation; elles semblent être des glandes lactées dont la sécrétion est destinée à la nourriture de embryon. Le lait arrive au fœtus par de larges orifices. L’estomac fœtal consiste simplement en un canal que traversent les aliments aisément assimilables qui sont alors absorbés par la spirale intestinale. Il est probable que les échanges respiratoires s'effectuent à travers la peau très fine du fœtus lorsqu'elle vient en contact avec les trophonemata vasculaires et la paroi utérine. — MM. Lauder Brun- ton et Sheridan Delepine présentent une note sur quelques-unes des variations observées dans le foie du lapin sous l'influence de certaines conditions physiolo- giques et pathologiques. Ils ont recherché quels sont les changements que l’on peut observer dans les cellules du foie sous l’influence du stimulus naturel de la diges- tion. Pendant la digestion, le glycogène s’accumule dans les cellules et remplit graduellement toutes les mailles du mitoma. Ce processus commence dans la zone hépatique presque immédiatement après le com- mencement d'un repas, atteint son maximum de la troi- sième à la huitième heure, puis décroit graduellement jusqu’à la douzième heure; quelques grains seulement restent alors dans la zone hépatique, qui est ainsi que la première et la dernière infiltrée de glycogène, Les au- teurs ont aussi observé l'accumulation d’un pigment ferrugineux dans les cellules du foie. Ce pigment apparaît nettement cinq heures après un repas; son abondance augmente graduellement, et, d’après les réactions micro-chimiques, elle atteint son maximum à la douzième heure, pour diminuer ensuite rapide- ment. Le premier effet produit par un repas est déterminé par une diminution de ce pigment fer- rugineux dans les cellules hépatiques. Les signes de l’activité des cellules du foie apparaissent dans l’ordre suivant : 4° il se produit d’abord des altéra- tions dans la dimension des mailles du mitoma et dans sa distribution; elles apparaissent très vite et persistent jusqu'à la huitième heure au moins après le repas; 2° il s’accumule dans les cellules certains pro- duits qui ont été séparés des aliments et absorbés, mais qui n'ont pas encore été assimilés (glycogène); ce phénomène apparaît très peu de temps après le repas et atteint son maximum entre la troisième et la huitième heure ; 3° il s’accumule dans les cellules cer- tains produits qu'elles ont séparés des aliments en raison de leur activité fonctionnelle spéciale et dont elles ne se sont point encore débarrassées (pigment ferrugineux). Ce phénomène atteint son maximum à la douzième heure, — MM, W. M. Bayliss et E. H. Starb- ling présentent une note sur les phénomènes électro- moteurs du cœur des mammifères. La méthode adoptée dans ces recherches, consistait à mettre en rapport au moyen d'électrodes non polarisables deux points de la surface du cœur avec un électromètre capillaire. Une image du ménisque était recueillie sur une plaque photographique en mouvement; on enregistrait éga- lement des contractions du ventricule, un tracé chro- nographique et le moment de l’excitation lorsqu'on se servait d’excitants artificiels. Les auteurs ont constaté que chez les animaux dont le cœur est dans une condition aussi normale que possible la variation élec- trique présente toujours deux phases: la variation négative de la base précède celle de la pointe; les plus légers changements de température des diverses parties du cœur agissent cependant profondément sur le caractère et la direction de cette variation. Séance du 10 décembre. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. A. Common : Sur la nécessité de seservir de verre bien recuit et homogène ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES pour les miroirs de télescope. L'auteur s'était procuré en 1880 à la manufacture de Saint-Gobain un disque en verre de cinq pieds de diamètre et de cinq pouces d’é- paisseur pour faire un miroir, destiné à un télescope de cinq pieds. Ce morceau de verre fut déposé contre un mur, ef il resta appuyé contre cette paroi jusqu’en 1886. Il fut alors poli à la manière habituelle; mais lorsqu'on l’essaya, on constata qu’il donnait une image elliptique d’un trou circulaire; ni polissage local, ni repassage à la meule ne purent venir à bout de faire disparaitre ce défaut; aussi laissa-t-on ce disque de côté et s’en procura-t-on un autre pour le remplacer. On découvrit en polissant ce nouveau disque les causes du défaut qui existait dans le premier, Le polissage produit une certaine quantité de chaleur; on s’apereut en essayant le second disque immédiatement après un polissage, qui avait duré trois heures, que sa distance focale s’était accrue de quatre pouces, mais trois heures après la distance focale avait repris sa valeur normale. M. Common croit que les défauts du premier miroir sont dus à ce qu'il n’était pas fait de verre bien recuit; après s'être échauffé par le polissage, il n’a pas pu se contracter régulièrement et a perdu ainsi sa Da géométriquement parfaite. — M. W. Brennand : Sur le Surya Siddhanta (astronomie indoue). Il résulte des recherches faites par l’auteur que les Indous connais- saient la précession des équinoxes et ses effets, ainsi que la théorie du mouvement lunaire et planétaire. Ils avaient déterminé très exactement le diamètre de la terre et la distance de la lune, ils savaient calculer les orbites des planètes à l’aide du mouvement accompli chaque jour par la lune dans son orbite, ils savaient aussi calculer et prédire les éclipses de lune et de soleil, et avaient une sérieuse connaissance de la plu- part des problèmes fondamentaux de l’astronomie. 29 SGIENCES PHYSIQUES. — M. H. L. Callendar : Sur un thermomètre à air compensateur, L'instrument est du type à pression constante, et est construit de telle sorte que les changements de température des tubes qui s'unissent au bulbe du thermomètre n’ont aucune action sur les lectures, ce qui permet de n’en pas tenir compte dans les calculs. Pour arriver à ce résultat, il faut employer deux jeux de tubes de connexion d'égal volume et ayant la même température, disposés de telle sorte que leurs actions soient différentielles et se com- pensent. La masse d’air enfermée dans le bulbe du thermomètre et dans un autre bulbe contenant du mercure, où l’air peut se dilater, est maintenue égale à la masse fluide contenue dans un bulbe rempli d'air, de densité convenable qui exerce une pression cons- tante lorsqu'il est maintenu à une température fixe. celle, par exemple, de la glace fondante. Ce bulbe com- munique avec un jeu de tubes de connexion égaux en volume à ceux du bulbe thermométrique lui-même et semblablement situés. L’instrument étant ainsi com- pensé, on gradue en degrés un des tubes du bulbe à pression constante; on peut lire sur cette graduation la température du bulbe thermométrique, etlesindications sont aussi aisées à lire que celles d’un thermomètre à mercure. — MM. W. Ramsay et Sydney Young font une communication sur quelques-unes des propriétés de l’eau et de la vapeur. Dans ce mémoire, les auteurs donnent des tables des volumes orthobariques de l’eau liquide entre 100 et 270°, de la compressibilité de l’eau à différentes températures, des pressions de vapeur d’eau jusqu'à 270° et de la densité de la vapeur d’eau sous diverses conditions de température et de pression, Regnault n'avait pas mesuré la pression de la vapeur pour les températures supérieures à 220°. Les nouvelles recherches confirment d’une remar- quable facon les mesures de Regnault et donnent pour les températures plus élevées des résultats concordants. Les densités de la vapeur saturée mesurée directement sont presque identiques à celles que Regnault à cal- culées au moyen des chaleurs de vaporisation ; mais au voisinage du point de condensation de la vapeur, spé- cialement aux basses températures, la pression esttrop ACADÈMIES ET SOCIÈTES SAVANTES 831 basse à cause de l’adhérence de la vapeur d’eau au verre qui détermine la condensation à des pressions inférieures aux pressions de vapeur, Les mesures pri- ses au voisinage du point de condensation sont donc nécessairement incertaines ; mais les nombres calculés à l’aide des résultats de Regnault pour des volumes de vapeur saturée concordent avec une exactitude suffi- sante avec les nombres obtenus par la mensuration directe à des volumes un peu plus grands que ceux de la vapeur saturée. — M. G.J. Walker fait une commu- nication sur la répulsion et la rotation produites par les courants électriques d’induction. Le P°Elihu Thom- son à démontré expérimentalement que deux circuits cirulaires dont les plans sont perpendiculaires aux lignes qui joignent leur centre se repoussent l’un l'autre quand un courant induit traverse l’un d'eux, et que si leurs centres coïncident et que leurs plans for- ment un angle aigu, ils constituent alors un couple tendant à accroître la grandeur de cet angle. On s’est servi de ces résultats pour mesurer les courants d'in- duction, et l’auteur à calculé des formules pour déter- miner les intensités respectives de la force et du cou- ple. Une autre expérience consiste à placer une feuille de cuivre de manière à couvrir à demi le pôle d’un électro-aimant ; on met alors par-dessus le tout et près du pôle une sphè re creuse de cuivre; l’action électro- magnétique produit un couple assez puissant pour vaincre la résistance due au frottement et faire tour- ner la sphère. Les recherches de M. Walker montrent que si la sphère tourne c'est que les phases des courants induits dans la plaque de cuivre ne coïn- cident pas avec celles des courants de l’aimant, et non parce que cette plaque de cuivre agit à la manière d’un ércan et rend le champ asymétrique. Richard A. GREGORY. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 4 décembre M. W. Hibbert. « Un champ magnétique perma- nent ». L'auteur a observé la constance approximative d'un barreau aimanté depuis longtemps, et il a obtenu une constance beaucoup plus rigoureuse en adjoignant aubarreau des pièces polaires, de manière à constituer un circuit magnétique à peu près fermé, de faible résis- tance magnétique.Le modèle qu'il décrit est formé d’un barreau d’acier de { pouce de diamètre et 2 pouces !/, de long avec un disque de fonte de 4 pouces de dia- mètre et 5 2 d'épaisseur, fixé à un bout. L'autre bout est introduit dans une calotte hémisphérique en fer qui surmonte le barreau et vient s'épanouir à l’entour de la surface supérieure du disque. Un espace annu- laire, large de moins de = de pouce, est laissé à l'air entre la surface cylindrique du disque et l'intérieur de la calotte hémisphérique, et quand le barreau est ai- manté, il existe un champ magnétique intense dans cet espace. Pour l'utiliser à la production d’impulsions électromagnétiques, une bobine de filest enroulée dans une étroite rainure, sur un tube de laiton qui peut glisser à travers l'espace annulaire, et couper ainsi toutes les lignes de force. Le tube est disposé de ma- nière à tomber par son propre poids, une détente soi- gneusement réglée permettant de le déclancher au mo- ment voulu. Il ÿ a 90 tours de fil sur la bobine, et le flux magnétique total à travers l’espace d’air est ‘d’en- viron 30.000 unités C, G. S. On obtient alors une impul- sion électromagnétique intense, même avec des résis- tances de 10.000 ohms. La vérification des trois ins- truments a montré qu’on n'a pas eu pratiquement, de va- riation du champ magnétique durant sept mois. L'auteur cousidère ce résultat comme satisfaisant et se propose de faire de son appareil un étalon de champ magnétique. Pour faciliter les calculs, il s’arrangera de manière à faire des étalons d’un nombre plus commode, de 20.000 ou 25.000 unités, par exemple. La note men- tionne les divers usages de cet instrument, et indique un moyen simple de détermination de la perméabilité par la méthode du magnétomètre. M. Blakesley pré- tend que le nom d' étalon magnétique est impropre, qu'on à en réalité une force électromotrice d’impulsion constante, M. Sumpner dit que la constance de la sensibilité du galvanomètre d’Arsonval donne la me- sure de la constance des aimants faisant partie de cir- cuits magnétiques à peu près fermés. De tels instru- ments, en usage à l’Institution centrale, restent sans changement depuis des années. M. S.-P. Thompson trouve très intéressant l'appareil de M. Hibbert et es- time qu'il pourra rendre de grands services dans les laboratoires. Des piles-étalons ne méritent pas toujours confiance, et les condensateurs sont les étalons de mesures électriques les plus défectueux, Au point de vue de la constance du magnétisme d’un barreau, M. Thompson rappelle les résultats de Stronhal et Ba- ne et de Hookham.M. Watson demande quelle est la perte pour 100 d'intensité de l’aimantation dans les aimants Hibbert. Les barreaux employés dans les oh- seryations magnétiques ont été fréquemment étalonnés ; ils perdent environ 51/, en 6 mois, M. Ayrton de- mande quel est le coefficient de pere e de l’appa- reil de M. Hibbert. Il pense que cet appareil rendra de très grands services si le magnétisme est réellement permanent. M. Hibbert répond que le coefficient de température de ses aimants est grossièrement de 0,03 0/,, mais il n'a pas encore fait sur ce point des mesures assez précises. — M. Ayrton, président, com- munique « une note sur les champs tournants (rofatory currents) ». On peut obtenir des courants alternatifs avec une dynamo à courants continus ordinaires, en établissant le contact avec deux points de l’armature, en joignant ces points à deux anneaux isolés sur l’axe.de la machine, et recueillant le courant par deux balais, Un moteur à courant continu, ainsi traité, transforme les courants directs en courants alternatifs ou en puis- sance mécanique. Si l'on choisit deux couples de points sur l’armature, situés aux extrémités opposées de deux diamètres rectangulaires, on a deux courants alter- natifs ayant une différence de phase de 90, et en choi- sissant des points convenables sur l’armature,on a deux, trois courants ou plus, ayant une différence de phase d'un angle voulu. Dans les moteurs ordinaires, de pa- reilles connexions seraient compliquées, mais le systè- me Ayrton et Perry, à armature fixe, se prête facilement à cet objet, car on en peut établir le contact avec un point quelconque de l’armature, avec la plus grande fa- cilité.On présenteun moteur de ce genre, où les contacts sont élablis avec quatre points équidistants sur l’arma- ture, En réunissant les deux points opposés par des fils de platine fins et faisant tourner lentement le moteur, on voit les fils rougir alternativement, l’un d’entre eux étant lumineux quand l’autre est obscur, et vice versa, ce qui prouve l’existence de deux courants dans le sys- tème. Quand les quatre points sont joints aux quatre coins d’un carré de fil de platine, les fils deviennent incandescents l’un après l’autre, la lumière parcourt le tour du carré et donne ainsi l’idée du champ tournant. Un moteur à courants alternatifs Tesla à été ainsi animé par deux courants ayantune différence de phase de 90° obtenus avec l’armature du moteur à courants continus Ayrton et Perry mentionné. L'auteur donne le calcul de la différence de phase entre les deux cou- rants alternatifs qui proviennent de deux paires de contacts établis aux extrémités de deux diamètres qui font entre eux l’angle &. — M. Perry : Sur les étais et les tirants qui supportent une charge latérale. Il re- marque que, dans le cas des étais, un léger défaut de rectitude peut réduire considérablement la charge qui produit la rupture. Même si un étai se trouvait bien droit au début, son poids produit d'ordinaire une charge latérale qui à pour conséquence une tension. Les expériences poursuivies depuis quelques années par l’auteur sur des exemples pratiques lui ont donné des résultats qui sont renfermés dans le mémoire dé- posé, 838 ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 19 novembre. MM. Ludwig Mond etR. Langer : Fer carbonyle. Les auteurs ont isolé deux composés du fer avec l’oxyde de carbone, représentés par les formules Fe (CO et Fe2(C0)7 pour lesquels ils proposent ces noms de ferropenta- carbonyle et diferroheplacarbonyle. Le ferropenta- carbonyle est obtenu en maintenant du fer finement divisé dans une atmosphère d’oxyce de carbone à la température ordinaire pendant vingt-quatre heures, et chauffant ensuite à environ 120°. On obtient ainsi une petite quantité d’un liquide ambré (environ 1 °/, du poids de fer employé) de densité 1,1666 qui se solidifie à — 21° en cristaux jaunes, aciculaires. Le composé distille sans décomposition à 102°,8; la vapeur a une densité de 6,5, la valeur qui correspond à la for- mule Fe (CO) étant 6,7. Les acides étendus sont sans action sur ce corps ; mais il est détruit par l'acide azo- tique, le chlore et le brome. Les solutions alcooliques d’alcalis le dissolvent rapidement et donnent une solu- tion rouge, qui s’allère au contact de J’air et dont on n’a pu retirer de composés définis. — Le diferrohepta- carbonyle se forme quand on expose à la lumière le ferropentacarbonyle Ilse sépare en cristaux de couleur jaune d’or, avec mise en liberté d'oxyde de carbone. Les cristaux sont presque insolubles dans tous les dissol- vants connus ; ils ne sont pas volatils, mais se décom- posent à 80° en fer, ferropentacarbonyle—et oxyde de carbone. Les cristaux ne sont pas attaqués par les aci- des étendus, mais l'acide azotique, le chlore et le brome les détruisent rapidement, La potasse alcooli- que les dissout, en formant une solution rouge analo- gue à celle que donne le ferropentacarbonyle. — Capitaine Abney : Photométrie des couleurs, L'auteur s’est proposé de chercher un moyen qui permette de représenter une couleur par un nombre. Il montre que l’on peut facilement obtenir ce résultat, qui rendrait de grands services aux chimistes, et annonce qu'il présentera prochainement un appareil basé sur les idées qu'il développe. SOCIÉTÉ PHILOSOPHIQUE DE MANCHESTER Séance du 21 octobre. 1° SGIENCES MATHÉMATIQUES : — M, T, P. Kirkman : Sur les groupements des fonctions de six lettres, 2° SCIENCES PHYSIQUES : — MM. H.B. Dixon et Harker présentent un mémoire sur la décomposition par explosion des corps gazeux endothermiques. D’après la théorie de M. Berthelot, la force initiale de l'explosion est augmentée par la chaleur dégagée dans la décom- position des gaz. L'explosion devrait donc dans une colonne du gaz se propager jusqu'au bout, Des expé- riences faites dans des tubes en verre sur l’acétylène ont montré cependant que ceci n’a pas lieu et que l'explosion s'éteint avant d'atteindre l'extrémité des tubes, — MM. Dixon et B. Lean lisent un second mé- moire sur la propagation des explosions à travers des colonnes d'air. Cette question a été suscitée à propos des explosions dans les mines de houille. Les auteurs ont pris deux tubes de 20 millimètres de diamètre, contenant chacun un mélange explosif. Entre ces deux tubes, ils en ont interposé d’autres de longueurs et de diamètres différents, etils ont trouvé qu'une explosion produite dans le premier tube ne se propage pas Jusqu'au second lorsque la masse d'air qui est inter- posée atteint une certaine valeur minima. La section et la longueur du tube sont sans influence appré- ciable, pourvu que leur produit, c'est-à-dire le vo- lume, atteigne la valeur nécessaire, Les expériences contredisent l'hypothèse d’après laquelle les explosions se propageraient depuis une masse isolée de grisou à une autre, à travers quelques vingtaines de mètres de saleries ne contenant ni grisou ni poussière. Séance du 17 novembre, SCIENCES NATURELLES. — M, J.-C. Ross lil un mémoire sur les cavernesdu calcaire du New-South-Wales (Aus- tralie). Ces cavernes présentent de grandes analogies avec celles du Derby Shire. Elles contiennent des osse- ments de certains marsupiaux disparus, et il est pro- bable qu'elles ont été habitées par l’homme, Dans quel- ques-unes d’entre elles on a trouvé une espèce d’araignée aveugle, — M. W. Brockbank a trouvé deux nouvelles couches contenant des végétaux fossiles dans le grès de Saint-Bees, à Hilton (Westmoseland). Les carac- tères de ces plantes démontrent que le grès est d’origine permienne. Séance du 1% décembre. SCIENCES NATURELLES, — M, W.-E. Hoyle montre un spécimen du ver géant de l’Australie, Megascolides Australis, envoyé par M. Baldwin Spencer, de Mel- bourne. La longueur maxima de ces vers est d'environ 180 centimètres, la longueur moyenne 120 centi- mètres. On connait aujourd’huitrois vers dedimensions remarquables que lon rencontre dans l'Afrique du Sud, dans les Indes et à Ceylan, et dans la partie aus- trale de l'Australie. L'auteur pense que ce sont les survivants d’une race autrefois très répandue. P.-J. Hartoc. ACADEMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 12 novembre. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. G.. Jäger : « Sur la théorie de la dissociation des gaz. — M. Lieben : Sur la dissociation dans les solutions de tartrates étendues. — M. Dolinar, ingénieur en chef du chemin de fer du Sud à Graz, envoie une note pour établir sa priorité, au sujet d’une découverte qu'il a faite dans la métal- lurgie du fer. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. Custos Franz Heger, directeur de la section anthropologique-ethnographique au Muséum d'histoire naturelle de Vienne, communique les résultats du troisième voyage qu’il a entrepris sous le patronage de l’Académie, en vue de recherches archéologiques et ethnographiques, dans le Caucase. Ce voyage a eu pour but de poursuivre les recherches commencées l’année précédente par la Commission archéologique de Saint-Pétersbourg et d’en tirer des conclusions. On aurait poursuivi l'exploration du petit village ossète de Tli-si, sur la pente sud du Caucase, sans les dangers que présente un voyage dans cette région. En chemin on à découvert néanmoins dans la vallée de la Liachwa, à Chwze, une localité aux envi- rons de laquelle exisle, à côté de vestiges d'une colonisation remontant à une époque très reculée, un tombeau de date relativement plus récente (datant du commencement de notre ère). Sur le versant nord du Caucase, on a trouvé deux lieux de fouilles intéressants ; l’un, sur le bord du fleuve Uruch, s'appelle «Ai gumuk » ; il s’y trouve un tombeau cinéraire, résultat important puisque jusqu'ici dans cette partie du Caucase on n’en avait pas trouvé. La seconde localité, située très haut sur le penchant de la montagne s'appelle, « Chui-mas- don »; on y a découvert deux ossuaires récents. Sur le versant opposé de la vallée, deux fouilles ont fourni des trouvaillestrès importantes ; malheureusementelles sont aujourd’hui presque entièrement détruites. L'un de ces champs funéraires, appelés «Rutcha tich », présente des vestiges de l’existence de tombeaux cinéraires tandis que le second, « Chor-gon », ne présente que des tom- beaux contenant des squelettes, Ces derniers doivent remonter à la même période que ceux qui ont été trouvés dans l’ancienne fouille de Koban. On a réussi, par l'étude précise d'un tombeau découvert là, à cons- later qu'il y a aussi des tombeaux de date beaucoup plus récente (commencement de notre ère), ce qui n'avait encore été suffisamment tiré au clair par les fouilles précédentes, On a entrepris deux expédi- tions vers le célèbre champ funéraire de Koban et on y a fait des fouilles. Elles ont confirmé lhypothèse Asnrotmmiihbaisis fé ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 839 émise à la suite des premières fouilles qu'on y avait faites, qu'il s’y trouve des tombeaux d’époques très diverses. En même temps on a fait des études ethno- graphiques sur la population des Ossètes, qui habite cette région. On a en particulier recueilli des données relatives à la religion de la montagne, où se retrouvent bien des souvenirs de l’époque paienne de ce peuple. Le rapporteur compte réunir et publier les études rela- tives à ses cinq voyages dans un grand ouvrage inti- tulé : « Contribution à l'archéologie et à l’ethnographie de l’empire russe ». EuiL WEÿr, membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE SAINT-PÉTERSBOURG Séance du x novembre. SCIENCES NATURELLES. — MM. Strauch et Schrenck présentent la note de M. Semenof intitulée : Revisio Hymenopterorum Musei zoologici Academiæ C. scientia- rum Petropolitanae, II, Genus Abia (Leach). C’est une discussion de dix espèces de ce genre conservées au Musée de l’Académie, avec l'indication de leur habitat. Une de ces espèces est décrite comme nouvelle. Un ap- pendice à l’ouvrage contient un tableau dichotomique de tous les représentants connus du genre Abia de la faune paléarctique. O. BACKLUND, membre de l'Académie. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séance du 15 novembre. 40 SCIENCES MATHÉMATIQUES, —M, Castelnuovo : Obser- vations sur les séries irrationelles de groupes de points appartenant à une courbe algébrique. Dans celte Note M. Castelnuovo démontre que le théorème bien connu de Riemann-Roch dérive d’une formule donnée déjà par M. Segre ;il applique cette formule à un cas plus général, et il arrive à élendre le théorème de Riemann- Rochauxsériesirrationnelles. L'auteur s’occupeen outre de la relation qui existe entre les points doubles d’une série irrationnelle. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — Les recherches de F, We- ber ont montré que la chaleur spécifique du dia- mant présente de fortes variationsavec la température, de manière qu'entre — 50 et + 250° elle double de valeur. M. Sella a voulu examiner si d'autres proprié- tés physiques présentent des varialions analogues par l'effet de la température, et il a étudié entre autres les variations de l'indice de réfraction du diamant entre la température ordinaire et celle voisine de 4100°. Les observations ont été exécutées sur un beau cristal octaé- drique, en faisant subir au rayon lumineux avant sa sortie du cristal, plusieurs réflexions internes. M. Sella décrit la méthode qu'il a suivie, établit des formules, et arrive à cette conclusion que l'indice de réfraction du diamant, dans les limites des expériences, croîtavec la température et présente une variation du même ordre que celles observées dans d’autres cristaux mo- nométriques. M. Sella fait remarquer en outre que la méthode générale, dont il donne la description, peut servir pour la détermination de l'indice de réfraction des substances cristallines trop dures ou trop molles pour qu’il soit possible d’en tirer des prismes à faces parfaitement planes. — MM. Nasini et Villavecchia ont étudié le pouvoir rotatoire spécifique du saccharose en solution diluée, en se servant des appareils les plus perfectionnés. Le professeur Pribram avait déjà trouvé que le saccharose en solution diluée se com- porte d’une manière différente qu'en solution concen- trée; et il croyait que, jusqu’à une certaine dilution, le pouvoir rotatoire spécilique dusaccharose augmen- tait avec le degré de la dilution, et qu'ensuite il allait en diminuant. MM. Nasini et Villavecchia arrivent à des conclusions opposées; leurs expériences tendent à prouver que le pouvoir rotatoire du saccharose augmente de plus en plus avec le degré de dilution, et qu'ilcroit plus rapidementdans le cas d’une très grande dilution, L’équation suivante (où p représente le 0/0 de saccha- rose) correspond au phénomène des solutions diluées : [lo 69.692 — 4.86958p + 11.86145p°. — M. Costa établit une comparaison entre les pouvoirs de réfraction et de dispersion de l’éthylcarbylamine et du cyanure d’éthyle, afin d’éclaircir la question de savoir si dans les isonitriles il existe le groupement — N—C ou bien—N=C.L'auteur, s'appuyant sur les résultats de ses expériences, c’est-à-dire sur l'excès des pouvoirs de réfraction et de dispersion des carbyl- amines surles correspondants des nitriles, arrive à des conclusions favorables à l'hypothèse, généralement admise, de l'azote pentavalent. 30 SGENCES NATURELLES. — M Pirotta présente le ré- sumé de son travail sur la découverte d’un système de réservoirs à mucilage dans la Curculigo recurvata (Herb.) Ces réservoirs manquent dans la racine; on les trouve dans la gaîne des feuilles vertes, dans les écailles du rhizome et dans les bractées de la région florale. Ce sont des canaux réguliers, à l’état jeune, d'origine schizogénique; plus tard elles forment des poches de forme et dimensions différentes remplies d’une substance, qui par ses caractères, ne semble à l'auteur ni de la gomme vraie, ni du mucilage de Beh- rens. M. Pirotta décrit brièvement l'apparition et la distribution de ces réservoirs dans les différents or- ganes de la plante; il annonce qu'ila trouvé des réser- voirs semblables dans le genre Hypoæis L., qui avec Cureuligo doit constituer une pelile famille bien carac- térisée des Monocotylédones Liliiflores. — M. Penzo à étudié l'influence de la températuresur la régénération cellulaire dans le cas particulier de la guérison des blessures. L'auteur s’est servi d’un appareil disposé de manière à maintenir immobile un lapin, dans d’excel- lentes conditions de santé, pendant plusieurs jours (20 à 30 jours). Aux oreilles et aux pattes de l'animal élaient fixés des étuis métalliques permettant, aumoyen d’un bain d’eau, de porter ces régions à une ltempéra- ture donnée. En examinant au miscroscope des frag- ments de peau qu'on enlevait aux membres soumis à des températures différentes, on reconnut que la régénération de l’épithelium se montrait plus active dans le côté froid. On rechercha alors s’il élait possible de rétablir cette activité dans des tissus où elle n’exis- tait plus; mais des recherches exécutées sur le tissu conjonctif et cartilagineux de l'oreille de vieux lapins, donnèrent des résultats négatifs, M. Penzo éludia alors l'influence de la température sur la multiplication cel- lulaire et sur l'accroissement des tissus en voie de dé- veloppement:; et il reconnut qu'en maintenant une oreille d’un jeune lapin à la température de + 12% et l'autre à + 37, après huit ou dix jours, cette dernière surpassait l’autre enlongueur, de plusd’un centimètre. Si on laisse en liberté un de ces lapins à oreilles dépa- reillées, on voit que le développement de l'oreille plus longue s'arrête, et que l’autre arrive bientôt aux dimen- sions de la première, En pratiquant des blessures iden- tiques sur les deux oreilles des lapins, on remarqua que la guérison était plus rapide dans le côté plus chaud ; on obtenait lemêème résultat en produisant des fractures dans les mélacarpes des lapins. Ces expériences dé- montrent que des températures voisines de celle du corps favorisent le processus physiologique de régé- néralion cellulaire, et celui qui se produit dans la guérison des blessures, Cette observalion a une importance pratique, parce qu’elle prouve que l'ap- plication d'une chaleur supportable peut donner de bons résultats dans le trailement des blessures, ainsi que cela a été confirmé dans plusieurs cas, dont la description a été donnée par M. Intosh dans le Medical Journal de New-York. — M. Mingazzini donne la des- cription de deux espèces de Grégarines, parasites des Holothuries, appartenant à un nouveau genre appelé Cystobia. Ce genre devrait être placé dans la famille des Grégarines dite des Syncystidées, créée par Aimé Schnei- 84) NOUVELLES der, laquelle ne comprend qu'un seul genre avec une es- pèce unique, laSyneystis mürabilis. M. Mingazzini s'occupe des divers états évolutifs de la Cystobia holoturiæ, déjà * étudiée par A. Schneider; il décrit la sporulation de cette espèce, qu'il a cultivée dans l’eau de mer, et il montre combien l'étude du développement est rendue difficile à cause de la confusion possible des divers états évolutifs de la Grégarine avec les éléments du sang des Echinodermes, M. Miugazzini décrit une nou- velle espèce qui se trouve dans Holoturia poli et H. im- patiens. Il remarque encore que l’on peut considérer les deux individus de celte espèce, et ceux de la Syneystis, comme produits par la division d’un seul individu: ce qui ferait considérer la famille des Syncystidées comme: un groupe moyen entre les Grégarines monocsystidées et les Grégarines polycystidées. Ernesto Mana. NOUVELLES LES EXPÉRIENCES DE M. A. ÉTARD SUR LA SOLUBILITÉ DES SELS Pendant un grand nombre d'années, les phénomènes de dissolution n'étaient pas considérés comme dignes d'attention; on n’en parlait guère avec estime que dans les précis. L'opinion a évolué sur ce point. Au lieu de tenir le sujet pour trop élémentaire, on le voit lié à nombre de questions d'ordre supérieur. Les lecteurs de la Revue ont pu se rendre compte, par l’article de notre distingué collaborateur M.G. Charpy !, de l’état actuel des idées en ces matières. À l’occasion de deux notes récentes de M. Etard ?, qui ont attiré l'attention des spécialistes, nous croyons utile d'indiquer en quelques lignes les principaux résultats obtenus par ce savant, Lorsqu'on représente graphiquement la quantité de sel que 100 parties d’eau dissolvent, on obtient les courbes de solubilité bien connues. M. Etard, dès le début de ses recherches, a remarqué que ces courbes ne donnent pas des résultats assez simples, se prêtant à des comparaisons ou à quelque généralisation, Il à proposé de représenter graphiquement la quantité de sel contenue dans 100 parties de la dissolution saturée. Ecartant la valeur arbitraire « 100 parties d’eau », il exprime directement l'équilibre qui, dans l'acte de la solution, s'établit de lui-même entre le sel et l’eau. Par ce changement de variables les faits apparaissent simplifiés d’une manière frappante : les courbes de- viennent des droites de solubilité. Pour un grand nombre de sels, l’auteur a déterminé ces droites dans des in- tervalles de température inconnus jusqu'à ce jour. Certaines mesures sont comprises entre — 20° et + 320, soit3409 d'intervalle, Pour de nombreux sels stables, il établit que la limite de la solubilité est le point de fusion ignée : la droite qui se rend ainsi au point de fusion, ou droite-limile, peut être considérée comme le lieu géométrique des points de fusion des mélanges de sel et d’eau. Ces points décroissent à partir de la fu- sion du sel pur, pris comme origine, parce que l’eau, très fusible, devient prépondérante dans le mélange. Il paraît peu probable que dans le parcours de cette dernière droite il y ait une dissociation en ions, puisque la limite du phénomène continu est ici la mo- lécule même : le sel pur. M. Elard a construit, pour divers sels, ce qu’il appelle une ligne de solubilité complète, comprise entre le point de congélation de la solution et le point de fusion du sel anhydre. Celte ligne est le plus souvent brisée, composée de deux ou trois segments raccordés à angle vif. Quelquefois cependant entre deux droites se produit un raccord courbe, plus ou moins prolongé. L'auteur avait admis, dès le début de ses recherches, qu'il s’agis- sait là d’une perturbation secondaire, due à la forma- tion ou à la destruction d’hydrates : il a nettement démontré dans ses deux dernières communications 1 G. Cnarpy : Les théories régnantes sur la constitution des solutions salines, dans la Revue du 15 oct. 1891, t. II, p.642. 2 A. Erarp, De la coloration des solutions de cobalt et de l’état des sels dans les solutions. Comptes rendus, t. 113, p.699 (16 nov.), et Etat des sels dans les solutions: sulfate de so- dium et chlorure de trontium. Comptes-rendus, 14 décem- bre 1891, t. CXIII, page 854. que, dans les solutions aqueuses d’un sel pur, on peut voir à la fois se déposer les cristaux de deux hydrates aux températures pourlesquelleslareprésentation graphique indique une courbure, En dissolvant donc un hydrate. particulier, bien cristallisé et bien défini, on ne peut penser avoir une solution sample de cet hydrate dans l’eau. On ne connnait pas la dissolution élémentañre, En dehors d'une dilution en quelque sorte infinie d’où lesel lui-même semble dissocié en ses éléments électrolys tiques, on n’observe que des dissolulions dans des solutions, Nous ne connaissons souvent sous le nom de ligne de solubilité d’un sel que la solubilité d’une somme d'hydrates. Pour les solutions très étendues, M. Arrhénius à émis une hypothèse hardie, sur laquelle la discussion est ouverte. Les sels les plus stables se trouvent dans le liquide à l’état dissocié. Ge ne sont plus des sels, mais des atomes ou même des groupements sans exis- tence connue, tirés des formules écrites, tels que SO‘, CI0#, AzOS. Ces fragments moléculaires atomiques ou fictifs auraient un potentiel électrique élevé qui maintiendrait un équilibre que nous ne connaissons pas dans la chimie expérimentale, car, selon lPhypo- thèse, des atomes de Cl et de K flottant au sein de l’eau n’ont aucune action réciproque, Pour les solu- tions saturées M. Berthelot et M. Naumann ont depuis longtemps émis l’idée qu'il était possible de les as- similer à des mélanges dissociés. Les travaux publiés par M. Etard se trouvent d'accord avec cette hypothèse générale de dissociation. Mais, dans l’esprit de lau- teur, il s’agit d’une dissociation qui n’est pas celle des ions. Pour lui une solution saturée à {° se compose de deux éléments : un liquide contenant un ou plusieurs hydrates et un sel ne se dissolvant plus dans le milieu en question : il y a équilibre. A t° + 1°, le liquide sa- saturé contenant une quantité d’eau finie éprouve une dissociation correspondant à l’accroissement de tem- pérature : de l’eau est mise en liberté. Si une certaine affinité subsiste encore, cette eau peut être employée de nouveau à dissoudre du sel, et la solubilité est croissante. Dans le cas contraire, l'eau ne trouve plus d'emploi, et par des accroissements successifs de température, elle s’accumule au-dessus du sel dont la solubiliié est alors décroissante, Dans diverses expériences vers 1509, on à de l’eau pure en présence de sels qui à froid sont très solubles. De même que les sels s’effleurissent dans Pair, 1ls peuvent à une température convenable s’effleurir ou se disso- cier dans l’eau, Ce mécanisme de dissociation continue est proportionnel à la température, puisqu'en dehors des perturbations accessoires on à une droite de solu- bilité. L'ensemble de travaux que nous venons de résumer jette une grande clarté sur l'une des questions les plus obscures et les plus discutées de la chimie actuelle, en rapprochant d’une facon plus complète les faits de dissolution du processus de dissociation, dont ils emprunteront sans doute un jour toutes les lois. Louis OLIVIER, Le Directeur-Gérant : Louis OLIMiIER EE — — —————"—…—"—"—"—"—…"…"…"…"…"—…"….— — — Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 11. TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES _ CONTENUES DANS LE (Du 15 JANVIER AU 30 DÉCEMBRE 1891) I. — ARTICLES ORIGINAUX Astronomie et Météorologie BrcourpAN (G.). — Revue annuelle d’astronomie...... 110 SaLET (G.). — L'hypothèse météoritique de M. Norman LETTONIE MONS TRE EEE en 134 SrROOBANT (P.). — La question des anneaux de Saturne. 437 Tréprep (Ch.).—La carte photographique du ciel. 529 et 568 Weyuer (Ch.). — Nouvelles expériences sur les tour- GHENS coèr SE ET OEM 10 — Sur l'origine des tourbillons naturels.............. 331 Botanique DEHÉRAIN (P. P.). — L'Epuisement des terres par la GUIÉUUDISANS TON DTAIS Re eee ee selson eee cest oies 657 —Reyue-annuelle d'agronomie........,............ 817 MaxGix (L.).— Revue annuelle de botanique.......... 255 Vesque (J.). — La sève ascendante......... Croobcutenc 574 Chimie BouveauLr (L.).— La synthèse des alcaloïdes naturels. 187 Cnarpy (G.).— Les théories régnantes sur la constitution HESRADIUONSISATINES ER RER E base escroc ioeecbee 642 Erarp (A.). — Revue annuelle de chimie pure......... 416 Guxe (Ph. A.). Revue annuelle de chimie appliquée. (Matières colorantes el produits organiques)... 47 Le BEL (J.-A.). — La cause de l'équilibre dans la mo- DOTE 325000000080 de 00 EE DEP En en 209 Le VERRIER (U.). — Les procédés nouveaux pour le raffinage de l’acier Lixper (1). (HN, Loscosoonodoob on one ou Copé dr — Les produits formés pendant la fermentation alcoo IMGTEsconsdsoc eco 0 ban beccotood bobdbe 720 Lumière (A. et L.). — Les Développateurs de la série FRAME dose nooer onda cop 0000 442 Lune (G.). — Revue annuelle de chimie appliquée. (La grande industrie chimique)................... 40 NoELriNG (E.). — Théorie générale des matières colo- rantes et de leur fixation sur les fibres textiles 245 et 299 VerNeuIL (A.). La reproduction artificielle des rubis... 5 Chirurgie Dugois (R.). — L’Insensibilisation chirurgicale. ....... 353 HarTMANN (H.). — Revue annuelle de chirur HÉbocco so Mie Enseignement des Sciences Brzzy (E. de). — L’Education RU des Ingénieurs ANA IS UNISR eee eibisenient Eee nie eien 638 DE Comserousse. — Lettre sur les laboratoires de mé- GATE TEebo os aTedonne noce colbnoasobone 685 Doxxin.— Lettre sur les laboratoires de mécanique... 685 DwezsHaAuvers-DEry. — Les laboratoires de méca- HN cac PSS PES PDP C ER ee ocHeeSto oO 364 MécaniciEN (Un). — Le laboratoire de mécanique du Conservatoires des arts et métiers.....,,....., .. 405 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1894, Taursron (R. H.).— Lettre sur l'organisation du Sibley- College et sur les laboratoires de mécanique. ...... Ethnographie DENIKER (J.).— Les Dahoméens.................,.... Géologie, Paléontologie et Océanographie BERGERON (J.). — La faune dite primordiale est-elle la DIOSRANCIENNE LE RACE emeee seeds CaREz (L.). — Revue annuelle de géologie............ KiLraAN (W.).— La géologie des Alpes et la carte de IMLINCÉadeonococonconodcc nsc cote don 0 en De LappArENT (A. de). — La formation de la craie phos- phatée en Pic. Eee te oneccoacoececmobectoe evo Priem (F.). — Le Néo-Lamarckisme en Amérique. — Ses bases positives, zoologiques ct paléontologiques, CR CC EEnennosacocnorcconemoédoecneqntoe TaouLer (J.). — Le sol sous-marin et les eaux abyssales. X. (C.). — L'œuvre du nivellement général de la France, Mathématiques Ocacxe (Maurice d’). — Le répertoire bibliographique des!sciences mathématiques........1...0......... — La Nomographie. — Représentation graphique des lois à un nombre quelconque de variables. ......... Poincaré (H.). — Le problème des trois corps. ....... — Les géométries non-Euclidiennes................. Roucué (E.). — Les origines du trait de perspective... TANNERY (J.). — A propos des lecons de géométrie de Ut IDEtMpipencobonte dans donanns eo Bose Mécanique appliquée Drzewieckt (S.). — L'aviation de demain............. KæniGs (G.). — Sur deux appareils nouveaux de méca- NON EhodrascooonboodndnomE oh) a) ae oe Le Career (A.). — Les propriétés mécaniques des IMÉRATXS Er PEER eERET EEE clement Le Cnarezier (H.) et Mourer (G.). chimiques : Première partie. — Mécanique chimique. — Prin- — Les équilibres CIPENEXPÉTINEN ALLER EEE Dee mecs Deuxième partie. — Application des principes de la thermodynamique ........ Hoopontec dia aouo Médecine et Hygiène BromE (F. J.). — La récente épidémie d’influenza à NOIRS -cnoudctoddenas ms bon TA ET to A0 Macnan et SÉRIEUX (P.). Sur les aliénés persécuteurs.. Ozrvier (Louis). — Revue annuelle d’hygiène......... — Le traitement des tuberculoses externes par la mé- thode sclérogène du professeur Lannelongue...... — Le congrès d’hygiène de Londres................, LaAvaRENNE (E. de). — Revue annuelle de médecine... Weiss {G.).— L'ombre pupillaire. — Mesure de la myo- pie, de l’hypermétropie et de l'astigmatisme...,... 25 RIRE Re TOME II DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES 374 181 445 144 138 664 774 172 433 600 748 252 842 Microbiologie BrepA DE Haan (J. Van). — Les expériences de M. Beye- rinck sur les bactéries lumineuses et leur nutrition.. 81 Cxarrin (A.).— La nature des sécrétions microbiennes. 129 Loir (A.). — Le surmenage et le charbon chez les moutons australiens ..... dos v sou Hoco sn ce 515 METcanikorr (E.).— Structure, déveioppement et repro- duction des bactéries.......... Re rene : 211 Rocer (G.). — Le rôle du sérum dans Patténuation HeS NITUS TE EE ecieeepene dons aderabhe te sus Vixcenr (H.). — La pathogénie du tétanos..... Jar 50 296 Physiologie. Dusois (R.).— Mécanisme de l'action des anesthésiques 561 FrépéricQ (L.). — Revue annuelle de physiologie..... 666 Gzex (E.). — Les découvertes récentes sur la physio- logie du Pancréas........................... +. 40) Mazarp (A.-E.). — La castration parasitaire......... 38 Massarr (J.). — La pression osmotique et la physio- logie de la cellule. Les vacuoles des cellules végé- ATOME bios oo soc so vor 00 69 — L'irritabilité des spermatozoaires................. 504 Physique. BaziLue (A.). — Les systèmes de télégraphie harmo- TIQUE RE. munies enimeseeeee 2-50-0000025000-m0a0€ 321 BLoxpLor (R.). — La théorie électromagnétique de la lumière. Principes de cette théorie. Propagation d’une onde plane................................ 289 BrizcouIx (M.). — La photographie des objets à très grande distance par lintermédiaire du courant électrique............"#.su.r.u HAS É TAC 33 CrooKkes (W.). — Les décharges électriques dans les gaz raréfiés et la constitution de la matiére. 161 et 216 — L'évaporation électrique.......................... 497 Ewixc (J.-A ). — L'induction magnétique et les phéno- mènes re DLL odo but a bo ot 0 Eee 731 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Game (C.-M.). — Revue annuelle de physique....... À GuirLaumMe (Ch.-Ed.). — Les idées modernes sur la thermomeétrie 2-2. ancre Sorenae session HospirALiEer (E.). — Les moteurs à courants alternatifs, raffinage de l'acier... Poor peu oué sr ec Marey (E. ER }. — La chronophotographie. Nouvelle méthode pour analyser le mouvement dans les sciences physiques et naturelles.......... eee Mixer (A.). — L’électrométallurgie de l’Aluminium... Wir (Aimé). — Le rendement photogénique des foyers. Zoologie. BEAUREGARD (H.). — Revue annuelle de Zoologie... Bouvier (E. L.). — L'expédition scientifique de l'A{- batrase "0e; 108508 IS 00 MOT 00 Kœnrer (R.). — Les idées nouy elles sur les Échino- dermeSPErErPr ete PRENANT (A.). — Les idées nouvelles sur l’origine et la formation des spermatozoïdes. ........... Mons Revues annuelles. BEAUREGARD (H.). — Zoologie............... ane Brcourpax (G.). — Astronomic....... OOo oc Der CUS Carez (L.) — Géologie... sure ne ee : DEHÉRAIN (P.-P.). — Agronomie... one EranD (A). — Chimie pure... -2- PETER 4 FrépéricQ (L.). — Physiologic........ ..... Nas Er GaARIEL (C.-M.). — Physique................. Rep age Guye (Ph.-A.). — Chimie appliquée : Matières colo- rantes et produits organiques............ Thetodie HARTMANN (H:)—"Chirurcic.. "2°" FC -SECRRE : LAvaRENNE (E. de). — Médecine........... ARTE ee Luce (G.). — Chimie appliquée : La grande iadustee CHIMIQUE RE rentre tar TUE Mancn (E ):— Botanique. .t- "271 CERN ROUE Orxvier (Louis). — Hygiène.............. Rd or Ge 00 II. — BIBLIOGRAPHIE 1° Sciences mathématiques. Mathématiques. ArreLz (P.). — Sur les lois des forces centrales faisant décrire à leur point d’application une conique, quelles que soient les conditions initiales......... BERTRAND (J.). -- Blaise Pascal.................... Brisse (Ch.). — Cours de géométrie descriptive... : Caucax. — Œuvres complètes HE poe oc oo Dargoux. — Lecons sur la théorie générale des sur- faces, 3e partie, 2e fascicule. ...... RE Se etes s à Ge Dawis (R.-F.) et Rév. John Murxe. — Géométrical CODICE ELEC ES ; Exxerer (Alfred). — Fonctions elliptiques. Théorie et HISfOLPE- Fee eee Dadao rs nbeDA 0 no ado dau FRENET. — Recueil d'exercices sur le calcul infinité- SMART ersre DSo re ou20noddodas ouai 0 1000 Goursar (E.). — Lecons sur l'intégration des Se aux dérivées partielles du 4er “ordre JoSvact : Hermire. — Cours d'analyse professé à la Faculté ‘des Sciences de ATIS = eee--ee--e-r-hhr-eeee 020: Huycexs (Christiaan). — Œuvres ‘complètes. etre Léaurey (Eug.) et GuizBauzr (Ad.). — Traité théorique et pratique de comptabilité. ........ JS 5 PO 0e Leconre. — Etude expérimentale sur un mouvement curieux des ovoïdes et des ellipsoïdes............ Marruews (B.-A.). — Manual of logarithmes treated in correction with arithmetic, algebra, plane trigo- nometry, and mensuration, for the use of students preparing for army and other examinations.... Mourer (G }). — L'égalité mathématique. NIEWENGLOWSKEI. — Cours d’Alsèbre............4,.... OLTRAMARE (G.). — Calcul de généralisation......... Picarp (Alf). — Rapport général sur l'Exposition uni- verseNOL AG HBSI CC PE EEE ETES PORT al à à c 5 Picarp (E). — Mémoire sur la théorie des équations aux dérivées partielles et la méthode des approxi- malions successives. ..... sus DCE — Sur la détermination des ‘intégrales de “certaines équations aux dérivées partielles du second ordre par leur valeur le long d’un contour fermé....... PocLarp (J.) et Dupepour (A.). — Théorie du navire. Resaz (H.). — Exposition de la théorie des surfaces. . SERVICE GÉOGRAPHIQUE DE L'ARMÉE. — Tables des loga- rithmes à 8 décimales des nombres de 1 à 120.000 et des sinus et tangentes de 40 secondes d'arc, dans le système de la division centésimale du quadrant. Srorrars (Abbé). — Cours de mathématiques supé- rieures à lPusage des candidats à la licence ès Sciences JpPhysiques-.. "7 aies eele site SIT TeixEtRA (Gomes). — Curso de analyse infinitesimal, Calculo differencial ...... PA DE © THoMAE (Johannes), — Esquisse d’une théorie des fonc- tions d’une variable FOR et des fonctions nes THomsox ZÉRAWSEL. - Astronomie. Carre pu Crer. — Bulletin du Comité international per- manent pour l'exécution photographique de la carte du Ciel (6° fascicule). ...... Toscane ns Dodo %o CasPaRI (M.- Di — Congrès international de chrononié- PHOSO A ot S see sense eeuisn eee css een 451 517 308 147 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Marrecas FerReIRA (M.-F.-L). — Sur la projection Dune (P.). — Cours,de physique mathématique et de zénithale équivalente de Lambert. ...... Sc do0bo 0er cristallographic...4...-..1...... érerereresee DE PouLain (A.). — L’unification des heures et les fuseaux Dumoxr (G.). — Annales d'Electricité et de Magnétisme London eo one bonnes ee : PURE) ABBOIBODE Re en meet entente Foro Soucnon (A.). — Traité d'astronomie théorique... ... 53 | Dumoxr (G.), LepLanc et DE LA BénovÈr Les Diction= TisseranD (K.). — Traité de mécanique céleste, t. IL. naire théorique et pratique d° Electricité ct de Ma- Théorie de la figure des corps célestes et de leur gnétisME........... ÉLPONEESEETES ECS cHyeoser . mouvement de rotation....... ae ee cet 319 Dwersæauvers-Dery (OT: ondements d PE AE Worr (C.). — Astronomie ct géodésie.. RER re 2517 velle méthode pour la mesure de l'intensité du son.. Ewererr (J.-D.). — Unités et constantes physiques.... Mécanique générale et mécanique appliquée Fagre (Ch.). — Traité encyclopédique de photographie. < Faye (H.). — Sur unc révolution dans les idées météo- Drzewreckt (S.). — Le vol plané. Essai d'une solution rologiques ........... Men en ent euiee baie mécanique du problème... Ge DE RE OA RENE Géo 485 | Prusrxer (K.). — La construction des étalons de résis- LoncGripGe. — Smokeless Powder an its influence on ice électrique. PRE RAT SE gun COnsIrUCIION................................. Gay (Jules). — Lectures scientifiques.........,........ = L’artillerie de l’avenir et les nouvelles poudres. .... 648: | GéRarn (Eric). — Lecons sur l'électricité professé à Mapamer (A.). — Résistance des matériaux. ........... 724 l'Institut électrotechnique ? Montofores. ALES Marmæu (Emile). — Théorie de l'élasticité des corps Gouré ne Vizzemoxrée. — Recherches sur la différence SOUTIEN eee sobcobsoeToen tee LOL 190 de potentiel au contact d’un métal ou d’un liquide... Mourer (G.). — Force et masse...................... 338 | Guesnarp (D. Adrien). — L'auréole photographique... Puiseux (P.). — Lecons de cinématique. Mécanismes, Jouserr (J.). — Traité élémentaire d'électricité. ...... a hydrostatique, hydrodynamique........ gone 83 | Laxcze (S.-P.). — Sur l'observation des phénomènes soudains........ HOT Top aut Seneeise ere 5che Thermodynamique Le Cnarezrer (H.).— Note sur le dosage du grisou par CLerk MaxweLz (J.).— La chaleur, lecons élémentaires par les limites d'inflammabilité. .…. HPÉCEMENRE … sur la thermométrie, la calorimétrie, la thermody- Lecros (Comm.). A ARR PR EE namique ctla dissipation de l’énergie.............. 382 Re de la 2 Dose ne ee s 2e nes tan # Dwecsaauvers-Dery (V.). — Le Révélateur Donkin et a topographie, aux observations scientifiques et aux Vaction des parois des cylindres à vapeur.......... 19 Ex opérations militaires........ RE ee pie SinIGAGLIA (F.). — Influenza delle masse che si muovo- EMOINE (G.). — Dissociation du bromhydrate d’amy- no di moto alternativo nelle machine a vapore..... 221 Jens sous se nue rÉMONEEES NEO FRE UE SP ao à — Diagrammi previsti delle macchine a vaporc..... 267 ee (@ Re res DRE ee SORTE THURSTON (R. H.).— A practical method for reducing Essai d’une théorie Lo Cotes the internal wastes ofthe steam-engine............ 49 | Masc Le (E). — Traité d'optique © — Réduction des pertes de chaleur dans la machine à Moxrserrar (E.) et Brisac (E.). — Le gaz ct ses + appli- FT EEE HSE A NES 677 CAE ES RREe et force RIRES — Manuel de la machine à vapeur pour les ingénieurs MODE EN FL x Le transport CARO NEARAOEES ct les écoles pratiques. ........... DR re eur or 192 . en Allemagne ct en Suisse............ OU 209600 Wurz (Aimé). — Moteur à gaz simplex,. ............. 83, | Niss Ekorm. — Sur la chaleur latente de NÉROS EM — La machine à vapeur......... D EEE SEE 648 de l'eau et sur la chaleur spécifique de 1 cauliquide. Pgcror (S.). — Congrès international de photographie deMBD0 Re ere SSnovno ee oedieu HÜnv pavot COONdOn Ie 2° Sciences physiques Pocne (G.). — Origine des forces de 1 nature. Nou- , velle théorie remplaçant celle de l’attraction...... . Physique, Poincaré (H.). — Electricité et optique. II. Les théories ABney. — La mesure ct le mélange des couleurs...... 737 de Helmholtz et les CAO de Hertz... pas 2 Amacar(E.-H.). — Nouvelles méthodes pour l'étude de la — Sur la résonance multiple des oscillations her- compressibilité des liquides et des gaz....... ere. D4 D TRE RP SR at RO RUES PE ETES Axxex (J.-P.). — Manuel pratique de Postale de — Les géométries non euclidiennes. DEEE la lumière électrique............ Féeries Pal RSS (E:): me DITS SRE £ Le paie , Barraz (G.). — Histoire d'un inventeur (M. Core considéré comme fonction de son point d’éballition VE) RAR e messe DOTE OO T DS BTS OS TE 648 Gi F5 DEP TRROnNN CRES ue DR me ; Bauur-PLuvineL (de IE La photographie au gélati- Rirrer (R.). Remarques: sur les expériences de ÉDLOURE NT ATE ENT series semer 00649 fi. Le NP RRUNINEE Dan once RE ENTREE LEONE É : Rues (H.), et Rirrer (R). — De l’action que les ré- BerGet (Alph.). — Photographie des couleurs par la SÉRIE ; : JOGeS ne méthode interférentielle de M. Lippmann...,...,.. 309 PE TERRE TETE Enr CE MnnIeE BerriLLoN (A.). — La photographie judiciaire, Classifi- Se es ee RÉ pos CPR He cation et identification anthropométriques......... Don] CES ONE EN CRU ROME ere sensibili Bs5Erkxess (V.).—Sur le mouvement de l'électricité dans es Pr ho EAP RARES Ann ENIANEpeE l'excitaieur de Hertz... SAS SCHUSTER Poe La décharge de l'électricité à travers Bozrzmanx (L.). — Sur les expériences de M. Hertz. . 117 Fr ee L 5 DU eine de QE on a = Sue le pds de Paucou… BrizzouIx (Marcel). — Principes généraux d’une théo- ee CEE A LR RE OPUS ETCE rie élastique de la plasticité et de la fragilité des Vascny. — Traité d'électricité et de magnétisme... Bons sonne andononte Jde ar ent 20 — Recherches récentes sur diverses questions d'hy He dynamique. re partie : Tourbillons................ 72% Buauer (A.). — La photographie de l'amateur débutant. 518 Cnapez D'EsriNassoux (de). — Traité pratique de déter- mination du TEMPS AE POSE... 1. see» 20 Cnarpuis (J.). et BerGET (A.). — Lecons de physique DORÉDIOR REA EC te co A En OPA ET terre 485 Ducraux (E.) — Cours de physique ct de météorologie professé à l’Institut agronomique................ LOT Voyer (J.). — Des ascensions aéronautiques libres en pays de montagnes et particulièrement à Grenoble. WaLLon (E.). — Traité élémentaire de l'objectif photo- BPAPID UC PERRET ET NN ME ER Re WATERHOUSE (colonel). Sur le renversement de Pimage photographique par les sulfo-carbamides.. Chimie, ALEXEYEFF (P.). — Méthodes de transformation des combinaisons organiques. ...................... do 843 551 617 148 117 117 191 »86 671 191 54 190 382 844 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Armsrroxc (H.) et Rossrrer (E.). — Action de l'acide Le l'échelle de nitrique sur les dérivés du naphtol... ..... 2e Fisnan Physique dede LENRt 1: Sd EC + Aucer. — Conférences faites au laboratoire de M. Frie- HouQus æ > Are er AE A SES del (2° fascicule). Sur les migrations moléculaires. CSN (A Le NEeee RE “A CU NT RE *X . À 1 EX 1e = ’ége de a Bargrer (Ph.) et Roux (L.). — Recherches sur la dis- RS Ce rats SERRES =. 1 à à nos à LOS ss... ….. . Ron ans es compos done D MR Lorior (P. de), — Description de la Faune jurassique ÉHAL. 0 nces faites au laboratoire de rie- du Portugal. Embranchement des Echinodermes del (2° fascicule). Sur les dérivées azoïques et les RARE (Ch. de). — Le Pieghe delle Alpi Apuane. Darod odondnasnor A SR AR nn ele AS Lo eu EE A D ; ribuz e _ Berruer (A.). — L’Iconogène..... asthieelss D sant URSS “es ouzione salk Fin dEIE ons ne PME SEE Bourcgois (Léon). — Analyse microchimique.. RARE RE (3). = Océanographie FIFA ATEN LÉ SE Brünz. — Sur les relations entre la dispersion. et la T STE CROP RE "07.0 aie JL : ; : IETZE (Dr Emil). — La gé P = constitution chimique des corps. Nouvelle détermi- = Font) Ta sÉologe des en pation des réfractions atomiques.................. RS FAC AN M Cuagrié. — Conférences faites au laboratoire de M. Frie- Botani otanique del (2e fascicule). Sur les relations entre la compo- sition chimique et la tension superficielle des corps. Czarke (F.-W.). — Sur le calcul des poids atomiques. Comses (A.). — Conférences faites au laboratoire de M. Friedel (2° fascicule). Sur les dicétones.. Cooxe (J.-P.). — Sur le poids atomique de Voxye CrarTs (J.). — Sur le poids atomique de l'oxygène. Dirrmar (W.). — Chemical arithmetic................ Dorzrer. — Minéralogie chimique générale.......... Durarc (L.) et Lx Royer (A.). — Recherches sur les ipones cristallines de quelques substances orga- Gaunin os - None de chimie générale... Gaurier (Armand). — Les perfectionnements de la vinification dans le midi de la France............ — Sophistication et analyse des vins. 4 Gzapsrone (D' J.-H.). — Réfraction et dispersion 1 mo- léculaires de diverses substances.................. Guxe (Ph.-A.). — Étude sur la dissymétrie moléculaire. Heumaxx (Karl). — Nouvelle synthôse de l'indigotine. HunrixGron Wizcrams (G.). — Eléments de Cr talloe graphie ...... Maiden Net a A dura do ei Isrrari (C.-[.). — Cours élémentaire derchimic- 47e Jacxaux (R.). — Histoire de la chimie............... Jüprner DE Jonsrorre (H.) — Traité pratique de chimie métallurgique... Kaiser (H.-E.). — Sur le poids atomique de l’oxygène. — Sur le poids atomique du palladium............... Mazzer (J.-W.). — Sur le poids atomique de l’or..... Mænecxe (C.). — Sur le poids atomique du chrome... Mérrau (Carlos). — Histoire de l’industrie sucrière dans la région du Nord........................... Mox» (Ludwig). — Sur le nickel tetra- carbonyle et ses applications dans les arts et manufactures........ Noves (W.-A.). — Sur le poids atomique de l’oxygène. Osrwazp (W.).— Essai de chimie générale......... . Pare (G.). — Conférences faites au laboratoire de M. Friedel (2° fascicule). Sur les sulfines. . . .... ParriGE (E.-A.). — Sur le poids atomique du cadmium. PrekeriNG {J.-V.). — Etude sur la nature de la disso- lution Topo abandon TOO DTA TI UO TE 6e Poisson (Alb.). — Cinq traités d'alchimie des plus grands philosophes none État an ndono 100 EUaTE — Théorie et symboles des alchimistes.............. Ricaarps (Th. -W. ). — Surle poids atomique del'oxyg gène. SBUBERT K. }. — Sur le poids atomique de l’osmium... — Sur les poids atomiques des métaux du groupe du platine ................ DOG 0 one hace Fate ere ob Seuserr (K.) et Kossé (K.). — Sur le poids atomique du rhodium......... prenceeteeomenreceerere Taomson (sir William). — Constitution de la motiére, WixcxkLer. — Réduction des combinaisons oxygénées par le magnésium............................... Woopwarp (C.). — Arithmetical chemistry....... 550 3° Sciences naturelles Géologie Bruecxner. — Sur le climat de l’époque glaciaire. .….. ComiTrÉ GÉOLOGIQUE D'ITaLtE, — Carte géologique d’Ita- ce AskeNasy (E.). — Quelques relations entre l’accrois- sement et la température............. since Bicer (A.).— Contribution à l’étude de la morphologie et du développement des bactériacées.... Certes (A.). — Sur un Spirille géant développé dans les cultures de sédiments d’eau douce d’Aden..... Cuopar (R.). — Contribution à l’étude des plastides... Cosraxrix (J.) et Durour (L.). — Nouvelle Flore des ChAMPIENONS EE ee -ee San os Dacia i0 Dermer (W.). — Manuel technique de physiologie vé- gétale.. AUTO TAB D ho To ee UE 0 AL GAUTIER (Emile). — Une révolution agricole. Georges Ville et les engrais chimiques......... Hbc . Gexay (P.).— De l'influence des engrais sur les récoltes. Girarp (Aimé). — Recherches sur la culture de la pomme de terre fourragère et industrielle........ 5 Goopaze (G.-L.). Traité de physiologie végétale. ...... Heczer (Robert). — Recherches histo-chimiques sur les membranes HAN ICER D HD Snbanon con 20 où Héraiz (F.) et Boner (Valère). — M. inipulations de botanique médicale et pharmaceutique, — Icono- graphie histologique des plantes médicinales... Houzeau (A.). — Rapport sur les champs de démons- tration (agr BONE) EE IDES Vache ne . KLEBS. — Expériences sur la reproduction des Hydro- dyctiées:...................... HAbtagdos cs ou: Ê KRAMER (E.). — La maladie visqueuse dur Vins eee Micuowre (F.). — Traité scientifique et industriel de la Ramie. in sense deseeetheeeteteECEE 7e Pacxouz. — Travaux de la station agronomique du Pas-de-Calais "2" -"tE tt ccercreceee dore = Scrmeer (A.-F.-W.). — Sur l'assimilation des sels minéraux par la plante verte................... CL Scnuzze (E). — Sur les principes ternaires de réserve de quelques graines des Légumineuses............ Seuuzze (E.) et Kisser (E.). — Sur la décomposition des matières protéiques dans les plantes vertes cul- tivées à l’obscurité......................:. Dao Vies (Hugo de). — Les plantes et les animaux dans les espaces obscurs des conduites d'eau de Rotterdam. Vurzzeux (Dr P.). — Le type floral des Graminées... Warp (H.). — Plant Organisation.....:....... Fbosnoc Worcurixé. — De la transplantation sur le corps de la plante......... rene den elssrerepe ei 229 192 118 486 527 5953 285 149 210 229 21 21 158 650 310 759 340 453 486 726 759 25 193 149 272 119 Lvologie, Anatomie et Physiologie de l’homme et des animaux Auuerr Ier. — Zur Erforschung der Meere und ibrer BewohneL.. sus ess meescpeneecspelecree tee ARLOING (S.). — Contribution à l’étude de la partie cer- vicale du grand RP Ne envisagé comme nerf SÉCTÉTOILE,.. ...s..s.seseses ce peie eee ours esse naniee Bazz (W. P.). — Hérédité et exercice, ..-......-..... BEaurecar» (H.). — Revue annuelle de Zoologie...... BEAUREGARD M) et Gaurpe. — Guide pratique pour les travaux de micrographie............. race BeLzenG (Er.). — Anatomie et SES animales. Classification......... Loco db 0eodio ue L BerxarD (Félix). — Recherches sur les organes pal- léaux des Gastéropodes prosobranches....... “a 195 BE) 795 332 149 488 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES BLanorarD (Dr R.), — Compte rendu des séances du Congrès international de Zoologie......,........ 0229 Crauveau (de l'Institut). — Le travail musculaire et l'énergie qu'il représente............ COL SC UE 425 Crecorint (S.-A.). — L’'inspiration profonde active .... 230 Cours (Elliot). — Manuel d’Ornithologie générale. .... 272 Duvaz (Mathias). — Le placenta des rongeurs........ 87 Lana (A.). — Traité d’Anatomie comparée et de Zoo- MEL oo oude oc iEbe bon Len AL DO .. 680 Lussock (sir John\._— Sens ct instinct chez les animaux et principalement chez les insectes.,.............. 759 Mizxe-Enwarps (A.). — La ménagerie................ 188 Monricror (L.). — L'amateur d’insectes............... 87 Parker (T. Jeffery). — Lessons in elementary biolowy. 588 PLarr-Bazz.— Y a-t-il héritage des effets de l’usage et du non-usage des organes?................... does Nb) PRENANT (Dr A.). — Eléments d'Embryologie de l'homme et des vertébrés. ............ Snadébe océans 453 Prtem (F.). — L'évolution des formes animales avant JAPAN ONE hOMME. 222. soso sense se ee) Proropoporr (D').— Sur la question de la structure des DAS ELe todos oder eo ent nee pp neo nn .. 519 Ray LankesTer (E.). — The advancement of Science, occasional Essays ANTAULESS PS ENS ME enr 19% Roure (L.). — Remarques sur l'origine des centres ner- VEURICREZIeSTIOMIOMATESE Eee eee. 383 SERGUEYEFF (S.). — Le sommeil et le système nerveux. Physiolowie de la veille et du sommeil............. 195 SIMON (Eug.). — Observations biologiques sur les Ara- COTES EMA Ed tbe nee Sante 726 SrErFANOwSsKkA (Micheline). — La disposition histolo- gique du pigment dans les yeux des arthropodes sous l'influence de la lumière directe et de l’obscu- RTÉNGOMIPIR LOS se se ns anne eme esse urenen ee een 310 VernooGex et ne Bœck. — Contribution à l'étude de la CITCUIATONICERADRAlE Reese eee cesse lee 973 NERNEAU (R.). — Les Races humaines...........,.... 651 Vries (Hugo de\. — Les plantes et les animaux dans espaces obscurs des conduites d’eau de Rotterdam.. 193 Wazzice (A.-Russel). — Le Darwinisme.............. 87 4° Sciences médicales Chirurgie, Gynécologie, Ophtalmologie Bureau. — Guide pratique d’accouchements........... 829 CrisrrAnt (H.). — Gastrostomie pour cancer de l'œso- DIE cÉuracocesoneni tot room dcrne ge qubass 89 Dupray (S.). et Cazix (M.). — Recherches expérimen- tales sur la nature et la pathogénie des atrophies musculaires consécutives aux lésions des articula- MEN trar too Oo Tao dater eine 230 Duvaz. — Traité pratique du pied bot................ 554 FaRABEUr L.-H.). et Varnier. — Introduction à l'é- tude clinique et à la pratique des accouchements..., 196 JAvaL (E.). — Mémoires d’Ophtalmométrie annotés et précédés d’une InfrodUCHION. se... 520 LaBusqQuiÈRE (R.). — De la grossesse après l'hystéro- ! HE ceuonnronndeonec onde boat tons base due 796 MassELoN (J,). — Examen fonctionnel de l'œil......... 196 Nicaise. — La grande chirurgie de Guy de Chauliac... 3% Orr (Dmitri de). — Sur quelques modifications du pro- cédé opératoire de l’hystéro-myomectomie......... 728 Ricenezor (L.-G.\). — Sur le traitement du pédicule dans l'hystérectomie abdominale par la ligature élastique MARNE a éooenoocatonategmannberLe rene bn c 56 SEGOND (P.). — De l'hystérectomie vaginale dans le trai- tement des suppurations périutérines............. 274 TroussEeAu (A.). — Guide pratique pour le choix des lu- RNECono mad coniT io And nbL 210006 ed HE 0p2 Médeciue, Hygiène et Microbiologie méd'cale ARLOING Aupry (Ch.). — Etude sur les tubercules du pied. tomie pathologique SORMESAviInUs ete een eee CE Ana- Baes (V.). — Annales de l’Institut de pathologie et de bactériologie de Bucharest....... BABES ET OPRESCU. — Sur un bacille trouvé dans un cas de septicémie hémorrhagique présentant certains ca- ractères du typhus exanthématique......... acoc Bariskt (J.). — Paraplégie flasque par la compression EAN Ole PR EC et RE Baupouix (Marcel). — L'asepsie et l’antisepsie à r hôpital Bichat. Service de chirurgie de M. Terrier... ; BraureGarD (H.). et Gaztppe. — Guide pratique pour les travaux de micrographie...... BourLocue (P.). — Sur la polyarthrite suppurée myosites déterminées par le pneumocoque Brivors (L.). — Manuel d’élecrothérapie synécologique. CARRIÈRE (Ch.). — Etude sur la purification des eaux courantes. Cuor (Dr S.). — Traitement du charbon par le bicarbo- nate de soude, d’après la méthode de M. Fodor...….. Cornevix (Ch.). — Des plantes vénéneuses et des em- poisonnements qu’elles déterminent. ...... mere Cyexeus. — Etude sur le bacille typhique............. Daxirewsxkt (de Karkof). — Sur les microbes de l’infec= tion malarique aiguë et chronique chez les oiseaux CACHEANROMMEN TP AREA ee semer nn 5 DEBIERRE (Ch.). — Traité élémentaire d’Anatomie de PROMMTÉ EC sien ee des co Decrmz (Dr). — Traité de la diphtérie................ Durax-Farpez (Raym.). — Technique élémentaire de bactériologie de Salomonsen...... _ Duoroziez (DrP.).— Traité clinique des maladies du cœur ErernoD (A.), et Haccrus. — Recherches concernant la Mano 0 NaCCINe se een lues tenace don nee c use Fasre-DomerGue (P.). — Manuel pratique de l'analyse micrographique des eaux..... Féré (Ch.). — Les épilepsies ct les épileptiques....…. à êt lé FoxsarrT et EnrManx. — Recherches nouvelles sur la HÉVRE SCA I ATOS EeE le es cena ee nee ee de eine ete : ForsrTer (J.\. — Infectiosité des viandes fumées d'anÿ- MAUAU DERNIERES RER ee nletesinle ste e cine eat iee Fournier (Prof. A.). — L’hérédité syphilitique........ — La lutte contre la fièvre typhoïde FRexcINET (de). dans l’armée. (Rapport à M. le Président de la RÉPUDÉQUES) EEE EEE Ce ee SoBÉGAE Hébbose . GamMaLEïA (N.).— Sur la lésion locale dans les Male us microbiennes Gus (Dr P.). — Précis d'embryolegic adapté aux SCIENCES ÉGALE RE eee eee see select GRrANCHER (J.) et Lepoux-Leparp. — Etude sur la tuber- culosetexpérimentale/du lapin.................... HuaouxexQ (L.). — Traité des poisons. Hygiène indus- tele MCHMICNE NA TER een elt eee JuLtEN (A.). — Aide-mémoire d’Anatomie à l’usage des étudiant en médecine. ........ JUS Jar ee lorbebr eo : LANNELONGUE et AcHarp. — Etude microbiologique de AVS TES ICONPÉNITAUNES tee acte es aiie se see co Lee ET Davis. — La composition chimique et la va- leur clinique du lait stérilisé..... DÉDDNO TAC OPO GET LeviczaIN (F.). -- Hygiène des gens nerveux précédée de notions générales et observations sur la struc- ture, les fonctions et les maladies du système NEVERS ee nee che Lépine (R.). — Pathogénie du diabète consécutif à l'ex- tirpation du pancréas Retriel= lei eee eieliaiste ss eee : AS-CHAMPIONNIÈRE (J.). — Sur la pratique antisep- tique des accouchements. Le nettoyage des mains. Lucer (A.). — De la congestion des mamelles et des Luc mamittes aiguës chez la vache.................... MaNaACÉINE (Marie). — Le surmenage mental et la civi- lisation moderne. Effets, causes, remêdes.......... MiqueL. -— Manuel pratique d’analyse bactériologique TÉSRCAL EEe an eee eu Meier aise lelais sie DR a l'unité des maladies et DEMÉUESEE ser le eee deal are Sa etalae se cale alale Pocar (A.). — ae des 846 Rouvier (J.). — Revue internationale de bibliographie médicale, pharmaceutique et vétérinaire........... 230 SaLazar (A.-E.) Newmaxx (C.). et BLaxcnarp (R.). — Examen chimique et bactériologique des eaux po- RO Rene orno doi be ip ao enodeoddeo 589 SALOMONSEN (Dr C.-J.). — Technique élémentaire de Bacténiolopie ere PUe 230 Sozzier (P.). — Psychologie de l'Idiot et de l'Imbécile. 830 SPILLMANN (P.). — Manuel de diagnostic médical et d'explorationoniqQue res de de. 23 SPRINGER (M.). — Etude sur la croissance et son rôle en pathologie. Essai de pathologie générale....... 120 Srraus et GamaLrïa. — Recherches expérimentales sur la tuberculose. La tuberculose humaine. Sa distinc- tion de la tuberculose des oiseaux................ 652 Temsrowrren. — Etude sur la pneumonie fibrineuse.. 89 Tesrur (Léo). — Traité d'anatomie humaine à l’usage des médecins et étudiants en médecine. Ostéologie, Arfhrolovie My010910 PEER. eee -e------- 311 VERNEUIL (Prof.). — Etudes expérimentales et cliniques sur la tuberculose. Tome III, 4er fascicule. ........ 796 Vixcexr (H.).— Présence du bacille typhique dans l'eau de Seine pendant le mois de juillet 1890........... 2714 WürrTz (R.) et Leuper (R.). — Recherches sur l’action pathogène du bacille lactique..................... 128 WyxTer BLyTx (A.). — Manuel d’hygiène............. 384 THÈSES POUR LE DOCTORAT ÈS SCIENCES PRÉSENTÉES A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE PARIS (1890-1891), ET ANALYSÉES DANS LA REVUE EN 1891 1° Sciences mathématiques. Bourzer (C.). — Sur les équations, aux dérivées par- tielles simultanées qui contiennent plusieurs fonc- tions inconnues. .......#"..".. 44... "r-.rree 338 CeLs (J.). — Sur les équations différentielles linéaires OriNaÎreS se Abe ce rer detente 826 Maxczor (M.-S.). — De la symétrie courbe............ 147 TANNENBERG (Wladimir de). — Sur les équations aux dérivées partielles du premier ordre à deux varia- bles indépendantes, qui admettent un groupe con- tinu de transformations............:.,............ 647 2% Sciences physiques (Physique et chimie. — BerTueLor (Daniel). — Recherches sur les conductibi- lités électriques des acides organiques et de leurs OA RSR oasis IE IS 352 FErNgacu (A.). — Recherches sur la sucrase, diastase inversive du sucre de Canne.-........4..":0..10... 42% GæIsENHEIMER (G.). — Sur les chlorures et bromures doubles d’iridium et de phosphore. .... H400 2604888 794 III. — ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA Académie des Sciences de Paris. Séances des DOPNTE EM MASOUP EP ETAT ECTS 24 — 5 janvier ARTARE EEE EEE EE 24 — 12 — PO IUT POUCES 57 — 19 — nt enr eee 57 — 26 — ER RE PO ONER RES 90 — 2 février M qi ae ee Se ES 91 — 9-16 PTE ane 120 — 23 — en neue 0 151 = 2 mars — Aero nd eLre 151 — 9-16 — 0 CPE Tri Te 197 — 23 — A En EN NTIC 231 — 31 — nos Cobntu 000 232 — 6 avril = fr lose ee 275 — 13 — Ne eee. 276 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES GENVRESSE (P.). — Contribution à l'étude de l’éther acé- DYACÉTIQUE PE -e-ce Eee Grixer (G.). Sur quelques cas d'isoméric dans la série BUGS RL seal er de MT -acteee CEE GuyE (Ph.-A.). — Sur la dissymétrie moléculaire... ... Lévy : Lucien). — Contribution à l’étude du titane... Orrrer (Albert), — De la variation sous l'influence de la chaleur des indices de réfraction de quelques espèces minérales dans l’étendue du spectre visible, 3° Sciences naturelles ArTHUS (M.).— Recherches sur la coagulation du sang. BaraizLox (E.). Recherches anatomiques et expérimen- tales sur la métamorphose des amphibiens anoures. Basrir (E.). —Recherches anatomiques ct physiologiques sur la tige et la feuille des mousses.............. BErxarD (F.). — Recherches sur les organes palléaux des Gastéropodes prosobranches................., BRanpza (M.). — Développement des téguments de la M once cc CnHauveauD (G.). — Recherches cmbryogéniques sur l'appareil laticifère des Euphorbiacées, Urticacées, Apocynéeslet Asclépladiées. "#47" Ficneur (E.). — Description géologique de la Kabylie du DjUTJUL ARE EEE EE RC PC EEE Gay (Fr.). — Recherches sur le développement et la classification de quelques algues vertes............ Hérouarp (Ed.). — Recherches sur les Holothuries des côtes de France "#2 --ehe--e-ercu ER LaniLce (F.). — Recherches sur les Tuniciers......... LamouxerTe. — Recherches sur l’origine morphologi- que duAiberMntenne ere -e-te-r ere TEE Le Daxrec. — Recherches sur la digestion interne chez lestProtozoaires-Lr AP cLre eee CEE ATendUMA ERA eee Ne CULOTTE LEE Méx£écaux (A.). — Recherches sur la circulation des la- mellibranches marins." .2220 20e Perprix (L.). — Sur les fermentations produites par un microbe-anaéorbie de leau-#2#. "2°" ce Pruxer (A.). — Recherches anatomiques et physiologi- ques sur les nœuds et les entre-nœuds de la tige des Dicotylédones,- these: e ee ECC PEER Rocn£ (G.). — Contribution à l'étude de l’anatomie com- parée des réservoirs aériens d'origine pulmonaire Chez les T01Seaux 0 ee ee TETE SAUVAGEAU (C.). — Sur les feuilles de quelques mono- cotylédones aquatiques... -"""Fc---.-r-"--ee SouLiEr (A.). — Etude sur quelques points de l’anato- mie des Annélides tubicoles de la région de Cette (secrétion du tube et appareil digestif).......,..... THouveniN (M.). — Recherches sur la structure des SAXITATACÉOS eee ee CE NE RER FRANCE ET DE L'ÉTRANGER Séances des 20 avril == 97 £+ 1 mai — juillet = s 5 Le M = 97 de, _— août — — 10-17 — — 679: 751 618 726 552 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES —_————————— ——— Séances des 2% août ASE henri 591 | Séances des 17-14-21 novembre 1891............... 163 — 31 — CE D ES A 621 — 28 — rt door 833 _ 7 septembre RE te ee aTNe 621 — 5 décembre eee 833 — 14-21 —- lues elele Vela=te ape 653 — 28 — 0 mind d0 ob 682 Soéiété française de Physique. = 5 octobre D OO E rs 682 : à PE 12 ei Den 7 EVA 683 | Séances des 16 janvier ASIA... HAS RAGE 00) 4, 19-26 2 SSP LS OA 729 — 6 février Et lier ele 92 — 2-9 novembre RE D ler ates 161 A 20 GE REA LTUUT TT LME 123 = 16 == ES TN EN 797 — 6 mars bee secrets 453 == 23-30 = ER RO 198 ra 20 FF esseeseeneeesee 199 = PEN dE CIN D LC D nn es PIC 831 e 3 avril Deer ebereose 271 — 17 —_ le elec jets ape 218 Académie de Médecine. — 4er mai RSR T on acescso 314 k = 15 — EP ue 345 Séances des 16-23-30 décembre 1890................ 25 _ 5 juin LS ANR RES 388 — 6 janvier ARDAE sa te arte 25 25 19 = ES SN EE à EU 429 — 13-20 — RO DOTE DoN TE 58 = 3 juillet lentes 458 S 27 = de coo0nbe 92 = 17 _ nn de 192 E 3 février = secensspesneeese 92 — 6 novembre nn UOTE re 131 be 10-17 cu — dossier 122 = 20 — TES PNERE 163 sS 2% 3 ON QD ONITOUDEC 198 — 4 décembre ra eee sier dans 199 — 3-10 mars AT ST Pa Ne rade 198 25 18 _ RE pr NE SORA Fan 833 Er 17 — Re cele 199 = 1-14 avril Ra hotngnnee 276 Société chimique de Paris. — 21-28 — ho er CEE ton 314 — 6 mai CR PT EE 314 | Séances des 96 décembre 1890............... 20 — 12 —= RCE 343 — 23 janvier LASER Eee. Érrrte 93 — 19 = = 344 — 4 février cer erorer 93 — 26 — = — 43 — ne OC iriere 153 — 2 juin — — 27 — Te cieimisieie aise {else 154 — 9-16 — — — 4-13 mars rence 200 — 23-30 _ — — 10 avril pré Doc 000 233 = 7 juillet _ — 24 _— se odabovaudeo 278 — 21 — = — 6-8 mai Men taalteists alone ieiofs ie 315 — 98 = 2 — 22 — — oodonddoodotoc 346 = 4 août — — 3 juin PTE bon cogneecc 389 ee 11-18 _— == — 12 — Ne ele tan isletlette 459 — 25 — — 92 — 26 — Re cts 460 — 4er septembre NAS eee 622 —_ 4er juillet cle ee ciel 492 — 8-15-22 — AT RE ER 654 _— 10 — eds e Ne scies 492 = 29 — Ra anne DE 683 — 2% — nee cle tieetderetsle 492 — 6 octobre 2 PR A NE SERRE 684 — 2% — ne eme apres al 523 — 13-20-27 — ER AN UNIT TS 130 — 13-27 novembre HR BOT oc 800 — 3 novembre RP ep 162 — 9-11 décembre Er ee Ne 000 834 10 — Re 763 = 24 = EE A IN RER 832 Société française de Minéralogie — er déc *e — 39 A sn ae ER Ve tan e Séances des 12 février Nés sésacoopaonoao 123 Re — 12 mars late su mot et ae 2 Société de Biologie. = 9 avril = , co on sn oo er oie else 2719 — il juin 4e ces oies efalele ciel 430 Séances des décembre SD Er----rr-ce. 25 — 17 — O0 DOC ONE 460 = 10 janvier ASIN A Eee 25 = Aer juillet D tcrerte 460 = 17 — A D ei MC ES cf 0 58 — 42 octobre hebdo nono 7164 = 24 - ete ele ele lot 59 — 31 = ER RARE AR Ne (EEE 92 Société mathématique de France _— ty Bvrier = 07 z NEO es Sn Ta nnnee RE... 93 A 91 SK RS A A 0 1 122 = 4 février FD oc Oro 93 a 28 2 SÉNTe Men ns _ 18 — RS EUR 124 ss 7 EE, SE Te 2 EP 152 — 4 mars re utiles 154 ei 14-91 ri TR ANT 190 = 18 — ae EEE ne 201 Se LAS al DRM NEUEE 977 — Aer avril = oc diocobtenopboe 233 _ 2 = Re ee 314 + eus. CR AE Je æ 2 ER MR dr Sr Ro: 314 — mai Carte ane : E 9-16 a BA RS er 6 = 2 — CE PR PPÉREO 346 ce 93 LA A PA 345 — 3 juin Foot orooco too 389 30 = FAC MARS . => AT. — PR CPE ES 70 460 ae 6 juin DNS 2 STE DITS 38S — Ar juillet rentes 460 a 13 ÿ ST NAS 250 == 15 — ta dune 193 Le 29 es A ee Man. 458 — 4 novembre = 5 0 ÉTon. C6 7132 + 97 = Rte Er 291 _ 18 [ee NE RARE toc ana 164 n juillet I A a OT 1 391 — 2-16 décembre ile 835 E ne Le ANS ES _ Société des Ingénieurs civils = 17 octobre RSR RS re 684 | Séances du 1e" janvier au {er juin 41891.. ....... 394 == 24-31 Ne AE 731 — des 5-19 NID SET CEE 521 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 848 Séances des 26 juin RER nee — — 3 juillet — ......... — — 17-2% — RE less Communications faites Het les AC ANCTS PERS Séance du 2 octobre. ASP Sociétés maritimes scientifiques Nord East Coast Institution of Engineers and...... 124,201, 233, 623, 133 Shipbuilders Institute of marine Engincers........,........... Institution o Séances des Société Séances des Séances des Séances des f naval Architects. 201, 623 ET 389, 493, 557, 133 Société royale de Londres 18 décembre 8 janvier 15 — 22-99 — 5 février 12 — 19 — 5-12 mars 19 — 9 avril 16 — 21-30 —- 1% mai 28 — 4 juin 11 -- 49 noveiubre 26 — 10 décembre 46 janvier 43 février 27 _ 6 mars 20 — 3 avril 17 — 22 mai 12 juin 26 — 6 novembre 20 — 4 décembre de Physique de Londres RTE state coenc Société de Chimie de Londres 45 janvier 5 février 19 — 5 mars 19 —— 2-16 avril 7 mai 21 — juin 19 - Société royale d'Edimbourg. 5 janvier 9 16-26 février 16 mars 6 avril 4 mai 18 — fer juin 45 -— 6 juillet 20 — Sociét€ philosophique de Manchester Séances des 43, ‘janvier 1891"... 020 62 — 10 février DEC 126 — 24 — SL RL 236 — 10 mars RE cu 236 — 1-21 avril — js ea TE 281 — 21 octobre Serre CES 838 — 17. novembre = —*:.:. "0000000 838 — Aer décembre — "4.115210 838 Société anglaise des Dames chimiques Séances des 9 janvier ABLE ETC . M62 — 6 février = SAC CEE 126 — 6 mars —" . 2120 COR 204 _ 3 avril — sise Eee 281 — Aer mai — rer 431 — 48 juin RE ec cnc 495 — 6 novembre — 1 nec SRE 165 Académie royale de Belgique Séances des 6-15-16 décembre 1890................ 21 — 1 février 1891.52 restes 204 = “i mars 0 204 — 4 avril = suis TRS 281 — 5 mai Yi AL SRE .. 349 — 6 juin © - 559 = 4 juillet co 559 — 4er août —" sale 624 Académie des Sciences d'Amsterdam Séances des 31 janvier ASIA ER CERF RREEEEEE 94 — 28 février ET 5 EC 05 0 205 — 28 mars cr 0 281 = 24 avril Er RTE IEEE 318 — 30 mai PO DOC oc o 395 — DMeTuin: OS don 463 — 26 septembre EN --RT PORPECR 654 — 31 octobre =... 6 APTE 134 Académie des Sciences de Berlin Séances des 42 mars ASIAPE TEA eee 318 — 2-9 avril ec 319 — 8-14 mai — bosses Loan 431 — 4A1 juin oo Ur oc 496 — 254 == 2, VER OST RCE 525 - 26 juillet En one 525 Société de Physique de Berlin Séances des 19M décembre A8 Er... 28 _— 9 janvier LOVE PE PECETEEER 28 _— 23 — ER 94 — 6 février NAS eue EE 209 — 20 — = hivers 126 = 6 mars RE eo à © 156 _ 10-24 avril Ne 319 — 8 mai — rec ER 319 _ 29 — RO ne de Les 2 431 — 12 juin A ec 432 — 26 —_ near NN 496 — 23 octobre A RE DO = 161 — 6 novembre = ete 766 Société de Physiologie de Berlin Séances des 148 octobre ABTAE ST MR er eee 684 — 30 — es TS TER RE 735 = 13 uovembre = Jura tee ete 766 Académie des Sciences de Vienne Séances des 18 “décembre M ABIDESES------.... 28 — 9 janvier AORAERE = rer 62 — 15 — = nas see sole de e 63 _— 22 — = Saba Ion 95 ‘ TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 849 Séances des 5 février (LIVE TER t doce 127 Séances des 22 avril OR taucec 350 LS 19 — To por on 156 — 20 mai Me connne non 432 = 5 mars M rntameseless 283 | Communications faites pendant les vacances... ...... 634 ei 12 = eee 206 | Séances des A0NSepleMbrE STI ER 655 = 9-16 avril Me alcle min ieialetalele le (ere a 283 — 923 — = LÉ SN RARES 685 ee 93 — NT AURA npen te 319 = 21 octobre POESIE Der c 767 = 8 mai RS SSD OR 349 _ 4 novembre ER Re ee 839 — 14 — = govoadoc doc duent 395 = 4 juin RC CS LE Sociétés diverses de Saint-Pétersbourg — Al — Rene proies ete 496 TE ie 18 = ANS mn 464 Sociélé des naturalistes de Saint-Pélersbourg — à juillet 7590400000 LDOEE 2e Séances de mars et d'avril RÉ r cendres 396 — _— "Mae eve ia ne st see 929 _ 16 — PE CAE CE 592 Société impériale minéralogique de Saint- Pétersbourg — 8 octobre ob De Dan 735 Sa Tes 2 16 ni LUN ns Re 236 Séances d'avril DEN enr re en ce 396 & 2 — At OU EVE N 166 FAR LATE TER = DÉDOVEMDLE esse» 761 cadémie royale des Lincei 2 12 Fa Rd relie ter 838 Séances des ASÉCEMDrE ASE. 6. 29 Académie des Sciences de Saint-Pétersbourg Fa 7 FA EE DELL CET EEE ë Séances des 16-30 décembre 1890................. 127 — Ac février Trent 95 _— 28 janvier HPllsroguoesecerr sons 157 = 47 mars DT OO DES 206 — 23 février DA OCT 206 _ 5 avril nc eee 284 _— 9 mars nn hot 206 = mai Ne 526 CS A | = TR EU SC Pts 236 | Comptes rendus de juillet à octobre ................. 802 — 25 — SD RP Or once 284 | Séance du 15 novembre RER See oo so 802 = 8 avril RP TO GE 284 — 15 — hs en 839 IV. — COURRIERS Courriers de Genbve-......,........... 40. Re TELE, 30 | Coumiers deSyAne yen A Me ere er eee each 559 — 1 bbeoconooosponenooe doc dpheo ones 285 V. — CHRONIQUES BeLLer (D.). — Les récentes Four sur les plaques Ozivier (L.). — Les recherches de MM. Lœwy et Pui- 66 HE oomonsendoceodtonne ve oo ouuomoncucce 95 seux pour déterminer la constante de l’aberration.. 231 BeLzuxG (Ed. 4 — Une éscursion zoologique au labora- Ramoxp (G.). — Les oscillations de Pantellaria......... 736 LMITORATAPOIELRA MR OSAS eee encre Lee Ce 287 | RENEL (G. A). — Les récents perfectionnements de la Haunié (E.). — Le générateur tubulaire à Ozone de filtration pastorienne de l’eau.................... 397 M. Gaston Séguy........,.... dan ea ue c ee AUS VI. — CONGRÈS Association francaise pour l'avancement des Sciences. Brunes (Bernard). — La Physique au recent congres Conprés do Marseille reset creer 592 de l'Association britannique à Cardiff.............. 687 Beer (D.). — Les fêtes du cinquantenaire de la fon- Naup (C.). — La chimie à l’Association britannique dation de la Société chimique de Londres......... 157 pour l'avancementides sciences... ........... 31 Biçourpax (G.). — Le congrès astronomique de Munich. 656 5 VII. — CORRESPONDANCE Sur la craie phosphatée (Lettre de M. A. de Lapparent). 521 td Combes) Penn men bancs eee 685 Sur les laboratoires mécaniques (lettres de MM. Donkin Sur le Muséum d’histoire naturelle (lettre de M. Arnaud). 768 850 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES VIII. — NOTICES NÉCROLOGIQUES ARCHENHOLD (F. S.\. — Wilhelm Weber............... 928 | DEemarçay (Eug.). — Auguste Cahours........ .. .… 238 BrizLouIx (Marcel). — Edmond Becquerel............. 351 1 « Nature ». — Sophie Kowalewski.....,....,, .,..... 128 — NOUVELLES BERGET (Alph.). — La photographie des couleurs. ..... 96 — La guérison de la tuberculose chirurgicale par Laricque (L.). — Les expériences de M. Chauveau sur lPoiPannelonene.- Fe ere ee 320 le circuit nerveux sensitivo-moteur des muscles... 804 — Les expériences de M. A. Etard sur la solubilits Ozxvier (Louis). — La confirmation expérimentale de la desSLIS RS ere rte CET e CC PETRRRES 840 théoretdefNresnel ete NE NE PRE LC 64 «97 gants! TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS ‘ A Abelous, 199, 314, 833. Abney (Cap.), 155, 151, 838. Abraham, 386. Achalme, 592. Achard, 89. Adamkiewicz, 157, 206, 396, 496, 136. Addenbroke, 393. Adenot, 163. Adie, 155, 204. Adler (de Vienne), 525. Adler (Dr G.), 28, 283. Adrian, 834. Agamemnone, 29. Agassiz (A.), 344. Aignan, 51, 313, 342. Aïtchison Robertson (W.-G.), 204. Aïtken (John), 349, 495. Albarran, 345, 491, Albert Ier, prince de Monaco, 195, 313. Albert (A.-M.), 197. Alcock (A.), 835. Alder Wright, 125. Alexeyefï, 309. Alezais, 380. Allard, 762, Altaras, 381. Amagat (E.-H.\, 54, 217, 683. Amalitzky, 396. Amat (L.), 197, 231. Amigues (E.), 90. Amoretti, 29. Anderson (W.-S.), 61. Anderson Stuart (J.-P.), 125. Andoyer, 197. Andrade (J.), 117, 154. André (Ch.), 91, 489. André (D.), 460, 835. André (G.), 58, 90, 231, 312, 313, 3, 421, 832. Andrews (J ), 317. Andrews (Th.), 93. Angeli, 63. Anney (J.-P.), 84. Antoine (M.), 91, 594. Antomari, 201. Appell (P.), 24, 141, 190, 219, 316, 338, 366. Appiani, 29, Aran, 763. Arcangeli, 207. Archenhold, 528. Arloing (S.), 35, 341, 621. Armstrong, 204, 317, 431, 463, 524, Arnaldi, 276. Arnaud (A.), 25, 215, 216, 217, 218, © 385, 455, 460, 763. Arnaud (H.), 58, 90, 343, 590. Arnoux, 524. Arons, 94, 432, 496. 12 Arsonval (d’), 26, 59, 92, 493, 452, 453, 232, 211, 314, 344, 345, 499, 494, 731. 1. Les nom; imprimés en caractères gras sont ceux des auteurs des articles originaux. Lies chiffres gras reportent à ces articles. Arthaud, 494, Arthus (M.), 90, 277, 619. Ascoli, 526, Askenasy (E.), 229, Aston (Emily), 802. Aubert (E.), 232, 216, Audry {Ch.), 23. Auger, 149, 492, 523, 834. Autonne (Léon), 197, 641, 761, 826. Aymonnet, 682. Ayrton, 203, 280, 392, 393, 461, 462, 494, 800, 801, 837. . 211. Babes (V.), 454, 589. Babinsky (D'), 345, 454. Bachelard, 456. Backer (de), 276, 832. Backlund (O.), 128, 157, 206, 236, 237 284, 300, 432, 654, 656, 685, 167, 7 839. Badin, 275. Badois, 558, 132. | Baeff, 556. Bagard, 831. Bailey, 281, 431, 496. Baillaud, 151, 197. Bakhuis-Roozeboom, 395, 464, 134. Balbiano, 803. Balestre, 198. Ball, 795. Ballaud, 313. Balmy, 490. Bamberger, 592. Bamberger (Marc), 63. Banti, 207. Baraduc, 590. Barbey (G.), 121, 197. Barbier (G.), 198. Barbier (Ph.), 198, 269. Baret, 430, Barral, 58, 151, 386, 457, 522, 648, 198. Barraud, 761, Barrell, 61. Barthe (L.), 342, Barthez, 833. Basc, 59. Basin, 490, 683. Basset (A.-B.), 59. Basso, 64. Bastit (E.), 91, 679. Bataillon (E.), 455, 553. Battelli, 526. Baubigny, 730. Baudin, 199. Baudouin (Marcel), 150. Baudran, 428. Baume-Pluvinel (de la), 649, 794. Bay, 590. Bayliss, 836. Bazille (A.), 3241 à 326. Bazin, 522. Beaulard, 489. Beauregard (H.), 55, 58, 89, 149, 452, 153, 195, 230, 272, 310, 332 à 337, 453, 759, 196, 831. 463, Béchamp, 153, 134, 278. 389. 159846" 523, 622, 684, 800. Becquerel (E.), 91, 121, 350, 834. Becquerel (H.), 198, 729, 162, 834. Bcddard, 802. Bedoyère (de ja Beghin, 93, 460. Béchal, 26, 93, 149, 154, 233, 492, 523. Behrens, 282, 654. Beilstein, 127. Beketoff (N.), 127, 206, 350. Bellet (D.), 95. Belloc, 386. Belzung (Ed.), 288. Belzung (Er.), 425, 488, 726. Bemmelen (Van), 395, 654. Beneden (Van), 559. Benedikt {R.), 63. Beraneck, 30. Berenger-Féraud, 762. Berg (A.), 151. Berg (E.), 654. Berg (Van den), 134. Bergenstamm (von), 283. Berger (P.), 198. Bergeron, 25. Bergeron (J.), 781 à 383. Berget (Alph.), 20, 96, 153, 497, 309, 315, 339, 382, 452, 485, 649, 618, 724, 828, 833. Bergstresser, 121. Bernard (Félix), 86, 519. Berry Haycraft (voir Haycraft). Bertelé, 682. » 423. Berthelot (D.), 24, 90, 121, 122, 382, 556, 762, 832. Berthelot (M.), 25, 58, 90, 121, 231, 312, 313, 343, 385, 386, 427, 455, 729, 197, 198, 599. Berther, 149. Bertillon (Alph.), 23, 392. Bertin-Sans, 555. Bertram-Prentice, 236. Bertrand, 200, 233, 346, 523. Bertrand (Joseph), 94, 267. Bertrand (M.), 343. Bertrand de Fontviolant, 524. Besson, 197, 231, 216, 521, 798. Betti, 206. Bevan, 311. Beyerinck, 81, 282. Bianchi, 209, S02. Bichner, 655. Bidschof, 736. Bierens de Haan, 95, 318. Biginelli, 803. Bigourdan (G.\, 410 à 445, 151, 232, 215, 312, 455, 517, 653, 656, 683 Billet (A.), 21. Billy (D.), 490, 591. Billy (E. de), 638 à G41. Binder, 432. Binet, 458, 491. Binet (A.), 163. Binet (P.), 555. Bioche, 219, 346, 493, 764. 489, 556, 892 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Bishop, 236. Bjerknes, 456. Blache (René), 591. Blakesley, 203, 204, 255, 317, 462, 465, 765, 836. Blanchard, 684. Blanchard (C.), 556. Blanchard (E.), 522. Blanchard (R.), 21, 26, 59, 229, 314, 3#4, 523, 589, 130, 833. Blarez, 151, 198, 276, 315, 396. Blaserna, 201. Blechynden, 551. Bleicher, 342, 832. Bloch (A. M.), 25, 421. Blondel, 799. Blondlot, 275. 289 à 295, : 764. Bœck (de), 215. Bois, (H. E.-J.-G. du), #32. Bois-Reymond (du), 685. Bolla, 803. Boltzmann, 111. Bonel, 793. Bonnet (Valère), 759. Bonnier (G), 271. Bonnier (J.), 831. Bonnier (P.), 730. Bordet, 684. Bordet (Ch.), 87. Bordoni Uffreduzzi, 803. Borel (A.), 388. Borelly, 215, 343, 798. Bôürnstein, 94. Borzilevsky, 206. - Bosc, 92, 684, 731. Bosscha, 621. Botella (F. de), 313. Bouchard (Ch.), 25, 275, 276, 130. Bouchardat, 199. Bouchardot (G.), 130. Boucheron (H.), 271. Boudailie, 400. Bougaïeff, 685. Boulloche, 426. Bouquet de la Grye, 151, 558, 132. Bourlet (C.), 338. Bourgeois (L.), 192, 228, 459, 835. Bourgeois (de Tourcoing), 25. Bourquelot (Em.), 198, 833. Boussinesq (J.), 385, 455, 490, 521. Boutan (L.), 521. Boutroux (L.), 555. Bouty, 428, 763. Bouveault (L.), 200, 287 à 291. Bouvier (E.-L.), 130, 244 à 348. Bovet (de), 391. Boyer, 385. Boyer (E.), 729. Boys (C. V.), 393, 494, 495. Boys (P. du), 386. Brandza (M.), 553. Braner, 283. Branly, 51, 218, 459. Brants (V.), 592 Brauner, 204. Breda de Haan (J. Van), 81 et 82, 395. Bredikhin, 350, 654. Brennand (W.), 836. Bretet, 199. Bretin, 590. Brillouin (Marcel), 20, 33 à 38, 197, 268, 309, 343, 352, 382 489, 724. Brioschi, 24. Brisac (E.), 821. Brisse (Ch.), 423. Brivois, 450, Brockbank, 62, 236, 281, 838 Brodie (D' F.J.), 661 à 665. Brodie (Rob.), 126. Brongniart (Ch.), 428, 457, 489, 490, 653, Brooks (W. R.), 319. Brouardel, 92, 198, 277. Brousset, 730. Brown-Sequard, 345, 388, 684, 131. Brueckner, 55. Brübl, 123, 269. Brullé (R.), 57. Brun (de), 198. Brunelle. 499. Brunhes (B.), 20, 84, 518, 687, 834. Bruyne (de), 832. Bucca, 803. Buchanan, 61. Bucher, 394. Budin, 271. Buguect (A.), 518. Buisine (A), 275, 312, Buisine (P.), 275, 312. Bukowski (Von), 496. Burbury (S. H.), 800. Burch, 801. Bureau, 829. Burgal, 343. Buron, 391. Burton, 155, 165, 801. Butte (L), 121. C. (A), 268. C. (E.), 84, 221. Cacheux, 391. Cadéac, 199, 277, 314, 88, 458. Cadet de Gassicourt, 654, 833. Cadiot, 58, 92, 591. Cahours, 208, 238, 314. Caiïller, 452, 592. Caiïlletet, 123, 198, 276, 314, 386,5358. Caïn, 317. Caïn (J. C.), 281. Callandreau, 54, 151, 382, 428. Callendar, 26, 836. Comara Pestana, 491. Cameron, 281. Camescasse, 831. Campbell Swinton, 236. Cancani, 29. Candlot, 391. Canevazzi, 592, Cannieu, 313. Canu (C.), 592. Canu (E.), 682. Capelle (van), 395, 654. Capelli, 207. Capitan, 123. Capus, 342. Cardani, 803. Carey Forster, 801. Carey Lea, 729. Carez, 608 à 616. Carles, 276. Carnot (Ad.), 26. Caron, 1. Carré (Georges), 154. Carré (L.), 522. Carrière (Ch.), 652, Carte du ciel, 308. Carus Wilson, 494, Carvallo (E.), 451, 197, 834, 835. Carvallo (J.), 424, 154, 201, 279. Casalonga, 191, 391, 523, 622. Cash, 202. Caspari (E.), 147, 648. Caspary (F.),385, 428, 455. Cassie (W.), 203. Castelnuoyo, 839, Cathelineau, 123. Catrin, 197. Cattaneo, 63, 803. Cattani, 284, 527. Cauchy, 116. Causse, 154. Causse (H.), 386, 7130, 800. Cavalli, 802. Cayeux, 313, 428. Cazeneuve, 215, 216, 313, 198. Cazin (M.), 230, 232. Cels, 342, 826. Cerruti, 29. Certes, 21. Chabrié (C.), 149, 730, 364. Chabry (L.), 59, 491, 554. Chambrelent, 58, 799, 833. Chantemesse, 7163. Chapel d’Espinassoux (de), 20. Chapman, 311. Chappuis (J.), 485. Chaput, 591. Charlois, 151, 197, 428, 456, 682, 161. Charpentier, 654. Charpentier (A.), 344, 388, 522, 555, 556. Charpy (G), 55, 118, 148, 194, 228, 269, 309, 339, 456, 486, 588, 618, 642 à 646, 649, 679, 724, 726, 161, 826, 831. Charrin (Dr), 25, 123, 429 à 134, 275, 385, 591, 684, 730, 833. Chassagny, 386. Chassevant (A.), 762, Chassevent, 459. Chatin (Ad.), 58, 621, 652, 730, 761. Chatin (J.), 151, 489. Chaudy, 622. Chaumier (de Tours), 832. Chaussegros, 391. Chauveau (de lInstitut), 151, 425, 621, 653. Chauveau (de l'Ac. de méd.), 457, 490, 683, 130, S04, 833. Chauveaud (G.), 650. Chauvin, 797. Chenrok, 127. Chervin, 25. Chevallier (H.), 524. Chibret, 489. Chicandard, 761. Chierchia, 527. Choay, 26, 93, 154, 231. Chobaut, 121. Chodat, 758. Choffat, 553. Chor (Dr). 488. Chouppe, 763. Chrystal, 495. Chuard, 555. Chwolson, 284. Ciamician, 63, 207 Ciani, 207. Ciccolini, 230. Clarke, 339. Claus, 592, 136. Claus (C.), 396, 464. Clerk Maxwell, 382. Clermont (de), 200. Clève, 156. Cloves, 461. Coëne (de), 391, 558. Coggi, 803. Cohen, 311. 457, 491, ss À its dm eu tpnisi TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 853 —————_—_——…—…—…—…—…—…—…—……….…—…"…—"…—…".…"…"— —……—…"—…— …—_…. …_"…. … … …"……" …" …"…"……". …"…—…"…".….… …"…. — —...…. ……"… … "…"…" …"…"…." "… …"…"_—"_…" …"…"…"…"…"…"…"…"—"—"—_…— _….… —.—..— — ——_— Coignet, 623. Colencon, 381. Coligny (A. de), 197, 205, 349. Colin (G.), 122, 555, 556. Colin (L.), 92. Colladon, 30. Collardeau, 198, 386, 388. Collet (J.), 386. Colley (R.), 231. Collignon, 154, 204. Collot, 57, 93, 389. Colson (A.), 232, 798. Combemale, 199, 377, 314, 458. Comberousse (Ch. de), 686. Combes (A.), 149, 154, 200, 919, 315, 346, 389, 460, 492, 800, 835. Comité géologique d'Italie, 229. Common, 836. Coninck (Œchsner de), 25, 198, Conroy (sir John), 155, 314, 833. Contamin, 558. Contejean (Ch.), 199, 313, 522. Cooke (J. P.), 191. Copeland, 524. Cormerois, 91. Cornet, 205. Cornevin (Ch,), 120, 314, 556, 591. Cvurnil, 271, 490, 832. Cornu (A.), 90, 91, 132, 185. Cossa, 29. Cosserat, 197, 621, 682, 683, 729 Costa, 839. Costantin (J.), 650. Coste, 732. Costomiris, 523. Coues (Elliott), 272. Courmont, 123, 199, 682. Courtade, 833. Courtade (A.), 400. Couttolenc, 430. Couturier, 345. Couvreur, 199. Crafts, 191. Crampel, 22. Crépieux, 492. Créquy, 122. Crié, 381. Crié (L.), 198. Crimail, 314. Crismer, 800. Cristiani (H.), 30, 56, 89. Crookes (William), 464 à 170, 216 à 226, 430, 497 à 504. Cros (A.), 490, Crosa, 64. Cross, 311. Crova (A.), 152, 231, 386, 427. Cruls, 275. Crum Brown, 236. Cuénot, 22, 87, 488. Cumenge, 730, 164. Cummins (W.-R.), 124. Cundall (Tudor), 802. Curie, 618. Custoz Franz Heger, 838. Cygneus, 56, Dabancourt, 91. Daligault, 590, Damien, 276. Dangeard, 91. Dangeard (P.-A.), 387. Daniel, 653. Danilewsky (de Karkof),274. Darboux, 65, 611. Daremberg, 129, 731. Dareste, 489, Darwin, 93. Dastre, 684. Daubrée, 58, 275, 313, 489, 556. Davis, 620, Davis (G.-E.), 204, 281, 496. Davis (R.-F.), 617, Debierre, 196, Debray, 1. Decaux, 730. Decharme (C.), 191. Déclat, 232, Defforges (C.), 90, 121, 218. Decohorne, 683. Dehérain (P.-P.), 661, S17% à 825. Deiss, 216. Déjerine (J.), 92, 152, 199, 345, 494, 591. Delacroix, 343, 522. Delage (Y.), 556. Delaurier, 25, 57, 92, 313, 387, 456, 129, 761. Delebecque, 25, 312. Delestre (P.), 762. Delianoff, 768. Del Re, 802, Delthil, 454. Demontké, 345. Demarcay -(E.), 240, 518. Demeny, 555, 762, Demont, 459, Denigès (G.), 216, 312, 313, 315. Deniler (J.), 324à 378. Denza, 592, Déperret, 455. Depoux, 345. Deprez (Marcel), 456, Derrécagaix (Gal), 91, 276. Des Cloizeaux, 279, Descoudre, 319. Deslandres (H.), 151, 232, 590, 798. Desnos, 198. Detmer, 310. Dettweiler (J.), 121, 232. Devaux (H.), 59, 91, 343, 428. Dewar, 154. Dignat, 92. Dines, 392, Dittmar, 228. Dixon (Augustus), 394. Dixon (H.-B.), 838. Dœlter, 192. Dolinar, 838. Donkin, 686. Dopof, 763. Dor, 123. Dorp (Van), 94, 734. Doumer (E.), 592, Douvillé, 152. Doyon, 428. Drewry, 201. Dreyfus, 496. Drouin, 832. Drzewiecki (S.), 485, 555, S12. Dubief (Dr), 56, 89, 120, 122, 193, 974. 311, 488, 520, 589, 619, 684. Dubois, 489. 657 à 152, 453, S05 à | Dubois (A.), 421. Dubois (R.), 353 à 363,561 1 56%. 619. Ducamp, 591. Duché, 344. Duclaux, 725. Ducos du Hauron, 428. Dudebout, 756. Dufet, 219, 430, 131, 164 Dufour (L.), 650. Duhem (P.), 232, 551, 129. Dujardin-Beaumetz, 58, 122, 199, 276, 314, 387. Dumont (G.), 423, 617. Dunstan, 202, 23: Dupare, 123, Duplay, 58, 232. Dupont (E.), 559. Duponchel, 832, Dupuy, 152.388, 833. Durand-Fardel (Dr Ray), 230, 652, 681, Durant, 391, 524. Duret, 654. Duroy (J.-L -P.), 490. Duroy de Brignac, 524. Duroziez (Dr), 651, Dury, 491. Dussaud (F.), 590. Duval (E.), 198, 554. Duval (Mathias), 87, 198, Duvillier (E.), 342. Dwelshauvers-Dery, 19, 364 à 369, 725, 793. Dymond, 394, Dziobeck, 319. Easterfeld, 236. Ebelmen, 6. Eder (J.), 283. Egger, 151. Eginitis, 386. Ehrmann, 488. Eliacheft (M°°), 344. Ellinger, 216. Elliot, 729. Elster, 319. Emerson Reynolds, 394. Emich, 95. Engel, 233, 312, 385, 459, 460, 523. Engler, 496. Enneper, 511. Enright, 495. Errera, 29, 64, 491, 624. Eraud, 522. Escoffier, 215. Esmiol, 343. Essner, 389. Etard (A ), 313. 426 à 484, 797, 832, 840. Eternod, 56. Ettinghausen (Von), 206, 283, 432. Evans (Frenton), 126, 291, Everett, 649. Evwart, 495. Ewing (J.-A.), 237 à 744. Exner (G.), 395. F Fabre (Ch.), 339, 791. Fabre-Domergue, 120, 277. Fabry, 343. Famintzin, 157, 206, 655. 685. Farabeuf, 196. Faraday, 236, 281. Farge, 344. Fasching (Mori), 464. Faurie, 623. Faurot, 151. Favaro, 802. Favé (L.), 199, 854 : Favero, 526. Faye (H.), 10, 30, 57, 91, 151, 385, 428, 648, 653, 761, 798. Fédoroff, 396. Feil, 1. Fengi, 590, 683. Féraud, 521. Ferdinand Jean, 492, Féré (Ch.), 25, 92, 344, 345, 458, 591, 684, 727, 163, 833. Féréol, 25, 833. Fernandus, 832. Fernbach (A.), 424. Féron, 92. Ferratini, 527, 803. Ferreira da Silva, 421. Ferron, 387, 522. Feussner, 126, 432, 452. F. F. (Voir Folie). Ffaundler, 283. Ficheur, 118, 386, 490. Figdor, 253. Fileti, 29, 64, 803. Finzi, 802. Fiquet, 800. Fischer (H.), 91, 427, 592. Fischer (P.), 58. Fisher (Rév. Osmond), 192. Fizeau, 621. Fitzgerald, 801. Flammarion, 90, 522, Fleury (J.), 558, 623. Fock, 283. Foerster, 682. Fol (H.), 312, 527. Folie (F.) ou F. F., 21. 349, 559, 624. Fonsart (D'), 488. Forcrand (de), 152, 197, 342, 385. Forel, 91. Forster (J.), 56. Forsyth Major, 761, 797. Fortin (A.), 24. Foster (R. le Neve), 495. Fouillon, 206. Fouqué, 118, 590. Fouret, 154, 201, 233, 279, 346, 732, 164, 835. Fournier (A.), 681. Foveau de Courmelles, 58. Franck-Pullinger, 155. Francois, 313, 313, 831. Frankland, 204. Fray Stogermayr, 63. Frédéricq (L.), 666 à 675. Freire (D.), 523, 590. Frémont (de Vichy), 271. Frémy, 5, 7, 151, 452. Frenet, 338. Frew (W.), 204. Freycinet Tde), 286. Friedel, 149, 154, 200, 312, 315, 346. Friedel (Ch.), 764, 832. Friedel (G.), 6, 123, 124, 901, 279. Friedländer frères, 156. Fritsch (Anton), 283. Fritsche, 525. Frolow (Gal.), 592, Fronde, 27. Frossard, 201. 205, 281, 313, Gad, 735, 766. Gaiffe, 314. Gaillot, 232. Galezowski, 25, 92, 198$. | Gilbert (Dr A.), 25, 58, 92, TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Galippe, 149, 153, 498, 833. Galton, 392, Gamaleïa, 554, 652. Gardner, 155. Gariel (C..M.), 344, 415 à 42%, 490, 520. | Garnier, 391. Garnier (J.), 555. Garras, 832. Garrigou, 315. Gartini, 95. Garzarolli, 736. Garzino, 803. | Gasparini, 400. Gasselin, 834. Gastine, 385. Gaube, 388, 731. Gaudin, 6. Gaudin (G.), 518. Gaudry (A.), 198, 428, 536, 161. Gautier (Armard), 119, 457, 389. 650, 161, 198, 832, 834. Gautier (Emile), 759. Gautier (H.), 85, 149, 310, 456, 679, 361 194. Gautier (P.), 342, 386. Gavoy, 198. Gay (Fr.), 383. Gay (J.), 518. Gée, 62, Gegenbauer, 28, 283, 432, 525. Geiïkie, 152. Geisenheimer (G.), 794. Geitel, 319. Genay, 340. Géneau de La Marlière, 342, 556. Genvresse, 679, Georgevics (von), 432, 766. Gérard (Eric.), 452. Gérard-Marchant, 591. Géraud (J.), 428. Gerland, 62. Gerloff (Oswald), 766. Germain (P.), 428. Gernaert, 276. Gernez, 59, 90, 455. Gerosa, 802. Giacomelli, 29. Giard (A.), 91, 277, 427, 458, 488, 491 556, 831. Gibon, 558. Gibsson, 61. Giesbrecht, 521. Gilbault, 683. L 344, 591. Gilis (Dr P.), 273. Gilles de la Tourette, 123. Gillis, 763. Giorgis, 527. Girard (Dr), 591. Girard (Aimé), 453, 459. Girard (A. Ch.), 456. Giraud (P.), 486. Girode, 23, 499, 314, 344. Gladstone (Dr), 155, 235, 269, 463. | Glan, 28. | Glassek, 761. Glazebrook, 348. | Gley (E.), 122, 199, 275, 276, 314, 344, 469 à 476, 491, 591, 684, 833. | Glücksmann, 525. Godefroy, 346. Godmann, 127. Goldschmidt, 157. Goldschmiedt, 592. Gonnard, 430. | Gouttes, : 199, 344, | Gonnessiat, 90, 455. Goodale, 486. Gordon (H.), 317. Gorges, 556. Gossart (E.), 729. Gosselet, 121. | Gotch, 155. | Gouilly (A.), 19, 83. | Gouré de Villemontée, 84. Goursat (E.), 53, 275, 385. He ILE Grabowitz, 29, 285, 526, 803. Gramont (de), 492. Gramont (A. de), 521. Grancher (J.), 123, 384. Granger, 428. Grassi-Cristaldi, 803. Grawitz, 198, 831. Greffer, 491. Gregory, 495. Gregory (R. A.), 26, 61, 94, 126, 455, 203, 235, 281, 317, 348, 393, 431, 461, 801, 837. Gréhant, 26, 152, 277, 387, 684. Gréhant (N.), 590. Gréhant (0.), 555. Greil, 24. Greuell, 198. Grien (A.), 802. Griffiths, 26, 395. Griffiths (A. B.), 762. Grigorescu, 314, 3#4, Grille, 732. Grimaldi, 802. Grimaux (E.), 91, 933, 2175, 276. 277, 218, 279, 455, #60. Grimshaw, 495. Griner, 460, 741, Grinwis, 134. Grison, 791. Gross (Ch.), 29. Gross (Th.), 496. Grossouvre (A. de), 25. 197. Grün (Goldfried), 525. Gruner, 391. Gruvel, 197. Grylls Adams, 461. Gryns (G.), 654. Gucci, 803. Guebhardt (Dr), 148. Guéniot, 92, 276, 314, 522, 557. Guerbet, 492, Guérin (A.), 199, 457, 522. Guermonprez, 622, 654. Guerne (J. de), 195, 727. Guerre, 489. Guichard (C.), 456. Guignard (L.), 197, 199, 343, 344, 428. 429. Guignet, 555. Guilbault (A.), 117. Guilbert (G.), 386. Guillaume (Ch. Ed.), 51, 59, 94 à 80, 90, 93, 148, 153, 191, 424, 459. 617, 649,676, 725, 151, 821, 834. Guimaraes, 316. Guitel (F.), 121, 312, 590. Guntz, 312, 386, 492, 521. Guye (Ph: A), 4% à 52, 149, 154, 192, 970, 340, 427, 552, 618, 801. Guyon, 391. 429, 491. Habert, 763. Haccius, 56. Hache, 587. Hadamard, 53, 190, 551, 617. Haitinger, 592. Hallauer, 427. Haller (A.), 51, 346, 489, Hamburger, 654, 134. Hammond, 592. Hamy (E. T.), 215. Hann (Dr), 283. Hanriot (M.), 26, 93, 154, 199, 315, 523 Harden, 62. Hardy, 654. Harker, 838. Harrow, 311. Hartl (Hans), 283. Hartley (W. N.), 287. Hartmann (D°), 23, 56, 89, 426, 454, 652, 128, 196, 830. Hartog (P, J.), 62, 126, 204, 236, 281, 230, 274, 341, 384, à 550, 554, 431, 196, 766, 838. Haton de la Goupillière, 342, 7 Haubner, 736. Haubtmann, 391, 524 Haudié (Edgard), 315, 345, 388, 430, 800. Hautefeuille, 8. Haycraft (J. B.), 60, 126, 294, 431. Heaviside (O.), 460. Hébert (A.), 55, 588, 630. Heckel, 831. Hédon, 275, 2117, 314, 342. Heen (de), 204, 559. Heger, 838. Hegler (Rob.), 726. Heilmann, 391. Heissner, 496. Hemmelmayr (F. von), 283, Henneguy (F.), 21, 429, 759. Hénocque, 123, 684, 731 Henriquez, 763. Henry (Ch.), 191, Henry (Prosper), Hensgen, 205. Hérail (K.), 759 Hérail (J.), 150, 27 Hérard, 654, Herbert, 68%, 833. Héricourt (H.), 429. 121FA624r 4, 216, Héricourt (J.), 59, 198, 34%, 833. Hermann, 835. Hermann (G.), 592. Hermite, 267. Hermite (H.), 682. Hernandes, 491. Hérouard (Ed.), 22. Herschel, 764. Hersent (G.), 391. Hertz, 117. Hervieux, 58. Herzig, 349. Heumann (Karl), Heurtault, 798. Hewitt, 156, 317. Hibbert (W.), 837. Higg (G.), 203. Hill (M. J. M.), 800. Hillairet, 391. Hind, 522, Hinrichs (G.), 342, 385, 590, 683, 729, 798. 831. Hinstin, 622, Hirbec, 798. Hæfer, 496, 148. 190, 521. 191, 208, 228, 149, 492, 733, 119, 229, 271, 218, 312, 456 D19, 829. 456, 490, 196, 520, 543 5 BEBE TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 899 , 340, | Hogdkinson, 802. Hôk, 124, 623. Holl, 127. Hoogewerff, 94, 734. Hopkinson, 460. Horbaczewski (D'), 283. Horsin-Deon, 93. Horsley (V.), 155. Hospitalier (E.), 123, 345. 543. Houdas, 762, , 313, 344. Houzeau | (A.), 588. Houzel, 491. Hovelacque, 521. Howard Mummery, Hoyle, 838. Huber, 832. Hubrecht, 654. Hugh Robert, 394. Hughes, 317, 394. Hugo (Léopold), 683, 761, 832. Hugo de Vries (voir de Vries.) Hugounenq, 152, 315, 522, 620. Humbert, 93,154, 388, 764. Hunter (William), 234. Huntington (Williams), 6178. Hurion, 456. Hurmuzescu, 522. Hutin (E.), 313, 4 Huygens FR ME o 202° Imbert (A.), 152, 275 Imchenctzky, 127, : Ince (W.), 235. Inostranzeff, 396. Irvine (Robert), 204, 431. Istrati, 827. Ivison O’Ncale (F.), 92. J Jaccoud, 122. Jäger (Gustav), 283, 319, 838. Jagnaux (R.), 309. Jahn (Dr Hans), 28, 94, 1927, 156, 319, 432, 496, 325, 166. Jahn (J.), 496. Jalioda, 157, 592. Janet (Paul), 199. Jannettaz, 391, 524, 559, 623, 133. Jannettaz (E.), 151, 201. | Janssen (J.), 314,385, 535, 761, 198. Japp, 311. Jaubert, 150. Javal (Dr), 654. Javal (E:), 520, 591. Jayle, 25: Jeannot, 199. Jesse, 431. Joannis, 121, Jobert, 556. Joffroy (J.) 456. Johnson (G.), 125, 391. Joly (A.), 276, 421, 456, 797. Jolyet, 684. Jordan, 391. Joubert (J.), Joubin (L.), Joubin (P.), 51. Jouffroy, 622. Jourdain (S.), 51. Jourdan (E.), 312. Jousselin, 391, 558. Joy (David), 733, 122, 831. 19, 452, 800. 192, 5336 à 918. Juillard (P.), 94, 278. Julien (A.), 215, 341. Jumelle, 312, 456. Julius (W. H.) 734. Jungfleisch, 313, 762. Jüptner de Jonstorff, 154, 486, K Kalt, 199. Karpinski, 655, 168. Kaufmann (M.), 56. Keeler (J, E.), 235. Keiser (E. H.) 191, 269. Kendall, 126, 281. Kerner (Fritz), 396. Khrouchtchev (Dr), 432. Khrouchtchof, 655. Kidston, 394. Kilgour, 800. Kilian (W.), 43 à 18, 25. Kirkman, 236, 838. Kirmisson, 58. Kisser, 55. Klat, 456. Klebs, 86. Klemencic (Dr), 156 Klolodkovsky, 206. Klumpke (Mile D.), 421, 683, 831 Kluyver, 94. Knecht, 204. Knoll, 349, 350. Knott (Cargill G.), 126, 394, 495, 5254 Kobb, 233, 279. Kobbé (K.), 339. Kæchlin (Horace), 204. KHæhler (R.), 102 à 409, 454, 588, 795. Kœnig (de Berlin), 319. Konigs (G.), 154, 2AA à 245. Kœrner, 803. Kohn (Gustave), 28, 496, 136. 197, 931, 455, 273, 384, Koller (Gustave), 592. Kondratieff, 396. Kondriawtzeff, 52%. Konig (Rudolf), 62. Se ee 134. Korteweg, 205. Kostanecki, 396, 464. Kouznetsoff, 350, 656. Kowalewski (Sophie), 122, Kramer, 271. Krasan, 432. Krauber, 396. Kraus (A.) 396, 592. Krazine, 231. Kreichgauer, 94. Krigar-Menzel, 525. Kronecker, 277, 319, 431. Kroulikovski, 284. Kroustchoff (K. de), Krüger, 766. Kunckel d’Herculais, 91, 456, Kundt, 126. 156. Kusta, 121. Kwisda, 592. Ra 102 co 239, 343. 387, 306. 458, 556. Labatut, 522. Labbé (Dr), 457. Labbé (A.) 683. Labbé (D.) 522. Labbé (Léon), 551. Laborde, 25, 92, 152, 198, 199, 977, 514 387, 457, 492, 5292, 833, 856 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS s RE Labusquière (R.), 196. Lacaze-Duthiers (de) 152, 287, 590, 761. Lachaud, 523, 555. Lacroix (Alf.), 91, 228, 498, 164, 798. Lafont (J.) 730. Lagneau, 25, 122, 976, 684. Lagrange (P.) 278. Laguerre (E.) 5 Laguesse (E.) Lahille (F.), 7 Lailler, 25. Laillet, 682. Laisant, 93, 342, 389, 460, 732. Lala (U.), 151. Lalande (K. de), 427. Lambert (P.), 313. Lamounette, 589. Lampa, 395. Lamy, 277. Lancereaux, 25, Landerer, 653, Lando Landi, 591. Lang (A.),680. Langer, 838. Langley (S. P.), 84,521, 555. Langlois (Ch.), 457, 458. Langlois (Marcellin), 1997 Langlois (P.), 152, 199, 833. Lannelongue, 89, 198, 320, 490, 491. Lannor, 341. Lapicque (L.), 25, 26, 58, 59, 92, 1 123, 150, 152, 153, 196, 198, 499, 233. 276, 271, 314, 343, 345, 386, 388, 429. 451, 490, 491, 522, 523, 556, 591, 592. 622, 653, 681, 683, 684, 730, 131, 762. 763, 199, 804, 832, 833. Lapparent (À. de), 57, 91, 152, 406 à 410, 486,527, 761. Larenaudie, 400. Larrey, 452. Lataste, 152. Lauder Brunton (Dr), 202, 836. Laulanié, 344. Launay (P.), 452 Laur (Fr.), 25. Laurent (Em.), 799. Laurent (J.) 522. Laussedat (A.) 154. Lauth (Ch.), 460, 489, 800, 834. De Lavarenne (Dr), 23, 25, 122, 198, 230, 748 à 255. Lavaux, 491, Lavenir, 279. Laveran, 25, Lavocat, 151. Lawson (A.), 802, Lean (B.) 838. Léauté (H.), 57, 342, 124, 136. Léautey (Eug.), 117 Lebel, 153. Lebel (J. A.) 299 à 244, 275. 492, 800. Leblanc, de 423, Le Cadet, 5 écharüer, “682, 683. Le Chatelier (H.), 24, 92, 93% à 402. A3S à 144,153, 459, 460, 492,509 à 545, 523, 621, 649, Leclainche, 491. Leclerc, 271. Leclère, 385. Lecomte (Henri), Leconte, 83. Lecoq de Boisbaudran, 57, 831. 312, 428, 430, 457, 977, 387, 654, 68#. 58, 92 , F] 59, 92, 345, 763. 219; 193; 229,272 651. | Lindet (L.), 57, Le Dantec, 310, 340. Le Dentu (Dr), 25, 92, 797. Ledicu (A.) 313. Ledoux-Lebard, Leduc, 731. Leduc (A.), 521, 522,555, 556. Lecd, 620. Lefebvre (J.) 797. Lefévre (1L.).233. 275. Be Fort, 58, 122,498: 976. 522. Léger, 313, 762. Le Goarant de Tromelin, 729, Legros (Commt.), 124, 794. Leguay, 312. Leidié, 276, 427. Leiïst, 31, 127. Lelieuvre, 161. Leloir, 199. Lembert-Koguin, 122, 428, Lemoine, 164, Lemoine (E.), 493. Lemoine (G.), 312, 313, 343, 385, 649. Le Moult, 343, 556. Lencauchez, 526. Léon (J.-G.), 125. Leone, 527. Léotard (J.), 91, Le Paive, 28. Lepierre, 200, 523, 555. Lépine (R.), 58, 151, 384, 457, 522, 798. Leray (Abbé), 388. Lereboullet, 832, Le Roux (F.-P. } 129: Leroy, (C.-J.-A.), 762. Le Roy (G.-A.) 275. Le Roy de Méricourt, 314, Le Royer, 123, 552. Lesage (P.), 57, 151, 232, 312, Lescarbaut, 57. Lespiau, 459. Lesska (Fr.), 832. Letellier (A.), 25. Leteur, 729. Leudet, 728. Levasseur, 122. Leveau (G.), 121, 797. Le Verrier (U.), 593 à 600. Levieux, 271. Levillain, 681. Levinstein, 431. Lévy (Albert), 831. Lévy (Lucien), 315, 460, 726. Lévy (Maurice), 682. Lewes (P.-Vivian), 390. Lezé, 216, 162. Lhotelier, #7. Liagre (Gal), 2 Lichtnecker, 49 Lie, 197. Lieben, 284, 496, 838. Liebreich, 28, 319, Lilienfeld, 685. Limb, 456. Limpach, 802. 314, 557, 162, 123, 384. 314, 387, 455, 621. 489, 621. 7. b. 93, 232, 371 à 374 389, 220 à 223, 834. Linebarger, 315. Linossier (G.), 152, 276 Lion, 731. Liouville (R..), 275, 834. Lippmann (de Vienne), 496. Lippmann (Ed.), 592. Lippmann (Friedrich), 592. Lippmann (G.), 91, 96. 123. Livache, 522, » Liveing, 154. Liznar, 767. Llaurado (A. de), 592. Lluria, 491. L. O. (Voir Louis Olivier). Lobny de Bryn (C.-A.), 654. Lodge (O.), 309, 392, 462, 495, 804. Lœwy (M.), 197, 237, 385, 456. Loir (A.), 545 ct 516, 559, 560. Longridge, 19, 648. Lorentz, 94. Lorié, 734. Loriol (P. de), Lortet, 555. Lüschardt, 206. Loth (O.), 396. Lougarre (F.), 117. Louise (E.), 312. Love (A.-E.-H.), 60. Lovisato, 207. Lüw (Moriz), 592. Lubbock (sir John), 759. Lucas (Félix), 315, 342, 346, 835. Lucas (L.-S.), 342. Lucas-Championnière (J.), 274, 622. Lucet, 420. Lüderitz, 684. Ludwig, 526. Lumière (A. et L.), 32, 442 à 444. Lunge (G.), 40 à 47. Lungo (Del), 95. Lunt (J.), 316. Luther (R.), 127. Luys, 499. Luzet, 388. Lyddeker, 26. 593: 992: Maas, 319. Maccalum, 3117. Mac-Connel, 202. Mac-Donnall, 233. Macfarlane, 349, 431. Mac-Govan, 394. Mach, 761. Mackensie (E.), 463. Mackintosh, 525. Mac-Laren, 62. Mac-William, 234. Madamet (A.), 724. Maes, 207. Magnanimi, 527. Magini, 285. Magitot, 30, 343. Magon, 491. Mahler (Ed.), 63 Mahler (P.), 798, 832. Mairet (P.), 59, 92, 684, 731. Malaguti, 6. Malaise, 592. Malaquin, 490, 522. Malard, 123. Malard (A.-E.), 38 à 40. Malassez, 92, 388, 523. Malbot (A.), 730. Malbot (E.), 730. Mallard, 59, 730, 764. Mallet (J. nus ) 2697 Mallock, 224, 316. Magnan (Dr), 374 à 781. Magnier de la Source, 121. Magnin (A.), 799. Manaceine (Marie), 150. Mancini, 29, 64, 95, 207, 285, 527, S04, 840, Mandereau, 344, 2 0 pda mil ft TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 851 Mandi (Max), 496. Mangcot, 147, 489. Mangin (L.), 149, 191, 255 à 266, 2711, 487. Mannheim (A.), 91, 151. Manouvrier, 23, 491. Manuel-Périer, 590. Maquenne, 276, 313, 345, 346, 424, S05. Marcano, 799. Marcet, 60, 393 Marchal (P.), 555. Marchand, 490, 521. Marchand (Em.), 57, 151. Marès, 387. Marestans, 458. Marey, 490. Marey (E.-J.), 689 à 949. 762. Marfan, 344, 131. Margerie (Emm. de, 86, 118, 149, 193, 2209/2714" Mavillier (L.), 128, 160, 830. Marion (A.-F.), 198, 232, 385, 555. Marjolin, 314, Tan. Markoff (A:), 276, 342, 385, 592, 797, 830. Markovits, 496. Marotte, 457. Marre, 591. Marrecas Ferreira, 227. Marshall (Hugh.), 127, 394. Martin, 396, 489. Martin (H.), 123. Martinand (V.), 275, 799. Marty (A.-P.), 653. Mascart (E.), 151, 345, 427, 522, 555, 677, 761. Massart J.. 69 à 93, 273, SU4 à 509, 654. Masselon, 196. Massin, 492, 521. Massol (G.). 275, 343, 385, 831. Masson (0.), 156. Masson (P.), 621. Mathey (Edward), 60. Mather, 494. Mathieu (A.), 193. Mathieu (Emile), 190. Matignon (C.\, 385, 386, 427, 455, 556, 730, 797. Matignon (W.-E.\), 555. Matthews, 227. Mattirolo, 803. Maumené, 315. Maupas, 653. Maury (A.), 653. Mauvenu, 276. Maximovicez, 121. Mazelle, 283. Mécanicien (Un), 465 à 469. Mégnin, 731, 763. Mégnin (P.), 344, 523. Meinecke, 339. Meldola, 394. Ménard, 198. Mendizabal (de), 460. Ménégaux (A.), 272. Ménière, 832. Menozzi, 29. Mensbrugghe (Van der), 205. Mer (E.), 91, 313. Mercadier (E.), 57, 456, 490. Mériau (C.), 552. Metchnikoff (E.). 2414 à 246. Metzler, 198, 313. Meunier, 199, 277, 314, 388, 458, 682, 834. Meunier (H.). 556. = Meunier (Stanislas), 121, 276, 313, 385, 521. Meyerhofter, 460, 492. Mendelsohn, 590, 591. Michel-Levy 590. Michkine, 231. Michotte, 229. Miculesco, 428. Mignot (L.), 2117, 621. Millard (de New-York), 523. Millosevich, 29, 197, 207, 284. Millot-Carpentier, 653. Milne (Rév. John J.), 617. Milne-Edwards, 90, 488, 798. Minchin, 61, 155. Minet (A.), 90, 356, S42 à S1%. Mingaszini, 207, 827, 839. Minguin, 25, 57, 455, 456. Minkowski, 90. Miquel, 760. Mirinny, 683. Mitrophanow, 762. Mohler, 25, 216. Moessard (Commt), 794. Moissan (H.), 275, 400, 428, 490, 762, 198, 831. Moitessier, 523, 555. Molina, 428. Molinos, 733. Monclar, 122, Mond (Ludwig), 524, 526, 678, 538. Moniez (R.),25, 232, 832. Monneraye (de la), 729. Monnory, 151. Monin (Dr), 426. Montané, 123. Montemartini, 803. Montessus (de), 152. Montserrat (E. de), 827. Montillot (L.), 87. Morat, 428. Morau (H.), 199, 314, 315, 734 Morau (P.), 833. Mordey, 203. Moreau (A.), 132. Moreau (L.), 428. Morera, 802, Morvan, 216. Moit (F.-W), 461. Mouchez (Amiral), 151, 232, 522, 653. Moulin (A.), 386. Moulin (H.), 429. Moureaux (Th.), 24, 90, 345. Mouret (G.), 97 1102, 138 à 144, 338, 826. Moureu, 154. Mourlon, 592, 624. Movdy, 156. Moynier de Villepoix, 590, Mudd (Thomas), 493. Muiz (Dr), 62. Mulders (E.), 654. Müller (E.), 730. Müller (Franz), 396. Müller (P. Th.), 385, 455. Multzer, 122. Munk, 735, 766. Müntz, 91, 151, 385, 456, 799. Murray, 61, 126, 204, 802. Muyden (G. van), 285. N Nadalon, 621. Nalepa (D'), 736, 767. Napoli, 92. Narducci, 207. Nasini, 526, 839. Nassakin, 206. Natterer, 526. Naud (C.), 31, 55, 85, 87, 149, 794. Naudin (Ch.), 58. Negri, 521. Nepveu, 344, 684, Nerville (de), 54, 452. Netter, 199, Neumann (G.), 592. Neumayr, 432. Newman (C.), 589. Newton (H.-A.), 556. Nicaise (E ), 341. Nicati, 152, 491. Nicolaïer, 90. Niessl, 28. Niewenglowski, 485. Nikolsky, 655. Nilce (H.), 431. Nils Ekolm, 227. Nocard (Ed.), 198, 523, 730, 832. Noë, 13. Noelting (E.), 245 à 251, 307%. Nordenskiold, 831. Norman Lockycer, 24, 134, 280. Normand, 524, Normann Collie, 524, Noyes (W.-A.), 191. 299 à Oo Obermayer (Alb.), 127, 156, 283, Obry A), 58. Ocagne (Maurice d’), 93, 12%, 151, 154, 470 à 1932, 201, 233, 219, 316, 346. 349, 423, 460, 493, 586, 604 à 608, 132, 764, 835. Oddone, 63, 95. Odling, 160. Occhsner de Coninck (voir de Coninck). Occhinke. 432 : Ofret (Alh.), 552. Olivier (Louis), 19, 53, 64, 83, 123, 147, 422 à 489, 190, 227, 238, 267, 309, 520, 338, 341, 384, 426, 433 à A4, 153, 454, 485, 486, 488, 517, 552, 554, 589, 600 à 603, 617, 620, 642, 648, 651, 652, 677, 680, 725, 759, 160, 168, 833, 840. Olivier (Dr), 92. Ollivier, 198, 684. Oltramare (G.), 451, 592. Onanoff, 217, 314. Oppenheim, 156. Oprescu, 589. Ormerod, 62. Orsini, 521. Osborne Reynolds, 236. Osmond (F.), 198, 683. Osmond (R.-T.), 395. Ossipolf, 523. Ostwald (W.), 90, 417, 122, 155. Ott (Dmitri de), 728. Oudmans, 654, Oudin, 522, Oustalet, 829, Ouvrard (L.), 456, 521. P Padé (H.), 2175, 342. Padova, 207. “ Pagès (C.), 90. Paget (sir James), 152, Pagnoul, 271. 858 Painlevé (P.), 232, 308, 386, 798. Panas, 522. Paquelin, 556, 590, 622, 653. Paraire, 232. Parenty (H.), 555, 729, 761. 831. Parker (W.-N.), 392. Parker (Th. Jeffery), 588. Parkin (Dr J.), 400. Parmentier (F.), #90. Parmentier (P.), 7, 385, 521. Passerini, 803. Patein (G.), 149, 521. Patin, 199. Patrigde, 339. Paul (Constantin), 34%, 387. Paulier, 763. Péan, 25, 457. Péchard, 215, 343, 490. Pector (S.), 194. Peddie (W.), 21, 62, 126, 204, 236. 349, 395, 431, 495, 525. Pée-Laby, 421. Pekelharing, 464. Pellat (H.), 59, 93, 276, 315. Pellerin, 233. Pellet (M.-A.), 386, 427. Pellin, 388. Pellizzari, 527. Pelsencer, 342. Penzo, 804, 839. Pepper (Ed.), 198. Perchot, 343, 191. Percy, 204. Perdrix (L.), 618. Périer, 457. Perkin (Frédérick), 204. Perkin Junior, 204, 236. Perkin (W.-H.), 62, 524, 801. Perman, 280. Pernot, 428. : Pernter, 28. Péron, 119. Pérot (A.), 682. Perrey, 8. Perrier (Edm.), 386. Perronato (Dr), 592. Perrotin, 428. Perry, 235, 392, 393, Petersen (J.), 592. Petot, 456, 831. Petree, 133. Pettit, 524. Philippidis, 653. Phillips (Ed.), 90. Phillips (Th.), 390. Phipson, 232. Physalix, 199, 729, 833. Picard (Alf.), 317. Picard (E.), 90, 201, 275, 308, 312 621, 791. Picart (L.), 90, Piccini, 284. Pichard, 456. Pichon (D' G.), 759. Pickering (S. V.), 20, 235, 463. Picot, 198. Pictet (Raoul), 319. Pietra-Santa (H.), 556. Pictte, 161. Pigeon, 621. Pigeon (D°), 556, 729. Pigeon (L.), 216, 386, 387, 683. Pignol, 198, 199, 387. Pigorini, 29, 64. Pilat, 491. Pilliet (A.-H.), 344, 491, 523. Pimpar, 622, 428. Pinard, 591. Pincherle, 63. Pinguet, 315. Pirotta, 839. Pitsch, 735. Pittarelli, 526. Pizon, 58, 122. Planat, 522. Platt-Ball, 55. Pleske, 432. Plicque (D'), 400. Poche, 648. Poggi (Aug.), 56. Poinearé (H.), 4 à 5, 91, 121, 151, 197, 268, 276, 313, 616, 129, 230 à 274, S31. Poincaré (Lucien), 59, 84, 93, 123, 453, 200, 309, 383, 486, 552. Poirault (G.), 313, 556. Poirier (P.), 523. Poisson (Alb.), 85, 618. Polaillon, 92, 314, 55%, 622. Pollard (J.), 756. Polonceau, 622. Polosson, 311. Pomel, 490. Pomel (A.), 232. Pommay, 58. Pomeranz (C.), 592. Poncet, 381. Popofï, 201. Popp (J.), 319. Potier (A.), 90, 122, Potilitzine, 523. Pouchet (G.), 26, 58, 275, 277, 312, 620, 831, 833. Poulain (A.), 83. Poulenc, 521. Poulet (J.), 19, 83, 84, 148, 227, 267, 648, 671. Pourcel, 391. Poynting, 392. Prenant (Dr A.), 453, 625 à 638. Priem (F.), 44% à 450, 519. Prillat, 834. Prillieux, 312, 343, 522. Prosorowsky-Golitzine, 396. Protits, 320. Protopopoff (Dr), 519. Prouho, 428. Proust (Dr), 58, 199, 344, 556. Prud'homme, 90, 455. Prunet (A.), 194. Prunier, 233. Pruvot (G.), 681. Puiseux (P.), 83, 197, 237, Pullinger (W.), 463. Puluj ‘J.), 283, 319, 349, 432. Pum, 592, 767. Purdic, 394. Puschl, 496, 198. 385. 135. Q Quantin (H.), 428. Quatrefages (de), 832. Quénisset, 653. Quénu, 198. Quinard, 400. Quincke, 524. Quinquaud, 277, 491, 555. Qvine (Robert), 61. Raffy (L.), 124, 451, 454, 197, 233, 312 389, 456, 493, 132, 835. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Ragona, 592, Raiïllict (A.), 120, 122, 429. Rambaud, 276, 455, 456, 729. Rammelsberg, 525. Ramond, 736. Ramsay (W.), 202, Rance (de), 62. Ranhin (A.), 395. Ransome, 26. Ranvier (L.), 235, 312, Raps, 526, 766. Rathay, 283. Ratcau, 683, 761. Raulin (G.), 91. Raulin (J.), 91. Raveau (C.), 312, 343. Ravet-Dumesnil, 653. Rayet (G.), 428, 798. Ray Lankester (E.), 194 Rayleigh (Lord), 154. Reboul, 761. Recoura, 456, 832. Regnault (E ), 491. Regnault (E.), 163, Reich (Carl.), 592: Reïichet, 28. Reiset, 455. Rémond (A ), 123. : Remy-Saint-Loup, 344. Renard (abbé), 205, 539. Renard (A.), 25. Renaud (J.), 312. Renel, 400. Renou (A.). 90. Resal (A.), 313. Resal (H.), 216, 551. Retger, 206. Réthi, 136. Retterer (E.), 123, 314, 344. Rey de Morande, 157, 152. Rhon, 315. Riban, 200, S00. Ribard (C.), 457 Ribard (P.), 653. Ribaucour, 590, 591. Ricco (A.), 556, 198. Richard, 455, 524, 622. Richard (L.), 455. Richards (Th.-W.), 191. Richardson (A.), 394, 495. Richardson (E.), 148. Richelot, 56. Richet (Ch.), 59, 150, 198, 199, 344,387, 429, 763, 833. Ricochon (D'), 163. Rietsch, 175. Rieux (E. des), 92. Righi, 207, 526. Rigollot, 24. Rütter (R.), 117. Rive (de la), 232, 682. Rivière (E.), 342. Robert (Hugh), 392. Robertson (G.-H.), 430, 431. Robin, 344. Robitschek (J.), 432. Rochard (J.), 199, 314, 387, 491. Roché (Dr Georges), 829. Rodet, 199, 682. Roger (D' Georges-H.), 25, 58, 92, 123, 440 à 4145, 491, 591, 730, 731. Rohon, 396. Rollet, 457, 653. Romburg (P. van), 729. Rommier, 428, 653. Ronna, 391. Roque da Silveira, 429. 280, 765, 801. 836 513. 832. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 859 EE EE_—]_]—_]—]…———— …— …—…—…— a Roscoe (Sir H.-E ), 316, 802. Rosenthal, 525. Rosival, 63. Ross (J.-C.), 838. Rossin (Otto), 592. Rossiter, 204, 463, 587. Rouché (E.), 404 à 405. Roule, 90, 383, 457, 522, 832, Rousseau (G.), 197, 200, 555, Roussel (J.), 343, 457. Roussel (Th.), 314. Routier, 92. Rouvier (J.), 230. Roux (L.), 198, 269. Rowland Williams, 204. Roy, 132. Rubens, 94, 766. Rubens (H.), 117, 126, 496. Rucker, 801. Rudolf, 320. Rutherford, 126. Ruydts (de), 559. s Sabatier (P.), 312, 342, Sabourau, 684. Sainte-Claire Deville (H.), 7. Saint-Germain (A.de), 90. Saint-Hilaire, 763, 833. Saint-Martin (L. de), 386. Saint-Pierre (O.), 26, 153. Saint-Remy (G.), 343, 555, Saintu (O.), 400. Salazar, 589. Salet (G.), 134 à 138. Salguès, 622, Saliba (F.), 556. Salomonsen (Dr C.-J.), 230. Sanchez-Toledo, 458, 591, Sande-Bakhuysen (H.-G. van de), 205. Saporta (G. de), 556. Sarasin (E.), 117, 160, 232. Sasse (Dr J.), 318. Sauvageau (C.), 193, 310, 383, 553, 650, 154, 194, 828. Savélieff, 152, 386. Schafer, 60, 125. Schell, 432. Scheurer-Kestner, 58, 90, 122, 555. Schlæsing fils (Th.), 799. Schiff (capitaine), 284, 350. Schimper, 424. Schindler, 592. Schmarda, 496. Schmidt (E.), 464. Schmidt (Th.), 256. Schmidt (W.), 799. Schneider, 521, 590. Schnyder, 25. Schober, 735. Schænfilies, 151, 197. Schoute, 94, 206, 283, 318, 395, 464, 654. 134, 735. Schreinemakers, 463. Schrenk, 121. Schræœder van der Kolk, 654. Schryver, 235. Schulze (E.), 55, 193. Schumann (V.), 191. Schunck (E.), 461, 765. Schuster (A.), 586, 587. Schützenberger, 555. Schwedoff, 429, 458. Scudder (Franck), 802. Sée (G.), 280, 387, 490, 654, 684. Seeley, 348. 522, 52 rs Segond (P.\, 274. Seguy, 208. Séjournet, 400. Sella (A.), 58, 63, 95, 803, 839, Semenoff, 168, 839. Semmola, 90, 557, 683, 68%, 730. Sénarmont (de), 6. Senet (E.), 799. Sergucyeff, 195. Sérieux (P.), 324 à FSI. 555. Serpa Pinto (de), 312. Serrant (E }, 152, 762. Serrct (P.), 591, 621. Serrin (V.), 428, 429, 460. Service géographique de l’armée, 267, Seubert, 339. Seunes (J.), 121, 428. Severweliz, 556. Shaw (G.), 281, 349, 492. Sheridan Delcpine, 26, 836. Siffert, 591, Sigmund (W.), 592. Silber, 207. Silva, 154. Silva (Chev. da), 592. Simon (Eug.), 726. Simpson (Dr), 496. Sinclair, 835. Sinigaglia (F.), 227, 261. Sire, 57, 197, 232. Sirodot, 122, 387. Sisley, 797. Skinner, 348 Sklarek (Dr W.), 685, 135. Skraup, 283, 592. Smith, 203, 204. Sollier (P.), 763, 830. Souchon (Abel), 53, Soulier (A.), 454. Souques, 344. Sparre (Cte de), 276, 677. Spence (James), 201. Spencer (W.-G.), 461. Spillmann, 23, 491. Spiral, 391. Spragu, 317. Springer (Dr M.), 120. Srajnocha (Ladislas), 283. Srezgensky, 206. Stanley (A.), 204. Stanley Kipping, 204, 463. Stanislas Meunier (voir Meunier.) Starbling (E. H.), 836. Stas, 21. Stefan, 320. Stefanesco, 151. Stefani, 30, 85,285, 527, 761. Stefanowska (Micheline), 310. Steinbruggen, 428. Steindachner, 464. Stenhouse (J.), 236. Stemberg (M.), 464. Stiles (Ch. V.), 3#4, 763. Stilling, 5. Stoel, 205. Stoffaes (Abbé), 586. Siokvis, 395, 654, 734. Stolz, 767. Stormer, 57. Strache, 592, Strachey, 316. Strauch, 655. Straus, 49, 652. Strauss, 591. Stricht (0. Van der), 513. Stroobant (P.), 437 à 441, 653, Struwe (G. O.), 685. Suarès, 653. Suess, 13. Sullivan, 802. Sully (L.), 682. Sumpner (W. E.), 461, 463, 837. Surgeon-Alcock, 235. Suringar, 464. Surry-Montaut, 456. Sy (F.), 276, 455, 456, 633, 729. Sydney Young, 521, 164, 836. Symington (J.), 431, Swinburne (J.), 203, 204, 235. 203, 280, 392, 393, q Tacchini (P.), 29, 57, 91, 591, 621, 798. Tait, 27, 126, 236, 394, 395, 525, 804. Tannenberg (Wladimir de), 641. Tannery (J.), 65 à 69. Tanret, 91, 154, 523. Tarnier, 216, 2711, 314. Tarry. 342. Taverni (D'), 592. Taylor (A.), 203, 281. Tchebycheff, 350. Tchistowitch, 89. Teguor, 386, 130 Teilly (de), 21. Teixeira (Gomes), 19. Terby, 281. Termier, 213, 312. Terreil, 800. Terrier, 551. Terrier (K.), 25, 150, 199, 457. Terry, 281. Testut (Léo\, 311. Thareau, 391. Thélohan, 58, 59. Thiesen, 191. Thiroloix, 684. Thizelton-Dyer, 391. T’Hoff (Van), 346. Thomae (Johannes), 147. Thompson (C.), 125. Thompson (J. J.), 160, 155, 348. Thompson (Sylvanus P.), 155, 235, 280, 317, 462, 463, 837. Thompson (W-), 27, 219, 281, 430. Thomson (H.-A.), 431. Thomson (sir William), 647, 827, 835. Thoulet (J.), 149, 152, 240, 326 à 330, 343, 386. Thouvenin (M.), 193. Thoyer, 92. Thuilant, 92. Thurston (R. H.), 19, 644 et 642, 611, 192. Tietze (Dr Emil), 270. Tillo (A. de), 232. Timofeiew (W.), 385, 386, 427. Tissandier (G.), 682. Tisserand (F.), 379, 490,797. Tissier, 26, 315, 343, 800. Tite, 555. Tizzoni, 284, 521. Tollens, 492. Tommasi, 688. Tondini de Quarenghi, 152, 313, 386, 729. Tourquistanoff (N. de), 342, 798. Trabert, 136. Trabut, 455. Trastour, 198. Traube Mengarini (Muce), 803, Trécul (A.), 457. 489. 95, 343, 526, 860 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Treille (A.), 58. Trépied (Ch.),5291535,568 45734. Tronchet (L.), 798. Trotter, 27. Trousseau (Dr A.), 652 Trouvé (G.), 591, 624, 761. Trouvelot, 456, 682. Tschermak, 157. Tuffier, 451. Tungchmann, 155. Tutton, 234, 235. U Ufireduzzi. 93. Unterweger (J.), 502. V Vaillant (L.), 388. Vaillard, 90, 123, 591. Valliéres (des), 762. Valude. 122. Varet (R.), 121, 122, 197, 232, 275, 428, 456. Varigny (H. de), 314, 455. Varnier, 196. Vaschy 54. Vauthier, 122. Vaux (G. de), 24. Veillon, 25. Vélain, 57. Venukoff, 197, 831. Verbeck, 282. Verhoogen, 213. Verneau (R.), 651. Verneuil (A.), 5 à 40, 233, 163, 196. Vernon, 156. Vernon-Harcourt, 592, Verschafrelt (J.), 231. Vesque (J.), 197, 276, 343, 427, 544 à 585. Vessiot, 2176. Vèzes, 791. Viala (P.), 385. Vialanes, 342. Vialleton, 388: Viard (G.), 342. Miault, 94, 92. Vicaire (E.), 57. Vicentini, 253, 803. Vidal (R.), 313. Vieille, 24, 200, 343. Vignon (Léo), 152, 198, 232, 312, 683, 197, 831. Vigouroux, 345. Vilanoya y Piera, 592. Villavecchia, 839. Ville (J.), 312. Villem, 490. Villiers (A.), 93, 151, 154, 197, 200. Villoch, 428. Vincent (H.), 90, 274, 296 à 299. Violle, 59. Viré (A.), 797. Vivet (L.), 194, 209, 234, 347, 391, 494, 558, 624, 534, 181. Vladesco, 26, 154. Vlasto, 154, 391. Vogel (H. C.), 496. Vogel (H. W.), 319. Vogt (Carl), 592. Voisin, 763. Volterra, 206. Voyer (J.), 490. Vries (Hugo de), 193. Vries (Jean de), 94. 496. Vuillemin (Dr P ), 149, 762. W Waals (van der), 281, 318. Wabney (W. de), 347. Waelsch(Emil), 62, 283, 319, 464. Waller, 155. Wallon (E.), 382. Walker (G.J.), 837 Walker (D' James), 236. Wallace (A. Russel), 481. Wanzel, 197. Ward (H.), 2172: Warrington, 463. Waterhouse (Colonel), 486. Watson, 837. Weber, 654, 766. Weber (C. O.), 126. Weber (Wilhelm), 528. Weddingen (Van), 343. Wedensky (N.), 831. Weighton, 233. Weingarten (J.), 231, Weinstein, 431. Weiss (E.) 28. Weiss (D' Georges), 196, 199, 252 à 255, 388, 429, 652. Weiss (de Prague), 396. Werner (Emil), 394. Wernicke, 536. Wertheim, 685. Wertheimer, 591. 215. | Weyher (C.), 10 à 43,331 et 332. Weyr (Emil), 29, 63, 95, 127, 457, 206, 284, 320, 350, 495, 396, 432, 464, 496, 526, 592, 736, 167, 839. Whetham, 348. Whipplé, 316. Widal, 763. Wien, 28. Wiener, 64, 90, 92. Wild (G.), 127, 157. Wilde (H.), 93, 284, 342, Wilde (P. de), 592. Willem (V.), 90, 455. Williamson (W. D.), 125. Willm (Ed.), 522. Willot, 197. Wilsmore, 156. Wilson (J. A.), 62. Wilson (W.), 623. Wimshurst (James), 317. Winckler, 85. Winogradsky (S.), 521. Winter, 763. . VWirtinger (W.), 319. Wisselingh (C. Van), 734. WVitz (Aimé), 83, 489, 648, 663 à 665, 821. Witz (Fr.), 197. Woechting, 119. Wolf, 798. Wolf (C.), 152, 517, = Wolf (Rod.), 90, 124. Wolfbauer, 522. Wood-Mason, 235, 835. Woodward, 228, 393. Worms, 654. Wunschendorfi, 794. Wurtz (Dr R.), 454, 728. Wynue, 204. Wynter-Blyth, 384. Wyrouboff, 123, 153, 200, 201, 459, 460, 764, 800. PU PT XYZ X. (C.), 144 à 446. Yankowsky, 524. Yarrow, 346, Yates, 389. Zaccagnu, 229. Zachariades, 388. Zalikiewiez, 621. Zanetti, 527. Zaroudnyi, 655. Zatti, 521, 803. Zehnder, 766. Zenger, 58, 762. Zigno (de), 64. Zona, 29. Zôrawski, 586. Zuckerkandl, 592. Zuco (Marino), 29. Zune, 93, 834. Zürcher, 343, 622, Zwaardemaker, 152. TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LES ARTICLES ORIGINAUX, LA BIBLIOGRAPHIE, LES CHRONIQUES ET LES NOUVELLES ‘! A ABERRATION, — Les recherches de MM. Lœwy et Pui- seux pour déterminer la constante de | — AByssaLes. — Le sol sous-marin et les eaux — ACCOUCHEMENTS. — Guide pratique d’ — — Introduction à l’étude clinique des — AGCCROISSEMENT. — Quelques relations entre l — ct la température... ADVANCEMENT OF SCIENCE. nel AMEL 266 s0toc race outhbrecaunoboere AGRONOMIE. — Revue annuelle d’ — ALCALOÏDES. — La synthèse des — naturels ALcHMiE. — Cinq traités d’ — des plus grands philo- SON rodeusecra inner dd eo reone dndEte ALCHIMISTES. — Théorie et symbole des — ALGÈBRE. — Cours d'— ALIÈNES. — Sur les-— persécuteurs ALGUES., — Recherches sur le développement et la clas- sification de quelques — vertes................... ALUMINIUM. — L'Electrométallurgie de l — AMPHIBIENS. — Recherches anatomiques et expérimen- tales sur la métamorphose des — anoures......... ANALYSE. — Cours d' — professé à la Faculté des SCD UE SET GPA TIS eenMe enrrecne eee eos ANALYSE BACTÉRIOLOGIQUE. — Manuel pratique d° — .. ANALYSE INFINITÉSIMALE, — Curso de Calculo differen- HAE Rack Ode PART PE DE OT EE Axaromie et Physiologie animales. Classification... ... — Aïide-mémoire d’ — à l'usage des étudiants en mé- ANATOMIE COMPARÉE. — Traité d' — et de Zoologie... ANATOMIE DE L'HOMME. — Traité élémentaire d’ — ANESTHÉSIQUES. — Mécanisme de l’action des — .. ANNEAUX DE SATURNE. — La question des — ANNÉLIDES. — Etude sur quelques points de l’anatomie des — tubicoles de la région de Cette (sécrétion du tbberetapparentdinestif PET Renan ANTISEPSIE. — L’asepsie et l' — à l'hôpital Bichat. ..... ANTISEPTIQUE. — Sur la pratique — des accouchements. LeMEOyarelAes MAINS... ed here APPAREILS. — Sur deux — nouveaux de méc anique. APPAREIL LATICIFÈRE. — Recherches embryogéniques sur | — des Euphorbiacées, Urticacées, Apocynées CPASGIÉPDIATO RSS 2 Peer ben eee eee eee ARACHNIDES. — Observations biologiques sur les — ... PRIT AR D TO CLEA NE ane aie doute cie deu aleie ARTHROPODES. — La disposition histologique du p'e- ment dans les yeux des — sous l'influence de la lumière directe et de l’obscurité complète. ........ ASCENSIONS AÉRONAUTIQUES. — Des — libres en pays de montagnes et particulièrement à Grenoble......., ASEPsIE. — J}/ — et l’antisepsie à l’hôpital Bichat... .. ASTIGMATISME. — Mesure de À — .................... ASTRONOMIE. — Revue annuelle d’ — ................. OR COOTENTE ete a Ne ee ee ER TAN lraité dfthénTique te ee CCC LES ATROPHIES MUSCULAIRES consécutives aux lésions des ADNGULALIONS = este: eme ends eee CR AVIATION. — L/ — de demain... 1 Les chiffres gras renvoient aux articles originaux. 237 326 829 196 229 19% 817 787 85 618 485 774 383 812 553 267 760 19 488 341 341 196 561 437 45% 150 274 241 650 726 311 B BIC IS TA EE Eee Ne Meter BaciLe LacTIQuE. — Recherches sur l’action pathogène AE En ieis sie saisten Nes doi une ele 04e era BaciLze TypHiQuE. — Présence du — dans l'eau de Seine pendant le mois de juillet 1890.............. A D SR ON MOD SH CE PP OC ESS D Bacrériacées. — Contribution à l'étude de la morpho- logie et du développement des — ................. Bacréries. — Sur la question de la structure des — . — Les expériences de M. Beyerinck sur les — lumi- D'EUSÉMETRICUTETUTETION ere ee lee : — Structure, développement ct reproduction des — .. BacTÉRIOLOGIE. — Annales de l’Institut de pathologie et dede BUCnaATES MERE M Mere dosseer — Technique élémentaire de — BrgLiocRapuie. — Revue internationale de — médicale, pharmaceutique et vétérinaire. ....... Brococy. — Lessons in elementary — Br ATS ERP AR DA PERLE nee een Soinle ects tes els BoraniQuE. — Revue annuelle de BROMHYDRATE D’AMYLÈNE. — Dissociation du — sous de TAUDIESSRREN SION SEEN ee ns nie le € CapmiuM. — Poids atomique du — CALCUrN dep ÉNÉTANSAON REA EE CU esse CALCULÉES TN APE LEE eee Craie Carte pu CteL. Bulletin du Comité international permanent pour l’exécution photographique de A ET eee et el ie meraleelerns alarslaie= la CARTE GÉOLOGIQUE D'IraLie à l'échelle de CARTE PHOTOGRAPHIQUE DU CIEL. CASTRATION PARASITAIRE. — La — CerLuzx. — La pression osmotique ct la physiologie de la -. Les vacuoles des cellules végétales... ........ CuaLeur. — La —, lecons élémentaires sur la thermo- métrie, la calorimétrie, la thermodynamique et la SSIDANOMUAeMLÉPErPIE eee ce cc — Sur la — latente de vaporisation de l’eau et sur la spécifique deleautliquide..-#""#...... CHamrIGNoxs. — Nouvelle flore des — CHAMPS DE DÉMONSTRATION, — Rapport sur les — ..... CHarBoN. — Traitement du — par le bicarbonate de SOU RE Er A es Annie cinlale rater dar als US — Le surmenage et le — chez les moutons australiens. CHEMICATÉARITEMENEC ee eee Lee e esse cie toe aise e CHEMISRRVE = MA TITRMELCAl EE Re. CHIMIE "Histoire de la" "....:....:....:...0e —1Courselémentaire de Terre. enncce — La — à l'Association britannique pour l'Avancement DÉS Lsucrccodcoodsdodsan oo o CHIMIE APPLIQUÉE. industrie chimique — Revue annuelle de —. Matières colorantes et pro- duits organiques........ AB oos To TAC O ME PAR DE CHIMIE GÉNÉRALE — Notions de — ,...,...:.......... D ÉRRC T a oeen SD e e CHIMIE LÉGALE. — Traité des poisons................. CHIMIE MÉTALLURGIQUE. — Traité pratique de — ...... CHIMIE PURE. — Revue annuelle de — 382 221 650 588 488 515 228 228 303 827 31 862 CHIRURGIE. — Revue annuelle de — .,................ — La grande — de Guy de Chauliac CaromE. — Sur le poids atomique du — .............. CHronomÈrriE. — Congrès international de — ........ CHRONOPHOTOGRAPHIE. — La —. Nouvelle méthode pour analyser le mouvement dans les sciences physiques BTANUTELlES rennes ee EL CnémarIQUuE. — Lecons de —. Mécanismes, hydrosta- He Ah yATOAYNAMITUES eee e emeceee 2 FA ANTENAIRE. — Les fêtes du — de la fondation de la Société chimique de Londres................. . CrreuiT NERVEUX. — Les expériences de M. Chauyeau sur le — sensitivo-moteur des muscles... Rte CIRCULATION CÉRÉBRALE. — Contribution à étude de EPST Te D So ete core CoaGuLATION. — Recherches sur la — du SANO EE. CœLomares. — Remarques sur l'origine des centres ner- VOUXACHEZ AS en ne er I ec COMBINAISONS ORGANIQUES. — Méthodes de transforma- tion des — COMPOSÉS ORGANIQUES. — Recherches sur la dispersion des — . CoMPOSITION CHIMIQUE . — Sur les relations entre la — et la tension superficielle GESICOBDS AE er ere CompraBiiré. — Traité théorique et pratique de — ..…. CowPrressimitrrÉé. — Nouvelles méthodes pour l'étude de la — et de la dilatation des liquides et des gaz... CONDUCTIBILITES ÉLECTRIQUES. — Recherches sur les — des acides organiques et de leurs sels... CONGRÈS ASTRONOMIQUE. — Le — de Munich GONIGS = AeNmMeTICAlE= Eee ARR EURE Consranres, — Unités et — physiques................ CorPs SoLipEs. — Principes généraux d’une théorie élastique de la plasticité ct de la fragilité des — .. Coureurs. — La mesure et le mélange des — COURRIERS de Berlin — de Genève NO CITES PAR ER An e DDC A BE ME De CRAIE PHOSPHATÉE. — La formation de la — en Picardie. ASIE ES ER RE OT PRE D D A CRISTALL CURE. — Eléments:de. — ::............. CriSTALLOGRAPHIE. — Cours de physique mathématique DCR no Dates CRoISsANCE. — Etude sur la — et son rôle en patho- Jopieissa ere Fond donL ee AUS ce : D DAHROMÉENSE EE RLEST RENTE EU RES DRRNVINISME ee ER RS M EN re DÉCHARGES ÉLECTRIQUES. — Les — dans les gaz raréfiés et la constitution de la matière DÉRIVÉS AZ0ïQuESs. SR AN RE ne DESCRIPTIVE, — boue depéométrie — ..:.......4... Dracxosric. — Manuel de — médical et d'exploration CHDIQUE SES 0 NET RERE CAN AI MR Dicéroxes. — Sur les — Dicorxrépones. — Recherches anatomiques et physio- logiques sur les nœuds etles entre-nœuds de la tige fs — ie et EE ss — des Rae et des gaz. à Droprrique. — Contribution à la — DrRHTERTE NS Tr ITelAEt EN NN DISPERSION MOLÉCULAIRE. — Réfraction et — de diverses substances Dissozuriox. — Etude sur la nature de la — ......... Dissymérrie. — Etude sur la — moléculaire. .......... E Eaux. — Manuel pratique de l'analyse micrographique GE CO Men ne UE SOON E on M dois EAUX POTrABLES. — Examen chimique et bactériologie des — TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ECORCE TERRESTRE, — Physique de l — .............. EcnINopERMES. — Les idées nouvelles sur les — ...... — Description de la Faune jurassique du Portugal. Embranchement des — EDUCATION TECHNIQUE. Etais UNIS LCR NE EÉGALITÉ MATHÉMATIQUE. L’ — ELasriciré. — Théorie de l — des corps solides...... ELecrricrTrÉ. — Dictionnaire théorique et pratique d’ — et de magnétisme. .... - Annales d’ — et de magnétisme........... D CUS Lecons sur | — Traité élémentaire d’ — Les théories modernes de | —, Essai d’une théorie — 1° — des ne aux HOUVENE 22e rm ent OR U noi 0 5 à 20 425 — La décharge de l — à travers les gaz.............. — Traité d’ — et de magnétisme ...... : c da et optique ….. ELuipsoïpes. — Etude expérimentale sur un mouvement curieux des ovoïdes et des — .......... Aa sooc neo EMerYoLoGlE. — Eléments d’ — de l’homme et des ver- LÉDrÉS Re reecrs resserre ent Ha Socon DCE — Précis d — adapté aux sciences médicales... .... : EXGraIs. — De l'influence des — sur les récoltes. ..... à EXGRAIS CHIMIQUES. — Georges Ville et les — . Une ré- -"oluton aonicoless "Cher Ce LE CÉREE Eprcepsie. — Les — et les épileptiques....... ÉPOQUE GLACIAIRE. — Sur le climat de l — ÉPUISEMENT DES TERRES. — L’ — par la culture sans engrais. Acide phosphorique............ rÉbeesti ÉQUATIONS. — Mémoire sur la théorie des — aux déri- vées partielles et la méthode des approximations SUCCERSIVES Eee aa re Ce PEACE «Re ene — Sur les — aux dérivées partielles simultanées qui contiennent plusieurs fonctions inconnues......... — Sur les — différentielles linéaires ordinaires ....... EqQuarioxs. — Sur les — aux dérivées partielles du pre- mier ordre à deux variables indépendantes qui ad- mettent un groupe continu de transformations. .... ÉQUILIBRES CHIMIQUES. — Les — 97 et ERFoRSCHUNG DER MEERE. — Zur — und ihrer Bewühner. Espaces oBscurs. — Les plantes ct les animaux dans les — des conduites d’eau de Rotterdam.......... ÊTHER ACÉTYLACÉTIQUE. — Contribution à l’étude de l — EVAPORATION ÉLECTRIQUE. — L’ — ExcursioN GÉOLOGIQUE au laboratoire Arago et à Rosas.. EXERCICE, —"Hérédité en" -.------re0e ë EXxPÉDITION SCIENTIFIQUE de l'Albatros................. EXxPLORATION CLINIQUE. — Manuel de diagnostic médical et PNR Erreur: ec CE EL CORRE ER tn 000 a ann di nooec on F FAUNE JURASSIQUE. — Description de la — du Portugal. Embranchement des Echinodermes.............. 20 FERMENTATION ALCOOLIQUE. — Les produits formés pen- GENRES 0002007100 TITI 0 106 DDC ULE CE 0 10 = FIÈVRE SCARLATINE, — Recherches nouvelles sur la — . Fièvre rypHoïpe. — La lutte contre la — dans l’armée. FILTRATION PASTORIENNE. — Les récents perfectionne- ments de la ==Tde LEA EC TEE PTE LP ECC CUE - FOLIES PASSIONNELLES. — Etudes philosophiques et so- Ciales eee LE ere To re LECTEUR EC CE TUE : FoxcTIONS ELLIPTIQUE. — Théorie et histoire. ........ : Foxcrioxs rHÉTA.— Esquisse d’une théorie des fonctions d’une variable complexe et des................. AP F'oRGE letimasse CRE eee ere cer Ee Forces DE LA NATURE. — Origine des —. Nouvelle théorie remplacant celle de l’attraction...... Son FORMES ANIMALES. — L'évolution des — avant l’appa- ritiontde NOMME Er er EEE Er ---ecre ForMe$ criSTALLINES. — Recherches sur les — de quel- ques substances organiques.................. Foyers. — Le rendement photogénique des — 308 338 826 647 138 195 193 679 497 517 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES 863 | Inpraomne. — Nouvelle synthèse de l --,,............. 148 & INDUCTION MAGNÉTIQUE. — 1” — ct les phénomènes mo- TÉCOTAITES ARENA ET eee te ASC Gasréropones. — Recherches sur les organes palléaux INDUSTRIE sucRIÈRE. — Histoire del — dans la région des — DR eee ee Rnbo LE SAR NE Dr s ŒUAN OPUS En ie an site dans lois 21e 920 ES SATA UE s : : : £ ; GASTROTOMIE pour te de CECI pu — Les récents progrès de l — ................... OL = Der ; = drones ee à DRE Gaz. — Le et ses applications Sa LAC ACNAUMAÉE INFECTION MALARIQUE. — Sur les microbes de l' — aiguë et force motrice)...... a Mr UN Es 821 GénérarEeuR. — Le — tubulaire à ozone de ‘M. Gaston DEPUV reset ee TDR T0 0 ND 50 7 t GENS NERVEUX. — Hy piéneides ne HONTE ONE 681 et chronique chez les oiseaux ct chez l'homme...... 274 INrecriosrré des viandes fumèes d'animaux tuberculeux. 56 INFLUENZA. — La récente épidémie d' — à Londres..... 661 BUT INSECTES. — L'amateur d’ —...... Sn a ne ee le at Con HT! Nr PER EEI EnE Los ep cn ne * 11 | IxsensimirisaTIOoN. — L' — chirurgicale. ......... STE 853 Géonoere= Revue annuelleidel="-".#"."" 608 INSPIRATION. — L’ — profonde active.................. 230 RAP res te ce mener Current eneree 686 INTÉGRALES. — Sur la détermination des — de certaines équations aux dérivées partielles du second ordre par leur valeur le long d’un contour fermé......... 308 INréGrarIoN. — Lecons sur l' — des équations aux déri- GéoLociE. — La — des environs de CracoMiC ee Pr 20 GéoLocrE pes ALPEs. — La — ct la carte de M. Noé.. 18 GéoLoaique. — Description — de la Kabylie du Djurjura. 418 Géomérrte. — A propos des lecons de — de M. Dar- vées partielles du 4er ordre Re 53 . boux........ He HA oTer 65 | Ixrexsrré pu son. — Fondements d'une nouvelle mé- Géométrie. — Les — non-euclidiennes................ 770 thode pour la mesure de l — ÉD: Lu J LAS ee 0 à mesure De GRAINE. Dre se téguments de la — .... ne Ivvenreun = Histoire d'on— (M, G. l'rouv SREN RE PACE OTA SOS SR en Ac RER 1% | [riprum. — Sur les chlorures et bromures doubles d’ — Gran symparmique., — Contribution à l'étude de la et de phosphore 194 partie cervicale du — envisagé comme nerf sécré- IsomÉRIE. — Sur quelques cas d’ — dans la séri GE toire dort usk 59 Grisou. — Note sur le dosage du — par les limites K ianiniiiiennemoncaogcuodso amet dent net 649 ou 5 pe 96 . Grossesse. — De la — après l'hystéropexie… SN SIES - 796 | Kanvre. — Description géologique de la — du Djur- Groupe pu PLATINE. — Sur les poids atomiques des jura 118 IDÉPAE QUE". #e LORS nets 897 | Kysmess Etude microbiologique de dix— congénitaux, 89 H L Heuwnorrz. — Les théories de — et les expériences de LagoraroIRe DE MÉCANIQUE. — Le — du Conservatoire Hertz. (électricité et optique)... 1268 des Arts et Métiers ... 465 TR ee e LOTS... 5000 5 HR Re NELCIGE AN Se DÉPENSES 195 | LanorATOIRES DE MÉCANIQUE. — Sur les —............ 685 HÉRÉDITÉ, SYPHILITIQUE. — L— ....................., 681 — Lettre sur l’organisation du Sibley-College et sur Herrz. — Les théories de Helmholtz et les expériences ee .. 641 de — (électricité et optique).................. +208 D'ATÉS SE ME EN LANDE es Remarques sur les expériences de — (Rayons de Lair STÉRILISÉ. — La composition chimique etla valeur Hnes CRI Q se don tBte dou oDboadUn a A) clinique du —.... SE LE PER LC) NU PHences Je NE Rennes AT | Lamerrsrancues. — Recherches sur la circulation des HerTZIENNES. — Sur la résonance multiple des oscil- mms 970 H is = MR Tee h a TEE à PS SR 616 | Lrcrures scientifiques Sortar 8e avec on rte ei LS nes — Recherches sur les — des côtes de ) | Lécumineuses. — Sur les principes ternaires de réserve H DADCETELELE OCR SR TS As ‘ ait DES re se de quelques graines COS ARR O ERA E RS er Qi EE : a LT 5 : a Re EE UE &s Expériences sur la; reproduction LÉSIONS DES ARTICULATIONS. — Recherches expérimen- FE ESS OUI BR PVR NSP onE SEA tales sur la nature et la pathogénie des atrophies HypropynamiQuEe. — Recherches récentes sur Ge de ele ee consécutives aux 930 gti DE x 9, SC RELE 0 Bopéngaunuo ser None TNT SUIARSRE SRE Cet EE ENT 724 | Liper. — Recherches sur l'origine morphologique du — HyprornÉéRAPlEe. — Manuel d gy écologique. ...... 150 EE 519 NP A € TD te Dee -cebeecUE- cc cpe-deereecr ARE ET Se ARPRON CE nt hr ab eee ER nc 172 | Louvres 'inrcammamiurré. — Note sur le dosage du gri- — Le congrès d’ — de Londres : : . 600 sou par les — 649 Er: qi FT APE SEC a rec Peresteereerses Josne Hs . Res REA TV ; té ; k ANRT RUE à Chi c. 948% | Locarrnmes. — Tables des — à 8 décimales des fGIÈNE INDUSTRIELLE. — Traité des poisons. Chimie 16 - : sale à L 620 nombres de 4 à 120,000 et des sinus et tangentes de LT EP CO EEE ES Re En Shen M Ne DD TE NOTES 10 secondes d'arc, dans le système de la division cen- HYPERMÉTROPIE. — Mesure de L —......,............ . 252 ecnale doluidrant 267 Hyporaëse méréortrique. — L’— de M. Norman Loc- ; Dee sp er AN CR A Pen û 134 — Manual of — treated in correction with arithmetic, our pi RENE tr ct Fe at de ta di a le Ar À a algebra, plane trigonometry and mensuration, for S ï À Cet A ‘aiteme ‘) Ü ÊRe S © SRE HOENUECETE the use of students preparing for army and others l— abdominale par la ligature élastique perdue.... 56 9 De AR Le ce Std oe ü eREMNNANTONS Eee rnb LEE eee DST RDEDE Sr tn ire DIV PEINE TE SSCPROTAUONE Lois DES FORCES CENTRALES. — Sur les — faisant décrire )Jeriuter na A Reed piton dl SADHPACATOUE NA , I E Ë SAT Le à leur point d'application une conique, quelles que Hyr£Ro-MYoMECroMIE. — Sur rt modifications du : à PORN TO En VE +2 soient les conditions initiales...................... 190 9 iratoir A SR LE ME Te £ « OI R FE Se Ra Ë at à ntes = pee à Lumière. — La théorie électromagnétique de la — Pro- E Eat 4° oT se ap RS LEARN TEE RE Ÿ = A FÈ DÉS 7 pagation d'unetonder planes nier rca U LuMIÈRE ÉLECTRIQUE. — Manuel pratique de l’installa- L noel, 556206000600 ados one ion RON Luxerres. — Guide pratique pour le choix des —...... 652 ICONOGENE EEE CNE ER ARE ce. og beeaoe 11/0) IcovoaraPpure histologique des Plantes médicinales. . 159 M Inror, ImBéciLe. — Psychologie de l' — et de | —..... 830 IMAGE PHOTOGRAPHIQUE. — Sur le renversement de l'— MACCHINE A VAPORE. — Influenza delle masse che si muo- DANESSUIOCaTDaNMITeS TEE RER EN E TEL C EE LL .. 486 vono di moto alternativo nelle — ...... Ce "0221 INDICES DE RÉFRACTION.— De la variation, sous l'influence — Diagrammi previsti delle — ................. ME IE de la chaleur, des — de quelques espèces minérales Ma ca A Pet la ae Mn tee 648 danslétendue du/spectrelvisible."##-"2:."-.-.##e1 02 — Réduction des pertes de chaleur dans da 16 CORSA 864 TABLÉ ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES a — Manuel de la — pour les Ingénieurs et les Ecoles pratiques. L 192 MAGNÉSIUM. — Réduction des combinaisons oxygénées PAL O rem eNee Abd dhoneta TRE RE ot Macnérisme. — Dictionnaire théorique ct pratique d'électricité et de — 423 — Annales d'Electricité et de — 617 — Traité d'Électricité et de — 5% Marantes, — L'unité des — et l'unité des remèdes Dot 56 MALADIES DU Cœur. — Traité clinique des — .......... 651 MALADIES MICROBIENNES. — Sur la lésion locale dans DES erreur sDéU0nEnTÉ dQ Don 0 oO Dan MameLLes, MaMMIrEs. — De la congestion des — et des HMÉONC MERE ER SEE RSmanoe 60e 00e I) MASSE NE ROrCE CL = en se M Ne 000980 MaTièRe. — Constitution de la — ... FEAT CPI — Les Décharges électriques dans les gaz raréfiés et la constitution: de la — ..... er LL CE et 161 MAmtËRES COLORANTES. — Théorie générale des — et de leur fixation sur les fibres textiles. ..…. cad ose 245 Mamières PROTÉIQUES. — Sur la décomposition des — dans les plantes vertes cultivées à l'obscurité... . 55 MATHÉMATIQUES. — Cours de — supérieures à l'usage des candidats à la licence ès sciences physiques ... 586 MÉCANIQUE CÉLESTE. — Traité de —, t. II. Théorie de la figure des corps célestes et de leur mouvement de LOSAHON EE eme Soon son 58300008 NE) MÉCANIQUE cnimIQue. — Les Équilibres chimiques. 1" partie : Principes expérimentaux. 2 partie Application des principes à la thermodynamique... 97 Mépecine. — Revue annuelle de — ................... 748 MÉDECINE PRATIQUE. — Formulaire de — 126 MEMBRANES LIGNIRIÉES. — Recherches histo-chimiques SURMIOS RE re ne CL LC MÉNAGERIE. — La — .. Méraux. sn MéréoroLocie. — Cours de physique et de — professé alinstitut aeronomIqUE Free en per eee 725 MéréoroLociques. — Sur une révolution dans les ÉCRAN ETS MON One d5d0000010 648 MicroBE. — Sur les fermentations proue par un — anaerobD'ede EAU Eee ee ec eee eee creer 618 Microes. — Sur les — de l'infection malarique aiguë et chronique chez les oiseaux et chez l'homme... .... 274 MicROBIOLOGIQUE. — Étude — de dix kystes congénitaux. 89 MIcROCHMIQUE = VANAISSE Ne ee 298 Microërapmte. — Guide pratique pour les travaux de — 4149 MIGRATIONS MOLÉCULAIRES. — Sur les — ..,.... 149 MINÉRALOGIE chimique générale....................... 192 Morécure. — La cause de l'équilibre dans la — ....... 209 Moxocoryrépones. — Sur les feuilles de quelques — ATUATIMES EEE eee er Te eee secs 828 Moreur À Gaz simplex 83 Moreurs à courants alternatifs - 086 Mousses. — Recherches anatomiques et physiologiques sur la tige et la feuille des — .:.............. AS 0 IN) Museum. - 768 MyoLocir. 311 MYoPrE = Mesure de lie PRE ee 252 Myosires. — Sur la Polyzrthrite suppurée et les — déterminées par le pneumocoque...........,..... . 426 N Napxror. — Action de l’acide nitrique sur les dérivés du — .. NAVIGATION. NAVIRE. —"Mhéorie Ant. enr cie Pi Nio-LAMARCKISME. Le — cn Amérique. Ses b: positives, zoologiques et paléontologiques d’après M. Cope Bet eee cote M CETTE ..... 445 Nerx sécRéTOIRE. — Contribution à l'étude de la partie cervicale du grand sympathique envisagé comme — 55 NICKEL-TÉTRACARBONYLE. — Sur le — et ses applica- tions dans les arts et manufactures................ 618 NIVELLEMENT, — L'œuvre du — général de la France. 144 NOMOGRAPHIE, — La —, Représentation graphique des lois à un nombre quelconque de variables... NoricEs NÉCROLOGIQUES. — Sophie Kowalewski........ 198 — Auguste Cahours......... ee 238 — Edmond Becquerel 351 — Wilhelm Weber..... 528 LU OBJECTIF PHOTOGRAPHIQUE. — Traité élémentaire de Pre een rare Me eee erte EC RE OCÉANOGRAPRHIE. 2e. cn Leone se ME) ŒrL. — Examen fonctionnel de l — ........... De delle Œuvres comPLèTEs de Cauchy........, BB uno 0 à UE) — de Christiaan Huygens................... TE CR PP Oiseaux. — Contribution à l'étude de l'anatomie com- parée des réservoirs aériens d’origine pulmonaire Chez Mes RE EN AE. DÉRT TIRUAPS0n nc Lee DBZ) OMBRE PUPILLAIRE. — L' —. Mesure de la myopie, de l’hypermétropie et de l'astigmatisme RO our Pol. ONDE PLANE — La théorie électromagnétique de la lu- mière, Propagation d'une — ..................2...289 ONDULATIONS ÉLECTRIQUES. — De l'action que les réseaux de fils conducteurs exercent sur les — .,... done Li OPnrALMoMErRIE. — Mémoires d’— annotés et précédés d'une AntrOAMCHON. =... eee EE RUE OPTIQUE == YLrate (AA NE REP CREER EREEES UT — "Electricité el Rene MU EC CR EE 968 Or. — Sur le poids atomique de P — ........... CH 269 ORGANES PALLÉAUX. — Recherches sur les — des Gas- tér0podes ProsObranChes......".--.-"----08 et ORIGINE DES MONTAGNES. — Contribution à l'étude sur V — (le Pieghe delle Alpi apuane)...... da 00 285 ORNITHOLOGIE. — Manuel d’ — générale .............. 272 OsciLLarions. — Les — de Pantellaria................ 136 OsmiumM. — Sur le poids atomique de P — .... 339 Ovoïpes. — Etude expérimentale sur un mouvement curieux des — et des ellipsoïdes...... AO Soon. LR OxYGËNE. — Sur le poids atomique de l — ...,....... 491 OMEs Snnles ee At Eee ADD roc à . 4149 P PazLaDnium. — Sur le poids atomique du — ........... 269 Paxcréas. — Les découvertes récentes sur la physiologie CR DE oo ASC 0 0e PT SEE 0 00 0 . 469 PARAPLÉGIE flasque par compression de la moelle...... 454 P\rnoLoGie. — Annales de l’Institut de — et de bacté- riologie de Bucharest............. bdodec Pas oace .. 454 Pépicure. — Sur le traitement du — dans l'hystéree tomie abdominale par la ligature élastique perdue.. 56 Pexpuze. — Sur le — de Foucault........... Haonoooou 671 PersPecrive. — Les origines du trait de — ........... 401 PHÉNOMÈNES MOLÉCULAIRES. — L'’induction magnétique étAles = A LR LM ET ee Rene. Er PrÉNOMÈNES SOUDAINS. — Sur l'observation des — .... 8% Pnospnore. — Sur les chlorures et bromures doubles COGNAC NE OO SE TRS 00 Ponobuoe 79% PHOTOGRAMMÉTRIE. — Éléments de — 72% Pnorocrarnie. — Traité encyclopédique de — 339 — La — de l'amateur débutant...... 518 — La — des couleurs............. 95 - Congrès international de — ile 1890............... 79% — La — des objets à très grande distance par l’inter- médiaire du courant électrique.................... 33 — La — au gélatino-bromure d’argent......... Dana in) — des couleurs par la méthode interférentielle de MPIppMANNE re Reese 20Codcone0 es MaUd — La — judiciaire. Classification ct identification an- THPOPOMEMIAUD PER EE Er ee CE oc PaysroLocre. — Revue annuelle de — ........... — Anatomie et — animales. Classification. — Traité del wyecétale #40. eee — Manuel technique de — végétale.................. Puaysique. — Revue annuelle de — ,................. — Lecons de générale. 0 ne — Cours de — et de météorologie professé à l'institut agronomique..... FT 102000 370000 NNODO TD IAE) ns HE TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES — La — au récent congrès de l'Association britan- RE (pi bb combo LODEL TUE — Cours de — mathématique et de cristallographie. .…. Prep-B0T. — Traite pratique du — ...............,.... PLacenTA. — Le — des rongeurs:.................... EPANTIORCANIZATION---- mme ses le PLANTES MÉDICINALES. — Iconographie histologique CES = ionbotn ocean ennui aane cote dob secoue PLANTES VÉNÉNEUSES. — Des — ct des empoisonnements QUETTES TETE MITEN De eee ceeredere PLantTes vERTES. — Sur la décomposition des matières protéiques dans les plantes vertes cultivées à lobs- CAES Ta dope de co Dot PLAQUES DE BLINDAGE. — Les récentes expériences sur PLAQUES PHOTOGRAPHIQUES. — Sur la détermination de la sensibilité des — au moyen du spectroscope..... PLasrines. — Contribution à l’étude des — .......... PLATEAU CENTRAL. — Le — de la France. ............: PLamiNEe. — Sur les poids atomiques des métaux du UOTE TUE miettes Sie nl eue M0 Pxeumocoque. — Sur la polyarthrite suppurée et les myo- sitesidéterminées par le — ....................... PNEUMONIE. — Étude sur la — fibrineuse.............. Porps ATOMIQUuEs. — Sur le calcul des — :...... 191 et Poips SPÉCIFIQUE, POIDS MOLÉCULAIRE. — Le — d'un li- quide considéré comme fonction de son — ........ Poisoxs. — Traité des — Hygiène industrielle. Chimi EE ssotdedeentenn 260 SSproBnootabaue PoLyarTHRITE. — Sur la — suppurée et les myosites déterminées par le pneumocoque.................. PoMME DE TERRE. — Recherches sur la culture de la — fOucrapéreletinAUuStrielle esse eee ee ane daee Pose. — Traité pratique de détermination du temps de — Poupres. — L’artillerie de l’avenir et les nouvelles — . Powpers.— Smokeless — an its influence on gun cons- HAUGDO RER ere en ee DotaTe lo noob pad PRESSION OSMOTIQUE. La — et la physiologie de Ja cel- e lule. — Les vacuoles des cellules végétales. ...... 2 PROBLÈME DES TROIS CORPS. — Le — ......:..,......, ProsecriIoN. — Sur la — zénithale équivalente de Lam Hentai Romane ProrozoatRes. — Recherches sur la digestion intra-cel- lulaire chez les — — Addendum... here PuriricarioN. — Etude sur la — des eaux courantes... R Races — Les — humaines. Sato no RAFFINAGE DE L’ACIER. — Les procédés nouveaux pour le —, : JOB Ce nee Rate. — Traité scientifique et industriel de la — .... RAYONS DE FORCE ÉLECTRIQUE. — Remarquez sur les expériences de Hertz relatives aux — ............, Rérracriox et dispersion moléculaires de diverses subs- MTS Teen obene oo ovonone OUT OO OOo RÉFRACTIONS ATOMIQUES. — Nouvelle détermination DONNE Ne mn enie ts ein AR ee RENDEMENT PHOTOGÉNIQUE. — Le — des foyers RTE RÉPERTOIRE BIBLIOGRAPHIQUE. — Le — des sciences ma- ÉDETTETQUES Eee etude ” Jobocre RÉSERVOIRS AËRIENS. — Contribution à l'étude de l’ana- tomie comparée des — d’origine pulmonaire chez lestoiseaux. 5... RÉSISTANCE GES Matériaux. : sec SR ler RÉSISTANCE ÉLECTRIQUE, — La construction des étalons AE Er ee ent etre seldare ee D RévéLareurR Donxix. — Le — et l'action des parois TESTCyAATES MAMADOU correcte UC REVUE ANNUELLE de Chimie appliquée ....,........... — d’Astronomic. — d'Hygiène .... HeBOAUE re CE LE CU Eee de Zoologie... de Physique... .... : delCHIMIE pure... à 89 de Chirurgie... CECI ES a das te dc 0 TARN e 20 deNBNYS0IOPE PEPREREET EE. de Médecines." une RAP TONER EE Reese ere ee. Raonium. — Poids atomique du — ... ROSE AS YOUIES UE RER EE Le eee o — La reproduction artificielle du — ...... s IFRAGACÉES. — Recherche sur la structure des — . RÉTIONS MICROBIENNES. — La nature des — ........ SENS ET INSTINCT chez les animaux et principalement CHCZPIESTINNECLE NA Et eee eette een naa ne SÉRIE AROMATIQUE. — Les développateurs de la — .... Sérum. — Le rôle du — dans l’atténuation des virus. . SÈVE- — 1141 aSCENAANC.. 4... ess stena eo s a1ee SiBLey-CoLLÈGE, — Lettre sur l’organisation du — Snus. — Table des — de 10 en 19 secondes d’arc....… SOCIÉTÉ CHIMIQUE. — Les fêtes du cinquantenaire de la fondation de la — de Londres.................... SOL SOUS-MARIN. — Le — et les eaux abyssales........ SOoLUBILITÉ DES SELS. — Les expériences de M. Etard sur DR ER A lee enr peite ee eieatsie re séénogeroc SOLUTIONS SALINES. — Les iepnee régnantes sur la constitution des — ....,..... : SOMMEIL. — Physiologie du — ..... ee SPECTROSCOPE. — Détermination de la sensibilité des plaques photographiques au moyen du — SPERMATOZOAIRES. — L’irritabilité des — ,,..,....,.. SPERMATOZOÏDES. — Les idées nouvelles sur Porigine et la formation des — ...... _ ee SPIRILLE GÉANT. — Sur un — développé dans les c ultures de sédiments d’eau douce d’Aden....... STATION AGRONOMIQUE. — Travaux de la — du Pas-de- Calais" #ce ed DUB ATE OA HT Do AOL OE NU SrEAM-ENGINE. — A practical method for reducing the internal wastes of the — ......... 'OHMEODE Hottes SUCRASE. — Recherche sur la diastase inversible du sucre de Came..." TT ren RE El DAS SULFINES. — Sur les — ...., Mean cie tie se LEZ se SULFOCARBAMIDES. — Sur le en Creme nt de l'image photographique par les — .... vus SUPPURATIONS. — De l’hystérectomie vaginale dans le traitement des — périutérines.. reel SURFACES. — Lecons sur la théorie générale des — 3° surface, 2e fascicule........... — Exposition de la théorie des — — Sur une déformation des — ... SnbtSe 200080 SURMENAGE. — Le — et le charbon chez les moutons aus- traliens. Le 20e Sacooboo Dao oc — Le— mental dans la civilisation moderne. Eflets, CAUSES LENCO eee ee nee eee rence SYMÉTRIE. — De la — courbe. Sébddraucoc SYSTÈME NERVEUX. — Notions générales et observations sur la structure, les fonctions et les maladies du — T TANGENTES. — Table des — de 10 en 10 secondes d'arc. TÉLÉGRAPHIE. — Les systèmes de — harmonique... — Guide pratique de — sous-marine.....,........... TEMPÉRATURE. — Quelques relations entre l’accroisse- ment et la — TENSION SUPERFICIELLE. — Sur les relations entre la composition chimique et la — des corps... TÉraNos. — La pathogénie du — ....,....,........... Tuéorte DE FRESsNer.. — La confirmation expérimentale THERMODYNAMIQUE. — Les équilibres chimiques. Méca- nique chimique. Principes expérimentaux. Appli- cation de ces principes à la — ..:............... THERMOMÉTRIE, — Les idées modernes de — . TiTane. — Contribution à l'étude du — ............... TourgiLLons. — Nouvelles expériences sur les — . — Sur l'origine des — naturels....,.... 866 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES — Recherches récentes sur diverses questions d’hy- Uxiré. — JL” — des maladies et l’ — des remèdes...... 56 drodynamique, — .............. dos SD ET ac EUR . 124 | Unirés et constantes physiques.......... éssroesroes 0649 TRANSPLANTATION. — De la — sur le corps de la plante. 119 | Usacx ou non-usage des organes. (Y a-t- il héritage des TRANSPORT ÉLECTRIQUE. — Le — de la force en Alle- effets ide =?) Se. correcte 55 MaApne eRERSUISSO eee e Re cene-ceee-nrmeresence 285 TRAVAIL MUSCULAIRE. — Le — et l’énergie qu’il repré- V Hbooonc Ido do tones eo 0 modtoneroaonennc , 1429 Tusercucose. — Etudes expérimentales et cliniques sur VacuoLes. — Les — des cellules végétales. .......... . 69 ENT Mertascicnie rer ee ere cree 796 | VarioLo-vaccixe. — Recherches concernant la — ..... 56 — La guérison de la — chirurgicale par le professeur Veiuze. — Le sommeil et le système nerveux. RUE sio- TEE TT RES Nb Po ob ASC pou 0 0 320 logie de la — et du sommeil.................. Poor LD — Recherches expérimentales sur la —. La — hu- Vix. — La maladie visqueuse du -- ...... DaSe de doc 271 maine. Sa distinction de la — des oiseaux... 652 | Vixtricarion. — Les perfectionnements de la — dans — Étude sur la — expérimentale du lapiu........... . 384 lomudide la/Rrance "Pr cree RE Doc Li.) TugercuLoses. — Le trailement des — externes par la Vis. — Sophistication et analyse des -— ...... OR il) méthode sclérogène du professeur Lannelongue... 488 , Virus. — Les — .................................... 341 — Études sur les — du pied. Anatomie pathologique. 23 | — Le rôle du sérum dans l'atténuation des — ....... 410 Tuniciers. — Recherches sur les — ....... ee . 194 | Vo pLané. — Le. — Essai d’une solution mécanique TypHus. — Sur un cas de septicémie hémorragique du problème........ CT 0 Ds RER OS o6 485 présentant certains caractères du — exanthé- matique.....,.. JE Lopods eva cochonne 108) | Z U ZooLocie. — Revue annuelle de — ...... MC oc ... 882 | — Compte-rendu des séances du Congrès international UXNIFICATION DES HEURES. — L' — et les fuseaux COR OR PE A dam rond o ue ace uce de 202) HORAITES EEE Eee CEE Die cer C ere 83 | — Traité d'anatomie comparée et de — .......... ... 680 ERRATA Page 10. — 1re colonne, ligne 8, au lieu de : ont environ quatre millimètres et demi d'épaisseur, re : QUATRE MILLIMÉ- TRES DE LARGEUR ET UN MILLIMÈTRE ET DEMI D'ÉPAISSEUR. Page 117, les trois analyses des ouvrages de MM. Boltz- mann, Ritler, Rubens et Riller ont élé signées du nom de M. Guillaume. Nous les devons à M.E. Sarasix, de Genève. Page 469, note 2, ligne 3, au lieu de : wn rapport, lire : SES RAPPORTS, Page 469, note 2, ligne 5, après aussi, ajouter : cyr. Page 410, note à, au lieu de : 1886, lire : 1866. PARIS. — IMPRIMERIE F. Page 414, 6e alinéa, ligne 3, au licu de : bransfuse, lire : CENTRIFUGE. Page 415, 1re colonne, ligne 2, au lieu de : CENTRIFUGE. Page 415, 2° colonne, ligne 14, au lieu de: lire : N’APPARAIT. Page 475, 2e colonne, ligne 46, au lieu de : POUVANT. Page 609 à 616. La revue annuelle de géologie a été faite non par G. Carez, mais bien par M. Léon CAREz. transfuse, lire : n'apparaissant, pouvait, lire : LEVÉ, RUE CASSETTE, 11. {| 4* NAN PMEPTA YU PA mens SRE à ent A TEE